La séance est ouverte à onze heures.
Nous recevons aujourd'hui, Monsieur Patrick de Schrynmakers qui était, jusqu'au mois de janvier dernier, secrétaire général de l'Association européenne de l'aluminium (AEA ou EAA), une organisation professionnelle qui a son siège à Bruxelles.
Il est très important pour notre commission d'entendre des experts, car ils sont a priori indépendants des grands groupes industriels même s'ils poursuivent souvent des activités de consultant. Leurs réflexions nous sont apparues comme complémentaires des propos tenus devant nous par les industriels et les syndicalistes. Ils ont des vues évidemment plus larges, qui tracent des perspectives économiques et sociales globales sur les filières retenant notre attention.
Si l'on se réfère, Monsieur de Schrynmakers, à certaines de vos déclarations relatées par la presse lorsque vous étiez encore en fonction, l'optimisme ne serait pas de mise, au moins pour la production d'aluminium primaire en Europe !
Au nom de votre organisation, vous avez estimé qu'en raison de la hausse du coût de l'électricité, près des deux tiers des usines européennes sont menacées de fermeture. Force est de constater que des sites importants ont déjà été démantelés. Rio Tinto a agi ainsi au Royaume-Uni et un autre géant, l'américain Alcoa, a fait de même à en Italie.
Il est exact que beaucoup de contrats de long terme avec les fournisseurs d'énergie arrivent à échéance et les nouveaux prix proposés aux industriels « électro-intensifs » ont parfois doublé !
Par ailleurs, l'Association européenne de l'aluminium a dénoncé les « surcoûts » qui seraient supportés par les producteurs au titre de la politique de l'Union européenne sur les émissions de CO2, entraînant une augmentation de 10 à 12 % des coûts de production !
Nous allons donc vous entendre avec un grand intérêt sur ces points.
Cela dit, il semble que la Commission européenne ait pris conscience de certains de ces problèmes, sans doute bien tardivement.
Nous avons rencontré la semaine dernière le Commissaire européen Tajani qui, lorsqu'il nous a présenté les grandes lignes de son plan acier, a insisté sur la possibilité offerte aux sidérurgistes de conclure des contrats d'électricité à long terme, c'est-à-dire, selon nous, au-delà du butoir de cinq ans, et renouer au moins quelque peu avec ce qui était possible autrefois. Qu'en sera-t-il pour le secteur de l'aluminium, pour lequel l'énergie représente souvent 40 % des coûts de production ?
Nous nous interrogeons également sur le devenir du recyclage de ce métal et des productions dites de deuxième fusion, ainsi que sur les perspectives des secteurs d'aval, souvent dynamiques, de la transformation.
En outre, qu'en est-il exactement du dumping de certains pays émergents ? Quels types de produits sont concernés ? Pouvez-vous nous donner certains exemples « criants » ?
Je crois qu'à partir de la problématique posée par la vente par Rio Tinto de son unité de Saint-Jean-de-Maurienne, on peut aussi s'interroger sur les stratégies actuelles des grands groupes mondialisés industriels et aussi miniers.
M. Patrick de Schrynmakers prête serment.
Je suis né en Belgique, j'ai vécu en Afrique pendant les dix premières années de ma vie, puis, en tant qu'ingénieur commercial de l'École de Commerce de Solvay, j'ai dédié toute ma vie à l'industrie. J'ai d'abord travaillé pour Solvay au Brésil dans la finance puis pour la réorganisation de sociétés. Je suis ensuite rentré en Europe pour m'occuper d'une filature de lin pendant quinze ans. J'ai également créé de nouveaux produits composites pour l'industrie automobile – j'ai fait une alliance avec La Chanvrière de l'Aube – et, au cours des douze dernières années, jusqu'en janvier dernier, j'ai dirigé l'Association européenne de l'aluminium.
Celle-ci regroupe plus de 85 % de l'industrie de l'aluminium, dont la totalité des smelters – ou fonderies –, 90 % du laminage et plus de 75 % de l'extrusion.
Je me suis battu pendant douze ans à Bruxelles avec toute mon équipe, qui a compté jusqu'à 20 personnes, pour que la Commission européenne se dote d'une politique industrielle doublée d'une politique énergétique, les deux allant de pair.
Ces politiques ont enfin gagné en importance, la crise aidant, mais la partie est loin d'être gagnée. Il est donc essentiel que la France les influence et en encourage le développement rapide. Les grandes lignes de la politique énergétique européenne se décidant à Bruxelles, je ne puis que vous inviter à suivre activement ce qui s'y passe.
Sans politique énergétique digne de ce nom, l'industrie européenne – notamment l'industrie lourde et celle des matières premières, dont une grande partie est très intensive en énergie – est condamnée. C'est également le cas d'une partie de l'industrie française.
La Commission s'est finalement engagée dans une réflexion stratégique sur l'avenir des filières industrielles européennes incluant les multinationales, les grandes entreprises et les PME. Mais cette réflexion mettra du temps pour déboucher sur des mesures concrètes, et beaucoup de mal a déjà été fait.
Après des années de lutte pour faire comprendre à la Commission l'impact crucial de la législation européenne sur notre industrie, deux secteurs industriels européens ont bénéficié d'un projet financé par la Commission – d'un montant d'environ 1 million d'euros – : le raffinage de pétrole et l'aluminium. Jusqu'ici, la Commission s'était en effet principalement intéressée au charbon et à l'acier.
Il s'agit d'une étude intitulée « Fitness Check » – ou « vérification de santé ». Concernant l'aluminium, le développement du projet a été confié au Centre for European Policies Studies (CEPS), un institut de recherche travaillant pour la Commission sur l'aluminium et maintenant aussi sur l'acier. Ce projet commence par une description chiffrée du secteur et de sa chaîne de valeur – ce qui a déjà été fait pour l'aluminium – et se poursuit –aujourd'hui – par une analyse de l'impact de l'énergie sur le secteur. Il fera ensuite l'objet au cours du mois de juin d'une étude des impacts de la concurrence et du changement climatique. Les vacances d'été seront consacrées aux impacts environnementaux, puis aux aspects relatifs au commerce extérieur, ainsi qu'aux politiques de droits de douane et autres.
Ce travail devrait être fini fin septembre. Si le rapport décrira les impacts de la législation, il ne proposera en aucun cas une liste de recommandations. En octobre, la direction générale Entreprises et industrie (DG ENT) de la Commission devra analyser le rapport et proposer des mesures de soutien à l'industrie. Le Commissaire Tajani, est pressé car il compte sur ce travail pour pouvoir alimenter le premier Sommet européen dédié à la compétitivité de l'industrie, prévu pour février 2014. Cela devrait retenir toute l'attention de votre commission et de votre ministre Arnaud Montebourg.
Il est important de comprendre que la direction générale Concurrence (DG COMP) n'a pas voulu jusqu'à présent définir des lignes claires en matière de soutien à l'industrie qui s'appliqueraient à tous les pays. Les États membres ont donc gardé la main dans ce domaine et deux pays en profitent largement : l'Allemagne et, dans une moindre mesure, la Norvège. Beaucoup de pays tirent parti de cette situation pour ne rien faire, ce qui est dramatique pour l'évolution de l'industrie.
Le problème le plus critique est l'impact que le système ETS – Emissions Trading Scheme ou système communautaire d'échange de quotas d'émission de carbone – a sur les prix de l'électricité, ou ce que nous appelons l'impact indirect de l'ETS sur l'industrie. Cet impact va jusqu'à huit fois celui des émissions générées par notre industrie dans les électrolyses et usines de fabrication d'alumine. La DG COMP ne comprend pas assez les conséquences que cela a sur l'industrie intensive en énergie. De plus, elle s'occupe essentiellement des problèmes de compétitivité intra-européenne, alors que dans notre secteur, cela n'a pas d'importance, même si le prix de l'électricité peut être très différent selon les pays. En revanche, elle se désintéresse de la concurrence extra-européenne, ce qui devrait pourtant être l'essentiel de ses préoccupations !
Dans le passé, la plupart des smelters avaient des contrats à long terme avec les producteurs d'énergie électrique qui, lorsqu'ils avaient un projet ambitieux, souhaitaient voir une industrie de l'aluminium s'installer près d'eux – la dernière usine d'aluminium construite en Europe l'a été à Dunkerque, à proximité de la centrale nucléaire et tourne jour et nuit, utilisant une part importante de la capacité d'EDF Dunkerque. En effet, un smelter fonctionne toute l'année et a une consommation importante et invariable. Or, produire de l'énergie constante coûte jusqu'à dix-huit fois moins que de l'énergie variable. La Commission n'a jamais intégré ces données.
L'industrie de l'aluminium a décidé, dès le début, d'accélérer le programme « Fitness Check ». Elle n'a plus rien à perdre – nous avons encore une capacité de 3,1 millions de tonnes en Europe, sachant que seules 2 millions de tonnes sont produites et que si les toutes les entreprises dont les contrats venus à échéance avaient arrêté leur production, on en serait à 1 million de tonnes. Cependant, quelques usines continuent à tourner, même à perte, en espérant que le mauvais cap pourra être passé bientôt.
Or, pour les deux smelters restant en France, les contrats à long terme arrivent à échéance en 2014 pour Saint-Jean-de-Maurienne et 2017 pour Dunkerque.
Ces contrats d'électricité à long terme ne sont plus à l'ordre du jour pour les producteurs d'électricité, pour plusieurs raisons : la DG COMP s'y oppose, principalement pour des motifs nébuleux et par mauvaise compréhension des mécanismes sous-tendus, alléguant la « forclosure » ou forclusion ; surtout, le climat d'incertitude législatif européen est tel que les producteurs d'électricité privés ne veulent plus investir massivement et, partant, ne prennent plus de risques ; pour eux, les contrats à long terme avec l'industrie se justifient principalement pour aider à financer des projets de développement ambitieux, qu'ils ne peuvent avoir dans ce contexte. Bref, il n'y a pas de climat favorable au réinvestissement.
De plus, les prix de l'électricité européens souffrent d'un manque de concurrence, car il n'y a pas d'interconnexion entre les réseaux – nous la réclamons pourtant depuis des années. En fait, la concurrence est aux mains d'oligopoles. Il est grand temps d'y remédier et j'espère que vous y contribuerez !
Si certains pays continuent d'une façon ou d'une autre de privilégier leur industrie, qu'ils considèrent à raison comme stratégique, en continuant à appliquer des tarifs spéciaux à certaines entreprises, le pire est que la Commission s'intéresse de très près à ces pratiques, les condamne et applique des sanctions financières lourdes. D'autres pays compensent leur industrie pour le surcoût électrique, c'est le cas de la Norvège et de l'Allemagne, même si celle-ci a été incapable pendant un an et demi de compenser le coût de l'ETS car la DG COMP s'y est opposée. Par ailleurs, les directives en la matière ont accouché d'une souris.
En Italie, une fermeture définitive a été décidée en raison d'un système de compensation que la DG COMP a critiqué, forçant Alcoa à rembourser 450 millions d'euros, au motif que le schéma mis en place par le gouvernement italien était inacceptable au regard des règles européennes – à charge pour le consommateur industriel de payer l'addition. C'est absurde !
Cela est d'ailleurs un drame pour la Sardaigne – sachant que l'île vivait du smelter qu'elle abritait et que les deux centrales électriques ont ensuite été arrêtées, ce qui a posé des problèmes d'approvisionnement en électricité et coûté 40 % de l'emploi local. La fermeture du site de Rio Tinto dans le nord de l'Angleterre a été également catastrophique pour l'économie locale. Or la Commission n'a pas l'air de s'en soucier.
En poussant à une harmonisation des tarifs électriques européens, celle-ci entraîne par conséquent l'industrie électro-intensive dans la débâcle et le chaos. Il est vital de comprendre qu'on ne peut pas appliquer les mêmes tarifs d'électricité à toutes les catégories de consommateurs, car la structure des coûts est très différente pour le producteur d'énergie d'un client-type à un autre. Dans le passé, les États en tenaient compte et adoptaient des tarifs spéciaux pour les gros consommateurs.
Les tarifs électriques devraient être en accord avec les profils de consommation, ce que l'Europe tend à refuser jusqu'à présent. C'est une partie du noeud du problème.
Rappelons que les smelters européens ont aidé les distributeurs à éviter les coupures de courant ou « blackouts » – qui peuvent en quelques heures s'étendre à l'ensemble de l'Europe –, en coupant l'alimentation des producteurs d'aluminium pour quelques heures et en offrant une compensation à l'industrie pour le manque à gagner. Sans électro-intensifs interruptibles, comme l'aluminium, plus de sécurité d'approvisionnement !
Les sociétés d'aluminium qui ont été sollicitées dans le cadre du « Fitness Check », – une dizaine d'usines d'aluminium primaire, dont les deux françaises – ont communiqué à la Commission toutes leurs données de coûts et les détails de leurs contrats d'électricité. Elles ont décidé de jouer la transparence totale, et ce, quels que soient le pays ou la structure de l'actionnariat.
Cela n'est pas le cas de l'acier, dont le secteur bénéficiait déjà de l'organisation de tables rondes avec la Commission, ses grands patrons et les syndicats. Or, comme la Commission ne voyait pas de progrès, ce métal a été rajouté en février 2013 dans les secteurs bénéficiant d'un « Fitness Check ». Mais le secteur reste très divisé au niveau européen.
D'ailleurs, M. Tajani a félicité l'aluminium lors du dernier « European Business Summit » à Bruxelles et a blâmé l'acier pour son manque de collaboration et de transparence.
Les problématiques du recyclage, nécessaires à la conservation des matières premières, sont essentielles pour l'industrie de l'aluminium et sont également au centre des préoccupations de Bruxelles. Mais il faut mettre un terme au mythe d'une industrie circulaire, à laquelle celle-ci rêve. L'aluminium est un métal jeune, en pleine expansion, qui a commencé à être produit industriellement en 1888 en France et aux États-Unis et s'est développé dans le domaine civil après la Seconde Guerre mondiale. On le retrouve dans une multitude d'objets possibles.
Je suis favorable à la récupération de tout l'aluminium en fin de vie ou scraps. Alors que 35 % du coût de production d'aluminium primaire en moyenne mondiale sont constitués par l'électricité, recycler de l'aluminium consomme 5 % de l'énergie nécessaire pour cette production. D'ailleurs, celui-ci est un des métaux dont le recyclage demande le moins d'énergie, nettement moins que l'acier.
Chaque kilo de ce métal est un trésor, un concentré d'énergie européenne chère, que nous devons garder. Or, alors que l'Europe importait traditionnellement 400 000 à 500 000 tonnes de scraps d'aluminium, principalement de Russie, elle en exporte aujourd'hui – et ce, à bon marché – près d'un million de tonnes, essentiellement vers la Chine et l'Inde.
La Chine subventionne l'importation de ces scraps lorsqu'elle est à cours d'énergie, car elle peut ce faisant assurer la production d'aluminium nécessaire à la réalisation de ses plans avec seulement près de 5 % de l'énergie nécessaire à la production équivalente d'aluminium primaire – sans parler des incitations fiscales. En une semaine, elle a ainsi envoyé 200 personnes en Europe, qui ont collecté 500 000 tonnes de scraps. Or la Commission se veut le défenseur du marché libre de ces produits, ce qui est une ineptie.
D'ailleurs, la Chine, qui est le plus grand producteur et bientôt consommateur d'aluminium dans le monde, investit la plus grande partie de sa production de ce métal dans des applications à longue durée de vie, comme le bâtiment et les machines, et génère donc très peu de scraps. Tandis qu'en Europe, l'aluminium sert beaucoup à la fabrication de canettes ou de voitures, dont le recyclage intervient respectivement deux mois ou dix-huit ans plus tard – sachant que ces dernières, qui contiennent 140 et bientôt 160 ou 170 kg de ce métal, sont souvent démantelées hors du continent, ce qui accroît encore les exportations en la matière.
L'aluminium bénéficie en Europe d'un système de droits d'importation de 4 % sur l'alumine – sachant que quasiment toute celle-ci provient de pays ayant des accords spéciaux avec l'Europe, mais que cela posera un gros problème pour l'Islande si elle rejoint l'Union européenne –, 6 % sur le métal et 7,5 % sur les produits semi-ouvrés – les droits étant plus importants sur les produits à plus forte valeur ajoutée. Plus de 80 % de l'aluminium importé en Europe sont exonérés de droits de douane, car venant de pays de la zone « Afrique-Caraïbes-Pacifique » (ACP) notamment, les seuls pays payant ceux-ci étant principalement la Russie et le Moyen-Orient. Cela génère des tensions importantes dans l'industrie : j'ai donc obtenu, il y a quelques années, en accord avec la Commission, de réduire les droits de douane sur l'importation de métal primaire non-allié de 6 à 3 %.
La tendance actuelle à la scission de groupes très intégrés est regrettable. Norsk Hydro constitue à et égard une exception, même s'il est en train de se défaire de l'activité d'extrusion ; il en est de même d'Alcoa, dans une moindre mesure. Je suis désolé de voir notamment que Péchiney, ce précurseur et leader de technologies, a été purement et simplement démantelé !
Par ailleurs, j'ai entrepris un second ajustement, il y a environ deux ans, consistant à réduire les droits d'importation de 6 à 4,5 % sur une partie de l'aluminium primaire allié, les pains d'aluminium servant au laminage et les billettes d'extrusion utilisées pour le filage. Il devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2014 : la France sera consultée ; j'espère que vous soutiendrez cette mesure, qui permettra de conserver un climat d'entente dans la filière, lequel est vital.
De nombreux pays ont adopté des droits de douane prohibitifs sur leur aluminium fin de vie, comme un impôt à l'exportation de 50 % Russie. D'autres, comme l'Ukraine, en ont interdit l'exportation. La Commission est de plus en plus consciente de l'importance de garder les matières recyclables en Europe, mais ne peut se décider à suivre l'exemple du reste du monde, qui soit accorde des subventions, soit octroie des avantages fiscaux ou diverses distorsions de concurrence non tarifaires.
Un des projets de la DG COMP est de supprimer les procédés anti-dumping, ce qui est un scandale, alors qu'on devrait au contraire augmenter les droits existants. Nous sommes la risée du monde !
J'ai, avec l'intermédiaire d'Eurométaux, aidé certains secteurs à concevoir des dossiers anti-dumping à coût modéré, mais l'Europe met deux ans au minimum pour se doter de dispositifs en la matière contre six mois pour les États-Unis. De plus, les critères retenus sont si sévères en Europe que 85 % des dossiers sont refusés pour insuffisance de dommage, ce qui est scandaleux. Il faut que les pays fassent pression sur la Commission pour que cela cesse.
L'aluminium est encore en plein développement, stratégiquement essentiel et sa filière de production trouve de plus en plus de ramifications et de nouvelles applications dans les produits du futur. Il n'est guère d'objet de haute technologie dans lequel il ne soit pas présent. La France se doit de maîtriser l'ensemble de la chaîne de valeur dans ce domaine, ce qui est essentiel à son indépendance.
D'autant qu'elle a été pionnière dans ce domaine, avec les États-Unis, et a bénéficié d'un avantage technique sur l'ensemble du monde – qu'elle est en train de perdre. Or plus les entreprises sont petites, plus il est difficile de les fédérer, alors que c'est pour elles que le besoin est le plus grand. Cela dit, la voix des PME a plus de portée que celle des grandes, autant vis-à-vis des responsables politiques que de la Commission.
En France, il serait très dommageable pour son économie de n'en faire profiter que les autres et plus encore de perdre sa position de force dans ce domaine.
L'AEA est là pour vous aider à Bruxelles, via l'Association française de l'aluminium (AFA) si nécessaire, pour tenter d'influer sur les aspects législatifs, qui pourraient se révéler désastreux pour l'industrie de l'aluminium – près de 80 % des projets législatifs en Europe proviennent des instances européennes elles-mêmes, bien que, parfois, il est vrai, sur recommandation d'un pays ou d'un autre. Il est toujours plus facile de prévenir que de guérir.
À cet égard, imaginer qu'on va taxer des produits importés ne satisfaisant pas aux impératifs environnementaux européens est une illusion, car il existe autant de différences d'impacts environnementaux que de smelters, d'autant que l'on ne peut établir une traçabilité de l'aluminium et qu'il est impossible de distinguer l'aluminium primaire de l'aluminium recyclé. Quelle taxe appliquer ainsi à un vélo, qui se compose de tant de matériaux différents d'origines si diverses, car taxer seulement les matières premières reviendrait à perdre une position concurrentielle sur les produits finis, et qu'il faudrait aussi protéger les produits finis pour sauvegarder notre industrie ?
La Commission européenne a fait le contraire de ce qu'il fallait faire en matière énergétique, sous couvert de très bons principes. Il serait souhaitable à cet égard que les responsables politiques aient eu quelques années d'expérience pratique dans la vie des affaires ou industrielle. Je suis moi-même pour l'écologie, mais pour une écologie raisonnée, respectueuse de l'équilibre des marchés mondiaux.
Cela étant, si l'on résout le problème du coût de l'énergie en France et en Europe, on pourra développer une industrie compétitive, car nous avons tous les atouts pour cela par ailleurs.
Merci beaucoup pour vos propos, qui vont dans le sens de ce que nous pensons.
La France est-elle toujours à la pointe dans les recherches sur l'aluminium ? À cet égard, on dit que plus de la moitié de l'aluminium produit dans le monde est encore fabriquée selon des process qui résultent de brevets « Aluminium Péchiney (AP) ».
Quels sont votre sentiment et vos analyses sur la disparition d'un groupe aussi puissant que Péchiney pendant toute une époque ? Comment expliquez-vous un tel désastre, qui a abouti à l'explosion de nombreuses activités, pour la plupart passées sous le contrôle d'intérêts étrangers ? Les pouvoirs publics français auraient-ils dû suivre les mises en garde de M. Jean Gandois, qui dirigea cette entreprise pendant huit ans ?
Par ailleurs, en Chine, voire chez d'autres producteurs asiatiques, existe-t-il des produits fabriqués selon des normes techniques en contradiction flagrante avec les normes internationalement admises, notamment les normes européennes ?
Plus généralement, si les capacités de production d'aluminium primaire continuent à diminuer en Europe, n'existe-t-il pas à terme un risque de dépendance qui mettrait en péril les activités d'aval, c'est-à-dire de transformation, dont l'Europe de l'aéronautique, du nucléaire ou des transports a pourtant besoin ?
Enfin, certaines mises en cause ont été parfois formulées à l'égard de l'utilisation de l'aluminium. Où en est-on de ces questions d'ordre sanitaire voire de santé publique ? Relèvent-elles plus de la polémique que de la réalité ? Ces informations ont-elles eu des conséquences sur certains métiers, voire des entreprises relevant de la filière au sens large ?
Pour la production d'aluminium primaire, ce qui reste de Pechiney est encore à la pointe des procédés actuellement utilisés, mais je ne sais pour combien de temps encore.
Cependant, apparaissent de nouvelles façons de produire de l'aluminium que celle inventée en 1885, même s'il faudra toujours de l'électricité pour ce faire. Il existe deux axes de recherche dans ce domaine. Le premier porte sur les anodes, qu'on utilise pour la réduction de l'alumine : jusqu'ici en carbone, elles pourraient devenir inertes – la Russie prétend qu'elle disposera de cette technologie en 2015, ce dont je doute. Le second – que l'on appelle, je crois, la carboréduction – permettrait d'avoir des unités moins grandes tout en ayant un bien meilleur rendement et une consommation énergétique moindre : il s'agirait d'utiliser des fours électriques comme ceux employés pour produire des alliages et du carbure de calcium. Je ne suis donc pas pessimiste sur l'avenir de l'aluminium.
S'agissant de la transformation, le maintien de la chaîne de valeur était l'atout principal de Pechiney. Cela dit, Constellium continue à poursuivre une partie de la recherche de ce dernier sur les applications. L'aluminium s'allie toujours avec d'autres métaux, dans des proportions allant de 3 à 8 % généralement, pour avoir une bonne ductilité ou bien pénétrer dans les moules. Or la force de Péchiney était une organisation régionale permettant de développer les alliages les plus aptes à mettre en valeur le potentiel de l'aluminium. Je rappelle, à cet égard, qu'en Italie, qui est un des plus grands recycleurs d'aluminium au monde, les bassins de production sont régionalement organisés avec les industries.
Si Constellium a décidé de vendre les filages de Ham et Saint-Florentin, essentiellement destinés au secteur du bâtiment – la concurrence est telle qu'il est difficile pour la France de garder des positions dans ce domaine –, il conserve heureusement les secteurs de l'aéronautique, de l'automobile et de l'emballage, qui sont en croissance et d'avenir.
Cela étant, je n'ai jamais compris que la France vende Péchiney à Alcan, alors que sa taille était selon moi suffisante.
Prévaut malheureusement le principe selon lequel il faut se concentrer sur son coeur de métier. L'industrie de l'aluminium, qui a pendant des années maîtrisé l'ensemble de la chaîne de valeur, a ainsi fait l'objet d'une concentration importante qui se résorbe actuellement.
Quant à la Chine, elle est bien obligée de faire semblant de respecter nos normes. Au cours des douze ans où j'ai dirigé l'AEA, je l'ai vue adopter de plus en plus celles-ci. Mais j'ai eu beaucoup de difficultés à imposer des normes mondiales. Cela dit, je ne pense pas que les normes soient la façon adéquate de protéger une industrie : l'innovation est beaucoup plus utile à cet effet. C'est la raison pour laquelle l'Italie, qui est dans une situation moins favorable que la France, se défend pas mal dans ce domaine, grâce notamment à des groupements entre les producteurs et les utilisateurs, voire les clients.
En ce qui concerne les questions d'ordre sanitaire, il y a deux catégories de terroristes intellectuels. La première est constituée par des chercheurs, qui inventent des dangers pour trouver des financements à leurs recherches – nous avons nous-mêmes financé beaucoup d'études dans ce domaine. Or, en dehors de personnes ayant une déficience très grave de la moelle épinière, on ne connaît pas de cas où l'aluminium ait pénétré jusqu'au cerveau. Il faut savoir que 8 % de la croûte terrestre est formée d'aluminium, ce qui en fait le composant le plus abondant après l'oxygène et le sable ; nos légumes en contiennent de même que le thé, qui en concentre plus que tous les autres aliments : tous les Anglais sont-ils pour autant malades ?
La deuxième catégorie est constituée par nos concurrents. L'aluminium fait en effet de l'ombre à l'acier ou au cuivre. Or la plupart des câbles, par exemple, qui sont nécessaires au développement des énergies renouvelables, sont en aluminium, ce qui les rend plus légers et moins chers.
Quant au principe de précaution, que d'idioties commet-on en son nom ! Quand comprendra-t-on qu'à force de ne plus vouloir prendre le moindre risque, on est en train de s'appauvrir et de retourner à la préhistoire ?
S'agissant du « Fitness Check », les médecins ne sont-ils pas les malades ? N'avez-vous pas senti une sorte de schizophrénie au sein de la Commission européenne entre ses préoccupations industrielles et environnementales ? Je rappelle qu'en France, nous avons résolu le problème du bisphénol.
Quelle appréciation portez-vous également sur l'apathie ou la lenteur du mécanisme de décision de la Commission ?
N'est-elle pas maniaque et son blocage intellectuel ne pourrait-elle nous conduire à la chronique d'une mort annoncée de l'industrie française et européenne ?
Par ailleurs, comment font l'Allemagne et la Norvège pour accorder leurs aides ? S'affranchissent-elles des règles ? Pourquoi ne ferions-nous pas comme elles ? Depuis quand nos gouvernements ont-ils toléré une telle situation ?
Y a-t-il des équivalents de l'exception culturelle dans les relations commerciales de l'Europe avec la Chine ou les pays de l'Asie du Sud-Est ?
Quelles mesures préconisez-vous pour protéger notre industrie au travers des produits finis ?
En France, nous sommes préoccupés par Rio Tinto Alcan (RTA), qui possède nos deux gros sites de production de l'aluminium et délocalise beaucoup au Canada. Or on m'a dit que ses usines dans ce pays ne fonctionnaient pas bien. Qu'en est-il, sachant que nous avons sur le site de Saint-Jean-de-Maurienne une véritable pépite technologique et de recherche ?
Que pensez-vous de l'entreprise Trimet, le repreneur allemand pressenti pour ce site ? Il semblerait que cette entreprise familiale ne chercherait pas le profit à tout prix, mais ne risque-t-elle pas de s'emparer de nos savoir-faire, de les transplanter en Allemagne, puis de sacrifier le site ?
Quel est votre avis sur le deuxième repreneur potentiel, un groupe français qui n'aurait pas pour seul objectif les bénéfices, mais ne jouirait pas de la préférence de nos autorités politiques ?
Que pensez-vous, dans les projets de reprise de Saint-Jean-de-Maurienne, de l'hypothèse où Rio Tinto cèderait l'usine de production mais conserverait le centre de recherche ?
Nous avons beaucoup de centrales nucléaires et, pourtant, nous ne recyclons pas assez : n'est-ce pas là le problème ?
Pourquoi l'Allemagne et la Norvège réussissent-elles ?
Enfin, pour construire des vélos, l'aluminium a constitué une révolution, ceux-ci étant auparavant fabriqués en acier. Mais ces nouveaux vélos ont été vendus par des firmes américaines, et non françaises. Et si, aujourd'hui, le nouveau matériau en vogue est le carbone, il ne permet guère d'aller plus vite, tout en coûtant deux ou trois fois plus cher.
Le vélo en fibre de carbone a un défaut principal : il n'est pas recyclable !
J'ai mis douze ans pour obtenir un « Fitness Check » de la Commission européenne, non sans faire pression grâce à toutes les industries de la chaîne de valeur. Ma méthode a été de collecter un maximum d'informations, vérifiables, en jouant la transparence avec elle.
Monsieur Hutin, je partage votre point de vue sur sa schizophrénie. Je n'ai jamais compris sa position doctrinaire, voire aveugle, en faveur du « tout environnement ». Trop peu de gens en son sein mesurent les conséquences de leurs décisions. C'est la raison pour laquelle, quand je vois des ONG radicalement contre les lobbies installés à Bruxelles, je leur dis qu'elles sont folles. De bons lobbies sont utiles pour informer et prendre des décisions pertinentes – à la différence des mauvais, comme on en trouve aux États-Unis, qui ressassent des leitmotivs jusqu'à ce qu'on les croit.
Or, étant donné les réductions de gaz à effet de serre que l'aluminium permet de réaliser dans le secteur des transports ou des bâtiments, il aide à obtenir les résultats prévus par le protocole de Kyoto. Il manque beaucoup de pragmatisme à la Commission européenne et même, souvent, aux gouvernements.
L'apathie dont vous parlez vient parfois d'une peur de faire mal. Mais je suis plus choqué par un phénomène inverse : le fait que chacun essaye de laisser un héritage législatif. Cela se traduit par un foisonnement dramatique de règles qui n'ont pas de sens et se contredisent les unes les autres. ETS a en soi les germes de son autodestruction mais personne ne veut le voir ! Nous ne sommes pas contre ETS, mais contre le fait qu'on ne veuille pas apporter des compensations aux secteurs industriels intensifs en énergie pour le surcoût que cela occasionne pour eux et que le reste du monde n'a pas.
J'ai perçu moi aussi un certain blocage, consistant à dire que la meilleure façon d'empêcher les Européens de gaspiller l'énergie est de fixer son prix à un niveau élevé. Or il ne souffre aucune contradiction. Heureusement, la crise économique a commencé à modifier la situation.
Nous nous sommes plaints depuis longtemps de l'inaction de la DG ENT. Quant à la DG COMP, elle est fermée à la discussion. Je ne pense pas non plus que la « comitologie » aille dans le bon sens, même si elle permet d'accélérer les processus. Malgré beaucoup d'avancées récentes, la Commission européenne a donc encore de nombreux progrès à faire.
La politique en faveur de l'environnement doit, encore une fois, être raisonnable et respectueuse des équilibres économiques. Si l'on peut montrer l'exemple, il ne faut pas se suicider pour ce faire ! Je comprends à cet égard certaines des critiques exprimées par votre ministre Arnaud Montebourg. Mais il ne faut pas exagérer non plus : si votre pays était plus actif à Bruxelles, on aurait moins à se plaindre de ce genre de problème.
S'agissant des aides, on dit que la France n'est pas assez riche pour faire comme l'Allemagne et la Norvège. Je n'en sais rien. À cet égard, l'un des aspects dangereux de l'ETS est qu'il est vu comme une vache à lait ou une façon de combler les trous du budget de l'État, auquel cas ce serait scandaleux. L'argent de l'ETS doit être utilisé pour financer la recherche et soutenir les secteurs qui ont des difficultés à se reconvertir.
La Commission de régulation de l'énergie (CRE) est en train d'expliquer, aujourd'hui même, qu'il faut augmenter le prix de l'énergie électrique en France d'ici 2017.
Je crains que vous n'ayez raison…
S'agissant des accords commerciaux avec les États-Unis, l'Europe fait en permanence des tentatives dans ce domaine. Un accord a d'ailleurs été conclu avec le Canada, de même qu'avec de nombreux pays. La plupart du temps, il s'agit d'accords de libre-échange avec une abolition graduelle des protections douanières. J'ai beaucoup oeuvré dans mes fonctions à l'EAA à harmoniser les normes entre les États-Unis et l'Europe, mais il y a une différence considérable entre ces deux pays s'agissant de la protection de l'industrie, pour laquelle ceux-ci sont extrêmement réactifs. De même, il existe encore outre-Atlantique des gens qui prennent des risques : ce n'est plus guère le cas en Europe, ce qui est dommage.
Ces accords tendent à réduire les distorsions de concurrence pour donner autant de chance à chaque partie.
Madame Bonneton, selon moi, il faut protéger l'ensemble de la chaîne de valeur, même si on n'a guère d'autre solution que de protéger les produits finis pour l'instant. En tout état de cause, plus courte est la distance entre le producteur de la matière première et l'utilisateur final, plus on a de chances d'avoir une adéquation entre les produits et les attentes des consommateurs.
S'agissant de Rio Tinto, l'AP 60 n'est pas suffisamment testé selon moi pour marcher sans le moindre problème au Canada. On a souvent eu le cas de dispositifs fonctionnant à petite ou moyenne échelle et ayant plus de difficultés à grande échelle. Cela dit, je ne serais pas étonné de voir Rio Tinto, dont la vocation première est d'être une société minière, se dégager de plus en plus de la production d'aluminium primaire.
Par ailleurs, je rappelle que la rentabilité a quasiment toujours été plus grande pour le métal primaire et, éventuellement, le métal recyclé, celle de la transformation ayant souvent été le parent pauvre. La concentration de la chaîne de valeur dans le passé est liée au fait que les producteurs ont pensé qu'en maîtrisant celle-ci, ils allaient accélérer le développement du marché de l'aluminium, qui croissait très vite. Mais les marchés financiers ont fait pression pour que les grands groupes industriels se recentrent sur leur coeur de métier, ce qui est à l'origine des démantèlements constatés. Cela étant, certaines sociétés ont essayé de nouer des alliances dans ce domaine – Sapa, qui représente ainsi aujourd'hui 20 % du filage européen va s'allier avec Norsk Hydro, qui correspond à une part équivalente.
Quant à Trimet, qui produit plus de métal recyclé que de métal primaire, j'ai visité son usine plusieurs fois et ai tendance à penser qu'elle ne cherche pas le profit à tout prix. J'ai beaucoup d'estime pour son président, dont je pense qu'il a une vision industrielle sur le long terme. Le fait qu'il ait survécu avec un coût de l'énergie électrique dans son pays beaucoup plus élevé qu'ici montre qu'il a eu l'intelligence d'établir un véritable dialogue avec le gouvernement et les producteurs d'énergie électrique pour trouver des solutions d'avenir – ce qui est, selon moi, du meilleur augure. Je pense que si Trimet reprend le site de Saint-Jean-de-Maurienne, ce n'est pas pour piller sa technologie, mais peut-être à la condition d'établir un partenariat avec EDF permettant de partager les bons et les mauvais moments. Tout dépendra de son contrat d'énergie électrique : si l'entreprise arrive à négocier un contrat intéressant avec EDF, elle pourrait même transférer une partie de sa production d'Allemagne en France.
En outre, il y a entre les ouvriers et le patronat de Trimet une dynamique que je n'ai vue nulle part ailleurs et qu'il est impossible de trouver dans les grands groupes.
Cela étant, si l'objectif de Rio Tinto est de garder le centre de recherche, préparez-vous à trouver des repreneurs pour Dunkerque ! (boutade).
Je rappelle que vous êtes parmi le pays européens un de ceux qui exportent le plus d'énergie, notamment vers l'Italie – qui est un des États du continent où l'électricité est vendue le plus cher.
Comme je l'ai dit, l'environnement législatif n'offre aucune vision d'avenir aux producteurs d'énergie. Cela ne les pousse pas à investir, mais à maximiser le profit à court terme en augmentant les prix. Je ne sais pas si c'est ce que fait EDF, mais la tentation doit être grande…
Monsieur Liebgott, l'inconvénient de la plupart des produits composites est double. D'abord, ils n'offrent pas une vision suffisante sur le long terme sur leurs caractéristiques. Je ne serai pas le premier passager du nouveau Boeing par exemple, car je pense qu'on ne maîtrise pas assez ce qui va se passer dans la structure de l'avion lorsqu'il sera frappé par la foudre. On ne peut recréer les mêmes conditions aussi facilement avec les matériaux composites qu'avec les matériaux homogènes comme l'aluminium. Deuxièmement, dans l'état actuel des technologies, il est pratiquement impossible de séparer les fibres de carbone des « thermodurs », qu'on emploie pour les lier.
Je crains qu'à vouloir chercher à tout prix des produits plus légers, on n'aille trop loin. Quant au magnésium, s'il est plus léger que l'aluminium, il n'est pas aussi facile à produire, ni aussi abondant. Cela étant, la poudre d'aluminium, comme toutes les poudres, est dangereuse : elle est utilisée comme carburant pour les fusées et elle est le composant principal des feux d'artifice – comme des têtes d'obus jadis. Aucun matériau n'est parfait.
La séance est levée à treize heures dix.