La réunion

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La séance est ouverte à 14 heures.

Présidence de Mme Catherine Coutelle, présidente.

La Délégation procède à l'examen du rapport d'information sur le projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs (n° 3600), présenté par Mmes Marie-Noëlle Battistel et Catherine Coutelle.

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Nous examinons aujourd'hui le rapport sur le projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs, dont la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes s'est saisie.

Dans le cadre de ces travaux, nous avons auditionné des associations, des syndicats, des chercheurs et, la semaine dernière, Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

À cet égard, j'observe que, pour la seconde fois, le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) fut la seule organisation patronale à ne pas avoir répondu à notre invitation ; il a dû juger suffisante sa présence aux auditions organisées par la commission saisie au fond. Soit le MEDEF n'est pas capable d'envoyer des personnes à deux séances différentes, soit, cette dernière hypothèse me paraissant la plus probable, il s'intéresse moins à une moitié des salariés des entreprises qu'à l'autre.

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Le combat pour l'égalité entre les femmes et les hommes est un combat qui demande une mobilisation sans cesse réaffirmée, comme l'a souligné la ministre Mme Myriam El Khomri, lors de son audition par notre Délégation le 30 avril dernier. Si les femmes représentent aujourd'hui 48 % de la population active, le monde du travail reste marqué par de profondes inégalités. En effet, les femmes occupent environ 82 % des emplois à temps partiel et plus des deux tiers des travailleurs pauvres. Même si les écarts de salaire diminuent deux fois plus vite en France qu'en Europe, elles gagnent encore 19 % de moins que les hommes en équivalent temps plein, avec une part dite non expliquée, la plus inadmissible, d'environ 10 %.

Par ailleurs, 27 % des femmes occupent des postes peu qualifiés d'employés ou d'ouvriers, soit près de deux fois plus que les hommes (15 %), et, plus globalement, une véritable ségrégation professionnelle demeure ; plus de la moitié de l'emploi féminin se concentre ainsi sur une dizaine de métiers, qui s'avèrent souvent peu valorisés. Plus exposées à la précarité dans l'emploi, elles sont aussi confrontées à un plafond de verre pour l'accès aux postes à responsabilité. Elles sont également plus concernées par les discriminations, directes ou indirectes, à raison du sexe ou de la parentalité, les harcèlements sexuels et les agissements sexistes.

En dépit de 40 ans de lois sur l'égalité professionnelle, celle-ci n'est pas encore réalisée. Depuis 2012, la France a engagé une démarche nouvelle pour transformer l'égalité des droits en égalité réelle : les droits des femmes sont devenus une politique publique à part entière, autonome et visible, mais qui a aussi vocation à être intégrée dans l'ensemble des politiques publiques de l'État.

Pour y veiller et pour promouvoir l'autonomie des femmes et l'égalité réelle au regard de l'importance des enjeux liés au travail et à l'emploi, la Délégation aux droits des femmes s'est saisie, depuis le début de cette législature, de plusieurs projets de loi concernant le travail, et relatifs au harcèlement sexuel, à la sécurisation de l'emploi, à l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, à la formation professionnelle, l'emploi et la démocratie sociale, et, récemment, du projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi. La Délégation a également publié en janvier 2013 un rapport d'information thématique sur le dispositif relatif aux obligations des entreprises en matière d'égalité professionnelle.

Dans le prolongement de ces travaux, la Délégation a souhaité être saisie du projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs, qui a été adopté par le Conseil des ministres le 24 mars dernier.

Dans cette perspective, des auditions ont été organisées avec des représentantes d'associations féministes ou oeuvrant sur le terrain pour promouvoir l'insertion professionnelle des femmes, des experts, membres du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (CSEP), des représentants et représentantes d'organisations syndicales de salariés et de l'Union professionnelle artisanale (UPA). Seul le MEDEF a décliné notre invitation, comme Mme la présidente l'a rappelé. Ce cycle de rencontres s'est conclu par l'audition de la ministre Mme Myriam El Khomri. La Délégation a également pu s'appuyer sur l'avis rendu le 11 mars 2016 par le CSEP sur l'avant-projet de loi, qui faisait état de plusieurs réserves sous l'angle de l'égalité professionnelle.

Si nous avons disposé de très peu de temps pour mener ces travaux, le rapport est très complet et procède tout d'abord à l'analyse des principales caractéristiques de l'emploi et du travail des femmes, afin de pouvoir mieux appréhender l'impact du projet de loi pour tenter de pallier les carences de l'étude d'impact sur ce point. Il rappelle également les nombreuses avancées intervenues depuis 2012 en matière d'égalité professionnelle.

Le rapport examine dans une seconde partie les différentes mesures du projet de loi sur lesquelles l'attention de la Délégation a été appelée. Celles-ci concernent principalement les principes essentiels du droit du travail qui doivent guider la réécriture de la partie législative du code du travail (article 1er), les dispositions relatives aux temps de travail, s'agissant plus particulièrement de celles relatives au temps partiel (articles 2 à 5), ainsi que la réforme du dialogue social, compte tenu de ses impacts sur la négociation collective en entreprise sur l'égalité professionnelle (articles 10 à 18). Nous avons également étudié les dispositions du projet de loi relatives au compte personnel d'activité (CPA) – (articles 21 et 22), au droit à la déconnexion et au télétravail (articles 25 et 26), la médecine du travail (article 44), ainsi que d'autres thématiques susceptibles d'enrichir ce projet de loi, concernant par exemple la lutte contre les agissements sexistes en milieu professionnel.

Nous formulons trente recommandations pour améliorer le droit du travail pour renforcer la lutte contre les inégalités ; par ailleurs, une trentaine d'amendements ont été déposés pour l'examen cette semaine du projet de loi par la commission des Affaires sociales.

Nous demandons tout d'abord l'élaboration systématique d'une étude d'impact chiffrée sur les conséquences des projets de loi et la mise en oeuvre effective des dispositions prévues en la matière par la circulaire du Premier ministre du 23 août 2012. Cette requête concerne d'ailleurs l'ensemble des projets de loi qui sont souvent accompagnés d'études d'impact lacunaires.

Nous formulons plusieurs recommandations sur les principes essentiels du droit du travail, qui devront guider le travail de réécriture de la partie législative du code du travail : mieux définir le principe d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ; prendre en compte l'accès à l'emploi dans la définition du principe relatif à l'interdiction des discriminations ; poser un principe plus ambitieux et plus conforme aux textes européens et internationaux en matière d'articulation entre la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale ; réécrire le principe concernant la grossesse et la maternité, afin de ne pas en présenter une vision négative et de mieux tenir compte du droit existant ; réécrire le principe relatif au principe d'égalité de rémunération pour viser explicitement les inégalités entre les femmes et les hommes. Nous préconisons également de prévoir, d'une part, la composition paritaire de la commission de refondation qui sera chargée de proposer une réécriture de la partie législative du code du travail et, d'autre part, d'associer le CSEP aux travaux de cette commission.

En matière de temps de travail et de repos, nous suggérons quatre pistes : rétablir un délai de prévenance de sept jours ; prévoir que les accords de branche ne peuvent pas moduler la majoration de la rémunération des heures complémentaires ; établir un bilan détaillé, quantitatif et qualitatif des accords de branche prévoyant des dérogations aux 24 heures ; modifier la rédaction du projet de loi pour faire référence aux congés d'articulation entre vie familiale et vie professionnelle, en supprimant le terme de conciliation.

Concernant la négociation collective sur l'égalité professionnelle, il nous semble nécessaire de renforcer les moyens des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) afin d'accompagner, de contrôler et de sanctionner les entreprises en matière d'égalité professionnelle, et de prévoir que la négociation sur l'égalité professionnelle et celle sur les rémunérations ne puissent devenir triennales à la suite d'un accord de branche que si l'entreprise a conclu un accord sur l'égalité. En outre, il est important de former les partenaires sociaux aux spécificités de la négociation sur l'égalité professionnelle en utilisant les nouvelles possibilités offertes par le projet de loi et, par ailleurs, de veiller à l'équilibre de la représentation des très petites (TPE) et des petites et moyennes entreprises (PME) où les femmes sont majoritairement représentées pour les négociations des accords collectifs de branche.

Nous proposons également d'harmoniser le vocabulaire utilisé pour nommer les éléments figurant dans la base de données économiques et sociales (BDES) et dans la procédure de consultation et de négociation, d'introduire dans les éléments soumis par l'employeur à la consultation et à la négociation, le plan d'action et en définir le contenu, et de porter à la connaissance des salariés non seulement la synthèse du plan d'action unilatéral de l'employeur en cas d'échec de la négociation, mais aussi la synthèse de l'accord lui-même en cas de succès. Il convient enfin de renforcer le positionnement et les moyens du CSEP et de veiller à la publicité systématique de ses travaux.

Deux autres recommandations portent sur l'amélioration des modalités d'abondement du compte personnel de formation (CPF), qui sera intégré dans le compte personnel d'activité (CPA), pour les salariées et salariés à temps partiel, et sur la prise en compte, dans le cadre de la réforme de la médecine du travail, des risques pour la santé et la sécurité des salariés dans les métiers majoritairement exercés par les femmes.

Nous avançons également plusieurs propositions dans le domaine des discriminations, du harcèlement sexuel et des agissements sexistes : harmoniser les règles de preuve en matière de discrimination et de harcèlement sexuel ou moral ; prévoir l'obligation pour l'employeur de rembourser à Pôle emploi les indemnités chômage versées à la personne licenciée suite à un traitement discriminatoire ou à un harcèlement moral ou sexuel ; instaurer une indemnisation plancher correspondant aux salaires des 12 derniers mois pour tout salarié licencié en raison d'un motif discriminatoire ou d'un harcèlement sexuel.

Il conviendrait par ailleurs de préciser le régime de la preuve applicable aux actions en justice relatives aux agissements sexistes en milieu professionnel, de prévoir l'obligation de rappeler dans le règlement intérieur des entreprises les dispositions prévues par la loi en matière d'agissements sexistes, mais aussi d'inclure les risques liés à ces agissements dans les principes généraux de prévention sur le fondement desquels l'employeur met en oeuvre les mesures nécessaires pour protéger la santé des salariés, et d'intégrer la question du sexisme et des violences au travail dans le champ de la négociation collective sur l'égalité professionnelle. Nous proposons enfin de modifier le titre du projet de loi pour faire également référence aux « actives », afin que les femmes ne soient pas invisibles.

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Concernant la seizième recommandation que venez d'évoquer, relative à l'équilibre de la représentation des TPE et des PME, où les femmes sont majoritairement représentées pour les négociations des accords collectifs de branche, la présentation me semble plus claire dans le corps du rapport.

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La loi procédera à un rééquilibrage de la représentation patronale, à hauteur de 80 % pour le MEDEF et la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CPGME), et 20 % pour les TPE. Nous n'arrivons pas à connaître la proportion de femmes dans les TPE et les petites entreprises, mais on nous a dit qu'elles y étaient majoritaires. Elles sont donc moins protégées et moins représentées que les salariés des grandes entreprises, qui disposent de délégués syndicaux, de comités d'entreprise (CE) et de comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Dans les PME, le texte améliore la situation en proposant le mandatement pour la négociation, mais l'UPA nous a dit souhaiter négocier au niveau des branches et non des entreprises, car les moyens humains sont insuffisants dans les petites structures. Nous souhaitons éviter la sous-représentation de ces petites entreprises, afin que les femmes soient défendues.

L'article 1er pose les principes du droit selon lesquels le code du travail sera réécrit. Nous avons avancé des propositions sur la grossesse, l'égalité professionnelle et l'articulation entre les vies au travail et familiale. Je vous demande de nous soutenir, car il n'est pas certain que l'on obtienne gain de cause, et nous avons besoin d'une commission paritaire pour réécrire le code du travail, les commissions Combrexelle et Badinter ayant été majoritairement composées d'hommes. Or il existe des expertes dans ce domaine, le CSEP en comptant notamment plusieurs.

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J'ai cosigné tous les amendements déposés en commission par les rapporteures. Cependant, je m'interroge sur la formulation de la recommandation qui propose de prévoir que les accords de branche ne puissent pas moduler la majoration de la rémunération des heures complémentaires : la rédaction ne pourrait-elle être clarifiée ?

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Nous avons mené ce combat dès l'accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013, car les premières heures complémentaires n'étaient pas rémunérées avant cette date. Dans le cadre du présent projet de loi, nous souhaitons que toute heure complémentaire soit payée avec une majoration de 25 %.

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Concernant les principes essentiels du droit du travail, le projet de loi introduit des dispositions relatives à la manifestation de convictions religieuses en entreprise, qui me dérangent.

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Le onzième alinéa de l'article 1er du projet de loi, correspondant au sixième grand principe, dispose en effet que : « La liberté du salarié de manifester ses convictions, y compris religieuses, ne peut connaître de restrictions que si elles sont justifiées par l'exercice d'autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l'entreprise et si elles sont proportionnées au but recherché ».

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Cela me pose problème au regard de l'emploi des femmes.

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Ce n'est pas le salarié qui embauche, et les dispositions précitées sont relatives à la liberté pour le salarié, à l'intérieur de l'entreprise, de manifester ses convictions, y compris religieuses. Le rapport d'information évoque les cas où des salariés de certaines entreprises pourraient refuser de serrer la main de collègues et de travailler au même poste que des femmes – on nous a cité l'exemple des transports. Dans ces situations, le salarié entrave le bon fonctionnement de l'entreprise.

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Certains salariés sont des directeurs. L'introduction du fait religieux dans l'entreprise me choque.

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Je suis d'accord avec Mme Maud Olivier et ne comprends pas pourquoi le texte parle de religion.

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Il y aura sûrement des amendements à cette disposition. L'article 1er énonce ce qui servira à réécrire le code du travail pendant deux ans et ne touche donc pas au code du travail. Cette entreprise de réécriture se fera à droit constant. La disposition avec laquelle vous exprimez votre désaccord, mesdames Olivier et Crozon, correspond en principe au droit actuel.

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Profitons de ce projet de loi pour la supprimer ! Souvenons-nous des hôtesses de l'air qui refusaient de porter le voile pour un vol vers Téhéran : Air France a pu trouver des volontaires, mais s'il n'y en avait pas eu, ces hôtesses auraient pu perdre du salaire.

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Si elles refusent de porter le voile, ce n'est justement pas par conviction religieuse !

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Vous souhaitez donc que nous proposions de supprimer le onzième alinéa du premier article ?

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Absolument. Il n'est pas nécessaire de stigmatiser une nouvelle fois le fait religieux.

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Nous lisions cette disposition comme une garantie apportée au salarié d'exprimer ses convictions religieuses. Il n'en reste pas moins que l'opportunité de maintenir la dimension religieuse dans la loi se pose.

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J'ajoute qu'il a été souligné lors de nos travaux que cette disposition a pour effet de créer une différence entre les salariés du privé et ceux du public. Il est donc décidé de proposer la suppression du onzième alinéa de l'article 1er.

Ce rapport présente le grand avantage de mettre en valeur le travail effectué par la Délégation, en rappelant les textes de loi relatifs au travail sur lesquels elle est intervenue et a obtenu des améliorations. Nous veillons à ce que l'on ne revienne pas sur ces progrès et tâchons d'en défendre de nouveaux.

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La dernière recommandation propose d'insérer le terme d'« actives » dans le titre du projet de loi. Je soutiens cette suggestion et souhaiterais même inverser les mots « actifs » et « entreprises ». Le projet de loi viserait alors à « instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les actives et les actifs et pour les entreprises ».

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Les libertés concernant plutôt les entreprises et les protections les salariés, peut-être serait-il plus opportun d'en rester à la recommandation initiale.

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Lorsqu'un accord sur l'égalité professionnelle est conclu dans une entreprise, a-t-elle l'obligation d'élaborer un rapport de situation comparée ?

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La loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, qui transposait l'ANI de janvier 2013, a créé une base de données unique (BDU) pour que les entreprises ne se perdent plus dans les demandes d'information. Néanmoins, la partie relative à l'égalité professionnelle et au rapport de situation comparée (RSC) n'avait pas été insérée dans la BDU. La loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi, dite loi Rebsamen, a procédé à cette intégration, en reprenant les différents items du RSC dans la BDU ou base de données économiques et sociales (BDES), et la Délégation aux droits des femmes s'était d'ailleurs mobilisée pour la préservation des fonctions du RSC.

Je rappelle que l'employeur d'une entreprise de plus de 50 salariés devait établir un rapport de situation comparée, et mettre à disposition des données et un diagnostic de situation comparée. Une fois les données connues, la consultation débutait, puis les négociations s'engageaient pour définir un plan d'action ou un plan unilatéral en l'absence d'accord. Nous souhaitons clarifier et remettre de l'ordre dans les différentes étapes du processus, car les dispositions issues de la loi Rebsamen ont conduit à un schéma compliqué dans lequel l'employeur est censé présenter à la consultation un plan en principe issu de la négociation. Nous pourrions également introduire la notion de bilan, voire de rapport, de situation comparée.

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Pour les TPE, les femmes peuvent être accompagnées par une personne mandatée et nommée par un syndicat pour les négociations, mais cette opportunité existe au niveau de la branche et non à celui de l'entreprise, n'est-ce pas ?

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Pas tout à fait. Les TPE emploient majoritairement des femmes, bien que nous ignorions la proportion exacte. Le mandatement d'un salarié constitue l'une des avancées du texte. Beaucoup d'entreprises ne comptent pas de délégué du personnel, y compris dans les moyennes et les grosses entreprises où les salariés pouvant assumer cette fonction craignent les discriminations. Dans les petites entreprises, le projet de loi prévoit la possibilité pour un salarié à l'intérieur de l'entreprise d'être mandaté par un membre extérieur nommé par un syndicat. Le salarié pourra, à l'intérieur de l'entreprise, demander des conseils au syndicat qu'il aura mandaté pour donner son accord au résultat de la négociation – il s'agissait là d'une revendication de la CFDT. Dans certaines branches, les TPE ne seront pas représentées alors qu'elles emploient des salariés et notamment des femmes. Je veux bien suivre le pari du Gouvernement et inciter au développement de la discussion, mais chacun doit démontrer une culture de la négociation : on doit reconnaître le rôle des syndicats et ceux-ci doivent accepter de négocier, c'est-à-dire de gagner sur certains points et de perdre sur d'autres.

La Délégation adopte le rapport d'information et les recommandations ci-après.

1. – Pour assurer l'égalité professionnelle, la Délégation aux droits des femmes demande l'élaboration systématique d'une étude d'impact chiffrée sur les conséquences des projets de loi et la mise en oeuvre effective des dispositions prévues en la matière par la circulaire du Premier ministre du 23 août 2012.

Principes essentiels du droit du travail

2. – Mieux définir le principe d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (en réécrivant le principe défini au 4° de l'article 1er du projet de loi de la façon suivante : « Le principe d'égalité s'applique dans l'entreprise. L'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes doit y être assurée. Ce principe ne fait pas obstacle à l'intervention, de manière temporaire, de mesures positives visant à corriger des inégalités entre les femmes et les hommes dans la vie professionnelle, dans les conditions prévues par la loi. »).

3. – Prendre en compte l'accès à l'emploi dans la définition du principe essentiel du droit du travail relatif à l'interdiction des discriminations (en réécrivant ainsi le principe défini au 5° : « Les discriminations sont interdites dans l'accès à l'emploi et dans toutes les relations de travail. »).

4. – Supprimer le 6° de l'article 1er du projet de loi, aux termes duquel « La liberté du salarié de manifester ses convictions, y compris religieuses, ne peut connaître de restrictions que si elles sont justifiées par l'exercice d'autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l'entreprise et si elles sont proportionnées au but recherché ».

5. – Poser un principe plus ambitieux en matière d'articulation entre vie professionnelle et vie personnelle et familiale, également plus conforme aux textes européens et internationaux (en réécrivant le principe défini au 9 de l'article 1er du projet de loi, par exemple de la façon suivante : « L'articulation de la vie professionnelle et de la vie personnelle et familiale est prise en compte dans la relation et l'organisation du travail »).

6. – Réécrire le principe concernant la grossesse et la maternité, pour ne pas en présenter une vision négative et pour mieux tenir compte du droit existant (en réécrivant le principe défini au 17° de l'article 1er du projet de loi de la façon suivante : « Pendant la grossesse et la maternité, les salariées bénéficient de mesures spécifiques, notamment en cas de risques pour leur santé et leur sécurité. La salariée a droit à un congé maternité pendant la période précédant et suivant son accouchement. Pendant la grossesse et la maternité, la salariée ne peut être licenciée, sauf exceptions prévues par la loi »).

7. – Réécrire le principe relatif au principe d'égalité de rémunération pour viser explicitement les inégalités entre les femmes et les hommes (en réécrivant le principe défini au 31° de l'article 1er du projet de loi de la façon suivante : « L'employeur assure l'égalité de rémunération pour un même travail ou un travail de valeur égale entre les femmes et les hommes », et non plus « entre les salariés »).

8. – Prévoir la composition paritaire de la commission de refondation qui sera chargée de proposer une réécriture de la partie législative du code du travail, ainsi que l'association du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle (CSEP) aux travaux de la commission de refondation, en complétant le premier alinéa de l'article 1er par la phrase suivante : « Elle comprend un nombre égal de femmes et d'hommes ».

Temps de travail et de repos

9. – Rétablir un délai de prévenance de sept jours pour les modifications dans la répartition de la durée du travail intervenant dans le cadre des contrats à temps partiel, avec possibilité de dérogation limitée à trois jours dans le cadre d'un accord collectif.

10. – Prévoir que les accords de branche ne peuvent pas moduler la majoration de la rémunération des heures complémentaires correspondant à un temps de travail additionnel compris entre le dixième et le tiers du temps de travail total en dessous de 25 % du prix de l'heure de base.

11. – Établir un bilan détaillé, quantitatif et qualitatif, des accords de branche prévoyant des dérogations aux 24 heures, et supprimer le caractère supplétif de la loi pour la fixation de la durée minimum du temps de travail lors d'un contrat à temps partiel.

12. – Modifier la rédaction du projet de loi pour faire référence aux « congés d'articulation entre vie familiale et vie professionnelle » à l'article 3 du projet de loi, et remplacer le mot de « conciliation » par celui d' « articulation » à l'article 2.

Négociation collective sur l'égalité professionnelle

13. – Renforcer les moyens des DIRECCTE afin d'accompagner, de contrôler et de sanctionner les entreprises en matière d'égalité professionnelle.

14. – Prévoir que la négociation sur l'égalité professionnelle et la négociation sur les rémunérations ne puissent devenir triennales à la suite d'un accord de branche que si l'entreprise a conclu un accord sur l'égalité.

15. – Former les partenaires sociaux aux spécificités de la négociation sur l'égalité professionnelle en utilisant les nouvelles possibilités offertes par le projet de loi.

16. – Veiller à l'équilibre de la représentation des TPEPME où les femmes sont majoritairement représentées pour les négociations des accords collectifs de branche.

17. – Harmoniser le vocabulaire utilisé pour nommer les éléments figurant dans la BDES et la procédure de consultation et de négociation.

18. – Introduire dans les éléments soumis par l'employeur à la consultation et à la négociation, le plan d'action de l'employeur et en définir le contenu (l'ancien RSC contenait une analyse de la situation dans l'entreprise et un plan d'action, celui-ci doit aussi être soumis pour avis lors de la phase de consultation et lors de la négociation entre les partenaires).

19. – Porter à la connaissance des salarié.e.s non seulement la synthèse du plan d'action unilatéral de l'employeur en cas d'échec de la négociation mais aussi la synthèse de l'accord lui-même en cas de succès.

20. – Renforcer le positionnement et les moyens du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle et prévoir la publicité systématique de ses travaux.

Compte personnel d'activité (CPA) et médecine du travail

21. – Améliorer les modalités d'abondement du compte personnel de formation (CPF), qui sera intégré dans le compte personnel d'activité (CPA), pour les salarié.e.s à temps partiel.

22. – Veiller à la prise en compte des risques pour la santé et la sécurité des salarié.e.s dans les métiers majoritairement exercés par les femmes dans le cadre de la réforme de la médecine du travail.

Discriminations, harcèlement sexuel et agissements sexistes

23. – Harmoniser les règles de preuve en matière de discrimination et de harcèlement sexuel ou moral (en modifiant l'article L. 1154-1 du code du travail, relatif à la preuve du harcèlement sexuel ou moral, en prévoyant que la personne candidate à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou lela salarié.e « présente des éléments de fait laissant supposer » l'existence d'un harcèlement sexuel ou moral (et non plus « établit des faits »), en reprenant ainsi la formulation retenue à l'article L. 1134-1 concernant les discriminations).

24. – Prévoir l'obligation pour l'employeur de rembourser à Pôle emploi les indemnités chômage versées à la personne licenciée suite à un traitement discriminatoire ou à un harcèlement moral ou sexuel (en complétant le présent projet de loi par un article additionnel reprenant les dispositions qui avaient été adoptées par l'Assemblée nationale et le Sénat en 2014 dans le cadre de la loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, à l'article 7, censuré uniquement pour des raisons de procédure parlementaire).

25. – Instaurer une « indemnisation-plancher » correspondant aux salaires des douze derniers mois pour tout.e salarié.e licencié.e en raison d'un motif discriminatoire (sexe, grossesse, situation familiale, etc.) ou d'un harcèlement sexuel (en complétant le projet de loi pour réintroduire les dispositions qui avaient été adoptées par l'Assemblée nationale et le Sénat en 2014 dans le cadre de la loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, à l'article 10, censuré pour des raisons de procédure).

26. – Préciser le régime de la preuve applicable aux actions en justice relatives aux agissements sexistes en milieu professionnel – régime de l'aménagement de la preuve, comme pour les discriminations liées au sexe (en modifiant l'article L. 1144-1 du code du travail, pour faire référence au nouvel article L. 1142-2-1 relatif à l'interdiction des agissent sexistes tel qu'issu de la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi).

27. – Prévoir l'obligation de rappeler dans le règlement intérieur des entreprises les dispositions prévues par la loi en matière d'agissement sexiste, comme c'est le déjà le cas pour les dispositions légales en matière de harcèlement sexuel (en modifiant en ce sens le 2° de l'article L. 1321-2 du code de travail, pour faire référence au nouvel article L. 1142-2-1 relatif à l'interdiction des agissements sexistes).

28. – Inclure les risques liés aux agissements sexistes dans les principes généraux de prévention sur le fondement desquels l'employeur met en oeuvre les mesures nécessaires pour protéger la santé des salarié.e.s. (en complétant en ce sens le 7° de l'article L. 1321-2 du code de travail, s'agissant des relations sociales et de l'influence des facteurs ambiants, pour faire référence aux risques liés aux agissements sexistes, comme c'est déjà le cas pour le harcèlement sexuel).

29. – Inclure la question du sexisme et des violences au travail dans le champ de la négociation collective sur l'égalité professionnelle.

30. – Modifier le titre du projet de loi pour ne pas « invisibiliser » les femmes, en faisant également référence aux « actives ».

La séance est levée à 14 heures 50.