Commission des affaires étrangères

Réunion du 18 juillet 2012 à 16h15

Résumé de la réunion

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La réunion

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Kazakhstan – exploration utilisation de l'espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques – n° 6

La séance est ouverte à seize heures quinze.

La commission examine, sur le rapport de Mme Odile Saugues, le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kazakhstan dans le domaine de l'exploration et de l'utilisation de l'espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques (n° 6).

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Le projet de loi que je vous présente concerne un accord intergouvernemental qui a été signé le 6 octobre 2009 entre la France et le Kazakhstan et est consacré à la coopération dans le domaine de l'exploration et de l'utilisation de l'espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques.

Cet accord répond naturellement à des préoccupations différentes de ses deux signataires.

Pour apprécier ce qu'en attend le Kazakhstan, il faut d'abord rappeler qu'il s'agit de l'économie la plus dynamique de celle des républiques ex-soviétiques d'Asie centrale. Cette économie a crû de près de 10 % par an en moyenne durant la décennie 2000, grâce à de considérables richesses naturelles, en hydrocarbures, mais aussi en uranium, chrome, manganèse, etc. Le PIB du Kazakhstan représente donc les deux tiers de celui de l'Asie centrale et est par habitant huit ou dix fois plus élevé que dans les républiques voisines. La balance courante est fortement excédentaire et l'Etat est enrichi par la rente pétrolière.

Dans cette situation, le Kazakhstan cherche à s'affirmer sur la scène internationale, notamment dans les enceintes multilatérales. Il a exercé en 2010 la présidence de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). En 2011, il a assuré la présidence de l'Organisation de la conférence islamique et de l'Organisation de coopération de Shanghai.

Enfin, le Kazakhstan est aussi un pays qui a hérité de son passé soviétique une tradition d'industrie spatiale, car il possède notamment le fameux site de lancement de Baïkonour. Cependant, de ce passé, le Kazakhstan a aussi hérité un partenariat forcé avec la Russie, qui a loué ce site jusqu'en 2050.

Nous avons donc un pays qui a des moyens et une tradition spatiale, qui cherche à s'affirmer et à échapper un peu, sans confrontation, à une relation trop exclusive avec la Russie. C'est dans ce contexte que le Kazakhstan souhaite développer de nouveaux partenariats, dans le domaine de l'espace, avec les pays les plus avancés dans ce domaine, comme la France.

Du point de vue français, l'intérêt d'un partenariat spatial avec le Kazakhstan apparaît jusqu'à présent essentiellement commercial. Des contrats importants ont été signés. En 2009, EADS-Astrium a ainsi décroché, en même temps qu'était signé l'accord dont nous débattons, un contrat de fourniture de deux satellites d'observation pour un montant évalué à 220 millions d'euros, ainsi que la construction d'un centre d'assemblage de satellites près d'Astana. L'un de ces satellites sera lancé de Kourou par Arianespace en 2014. Par ailleurs, Thales, autre groupe français, a remporté en 2011 un appel d'offres kazakh portant sur la fourniture d'un satellite de télécommunications.

L'accord que nous examinons a été négocié en 2009, principalement à la demande de la partie kazakhe. Il faut bien voir que si nous avons en France, ou plutôt en Europe, de grandes entreprises qui sont indépendantes de l'État, même si celui-ci y conserve souvent des participations minoritaires, au Kazakhstan tout le secteur spatial, y compris ses aspects industriels, est directement contrôlé par la puissance publique. Il était donc naturel que les contrats industriels soient en quelque sorte chapeautés par des accords intergouvernementaux. En 2009 ont ainsi été signés deux accords de cette nature, l'un encadrant la coopération industrielle, c'est-à-dire les contrats dont j'ai parlé, l'autre consacré à la coopération dite institutionnelle, celui dont nous discutons.

Cet accord ressemble à d'autres accords bilatéraux déjà en vigueur pour organiser la coopération spatiale institutionnelle, c'est-à-dire entre agences spatiales. Dans le cas présent, cette coopération sera menée par le Centre national d'études spatiales, le CNES, et son homologue Kazkosmos. À la différence de la coopération industrielle dont j'ai parlé, cette coopération institutionnelle avec le Kazakhstan est pour l'heure à l'état embryonnaire.

Je détaille les clauses de cet accord, assez classiques, dans mon rapport écrit. Pour en donner les grandes lignes, j'indiquerai seulement que son texte délimite soigneusement le champ de coopération visé, excluant non seulement les applications militaires, mais aussi les activités industrielles, traitées dans un autre cadre comme on l'a vu. Dans le champ de l'accord, la coopération devrait être coiffée par un comité mixte de représentants du CNES et de Kazkosmos, auquel d'autres chercheurs ou universitaires pourront être associés. Ce type de comités, prévus par les accords de coopération spatiale, a généralement une activité mesurée, avec une réunion par an. Enfin, l'accord comporte des clauses d'encadrement juridique, notamment sur des points qui sont sensibles et auxquels la diplomatie française est très attachée : il y a ainsi une annexe détaillée sur le respect de la propriété intellectuelle et du droit d'auteur dans les activités qui seront menées en coopération ; il y a aussi un rappel du nécessaire respect des règles nationales sur les exportations et les transferts de technologie, afin d'en éviter le détournement à des fins militaires.

Sous ces observations, j'invite la commission à adopter le projet de loi de ratification de cet accord.

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L'intérêt de cet accord n'échappe à personne, tant en ce qui concerne la recherche que ses aspects techniques ou commerciaux. Le Kazakhstan développe une politique d'ouverture, notamment avec l'OSCE et avec les pays développés, pour sortir de sa spécificité originelle sur Baïkonour. D'autres accords identiques sont-ils signés avec d'autres pays et si oui, lesquels ? L'accord se limite-t-il à la base de Baïkonour ou va-t-il plus loin, comme avec les bases françaises que nous avons sur d'autres territoires ?

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Nous avons conscience de l'importance du Kazakhstan compte tenu de son positionnement géographique et de sa superficie. Quel est son degré de fiabilité, quant aux questions de gouvernance intérieure ? Est-il politiquement stable et quel est l'espoir de voir appliqué cet accord ?

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Une question sur les aspects budgétaires et financiers pour savoir quels sont les conséquences budgétaires de l'accord et les volumes financiers.

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M. Jean-Paul Dufau a parlé de politique d'ouverture ; il y a d'autres accords, effectivement, avec la Chine, le Brésil, l'Inde et la Russie. L'accord ne détermine pas d'autres bases pour la France. Quant à la question de la stabilité politique soulevée par M. Jean-Paul Dupré, je renvoie simplement au fait que le Président Nazarbaiev est au pouvoir depuis très longtemps… La question de l'incidence budgétaire ne se pose pas, il s'agit d'un accord institutionnel et les industriels ne dépendent pas de l'Etat en France, même si c'est sans doute différent au Kazakhstan.

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Ma question portait sur la fiabilité démocratique…

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Si l'on devait restreindre nos conventions internationales aux seuls pays démocratiques, nous n'en conclurions pas beaucoup…

Suivant les conclusions de la rapporteure, la commission adopte sans modification le projet de loi (n° 6).

Grèce – protocole additionnel à l'accord relatif aux rapports intellectuels et artistiques (n° 12)

La commission examine, sur le rapport de M. Michel Terrot, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation du protocole additionnel à l'accord relatif aux rapports intellectuels et artistiques du 19 décembre 1938 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République hellénique (n°12).

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Le texte dont nous sommes aujourd'hui saisis est un accord franco-grec qui vise à renforcer l'action de l'Institut français de Thessalonique, la deuxième ville de Grèce. Cet accord a été signé le 6 juin 2008, à l'occasion d'une visite du président Nicolas Sarkozy à Athènes. Comme j'entends le souligner, ce texte rappelle qu'au-delà des aspects politiques et économiques, l'amitié franco-hellénique repose aussi sur de forts liens culturels. Et ces liens méritent d'être maintenus et approfondis en dépit des graves difficultés qui affectent en ce moment notre continent. Toutefois, avant de vous présenter, plus en détails, le dispositif de l'accord franco-grec, il me semble utile de présenter brièvement l'Institut français de Thessalonique, qui est l'objet même du texte qui nous est soumis.

Cet Institut est, avec l'Ecole française, l'Institut français et le lycée français d'Athènes, l'une des principales structures sur lesquelles repose notre action culturelle en Grèce. Pour autant, cet Institut n'est pas un établissement public. Il appartient à la Mission laïque française. C'est d'ailleurs un des éléments « phare » de celle-ci puisqu'il est l'héritier du premier lycée qu'elle a fondé, en 1906. Détruit pendant la seconde guerre mondiale, ce lycée revit le jour en 1946 non sous sa forme initiale mais sous celle d'un institut culturel qui, depuis les années 60, héberge également une école primaire.

Reconnu en tant qu'association française installée en Grèce, l'Institut français de Thessalonique reçoit le soutien du ministère des affaires étrangères et européennes. Il bénéficie ainsi de 3 équivalents temps plein et d'une dotation de 50.000 euros via notre ambassade à Athènes. Aux côtés de ce personnel expatrié, l'Institut dispose de 15 équivalents temps plein relevant du droit du travail grec, rémunérés sur le budget de l'établissement.

Les missions de l'Institut français de Thessalonique sont de quatre sortes. Tout d'abord, il joue un très grand rôle dans la promotion et l'enseignement du français. Il propose différents cours de langue qui ont recueilli 610 inscriptions en 2011-2012. C'est aussi un lieu d'information sur les études en France et de soutien aux coopérations scientifiques et universitaires. En outre, il fait office de centre d'examen pour les épreuves liées à l'enseignement du « français langue étrangères ». Enfin, c'est un pôle culturel très actif qui propose de nombreuses expositions et spectacles.

L'exercice de ces missions a vocation à être conforté par le protocole additionnel du 6 juin 2008. Au premier abord, ce texte est quelque peu déroutant. Il ne comporte que deux articles au contenu quelque peu sibyllin. L'article 1er – coeur du dispositif – se contente d'indiquer que « les dispositions de l'accord du 19 décembre 1938 relatives à l'Institut français d'Athènes s'appliquent à l'Institut français de Thessalonique ». Or, cet accord de 1938 n'est guère plus précis puisqu'il indique seulement que l'Institut français d'Athènes est entretenu par le Gouvernement français. En fait, l'administration et la justice grecques en ont défini elles-mêmes la portée. Elles l'ont fait dans un sens favorable à nos intérêts en considérant que l'Institut français d'Athènes participait pleinement à la présence de la France. Cela a conduit, concrètement, à le faire bénéficier des mêmes protections policières que celles accordées aux installations officielles françaises en Grèce. Cela a également conduit à simplifier les relations administratives avec les autorités grecques mais aussi à accroître la visibilité de l'Institut et de permettre une plus grande mobilisation des partenaires privés tant en Grèce qu'en France.

Ainsi, par l'effet combiné de l'article 1er du protocole de 2008 et de l'accord de 1938, les avantages de l'Institut français d'Athènes sont étendus à celui de Thessalonique. Il convient de préciser que cette extension n'emporte pas modification du statut de l'Institut français de Thessalonique. Celui-ci demeure la pleine propriété de la Mission laïque française. De même le statut du personnel est inchangé. En particulier, les employés recrutés localement demeurent des contractuels de droit grec. En revanche, sur le plan fiscal, l'Institut français de Thessalonique qui, en application d'une convention fiscale franco-grecque de 1963, est déjà dispensé de déclaration de revenus, pourra bénéficier d'exemptions de TVA pour les activités se rattachant à la coopération culturelle. Le Quai d'Orsay m'a cependant indiqué que cet assouplissement fiscal est actuellement suspendu compte tenu des difficultés budgétaires que connaît la Grèce. Toutefois, à terme, la France disposera d'un fondement pour obtenir ces exemptions.

La contrepartie à ces avantages concédés à l'Institut français de Thessalonique est que l'Etat français devra le maintenir dans le cas, par exemple, où la Mission laïque française souhaiterait s'en désengager. En effet, le texte qui nous est soumis assimile l'Institut à celui d'Athènes et ce dernier, en vertu de l'accord de 1938, est un établissement « entretenu par la France ». La portée de cette obligation doit cependant être relativisée. Elle n'interdira pas d'éventuelles décisions de restructurations qui pourraient être prises ultérieurement. Cela a été fait, par le passé, à Athènes sans susciter de contestations de la part du gouvernement grec.

Le texte qui nous est soumis, vous le voyez, ne révolutionnera pas l'histoire des relations bilatérales franco-grecques. S'il contribue à conférer certains privilèges à l'Institut français de Thessalonique, sa portée n'en demeure pas moins réduite et ses implications concrètes relativement limitées. Pour autant, je pense que cet accord constitue un signal positif. Le protocole franco-grec sur l'Institut français de Thessalonique, à son niveau, réintroduit une dimension culturelle dans des agendas politique et parlementaire dominés par la crise économique et financière ainsi que les graves difficultés qui en découlent.

La Grèce, vous vous en doutez, a dû se résoudre à sacrifier une large part de sa politique culturelle dans des proportions dont on a du mal à imaginer l'ampleur. Le prestigieux festival d'Athènes et d'Epidaure, par exemple, a vu son budget passer de 5 millions d'euros en 2009 à 500.000 euros en 2012 ! La crise a également pour effet de réduire les crédits destinés aux monuments historiques qui étaient jusqu'alors prioritaires en Grèce puisqu'ils représentaient jusqu'à 90% du budget de la culture. On ne peut dès lors que se réjouir de débattre, aujourd'hui, d'un thème qui nous éloigne quelque peu de la crise et qui rappelle qu'avant d'être un pays qui souffre, la Grèce est aussi un pays avec lequel la France entretient des relations historiquement étroites et amicales qu'il est nécessaire de maintenir.

C'est donc au bénéfice de ces observations que je vous recommande d'adopter le projet de loi qui nous est soumis. Je vous remercie.

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Vous avez cité le chiffre de 610 inscriptions pour 2011-2012. Quelle est l'évolution dans le temps ?

Lors d'un déplacement à Athènes, il y a quelques années, on m'a signalé que des étudiants grecs désireux de poursuivre leurs études en France connaissaient certaines difficultés. A-t-on pris des mesures pour y remédier ?

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La mission laïque française a-t-elle d'autres instituts que celui de Thessalonique ? L'Agence pour l'enseignement français à l'étranger est-elle associée à ses établissements ?

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Le nombre d'inscrits à l'Institut français de Thessalonique était de 1 500 en 1970, de 3 400 en 1980 et de 1 000 en 1990. Il a ensuite chuté à 610 en 2011.

Si le français décline en Grèce, c'est que son apprentissage est seulement optionnel, contrairement à celui de l'anglais, qui est obligatoire.

Par rapport aux autres langues, le français se place à la deuxième position, nettement derrière l'anglais, mais devant l'allemand, qui compte plus de locuteurs au Nord qu'au Sud, où le français est très largement dominant.

La Grèce a rejoint l'Organisation internationale de la francophonie en 2006, et c'est dans ce pays que nous faisons passer le plus d'examens de connaissance du français, après l'Allemagne. Par ailleurs, l'apprentissage du français a progressé de 10 % l'année dernière.

Ce protocole est utile, car il tend précisément à renforcer la présence culturelle française.

La mission laïque gère et anime un réseau de 109 établissements scolaires dans une quarantaine de pays, fréquentés par 40 000 élèves. Historiquement implantée dans le monde méditerranéen, elle s'est récemment développée aux Etats-Unis et dans les pays du Golfe. Elle joue un rôle très important en Grèce, notamment pour les raisons historiques que j'ai rappelées.

Son action s'inscrit en complémentarité de celle de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, avec laquelle elle signera prochainement une convention.

Parmi les autres instituts implantés en Grèce, au nombre de quinze environ, beaucoup ont une activité essentiellement archéologique – l'Ecole française d'Athènes, fondée en 1846, est d'ailleurs très réputée dans ce domaine. Le Goethe Institut est présent à Athènes et à Thessalonique, ainsi qu'à Patras et en Crète ; le British Council à Athènes et à Thessalonique également ; l'Institut Cervantès à Athènes ; l'Institut italien à Athènes et à Thessalonique. Il existe aussi un Institut russe et un Institut hollandais, même si l'activité de ce dernier est relativement limitée, et une Union gréco-américaine à Athènes.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification le projet de loi (n° 12).

Vietnam – université des sciences et des technologies de Hanoï (n° 10)

La commission examine, sur le rapport de Mme Chantal Guittet, le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République socialiste du Vietnam, pour la création et le développement de l'université des sciences et des technologies de Hanoï (n° 10).

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Les relations que notre pays entretient avec le Vietnam sont anciennes et denses, sur de nombreux aspects. C'est par exemple le cas en matière économique : les investissements français sont en progression constante et placent notre pays parmi les partenaires importants du Vietnam, avec un dynamisme des échanges commerciaux remarquable, bien que notre commerce extérieur soit fortement déséquilibré. La croissance considérable des échanges a été de +20 % de 2010 par rapport à 2009, puis de +28 %, de 2011 par rapport à 2010. Notre pays entretient aussi avec le Vietnam des relations de coopération importantes, et la France est le premier donateur bilatéral européen du Vietnam en matière d'aide au développement. Les coopérations bilatérales en matière de recherche scientifique et d'enseignement, notamment supérieur, sont nombreuses et au total, quelque 6 000 étudiants vietnamiens, dont 700 doctorants, étudient dans notre pays, ce qui en fait la deuxième communauté asiatique dans les universités françaises. De nombreuses universités et instituts de recherche français, le CNRS, l'IRD, Polytechnique, l'Institut Pasteur, parmi bien d'autres, travaillent depuis longtemps en étroite collaboration avec leurs homologues vietnamiens. Je vous renvoie au rapport pour trouver des précisions sur le « Programme de formation des ingénieurs d'excellence au Vietnam », PFIEV, ou sur les « Programmes universitaires français », PUF, qui permettent la formation de jeunes étudiants dans des filières très variées, sciences humaines et sociales, économie et gestion, architecture, comme aussi la médecine, les mathématiques, les biotechnologies ou les nanotechnologies. Tout cela traduit l'attractivité des universités et de la recherche françaises.

L'accord bilatéral qui est aujourd'hui soumis à notre examen est par conséquent loin d'être le premier en matière universitaire entre nos deux pays, il y en a quelque 200 en tout. Il revêt cependant une importance particulière car il s'inscrit dans le cadre de la préoccupation manifestée par les autorités de Hanoï de voir le niveau général de l'université vietnamienne progresser. Le Vietnam fait face depuis quelques années à un certain nombre de défis importants et ses besoins sont immenses en termes de ressources humaines de qualité qu'il lui faut former s'il entend poursuivre sa marche soutenue vers le développement économique et social. Il faut garder présent à l'esprit qu'il y a vingt ans à peine, les étudiants au Vietnam étaient un peu plus de 35 000 ; ils sont aujourd'hui plus de 2 millions. Le nombre des universités et grandes écoles a lui-même explosé et le pays compte aujourd'hui près de 400 établissements d'enseignement supérieur.

C'est pourquoi en 2008 le Vietnam a demandé à quatre de ses principaux partenaires, les USA, le Japon, l'Allemagne et la France, de l'aider à bâtir l'université de demain en créant quatre pôles universitaires « modèle ». En ce qui concerne l'Allemagne et la France, les négociations ont été menées très vite puisque le pôle de Ho Chi Minh Ville a été ouvert courant 2009 et que celui de Hanoï, franco-vietnamien, l'a été à la rentrée 2010. Les pôles de Can Tho, avec les USA et de Danang, avec le Japon, ont en revanche pris du retard.

Le projet de loi qui nous est soumis vise à donner un statut officiel à cet établissement qui est d'ores et déjà en activité. L'USTH a été voulue comme une université d'excellence de niveau international, et les gouvernements français et vietnamiens ont affirmé leur ambition d'accélérer la réforme de l'enseignement supérieur vietnamien et de créer et développer une coopération scientifique et technologique durable de très haut niveau, qui leur soit mutuellement profitable.

Les missions qui sont assignées à l'USTH sont vastes et importantes : dans les secteurs identifiés par les deux Parties comme prioritaires, les biotechnologies et la pharmacologie, l'aéronautique et l'espace ; l'énergie ; les sciences et technologies de l'information et de la communication ; les nanotechnologies et enfin l'eau, l'environnement et l'océanographie, l'USTH aura notamment à charge de former les ressources humaines de haut niveau au service du développement socioéconomique du Vietnam, de mener des formations et des recherches scientifiques et technologiques en étroite liaison avec le monde des entreprises et des industries et d'accompagner l'orientation des étudiants, la préparation et le suivi de l'insertion professionnelle des diplômés. L'USTH est organisée de manière à articuler étroitement la formation, la recherche et l'entreprise, raison pour laquelle l'accord du 12 novembre 2009 prétend « créer un nouveau modèle de gestion universitaire », qui repose sur une association constante au sein des instances de l'université entre les représentants des deux Parties, entre enseignants, chercheurs, ingénieurs-techniciens-administratifs, réunis au sein d'« unités mixtes internationales » de recherche. Ces laboratoires travaillent sous la responsabilité conjointe des universités, des écoles, des organismes de recherche et des entreprises vietnamiennes et françaises qui sont impliquées sur le projet et qui traduisent concrètement les partenariats scientifiques de haut niveau qui sont mis en oeuvre.

Ces partenariats fonctionnent grâce à la constitution d'un consortium qui doit mobiliser les universités, les organismes de recherche et les grandes écoles françaises. Ce consortium existe d'ores et déjà, il est composé d'une cinquantaine d'universités et de centres de recherche, auxquels se sont joints des partenaires vietnamiens. Il participe à la définition des programmes d'enseignement, à la constitution des unités mixtes internationales de recherche, et facilite la mise à disposition d'experts. Un second organisme est également prévu, une fondation de droit français, dédiée au développement de l'USTH, qui reçoit le concours de l'Etat et des collectivités publiques françaises intéressées, d'entreprises françaises et vietnamiennes, ainsi que des personnes privées en particulier issues de la diaspora vietnamienne en France. Cette fondation n'a pas encore vu le jour, mais un certain nombre d'entreprises françaises ont d'ores et déjà manifesté leur intérêt.

Pour le reste, les instances universitaires sont plus classiques, en ce sens que l'université a à sa tête un recteur, un conseil d'université, un conseil d'administration, et d'autres organes de gestion nécessaires, dont la responsabilité est soit partagée entre les deux Parties, soit nationale. Le recteur est français. Certaines des instances ou organes prévus à ce même article 2, tel que l'incubateur ou l'institut de transfert de technologie, n'ont pas encore été mis en place.

Concernant les aspects matériels et financiers, un partage des charges est prévu entre les deux Parties. Le Vietnam se charge d'obtenir le financement international destiné à la construction du campus, et il vient de se voir accorder par la Banque asiatique de développement un prêt de 200 millions de $ pour cela. En attendant, l'USTH est hébergé dans les locaux de l'Académie des sciences et technologie du Vietnam ; elle devrait occuper son campus à l'horizon 2015. Le Vietnam prend également à sa charge la mobilisation des acteurs vietnamiens à ce projet ainsi que les bourses de 400 doctorants en France durant les 10 premières années du projet. De son côté la France assume les coûts relatifs à l'ingénierie du projet, à l'assistance technique, à la formation. Ce coût global est estimé à quelque 100 millions sur 10 ans, dont 40 liés à la formation des 400 docteurs et 60 à la mise en place des unités mixtes internationales de recherche que j'ai mentionnées plus haut.

Ce projet est très ambitieux, tant pour le Vietnam que pour notre pays. Il traduit clairement la reconnaissance de la qualité de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique de la France par l'un des principaux pays émergents de la région, avec lequel notre pays entretient depuis très longtemps une coopération dense et d'un excellent niveau.

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Je tiens à féliciter Mme la rapporteure pour son travail fouillé. Le projet dont nous débattons s'inscrit dans les relations déjà anciennes entre la France et le Vietnam. Ce projet comporte plusieurs volets, des éléments très concrets et laisse une grande part à l'innovation ; bref, c'est un projet porteur.

J'ai noté que d'autres pays européens, comme l'Allemagne, ainsi que les Etats-Unis et le Japon, ont au Vietnam des projets de même nature. Les pays de l'ancienne Indochine appartiennent à l'espace francophone. Dans quelle langue auront lieu les échanges qui sont prévus. Ce projet s'inscrira-t-il pleinement dans la perspective de la francophonie ? Sachant que 6 000 étudiants vietnamiens viennent en France, nous avons là l'opportunité de démultiplier le rayonnement de notre langue.

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J'espère que le Vietnam fait toujours partie de l'espace francophone…

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Je suis très attaché au développement de toutes les formes de liens avec les pays asiatiques ; cela permet de renforcer les échanges bilatéraux notamment dans le domaine économique.

Je souhaiterais par ailleurs des précisions sur l'état de mise en oeuvre sur le terrain du projet dont nous parlons.

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L'enseignement scientifique est très souvent délivré en anglais. Il en est de même pour les colloques, même quand ils sont organisés en France. Cependant, ce projet comprendra un volet d'enseignement de la langue française, destiné à permettre à de jeunes vietnamiens en mastère de venir faire leur doctorat dans les universités françaises. Pour le reste, l'enseignement sera essentiellement en anglais. Le fait est que le Vietnam n'est pas un pays très francophone et ne l'a jamais été.

L'université que prévoit le projet est déjà en place avec, en 2011, quatre mastères et une licence. Le campus devrait être achevé pour 2015. Les autres développements prévus – l'incubateur et la fondation notamment – n'ont pas encore de traduction concrète. Un recteur, M. Pierre Sebban, issu de l'université Paris-Sud (Orsay), a été nommé, et des coopérations sont engagées avec une cinquantaine d'établissements français, dont l'université de Brest dont je proviens. L'objectif est d'avoir 8 000 étudiants en 2020. Ce projet est très important pour le développement des liens économiques avec le Vietnam.

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Je peux comprendre que les chercheurs publient en anglais, afin d'être lus, mais est-il indispensable que tout le monde parle anglais dans des colloques organisés en France ?

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C'est une réalité, on parle anglais dans les colloques. Mais c'est à chacun de prendre ses responsabilités ; les Français pourraient faire de la résistance…

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Il existe dans certains milieux un snobisme qui pousse à parler systématiquement anglais. Je l'ai constaté dans l'administration des finances, où j'ai servi avant ma carrière politique.

Le Vietnam est un pays asiatique et un partenaire important, il est donc essentiel d'entretenir les liens que nous avons avec ce pays.

L'actualité m'impose d'évoquer un autre sujet : nous venons d'apprendre que trois des plus hauts responsables de la sécurité viennent d'être tués en Syrie. Par ailleurs, le Conseil de sécurité va devoir se prononcer prochainement. Nous sommes peut-être à un tournant. Nous allons naturellement suivre de très près cette situation.

Suivant les conclusions de la rapporteure, la commission adopte sans modification le projet de loi (n° 10).

La séance est levée à dix-sept heures dix.