Déposé le 27 février 2016 par : Mme Lacroute, M. Nicolin, M. Vitel, M. Frédéric Lefebvre, M. Gandolfi-Scheit, M. Hetzel, M. de La Verpillière, Mme Grosskost.
Supprimer cet article.
Le présent amendement supprime l'action de groupe dans le domaine environnemental, introduite par les sénateurs en séance en première lecture.
La création d'une action de groupe en matière d'environnement apparaît grandement prématurée, pour plusieurs raisons.
D'abord, il n'existe pas de « vide juridique ». Le droit positif confère déjà aux associations de protection de l'environnement le pouvoir d'agir, notamment en tant que parties civiles, pour la défense des intérêts collectifs qu'elles prétendent incarner. Par ailleurs, l'article L. 142-3 alinéa 1er du code de l'environnement leur permet d'être mandatées par plusieurs personnes afin d'agir en réparation des préjudices subis, résultant d'un dommage causé à l'environnement. Ces dispositions permettent donc d'ores et déjà de faire cesser un manquement ou de porter des actions indemnitaires collectives de façon satisfaisante et propre à la spécificité de la protection de l'environnement et de la biodiversité.
Le texte soulève en outre de réelles difficultés juridiques. S'inspirant du système mis en place pour l'action de groupe consommation, il accorde la qualité pour agir aux associations agréées, aux associations régulièrement déclarées depuis cinq ans au moins dont l'objet statutaire comporte la défense des victimes de dommages corporels, et aux associations de protection de l'environnement agréées.
Or, le monde associatif environnemental n'est pas encore aussi structuré que celui de la consommation. Une réforme de l'agrément des associations environnementales a été engagée à la suite de la loi Grenelle 2, mais le décret du 12 juillet 2011 réformant la procédure d'agrément et de définition des critères de représentativité au sein des instances consultatives a suscité un grand nombre de débats, qui ne sont toujours pas tranchés à ce jour. Il est donc critiquable de conférer à des œuvres socio-environnementales la qualité pour agir. En tout état de cause, le texte en l'état permettrait à des centaines d'associations d'engager la procédure, d'où un risque de recours abusifs avec une démultiplication des contentieux que les entreprises devraient gérer, et ce quelle qu'en soit l'issuein fine.
Enfin, une telle procédure exige un examen plus approfondi et fait déjà l'objet de travaux parlementaires :
- D'une part, la loi relative à la consommation de mars 2014 a prévu que le Gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant les conditions de mise en œuvre de l'action de groupe en droit de la consommation et proposant les adaptations nécessaires. Ce bilan, qui doit être dressé trente mois au plus tard après la promulgation de cette loi (soit en septembre 2016) « envisage également les évolutions possibles du champ d'application de l'action de groupe, en examinant son extension aux domaines de la santé et de l'environnement ».
- D'autre part, un projet de loi relatif à l'action de groupe et à l'organisation judiciaire, actuellement soumis à l'examen parlementaire, prévoit de créer un « socle commun » procédural pour l'ensemble des actions de groupe, quel que soit le domaine concerné, dans une optique de rationalisation et de simplification. D'ores et déjà, la commission des lois, saisie au fond, a nommé les rapporteurs MM. Clément et Le Bouillonnec sur ce projet de loi. Le titre V de ce projet est et demeurera intégralement consacré à l'action de groupe. Nous ne pouvons pas improviser une réforme précipitée du code de justice administrative.
Dans ce contexte, il convient d'éviter toute extension hâtive de l'action de groupe au domaine environnemental. Pour toutes ces raisons, l'article 51 quater AA doit être supprimé.
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