Commission de la défense nationale et des forces armées

Réunion du 16 décembre 2014 à 17h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • blessure
  • blessé
  • cellule
  • militaire
  • post-traumatique
  • soldat

La réunion

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La séance est ouverte à dix-sept heures trente.

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Nous allons entendre Mme Émilienne Poumirol et M. Olivier Audibert-Troin, rapporteurs de la mission d'information sur la prise en charge des blessés. Notre commission a en effet décidé de se saisir de ce sujet car, aussi étonnant que cela puisse paraître, alors que nos armées participent à des missions de plus en plus difficiles en opérations extérieures, payant pour cela trop souvent le prix du sang, aucun rapport d'information sur le sujet n'a été réalisé par le Parlement. Il est donc apparu aussi opportun qu'urgent de se pencher sur cette question à la fois complexe et douloureuse.

Je signale à l'ensemble de la commission que cette réunion est ouverte à la presse et que nous avons en outre le plaisir d'accueillir un groupe de stagiaires de classes de troisième, qui suivront le début de nos travaux.

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Le rapport que nous avons l'honneur et le plaisir de vous présenter aujourd'hui est, comme vous venez de le dire, le premier rapport d'information traitant de la prise en charge des militaires blessés au sein de nos armées. Il s'inscrit pleinement dans la mission de la commission et se trouve être d'actualité en raison des opérations extérieures dans lesquelles la France est engagée. Celles-ci ne le sont malheureusement pas sans entraîner le décès ou les blessures de nos soldats dont nous tenons à saluer ici le courage et le sens du devoir. Notre démarche a été de brosser le tableau le plus large possible de ce sujet dont nous soupçonnions certes la richesse mais méconnaissions l'étendue, et nous avons en effet vu le spectre de notre mission s'élargir au fur et à mesure de nos auditions. Car la partie médicale de la prise en charge, qui vient à l'esprit en premier lieu, s'inscrit dans une dynamique complexe à laquelle participent de très nombreux acteurs. Tellement nombreux d'ailleurs que nous en avons sûrement oublié certains et que nous aurions pu continuer notre mission encore quelques mois. Nous avons donc effectué un travail de défrichage dont nous sommes persuadés qu'il livrera à nos collègues des sujets pour les futurs travaux de cette commission.

Nous nous sommes donc intéressés à l'ensemble de la chaîne de prise en charge, depuis la prévention de la blessure jusqu'à la réinsertion ou la reconversion du blessé, selon qu'il demeure dans l'armée ou la quitte. De la même façon, nous avons considéré non seulement le blessé de guerre mais également le blessé en service. Nous avons également consacré une partie de notre rapport au syndrome post-traumatique, une question dont nous estimons qu'il est urgent de se saisir, ce que confirment les chiffres en constante augmentation. Nous avons pour cela rencontré, ici et sur le terrain, de nombreux médecins du service de santé des armées, des représentants des différentes armées et de la gendarmerie, des responsables de services administratifs, des représentants d'associations et bien sûr des blessés. Nos auditions, nos déplacements nous ont rapidement amenés à constater que les blessés de l'armée française étaient très bien traités et qu'une grande attention leur était portée. Néanmoins tout système est perfectible et nous évoquerons quelques points nécessitant selon nous une attention particulière et nous proposerons quelques changements. Car si pour ce qui concerne le volet médical, le travail est excellent, le système administratif est, lui, bien français et nous a conduits à faire quelques propositions de simplification.

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Je pense moi aussi qu'il sera intéressant que nos collègues se saisissent un jour à nouveau du sujet pour mesurer les évolutions intervenues. Mais venons-en au blessé de guerre et au système mis en place par le service de santé pour le secourir. Ce système joue un rôle fondamental dans le moral du soldat et participe de ce fait pleinement à l'efficacité opérationnelle. Il est important de rappeler également que le déploiement précoce des structures médicales en OPEX est un élément essentiel de la faculté d'entrer en premier qui est une caractéristique française.

Le système repose sur le sauvetage au combat et sur la médicalisation de l'avant, voire de l'extrême-avant pour les forces spéciales, qui est, elle aussi, une exception française. Le sauvetage au combat répond à un déroulement chronométré : dans les dix premières minutes le blessé doit avoir reçu les premiers soins, généralement prodigués par le camarade de combat le plus proche. Pour cela, tous les soldats ont été formés et possèdent une trousse de secours. Il s'agit principalement de stopper les hémorragies qui sont la première cause de décès, dont 90 % sont évitables s'ils sont pris en charge dans les premières minutes. Dans l'heure qui suit, un médecin doit avoir vu le blessé, qui doit bénéficier d'une intervention chirurgicale de sauvetage avant la fin de la deuxième heure. Le service de santé installe sur le terrain plusieurs structures qui peuvent aller, selon l'environnement et les nécessités découlant de l'engagement, du poste médical avancé au plus près des combats à un véritable hôpital, comme à Kaboul. Une fois mis en condition pour être transporté, le blessé est évacué vers une structure de soin, par avion, par hélicoptère ou par voie terrestre selon les circonstances. Il reste sur place s'il peut être soigné et reprendre son service, ou bien il est évacué vers la France pour y être soigné. La blessure peut également se produire sur un navire. La chaîne de soins y est évidemment différente puisque le médecin y est contraint à l'autonomie, qu'il s'agisse d'une structure hospitalière remarquable sur un BPC, comme nous l'avons vu à Toulon, ou de la structure rustique de deux mètres carrés dont dispose le médecin d'un sous-marin nucléaire d'attaque et je peux confirmer, pour l'avoir vu, que l'espace dévolu aux soins est extrêmement restreint.

L'évacuation aérienne est soit individuelle, soit collective. Les moyens aéronautiques sont adaptés à l'urgence et à la gravité de l'état du blessé, exprimés sous forme de classements parfaitement maîtrisés par l'ensemble de la chaîne santé. En cas d'urgence, il s'agit d'un Falcon de la flotte gouvernementale dont la mise à disposition est demandée au ministre. Si l'urgence est moindre, il peut s'agir d'un avion du commandement européen de transport aérien (EATC), dont le siège se trouve à Eindhoven et auquel appartient la France, ou même d'un avion de ligne civil. Les blessés sont toujours accompagnés par du personnel médical et un convoyeur de l'air, une fonction très importante, et nous présentons dans notre rapport le corps des convoyeurs qui joue un rôle très précieux. En cas de situation de crise et d'un grand nombre de blessés, l'armée dispose d'un outil exceptionnel, le module MORPHEE. Ce module de réanimation permet de transformer, comme nous avons pu le voir sur la base aérienne d'Istres où nous nous sommes rendus, un Boeing C135 en un service de réanimation volant pouvant accueillir jusqu'à douze patients. C'est un outil remarquable équipé de tout le matériel nécessaire au soin et au suivi du blessé qui a servi une fois au Kosovo et quatre en Afghanistan. De retour en France, les blessés intègrent ensuite la filière de soins hospitalière qui les mène, toujours dans l'excellence, jusqu'à la réadaptation.

Mais dans l'intervalle, et c'est là que le système devient complexe à appréhender, interviennent d'autres acteurs auprès des familles, puis des blessés : le régiment, l'action sociale et surtout les cellules d'aide aux blessés. Chaque armée possède la sienne, sauf la gendarmerie, dont le dispositif d'aide fonctionne différemment, mais qui envisage d'en créer une, tellement ces cellules rendent de services au soldat. Ces cellules sont très attachées à la spécificité de leur armée et, si nous avons au cours de nos auditions évoqué une possibilité de fusion des cellules, nous avons vite battu en retraite tant cela paraît inenvisageable à chacune des armées. Les cellules fonctionnent toutes selon le même principe : elles procurent au blessé et à sa famille un soutien moral, matériel et administratif qu'elles assurent dans la durée. Pour ce faire elles ne disposent, ce ne fut pas le moindre de nos étonnements, … d'aucun budget ! Leurs actions sont entièrement financées par les associations qui sont très réactives et viennent pallier l'urgence ou les lacunes de la prise en charge institutionnelle. Là aussi chaque armée a sa (ou ses) propre association de soutien. À titre d'exemple, l'action sociale de la Défense finance un séjour de 21 jours auprès du blessé pour deux membres de sa famille. Une fois ce temps écoulé, la cellule pourra, en cas de nécessité, solliciter une association pour le financement de la prolongation du séjour. À ce propos, un grand progrès vient d'être franchi puisque la première pierre de la maison des blessés et des familles a été posée le 1er juillet dernier par le ministre de la Défense dans l'emprise de l'hôpital Percy, une cérémonie à laquelle nous avons assisté. Cette maison proposera cinq appartements pour les familles et six studios pour les blessés en hôpital de jour. Cette maison voit le jour dans le cadre d'un partenariat caractéristique de la politique de soutien menée par l'État en faveur des militaires blessés : il assure le principal, très largement, et laisse le complément à l'initiative privée, dans ce cas précis, la décoration, à rebours du modèle anglo-saxon dans lequel le suivi des blessés est principalement assuré par les charities.

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Après la prise en charge sur le théâtre d'opérations, l'hospitalisation, vient pour les blessés et leur famille, le droit à réparation. Nous nous sommes donc également intéressés à l'aspect administratif de la prise en charge et d'abord au statut du blessé durant sa convalescence. Le blessé en service bénéficie d'un statut très favorable puisqu'à l'issue du congé maladie initial de six mois, il peut se voir proposer, selon son affection, un congé de longue maladie, ou de longue durée maladie, pouvant aller jusqu'à cinq ou huit ans. Mais ce congé fait sortir le blessé de son régiment, c'est un élément important que je tiens à souligner, pour l'attacher à une unité administrative de gestion, laquelle s'occupe notamment des renouvellements successifs de son congé et de la prise des rendez-vous auprès du praticien hospitalier que le blessé a consulté initialement, souvent loin de chez lui. Comme le système ne donnait pas entière satisfaction et que le respect du secret médical laissait à désirer, le service de santé a décidé de rapatrier en début d'année prochaine le livret médical des personnels en congé longue durée dans les centres médicaux des armées proches du domicile du patient. Celui-ci peut être en effet amené à se déplacer pour des visites de contrôle très loin de son domicile, ce qui entraîne une gêne et a également un impact budgétaire. Une initiative que nous saluons car ce rapprochement géographique aura certainement pour effet de recréer un lien avec un patient qui, n'appartenant plus à son régiment, s'est isolé au fil du temps.

Il est utile de rappeler que le patient militaire, blessé ou non, a la liberté du choix de son praticien, hormis en OPEX. Les soins en secteur civil liés à une blessure sont remboursés par la caisse nationale militaire de sécurité sociale à 100 % du tarif de responsabilité de la sécurité sociale si le médecin militaire a rempli une déclaration d'affection présumée imputable au service. Il s'agit d'un lien de causalité que nous allons retrouver très régulièrement dans le cadre du droit à réparation. Cela implique notamment que tous ceux qui ont la charge de rédiger les documents qui permettront de garder une trace de la blessure et de ses circonstances ne fassent pas passer cette tâche administrative au second plan, alors qu'elle est de la plus haute importance pour l'avenir du blessé.

Ce patient que nous venons d'évoquer a vraisemblablement dû déposer au début de son congé une demande de pension militaire d'invalidité, une procédure dont il va malheureusement tarder à voir le terme. À moins qu'il ne soit un blessé en OPEX, pour lequel a été mise en place une procédure particulière de traitement de son dossier en 180 jours maximum, sur une demande expresse du ministre de la Défense. Dans le cas contraire, il devra attendre longtemps, pour ne pas dire très longtemps. La sous-direction des pensions annonce un délai de traitement de 380 jours fin 2014, malheureusement en augmentation, ce qui nous inquiète beaucoup. Mais à ce délai moyen, dont on peut penser qu'il est parfois bien plus élevé en fonction de la complexité du dossier, s'ajoutent les délais de transmission du dossier par les intermédiaires. Il peut s'agir, là encore, d'une tâche considérée comme secondaire par les groupements de soutien des bases de défense (GSBdD) et cent jours s'écoulent parfois avant la transmission du dossier. Le délai atteint alors facilement 600 jours et plus. Comment cela se fait-il ? Nous avons cherché à comprendre et les raisons sont multiples : une déflation des effectifs du service peut-être trop rapide et trop importante, des réorganisations multiples, dont la fermeture des directions interdépartementales des anciens combattants, un code et une procédure complexes, un réseau d'experts civils sous-payés qui ne cesse de diminuer… L'insatisfaction est grande chez les blessés et les malades, qu'ils soient en attente de leur première pension ou anciens combattants présentant une demande d'aggravation. La situation est paradoxale à mon sens, car l'excellente prise en charge médicale se trouve en quelque sorte battue en brèche par les difficultés administratives. La situation doit donc être redressée mais cela ne sera pas facile. Des mesures simples, telles qu'une pause des réformes et des déflations, une meilleure information de tous les acteurs de la chaîne, une meilleure documentation de la blessure et de ses circonstances pourraient peut-être y contribuer ainsi qu'un audit du service. Mais les résultats seront modestes et loin d'être immédiats pour résorber l'ensemble du retard.

Le blessé peut, depuis 2003, obtenir du ministère une indemnisation complémentaire en vertu de l'arrêt « Brugnot ». Il s'agit de l'indemnisation, après consolidation de la blessure, de préjudices tels que les souffrances endurées, le préjudice esthétique, le préjudice d'agrément et le préjudice moral. Le « Brugnot », c'est ainsi que le nomme le monde de la Défense, nécessite une expertise à l'instar de la pension militaire d'invalidité mais d'un périmètre et à un moment potentiellement différent. Les expertises sont effectuées par le service de santé des armées à la satisfaction de tous, semble-t-il. Nous avons en revanche souvent entendu déplorer le manque d'information à propos de cette indemnisation que beaucoup de blessés ignoreraient encore.

L'ensemble de ces démarches représente souvent pour le blessé et sa famille un parcours du combattant, c'est de rigueur, qui nécessite un accompagnement en règle générale assuré, comme nous l'avons vu, par les cellules d'aide. Mais des initiatives ont été prises pour aller au-delà, non seulement pour s'assurer de la bonne marche du présent mais également pour préparer l'avenir. Des structures transverses ont été créées par le ministère pour fédérer l'action de tous ces acteurs : un poste de commissaire chargé de mission « blessés et familles endeuillées » auprès du secrétaire général pour l'administration et un bureau « offre de soins », comptant deux médecins, au sein du service de santé des armées. Les avancées sont nombreuses, nous les énumérons dans notre rapport, et leur mérite est de mettre en place des outils dans une vision globale qui n'exclut aucun aspect de la prise en charge du blessé. Parmi ces avancées, nous tenons à saluer la prise en charge des prothèses nouvelle génération. Jusqu'à l'année dernière ces prothèses n'étaient prises en charge que partiellement par l'État, les partenaires institutionnels et associatifs assurant la part, très importante, du financement complémentaire. Une convention de gestion a été signée en juillet 2013 avec la caisse nationale militaire de sécurité sociale et une main bionique d'un montant de 56 400 euros et une prothèse piedcheville de 15 000 euros ont déjà été financées dans ce cadre. Il est prévu d'appareiller environ quinze militaires par an qui, pour bénéficier de ces prothèses, doivent avoir été blessés en service et s'inscrire dans un parcours de réinsertion formalisé. Les partenaires de l'État, dégagés de cette charge, se sont tournés vers le financement de prothèses de sport.

En effet, nous avons pu constater la place centrale que tient le sport dans la vie du soldat. Il y consacre beaucoup de temps et la blessure vient interrompre cette activité brutalement, ce que beaucoup vivent très mal. Mais le sport est aussi un élément essentiel de la réadaptation et de la reconstruction, non seulement pour ses vertus physiques mais aussi, et presque surtout, pour ses vertus psychologiques en renforçant la confiance en soi et favorisant la resocialisation. De très nombreux stages sont donc mis en place à destination des blessés par les cellules d'aide, autour d'un sport ou d'un milieu. Des rencontres sportives sont organisées, comme les Rencontres militaires blessure et sports, dont la troisième édition à Bourges, a permis encore cette année à 54 blessés de découvrir de nouveaux sports. Il n'est d'ailleurs pas rare que des blessés se reconvertissent en moniteur de sport. Je veux également citer le stage CREBAT organisé par l'armée de terre pour les blessés psychiques, qui s'appuie sur des activités physiques mais aussi sur des séances collectives d'accompagnement psychologique et des entretiens individuels pour réapprendre le groupe et valoriser ses ressources individuelles. Nous avons rencontré un blessé qui a suivi ce stage et qui en a retiré de grands bienfaits.

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Ceci nous offre une transition toute trouvée pour aborder le thème de la blessure invisible, du syndrome post-traumatique auquel nous consacrons une partie de notre rapport. Nous tenons en premier lieu à répondre à des objections ou des réserves que nous avons pu entendre formuler ici ou là quant à la gravité, voire à la réalité de ce trouble. Nous avons rencontré plusieurs blessés, nous leur avons parlé, ils nous ont raconté leur histoire et nous sommes en mesure de vous affirmer que leur souffrance est bien réelle et que cette blessure les empêche de mener une vie normale et retentit sur leur entourage, qui souvent s'écarte d'eux. Reconnu comme blessure de guerre seulement depuis 1992, mais identifié depuis l'antiquité, le syndrome post-traumatique s'est imposé comme une problématique à considérer à la suite du durcissement du conflit en Afghanistan. Le ministère de la Défense a élaboré deux plans successifs traitant des « troubles psychiques post-traumatiques dans les forces armées », en 2011 et 2013 afin d'en améliorer la prévention et de renforcer le soutien médical et psychosocial des militaires et de leur famille. Confrontation à l'irreprésentable, l'état de stress post-traumatique se caractérise par les symptômes que sont les cauchemars, les reviviscences diurnes, les flashs, les conduites d'évitement et de sursaut. Il s'accompagne de troubles du comportement tels qu'un sentiment d'insécurité permanente, l'hypervigilance, l'agressivité, le repli sur soi. Les addictions sont fréquentes.

L'apparition des troubles semble en relation avec l'intensité des combats, à leur répétition – un élément particulièrement important puisque nos soldats sont engagés dans des OPEX qui se succèdent - et au nombre de blessures physiques et de décès dans l'unité. Le service de santé a mis en place un recueil épidémiologique hebdomadaire de ces troubles : 136 cas ont été enregistrés en 2010, 298 en 2011, 282 en 2012 et 359 en 2013. Une étude du centre d'épidémiologie et de santé publique des armées indique toutefois, que si le délai de latence peut atteindre dix ans, 50 % des troubles apparaissent un mois après l'événement déclencheur, 65 % dans les trois mois et 95 % un an plus tard. Des visites systématiques ont été instaurées trois mois après le retour d'opération extérieure et sont à l'origine de 27 % des demandes de soins. Mais le mur le plus difficile à vaincre est celui du silence. Il est donc important d'informer les militaires car la honte n'est pas la seule raison de ce silence, il y a également la méconnaissance des symptômes et la crainte de perdre son aptitude. La prévention s'articule autour de la mise en condition opérationnelle qui vise à améliorer la résistance, autour de l'information sur les troubles et autour du rappel de l'importance de la parole.

Sur le terrain le soldat ne se trouve pas isolé et un dispositif d'accompagnement est organisé par les psychologues et les médecins d'unité afin d'intervenir rapidement en cas d'événement potentiellement traumatisant. Les psychologues et les psychiatres du service de santé agissent en coordination avec les services de psychologie dont dispose chaque armée. Le plus important est celui de la marine qui compte quarante psychologues, qui interviennent notamment auprès des forces spéciales. Le commandement a, de son côté, mis en place un dispositif reposant sur des conseillers facteur humain et des référents sections, en relation directe avec les auxiliaires sanitaires. L'aumônier joue également un rôle important car il se situe hors de tout lien hiérarchique ou médical.

Les soldats en souffrance peuvent s'adresser anonymement à un psychologue en appelant le numéro Écoute défense, qui a reçu 330 appels en un an lesquels ont permis de détecter 176 cas de syndrome post-traumatique. Les différents hôpitaux militaires et les centres médicaux des armées proposent divers traitements parmi lesquels on trouve la psychanalyse, les thérapies cognitivo-comportementales, l'hypnose, selon l'orientation du praticien. Un réseau de psychologues et de psychiatres civils labellisés est en cours de constitution afin de couvrir les territoires dans lesquels l'armée n'est pas présente. Nous souhaitons que la prise en charge financière de ces consultations soit assurée pour les ressortissants de toutes les armées car seule l'armée de terre en bénéficie aujourd'hui grâce à l'intervention de l'association Terre et Fraternité.

Au-delà des soins, au-delà des aides financières, les militaires ont besoin de reconnaissance, qui est un élément essentiel de la reconstruction. La reconnaissance exprimée par la hiérarchie et la reconnaissance exprimée par la Nation qui prend la forme d'une décoration, l'insigne des blessés. Or si la dernière loi de programmation militaire indique clairement qu'« un effort particulier de reconnaissance doit être entrepris à l'égard des militaires blessés au service de notre pays. », il semble que cet effort se heurte à des résistances et nous estimons, tous deux, que rien ne s'oppose à la remise de l'insigne des blessés à l'ensemble des blessés physiques ou psychiques à partir du moment où le service de santé a reconnu leur état. Nous espérons que cette question sera résolue rapidement.

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Les blessés sont nombreux à quitter l'armée à l'issue de l'expiration de leurs droits à congés de maladie, par choix ou parce qu'ils ne sont plus aptes. Ils font face à plusieurs défis qui sont aussi des défis pour l'institution : leur reconversion et leur suivi. Leur reconversion est assurée par Défense mobilité et, nous l'avons constaté, beaucoup par les cellules d'aide et les blessés eux-mêmes qui souvent font preuve de beaucoup d'énergie pour se prendre en charge. Quant à leur suivi, il revient à l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre (ONACVG) qui se positionne aujourd'hui comme interlocuteur privilégié en s'ouvrant à la nouvelle génération du feu et a signé pour cela des conventions avec l'armée de l'air et la marine, et bientôt l'armée de terre, afin de prolonger l'action des cellules d'aide. La volonté est immense et l'effort sera exigeant, notamment pour le suivi des blessés atteints de syndrome post-traumatiques, qui ne s'improvise pas. Nous attendons beaucoup de ce suivi dont nous nous félicitons car nous sommes convaincus qu'il faut à tout prix éviter de rompre le lien.

Nous allons vous parler maintenant du sas de fin de mission. Pourquoi maintenant, nous direz-vous ? Pourquoi pas avec le syndrome post-traumatique ? Parce que ce sas de décompression n'est pas un dispositif médical et qu'il s'adresse à tous les soldats projetés, à partir du moment où le commandement a estimé que les difficultés de la mission nécessitaient son activation. Le sas de Chypre avait été désactivé – les premiers soldats de Serval n'ont donc pu en bénéficier – puis réactivé avant de fermer définitivement et d'ouvrir à nouveau au Sénégal pour les soldats des opérations Barkhane et Sangaris. Ce passage fait partie intégrante de la mission et il fonctionne comme une zone tampon permettant de prendre ses distances physiquement et psychologiquement de la zone de combat. Autrefois les longs voyages en bateau offraient naturellement un éloignement graduel que ne permet plus la brutalité des voyages en avion si rapides. Le sas français est né en Afghanistan et, après quelques essais, le concept a été pérennisé dans sa forme actuelle que nous avons pu vivre de l'intérieur en nous rendant à Chypre lors d'une relève de retour de Centrafrique. Le sas se déroule dans un milieu ouvert fréquenté par des vacanciers. Il dure trois jours, ce qui est suffisant pour se détendre et suffisamment court pour ne pas être vécu comme une contrainte. L'hôtel est de bon niveau afin d'offrir un contraste et un repos après des conditions vie rustiques. Les activités obligatoires sont, d'une part, un débriefing collectif et une réunion d'information post-OPEX et, d'autre part, la réparation physique, car les soldats sont très fatigués. Elle consiste en des massages de dos et des séances de techniques d'optimisation du potentiel. Des activités ludiques comme une mini-croisière et une visite archéologique facilitent le retour à la vie civile. Des activités facultatives sont également proposées : séances d'information sur le retour en famille, entretiens individuels à la demande, plage, piscine, sauna, musculation, footing… Quelle que soit l'intensité des combats, et de manière quasi invariable, environ 3 % du personnel transitant par le sas de fin de mission demandent un entretien individuel auprès d'un psychologue et 1 % du personnel en transit est ensuite orienté vers une prise en charge médico psychologique. Nous avons pu apprécier l'efficacité de ce dispositif en parlant avec les soldats et en les observant durant 48 heures durant lesquelles nous les avons vus se détendre et se mettre à parler. Nous sommes revenus pleinement convaincus de l'utilité de ce dispositif. Nous étions d'ailleurs inquiets de savoir que le sas de Chypre allait fermer définitivement en raison de l'expiration du marché et d'une localisation géographique moins favorable depuis l'Afrique alors qu'elle était parfaitement adaptée à un retour d'Afghanistan. Nous avons été rassurés qu'un sas soit installé à Dakar, car l'opération Sangaris présente toutes les caractéristiques d'une mission difficile aux conséquences psychologiques potentiellement lourdes.

Venons-en maintenant au dernier point de notre rapport qui traite de l'arme la plus efficace contre la blessure : sa prévention. Elle est assurée notamment par la protection des soldats et l'évolution des matériels. Le blindage des véhicules a fait beaucoup pour sauver des vies, tout comme le gilet pare-balles. Des études amont sont menées pour l'amélioration constante des matériels. L'institut de recherche biomédicale des armées conduit des recherches sur les chocs hémorragiques et la reconstruction tissulaire pour les grands brûlés. L'avenir est également fait du développement de nouvelles technologies de l'information au profit de la médicalisation de l'avant, avec le programme Infostructure santé lancé en 2012. Il permettra de fournir aux médecins des forces sur le terrain trois outils d'optimisation de la chaîne santé autour du blessé en opération : un système d'information et de régulation médical entre le théâtre d'opération et la métropole, un centre de télémédecine et un module épidémiologique.

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Enfin, comme vous avez pu le constater, nous ne vous avons pas abreuvés de chiffres. Et peut-être vous en étonnez-vous comme ce fut notre cas, lorsque commençant notre cycle d'auditions nous avons innocemment sollicité des chiffres qui ne sont pas venus, ou très tard et parcellaires. Car, aussi étrange que cela puisse paraître, personne n'est en mesure de dire aujourd'hui précisément combien il y a de blessés dans l'armée. Il y a bien un recueil épidémiologique, mais limité à certaines pathologies. Il y a le nombre d'évacuations sanitaires, qui ne dit rien sur les blessés traités sur place. Il y a les chiffres communiqués par les cellules d'aide mais tous les cas ne sont pas suivis et les périmètres sont différents. Il n'y a aucune consolidation de tous ces chiffres que chaque entité tient dans son coin. Tous nos interlocuteurs l'ont d'ailleurs déploré et nous ne comprenons pas comment l'institution peut se priver d'un outil statistique aussi utile. Il s'agit de notre première recommandation.

Nous n'allons pas rappeler toutes les observations et les recommandations formulées dans notre rapport mais seulement celles qui nous semblent les plus importantes, tout en saluant le travail accompli, en particulier sur le syndrome post-traumatique, par le ministère au cours des deux dernières années. En effet de nombreux groupes de travail ont été mis en place par le ministère, réunissant le SSA, le commandement, les cellules d'aide, les associations, ce qui permettra très certainement des améliorations rapides de ce système complexe.

Nous avons évoqué dans notre rapport une colocalisation des cellules d'aide, qui pourraient mettre en commun une partie de leurs moyens. Il nous semble que cet ensemble devrait s'élargir et comprendre des référents blessés représentant les différents services interlocuteurs du blessé et même accueillir des blessés au sortir de l'hôpital pour baliser leur suivi médical, sportif, administratif et social. Une sorte de maison du blessé qui trouverait naturellement sa place aux Invalides. Il s'agit d'un projet ambitieux mais d'une grande cohérence. Nous tenons également à ce que tout soit fait pour simplifier les procédures, et notamment celle de la pension militaire d'invalidité car j'ai eu le sentiment qu'il particulièrement difficile et incompréhensible pour les militaires, qui souffrent déjà de leur blessure, d'avoir toujours à se justifier, au mépris de la reconnaissance, pour peu que la rédaction de ce que j'appelle le certificat initial ait été approximative.

Et enfin, il nous semble impératif que soit poursuivie au sein du ministère une réflexion médicosociale sur la prise en charge du syndrome post-traumatique afin de mener des actions adaptées en prévoyant de former le personnel impliqué. C'est un problème auquel sont confrontés, dans le civil, d'autres ministères, les Affaires étrangères et l'Intérieur notamment, et je pense qu'il serait intéressant de disposer d'un système interministériel de référence.

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Votre exposé a suscité beaucoup d'intérêt et soulève beaucoup de questions. En premier lieu, a-t-on une idée du nombre de militaires blessés en service qui arrivent à être reclassés au sein de leur régiment ?

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Il existe certes des cellules qui s'occupent du reclassement des blessés mais nous ne disposons que de peu de chiffres précis sur ce sujet. Nous savons que 75 % des blessés psychiques quittent l'armée alors que la proportion est d'environ 50 % pour les blessés physiques. Nous disposons de très peu de chiffres sur le reclassement en 2013, quatre ou cinq dossiers sur 50 ont été acceptés, ce qui est extrêmement peu.

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En lieu de chiffres, nous avons surtout eu des pourcentages, alors même que de petites mutuelles d'assurance sont en mesure de produire des chiffres. Nous avons constaté que dans chaque arme, y compris pour la gendarmerie qui dispose d'un système à part, personne n'utilise les mêmes bases d'analyse. Par exemple, la cellule d'aide aux blessés de l'armée de Terre (CABAT) ne s'occupe que des blessés en service, tandis que l'armée de l'air s'occupe également des blessés hors service et des familles. C'est une vraie difficulté pour disposer de statistiques à périmètre égal. S'agissant des mi-temps thérapeutiques, il n'existe que 50 postes disponibles, dont seulement 42 sont effectivement pourvus.

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Je tiens à remercier les rapporteurs pour la grande qualité de leur rapport qui suscite beaucoup de questions. J'ai du mal à comprendre l'absence de statistiques concernant les blessés en OPEX ou en entraînement, qui pourraient pourtant nous permettre une meilleure analyse. S'agissant du reclassement des militaires, celui-ci est-il majoritairement fait au sein du ministère de la Défense ou le secteur privé est-il également réceptif aux demandes de reclassement des militaires blessés ? Par ailleurs, pouvez-vous nous éclairer sur les modes d'action d'assistance aux blessés dans d'autres pays ? Je ne parle pas des États-Unis qui, ayant connu deux guerres successives en Irak et en Afghanistan, ont développé un programme de soins et de transition, le warrior care and transition program (dit WCTP), mais des pays européens ? Notre prise en charge des blessés est-elle de bonne qualité ? Est-elle perfectible ?

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Je salue le travail des rapporteurs qui nous fournit une base utile pour nos travaux futurs. Je souhaiterais savoir comment s'organise, en cas de nécessité, le rapatriement des blessés sur d'autres bases d'autres pays. Par ailleurs, comme membre de la Délégation aux droits des femmes, je souhaiterais savoir si on dispose de statistiques concernant le genre, en particulier, le pourcentage de femmes blessées est-il important ? De quel type de blessure s'agit-il ?

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Je suis impatiente de prendre connaissance de l'intégralité de votre rapport. Il semblerait que le taux de reclassement des blessés reste relativement faible. Que se passe-t-il concrètement pour ceux qui ne sont pas reclassés ? Vous avez également parlé de réticence relative à l'attribution de la médaille des blessés, à ceux atteints d'un syndrome post-traumatique. Quelles sont les causes de cette réticence ?

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Le taux de reclassement est très faible. Il existe certes des conventions avec le privé, en particulier avec les entreprises de défense. Nous avons constaté que l'armée regrette que les collectivités locales n'aient pas suffisamment d'ouverture vers les blessés et qu'il n'existe pas d'obligation de recrutements de blessés dans les marchés publics, contrairement à ce qui existe au Canada.

Les blessés touchent leur solde pendant un temps relativement long, de trois à cinq ou huit ans. Le problème est qu'ils sont ensuite perdus de vue par l'institution militaire. L'ONACVG, qui devrait d'ailleurs s'appeler l'office national des combattants, devrait jouer un rôle plus important dans le suivi. En effet il dispose d'antennes dans tous les départements et de référents qu'il faudrait néanmoins former. Il s'agit d'un réseau de maillage intéressant à valoriser pour accompagner au mieux les anciens militaires blessés.

Pour ce qui concerne le rapatriement sur d'autres bases en Europe, nous avons noté que cela s'est produit en Allemagne, même si le principe reste un rapatriement direct, la plupart du temps sur vers les hôpitaux Percy à Clamart et Sainte-Anne à Toulon. Il convient de souligner qu'il existe une convention dite EATC (European Air Transport Command - Commandement du transport aérien européen) qui offre la possibilité d'affréter des avions pour le rapatriement des blessés, ce qui permet de diminuer les coûts. Le système modulable de rapatriement collectif français MORPHEE est très différent du système allemand, qui exploite un Airbus hôpital installé de façon pérenne. MORPHEE est en alerte 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, qui permet en moins d'une journée d'équiper des avions avec tout le matériel et les médicaments nécessaires, permettant de transporter six blessés très graves et six moins graves.

Nous avons bien senti que les associations d'anciens combattants estiment qu'on s'occupe très bien des blessés en OPEX mais moins des anciens combattants. De la même façon, on entend dire qu'on s'occupe beaucoup des blessés victimes de stress post-traumatique, notion qui reste encore inconnue. Nous sommes persuadés que l'attribution de la médaille des blessés serait pour les militaires souffrant de stress post-traumatique quelque chose de très important.

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Nous n'avons pas eu le temps d'explorer ce qui se faisait dans les pays étrangers mais nous pensons néanmoins, d'après les témoignages recueillis, que la France est plutôt très avancée en matière de soutien aux blessés. Nous avons en particulier visité à Chypre le sas britanniques. Il s'agit d'un programme d'une journée, dans un camp militaire, où les soldats dorment en dortoir après avoir pratiqué des activités sportives. C'est une façon totalement différente de celle dont nous traitons le retour de nos soldats.

S'agissant de la reconversion, l'Agence de la reconversion nous a fourni quelques statistiques. En 2013, quatre blessés ont été reconvertis dans le secteur privé et un dans le secteur public. En 2014, treize blessés seulement ont été reconvertis. Il est intéressant de constater que les industriels de la défense essaient réellement de jouer le jeu, notamment pour ce qui concerne le stress post-traumatique. Trois expériences ont ainsi été menées chez les entreprises Michelin, Renault Trucks Defense et Areva pour ce qui concerne les stress post-traumatique. Le rapatriement avec les armées alliées fait l'objet d'échanges de bons procédés. Les Allemands arment en permanence leur Airbus, contrairement au modèle français qui repose sur l'insertion de modules dans des avions de transport de troupes de type Boeing C135. Je rappelle également que nous disposons d'un droit de tirage en matière de rapatriement sanitaire dans le cadre de l'EATC. Nous avons constaté qu'il existe un réel choc de générations parmi les anciens combattants. L'ONACVG et le secrétariat d'État aux Anciens combattants et à la mémoire devraient faire un réel effort pour éviter une cassure entre les anciens combattants et la nouvelle génération.

Pour les blessés psychiques, j'ai assisté il y a un mois et demi à une réception au cours de laquelle les rescapés du Drakkar ont été enfin reconnus et récompensés par l'insigne des blessés par le ministre de la Défense. Nous avons par ailleurs reçu il y a quinze jours, lors d'une audition à l'Assemblée nationale, un rescapé du Drakkar qui était au bord des larmes. Il ne s'en est pas encore remis, 31 ans après. Il a quitté le bâtiment à 6 h 32 et deux minutes après, celui-ci s'est effondré. Il continue aujourd'hui à se poser la question de savoir pourquoi lui a eu la chance de s'en sortir, alors qu'il ne porte évidemment aucune responsabilité dans cette tragédie. La prise en charge des rescapés du Drakkar mériterait à elle seule un chapitre complet de notre rapport, tellement les manquements à l'endroit de ces rescapés ont été particulièrement criants et étonnants. Ce n'est que justice de reconnaître aujourd'hui à leur juste valeur ces rescapés et la reconnaissance de la Nation reste à juste titre pour eux extrêmement importante.

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Je crois qu'il y avait là un vrai problème culturel car je me souviens du médecin-général Crocq qui, le premier dans la période contemporaine, avait identifié le syndrome post-traumatique, en s'appuyant sur des exemples de la guerre d'Algérie. C'était alors quelque chose de difficile à reconnaître.

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Quels sont les régiments les plus touchés ? Disposez-vous de statistiques à ce sujet ? Par ailleurs, est-ce que vous pensez que les efforts faits en matière de protection et de prévention sont aujourd'hui suffisants ?

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Les unités les plus exposées sont naturellement les forces spéciales. Et je tiens à saluer le travail remarquable des médecins de ces unités qui les accompagnent.

Pour ce qui concerne la protection, beaucoup de recherches sont aujourd'hui faites sur les blindages. L'hélicoptère que pilotait le premier militaire ayant trouvé la mort au cours de l'opération Serval était dépourvu de blindage. Avec un appareil de nouvelle génération, on aurait probablement pu sauver la vie de son pilote. C'est un exemple cruel.

Nous avons été impressionnés par les recherches qui sont faites, non seulement sur les protections, mais aussi sur les nouvelles technologies qui permettent de communiquer depuis le terrain quasiment en vidéo-conférence. Les techniques pour la protection de nos soldats avancent, donc.

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Pour ma part, j'ai été vraiment impressionnée par l'excellence du milieu médical dans l'armée, que ce soit au niveau des médecins, des chirurgiens, des infirmiers mais aussi des soldats, qui sont tous capables d'effectuer les premiers soins sur le terrain. Et dans les forces spéciales, les médecins sont non seulement d'excellents médecins mais aussi, selon les cas, d'excellents parachutistes ou nageurs de combat.

En matière de prévention, nous avons rencontré la DGA et avons pu constater qu'elle conduisait beaucoup de recherches dans ce domaine. En outre, au centre de transfusion des armées de Percy, des travaux de recherche ont permis de miniaturiser les plasmas lyophilisées, par exemple, que les soldats emportent sur eux. Beaucoup de progrès ont donc été faits ces dernières années par les armées dans le domaine de la prévention et des soins.

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Quelques chiffres : la DGA consacre à la recherche en matière de protection balistique des combattants – gilets et casque – un budget de deux millions d'euros par an, au blindage, cinq millions d'euros, à la protection contre les risques NRBC, 4,5 millions d'euros, à la protection contre le bruit et les contraintes thermiques, trois millions d'euros. Un effort de recherche important est donc consacré à ces questions.

La commission autorise à l'unanimité le dépôt du rapport d'information sur la prise en charge des blessés en vue de sa publication.

La séance est levée à dix-neuf heures.