La réunion

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La commission d'enquête, qui a commencé ses travaux ce matin en auditionnant deux journalistes de Mediapart, Edwy Plenel et Fabrice Arfi, a pour objet de faire la lumière sur d'éventuels dysfonctionnements de l'action du Gouvernement et des services de l'État dans la gestion de l'affaire Cahuzac. Il s'agit, dans un souci de transparence, d'identifier précisément qui savait quoi, et à quel moment, quelles initiatives ont été prises, et par qui.

Il nous a semblé logique de vous entendre, monsieur Gonelle, parmi les tout premiers témoins, car c'est bien l'enregistrement effectué en 2000, dont vous êtes un des détenteurs et dont Mediapart a révélé l'existence le 5 décembre 2012, qui constitue le point de départ de cette affaire. Je vous remercie donc de vous être rendu rapidement disponible pour cette audition.

Vous vous êtes exprimé à plusieurs reprises dans les médias sur les conditions dans lesquelles vous êtes entré en possession de cette bande-son et sur les relations que vous entreteniez avec M. Cahuzac, votre adversaire politique à Villeneuve-sur-Lot. Il reste toutefois des zones d'ombres et des interrogations.

Je vous laisse d'abord la parole pour une quinzaine de minutes. Puis le rapporteur vous interrogera. Ensuite, nos collègues poseront leurs propres questions.

Auparavant, il me revient de rappeler que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

(M. Gonelle prête serment.)

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Michel Gonelle

J'ai quitté la vie publique depuis plusieurs années, et n'étant plus impliqué dans la vie politique, je ne suis plus l'adversaire de qui que ce soit. Par conséquent, tout ce qui a été dit, en termes souvent excessifs, sur l'esprit de vengeance ou de haine qui m'animerait, est complètement stupide. Je n'ai jamais éprouvé de tels sentiments.

On a également beaucoup glosé sur le temps qui s'est écoulé entre la fin de l'année 2000, lorsque j'ai reçu fortuitement, sur la boîte vocale de mon appareil téléphonique mobile, l'enregistrement d'une conversation de Jérôme Cahuzac, et le moment où son existence a été révélée, à la fin de l'année 2012. Or rien ne permet d'affirmer sérieusement que je n'aurais pris aucune initiative lorsque j'ai reçu cet enregistrement, même si, bien entendu, je ne me suis adressé ni aux médias, ni au procureur de la République – bien que je fusse autorité constituée à l'époque. J'ai pris des initiatives. Ces initiatives sont d'ailleurs connues des services enquêteurs de la police judiciaire, qui ont fait un travail remarquable depuis le mois de janvier. L'enquête sur commission rogatoire actuellement en cours attestera de ce que j'ai fait ou fait faire, et à quel moment.

Je souhaite enfin préciser mon attitude lorsque l'affaire a été révélée, le 4 décembre 2012. J'ai été surpris par l'annonce de cette publication dans laquelle je n'ai joué aucun rôle. Ma surprise et mon désarroi ont été suffisamment importants pour que je déclare que je n'étais pour rien dans la publication, mais pas, évidemment, dans le fait que la conversation, dont j'ai été le premier auditeur, ait été enregistrée sur ma boîte vocale et avait été conservée comme une archive sensible.

De tels enregistrements sont conservés dans la mémoire du téléphone pendant quatorze jours. À l'époque maire d'une commune de 23 000 habitants – ne sachant pas si j'allais le demeurer –, j'ai immédiatement compris le caractère sensible et choquant du message. Je n'ai donc pas souhaité que ce document disparaisse.

Telles sont les déclarations que je souhaitais faire en préambule afin de démentir un certain nombre de critiques qui m'ont été faites au début de la révélation de l'affaire. Les dix ou quinze premiers jours qui ont suivi le 4 décembre, en particulier, n'ont pas été pour moi une sinécure.

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Quelles sont donc les initiatives que vous avez prises lorsque vous avez obtenu cet enregistrement ?

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Michel Gonelle

Trois voies étaient possibles. La première consistait à en parler devant les médias : je l'ai immédiatement rejetée. La deuxième, d'une certaine façon, s'imposait à moi, mais je ne l'ai pas choisie : c'était celle de l'article 40 du code de procédure pénale, c'est-à-dire aller trouver le procureur de la République de mon département pour lui signaler ce qui constituait un fait délictueux.

J'ai adopté une autre voie. J'avais, dans mon entourage très proche, et même dans mon intimité, un fonctionnaire des impôts. Avec mon accord, il a écouté le message et pris une initiative qui me semble la plus républicaine : informer de ce message et de ce qu'il avait appris avec mon intermédiaire, aussi avec mon accord, le service compétent en la matière, c'est-à-dire la représentation régionale, située à Bordeaux, de la Direction nationale des enquêtes fiscales – DNEF.

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Michel Gonelle

Au printemps 2001, c'est-à-dire presque aussitôt après la réception du message.

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Pouvez-vous nous dire qui est la personne dont vous parlez ?

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Michel Gonelle

Elle n'a pas souhaité révéler son identité. Cependant, des traces de sa démarche demeurent à la DNEF, et les enquêteurs de la police judiciaire ont pu la reconstituer.

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Tout cela se passait au moment des élections municipales ?

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Michel Gonelle

Vous êtes tous des élus, et vous pouvez me comprendre. Nous étions à la veille des élections, et je détenais un document sensible. Je n'avais aucune assurance, en l'écoutant, que le compte à l'étranger dont il était fait mention n'était pas déclaré, même si j'avais une forte présomption. Si j'avais livré ce document sur la place publique en plein débat électoral, je me serais probablement exposé à une action en diffamation ou, plus grave encore, en dénonciation calomnieuse.

En outre, je ne voulais pas polluer le débat électoral avec ce type de polémique, d'autant que Jérôme Cahuzac était un adversaire redoutable. Ainsi, pendant la campagne de 2001, lorsque trois de mes colistiers, médecins, l'ont mis en cause par écrit au sujet des largesses distribuées par certains laboratoires pharmaceutiques aux associations sportives de la ville, sa réponse a été extrêmement cinglante, à l'égard de ces colistiers et de moi-même, en tant que tête de liste. Je ne voulais pas multiplier ce type d'incidents, qui rendent le débat électoral nauséabond. Je n'ai donc pas révélé ce que je savais. De même, je n'ai pas saisi le procureur, ne sachant pas si le compte était déclaré ou non. L'infraction n'aurait été constituée que dans le second cas.

Le signalement a donc été fait au service compétent. Depuis le début de cette affaire, mon entourage et moi-même avons donc eu – pardonnez-moi de le dire – une attitude parfaitement républicaine.

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Connaissez-vous Rémy Garnier, et dans l'affirmative, vous a-t-il fait part de ses soupçons à l'égard de Jérôme Cahuzac ?

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Michel Gonelle

À ce moment, je ne le connaissais pas du tout. Rémy Garnier est un inspecteur des impôts en conflit avec sa hiérarchie depuis qu'il a été interrompu dans le contrôle fiscal qu'il effectuait sur une grande coopérative de pruniculteurs, France Prune. Ce fonctionnaire était pourtant l'un des mieux notés de France. Il a fait rentrer des millions d'euros dans le Trésor en identifiant des fraudes. Mais les intérêts économiques liés à la coopérative agricole avaient conduit le parlementaire de la circonscription à demander, comme cela se pratique, l'indulgence du ministère du budget, qu'il a d'ailleurs obtenue. Il en a résulté toute une polémique sur laquelle je ne reviendrai pas.

Quoi qu'il en soit, Rémy Garnier est devenu mon client beaucoup plus tard, aux environs de 2003, après qu'un de mes confrères du barreau de Bordeaux, Me Boulanger, eut refusé d'assurer sa défense.

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Ce n'est donc pas à lui, mais à un autre fonctionnaire des impôts que vous avez fait écouter l'enregistrement.

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Michel Gonelle

En effet, c'est à un fonctionnaire qui fait depuis longtemps partie de mon entourage, et que j'aime beaucoup. Il a été président de la Ligue des droits de l'homme. Il est aujourd'hui à la retraite, mais je le fréquente toujours autant.

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Michel Gonelle

Pas sans son accord.

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Vous avez indiqué avoir contacté le directeur de cabinet adjoint du Président de la République, M. Alain Zabulon, au sujet de cet enregistrement. À combien de reprises avez-vous été en contact ? Qu'avez-vous très exactement dit, et que vous a répondu M. Zabulon ?

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Michel Gonelle

Je connais Alain Zabulon depuis longtemps, puisqu'il a été sous-préfet dans ma ville. Nous avons partagé une aventure exaltante, la création de la communauté de communes du Villeneuvois. M. Zabulon m'a accompagné lors de nombreuses soirées passées devant les membres de conseils municipaux de petites communes, afin de les rassurer et de leur apporter la parole de l'État. Il a contribué à la création de cette communauté, qui est aujourd'hui une réussite.

Nous avions donc des relations de confiance mutuelle, et j'éprouve encore pour lui, au moment où je vous parle, le plus grand respect. Il est devenu préfet, ce qui est tout à fait mérité, car c'est à mon avis un fonctionnaire de grande qualité.

Lorsque j'étais sous le feu du déchaînement médiatique, pendant les dix jours qui ont suivi le 4 décembre, je ne savais pas trop quoi faire. Certains me sommaient de dire que j'étais le détenteur de l'enregistrement – ce qui était vrai –, d'autres, que j'étais la source de Mediapart – ce qui était faux. Un samedi matin, le 15 décembre, alors que je me trouvais à Paris – à l'hôtel de Harlay, place Dauphine – dans le cadre de mes fonctions de vice-président de la Caisse de retraite des avocats, j'ai décidé d'appeler Alain Zabulon en vue de le rencontrer, non à son bureau, mais plutôt en ville, afin de lui remettre un pli manuscrit que j'avais préparé à l'intention de M. Président de la République, dans lequel j'expliquais ce qui s'était passé en donnant tous les détails que j'étais seul à connaître.

Après avoir connu quelques difficultés pour trouver le numéro, j'ai donc appelé le standard de l'Élysée et demandé à parler à Alain Zabulon. On m'a répondu que l'on ne pouvait pas me le passer. J'ai dit que c'était plutôt urgent, et la standardiste a noté mon numéro de téléphone portable en m'indiquant que le directeur de cabinet adjoint me rappellerait dès qu'il trouverait un moment disponible.

Alain Zabulon m'a rappelé dans les trois minutes qui ont suivi. Après quelques échanges de politesses – nous n'avions plus eu de contact depuis le moment où il avait quitté Villeneuve-sur-Lot –, je lui ai dit précisément ceci : « Vous vous doutez de la raison de mon appel », et il m'a répondu : « Je m'en doute, en effet. ». Je lui ai donc à nouveau expliqué ma démarche, mon souci de transmettre au Président de la République le plus de détails possible sur ce qui s'était passé, et ma conviction absolue que la voix entendue sur cet enregistrement était bien celle de Jérôme Cahuzac, dès lors qu'il faisait suite, avec le même numéro d'appel, à un autre appel officiel, celui-là, de Jérome Cahuzac.

J'ai en effet reçu deux messages sur ma boîte vocale fermée. Lors du premier appel, composé avec un numéro que j'ai reconnu être celui de Jérôme Cahuzac, ce dernier m'annonçait que Daniel Vaillant avait accepté de venir à Villeneuve-sur-Lot pour inaugurer le nouveau commissariat de police, et demandait à me rencontrer pour mettre au point les détails de la réception. Nous avions en effet collaboré sur ce dossier, lui en tant que député et moi comme maire. C'était donc notre oeuvre commune, réalisée à la plus grande satisfaction des policiers de la ville, auparavant très mal logés.

Après ce premier message, dans lequel il me demandait de le rappeler, venait un autre message – qui n'en était pas vraiment un –, avec le même numéro d'appel. Pour moi, il n'y avait donc aucun doute – j'insiste sur ce point – sur l'origine de cet appel, d'autant que j'ai reconnu les intonations de la voix de Jérôme Cahuzac, dont je connais tous les registres, qu'il s'agisse d'une conversation en privé ou d'un discours public. C'est en effet une personne que je côtoyais presque tous les jours. Je le répète, je n'avais aucun doute, et c'est ce que je souhaitais faire savoir au Président de la République.

Je suis avocat depuis quarante ans et quatre mois. J'ai exercé ce métier avec passion, sans jamais m'attirer la moindre remontrance de la part du conseil de l'ordre. Je suis un homme sincère. Je crois à ce que je fais. J'ai exercé mes fonctions électives du mieux que j'ai pu. J'ai donc voulu dire au président François Hollande ce qui s'était passé, comment cela s'était passé, et pourquoi j'étais sûr de l'origine du message. C'est ce que j'ai expliqué à Alain Zabulon.

Ce dernier m'a dit qu'il s'agissait d'une affaire extrêmement sensible et qu'il devait en référer, ce que je comprenais parfaitement. Il n'avait pas le temps de me rencontrer, étant l'organisateur de l'arbre de Noël de l'Élysée, qui avait lieu dans l'après-midi. Il m'a donc assuré qu'il me rappellerait, et je n'avais pas de raisons de penser qu'il ne tiendrait pas parole. Au sujet de la lettre, il m'a demandé de ne rien faire dans l'immédiat et d'attendre qu'il me rappelle. C'est pourquoi je ne l'ai pas postée.

Le mardi ou le mercredi suivant, la secrétaire de mon cabinet a voulu me passer une communication de M. Zabulon depuis l'Élysée. J'ai donc eu en ligne la secrétaire de ce dernier, qui a d'abord dit qu'elle allait me le passer, puis, quinze secondes plus tard, m'a indiqué qu'il venait de prendre une autre communication et qu'il me rappellerait. J'attends encore.

Cela se passait le mardi. Le lendemain, le site lemonde.fr publiait un article documenté par des déclarations du service de presse de la présidence de la République, et dont le contenu m'a blessé. J'en cite un extrait : « L'Élysée a confirmé avoir été contacté : “Michel Gonelle a bien eu il y a quelques jours un contact avec le directeur de cabinet adjoint de M. François Hollande, Alain Zabulon”, a-t-on déclaré dans l'entourage du président. “Nous l'invitons à remettre tous les éléments à la justice”, a-t-on précisé de même source, estimant toutefois qu'“il n'y avait aucun élément tangible”. “S'il dispose réellement d'éléments, qu'il s'adresse à la justice puisqu'il y a une procédure judiciaire”, a ajouté l'entourage du chef de l'État. »

Pour ma part, je n'ai obtenu aucune réponse de l'Élysée. Pour répondre précisément à votre question, monsieur le rapporteur, je n'ai eu qu'une seule conversation avec M. Zabulon : celle que je vous ai décrite.

Un autre article mentionne que mes propos avaient été qualifiés de confus. Depuis quarante ans, pourtant, mes clients ne me font pas un tel reproche ! Cette affirmation est ce qui m'a le plus blessé. J'ai pensé qu'une porte se fermait, et j'en ai été extrêmement déçu. J'avais pensé être un témoin recevable, et que le premier magistrat de France pouvait écouter ce que j'avais à lui dire.

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Quelle est la date du communiqué de l'Élysée ?

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Michel Gonelle

Apparemment, n'y a pas de communiqué de l'Élysée. J'ai cherché parmi les communiqués officiels publiés sur le site internet de l'institution, et je n'en ai pas trouvé trace.

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À quel document faites-vous référence, dans ce cas ?

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Michel Gonelle

À un article publié le 21 décembre 2012 à 13 heures 10 sur le Monde.fr et signé : « Le Monde avec l'AFP ». Je n'ai pas eu la curiosité de rechercher la dépêche de l'AFP correspondante.

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Je vous prie de nous en remettre une copie.

Par ailleurs, avez-vous encore la lettre que vous souhaitiez remettre au Président de la République, et si oui, pouvez-vous nous la transmettre ?

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Michel Gonelle

Certainement. Je ne l'ai pas sur moi, mais je ne pense pas l'avoir détruite.

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Par ailleurs, pourquoi, lorsque vous avez découvert cet enregistrement sur votre téléphone portable, n'avez-vous pas saisi le procureur de la République en application de l'article 40 du code de procédure pénale, comme le ferait tout citoyen ? Nous-mêmes, députés, il nous arrive de recevoir des dénonciations. Lorsqu'elles ne sont pas signées, c'est évidemment différent. Mais en l'occurrence, l'origine des informations était établie. Pourquoi n'avoir pas écrit, dès 2001, une lettre au procureur en expliquant que vous aviez reçu cette information à votre corps défendant ? Pourquoi l'avoir gardée pendant onze ans ? Étiez-vous d'ailleurs le seul à la conserver ? D'autres personnes en ont-elles pris connaissance, en plus de celle que vous avez citée ?

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Michel Gonelle

Les enquêteurs de la police judiciaire ont auditionné toutes les personnes qui ont écouté l'enregistrement, et qui sont moins nombreuses que les doigts d'une seule main.

Vous avez raison, monsieur le président : j'aurais pu recourir à l'article 40. Je ne l'ai pas fait pour deux raisons : premièrement, je n'étais pas sûr que le compte ne fût pas déclaré, et deuxièmement, me trouvant en campagne électorale, je ne souhaitais pas mélanger les genres. Si j'avais transmis cette information au Parquet, je prenais le risque qu'elle soit connue par l'opinion publique. J'ai donc opté pour une autre voie, celle du signalement auprès du service compétent de l'administration fiscale. J'ai jugé que cette voie était la plus « normale », le meilleur moyen de vérifier que le compte en banque n'était pas déclaré. J'avais en outre une grande confiance dans mon messager. J'ai appris que le fonctionnaire à qui l'information avait été apportée avait demandé la transmission à Bordeaux du dossier fiscal de M. Cahuzac.

Quelque temps plus tard, j'ai également appris – toujours par le biais de mon ami, inspecteur des impôts à Villeneuve – que Bercy avait refusé la communication du dossier au service demandeur, pourtant compétent en matière de fraude ou d'évasion fiscale. L'explication qui m'a été donnée – je ne sais pas si elle est vraie – est qu'il existe une procédure particulière pour les hommes politiques, les footballeurs et les cadres de haut niveau de l'administration fiscale visés par une enquête fiscale.

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Vous vous êtes contenté de cette réponse ? Vous êtes pourtant un homme de droit.

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Michel Gonelle

Je n'ai pas voulu aller plus loin lorsque j'ai vu que cette porte se fermait. Une autre opportunité s'est cependant présentée à moi, le 12 novembre 2006, avec la venue de Jean-Louis Bruguière.

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C'est à ce moment qu'il a obtenu une copie de l'enregistrement.

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Michel Gonelle

Ce haut magistrat, que tout le monde connaît, envisageait d'être candidat aux élections législatives dans le Villeneuvois. Il faisait donc le tour des responsables et anciens responsables afin de vérifier si ses chances étaient réelles et s'il pourrait obtenir des soutiens. Je l'ai reçu très longuement dans mon bureau. Nous avons parlé de ses chances, mais aussi de son adversaire principal, qui serait inévitablement Jérôme Cahuzac, dans la mesure où celui qui l'avait battu en 2002, Alain Merly, ne se représentait pas. Nous avons donc passé en revue les qualités, nombreuses, mais aussi les défauts de M. Cahuzac. Nous avons en particulier évoqué les questions qui se posaient sur son train de vie, les subventions apportées par des laboratoires pharmaceutiques aux associations sportives de la ville, ou le grand rassemblement organisé à Villeneuve, fin 1999 ou début 2000, par le laboratoire Lilly. C'est à ce moment que j'ai parlé de l'enregistrement à Jean-Louis Bruguière, et d'une certaine façon, je le regrette, car il n'a pas fait un bon usage de cette information.

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Est-ce lui qui a transmis l'enregistrement à Mediapart ?

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Michel Gonelle

Vous allez trop vite, monsieur le rapporteur. En outre, je n'ai pas la réponse à cette question.

Lorsque j'ai demandé à Jean-Louis Bruguière s'il savait que Jérôme Cahuzac avait un compte en Suisse, il a aussitôt voulu savoir comment j'en étais informé. Je lui ai donc raconté l'anecdote du téléphone. Apprenant que j'avais conservé l'enregistrement, il a voulu l'écouter. Mais le support était un mini-CD, dont on avait l'usage au début des années 2000, et je n'avais pas avec moi l'appareil permettant de le lire. Il m'a donc dit : « Confiez-le moi, je l'écouterai, puis je vous le rendrai. » Quand je l'ai averti que le son était de très mauvaise qualité, il m'a répondu qu'il avait à sa disposition des gens capables de l'améliorer. Je l'ai cru, car ce juge antiterroriste avait mené de nombreuses enquêtes impliquant des écoutes téléphoniques.

Bien que ne le connaissant pas très bien à l'époque, je lui ai fait confiance, car il était auréolé du prestige lié à son titre de premier vice-président du tribunal de grande instance de Paris. Je lui ai donc donné l'un des deux mini-CD que je détenais. Il ne me l'a jamais rendu – alors que j'en étais le légitime propriétaire –, ni ne m'a dit ce qu'il en avait fait. Lorsque l'affaire a été révélée, il a eu des propos – rapportés, je crois, par Paris Match – absolument ignobles et mensongers à mon égard. Il a ainsi prétendu qu'il avait détruit l'enregistrement sans l'écouter, et qu'il m'avait congédié sur le champ de son équipe de campagne. Or, non seulement cette équipe n'était pas constituée en novembre 2006, mais il m'a écrit plus tard de façon louangeuse afin de me remercier pour les bons et loyaux services que je lui avais rendus pendant cette campagne. Visiblement, il ne se rappelait plus avoir envoyé cette longue lettre manuscrite, que j'ai depuis remise aux enquêteurs. Ce qu'il a raconté à la presse est donc complètement faux, et je lui en veux beaucoup de ce mensonge qui ne l'honore pas.

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Pourquoi, à votre avis, a-t-il eu cette attitude ?

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Michel Gonelle

C'est à lui qu'il faut poser la question. Pour ma part, je ne m'explique un tel mensonge proféré par un haut magistrat.

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Comment, selon vous, les journalistes de Mediapart ont-ils obtenu l'enregistrement ? Est-ce vous qui le leur avez fourni, ou bien quelqu'un à qui vous l'auriez transmis ? Quelle est votre hypothèse ?

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Michel Gonelle

Je le répète, j'ai fait écouter cet enregistrement à un petit cercle d'amis – moins de cinq personnes –, et j'en ai donné copie à une seule personne, Jean-Louis Bruguière. Dès lors que ce n'est pas mon exemplaire qui a été transmis à Mediapart, puisque je l'ai donné à la police judiciaire, il s'agit forcément de l'autre qui a circulé. Je n'imagine pas une seconde que M. Bruguière ait donné à Mediapart l'exemplaire qu'il détenait. Je ne pense pas, en effet, que les relations qu'il entretient avec ce journal soient au beau fixe. Mon hypothèse est qu'à l'époque, en 2006 et 2007, ce disque a dû circuler entre les mains de plusieurs personnes avant d'aboutir à Mediapart. Je n'en ai cependant aucune preuve.

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Ce n'est donc pas vous qui avez fourni l'enregistrement ?

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Michel Gonelle

Non, les journalistes de Mediapart l'ont confirmé à de nombreuses reprises.

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Ils nous l'ont répété ce matin. Résumons-nous. Il n'existait que deux exemplaires. Vous en avez conservé un, que vous avez remis…

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Michel Gonelle

…aux enquêteurs, qui ont fait un scellé.

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Le second, vous l'avez donné à M. Bruguière, futur candidat aux élections législatives, qui a déclaré dans la presse l'avoir détruit.

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Entre le moment où il l'a obtenu et sa destruction, des copies n'ont-elles pas été faites ?

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Michel Gonelle

Pour ma part, je ne l'ai pas beaucoup revu.

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Je souhaitais vous demander combien d'exemplaires il existait de cet enregistrement, mais il ressort de vos propos qu'il n'y en avait que deux : le vôtre, que vous avez remis à la police, et celui du juge Bruguière. C'est d'ailleurs ce que vous aviez affirmé à la presse. Le confirmez-vous ?

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Michel Gonelle

Oui. J'ajoute que les deux supports étaient absolument identiques, des mini-CD insérés dans un étui de plastique rigide. Le technicien qui a procédé à la sauvegarde de l'enregistrement, entendu par la police judiciaire, a expliqué en détail comment il s'y était pris.

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En 2001, après avoir indirectement informé l'antenne régionale de la Direction nationale des enquêtes fiscales, vous n'avez jamais cherché à savoir où en était l'enquête. N'est-ce pas surprenant ? Vous disposez d'informations majeures sur Jérôme Cahuzac, qui était devenu parlementaire, et à aucun moment vous n'en avez fait part à quiconque entre 2001 et 2012.

À partir de 2002, nous étions à nouveau dans la majorité. Il n'aurait pas été difficile de passer un coup de fil à un conseiller technique au ministère du budget afin de lui demander ce qui avait été fait. Pourtant, vous n'avez rien entrepris pendant dix ans. C'est curieux.

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Michel Gonelle

J'ai lancé une alerte, ce que je jugeais normal, auprès du service qui me paraissait adéquat. On m'a dit que Bercy avait refusé de transmettre le dossier. Il y avait bien un ministre en charge du budget à l'époque !

Je n'ai pas, en effet, suivi l'état de la procédure. Peut-être n'ai-je pas l'âme d'un enquêteur ou d'un procureur. Peut-être me suis-je trop conduit en avocat. Je n'ai pas fait davantage, c'est vrai.

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Je ne mets pas votre bonne foi en doute, mais je voudrais comprendre. Vous avez obtenu l'enregistrement à la fin de l'année 2000. Les élections municipales ont eu lieu en 2001. Pourquoi ne pas avoir eu recours à l'article 40 du code de procédure pénale après la campagne ?

Votre défense comprend deux points. Tout d'abord, vous n'étiez pas sûr que le compte ne fût pas déclaré. Mais je crois me rappeler que Jérôme Cahuzac, dans la conversation qui a été enregistrée, dit de la banque UBS qu'elle « n'est quand même pas forcément la plus planquée des banques ». On peut imaginer que le compte n'était pas déclaré, si bien que ce premier argument ne tient pas.

Le deuxième est que vous ne vouliez pas rendre cette information publique. Cependant, si vous aviez saisi le procureur au titre de l'article 40, compte tenu des éléments importants dont vous disposiez, cela aurait certes pu entraîner une enquête, mais votre démarche n'aurait pas été connue du grand public.

Je comprends que vous n'ayez pas souhaité emprunter la première voie – le recours aux médias –, mais je ne vois pas pourquoi vous n'avez pas eu recours à l'article 40, surtout à partir du moment où vous avez constaté que votre démarche auprès de l'administration fiscale n'avait rien donné.

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Michel Gonelle

Il me semble l'avoir déjà dit : je n'ai pas eu recours à l'article 40, c'est un fait. Vous n'avez pas eu la chance d'avoir, comme moi, un homme tel que Jérôme Cahuzac comme adversaire. C'est un adversaire particulier.

Lorsque mes colistiers ont fait une très légère allusion aux subventions données par les laboratoires pharmaceutiques aux associations sportives de la ville en période préélectorale,– d'une certaine façon, cela constituait un financement illégal, dans la mesure où les entreprises concernées, en remettant devant la presse des images de chèques en grand format, contribuaient à valoriser l'action du député –, la réponse de M. Cahuzac a été cinglante : « puisque nous sommes traités de corrupteurs, il n'y aura désormais plus aucune subvention de la part des laboratoires. Si les clubs sportifs ne sont plus aidés financièrement, ce sera de la faute des conseillers municipaux d'opposition ».

Jérôme Cahuzac n'est pas un adversaire comme les autres. Au moindre pas de travers, il sait répliquer. Je n'ai donc pas trouvé opportun de m'acharner pour obtenir une enquête de la part de services qui, manifestement, ne voulaient pas enquêter. Je ne suis pas sûr que le procureur de la République eût fait mieux que la Direction nationale des enquêtes fiscales. Dois-je présenter des excuses ? S'il le faut, je le ferai volontiers. Mais il n'est pas dans mon tempérament de poursuivre quelqu'un inlassablement. J'ai fait ce qu'il fallait en lançant une alerte au moment où il le fallait.

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Pourquoi, alors, avoir cherché à contacter l'Élysée en novembre 2012 ?

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Michel Gonelle

Mais en 2012, tout le monde m'est tombé dessus !

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Pardonnez-moi d'insister, mais je suis de l'avis de mes collègues. Vous avez dit tout à l'heure que vous aviez tout de suite compris le caractère sensible et choquant de cet enregistrement, ce qui vous a conduit à le conserver. D'ailleurs, vous affirmez que vous n'avez pas voulu vous acharner, mais vous avez tout de même gardé ce document plus de dix ans.

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Michel Gonelle

Je ne l'ai pas détruit, en effet.

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Parmi les trois voies qui s'offraient à vous, vous avez choisi de confier à un de vos intimes, un fonctionnaire des impôts en qui vous aviez confiance, le soin d'informer le service compétent, à savoir l'antenne bordelaise de la DNEF. Savez-vous quelle forme a pris cette alerte ? Existe-t-il une lettre, un dossier ?

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Michel Gonelle

Tout cela figure dans l'enquête judiciaire.

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En dehors de cette initiative de 2001, vous en avez pris une autre en 2006, avec le juge Bruguière.

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Vous avez dit que la campagne électorale n'était pas un moment propice pour dévoiler cette affaire. Mais après les élections, qui ont conduit à la victoire de Jérôme Cahuzac, et malgré le silence de l'administration, vous ne tentez rien. En 2002, M. Cahuzac perd l'élection législative, mais vous ne cherchez pas à relancer la procédure. Il en est de même lorsqu'il est nommé président de la Commission des finances, quand il fait partie de l'équipe de campagne du candidat François Hollande, et enfin quand il devient ministre. Tout cela est troublant.

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Michel Gonelle

Je n'ai pas été un accusateur assez zélé, selon vous.

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Je trouve ce comportement incompatible avec le fait de garder cet enregistrement pendant plus de dix ans.

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Michel Gonelle

Je n'ai exercé de mandat que jusqu'en 2004, date à laquelle je suis sorti de la vie publique. Je ne pense pas à Jérôme Cahuzac matin, midi et soir. Je vous livre ces faits sous serment : c'est la vérité, il n'y en a pas d'autre.

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Vous n'avez plus l'enregistrement à votre disposition ?

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Je souhaite en revenir à l'objectif de notre commission d'enquête, déterminer si l'appareil d'État était informé de cette affaire.

Vous avez dit à Mme Dalloz qu'elle n'avait pas eu la chance d'avoir un adversaire tel que Jérôme Cahuzac. De même, beaucoup d'entre nous n'avons pas eu la chance d'avoir un opposant tel que vous : bien que disposant d'un tel document, vous n'en faites usage à aucun moment, ni pendant, ni après la campagne électorale. On peut porter à votre crédit de n'avoir pas voulu faire preuve d'acharnement à l'égard de M. Cahuzac.

Vous avez dit plusieurs fois, à propos de ce dernier, qu'il était un adversaire particulier. N'avez-vous pas eu peur de lui, de ses réseaux, de ses relations et de sa façon de faire de la politique ? Les chèques remis aux associations sportives constituent en effet une pratique étonnante, mais ils ne suffisent pas à expliquer ce qualificatif, « particulier ». Avez-vous d'autres exemples en tête, qui nous permettraient de comprendre pourquoi vous n'avez pas, même après la campagne électorale, fait un choix qui vous aurait permis d'assouvir une petite vengeance tout en servant le pays et l'intérêt général ? Qu'est-ce qu'un « candidat particulier » ?

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Plus généralement, quelle était la nature de vos relations avec M. Cahuzac ?

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Michel Gonelle

Sur ce point également, beaucoup de bêtises ont été publiées dans la presse.

M. Jérôme Cahuzac est arrivé à la fin de l'année 1996 dans le Villeneuvois, parrainé par le maire de Marmande, Gérard Gouzes, comme lui d'origine rocardienne. Or on a dit – et même écrit – que j'avais favorisé son installation à Villeneuve-sur-Lot. Cependant, lorsqu'il s'est présenté aux législatives en 1997, j'étais moi-même candidat indépendant. Le député UDF sortant, Daniel Soulage, élu cinq ans auparavant avait obtenu le soutien de l'UDF comme du RPR. Je n'avais donc pas l'investiture de mon parti. Néanmoins, la majorité de mon conseil municipal a estimé que le maire de la ville chef-lieu devait être candidat, et j'ai accepté de me lancer, avec tous les inconvénients liés à l'absence d'investiture.

J'ai obtenu 15 % des voix au premier tour. Le soir même, j'ai rédigé le texte annonçant mon désistement en faveur de Daniel Soulage, qui a été publié dès le lendemain matin. D'ailleurs, les mêmes qui aujourd'hui m'accusent d'avoir été un soutien de Cahuzac me reprochaient à l'époque de me désister trop vite.

Par la suite, ayant appris que François Bayrou venait à Villeneuve-sur-Lot soutenir le député sortant, j'ai fait savoir à M. Soulage que je les recevrais volontiers à la mairie. J'ai accueilli M. Bayrou conformément à son statut d'homme politique de premier plan, en compagnie du candidat, de son suppléant et de mes colistiers.

De même, au cours de la semaine précédant le deuxième tour, nous avons multiplié les démarches en faveur de Daniel Soulage, au point que ce dernier a obtenu dans la commune de Villeneuve le même résultat, soit 53 %, que celui dont il a bénéficié dans son fief politique, le canton de Monflanquin. Cela signifie que l'affirmation, rapportée par Le Nouvel Observateur et Le Point, selon laquelle j'aurais favorisé l'arrivée de Jérôme Cahuzac à Villeneuve-sur-Lot, est une fable. Ce mensonge a été inventé par l'un de mes anciens adjoints, qui m'a d'ailleurs quitté en 2001 pour présenter une liste contre moi. Je rappelle que M. Cahuzac a été élu maire dans le cadre d'une triangulaire, avec 42 % des voix.

Telles étaient mes relations avec Jérôme Cahuzac. J'étais un adversaire courtois, et non pas un adversaire tordu.

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En d'autres termes, les affirmations publiées dans la presse pour illustrer la complexité de vos relations sont inexactes.

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Michel Gonelle

C'est ce que montrent les faits que je viens de vous rapporter.

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D'après ce que nous ont dit ce matin Edwy Plenel et Fabrice Arfi, vous auriez utilisé, à Agen, l'appareil d'un policier que vous connaissiez pour tenter de contacter M. Plenel, à qui vous avez demandé de vous rappeler. Plus tard, le commissariat en a informé le directeur de cabinet du préfet du Lot-et-Garonne, lequel a prévenu la chef de cabinet du ministère du budget, elle-même indiquant dans un courrier électronique destiné à M. Cahuzac qu'elle attendait d'autres informations de la part du directeur départemental de la sécurité publique. Cela reviendrait à dire que les services du ministère de l'intérieur étaient informés.

Décidément, vous n'avez pas beaucoup de chance avec les téléphones. Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez été conduit à utiliser celui d'un policier pour appeler M. Plenel ?

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Michel Gonelle

Il s'agit d'un incident assez anecdotique, qui s'est produit le 11 décembre, à un moment où, harcelé par la presse écrite et audiovisuelle – aux sollicitations de laquelle je n'ai jamais refusé de répondre –, je devais consacrer une part déraisonnable de mon temps au téléphone. Je me trouvais en audience au tribunal correctionnel d'Agen quand j'ai reçu un message de Mediapart – c'était le premier contact que j'avais avec ce journal – me demandant de rappeler. Comme la batterie de mon téléphone était déchargée, j'ai demandé au chef d'escorte présent sur place, que je connais depuis longtemps, de me prêter le sien. J'ai tenté à deux reprises de contacter mon interlocuteur à Mediapart, tombant à chaque fois sur le répondeur, avant de renoncer et de rendre l'appareil à son propriétaire. Par la suite, le policier – d'après ce que l'on m'a raconté – a reçu un appel depuis le numéro que j'avais appelé. Apprenant qu'il s'agissait d'Edwy Plenel et de Mediapart, et craignant sans doute des ennuis, il a décidé de rédiger un rapport succinct à l'intention de son chef de service. Ce dernier, semble-t-il, a jugé préférable d'en avertir le préfet, qui lui-même a dû estimer nécessaire d'en référer au ministre du budget.

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Michel Gonelle

C'est ainsi que l'information est parvenue à Mme Valente, qui l'a transmise dans un courrier à Jérôme Cahuzac.

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Une dernière question : pouvez-vous confirmer que M. Zabulon ne vous a jamais rappelé et qu'il ne vous a pas conseillé de saisir la justice ?

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Michel Gonelle

J'ai oublié de préciser tout à l'heure que M. Zabulon m'avait demandé si je détenais encore l'enregistrement. Je lui ai répondu que c'était le cas. À la fin de la conversation, il m'a dit : « Ne faites rien. Attendez que je vous rappelle. » Je suis resté sur cette injonction. Par la suite, il a tenté de me rappeler, mais je ne l'ai jamais eu en ligne.

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Merci pour ces explications : peu à peu, nous comprenons mieux le déroulement des faits.

Quelles ont été vos relations avec Mediapart depuis le 4 décembre ? Quand avez-vous été contacté, et quels ont été vos échanges ? Ce matin, les journalistes nous ont donné un certain nombre d'éléments, et j'aimerais croiser les agendas.

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Michel Gonelle

Notre premier contact a eu lieu le 11 décembre, dans les circonstances un peu cocasses que je viens de décrire. L'enquêteur de Mediapart et son patron ont demandé à me rencontrer, et nous nous sommes vus le vendredi 14 décembre à Paris, dans mon hôtel. Ils souhaitaient que je me dévoile. Je leur ai répondu que je n'avais pas l'intention de le faire de la façon à laquelle ils pensaient, sans leur préciser mon intention de m'adresser au Président de la République.

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Si redoutable que soit Jérôme Cahuzac, on a du mal à comprendre que vous soyez resté pendant dix années en possession d'un mini-CD contenant ce que vous considériez comme étant l'enregistrement de sa voix, et que vous n'ayez pas fait le choix, sur ce sujet sensible, de saisir la justice, le gouvernement ou le président de la République alors en fonction. Quel espoir placiez-vous dans la démarche que vous avez effectuée auprès de M. Zabulon ?

Que vouliez-vous dire par « ce que j'ai fait ou fait faire » ? Pouvez-vous préciser ce que vous avez « fait faire » ?

Enfin, où ont été conservés les enregistrements pendant toute cette période ?

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Michel Gonelle

En contactant Alain Zabulon, j'espérais qu'il pourrait remettre en mains propres au Président de la République la lettre que je lui destinais. Tel était mon but.

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Beaucoup de nos collègues ont du mal à comprendre que vous ayez conservé une preuve matérielle aussi longtemps. Si vous aviez pensé qu'elle n'avait pas de valeur, vous auriez pu la détruire, mais vous nous avez justement dit, à l'inverse, que vous étiez sûr de l'identité de la personne enregistrée.

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Michel Gonelle

Monsieur le président, a-t-on le droit de se montrer impertinent devant votre commission ?

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Michel Gonelle

L'enregistrement a été diffusé par Mediapart le 4 décembre. À ce moment, la quasi-unanimité de la classe politique – et dans tous les groupes – a pris la défense de Jérôme Cahuzac. Ceux qui étaient mis en accusation dans la presse, c'était plutôt – dans cet ordre – les journalistes de Mediapart, l'inspecteur Rémy Garnier et votre serviteur. Nous avons dû subir au quotidien des pressions, des insultes et des quolibets. Un journaliste travaillant pour un hebdomadaire paraissant le dimanche m'a ainsi – littéralement – donné un nom d'oiseau et m'en rendra raison : l'action en diffamation que j'ai intentée sera examinée demain.

Peut-être n'avais-je pas été un procureur suffisamment zélé, mais après la diffusion de l'enregistrement, j'ai été soumis à une pression invraisemblable. Et j'ai ressenti une grande colère à l'égard des élus et de la presse qui, influencés par une agence de communication fort habile, ont pris fait et cause pour quelqu'un que je savais être un fraudeur. Je peux admettre que l'on me reproche de n'avoir pas agi assez vite, mais n'oublions pas que lorsque Mediapart a porté son accusation, tout le monde, ou presque, s'est placé du côté de la défense.

Si j'ai parlé de ce que j'ai fait ou fait faire, c'est parce que je n'ai pas personnellement rencontré le responsable de la DNEF qui était en poste à Bordeaux lors de la première alerte, M. Mangier ; c'est l'inspecteur des impôts dont j'ai déjà parlé qui l'a fait avec mon accord.

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M. Mangier était le directeur régional des services fiscaux ?

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Michel Gonelle

Je l'ignore, mais c'était la personne idoine.

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L'intermédiaire dont vous ne voulez pas révéler l'identité a-t-il fait écouter l'enregistrement à M. Mangier ?

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Michel Gonelle

Non, car il ne l'a jamais eu en sa possession.

Vous m'avez demandé où était conservé cet enregistrement. Il n'a jamais été confié à un notaire – c'est une fable ridicule –, mais était tout simplement rangé dans un tiroir, dans mon cabinet d'avocat. D'ailleurs, lors de la révélation de l'affaire, le 4 décembre, lorsque j'ai recherché l'exemplaire resté en ma possession, j'ai mis trois jours à le trouver.

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Vous avez déclaré ne plus faire partie de la vie publique depuis 2004. Mais vous avez reçu en 2006 M. Bruguière, à qui vous avez donné un élément qui pouvait se révéler très important pour sa future campagne. À mes yeux, cela revient à participer à la vie publique.

J'ai par ailleurs du mal à comprendre qu'au moment de la révélation de l'existence de l'enregistrement, le 4 décembre, vous n'ayez pas souhaité crier la vérité que vous déteniez depuis dix ans, afin de vous dégager de cette affaire, ni porter une lettre au procureur de la République.

Je répète la question de mon collègue Thévenoud : qu'attendiez-vous du Président de la République ? Ce n'était, à l'évidence, pas lui que vous deviez approcher, mais plutôt le procureur.

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Michel Gonelle

Je ne suis pas de votre avis sur ce dernier point.

Quant à votre première question, madame la députée, je considère que participer à la vie publique, c'est être élu. Or je n'exerçais plus aucun mandat après 2004. Jean-Louis Bruguière a souhaité me rencontrer pour recueillir mon avis de citoyen disposant d'une influence. En outre, la remise de l'enregistrement n'était pas une démarche totalement volontaire de ma part : M. Bruguière avait manifesté avec insistance le désir de l'entendre, et il m'a demandé de le lui remettre en me promettant qu'il le rendrait. Il n'était pas question d'une publication. Et après tout, Jean-Louis Bruguière n'était pas un candidat comme les autres : premier vice-président du tribunal de grande instance de Paris, le premier de France, c'était un haut magistrat, doté d'une réputation importante au Palais de justice. J'ai donc pensé pouvoir placer en lui ma confiance même si ce n'était pas le procureur de la République d'Agen.

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Dans une interview du 3 avril, vous indiquez que l'administration des douanes aurait eu connaissance dès 2008 de l'existence du compte à l'étranger de Jérôme Cahuzac. Comment le saviez-vous ?

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Michel Gonelle

En réalité, il y a une erreur dans la transcription de mes propos, car cette administration le savait bien avant 2008. J'ai entendu dire par plusieurs sources journalistiques concordantes que le service compétent des douanes, le chef du 4ème bureau de la Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières - une des divisions de la DNRED - avait obtenu ce renseignement dès 2001, même si j'ignore de quelle façon. Selon mes informations, dont j'ai tout lieu de penser qu'elles sont sérieuses, ce cadre de haut niveau, administrateur civil d'origine, a été interrogé par plusieurs journalistes sur ce fait, sans jamais le démentir ni le confirmer.

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Beaucoup d'entre nous sont troublés par votre témoignage. En 2001, vous ne vouliez pas utiliser cette information contre un adversaire politique, mais c'est pourtant ce que vous avez fait lors de l'élection suivante, sans être capable de nous expliquer ce qui vous a fait changer d'avis. M. Bruguière était un candidat potentiel face à M. Cahuzac. Nous ne comprenons toujours pas, alors que cette audition dure depuis une heure et demie, pourquoi vous n'avez pas transmis les informations que vous déteniez, soit au titre de l'article 40 du code de procédure civile, soit en saisissant formellement, en votre nom, l'administration fiscale. C'était votre devoir de maire et de citoyen. Or, vous n'avez pas donné d'explication convaincante.

Ce qui me trouble également, c'est le luxe de détails dans lequel vous entrez sur certains points de votre témoignage, comme lorsque vous évoquez vos contacts avec M. Zabulon ou le devenir de l'enregistrement. Vous avez d'abord dit que le support était une petite disquette, et que vous ne pouviez pas le faire écouter à M. Bruguière parce qu'il fallait une grande disquette ; puis qu'il existait deux disquettes identiques ; enfin, que vous aviez la disquette sous la main, dans votre tiroir, mais que vous avez mis trois jours à la trouver…

Pouvez-vous nous redire précisément comment vous avez transféré l'enregistrement de votre téléphone portable vers une disquette, puis comment vous êtes passé de ce support, que je comprends être une petite disquette, vers une plus grande disquette destinée à M. Bruguière. C'est le premier point troublant.

Par ailleurs, il ressort de vos propos que vous avez une grande proximité avec des agents du fisc : vous êtes l'avocat de l'un d'entre eux, un autre est un de vos amis très proches, à qui vous demandez de transmettre à Bordeaux les informations dont vous disposez. Par la suite, vous obtenez, en retour, des informations – qui relèvent pourtant du secret fiscal – sur les suites données à cette démarche. De même, vous avez apparemment des relations très proches avec des agents des douanes qui, dès 2001, vous confirment l'existence du compte en banque. Pouvez-vous nous expliquer cette grande proximité avec des agents de l'État, qui vous permet d'obtenir en permanence des informations que vous êtes apparemment le seul à connaître sur Jérôme Cahuzac ?

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Michel Gonelle

Monsieur le député, il n'y a pas de trouble dans mon esprit. La police judiciaire a entendu le technicien qui a sauvegardé l'enregistrement : ce dernier a fabriqué deux minidisques identiques que j'ai conservés. J'en ai remis plus tard un exemplaire à Jean-Louis Bruguière – qui, du reste, ne s'en est pas servi plus que moi.

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Michel Gonelle

M. Bruguière n'a pas non plus saisi le procureur de la République en vertu de l'article 40 ! Il a même dit qu'il avait détruit l'enregistrement !

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Les membres de la commission d'enquête se demandent comment les journalistes de Mediapart ont obtenu l'enregistrement. Ces derniers nous ont confirmé ce matin que ce n'était pas vous qui le leur aviez remis. Or il n'existait que deux exemplaires.

Ce matin, M. Plenel et M. Arfi n'ont pas voulu révéler par quel moyen ils ont obtenu l'enregistrement. En tant que journalistes, ils ne sont pas obligés de révéler leurs sources. C'est sans doute en auditionnant M. Bruguière que nous saurons ce qu'il a fait de son exemplaire. Sur ce point, nous ne pouvons que formuler des hypothèses.

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Comment l'enregistrement a-t-il été transféré depuis votre téléphone ? Y a-t-il eu, dès le départ, deux copies de faites, et pourquoi ? Comment se fait-il qu'il ait fallu trois jours pour retrouver un support qui se trouvait dans un tiroir, à portée de main ?

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Michel Gonelle

Il s'est écoulé six années entre ma rencontre avec M. Bruguière et la révélation de l'affaire par Mediapart. En 2006, les deux disquettes se trouvaient, ensemble, dans un tiroir de mon bureau. J'en ai remis une à Jean-Louis Bruguière, qui ne me l'a pas rendue. En 2012, l'exemplaire restant ne se trouvait pas au même endroit, ce qui est assez banal.

Puis-je me montrer encore impertinent, monsieur le président ?

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Vous êtes un homme libre : cette commission ne vous demande que de dire la vérité.

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Michel Gonelle

Je croyais que cette commission avait pour but de pointer les dysfonctionnements de l'État.

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Michel Gonelle

Si je suis en accusation, dites-le moi ! J'ai l'habitude de faire face.

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Pas du tout, monsieur Gonelle. Mais les nombreuses relations que vous entretenez avec des fonctionnaires s'inscrivent pleinement dans le cadre de cette commission d'enquête.

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Michel Gonelle

Je ne vous ferai pas l'injure de penser que vous-même n'avez pas d'excellentes relations avec de nombreux fonctionnaires des impôts. Cela fait partie de votre mission.

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Vous êtes élu de la région parisienne, monsieur Germain. En province, nous n'avons pas le même type de relations avec les agents de l'État que dans une grande agglomération.

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Mais tout le monde applique l'article 40 quand il doit le faire.

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Pour ma part, monsieur Gonelle, je vous remercie pour la clarté de votre exposé, la cohérence de vos réponses, mais aussi pour la patience dont vous faites preuve en répondant avec constance à des questions déjà posées plusieurs fois.

Selon vous, M. Cahuzac pouvait-il se douter que vous déteniez cet enregistrement, ou du moins une information à propos de son compte en Suisse ? Il s'est en effet passé beaucoup de temps avant la révélation de l'affaire par Mediapart, et plusieurs personnes étaient dans la confidence, même si elles n'étaient pas nombreuses.

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Michel Gonelle

Merci pour votre amabilité, Monsieur le bâtonnier. Non, M. Cahuzac ne l'a jamais su. Nous n'en avons jamais parlé, bien que nous ayons continué à dialoguer après que j'ai quitté la vie publique. Mon dernier entretien avec Jérôme Cahuzac a eu lieu dans le cadre de la préparation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, c'est-à-dire en octobre 2012. Mais nous n'avons jamais abordé cette question qui, pour moi, était un peu enfouie dans les mauvais souvenirs de ma vie publique.

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Je suppose, monsieur le président, que notre commission entendra également M. Bruguière ?

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Nous le souhaitons tous les deux, le rapporteur et moi.

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C'est la commission dans son ensemble qui décide des auditions.

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Si tout le monde en est d'accord, nous recevrons donc M. Bruguière.

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Il faudrait également convoquer M. Mangier.

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Michel Gonelle

C'est impossible, car il est décédé. Mais les enquêteurs ont interrogé son entourage.

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L'objet de cette commission d'enquête concerne en effet le fonctionnement de l'État. Elle se demande qui savait et, le cas échéant, pourquoi ceux qui savaient n'ont pas agi.

Mediapart, entre autres, confirme que vous avez remis à la police la copie de l'enregistrement le mercredi 16 janvier 2013.

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Ce qui nous intéresse tous, c'est ce qui s'est passé pendant les années antérieures. En 2001, vous étiez celui qui savait. Au printemps 2001, Jérôme Cahuzac vous bat aux élections municipales : cela ne peut que laisser amer, d'autant qu'il poursuit son ascension et s'installe durablement dans ses fonctions municipales.

Vous saisissez indirectement l'administration fiscale, sans savoir ce qui en résulte. Puis il ne se passe plus rien. Vous vous éloignez ensuite de la vie politique en 2004. Nous avons beaucoup de peine à comprendre qu'entre 2001 et 2004, vous n'ayez pas cherché à vous rapprocher de l'administration pour tenter de comprendre pourquoi votre initiative n'a pas eu de suites – même si la direction nationale n'avait pas voulu accéder à la demande de l'antenne régionale.

En 2006, un candidat se présente soudain à vous et vous lui donnez l'information que vous détenez, sans que cela conduise à l'interpellation des pouvoirs publics. Pendant ce temps, Jérôme Cahuzac continue à grimper les échelons, devient une des grandes voix de la commission des finances, puis son président, tout en exerçant des fonctions éminentes au sein du parti socialiste.

Pourquoi, à votre avis, M. Bruguière, candidat aux législatives, n'a-t-il pas fait connaître les éléments dont il disposait ? Vous me répondrez sans doute que c'est à lui qu'il faut poser la question. Mais pensez-vous raisonnablement qu'il ne les a pas transmis, soit à l'administration fiscale, soit à la justice, voire qu'il ne les a pas exploités politiquement ? Vous-même avez dit ne pas vouloir suivre cette voie compte tenu du contexte, mais M. Bruguière aurait-il eu les mêmes préventions ?

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Michel Gonelle

Vous devez lui poser la question. C'est à sa demande que je lui ai remis l'enregistrement, après lui avoir parlé de ce compte à l'étranger et des circonstances dans lesquelles ce document était entré en ma possession. Cela n'était pas un acte prémédité de ma part. Je suis un électeur comme les autres : le fait qu'il ait voulu me voir n'implique pas que j'étais dans l'action politique. Il a rencontré des dizaines de personnes dans le même but : savoir s'il avait des chances de remporter l'élection législative en 2007.

Peut-être n'aurais-je pas dû lui remettre ce document. Est-ce ce que vous voulez me faire dire ?

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Ce n'était pas le sens de ma question. Vous avez expliqué que vous ne souhaitiez pas aller au-delà d'une alerte destinée à l'administration fiscale. Cinq ans plus tard, vous informez quelqu'un d'autre, sans plus de résultats d'ailleurs.

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Nous poserons la question à M. Bruguière, puisque nous avons prévu de l'auditionner.

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Par ailleurs, ne vous paraît-il pas surprenant que pendant onze ans, alors que se succédaient tant de ministres du budget ou de l'intérieur, cette information n'ait jamais été rendue publique, alors même qu'elle était connue de plusieurs personnes ?

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Michel Gonelle

Il y a eu plusieurs alertes : celle de 2001, lancée à mon initiative, et celle de 2008, lorsque Rémy Garnier a rédigé – sans que je le sache à ce moment – une note sur ce sujet, pour laquelle il a été sanctionné. J'ai lu aujourd'hui dans Le Monde que la majorité actuelle souhaitait protéger les fonctionnaires « lanceurs d'alerte ». Elle a bien raison, car Garnier, après avoir signalé cette anomalie, a été sanctionné par sa hiérarchie. Enfin, je rappelle que le 4 décembre, lors de la diffusion de l'enregistrement, la majorité de la classe politique s'est placée du côté de Jérôme Cahuzac. Et voilà que l'on me reproche, aujourd'hui, de ne pas en avoir fait assez !

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Bien que faisant partie de la petite minorité qui ne l'a pas défendu, j'estime que tel n'est pas l'objet de nos débats. Nous gagnerions, mes chers collègues, à poser des questions plus ciblées.

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Pourquoi M. Gonelle, sachant que vous étiez auditionné par une commission d'enquête, pourquoi n'êtes vous pas venu avec la lettre qu'il souhaitait remettre au Président de la République ?

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Michel Gonelle

Je n'ai pas reçu officiellement la convocation à cette réunion On m'en a remis une copie tout à l'heure, et il est vrai qu'elle précise que l'on peut apporter des documents. Mais c'est la première fois que j'assiste à une commission d'enquête. Par conséquent, je n'ai rien apporté d'autres que quelques coupures de presse.

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L'important est que vous nous transmettiez cette lettre dès que possible.

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Vous êtes devenu en 2003 l'avocat de Rémy Garnier. Avez-vous évoqué l'affaire Cahuzac avec ce dernier ?

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Michel Gonelle

Non. Rémy Garnier connaissait déjà l'existence du compte en Suisse, et ce n'est pas moi qui la lui ai apprise. Mes relations avec lui sont couvertes par le secret professionnel, mais je peux vous préciser qu'il a gagné tous ses procès, sans exception.

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Je ne voudrais pas que notre commission d'enquête ne perde de vue son véritable objet : y a-t-il eu, ou non, dysfonctionnement de la part des autorités de l'État ou de l'administration ? Cependant, il est intéressant de constater que vous avez eu recours à cette dernière de manière oblique, voire détournée. À cet égard, nous sommes au coeur du sujet.

On a dit que vous n'aviez rien fait pendant dix ans. En réalité, vous avez fait deux choses. Tout d'abord, vous avez recours à un copain – pardonnez-moi l'expression –, qui se trouve être inspecteur des impôts, pour lui demander de faire remonter l'information et d'aller voir si Bercy ne veut pas transférer le dossier de M. Cahuzac. Ce n'est pas une saisine de l'administration fiscale ! Pour autant, celle-ci ne semble pas avoir de secrets pour vous, puisqu'elle vous laisse savoir que le dossier ne sera pas transféré à Bordeaux. C'est une première surprise.

Votre deuxième initiative est tout aussi oblique. Vous remettez un exemplaire de l'enregistrement à un haut magistrat, quelqu'un dont vous dites qu'il est peut-être encore plus important qu'un procureur. Une telle affirmation est stupéfiante dans la bouche d'un avocat, qui connaît pourtant bien le monde judiciaire. Vous avez reçu non un magistrat ès qualités, mais le candidat à une élection. Les bras m'en tombent !

Non seulement vous ne saisissez officiellement la justice à aucun moment, mais à aucun moment non plus vous ne saisissez officiellement l'administration. Mieux, comme l'a dit M. Germain, vous obtenez d'elle des informations que vous ne devriez pas connaître, car elles violent le secret fiscal, et plus généralement le secret professionnel auquel sont soumis les agents de l'État. Votre copain inspecteur des impôts n'était certainement pas autorisé à vous rendre compte de la façon dont l'information a suivi la voie hiérarchique jusqu'à Bercy. Je trouve tout cela stupéfiant.

Ma question est la suivante : ne pensez-vous pas, en tant qu'avocat, que les dysfonctionnements qui ont peut-être eu lieu au sommet de l'État ont commencé au bas de la chaîne, lorsque vous avez fait le choix de procédures détournées ? Ne voyez-vous pas une relation entre les deux ?

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Michel Gonelle

Vous avez rappelé en préambule que cette commission recherchait des dysfonctionnements au sein de l'État. Pour ma part, je n'ai pas la prétention d'incarner l'État. J'exerce une profession libérale, et je suis moi-même soumis au secret professionnel. Mon bâtonnier pourrait vous confirmer à cet égard que je n'ai jamais encouru le moindre reproche de la part de mon conseil de l'ordre.

Je ne vois pas l'intérêt de votre question. Vous instruisez mon procès, à votre aise ! Mais dans cette affaire, ce n'est pas moi, je pense, qui ai commis les actes les plus graves. Alors que nous parlons de fraude, de blanchiment de fraude, de mensonges proférés devant toute l'Assemblée nationale et devant le Président de la République, c'est moi que vous souhaitez mettre en accusation ?

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Nous parlons d'une fraude que vous n'avez pas dénoncée par les moyens appropriés qui étaient à votre portée.

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Michel Gonelle

Vous avez employé le mot « copain » : je récuse ce terme. Ce fonctionnaire des impôts, qui a une très bonne réputation, était en mesure de transmettre l'information à son collègue de Bordeaux. Tout cela est de la polémique !

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Restons-en là. Comme vous le savez tous, le droit français ne prévoit pas de sanction en cas de non-respect de l'article 40 du code de procédure pénale.

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Michel Gonelle

Quant à M. Bruguière, vous savez bien qu'il occupe un grade très élevé dans la hiérarchie judiciaire.

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Connaissez-vous le contenu du message que le journaliste de Mediapart – probablement Edwy Plenel – a laissé sur le portable que vous aviez emprunté au policier ? Je pose la question parce que je me demande ce qui a pu motiver son geste de rédiger un rapport à l'intention de sa hiérarchie.

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Michel Gonelle

Je n'en connais pas le contenu, ne l'ayant pas entendu. Je suppose que M. Plenel cherchait simplement à me joindre.

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Mais si ce dernier s'est contenté de s'identifier et de demander que vous le rappeliez, pourquoi le policier a-t-il éprouvé le besoin d'en référer à ses supérieurs ?

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Michel Gonelle

Je ne suis pas en mesure de vous répondre sur ce point.

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À plusieurs reprises, vous avez qualifié M. Cahuzac d'adversaire particulier, d'opposant redoutable. Lorsque vous déteniez cet enregistrement, avez-vous craint de le dévoiler ? Avez-vous subi des pressions ?

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Michel Gonelle

J'avais une crainte, en effet. À un point de l'enregistrement, on entend M. Cahuzac dire qu'il n'y a plus rien sur le compte. Ce détail a pesé sur ma décision. Beaucoup d'entre vous pensent que j'aurais dû agir de façon plus énergique, saisir le procureur, par exemple. Mais mettez-vous un instant à ma place : il s'agissait d'un compte ouvert à l'étranger, sur lequel il ne restait plus d'argent. J'étais dans l'embarras. Je craignais une action en retour contre moi, de surcroît dans un contexte de campagne électorale.

Ne me faites pas grief de n'avoir pas utilisé ce document dans la bataille électorale, selon ma conception, n'est pas le lieu de tels déballages. Elle est faite pour évoquer des idées, des projets, les positions politiques respectives des candidats.

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Je pense que mon collègue souhaite savoir si vous craigniez, en révélant ce document, des conséquences négatives pour vous-même ou vos affaires.

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Michel Gonelle

Une réplique de l'intéressé aurait pu entraîner des conséquences négatives, bien sûr.

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Michel Gonelle

uUne plainte en diffamation ou en dénonciation calomnieuse qui n'aurait rien eu d'agréable.

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Michel Gonelle

Non, rien de tel.

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Michel Gonelle

De même, je n'ai jamais subi de pressions de la part de qui que ce soit.

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Avez-vous eu peur d'une action de Jérôme Cahuzac après votre contact avec M. Zabulon et la publication, dans Le Monde, de cet article dont vous dites qu'il vous a blessé ?

Qu'est-ce qui explique, selon vous, le silence de M. Zabulon après cet échange, dans la mesure où vous nous avez dit partager avec lui une relation de confiance ? Comment interprétez-vous l'appréciation portée par l'entourage élyséen ?

Enfin, qu'attendiez-vous du Président de la République dans l'hypothèse où il aurait pris connaissance de votre lettre ?

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Michel Gonelle

Ma confiance envers M. Zabulon est intacte, mais à la place qu'il occupe, je sais qu'il est soumis à sa hiérarchie !

J'ai en effet été mortifié de la réponse apportée le mercredi par la présidence, tant elle n'était pas à la hauteur des circonstances. De fait, j'ai pensé que l'État était en train de dysfonctionner, et j'en ai été extrêmement déçu. Je l'ai été encore davantage quelques jours plus tard, le 19 décembre, lorsque j'ai lu dans le Journal du dimanche que la Suisse « blanchissait » Jérôme Cahuzac à la suite de la demande d'entraide administrative !

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Une nouvelle fois, à ce moment, vous refusez de vous adresser à la justice. Voilà ce qui m'étonne.

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Michel Gonelle

A cet égard, j'ai oublié un point important. Lorsque Le Monde a publié ce communiqué de la présidence de la République dans lequel on m'enjoignait, si je disposais d'éléments, de les transmettre à la justice, j'ai pris contact avec le juge Daïeff, chargé de l'enquête sur la banque UBS et l'évasion fiscale. L'ayant joint au téléphone, je lui ai demandé s'il voulait recueillir mon témoignage. On était à la veille de Noël. Il m'a répondu qu'il devait consulter le juge avec lequel il travaillait sur cette affaire, et qu'il reviendrait vers moi en janvier. Et c'est ce qu'il a fait, le 3 janvier. Il m'a dit : « mon collègue est d'accord pour vous entendre, mais vous devez nous envoyer une lettre pour proposer votre témoignage ». Je la lui ai envoyée le jour même. Mais le lendemain, le procureur ouvrait l'enquête préliminaire, et il n'a donc plus été question de témoigner.

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Pouvez-vous nous fournir une copie de cette lettre ? Le nom de M. Daïeff a en effet été abondamment cité lors de l'audition de ce matin.

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Michel Gonelle

Oui, d'autant que je l'ai avec moi. (M. Gonelle remet un document au président.)

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Je retiens de cette audition quatre informations très importantes.

Nous cherchons à savoir si l'État a connu des dysfonctionnements. Or, il se peut qu'il y en ait eu un premier dès 2001, quand vous avez informé l'administration fiscale. À l'époque, Laurent Fabius était ministre de l'économie et des finances, et Florence Parly secrétaire d'État chargée du budget. Pensez-vous que l'information soit remontée jusqu'à eux ?

Par ailleurs, nous avons désormais la certitude qu'à partir du 15 décembre, le Président de la République était au courant de toute cette affaire. Il ne s'agit donc plus seulement de l'affaire Cahuzac mais, de plus en plus, de l'affaire Hollande.

Autre information clé : vous avez dit que vous étiez certain de l'authenticité de l'enregistrement, car le même numéro de téléphone a été composé lors des deux messages successifs. Edwy Plenel avait-il la même certitude lorsque vous avez été en contact avec lui ? Est-ce pour vérifier ce point qu'il a cherché à vous joindre ?

Enfin, le 18 décembre, sur France Inter, Jérôme Cahuzac affirmait que la voix de l'enregistrement n'était pas la sienne. Pourquoi n'avez-vous pas réagi aussitôt à ce mensonge que vous auriez pu démonter facilement ?

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Michel Gonelle

En 2001, Florence Parly était en effet en charge du budget. Si la décision de refuser le transfert du dossier à la DNEF de Bordeaux existe, tous ces faits seront décortiqués par la police judiciaire et cela sera rendu public !

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Michel Gonelle

Quoi qu'il en soit, à l'époque, c'est bien Florence Parly qui se trouvait à l'autre bout de la chaîne.

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Voulez-vous dire que d'après vos informations, c'est la secrétaire d'État au budget qui a demandé le classement du dossier ?

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Michel Gonelle

Je ne sais pas. Mais d'un point de vue hiérarchique, elle se situait au sommet.

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Ce n'est pas la même chose ! De toute façon, nous auditionnerons les responsables de l'époque.

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Michel Gonelle

Il s'agissait tout de même d'un parlementaire. Je ne peux pas imaginer que l'on n'ait pas informé le cabinet du ministre.

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Dans ces conditions, il conviendrait d'auditionner tous les secrétaires d'État au budget, les ministres des finances et les présidents de la République qui se sont succédé depuis 2001 !

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Soyons rigoureux : nous devons entendre ceux qui étaient en charge en 2001 ou 2002.

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Michel Gonelle

Pour répondre à vos autres questions, lorsque j'ai rencontré M. Plenel – je ne l'avais jamais vu auparavant –, je n'ai pas eu le sentiment qu'il était animé par le doute, bien au contraire. Ce qu'il voulait, c'est que je me dévoile en tant que détenteur initial de l'enregistrement. Mais cela ne me plaisait pas beaucoup de me jeter en pâture à l'opinion publique – même si j'ai finalement été obligé de le faire.

Je note au passage – puisqu'il s'agit d'identifier les dysfonctionnements de l'État, que c'est la présidence de la République qui, avant tout le monde, a révélé mon appel, et donc le fait que j'étais le détenteur de l'enregistrement. Cela m'a étonné, car mon coup de fil n'était pas destiné à être rendu public. J'ai dû en assumer les conséquences comme j'ai pu.

Enfin, Jérôme Cahuzac a très souvent affirmé que la voix figurant dans l'enregistrement n'était pas la sienne. Si j'avais voulu contester toutes les déclarations de M. Cahuzac, j'y aurais passé tout mon temps. Il a même prétendu qu'il s'agissait d'un montage.

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Pouvez-vous nous confirmer qu'avant le 4 décembre 2012, date de la révélation de l'affaire par Mediapart, vous n'avez pas pris contact avec ses journalistes, ni fait part à des proches d'un souhait de les contacter ?

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Michel Gonelle

Non. J'avais beaucoup à faire, on me téléphonait sans arrêt. Je ne suis pas allé vers Mediapart, c'est Mediapart qui est venu vers moi.

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Ce matin, les représentants de Mediapart ont confirmé qu'il n'était pas leur source. Il nous reste donc une chose à éclaircir : qui leur a donné le deuxième exemplaire de l'enregistrement ?

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C'est en effet une des raisons pour lesquelles nous avons collégialement décidé d'auditionner le juge Bruguière. Mais dans l'immédiat, j'aimerais vous demander, monsieur Gonelle, qui, à votre connaissance, aurait pu avoir accès à cet enregistrement en dehors du juge. Pourrait-il s'agir de quelqu'un de son entourage ? Du technicien qui a procédé au transfert ?

Vous avez dit qu'après 2006 l'enregistrement n'était plus forcément dans le tiroir de votre bureau. Quelqu'un aurait-il pu y avoir accès à votre insu ?

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Michel Gonelle

C'est impossible, car le support ne comportait aucune étiquette, aucun signe distinctif. Personne ne pouvait savoir de quoi il s'agissait.

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C'est donc l'autre voie que nous devons explorer, quand nous auditionnerons le juge Bruguière.

Mes chers collègues, je vous félicite de votre implication, mais nous avons dépassé de plus d'une heure le temps prévu pour cette audition.

Merci, monsieur Gonelle, d'avoir longuement répondu à toutes nos questions.