commission élargie
(Application de l'article 120 du Règlement)
Mardi 27 octobre 2015
Présidence de M. Dominique Baert, vice-président de la Commission des finances, et de M. Jean-Jacques Urvoas, président de la Commission des lois
La réunion de la commission élargie commence à dix-huit heures trente.
projet de loi de finances pour 2016
Administration générale et territoriale de l'État
Monsieur le ministre de l'intérieur, nous sommes particulièrement heureux de vous accueillir en commission élargie afin de vous entendre sur les crédits du projet de loi de finances pour 2016 consacrés à la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».
La mission « Administration générale et territoriale de l'État » constitue le cadre budgétaire de gestion des moyens humains, matériels et financiers dont dispose le ministère de l'intérieur afin d'assumer trois de ses responsabilités fondamentales : garantir l'exercice des droits des citoyens dans le domaine des grandes libertés publiques ; assurer la présence et la continuité de l'État sur l'ensemble du territoire national ; mettre en oeuvre à l'échelon local les politiques publiques nationales.
Le projet de loi de finances pour 2016 propose de consacrer à l'ensemble de ces actions environ 2,52 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 2,54 milliards d'euros en crédits de paiement, soit une baisse des crédits de 12,33 % en autorisations d'engagement et de 12,51 % en crédits de paiement – chiffres qui ne tiennent pas compte des amendements déposés par le Gouvernement. Ce constat de diminution doit cependant être nuancé. La diminution observée tient, pour une part non négligeable, à la réduction des dépenses du programme 232, qui varie sensiblement en fonction du calendrier des scrutins électoraux ; aucun scrutin n'est prévu en 2016.
Après examen du projet annuel de performance, nous pouvons considérer que les crédits de la mission répondent, pour l'essentiel, à deux impératifs : prendre leur juste part à l'effort de réduction des déficits publics ; optimiser l'utilisation des ressources, sans préjudice pour le service rendu à l'usager et pour les devoirs qu'il incombe à l'État d'assumer sur l'ensemble du territoire. La rationalisation de la dépense publique ne saurait se résumer à une gestion comptable des effectifs et des moyens. Félicitons-nous donc du fait qu'un chemin de réforme ait été tracé en ce qui concerne le réseau préfectoral, notamment dans le cadre du plan « Préfectures nouvelle génération » (PPNG) et de la réforme de l'administration territoriale. Il importe aujourd'hui de donner corps aux nouvelles perspectives ouvertes par le Gouvernement en formalisant les réflexions engagées et en menant à bien les modernisations nécessaires. Cette exigence vaut tant pour l'organisation de l'administration territoriale que pour celle des fonctions support du ministère de l'intérieur et celle des scrutins électoraux, et c'est précisément sur ces sujets, monsieur le ministre, que je souhaite vous interroger.
Le ministère de l'intérieur a obtenu une atténuation de l'application du schéma d'emploi pour l'exercice 2016, en contrepartie de l'engagement d'une réforme structurelle de l'organisation des missions du réseau préfectoral dans le cadre du PPNG. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous préciser l'état de la concertation en cours avec les organisations syndicales, ainsi que les principales conclusions des six groupes de travail thématiques constitués pour réfléchir aux modalités de mise en oeuvre du PPNG ?
Reposant sur une redéfinition des missions prioritaires et des méthodes de travail des services, ce plan comporte notamment une réforme des procédures de délivrance des titres visant à réduire les démarches qui nécessitent un passage au guichet des préfectures. Selon les estimations du ministère, cette réorganisation permettrait de libérer 2 000 équivalents temps plein (ETP) de tâches inhérentes à la délivrance des titres et d'en redéployer 700 sur les autres missions prioritaires. À terme, pour quelles démarches faudrait-il encore passer au guichet des préfectures ? Par ailleurs, quelles mesures sont envisagées afin d'assurer la formation et la reconversion des agents appelés à travailler sur les plateformes assurant le traitement des demandes des titres ?
J'en viens à la réforme de l'administration territoriale. Pourriez-vous nous préciser les principales orientations arrêtées en ce qui concerne l'implantation des directions régionales, la spécialisation des sites par métier et la mutualisation et la rationalisation des moyens de fonctionnement ?
Au niveau infradépartemental, à la suite du remaniement de la carte des sous-préfectures en Alsace-Moselle, le ministère de l'intérieur a demandé aux préfets, sur d'autres parties du territoire, de présenter des propositions relatives au maillage des sous-préfectures. Je souhaite connaître les suites que le Gouvernement entend donner à ces travaux, et le rôle qui sera attribué demain aux sous-préfets dans le cadre de la réorganisation de l'administration territoriale de l'État. Plus spécifiquement, comment le Gouvernement souhaite-t-il articuler le réseau des préfectures et sous-préfectures avec la mise en oeuvre des schémas départementaux d'accessibilité des services au public ?
Le projet annuel de performances fait état de résultats pour le moins inégaux en ce qui concerne l'organisation des élections au meilleur coût, dans le cadre du programme 232. Comment assurer l'efficience de la dépense publique dans l'accomplissement de cette mission essentielle ? Le Gouvernement a-t-il de nouveaux éléments à apporter au débat sur la dématérialisation de l'envoi de la propagande électorale ? Comme l'an dernier, je considère qu'elle pourrait connaître une première mise en oeuvre lors du prochain scrutin présidentiel, compte tenu de la visibilité de cette élection structurante pour la vie politique française.
En tant que rapporteur pour avis des programmes « Administration territoriale » et « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », je me suis plus particulièrement penché, cette année, sur les conséquences, pour les services déconcentrés de l'État, des fusions de régions qui interviendront le 1er janvier 2016. La France métropolitaine comptera alors douze régions, au lieu des vingt et une régions actuelles, la Corse étant, elle, une collectivité territoriale à statut particulier.
L'administration territoriale de l'État a déjà connu de nombreuses évolutions et plusieurs réformes ces dernières années, dans un contexte de réduction des effectifs. La création des nouvelles régions obligera à de nouvelles réorganisations des services déconcentrés : les fusions de régions entraîneront des fusions de services, mais aussi de nombreuses réorganisations, qui s'étaleront de 2016 à 2018. Cette réforme est censée entraîner des économies, mais elle aura également un coût en termes d'accompagnement indemnitaire des agents et de nouveaux investissements.
Cela m'amène à une première série de questions. Quelles mesures d'accompagnement prévoyez-vous – en termes financiers ou de ressources humaines – en faveur des agents concernés par des réorganisations de services ? Dans quelle mesure les économies et les dépenses supplémentaires liées aux réorganisations de l'administration territoriale de l'État sont-elles prises en compte dans la construction du projet de loi de finances pour 2016 ? Au total, quelles économies nettes pouvons-nous attendre sur la période 2016-2018 ?
Un autre enjeu de la réforme sera, dans de nouvelles régions parfois très grandes, de maintenir une certaine proximité des services de l'État et d'empêcher une dévitalisation de certains territoires. Comment cette problématique de l'équilibre des territoires est-elle traitée dans la réorganisation de l'administration territoriale de l'État ? Quelles sont les règles retenues en matière d'implantation des sites des différents services de l'État ? Dans quelle mesure les redéploiements d'effectifs au niveau régional bénéficieront-ils au niveau départemental ? Plus généralement, quelles évolutions connaîtront les administrations départementales de l'État ?
La réorganisation de l'administration territoriale, dans le contexte des nouvelles grandes régions, pose également la question du rôle des préfets de région. Les fusions de régions entraîneront mécaniquement la disparition de neuf postes de préfets de région. On peut toutefois s'interroger sur la pertinence du maintien de la règle selon laquelle le préfet de région est le préfet du département où est situé le chef-lieu de la région. Dans le cadre de grandes régions, aux compétences renforcées, le cumul de ces deux fonctions paraît plus difficile à justifier qu'aujourd'hui. Comment envisagez-vous l'évolution du rôle des préfets de région dans les années à venir ? Pourquoi ne pas avoir mis fin à cette pratique actuelle du cumul ?
Mes dernières questions n'ont pas de lien direct avec les fusions de régions.
Un décret du 15 mai 2015 a modifié le statut des préfets, en particulier en supprimant la position dite « hors cadre », critiquée à plusieurs reprises, notamment par la Cour des comptes, qui s'était inquiétée en 2014 d'une « dérive des effectifs » des préfets hors cadre. Cependant, il crée de nouveaux types d'affectation des préfets en dehors de postes territoriaux. Les préfets peuvent ainsi : être nommés « conseillers du Gouvernement pour accomplir des missions auprès des pouvoirs publics », ou bien être affectés dans une administration centrale du ministère de l'intérieur ou du ministère des outre-mer ou dans un cabinet ministériel, ou encore devenir membres du Conseil supérieur de l'administration territoriale de l'État, devenu Conseil supérieur de l'appui territorial et de l'évaluation (CSATE). On ne mesure donc pas très bien ce que change concrètement ce décret. Je souligne d'ailleurs que, le 1er octobre dernier, on comptait plus de préfets sans affectation territoriale – ils étaient 128 – que de préfets affectés à un poste territorial – ils étaient 127. Au-delà de la suppression de la position « hors cadre », que change donc, monsieur le ministre, ce décret du 15 mai 2015 ?
Enfin – la question est devenue quasi rituelle au sein de la commission élargie consacrée à la mission « Administration générale et territoriale de l'État » –, où en est la réflexion sur l'évolution des sous-préfectures ? De nouvelles expérimentations, semblables à celles menées en Alsace en 2014, ne devaient-elles pas être annoncées par le Gouvernement d'ici à la fin de cette année ?
Permettez-moi tout d'abord de me réjouir du maintien du financement public des partis politiques à son niveau actuel. L'enveloppe prévue pour 2016 est effectivement de 68,7 millions d'euros, comme en lois de finances pour 2014 et pour 2015. Le financement public des partis avait été réduit de près de 10 % en loi de finances pour 2013 et de 5 % en loi de finances pour 2012. Sa stabilité ultérieure est due à un amendement que j'avais déposé, et que nous avions adopté en faisant preuve d'un bel unanimisme.
Le thème de mon rapport pour avis est, cette année, la modernisation de l'organisation des élections. Aucun scrutin n'étant prévu en 2016, c'est l'occasion de réfléchir à une évolution, afin d'éviter que ne se reproduisent en 2017 certaines difficultés rencontrées lors des précédents scrutins. Ce très vaste sujet a déjà suscité plusieurs contributions, tout particulièrement celle de Romain Colas, auteur d'un récent rapport d'information, et des projets de réforme sous la houlette du très actif président de notre commission des lois.
Je m'en suis, pour ma part, tenu à trois aspects de la question, sur lesquels j'interrogerai M. le ministre.
Le premier est la durée d'application de la législation sur les comptes de campagne. La durée de la période pendant laquelle les dépenses doivent être intégrées aux comptes de campagne est aujourd'hui d'une année pour l'ensemble des élections. À plusieurs reprises, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), présidée par M. François Logerot, a recommandé de la réduire à six mois, notamment parce que l'essentiel des dépenses se concentre dans les derniers mois de la campagne. Si nous souhaitons suivre cette recommandation lors des prochaines élections présidentielle et législatives, il faut évidemment que le Gouvernement ou le Parlement s'en saisissent très rapidement. Qu'en pensez-vous, monsieur le ministre ?
Le deuxième aspect de la question auquel je me suis intéressé est la dématérialisation de la propagande électorale. À plusieurs reprises, l'Assemblée nationale a rejeté les propositions du Gouvernement tendant à supprimer l'envoi aux électeurs, par la poste, des bulletins de vote et professions de foi des candidats aux élections européennes, régionales et départementales. À titre personnel, j'estimais que les dispositions proposées étaient conçues uniquement dans une logique d'économies budgétaires et qu'elles entraînaient un basculement trop brutal vers une procédure totalement électronique.
Cette année, le projet de loi de finances lui-même ne comporte aucune disposition sur cette question, mais l'une de ses annexes – le « jaune » consacré à la « revue de dépenses » – fait état d'une possible réforme d'ici aux élections présidentielle et législatives de 2017. L'économie attendue serait d'environ 150 millions d'euros.
Sur le fond, je ne suis pas hostile à la dématérialisation de la propagande électorale. Elle est d'ailleurs déjà en vigueur pour l'élection des conseillers consulaires à l'étranger, et connaît à ce titre des fortunes diverses. Elle avait été partiellement mise en oeuvre lors de l'élection des députés des Français de l'étranger.
Cependant, pour qu'elle puisse être étendue à d'autres scrutins, deux conditions me semblent nécessaires. Il faudrait, tout d'abord, proposer une démarche progressive, sur la base du volontariat, en permettant aux électeurs qui le souhaitent d'opter pour une propagande électorale sous forme électronique plutôt que sur papier. Il s'agit, ensuite, d'offrir une réelle alternative, plus attractive et plus riche, à l'actuelle propagande sur papier. Le numérique, ce n'est pas l'imprimerie. Ce n'est pas en scannant – mal – une profession de foi imprimée ou en créant un document au format PDF que l'on améliorera l'information des citoyens en matière électorale.
Concrètement, on pourrait envisager un site internet accessible à tous, quel que soit le matériel utilisé, dont le contenu devrait être facilement diffusable sur les réseaux sociaux. Il pourrait comporter des liens hypertexte, des images ou des vidéos. À terme, il serait possible de comparer les programmes des différents candidats. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous en dire plus sur les intentions du Gouvernement en la matière ?
Le dernier aspect concerne les difficultés spécifiques des campagnes et des élections à l'étranger. Élu de la deuxième circonscription des Français établis hors de France, je sais d'expérience que les campagnes électorales menées à l'étranger présentent plusieurs particularités qui ne sont malheureusement pas suffisamment prises en compte par notre législation et notre réglementation. Il serait irresponsable de ne pas traiter cette question d'ici aux élections législatives de 2017, alors que nous avons pu constater, en 2012, les insuffisances de la législation — qui se sont traduites par plusieurs invalidations, notamment celle de l'élection d'une collègue membre de la commission des lois.
J'évoquerai trois difficultés, parmi de nombreuses autres. Premièrement, en ce qui concerne, les modalités de paiement à l'étranger, il me paraît nécessaire de renforcer les pouvoirs des mandataires délégués. Cela permettrait de limiter les rejets de comptes de campagne motivés par des paiements directs effectués par les candidats eux-mêmes. Deuxièmement, la faculté d'ouvrir des comptes bancaires à l'étranger est aujourd'hui très limitée et se heurte à de nombreuses difficultés pratiques. Troisièmement, il n'est pas possible de continuer à appliquer le taux de change, dit « taux de chancellerie », en vigueur un an avant l'élection pour convertir en euros les dépenses réglées en monnaie locale. Je propose de retenir le taux en vigueur six mois avant l'élection.
Tous ces points peuvent paraître techniques, mais ils sont cruciaux pour la bonne organisation des scrutins à l'étranger. Il nous faut agir vite, avant les échéances de 2017. Quels sont, monsieur le ministre, les projets du Gouvernement en la matière ?
Je remercie tout d'abord infiniment M. le rapporteur spécial et MM. les rapporteurs pour avis. Leur travail, de très grande qualité, témoigne d'un ensemble de préoccupations que le Gouvernement partage. Je veux donc leur répondre de manière extrêmement précise.
M. Colas m'interroge sur les conditions dans lesquelles nous allons mettre en oeuvre la réforme de l'administration territoriale de l'État et plus particulièrement, pour ce qui relève des compétences de mon ministère, le plan « Préfectures nouvelle génération ». Entre 2006 et 2012, ce sont 3 700 emplois qui ont été supprimés dans l'administration préfectorale et sous-préfectorale. Chaque préfecture comptant environ 250 à 300 emplois, cela signifie qu'a été supprimé l'équivalent de douze à treize préfectures. L'application de cette logique de rabot a conduit, dans un certain nombre de territoires, à une aporie de l'administration de l'État : des collectivités territoriales ont constaté qu'elle contribuait à les affaiblir elles-mêmes. En milieu rural, les collectivités locales sont effectivement désormais dans l'impossibilité de bénéficier de services d'ingénierie de l'administration préfectorale et sous-préfectorale, alors que la complexité croissante des normes environnementales et d'urbanisme, entre autres, rend un tel accompagnement indispensable à la réalisation de leurs projets, quand bien même elles ont, par ailleurs, les moyens de les financer. J'ai donc engagé, au terme d'une discussion approfondie avec mes services, une réforme très ambitieuse de l'administration préfectorale et sous-préfectorale, réforme que rend également nécessaire notre réforme des collectivités territoriales, puisque trois grands textes de loi – la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM), la loi relative aux régions et la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) – redessinent le visage des collectivités territoriales.
En quoi consiste ce projet « Préfectures nouvelle génération » ? Nous visons trois objectifs. Il s'agit, tout d'abord, de sortir de la révision générale des politiques publiques (RGPP) et de redonner de la force à l'administration préfectorale et sous-préfectorale, grâce à une réforme structurelle et à un abandon de la logique de rabot. La mise en place de plateformes régionales, interrégionales et nationales de titres conduira ainsi à mutualiser un certain nombre de fonctions dans le domaine des titres d'identité, des passeports et d'autres pièces, comme les cartes grises. Selon nos calculs, cela permettra de dégager 2 000 ETP. Or l'effort budgétaire que le secrétaire d'État au budget demande au ministère de l'intérieur de fournir d'ici à 2017 est de 1 300 ETP. Cela signifie que notre réforme structurelle permettra de libérer 700 emplois de plus. Je propose d'en profiter pour remettre de la substance et de la compétence dans l'administration préfectorale et sous-préfectorale, notamment dans les domaines dans lesquels les collectivités nourrissent certaines attentes à son égard.
Il s'agit, ensuite, de recentrer les préfectures sur leur coeur de métier. Après l'ingénierie, je pourrais évoquer la lutte contre la fraude, domaine dans lequel je souhaite que l'administration préfectorale et sous-préfectorale renforce ses compétences, ou le contrôle de légalité, en amont duquel les collectivités locales ont besoin d'un plus fort accompagnement par les services de l'État, mais je n'épuiserais pas la totalité des questions que l'administration placée sous ma responsabilité pourrait avoir à traiter. C'est donc une véritable refonte du cahier des charges de l'administration préfectorale que je souhaite.
Il s'agit, enfin, de profiter de ce grand mouvement de réforme pour reconfigurer, au plan infradépartemental, la carte des préfectures, sous-préfectures et maisons de l'État. La réforme régionale divise par deux le nombre de préfectures de régions. Les préfectures départementales, pour leur part, bénéficieront de compétences nouvelles. En vertu de la charte de la déconcentration, les préfets de département disposent désormais de compétences en matière de gestion budgétaire et de gestion des ressources humaines qu'ils n'avaient pas auparavant.
Quant aux sous-préfectures, je souhaite que leur carte, inchangée depuis 1926, soit adaptée. Il ne s'agit pas de prendre la carte de France pour faire des croix sur les sous-préfectures que l'on veut supprimer, comme cela fut fait pour les tribunaux il y a quelques années ; il s'agit de supprimer des sous-préfectures là où les évolutions sociologiques et démographiques le justifient, d'en créer à d'autres endroits où, au contraire, le besoin de présence de l'État se fait plus fort, et de déterminer dans quelles conditions les maisons de l'État que l'on crée peuvent se substituer à des sous-préfectures. Les maisons de l'État peuvent effectivement être le fruit d'une ré-articulation d'un certain nombre de services de l'État avec des services de collectivités locales ou se substituer à d'anciennes sous-préfectures avec un élargissement du périmètre d'intervention à la faveur de coopérations avec des services de collectivités locales ou d'autres services de l'État, non préfectoraux. Ainsi ai-je récemment inauguré, dans les Pyrénées-Atlantiques, une maison de l'État exerçant des compétences interministérielles que la sous-préfecture n'avait pas jusqu'à présent.
Nous souhaitons que ce travail soit mené à bien à l'horizon 2017. J'ai mandaté les préfets de région pour déterminer ce qu'il convient de faire et redessiner la carte des sous-préfectures et des maisons de l'État. Par ailleurs, dans le cadre des schémas départementaux d'accessibilité des services au public, ce sont 1 000 maisons de service public que nous souhaitons créer en plus des maisons de l'État et de la refonte des sous-préfectures pour renforcer considérablement le maillage des services publics territoriaux.
Toute cette réforme que j'ai engagée appelle bien entendu une attention particulière à la gestion des ressources humaines. Nous allons effectivement devoir permettre une mobilité fonctionnelle pour éviter de recourir à la mobilité géographique. J'ai donc confié au secrétaire général du ministère de l'intérieur le soin de mettre en place une cellule d'accompagnement des personnels dans la formation. Mettons vraiment l'accent sur la formation des personnels pour leur offrir des perspectives de carrière qui ne leur étaient pas ouvertes jusqu'à présent et accompagnons-les dans le développement de leurs compétences. Cette démarche devra se doubler d'un effort particulier de dialogue social avec les personnels des préfectures et des sous-préfectures.
Les questions de M. Zumkeller me donnent l'occasion de préciser l'impact de la réforme des régions sur l'administration déconcentrée de l'État. Qu'en est-il, tout d'abord, des effets de la fusion des régions en matière d'accompagnement financier ou en termes de ressources humaines des agents concernés par des réorganisations de services ? Je l'ai dit tout à l'heure, le nombre de régions passe de vingt-deux à treize : l'organisation des services de l'État se fondera donc dès le 1er janvier 2016 sur cette nouvelle cartographie.
Deux stratégies étaient possibles. L'une aurait consisté à concentrer l'ensemble des directions régionales de l'État dans la nouvelle préfecture de région des régions fusionnées. Sans doute aurions-nous ainsi gagné en centralisation et peut-être en rationalité, mais nous aurions beaucoup perdu en proximité et en aménagement du territoire. Il s'agissait donc de veiller à l'équilibre du territoire sans compromettre les économies que l'État attendait de cette réforme.
J'ai donc proposé une démarche qui permette d'atteindre les deux objectifs à la fois et confié aux préfets préfigurateurs des régions – les préfets des chefs-lieux régionaux issus de la fusion – le soin de répartir les administrations régionales de l'État entre les anciennes capitales régionales, en tenant compte de ce que sont les spécificités territoriales et économiques des régions avant la fusion. Ainsi, il était évident pour nous, pour des raisons qui tiennent à la spécificité de l'activité champenoise, que la direction régionale de l'agriculture de la nouvelle région Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine, dite Grand Est, fût implantée à Châlons-en-Champagne plutôt qu'ailleurs, tandis que les moyens de la zone de défense devaient être maintenus à Metz, pour des raisons qui tiennent à l'histoire et pour éviter que cette ville ne pâtisse d'un autre choix. Quant au rectorat, nous l'avons maintenu à Nancy. Nous avons donc réparti les grandes directions régionales de l'État en fonction des spécificités territoriales et des blocs de compétences. Par exemple, les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), plus particulièrement chargées des conséquences environnementales des activités agricoles, ont vocation à être établies au même endroit que les directions régionales de l'agriculture. Il s'agit de permettre aux services de coopérer les uns avec les autres et de veiller à une lisibilité globale de la réforme.
D'où viendront les économies ? Tout d'abord, les effectifs des secrétariats généraux pour les affaires régionales (SGAR) seront réduits de 30 %, car il n'y aura plus qu'un SGAR par grande région fusionnée. La mutualisation rendue possible par la fusion des SGAR permettra donc des économies de 30 %. Même si une partie des compétences sont redéployées pour mettre en place des équipes d'ingénierie projetables, notamment, vers les territoires ruraux et les intercommunalités rurales, nous réaliserons un gain incontestable. S'y ajoutera par ailleurs un gain mécanique résultant de la mutualisation, au niveau des grandes régions, de l'ensemble des fonctions support des anciennes directions régionales, puisqu'il y avait autant de fonctions support que de préfectures régionales.
Comment chiffrer ces économies de fonctionnement ? Je vous garantis qu'elles seront au rendez-vous, mais je ne peux vous donner de chiffres précis avant que ce travail n'ait abouti. Si leurs présidents en sont d'accord, je reviendrai donc dans quelques mois donner à vos commissions des chiffres précis. Ainsi le Parlement pourra-t-il jouer son rôle de suivi. Par ailleurs, même si elles ne dépendent pas de mon ministère, n'oublions pas les économies qui résulteront, à terme, du même mouvement de mutualisation opéré au sein des conseils régionaux.
Je crois donc avoir indiqué de façon synthétique comment la problématique de l'équilibre territorial avait été traitée. Quant aux redéploiements d'effectifs, le dispositif de mobilité et d'accompagnement de la formation des personnels que j'évoquais tout à l'heure, à propos du plan « Préfectures nouvelle génération », vaut également pour la refonte de l'administration territoriale de l'État. Cette cellule placée auprès du secrétaire général de mon ministère permet ainsi de suivre la totalité de la réforme de l'État.
Qu'en est-il du métier de préfet ? Avec les dispositions réglementaires prises au mois de mai dernier, nous avons engagé une importante réforme du corps préfectoral. Celle-ci était fort attendue, comme en témoignaient les remarques, justifiées, de la Cour des comptes, auxquelles elle entend répondre.
La réforme repose sur plusieurs principes. Il s'agit tout d'abord de mettre fin à certaines pratiques, qui n'étaient pas bonnes. Ainsi le maintien en activité de préfets qui avaient dépassé leur âge limite d'activité contribuait à l'embolisation du corps préfectoral. Certains avaient manifestement du mal à surmonter l'angoisse que leur inspirait le passage à l'inactivité professionnelle – c'était oublier qu'une autre activité est possible après l'activité professionnelle. J'ai mis fin à cela. On ne peut plus, désormais, poursuivre son activité professionnelle au-delà de l'âge limite, et cela vaut pour tout le monde.
J'ai également mis fin au statut de préfet « hors cadre », notion péjorative et dévalorisante pour le corps préfectoral. Je veux des préfets forts, car il est bon pour les services publics et la République d'avoir des préfets forts dans un État fort. Le ministère de l'intérieur doit rompre, dans ses habitudes, avec tout ce qui est de nature à affaiblir le corps préfectoral. Nous avons donc substitué aux préfets hors cadre des conseillers du Gouvernement, nommés en conseil des ministres, ouvert la hors cadre au président et vice-président du CSATE, et arrêté un principe d'affectation des conseillers du Gouvernement dans des fonctions réelles. Autrement dit, je souhaite qu'il n'y ait plus du tout de membres du corps préfectoral sans fonctions.
Vous estimez, monsieur Zumkeller, que le nombre de 128 préfets sans affectation territoriale témoigne du fait que nous n'avons pas réglé le problème. Je veux apporter des précisions. Outre les conseillers du Gouvernement à qui j'ai confié des missions particulières, qui me conduisent à les rencontrer souvent et à les mobiliser toujours, outre les préfets affectés au Conseil supérieur de l'administration territoriale de l'État, les préfets affectés en administration centrale et les préfets en cabinet ministériel, il y a également des préfets détachés, pour exercer des missions au service d'autres ministères dans divers domaines, comme l'environnement ou des questions internationales. Mon objectif est de faire en sorte qu'une mission soit bien confiée à tout conseiller du Gouvernement ou préfet sans affectation territoriale et de réduire à zéro le nombre des préfets sans mission à l'horizon 2017.
Est-il bien sérieux de maintenir le cumul entre la fonction de préfet de région et celle de préfet de département chef-lieu ? Je le maintiendrai, faute de quoi nous ne ferions pas d'économies. En outre, nous ne nommons que des préfets énergiques et volontaires, qui ont choisi les ennuis plutôt que l'ennui. Ainsi chacun peut-il s'épanouir dans les fonctions qui lui sont confiées.
Est-il envisageable, me demande M. Coronado, de réduire à six mois la durée de la période pendant laquelle les dépenses doivent être intégrées dans les comptes de campagne ? La commission à laquelle vous appartenez, monsieur le député, y réfléchit et le président Urvoas a lui-même quelques idées sur la question. Je ne saurais me montrer ouvert aux propositions des parlementaires membres de votre commission si je fermais la porte avant qu'ils ne commencent à les formuler ; ce ne serait pas une bonne méthode de travail.
Cela dit, il y a des avantages et des inconvénients. Une durée suffisamment longue permet de retracer les dépenses faites dans un contexte où elles peuvent, pour un certain nombre d'élections, être antérieures à la période de six mois précédant le scrutin. En effet, certains candidats commencent leur campagne bien plus tôt, notamment dans le cadre de primaires, phénomène nouveau dans la vie politique française et dont il faudra tenir compte pour procéder à la comptabilisation des dépenses de campagne. En même temps, les expériences récentes et les remarques de la CNCCFP montrent qu'une durée longue ne permet pas forcément toute la traçabilité et toute la transparence nécessaires.
Je vous propose de ne pas clore ce débat aujourd'hui. Le Gouvernement est ouvert à l'idée d'examiner la question avec les parlementaires, pour peu que ceux-ci y soient disposés – mais c'est généralement le cas au sein de la commission des lois. Considérons tous les avantages et tous les inconvénients des deux durées afin de prendre la décision la plus consensuelle possible. Je parle d'un consensus non pas simplement entre le Gouvernement et le Parlement, mais aussi entre les formations politiques de la majorité et de l'opposition. Lorsqu'il s'agit de définir des règles électorales, plus le consensus et le compromis règnent entre les formations politiques, moins les objectifs visés nourrissent la suspicion.
Ministre du budget, j'étais très favorable à la dématérialisation des élections et de la propagande électorale, qui peut permettre de très significatives économies. Je le suis resté après être devenu ministre de l'intérieur, parce que je considère que tous les ministères doivent contribuer aux efforts budgétaires et que, lorsqu'il s'agit du redressement des comptes et des intérêts supérieurs de l'État, il ne saurait être question de changer de point de vue à la faveur d'un changement de maroquin. Si je suis très favorable à cette évolution, c'est aussi parce qu'un très grand nombre de pays européens, pas moins démocratiques ni plus numérisés que la France, l'ont connue. Elle a pu susciter des débats, mais le résultat n'en a pas moins été un dispositif beaucoup plus moderne, qui permet une diffusion de la propagande électorale beaucoup plus rapide et efficace qu'auparavant. La modernisation de la société doit aussi permettre d'engranger des progrès, de faire des économies et de renforcer l'accessibilité des citoyens à l'information électorale.
Je n'en partage pas moins le point de vue que vous avez exprimé : cela ne peut pas se faire de façon brutale, sans concertation avec les formations politiques concernées qui concourent au scrutin ni avec les maires eux-mêmes. La connexion à internet reste difficile en certains endroits de notre pays. En outre, quand bien même les réseaux numériques sont présents, certains de nos concitoyens n'y ont pas accès. Il nous faut donc définir les conditions dans lesquelles la dématérialisation n'obère pas l'accès de tous à l'information électorale.
À l'occasion des élections départementales, nous avons lancé, dans cinq départements, une expérimentation qui s'est révélée assez concluante. Il s'agissait de permettre un accès numérique à la propagande électorale en même temps qu'un accès sur papier, et de sensibiliser les citoyens à la nécessité de préférer le numérique au papier. Si vous en êtes d'accord, je propose un travail partenarial entre la commission des lois et le Gouvernement, qui permette de tirer tous les enseignements de cette expérimentation et de déterminer les conditions et le calendrier de son éventuelle extension. Il nous faut notamment réfléchir à l'implication des associations d'élus dans cette réforme afin qu'elle soit la plus consensuelle possible. Des propositions de loi sont à l'étude. Qui dit proposition de loi dit étude d'impact et nécessité d'une réflexion commune. Il y a donc matière à faire, vite, bien et ensemble. En tout cas, ma position est fort claire : je suis très favorable à cette évolution.
J'en viens à votre question non intéressée et par ailleurs tout à fait légitime, monsieur Coronado, sur les difficultés spécifiques rencontrées lors des campagnes et des élections à l'étranger. Selon vous, ces difficultés sont de trois ordres. Premièrement, s'agissant des modalités de paiement à l'étranger, il vous paraît nécessaire de renforcer les pouvoirs des mandataires délégués, ce qui permettrait de limiter les rejets de comptes de campagne lorsque des dépenses sont payées directement par les candidats eux-mêmes. Deuxièmement, vous souhaitez élargir la faculté d'ouvrir des comptes bancaires à l'étranger, laquelle est aujourd'hui très limitée et se heurte à de nombreuses difficultés pratiques. Troisièmement, pour convertir en euros les dépenses réglées en monnaie locale, il n'est pas possible, d'après vous, de continuer à appliquer le « taux de chancellerie » en vigueur un an avant le scrutin.
Je souhaite vous faire part de deux réflexions. D'une part, lors des élections législatives de 2012, les décisions de la CNCCFP relatives aux candidats dans les circonscriptions des Français de l'étranger se sont distinguées par une proportion d'approbation pure et simple et d'approbation après réformation nettement inférieure à celle qui a été constatée pour l'élection des autres députés de France. Je propose donc que nous soyons prudents avant d'envisager de grandes évolutions.
D'autre part, le financement des campagnes pour l'élection des députés des Français de l'étranger fait déjà l'objet, je le rappelle, de règles très spécifiques, formulées dans les articles L. 330-6-1 et suivants du code électoral, qui prennent en compte la situation particulière des candidats. Ainsi, les modalités de financement diffèrent selon le pays considéré : il y a les pays dans lesquels la monnaie est convertible ; les pays dans lesquels le mandataire délégué peut payer certaines dépenses qui lui sont remboursées par le mandataire, sans pour autant être autorisé à ouvrir un compte spécial ; les autres pays, dans lesquels le mandataire délégué peut ouvrir un compte spécial. Je conviens que ces dispositions sont complexes à mettre en oeuvre pour les candidats, particulièrement pour ceux qui se présentent dans des circonscriptions qui couvrent plusieurs pays.
Je propose d'engager une réflexion. Il s'agirait d'assouplir le dispositif pour les candidats en matière de paiement des dépenses ou de perception des ressources, tout en maintenant un contrôle efficient des comptes par la CNCCFP. Plusieurs solutions peuvent être envisagées dans ce cadre, quel que soit le pays considéré : permettre au mandataire délégué d'ouvrir un compte bancaire spécial ; élargir la liste des dépenses pouvant être payées par les mandataires délégués ; permettre au mandataire délégué d'utiliser la carte bancaire du mandataire liée au compte du candidat. Je souhaite que ces solutions fassent l'objet d'une expertise technique approfondie et que soit mis en place, à cette fin, un groupe de travail qui associerait le ministère des affaires étrangères, celui de l'intérieur, celui des finances et des comptes publics, la CNCCFP, la Banque de France, l'ordre des experts-comptables et des parlementaires concernés.
Je saisis vos propositions au vol, monsieur le ministre. La réflexion sur le financement des campagnes à l'étranger requérant une ingénierie assez lourde, je propose que nous prenions un peu de temps pour la mettre en place. En revanche, si vous en êtes d'accord, monsieur Coronado, je suis disposé à vous solliciter pour mener rapidement une réflexion sur la dématérialisation de la propagande électorale, pour ce qui relève de la commission des lois. En la matière, il me paraîtrait opportun de commencer par la prochaine élection présidentielle.
Monsieur le ministre, vous nous présentez un budget très structuré, qui prend acte du fait que l'année 2016 ne sera pas une année électorale et permet d'entrer dans une dynamique de modernisation, ainsi que vous venez de l'évoquer à l'instant, avec notamment l'enjeu du numérique.
L'administration de l'État incarne la force de la loi et du droit, mais elle est aussi garante de la pondération des politiques publiques. Son action est indispensable sur tous nos territoires. Vous savez à quel point certains de nos concitoyens se sentent parfois loin de tout.
Quelle place le numérique va-t-il prendre dans le plan de modernisation des préfectures ? Actuellement, tous les territoires ne sont pas encore entièrement couverts par une connexion à internet de bon niveau. Or une telle connexion est nécessaire pour permettre aux préfectures d'assumer toutes les fonctions qui leur reviennent, pour sécuriser le travail des services et des fonctionnaires, et pour assurer la solidarité entre les territoires. Quelle politique comptez-vous mener en la matière ? D'autre part, de quelle façon l'État va-t-il accompagner les membres du personnel qui vont devoir adapter leurs compétences, individuelles et collectives, aux nouvelles missions qui vont leur incomber à la suite de la restructuration des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ?
Je vous remercie d'avoir engagé le travail de mise en place des plates-formes régionales d'instruction des demandes de passeport et de naturalisation. Cette réorganisation indispensable sera enfin réalisée. Je tiens à le souligner.
Je salue le regroupement des services du ministère de l'intérieur et du ministère de l'écologie compétents en matière de sécurité et d'éducation routières. Il donnera une véritable cohérence à notre action en la matière, essentielle sur l'ensemble du territoire national, ainsi que nous l'avons encore constaté cette année, notamment avec l'accident d'une exceptionnelle gravité qui s'est produit il y a quelques jours. Je présente mes condoléances aux familles et aux collectivités territoriales qui ont été touchées, et rends hommage à l'ensemble des services qui sont engagés sur le terrain.
Vous avez fait du renforcement des effectifs dans les services régionaux de l'État une orientation forte, prenant acte des réformes que nous avons votées et qui ont été engagées, avec la nouvelle carte territoriale et la montée en puissance des régions et des métropoles. Cela se traduira par une baisse des effectifs dans les services départementaux. C'est, là encore, une réforme essentielle.
Je vous remercie, monsieur le ministre, pour ce budget opérationnel, dont les objectifs sont clairs, et qui porte la marque d'une action constante et déterminée.
Cette année, les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État » doivent évidemment s'analyser à l'aune du « big-bang régional » qui s'est réalisé dans les conditions que chacun sait, un soir d'avril 2014 dans le bureau du Président de la République, le territoire métropolitain de la République passant de vingt-deux régions à treize. Nous assistons ainsi à une reconcentration des moyens de l'État autour de treize « super-préfets de région » alors que, dans le même temps, les effectifs des préfectures continuent de fondre, avec, pour 2016, la disparition prévue de 1 159 ETP dans les services départementaux de l'État. Vous donnez vous-même ce chiffre à la page 35 de votre « bleu budgétaire », monsieur le ministre : le plafond d'emplois – seule réalité que je connaisse en matière d'effectifs – passera de 26 191 à 25 032 ETP dans ces services. De notre point de vue, il y a une contradiction entre, d'une part, la réduction du nombre de régions, l'accroissement de leur périmètre et la réorganisation des services de l'État dans ce cadre et, d'autre part, l'affaiblissement de l'échelon départemental.
Les députés du groupe Les Républicains et beaucoup d'autres collègues s'inquiètent : il s'agit d'un éloignement sans précédent des services de l'État. Et la répartition géographique des grandes directions régionales que vous avez évoquée tout à l'heure n'y change pas grand-chose, aussi habile ou opportune soit-elle. Je parle d'éloignement sans précédent car, depuis qu'il existe des préfets de départements, c'est-à-dire depuis le Consulat et, plus précisément encore, depuis l'an VIII, c'est bien l'échelon départemental qui est le pivot central de notre organisation administrative.
Dans ce contexte de reconcentration au niveau des préfectures de région, la réduction d'un millier d'emplois dans les services départementaux va véritablement « sous-préfectoraliser » les préfets de départements. Face à ce mouvement, nous aurions aimé, au contraire, que le rôle et les moyens des préfets de département soient réaffirmés. Sur ce point, votre plan « Préfectures nouvelle génération » ne nous rassure pas. L'enjeu est évidemment non pas le sort personnel du préfet de département ou celui de son secrétaire général, mais celui de la proximité pour l'exercice de politiques publiques, ainsi que l'a souligné Michel Zumkeller.
Lorsque l'on connaît les difficultés qu'a aujourd'hui un préfet de département à mobiliser certains services régionalisés de l'État dans de petites régions comptant quatre à six départements – dans ma commune d'Eure-et-Loir, nous avons ainsi le plus grand mal à obtenir, avec le préfet de département, que la DREAL exerce ses pouvoirs de police spéciale sur une installation classée, car c'est, de son point de vue, un petit dossier concernant un territoire relativement périphérique –, on n'ose imaginer ce que cela donnera dans les futures grandes régions comptant douze ou treize départements telles que Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées ! Cette myopie va nécessairement s'aggraver. En l'absence de moyens humains, monsieur le ministre, vous auriez pu ouvrir un chantier, certes interministériel, sur les moyens juridiques dont devraient disposer les préfets de départements pour saisir les services régionalisés de l'État, désormais bien lointains.
Compte tenu du besoin de proximité que vont créer vos grandes régions, le sort des sous-préfectures revêt une importance nouvelle. À la fin du mois d'août, à Bayonne, vous avez affirmé vouloir « réformer profondément l'organisation infradépartementale de l'État ». Vous venez de nous en dire un peu plus à ce propos. Si l'on peut comprendre qu'il soit nécessaire d'adapter la carte des sous-préfectures, la réduction de leur nombre et leur remplacement éventuel par des maisons de l'État entraîneront, selon moi, une perte en qualité de service pour les territoires concernés. Le Premier ministre a déclaré à plusieurs reprises vouloir « faire reculer le sentiment d'abandon des territoires ruraux ». Nous craignons, bien au contraire, que vous n'aggraviez encore ce sentiment, ainsi que vous l'avez déjà fait avec le redécoupage brutal des cantons.
Je terminerai par deux questions. Premièrement, ce sont les services des préfectures qui reçoivent les déclarations d'acquisition et de détention d'armes de catégorie C et D. Il s'agit d'armes de chasse, mais aussi, parfois, de fusils à pompe. Or la faiblesse des moyens humains dont disposent aujourd'hui les préfectures rend cet enregistrement quasi automatique. Pouvez-vous nous rassurer sur le fait qu'il y a bien une consultation systématique des fiches S chaque fois qu'une telle déclaration est faite ?
Deuxièmement, vous proposez d'accroître significativement les moyens consacrés à la formation des imams. C'est, selon moi, une bonne chose que l'État s'assure de la qualité de cette formation, et même une évidence lorsqu'il s'agit d'aumôniers. En revanche, je m'interroge sur le fait qu'elle soit financée par des fonds publics. Cela vous semble-t-il conforme à la loi de 1905 ?
J'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer, mais je souhaite revenir sur un certain nombre de points qui ont été soulevés.
Dans la mesure où il intervient après une réforme territoriale d'ampleur, ce budget doit vraiment être l'occasion d'une réorganisation globale des territoires. Il faut aussi en profiter pour dématérialiser les procédures et utiliser des moyens modernes, notamment la vidéoconférence, afin de maintenir des services dans des territoires relativement isolés. Cette idée est revenue fréquemment au cours des auditions que nous avons conduites. Si ces nouvelles technologies nécessitent d'investir des moyens au départ, elles seront source, ensuite, de nombreuses économies. Nous serons vigilants sur ces aspects très importants.
Malgré son importance, l'élection présidentielle est très certainement la plus propice pour tester la dématérialisation de la propagande électorale. Je pense que nos compatriotes comprendront que c'est plutôt une bonne chose, en dépit du choc de départ.
À ce stade du débat, le groupe Union des démocrates et indépendants n'a pas d'objection majeure à l'adoption des crédits de cette mission.
Les crédits du programme « Vie politique, cultuelle et associative » enregistreront une baisse par rapport à l'année 2015, marquée par les élections départementales puis régionales, ces dernières devant être moins dispendieuses. Les années passées, j'étais rapporteur pour avis pour les crédits de ce programme et j'avais cosigné les amendements tendant à empêcher la dématérialisation de la propagande électorale pour les élections européennes, puis pour les élections départementales et régionales. Lesdits amendements avaient été votés par les députés et acceptés par le Gouvernement, d'ailleurs de bonne grâce. Je note avec intérêt votre volonté d'avancer sur ce sujet, monsieur le ministre, avec une méthode. La fracture numérique peut être technique, mais il peut aussi s'agir de personnes âgées qui ne savent pas se servir de l'outil informatique – quoiqu'il ne faille pas verser dans la caricature : certains anciens l'utilisent très bien. L'année dernière, nous nous étions accordés sur l'idée de commencer par l'élection présidentielle, emblématique et très bien reprise par les médias. Cet accord semble perdurer aujourd'hui, ce dont on ne peut que se féliciter.
Nous sommes satisfaits que les crédits dédiés au financement des partis se stabilisent à 68,7 millions d'euros en 2015 et en 2016, après une baisse de 10 % en 2014, que nous avons acceptée. Les partis sont un élément fondamental de notre démocratie, d'où l'importance de leur financement. À cet égard, je ne reviens pas sur certaines mauvaises pratiques qui ont défrayé la chronique.
S'agissant de l'exercice des cultes, je note les crédits destinés à financer les formations universitaires et de recherche en islamologie. On se rend compte que les imams ont quelques difficultés à s'adapter à notre mode de vie lorsqu'ils viennent de pays où les pratiques sociales sont très différentes des nôtres, par exemple l'Arabie saoudite. C'est donc plutôt une bonne chose de les former directement chez nous. Cela contribuera à faire émerger un islam de France, avec des imams plus en phase avec les pratiques sociales du pays dans lequel ils sont amenés à dispenser leur enseignement. Je constate un certain accord de la part de mes collègues sur ce point.
Je salue les propositions intéressantes formulées dans le rapport pour avis de Sergio Coronado concernant la modernisation de l'organisation des élections, ainsi que dans le rapport d'information établi par Romain Colas au nom de la commission des finances sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales. Elles visent à répondre à des situations de plus en plus complexes. Compte tenu de mon expérience en la matière, je me propose d'apporter ma modeste contribution à cette réflexion.
Dans le cadre de cette mission, nous examinons les moyens correspondant à trois responsabilités essentielles du ministère de l'intérieur, que plusieurs intervenants, notamment Romain Colas, ont rappelées.
Je m'intéresserai principalement aux programmes 307 « Administration territoriale » et 232 « Vie politique, cultuelle et associative ».
S'agissant du programme 307, après 1'adoption de la réforme territoriale et de la nouvelle carte des régions, ce budget pose les premières pierres du plan « Préfectures nouvelle génération », qui vise à redéfinir le positionnement de l'État, ses missions et ses modes d'intervention. Vous nous avez donné quelques éclaircissements, monsieur le ministre, mais nous ne connaissons pas encore les contours exacts de ce plan, puisque la concertation ne devrait aboutir qu'à la fin de l'année.
Quoi qu'il en soit, cette réforme d'ampleur suscite des interrogations. Vous avez indiqué qu'il y aurait désormais treize préfets de grande région, auxquels vous souhaitez confier un rôle beaucoup plus stratégique qu'aux actuels préfets de région. Quant aux préfets de département, ils seront désormais plutôt chargés de la déclinaison opérationnelle des politiques publiques. Par ailleurs, notamment lors du comité technique central des préfectures de juin dernier, vous vous êtes engagé à préserver la mission de délivrance des titres, à renforcer les missions prioritaires, à maintenir l'échelon infradépartemental et à mettre en oeuvre un plan de requalification des agents.
Si ces annonces sont rassurantes, nous constatons toutefois que votre projet s'inscrit dans la continuité des réformes précédentes, qu'il s'agisse de la réforme de l'administration territoriale de l'État ou de la directive nationale d'orientation des préfectures pour les années 2010 à 2015, qui arrive à échéance. Néanmoins, vous avez abandonné – et c'est heureux – la logique aveugle du rabot budgétaire qui prévalait avec la RGPP. Plutôt que de raboter les moyens au détriment des missions, vous privilégiez un recentrage de l'action de l'État sur ses missions jugées essentielles : la sécurité publique, le contrôle de légalité, la lutte contre la fraude, la coordination territoriale. J'approuve cette méthode et vous remercie de l'avoir adoptée.
Cependant, qui dit recentrage dit réduction du périmètre d'intervention de l'État, délaissement de certaines missions et rationalisation des moyens de fonctionnement. Ce qui se profilerait – j'emploie le conditionnel –, ce sont de nouvelles réductions d'effectifs à hauteur de 2 000 ETP d'ici à 2017, dont 1 300 seraient « rendus à Bercy », c'est-à-dire supprimés, et 700 redéployés. Vous avez donné des informations à ce sujet, mais nous aimerions avoir des précisions concernant l'avenir, au-delà du budget d'attente que vous nous présentez aujourd'hui.
De réforme territoriale en revue des missions, de nouvelles chartes en nouveaux plans, l'administration territoriale de l'État est plongée depuis des années dans une forme d'incertitude quant à son avenir et au sens de ses missions. En tant qu'élus, nous sommes nous aussi dans l'incertitude. C'est pourquoi nous demandons à nouveau que soit dressé un bilan sérieux et exhaustif des réformes et des réductions d'effectifs auxquelles on a procédé ces dernières années, afin d'évaluer leurs conséquences sur la qualité des services rendus aux usagers et de voir, le cas échéant, ce qui n'a pas fonctionné.
S'agissant du programme 232, les crédits dédiés à la vie associative passeront de 75 millions d'euros cette année à 55 millions en 2016. Comment expliquer cette baisse ? Quelles en seront les conséquences concrètes pour le tissu associatif ?
D'autre part, nous continuons de penser que le dispositif de financement des partis politiques pèche par son manque d'équité. Il serait nécessaire d'établir de nouvelles règles de répartition de l'aide publique qui donnent plus de poids à la fraction assise sur les suffrages exprimés en faveur de chaque parti. Il conviendrait de modifier la loi du 11 mars 1988 en ce sens.
Quant au programme 216, il ne nous semble pas, à ce stade, appeler de remarques particulières.
Ainsi que vous l'avez indiqué, monsieur le ministre, le programme 307 est marqué par un recul de 825 ETP. Cependant, à l'instar de Gaby Charroux, je tiens à vous féliciter d'être sorti de la logique de la RGPP : plutôt que de passer le rabot de manière aveugle, vous articulez les moyens avec les besoins et vous menez des réformes structurelles de manière à dégager les effectifs nécessaires à l'exercice des missions qui reviennent à votre ministère. À cet égard, je souligne le décalage persistant entre les différents discours : d'un côté, on demande toujours plus d'économies ; de l'autre, on regrette que la réorganisation que vous conduisez, avec efficacité selon moi, se traduise par une diminution des moyens.
Lorsque l'on examine la manière dont se répartira cette diminution de 825 ETP, on constate que la baisse des effectifs dans les services départementaux de l'État sera un peu plus marquée que la montée en puissance des effectifs dans les services régionaux. Comment cet écart s'explique-t-il ? Vous avez évoqué des regroupements de services au niveau régional, notamment la mise en place de plates-formes d'instruction des demandes de passeport.
Vous avez présenté la réorganisation des services de l'État au niveau des grandes régions, mais j'aurais aimé en savoir plus sur vos intentions en ce qui concerne les niveaux départemental et infradépartemental. Dans le cadre de l'application des lois de réforme territoriale, compte tenu du plafond d'emplois qui s'impose à vous, comment comptez-vous accompagner le transfert aux intercommunalités de compétences telles que la gestion de l'eau et des milieux aquatiques, l'assainissement et la prévention des inondations ? Il faut veiller à ce que les élus locaux puissent bénéficier d'un appui sur ces questions très techniques.
Lorsque j'entends nos collègues du groupe Les Républicains récuser chacune des mesures d'économie que nous mettons en oeuvre, ainsi que vient de le faire M. Marleix, je me demande où ils trouveront les 100 milliards d'économies qu'ils promettent aux Français !
Le plan « Préfectures nouvelle génération » a vocation à faire entrer pleinement l'administration déconcentrée de l'État dans l'ère de la modernité. Il s'agit de proposer à nos concitoyens un service de meilleure qualité : plus accessible, plus efficace et plus rapide. Pour concrétiser ces objectifs, ainsi que vous l'avez évoqué, monsieur le ministre, le recours aux nouvelles technologies et aux procédures dématérialisées sera généralisé. L'activité du réseau préfectoral sera recentrée sur ses missions premières, au premier rang desquels la lutte contre toutes les formes d'insécurité.
Le changement suscite, par nature, des inquiétudes. Dès l'annonce du projet de refonte du réseau préfectoral au début de cette année, les organisations syndicales ont exprimé leurs craintes quant à la dégradation du service rendu à la population que pourrait entraîner cette réforme. Elles s'inquiètent également des effets négatifs qu'elle pourrait avoir sur les conditions de travail des agents. Le personnel de la police nationale, en particulier, redoute une perte de proximité dans la gestion des ressources humaines – j'en suis particulièrement informé en tant que rapporteur pour avis des crédits de la mission « Sécurités ». Pouvez-vous apporter des éléments de réponse à cette préoccupation des policiers et préciser le calendrier d'application de la réforme prévue en la matière ?
Votre ministère est amené à repenser le réseau des préfectures et des sous-préfectures pour le mettre en adéquation avec la nouvelle carte des régions et la réforme territoriale. Tel est l'objet du plan « Préfectures nouvelle génération » que vous avez lancé en juin 2015 et dont la mise en oeuvre est prévue en 2016.
Les préfectures et les sous-préfectures, en tant que garantes de la permanence de l'État sur l'ensemble du territoire français, sont le premier contact de proximité pour les citoyens – vous avez eu l'occasion de le constater récemment à Florac. La proximité et l'accessibilité pour les usagers, a fortiori dans les territoires ruraux, doivent être le fil rouge de la réforme de leur maillage territorial.
L'accent a été mis jusqu'à présent sur l'amélioration de la qualité du service et de l'accueil des usagers, notamment avec la mise en place des labels « Marianne » et « Qualipref ». La qualité du service passe, certes, par la réactivité de l'administration, par l'uniformisation des informations et par la dématérialisation des échanges. Cependant, la dématérialisation ne peut pas être totale et ne doit pas faire perdre de vue la nécessaire proximité du service, notamment pour les usagers isolés et ruraux. L'inspection générale de l'administration a rendu un rapport sur le maillage territorial des sous-préfectures. Vous venez vous-même d'évoquer ce sujet, monsieur le ministre, mais on ne voit pas bien où vous voulez en venir en termes de suppressions, de transformations et de restructurations. Je vous ai bien écouté : vous souhaitez redéfinir le rôle des préfectures et des sous-préfectures, développer des maisons de l'État et créer jusqu'à 1 000 maisons des services au public. Mais avec quel budget allez-vous faire tout cela ?
De nombreux préfets se plaignent d'avoir perdu des agents d'autorité de catégorie A. Quelles mesures budgétaires et sociales envisagez-vous dans le cadre de la modernisation de l'action publique (MAP) concernant l'encadrement des services déconcentrés de l'État ?
Le projet annuel de performances (PAP) décrit l'année 2016 comme une « année de transformation » pour le programme « Administration territoriale » en raison de la réforme de la carte des régions. Il cite également les suites de la MAP engagée depuis 2012, notamment le plan « Préfectures nouvelle génération », qui doit encore être arrêté après une phase de consultation. On mesure à ces deux réformes structurantes l'importance des chantiers qui attendent l'administration déconcentrée de l'État.
Vous avez déjà abordé ce sujet en répondant aux rapporteurs. Mais, lors des auditions que j'ai menées en tant que rapporteure du projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, j'ai pu constater que les fonctionnaires de l'État s'interrogeaient sur ces chantiers. S'ils en comprennent la nécessité et la logique, qu'ils partagent, ils se demandent quel accompagnement leur sera proposé en termes de ressources humaines. Certaines dispositions du projet de loi en cours d'examen sont de nature à les rassurer, en particulier l'actuel article 21, qui instaure une priorité d'affectation ou de détachement au profit du fonctionnaire dont l'emploi est supprimé. Cependant, nous connaissons le poids de la pratique dans ce domaine.
Parmi les chantiers en perspective, le PAP mentionne la modernisation de la gestion des parcours professionnels des agents par le biais d'un plan de requalification des emplois parallèlement à la reconfiguration des missions. Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, comment les services déconcentrés de l'État se préparent aux évolutions à venir, notamment du point de vue de l'accompagnement en matière de ressources humaines ? De quels éléments d'information disposez-vous quant au plan de requalification évoqué ?
Je vous remercie, monsieur le ministre, pour la clarté de vos propos et de vos engagements. Vous avez rappelé avec détermination que nous voulons tous un État fort, des préfets forts, des services forts, pertinents et efficaces.
Je reviens sur la question du contrôle de légalité et du contrôle budgétaire, bien que vous ayez déjà apporté un certain nombre de réponses à ce sujet. Les textes que nous venons d'adopter, en particulier la loi MAPTAM et la loi NOTRe, vont amener un bouleversement que les élus devront s'approprier progressivement. Cela ne se fera sans doute pas aussi rapidement que nous pourrions le souhaiter. La clause générale de compétence a été supprimée, et les compétences ont été clarifiées. Cependant, la loi prévoit un certain nombre d'exceptions définies très précisément. Par exemple, les transports interurbains et les transports scolaires qui relevaient auparavant du département seront confiés à la région, mais celle-ci pourra les déléguer à nouveau au département. Des problèmes vont donc se poser en matière de contrôle de légalité. Je rappelle que ce contrôle, mentionné à l'article 72 de la Constitution, reste indispensable afin de vérifier la conformité des actes pris par les collectivités territoriales.
En pratique, de nombreux juristes s'inquiètent de la disparité des contrôles d'un département à l'autre, laquelle tient à la fois au faible nombre d'agents affectés à cette mission dans les préfectures et à la qualité inégale des équipes – c'est une réalité. Selon moi, il convient de maintenir la qualité tant des contrôles que des conseils apportés par les préfectures aux collectivités territoriales afin d'éviter la saisine du juge administratif. Je pense que vous partagez cette analyse, monsieur le ministre. D'après vous, au-delà des mesures de dématérialisation prévue dans le plan « Préfectures nouvelle génération », l'évolution des effectifs affectés au contrôle de légalité permettra-t-elle de tenir compte, au cours des trois prochaines années, de cette nouvelle étape de la décentralisation et de la « montée en compétences » de l'administration locale, notamment des EPCI ?
Lancé il y a quelques années, le projet de carte nationale d'identité électronique a avorté notamment en raison de sa complexité et de la censure du Conseil constitutionnel, qui a jugé que le procédé de recueil des données biométriques envisagé était trop intrusif dans la vie privée des citoyens. Pourtant, la carte nationale d'identité électronique serait un outil particulièrement intéressant en matière de lutte contre le terrorisme et de contrôle des infractions. Selon un rapport du ministère de l'intérieur publié en 2013, « seule est autorisée une carte nationale d'identité électronique comportant un seul composant électronique sécurisé contenant l'état civil du titulaire avec la photographie et les empreintes digitales ». Vous avez confié une mission à ce sujet à un inspecteur général de l'administration. Ce projet est-il toujours d'actualité malgré son coût non négligeable ? Aura-t-il une suite ? Est-il utile, selon vous ? Fait-il partie des chantiers du ministère de l'intérieur pour les années qui viennent ?
Vous avez rappelé la nomination de sept préfets préfigurateurs chargés, dans les nouvelles régions fusionnées, d'élaborer et de coordonner le projet de réorganisation régionale de l'administration de l'État ainsi que de définir et de conduire les grandes étapes de sa mise en place jusqu'en 2018, avec notamment l'objectif de renforcer la proximité dans l'action de l'État sur le territoire. Or force est de constater que, sur le terrain, beaucoup d'élus locaux s'inquiètent de la disparition de services publics de proximité – on l'a constaté lors de la préparation du congrès de l'association des maires de France.
Je rappelle que, en 2013, un projet prévoyait la suppression de 47 sous-préfectures sur les 233 que compte notre pays. Dans mon département, il avait été question de la fermeture de la sous-préfecture de Rochefort, ce qui a valu quelques va-et-vient et un peu de rétropédalage.
Un département littoral comme la Charente-Maritime possède une direction départementale des territoires et de la mer. Aucune garantie ne nous est donnée quant à la préservation des services spécialisés dans les affaires maritimes. Que vont devenir ces services spécifiques de proximité ? Nous sommes tous d'accord pour considérer qu'une réorganisation de l'État, complémentaire de celle des très grandes régions, est impérative, mais elle ne doit pas mener à une aporie – je reprends votre expression – de la représentation de l'État aboutissant à une dégradation du service public.
Monsieur le ministre, je vous serais reconnaissant de nous préciser le calendrier que vous entendez mettre en place pour maintenir des services de l'État efficaces et proches de nos concitoyens, car ceux-ci ne veulent pas « moins d'État », mais « mieux d'État ». Que répondez-vous à ceux qui craignent un renoncement à une véritable politique d'aménagement du territoire ?
Depuis 2012, nous avons voté de grandes lois, avec le souci de mettre nos territoires en cohérence et de les rendre compétitifs, dans une économie qui ne peut échapper à la métropolisation et à la mondialisation. La loi NOTRe, que nos élus doivent porter avec ambition en s'interrogeant sur le périmètre des bassins de vie, fait l'objet actuellement de toutes les discussions.
Dans un tel contexte d'ambitieuses réformes, l'État a toute sa place. Je considère que la situation complexe que nous vivons requiert un État fort dans nos territoires. L'administration territoriale accompagne cette réorganisation ; elle change de visage. Les maisons de l'État – l'une d'entre elles est installée à Louhans dans ma circonscription – rassemblent des services de l'État jusque-là dispersés. Sont désormais réunis la direction départementale des territoires (DDT), l'inspection académique, l'Office national des forêts, aux côtés des services préfectoraux, et bientôt peut-être une maison des services publics regroupant la Mutualité sociale agricole, l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF), transformant la sous-préfecture en un véritable centre administratif. Il faut plus que jamais, dans des structures qui prennent tout leur sens au service du territoire et pour dynamiser dans la proximité les politiques du Gouvernement, maintenir à leur tête un représentant de l'État. Sur ces deniers points, je souhaite connaître la force de l'engagement de l'État et les délais dans lesquels cette réorganisation doit être mise en place.
Monsieur le ministre, j'ai eu l'honneur et le plaisir de vous accueillir cet été pour visiter la nouvelle maison de l'État à Bayonne, une ancienne sous-préfecture d'un département totalement bicéphale. Vous avez qualifié cette maison de l'État de « modèle d'excellence », évoquant la qualité du service public. Je le confirme : les usagers, comme les élus, sont satisfaits. Non seulement les services cohabitent, mais ils travaillent ensemble et ont même su créer des synergies. Sont ainsi regroupés les services traditionnels d'une sous-préfecture, mais aussi l'agence régionale de santé, la DREAL. Je salue votre volontarisme pour engager cette réforme, alors que rien n'avait été fait depuis 1926.
Entendez-vous analyser précisément les besoins des usagers et les moyens disponibles dans les territoires pour choisir la configuration la mieux adaptée ? En d'autres termes, allez-vous faire du cousu main ?
Depuis quelques semaines, les préfets proposent de nouvelles cartes intercommunales, qui comportent souvent de futures intercommunalités de très grande taille – très largement au-delà du seuil de 15 000 habitants prévu par la loi – et, parfois, à cheval sur plusieurs départements. Avez-vous l'intention d'adapter les structures de l'État à ce nouveau paysage qui se dessine autour des EPCI et qui ne correspond plus du tout à nos anciens départements ?
Vous avez insisté sur la spécificité de chacune des régions, sur les blocs de compétence ainsi que sur la cohérence de ces derniers avec l'organisation des régions. Comment les grandes régions organiseront-elles leurs services ? Doivent-elles rechercher un parallèle avec les services de l'État ? Pour les services déconcentrés de l'État, y aurait-il un intérêt à rechercher des cohérences entre, par exemple, la DREAL et l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), entre la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi et Pôle emploi, ou entre les chambres de commerce et d'industrie et les directions régionales concernées ?
Madame Le Dain, j'ai parfaitement conscience que la numérisation est très attendue de la part des administrés et qu'elle représente pour l'État une occasion extraordinaire de se moderniser en reconfigurant ses administrations et en les faisant travailler autrement.
Nous souhaitons que le service public soit accessible pour tous. La numérisation peut le permettre, mais aussi l'empêcher pour des territoires qui n'ont pas encore accès autant qu'on pourrait le souhaiter au numérique. Pour les personnes qui ne pourront pas accéder facilement à des guichets numériques, nous sommes en train de réfléchir à des modalités d'accompagnement, par exemple la mise en place de points de contact dans un certain nombre de services publics – mairies, postes, maisons de l'État –, en concertation étroite avec les organisations syndicales. Notre objectif est aussi de faciliter l'accès au numérique sur l'ensemble du territoire national. Nous travaillons dans ces deux directions dans un souci d'efficacité.
M. Marleix fait des remarques qui appellent des précisions de ma part. Je tiens d'abord à vous tranquilliser en vous livrant des chiffres précis. Entre 2006 et 2012, le nombre d'emplois perdus dans les préfectures et sous-préfectures s'élève à 3 700, ce qui correspond à une perte d'effectifs annuelle d'environ 800. Dans le budget qui vous est présenté cette année, le nombre d'emplois supprimés dans les préfectures et sous-préfectures est de 180. Je n'ai pas souhaité aller au-delà des économies produites par la mutualisation. Vous citez des chiffres, mais vous n'êtes pas exhaustif dans leur commentaire. Le chiffre que vous indiquez résulte du transfert d'effectifs du budget du ministère de l'intérieur vers le programme 333 « Moyens mutualisés des administrations déconcentrées », c'est-à-dire vers les services du Premier ministre, du fait de la création des directions de l'action du gouvernement, soit 684 ETP. Il n'y a pas de diminution des effectifs. Essayons d'être honnêtes, monsieur Marleix. La véritable diminution des effectifs de mon ministère porte sur 180 postes, là où, au cours des années précédentes, elle était de 800 par an. Je veux mettre fin à la RGPP, qui, avec 3 700 suppressions d'emplois, avait abouti à l'affaiblissement de l'administration territoriale de l'État. À vous entendre, lorsqu'on supprime 3 700 emplois, c'est bon pour l'administration préfectorale, mais, lorsqu'une réforme permet de diviser par sept les suppressions d'effectifs, c'est une mauvaise affaire. Je pense que les fonctionnaires de l'administration préfectorale préféreront ma mauvaise affaire à votre bon traitement ; eux voient parfaitement la différence. Les organisations syndicales avec lesquelles je négocie comprennent ce que nous faisons quand elles comparent à ce qui a été fait.
Entre 2007 et 2012, 3 700 emplois ont été supprimés, et, depuis 2012, 1 500. Depuis 2014, j'ai divisé les suppressions d'emplois de façon significative, puisque nous sommes passés de 800 suppressions lorsque vous étiez aux responsabilités à 400 en moyenne au début du quinquennat, puis à 180 maintenant. La réforme que je vais conduire permettra d'atteindre l'objectif que je vous ai indiqué.
Vous vous inquiétez de la réforme des sous-préfectures. M. Quentin vous a apporté la réponse, en faisant état d'un projet de 2007 qui consistait à en supprimer 47 sur près de 300. À l'époque, c'était sans doute un excellent projet qui ne vous inquiétait pas. Quant à moi, je n'ai que l'intention d'essayer de créer des sous-préfectures là où elles sont nécessaires et d'en supprimer là où elles ne le sont plus, mais aussi de créer des maisons de l'État pour densifier le réseau des acteurs de l'administration territoriale de l'État. Je n'ai pas de projet de suppression des sous-préfectures comparable à celui de 2007, que j'ai choisi de ne pas évoquer pour ne pas être indélicat, mais que M. Quentin a mentionné à ma place, ce dont je le remercie. La suppression de sous-préfectures avec une règle à calcul serait une très mauvaise manière d'assurer la proximité dont le pays a besoin. Pleinement conscient de cette exigence, je propose de mettre fin à la RGPP, de changer de méthode et de recréer des emplois, notamment en milieu rural ou dans un certain nombre de villes.
L'échelon départemental n'est absolument pas affaibli puisque les schémas d'emplois pour le programme « Administration territoriale » ont été adoucis et que le rôle du département va être renforcé dans le cadre de la réforme territoriale, précisément pour assurer la proximité. Avec de grandes régions, il est indispensable de créer les conditions de la proximité des services publics par le renforcement de l'échelon départemental. C'est ce que je souhaite faire à travers la mise en place du plan « Préfectures nouvelle génération ».
Vous demandez ensuite si la formation des imams n'est pas une manière de remettre en cause le principe de la laïcité. Mais dans quelle partie de mon budget voyez-vous une ligne consacrée à la formation des imams ? Il n'y a pas de formation théologique.
C'est autre chose. Ces diplômes universitaires ne sont pas des diplômes de formation des imams, mais des diplômes de formation aux principes de la République et de la laïcité. Ils existent depuis des années, sont totalement laïques et ouverts à des étudiants qui ne s'intéressent pas aux questions religieuses. Nous allons en augmenter le nombre, mais nous n'avons aucunement l'intention de former des imams sur le plan théologique. Ce n'est pas le rôle de l'État dans une République où s'applique la loi de 1905. En revanche, nous imposons aux imams aumôniers recrutés par l'État l'obtention de ce diplôme de formation à la laïcité et aux principes de la République.
Ne dénaturez pas tous les sujets dont vous vous emparez ! Il est normal que le ministère de l'intérieur, qui est le ministère des valeurs de la République, finance les diplômes universitaires de formation aux principes de la laïcité et de la République. Nous souhaitons que ces formations soient désormais obligatoires pour les aumôniers recrutés dans les administrations de l'État, quelle que soit leur religion, car nous estimons qu'ils doivent parler français et être formés aux principes et aux valeurs de la République. Comment peut-on transformer ce sujet, qui devrait faire consensus, en objet de polémique ? Depuis des années, dans toutes les universités – celle de Strasbourg, par exemple, où je me suis rendu –, vous verrez des étudiants qui n'ont rien à voir avec la religion et qui préparent ces diplômes.
On a déjà voulu polémiquer à propos d'avions qu'on nous a reproché d'avoir affrétés alors qu'ils sont utilisés par le ministère de l'intérieur depuis 2006 et qu'ils ont fait l'objet d'un contrat de location signé par l'un de mes illustres prédécesseurs, dont certains d'entre vous sont ici les porte-parole. Dans un contexte marqué par des débats dictés par l'agenda du Front national, je commence à être las de voir certains préempter tous les sujets pour asséner des contre-vérités, avec les résultats que l'on sait. Les rapporteurs peuvent venir vérifier sur pièce et sur place la véracité de ce que je dis. Cessons d'instrumentaliser ces questions de façon malsaine pour lancer des débats malsains qui ont des conséquences malsaines.
Monsieur Charroux, rassurez-vous, les crédits ne passent pas de 75 à 55 millions d'euros, mais de 75 000 et 55 000 euros et correspondent aux crédits de maintenance du répertoire national des associations. Cette baisse n'est pas de nature à remettre en cause le soutien que nous apportons aux associations. Je souhaitais dissiper votre inquiétude sincère en vous apportant cette précision et lever toute ambiguïté sur les objectifs que nous poursuivons.
Monsieur Molac, nous maintenons les crédits pour le financement des partis politiques, après plusieurs années consécutives de baisse. Je partage votre sentiment sur la nécessité de ne pas diminuer encore davantage les moyens des partis politiques qui concourent à l'expression démocratique et au suffrage.
Quant à la dématérialisation, je rejoins votre préoccupation sur laquelle, en réponse au rapporteur, j'ai proposé que nous avancions ensemble.
Monsieur Dussopt, la réforme territoriale vise notamment à renforcer l'échelon infradépartemental de proximité. Dans ce cadre, notre objectif est d'améliorer l'ingénierie territoriale par la mise en place d'équipes projetables auprès des intercommunalités afin de leur permettre de bénéficier d'un soutien plus efficace. Les nouvelles compétences des intercommunalités et des EPCI issues de la loi NOTRe vont accroître le rôle des intercommunalités : les préfets sont saisis de cette question, ils ont convoqué les commissions départementales de la coopération intercommunale auxquelles ils présentent leur pré-projet. La concertation commence : l'approbation des schémas départementaux de coopération intercommunale est fixée à la fin mars et le périmètre doit être établi dès cet été.
Pour les aspects plus techniques – l'eau et les risques aquatiques –, la loi NOTRe a repoussé les délais. Un travail approfondi a été conduit par Mme Lebranchu avec l'AMF ; les préfets sont mobilisés pour assurer l'appui des services de l'État. Plus globalement, l'objectif du ministère de l'intérieur dans le cadre du PPNG est de renforcer l'appui aux collectivités locales en termes d'ingénierie administrative. J'espère que vous serez rassuré quant à la volonté du Gouvernement d'atteindre cet objectif.
Monsieur Morel-A-L'Huissier, le PPNG sera mis en oeuvre à compter de 2017 pour pouvoir prendre en compte l'ensemble des éléments d'aménagement du territoire. L'année 2016 sera mise à profit pour préparer la réforme et former les agents des préfectures concernées. Le plan prévoit une formation et une requalification qui permettront de renforcer les compétences des agents des services au bénéfice des usagers.
Madame Descamps-Crosnier, un dispositif centralisé a été mis en place auprès du secrétaire général dont le principal objectif est d'accompagner la mobilité fonctionnelle des agents afin d'éviter autant que possible la mobilité géographique. Compte tenu de la modularité de l'organisation territoriale de l'État que nous préconisons, les préfets font remonter des territoires des projets de programmes de formation qui s'appuient sur la concertation engagée avec les personnels pour faire du cousu main. Ces informations permettront d'affiner le dispositif global d'accompagnement prévu par le secrétaire général et sur lequel je lui ai demandé de travailler de façon approfondie. Je vous transmettrai dès la fin de la réunion une note précise sur les moyens mobilisés par l'État pour la mobilité fonctionnelle et géographique ainsi que pour la formation professionnelle.
Monsieur Valax, la centralisation en préfecture du contrôle de légalité lancée en 2009 s'est accompagnée d'une réduction très importante des effectifs chargés de ce contrôle, ces derniers passant de 1 173 à 866, soit une baisse de 26,2 %, entre 2009 et 2012. L'objectif de cette centralisation était de concentrer l'expertise juridique en préfecture et d'harmoniser les pratiques de contrôle à l'échelle départementale, en particulier dans les domaines prioritaires tels que la commande publique ou l'urbanisme, des sujets sur lesquels les risques juridiques sont considérables et les éléments de technicité incontestables. Les missions de contrôle sont désormais exercées au sein d'une direction chargée des relations avec les collectivités locales ; des pôles spécialisés sont mis en place compte tenu des priorités de contrôle établies par les préfets ; les agents de catégorie A et B dans les préfectures disposent, pour la plupart, d'une formation juridique. Cependant, un plan de formation, composé de deux volets, national et régional, doit permettre de développer les capacités d'expertise des agents concernés. Dans le cadre du PPNG, je souhaite renforcer considérablement le contrôle de légalité qui a été très affaibli alors même que la complexité juridique des sujets traités par les collectivités locales s'accroissait. Je souhaite donc augmenter l'accompagnement juridique des collectivités locales afin que les difficultés auxquelles nous avons été confrontées ne se perpétuent pas.
Monsieur Chrétien, le ministère de l'intérieur travaille sur la mise en place d'une identité électronique et numérique très sécurisée. La carte nationale d'identité électronique (CNIe) en est une modalité, mais son coût est élevé et doit être mis en regard du niveau de sécurité numérique qu'elle assure, d'autant que d'autres moyens permettent d'atteindre ce niveau. Je souhaite conjuguer sécurisation maximale et coûts maîtrisés. C'est la raison pour laquelle je concentre les moyens du ministère sur la carte d'identité sans puce électronique depuis l'annulation du projet de CNIe. Des mesures fortes pour protéger l'identité ont été mises en place ; la sécurisation des procédures, la transmission informatisée des dossiers des mairies vers les préfectures – le dispositif COMEDEC (Communication électronique des données de l'état civil) –, ainsi que le dispositif de lutte contre la fraude doivent permettre d'atteindre un niveau de sécurité maximal avec des coûts mieux maîtrisés. Je suis tout à fait disposé à rendre compte devant vos commissions de la mise en place de ces projets et des résultats que nous obtenons, au regard de la préoccupation très légitime que vous avez exprimée.
Mesdames Capdevielle et Untermaier, les maisons de l'État ne sont pas un substitut aux sous-préfectures, mais cette substitution n'est pas interdite si l'opportunité territoriale s'en présente. Des maisons de l'État sont implantées dans des territoires dans lesquels les sous-préfectures sont maintenues ; des maisons de sous-préfecture sont installées dans des maisons de l'État. Ce qui compte pour moi, c'est la modularité territoriale : l'adaptation de l'organisation de l'État aux spécificités des territoires, à leur évolution démographique et sociologique, ainsi qu'aux opportunités de coopération avec les collectivités, comme la création de maisons dans lesquelles les administrations des collectivités et de l'État cohabitent.
Pour répondre à M. Morel-A-L'Huissier, nous avons augmenté les budgets consacrés à la création de maisons de l'État. J'ai obtenu, en 2014, une disposition réglementaire et un abondement du budget qui ont permis de passer de treize maisons construites ou en cours de construction à trente-trois projets, dont un certain nombre sont en cours de réalisation. Grâce aux moyens budgétaires, on constate un très fort succès des maisons de l'État et une appropriation par les préfets et les élus, si bien que je suis souvent conduit à poser des premières pierres ou à inaugurer des maisons dans des départements ou villes où elles représentent une formidable opportunité de modernisation.
Bien entendu, l'État est désireux d'adapter sa présence à l'émergence des intercommunalités. Vous êtes bien placés pour savoir que certains vieux projets territoriaux peuvent ressortir à la faveur de l'émergence d'EPCI. Ceux qui préconisaient la création d'intercommunalités n'y sont parfois plus favorables dès lors que l'opportunité se présente de les réaliser. Cela fait partie des charmes de la vie politique française… Votre département est un très bon exemple de notre capacité à adapter l'organisation de l'État aux nouvelles intercommunalités. J'ai d'ailleurs prononcé un discours à Bayonne allant dans ce sens et précisant les moyens à notre disposition – maison de l'État, refonte de la carte des sous-préfectures, création des maisons de service public –, dans le cadre des schémas d'accessibilité au service public. Nous sommes donc dans la bonne direction.
Je reconnais la fibre maritime et rochelaise de M. Quentin dans sa question : s'agissant des directions départementales des territoires et de la mer (DDTM), le Premier ministre a décidé de maintenir l'organisation des directions départementales interministérielles (DDI) sous réserve des mutualisations en matière de cohésion sociale. Le conseil des ministres a pris un engagement très clair en ce sens le 31 juillet. Mme Royal a demandé aux services placés sous sa responsabilité d'examiner les missions et agents susceptibles d'être détachés des DREAL pour renforcer les DDTM et les DDT. La rationalisation de l'organisation de l'administration de l'État au plan régional ne remet pas en cause le maillage territorial existant pour des administrations spécifiques dont la présence sur des territoires présentant des particularités – territoires de montagne ou maritimes – leur est très nécessaire.
M. Popelin m'a posé beaucoup de questions, mais il a dû partir. Je propose de lui adresser par écrit une réponse précise.
La réunion de la commission élargie s'achève à vingt heures vingt.
Le Directeur du service des comptes rendus des commissions,
Nicolas VÉRON© Assemblée nationale