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...s’agit d’inscrire le droit du sol dans notre Constitution. Pourquoi soulever cette question ? J’ai bien entendu les invitations du Gouvernement à s’en tenir aux deux sujets qui nous sont soumis, mais ce thème est directement lié aux deux. Surtout, l’article 2 qui nous est proposé remet bel et bien en cause la façon dont la nationalité est traitée dans la Constitution française en y inscrivant la déchéance de nationalité.
...ticulier sur l’article 2. À qui s’adresse-t-il ? Certainement pas aux terroristes, qui sont dans un autre univers que le nôtre, ont lié un contact avec une divinité censée être toute-puissante et côtoient sans discontinuer la mort à travers laquelle ils cherchent à atteindre un paradis. Votre projet de loi n’est donc d’aucune efficacité ni d’aucune utilité dans la lutte contre le terrorisme. La déchéance de nationalité s’adresse-t-elle aux Français et aux Françaises ou à ceux qui se trouveraient l’être à un moment de leur existence ? Il faudrait alors qu’il existât une prime à être français ou française, ce qui est très difficile à inscrire dans la Constitution. Sans intérêt, le texte est aussi dépourvu de vision. Nous avons eu des arguties au sujet de l’état de guerre lors de l’examen de l’arti...
...allons, bien sûr, débattre longuement de l’article 2. J’évoquerai d’abord son contenu. Sa rédaction actuelle – je parle de celle qui nous est proposée par le Gouvernement à travers l’amendement no 63, car telle est dorénavant la base de travail, chacun l’aura compris –, est en réalité relativement neutre au regard du droit actuel. Elle consiste simplement à donner un chapeau constitutionnel à la déchéance de nationalité. Dans un texte publié le 5 février dernier par le journal Le Monde, Robert Badinter se dit d’accord avec tous les objectifs poursuivis, y compris l’état d’urgence, divergeant toutefois sur la nécessité de réviser de la Constitution. Il concède néanmoins que, si l’on avait procédé par la loi, il aurait fallu ensuite saisir le Conseil constitutionnel afin de déterminer si le disposi...
La nouvelle rédaction de l’article 2, proposée par le Gouvernement par voie d’amendement au texte initial, a répondu aux interrogations légitimes des uns et des autres. La question de l’introduction des délits, celle des binationaux qui ne sont plus les seuls potentiellement visés par la déchéance de nationalité, celle aussi de l’apatridie traitée par l’engagement de ratifier la convention de 1961 trouvent, dans la nouvelle rédaction proposée pour l’article 2 et dans les textes d’application qui suivront, des éléments de réponse. Ceux auxquels la déchéance de nationalité pour les terroristes pose un problème de conscience n’ont pas été convaincus. Il faut respecter cette position. Mais to...
... tueur de soldats et d’enfants juifs à Toulouse ? Que ces Merah, Nemmouche, Kouachi, Abdeslam ou autres soient binationaux ou pas, nés français ou pas, naturalisés ou pas, n’a aucune importance : ils ne doivent plus, ils ne peuvent plus être Français, quitte à faire quelques apatrides – quelques dizaines au maximum. Et alors ? La grande affaire ! Aucun argument juridique robuste ne s’oppose à la déchéance de nationalité pour ces criminels. Il faut arrêter de couper les cheveux en quatre ! Ce débat a déjà fait couler beaucoup trop d’encre. Les Français attendent simplicité, efficacité, clarté et surtout sécurité. Il est grand temps d’assumer nos responsabilités.
Le 16 novembre à Versailles, le Président de la République n’a pas explicitement prévu d’inscrire la déchéance de la nationalité dans la Constitution. Dès lors, pourquoi tant tergiverser pour l’y inclure alors qu’on ne sait toujours pas si elle visera les seuls binationaux ou tous les Français ? La solution doit être conforme à nos valeurs et à notre histoire. Elle doit également être consensuelle, faute de quoi nous prenons le risque de déchirements dont nous n’avons pas besoin comme celui de satisfaire...
Si je tourne les armes contre la France, si je tue des Français simplement parce qu’ils sont Français, comment puis-je être encore Français ? Le lien légal qui me rattache à ma nationalité n’est plus que celui de la haine. Il est illégitime. Il doit être rompu. C’est la déchéance de nationalité. Mais comment pourrait-il se faire que, pour ce même crime, je sois déchu de ma nationalité si j’ai une double nationalité et que je ne le sois pas si je n’ai que la nationalité française ? C’est une discrimination inacceptable – que vous nous proposez pourtant, monsieur le ministre. Certes, vous avez supprimé la référence aux binationaux dans le projet de loi constitutionnelle, ...
...nstitutionnelle, elle pourrait s’appliquer massivement. On tremble à l’idée de ce qu’une simple loi en découlant pourrait contenir. Il est indispensable que le terme « délit » soit supprimé. J’en reviens au texte proposé. Juridiquement, l’expression « atteinte grave à la vie de la Nation » n’a pas de sens précis. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point, monsieur le ministre ? À qui s’applique la déchéance de nationalité ? Aux personnes nées en France ? Aux Français par acquisition de nationalité ? Aux binationaux ? Si la déchéance de nationalité s’applique aux Français détenteurs d’une seule nationalité, cela créera des apatrides, et ce n’est pas la signature de la convention des Nations unies sur l’apatridie de 1961 qui réglera le problème, puisqu’elle autorise des exceptions. Or, d’après l’artic...
... nous est posée n’est peut-être pas tant de savoir comment l’on pourrait ne plus être Français que de savoir ce que signifie de l’être. Dans l’entrelacs des conventions internationales et de leur articulation avec notre droit, il convient de se demander quels sont les principes les plus forts. Monsieur le garde des sceaux, vous avez dit vendredi matin, en réponse à l’un de nos collègues, que la déchéance de nationalité était non pas un symbole, mais un principe. Je suis sans doute moins juriste que vous – j’émets moi-même cette réserve au sujet de mon argument –, mais j’ai beau chercher dans la liste des principes généraux du droit, j’ai beau chercher dans l’architecture des normes, je ne trouve ni de près ni de loin en quoi le fait de priver une personne de l’une de ses qualités dans la Constitu...
La déchéance de nationalité inscrite dans cet article ne ciblerait plus expressément les binationaux si l’amendement du Gouvernement était adopté. Passons sur les tergiversations et les volte-face du Gouvernement sur ce sujet ; il ne faudrait pas qu’à la stigmatisation des binationaux succède l’acceptation d’apatrides, ce que notre pays et notre tradition ont toujours refusé. Aussi la déchéance de nationalit...
... une réponse efficace au terrorisme. La Nation a été frappée au coeur. La liberté d’expression, la confession religieuse, les forces de l’ordre, notre jeunesse ont été les cibles de ces attentats odieux. La première réponse doit être celle de la sécurité. C’est pourquoi je suis favorable à l’article 1er de la révision constitutionnelle. En revanche, si je comprends que l’on prononce une peine de déchéance de nationalité à l’encontre de ceux qui, nés étrangers et éduqués dans un autre pays, portent les armes contre la France, je me demande comment nous pouvons fuir nos responsabilités lorsque nous avons nous-mêmes enfanté les monstres. Je suis députée-maire de Vaulx-en-Velin. Ma ville est le carrefour de toutes les histoires. Elle est porteuse de France. Depuis le début du débat sur la déchéance d...
...arde des sceaux, vous le savez, l’article 2 cristallise de très nombreuses inquiétudes et oppositions sur tous les bancs de cet hémicycle et dans notre pays. Trois anciens présidents du Conseil constitutionnel, des anciens Premiers ministres, des juristes, des historiens, des sociologues, le Défenseur des droits et des milliers de concitoyens ont fait part de leur opposition à une extension de la déchéance de nationalité. Prenons garde à ne pas offrir de victoire symbolique aux terroristes en constitutionnalisant la déchéance de la nationalité et en ouvrant ainsi une brèche dans notre droit du sol. Prenons garde également à ne pas inscrire dans le marbre de notre Constitution des mesures que d’autres majorités pourraient, plus tard, dénaturer. J’ai en tête la parole de jeunes de Nancy, rencontré...
...moment particulier, alors qu’elle a été touchée dans ce qu’elle est au plus profond d’elle-même, dans ses fondements, dans sa manière de vivre et dans sa culture. La France s’interroge. Que penser de ceux qu’elle a vu naître et qui, pourtant, décident de rompre leur contrat avec la Nation, de porter allégeance à une armée terroriste pour se retourner contre leur propre pays ? Historiquement, la déchéance de nationalité s’analyse comme une sanction pouvant être prononcée contre un individu s’étant rendu coupable d’acte indigne manifestant un défaut de loyauté à l’égard de l’État. C’est donc un acte exceptionnel, prévu aux articles 25 et 25-1 du code civil, qui sanctionnent un comportement très grave portant atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation, mais qui ne concernent que ceux ayant acq...
...r de son Président de la République, du Premier ministre, du ministre de l’intérieur et de l’ensemble du Gouvernement, est en première ligne pour combattre ces terroristes. Ceux qui attaquent notre République se mettent en dehors de notre communauté nationale et sont indignes d’être Français. Ceux qui veulent terroriser notre belle et vieille nation doivent être déchus. Mais le débat autour de la déchéance ne saurait être uniquement juridique ou politique. Il est aussi moral et dépasse le seul cadre de la lutte contre le terrorisme. La France a un double rôle à jouer, celui de mener une lutte totale et globale contre le terrorisme mais aussi celui d’éclairer les autres nations. Parce que la France a été particulièrement meurtrie dans sa chair, de très nombreux pays nous observent, étudient la faço...
...cun peut en livrer une interprétation historique, quitte à ce qu’elle soit parfois hasardeuse. Aujourd’hui, notre pays s’interroge sur le concept de nation française. Que signifie être français aujourd’hui ? C’est partager un certain nombre de valeurs d’égalité, d’ouverture, de tolérance, mais aussi l’envie de construire un avenir ensemble. Monsieur le garde des sceaux, vous avez déclaré que la déchéance était non pas un symbole mais un principe. Quel est ce principe ? Constater une déchirure définitive avec nos valeurs. Or nos débats ne concernent que les terroristes – nous devons le rappeler constamment. La déchéance ne pourra être prononcée qu’à l’encontre de terroristes qui se sont placés en dehors du champ de la nation.
Nous sommes au coeur d’un débat grave, engagé en commission et qui s’est déployé dans la presse et les médias, donnant à tous l’occasion de s’exprimer. J’apprécie la nouvelle formulation retenue par le Gouvernement, qui sort le terme de déchéance de nationalité du projet de loi constitutionnelle pour le renvoyer à plus tard, tout en prévoyant que les droits attachés à la nationalité pourraient être enlevés à une personne qui conserverait notre nationalité. Le débat qui se tient dans cet hémicycle m’étonne et m’émeut. Nous parlons avant tout de terroristes. Lorsque l’on décide de prononcer une peine de déchéance de nationalité à l’encontr...
...Après les attentats que la France a connus en 2015, il était du devoir du Président de la République de réunir les conditions de l’unité nationale pour agir en faveur de la sécurité des Français. Sans conteste, les mesures prises depuis cette date ont poursuivi cet objectif et je m’en félicite. Mais il est une mesure aujourd’hui qui nous divise – c’est ce que cherchent nos ennemis –, la mesure de déchéance de la nationalité. Je la refuse. Alors, pour refermer la faille ouverte dans le projet de loi constitutionnelle du 23 décembre, qui opère une différenciation inconcevable, inacceptable, entre les Français selon leur origine en prévoyant la déchéance de nationalité des seuls Français binationaux, vous intégrez maintenant la possibilité pour la France de créer des apatrides.
Nous l’avons pourtant tous dit, à commencer par le Président de la République devant le Congrès le 16 novembre : « la déchéance de nationalité ne doit pas avoir pour résultat de rendre quelqu’un apatride ». Quant au Premier ministre, il déclarait le 6 janvier : « la France ne peut pas créer des apatrides ». Il poursuivait : « Cela n’est pas possible, ce ne serait pas conforme à l’image ni aux valeurs […] de la France. » Et, bien avant nous, la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 dispose en son article 15...
Cette mesure de déchéance nationale est, j’en suis convaincue, la seule qui puisse nous rassembler. D’abord nous rassembler nous, la gauche, mais également la représentation nationale tout entière – c’est à la droite de le dire mais je veux le croire.
... rues le 11 janvier 2015 face à la terreur, mais aussi retrouver de l’unité entre ce que disent les députés de l’opposition et ce que disent ceux de la majorité. Nous devons rechercher un symbole qui dise l’unité nationale face à la terreur et la réprobation à l’égard d’individus qui s’attaquent à la République et à toutes nos valeurs. C’est pourquoi j’ai cosigné des amendements qui proposent la déchéance, non pas de la nationalité, mais des droits qui y sont attachés. Elle serait prononcée par le Parlement, parce qu’après tout, l’unité du peuple français peut aussi s’exprimer, comme la Constitution le prévoit en son article 34-1, par la voie d’une résolution du Parlement. Nous nous trouverions ainsi rassemblés dans la réprobation sans tomber dans les travers qui sont encore ceux de la nouvelle ré...