Commission des affaires européennes

Réunion du 22 juin 2016 à 16h15

Résumé de la réunion

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La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mercredi 22juin 2016

I. Communication de la présidente Danielle Auroi sur la réunion de la COSAC à La Haye les 13 et 14 juin 2016

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La cinquante-cinquième COSAC s'est déroulée du 12 au 14 juin 2016 à La Haye. Philip Cordery et moi-même y représentions notre commission.

La présidence néerlandaise a clairement voulu recentrer la COSAC sur l'objectif qui lui est initialement assigné par les traités, c'est-à-dire « l'échange d'informations et de meilleures pratiques entre les parlements nationaux et le Parlement européen ». Les principaux sujets à l'ordre du jour reflétaient cette volonté de « partage de bonnes pratiques » : les sessions de la première journée étaient entièrement consacrées au contrôle parlementaire des trilogues, au rôle des rapporteurs, au contrôle de l'Etat de droit dans les parlements et à la diplomatie parlementaire.

Les sujets plus sensibles semblaient avoir été mis de côté.

Ainsi, aucune session n'a été consacrée à l'Union de l'énergie ou à la lutte contre le changement climatique, qui figurait pourtant parmi les priorités de la présidence néerlandaise de l'Union.

La session sur l'immigration n'a eu lieu qu'à la toute fin de la conférence, et la présidence souhaitait initialement qu'aucune référence à ce sujet pourtant central ne soit faite dans les contributions de la COSAC. Sur ce point, elle a dû céder face à la pression des Italiens, fermement soutenus par notre délégation et celle du Sénat français, du Bundestag, de Malte et du Portugal.

Cette conférence a été introduite par le Premier ministre Mark Rutte, qui a dressé le bilan des six mois de la présidence néerlandaise.

Il est évidemment revenu sur le « non » néerlandais lors du référendum d'initiative populaire sur l'accord d'association Union européenne – Ukraine du 6 avril dernier. Il a déploré la tenue de cette consultation, et a déclaré vouloir « sortir de l'impasse tout en tenant compte des points de vue exprimés », mais a prévenu que son pays risquait de ne pas pouvoir ratifier cet accord. Certains pays, en particulier l'Estonie, ont exprimé leurs inquiétudes à ce sujet.

Plusieurs parlementaires, auxquels je me suis associée, ont interrogé le Premier ministre sur les négociations commerciales et l'association des parlements nationaux. Celui-ci a répondu qu'il fallait informer ces derniers sans pour autant mettre en péril les négociations, en rappelant que le Gouvernement néerlandais est extrêmement favorable à la conclusion de ces accords, en particulier du TTIP.

Je profite de cette communication pour vous signaler qu'en marge de la COSAC, mon homologue du Sénat néerlandais a proposé à notre signature un projet de courrier à destination de la Commission européenne et du Conseil relatif au caractère mixte du traité de libre-échange en négociation avec le Canada, le CETA.

Ce courrier appelle à ne pas mettre en oeuvre provisoirement les dispositions du CETA qui n'apparaissent pas clairement comme relevant de la compétence exclusive de l'Union.

Je trouve que c'est une bonne démarche, mais je souhaite recueillir votre avis sur l'éventualité de la soutenir.

Le Vice-président de la Commission européenne Frans Timmermans était présent à la tribune le premier jour et est intervenu à la fois sur le rôle des parlements nationaux dans l'Union européenne et sur la protection des droits fondamentaux. Contrairement à l'habitude de la COSAC, ses interventions n'ont pas donné lieu à une série de questions-réponses.

Sur le « carton jaune » émis par les parlements nationaux de 11 Etats membres sur la proposition de la Commission européenne sur les travailleurs détachés, il a réaffirmé son attachement au projet de la Commission européenne sur le fond et plaidé pour la nécessité d' « empêcher le dumping social ». Il a également souligné la nécessité d'apporter une vraie réponse aux parlements nationaux. Frans Timmermans est en effet très conscient de la frustration qu'avait engendrée la réponse superficielle de la Commission européenne au carton jaune sur le parquet européen, puisqu'il était à l'époque ministre des affaires étrangères et européennes des Pays-Bas, et que les deux chambres du parlement néerlandais avaient alors émis un avis motivé sur ce texte. Il a annoncé que Marianne Thyssen, responsable de ce dossier, serait présente à la COSAC des présidents de juillet.

Sur les droits fondamentaux, plusieurs visions se sont opposées.

La Slovaquie a plaidé pour un « principe de subsidiarité » en matière de droits fondamentaux, et la Pologne a mis l'accent sur l'équilibre à trouver entre sécurité et liberté.

Le Parlement européen a souligné la nécessité de ne pas montrer du doigt certains pays en réagissant « incident par incident » mais de mettre en place un mécanisme continu d'évaluation du respect des droits fondamentaux.

La dernière session de la COSAC portait sur la crise migratoire et en particulier sur l'accord entre l'Union européenne et la Turquie.

L'intervenant principal à la tribune était Gérald Knaus, président d'un think-tank intitulé « European Stability initiative » dont les travaux sont en grande partie à l'origine de l'accord avec la Turquie. Il a présenté de manière assez partisane les bénéfices de cet accord.

Elmar Brok, président de la commission des Affaires étrangères du Parlement européen, a également défendu cet accord avec la Turquie, et a plaidé pour adopter le plus vite possible l'accord de libéralisation des visas, considérant que l'essentiel était de régler les questions liées à la sécurité et notamment le déploiement complet des passeports biométriques. Il a surtout insisté sur la responsabilité incombant aux États membres et notamment sur la nécessité d'envoyer des fonctionnaires en renfort en Grèce pour traiter le stock de demandes d'asile.

Notre délégation et celle du Sénat sont intervenues pour souligner les nombreuses questions soulevées par cet accord en matière de respect des droits de fondamentaux. J'ai également noté l'inquiétude des pays baltes sur la priorité donnée par la Commission européenne à la conclusion de cet accord avec la Turquie par rapport à l'accord de libéralisation des visas en cours de négociation avec la Géorgie.

II. Examen du rapport d'information de MM. Christophe Caresche et Michel Herbillon sur les recommandations pays relatives aux programmes de stabilité et de réforme pour la France (COM(2016) 295 final, COM(2016) 196 final, COM(2016) 297 final et COM (2016) 330 final)

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Comme chaque année, le printemps constitue une étape clé du dialogue que nouent, dans le cadre du cycle de coordination des politiques économiques, les autorités nationales et les institutions européennes. Second temps fort du Semestre européen, le rendez-vous de printemps est marqué par la formulation, par la Commission européenne, de recommandations spécifiques pays par pays. Ces dernières sont établies sur la base des « rapports pays » que la Commission européenne publie, généralement au mois de février, après examen des programmes de stabilité ou de convergence que les États membres adressent à la Commission européenne.

Lancé le 26 novembre 2015 avec la publication par la Commission européenne de son examen annuel de croissance 2016 présentant les grandes orientations de politique économique pour l'Union européenne, le sixième exercice du Semestre européen de coordination des politiques économiques s'inscrit dans un cadre renouvelé.

Le manque de lisibilité des procédures régissant, en Europe, la coordination des politiques économiques, leur excessive complexité et leurs insuffisances, notamment mises en lumière dans le rapport dit « des cinq présidents » sont à l'origine du mouvement de simplification et de rationalisation du Semestre européen, engagé à partir de 2015, qui vise à accorder une plus grande attention aux spécificités de la zone euro ainsi qu'à l'emploi et à la dimension sociale des politiques économiques, tout en ménageant plus scrupuleusement les marges de manoeuvre et la souveraineté des gouvernements nationaux dans la mise en place de réformes structurelles.

Exercice désormais habituel au sein de l'Union européenne, le Semestre européen 2016 marque toutefois un changement d'approche dans la surveillance et la coordination des politiques économiques et reflète les récentes améliorations qui lui ont été apportées.

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En premier lieu, la deuxième partie du Semestre européen est l'occasion pour la Commission européenne d'apprécier les progrès réalisés dans la mise en oeuvre des recommandations des cycles précédents. Pour l'année 2016, la Commission européenne relève que les progrès se sont maintenus à un niveau similaire à celui de 2015. La mise en oeuvre effective des recommandations par les États membres demeure, par conséquent, perfectible. Dans cette perspective, la volonté de la Commission européenne de réduire le nombre de recommandations adressées aux États membres et d'en affiner le contenu est une initiative que nous saluons tout particulièrement. Cette année, les États membres ne peuvent donc pas être destinataires de plus de cinq recommandations. Dans son appréciation des progrès réalisés, la Commission européenne prend également en considération les objectifs de la stratégie Europe 2020. Au regard des informations disponibles à ce jour, la Commission européenne souligne que si les situations nationales s'améliorent globalement, les objectifs relatifs à l'emploi, à la recherche & développement et à l'exclusion et la pauvreté risquent de ne pas être atteints à horizon 2020.

En second lieu, le rendez-vous de printemps est également l'occasion pour la Commission européenne de présenter les résultats des bilans approfondis réalisés pour les 18 États membres qu'elle avait identifiés, en novembre 2015, comme étant susceptibles de présenter des déséquilibres macroéconomiques. Début avril 2016, la Commission européenne constatait que les déséquilibres macroéconomiques se réduisaient de manière générale, en zone euro comme au sein de l'Union européenne. Les États membres présentant toutefois des situations économiques encore très hétérogènes, la Commission européenne insiste sur la nécessité de procéder, aux plans national comme européen, aux rééquilibrages requis, afin de renforcer la capacité de résilience de chacune des économies de l'Union européenne.

Pour six États membres (Royaume-Uni, Autriche, Belgique, Estonie, Hongrie, Roumanie), la Commission européenne a conclu qu'il n'existait pas de déséquilibre, au sens de la procédure pour déséquilibres macroéconomiques (PDM). Sept États membres présentent, en revanche, des déséquilibres (Irlande, Slovénie, Espagne, Finlande, Allemagne, Pays-Bas et Suède) et six (Croatie, Chypre, France, Portugal, Bulgarie, Italie) des déséquilibres excessifs.

En troisième lieu, les recommandations proposées par la Commission européenne ont été examinées lors du conseil ECOFIN du 17 juin 2016 et doivent désormais être approuvées par les chefs d'État et de gouvernement lors du Conseil européen des 28 et 29 juin 2016 pour être finalement formellement adoptées par le Conseil au mois de juillet 2016.

Les recommandations pays par pays sont formulées par la Commission européenne après que cette dernière a rendu publiques ses prévisions de croissance dites « de printemps » et son analyse de l'environnement économique global dans lequel s'inscriront les réformes à effectuer. De manière générale, la Commission européenne constate, dans ses prévisions de croissance de printemps, une amélioration globale de la situation économique en Europe mais insiste sur la nécessité de recentrer rapidement la croissance européenne sur ses propres moteurs et, plus particulièrement, sur le dynamisme de la demande intérieure. Les incertitudes croissantes de l'environnement économique international et le caractère encore lent et fragile de la reprise constituent ainsi une injonction à accélérer les réformes structurelles dans chacun des États membres.

Cette année, la formulation des recommandations spécifiques pays par pays se fonde sur « triangle vertueux » que constituent les priorités de politique économique pour 2016, à savoir : la conduite de politiques budgétaires responsables, la relance de l'investissement et la mise en oeuvre de réformes structurelles. De manière générale, la Commission européenne invite ainsi les États membres à prendre des mesures pour améliorer la productivité, en réformant l'environnement légal et réglementaire dans lequel opèrent les entreprises (en particulier en France) et en renforçant notamment les liens entre les universités, la recherche et l'innovation au sein des entreprises ; réformer le marché du travail, en réduisant la fiscalité pesant sur le travail (notamment en France), limitant les phénomènes de dualisation du marché du travail, en investissant davantage dans le capital humain et en modernisant les systèmes de protection sociale.

Il convient de relever que les récentes améliorations de la situation économique de Chypre, de l'Irlande et de la Slovénie, ont conduit la Commission européenne à proposer que ces trois pays relèvent, à partir de 2016, du volet préventif du Pacte de stabilité et de croissance (PSC). Cette décision entérine leur sortie du champ de la procédure concernant les déficits excessifs (PDE). Par ailleurs, la Commission européenne propose d'accorder à l'Espagne et au Portugal un délai supplémentaire d'un an pour corriger leurs déficits excessifs. L'Espagne devrait ainsi être en mesure de respecter ses engagements européens d'ici 2017 et le Portugal d'ici 2016. La situation des deux pays fera l'objet d'un nouvel examen au mois de juillet, avant l'adoption formelle des recommandations par le Conseil.

Dans son bilan approfondi, la Commission européenne identifie, en France, deux déséquilibres macroéconomiques principaux. La dette publique élevée et croissante et le faible redressement de la compétitivité et de la productivité fragilisent la situation économique du pays et constituent, selon la Commission européenne, les enjeux principaux que la France doit relever, dans un contexte par ailleurs marqué par la nécessité de rétablir, d'ici 2017, la soutenabilité et la viabilité des finances publiques.

Relevant toujours du volet correctif du Pacte de stabilité et de croissance, la France réaffirme, dans son programme de stabilité pour 2016, l'engagement du Gouvernement de corriger le déficit excessif du pays d'ici 2017, conformément à la recommandation du Conseil du 10 mars 2015.

Cette année, la Commission européenne adresse à la France cinq recommandations de politique économique dont la plupart ne constituent pas de nouveauté et font l'objet de préconisations constantes de la Commission européenne.

La première recommandation concerne la nécessité de rétablir l'équilibre des finances publiques. Nous considérons qu'il est indispensable que la France honore ses engagements en matière budgétaire et mette tout en oeuvre pour rétablir un déficit public inférieur à 3 % du PIB en 2017.

La deuxième recommandation concerne l'amélioration de la situation de l'emploi. Il convient de noter que la Commission européenne prend acte et salue les récentes mesures mises en oeuvre pour réduire le coût du travail et améliorer les marges bénéficiaires des entreprises. Elle invite toutefois le gouvernement à pérenniser les réductions du coût du travail et à veiller à ce que les évolutions du salaire minimum soient compatibles avec la création d'emplois et la compétitivité. La dualité du marché du travail doit également faire l'objet de réformes ambitieuses notamment orientées vers les populations les plus jeunes et les moins qualifiées.

La deuxième recommandation concerne l'amélioration des performances en matière d'éducation et de formation. Les insuffisances relevées dans le système d'apprentissage ainsi que, de manière générale, dans l'offre de formation pour les chômeurs, les travailleurs peu qualifiés et les salariés des petites et moyennes entreprises nécessitent, selon la Commission européenne, des réformes substantielles, en sus de la réforme en cours de la formation professionnelle.

La Commission européenne incite ainsi la France à renforcer les liens entre le secteur de l'éduction et le marché du travail, notamment par une réforme du système d'apprentissage et de la formation professionnelle qui mette l'accent sur les personnes peu qualifiées et recommande qu'une réforme du système d'assurance-chômage soit entreprise, avant la fin de l'année 2016, pour en rétablir la viabilité budgétaire et encourager le retour au travail.

La quatrième recommandation concerne l'amélioration de l'environnement des entreprises et l'élimination des obstacles à l'activité dans le secteur des services. La France présente, selon la Commission européenne, un positionnement moyen en Europe du point de vue de l'environnement des entreprises en raison, notamment, de contraintes réglementaires fortes. La Commission européenne salue la poursuite du programme de simplification entrepris par la France mais souligne son inégale mise en oeuvre.

Les performances, jugées insuffisantes, de la France en matière d'innovation sont une nouvelle fois pointées, en dépit de la générosité de l'aide publique en la matière. La Commission européenne préconise, par conséquent, une simplification des programmes publics d'innovation pour en améliorer l'efficacité.

Enfin, la cinquième recommandation concerne la réforme de la fiscalité. Outre le mouvement global et continu d'augmentation de la charge fiscale, la Commission européenne relève également que la fiscalité française pèse, de manière générale, trop lourdement sur les facteurs de production et relativement peu sur la consommation. La Commission européenne préconise ainsi de réduire les impôts sur la production et le taux nominal de l'impôt sur les sociétés, tout en élargissant la base d'imposition sur la consommation, notamment en ce qui concerne la TVA.

De manière générale, je considère, à titre personnel, que les recommandations adressées à la France ne tiennent pas suffisamment compte de la situation politique française. À titre d'exemple, il semble, en effet, très peu probable que le Gouvernement et la majorité procèdent à une augmentation de la fiscalité – notamment de la TVA - en période pré-électorale.

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Le Semestre européen 2016 constitue le premier exercice d'un cycle « rénové » des politiques économiques. Dans cette perspective, il convient de souligner les récentes améliorations apportées à la coordination des politiques économiques en Europe et qui constituent de réelles avancées.

Le Semestre européen tient désormais davantage compte des spécificités de la zone euro et des dimensions sociales des politiques économiques. Récemment enrichie de trois indicateurs sociaux, l'analyse des déséquilibres macroéconomiques à laquelle procède la Commission européenne porte aux performances des États membres en matière sociale et d'emploi une attention particulière et témoigne d'un changement – bienvenu – de paradigme dans l'analyse des situations économiques nationales, en particulier dans un contexte où certains pays font encore face aux lourdes conséquences de la crise. La Commission européenne indique ainsi accorder une plus grande attention à l'équité sociale des programmes d'ajustement.

Par ailleurs, la Commission européenne publie désormais, au moment du lancement du Semestre européen, une recommandation concernant la politique de la zone euro qui identifie les actions prioritaires à mener au sein de la zone euro et accorde une importance plus grande aux interdépendances entre les économies de la zone, notamment dans la formulation des recommandations spécifiques pays par pays. L'objectif est, en effet, de favoriser la coordination des politiques économiques, en particulier dans les États membres de la zone euro, pour faciliter in fine la convergence.

Par ailleurs, la Commission européenne a manifesté, à plusieurs reprises, sa volonté de favoriser l'appropriation du Semestre européen par toutes les parties prenantes et le Semestre européen 2016 est une illustration des progrès réalisés dans cette voie.

En premier lieu, les conditions du dialogue entre autorités nationales et institutions européennes ont été améliorées. Cette année, en effet, la Commission européenne a légèrement avancé la publication de ses rapports pays afin de permettre aux gouvernements nationaux d'en prendre connaissance plus en amont de l'élaboration de leurs programmes de stabilité ou de convergence et de leurs programmes nationaux de réformes. Consciente de la nécessité de renforcer la légitimité et la responsabilité démocratiques, la Commission européenne a également veillé, dans le cadre de l'exercice 2016, à faciliter le dialogue avec chacun de ses interlocuteurs. Les autorités nationales comme les partenaires sociaux ou les membres de la société civile ou encore le Parlement européen ont ainsi été plus largement associés aux discussions préalables à la formulation des recommandations pays par pays, dans le cadre d'échanges plus ou moins formels.

En second lieu, la lisibilité de la procédure pour déséquilibres macroéconomiques a été renforcée. Dans un souci de pédagogie et de plus grande clarté, la Commission européenne a amélioré la présentation des conclusions de ses bilans approfondis en introduisant des tableaux qui indiquent, dans un document unique, les sources de déséquilibres qu'elle a identifiées ainsi que les récentes évolutions des indicateurs traditionnellement utilisés pour les mesurer. Ainsi peut-on, par exemple, observer, en annexe au rapport pays établi pour la France par la Commission européenne, l'évolution, depuis 2009, de la balance courante, de la position extérieure nette ou encore des parts de marché à l'exportation pour illustrer l'existence de déséquilibres externes et de compétitivité.

Par ailleurs, il convient de saluer l'effort de simplification résultant des évolutions apportées aux catégories de déséquilibres macroéconomiques. La Commission européenne en a, en effet, réduit le nombre. Les États membres sont désormais susceptibles de relever de l'une des quatre catégories suivantes (contre six auparavant) : aucun déséquilibre ; déséquilibres ; déséquilibres excessifs ; déséquilibres excessifs avec action corrective.

En troisième lieu, des progrès ont été faits pour renforcer le processus de coordination des politiques économiques. Le processus d'élaboration des recommandations a ainsi été rationnalisé : les recommandations adressées aux États membres sont désormais moins nombreuses et plus ciblées, ce qui sera probablement plus propice à une correcte appréhension et application par les États membres.

Vos rapporteurs soulignent toutefois qu'en dépit de la volonté affichée par la Commission européenne de se montrer moins intrusive et moins directive dans la formulation de ses recommandations afin de préserver la marge de manoeuvre et la souveraineté des gouvernements nationaux, certaines d'entre elles, notamment adressées à la France, demeurent, à certains égards, extrêmement précises et prescriptives.

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Pour conclure, je voudrais insister sur les améliorations du Semestre européen qui ont été mises en place et qui rendent un peu plus lisible le processus. Nous pourrions encore aller plus loin mais je pense que nous aurons l'occasion d'en discuter, notamment dans le cadre du groupe de travail sur l'intégration différenciée au sein de l'Union européenne qui a été constitué au sein de la commission des Affaires européennes.

Par ailleurs, il est vrai que les recommandations adressées par la Commission européenne à la France paraissent un peu répétitives parce qu'elles vont toujours un peu dans le même sens depuis quelques années. On peut y voir le fait que la Commission européenne reste relativement fidèle à ses analyses. Ce que je constate, à titre personnel, c'est que la Commission européenne a ajusté ses préconisations concernant le rythme de la consolidation budgétaire exigée de la France et je pense, que notre pays parviendra à ramener le déficit en deçà de 3 % du PIB mais nous avons déjà eu l'occasion d'en discuter lors de la présentation par le Gouvernement du programme de stabilité et lors de la récente audition du commissaire Moscovici. Pour le reste, on retrouve un certain nombre de recommandations que l'on connaît bien, qu'il s'agisse des finances publiques, du marché du travail, de la dette ou encore de la TVA. J'ai le sentiment que la France est sur une trajectoire – pas assez rapide peut-être – qui nous permet de répondre, au moins en partie, aux préconisations de la Commission européenne.

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Je voulais juste faire remarquer que la Commission européenne annonce qu'elle formule désormais moins de recommandations et que la France est destinataire de cinq recommandations, ce qui me semble quand même beaucoup… D'autant que les recommandations pour la France sont extrêmement sévères me semble-t-il et on a le sentiment qu'il s'agit d'une Commission européenne qui en a assez de faire toujours les mêmes constats à la France…

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Pour sortir du cas français et parler de la politique de la Commission européenne de manière générale, je crois que nous devrons, à l'avenir réfléchir à comment faire en sorte que les recommandations de la Commission européenne soient entendues. Il me semble aujourd'hui que l'autorité de la Commission européenne est quelque peu battue en brèche…

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Peut-être faudrait-il aussi s'interroger sur la pertinence des recommandations de la Commission européenne mais nous aurons peut-être l'occasion d'en discuter une prochaine fois.

La commission des Affaires européennes a approuvé les projets d'acte communautaire COM(2016) 295 final – E 11185, COM(2016) 296 final – E 11186, COM(2016) 297 final – E 11187, COM(2016) 330 final – E 11188, en l'état actuel des informations dont elle dispose.

Présidence de M. Pierre Lequiller, après l'interruption liée à l'hommage à

Mme Jo Cox

III. Examen du rapport d'information de MM. Yves Daniel et Philippe Armand Martin sur la protection des indications géographiques protégées (IGP) dans le cadre du projet de partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP)

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À l'occasion du prochain Conseil européen, la Commission européenne s'apprête à poser une « question de confiance » aux États membres, afin que ces derniers confirment son mandat de négociation pour le Partenariat Transatlantique de Commerce et d'Investissement, avec les États-Unis. Vos rapporteurs ont souhaité se saisir de cette occasion pour réaffirmer les positions françaises, mais aussi les positions traditionnelles de notre Commission, en la matière. Même si la réaffirmation du mandat portera sur son intégralité, et non pas uniquement sur la question des indications géographiques, nous souhaitons réaffirmer nos positions à ce propos. La Commission européenne doit, à cet égard, rester fidèle aux principes qui présidaient au texte d'origine du mandat, à savoir, que :

– « les négociations viseront à concilier les approches de l'UE et des États-Unis en matière de règles d'origine, d'une manière qui facilitera les échanges entre les parties et tiendra compte des règles d'origine de l'UE et des intérêts des producteurs européens » ;

– et que les « négociations viseront à garantir une protection et une reconnaissance accrues, grâce à l'accord, des indications géographiques de l'UE, d'une manière qui se fonde sur l'ADPIC (Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce) et les complète, en tenant compte du lien avec leur utilisation préalable sur le marché américain en vue de résoudre les conflits existants de manière satisfaisante. »

Vos rapporteurs considèrent que la position de la Commission européenne doit demeurer cohérente, à deux titres : la reconnaissance progressive des IG en droit européen et la protection de ces IG dans les accords de libre-échange.

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En premier lieu, inspiré en grande partie par le droit français, les produits d'appellation ont fait l'objet d'une protection juridique progressive. De la réforme de l'Organisation Commune de Marchés vitivinicole du 16 mars 1987 qui a permis d'adopter des dispositions particulières relatives aux vins de qualité, issus de régions déterminées à la réforme de la PAC de 2003, la politique de qualité agricole a innervé petit à petit la politique de la Commission européenne. L'instauration d'une OCM unique en 2013, elle-même, n'a pas entamé cette politique de qualité, et n'a en rien affecté la spécificité du système de promotion des produits d'origine au sein de l'Union européenne.

Les réglementations annexes en matière d'étiquetage, de valorisation ou de limitation de la production complètent l'arsenal juridique de protection des produits d'appellation. Vos rapporteurs n'oublient certes pas que la Commission européenne, engagée actuellement dans un processus de simplification de la PAC, a envisagé, dans le domaine vitivinicole, une réorganisation des règlements qui aurait grandement nui à la cohérence de la protection des IG. Notre Commission y a récemment consacré une résolution, dont notre collègue Yves Daniel fut le rapporteur : adoptée à l'unanimité, elle rappelait utilement l'importance des appellations pour la filière vitivinicole.

La Commission européenne se doit par ailleurs de faire respecter les indications géographiques, afin de garantir la cohérence de sa politique en matière d'accords de libre-échange. De nombreux exemples récents démontrent qu'il est possible de faire accepter par des tiers le système des indications géographiques, ou, du moins, de faire coexister un système de marques et un système d'IG. L'accord avec le Canada en est la preuve. Il ne s'agit pas là d'un accord qui remplit toutes les espérances des agriculteurs, et moins encore les associations représentatives en Frances des producteurs de fromages et de vins d'appellation. Il ne protège que 42 appellations françaises, hors vins et spiritueux, sur un total de plus d'un millier. Il s'agit toutefois d'une base de travail intéressante.

Par ailleurs, lorsque la Commission européenne contribue à faire reconnaître les IG dans des marchés étrangers, cela pèse nécessairement sur les négociations du PTCI. Vous permettrez à votre rapporteur d'en citer quelques exemples :

– dans le cadre de l'accord avec des pays d'Amérique centrale, dont les négociations ont été conclues en 2010, il est prévu une protection de 224 IG européennes dont 37 IG françaises ;

– l'accord de libre-échange avec le Vietnam comprend un volet IG, qui permet la protection de 169 IG européennes dont 36 IG françaises, et notamment une meilleure protection de l'IG champagne après une période de transition ;

– l'accord sur les indications géographiques avec le Maroc, paraphé le 16 janvier 2015, prévoit, quant à lui, la protection de 3 200 IG européennes dont 642 IG françaises – 191 IG agroalimentaires et 451 IG vins et spiritueux –, ainsi que de 20 IG marocaines.

Vos rapporteurs y voient la preuve que le système des indications géographiques n'est pas ce protectionnisme déguisé que certains lobbys outre-Atlantique aiment à dénoncer. Il est parfaitement compatible avec l'ouverture de zones de libre-échange, et, partant, de reconnaissance mutuelle d'agricultures de qualité.

C'est à ce titre que de récentes études d'opinion ont confirmé un goût croissant sur le marché américain de produits d'origine protégée comme le Comté. C'est toujours à ce titre que les producteurs viticoles de la région de la Napa Valley, que M. le Secrétaire d'État Matthias Fekl a rencontré très récemment, soutiennent la cause des indications géographiques au sein de leur propre pays. Ils ont en effet adhéré au principe d'un cahier des charges strict, de la reconnaissance de leur travail par des labels et donc de la nécessité que les consommateurs aient une bonne information.

C'est pour toutes ces raisons que le système de protection des indications géographiques (IG) fait partie de ces forces sur lesquelles l'Union européenne peut compter, et doit être considéré comme ce que l'on appelle un « offensif », à défendre dans le cadre des accords de libre-échange.

Le jeu va être serré. Les interlocuteurs de vos rapporteurs ont confirmé que la position des négociateurs américains s'est progressivement fermée, ce qui n'est pas sans lien avec le zèle des lobbys des grandes fermes américaines contre la reconnaissance des indications géographiques. L'enjeu est désormais de savoir sous quelle forme et selon quel calendrier la question des indications géographiques va être traitée. Les Américains souhaitent la traiter en fin de discussions. Mais vos rapporteurs estiment que les enjeux sont trop importants pour qu'elle ne soit pas traitée avant la conclusion de l'accord, ce qu'on appelle techniquement l' « end-game ». Les indications géographiques forment un sujet à part, et ont, la plupart du temps, fait l'objet d'un chapitre entier dans les accords de libre-échange qu'a négociés la Commission européenne. Là encore, comme l'a dit M. le Secrétaire d'État Fekl, mieux vaut ne pas signer d'accord que d'avoir un mauvais accord. Si nos partenaires ont la volonté de signer avant le changement d'administration, qui peut être défavorable au destin du PTCI, il ne revient pas à la Commission européenne de satisfaire ces desiderata à n'importe quel prix.

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Le PTCI incarne pour beaucoup de secteurs une grande chance de développement par les exportations. Certains secteurs agricoles européens, à l'instar de l'élevage, risquent toutefois de fortement pâtir de l'ouverture du marché européen aux produits américains. Il n'y a aucune raison légitime pour que les succès européens ne puissent pas s'exporter aussi facilement que les « offensifs » américains dans d'autres secteurs. Vos rapporteurs demandent donc globalement au gouvernement français de s'assurer que la Commission européenne se porte garante d'un accord équilibré et ambitieux, sans quoi l'appui politique de la France pourrait faire défaut.

La question des IG cristallise les divergences entre producteurs américains et européens, et finalement, entre deux visions de la valorisation des produits agricoles. À la reconnaissance des caractéristiques du terroir et d'un cahier des charges précis et exigeant s'oppose la protection par les marques déposées. Ce sont donc à la fois des questions de propriété intellectuelle et de bonne information des consommateurs qui distinguent les points de vue de part et d'autre de l'Atlantique.

Vos rapporteurs ne peuvent donc qu'encourager la Commission européenne à poursuivre dans la voie qu'elle a tracée dans les autres accords, et rester ainsi fidèle à son mandat d'origine. Pour ce faire, nous avons des demandes précises :

-– la reconnaissance globale du système des indications géographiques, qui puisse dépasser ce qui a été obtenu dans le cadre de l'accord avec le Canada. Il s'agissait d'un premier pas important, mais qui reste insuffisant au vu des enjeux soulevés par ces questions ;

– l'élimination définitive des produits dits semi-génériques. Là aussi, la preuve existe que le système des indications géographiques peut s'imposer dans un pays où le système de marques est pourtant traditionnel. L'accord signé avec le Canada en 2003, qui a entraîné la reconnaissance, au bout d'un délai de transition, de l'indication géographique du Champagne, en est la parfaite illustration. Alors que les producteurs de « champagne » californien exportaient leurs produits à faible coût vers le Canada, avec une étiquette mentionnant « champagne », la pratique leur est désormais interdite. Ils ne peuvent plus exporter ces produits que sous l'appellation de « sparkling wine ». Vos rapporteurs y voient la preuve que le système des semi-génériques, qui voudrait que les noms de domaine et d'indication géographique soient voués à tomber dans le domaine public dès lors qu'ils ont été valorisés en dehors de leurs caractéristiques originelles, n'est pas durable. Ils encouragent donc d'autant la Commission européenne à rester ferme sur ses engagements ;

– enfin, en termes de calendriers, vos rapporteurs estiment que la question des indications géographiques doit être traitée le plus rapidement possible. Le quatorzième round de négociations va être entamé à la mi-juillet. Il serait opportun de présenter alors à la table des négociations un document qui puisse servir de base aux négociations ultérieures, sur des questions telles que l'ampleur de la reconnaissance des indications géographiques, la coexistence de ce système avec celui des marques et de la protection juridique dans le cadre de la common law.

Vos rapporteurs ne veulent pas d'un sujet rejeté en fin de négociations, à l'heure des grands trocs. L'agriculture n'a pas vocation à servir de monnaie d'échange. Elle représente des terroirs, des savoir-faire et des outils de diversité biologique et gastronomique sur lesquels on ne peut transiger dans un accord de libre-échange. La Commission européenne paraît tout à fait mobilisée sur ce problème. Il nous a toutefois semblé qu'au moment où elle retrempait sa légitimité dans le suffrage des Etats membres, il était opportun d'affirmer avec force la position française en faveur d'une agriculture à haute valeur ajoutée, diverse et respectueuse des terroirs et des traditions.

C'est pourquoi nous vous soumettons ces conclusions, destinées à inciter la Commission européenne à défendre, dans le cadre des négociations sur le PTCI, les indications géographiques.

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Ce rapport arrive à un moment où beaucoup de membres de la profession viticole, notamment dans notre pays, se sentent mal aimés et parfois bousculés par l'Union européenne. Le problème des indications géographiques s'ajoute au problème de l'extension des surfaces et de beaucoup d'autres choses. Cela donne à nos viticulteurs, dans mon département comme ailleurs, le sentiment que l'Europe n'est pas attentive, qu'elle vient là pour bousculer les choses, pour faire en sorte que leur métier, qui est un métier de tradition, soit bousculé par des considérations industrielles et économiques qui dépassent nos frontières. Le fait que vous réaffirmiez à travers ce texte la primauté, la qualité du travail humain qu'il faut protéger à tout prix, arrive au bon moment. Je ne peux que vous féliciter au nom de tous mes collègues.

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Je vous remercie de me donner la parole, d'autant plus que je ne suis pas membre de cette commission. Notre position risque de vous interpeller quelque peu. La labellisation AOP ou IGP est la garantie pour un producteur que son savoir-faire et le terroir qu'il fait vivre sont uniques et ne seront pas plagiés. Pour les producteurs et les agriculteurs, c'est une reconnaissance et une fierté ; pour les consommateurs c'est une garantie de qualité. La reconnaissance des indications géographiques et des produits d'appellation est très importante dans le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement. Or, rien n'est acquis à ce jour. D'ailleurs Madame Cécilia Malmström, commissaire européenne en charge de ces négociations, est venue à l'Assemblée nationale le 15 avril 2015. Je l'avais interrogée précisément sur ce point et voici ce qu'elle m'avait répondu :

« En ce qui concerne les indications géographiques, 42 produits français sont inclus dans l'accord avec le Canada sur un total de 154. Nous allons essayer d'atteindre un résultat au moins aussi bon avec les États-Unis. Je ne vous cache pas que c'est un point difficile car les États-Unis ont une tout autre approche de cette question. »

Il y a donc seulement 42 indications géographiques protégées pour la France dans le CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement), en dehors des vins et alcools, comme cela a été précisé. Nous avons pourtant 42 AOP laitières, 45 AOP agroalimentaires, 122 indications géographiques agroalimentaires, et 427 labels rouges. Il faut ajouter à cela plusieurs centaines, de l'ordre de 400 AOP ou indications géographiques, en vins et alcools. Nous arrivons à un total d'un peu plus de 2000, ce que vous disiez précédemment. 42 appellations qui pourraient éventuellement être protégées, cela ne représente même pas 5%. Au niveau européen, on retrouve la même proportion, pour le moment, dans l'annexe 20A du CETAAECG.

Dans les conclusions que vous nous proposez je constate avec satisfaction qu'il est proposé d'aboutir à une reconnaissance globale des indications géographiques dans le cadre du PTCI. En effet, si une appellation n'est pas reconnue, elle peut subir une concurrence extrêmement déloyale. Je prendrais un exemple, les noix de Grenoble, qui bénéficient d'un AOP depuis 1938. Au Canada il se vend beaucoup de noix dites « de Grenoble ». Il y a eu un problème sanitaire il n'y a pas très longtemps, et en réalité aucune noix ne provenait de Grenoble. Ce sont des noix de Californie qui sont vendues sous l'appellation « noix de Grenoble ». Il serait par exemple possible de trouver partout dans l'Union européenne des noix qui viennent de Californie, si l'appellation « noix de Grenoble » n'était pas protégée.

Il faut également porter attention aux semi-génériques qui sont extrêmement trompeurs, mais cela ne vous a pas échappé dans ces propositions de conclusion. C'est le cas également pour le champagne de Californie.

L'approche concernant les appellations d'origine est très différente aux Etats-Unis. Il y a eu par exemple des accords en 2005 entre l'Union et ces derniers qui prévoyaient l'abandon des semi génériques. Or, ceci n'a jamais été transcrit dans les lois américaines et n'est donc jamais entré en vigueur.

Je pense que les termes de vos conclusions ne sont pas assez impératifs. Si la Commission européenne a demandé un nouveau mandat de négociation, quelle sera la position de la France vis-à-vis de cette demande ? Comment faire en sorte que nos souhaits deviennent en quelques sortes des impératifs ?

La présidente Danielle Auroi m'a chargée de vous dire qu'elle était favorable à une abstention bienveillante sur les conclusions proposées, et Jean-Louis Roumegas serait plutôt partisan d'une opposition à ces conclusions, du fait de la faiblesse des impératifs. Je vous remercie.

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En tant que député paysan, je pense avoir la fibre écologiste, y compris dans l'application de l'écologie. Les réponses à toutes les questions que vous pouvez avoir se retrouvent dans le troisième point de la résolution, puisqu'il affirme que nous estimons qu'il s'agit d'un premier pas encore insuffisant, et qu'il doit être renforcé pour aboutir à une reconnaissance globale des indications géographiques dans le cadre du PTCI.

La France, si j'ai bien compris, votera pour, mais réaffirmera la nécessité de protéger les indications géographiques. C'est une préoccupation du Président de la République. Donc je peux affirmer que nous ne pouvons qu'être favorables à un maximum de reconnaissance des indications géographiques.

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Nous avons parlé de l'accord CETA avec le Canada. Il peut apparaitre insuffisant mais c'est déjà un combat de gagné. Certaines indications géographiques ont été reconnues. C'est déjà significatif.

Aujourd'hui le combat face aux États-Unis est un combat de fond. J'étais rapporteur en 2005 sur ce dossier. Les États-Unis mettent toujours en avant la clause dite du « grand père ». Ils utilisaient déjà les semi-génériques et indiquaient les appellations Bourgogne, Champagne, etc. Dès lors qu'ils les utilisaient auparavant, ils estiment aujourd'hui qu'ils peuvent encore se permettre de les garder et ne sont pas prêts à vouloir négocier sur ce sujet.

Il est tout de même important que nous puissions faire comprendre à la Commission européenne, comme cela est d'ailleurs mentionné dans le texte, qu'elle « doit poursuivre ses efforts pour la reconnaissance des indications géographiques ». Ce qui est important, c'est de savoir sur qui nous pouvons compter pour avancer, comme l'avait révélé en son temps le combat sur les droits de plantation. Nous avions réussi dans ce cadre à avoir à nos côtés toute la viticulture des États-Unis, c'est ce qui nous avait permis de gagner le combat.

La France doit donc appuyer la Commission européenne, négocier avec les Etats-Unis, et travailler sérieusement avec les viticulteurs américains sur ce sujet. Il ne sera pas question d'avoir un accord sans que ces appellations ne soient reconnues.

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Il me semble que les conclusions proposées insistent sur ce point et que, en outre, elles soulignent la nécessité d'en parler en amont de la négociation et non à la fin. Il me semble qu'il y a là assez de garanties.

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Ce que notre rapporteur vient de dire est extrêmement important. S'il avait été noté que la France s'opposait à une signature de l'accord dans le cas où l'ensemble des indications géographiques n'étaient pas reconnues, cela aurait eu plus d'impact. C'est ce que l'on appelle un mandat beaucoup plus impératif.

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Les conclusions vont tout à fait dans le sens que vous évoquez.

La commission a ensuite adopté les conclusions suivantes.

« La Commission des Affaires européennes,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, en particulier ses articles 38 à 44,

Vu le règlement (UE) n° 13082013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) n° 92272, (CEE) n° 23479, (CE) n° 10372001 et (CE) n° 12342007 du Conseil,

Vu le règlement (CE) n° 6072009 du 14 juillet 2009 fixant certaines modalités d'application du règlement (CE) n° 4792008 du Conseil en ce qui concerne les appellations d'origine protégées et les indications géographiques protégées, les mentions traditionnelles, l'étiquetage et la présentation de certains produits du secteur vitivinicole,

Vu le règlement (UE) n° 2612012 du Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2012 portant modification du règlement (CE) n° 12342007 du Conseil en ce qui concerne les relations contractuelles dans le secteur du lait et des produits laitiers,

Vu le règlement (UE) n° 11512012 du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires,

Vu le règlement d'exécution (UE) n° 6682014 de la Commission du 13 juin 2014 portant modalités d'application du règlement (UE) n° 11512012 du Parlement européen et du Conseil relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires,

Vu les directives de négociation concernant le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement entre l'Union européenne et les États-Unis d'Amérique du 17 juin 2013,

Vu la résolution du Parlement européen du 8 juillet 2015 contenant les recommandations du Parlement européen à la Commission européenne concernant les négociations du partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (PTCI) (20142228(INI)),

Considérant que la Commission européenne a pour mandat de négocier le partenariat transatlantique de commerce et d'investissement, qui inclut notamment l'amélioration des échanges de denrées agricoles entre l'Union européenne et les États-Unis d'Amérique,

Considérant que la Commission européenne a annoncé qu'elle demanderait aux États membres de reconfirmer ce mandat lors du Conseil européen des 28 et 29 juin 2016,

Considérant que les indications géographiques constituent un aspect stratégique et déterminant de l'agriculture européenne, et qu'à ce titre, leur reconnaissance dans les accords de libre-échange est cruciale,

1. Demande au gouvernement français d'appeler la Commission européenne, à défendre, conformément à son mandat, le principe des indications géographiques et des produits d'appellation dans le secteur agricole ; estime en particulier que, plus encore qu'une liste d'indications géographiques, le système des indications géographiques, conforme aux principes de la propriété intellectuelle de bonne information des consommateurs, soit pleinement reconnu par les États-Unis d'Amérique ; demande instamment à ce que, par voie de conséquence, tout détournement indu d'indication géographique, soit interdit ;

2. S'inquiète de ce que les indications géographiques n'aient pas encore fait l'objet d'un chapitre de négociation ; considère qu'il s'agit là d'un préalable à l'avancée des négociations et en aucun cas d'un sujet qui doit être relégué en fin de discussion ; demande par conséquent à ce que cette question soit traitée au plus vite ;

3. Prend acte de l'Accord Économique Commercial Global (AECG) signé avec le Canada, et de la reconnaissance d'une liste de produits sous indication géographique ; estime qu'il s'agit d'un premier pas, encore insuffisant, qui doit être renforcé en vue d'aboutir à une reconnaissance globale des indications géographiques dans le cadre du PTCI ;

4. Demande en particulier à ce que les produits dits « semi-génériques » dans le domaine vitivinicole, qui participent du détournement des produits d'origine, ne puissent plus se prévaloir du nom de produits bénéficiant d'une indication géographique ;

5. Considère que la Commission européenne doit poursuivre ses efforts pour la reconnaissance des indications géographiques dans tous les accords de libre-échange qui sont actuellement en cours de négociation, et que la nécessaire diversité des productions agricoles doit guider, à l'instar de la diversité culturelle, la politique commerciale de l'Union européenne. »

IV. Communication de Mme Isabelle Bruneau et de M. Marc Laffineur sur l'application du droit de la concurrence et des règles du marché intérieur au football professionnel

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Nous avons entamé depuis plusieurs mois un travail conjoint sur les pratiques fiscales dommageables qui affectent, en Europe, nos économies et donc nos sociétés. À l'heure de l'Euro 2016, il nous a semblé intéressant de faire un focus sur le football professionnel.

L'exposition médiatique et les aspects symboliques du football professionnel constituent en effet des enjeux politiques et sociaux significatifs, et le football professionnel est aussi le lieu d'un paradoxe : si la concurrence sportive est uniquement nationale pour la plupart d'entre eux, et essentiellement nationale pour ceux qui jouent régulièrement une Coupe d'Europe, le football professionnel est une des activités économiques à avoir acquis une véritable dimension européenne.

Dans un contexte de dérégulation des marchés liés au sport professionnel, l'évolution des rapports économiques entre les différents acteurs du monde du football professionnel français et la financiarisation croissante de ce secteur ont fait que, tant à l'échelon national qu'européen, les instances dirigeantes du football tout comme les pouvoirs publics ont été ou sont encore confrontés à des phénomènes significatifs autour du fonctionnement économique des clubs professionnels, avec un constat de malversations financières, une viabilité financière des clubs professionnels incertaine et de nouvelles formes d'investissements dans les joueurs, et enfin, une demande d'application sans limitation des règles du marché intérieur, alors que le modèle sportif européen pose le football professionnel comme un secteur d'activité économique spécifique, justifiant voire nécessitant des modes de régulation propres.

Des rapports très documentés ont été publiés ces trois dernières années, le dernier en date étant le rapport remis le 19 avril dernier à M. Thierry Braillard, secrétaire d'État aux sports, par la Grande Conférence sur le sport professionnel français. Notre communication n'a pas pour ambition de les égaler, et nous avons souhaité la circonscrire aux enjeux de concurrence et par ricochet d'aides d'État.

Le modèle sportif européen est un modèle ouvert et caractérisé par la mise en oeuvre de règles dérogatoires au droit commun. Le droit européen a sur lui un impact limité sauf lorsque l'Union se place sous l'angle de la concurrence et du respect des règles du marché intérieur, mais prime jusqu'à présent la volonté de légitimer des règles dérogatoires au droit commun en raison des spécificités liées à la pratique du sport.

Le football est toutefois, comme d'autres secteurs, le lieu aujourd'hui de divergences, entre dérégulation pour stimuler la concurrence et régulation pour préserver un équilibre compétitif.

Une première approche est celle de la concurrence fiscale et sociale entre pays européens. Elle passe par des niveaux de taux différents (du ressort des États, rappelons-le), mais aussi par des pratiques d'optimisation voire d'évasion fiscale.

Sans vouloir singulariser ici le football professionnel, force est de constater que la presse s'est fait l'écho de suspicions de malversations fiscales, et que des enquêtes sont en cours dans certains États membres, dont le nôtre.

Si ces pratiques répréhensibles ne sont bien sûr pas propres au football, elles trouvent dans cette industrie des conditions qui favorisent la mise en place de circuits financiers élaborés, comme l'a montré le rapport sur les risques de blanchiment dans le secteur du football publié par le Groupe d'action financière (GAFI) en 2009.

Deux exemples ont récemment fait l'actualité : la domiciliation du capital social de clubs anglais dans des pays « opaques et l'accusation de répartition fictive de frais lors d'opérations de transferts de joueurs, pour des clubs italiens.

Pour le football professionnel, comme pour d'autres activités dans une économie internationalisée, se pose donc le problème de l'asymétrie des règles et des contrôles, et donc la question d'une harmonisation, au minimum à l'échelon européen.

En matière de concurrence « légale », la France a su se doter de dispositifs fiscaux attractifs pour attirer les acteurs du secteur du football professionnel, la contrepartie en étant sans doute un système lourd et complexe. Plus que la concurrence en matière fiscale, c'est donc celle en matière sociale qui a été mise en exergue par nos interlocuteurs. Un comparatif en matière de charges sociales se fait en effet en défaveur des clubs professionnels français, alors que les salaires représentent le principal poste de dépenses des clubs professionnels.

Alors que certains pays – dont l'Allemagne – appliquent une règle générale de plafond de cotisation, les solutions mises en avant en France relèvent à l'inverse du cas particulier, avec par exemple de février 2005 à juillet 2010, un régime social spécifique prenant en compte la médiatisation de la profession des sportifs professionnels, le droit à l'image collective.

C'est une solution similaire qui est d'ailleurs suggérée par la Grande Conférence sur le sport professionnel français, afin rétablir une compétitivité sportive qu'elle juge corollaire de la performance financière et de la puissance économique des clubs : l'extension du régime applicable aux professionnels du spectacle.

S'il n'est pas illégitime d'instaurer un « droit à l'image » calqué sur le mécanisme existant pour les artistes interprètes, l'absence de visibilité d'un tel dispositif pour les finances publiques ne peut être éludée. Par ailleurs, la concurrence sportive est uniquement nationale pour la plupart des clubs, et essentiellement nationale pour ceux qui jouent régulièrement une Coupe d'Europe. Il faut donc rappeler aussi l'impératif d'une contribution de chacun, selon ses capacités, au financement de la protection sociale des citoyens de notre pays.

Les données sur le marché des transferts relativisent par ailleurs quelque peu l'importance des facteurs fiscaux et sociaux au regard d'autres facteurs structurels de puissance économique, tels que la faiblesse des fonds propres, le montant moins élevé des recettes d'entrées dans les stades, l'importance moindre des droits dérivés, une répartition des droits télévisées différente de celles pratiquée par d'autres ligues professionnelles européennes.

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En l'absence d'investisseurs puissants, et compte tenu d'un recours inégal aux autres outils que sont les droits annexes (retransmission et marketing) et la valorisation du stade, deux autres mécanismes de financement peuvent être utilisés pour s'adjuger les services du principal actif des clubs, les joueurs : les indemnités de transfert et la propriété des droits économique par des tiers. Sur ces deux modalités, la régulation en place est contestée au nom des règles du marché intérieur.

En premier lieu, le marché des transferts confèrerait un monopole des grands clubs sur les bons joueurs, le coût des transferts étant bien trop élevé pour les « petits clubs ». De plus, un lien très fort entre les dépenses en matière de transfert et les résultats sportifs a été mis en évidence, en particulier depuis 2001, et cette situation ne fait qu'aggraver les déséquilibres qui existent entre les clubs les plus riches et les autres. La saison 2015-2016 de la première division française en est un bon exemple.

Enfin, la fédération internationale des associations de footballeurs professionnelles conteste, au nom du droit à la concurrence, la non-réciprocité des droits des employés (les joueurs) et des employeurs (les clubs), notamment sur la rupture unilatérale des contrats.

La réalité est plus nuancée.

Plus que cette question du monopole, il convient de prendre en compte l'impact de ces transferts sur les résultats financiers des clubs : alors que cette activité a très peu d'impact sur les résultats financiers des clubs de certains pays importateurs de talents, certains clubs d'autres pays mettent systématiquement à mal leurs résultats financiers en réalisant ces transferts. À cet égard, les règles de fair-play financier mises en place par l'UEFA représentent donc un « garde-jeu » essentiel pour l'équité de la compétition sportive.

Quant à l'atteinte aux droits des joueurs, l'organisation du marché des transferts est marquée par une forte segmentation, et les transferts payants ne concernent que le haut de la pyramide. Certes, ce sont ceux dont on parle le plus car ils se réalisent moyennant des sommes très importantes mais cela ne concerne qu'un nombre très limité de joueurs. Un autre phénomène, les prêts de joueurs entre clubs, qui précarise les footballeurs, devrait en fait plus retenir notre attention.

Loin d'appliquer sans restriction les règles du marché intérieur, il conviendrait au contraire de renforcer la régulation spécifique au football professionnel. Des pistes sont proposées, on peut citer une « redevance d'équité » sur les indemnités de transfert dépassant un certain montant afin de financer un mécanisme de redistribution des fonds entre les clubs riches et les clubs moins fortunés, et ainsi rétablir en partie l'équilibre compétitif, une régulation de la pratique des clauses de rachat, la mise en place d'une « chambre de compensation » via la fédération ou la ligue, ou établir une limite au nombre de joueurs par club et réguler le mécanisme des prêts de joueurs.

En second lieu, l'interdiction de la tierce propriété est contestée, notamment par l'autorité de la concurrence espagnole.

C'est une pratique par laquelle une société achète, aux côtés d'un club, tout ou partie d'un joueur, soit pour partager l'investissement – lors d'un achat d'un nouveau joueur – soit pour régler un problème de trésorerie – lorsque le club possède déjà le joueur–.

Quelques fédérations nationales – dont la France –, confrontées à des cas ayant mis en lumière les risques associés aux pratiques de TPO, avaient interdit cette pratique, autorisée mais encadrée par la FIFA, avant que cette dernière ne l'interdise également à la fin en décembre 2014, à partir du 1er mai 2015. Cette dernière a d'ailleurs sanctionné à ce sujet quatre clubs en mars dernier.

Le principal argument de la FIFA est que les TPO interfèrent dans les décisions sportives des principales unités économiques qui opèrent dans cette industrie, les clubs, mais trois dérives potentielles peuvent être identifiées: l'opacité quant à la provenance des fonds injectés dans les clubs leur permettant de réaliser les opérations de transferts, le risque d'opérations de transferts uniquement guidées par des considérations de rentabilité et non par l'intérêt sportif du club etou du joueur , et enfin, le risque de dépendance financière des clubs.

Cette décision d'interdiction est contestée, notamment par la Ligue espagnole et par l'autorité de la concurrence de cet État membre, mais aussi par les fonds d'investissement. De nombreuses actions juridiques sont en cours en Belgique, en France et devant la Commission européenne, sans résultat jusqu'à présent.

Outre l'aspect humain souligné à juste titre par M. Theo Van Seggelen, secrétaire général de la FIFPro, qui redoute son effet négatif sur le développement des jeunes joueurs et l'assimile in fine au trafic d'êtres humains, nous considérons qu'à ce mode de financement, artificiel et limité aux actifs joueurs des clubs, doit être privilégié un investissement direct dans les clubs, tout en notant que les mécanismes d'injections de capitaux propres ne sont pas, eux non plus, dénués de fragilités.

En matière de financements privés, trois mécanismes sont privilégiés : une stratégie de diversification dans le cadre de clubs omnisports, l'introduction en bourse des clubs – mais l'aléa sportif entraîne une relative désaffection des investisseurs pour le marché boursier du football professionnel – et l'arrivée d'investisseurs étrangers, notamment de pays émergents, qui mêlent intérêt sportif, vecteur de rayonnement diplomatique et diversification de leurs placements. C'est le cas du Qatar, bien sûr, mais aussi, et de plus en plus, de la Chine.

Or l'arrivée de ces investisseurs a été synonyme d'une augmentation spectaculaire des moyens de leurs clubs, au risque de déstabiliser de l'ensemble de la filière du football, les clubs les moins riches n'ayant pas les moyens suffisants pour conserver leurs joueurs les plus performants. En Ligue 1, la variation des effectifs du club d'Angers lors du dernier mercato d'hiver l'illustre parfaitement.

Cette montée en puissance des financements privés s'inscrit dans un contexte de contrainte budgétaire pour les collectivités territoriales, donc de contraction des financements publics, de toute façon sous surveillance européenne. Ce sera notre troisième et dernier point, la question du financement public.

L'interdiction de principe des aides d'État souffre toutefois d'exceptions, notamment en raison de missions d'intérêt général – la liste est à l'article R. 113-2 du code du sport. En matière d'infrastructures, la Commission européenne a également légitimé les aides pour la rénovation ou la construction d'équipements susceptibles d'accueillir des compétitions internationales et ayant vocation à permettre à un État de rayonner au plan européen et international – ce fut le cas pour 9 des stades qui sont utilisé en ce moment pour l'Euro – mais aussi d'équipements à vocation uniquement locale.

Dans un précédent rapport, notre collègue Isabelle Bruneau soulignait l'apport, pour les acteurs de terrain, des communications par lesquelles la Commission européenne précise son approche dans l'interprétation de la notion d'aide d'État et donc de son contrôle.

Alors qu'un travail est en cours sur les modalités de calcul de la redevance pour les stades, et qu'un tel cadrage existe pour l'activité physique de loisir, un focus sur le cas des infrastructures utilisées par le football professionnel serait sans doute utile, dans le contexte de la mise en cause de sept clubs espagnols par la Commission européenne pour des modalités relatives aux centres de formations, à la prise en charge lors de la construction d'un nouveau stade, ainsi qu'en matière de régime fiscal.

Les chambres régionales des comptes dénoncent régulièrement les modalités du soutien que les collectivités territoriales françaises apportent aux clubs de football, attirant l'attention sur le risque au regard de la réglementation en matière d'aides d'État.

En filigrane, ce qui est ici posé, c'est la question de l'outil de travail des clubs, le stade, mais aussi celle du risque de l'aléa sportif et de sa prise en charge : s'agissant du football professionnel, il pourrait être déplacé des collectivités territoriales vers les clubs eux-mêmes.

Si la plupart des pays européens ont fait le choix d'une propriété privée des équipements sportifs, en France ce sont les collectivités territoriales qui détiennent la propriété de ces équipements, à quelques rares exceptions près, dont l'exemple le plus récent est l'Olympique Lyonnais.

En réponse aux critiques sur les modalités du soutien des collectivités territoriales, la Grande conférence sur le sport professionnel propose de sécuriser la mise à disposition des équipements sportifs par la définition d'un mode de calcul des redevances au moyen d'une réglementation unique dont la compatibilité avec le régime des aides d'État aura préalablement été validée par la Commission européenne.

En réponse aux demandes des clubs de mieux maitriser leur outil de travail, la Grande conférence sur le sport professionnel propose deux options : sans modifier le régime de propriété, il serait possible d'optimiser l'exploitation des stades ; la propriété des stades par les clubs serait favorisée via la cession des enceintes sportives existantes appartenant aux collectivités locales etou la sécurisation de la procédure juridique et des financements pour les nouvelles enceintes sportives.

Pour les représentants de Première Ligue que nous avons reçus, maîtriser le stade leur permettrait de maîtriser leurs financements (garantie d'emprunt, recettes complémentaires, etc…). Si nous en comprenons la logique, il nous semble toutefois nécessaire d'être vigilants sur un équipement « symbole » pour les collectivités territoriales.

Enfin, et pour « boucler la boucle » avec notre introduction, il nous semble indispensable que les États européens reprennent « la main » face aux fédérations internationales.

Il est en effet absolument nécessaire et utile d'accueillir dans nos pays des compétitions sportives internationales, compte tenu de leurs impact sur nos territoires, notre jeunesse, notre économie, mais la lutte contre l'optimisation fiscale passe aussi, à nos yeux, par le refus d'entrer dans une compétition vers le moins disant fiscal en matière d'organisation de ces compétitions.

En disant cela, je ne critique pas la situation actuelle pour cet Euro, la France n'avait pas le choix. Nous n'y arriverons pas seuls, cela implique une prise de position de l'ensemble des pays européens face à des demandes de traitement exorbitant du droit commun mais la situation n'est pas si inégale que ces fédérations veulent bien le dire.

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Je vous remercie pour cette communication très intéressante, et je vous propose d'adopter les conclusions proposées.

La commission des Affaires européennes a ensuite approuvé les conclusions suivantes :

« La Commission des affaires européennes,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu les articles 6 et 165, 26 ainsi que 107 à 109 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,

Vu la communication de la Commission européenne « Développer la dimension européenne du sport » du 18 janvier 2011, premier document stratégique adopté dans le domaine du sport depuis l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne,

Vu la déclaration commune de la Commission et de l'Union européenne des associations de football (UEFA) du 21 mars 2012,

Vu la résolution du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres, réunis au sein du Conseil du 21 mai 2014, sur le plan de travail de l'Union européenne en faveur du sport pour 2014-2017 (2014C 18303),

Vu les conclusions du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres sur le sport comme facteur d'innovation et de croissance économique (2014C 43602) du 5 décembre 2014,

Vu la résolution du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres du 21 mai 2014 sur le plan de travail de l'Union européenne en faveur du sport pour 2014-2017 (2014C 18303),

Considérant la tendance, dans le cas du football professionnel, à un rapprochement avec le « sport spectacle » et les contestations dont font l'objet, au nom du marché intérieur et de la libre concurrence, les régulations - notamment financières - mises en place,

Considérant que si la concurrence sportive est uniquement nationale pour la plupart des clubs de football professionnel, et essentiellement nationale pour ceux qui jouent régulièrement une Coupe d'Europe, le football professionnel est une des activités économiques à avoir acquis une véritable dimension européenne de sorte que les décisions prises dans un pays exercent des effets sur les autres participants,

Considérant l'importance de la préservation dans le domaine du football d'un modèle sportif européen combinant plusieurs principes : solidarité financière entre amateurs et professionnels, organisation pyramidale, ligues ouvertes, etc,

Considérant à la fois l'importance de l'ancrage local – sous toutes ses formes – des différents acteurs et les contraintes dans lesquelles évoluent les collectivités territoriales,

Considérant le rôle-clé que peut jouer l'Union européenne en dépit d'une simple compétence d'appui dans le domaine du sport et d'un espace géographique plus restreint que l'espace européen du football,

1. Rappelle les enjeux politiques et sociaux significatifs qu'entraînent l'exposition médiatique et les aspects symboliques du football professionnel ;

2. Salue l'apport du Traité de Lisbonne qui apporte des garanties supplémentaires au fait que le football professionnel est plus qu'une activité économique devant respecter les règles du marché intérieur, et appelle l'Union européenne et les États membres à utiliser pleinement les facilités nouvelles introduites par le Traité, en dépit de leur caractère limité, comme ils l'ont fait avec le soutien apporté au « fair play » financier institué par l'Union européenne des associations de football (UEFA) ;

3. Estime que, dans le domaine du football professionnel, l'Union européenne et les États membres doivent avoir pour ambition la préservation du modèle sportif européen, en garantissant l'équité des compétitions, la viabilité économique des structures professionnelles grâce à un mode de financement équilibré, transparent et contrôlé, l'intégrité des acteurs et leur ancrage local ;

4. Souligne à ce titre :

- l'impact de l'asymétrie des règles et des contrôles, et donc la nécessité d'une coordination à l'échelon européen, en particulier en matière de soustraction à la taxation ;

- l'importance de la régulation des financements privés, mise en place au nom de l'intégrité et de l'équité des compétitions et aujourd'hui contestée au nom de l'application des règles du marché intérieur, et est d'avis qu'il convient au contraire de la renforcer pour accroître la transparence et assurer un meilleur équilibre entre toutes les parties prenantes ;

- les possibilités existantes en matière d'aides d'État, notamment pour celles qui concernent les infrastructures, qui prennent en compte les situations de sous-investissement dans les infrastructures de football en les conditionnant à l'utilisation desdites infrastructures de façon sociale et ouverte, mais suggère d'en faciliter l'appropriation par les clubs professionnels et les collectivités territoriales par un « cadre d'emploi » général préalablement validé par la Commission européenne. »

V. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport de la Présidente Danielle Auroi, la Commission a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

l Textes « actés »

Aucune observation n'ayant été formulée, la Commission a pris acte des textes suivants :

Ø COMMERCE INTERIEUR et SERVICES

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil remplaçant les listes des procédures d'insolvabilité et des praticiens de l'insolvabilité figurant aux annexes A et B du règlement (UE) 2015848 relatif aux procédures d'insolvabilité (COM(2016) 317 final – E 11224).

Ø ENVIRONNEMENT

- Règlement (UE) de la Commission portant modification du règlement (UE) nº 5822011 en ce qui concerne les émissions des véhicules lourds, s'agissant des dispositions relatives aux essais au moyen de systèmes portables de mesure des émissions (PEMS) et de la procédure d'essai de la durabilité des dispositifs antipollution de remplacement (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (D04452902 – E 11216).

Ø TRANSPORTS

- Proposition de décision du Conseil établissant la position à adopter au nom de l'Union européenne, au sein des comités compétents de la Commission économique pour l'Europe des Nations unies, sur les propositions d'amendements aux règlements nos 9, 11, 13, 13-H, 14, 16, 30, 41, 44, 49, 54, 55, 60, 64, 75, 78, 79, 83, 90, 106, 113, 115, 117, 129 et 134, sur les propositions d'amendements aux règlements techniques mondiaux 15 et 16, sur quatre propositions de nouveaux règlements de l'ONU concernant les systèmes d'aide au freinage (BAS), le contrôle électronique de stabilité (ESC), les systèmes de surveillance de la pression des pneumatiques (TPMS) et le montage des pneumatiques, sur une proposition de nouveau règlement technique mondial de l'ONU concernant la procédure de mesure pour les émissions des véhicules à moteur à deux ou trois roues et sur une nouvelle résolution spéciale nº 2 (R.S.2) sur les progrès de la mise en oeuvre de l'accord mondial de 1998 (COM(2016) 351 final – E 11225).

l Textes « actés » de manière tacite

Permalien
Accords tacites de la Commission, du fait de la nature du texte

En application de la procédure d'approbation tacite, dite procédure 72 heures, adoptée par la Commission les 23 septembre 2008 (textes antidumping), 29 octobre 2008 (virements de crédits), 28 janvier 2009 (certains projets de décisions de nominations et actes relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) concernant la prolongation, sans changement, de missions de gestion de crise, ou de sanctions diverses, et certaines autres nominations), 16 octobre 2012 (certaines décisions de mobilisation du fonds européen d'ajustement à la mondialisation), et 1er décembre 2015 (mesures de dérogations en matière de TVA, de décisions relatives à la réduction facultative de droits d'accise et de décisions relatives aux contributions nationales pour financer les tranches du Fonds européen de développement), celle-ci a approuvé tacitement les documents suivants :

Ø BUDGET COMMUNAUTAIRE

- Proposition de virement de crédits n° DEC 112016 à l'intérieur de la section III - Commission - du budget général pour l'exercice 2016 (DEC 112016 – E 11259).

Ø INSTITUTIONS COMMUNAUTAIRES

- Décision du Conseil portant nomination d'un membre de la Cour des comptes (938116 – E 11245).

Accords tacites de la Commission liés au calendrier d'adoption par le Conseil

La Commission a également pris acte de la levée tacite de la réserve parlementaire, du fait du calendrier des travaux du Conseil, pour les textes suivants :

Ø COMMERCE EXTERIEUR

- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (UE) nº 13882013 portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires autonomes de l'Union pour certains produits agricoles et industriels (COM(2016) 299 final – E 11213).

- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (UE) nº 13872013 portant suspension des droits autonomes du tarif douanier commun sur certains produits agricoles et industriels (COM(2016) 301 final – E 11214).

Ø MARCHE INTERIEUR

- Proposition de décision du Conseil relative à la position à adopter au nom de l'Union européenne, au sein du Comité mixte de l'EEE, au sujet d'une modification du protocole 31 de l'accord EEE concernant la coopération dans des secteurs particuliers en dehors des quatre libertés (ligne budgétaire 33 02 03 01 - Droit des sociétés) (COM(2016) 362 final – E 11234).

Ø POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE

- Proposition de décision du Conseil établissant la position à adopter au nom de l'Union européenne en ce qui concerne certaines décisions devant être adoptées dans le cadre du Conseil oléicole international (COI) (COM(2016) 373 final – E 11242).

Ø POLITIQUE ETRANGERE ET DE SECURITE COMMUNE (PESC)

- Décision du Conseil abrogeant la position commune 2008109PESC concernant des mesures restrictives instituées à l'encontre du Liberia (972316 LIMITE – E 11254).

- Règlement du Conseil abrogeant le règlement (CE) n° 2342004 imposant certaines mesures restrictives à l'égard du Liberia (988816 LIMITE – E 11255).

Ø POLITIQUE SÉCURITÉ & DÉFENSE COMMUNE (PSDC)

- Décision du Conseil relative à la signature et à la conclusion au nom de l'Union de l'accord sous forme d'échange de lettres entre l'Union européenne et la République centrafricaine sur le statut de la mission militaire de formation PSDC de l'Union européenne en République centrafricaine (EUTM RCA) (989316 LIMITE – E 11256).

- Décision du Conseil modifiant la décision (PESC) 2015778 relative à une opération militaire de l'Union européenne dans la partie sud de la Méditerranée centrale (EUNAVFOR MED opération SOPHIA) (929616 LIMITE – E 11257).

Ø SECURITE ALIMENTAIRE

- Règlement (UE) de la Commission modifiant l'annexe II du règlement (CE) nº 3962005 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le thiaclopride (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (D04452403 – E 11215).

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les contrôles officiels et les autres activités officielles servant à assurer le respect de la législation sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux ainsi que des règles relatives à la santé et au bien-être des animaux, à la santé et au matériel de reproduction des végétaux et aux produits phytopharmaceutiques, et modifiant les règlements (CE) nº 9992001, (CE) nº 18292003, (CE) nº 18312003, (CE) nº 12005, (CE) nº 3962005, (CE) nº 8342007, (CE) nº 10992009, (CE) nº 10692009, (CE) nº 11072009, (UE) nº 11512012, (UE) 2013 ainsi que les directives 9858CE, 199974CE, 200743CE, 2008119CE, 2008120CE et 2009128CE (règlement sur les contrôles officiels). (COM(2013) 0265 final – E 8301).

Ø SERVICES FINANCIERS (BANQUES - ASSURANCES)

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) nº 2582014 établissant un programme de l'Union visant à soutenir des activités spécifiques dans le domaine de l'information financière et du contrôle des comptes pour la période 2014-2020 (COM(2016) 202 final – E 11114).

- Proposition de décision du Conseil relative à la position à adopter, au nom de l'Union européenne, au sein du Comité mixte de l'EEE en ce qui concerne des modifications de l'annexe IX (Services financiers) de l'accord EEE (COM(2016) 319 final – E 11232).

La séance est levée à 18 h 25