La réunion

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Audition, ouverte à la presse, conjointe avec la commission des affaires européennes, de M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes, sur le Conseil européen des 24 et 25 octobre

La séance est ouverte à dix-sept heures

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Je remercie M. Thierry Repentin de venir s'exprimer, comme l'usage en a été établi, sur les conclusions du Conseil européen, qui s'est tenu la semaine dernière, les 24 et 25 octobre.

Ce Conseil européen était consacré à l'économie numérique et devait permettre de faire un point d'étape sur l'union économique et monétaire (UEM). Compte tenu des dernières révélations sur les écoutes américaines, il s'est toutefois ouvert sur une initiative franco-allemande pour obtenir des informations de la part des États-Unis sur les pratiques – jugées à juste titre choquantes – de leurs services, approuvée par tous les États membres. Une déclaration sur ce sujet a été annexée aux conclusions du Conseil. Des contacts bilatéraux avec les États-Unis devront permettre d'aboutir avant la fin de l'année à un accord de bonne conduite sur les questions de renseignements. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire quelle est la réaction de ce pays, quels États se joindraient à la France et à l'Allemagne pour avoir des contacts avec celui-ci – je m'interroge notamment sur la position du Royaume-Uni – et si la question des accords bilatéraux existants a été évoquée ?

S'agissant des sujets inscrits à l'ordre du jour, je commencerai par le point d'étape sur l'UEM. Je n'ai pas trouvé qu'il apporte grand-chose : il reporte d'ailleurs ce sujet à décembre, de même que la dimension sociale de l'Union – sur laquelle la Commission a déposé un rapport prévoyant notamment la création d'indicateurs sociaux. Le Conseil réaffirme cependant la volonté des États membres d'avancer rapidement sur la mise en place de l'union bancaire. Le mécanisme de supervision unique a été créé – le règlement ayant été approuvé – et on progresse bien sur les dispositifs nationaux de résolution, mais l'institution d'un mécanisme unique de résolution des crises mis en oeuvre par une autorité unique, sans lequel il n'y a pas d'union bancaire, fait encore l'objet de nombreux désaccords. Pouvez-vous nous faire le point sur l'état des discussions, notamment avec l'Allemagne, et nous dire ce qui se passerait si la Banque centrale européenne (BCE), en charge de la supervision, détectait dans ses tests de résistance un besoin de recapitalisation des banques ?

Enfin, je me réjouis des conclusions substantielles concernant l'économie numérique. C'est un potentiel de croissance et d'emplois formidable. Elles appellent à un approfondissement du marché intérieur et à ce que différentes dispositions soient prises pour réaliser des investissements. Qu'attendez-vous de concret sur ces investissements, la formation et l'innovation dans ce secteur ? Quels fonds y seraient consacrés, quels problèmes juridiques devra-t-on surmonter et quel est l'état des discussions sur la directive relative à la protection des données ?

Vous nous direz également quelles sont les positions de la France et de ses partenaires en matière d'immigration et d'asile après le drame de Lampedusa, pour que des initiatives plus substantielles soient prises, notamment sur l'asile, en juin 2014. Que peut-il se passer d'ici là ?

Enfin, beaucoup de sujets ont été reportés au prochain Conseil européen de décembre, qui va être très encombré : quelle place pensez-vous y réserver à l'Europe de la défense, qui j'espère ne sera pas occultée ?

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Merci, monsieur le ministre, de répondre à notre invitation pour ce « debriefing » traditionnel sur le Conseil européen.

La question des écoutes américaines et le drame de Lampedusa ont aussi beaucoup occupé les esprits lors de la réunion de la Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires (COSAC), qui vient de fêter sa cinquantième réunion en présence de notre ministre des affaires étrangères.

À la suite de la communication de la Commission européenne sur la dimension sociale de l'UEM, la question des indicateurs sociaux ainsi que celle de leur portée ont été évoquées par le Conseil européen, mais rien de précis n'en est sorti. Ces indicateurs ont-ils une portée réelle dans la prise en compte par la Commission de la situation des États membres et dans ses recommandations ?

Quand on voit le Portugal en train de plonger ou que la municipalité de Madrid veut faire payer 750 euros à des personnes mises à la rue parce qu'elles ne peuvent plus honorer leurs charges foncières, on se dit que l'Union européenne devrait s'interroger. Le Conseil s'est-il demandé si c'est en continuant à faire ainsi souffrir les citoyens que l'on rend l'Europe attractive ?

Plus largement, nous serions heureux que vous puissiez nous dire quelles sont les perspectives de renforcement de l'Europe sociale.

On a bien vu, lors des récentes élections en République tchèque, que les sociaux-démocrates se retrouvent avec une très courte majorité et que les deux partis politiques ayant profité de la situation sont populistes. Le Conseil réalise-t-il une étude sur cette montée des populismes ? Celui de décembre devrait avoir l'occasion de se pencher sur ce sujet, mais ne faut-il pas donner un espoir ?

Nous travaillons pour notre part sur ces questions avec la Commission des affaires sociales de notre assemblée et celle du Parlement européen. Peut-on espérer enfin des projets de salaires minimums avec des références européennes, même si les choix doivent ensuite être faits État par État ? Les dernières élections allemandes pourraient avoir des conséquences positives à cet égard.

S'agissant du développement économique durable et solidaire, on a beaucoup entendu parler de l'aspect économique. Peut-on espérer que les volets de l'union bancaire relatifs à la résolution des crises bancaires et aux garanties des dépôts fassent l'objet d'un accord opérationnel avant les élections européennes ? Que peut-on dire à cet égard de la position de notre partenaire allemand ?

Je ne reviendrai pas sur les excellentes questions posées par la Présidente Élisabeth Guigou sur la stratégie européenne en matière numérique, qui devait être au coeur de ce Conseil mais a été un peu marginalisée par des sujets d'actualité immédiate.

Par ailleurs, pouvez-vous nous dire où nous en sommes du Pacte de croissance et de la réorientation des moyens financiers disponibles au service du développement durable ? Au moment où nous recevons de nouveau des alertes au niveau international sur les risques liés au changement climatique, quelle sera la réponse de l'Europe, qui, après avoir été la bonne élève pendant des années dans ce domaine, semble aujourd'hui stagner ?

En outre, nous sommes un peu inquiets sur le devenir du projet de taxe sur les transactions financières. Pouvez-vous nous rassurer à cet égard sur la volonté des onze États qui se sont engagés à ce sujet ? Qu'en est-il de leur volonté de rester solidaires des pays du Sud ? On ne peut à la fois déplorer le drame de Lampedusa et diminuer sans cesse le budget destiné à aider ceux-ci. Les États européens me semblent avoir une position contradictoire à cet égard.

S'agissant de la politique européenne de l'immigration, après ce drame, qui fait suite à beaucoup d'autres – je rappelle qu'à Mayotte aussi, beaucoup d'immigrés essaient d'entrer sur notre territoire, dont certains se retrouvent au fond de l'océan –, le débat semble décevant ou décalé, et l'essentiel paraît avoir été reporté à plus tard.

Il y a sans doute une solidarité à trouver entre les États qui reçoivent beaucoup d'immigrés – dont le premier est l'Allemagne, la France étant en cinquième position – et les autres. Y a-t-il eu des échanges positifs entre les pays à cet égard ? La réforme de l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l'Union européenne (Frontex) et l'attribution du budget qui lui est nécessaire vont dans la bonne direction, mais cela reste insuffisant.

On n'interrompra pas l'immigration illégale tant qu'on ne s'attaquera pas plus efficacement aux trafiquants d'êtres humains et à ceux qui les commanditent ou en profitent. Un débat sur la création d'un parquet européen a beaucoup animé la COSAC. La France soutient ce projet. Comment peut-on espérer le voir avancer dans la prochaine période ?

Enfin, au cours de la COSAC, j'ai été heureuse d'entendre notre ministre des affaires étrangères soutenir clairement la mise en place – dans la logique du renforcement de la gouvernance économique européenne, dans la ligne de la Conférence budgétaire de l'article 13 – d'une structure parlementaire nouvelle réunissant les représentants des parlements nationaux. Ce sujet commence-t-il à être évoqué au Conseil ?

Je rappelle que, ce matin même, se réunissait le Forum des femmes de la COSAC : cela est, me semble-t-il, une première, que je tiens à saluer.

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Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires

Je suis heureux de venir vous rendre compte des décisions et orientations du dernier Conseil européen. À l'occasion de la séance des questions au Gouvernement de la semaine dernière, qui était réservée aux questions européennes, je vous avais indiqué les objectifs de notre pays, notamment pour une croissance solidaire et favorable à l'emploi. Nous espérons tous des premiers signes positifs dans ce domaine.

Aujourd'hui, je peux vous dire qu'à la suite de ce Conseil, de nouveaux pas ont été franchis, en posant notamment de nouveaux jalons dans le renforcement incontournable de l'union économique et monétaire, en promouvant l'investissement et en adoptant une stratégie globale dans le domaine du numérique.

Mais comme souvent lors de ces Conseils européens, l'agenda a été bousculé par des événements qui ont, une nouvelle fois, mis à l'épreuve la capacité de l'Union européenne à réagir.

Et il y a justement quelque chose de rassurant à voir cette capacité de l'Europe à répondre à l'urgence, dans un souci de solidarité et de protection des intérêts de nos concitoyens les plus précaires. Je pense bien entendu aux questions de politique d'immigration et de protection des données qui ont mis l'Europe à la « une », et ce, plutôt en tant qu'acteur d'un mauvais scénario.

Cette actualité nous montre à quel point le besoin d'Europe est plus que jamais pressant. Celle-ci, qui a été certes affaiblie par la crise, doit absolument relever la tête et assumer un statut de véritable puissance mondiale. C'est une nécessité pour pouvoir développer notre économie, protéger nos concitoyens et, en d'autres termes, répondre à leurs besoins, afin de faire en sorte que sa légitimité ne soit pas remise en question, notamment lors de l'échéance de mai prochain.

Trois objectifs ont été poursuivis à l'occasion de ce Conseil : être à la hauteur des défis qui se présentent dans un souci de protection et de solidarité ; investir pleinement le champ du numérique et de l'innovation ; et renforcer l'UEM, en y introduisant en particulier une dimension sociale.

D'abord, nous devons être à la hauteur des défis qui se présentent à nous, unis, dans un souci de protection et de solidarité.

Le Conseil européen est d'abord un organe de gouvernance politique, prêt à faire face à l'urgence des situations que connaissent les gouvernements comme les citoyens. C'est ce qu'a fait le couple franco-allemand sur l'affaire des écoutes de la NSA, qui s'est invitée à la table des négociations, comme la question des flux migratoires.

Au sujet de cette affaire et au vu de l'actualité plus que brûlante sur ce sujet, il allait de soi que l'Allemagne et la France devaient être à l'initiative du débat. Chaque fois que l'avenir de l'Europe est en jeu, le binôme franco-allemand est un moteur de l'action européenne. Ce fut le cas sur ce point comme sur les autres à l'ordre du jour, de même d'ailleurs que lors des précédents Conseils – je vous rappelle que c'était sur la base de la contribution franco-allemande du 30 mai dernier que le Conseil européen de juin a mis l'emploi des jeunes au coeur de ses priorités. La France et l'Allemagne avaient d'ailleurs convoqué leurs ambassadeurs des États-Unis respectifs pour s'expliquer et ces initiatives ont été suivies par d'autres États comme l'Espagne.

La découverte des écoutes par la NSA n'était pas sans donner une tonalité très particulière au point sur la protection des données numériques, qui a acquis une légitimité nouvelle, alors que certains cherchaient à banaliser le risque qu'encourent nos citoyens dans leur quotidien en termes de libertés individuelles.

Ce débat a abouti à une déclaration des chefs d'État et de gouvernement, qui ont tenu à rappeler que le partenariat que nous entretenons avec nos alliés américains était conditionné par la confiance – laquelle est grandement écornée –, y compris – je cite – « en ce qui concerne l'action et la coopération des services secrets ». S'il est légitime que nous puissions avoir des collaborations pour la défense de nos sécurités respectives, il est intolérable de mener des écoutes à des fins personnelles de chefs d'État, de gouvernements ou d'industriels. C'est la raison pour laquelle nous avons, comme l'Allemagne, l'intention de négocier un accord avec les États-Unis d'ici la fin de l'année sur les relations que nous entretenons avec eux dans ce domaine. L'Espagne a demandé à être associée aux négociations déjà engagées. Quant au Royaume-Uni, il n'a pas jugé nécessaire de s'exprimer sur cette question, considérant qu'il s'agit de pratiques assez normales. Mais il fait partie des quatre pays n'étant pas auscultés de près par la NSA, ce qui explique peut-être cela. Toutefois, cette position ne rebute pas les efforts d'autres pays de l'Union européenne pour protéger les libertés de leurs concitoyens.

Aussi avons-nous beaucoup insisté pour que les directives en cours d'élaboration – portant respectivement sur la cybersécurité et la protection des données – soient adoptées dans les meilleurs délais, soit fin 2014, sachant qu'il nous faudra un an de travail pour harmoniser les volontés et les différentes législations en vigueur dans les États.

L'autre rendez-vous auquel ce Conseil européen a répondu présent est celui de la politique d'immigration menée par l'Union européenne, mise à l'agenda à la demande écrite de la France et de l'Italie après les drames survenus au large de Malte et de l'île de Lampedusa.

Nous avons été là aussi entendus, même si nous aurions aimé aller plus loin. Le Conseil européen a en effet réclamé une réponse forte de l'Europe sur la base du triptyque « prévention, protection et solidarité » proposé par la France, que j'avais rappelé à la tribune de votre assemblée avant le Conseil européen.

Là encore, l'Europe est attendue sur des actes : des actes de protection comme de solidarité à l'égard des migrants et des pays qui se retrouvent en première ligne au sein de l'Union européenne.

Il s'agit de mener une action en deux temps. D'abord, répondre à l'urgence, car on ne peut laisser la Méditerranée devenir un cimetière à ciel ouvert. Puis s'attaquer aux causes profondes de ces mouvements migratoires désespérés, tant par le développement des pays d'origine que par la lutte contre les trafics abominables d'êtres humains.

À cet effet, une « task force » pour la Méditerranée a tenu une première réunion le 24 octobre à Bruxelles afin de définir des actions prioritaires et de faire des propositions pour utiliser de manière plus efficace les moyens existants.

La présidence du Conseil, quant à elle, rendra un rapport au Conseil européen de décembre prochain. Cela n'est pas allé de soi car si tout le monde est d'accord sur le terme de solidarité, chaque État a sa propre définition et cette solidarité s'estompe lorsqu'on s'éloigne du lieu où elle devrait s'exercer. Lors du Conseil des ministres préparant le Conseil européen, nous avons d'ailleurs eu du mal à trouver les voies et moyens pour agir ensemble de façon effective. Certains étaient tentés de renvoyer le sujet à la revue générale de notre politique d'immigration, au mieux dans un an. C'était inacceptable et nous ne l'avons pas accepté ! Des propositions seront faites de façon opérationnelle en décembre prochain et nous portons sur les fonts baptismaux l'idée d'une politique migratoire à l'échelle de l'Union européenne pour le Conseil de juin 2014, après le renouvellement des institutions.

Les États membres conduits à recevoir le nombre le plus élevé de migrants seront soutenus notamment par une aide financière spécifique, qui sera accrue pour contribuer au sauvetage de ceux-ci ou à leur premier accueil. La solidarité est aussi destinée aux pays tiers pour favoriser la recherche sur place de solutions durables et tend à accorder une attention renouvelée aux programmes de développement et de renforcement de la stabilité. La France privilégie, dans ce qu'on appelle la politique de voisinage, un ciblage des fonds européens sur les pays de la côte méditerranéenne, compte tenu de l'importante immigration provenant de cette zone. Mais il y a un débat au sein des 28 États membres, certains estimant que la priorité devrait être plutôt accordée au partenariat oriental, à l'égard des pays comme l'Ukraine, la Géorgie ou la Moldavie.

La prévention doit se faire dans les pays d'origine et de transit par des actions à la source des migrations et la préservation des réfugiés. Cela passe par une coopération avec le Haut commissariat pour les réfugiés et l'organisation internationale des migrations. Quant à la protection, elle implique une lutte renforcée contre la traite des êtres humains pour éviter de nouveaux drames tels que celui de Lampedusa. Il faut renforcer le système Frontex, dont le budget devra être abondé. Nous améliorerons également les coopérations judiciaires et policières, qui sont indispensables pour lutter contre les trafics et les passeurs.

Quant au numérique, qui était théoriquement le sujet majeur de ce Conseil, il était d'autant plus crucial de s'en saisir que, comme nous l'avions mentionné lors de notre dernière rencontre, l'enjeu est de taille pour l'avenir économique de l'Europe.

C'est un sujet qui parle aux nouvelles générations de façon très positive et touche autant le quotidien de nos concitoyens – de la recherche d'emploi à l'information, en passant par les loisirs – que la compétitivité de nos économies, puisqu'il représente un quart des emplois et de la croissance de notre pays.

Pas plus tard qu'hier, j'ai eu l'occasion de visiter plusieurs sites en Bretagne, qui est une des régions les plus en pointe dans l'Union européenne dans ce domaine : je pense que, dans les années qui viennent, plusieurs dizaines de milliers d'emplois s'y développeront. Il existe beaucoup de start-up créées par les Bretons qui, pour des raisons de maillage, se sont installées à San Francisco, dans la Silicon Valley notamment. J'en ai visité une qui avait 20 emplois au siège dans cette ville et 150 à Rennes, avec des perspectives de plusieurs milliers d'emplois. Or cette entreprise bénéficie notamment d'un accompagnement financier au travers des fonds structurels de l'Union européenne, qui lui permettent de développer des logiciels vendus dans le monde entier et d'être un des leaders de la diffusion sur les nouveaux supports numériques. Au-delà de l'action du Fonds européen de développement régional (FEDER), il est prévu une augmentation de 38 % sur la période 2014-2020 des fonds dédiés à la recherche et au développement. Dans le budget que le Parlement européen devrait adopter le mois prochain, 70 milliards d'euros seront en effet mobilisés à cette fin.

L'enjeu était d'obtenir un accord sur la nécessité de définir une réelle stratégie afin de développer les emplois du futur. Pour y parvenir, nous étions et restons mobilisés en vue de bâtir une politique industrielle numérique à l'échelle européenne et définir des règles du jeu équitables en matière fiscale entre les acteurs : les distorsions existant dans ce domaine entraînent une évasion fiscale inacceptable et certaines entreprises ne sont pas imposées à la hauteur du chiffre d'affaires qu'elles réalisent au-delà des frontières du pays où elles sont implantées. Il s'agit aussi de garantir la propriété intellectuelle pour soutenir les industries créatives et de protéger les données personnelles pour sécuriser l'environnement numérique de nos concitoyens comme de nos entreprises.

Sur l'ensemble de ces points, des jalons ont été posés. Les États membres se sont mis d'accord sur une stratégie globale articulant les attentes des consommateurs et la nécessité de renforcer l'offre européenne.

Nous nous sommes accordés sur la nécessité d'investir davantage sur des secteurs à la pointe de l'innovation, ce qui nous permettra de décrocher les marchés de demain : le stockage de masse (« big data ») et l'informatique en nuage (« cloud computing »). Il s'agit d'avancées essentielles car elles déterminent la sécurisation et les conditions de vente de nos données. Ce sont des questions de libertés publiques autant que de commerce.

La Commission devra également examiner la question du taux de TVA appliqué aux produits numériques, de manière qu'il y ait une TVA à taux réduit sur le livre numérique comme sur le livre physique.

Nous nous sommes aussi accordés pour que, à l'horizon 2015, sur les « majors », la TVA ne soit plus appliquée sur le chiffre d'affaires là où est implantée l'entreprise mais là où celui-ci est réalisé. Ainsi, Amazon s'est installée au Luxembourg pour bénéficier de son taux de TVA attractif : or la majorité de ses ventes se font en dehors de ce pays. À partir de 2015, la TVA sera applicable proportionnellement au chiffre d'affaires réalisé dans chacun des États. Il s'agit donc d'une décision positive pour lutter contre une concurrence à l'égard de cette taxe.

La constitution d'un groupe d'experts à haut niveau sur la fiscalité du numérique constitue également une avancée. Il y a encore quelques mois, ce sujet était tabou en Europe, notamment de la part des États qui avaient accueilli les « majors » dans ce domaine et ne voyaient pas pourquoi nous irions vers une harmonisation fiscale.

En outre, les droits d'auteurs et la protection des données ont été abordés, comme nous le souhaitions, en vue de leur modernisation et de garantir davantage les intérêts des utilisateurs.

Enfin, en ce qui concerne le renforcement de l'UEM, l'enjeu était de taille : les mesures prises permettent, au travers du parachèvement de l'union bancaire, de renforcer l'Union européenne. On a vu au cours de la crise combien il était important que nous ayons une zone euro réactive, dotée de moyens de décision rapides.

Nous avons, dans ce cadre, inséré, pour la première fois lors d'un Conseil de chefs d'État et de gouvernement, une dimension sociale. Cela s'est fait sur la base d'une communication de la Commission, à la demande du Conseil de juin dernier, à la suite du document du 30 mai signé par François Hollande et Angela Merkel, demandant de travailler sur cet aspect ignoré lors de la dernière décennie.

À partir du Conseil de décembre prochain, qui prendra des décisions dans ce domaine, devraient être intégrés au moins cinq indicateurs sociaux – reposant notamment sur les thématiques de l'emploi et de la formation – qui aideront à mieux comprendre la situation des pays membres de l'Union européenne, particulièrement ceux de la zone euro, à un moment où, lors du premier semestre européen, on va leur demander d'adopter des politiques économiques convergentes.

Le fait d'intégrer ces indicateurs va permettre d'assouplir ces politiques, car on ne peut demander le même effort en termes fiscal ou budgétaire aux pays connaissant des situations sociales différentes. Nous n'avions pas de répondant jusqu'ici de la part de la Commission européenne : je suis donc heureux que la France et l'Allemagne aient fait bouger les lignes et que de plus en plus de pays trouvent naturelle cette avancée.

Quant au salaire minimum, qui n'était pas à l'ordre du jour, il a fait l'objet, en marge du Conseil, de discussions entre plusieurs chefs d'État et de gouvernement, notamment des sept pays qui n'en disposent pas. Même si cela ne figure pas dans le compte rendu du Conseil, ces gouvernants sont beaucoup plus ouverts aujourd'hui. Le plus important de ces pays, l'Allemagne, a indiqué qu'il y aurait, non un SMIC comme nous le connaissons en France – car ce n'est pas la tradition de ce pays où le dialogue social permet des discussions par filières –, mais la mise en place d'un salaire minimum dans chacune d'elles, notamment dans l'agroalimentaire et les abattoirs. Ainsi, des travailleurs payés aujourd'hui un peu plus de 3 euros de l'heure dans ce secteur outre-Rhin pourraient recevoir le triple, ce qui rééquilibrerait la concurrence internationale. Les discussions menées par Mme Merkel pour avoir un nouveau gouvernement sans doute d'ici décembre avec un nouveau partenaire social-démocrate très ouvert sur cette question vont favoriser la mise en oeuvre de cette mesure.

Nous avons aussi insisté sur l'importance d'avancer sur la directive sur le détachement des travailleurs, même si elle n'était pas à l'ordre du jour, et pour que soit adoptée d'ici la fin de l'année l'importante directive sur les marchés publics et concessions, qui va nous donner des outils pour refuser, sur des bases juridiques fortes, des offres anormalement basses ou à bas coût mais ne respectant pas des critères salariaux ou environnementaux.

Madame la Présidente Élisabeth Guigou, le respect du calendrier récemment mis à jour par le Conseil européen sur l'union bancaire est vraiment crucial. Il y a eu des discussions très difficiles, certains pays, non des moindres, souhaitant reporter les engagements pris à l'occasion de plusieurs Conseils européens au cours de 2012 et 2013. Le mécanisme de supervision unique, qui est le premier pilier de l'union bancaire instauré auprès de la BCE, a été conçu pour surveiller le système bancaire des États membres volontaires de la zone euro et éviter que les errements du passé ne se reproduisent. L'idée générale est que cela coûte moins cher de prévenir que de guérir et que nous devons donc avoir une surveillance très poussée avec les mêmes critères par un organisme central, la BCE, à l'égard de toutes les banques importantes pour éviter de nouvelles banqueroutes.

Ce mécanisme entrera en vigueur cet automne grâce au vote intervenu le 15 octobre dernier au Conseil Ecofin et sa mise en oeuvre opérationnelle, au travers de règlements, est prévue un an plus tard, en novembre 2014. Entre-temps, nous allons voir de quelle manière la BCE exerce les mêmes contrôles vis-à-vis du réseau bancaire européen, qui est substantiellement différent d'un pays à l'autre.

La résolution des crises bancaires constitue le deuxième pilier de l'union bancaire. Le Conseil a appelé à l'adoption d'ici fin 2013 de la directive sur ce sujet : cela respecte totalement les engagements pris et permet d'harmoniser les systèmes nationaux de mise en faillite des banques. Mais nous devons aller plus loin en mettant en place le système de résolution unique car, une fois la faillite avérée, il faut être en mesure de recapitaliser. La Commission a présenté un texte à ce sujet en juillet dernier : la France l'a adopté, les négociations doivent avancer rapidement et le Conseil européen a également appelé à un accord sur ce sujet d'ici fin 2013 afin d'obtenir une adoption avant le terme de l'actuelle législature, c'est-à-dire en mai prochain – comme la France et l'Allemagne l'avaient réclamé dans la plateforme du 30 mai dernier.

Le Conseil a aussi demandé l'adoption d'ici la fin de l'année d'une directive sur le système de garantie des dépôts des épargnants. Ce système, adopté à l'échelle de l'Union européenne, assurera à nos concitoyens que leur épargne placée dans une banque en faillite sera préservée et garantira tous les dépôts jusqu'à hauteur de 100 000 euros – ce qui devrait couvrir une grande partie des épargnants.

Enfin, l'Eurogroupe de juin dernier est parvenu à un accord concernant la recapitalisation directe. Si une banque fait faillite, il faut un système organisé à l'échelle de l'Union européenne : il y aura dans un premier temps un fonds mutualisé de 60 milliards d'euros susceptible d'intervenir en cas de crash sur une banque pour qu'il n'y ait pas d'effet sur d'autres banques ou le pays concerné.

Certes, le Conseil de décembre reviendra pour acter des décisions opérationnelles sur l'UEM et l'union bancaire, mais le vrai sujet à l'ordre du jour sera la politique de sécurité et de défense commune (PSDC). Le Gouvernement défendra trois orientations. D'abord, le volet institutions et opérations, concernant des sujets emblématiques tels que la mise en oeuvre opérationnelle d'une stratégie européenne de sûreté maritime, l'élaboration de la surveillance des frontières, notamment au Sahel, et la mise en action des troupes sur le terrain, en particulier la question de la succession des troupes de la KFOR dans certains pays des Balkans – certains États demandant que l'Union européenne puisse venir chez eux au titre de la PSDC.

Deuxième orientation : les capacités militaires. Comment renforcer l'autonomie stratégique de l'Union avec des moyens militaires que nous devons aujourd'hui partager, faute de pouvoir les assumer seuls ? L'exemple le plus marquant est celui des avions ravitailleurs : lors de nos dernières interventions en Afrique, ceux d'autres pays ont été mobilisés et les trois États du Benelux se joignent par exemple pour acheter des A400M.

La troisième orientation porte sur l'industrie et les marchés. Il faut voir comment la Commission étudie les modalités d'un soutien aux PME ayant aujourd'hui des difficultés d'accès au marché de l'armement et soutenir des technologies où les industriels ont besoin d'être accompagnés. C'est le cas par exemple pour les drones.

Madame la Présidente Danielle Auroi, je vous invite à regarder de près le budget qui sera voté par le Parlement européen le mois prochain, car, dans les fonds structurels dont vous bénéficierez tous dans vos territoires, qui ont été préservés dans les arbitrages – 16 milliards d'euros sur la période 2014-2020, contre 14 milliards sur 2007-2013 –, il sera obligatoire de consacrer un pourcentage minimum d'entre eux à des actions de développement durable : au moins 12 %, 15 % ou 20 % selon que vous êtes respectivement dans une zone peu développée, en transition ou économiquement forte. Cette notion de développement durable couvre d'ailleurs beaucoup de sujets, dont notamment la régulation thermique des logements. Par ailleurs, ceux qui voudront y consacrer un pourcentage plus important y seront incités par les autorités françaises et communautaires.

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Le projet de réforme du cadre européen de protection des données personnelles avance difficilement : quelles initiatives la France va-t-elle prendre prioritairement en liaison avec ses partenaires dans les mois qui viennent pour se saisir de ce sujet ?

S'agissant du drame de Lampedusa, il y a eu le 25 octobre dernier une initiative des dirigeants parlementaires progressistes à Bruxelles – je me suis moi-même déplacée pour représenter mon groupe politique –, tendant également à lutter contre les réseaux mafieux grâce à une coopération en matière de développement et une gestion plus solidaire des frontières. Il a été demandé que les frontières des pays du sud de l'Europe soient celles de l'Europe.

Par ailleurs, lors d'une mission à laquelle j'ai participé avec notre collègue Charles de La Verpillière au nom de la Commission des affaires européennes en Grèce sur la question de l'asile, les représentants de Frontex nous ont exprimé leurs inquiétudes au sujet de leurs crédits pour cette partie de la Méditerranée. Comment la France entend-elle apporter son soutien et celui d'autres partenaires dans ce domaine ?

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Sur les flux migratoires et l'asile, il ne s'est pas passé grand-chose au Conseil en dehors d'une pétition de principe sur Lampedusa, ces questions étant repoussées au Conseil européen de juin 2014.

Mais nous avons actuellement en France un afflux de personnes en provenance de l'Albanie et du Kosovo. Le Préfet de région me dit que dans le Rhône, il en reçoit environ 400 par mois, ce qui pose des problèmes considérables. Jusqu'au mois de mars 2012, ces deux pays étaient classés sur la liste des pays « sûrs », mais un arrêt du Conseil d'État a considéré qu'il n'en était rien. Depuis, ces réfugiés bénéficient de conditions particulières pour le traitement de leurs demandes d'asile. Or la Belgique considère que ces pays sont des pays « sûrs », de même que la Suisse, l'Allemagne et l'Espagne. Comment peut-il y avoir une telle divergence d'appréciation au sein de l'Europe ?

On peut certes estimer que, le Conseil d'État ayant statué il y a plus d'un an et demi, la situation a peut-être changé depuis – sur le site Internet du ministère des affaires étrangères, le Kosovo et l'Albanie sont considérés comme des pays « sûrs » ou sans trop de difficulté. N'y a-t-il pas moyen de demander à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) de clarifier ce point ? Il est d'ailleurs curieux que dans certains pays ce soit l'exécutif qui décide alors que dans d'autres c'est le parlement : je croyais qu'il y avait une harmonisation européenne en la matière…

Y a-t-il une chance de faire évoluer la situation d'une façon plus rationnelle ?

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Il est nécessaire d'encadrer les flux migratoires. Le directeur-adjoint de Frontex dit, dans un article du « Monde » publié le 26 octobre, que ce sera difficile et plaide pour que les États définissent des voies légales permettant aux citoyens en détresse de fuir leur pays sans emprunter de route périlleuse. Il nous manque au niveau de l'Union européenne une véritable stratégie d'immigration. J'ai suivi les débats qui se sont déroulés aux États-Unis, qui ont fait état des mêmes observations, mais ce pays a ensuite mis en place une stratégie pour maîtriser les flux et accueilli, par exemple, une immigration africaine qui apporte un plus à l'économie américaine. Il en est de même au Canada.

En tant que co-rapporteur sur l'Europe de la défense, j'attire à cet égard votre attention sur la résolution que nous avons adoptée à l'unanimité de la Commission des affaires européennes et de la Commission de la défense nationale, qui comporte une vingtaine de propositions concrètes, y compris sur le financement des opérations extérieures (OPEX).

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C'est une excellente chose que le volet social ait fait partie des discussions, l'accès à l'emploi étant la première préoccupation des citoyens français et européens. L'emploi des jeunes est un sujet majeur : il est bon que l'Europe se mobilise à cet égard. La France s'est déjà largement engagée en mettant en place dès la fin de 2012 les emplois d'avenir et les contrats de génération ainsi que, ce mois-ci, la garantie jeunes. Quelle est l'évolution de la situation en matière d'insertion des jeunes dans les autres pays de l'Union européenne ?

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S'agissant de la directive sur le détachement des travailleurs, j'ai cru comprendre que les débats préparatoires au dernier Conseil européen n'avaient pas permis d'aboutir à une conclusion positive et que la réunion de la dernière chance aurait lieu avant le Conseil du 9 décembre. Comment la préparez-vous et comment percevez-vous la mise en oeuvre de la comitologie en la matière ?

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Les membres de l'Union européenne ont adopté dans la nuit de jeudi à vendredi une déclaration commune après les révélations sur l'espionnage américain, qui appelle au respect mutuel et soutient l'initiative franco-allemande pour des discussions avec les États-Unis. Herman Van Rompuy a commenté cette déclaration en précisant que « La France et l'Allemagne vont rechercher un contact bilatéral avec les États-Unis pour trouver un compromis d'ici la fin de l'année » sur l'encadrement du renseignement. Quel est votre sentiment face à cette initiative franco-germanique et à l'effacement de l'Union européenne qui, une fois de plus, semble ne pas parvenir à s'imposer comme l'interlocuteur principal vis-à-vis de ce pays ?

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Sur le volet de l'UEM, on peut être déçu car il n'y pas vraiment de contenu.

Le Président de la République avait annoncé lors d'une conférence de presse qu'il fallait avoir un président stable de la zone euro. Cette idée a-t-elle avancé ?

Par ailleurs, on peut déplorer, après le drame de Lampedusa, de renvoyer le problème à juin 2014, ce qui peut alimenter les déceptions à l'égard de l'Europe. On n'est pas à l'abri d'un nouveau drame de cette ampleur et je regrette beaucoup que sur le contrôle aux frontières, la solidarité et l'amélioration des conditions de vie dans les pays d'où viennent les migrants, il n'y ait pas eu beaucoup d'avancées. Il faudrait aussi qu'on réfléchisse à la réforme du système de Schengen, qui comporte des failles.

Enfin, sur la taxe sur les transactions financières, le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, a fait des déclarations très critiques sur le projet présenté par la Commission et la BEC a émis les mêmes réserves. Quelle est la position du Gouvernement sur ce texte ?

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Je vous informe que le Président de la République a annoncé que les otages français enlevés au Niger – Thierry Dol, Marc Féret, Daniel Larribe et Pierre Legrand – viennent d'être libérés.

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Sur l'UEM, j'ai été plutôt agréablement surpris par le résultat du Conseil. On sait les réticences de nos amis allemands dans ce domaine et, malgré cela, la perspective d'une recapitalisation des banques par le mécanisme européen de stabilité (MES) est confirmée, de même que la mise en place d'un mécanisme de résolution qui viendrait compléter celui de supervision – l'un ne pouvant aller sans l'autre. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur la manière dont les discussions se sont déroulées ? Les résistances ont-elles été fortes ou cette perspective d'union bancaire est-elle en train de s'imposer de façon plutôt consensuelle ?

Par ailleurs, il y a eu des éléments sur les questions des services et du commerce, qui intéressent directement la France : une volonté de faire une évaluation de la directive sur les services et le mandatement de la Commission sur les professions réglementées. Comment le Gouvernement compte-t-il aborder ces questions ?

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Sur l'économie et l'innovation, à première vue, je crains que les conclusions du Conseil ne se résument qu'à des déclarations d'intention puisque la seule échéance évoquée est celle d'une réunion du Conseil sur l'innovation et la recherche en février 2014. Quelles sont les échéances prévues notamment pour les questions numériques au sens large ?

En outre, en pleine affaire des écoutes américaines, le Conseil a décidé de reporter le règlement sur la protection des données à 2015, alors que ce sujet est en débat depuis plus de vingt mois à Bruxelles et que le Parlement et la commissaire européenne Viviane Reding militent depuis des mois pour conclure les discussions avant les élections européennes de mai prochain. Quelle était la position de la France concernant le calendrier et pourquoi en arrive-t-on une nouvelle fois à un tel report ?

Concernant le « cloud computing », le « big data » et « l'open data », le Conseil demande la constitution d'un réseau solide de coordinateurs nationaux en matière numérique : quelles sont les pistes pour mettre en oeuvre cette recommandation ?

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Je me réjouis des avancées enregistrées en matière d'union bancaire – qui n'étaient pas faciles –, ainsi que de l'insertion de la dimension sociale dans l'agenda, avec un paragraphe intéressant sur le dialogue social sectoriel – lequel avait été très fort à l'époque de Jacques Delors avant de péricliter au fur et à mesure que le libéralisme est devenu la seule doxa de la Commission. De fait, une partie du monde syndical et ouvrier se sentait totalement à l'écart de la construction européenne.

Je suis également heureux de l'annonce sur le salaire minimum, même si elle ne figure pas dans le compte rendu du Conseil. Nous avons réalisé un rapport d'information pour la Commission des affaires européennes, avec nos collègues Chantal Guittet et Michel Piron, dans lequel nous préconisions un salaire minimal de référence, pensant que des salaires minima universels seraient difficiles à mettre en place dans chaque pays : il constitue une des réponses à l'effet « passoire » de la directive sur le détachement des travailleurs, sans faire partie de la réforme en cours sur ce texte. La France doit en effet mettre d'autres solutions sur la table, la directive ayant des ambitions forcément limitées – ne serait-ce que parce que nous enregistrons beaucoup de détachements nous-mêmes et que nous devons avoir une capacité de négociation très parcimonieuse en la matière.

Je plaide aussi pour que l'on instaure au moins, pour commencer, une agence de contrôle du travail mobile en Europe au nom de la subsidiarité, nos administrations nationales n'étant pas capables de faire face.

Sur le renforcement de la politique économique et la coordination des politiques économiques, je regrette qu'il n'y ait pratiquement aucune nouvelle avancée, ni aucune perspective d'assouplissement de la politique monétaire. Or des articles importants ont récemment montré combien la politique monétaire de la Banque d'Angleterre était accommodante et combien nous étions encore dans un carcan. L'Allemagne a une position très fermée sur ce sujet, mais elle s'est beaucoup ouverte sous la pression des événements au cours de ces dernières années. On aurait peut-être intérêt à assouplir la politique monétaire et à donner à la Banque centrale la possibilité de faire ce qu'elle essaie de réaliser en catimini de façon beaucoup trop tardive.

Enfin, je me permets de vous alerter, monsieur le ministre, sur le fait que la question des services se manie comme de la nitroglycérine en période préélectorale. La Commission européenne est en train de nous expliquer qu'il faudrait évaluer la directive sur ce sujet, autrement appelée « Bolkestein », dont on se souvient les dégâts considérables qu'elle avait provoqués. Or il n'y a pas péril en la demeure, ni donc de raison de se hâter sur ce point.

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L'Union européenne dit que le numérique est un facteur de croissance. Sa seule vision étant la libre concurrence, parle-t-on de haut débit alors que des pays en sont déjà au très haut débit ? Y a-t-il des possibilités de financement au niveau européen et est-il prévu la mise en place d'infrastructures ?

Quant aux indicateurs sociaux, on en parle depuis longtemps, puisqu'en 2004 on en a déjà mis en place, et qu'on n'arrête pas d'en élaborer de nouveaux – lesquels, à ma connaissance, ne sont pas très efficaces, si ce n'est de permettre un meilleur suivi des grandes évolutions. Ne faudrait-il pas qu'ils aient une valeur contraignante à cette fin – à l'image de ceux existant pour le déficit public des États – et que les syndicats et les employeurs soient associés à leur conception ?

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Je me réjouis d'un langage nouveau dans les conclusions du Conseil : le terme de croissance est de retour de même que la dimension sociale, même si cela reste timide.

Les indicateurs sociaux sont en effet une avancée, mais quelle serait leur portée ? La Commission serait-elle par exemple tenue d'en tenir compte dans les recommandations qu'elle fait ? Il ne s'agit pas de pénaliser les pays connaissant une situation sociale dramatique, mais plutôt de les aider. Comment ces indicateurs pourront-ils constituer un véritable instrument pour que ces pays puissent retrouver un niveau social plus élevé ? Quel sera le calendrier retenu et pourront-ils entrer en vigueur dès 2014 ?

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Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires

S'agissant des flux migratoires, nous sommes confrontés à une situation ponctuellement particulière sur le Kosovo, liée effectivement au fait qu'à la suite d'une décision du Conseil d'État, ce pays est désormais classé dans la liste des pays « non sûrs ». Cela change substantiellement l'instruction des demandes d'asile, ce qui explique une augmentation de celles-ci en France et, dans une moindre mesure, en Allemagne. Pour les personnes issues d'un pays « sûr », l'instruction du dossier prend au maximum 8 semaines, contre 18 mois pour celles venant de pays « peu sûrs », c'est-à-dire ceux pour lesquels on a des doutes du point de vue démocratique.

Notre législation prévoit un accompagnement social des demandeurs d'asile. Nous ne souhaitons pas la remettre en cause, pas plus d'ailleurs que les gouvernements précédents. Mais cela crée un appétit plus marqué à l'égard de notre pays car les candidats à l'asile venant du Kosovo savent qu'ils passeront chez nous 14 à 18 mois, durant lesquels ils pourraient espérer trouver une activité et se fondre dans le paysage. Nous devons obtenir des solutions en liaison avec ce pays. Je m'y suis rendu pour voir le premier ministre et la personne chargée de l'intégration européenne pour que nous puissions prendre ensemble des dispositions en matière policière ; les autorités de sûreté de nos deux pays effectuent un travail plus efficace puisque nous avons démantelé au cours des derniers mois plusieurs réseaux de passeurs, lesquels ont été arrêtés au Kosovo. Le premier ministre et la ministre compétente ont fait une déclaration devant la presse indiquant qu'il ne servait à rien d'essayer de quitter le pays pour aller en France car, à l'arrivée, 98,5 % des demandes sont refusées. Celles-ci sont en effet considérées comme non fondées dans la mesure où ces personnes ne sont pas menacées au titre d'une violation de leurs droits dans leur pays.

Pour raccourcir le délai de l'instruction des dossiers, deux antennes de l'OFPRA ont été décentralisées il y a quelques jours, à Lyon et à Metz : l'objectif est de le réduire d'au moins de moitié.

Cela étant, les questions d'asile constituent une compétence partagée entre l'Union européenne et les pays membres, ce qui veut dire qu'il peut exister des divergences d'un État à l'autre sur certains points comme la liste des pays « sûrs ». Nous allons continuer à travailler avec les autorités du Kosovo pour être plus efficaces au stade du départ de ce pays et nous avons passé une commande à Frontex pour lutter contre les réseaux de passeurs.

Par ailleurs, le système de Schengen a fait l'objet d'une réforme passée inaperçue en juin dernier, permettant aux États membres de remettre en place des contrôles à leurs frontières dans des situations exceptionnelles – ce qui peut être le cas pour un flux migratoire spontané lié à des difficultés particulières, comme on peut en connaître dans le bassin méditerranéen, voire au Kosovo. Mais ces mesures doivent être prises en concertation avec les autres États membres et les institutions européennes.

Certains ont exprimé leur déception qu'à l'occasion du dossier de Lampedusa, nous ayons demandé à la Commission de faire des propositions sur les politiques migratoires en juin prochain. C'est un sujet difficile. Notre pays lui-même est-il toujours prompt à adopter des réformes dans ce domaine, sachant que lorsque nous le faisons, nous mettons plusieurs mois à nous mettre d'accord ? Avoir une politique migratoire à l'échelle des 28 États membres pour le premier Conseil suivant le renouvellement des institutions est donc ambitieux.

Nous avons, lors du dernier Conseil, volontairement scindé la question de Lampedusa et d'un renforcement des moyens, qui est urgente, de celle des politiques migratoires. Certains de nos interlocuteurs à qui on parle de solidarité répondent qu'ils préfèrent traiter ces questions globalement en se donnant quelques mois pour se mettre d'accord sur la stratégie. Or si nous avions choisi d'aborder ces problèmes en même temps, nous n'aurions apporté aucune réponse à la suite du drame de Lampedusa. De plus, au-delà de celle apportée ce mois-ci, il y aura au Conseil de décembre prochain des mesures conclusives sur le renforcement des moyens de Frontex et d'Eurosur – portant sur l'organisation des bateaux en Méditerranée.

D'ailleurs, certains pays anglo-saxons ayant plaidé pour que nous prenions notre temps sur la question de Lampedusa ont fait de même sur la protection des données individuelles ou le numérique.

Monsieur Lequiller, le dernier Conseil n'avait pas de décision à prendre sur l'UEM, qui sera à l'ordre du jour de celui de décembre.

S'agissant du projet de taxe sur les transactions financières, notre ministre de l'économie a indiqué qu'il était excessif et s'est largement employé pour que suffisamment de pays soient favorables à la soutenir. Nous avons, dans le cadre de la coopération renforcée, trouvé un ensemble de onze États d'accord pour la mettre en place. Toute la difficulté est de trouver un compromis entre ceux-ci pour que la taxe produise suffisamment de recettes – que nous souhaitons affecter à la zone euro pour disposer d'un moyen budgétaire d'intervention dans l'économie – sans remettre en cause le mode de fonctionnement de nos économies respectives. Suivant ce que l'on taxe, ce prélèvement peut en effet pénaliser davantage certains pays que d'autres compte tenu des modes de refinancement, ou affaiblir une place boursière, comme par exemple celle de Paris. C'est la raison pour laquelle il n'a pas encore été mis en place aujourd'hui. J'ai la conviction que nous allons y arriver mais cela prendra encore quelques semaines. En tout état de cause nous souhaitons trouver une solution réaliste et ambitieuse avant la fin de 2013 et nous respecterons notre engagement de mettre en oeuvre cette mesure.

Sur l'économie numérique et l'innovation, beaucoup de choses concrètes ont été pour la première fois décidées. Il en est ainsi sur la fiscalité, sur laquelle le Conseil prendra de nouvelles décisions en décembre – or personne ne voulait en parler il y a quelques mois, en raison des différences existant entre les pays. Il en est de même des enjeux industriels, alors qu'on avait tendance à n'aborder que ceux du marché intérieur : on évoque maintenant des offres européennes avec des projets concrets comme le « cloud computing ». En outre, nous accompagnerons le numérique dès le 1er janvier prochain à travers la mobilisation de plusieurs lignes budgétaires bien identifiées par les industriels. Je rappelle que le programme Horizon 2020 en faveur de la recherche et du développement mobilise 70 milliards d'euros, soit une augmentation de 38 % par rapport à 2007-2013.

Nous pourrons aussi, alors que le commissaire européen Johannes Hahn n'y était pas favorable il y a six mois, utiliser des crédits du FEDER ou du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), de même qu'1 milliard d'euros prévu sur une ligne consacrée aux mécanismes d'interconnexion européenne.

Concernant la protection des données, certains pays ne veulent pas en entendre parler, ne s'intéressant qu'à l'aspect commercial et souhaitant qu'on laisse exploiter les données individuelles, conçues comme une matière première monnayable. Or nous ne voulons pas que ce soit le cas dans n'importe quelles conditions, y compris s'agissant du droit à l'oubli, c'est-à-dire la possibilité d'effacer les données dont on dispose. Mais le Royaume-Uni demande à repousser le plus loin possible cette réglementation : le compromis obtenu est que les directives tendant à la protection des données seront adoptées au plus tard fin 2014-début 2015.

Quant au parquet européen, la France soutient sa mise en place. Nous avons d'ailleurs fait une proposition avec l'Allemagne dans le cadre d'une position commune, sous réserve que ce soit une structure collégiale, afin de pouvoir s'ancrer sur les systèmes juridiques et judiciaires nationaux existants. La proposition de la Commission européenne est d'une autre nature puisqu'elle repose sur un modèle supranational avec un procureur unique européen. Nous essayons de constituer, dans le cadre de la coopération renforcée, un groupe de pays rejoignant la position franco-allemande pour faire contrepoids à cette proposition : nous avons des chances d'aboutir. D'ailleurs, vos collègues sénateurs ont adopté aujourd'hui une proposition de résolution européenne portant avis motivé sur la création d'un parquet européen et se sont engagés dans une procédure de « carton jaune » – permettant au Parlement de saisir la Commission pour non-respect du principe de subsidiarité.

En ce qui concerne l'aspect social, il est prévu, dans les conclusions du Conseil, que les partenaires sociaux soient mieux associés. Ce sera le cas pour la Confédération européenne des syndicats (CES) dans le cadre du semestre européen : nous avons d'ailleurs demandé qu'il en soit ainsi en prenant exemple sur la grande conférence sociale qui a eu lieu cette année ainsi que l'an dernier. Nous dialoguons étroitement avec le CES sur ce point.

Monsieur Richard, la directive sur le détachement des travailleurs, qui est un sujet symboliquement très fort, sera utilisée par ceux qui combattront l'Europe en disant qu'elle est à l'origine de tous les maux. Il s'agit d'un dossier difficile, sur lequel nous ne partons pas de la même ligne. Les négociations avancent, mais il est vrai que la dernière réunion du Conseil EPSCO s'est soldée par un échec : nous n'avons pas voulu entériner une proposition qui se serait traduite finalement par moins d'outils qu'aujourd'hui pour lutter contre les contournements de la directive de 1996 – laquelle était censée faire en sorte qu'il n'y ait pas de concurrence parmi les salariés travaillant sur notre sol selon qu'ils sont issus d'une entreprise nationale ou ayant son siège dans un autre pays de l'Union.

Deux articles de ce texte sont en débat. D'abord, l'article 9, qui tend à nous donner les outils que nous estimons incontournables pour réaliser des contrôles sur pièces permettant d'éviter qu'une entreprise puisse cacher la réalité du statut des salariés qui sont sur un chantier ou qui apportent une prestation de service. Nous sommes pour une liste assez large d'une dizaine de documents ou de justificatifs, que nous avons déterminée en fonction de l'expérience des inspecteurs du travail et des services des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE). Les pays souhaitant que le système actuel perdure sont au contraire en faveur d'une liste de cinq documents. Si on trouve un accord sur celle-ci, ce sera un recul, puisque nous effectuons déjà des contrôles sur un nombre plus élevé de justificatifs.

Deuxièmement, l'article 12, qui y est lié, résulte d'une demande de la France tendant à mettre en place une responsabilité conjointe et solidaire de tous ceux qui interviennent sur un chantier : le donneur d'ordre, l'entreprise attributaire et les éventuels sous-traitants. De la sorte, les entreprises qui recourent à la sous-traitance devront se conformer aux règles de paiement des salaires sur le sol national ainsi qu'aux règles sociales. Chacun sera responsable de l'attribution de marchés donnés en sous-traitance dans tous les domaines. En effet, les plus grands scandales constatés en France se sont produits à travers la sous-traitance : généralement, une grande entreprise ayant pignon sur rue attribuait un marché à un sous-traitant sans regarder la façon dont il procédait. Mais une telle disposition n'existe pas dans les pays anglo-saxons, qui ne veulent pas en entendre parler.

Nous menons donc des négociations bilatérales et multilatérales pour essayer de trouver une solution début décembre. Elle se traduirait peut-être par le fait que, sur l'article 9, nous ayons une liste obligatoire de cinq documents pouvant être étendue pour les pays volontaristes – ils sont une dizaine –, qui estiment que c'est nécessaire pour exercer un bon contrôle. Sur l'article 12, il y aurait une responsabilité conjointe et solidaire pour des chantiers dépassant un certain volume de chiffre d'affaires, les pays pouvant aussi, à titre volontaire, la mettre en place dans les secteurs économiques qui leur semblent essentiels. Cela veut dire que les États vertueux pourraient s'assurer que chez eux il n'y ait plus d'entailles à un système qui, à l'origine, devait nous préserver contre les effets du dumping social ou du travail à bas coût. C'est précisément parce que les acteurs économiques en ont trouvé les failles que nous voulons cette responsabilité conjointe et solidaire : dès lors qu'ils seront redevables devant un tribunal pour n'avoir pas réalisé les contrôles nécessaires chaque fois qu'ils recourent à la sous-traitance, ils seront plus prudents.

Au-delà des avancées souhaitées d'ici la fin de l'année, nous devrons continuer à travailler sur d'autres sujets : la question du salaire minimum doit être traitée de pair, car s'il y a de l'autre côté de la frontière des salariés payés beaucoup moins chers, on n'aura pas résolu le problème.

S'agissant des services, la France a pleinement mis en oeuvre la directive dans ce domaine. Pour nous, elle ne doit pas être modifiée. Les conclusions du Conseil évoquant la possibilité d'une proposition de la Commission d'ici mars 2014 tendant à la faire évoluer constituent un sujet sensible : nous serons très vigilants pour ne pas avoir à gérer dans les mois qui viennent des propositions qui nous fassent revivre le temps de la directive « Bolkestein ». Ce sujet est en fait survenu au travers d'un point à l'ordre du jour portant sur la simplification. Nous avions d'ailleurs nous-mêmes demandé des mesures dans ce domaine, qui offrent des gains pour l'économie. Mais nous ne voulons pas que cela se traduise par une déréglementation pour le salarié, le consommateur ou l'environnement. Or nos amis britanniques viennent de produire un document, au titre d'une « business task force », disant que pour des raisons de simplification, il ne faut pas de dispositif trop coercitif pour la directive sur le détachement des travailleurs ou qu'il faut supprimer toute législation protégeant les femmes enceintes dans leur emploi.

La garantie jeunes décidée lors du Conseil européen de février dernier tend à proposer rapidement des solutions aux jeunes sortis du système éducatif : elle ciblera en priorité ceux qui ne sont ni étudiants, ni en situation d'emploi, ni en formation et qui présentent une certaine vulnérabilité, notamment une inscription depuis plus de quatre mois au chômage. Nous avons commencé à l'expérimenter dans dix départements, auxquels s'ajouteront dix autres au 1er janvier prochain, pour un objectif d'environ 100 000 jeunes par an. Cette disposition est complémentaire des 600 millions d'euros apportés par l'Europe à cette date à notre pays – 6 milliards à l'échelle de l'Union – pour toutes les régions dans lesquelles le taux de chômage des jeunes de 25 ans est supérieur à 25 %. Cela se traduira par des aides aux régions et collectivités locales mettant en place des actions de promotion de l'apprentissage, de stages ou de formation professionnelle à leur profit.

D'ailleurs, le 12 novembre prochain, l'ensemble des chefs d'État et de gouvernement de l'Union européenne se réunira à Paris, à l'invitation du Président de la République, pour examiner les bonnes pratiques en Europe afin d'utiliser au mieux ces 600 millions d'euros.

Nous reviendrons en outre au mois de décembre sur le numérique et l'approfondissement de l'UEM.

Enfin, s'agissant de la présidence de la zone euro, nous n'avons pas pris de retard : la plateforme du 30 mai indiquait que ce sujet de la gouvernance était à une échéance de deux ans, car nous avons conscience qu'il faut bouleverser un certain nombre de pratiques et faire converger les États sur le fait qu'il y aurait une présidence à temps plein de cette zone. Nous devons aussi faire avancer l'idée que celle-ci aurait une administration, notamment à l'égard de la Commission européenne. En même temps, il nous faut trouver un pendant démocratique au sein du Parlement européen, qui devrait avoir une commission de la zone euro pour répondre aux initiatives du président de celle-ci, et que celui-ci soit doté d'un budget. Si ce point n'était pas à l'ordre du jour du Conseil, il a avancé au gré des discussions informelles.

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Je vous remercie beaucoup, monsieur le ministre, pour la qualité et la précision de vos réponses.

La séance est levée à dix-neuf heures.