La séance est ouverte à 16 heures 25.
Présidence de Mme Catherine Coutelle, présidente.
La Délégation procède à l'examen du rapport d'information sur les violences faites aux femmes (Mme Pascale Crozon, rapporteure).
Nous examinons aujourd'hui un rapport important, par lequel nous avons souhaité tout d'abord faire le bilan de l'application de la loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, ainsi que de la loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.
Notre intention est d'améliorer un certain nombre de situations susceptibles de l'être dans le domaine des violences faites aux femmes, notamment la prise en compte de ces réalités par la société et par les divers professionnels – médecins, gendarmes, policiers, etc. – qu'une femme est susceptible d'appeler à l'aide, mais qui ne savent pas toujours entendre ces appels, car ceux-ci ne sont pas toujours explicites, incapables qu'elles sont parfois d'exprimer les violences terribles auxquelles elles sont soumises.
Après les travaux menés par la délégation sur le projet de loi pour une République numérique, notre rapporteure, Pascale Crozon, a entendu depuis la mi-janvier un certain nombre de magistrats, de juristes et d'associations sur les violences faites aux femmes. Si le rapport a été rédigé dans des délais à dessein restreints, je précise que, lorsque ce travail a commencé, nous avons été sollicitées par des associations, dont une association représentant des femmes en situation de handicap – qui font souvent l'objet d'un surcroît de violence – ainsi que l'association SOS les Mamans, qui a été auditionnée en février, de même que le Collectif national pour les droits des femmes. J'ai par ailleurs rencontré, de mon côté, une association qui reçoit des auteurs de violences – car il convient de les soigner aussi.
Pascale Crozon aurait souhaité approfondir les investigations relatives aux femmes immigrées victimes de violences, mais nous n'avons pas voulu reprendre l'intégralité des débats et des textes. Si j'ai lu dans la presse des contrevérités concernant la lutte contre les violences faites aux femmes, la situation a bel et bien évolué, les textes sont appliqués, des politiques sont mises en oeuvre, des associations nous indiquent disposer de davantage de moyens et d'outils réglementaires pour intervenir. La question, naturellement, demeure très vaste et il serait faux de prétendre que tout peut se régler en trois ou quatre ans.
Le rapport que je présente aujourd'hui s'inscrit dans un contexte particulier : celui de l'émotion soulevée par la condamnation de Jacqueline Sauvage par la cour d'assises de Blois. Devant cette situation qui nous a toutes et tous interpellés, la délégation a souhaité entendre des juristes et des acteurs de l'égalité entre les femmes et les hommes, afin de faire le point sur l'état de la législation relative à lutte contre les violences conjugales et intrafamiliales.
Notre ambition n'a pas été de refaire le procès, car nous respectons la chose jugée et ses attendus ; si nous ne pouvons que saluer la mesure d'humanité décidée par le Président de la République, nous ne nous sommes pas demandé si telle ou telle évolution de la loi aurait permis d'aboutir à un autre verdict.
Notre rapport a pour objet l'évaluation de la portée des mesures législatives adoptées depuis l'entrée en vigueur de la loi du 9 juillet 2010 – issue notamment des travaux de Guy Geoffroy et Danielle Bousquet —, renforcée par la loi du 4 août 2014, Najat Vallaud-Belkacem étant alors ministre des droits des femmes. Nous avons, d'autre part, étudié les principales propositions résultant du débat public sur l'aggravation des peines pour les crimes commis à raison du sexe et sur la réforme du régime de la légitime défense.
En ce qui concerne l'évaluation des actions mises en oeuvre, la prise de conscience des pouvoirs publics doit être saluée : la lutte contre les violences faites aux femmes est devenue une priorité, et les campagnes régulièrement menées désormais – le rapport les évoque – contribuent à la libération de la parole des victimes.
Au titre des résultats concrets illustrant les progrès réalisés que le rapport mentionne, je relèverai certains éléments chiffrés.
Le nombre des appels reçus au numéro 3919 a plus que doublé, passant de 24 000 en 2013 à 50 000 en 2014, et l'augmentation se poursuit puisque 7 000 appels mensuels sont actuellement enregistrés.
Le recours au téléphone portable d'alerte pour femmes en grand danger s'est étendu : 400 sont utilisés aujourd'hui, et le nombre des « téléphones grand danger » est appelé à augmenter.
Le protocole local de plainte a été mis en oeuvre dans 81 départements, et 300 points d'accueil de proximité ont été déployés.
L'hébergement des victimes de violence progresse : 1 147 places d'hébergement ont ainsi été créées depuis 2012.
En 2014, plus de 1 500 auteurs de violences ont bénéficié d'un accompagnement dans le cadre de stages de responsabilisation.
Cependant, d'autres constats appellent à la vigilance : seulement 15 % des femmes victimes de violences conjugales portent plainte, et le délai moyen constaté avant la délivrance d'une ordonnance de protection demeure de trente-sept jours, alors qu'un rapport émanant du Conseil de l'Europe – à l'Assemblée parlementaire duquel je siège – préconise vingt-quatre heures, considérant qu'il s'agit d'une urgence. La marge de progrès est large, l'attente constituant un facteur de danger pour les femmes concernées.
Ces constats m'ont amenée à formuler un certain nombre de recommandations, dont l'édiction d'une nouvelle circulaire sur l'ordonnance de protection, afin de tirer les enseignements des inégalités d'application constatées selon les départements, ainsi que la mutualisation des meilleures pratiques. En ce qui regarde les moyens mis en oeuvre, priorité doit être donnée à l'accueil et à l'accompagnement des victimes, ce qui implique la formation des intervenants, qu'il s'agisse d'améliorer la détection de ces situations et des phénomènes d'emprise, ou de mieux informer les victimes de leurs droits et de les accompagner dans leur démarche de dépôt de plainte. À cet effet, le rapport recommande que les feuilles de route ministérielles fixent des objectifs chiffrés du nombre de professionnels formés. Il est également préconisé de créer des outils de suivi de façon à mieux appréhender les phénomènes de déclassement ou de correctionnalisation par les procureurs.
L'un des axes majeurs de notre travail a porté sur l'encouragement à utiliser le terme de « féminicide » dans le vocabulaire courant et administratif, étant entendu qu'il ne s'agit pas dans mon esprit de caractériser ainsi tout meurtre commis sur une femme – qui peut être de nature crapuleuse ou terroriste –, mais le meurtre commis sur une femme à raison de son sexe. De fait, la question s'est posée de savoir si le « féminicide » devait constituer une circonstance aggravante, comme c'est aujourd'hui le cas pour les meurtres commis à raison de l'ethnie, la nation, la race, la religion, l'orientation ou l'identité sexuelle.
Ma position de départ était que, l'article 225-1 du code pénal reconnaissant aujourd'hui vingt-deux motifs de discrimination d'égale valeur en matière délictuelle, il serait logique de faire prévaloir le même principe en matière criminelle. Cependant, les auditions m'ont convaincue que cette approche n'est pas adaptée en cas de violences conjugales et intrafamiliales. Il est en effet plus difficile d'établir que le crime répond à une motivation sexiste de l'auteur des faits que de solliciter les circonstances aggravantes existantes, qui reposent sur des éléments objectifs lorsqu'ils visent le conjoint, le partenaire, l'ex-conjoint ou l'ex-partenaire. Ces dispositions sont au demeurant plus protectrices pour les femmes, qui constituent la grande majorité des victimes de ces violences. Aussi le rapport ne recommande-t-il pas une telle évolution.
Le délicat débat en cours sur la notion de légitime défense me conduit à souhaiter que nous n'instaurions pas sous le coup de l'émotion une « légitime défense différée », dont on mesure mal aujourd'hui la portée. Il ressort des auditions que la création d'un tel régime, établissant une présomption d'irresponsabilité pénale, ouvrirait la porte à un « permis de tuer » à la victime de violences conjugales. Il nous a cependant semblé qu'une éventuelle modification du droit devrait mieux prendre en considération la notion d'emprise, et mieux établir la proportionnalité entre l'agression et les moyens de défense employés, en retenant la notion de menaces et de violences antérieures d'une particulière gravité.
Nous souhaitons que cette recommandation puisse s'appuyer sur la remise par le ministère de la Justice, dans les meilleurs délais, d'une étude approfondie, chiffrée et différenciée en fonction des sexes, portant sur l'état de la jurisprudence en matière de légitime défense, et détaillant le nombre de cas concernant les femmes et les hommes, l'interprétation jurisprudentielle des critères légaux, les éléments de droit comparé, etc.
Je reconnais toutefois que la définition actuelle de la légitime défense est inadaptée aux situations de violences conjugales, car elle a été pensée par et pour des hommes, dont la principale préoccupation était la protection de leurs propriétés. Plutôt que de modifier cette notion, je propose d'introduire dans le droit celle d'emprise ; cela vaut pour le signalement de ces situations : doit-on pouvoir protéger, contre sa volonté — à l'instar de ce qui existe pour les mineurs —, une personne sous emprise ? Aujourd'hui, cela n'est pas clair et, en tout cas, ne suffit pas à justifier une ordonnance de protection.
Faut-il par ailleurs considérer cette emprise comme un facteur susceptible d'atténuer le discernement, ou d'excuser la disproportion entre la réponse et la menace ? C'est ce que fait la législation helvétique, qui s'abstrait de la logique binaire de la légitime défense, qui considère l'individu soit comme totalement irresponsable, soit totalement coupable avec des circonstances aggravantes, et qui aboutit – fût-ce de façon légitime – à ce que les peines prononcées paraissent incohérentes et parfois disproportionnées.
Le rapport recommande enfin que la délégation s'empare d'un sujet connexe que nous n'avons pu aborder, alors même qu'il est essentiel : celui de l'exposition spécifique des femmes étrangères aux violences conjugales et à la double peine administrative.
Merci pour ce travail exécuté dans un délai très court.
Toutes les recommandations sont intéressantes, mais mon appréciation de la notion de légitime défense diverge de ce que préconise le rapport.
Je souhaiterais par ailleurs que l'ordre de ses préconisations soit revu, de façon à placer en tête la troisième, relative à la légitime défense, puis la septième, qui concerne l'ordonnance de protection, puis la huitième, qui a pour objet la médiation familiale, puis la quatrième, portant sur la formation, puis la neuvième, qui a trait aux politiques volontaristes – le reste sans changement.
L'ordre des recommandations n'implique pas une quelconque hiérarchisation : il se borne à reprendre celui de leur apparition au sein du rapport.
Par ailleurs, la rédaction de la treizième proposition, relative aux femmes étrangères, me gêne, l'expression « exposition spécifique des femmes étrangères aux violences conjugales » pouvant donner à entendre que les conjoints étrangers sont nécessairement plus violents que les autres. Je suggère la rédaction suivante : « Évaluer les dispositions en matière de droit au séjour pour les femmes étrangères victimes de violences. » Nos travaux préparatoires à la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile ont montré que la question primordiale était le droit au séjour.
Il est notoire que certaines femmes étrangères ont pour époux des Français qui les maltraitent, leur confisquent leurs papiers et les jettent à la rue.
La rédaction de la troisième proposition, qui concerne la légitime défense, pourrait être améliorée. Je propose d'écrire ainsi le deuxième alinéa : « En redéfinissant la légitime défense pour que soit mieux appréciée l'éventuelle disproportion entre l'agression et les moyens de défense employés, compte tenu de l'existence de violences antérieures répétées et d'un danger de mort permanent. » S'il ne s'agit évidemment pas de délivrer un permis de tuer, il n'est pas non plus question d'établir un régime d'autodéfense différée : ce qui importe, c'est la prise en compte de l'antériorité des violences. C'est parce qu'elles se sentent en danger de mort que ces femmes peuvent être amenées à réagir violemment, et notre droit doit intégrer ce fait.
La rédaction retenue est le fruit d'un long travail, sur lequel je ne souhaite pas que nous revenions, même si je comprends vos motivations. Votre proposition se réfère à la notion de légitime défense ; or, cette notion a pour effet d'écarter toute responsabilité. Or, dans le cas de Jacqueline Sauvage, par exemple, il y a bien homicide : cette personne a tué son mari en lui tirant dans le dos à un moment où il n'était pas directement menaçant – c'est du moins tout ce que nous avons pu comprendre par la presse. Il est donc difficile de légitimer cet acte en considérant que Mme Sauvage n'est pas coupable d'avoir tué son mari. S'il est malheureux que la notion de circonstance atténuante ait été supprimée du code pénal en 1994, je rappelle que les faits étaient passibles de la réclusion criminelle à perpétuité, soit bien plus que la peine de dix ans qui a été effectivement prononcée – même si elle nous a paru injuste au regard de ce que la malheureuse avait vécu.
La délégation aux droits de femmes doit clairement affirmer qu'il n'y a pas lieu de créer un régime de légitime défense différée qui serait un permis de tuer ; le substitut Luc Frémiot nous l'a démontré. Nous pouvons aller dans votre sens en indiquant que nous interrogeons la définition et en suggérant un critère de proportionnalité ; de fait, nous ignorons si, au moment des faits, le mari de Mme Sauvage était particulièrement menaçant – elle reconnaît elle-même qu'il s'est agi d'une accumulation de violences dans la durée, qui a conduit à l'épilogue que l'on sait.
Nous demandons par ailleurs que le Gouvernement nous fournisse dans un délai raisonnable une étude sur le sujet, car nous ne disposons pas de la jurisprudence : nous ignorons combien de femmes ou d'hommes sont condamnés pour de telles affaires ; une vision d'ensemble nous fait défaut.
Cette question figure dans un chapitre du code pénal, qui traite des causes d'irresponsabilité ou d'atténuation de la responsabilité.
Je m'interroge par ailleurs sur le terme « absence de disproportion » dans le troisième alinéa de la troisième proposition : à mes yeux, il ne peut exister qu'une éventuelle disproportion entre l'agression et les moyens de défense employés, qu'il convient de mieux apprécier dans des cas tels que celui de Jacqueline Sauvage.
Nous nous sommes fondées sur la rédaction actuelle du premier alinéa de l'article 122-5 du code pénal, aux termes duquel : « N'est pas pénalement responsable la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-même ou autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la légitime défense d'elle-même ou d'autrui, sauf s'il y a disproportion entre les moyens de défense employés et la gravité de l'atteinte. »
C'est la formulation que nous avons reprise : quand bien même sa lecture peut surprendre, nous nous y sommes conformées.
L'expression « absence de disproportion » me semble peu claire : ne vaudrait-il pas mieux écrire « absence de proportion » ? La formulation « éventuelle disproportion » conserve cependant ma préférence.
Nous pouvons l'écrire entre guillemets afin de signifier que la rédaction est celle du code pénal.
Il faut par ailleurs souligner que c'est le danger de mort qui conduit à des réactions d'une telle violence.
Nous pourrions recourir à l'expression : « menaces d'une particulière gravité pouvant entraîner la mort ». Le danger ne s'exprime pas toujours par des menaces de mort. Mme Lange, en 2009, était sous la menace d'un danger permanent qui l'a conduite à tuer son mari alors qu'il tentait de l'étrangler.
Le terme « d'une particulière gravité » me paraît moins clair que l'expression « danger de mort ».
La rédaction pourrait alors être la suivante : « l'existence de violences antérieures répétées, de menaces d'une particulière gravité et d'un danger de mort. »
Je rappelle que 41 % des femmes concernées ont porté plainte. Le danger de mort était bien réel.
Je persiste à penser que nous devons maintenir au premier rang la proposition relative à l'usage du terme « féminicide », qui constitue l'un des deux axes de réflexion ayant présidé à la rédaction du rapport ainsi qu'au choix des personnes auditionnées. En 2014, la question avait d'ailleurs été évoquée dans le cadre d'un amendement et il avait été prévu de conduire une réflexion afin d'étudier comment cette notion pourrait être intégrée dans notre droit ; aujourd'hui, nous rencontrons toujours de grandes difficultés à faire accepter ce terme dans la langue française… Nous souhaitons donc que son utilisation soit encouragée dans le vocabulaire courant et administratif.
Il nous a été dit qu'il n'existait pas de réponse pour la légitime défense en France, mais que des solutions avaient été trouvées en Suisse et au Canada. La rédaction canadienne, très complexe, semble difficilement transposable en l'état dans notre droit ; c'est pourquoi une étude comparée des dispositions existant en matière de féminicide nous permettrait de mieux apprécier les conditions dans lesquelles ce terme pourrait être utilisé en France. Cette demande fait l'objet de notre deuxième proposition, et je préférerais donc qu'elle soit maintenue à cette place.
Dans ces conditions, la septième proposition, relative à l'ordonnance de protection, deviendrait la quatrième, et la huitième, qui concerne la médiation familiale, deviendrait la cinquième. La quatrième, qui a trait à la formation, viendrait à la sixième place, et la neuvième, qui préconise la mise en oeuvre de politiques de juridictions volontaristes, à la septième place.
Par ailleurs, la formulation de la dernière proposition au sujet des femmes étrangères serait modifiée afin de lever tout risque d'ambiguïté.
Enfin, je souhaiterais que, dans la conclusion du rapport, les travaux menés par la Délégation aux droits des femmes soient mentionnés, puisque, lors de l'examen du projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile, Maud Olivier avait rendu un rapport au nom de notre délégation et que, depuis, les violences exercées sur les femmes étrangères sont mieux prises en compte pour l'attribution du droit d'asile.
J'ai rencontré des associations qui m'ont indiqué que des aménagements ont été apportés au bénéfice des demandeuses d'asile se trouvant dans le Calaisis, car elles sont singulièrement victimes de violences : elles seront ainsi mieux protégées à l'avenir.
Je tiens à saluer le travail de grande qualité réalisé dans un laps de temps très restreint, et malgré un contexte passionnel et d'emballement médiatique. Il est bon que notre délégation ait pu prendre le temps de conduire une réflexion sereine et formulé des propositions après avoir entendu des points de vue très différents.
La Délégation adopte le rapport d'information ainsi que les recommandations suivantes :
1. – Encourager l'usage du terme de « féminicide » dans le vocabulaire courant et administratif.
2. – Réaliser une étude de droit comparé sur les meurtres et violences commis à raison du sexe et les dispositions normatives adoptées dans certains pays en matière de féminicide.
3. – Préciser le droit en vigueur pour mieux prendre en compte la notion d'emprise des victimes de violences, notamment des femmes victimes de violences conjugales pérennes :
– sans créer un régime de légitime défense différée, qui ouvrirait la porte à un « permis de tuer » en établissant une présomption d'irresponsabilité pénale ;
– en interrogeant la définition de la légitime défense pour que soit mieux appréciée « l'absence de disproportion » entre l'agression et les moyens de défense employés, compte tenu de l'existence de violences antérieures répétées, de menaces d'une particulière gravité et d'un danger de mort.
Pour étayer cette recommandation, la Délégation demande la remise, par la Chancellerie et dans les meilleurs délais, d'une étude approfondie, chiffrée et sexuée sur l'état de la jurisprudence en matière de légitime défense (nombre de cas concernant les femmes et les hommes, interprétation jurisprudentielle des critères légaux, éléments de droit comparé, etc…)
4. – Améliorer l'ordonnance de protection en raccourcissant ses délais de délivrance, et en favorisant son usage en adressant une nouvelle circulaire ministérielle aux juges aux affaires familiales, et procéder à une étude quantitative et qualitative du recours à l'ordonnance de protection sur l'ensemble du territoire et par ressort de TGI.
5. – Exclure le recours à la médiation familiale en cas de violences conjugales.
6. – En matière de formation :
– poursuivre et amplifier l'effort de formation de tous les professionnel.le.s confronté.e.s à la problématique des violences faites aux femmes, s'agissant en particulier de la formation continue.
– publier chaque année dans les feuilles de route ministérielles pour l'égalité des statistiques détaillées sur la proportion de professionnel.le.s en exercice ayant suivi une formation sur les violences (en particulier les magistrat.e.s, policier.e.s et gendarmes) avec des objectifs chiffrés pour l'année à venir.
7. – Mettre en oeuvre des politiques de juridictions volontaristes pour renforcer le dialogue entre les différents acteurs judiciaires, avec une clarification des circuits de signalement et de communication des faits de violence conjugales sous l'impulsion du procureur.
8. –Recenser les données sur les peines prononcées à l'encontre des hommes et des femmes auteur.e.s de violences et leur exécution.
9. – Créer les outils pour mieux identifier les phénomènes de correctionnalisation des crimes, s'agissant en particulier des viols, et veiller à ce que les décisions de classement de suite prononcées par les procureurs de la République fassent l'objet d'une motivation détaillée.
10. – Renforcer les moyens des unités médico-judiciaires (UMJ) et faciliter l'accès pour les personnes victimes de violences en urgence.
11. – Améliorer la formation et l'évaluation des expert.e.s et examiner les possibilités de faciliter le recours à une seconde expertise dans le cadre d'une procédure judiciaire.
12. – Poursuivre les efforts engagés en matière de prévention des violences et d'accompagnement des victimes :
– en organisant des campagnes régulières d'information sur les violences au sein des couples, en rappelant les mesures de protection existantes et les dispositifs d'accompagnement ;
– en veillant aux moyens des principaux acteurs, en particulier le service central des droits des femmes et de l'égalité, les services déconcentrés et les associations intervenant auprès des femmes victimes de violences.
13. – Évaluer les dispositions en matière de droit au séjour pour les femmes étrangères victimes de violences conjugales.
La séance est levée à 17 heures.