L'article 12 a d'abord pour objet la situation de vacance de la présidence de l'Autorité des marchés financiers (AMF). Cette situation n'est pas traitée par les textes qui n'envisagent, de façon incomplète, que l'« absence » ou l'« empêchement » du président. L'article L. 621-5 du code monétaire et financier actuel, issu de la loi de sécurité financière du 1er août 2003, ne prévoit en effet que l'hypothèse de l'absence ou de l'empêchement du Président, hypothèse dans laquelle le Collège peut donner délégation à un autre membre du Collège pour prendre les décisions individuelles relevant de la compétence dudit collège. Par ailleurs dans ce cas précis, les pouvoirs propres du Président (mesures d'urgence en cas de « circonstances exceptionnelles menaçant la stabilité du système financier », recours contre une décision de la Commission des sanctions, représentation de l'AMF devant les juridictions) ne sont pas compris dans le champ de cette délégation.
Il est donc proposé de compléter l'article L. 621-2 du code monétaire et financier en prévoyant non seulement l'hypothèse de la vacance des fonctions de président, mais également celle de l'empêchement durable de ce dernier, hypothèses dans lesquelles il désigne un membre du Collège pour qu'il assure l'intérim.
Le 2° et le 8° de l'article sont relatifs au droit de communication des services de l'AMF. Ni le code monétaire et financier, ni le règlement général de l'AMF ne prévoient de dispositions générales qui permettraient à l'AMF d'obtenir des réponses de prestataires de services d'investissement, de sociétés de gestion de portefeuille ou de toute autre personne ou entités que l'AMF est amenée à réguler. Ainsi, aujourd'hui, dans le cadre de sa mission de surveillance, l'AMF ne peut s'appuyer sur aucun texte pour motiver les demandes d'informations adressées aux professionnels qu'elle régule (les demandes de dépouillements par exemple). Dans ce contexte, certains professionnels peuvent tarder à communiquer à l'AMF les informations requises pour identifier de possibles abus de marché ou des manquements aux obligations professionnelles, ce qui retarde d'autant les propositions d'enquête ou de contrôle. En pratique, faute de pouvoir exiger certaines informations, soit l'AMF renonce à certaines propositions d'enquête ou de contrôle, soit le secrétaire général prend le risque d'ouvrir une enquête ou un contrôle dont l'enjeu est mal mesuré, faute de disposer des éléments matériels les plus tangibles. Par ailleurs, les services de l'AMF disposent d'outils conférés par la loi pour appuyer leurs demandes d'informations auprès des émetteurs lorsque leurs titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, mais ils ne peuvent s'appuyer sur aucun fondement législatif pour demander le même type d'information lorsque les instruments financiers d'un émetteur sont admis aux négociations sur un marché autre que réglementé, par exemple un système multilatéral de négociation organisé (SMNO) de type Alternext. Ainsi, il est proposé de renforcer la base juridique de l'activité de veille et de surveillance permettant de solliciter auprès de l'ensemble des acteurs de marchés la transmission des documents, d'informations ou de données, en amont d'une procédure de contrôle ou d'enquête, et d'étendre l'obligation de publication aux marchés autres que réglementés.
Le 3° et le 5° sont relatifs aux pouvoirs des enquêteurs et des contrôleurs. Les modifications proposées ont pour objet :
Le 4° de l'article est relatif au droit des enquêteurs et des contrôleurs de prendre une identité d'emprunt.
Dans les cas de plus en plus fréquent où les prestataires de service d'investissement fournissent leurs services exclusivement sur internet, les informations n'étant pas librement accessibles, ni la visite sur place, ni la simple demande de documents ou d'explications ne permet aux enquêteurs ou aux contrôleurs de s'assurer pleinement de la conformité des services exercés.
Une part croissante de la commercialisation des instruments financiers est réalisée via Internet uniquement. Les missions de contrôles sont ainsi, à titre d'exemple, amenées à contrôler de plus en plus fréquemment des plateformes de distribution de produits financiers qui interviennent directement auprès de particuliers via Internet uniquement.
Le dispositif proposé donne aux enquêteurs et aux contrôleurs la possibilité de prendre une identité d'emprunt pour accéder aux informations et éléments disponibles sur ces services et pour identifier l'offre de services d'investissement et les conditions de commercialisation des instruments financiers. Les enquêteurs et les contrôleurs seraient ainsi en mesure de recueillir les informations nécessaires afin de mener à bien leurs investigations. Ainsi, l'usage d'identités d'emprunt représenterait un outil nécessaire et d'appréhender le fonctionnement des professionnels et les modalités de distributions des produits proposés auprès de la clientèle.
Le 6° est relatif au cadre et au champ d'application des visites domiciliaires.
À ce jour, la visite domiciliaire, mesure coercitive qui permet aux enquêteurs d'accéder aux locaux professionnels et au domicile des personnes et de se voir remettre des documents, ne peut être pratiquée que dans le cadre de la recherche des trois infractions pénales boursières, à savoir le délit de fausse information, le délit d'initié et la manipulation de cours (auxquelles renvoie directement l'article L. 621-12 du code monétaire et financier), nécessairement commis sur le marché réglementé (la matière pénale boursière étant définie par référence au marché réglementé seulement, cf. articles L. 465-1 et L. 465-2 du code monétaire et financier). Or, cette limitation apparaît aujourd'hui mal adaptée à la matière des enquêtes, dont le rôle est de rechercher des infractions dont la gravité ne dépend ni de la plateforme sur laquelle les titres sont échangés (les manquements commis sur Alternext, marché sur lequel la Direction des enquêtes mène un nombre croissant d'enquêtes, sont pour l'heure hors champ de la visite domiciliaire) ni de la qualification en délit boursier (les manquements commis dans le cadre de la commercialisation de titres financiers, dont la gravité, en termes de protection de l'épargne, n'est plus à démontrer, sont également hors champ). Les modifications apportées ont pour but de permettre de pratiquer des visites domiciliaires dans le cadre de la recherche de manquements susceptibles de faire l'objet de sanctions par la Commission des sanctions et commis dans le cadre notamment de la commercialisation de produits financiers, en étendant le renvoi actuel de l'article L. 621-12 du code monétaire et financier à tout délit pénal commis contre les biens.
D'autres modifications sont apportées au texte, tenant, d'une part, à la possibilité de recueillir les observations des personnes visitées lors des visites domiciliaires et, d'autre part, à celle, en cas de visites domiciliaires simultanées sur différents sites non situés dans le ressort de la même juridiction, de ne former qu'un seul recours devant une seule juridiction (mesure inspirée de ce qui a cours depuis de nombreuses années dans le cadre de la procédure devant l'Autorité de la Concurrence).
Le a du 7° modifie le troisième alinéa de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier qui, dans sa rédaction actuelle issue de la loi de régulation bancaire et financière d'octobre 2010, prévoit qu'un membre du collège « ayant examiné le rapport d'enquête ou de contrôle et pris part à la décision d'ouverture d'une procédure de sanction » est convoqué à l'audience.
Or, en pratique, ces dispositions pourraient, à raison du renouvellement régulier des membres du Collège, s'avérer délicates à mettre en œuvre dans le cas où une procédure de sanction serait d'une durée particulièrement longue.
Il est donc proposé de supprimer cette condition à l'article L. 621-15 du code monétaire et financier.
Le b du 7° introduit un manquement autonome d'entrave.
À ce jour, la seule réponse à l'obstruction aux investigations des enquêteurs et des contrôleurs est pénale conformément à l'article L. 642-2 du code monétaire et financier. Or, en pratique, les contrôleurs tout comme les enquêteurs sont souvent confrontés à un manque de coopération des personnes faisant l'objet d'un contrôle ou d'une enquête. Cette inertie dilatoire peut dans certains cas prolonger très nettement les délais des procédures de contrôle et/ou d'enquête.
L'introduction dans l'article L. 621-15 II du code monétaire et financier d'un nouveau manquement administratif sanctionnant l'obstruction aux investigations des enquêteurs et des contrôleurs, susceptible d'être sanctionné par la Commission des sanctions, résulte d'une volonté marquée d'accroître le caractère dissuasif de la sanction d'un tel comportement auquel les enquêteurs et les contrôleurs sont aujourd'hui trop souvent confrontés en pratique.
Le c du 7° modifie le III de l'article L. 621-15 pour prévoir le montant des sanctions.
À cette même occasion, le e du II de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier, sur le fondement duquel la commission des sanctions peut prononcer une sanction à l'encontre de toute personne qui, sur le territoire français ou étranger, s'est livrée ou a tenté de se livrer à la diffusion d'une fausse information lors d'une opération d'offre au public de titres financiers n'a pas son correspondant dans le III du même article, qui a pour objet de préciser le montant de la sanction pécuniaire correspondant, comme c'est le cas pour les a, b, c et d du II. Il est donc proposé de combler cette lacune au ajoutant aux b et c du III de l'article L. 621-15 la référence aux faits mentionnés, non seulement aux c et d du II, mais également au e de ce même paragraphe II.
1. | Le chapitre unique du titre II du livre VI du même code est ainsi modifié :
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2. | 1° Après le dix-septième alinéa de l'article L. 621-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : |
3. | « Le président de l'Autorité des marchés financiers désigne, après avis du collège, un membre du collège chargé d'assurer sa suppléance en cas de vacance ou d'empêchement. » ; |
4. | 2° Après la sous-section 2 de la section 4, il est inséré une sous-section 2 bis ainsi rédigée : |
5. | « Sous-section 2 bis |
6. | « Veille et surveillance |
7. | « Art. L. 621-8-4. - L'Autorité des marchés financiers peut se faire communiquer, par les personnes ou entités mentionnées au II de l'article L. 621-9, tous documents ou informations, quel qu'en soit le support, utiles à l'exercice de sa mission de veille et de surveillance. » ; |
8. | 3° L'article L. 621-10 est remplacé par les dispositions suivantes : |
9. | « Art. L. 621-10. - Les enquêteurs et les contrôleurs peuvent, pour les nécessités de l'enquête ou du contrôle, se faire communiquer tous documents, quel qu'en soit le support. Les enquêteurs peuvent également se faire communiquer les données conservées et traitées par les opérateurs de télécommunications dans le cadre de l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques et les prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, et en obtenir la copie. |
10. | « Les enquêteurs et les contrôleurs peuvent convoquer et entendre toute personne susceptible de leur fournir des informations. Ils peuvent accéder aux locaux à usage professionnel. Ils peuvent recueillir des explications sur place dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État. » ; |
11. | 4° Après l'article L. 621-10, il est inséré un article L. 621-10-1 ainsi rédigé : |
12. | « Art. L. 621-10-1. - Lorsque les personnes et entités mentionnées au II de l'article L. 621-9 fournissent leurs services sur internet, les enquêteurs et les contrôleurs peuvent, pour accéder aux informations et éléments disponibles sur ces services, faire usage d'une identité d'emprunt sans en être pénalement responsable. |
13. | « Un décret en Conseil d'État précise les conditions dans lesquelles les enquêteurs et les contrôleurs procèdent dans ces cas à leurs constatations. » ; |
14. | 5° À l'article L. 621-11 : |
15. | a) À la première phrase, après les mots : « Toute personne convoquée », sont insérés les mots : « ou entendue » ; |
16. | b) À la seconde phrase, après les mots : « Les modalités de cette convocation », sont insérés les mots : « ou du recueil de ses explications sur place » ; |
17. | 6° À l'article L. 621-12 : |
18. | a) Le premier alinéa est remplacé par les dispositions suivantes : |
19. | « Pour la recherche des infractions définies aux articles L. 465-1 et L. 465-2 et des faits susceptibles d'être qualifiés de délit contre les biens et d'être sanctionnés par la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers en application de l'article L. 621-15, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les locaux à visiter peut, sur demande motivée du secrétaire général de l'Autorité des marchés financiers, autoriser par ordonnance les enquêteurs de l'Autorité à effectuer des visites en tous lieux ainsi qu'à procéder à la saisie de documents et au recueil, dans les conditions et selon les modalités mentionnées aux articles L. 621-10 et L. 621-11, des explications des personnes sollicitées sur place. |
20. | « Lorsque les locaux visités sont situés dans le ressort de plusieurs juridictions et qu'une action simultanée doit être menée dans chacun d'eux, une ordonnance unique peut être délivrée par l'un des juges des libertés et de la détention compétents. » ; |
21. | b) Le deuxième aliéna est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque les opérations ont lieu en dehors du ressort de son tribunal de grande instance, le juge des libertés et de la détention saisi peut se déplacer sur les lieux quelle que soit leur localisation sur le territoire national. » ; |
22. | c) Au troisième alinéa, après les mots : « L'ordonnance », sont insérés les mots : « mentionnée au premier alinéa » ; |
23. | d) À la fin de la deuxième phrase du cinquième alinéa, sont ajoutés les mots : « dans le ressort de laquelle le juge a autorisé la mesure. » ; |
24. | e) Au douzième alinéa, après les mots : « Le premier président de la Cour d'appel », sont insérés les mots : « , dans le ressort de laquelle le juge a autorisé la mesure, » ; |
25. | f) Au treizième alinéa, les mots : « une des infractions définies aux articles L. 465-1 et L. 465-2 » sont remplacés par les mots : « une infraction ou un fait mentionnés au premier alinéa » ; |
26. | 7° À l'article L. 621-15 : |
27. | a) Au troisième alinéa du I de l'article L. 621-15, les mots : « , ayant examiné le rapport d'enquête ou de contrôle et pris part à la décision d'ouverture d'une procédure de sanction, » sont supprimés ; |
28. | b) Après le e du II, il est ajouté un f ainsi rédigé : |
29. | « f) Toute personne qui, dans le cadre d'une enquête effectuée en application du I de l'article L. 621-9 sur demande des enquêteurs et sous réserve de la préservation d'un secret légalement protégé et opposable à l'Autorité des marchés financiers, refuse de donner accès à un document, quel qu'en soit le support et d'en fournir une copie, refuse de communiquer des informations ou de répondre à une convocation, ou refuse de donner accès à des locaux professionnels. » ; |
30. | c) Aux b et c du III, les mots : « aux c et d du II » sont remplacés par les mots : « aux c, d, e et f du II » ; |
31. | 8° Le premier alinéa de l'article L. 621-18 est complété par les mots : « ou les émetteurs dont les titres sont admis aux négociations sur un système multilatéral de négociation qui se soumet aux dispositions législatives ou réglementaires visant à protéger les investisseurs contre les opérations d'initiés, les manipulations de cours et la diffusion de fausses informations. » |
Tous les amendements déposés sur cet article : n° CF-274 adopté n° CF-96 n° CF-167