Audition de M. François Delattre, Ambassadeur, Représentant permanent de la France au Conseil de sécurité et chef de la mission permanente française près les Nations unies à New York (États-Unis)
La séance est ouverte à seize heures quinze.
Nous avons le plaisir d'accueillir M. François Delattre, ambassadeur, représentant permanent de la France au Conseil de sécurité des Nations unies. Merci, monsieur l'ambassadeur, d'avoir accepté mon invitation.
Cette audition pourrait être l'occasion d'évoquer les premiers enseignements que vous tirez de vos premiers mois dans cette fonction, qui vous place au coeur du système des Nations unies et en contact direct avec les principaux acteurs diplomatiques internationaux. Je rappelle que vous êtes en poste depuis le mois de septembre dernier.
Vous pourriez également revenir sur les priorités de la France pour les prochains mois dans le cadre des Nations unies, ainsi que sur les principales crises internationales dont vous avez à connaître. Comme nous ne pourrons pas aborder cet après-midi tous les dossiers, je vous propose de commencer par la Syrie, l'Irak et le Proche-Orient.
En ce qui concerne la Syrie, plusieurs initiatives ont été lancées afin d'essayer de sortir du blocage diplomatique : d'une part, une initiative russe de dialogue entre le régime syrien et l'opposition, qui pourrait avoir lieu à Moscou à la fin du mois ; d'autre part, la proposition du nouvel envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies, M. de Mistura, d'un « gel des combats » qui pourrait servir de base pour la reprise d'un processus politique. Comment jugez-vous les chances de succès de ces deux initiatives ?
S'agissant de l'Irak, comment évaluez-vous la cohésion de la vaste coalition internationale contre Daesh et le degré d'engagement de ses différents partenaires – notamment les pays du Golfe et la Turquie ? Quelles seraient les marges de progrès ? Par ailleurs, comment voyez-vous le processus de réconciliation nationale en Irak ? Où en est-on ? Et comment encourager ce processus indispensable pour une solution politique durable ?
Nous serons aussi particulièrement attentifs à ce que vous pourrez nous dire du conflit au Proche-Orient. Il y a eu une proposition de résolution déposée par l'Autorité palestinienne sur laquelle la France a beaucoup travaillé et qu'elle a soutenue mais qui, au dernier moment, n'a pas été adoptée par le Conseil de sécurité. Les négociations bilatérales sous l'égide américaine semblent vouées à l'échec, les positions des deux parties ne cessant de s'écarter. Or nous savons à quel point le statu quo est dangereux. La France a proposé l'organisation d'une conférence internationale, selon une méthode renouvelée qui associerait les États-Unis, l'Europe et les pays arabes. Comment selon vous faire en sorte que cette initiative n'ait pas le même sort que les précédentes ? L'adoption d'une résolution au sein du Conseil de sécurité fixant des paramètres clairs et un calendrier précis aux négociations vous semble-t-elle plausible ? Quel est l'état de notre discussion avec les États arabes, notamment la Jordanie, l'Égypte et l'Arabie saoudite ? Par ailleurs, les États-Unis, qui ont tendance en ce moment à reléguer le conflit israélo-palestinien au second plan, après la Syrie ou l'Irak, pourraient-ils se laisser convaincre ?
Enfin, la Palestine a obtenu son adhésion à la Cour pénale internationale (CPI) et le Bureau du Procureur de celle-ci a procédé à un examen préliminaire sur la situation dans ce pays. Quelles peuvent être selon vous les conséquences de cette adhésion, qui s'est accompagnée d'une demande d'adhésion à une vingtaine d'autres organes ? Plus généralement, pourriez-vous nous éclairer sur la stratégie palestinienne à l'ONU, qui peut parfois sembler contre-productive ?
Merci, Madame la Présidente, de votre accueil. C'est un honneur tout particulier pour moi d'être reçu par la Commission.
Je concentrerai mon propos liminaire sur trois points : les premiers enseignements que je tire de ma fonction à New York, nos principales priorités transversales pour 2015 dans le cadre des Nations Unies et un coup de projecteur vu de New York sur les crises que vous avez évoquées.
Je retire trois principaux enseignements de ma fonction à New York.
D'abord, l'influence très particulière de la France à l'ONU, qui n'a me semble-t-il pas d'équivalent ailleurs. Celle-ci repose sur trois facteurs.
Premier facteur : notre statut de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies. Non seulement la France est l'un des cinq « grands » à l'ONU, mais elle mérite chaque jour ce statut en s'y montrant l'un des États les plus actifs sur tous les fronts. C'est vrai au Conseil de sécurité comme à l'Assemblée générale, dans la myriade de comités et sous-comités qui marquent la vie de la communauté des nations, sur le dossier clé des droits de l'Homme, dans les agences ou les actions de terrain.
Deuxième facteur : nos leviers – à travers par exemple la francophonie, notre influence en Afrique, notre capacité de projection de forces ou notre leadership dans le domaine des droits de l'Homme – jouent à fond aux Nations Unies et nous y assurent une influence maximale. La force de la France est de pouvoir y jouer sur tout le clavier de la « puissance d'influence », comme le dit Laurent Fabius, en s'appuyant sur une approche globale et inclusive, sans naïveté bien sûr, comme trait d'union et pont entre les différents mondes composant la communauté internationale, ainsi que comme promoteur inlassable du dialogue des cultures et des civilisations. Cette « griffe » est me semble-t-il la plus conforme à nos valeurs tout en servant le mieux nos intérêts nationaux. On le voit lors des nombreuses élections qui rythment la vie des Nations Unies, comme avec la brillante élection récente de Marc Perrin de Brichambaut à la Cour pénale internationale malgré un contexte compliqué, on le voit aussi sur des dossiers clés comme le réchauffement climatique ou la lutte contre le terrorisme, où il nous faut rassembler des pays et groupes de pays qui défendent spontanément des positions différentes.
Troisième facteur : notre image à l'ONU reste exceptionnelle. J'ai demandé au Secrétaire Général de la délégation française à la dernière session de l'Assemblée générale de noter dans les discours des près de 200 chefs d'État et de gouvernement quels étaient les pays les plus cités. Il en ressort que la France est non seulement largement en tête des pays les plus cités, mais que les références à notre pays sont presque toujours très positives.
Mon deuxième enseignement, en miroir du précédent, est que la France, plus peut-être qu'aucun autre pays, parie sur les Nations Unies et a pour intérêt fondamental une ONU forte. C'est vrai sous l'angle stratégique : nous sommes, comme le souligne Laurent Fabius, passés du monde bipolaire de la Guerre froide au « moment unipolaire » de la présidence de George W. Bush puis à un monde apolaire, avec l'objectif de construire un monde multipolaire organisé. Dans ce schéma, les Nations Unies ont un rôle essentiel à jouer comme l'un des éléments clés de ce monde multipolaire, permettant précisément d'organiser la coopération entre ses différents pôles. C'est vrai aussi si on raisonne dossier par dossier, la France se caractérisant par son attachement à la légalité internationale. Nous sommes d'ailleurs bien perçus, parmi toutes les puissances des Nations Unies, comme l'une de celles sinon celle qui est la plus en ligne avec cette organisation et ses objectifs.
Troisième enseignement : les Nations Unies sont un baromètre inégalé, derrière les discours, de l'évolution des rapports de puissance. Et on ne peut qu'être frappé sur ce point par la montée en puissance des pays émergents et l'affirmation de la Chine en particulier, qui est palpable, notamment au Conseil de sécurité. En témoignent la place croissante de ce pays dans les opérations de maintien de la paix, en Afrique en particulier, ou le rôle de plus en plus important de mon collègue chinois, qui est d'ailleurs remarquable, à la table du Conseil. Elément intéressant, cette affirmation se traduit du reste par une certaine autonomisation de Pékin vis-à-vis de Moscou au Conseil de sécurité. Je pourrais évoquer aussi l'activisme de pays comme le Brésil ou l'Inde, pour ne citer qu'eux, dans les autres enceintes des Nations Unies.
S'agissant de nos priorités à l'ONU pour 2015, dans le cadre tracé par le Président de la République et M. Fabius, on peut en définir pour schématiser – et sans aucune exhaustivité - trois principales.
Première série de priorités, stratégiques : tirer parti du soixante-dixième anniversaire des Nations Unies que nous célébrons cette année pour promouvoir la réforme de cette organisation, qui nous est chère, et dans ce cadre l'élargissement du Conseil de sécurité, qui constitue une de nos lignes stratégiques, mais aussi la limitation volontaire par les cinq membres permanents du Conseil de l'usage du veto en cas d'atrocités de masse – crimes de génocide, crimes contre l'humanité, crimes de guerre de grande ampleur. Cette initiative française connaît un écho très large et croissant à New York. L'événement organisé par Laurent Fabius et son collègue mexicain à New York en septembre dernier est ainsi, de tous les événements montés à l'occasion de la dernière Assemblée Générale des Nations Unies, celui qui a eu de loin le plus de succès et le plus d'impact. Je participerai d'ailleurs demain à un séminaire organisé par le Quai d'Orsay, dans lequel Laurent Fabius et Hubert Védrine, à qui notre Ministre a confié une mission pour renforcer encore la mobilisation internationale autour de cette initiative française, interviendront.
A ces priorités stratégiques, j'ajoute pour mémoire la succession de Ban Ki-moon, dont le deuxième mandat s'achève à la fin de l'année 2016. La campagne pour sa succession, qui doit revenir en principe à un Européen de l'Est, n'a pas encore véritablement commencé et devrait progressivement monter en puissance au deuxième semestre de cette année.
Deuxième série de priorités : les grands dossiers transversaux. Je mentionnerai dans ce cadre, sans chercher à être exhaustif, deux priorités de premier plan pour la France.
Première priorité : les négociations sur le climat. Certes, le coeur de la négociation n'a pas lieu à New York et se déroule, pour ce qui concerne l'ONU, dans le cadre de la convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique, dont le Secrétariat est à Bonn. Mais les choses se jouent en partie à New York, notamment sur le plan de la mobilisation de la communauté internationale. On l'a vu avec le sommet sur le climat, qui a été un grand succès organisé par Ban Ki-moon en septembre dernier, auquel a participé le Président de la République. L'année 2015 verra une succession de conférences et de sommets onusiens majeurs sur le climat et la problématique du développement, deux problématiques qui sont intimement liés à l'ONU. Parmi eux, un événement de haut niveau sera organisé sur le climat le 29 juin prochain à l'Assemblée Générale des Nations Unies, à New York, sur lequel nous sommes en train de travailler avec Sam Kutesa, le Président de l'Assemblée Générale. A cela il faut ajouter notamment, jalonnant la route vers la COP21 à Paris, la conférence majeure sur le financement du développement à Addis-Abeba en juillet et le sommet sur le programme de développement post-2015 à New York en septembre.
Mon équipe et moi sommes donc très mobilisés sur ce dossier du climat, dans trois directions notamment. En premier lieu, vérifier que le mécanisme de coordination ONU-Coprésidence française-Coprésidence péruvienne fonctionne bien pour la préparation de la COP21 de Paris en décembre prochain. En deuxième lieu, créer des coalitions pour le climat avec nos grands partenaires européens, américains et chinois, mais aussi avec tous nos autres partenaires. Nous avons ainsi monté – et continuons à monter – avec mon collègue péruvien toute une série d'événements avec, par exemple, les représentants des petits États insulaires des Caraïbes et du Pacifique, notamment les pays côtiers menacés par la montée des eaux, pour constituer des coalitions nous permettant de créer les conditions d'un accord à Paris. En troisième lieu, associer le monde économique et les collectivités locales à nos efforts. Nous montons ainsi par exemple avec Michael Bloomberg, que je connais depuis longtemps, des événements communs à New York pour mobiliser le monde des affaires et l'associer à cette action.
Deuxième priorité transversale : la lutte contre le terrorisme. Les Nations Unies ont eu à la suite des récents attentats qui nous ont frappés une réaction à bien des égards exemplaire. A notre initiative, le Conseil de sécurité a ainsi adopté une déclaration de condamnation très ferme le jour même des attentats contre Charlie Hebdo, puis organisé – fait exceptionnel - une minute de silence de l'ensemble de ses membres. Dans le même esprit, Ban Ki-moon est venu à la mission permanente signer le registre de condoléances mais aussi, ce qui est particulièrement rare, s'y exprimer devant les médias, y compris en français. J'étais naturellement à ses côtés.
Symétriquement, notre pays est en pointe dans les efforts conduits aux Nations Unies pour mobiliser davantage l'ONU dans la lutte contre le terrorisme.
Je donnerai à cet égard trois exemples de ce que peut faire cette organisation. D'abord, nous avons dès juin 2014 soulevé aux Nations Unies la problématique des combattants terroristes étrangers, à l'occasion de la revue de la stratégie antiterroriste de cette organisation, et nous avons joué un rôle clé dans la négociation de la résolution 2178 contre ces combattants, qui a été adoptée par le Conseil de sécurité en septembre dernier à l'occasion d'un sommet du Conseil sous la présidence du Président Obama, en présence du Président de la République. Deuxièmement, et au-delà de cette activité normative, la France est particulièrement active également sur la problématique des sanctions, qui est un instrument-clé des Nations Unies contre le terrorisme. Cela concerne à la fois la mise sous sanctions d'entités ou d'individus dans le cadre des comités compétents – notre pays a ainsi obtenu la mise sous sanctions en novembre dernier d'Ansar al-Charia en Libye – et, de manière générale, la lutte contre le financement du terrorisme. Nous avons à cet égard pour atout le fait que la direction exécutive du Comité contre le terrorisme des Nations Unies soit présidée par un magistrat français, le juge Jean-Paul Laborde, qui est le deuxième Français le plus haut placé dans le système des Nations Unies, avec le rang de Secrétaire général adjoint. Enfin, nous nous efforçons de mobiliser davantage l'ONU sur le thème de la lutte contre la radicalisation, démarche préventive que l'organisation a trop peu conduite jusqu'ici et sur laquelle nous sommes engagés pour établir un dialogue approfondi avec l'ensemble des pays concernés et les représentants de la société civile. Il s'agit de mettre au point une analyse commune des menaces, de tenter de mettre les mêmes mots pour en rendre compte – ce qui n'est pas facile, comme le montrent par exemple les différends et malentendus sur l'emploi du terme d'« Islam radical » - et d'établir sur cette base une coopération internationale accrue sur les racines du terrorisme.
Enfin, troisième série de priorités, ce sont naturellement les grandes crises, qui connaissent une accumulation sans précédent. Comme la quasi-totalité de ces crises trouvent leur traduction à la table du Conseil de sécurité, celui-ci connait aussi un volume de travail sans précédent.
Concernant le processus de paix au Proche-Orient, depuis l'échec en avril dernier de la médiation conduite par John Kerry, il est au point mort et chaque jour qui passe ne fait qu'aggraver la situation. À Gaza, la guerre a conduit à des destructions plus importantes que toutes les guerres précédentes. À Jérusalem, la situation se tend sur le terrain politique mais aussi religieux. La viabilité de la solution des deux États, endossée par le Conseil de sécurité ainsi que par les autorités israéliennes et palestiniennes, se trouve ainsi chaque jour davantage mise en péril.
Face à cette réalité, la France a fait le constat de l'incapacité du processus de paix, tel qu'il était conduit jusqu'à présent, à déboucher sur un règlement effectif du statut final. Ce processus, tel qu'on le connaît depuis Oslo, repose sur trois piliers : une négociation bilatérale entre Israéliens et Palestiniens; une médiation par les États-Unis, perçus comme étant les seuls à avoir la confiance d'Israël et des leviers pour peser sur ses décisions ; un financement par les acteurs tiers, dont l'Union européenne, les Nations Unies et les pays arabes. Dans ce schéma, le Conseil de sécurité s'est trouvé marginalisé par les États-Unis, qui considèraient l'implication de celui-ci comme contradictoire avec le principe selon lequel il revenait aux deux parties de négocier et non de se voir imposer un accord. Washington craignait aussi de perdre la main sur cette négociation, tout cela dans un cadre de politique intérieure fortement contraint.
Dans ce contexte, le président Abbas a proposé à New York en septembre dernier un projet de résolution, qui n'avait aucune chance d'être adopté, proposant la fin de l'occupation israélienne sur une période de deux ans. Face à ce double constat de blocage, côté américain et palestinien, la France a proposé une voie alternative avec un changement de méthode de négociation, dans le sens d'une démarche à la fois plus collective et plus structurée, que nous considérons indispensable pour aboutir à un résultat. Le coeur de notre initiative est de proposer un accompagnement international des négociations. C'est dans cet esprit que nous avons préparé un projet de résolution articulé autour de trois éléments clés : la définition des paramètres du statut final, qui s'inspirent largement des paramètres agréés au niveau européen ; la relance des négociations dans le cadre d'une architecture internationale renouvelée, impliquant notamment, aux côtés des États-Unis, les autres membres permanents du Conseil de sécurité, l'Union européenne et la Ligue arabe ; l'établissement d'un calendrier de deux ans pour la conclusion des négociations.
Dans ce contexte, l'annonce d'élections israéliennes en mars prochain et la décision palestinienne de précipiter un vote le 30 décembre dernier, sur la base de pressions de politique intérieure à Ramallah, ont certes créé un contexte nouveau. La démarche consensuelle proposée par la France n'en reste pas moins perçue à New York comme une référence, particulièrement utile pour le jour où les conditions d'une négociation sérieuse à New York seront réunies. En outre, certains des Etats qui sont entrés au Conseil de sécurité le 1er janvier dernier, comme l'Espagne ou la Nouvelle Zélande, sont très proches de nos positions, et les autres membres européens du Conseil, à commencer par la Grande-Bretagne, sont soucieux de trouver une voie de sortie par le Conseil à travers une démarche collective. C'est donc à l'honneur de la France de rester engagée et de continuer à promouvoir une relance du processus. Beaucoup dépendra naturellement de l'attitude de Washington, dans un contexte où après l'échec de la médiation de John Kerry certains responsables américains paraissent plus que par le passé soucieux de mutualiser les risques d'une reprise des négociations et ce faisant, dans une certaine mesure, les responsabilités correspondantes.
S'agissant de la Syrie, il y a trois angles d'approche à l'ONU: les angles politique et humanitaire ainsi que le volet des armes chimiques.
La démarche de M. de Mistura nous paraît intelligente en ce sens qu'elle vise à promouvoir un accord sur Alep – qui est une de nos toutes premières priorités – pour éviter un désastre humanitaire, qui serait aussi un désastre politique, et contribuer à construire sur cette base un règlement politique qui doit selon nous être fondé sur le communiqué de Genève, qui est la seule ligne d'accord sur le plan international, acceptée par les Russes, prévoyant expressément une transition politique à Damas. Comme nous le craignions, les conditions d'un tel accord sur Alep paraissent néanmoins difficiles à réunir. De même, nous en saurons davantage dans les prochains jours sur l'initiative russe d'une réunion à Moscou des représentants du régime et de l'opposition.
Mais le fait est qu'aux Nations Unies ce volet politique est peu évoqué, compte tenu des oppositions entre les membres du Conseil de sécurité. Deux autres volets sont en fait au coeur de l'agenda de l'organisation : le volet humanitaire, car on est parvenu à trouver difficilement avec les Russes un moyen d'améliorer l'acheminement de l'aide humanitaire en Syrie ; et le problème des armes chimiques, qui reste pour nous une vraie source de préoccupation À cet égard, le Conseil a adopté la résolution 2118, à la suite de la fameuse attaque chimique de la Ghouta en août 2013. Sur cette base, le désarmement chimique engagé entre les Nations Unies et l'Organisation internationale des armes chimiques (OIAC) a permis d'importants progrès, mais nous souhaitons maintenir la vigilance du Conseil sur au moins deux points qui nous inquiètent : les incertitudes qui demeurent au sujet de la sincérité de la déclaration initiale faite par la Syrie à l'OIAC sur son programme chimique, et surtout les nombreux cas avérés d'emploi de gaz de chlore en Syrie en 2014. Nous sommes en train de discuter avec nos partenaires du Conseil de sécurité les termes d'un texte condamnant ces attaques
Merci pour cet exposé d'ensemble.
S'agissant du conflit israélo-palestinien, lors du débat sur la résolution adoptée par le Parlement sur la Palestine, il nous a semblé que la France avait fait sien ce délai de deux ans, donnant la perspective le cas échéant d'une reconnaissance unilatérale de l'État palestinien, dans l'esprit de poursuivre la voie diplomatique. Cette mesure a-t-elle aidé à faire avancer les choses à l'ONU ?
Par ailleurs, comment s'inscrit l'action de la France dans la légalité internationale en Irak ? La mobilisation des chefs d'État après les attentats de Paris – V. Poutine a notamment exprimé sa sollicitude au peuple français – peut-elle aider à adopter une résolution globale d'intervention des Nations unies en Syrie ?
C'est toujours une joie d'entendre notre ambassadeur s'exprimer avec autant de calme et de précision sur des dossiers aussi compliqués.
Sur la Palestine, je note que vous n'êtes cependant pas parvenu à réaliser tout ce qu'il fallait faire, en l'occurrence essayer de dissuader les Palestiniens de proposer une résolution qui conduirait à un échec. On se trouve ainsi devant une situation qui s'est radicalisée des deux côtés, avec une stratégie palestinienne tendant à faire condamner Israël à la CPI pour crimes de guerre ou contre l'humanité et cet État qui risque du coup de se braquer dans la position inverse. Quelles marges de manoeuvre avons-nous et comment allons-nous sortir de ce conflit ? Les chances de voir aboutir votre texte me paraissent assez faibles.
S'agissant des États arabo-musulmans, une des conséquences des événements ayant suivi la tragédie qui vient de nous frapper – et qui, à mes yeux, ne fait que commencer – est d'installer un divorce patent non seulement avec la communauté musulmane dans ce pays, mais aussi avec bon nombre d'États musulmans, comme le montrent les protestations exprimées dans certains de ces pays, y compris certains de ceux représentés lors de la manifestation du 11 janvier. Sentez-vous cette tension aussi à New York dans les délégations du monde arabo-musulman ?
Enfin, concernant la question clé du financement du terrorisme, au retour d'un voyage en Irak avec François Fillon à l'automne, nous avions demandé à Laurent Fabius qu'il saisisse la CPI pour qu'une enquête internationale soit diligentée pour savoir qui aide l'État islamique, qui fait passer les jihadistes et qui envoie de l'argent. Il ne s'est rien passé et je ne sais pas si la démarche a été faite, ni si la CPI donnerait droit à une demande de ce type. Pensez-vous que le Comité de lutte contre le terrorisme que vous avez évoqué serait un moyen possible pour mener une enquête internationale de ce genre, qui me paraît indispensable ? Voyez-vous un autre moyen d'action ? Daech n'est pas, comme le dit Laurent Fabius, qu'une « bande d'égorgeurs » : cela est bien plus grave et il est urgent de stopper les 1 000 jihadistes qui rejoignent chaque mois cette organisation et qu'on arrive à couper ses financements – qu'il s'agisse des exportations de pétrole par le biais de la Turquie ou des fondations arabes à la source de ces aides.
Nous avons assisté à une succession d'erreurs dans la politique syrienne de la France depuis plus de dix ans. Vous regrettez que personne ne nous suive, mais peut-être faut-il se demander si notre politique est pertinente. Allons-nous rester dans cette position solitaire ? Et quand on parle de l'opposition modérée, c'était peut-être une réalité il y a quelques mois, mais c'est aujourd'hui quasiment une fiction et on a assisté au ralliement de ladite opposition aux organisations les plus dures, que ce soit Al-Nosra ou Daech.
Quant au désengagement américain, il est assez patent par rapport aux autres seconds mandats des présidents précédents. En Afrique, les États-Unis ont ainsi tendance à faire sous-traiter les problèmes, y compris le grave problème du terrorisme, par des États plus courageux comme le nôtre, ce qui est peut-être dommageable. Y a-t-il des moyens de les mobiliser davantage sur la lutte contre le terrorisme, auquel l'Europe ou d'autres continents comme l'Afrique sont confrontés ? En outre, alors que l'exemple de Boko Haram est très inquiétant, je n'ai pas l'impression que les Nations unies soient mobilisées sur cette tragédie.
Il n'y a plus aucune force combattante internationale en Afghanistan. Le nouveau régime afghan tiendra-t-il ? Qu'en dit-on aux Nations unies alors que la culture de la drogue explose au profit des talibans ?
S'agissant de l'Iran, on voit bien qu'il est au coeur de toutes les crises, que l'économie du pays connaît de grandes difficultés depuis plus de trois ans, notamment à la suite des boycotts qui ont été décidés, notamment financiers, et que le régime des mollahs tient fondamentalement sur le subventionnement à la consommation. Quelle appréciation a-t-on des conséquences de l'effondrement du cours du pétrole sur la situation intérieure du pays dans les mois ou semaines à venir ?
En Centrafrique, la haine entre catholiques et musulmans est telle qu'on ne voit pas la solution à court ou moyen terme. L'idée d'une éventuelle partition du pays est-elle évoquée aux Nations unies ?
Quelle est la position des membres du Conseil de sécurité disposant du droit de veto à l'égard de l'initiative française tendant à restreindre ce droit en cas de crimes de guerre, en particulier s'agissant des États-Unis, de la Chine et de la Grande-Bretagne ?
Quelle est par ailleurs la position du Brésil dans la grande négociation climatique de la fin de l'année ? Joue-t-il un rôle positif ou bloquant ?
Enfin, quelle est la position des Britanniques vis-à-vis de la situation en Syrie ?
Merci pour votre panorama très complet.
La question des chrétiens d'Orient a-t-elle été traitée par le Conseil de sécurité, alors que la priorité de la France semble être de créer les conditions d'un maintien de tous les Irakiens dans leur pays ?
S'agissant de la réforme du Conseil, n'y a-t-il pas le risque qu'en faisant entrer trop de nouveaux membres permanents on nous fasse perdre notre siège au détriment de je ne sais quel groupe européen ?
Le 18 décembre dernier, le Conseil de sécurité a condamné fermement l'emploi d'armes lourdes en Syrie dans la zone de séparation. Quelle est l'évolution de la situation et quelles mesures ont été prises concrètement pour faire appliquer cette résolution ?
Enfin, peut-on mesurer exactement l'influence que nous avons dans les organes de l'ONU ? Il y a en outre une forme d'onuscepticisme. Que pourrait-on faire pour essayer de convaincre de l'utilité du Conseil de sécurité ?
Il y a des crises partout, qu'elles soient interétatiques ou d'influence, ou bien asymétriques, du faible au fort, c'est-à-dire du barbare au repu, trop bien nourri et plein d'illusions. Or la construction de l'ONU a été réalisée dans un monde bipolaire : cette structure est-elle encore efficace pour gérer des conflits multiformes et répartis partout dans le monde ? N'a-t-on pas intérêt à travailler davantage dans le cadre de l'Assemblée générale et au renforcement des pouvoirs coercitifs de cette instance ?
Estimez-vous finalement que le multilatéral est toujours la diplomatie des paresseux ?
Qu'apporte concrètement la résolution 2178 ?
N'est-il pas illusoire d'attendre en Irak que certains officiels du régime se rebellent contre son chef afin de garder l'appareil d'État et d'éviter que tout s'effondre – le président actuel étant toujours bien installé ? Ne serait-il pas temps de se rapprocher des Russes pour trouver une solution ?
Enfin, je ne comprends pas qu'on arrive à prendre des sanctions efficaces contre la Russie et qu'on ne parvienne pas à appliquer la moindre sanction contre un groupe terroriste comme Daech.
Vous avez confirmé avec conviction la capacité d'influence de la France aux Nations unies et, de fait, il n'y a guère d'autre solution que de s'engager dans cette voie, notamment s'agissant du conflit israélo-palestinien, qui n'enregistre pas de progrès.
Concernant la situation en Syrie, elle a été mal gérée par les États-Unis, qui ont refusé de s'engager au moment opportun alors que le crime de génocide ou contre l'humanité pouvait être imputé à Bachar el-Assad – avec une certaine complicité de la Russie, qui ne voulait pas qu'on touche à son allié syrien.
Je rappelle que la « responsabilité de protéger » (R2P) a été votée par l'Assemblée générale des Nations unies, y compris par la Russie, et que, depuis, le ministre Lavrov et l'ambassadeur de Russie en France nous disent qu'il s'agit d'un piège des Occidentaux, dans lequel on a eu tort de tomber. Quel espoir peut-on avoir de faire renoncer les grandes puissances à opposer un veto au Conseil de sécurité sur les questions génocidaires et de crimes contre l'humanité ?
Je crois qu'il n'y a pas d'autre choix que de poursuivre la politique engagée par la France, mais les risques sont grands et les chances de réussite minces. Il faudra aussi convaincre le peuple israélien que le péril pour lui est bien plus iranien que palestinien désormais. L'insécurité à son égard vient de la faiblesse américaine vis-à-vis de l'Iran s'agissant en particulier de la reconnaissance de la capacité de ce pays à s'équiper d'éléments de production nucléaire. Peut-être pourrions-nous travailler sur ce sujet notamment avec nos amis israéliens, sachant que nous voulons une solution viable pour Israël et la Palestine. La ligne de crête est difficile à tenir et, si je n'envie pas le rôle qui est le vôtre, j'admire votre obstination.
Quel regard porte-t-on à l'ONU sur Daech et l'intégrisme islamiste ? Qu'en est-il sur l'Afrique, aussi bien sur le Sahel que sur Boko Haram ?
Concernant la politique de la France au Moyen-Orient, on peut parfois avoir l'impression qu'elle s'aligne sur les positions des États-Unis et joue le rôle de sous-traitant. Cela ne tient-il pas au fait que nous nous situons encore dans un monde bipolaire nous amenant à rester proche des États-Unis et à prendre des distances envers la Russie ?
Monsieur Germain, face aux Palestiniens, qui demandaient le retrait des forces israéliennes des territoires occupés dans un délai de deux ans et aux Américains et aux Britanniques, qui ne voulaient pas de délai, nous avons proposé une solution de compromis consistant à prévoir un tel délai non pour la fin de l'occupation israélienne, mais pour l'achèvement des négociations.
Par ailleurs, nous considérons que la légitime défense et la demande de l'État irakien nous placent dans un cadre de légalité internationale avérée, sans avoir besoin de résolution supplémentaire.
Monsieur Lellouche, nous sommes sans doute le pays le plus actif aujourd'hui dans la recherche d'une démarche collective et consensuelle sur le conflit israélo-palestinien, même si chacun sait combien le chemin est difficile. C'est d'autant plus important que le statu quo conduit chaque jour à nous éloigner davantage de la solution des deux Etats et à favoriser la montée des extrémismes, ce qui n'est dans ni dans l'intérêt d'Israël ni dans celui des Palestiniens. La séquence des dernières semaines conduit en effet à un risque d'escalade, ou de fuite en avant, que nous nous efforçons de prévenir avec nos partenaires.
Après le formidable élan d'unité suscité par les attentats de Paris et la marche de chefs d'État la plus importante depuis les funérailles du Président Kennedy, le fait que le message de la France à travers « Je suis Charlie » soit perçu par certains comme ayant une tonalité antimusulmane a un écho en effet à New York. Dans la ligne des déclarations publiques des autorités françaises, la seule réponse possible me paraît être d'expliquer inlassablement nos positions, avec pédagogie et respect, et de tenir un langage condamnant avec la même force l'islamophobie, l'antisémitisme et le racisme.
S'agissant de la lutte contre le financement de Daech, c'est naturellement une priorité. Des résultats ont été obtenus, puisque selon certaines études récentes les revenus tirés par Daech de l'exploitation pétrolière sur le théâtre syro-irakien ont d'ores et déjà été divisés par près de deux.
Le problème est que, pour des raisons tenant à notre histoire et dont je suis fier, le blasphème n'est pas un crime en France alors qu'il est très mal vécu dans beaucoup de pays, y compris aux États-Unis. Nous avons donc à faire un difficile travail d'explication.
Par ailleurs, je note que l'adoption par le Parlement de la résolution sur la Palestine n'a pas aidé à faire baisser la pression : on assiste au contraire à la poursuite d'une stratégie palestinienne allant vers l'escalade, ainsi qu'à la même tendance côté israélien.
Nous n'allons pas recommencer le débat que nous avons eu sur ce point. Mais il est vrai que beaucoup de pays, dont certains non musulmans, sont choqués du fait que le délit de blasphème n'existe pas chez nous. Le Président de la République a commencé d'apporter une première réponse, consistant pour la France à redire ce à quoi elle tient pour elle-même sans faire la leçon aux autres. Nous avons intérêt à souligner qu'on peut ne pas aimer les unes de Charlie Hebdo tout en défendant la liberté d'expression. Et que lorsqu'il y a des contestations, elles doivent être portées devant les tribunaux. D'ailleurs, à plusieurs reprises, des responsables religieux de toutes les confessions ont fait cette démarche et se sont conformés aux décisions des tribunaux qui les ont déboutés.
Monsieur Loncle, la France estime que Daech et Bachar sont les deux faces d'une même médaille, que le premier a été nourri par la politique du président syrien et que la seule ligne possible est donc de soutenir l'opposition modérée, la seule à incarner une alternative démocratique possible
Je crois comme vous qu'un vent de désengagement souffle aujourd'hui sur les États-Unis, même s'il faut garder une certaine prudence pour la suite car il n'est pas impossible qu'un futur président plus interventionniste puisse changer le cours des choses.
Face aux drames provoqués par Boko Haram, la France est en première ligne pour tenter de mobiliser la communauté internationale, comme on l'a vu avec la conférence de Paris en mai dernier. Ces efforts trouvent naturellement leur prolongement à New York.
Monsieur Poniatowski, la France est l'un des pays les plus engagés, y compris à New York, pour renforcer la priorité et les moyens consacrés à la lutte contre la culture de la drogue en Afghanistan. C'est l'un des principaux messages que porte notre pays sur ce dossier dans les enceintes onusiennes.
Quant à l'Iran, la baisse du prix du pétrole contribue incontestablement, avec les sanctions, à priver ce pays d'une partie de ses ressources et donc, peut-on espérer, à l'encourager à conclure un accord sur le nucléaire.
Sur la Centrafrique, nous faisons en sorte que le Conseil de sécurité demeure attentif à la situation du pays. On a le sentiment vu de New York que, si la situation y reste difficile, la transition politique est vraiment engagée derrière la présidente transitoire et que la force des Nations unies, la MINUSCA, s'est déployée dans des conditions satisfaisantes. Nos partenaires à l'ONU créditent la France, ses forces armées et sa diplomatie, d'avoir permis d'éviter un génocide et de rétablir un processus politique et de stabilisation piloté par les Nations Unies.
Monsieur Bui, s'agissant de la position des membres permanents du Conseil de sécurité sur l'initiative française d'encadrement de l'usage du veto, il faut distinguer entre les Britanniques – favorables -, les Américains – qui sont partagés - – et les Chinois et les Russes – auprès desquels, il ne faut pas s'en cacher, il reste un gros travail de conviction à réaliser. Mais nous avons derrière nous l'immense majorité de la communauté internationale.
Vous avez tout à fait raison, avec les autres pays émergents le Brésil sera un des acteurs clés sur le climat en vue de la COP21.
Monsieur Quentin, les chrétiens d'Orient constituent en effet une préoccupation qui s'exprime dans le cadre des Nations Unies, et sur laquelle, pour des raisons historiques et politiques, on se tourne assez spontanément vers nous.
Concernant l'élargissement du Conseil de sécurité, nous le soutenons pour les deux catégories de membres, permanents et non permanents. Nous appuyons en particulier les efforts du G4, groupe réunissant le Japon, l'Allemagne, le Brésil et l'Inde, dans le cadre d'une réforme du Conseil préservant le droit de veto et la position de la France comme membre permanent.
Comme vous le soulignez, la résolution 2192 adoptée en décembre dernier a condamné l'utilisation d'armes lourdes par le régime syrien et les groupes d'opposition dans la zone d'observation des Nations Unies sur le Golan. Cette zone frontalière a vu ces derniers mois une progression des groupes d'opposition djihadistes, en particulier le Jahbat al-Nusra, au détriment de l'armée syrienne. Les casques bleus ont été conduits à évacuer l'essentiel de leurs positions pour se regrouper de manière temporaire du côté israélien de la frontière en raison des risques sécuritaires. Nous nous efforçons de préparer les Nations Unies à se redéployer dans la zone de séparation dès que les conditions de sécurité le permettront de manière à rétablir autant que possible la stabilité aux frontières sur le Golan.
L'onuscepticisme existe en effet et je l'ai particulièrement ressenti dans mon précédent poste à Washington. Mais pour nous Français, l'ONU est une organisation d'autant plus essentielle qu'elle correspond fondamentalement à nos intérêts, à nos valeurs, et que nous y disposons d'une influence sans équivalent par rapport aux autres organisations internationales.
Monsieur Myard, je considère l'Assemblée générale comme le « réacteur nucléaire » des Nations Unies, le lieu où se dessinent les grands mouvements de la communauté des Nations, un lieu où nous devons être omniprésents, peut-être plus encore que par le passé, sachant qu'il n'y a pas de petit combat et que toutes les questions qui y sont traitées méritent notre attention et notre engagement. Je suis donc favorable à ce que nous soyons davantage présents dans cette instance – j'en donne d'ailleurs tous les jours la consigne à mes équipes –, même si le renforcement des attributions de l'Assemblée générale est une autre question.
Monsieur Mariani, la résolution 2178 contient des éléments importants sur la lutte contre les combattants terroristes étrangers. Ce texte, négocié de haute lutte, nous permet au quotidien de faire valoir nos vues et d'encourager les États réticents à faire adopter des législations allant dans le même sens que la nôtre.
La Russie est en effet une des clés de la solution en Syrie. C'est la raison pour laquelle nous nous efforçons de rétablir des ponts avec ce pays là où nous le pouvons, notamment sur les volets humanitaire et chimique du dossier syrien – avec certains résultats sur ces deux fronts. C'est plus complexe sur le volet politique, pour lequel nous attendons les résultats des réunions de Moscou.
Monsieur Janquin, sur le conflit israélo-palestinien, il n'y a pas aujourd'hui d'autre piste réellement articulée sur la table que celle évoquée par la diplomatie française pour construire une démarche plus collective et plus structurée vers la solution des deux Etats.
Sur le dossier nucléaire iranien, il est vrai qu'Israël apprécie la fermeté française – nos interlocuteurs israéliens nous l'indiquent également à New York.
Monsieur Guibal, une des grandes difficultés que nous avons aux Nations unies est en effet de définir une appréciation commune – et partant une position commune - sur l'islam radical, car l'expression est perçue de manière très différente selon les pays. D'où la nécessité d'un dialogue sur ce point, que la France s'efforce de promouvoir.
C'est vrai et il n'y a pas de recette miracle. La seule est d'expliquer nos positions.
Enfin, Monsieur Guibal, nos partenaires au sein des Nations Unies ne perçoivent guère la France comme étant « alignée » sur les États-Unis au Moyen-Orient – ou ailleurs. Notre pays est perçu et apprécié comme une voix forte et indépendante.
La séance est levée à dix-sept heures cinquante-cinq.