Commission des affaires économiques

Réunion du 9 décembre 2015 à 9h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • BUSINESS
  • PME
  • commerciale

La réunion

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La commission a procédé à l'audition, conjointe avec la commission des affaires européennes, de M. Matthias Fekl, secrétaire d'État au Commerce extérieur, à la promotion du tourisme et aux Français de l'étranger.

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Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie d'être venu vous exprimer devant nos deux commissions. Nous tenons désormais à l'habitude que nous avons prise de vous recevoir régulièrement afin de suivre les questions majeures relatives à notre politique commerciale.

Je ne doute pas que mes collègues auront de nombreuses questions à vous poser sur le partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP) à l'issue du onzième round de négociation – en particulier sur l'accès aux documents de négociation. Pour ma part, je voudrais évoquer trois sujets qui méritent à mon sens au moins autant d'attention que le TTIP.

Le premier est relatif à l'évaluation des accords de libre-échange. Avant l'ouverture d'une négociation bilatérale, la Commission européenne publie une étude préalable qui montre systématiquement qu'un accord commercial serait bénéfique pour l'Union européenne. Cette étude fait-elle l'objet d'une contre-analyse de la part des services de l'État afin d'évaluer, entre autres, les bénéfices pour notre pays ? Sachant qu'une fois les négociations achevées, plusieurs années ont pu s'écouler depuis la remise de l'étude préalable, nous voudrions aussi savoir si cette dernière est réactualisée ? À ma connaissance, l'étude de la Commission concernant l'accord économique et commercial global avec le Canada (CETA), qui date de 2008, n'a pas été revue postérieurement à sa publication alors que les conditions économiques ont considérablement changé.

Existe-t-il un véritable suivi de la mise en oeuvre des accords en vigueur, en particulier de leurs clauses relatives aux droits humains, sociaux et environnementaux ? Selon certaines organisations non gouvernementales (ONG), ce ne serait pas le cas, notamment s'agissant des accords avec la Colombie et le Pérou. Nous avons reçu récemment des représentants syndicaux colombiens, et des membres d'ONG travaillant au Pérou. Ils nous ont démontré que le rapport très optimiste publié par la Commission européenne ne correspondait pas à la situation sur le terrain, notamment en matière de droits humains, de travail illégal ou de droits environnementaux. Je rappelle que nos collègues Joaquim Pueyo et Hervé Gaymard ont été désignés rapporteurs sur l'évaluation de la mise en oeuvre des accords de libre-échange, par la commission des affaires européennes.

Ma deuxième préoccupation concerne le Trade in Services Agreement (TISA) : l'accord sur le commerce des services. Ce traité est actuellement négocié par vingt-trois parties membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), dont l'Union européenne, les États-Unis et le Canada, sans aucun des « grands » pays émergents que sont la Chine, la Russie, le Brésil et l'Inde. Le quinzième round de négociation a eu lieu la semaine dernière sous présidence de l'Union européenne. Ce traité pourrait représenter une menace au moins aussi grande que le TTIP, si ce n'est plus grande, pour nos préférences collectives. En effet, les services publics sont l'un des grands sujets de ces négociations, et les craintes sont nombreuses sur les conséquences d'une « liste négative » de secteurs protégés, qui entraînerait, par défaut, l'obligation de libéraliser tous les autres secteurs. Disposez-vous d'éléments sur ce sujet ? Confirmez-vous qu'une clause de statu quo est envisagée qui figerait le niveau de réglementation au moment de la signature de l'accord ? Que deviendrait alors le droit des États à réguler ?

Enfin, la conférence ministérielle de l'OMC qui s'ouvre la semaine prochaine à Nairobi est souvent présentée comme celle de la « dernière chance » d'obtenir enfin un accord qui mettrait un terme aux quinze années de négociations du cycle de Doha – même si le terme de « dernière chance » est assez galvaudé, il faut bien le reconnaître. Un accord pourrait-il être conclu et, si accord il y a, ses conditions seront-elles favorables à l'Union européenne ?

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je vous prie d'excuser l'absence de Mme la présidente de la commission des affaires économiques, retenue ce matin à la COP21.

Si la France reste le sixième exportateur mondial de biens et de services et si elle profite de certaines évolutions enregistrées l'année dernière, comme la baisse des prix de l'énergie ou les corrections des taux de change, des difficultés persistent. Monsieur Matthias Fekl, nous sommes heureux que vous vous exprimiez devant nous sur l'état du commerce extérieur français, sur la stratégie de redressement que vous avez mise en oeuvre, et sur certaines initiatives récentes comme l'appel à candidature lancé pour le French Tech Ticket, ou celle prise avec le ministre de l'agriculture, M. Stéphane Le Foll, concernant le secteur de l'agroalimentaire. Évidemment, nous souhaitons aussi que vous puissiez faire le point sur les négociations commerciales en cours qu'évoquait Mme la présidente Danielle Auroi.

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Matthias Fekl, secrétaire d'état chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger

Cette audition me permet de vous présenter, et il s'agit d'une première, le rapport sur la stratégie du commerce extérieur de la France et la politique commerciale européenne, qui constitue un document unique comportant à la fois des éléments de diagnostic et de stratégie. Les parlementaires étaient nombreux, tant au Sénat qu'à l'Assemblée, à souhaiter que nous publiions un tel document. Quant à l'Union européenne, elle a présenté sa propre stratégie et, s'agissant d'une politique communautarisée, nous nous inscrivons évidemment dans un schéma européen que nous avons largement alimenté.

Ce rapport n'est pas un rapport de plus. Il s'agit d'un document évolutif élaboré avec l'ensemble des acteurs concernés. Les analyses et les propositions dont vous m'avez fait part lors de nos diverses rencontres ont notamment été intégrées, comme le seront nos échanges de ce matin. Les collectivités locales ont évidemment participé à sa rédaction. Il a aussi été élaboré en lien avec le comité de suivi stratégique des sujets de politique commerciale. J'ai réformé cette institution, désormais composée de deux collèges, l'un au sein duquel siègent des élus, l'autre représentant la société civile – à ce titre, les syndicats, les ONG, les fédérations professionnelles ont contribué à ce rapport. Par ailleurs, le conseil stratégique de l'export, qui rassemble tous les opérateurs publics et privés accompagnant les entreprises sur les marchés internationaux, a également participé à ce travail. J'indique qu'avec ce conseil, que je réunis régulièrement, nous avons mis en place un parcours unique d'accompagnement à l'export pour les PME. Au final, ce rapport construit avec tous les acteurs engage donc tout le monde et constitue véritablement la feuille de route qui trace la stratégie du commerce extérieur français.

J'en viens à quelques éléments de diagnostic.

La réduction continue et massive du déficit commercial de notre pays depuis 2011 constitue une tendance de fond : il devrait en effet passer, entre 2011 et la fin 2015, de 75 à environ 40 milliards d'euros environ. Évidemment, ce déficit est encore trop élevé, mais il a baissé de 45 % ! Deux facteurs principaux expliquent cette réduction. L'honnêteté oblige d'abord à constater l'existence de causes conjoncturelles, ou du moins extérieures : la baisse du prix de l'énergie, et le taux de change favorable entre l'euro et le dollar semblent jouer pour deux tiers dans les évolutions constatées depuis 2011. Un tiers de la reprise provient donc ensuite de réformes internes qui ont permis un regain de compétitivité de notre économie, et de la stratégie du commerce extérieur française. Je note qu'en 2014, la France enregistre un excédent de 40 milliards d'euros sur le commerce des services et le négoce international, excédent qui permet de compenser les deux tiers de notre déficit commercial sur les biens.

Notre commerce extérieur connaît aussi quelques faiblesses structurelles. Le nombre d'entreprises françaises qui exportent est insuffisant. Elles sont 121 000 en France, mais deux fois plus nombreuses en Allemagne, et trois fois plus en Italie, pays qui est sans doute encore plus comparable au nôtre. Par ailleurs, l'internationalisation n'est pas encore assez intégrée comme élément de stratégie durable des entreprises : sur dix entreprises qui se lancent à l'international, il n'en reste que trois, un an après, et une seule, trois ans plus tard. L'international est trop souvent considéré comme une opportunité à saisir à court terme.

Les efforts engagés permettent toutefois d'enregistrer des améliorations. Elles sont dues en particulier aux réformes structurelles de notre économie. Le travail accompli avec le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) porte ses fruits : pour la première fois depuis de longues années, le coût du travail horaire dans l'industrie en France est passé sous celui enregistré en Allemagne. Cela joue évidemment de façon très importante sur la compétitivité, même si nous sommes nombreux dans cette salle à être persuadés que le coût du travail ne constitue pas l'alpha et l'oméga de la compétitivité française.

Nous poursuivons également notre travail visant à remédier à la dispersion du dispositif d'accompagnement à l'export : trop d'intervenants ne s'étaient pas assez correctement réparti les tâches. Le 1er janvier dernier, moins d'un an après que le Président de la République l'a annoncé, Business France, était opérationnel. Business France est né de la fusion d'Ubifrance, l'agence française pour le développement international des entreprises, qui était en charge de l'export, et de l'agence française pour les investissements internationaux (AFII), qui travaillait sur l'attractivité du pays. Dans une économie mondialisée, alors qu'un tiers des exportations françaises sont le fait de filiales de groupes étrangers, la séparation des problématiques n'avait plus de sens. Nous travaillons également au rapprochement de certaines activités de la société pour l'expansion des ventes des produits agricoles et alimentaires, dite SOPEXA, avec Business France afin d'introduire de la cohérence et de la coordination dans les actions menées. Il faut par exemple à tout prix éviter que la France soit présente à quelques mois d'intervalle sur deux salons similaires dans un même pays, cela n'est pas efficace, notamment en termes d'image.

Notre effort porte également sur les PME. J'ai réuni, au mois de mars dernier, au Quai d'Orsay, le premier forum des PME à l'international. Un plan d'action a été présenté à cette occasion : dix des quinze propositions avancées sont déjà mises en oeuvre.

L'évolution du nombre de volontaires internationaux en entreprise (VIE) devrait permettre d'atteindre un effectif annoncé de 10 000 jeunes en 2017. Ce dispositif est positif non seulement pour les entreprises, mais surtout pour les jeunes, car les taux d'embauche à l'issue d'un VIE font rêver – si toutes les mesures qui leur sont proposées étaient aussi efficaces en termes d'emploi, l'état de notre pays serait différent. Nous devons cela à notre jeunesse ! Nous travaillons afin que les PME puissent davantage utiliser les VIE en passant soit par un portage par les grands groupes soit par une mutualisation entre petites et moyennes entreprises.

Les conseillers du commerce extérieur de la France constituent un très beau réseau de 4 300 bénévoles dans le monde entier et dans nos régions. Ils se sont mobilisés pour mettre en place cent cinquante-cinq référents PME afin d'assurer un tutorat et un accompagnement à l'exportation.

Aujourd'hui, 3 000 entreprises supplémentaires s'inscrivent dans le cadre du parcours de l'international simplifié et rénové pour les PME.

La campagne Créative France, lancée par le Premier ministre lors de son déplacement au Japon, au mois d'octobre dernier, doit permettre de présenter, à l'international, la créativité, les savoir-faire et les capacités de notre pays en matière d'innovation et de formation.

Je rappelle par ailleurs que les délégations d'entreprises qui m'accompagnent dans mes déplacements à l'étranger sont ouvertes aux PME qui les composent à 40 %. Je crois qu'elles en tirent un réel bénéfice, et je vous incite à continuer de me signaler les entreprises de vos circonscriptions qui sont intéressées.

La simplification douanière sera opérationnelle au 1er semestre 2016. Je salue l'engagement de la direction générale des douanes en la matière.

La coopération entre Business France et les chambres de commerce et d'industrie française à l'étranger doit se renforcer.

Je poursuivrai, en 2016, mon tour de France des PME exportatrices. Je souhaite tenir des forums dans toutes les grandes régions afin de présenter partout les simplifications en cours, et inciter toujours plus de PME à se lancer sur les marchés internationaux.

Le travail relatif à l'attractivité de notre pays doit être prolongé, notamment en matière de recherche et de développement. Le crédit d'impôt recherche (CIR) est particulièrement apprécié par nos partenaires dans le monde entier ; il a vocation à être pérennisé, ainsi que le Gouvernement l'a annoncé.

Des succès ont été obtenus dans le cadre de ce que nous avons appelé, avec le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, « la diplomatie des terroirs ». Il s'agit de défendre les productions de nos terroirs, les indications géographiques, les appellations d'origine, et les savoir-faire agricoles français. La bataille mondiale des normes se mène partout de façon offensive afin de protéger les intérêts de l'agriculture française. L'arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques a été récemment révisé et élargi ; Stéphane Le Foll et moi-même nous sommes beaucoup mobilisés sur le sujet.

Dans le cadre du plan national pour l'élevage, le Gouvernement est intervenu auprès des États qui maintenaient un embargo sur la viande de boeuf, comme le Vietnam, où s'est rendue cet été Mme Martine Pinville, secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire, l'Afrique du Sud, où je me suis moi-même déplacé, le Canada, et l'Arabie Saoudite. Nous maintenons aussi la pression sur d'autres pays tels que la Chine. Le ministre de l'agriculture et moi-même avons également lancé la plateforme France viande export qui a vocation à structurer l'offre française de ce secteur. Nous sommes également mobilisés sur le plan diplomatique pour prévenir les réactions excessives et préjudiciables de nos partenaires lorsque surviennent des cas circonscrits de grippe aviaire dans notre pays.

En matière de politique commerciale, les grandes discussions se déroulent de moins en moins souvent au sein de l'OMC. Le multilatéralisme, auquel la France est attachée dans tous les domaines de la diplomatie, est en crise. Parce que nous craignons la « fragmentation » de l'espace juridique commercial international qui résulte de la multiplication des négociations bilatérales – un rapport du FMI évoque ce risque –, nous souhaitons un retour au multilatéralisme. La dixième conférence ministérielle de l'OMC se tiendra durant toute la semaine prochaine à Nairobi. Nous souhaitons faire avancer le cycle de Doha, mais il est vrai, madame la présidente, que l'état des négociations n'incite pas à un grand optimisme et qu'il ne laisse guère espérer qu'un grand accord fondateur sera conclu. Nous poursuivons évidemment de nombreuses négociations commerciales internationales. Vous avez évoqué celles relatives au TTIP, mais il en existe de nombreuses autres avec tous les ensembles régionaux du monde.

L'Europe, premier ensemble économique au monde, première par son poids dans les échanges internationaux, a vocation à être le grand acteur du commerce mondial. Elle doit peser davantage encore qu'aujourd'hui dans les négociations en cours. L'Union européenne doit cesser d'aborder les négociations de manière bureaucratique et routinière, comme elle le fait trop souvent ; elle ne doit pas les subir, et l'agenda ne doit être imposé par personne. La France rappelle de manière constate son attachement à ce que les négociations soient menées de façon politique, avec des objectifs politiques prenant en compte la défense de nos intérêts et d'un certain nombre de valeurs, la protection des consommateurs ou le respect des choix des citoyens.

Si vous me permettez d'évoquer un autre écueil, il faut également cesser de considérer qu'en matière commerciale l'Europe doit s'appliquer de manière totalement béate les principes du libéralisme, sous prétexte qu'ils conduiraient à une mondialisation heureuse et qu'ils seraient source de croissance et de bonheur. Cela ne fonctionne pas ! Les crises des dernières années auraient dû conduire inéluctablement tous ceux qui prêchent benoîtement en faveur du libéralisme à faire ce même constat ; il suffit de regarder les faits et la réalité. Il faut davantage évaluer ce qui s'est produit, mais également réhabiliter le débat économique en donnant leur place à toutes les écoles de pensée. La même a toujours la parole, et nous écoutons les mêmes économistes comme s'ils détenaient la vérité révélée alors qu'ils n'ont pas vu venir les crises majeures récentes qui ont frappé le monde entier – il faudrait aussi assurer la transparence des ressources annexes qui complètent leurs revenus universitaires.

Le onzième cycle de négociations du TTIP, qui s'est tenu à Miami au mois d'octobre dernier, n'a pas permis de faire d'importants progrès. Je reste très ferme sur les positions que j'avais prises à la fin du mois de septembre, et je ne vois aucune raison de revenir sur les propos que je tenais à ce moment. Alors que l'Europe a multiplié les propositions, dans les faits, discours mis à part, nous ne sentons pas de réelle volonté d'avancer du côté américain. Aucune de nos demandes, qu'elles soient défensives ou offensives, n'est aujourd'hui prise en compte.

En 2016, les normes sociales et environnementales doivent davantage être prises en compte dans les négociations commerciales. Le commerce constitue aussi une façon concrète de contribuer à des projets politiques : la France portera à l'avenir l'idée que les normes sociales et environnementales doivent être contraignantes au même titre que les normes commerciales. Cette préoccupation rejoint évidemment le travail que mène actuellement la diplomatie française dans le cadre de la COP21 présidée par M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international.

Les grands secteurs exportateurs français, qui sont une fierté pour notre pays, sont aussi souvent les secteurs dynamiques sur le plan national. Si je ne crois pas à la mondialisation heureuse – trop d'entre vous sont les élus de territoires qui connaissent les difficultés qu'elle engendre pour être dupes –, je ne crois pas davantage au repli de la France sur elle-même et au recroquevillement. Je rappelle que l'aéronautique représente 23 milliards d'euros d'excédents mais aussi de nombreux emplois. L'agriculture et l'agroalimentaire, l'industrie du luxe – qui repose aussi sur l'artisanat vivant dans les territoires –, la pharmacie, la chimie, et la cosmétique sont autant de secteurs à la fois conquérants à l'international et dynamiques en interne.

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Concernant la forme des négociations commerciales, notamment celles relatives au partenariat transatlantique, il est fâcheux de devoir revenir une fois de plus sur la question de la transparence, mais comment ne pas être de nouveau suspicieux lorsque l'on apprend que certaines grandes entreprises du secteur des énergies fossiles auraient récemment eu accès à certains documents confidentiels ?

J'avais eu l'occasion de vous interroger sur la possibilité de réaliser une étude d'impact au niveau national afin de mesurer les effets sociaux et environnementaux du projet de partenariat. Qu'en est-il ? Ce type d'étude ne devrait-il pas être diligenté systématiquement en amont de chaque projet d'accord ?

Sur le fond du projet de partenariat, alors que le onzième cycle de négociations a été clôturé en octobre dernier, quel état des lieux pouvons-nous faire des points de blocage avec les États-Unis ? Je pense notamment à l'accès aux marchés publics ou aux indications géographiques protégées. Les Allemands rencontrent-ils les mêmes difficultés que nous en la matière ?

Concernant l'accès aux marchés publics américains, la demande de l'Union européenne revient régulièrement sur le tapis mais elle n'a toujours pas commencé à être négociée. Elle devrait l'être en février 2016. Quelles sont les chances concrètes d'avancer sur ce point ?

Pour ce qui est des indications géographiques protégées, vous-même et Mme Cecila Malmström, commissaire européenne au commerce, avez admis que les discussions étaient très compliquées. Or il s'agit de l'une des lignes rouges que la France ne peut se permettre de franchir étant donné l'importance de ce sujet pour notre modèle agricole. Comment continuer à envisager un accord si aucun compromis n'est trouvé sur ce point précis ?

Les services publics semblent aussi concernés puisque Mme Cecilia Malmström s'était engagée à protéger les services publics européens, mais des offres de libéralisation ont été formulées lors du dernier cycle de négociations. Que pouvez-vous nous en dire ?

Deux éléments importants manquent toujours dans la proposition de la Commission européenne, inspirée par la France et l'Allemagne, visant à remplacer le mécanisme de règlement des différends : le principe de quarantaine, et celui d'amende pour plainte abusive. Lors de votre précédente audition, vous nous aviez indiqué que les choses évoluaient dans le bon sens, et que la cour permanente devait être mise en place dans des délais raisonnables. Selon vous, en dépit de ces lacunes, cette proposition est-elle acceptable en l'état ?

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Les PME rencontrent de nombreux freins dans leur développement à l'international. Leur niveau de compétitivité constitue un obstacle majeur mais leurs efforts doivent également porter, d'une part, sur la pratique courante de la langue anglaise par leurs dirigeants et leurs commerciaux et, d'autre part, sur l'utilisation des nombreuses opportunités qu'offre le numérique – à ce jour, moins de la moitié des petites entreprises disposent d'un site internet. Quelles solutions envisagez-vous pour remédier à ces difficultés ?

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M. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, m'a indiqué hier que les organisations syndicales qui s'inquiétaient du transfert de la partie garantie publique COFACE vers la Banque publique d'investissement pouvaient être rassurées sur la compétence de cette dernière. Je n'y reviendrai pas, mais j'insiste sur la nécessité de prendre en compte l'expérience de la COFACE. Le maintien sous maîtrise publique constitue cependant un point positif.

Je m'interroge, de façon générale, sur l'implication des banques en matière d'exportation, et je pense en particulier à Cuba. Malgré les garanties publiques qui sont toujours apportées, l'on constate une frilosité des banques pour accompagner les entreprises françaises dans leurs échanges commerciaux avec un certain nombre de pays. Au-delà des obstacles bureaucratiques, l'entreprise française qui veut exporter à Cuba ne trouvera des financements que dans les banques canadiennes ou espagnoles. Il semble que les banques françaises n'aient pas la volonté de surmonter le blocus américain et de s'installer dans ce pays. L'une d'entre elles va-t-elle enfin s'y résoudre ?

L'article 39 du code des douanes qui permet de contrôler les produits français qui bénéficient d'une marque les protégeant laisse passer au travers des mailles du filet des importations de contrefaçon. Les douanes déplorent de ne pouvoir effectuer suffisamment de contrôle et de ne pas disposer de moyens de vérification numériques et dématérialisés.

Comme vous le savez, je suis opposé au traité transatlantique quel que soit son contenu. J'appelle néanmoins votre attention sur l'exigence de développer une approche des importations qui tienne compte du différentiel social et environnemental.

Monsieur le secrétaire d'État, quelles seraient selon vous les conséquences sur le développement de notre économie et de notre commerce extérieur de la mise en oeuvre d'un prétendu « patriotisme économique » que certains appellent de leurs voeux – je pense notamment au Front national ? Il faut dire le désastre que constituerait un repli sur nous-mêmes et l'édification de murs à nos frontières.

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Le 12 octobre dernier, vous lanciez, avec le ministre de l'agriculture, la plateforme France viande export qui doit permettre de mieux mobiliser l'offre française, et de bâtir des partenariats économiques durables avec les pays importateurs. Grâce à cet outil innovant, les entreprises auront la possibilité de répondre collectivement aux offres et aux opportunités commerciales à l'exportation, qui pourront porter sur des volumes plus importants. Elles utiliseront une identification unique qui permettra de mieux promouvoir la viande française. Cette plateforme a-t-elle déjà offert une réponse commune à des appels d'offres de pays tiers ? Plus largement, pouvez-vous dresser un premier bilan de l'action du Gouvernement afin d'ouvrir de nouveaux marchés vers l'exportation au bénéfice des éleveurs ?

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En France, aujourd'hui, plus de cinq mille entreprises produisent des bateaux, voiliers, paddles… Elles exportent en moyenne 80 % de leur production, ce qui est exceptionnel. Hier, au salon nautique international de Paris, qui se tient Porte de Versailles, où se sont rendus plusieurs d'entre nous, elles nous ont confié avoir un grand potentiel de développement freiné par un certain nombre d'éléments. Le classement en installation classée pour la protection de l'environnement (ICPE) pose ainsi un problème à ces gros chantiers qui se trouvent souvent sur le littoral. Le manque de flexibilité du temps de travail constitue également un obstacle dans une industrie dont les carnets de commandes se vident et se remplissent de façon aléatoire.

Tous les grands pays du monde ont développé leur transport maritime, et la Chine prend une place de plus en plus grande dans ce secteur. Comment analysez-vous la situation ?

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Les missions et les rôles respectifs de la SOPEXA et de Business France ont été clarifiés. La SOPEXA doit désormais relever un véritable défi en termes de réputation puisque M. Jean-René Buisson, son président, estime qu'elle « souffre en France d'une mauvaise image ». L'État compte-t-il participer à la revalorisation de cette image ?

Depuis mai 2013, l'excédent des échanges agroalimentaires français diminuait. Depuis mars 2015, il progresse, notamment grâce à l'augmentation des exportations de céréales et d'animaux vivants. Il atteignait 647 millions d'euros en août dernier, soit 35 millions d'euros de plus qu'au mois d'août de l'année précédente. Comment expliquer cette bonne santé commerciale alors que nous sommes confrontés à une crise agricole interne extrêmement profonde ? Comment ces résultats très positifs peuvent-ils également profiter aux agriculteurs ?

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La Conférence nationale du tourisme a insisté sur l'importance de l'oenotourisme, et le Parlement a pris des dispositions législatives afin que les collectivités et les territoires puissent communiquer sur ce secteur. Comment le Gouvernement compte-t-il accompagner son développement ?

Dans le cadre de la fusion de Business France et de la SOPEXA, comment les PME de l'agroalimentaire, en particulier celles du secteur viticole, pourront-elles se regrouper et être accompagnées dans la conquête de marchés extérieurs à l'Union européenne.

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Les signes d'identification de la qualité et de l'origine des produits agricoles et agroalimentaires (SIQO) constituent un atout économique pour la France. Le rapport d'information relatif aux produits sous SIQO, que j'ai présenté en janvier dernier, au nom de la commission des affaires économiques, insistait sur la nécessaire simplification de la communication à l'export. Il soulignait le rôle majeur de la SOPEXA chargée de promouvoir les SIQO. Depuis le mois de septembre, la SOPEXA s'est rapprochée de Business France qui accompagne les entreprises dans leur internationalisation et, à la fin de l'année 2017, le second se substituera à la première pour assurer la promotion des produits français à l'étranger. Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous décrire en détail le rôle que jouera à terme la SOPEXA ? Les moyens matériels, financiers et humains de Business France lui permettront-ils de mener à bien sa nouvelle mission ?

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Aujourd'hui, certains redoutent que les négociations en cours en vue d'établir un partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP), également connu sous le nom de traité de libre-échange transatlantique (TAFTA), donnent lieu à une remise en cause des prérogatives des collectivités territoriales. Il semble que les articles 4, 23, 24, 27 et 45 du mandat confié à la Commission européenne fassent état d'une soumission des réglementations nationales au futur traité. Dans ces conditions, le pouvoir réglementaire des collectivités territoriales pourra-t-il être préservé conformément à l'article 72 de la Constitution d'où découle le principe de leur libre administration ? Que pensez-vous des collectivités qui se déclarent « hors TAFTA » ?

L'accord de partenariat économique (APE) ratifié entre l'Union européenne et seize États de l'Afrique de l'Ouest – les quinze membres de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) plus la Mauritanie –, qui supprime les droits de douane sur 75 % des exportations européennes, réduit les marges de manoeuvre d'États africains qu'il prive d'importantes recettes budgétaires. En agissant de la sorte, l'Union européenne ne met-elle pas en danger le développement de ces pays où des millions d'habitants vivent avec seulement quelques dollars par jour et où la compétitivité des petites exploitations agricoles et des petites entreprises est faible ? Qu'en est-il de la souveraineté de ces États, et de leur capacité à diversifier leur économie ?

Plusieurs collègues et moi-même menons actuellement au sein de la commission des affaires économiques une mission d'information sur la crise de l'élevage. Nos auditions montrent que la diversité des normes édictées dans l'Union, le caractère particulièrement contraignant de l'agriculture biologique en France, les interprétations différentes de directives comme celle portant sur les travailleurs détachés, les tolérances de certains à l'égard du travail au noir, notamment en Espagne, ou du détournement du salaire minimal, par exemple en Allemagne, finissent par poser un problème. Nous devrions nous pencher davantage sur le coût du travail, les distorsions de concurrence et le dumping social au sein de l'Union ; il en va de l'avenir même de l'Europe !

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Le rapprochement des acteurs de l'exportation était une nécessité. Beaucoup a déjà été fait et, grâce à Business France, les choses sont aujourd'hui bien plus claires. Quel est le calendrier précis de la fusion avec la SOPEXA ? Quid du rapprochement avec les chambres de commerce que vous avez évoqué ?

Le programme des VIE est très positif pour la France, pour les entreprises, et pour les jeunes concernés. Il arrive toutefois malheureusement que certains d'entre eux ne trouvent pas d'emploi à l'issue de leur mission. Nous rencontrons quelques problèmes administratifs pour qu'ils bénéficient d'indemnités de chômage ou de la sécurité sociale – la question des droits à la retraite se pose aussi pour tous. Je sais que vous travaillez sur ces sujets ; pouvons-nous savoir où vous en êtes ?

De nombreux Français vivant à l'étranger, restaurateurs ou commerçants par exemple, sont des acteurs de la « diplomatie des terroirs ». Puisqu'ils ne sont pas à proprement parler des exportateurs, mais plutôt des importateurs, ils ne bénéficient pas de l'aide de notre pays. Comment pourrions-nous valoriser ces compatriotes qui font aussi vivre nos produits à l'étranger ?

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Nous savons tous à quel point il est difficile de pénétrer les différents marchés des États-Unis. Ce pays met en effet en oeuvre un protectionnisme extrêmement dur. Il y a un an, alors que j'accompagnais une délégation du Périgord à Chicago pour présenter une exposition sur la grotte de Lascaux, nous avons dû renoncer à transporter du foie gras français pour nous rabattre sur du foie gras canadien !

Dans nos relations avec les États-Unis, la question des normes sanitaires pose un problème considérable. Nous ne voulons ni des produits contenant des OGM ni des viandes hormonées – je ne parle même pas de celles qui sont traitées au chlore. Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous en dire plus sur cet enjeu majeur pour l'agriculture française et européenne ?

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L'exploitation des huiles et gaz de schiste aux États-Unis n'est manifestement pas une « bulle » puisqu'elle se poursuit lorsque le prix du baril est fixé à 40 ou 50 dollars. Depuis quelques années, des unités de chimie et de pétrochimie sont en construction autour de cette production. Lorsqu'elles seront exploitées, à partir de 2018 ou 2019, il est à craindre qu'elles inondent le marché de produits chimiques de base entrant dans la composition de nombreux matériaux. Les chimistes européens s'inquiètent de cette situation. Cette branche de l'industrie très exportatrice est essentielle pour de nombreux secteurs d'activité comme l'automobile ou le bâtiment. Le Gouvernement a-t-il bien identifié cette menace ? Quelles dispositions envisage-t-il de prendre pour y faire face ?

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Business France a vu le jour il y a un an mais, sur le terrain, nous entendons toujours les mêmes récriminations de la part des PME qui souhaitent être accompagnées pour conquérir des marchés à l'étranger. Quel bilan dressez-vous de l'activité de l'agence depuis le mois de janvier dernier ?

Vous vous souciez à juste titre des normes environnementales. Il faudra toutefois veiller à la cohérence entre cet impératif et la difficulté de proposer une production alimentaire de qualité et labellisée qui puisse s'exporter.

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Certains pensent que l'actuelle proposition de directive sur le secret des affaires ne vient pas totalement par hasard en même temps que les négociations en cours sur le TAFTA. Si l'on peut comprendre les motivations affichées par cette proposition, elle pose un certain nombre de questions relatives à la liberté d'information et d'expression, qui concernent par exemple les journalistes, les lanceurs d'alertes ou les salariés et leurs représentants. Il semble que le problème ne se pose pas Outre-Atlantique où une législation similaire est en vigueur, mais où chacun peut se réclamer du premier amendement de la Constitution américaine, sans équivalent à l'échelle de l'Union européenne. La mise en oeuvre de la directive en même temps que l'application du traité transatlantique en négociation faciliterait l'implantation des entreprises américaines sur nos territoires en leur permettant de profiter de nos secrets d'affaires et de contourner la faible protection dont disposent en Europe les journalistes et les lanceurs d'alertes. Monsieur le secrétaire d'État, quel est votre point de vue sur cette préoccupation de la société civile ?

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Paradoxalement, alors que de nombreuses entreprises du Nord-Pas-de-Calais, région où je suis élu, travaillent sur les marchés internationaux, la population ne croit guère aux vertus des échanges avec l'étranger. Il lui semble même parfois que l'insertion dans l'échange international fragilise l'emploi. Monsieur le secrétaire d'État, quel est l'effet multiplicateur de l'échange international en termes d'emplois durables ?

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Le potentiel du secteur nautique à l'export doit davantage être pris en considération. Je rappelle qu'il fait actuellement face à une concurrence accrue, avec notamment l'arrivée des Chinois.

Le « grand yachting » crée de nombreux emplois, notamment sur la French Riviera. Le Gouvernement devrait traiter ce secteur comme celui de l'hôtellerie de luxe et des palaces, car il génère un gros chiffre d'affaires et fait vivre de nombreuses personnes.

Les ports constituent un important maillon dans la capacité d'exportation de notre pays. Le Gouvernement doit être particulièrement attentif en la matière.

La France fait la promotion de la « ville durable ». Quelques batailles d'ego ont eu lieu entre les différents acteurs susceptibles de nous faire avancer sur ce sujet. L'enjeu est pourtant majeur. Nous devons avoir des démonstrateurs en France. Le sujet était sur la table au début du quinquennat ; où en sommes-nous aujourd'hui ?

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Le commerce extérieur est, à mon sens, une cause nationale économique. Il faut à la fois affirmer que nous vivons dans un monde ouvert, dire notre désir d'échanges, et protéger un certain nombre d'entreprises et, par là même de salariés.

Un changement de paradigme me semble cependant nécessaire. Certaines grandes régions européennes, comme la Catalogne, travaillent déjà davantage sur le développement de la demande européenne que sur celui de l'offre.

L'économie et la formation font partie des compétences des nouvelles grandes régions. La question du commerce extérieur ne devrait-elle pas être revue en tenant compte de cette évolution ? Monsieur le secrétaire d'État, on répète que les Français sont ingénieux mais qu'ils ne savent pas vendre : peut-être serait-il intéressant que vous travailliez avec votre collègue en charge de l'éducation sur une autre manière de faire du commerce dans notre pays ?

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Quelles actions précises pouvez-vous conduire pour renforcer l'engagement des jeunes dans le commerce international, par exemple dans le cadre du volontariat international d'entreprise (VIE) ? Les formations nécessaires existent-elles déjà ?

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Hier, nous avons appris ce que je considère comme une mauvaise nouvelle concernant la taxe sur les transactions financières (TTF). Le conseil ECOFIN a pris une décision qui prévoit des conditions extrêmement modestes pour sa mise en oeuvre. Monsieur le secrétaire d'État, quel est votre point de vue sur cette TTF qui ne concerne désormais plus que dix pays – l'Estonie vient de se retirer – et ne donne pas nécessairement un bon signal en faveur des pays africains et du financement de l'aide au développement ?

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Matthias Fekl, secrétaire d'état chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger

Madame la présidente, pour revenir à votre questionnement initial, l'accord entre l'Union européenne, le Pérou et la Colombie inclut un chapitre relatif au développement durable – comme nous souhaitons que cela soit systématiquement le cas. Pour m'exprimer en termes diplomatiques, je dirais que nous considérons que le contenu de ce dispositif est perfectible. Les feuilles de routes élaborées par le Parlement européen permettent de suivre les évolutions en la matière, et d'apporter des pistes d'amélioration en coordination avec les parlementaires européens et nationaux. Une clause rend possible la suspension de l'accord en cas de non-respect. Nous sommes particulièrement attentifs sur ces sujets.

Le TISA mériterait que nous y consacrions une audition tant les enjeux sont importants. Nous avons obtenu, avec plusieurs autres États membres de l'Union, la publication du mandat de négociation. Nous souhaitons que cette pratique soit constante en matière de négociations commerciales. La construction d'un véritable agenda de transparence est en cours, et certaines décisions très fortes ont déjà été prises en la matière. La mise en place du comité de suivi stratégique permet de rendre des comptes devant les parlementaires et devant la société civile, et la publication des mandats de négociation constitue un réel progrès. Nous sommes totalement mobilisés auprès de la Commission européenne pour obtenir l'amélioration de l'accès aux documents de négociation. J'ai bon espoir que les choses évoluent dans un délai assez bref. La transparence constitue un enjeu majeur pour les négociations commerciales du XXIe siècle. À l'ère de Wikileaks et des réseaux sociaux, alors que certaines entreprises multinationales semblent avoir accès aux informations, il est bien normal que les opinions publiques obtiennent gain de cause en la matière.

Les services audiovisuels sont exclus du TISA, et le droit à réguler est explicitement reconnu dans le mandat de négociation. Par ailleurs, la France est attachée à l'existence d'une clause transversale de protection des services publics, clause dont elle demande systématiquement la mise en oeuvre, quelle que soit la négociation commerciale. Les discussions sur le TISA ne progressent pas rapidement.

Pour ce qui est du cycle de Doha, je répète que j'ai très peu d'espoir que nous puissions parvenir à un accord large et ambitieux dans le cadre de la réunion ministérielle de Nairobi, la semaine prochaine.

Plusieurs travaux ont été menés sur l'évaluation du TTIP. Un très intéressant rapport du centre de recherche français dans le domaine de l'économie internationale (CEPII) date de 2013. Je considère cependant qu'aucune étude ne fait foi : ni celles qui promettent que le TTIP apportera le bonheur éternel, ni celles qui dénombrent, à l'unité près, les emplois détruits par le traité. Nous avons besoin de disposer de davantage d'études qui doivent aussi évaluer les accords déjà mis en oeuvre. Le Parlement peut contribuer de façon très importante à l'évaluation des politiques publiques. Ce grand chantier d'avenir reste à mener.

Monsieur Pellois, je ne m'attarde pas sur la question de la transparence des négociations du TTIP. Il s'agit pour moi d'une priorité : le premier courrier que j'ai signé au lendemain de ma nomination portait sur ce sujet. Tous les citoyens sont demandeurs, et je me déplace régulièrement dans les territoires, à l'invitation d'élus ou d'associations, pour rendre compte de la situation. Je ne sais pas si des firmes internationales ont eu accès à des documents qui n'étaient pas rendus publics. En tout état de cause, si tel est le cas, c'est un scandale ! Des lobbies ne peuvent pas disposer de documents que l'on refuse de communiquer aux élus et aux citoyens.

Peu de choses ont avancé dans le cadre du onzième cycle de négociations du projet de partenariat. Il y a très clairement un blocage du côté américain, et certaines de nos exigences ne sont pas prises en compte concernant l'accès aux marchés publics, les indications géographiques, les services, notamment financiers, et la réciprocité. En matière de politique commerciale, l'application du principe de réciprocité est un préalable. Or les Américains ne le respectent pas. Ils prônent fortement le libéralisme pour les autres, mais quand leurs intérêts sont en jeux, ils savent fort bien, et à juste titre, s'en abstraire. Nous pouvons donc faire de même. Comptez sur moi pour défendre nos priorités, nos intérêts, et nos valeurs dans ces négociations !

Je travaille étroitement avec mon homologue allemand, M. Matthias Machnig, et avec M. Sigmar Gabriel, ministre fédéral de l'économie et de l'énergie, afin que nous avancions ensemble. Tant que la France et l'Allemagne partageront des grands intérêts stratégiques et défendront ensemble un certain nombre de principes, nous pourrons avancer, comme cela s'est fait par exemple sur le règlement des différends ou la transparence. L'honnêteté oblige toutefois à constater que les spécialisations économiques de nos deux pays ne sont pas identiques, que certains intérêts diffèrent, et que l'industrie allemande, plus exportatrice que la nôtre, est plus offensive sur certains marchés. Il ne s'agit donc à aucun moment de céder à une quelconque naïveté, même avec l'Allemagne qui est un grand pays partenaire et ami.

S'il n'y a pas d'évolution du côté américain sur le TTIP, il n'y aura pas d'accord. C'est aussi clair et net que cela.

La France a proposé la première la création d'une cour permanente de justice commerciale. Dans une économie mondialisée, il faut que les règles soient mondialisées et qu'elles garantissent un haut niveau de protection et de respect des citoyens et des droits des consommateurs. Une proposition sur ce sujet a été bâtie avec l'Allemagne, qui a été adressée à la Commission. Si les deux idées que vous évoquiez n'ont pas été retenues – la « quarantaine » applicable aux arbitres souhaitant devenir avocats, afin d'éviter les conflits d'intérêts, et la sanction pour plainte abusive –, la proposition européenne va aujourd'hui très loin par rapport aux fins de non-recevoir que l'on nous opposait il y a à peine un an, et elle reprend très largement les préconisations françaises.

Monsieur Mathis, vous avez insisté sur le rôle des PME et sur l'importance de la pratique de la langue anglaise. Je partage totalement votre position. La ministre de l'éducation nationale est particulièrement attentive à la question de l'enseignement des langues. Je constate aussi sur le terrain que la génération qui accède aujourd'hui à la tête des PME parle plus souvent anglais que ce n'était le cas dans la génération précédente. Il ne faut pas oublier les autres langues que l'anglais, et notamment le chinois. Je sais bien que les patrons de PME ne vont pas tous pratiquer cette langue, mais ils doivent pouvoir faire appel à des compétences – le recours aux VIE prend alors tout son sens, d'autant que ce dispositif permet de nouer des contacts de long terme. Nous avons trop souvent tendance, en France, à penser que le fait de proposer les meilleurs produits – car c'est bien souvent le cas – nous dispense de nouer des relations de confiance. C'est une erreur, d'autant qu'en Asie, ce rapport sur le long terme est essentiel.

Concernant le numérique et les PME, je veux regarder avec les régions, les chambres consulaires et Business France, comment il est possible d'assurer un accompagnement pour mettre en place des sites internet dans plusieurs langues. Les choses ne sont pas encore en place aujourd'hui, mais j'attache une grande importance à ce sujet.

Monsieur Chassaigne, la question essentielle du rôle des banques se pose pour Cuba mais également pour d'autres pays. Deux banques françaises ont été chassées de Cuba par crainte des effets de l'extraterritorialité du droit américain, alors même que les États-Unis négociaient déjà sans doute les modalités du dégel en cours. Un autre problème vient du problème du règlement de la dette. Le ministre des finances et moi-même sommes personnellement engagés dans les discussions en cours, et nous avons bon espoir qu'elles évoluent positivement. La France souhaite jouer tout son rôle à un moment historique pour ce pays. Au mois de mai dernier, le Président de la République a été le premier chef d'État occidental à se rendre à Cuba depuis l'annonce du dégel entre l'île et les États-Unis. La France doit trouver une solution satisfaisante à ce problème de dette afin que Cuba, qui souhaite diversifier ses partenariats économiques, offre davantage d'opportunités aux entreprises françaises. Elles sont déjà présentes en nombre – je pense à la CMA CGM, à Bouygues, à Accor, à Malongo, à de très nombreuses PME… Avec l'Espagne, la France est le pays qui a les liens historiques les plus forts avec Cuba. Au début des années 1990, nous avons été l'un des rares pays à nous trouver aux côtés de Cuba lorsqu'à la suite de la disparition de l'URSS, tous les partenaires économiques de l'île, fournisseurs et clients, avaient subitement disparu.

Nous travaillons en relation étroite avec les douanes, même si elles ne relèvent pas de mon autorité. Je salue les efforts de simplification qu'elles consentent pour se mettre au service de l'export. Monsieur Chassaigne, l'article 39 organise la lutte contre les produits importés qui prétendent bénéficier d'une marque spécifique d'origine française. Les douanes ont mis en oeuvre un plan de lutte contre la contrefaçon pour la période allant de 2013 à 2017. Elles certifient gratuitement le made in France. Un dispositif très précis est en place pour le suivi des vins et spiritueux. La dématérialisation des moyens et l'utilisation du numérique font partie du plan de lutte. Les 8,8 millions d'articles contrefaits saisis par les douanes en 2014 constituent un nouveau record qui illustre bien la mobilisation de ces services.

J'en viens à votre très judicieuse question sur le patriotisme économique. Dans cette salle, tout le monde défend le patriotisme économique : nous aimons tous notre pays, et c'est bien pour cela que nous ne voulons pas le voir tomber entre de mauvaises mains. Je suis moi-même élu du Lot-et-Garonne, territoire qui connaît les difficultés qu'engendre la mondialisation. Des pans entiers de notre industrie sont aujourd'hui malmenés faute d'être compétitifs face à la concurrence internationale, ce qui induit des disparitions d'emplois et implique que des territoires se reconvertissent de fond en comble. Dans de telles situations, l'on comprend bien que le concept de « mondialisation heureuse » est absurde. Le problème, c'est que l'on voit les emplois disparaître et la détresse progresser, alors que l'on ne voit pas les emplois qui se créent. Le lien entre commerce extérieur et création d'emplois n'est jamais fait directement : lorsqu'une entreprise s'installe, personne ne pense à ses exportations. Il faut donc marteler un chiffre : un quart de l'emploi français, c'est-à-dire six millions d'emplois, dépend directement du commerce extérieur et de la capacité de notre pays à se projeter hors de ses frontières. Il est en conséquence aberrant de prêcher la fermeture de notre pays sur lui-même, que ce soit pour l'industrie ou l'agriculture. Dire à nos agriculteurs qu'ils auront un avenir meilleur si la France sort de l'Europe, alors que l'agriculture et l'agroalimentaire enregistrent des excédents commerciaux, c'est un mensonge et même une insulte ! Si de telles paroles étaient suivies d'actes, en quelques mois l'agriculture française serait confrontée à des crises majeures bien plus fortes que celles qui l'éprouvent déjà durement aujourd'hui. Dire aux agriculteurs et aux ouvriers de France que leur vie s'améliorera lorsque nous serons coupés du monde, c'est surfer sur les peurs et sur les difficultés que rencontrent des territoires entiers, et cela nous interdit de nous projeter dans l'avenir à l'heure où de nombreux secteurs créent de l'emploi parce qu'ils exportent, parce qu'ils innovent et parce qu'ils montent en gamme.

Monsieur Le Roch, France viande export regroupe la quasi-totalité des professionnels du boeuf, et du porc ainsi que le secteur agroalimentaire concerné. C'est la première fois que professionnels de la filière se fédèrent ainsi : je salue cet engagement indispensable. La puissance publique doit prendre toute sa part dans le combat à mener, mais elle ne peut pas se substituer à la filière dans son effort de structuration – même s'il est possible de l'accompagner. La plateforme n'est lancée que depuis quelques semaines, et elle n'a pas encore remporté d'appel d'offres, mais un premier objectif concerne le Liban. Elle a vocation à présenter des offres dans tous les pays où le Gouvernement a obtenu des levées d'embargo. Je me tiens à votre disposition pour vous rendre compte, avec le ministre de l'agriculture, des résultats au fur et à mesure que nous les obtiendrons.

M. Le Ray et M. Leroy m'ont interrogé sur la belle filière du nautisme qui compte nombre de PME et d'entreprises de taille intermédiaire très dynamiques et très largement exportatrices. Je partage leur constat sur l'importance de ce secteur. Je me suis rendu en octobre dernier au Grand Pavois, le salon nautique international à flot, qui se tient à La Rochelle. Il s'agit de l'une des vitrines de cette filière innovante et créatrice d'emplois qui se structure en matière de tourisme autour des croisières et du nautisme. Nous l'accompagnons pour lui permettre d'obtenir des marchés à l'étranger. Nous sommes aussi à la disposition des entreprises pour tenter de répondre aux défis que pose la saisonnalité propre au secteur. La législation actuelle comporte déjà de nombreuses mesures qui permettent des ajustements utiles. Je pense en particulier à la mise en oeuvre des trente-cinq heures et aux débats consacrés à l'annualisation du temps de travail – il est possible de donner des libertés et des droits nouveaux aux salariés tout en collant aux réalités de l'économie.

Il est essentiel de disposer de grands champions en matière de transport maritime. Les nôtres conquièrent de nouveaux marchés. Pour citer un seul exemple, l'été dernier, lors de la visite officielle en France du Premier ministre chinois, deux très importants accords économiques ont été signés, à Marseille, avec la CMA CGM. L'entreprise française s'impose ainsi comme l'un des leaders mondiaux du secteur. Nous sommes aux côtés de nos transporteurs pour aider à leur développement car le lien entre ces entreprises et l'accès au marché international est évident.

Vous avez été nombreux à m'interroger sur le rapprochement entre la SOPEXA et Business France. Le Président de la République a souhaité rationaliser et simplifier le dispositif français d'accompagnement à l'export, ce qui a abouti à la création de Business France. La SOPEXA, intervenant privé, remplit une importante et appréciée mission de service publique. Nous avons souhaité transférer certaines de ses activités à Business France pour éviter les doublons – lorsque deux opérateurs organisent, dans le même pays, des événements similaires à peu de temps d'intervalles, c'est non seulement absurde, mais nous nous ridiculisons. À partir du 1er janvier prochain, les mini-expositions relèveront en conséquence de Business France. Il en sera de même, un an plus tard, de l'organisation et de la tenue des pavillons France dans les salons à l'étranger. Nous veillons à ce que ces changements de compétences s'accompagnent des moyens nécessaires : pour la partie salons et mini-expositions, dix-sept emplois équivalents temps plein seront transférés vers Business France. J'ai très régulièrement rencontré les responsables des deux opérateurs, et je peux affirmer que ce transfert se produit dans une atmosphère consensuelle.

Monsieur Daniel, l'agriculture française exporte parce qu'elle mise sur la qualité. Elle continuera dans cette voie en allant progressivement vers l'agriculture durable, en structurant toujours davantage son offre, et en garantissant l'authenticité de ses productions, ce qui explique notre mobilisation en faveur des indications géographiques ou des appellations d'origine. Cette année, lors de la conférence annuelle des ambassadeurs, qui se tient à Paris, nous avons organisé des événements spécifiques pour présenter l'agriculture et l'agroalimentaire français.

Madame Fabre, tous les sondages effectués sur le tourisme montre que les étrangers viennent en France pour le patrimoine, pour la culture, et pour la gastronomie, c'est-à-dire aussi pour les vins. Je soupçonne d'ailleurs la plupart des personnes interrogées de ne placer la gastronomie qu'en deuxième ou troisième choix pour ne pas avouer qu'elle se classe bien mieux dans leurs préférences. L'oenotourisme est donc un secteur essentiel en faveur duquel nous mettons en place une stratégie à la demande de M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international, qui s'est personnellement impliqué sur le sujet – il a d'ailleurs été élu « homme de l'année » pour 2014, par La Revue du vin de France. Nous avons confié à un viticulteur, M. Michel Bernard, la mission de piloter le pôle national d'excellence dédié à l'oenotourisme, lancé en Champagne, au mois de janvier dernier. Nous souhaitons fédérer tous les acteurs afin qu'ils puissent s'inspirer des démarches positives existantes, et nous entendons promouvoir toute la gamme de l'oenotourisme. Le haut de gamme permettra d'attirer une certaine clientèle étrangère, en particulier dans les vignobles prestigieux, mais les classes moyennes et populaires sont aussi concernées. Tous les vignobles et toutes les appellations peuvent trouver leur place dans une économie qui constitue un réel complément de revenu pour les viticulteurs qui le souhaitent. L'oenotourisme est une vitrine pour la France et permet de faire de la pédagogie autour du vin, de ses qualités et de ses vertus. Nous savons, en France, que le vin est un produit de civilisation. Il faut le dire sans tabou, comme il faut dire que les viticulteurs sont les premiers à s'engager dans la lutte contre l'alcoolisme et en faveur de la prévention en matière de sécurité routière. De plus, que je sache, ce n'est pas en buvant du vin que l'on s'adonne au binge driking ou aux autres pratiques détestables de ce type ! Vous pouvez compter sur la mobilisation de tout le Gouvernement pour continuer de défendre des produits qui font partie du meilleur de la France, et pour valoriser et accompagner les importants efforts des viticulteurs en faveur du tourisme.

Madame Le Loch, je respecte le geste des collectivités qui se déclarent « hors TAFTA ». Il s'agit d'un très important acte politique qui n'a cependant aucune portée juridique car la France est encore un État souverain et unitaire qui contracte des engagements internationaux applicables sur l'ensemble de son territoire. Je note cependant que certaines collectivités se sont proclamées « zones de débat TAFTA », ce qui a l'avantage d'avoir le même impact politique tout en respectant le cadre juridique et constitutionnel qui est le nôtre. Selon le recensement que nous avons effectué, et qui peut être affiné, nous comptons 450 collectivités concernées par l'un des deux cas de figure que je viens d'évoquer. Je me suis rendu dans certaines des collectivités en question afin de débattre, et je reste disponible pour rendre des comptes sur ce sujet, y compris au plus près du terrain.

Je salue les accords de partenariat économique (APE) passés avec l'Afrique de l'Ouest, l'Afrique australe ou l'Afrique orientale. Ils donnent un cadre rénové et stable aux relations entre l'Union européenne et l'Afrique pour lesquelles la France a le souci de la réciprocité et de l'équité. Malgré les difficultés que vous avez évoquées, ces accords sont plus favorables aux États africains en matière de droits de douane.

Madame la députée, dans le cadre de la mission d'information que vous conduisez sur la crise de l'élevage, vous avez constaté que les phénomènes de concurrence déloyale en matière de droit du travail ou d'usage des produits phytosanitaires créent des distorsions et des iniquités au sein de l'Union européenne. J'ai fait partie des députés cosignataires d'une proposition de loi visant à lutter contre le dumping social et la concurrence déloyale, déposée en 2014, dont M. Gilles Savary a été le rapporteur, et dont l'adoption a apporté quelques réponses au problème des travailleurs détachés. L'Europe n'est à la hauteur de son rôle que si elle résout très concrètement ces problèmes : le marché unique ne s'entend que si des règles identiques s'appliquent de façon identique sur l'ensemble de son territoire.

Monsieur Cordery, nous adaptons, pays par pays, le cadre dans lequel les VIE sont recrutés. Nous n'atteindrons les 10 000 volontaires que si les plafonds d'emplois sont relevés. Nous suivons de près la question des rémunérations, notamment dans les pays hors zone euro où les conditions de vie peuvent être difficiles. Nous regardons ce qu'il en est des cas, très peu nombreux, où les VIE ne trouvent pas de travail à l'issue de leur mission – 90 % d'entre eux sont embauchés, la plupart du temps dans la structure qui les avait envoyés à l'étranger.

Je partage votre constat sur le rôle joué par les Français expatriés à l'étranger. Ils sont plus de deux millions et demi et ils jouent un rôle d'ambassadeur. C'est une réalité que vous connaissez bien.

Au 1er décembre 2015, dix-neuf accords avaient été signés localement entre des chambres de commerce et d'industrie et Business France. Dix accords sont aujourd'hui en bonne voie, et nous espérons pouvoir en signer une trentaine. Nous rencontrons quelques difficultés dans une vingtaine de cas mais les choses progressent. Il ne reste que quelques cas problématiques que nous tentons de résoudre. Le but n'est pas d'imposer un modèle unique mais de proposer un cadre lisible pour les PME. Nous acceptons les adaptations, mais nous n'accepterons pas que certains ne jouent pas le jeu et ne facilitent pas le parcours international des PME. C'est bien la moindre des choses que puissent faire la puissance publique et les opérateurs privés chargés d'une mission de service public !

Monsieur Peiro, les normes sanitaires constituent un sujet fondamental et l'une des « lignes rouges » que défend notre pays dans toutes les négociations. Nous ne souhaitons en aucun cas que les réjouissances gastronomiques que vous avez citées s'inscrivent à nos menus. La protection des consommateurs est au coeur de la stratégie française de négociation. Si nous sommes favorables à la simplification de la vie de nos PME, et à la suppression des doubles contrôles qui ne sont pas nécessaires, nous sommes déterminés à ne pas accepter un abaissement des normes de protection et de qualité. La nécessité d'être présents dans la bataille mondiale des normes est un argument fort pour justifier notre participation aux négociations du TTIP, mais il ne vaut que s'il s'agit de normes protectrices et souhaitables.

Monsieur Blein, dans le prolongement de la réponse que je viens de faire à M. Peiro, sachez que la souveraineté des parties à la négociation n'est pas négociable. Nous ne signerons pas un accord qui nous imposerait, de quelque manière que ce soit, de revenir sur les questions de la diversité culturelle ou du respect des services publics, ou de modifier nos choix en matière de politique énergétique. Rien dans les négociations ne permet de penser que l'on pourrait nous imposer d'exploiter les gaz de schiste. La réciproque est vraie : nous n'irons pas interdire à des partenaires commerciaux la prospection ou l'exploitation de leurs ressources.

Madame Got, il est un peu tôt pour tirer un bilan global de l'activité de Business France en faveur des PME, mais les premiers retours sont très positifs. Depuis le forum que j'ai organisé au mois de mars dernier au Quai d'Orsay, qui visait à installer la culture des PME au coeur de l'État et des politiques publiques, les choses ont bougé. Lors de la semaine des ambassadeurs, un speed dating a été organisé avec succès, sur l'initiative de M. Laurent Fabius, entre ces derniers et les patrons de PME. La politique des grands contrats faisait légitimement déjà partie de la stratégie commerciale de la France, mais il était nécessaire de renforcer le lien avec les PME ; nous y sommes particulièrement attentifs.

Madame Linkenheld, la directive relative au secret des affaires n'est pas suivie par mon secrétariat d'État et je ne saurai empiéter en la matière sur le travail mené par Bercy, mais j'ai bien compris le lien que vous établissez justement entre ce sujet et les enjeux de politique commerciale. Je regarderai cette question de manière particulièrement attentive.

Monsieur Kemel, comme M. Chassaigne, vous vous faisiez écho de la détresse que vous rencontrez sur le terrain. La moindre des choses que nous devons aux personnes qui sont dans cette détresse, ce sont des réponses honnêtes, et certainement pas des propos démagogiques qui conduiraient à aggraver encore la situation. Il ne faut pas se contenter d'écouter les invectives et les slogans. Nous devons regarder les programmes de façon précise, déconstruire, mesure par mesure, les aberrations proposées, et constater les désastres qui suivraient l'application des décisions qui seraient prises. Il suffit de regarder ce qu'il se passe à Béziers. Certaines municipalités font profil bas afin d'éviter de trop se faire remarquer avant 2017, mais ce n'est pas le cas à Béziers où l'on pratique désormais l'incitation à la haine raciale et à la délation, la chasse aux pauvres et aux enfants de pauvres… Telles sont les politiques mises en place qui ne répondent évidemment à aucun des problèmes concrets auxquels nos concitoyens font face.

Monsieur Leroy, les démonstrateurs sont indispensables pour la ville durable. Mme Nicole Bricq avait mis en place la stratégie des familles prioritaires à l'export, que j'ai confirmée. La ville durable permet de mettre en avant de nombreux savoir-faire français – mobilité de demain, gestion des déchets, de l'eau… Nous avons bâti avec Vivapolis un démonstrateur dont la présentation est très appréciée.

Madame Rabin, 60 % du commerce extérieur français va vers l'Union européenne qui doit en effet constituer pour nous une priorité, de même que nos grands partenaires commerciaux d'Amérique du Nord, et que les grands émergents du G20 qui sont répartis sur tous les continents. C'est là qu'apparaissent les classes moyennes de demain, et que s'expriment des besoins nouveaux pour lesquels les entreprises françaises peuvent apporter, dans presque tous les secteurs, des réponses qui sont parmi les meilleures au monde. Des entreprises françaises m'accompagnent dans chacun de mes déplacements.

Demain, les grandes régions de notre pays joueront un rôle encore accru, et les plans régionaux d'internationalisation des entreprises (PRIE) constituent, sur le terrain, des outils indispensables pour favoriser l'export.

Madame la présidente, un accord a été obtenu hier au conseil ECOFIN sur les caractéristiques fondamentales de la TTF. Il s'agit d'une étape essentielle. Conformément au souhait du Président de la République, l'assiette de la taxe sera large et très peu d'exemptions sont prévues. Il s'agit d'un premier pas très important. Je réaffirme ce matin l'engagement total de l'exécutif sur la question de principe. Il faudra ensuite trouver les modalités d'application afin d'atteindre les objectifs fixés. Dix pays sont aujourd'hui engagés, parmi lesquels l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne. La Commission a été chargée de transcrire l'accord dans un texte législatif. Elle travaillera également sur des hypothèses de taux qui nous permettront d'émettre des hypothèses de revenus. Un accord plus abouti doit être trouvé au mois de juin prochain, mais il s'agit d'un combat au long cours, que nombre d'entre vous portent depuis longtemps. Il fait écho à l'un des axes structurant du rapport que je vous présente ce matin : l'organisation de la mondialisation, et le retour de la puissance publique après trente années de dérégulation pure et simple sont les seules solutions pour que les citoyens contribuent à fixer un certain nombre de principes et pour que puissent se conjuguer le développement économique et le respect de la souveraineté et des choix démocratiques.

J'espère avoir répondu à l'ensemble de vos questions. Quelle que soit la majorité au pouvoir, et si la représentation nationale le souhaite, il me semblerait bénéfique de reproduire cet exercice, afin que le Parlement puisse débattre chaque année des grands choix de politique commerciale de la France dans le cadre de l'Union européenne.

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Le nombre des questions posées montre bien l'intérêt que portent à ce sujet, et à vos réponses complètes et approfondies, les membres de nos deux commissions.

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Monsieur le secrétaire d'État, nous vous remercions vivement pour la précision de vos réponses ainsi que pour le temps que vous nous avez accordé.

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 9 décembre 2015 à 9 h 30

Présents. - M. Damien Abad, Mme Delphine Batho, M. Thierry Benoit, M. Philippe Bies, M. Yves Blein, M. Christophe Borgel, M. André Chassaigne, M. Dino Cinieri, M. Jean-Michel Couve, M. Yves Daniel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Christian Franqueville, M. Georges Ginesta, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, M. Henri Jibrayel, M. Philippe Kemel, Mme Laure de La Raudière, M. Jean-Luc Laurent, M. Michel Lefait, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Marie-Lou Marcel, M. Jean-Claude Mathis, M. Yannick Moreau, M. Germinal Peiro, M. Hervé Pellois, M. Dominique Potier, M. Patrice Prat, M. François Pupponi, M. Franck Reynier, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. Michel Sordi, M. Éric Straumann, M. Alain Suguenot, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Jean-Marie Tetart

Excusés. - M. Bruno Nestor Azerot, Mme Ericka Bareigts, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Denis Baupin, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, M. Daniel Fasquelle, M. Franck Gilard, M. Thierry Lazaro, M. Serge Letchimy, Mme Frédérique Massat, M. Kléber Mesquida, Mme Josette Pons, M. Bernard Reynès, M. Thierry Robert, Mme Catherine Troallic, Mme Catherine Vautrin

Assistait également à la réunion. - Mme Monique Rabin