Commission des affaires économiques

Réunion du 2 novembre 2016 à 10h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La commission a examiné la proposition de résolution européenne sur les conséquences de la fin des quotas sur la filière laitière française et européenne (n° 4124), sur le rapport de M. Hervé Pellois.

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La proposition de résolution européenne (PPRE) sur les conséquences de la fin des quotas sur la filière laitière française et européenne de MM. Yves Daniel et Hervé Gaymard a été adoptée à l'unanimité le 12 octobre dernier par la commission des affaires européennes, à l'issue de la présentation d'un rapport d'information sur cette même thématique. M. Hervé Pellois en est le rapporteur aujourd'hui pour la commission des affaires économiques.

Dans le cadre de la procédure d'examen des PPRE, la commission des affaires économiques, compétente au fond dans le domaine agricole, disposait d'un mois suivant le dépôt de la proposition de résolution adoptée par la commission des affaires européennes pour déposer son rapport. Si, dans les quinze jours suivant la mise en ligne du texte adopté par notre commission, la Conférence des présidents ne décide pas de l'inscrire à l'ordre du jour de l'Assemblée, ce texte deviendra définitif et il sera transmis au Gouvernement et publié au Journal officiel – nous avons déjà fait le même exercice, en mai 2016, avec la PPRE rapportée par Mme Marie-Hélène Fabre sur le maintien de la réglementation vitivinicole.

Le sujet de la présente PPRE, sujet que nous avons souvent évoqué ici, est très important. Depuis la fin des quotas laitiers, la filière laitière européenne connaît une crise d'une ampleur inédite liée à la surproduction et au manque d'anticipation des évolutions du marché. Cette crise s'est traduite par une baisse des prix des produits laitiers et des revenus des producteurs, y compris en deçà de leurs coûts de production. Nous suivons ce dossier avec une attention particulière. J'en veux pour preuve le rapport d'information sur l'avenir des filières d'élevage de Mme Annick Le Loch et M. Thierry Benoit.

Je vous rappelle que nous avions évoqué la possibilité d'organiser une table ronde avec les régions sur ce sujet. Nous avons essayé de fixer une date à deux reprises, mais jusqu'à présent nous n'y sommes pas parvenus, le nombre de régions représentées étant insuffisant – il faudrait réunir sept ou huit régions pour pouvoir aborder tous les sujets. Mais je ne désespère pas et vous pouvez compter sur ma persévérance pour tenter d'organiser cette réunion d'ici au mois de décembre, ce qui permettrait de faire le point et d'avoir un échange constructif.

Monsieur Hervé Pellois, je vous remercie d'avoir accepté de prendre à bras-le-corps ce sujet que vous suivez depuis nombreux mois, voire de nombreuses années.

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La proposition de résolution européenne que nous examinons aujourd'hui est le fruit de l'initiative de la commission des affaires européennes de notre Assemblée, à la suite de l'excellent rapport d'information publié par nos deux collègues Yves Daniel et Hervé Gaymard, que je tiens à remercier.

La fin des quotas laitiers européens, le 1er avril 2015, a exposé la filière laitière à l'instabilité des marchés, à la volatilité des prix à la production et à une concurrence mondiale et intra-européenne exacerbée. Ne regrettons pas pour autant la période des quotas laitiers de 1984 à 2005. La France était très minoritaire en Europe à vouloir leur maintien, et nous savons très bien que nous n'y reviendrons pas. Il fallait mettre un terme à cette période de gestion administrée de la production qui, rappelons-le, était initialement prévue pour une durée limitée de cinq ans et a été reconduite à plusieurs reprises, grâce notamment aux Français. Les quotas n'ont d'ailleurs pas totalement préservé nos producteurs de la volatilité des prix du marché, notamment en 2009. Leur disparition a cependant rendu plus violente la confrontation de nos exploitations laitières aux prix mondiaux. L'atterrissage en douceur prôné par Bruxelles a été plus difficile que prévu. En témoigne le prix de la tonne de lait à 390 euros en janvier 2014, contre 275 euros en août 2016, soit une baisse de 30 %. En France, fort heureusement, les derniers cours sont proches de 300 euros la tonne, mais ils n'atteignent pas encore le prix de revient de 340 euros la tonne.

La situation de la filière depuis un an et demi est regrettable. Certains pays membres de l'Union européenne ont trop vite anticipé la fin des quotas en augmentant aveuglément leurs volumes de production dès 2014. C'est le cas de l'Irlande et des Pays-Bas qui ont laissé dériver leur production, respectivement, de 33 % et 17 %. Ce n'est pas le cas de la France, mais elle a subi de plein fouet comme tous les autres pays européens cette surproduction européenne couplée à la fermeture du marché russe du fait de l'embargo politique et à la moindre demande chinoise en poudre de lait contrairement aux anticipations.

Ce n'est pas faute d'avoir tenté, au niveau de la Commission européenne, de préparer le secteur en lui permettant de s'organiser. Les recommandations du groupe d'experts mis en place par la Commission en 2010 ont abouti à l'adoption du « paquet lait » entré en vigueur le 3 octobre 2012, parfois en contrevenant au sacro-saint droit de la concurrence.

Le « paquet lait » a permis, d'une part, de mieux appréhender, avec les organisations interprofessionnelles, les variations du marché et de définir une stratégie de filière – mieux écouter le marché, c'est également le rôle important dévolu à l'Observatoire européen du marché du lait. D'autre part, le « paquet lait » a permis de favoriser, avec les organisations de producteurs, les regroupements de producteurs en structures visant à remédier à l'émiettement de l'offre face à la concentration de l'aval de la filière que représentent à la fois les transformateurs, collecteurs du lait, parmi lesquels on compte des multinationales et les distributeurs, de plus en plus concentrés en un nombre réduit de centrales d'achat. La contractualisation obligatoire est aussi un instrument de rééquilibrage des relations commerciales ; il convient de la renforcer.

L'exposition des producteurs aux lois du marché ne s'est pas faite sans filets de sécurité, d'autant que la Commission européenne a utilisé des mécanismes de soutien conjoncturel à la filière. On pouvait regretter que le « paquet lait » soit encore insuffisamment mis en oeuvre à l'échelle des autres pays membres, et surtout trop lentement. La pugnacité de notre ministre de l'agriculture, lors du Conseil des ministres de l'agriculture de l'Union européenne le 18 juillet dernier, a permis d'adopter des mesures de réduction de la production de lait qui s'avèrent dès à présent positives.

La France, de son côté, a continué à agir pour répondre aux préoccupations des producteurs de lait. La publication au Journal officiel du 30 septembre 2016 de l'arrêté permettant la mise en place, à titre expérimental, pour deux ans, de l'étiquetage de l'origine du lait dans les produits transformés dès le 1er janvier 2017 en est un excellent exemple. Plus récemment, le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (Sapin II), en cours d'examen, améliore le fonctionnement de la contractualisation dans les limites du droit européen.

Avec les outils ainsi à disposition et en gardant les objectifs d'une politique agricole commune ambitieuse et soucieuse du maintien de toutes les exploitations laitières même les plus fragiles, la proposition de résolution européenne de nos collègues de la commission des affaires européennes propose quatorze pistes de consolidation du secteur, auxquelles j'adhère pleinement.

Ces quatorze propositions mettent d'abord en avant des mesures de stabilisation des marchés et d'amélioration des relations commerciales en renforçant la mise en oeuvre du « paquet lait » et en se dirigeant vers des mesures assurantielles de stabilisation des revenus, d'atténuation de la volatilité des prix et de lissage des volumes en cas de crise, reprenant le programme pour la responsabilisation face au marché de l'European Milk Board. C'est, j'en suis persuadé, l'une des orientations que devra prendre la future politique agricole commune (PAC) post 2020.

Ce sont ensuite des mesures plus classiques mais nécessaires de consolidation de la stratégie agricole européenne qui sont réaffirmées : assurer des débouchés à l'export en négociant la levée de l'embargo russe et en poursuivant les mesures de promotion des exportations, d'une part, et protéger les exploitations d'élevage fragilisées en augmentant les aides couplées aux jeunes agriculteurs et en investissant en faveur des biens publics fournis par l'élevage, d'autre part.

Cette proposition de résolution affirme parfaitement ce que doit être une politique laitière ambitieuse. Celle-ci a été adoptée à l'unanimité par la commission des affaires européennes ; je vous propose de partager ce consensus et de l'adopter sans modification.

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Nous examinons ce matin la proposition de résolution européenne sur les conséquences de la fin des quotas sur la filière laitière française et européenne proposée par nos collègues Yves Daniel et Hervé Gaymard. Celle-ci fait suite au rapport sur les filières d'élevage que Thierry Benoit et moi-même avons présenté le 30 mars dernier. Aujourd'hui encore, les filières d'élevage sont en crise grave et la filière laitière est particulièrement affectée. La fin des quotas, le 1er avril 2015, a déstabilisé le secteur qui vit une crise de surproduction et une volatilité des marchés laitiers libéralisés avec une diminution des prix payés aux producteurs français et européens. Et le « paquet lait » entré en vigueur en 2012 n'y a rien fait. « L'après quotas est une catastrophe », me disait un éleveur de mon département et même s'il y a d'autres raisons à cette situation de crise profonde, la détresse de certains producteurs est palpable.

Les quotas laitiers qui ont permis de garantir un prix n'ont cependant pas empêché une restructuration radicale du paysage laitier français. En vingt ans, notre pays est passé de 160 000 exploitations à 67 000 aujourd'hui et cette tendance devrait se poursuivre dans les années à venir. La pyramide des âges impliquera que d'ici à dix ans une exploitation sur deux changera de propriétaire.

Comment, dans ce contexte, conserver notre production laitière, soit près de 10 % des produits laitiers mondiaux, comment maintenir les producteurs dans nos territoires et comment saisir les opportunités économiques qui ne manqueront pas de s'ouvrir dans les années qui viennent ?

Les réponses à ces questions figurent dans la résolution proposée, qui fait suite au rapport d'information de nos collègues de la commission des affaires européennes dans lequel une stratégie globale pour l'avenir de la filière laitière française et européenne est tracée. Si l'on sait qu'on ne peut espérer revenir aux quotas, on ne peut pas non plus laisser les impitoyables logiques économiques des marchés mondiaux régir celui de la production laitière.

Comme le précise un considérant de la proposition de résolution, les producteurs doivent être rémunérés à hauteur de leur contribution aux biens publics qui sont leur mission nourricière, l'aménagement du territoire, le maintien des paysages et celui de la santé de la planète et du vivant ainsi que la lutte contre le réchauffement climatique.

Il convient donc de mettre en place un système de régulation capable de garantir un revenu décent aux producteurs, un système d'incitation et de contrainte proche du programme pour la responsabilisation face au marché (PRM) de l'European Milk Board qui permettrait de lisser les revenus et les volumes produits en cas de crise, comme nous l'avons déjà évoqué dans notre rapport sur l'avenir des filières d'élevage en mars dernier. Cette mesure peu coûteuse ne pénalise pas ou peu les exportations, car même si les volumes diminuent, les prix augmentent à la suite d'une revalorisation des prix sur le marché mondial. Cet instrument peut être mis en place rapidement dans le cadre réglementaire actuel de l'Union européenne. Il s'agit d'un système intelligent de régulation, un outil moderne adapté au système actuel, pas une entrave mais un système vertueux qui permettrait de préserver l'avenir, l'avenir justement et les investissements à venir. Quelle meilleure garantie pour les jeunes qui projettent de s'installer et pour les banques que cette forme de régulation ?

Cette impérieuse nécessité de réguler la production de lait au niveau européen a déjà trouvé un premier écho favorable à la suite d'une intense négociation initiée par le ministre français de l'agriculture dès le mois de février dernier. Une aide de 150 millions d'euros a été mise en place pour inciter à la réduction de la production du lait de vache, soit quatorze centimes par kilo non produit. La France a annoncé, fin août, sa décision d'abonder de dix centimes l'aide européenne. Le succès a été immédiat : la totalité de l'aide a été sollicitée dès le premier appel d'offres, 13 000 producteurs ayant déposé une demande pour les trois prochains mois. Une deuxième enveloppe est proposée : il y aurait huit fois plus de demandes que de possibilités financières offertes. Cette information est à vérifier.

Ce mouvement ne se limite pas à nos frontières. Au niveau européen, la baisse de la production est estimée à un peu plus d'un million de tonnes, ce qui traduit bien une prise de conscience collective, celle des professionnels d'abord qui veulent être acteurs de leur avenir et qui prouve la pertinence du dispositif initié par la France, celui de la diminution de l'offre pour soulager la crise.

Après les actions des producteurs contre Lactalis, ces derniers jours des sections syndicales bretonnes ont estimé qu'une des plus importantes coopératives laitières pratiquait des prix inacceptables au vu de la situation d'un très grand nombre d'éleveurs. Le rapporteur a évoqué le prix de 300 euros la tonne, mais j'ai lu, ici ou là, que les prix varient autour de 275 ou 280 euros la tonne en fonction de la qualité du lait.

Faut-il rappeler les résultats économiques de certains élevages, peu enviables ces deux dernières années ? Plus de 20 % d'entre eux peuvent en effet prétendre au revenu de solidarité active (RSA). Et avec eux c'est tout un écosystème local, une dynamique de territoire qui peut s'effondrer.

L'urgence est là. Je vous propose donc d'adopter cette proposition de résolution européenne.

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Je veux saluer, au nom du groupe Les Républicains, le travail effectué par nos collègues Hervé Gaymard et Yves Daniel. Bien entendu, je souscris aux objectifs formulés. Il faut effectivement apporter une réponse européenne à la crise que traversent les producteurs de lait. Cependant, je me permets de rappeler à nos collègues de la majorité qu'il convient également d'apporter des réponses nationales. Tout ne doit pas venir de l'Europe. Malgré les quelques avancées contenues dans le projet de loi Sapin II, nous continuons de regretter le rejet de notre proposition de loi sur la compétitivité de l'agriculture que nous avions déposée au mois de février dernier.

Concernant plus précisément la filière laitière, plusieurs d'entre nous ont déposé récemment des amendements visant à compenser les surcoûts de la collecte en zone de montagne. Ils ont proposé, lors de l'examen du projet de loi de finances, une exonération de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, une exonération des charges salariales sur le personnel chargé de cette collecte. Mais ces amendements ont été rejetés. Il serait bon que le Gouvernement et sa majorité revoient leur position en nouvelle lecture de ces deux textes pour coller à l'esprit de cette proposition de résolution.

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À mon tour, je tiens à saluer le travail de nos collègues qui ont essayé de trouver des solutions, même si je ne suis pas aussi enthousiaste que la plupart des députés de la commission des affaires économiques ou de la commission des affaires européennes.

Les réponses apportées visent en effet à adapter ce que l'Europe nous impose : on ne s'attaque pas de front à la question fondamentale de la politique agricole commune. Cette machine infernale fondée uniquement sur la recherche du prix le plus bas aboutira à la disparition des plus faibles. Pour faire bouger cette politique agricole commune, et ne pas être simplement dans l'accompagnement, il faudrait mettre un grand coup de pied dans la fourmilière et aller bien au-delà des propositions faites ici. Certes, je salue la recherche effrénée de solutions, mais celles-ci ne règlent pas le fond du problème. On parle de la volatilité du marché comme étant la principale menace pour la stabilité du revenu des éleveurs, mais cette volatilité est entretenue par les injonctions de l'aval : les groupes agroalimentaires et de la distribution. Or je ne suis pas sûr que les mesures contenues dans la PPRE s'attaquent vraiment à la domination de ces groupes. Quand on sait que dans le cadre d'une approche mondialisée de la production de lait, les exportations ne représentent que 9 % de la production, on peut se demander si l'on ne pourrait pas mieux rémunérer la production consacrée au marché intérieur. Je sais que c'est compliqué. Certaines propositions sont avancées, tels des tunnels de prix permettant de garantir un revenu pour les premiers volumes de production. Mais au nom de ce libéralisme européen, on abandonne toute autre solution.

La proposition de résolution s'appuie essentiellement sur le lissage des revenus, les instruments financiers et assurantiels privés. Je ne suis pas convaincu qu'il s'agisse bien là de mécanismes de garantie des prix. Bref, je ne m'opposerai pas à cette proposition, mais je ne crois pas qu'elle comporte des mesures suffisamment fortes pour résoudre les problèmes de nos producteurs laitiers.

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Au nom du groupe Union des démocrates et indépendants, je tiens à saluer le travail de nos collègues Hervé Gaymard et Yves Daniel, rapporté aujourd'hui par M. Hervé Pellois. Cette proposition de résolution européenne, que je soutiens, s'inscrit dans la poursuite de différents rapports et actions conduites par les parlementaires français pour faire bouger les lignes en matière de production laitière en France et en Europe, et elle nous est présentée à mi-parcours de la programmation budgétaire 2014-2020. Elle nous permet de rappeler que la France est le grand pays agricole de l'Union européenne, avec une surface agricole utile (SAU) de 28 millions d'hectares. C'est donc notre pays qui doit donner le « la » en Europe. Il n'y a plus lieu aujourd'hui de revenir sur le bien-fondé de la suppression des quotas laitiers. Dans notre rapport intitulé « Sauver l'élevage français : une volonté nationale, un enjeu européen », nous avions proposé avec Mme Annick Le Loch de renforcer les outils de régulation en cas de crise. L'Europe doit en effet prendre son bâton de pèlerin et être à la tête d'un mouvement visant à prévoir une régulation en cas de crise. À la fin des quotas laitiers, la France a posé des exigences, applicables aux relations entre les industriels et les éleveurs producteurs de lait, pour contenir la production laitière tandis que certains de ses voisins et amis européens ne se sont pas privés d'ouvrir les robinets.

On compare le lait que l'Europe met sur le marché mondial, et qui est d'excellente qualité car il répond à des normes sanitaires et qualitatives précises, à celui de la Nouvelle-Zélande alors qu'il n'y a aucune comparaison possible. Et au final, cela tire les prix par le bas. C'est pourquoi l'Europe a un rôle à jouer quant aux exigences qu'elle pose à ses ressortissants, notamment français, mais également lorsqu'elle examine ou signe des traités internationaux – le traité de libre-échange transatlantique (TAFTA), l'accord économique et commercial global (CETA)…

M. Lionel Tardy a souligné la responsabilité qui incombait à la France, notre pays accusant un retard dans le développement des associations d'organisations de producteurs. Il y a quelques années, on a incité les éleveurs à contractualiser, les gens intelligents n'avaient que ce mot à la bouche ! La France devrait mettre une administration de l'État à la disposition des éleveurs pour les aider à se structurer en associations d'organisations de producteurs.

Les normes régissant les relations entre les producteurs et les industriels relèvent du ressort national. Mme Annick Le Loch et moi-même nous étions attaqués au problème du déséquilibre dans les négociations entre les industriels et les producteurs. Le récent mouvement social en Mayenne a révélé cette inégalité entre les producteurs, qui se structurent progressivement, et les industriels, qui agissent dans un marché mondial. Nous devons corriger ce déséquilibre. Les éleveurs ne pourront pas faire face à une situation dans laquelle on les enjoint d'être compétitifs et de pratiquer un prix du lait attractif, tout en les encourageant à contracter des emprunts. Ces derniers recèlent une dimension punitive car ils obligent les éleveurs à être corvéables à merci pendant trente ans pour les rembourser, le prix du lait, chose inadmissible, s'avérant trop faible pour assurer une rémunération suffisante.

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Le rapport contient trente-trois propositions réparties par domaine d'intervention.

La décision de supprimer les quotas laitiers, prise en 2003 et entrée en vigueur en 2015, s'est accompagnée d'un manque d'anticipation, pointé par l'ensemble des acteurs auditionnés pour ce travail. Il aurait fallu élaborer des outils pour faire face à cette disparition. Il s'agit là d'une question de société, qui dépasse le champ de l'agriculture.

Des prix trop hauts comme trop bas déséquilibrent la filière, d'où la nécessité de mener un travail structurel destiné à ne plus subir la succession de crises conjoncturelles. La régulation, par les volumes – et par les prix car les quotas n'ont pas empêché la survenue de la crise de 2009 –, constitue le principal outil d'action. L'interprofession, les associations de producteurs, la contractualisation, la mise en oeuvre d'un tunnel de prix fonctionnant avec des bonus et des malus, les fonds de régulation et la préparation de la PAC pour 2020 représentent les principaux sujets à traiter.

Chaque acteur doit s'approprier les trente-trois mesures du rapport, le travail, pour être efficace, devant être conduit aux échelles locale, nationale, européenne et mondiale. Même si la part de l'agriculture dans le produit intérieur brut s'avère relativement faible, ce secteur joue un rôle très important et ne peut pas être régi par le libéralisme. Construisons un modèle permettant de prendre d'autres critères en compte que les résultats financiers et les volumes. L'agriculture doit être reconnue comme une activité spécifique, ce qui nécessite la mobilisation de tous les acteurs : chacun doit prendre ses responsabilités !

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La résolution aborde presque tous les sujets, mais en omet deux. Tout d'abord, vous vous appuyez, Monsieur le rapporteur, sur les propositions de l'European Milk Board, qui souhaite l'instauration d'un tunnel de prix pour les producteurs. Quelle place pourrait-on faire aux initiatives des consommateurs, comme celle dans laquelle une marque bien connue distribue une brique de lait dont le prix est fixé par le consommateur ? Cette initiative est intéressante car elle implique le consommateur dans un bien qui lui est essentiel ; il conviendrait de l'inclure dans la résolution, afin de ne pas la rendre incompatible avec le mécanisme du tunnel de prix. Ensuite, la Commission européenne a autorisé, lorsqu'une grave crise comme celle du lait advient, que les producteurs s'entendent temporairement, ce qui constitue une exception aux règles de la concurrence. Pourrait-on prévoir cette disposition dans le texte ? Un tel signal serait de nature à rassurer les producteurs.

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Je me félicite de cette résolution qui intervient dans un contexte de crise très importante : en 2014, la tonne de lait était payée entre 370 et 390 euros et elle n'atteint plus que 270 euros aujourd'hui. Les prix ont baissé d'un tiers et la surproduction n'est que de 3 % en Europe. On ne reviendra plus au système des quotas, si bien qu'il nous faut inventer un nouveau modèle. Monsieur Lionel Tardy, vous avez plaidé pour l'édiction de dispositions françaises, mais M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, a pris des mesures comme l'année blanche et les reports de cotisations à la mutualité sociale agricole (MSA), qui sont globalement bien accueillies sur le terrain.

Il convient néanmoins d'aller plus loin et de préparer la future PAC, en ayant conscience que le marché détruit l'outil de travail et l'aménagement du territoire. Cette résolution souhaite donner du poids aux organisations de producteurs, ce qui n'a pas été fait jusqu'à maintenant. La loi Sapin II permettra à chaque organisation de producteurs d'effectuer une contractualisation globale, alors que l'on vivait jusqu'à maintenant dans un système très déséquilibré où chaque agriculteur signait un contrat avec des entreprises aussi puissantes que Lactalis.

Il y a également lieu de faire émerger une interprofession du lait couvrant toute l'Europe. Monsieur André Chassaigne, l'interprofession est un système qui date de 1936 ! Les producteurs et les transformateurs doivent se rencontrer pour assurer des prix rémunérateurs, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

Lorsque l'on sort du tunnel de prix, la puissance publique doit intervenir à l'échelle européenne pour fixer un niveau de production ; le quota ne sera plus l'outil de cette action, et il faut en élaborer de nouveaux. Sans régulation, on ne sortira pas de la crise.

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Il faut évidemment trouver des solutions pour le lait dans un contexte où les quotas n'existent plus, et l'on doit retrouver une agriculture performante et compétitive. Le produit doit contenir une valeur ajoutée pour faire vivre le producteur, qui ne doit pas être dépendant des primes.

Lorsque l'on paie une brique de lait un euro et que le producteur ne touche que vingt-huit centimes, la redistribution des marges s'avère injuste, et je rejoins M. André Chassaigne sur ce point. Le producteur ne doit plus être la variable d'ajustement ! Ne pourrait-on pas obliger le producteur, le distributeur et le transformateur à se mettre autour de la table pour trouver un équilibre dans le partage de la marge ?

Le système actuel est artificiel, et nos agriculteurs, qui subissent une crise structurelle de grande ampleur, « crèvent la bouche ouverte » ! Des mesures ponctuelles sont prises, mais elles ne règlent pas le problème de fond. Les agriculteurs et le secteur agricole doivent s'organiser pour apporter de la valeur ajoutée au produit et pouvoir ainsi en vivre. Les agriculteurs ont créé des coopératives dans lesquelles, bien souvent, ils ont perdu la main. Les gros groupes dominent et se préoccupent peu de nos agriculteurs. Il faut instaurer un cadre légal national qui ne fasse plus du producteur la variable d'ajustement. Pensez-vous que nous y arriverons un jour ?

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Ce rapport et cette résolution sont particulièrement bienvenus dans le contexte de crise que nous connaissons depuis trop longtemps. Il est indispensable que les éleveurs puissent vivre décemment de leur travail. La proposition de résolution européenne présente de nombreux points positifs : la possibilité de lisser les volumes produits en cas de crise, la nécessité de mieux aider les éleveurs en zone défavorisée ou comprenant des handicaps naturels, la valorisation d'instruments de stabilisation des revenus, l'encouragement à développer un système d'interprofessions et d'organisations professionnelles, et la volonté de voir les producteurs, les acheteurs et les distributeurs se lier par des contrats tripartites – ce dialogue ne se situant actuellement pas au coeur du système.

La résolution demande la mise en place d'instruments financiers et assurantiels permettant aux producteurs d'atténuer l'impact de la volatilité des prix sur leur production. Monsieur le rapporteur, quelle pourrait être la nature de ces instruments ?

Les instruments assurantiels auront un coût : qui l'assumera ? Cela vous paraît-il pertinent que les assurances compensent les effets pervers d'un marché trop peu régulé ? Il faudrait surtout mettre en place suffisamment de régulations.

La proposition de résolution oublie quelque peu le consommateur en n'évoquant pas le sujet de l'étiquetage ; ce dernier sera possible à partir du 1er janvier prochain, mais uniquement en période de crise. Il serait opportun d'impliquer davantage le consommateur.

La résolution demande que l'accès aux AOP soit facilité, ce qui n'offre que peu de cohérence avec la signature du CETA entre l'Union européenne et le Canada, qui ne reconnaît que vingt-huit AOP laitières, alors que nous en comptons une centaine en France. Pourquoi ne parle-t-on pas des indications géographiques protégées (IGP) ?

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Comme tous mes collègues, je m'associe à cette proposition de résolution européenne. Il faut veiller à l'accompagnement financier des organisations de producteurs, car ce sont elles qui permettront aux éleveurs de peser face à la grande distribution. La loi nous autorise déjà à mettre en place des instruments financiers et assurantiels adaptés à la production laitière, qui diffère des autres productions. Il convient également de redonner un rôle d'élaboration stratégique à l'interprofession.

On ne tire pas les enseignements de nos erreurs passées : la plupart des producteurs sont en difficulté, mais cette situation date d'avant la fin des quotas. Lorsqu'ils existaient, on a eu tort de refuser de donner une valeur aux quotas ; on a ainsi laissé des gens acheter du foncier, actif non amortissable, sans attribuer une valeur aux quotas. La loi Sapin II poursuit cette logique en ne reconnaissant pas de valeur au droit à produire ; cela revient à dire à un commerçant que son fonds de commerce ne vaut rien. Ce système affaiblit le poids de l'agriculteur face aux industriels et, indirectement, face à la grande distribution. Légiférons pour donner cette valeur et pour préciser les transactions ! L'État doit permettre l'installation des éleveurs, même si cette politique a un coût.

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Je salue le travail de nos deux collègues et affiche mon soutien complet à la proposition de résolution, les trente-trois propositions allant dans le bon sens. La suppression des quotas en avril 2015, l'embargo russe, l'atonie de la commande provenant des pays asiatiques et la surproduction de certains pays d'Europe du Nord – les hausses de volume pouvant atteindre 33,17 % – expliquent la situation présente. La loi du marché régnant, les prix se sont effondrés et sont passés de 390 euros la tonne en 2014 à 275 euros aujourd'hui, une tonne bien payée se vendant actuellement 300 euros. Cela est inacceptable pour nos producteurs, qui travaillent dur et qui relèvent les défis de l'aménagement du territoire et du maintien des paysages.

Je salue les mesures d'urgence prises par M. Stéphane Le Foll – réduction et report des charges, et année blanche –, mais il faut travailler sur le fond du problème. L'Europe a financé, à hauteur de 150 millions d'euros, une mesure visant à limiter la production, à laquelle l'État a également participé. Nous avons besoin de réponses européennes, nationales, locales, et le consommateur a aussi un rôle à jouer. La loi Sapin II et les circuits courts apportent des solutions, et il convient de travailler sur les méthodes de production.

Le problème principal réside dans la relation commerciale, car les producteurs affrontent des distributeurs et des transformateurs irraisonnables. La loi doit donc s'en mêler et se pencher sur l'organisation des producteurs pour permettre le développement d'une relation commerciale correcte.

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Je voudrais relever le courage des rapporteurs qui appellent à négocier pour la levée de l'embargo russe sur les produits laitiers. Cette question diplomatique a un fort impact sur notre production nationale, car le poids de la Russie dans les exportations de produits laitiers est très élevé. La consommation de lait diminue en Chine depuis quelques années à cause de scandales, et l'Europe n'a pas suffisamment pris en compte cette évolution alors que le marché chinois a un potentiel énorme.

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Je soutiens cette résolution européenne, mais je me demande quelles sont ses chances d'être mise en oeuvre. Par ailleurs, notre Parlement peut-il demander à l'Europe de prendre des dispositions alors que nous restons passifs face à la violence de la crise du secteur laitier dans notre pays ?

La semaine dernière, certains d'entre nous ont défendu, contre la majorité qui l'a rejeté, un allégement de charges dans des zones défavorisées, notamment montagnardes, pour nos producteurs.

Dans les relations entre le producteur, le transformateur et le distributeur, je souhaiterais instaurer un échelon intermédiaire de négociation impliquant le transformateur, afin que la négociation ultime avec la distribution se fasse à partir d'un prix plancher, ce qui empêcherait les prix de tomber à un niveau trop bas. Cette mesure relève de la législation française.

Enfin, les coûts de production sont très lourds dans notre pays, à cause de l'inflation des normes, des réglementations et des charges. Il faut juguler ces coûts et alléger le cadre réglementaire. Il est de notre devoir de législateur français de traiter ces questions, même si l'Europe a également des réponses à apporter.

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Cette proposition de résolution va dans le bon sens. Dans ma circonscription, des éleveurs se sont rassemblés pour prendre en main leur avenir et ont créé une société par actions simplifiée (SAS) ; ces producteurs s'occupent de la transformation et de la commercialisation, et ils ont reçu il y a quinze jours le prix de l'innovation au salon international de l'alimentation à Villepinte. Cette démarche, nommée « En direct des éleveurs », offre une traçabilité totale et vérifiable, ainsi qu'une perspective tripartite pour les producteurs, les consommateurs et les distributeurs – ces derniers réalisant une marge. Ces exploitants s'inscrivent dans l'association « Bleu-blanc-coeur », produisent sans organismes génétiquement modifiés (OGM) et sans huile de palme, et emballent leurs produits dans des paquets intégralement recyclables. Aujourd'hui, on doit protéger le consommateur.

La gestion des contrats a créé de nombreuses difficultés, et il nous faut améliorer la capacité des agriculteurs à négocier. Ils sont aujourd'hui enfermés dans un système très complexe, puisqu'il y a un contrat pour la collecte et un autre pour la cuve. Le délai de préavis pour mettre fin à ces contrats s'élève souvent à un an pour les producteurs, mais à seulement trois mois pour les collecteurs. Ce déséquilibre empêche la négociation et crée des barrières pour les agriculteurs qui veulent s'organiser eux-mêmes. Il est possible d'agir, et notre attention doit porter en priorité sur les contrats, même s'il est compliqué de définir des critères valant pour chaque exploitation du fait de leur diversité.

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Quand j'entends dire que la crise trouve son origine dans l'engorgement des marchés européens, je veux rappeler que les pays du Nord de l'Europe ne sont pas les seuls concernés : selon les experts, il y a probablement un million de vaches laitières en trop en France, et il faudra bien, à un moment ou un autre, s'armer de courage pour réduire ce cheptel. Entre 800 000 et 850 000 vaches laitières supplémentaires vont être abattues en Europe cette année tandis que, dans le même temps, 80 000 à 100 000 vaches laitières irlandaises vont arriver sur le marché – sans même parler de ce que prévoit le CETA. L'abattage massif de vaches laitières a des conséquences désastreuses pour le marché de la viande, du fait de l'arrivée d'un très grand nombre de carcasses sur le marché. Il existe une proposition qui pourrait être de nature à améliorer la situation tant du marché du lait que de celui de la viande, à savoir celle du marché européen humanitaire, consistant à retirer 300 000 à 400 000 animaux du marché pour les transformer en corned-beef à destination des zones en état de guerre ou en grande difficulté en raison des migrants. Pensez-vous que cette proposition puisse aboutir, éventuellement dans le cadre de la présente résolution ?

Pour ce qui est de votre proposition n° 4, consistant à revoir et assouplir les règles de validation des organismes de défense et de gestion pour les appellations d'origine protégée, j'avoue qu'elle m'inspire une inquiétude, celle de voir les AOP se banaliser : le cas échéant, le remède pourrait se révéler pire que le mal si l'on aboutissait à ce que les AOP qui protègent aujourd'hui les éleveurs, notamment dans le cadre de leurs activités de transformation, perdent en efficacité.

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La troisième proposition de ce texte consiste à demander « la mise en place d'instruments financiers et assurantiels permettant aux producteurs d'atténuer l'impact de la volatilité des prix sur leur production » – une solution que j'ai déjà suggérée dans le cadre de réunions de syndicats d'agriculteurs. Les technologies actuelles nous permettent beaucoup de choses, notamment la création d'une marge arrière directe du consommateur au distributeur en sortie de caisse, puisque tous les produits sont tracés. Quand on sait que la vie d'une exploitation – donc celle de l'exploitant – dépend d'une variation de quelques centimes du kilo du prix de sa production, il ne fait aucun doute que cette solution serait efficace. Dans la mesure où sa faisabilité technique n'est pas un problème, sa mise en oeuvre n'attend qu'une volonté politique, d'autant que le consommateur français est d'accord pour payer un peu plus cher, du moment que c'est le producteur qui en profite. En la matière, les observatoires des prix ont malheureusement démontré qu'ils étaient peu efficaces : ils me font un peu penser au Marégraphe de Marseille, un ensemble de bâtiments construit au XIXe siècle à la seule fin d'observer les marées. Il est possible d'agir sur les prix : le système de la marge arrière peut nous le permettre.

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Je veux rappeler que la crise du lait est apparue avant la fin des quotas : établir une stricte corrélation entre les deux événements serait donc une erreur. De ce point de vue, le titre de la proposition de résolution, qui fait référence aux « conséquences de la fin des quotas sur la filière laitière française et européenne », ne me paraît pas correspondre à son contenu, qui prend en compte d'autres causes de la crise du lait.

Vous avez bien fait de mentionner l'embargo russe, qui a plus d'impact sur nos producteurs de lait que la question des quotas.

La crise actuelle ne se limite pas à la filière laitière, mais touche l'ensemble des filières d'élevage ; mettre fin à cette crise qui a plusieurs origines nécessite d'entreprendre une action à la fois sur les plans local, national et européen. Notre objectif doit être de mettre en place des mécanismes de régulation du marché, de disposer d'une meilleure visibilité sur la chaîne associant producteurs, transformateurs et distributeurs, et d'améliorer la qualité, notamment grâce aux AOP.

Enfin, la question européenne est essentielle : je pense à l'European Milk Board, mais aussi à l'avenir de la politique agricole commune. La crise laitière actuelle trouve l'une de ses causes dans la cassure entre la France et l'Allemagne, qui n'ont plus du tout la même vision des filières agricoles et de l'avenir de l'agriculture. Pour améliorer la situation de l'élevage en France et en Europe, nous devons donc commencer par reformer un couple franco-allemand digne de ce nom.

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Le contexte actuel est celui d'une crise agricole généralisée, touchant aussi bien la filière du lait que celle de la viande bovine et porcine. Si cette proposition de résolution qui cible la filière laitière formule quelques préconisations intéressantes, certaines actions mériteraient d'être menées au niveau national : je pense notamment à l'abaissement des coûts de production et à l'allégement des normes et des charges, ainsi qu'à l'amélioration de l'organisation des producteurs face à des transformateurs et une grande distribution concentrés.

Ces observations faites, je souhaite demander au rapporteur quels effets concrets nous pouvons attendre de cette proposition de résolution. Il ne faudrait pas, comme c'est trop souvent le cas pour des textes soumis au Parlement français ou au Parlement européen, que cette proposition n'aboutisse qu'à mettre en évidence une certaine impuissance publique, ce qui ne ferait qu'aggraver la détresse, déjà profonde, de nos agriculteurs.

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Certes, la crise de la filière laitière préexistait, mais force est de reconnaître qu'elle s'est aggravée avec la fin des quotas. Les revenus des producteurs dépendent de trop nombreux critères – notamment une demande mondiale caractérisée par sa volatilité – et sont également tributaires de décisions politiques. L'organisation actuelle de la filière n'est pas satisfaisante, avec des distributeurs qui cherchent à obtenir des prix toujours plus bas, et des aides européennes trop complexes et irrégulières. Les producteurs français méritent pourtant que l'on cherche à maintenir leur existence, car ils contribuent largement à préserver les territoires et les paysages qui font la richesse de notre pays.

Aujourd'hui, c'est l'ensemble de la filière qu'il faut remettre à plat et réorganiser, afin que les producteurs voient leur travail justement rémunéré. Pour mettre fin aux importantes variations de leurs revenus, résultant des aléas climatiques et politiques, nous devons impérativement mettre en place, comme cela s'est fait avec succès dans d'autres domaines, une interprofession efficace, c'est-à-dire capable d'aider la filière.

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Avant de laisser la parole au rapporteur, je veux juste préciser que cette proposition de résolution, dont les auteurs sont MM. Yves Daniel et Hervé Gaymard, a été examinée par la Commission des affaires européennes le 12 octobre dernier ; certaines des questions qui viennent d'être posées ont certainement vocation à être adressées aux deux rapporteurs que je viens de citer plutôt qu'à notre collègue Hervé Pellois.

Par ailleurs, je rappelle qu'il s'agit d'une proposition de résolution européenne et qu'il serait vain de vouloir donner à un texte de cette nature plus de poids qu'il ne saurait en avoir. À l'issue de nos travaux, cette proposition sera publiée en l'état si elle n'est pas inscrite à l'ordre du jour de la séance publique, dans la mesure où aucun amendement n'a été déposé.

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Je remercie les différents intervenants pour leurs questions. Tous ont fait le constat d'une crise ayant plongé nos éleveurs dans une situation de grande détresse, résultant en partie du fait qu'ils étaient insuffisamment préparés à la situation actuelle. Ils étaient en effet habitués à percevoir depuis des décennies une paye de lait mensuelle – tandis que d'autres producteurs sont, eux, soumis de longue date à des aléas permanents : je pense notamment aux producteurs de porcs, qui ont dû affronter plusieurs crises consécutives et, à chaque fois, remonter la pente pour continuer à produire. Comme l'ont indiqué les rapporteurs de la proposition de résolution, il conviendrait sans doute de réfléchir à la mise en place d'une formation spécifique des producteurs afin qu'ils soient en mesure de faire face au contexte actuel, et mieux armés pour appréhender les mécanismes mondiaux d'une grande complexité dont ils sont peu familiers – même s'ils doivent en tenir compte depuis la crise de 2009, à laquelle ils n'ont pas échappé alors pourtant que les quotas laitiers étaient en vigueur.

L'organisation des producteurs a été largement évoquée. Si elle a été entreprise il y a plusieurs années, on peut penser qu'elle n'a sans doute pas avancé aussi vite qu'il l'aurait fallu. Le « paquet lait » de 2012 fournissait un certain nombre de réponses à la crise, dont les professionnels ne se sont pas emparés assez rapidement. De ce point de vue, nous pouvons féliciter notre ministre de l'agriculture d'avoir mis à profit certaines mesures de ce dispositif pour permettre une diminution de la production chez un certain nombre d'éleveurs laitiers – qui se répercute sur la production de viande bovine, comme cela a été dit. Je rappelle qu'il suffit d'une diminution d'un très faible pourcentage pour aboutir à un nouvel équilibre entre l'offre et la demande.

Aux critiques émises par certains de nos collègues de l'opposition, je répondrai d'abord qu'il est évident que l'on ne fait jamais assez en politique pour aider les personnes qui se trouvent en difficulté. Cela dit, je rappelle que l'allégement des charges annuelles pour le secteur agricole est passé de 2,5 milliards d'euros en 2012 à 4,7 milliards d'euros aujourd'hui : les 2,2 milliards d'euros supplémentaires qui ont été apportés pour tenter d'apaiser des difficultés du monde agricole, que l'on espère passagères, constituent, à mon sens, un effort important et très concret.

À M. André Chassaigne, qui m'a interrogé sur la volatilité des marchés, je dirai que les marchés sont par nature volatils. Dès lors, il nous appartient de trouver des réponses dans le cadre de la révision de la PAC en 2020 pour maintenir les producteurs en place : les réponses collectives dont nous disposons au niveau européen doivent pouvoir se décliner au niveau national à l'occasion de la mise en place de cette nouvelle PAC et, pour cela, la France doit être porteuse d'idées de nature à permettre de maintenir le plus grand nombre possible de producteurs partout en Europe.

Mme Annick Le Loch a souligné la forte diminution du nombre d'éleveurs laitiers consécutive à la mise en place des quotas. S'il y a six fois moins d'éleveurs qu'auparavant, la production, elle, s'était maintenue jusqu'à présent dans toutes les régions françaises ; or, cette production commence également à se tarir dans certaines régions, ce qui constitue une alerte que nous ne devons pas ignorer. C'est l'objet de la proposition n° 13, visant à ce que l'agriculteur se voie confier un rôle dépassant celui de simple producteur de lait pour toucher également à l'aménagement du territoire et à la survie des campagnes.

M. Yves Daniel a souligné le manque d'anticipation de la crise de la part de l'ensemble des producteurs européens. Les solutions proposées par l'Europe n'ont effectivement pas toujours été suivies d'effet, ce que l'on peut déplorer.

Mme Sophie Rohfritsch a fait allusion à la brique de lait dont le prix a été fixé par les consommateurs. Je me félicite de cette initiative, très proche de ce qui est fait avec les paniers de fruits et légumes, dont le prix est fixé de manière équitable, et qui peut constituer un élément de réponse.

Mme Michèle Bonneton m'a interrogé au sujet de la proposition n° 3, en particulier sur la nature des instruments assurantiels de nature à permettre aux producteurs d'atténuer l'impact de la volatilité des prix sur leur production. Un fonds d'assurance s'alimente au moyen de cotisations et un fonds de mutualisation par des taxes. Des groupements de producteurs ont déjà mis en place ce type de fonds constitué d'une caisse de péréquation qu'ils alimentent lorsque les cours sont hauts, et dans laquelle ils puisent lorsque les cours sont bas. Cela dit, de tels systèmes ne sont pas faciles à maintenir quand les périodes de crise se succèdent trop rapidement.

Pour ce qui est de l'étiquetage des produits laitiers, il va être procédé à une expérimentation à compter du 1er janvier 2017 pour une durée de deux ans, donc sur une période dont on peut espérer qu'elle ne correspondra pas uniquement à la crise ; au demeurant, si l'expérience se révèle positive, nous pourrons nous efforcer de faire en sorte que cette mesure soit prolongée au-delà des deux ans prévus actuellement.

Pour ce qui est des appellations d'origine protégée, je me contenterai d'observer que les AOP figurant dans le CETA sont celles qu'il est le plus important de protéger dans le cadre des échanges commerciaux avec le Canada.

M. Philippe Le Ray a évoqué l'accompagnement financier des groupements de producteurs – auquel je sais que la région Bretagne, notamment, apporte sa contribution –, et l'on ne peut qu'être favorable à de telles initiatives, qui permettent d'encourager la structuration des élevages.

Pour ce qui est de la valeur des quotas, d'autres pays qui ont mis en place des quotas payants se trouvent aujourd'hui empêtrés dans un système ayant pour conséquence de renchérir le coût de l'installation des exploitants, ce qui va à l'encontre de l'objectif consistant à favoriser l'installation de nouvelles générations de producteurs.

M. Éric Straumann a souligné l'intérêt qu'il y aurait à engager des négociations en vue de la levée de l'embargo russe sur les produits laitiers en provenance de l'Union européenne, ainsi que le potentiel commercial du marché chinois. S'il est exact qu'une très faible variation des commandes à destination de la Chine peut avoir d'importantes répercussions sur le volume de nos exportations, nous devons aussi nous demander, à l'inverse, quelles seraient les conséquences pour nos producteurs si les relations entre la France et la Chine, actuellement au beau fixe, venaient à se détériorer pour une raison ou une autre. D'une manière générale, il est très important pour nous que les relations avec la Chine et tous les pays du Sud-Est asiatique, des pays émergents constituant autant de nouveaux marchés pour les exportateurs européens, soient aussi bonnes que possible, et c'est l'un des objectifs de cette proposition de résolution que de nous permettre de trouver de nouveaux débouchés dans les pays d'Extrême-Orient.

Je remercie Mme Sophie Errante d'avoir rappelé que l'innovation est porteuse d'avenir.

M. Alain Suguenot a évoqué son inquiétude à l'idée d'un assouplissement des appellations d'origine protégée. En réalité, il ne s'agit pas tant d'assouplir les AOP que de faciliter leur mise en place et de raccourcir les délais qu'imposent actuellement les exigences d'une administration souvent trop tatillonne en la matière. L'effet positif des AOP sur les prix des produits laitiers n'est plus à démontrer, notamment en zone de montagne, où les producteurs se portent, de ce fait, plutôt mieux que ceux des zones de plaine.

En réponse à M. Jean-Charles Taugourdeau, je dirai qu'une bonne partie des produits français bénéficie déjà d'une labellisation.

M. Damien Abad s'interroge sur l'efficacité du couple franco-allemand. Pour ma part, je ne suis pas persuadé que les divergences entre notre pays et l'Allemagne se résument à des questions d'ordre agricole. Notre voisin d'outre-Rhin profite actuellement du considérable effort de modernisation qu'il a réalisé de 1995 au début des années 2000 : le Gouvernement allemand a entrepris des chantiers de grande ampleur afin de reconstituer, à l'est du pays, des élevages importants qui nous causent aujourd'hui beaucoup de tort. Cela dit, n'allons pas reprocher à l'Allemagne d'avoir su faire preuve de dynamisme, et efforçons-nous plutôt de trouver, à notre tour, des solutions pour rendre notre agriculture plus performante.

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J'aimerais préciser que nous sommes, bien entendu, favorables à l'installation de jeunes exploitants. Lors de mon intervention précédente, j'ai simplement voulu dire que, dans le rapport de forces qui l'oppose à l'industriel, le producteur se trouve fragilisé par le fait que les contrats laitiers et les quotas qui y sont rattachés ne sont pas valorisés.

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Ce rapport montre à quel point il est important de travailler à la restructuration de la filière laitière, mais aussi de l'ensemble des filières agricoles. Les organisations professionnelles et syndicales agricoles doivent prendre leurs responsabilités en la matière, en participant à la mise en oeuvre de cette restructuration.

La commission adopte la proposition de résolution sans modification.

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Mes chers collègues, je vous rappelle que nous procéderons, mercredi 9 novembre à seize heures trente, conjointement avec la commission des affaires européennes, à l'audition de Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture.

Information relative à la commission

La commission a nommé Mme Marie-Noëlle Battistel rapporteure pour avis sur l'ensemble du texte de la proposition de loi portant adaptation du code minier au droit de l'environnement (n° 4043).

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 2 novembre 2016 à 10 h 30

Présents. - M. Damien Abad, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. Christophe Borgel, M. André Chassaigne, Mme Karine Daniel, Mme Corinne Erhel, Mme Sophie Errante, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Christian Franqueville, M. Franck Gilard, M. Daniel Goldberg, M. Jean Grellier, Mme Laure de La Raudière, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, Mme Jacqueline Maquet, Mme Marie-Lou Marcel, M. Philippe Armand Martin, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Kléber Mesquida, M. Hervé Pellois, Mme Josette Pons, M. François Pupponi, M. Franck Reynier, Mme Béatrice Santais, M. Michel Sordi, M. Éric Straumann, M. Alain Suguenot, M. Lionel Tardy, M. Jean-Charles Taugourdeau, Mme Catherine Troallic

Excusés. - M. Bruno Nestor Azerot, M. Denis Baupin, M. Jean-Claude Bouchet, M. Dino Cinieri, Mme Jeanine Dubié, M. Laurent Furst, Mme Pascale Got, M. Philippe Kemel, M. Jean-Luc Laurent, M. Serge Letchimy, Mme Audrey Linkenheld, M. Yannick Moreau, M. Philippe Naillet, M. Dominique Potier, M. Thierry Robert, M. Jean-Paul Tuaiva, Mme Catherine Vautrin

Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Louis Bricout, M. Alain Calmette, M. Guillaume Chevrollier, M. Paul Molac, Mme Sophie Rohfritsch, M. Arnaud Viala, M. Philippe Vigier