Commission des affaires étrangères

Réunion du 8 janvier 2014 à 10h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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Audition de M. Pierre Sellal, Secrétaire général du ministère des affaires étrangères

La séance est ouverte à dix-heures.

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Monsieur Pierre Sellal, vous êtes secrétaire général du ministère des affaires étrangères depuis 2009. Auparavant, vous avez été le directeur de cabinet du ministre des affaires étrangères, M. Hubert Védrine, puis le représentant permanent de la France auprès de l'Union Européenne. Vous avez également été mon adjoint lorsque j'étais secrétaire générale du comité interministériel pour les questions de coopération économique européenne (SGCI).

Nous souhaiterions vous entendre, monsieur le Secrétaire général, sur l'état de notre outil diplomatique, dans un contexte budgétaire de plus en plus difficile. Grâce à la baisse de notre quote-part dans le financement des organisations onusiennes, le budget du ministère pour 2014 permettra de financer l'essentiel : le renforcement de la sécurité de nos ambassades ; la réforme des bourses scolaires à l'étranger, qui est conduite conformément aux engagements pris par François Hollande pendant la campagne présidentielle ; le maintien de l'universalité de notre réseau diplomatique, qui reste l'un des plus importants au monde. Cependant, le ministère des affaires étrangères contribue à l'effort de maîtrise des finances publiques depuis au moins une décennie, ce qui n'est pas nécessairement le cas de toutes les administrations. Jusqu'à présent, il a su faire face à ces restrictions de manière pragmatique, en rationalisant ses implantations immobilières, en développant la polyvalence des agents, en externalisant une partie de la gestion des visas, en recherchant des financements externes ou encore en dématérialisant les procédures. Mais allons-nous pouvoir continuer de la sorte sans sacrifier l'essentiel ?

Quels sont vos chantiers de réforme, suite à la publication du rapport de la Cour des comptes sur l'évolution des missions et de l'organisation des consulats ?

La diplomatie économique est une des priorités du ministre des affaires étrangères. Vous suivez personnellement ce dossier, non seulement en tant que Secrétaire général, mais aussi en qualité de représentant spécial du ministre pour la diplomatie économique avec les Émirats arabes unis. La Commission recevra d'ailleurs tous les représentants spéciaux : elle a déjà auditionné Mme Aubry sur la Chine et M. Chevènement sur la Russie ; elle entendra prochainement M. Raffarin sur l'Algérie. Pouvez-vous faire une présentation générale de notre diplomatie économique, puis revenir plus en détail sur notre partenariat stratégique et économique avec les Émirats arabes unis ? Je rappelle que la France dispose d'une base militaire à Abou Dabi et qu'elle dégage avec les Émirats son troisième excédent commercial.

D'autre part, le Gouvernement a fixé un objectif ambitieux pour 2017 : passer de 700 à 1 000 décisions annuelles en matière d'investissements étrangers créateurs d'emplois sur notre territoire. Comment le ministère des affaires étrangères compte-t-il y contribuer ? Quelle est, selon vous, la meilleure architecture institutionnelle en la matière ? Le projet de rapprochement entre Ubifrance et l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII) suscite des interrogations, voire des oppositions, en particulier celle de notre collègue Jean-Paul Bacquet, président d'Ubifrance. À titre personnel, je suis très dubitative sur l'opportunité d'un tel rapprochement. J'ai d'ailleurs écrit à nos autorités à ce sujet.

Pourriez-vous évoquer également la politique des visas ? M. Destot a beaucoup insisté sur cet aspect dans son rapport sur la Chine. La France a accompli des progrès, en multipliant les visas de circulation. Où en sommes-nous aujourd'hui, en particulier pour la délivrance de visas aux étudiants et aux chercheurs ?

Enfin, le Conseil des affaires étrangères qui se tiendra le 20 janvier prochain à Bruxelles sera une échéance très importante : la France va tenter de transformer son intervention en République centrafricaine en opération européenne dans le cadre de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC). À cette fin, il est nécessaire que le Conseil de sécurité des Nations unies adopte une nouvelle résolution, qui confie un mandat à l'Union européenne. Mais pourquoi n'avoir pas envisagé dès l'origine une résolution prévoyant l'intervention des troupes européennes en République centrafricaine ? Avions-nous interrogé nos partenaires européens à l'époque ? L'urgence d'une intervention n'était pourtant pas la même qu'au Mali.

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Je souhaite soulever un point d'ordre. J'avais écrit au président de l'Assemblée nationale le 26 décembre dernier pour demander la création d'une mission d'information de la Conférence des présidents sur l'intervention française en République centrafricaine. En application de la Constitution, l'Assemblée sera amenée à voter dans trois mois sur le maintien des forces françaises dans ce pays. Mais, compte tenu de la dégradation de la situation sur le terrain, les objectifs de la mission paraissent déjà compromis, sans même évoquer les difficultés diplomatiques que vous venez de rappeler, madame la présidente. Il me paraît donc nécessaire qu'une mission de quelques députés de la majorité et de l'opposition se rende sur place rapidement, afin de faire le point et d'éclairer la représentation nationale avant le vote. De plus, il serait utile d'étendre à l'Afrique centrale la réflexion engagée sur les problématiques sécuritaires par le groupe de travail sur le Sahel, que j'ai l'honneur de présider et dont M. Loncle est le rapporteur.

Or, en Conférence des présidents hier, le président de l'Assemblée nationale, la présidente de la commission de la défense et vous-même, madame la présidente, avez refusé de donner aux parlementaires les moyens de contrôler l'action de l'exécutif en République centrafricaine. Nous ne comprenons pas cette attitude. L'opposition avait soutenu le principe d'une intervention de la France en République centrafricaine, pour des raisons tant humanitaires que sécuritaires. Mais le groupe UMP sera amené à tirer les conséquences de votre refus en envisageant une mission sur le terrain composée uniquement de parlementaires de l'opposition, alors qu'une mission bipartisane eût été préférable, dans l'intérêt de notre pays.

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On ne peut pas présenter les choses de cette manière : je ne refuse nullement que les parlementaires examinent la situation en République centrafricaine ! Le président de l'Assemblée nationale a en effet décidé de ne pas donner suite à votre demande. La présidente de la commission de la défense et moi-même avons fait valoir que nous travaillions déjà sur ce sujet depuis des mois. Notre commission a créé un groupe de travail permanent sur les crises suivies par le Conseil de sécurité. Il comprend douze députés, dont quatre du groupe UMP. M. Loncle et vous-même n'en faites pas partie, mais rien ne vous empêche de vous joindre à ses travaux. En outre, nous venons de mettre en place une mission d'information sur l'Afrique francophone, dont le président et le rapporteur sont respectivement M. Guibal et M. Baumel.

Enfin, la mission d'information que vous proposez compterait au plus trente membres. Or, plusieurs commissions y seraient représentées – affaires étrangères, défense finances. Elle comprendrait donc moins de membres de notre Commission que le groupe de travail sur les dossiers suivis par le Conseil de sécurité. Sa création conduirait donc non seulement à une duplication de notre travail, mais aussi à une réduction de notre représentation !

Vous avez néanmoins raison sur un point, monsieur Lellouche : il est indispensable que le Parlement soit informé de la situation en République centrafricaine. J'ai demandé hier au ministre délégué chargé des relations européennes que le Premier ministre réunisse à nouveau les présidents des groupes politiques et les présidents des commissions compétentes à cette fin. Vous aviez d'ailleurs été mandaté par votre groupe politique pour participer à certaines des réunions précédentes.

Votre principal argument, c'est qu'un regard politique – et non seulement militaire – est nécessaire sur la situation en République centrafricaine. Or, tel est bien le rôle que joue notre Commission, à moins que vous ne teniez pour négligeable le travail que nous réalisons collectivement, dans le respect des prérogatives de tous les groupes politiques.

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Il y a pourtant eu une mission d'information sur l'opération Serval au Mali et une autre, après l'attentat d'Ouzbine, sur l'évaluation de l'opération militaire française en Afghanistan, dont j'avais été rapporteur aux côtés de M. François Lamy, aujourd'hui membre du Gouvernement. Nos recommandations avaient d'ailleurs conduit la France à modifier sa méthode d'intervention en Afghanistan. Aujourd'hui, nous souhaitons nous rendre compte de la situation sur le terrain en République centrafricaine. Or, aucun des dispositifs que vous avez mentionnés, madame la présidente, ne permettra à un petit groupe de parlementaires de se rendre sur place. Il est dommage que nous devions nous contenter des commentaires de presse. Vous ne répondez pas au besoin d'information directe du Parlement.

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Le président de l'Assemblée nationale, la présidente de la commission de la défense et vous-même, madame la présidente, n'avez pas souhaité la création d'une mission d'information spécifique et bipartisane sur l'opération en République centrafricaine. Nous en prenons acte, mais nous le regrettons. En ma qualité de vice-président de cette Commission, je ne peux qu'appuyer la demande de M. Lellouche. La crise centrafricaine est actuellement le dossier majeur de politique internationale. La situation sur le terrain va devenir de plus en plus compliquée et les efforts militaires de la France doivent être complétés par des initiatives diplomatiques. Certains pays africains ne veulent pas d'une intervention de l'ONU, qui est pourtant nécessaire – nous nous rejoignons sur ce point, madame la présidente.

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Le groupe de travail sur les dossiers suivis par le Conseil de sécurité et la mission d'information sur l'Afrique francophone se concentreront en priorité sur la crise en République centrafricaine. D'autre part, nous n'avons jamais exclu un déplacement sur le terrain dans le cadre de nos groupes de travail, même si cela pose des problèmes de sécurité qu'il convient d'examiner avec le ministère de la défense et le ministère des affaires étrangères. Nous ferons tout ce qui est nécessaire pour suivre la crise centrafricaine, tant sur le plan militaire que diplomatique, monsieur Poniatowski.

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Pierre Sellal, Secrétaire général du ministère des affaires étrangères

C'est un grand honneur de m'exprimer aujourd'hui devant vous. J'évoquerai d'abord l'organisation de notre outil diplomatique et les réformes que nous avons engagées pour améliorer son efficacité, plus particulièrement depuis dix-huit mois, au service de la politique étrangère définie par le Président de la République et par le ministre. Quatre objectifs nous guident aujourd'hui : l'adaptation de notre dispositif ; la coordination, qui est la condition de notre efficacité ; la mobilisation autour de priorités clairement définies, en particulier la diplomatie économique ; la recherche de l'attractivité.

Première exigence, s'adapter. Le monde change. Les rapports de puissance se modifient de manière accélérée depuis environ vingt ans. Notre représentation diplomatique doit épouser ces changements, de même que les communautés françaises à l'étranger et nos entreprises se redéploient elles aussi.

Deux principes ont été fixés. D'une part, ne pas renoncer à une présence de la France aussi universelle que possible. L'universalité constitue un atout : elle permet à notre pays de rayonner, de protéger ses ressortissants et de promouvoir ses intérêts presque partout dans le monde. C'est là un « actif » important de la diplomatie française.

D'autre part, penser l'universalité de manière globale. Antérieurement, sans doute parce que nous disposions de davantage de moyens, nous avons eu tendance à procéder à des ajustements séparés de chacun des réseaux – diplomatique stricto sensu, consulaire, culturel et de coopération. Aujourd'hui, notre objectif est double : passer d'une répartition des moyens fondée sur des héritages, des sédimentations, voire une certaine inertie, à une carte des implantations tournée vers l'avenir, qui corresponde à l'évolution prévisible des rapports de puissance et aux nouvelles influences ; dans un pays déterminé, moduler notre présence en fonction de notre priorité, qui peut être politique, économique, consulaire ou culturelle.

En combinant ces deux principes, nous réaffirmons l'ambition d'une présence aussi universelle que possible – à laquelle votre Assemblée est, je le sais, attachée. Mais, compte tenu de nos moyens et de nos objectifs, cette universalité ne peut être synonyme ni d'immuabilité, ni d'uniformité, ni d'exhaustivité des missions. Il n'en reste pas moins que le réseau diplomatique français demeure le troisième au monde, la Chine étant passée au deuxième rang.

Je donnerai trois exemples des adaptations en cours. D'abord, nous allons procéder, entre 2013 et 2015, au redéploiement d'environ 300 emplois de toutes catégories à partir des États-Unis et des postes les mieux dotés en Europe et au Maghreb vers les zones géographiques prioritaires, en particulièr les pays émergents. Cet effort, qui peut paraître limité à première vue, est en réalité très important au regard des effectifs du ministère des affaires étrangères et des 600 emplois qu'il devra rendre au cours du triennum – nous continuons en effet à apporter notre contribution à l'effort global de stabilisation de l'emploi public.

En outre, nous allons transformer certains postes dits « de présence diplomatique » en ambassades au format très allégé – un ambassadeur assisté de quatre agents au maximum – et recentrées sur deux ou trois missions prioritaires. C'est là une innovation importante. Jusqu'à présent, nous avions considéré qu'une ambassade comptant moins de dix agents ne disposait pas vraiment d'autonomie. Nous avons décidé de franchir le pas, en suivant l'exemple de certains de nos partenaires, notamment britanniques. Ce faisant, nous ne renonçons pas à notre présence, qui est gage de rayonnement politique. Nous allons tester cette formule dès cette année dans treize pays, notamment à Brunei, en Érythrée, à la Jamaïque ou en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Cette transformation s'accompagne d'une adaptation et d'un allègement de nos implantations immobilières dans les pays concernés.

Enfin, dans les pays où nous disposons d'un réseau avec plusieurs postes ou implantations, nous allons, hors la capitale en particulier, identifier la structure la plus représentative de nos priorités et en faire la base de notre présence. Cette mesure concernera, notamment, l'Europe. Un exemple, en Allemagne où cela n'aurait guère de sens de multiplier les structures. Nous avons au contraire intérêt à choisir dans chaque métropole régionale où nous sommes implantés la forme de présence la plus adaptée, qui peut être un consulat général, un institut français ou encore un bureau d'Ubifrance. Nous adosserons ensuite les autres fonctions à cette structure porteuse. Nous pourrons ainsi conférer le titre de consul général à un directeur d'institut français ou à un responsable de bureau d'Ubifrance, ce qui leur donnera une capacité d'influence supplémentaire. Il s'agit donc de supprimer les doublons, de tirer le meilleur profit de la présence existante, afin de resserrer notre maillage et d'être aussi efficaces que possible.

Épouser les changements, c'est aussi faire face aux menaces sur nos implantations, nos agents et les communautés françaises à l'étranger – un des grands enjeux du ministère aujourd'hui, tant sur le plan budgétaire que sur celui de l'organisation. Afin de renforcer la protection de nos implantations dans les zones à risques élevés, nous avons engagé un programme très important de dépenses de sécurité. Elles sont financées par redéploiement et emploi d'une part du produit de nos cessions, et s'élèveront à environ 20 millions d'euros par an.

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Pierre Sellal, Secrétaire général du ministère des affaires étrangères

Oui, 20 millions d'euros chaque année, en 2014, 2015 et 2016. Néanmoins, ce montant ne comprend pas certaines opérations exceptionnelles, comme celle que nous allons réaliser à Tripoli après l'attentat dont notre ambassade a été victime l'année dernière : l'ancien bâtiment est inutilisable et nos équipes sont installées à l'hôtel dans des conditions de sécurité précaires. Nous devons donc accélérer notre installation dans un compound sécurisé, ce qui coûtera environ 15 millions– à financer aussi par redéploiement.

En outre, nous élaborons actuellement, dans un cadre interministériel, une doctrine précisant notre politique de sécurité à l'étranger. Nous devons répondre, dans ce cadre, à certaines questions : convient-il d'étendre cette politique de sécurité à l'ensemble de nos implantations, y compris aux écoles, aux lycées, et aux centres culturels ? Quel équilibre trouver entre le souci de maintenir certains lieux ouverts et accessibles au public et l'impératif de sécurité ?

La deuxième exigence qui s'impose à nous est la coordination, sans laquelle il ne saurait y avoir de politique étrangère efficace. Il revient au ministère des affaires étrangères et, sur le terrain, aux ambassadeurs d'assurer la cohérence de l'action extérieure de la France. Pour cela, nous avons besoin d'outils opérationnels. J'évoquerai trois innovations à cet égard. D'abord, nous avons créé dans la plupart des ambassades, sur instruction du ministre, un conseil économique et un conseil pour l'action culturelle, l'éducation et l'attractivité. Il s'agit de réunir très régulièrement, sous l'autorité de l'ambassadeur, l'ensemble des services et des opérateurs de l'État qui concourent à la présence et au rayonnement de la France dans un pays donné. Les représentants des entreprises sont associés aux réunions du conseil économique. L'objectif est clair : décloisonner ; créer des synergies entre nos différents moyens d'action – soutien aux entreprises, coopération technique, action culturelle, délivrance des visas, assistance à la communauté française ; en un mot, faire système.

En outre, depuis quelques mois, les plans d'action des ambassades sont devenus de véritables documents interministériels qui engagent l'ensemble des services et des opérateurs de l'État dans un pays donné. La partie économique de ces plans d'action est élaborée en concertation avec la direction générale du Trésor. Nous l'assortissons d'indicateurs qui permettent au ministère des affaires étrangères et aux ministères de l'économie et des finances et du commerce extérieur d'apprécier conjointement leur mise en oeuvre par l'ambassadeur et les services économiques. Compte tenu des difficultés de coordination qui ont pu exister dans certains postes, c'est là un progrès significatif.

Enfin, le Gouvernement a décidé, en décembre dernier, d'inscrire dans la mission de coordination et d'animation confiée aux ambassadeurs, en vertu du décret du 1er juin 1979 relatif aux pouvoirs des ambassadeurs et à l'organisation des services de l'Etat à l'étranger, l'ensemble des opérateurs de l'Etat, par exemple l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), l'Agence française de développement (AFD) ou Ubifrance. C'est une mesure de bon sens. De même, au niveau central, le champ de compétence du comité interministériel des réseaux internationaux de l'État (CORINTE) englobe l'ensemble des opérateurs de l'État, qui seront plus systématiquement associés à ses travaux.

Cette amélioration de la coordination doit s'accompagner d'un effort de mutualisation des moyens, source d'économies et d'efficacité accrue. Elle est systématiquement recherchée avec les autres services de l'État. Nous nous efforçons également de colocaliser nos implantations avec nos partenaires européens, au premier chef l'Allemagne, même si les succès sont peu nombreux en la matière, tant il est difficile de faire coïncider nos besoins, nos budgets et nos calendriers respectifs. Nous allons également examiner les possibilités de colocalisation avec les délégations de l'Union européenne dans les pays où nous allons réduire fortement nos effectifs.

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Avez-vous déjà réalisé une opération de ce type ?

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Pierre Sellal, Secrétaire général du ministère des affaires étrangères

Nous avons réalisé des opérations de ce type, avec l'Union européenne, à Kigali et à Djouba. Nous avons plusieurs projets en cours avec l'Allemagne, à Dacca, où les travaux ont débuté, mais aussi à Khartoum, à Koweït et à Séoul. Dans tous les pays où nous allons transformer un poste de présence diplomatique en ambassade au format allégé, nous allons rechercher en priorité la possibilité d'une colocalisation avec la délégation de l'Union européenne.

La troisième exigence qui doit nous guider est la mobilisation autour de priorités sélectives et précisément définies, en premier lieu la diplomatie économique. Celle-ci s'impose pour des raisons évidentes que le Président de la République a rappelées hier dans ses voeux aux corps constitués : d'une part, le redressement de notre économie et de nos comptes extérieurs est une question de souveraineté, et il n'y a pas de politique étrangère sans souveraineté ; d'autre part, notre capacité d'influence est étroitement corrélée à notre performance économique.

Que signifie la diplomatie économique aujourd'hui ? Quelles doivent être nos actions concrètes ? Il est d'abord nécessaire, en permanence, d'expliquer, de valoriser nos atouts et nos performances, de réagir à la désinformation, aux présentations tendancieuses, déformées ou biaisées – nous avons ces jours-ci un exemple frappant de l'impact négatif que peuvent avoir de telles présentations –, voire à l'autodénigrement. Ce travail doit être mené au quotidien, tant au niveau central que dans les postes. C'est une condition essentielle si nous voulons rester un pays attractif pour les investissements étrangers et orienter ces investissements vers la création de valeur ajoutée et d'emplois durables.

Ensuite, les ambassadeurs auront à faire du soutien aux entreprises – la première des priorités qui leur est assignée dans leur plan d'action – leur objectif quotidien. Ils doivent se mettre au service des entreprises, et pour cela, avec leurs équipes, développer leur expertise sur la situation du pays, ses besoins, sa politique et ses procédures de décision. Cela suppose également que nous soyons disponibles et réactifs à Paris, chaque fois qu'une intervention gouvernementale est nécessaire pour favoriser telle ou telle opération commerciale.

Le ministre des affaires étrangères a souhaité que le soutien aux entreprises ne se limite pas aux grands groupes. C'est pourquoi nous avons invité, pour la première fois, des PME et des ETI à participer à plusieurs tables rondes lors de la dernière conférence des ambassadeurs et nous nous efforçons de susciter des démarches de filières. Il est plus difficile d'organiser la relation avec les PME et les ETI qu'avec les grands groupes, mais c'est un objectif important. Les ambassadeurs pour les régions y contribuent : ils constituent un relais entre les tissus économiques locaux et les services d'administration centrale.

Enfin, lorsque nous définissons nos positions et nos stratégies de négociation dans un cadre multilatéral, nous devons prendre en compte les intérêts de nos entreprises et leur situation par rapport à leurs concurrents étrangers. Cela vaut pour toutes nos postes multilatéraux, mais plus encore pour notre représentation permanente à Bruxelles, par exemple lorsque nous négocions une directive, définissons un mandat de négociation pour la conclusion d'un accord de libre-échange ou suivons la manière dont la Commission négocie un tel accord. Là aussi, c'est d'abord une question de priorités et d'état d'esprit, mais aussi d'organisation concrète des échanges d'information avec les entreprises.

La quatrième exigence qui doit inspirer notre action est la recherche systématique de l'attractivité. Il s'agit de mobiliser et de valoriser l'ensemble de nos atouts, d'utiliser tous nos moyens d'action et de coopération pour dynamiser les échanges économiques. Ainsi, nous devons prendre conscience que l'espace francophone est également un espace d'opportunités économiques pour nos entreprises. De même, en matière de politique de développement, sachons tenir compte des objectifs économiques quand nous choisissons les pays ou les secteurs d'intervention. Certes, il n'est pas question de porter préjudice à notre politique de développement, qui garde sa légitimité intrinsèque, mais nous devons désormais faire le lien avec ces objectifs. C'est un réflexe qu'il faut acquérir. De même, en matière de coopération scientifique et technique – nous sommes d'ailleurs en train de revoir notre stratégie et nos implantations en fonction de ce critère – ou en matière de coopération culturelle – n'oublions pas les industries culturelles : les conseillers culturels participeront aux conseils économiques.

Notre diplomatie aux Émirats arabes unis est l'exemple le plus abouti de cette approche inclusive. Nous y avons déployé l'ensemble de nos moyens d'influence : base militaire, établissements d'enseignement, université Paris-Sorbonne à Abou Dabi, musée du Louvre à Abou Dabi. L'ensemble de ces actions fait système et donne à la France une image et une place sans égale parmi ses partenaires et qui a peu d'équivalents dans le monde. Notre objectif est de valoriser pleinement cet investissement multiforme, en premier lieu sur le plan économique. Il explique en partie que nous réalisions notre quatrième excédent commercial dans le monde avec ce pays. Au total, grâce à son attractivité, la France a été choisie – c'est d'autant plus important – comme partenaire de référence par les Émirats arabes unis. Le prince héritier le souligne souvent : historiquement, rien ne prédestinait notre pays à un tel rôle.

La somme des actions politiques, économiques, consulaires, culturelles et de coopération que mène notre pays en fait un acteur dont la voix compte sur la scène internationale et un territoire privilégié pour les investissements étrangers. J'insiste : l'enjeu pour nous, c'est d'être capable de créer un continuum entre les différentes dimensions de notre action. Nous devons prendre des initiatives politiques fortes, comme nous le faisons aujourd'hui en Afrique, rester un acteur clé du débat européen, consolider nos liens traditionnels dans l'espace francophone et dans le bassin méditerranéen, établir ou restaurer des relations politiques et économiques étroites avec les grands pays émergents. Pour ce faire, nous avons besoin d'un minimum de moyens. Il y a, dans ce domaine comme dans certains, un principe de « stricte suffisance ». J'espère que ces moyens nous permettront de poursuivre notre action dans les années qui viennent.

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Les personnes qui s'intéressent à la politique internationale et les agents du ministère des affaires étrangères s'inquiètent du déclin des moyens budgétaires qui se poursuit depuis vingt ans. Le Quai d'Orsay est le seul ministère à avoir été touché sur une période aussi longue. Il est temps, comme vous venez de le dire, d'améliorer les perspectives budgétaires.

Néanmoins, il y a des économies à réaliser. La France – c'est une spécificité – compte vingt-huit ambassadeurs thématiques qui ont été nommés sous les présidences de MM. Chirac et Sarkozy. M. Fabius en a supprimé deux ou trois, mais en a nommé un supplémentaire. Je n'aurai la cruauté ni d'énumérer l'intitulé de leurs fonctions, ni de les nommer : on s'apercevrait que ces postes permettent à des personnalités éloignées du suffrage universel de retrouver un emploi, parfois sans application de la limite d'âge. J'espérais qu'il y aurait des progrès en la matière, or je constate un statu quo.

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J'ai eu beaucoup de bonheur à oeuvrer avec vous, monsieur le Secrétaire général, lorsque j'étais secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Nous avions beaucoup travaillé alors sur la présence française au sein du Service européen d'action extérieure (SEAE) qui était en cours de création. Six ans plus tard, la France est-elle correctement représentée au sein du SEAE ?

Lorsque M. Juppé était ministre des affaires étrangères, nous avions essayé de faire en sorte que les diplomates aient une expérience en entreprise ou de gestion des dossiers économiques au cours de leur carrière et, de même, que les cadres de la direction générale du Trésor fassent un passage en ambassade où ils se voient confier des missions politiques. Où en sommes-nous aujourd'hui ?

En dépit de tous les efforts que nous déployons aux Émirats arabes unis, le contrat de construction des centrales nucléaires a été décroché par les Coréens. Vous siégez aux conseils d'administration d'EDF et d'AREVA. Quelle leçon tirez-vous de cette expérience ? La France éprouve souvent des difficultés à « transformer l'essai ». Nous l'avons également vu pour le contrat de construction d'une ligne à grande vitesse en Arabie Saoudite.

Enfin, quid de l'aide liée ? La France distribue des aides pour la réalisation d'études sur la construction de barrages, de liaisons ferroviaires ou de métros, mais les contrats correspondants sont souvent remportés par des entreprises chinoises ou japonaises, tout en restant financés à hauteur de 20 % par la France via l'aide européenne. Nous sommes souvent le dindon de la farce ! Lorsque j'étais secrétaire d'État, j'avais demandé que l'on examine cette question de plus près. Quelle est votre analyse sur ce point ?

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Ne craignez-vous pas que les affrontements en République centrafricaine ne dégénèrent en un conflit interreligieux, notamment à la suite de la réaction du président tchadien ? Cela compliquerait encore la tâche des forces françaises.

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Vous avez insisté sur la nécessité de coordonner l'action des différents ministères. Quelle est selon vous la place de la diplomatie parlementaire, c'est-à-dire de la contribution que nous apportons en publiant des rapports, en entretenant des relations à travers les groupes d'amitié, mais aussi en promouvant les territoires que nous représentons ?

Les grands groupes français ne pourraient-ils pas, à l'instar de leurs homologues allemands, entraîner derrière eux des PME de leur secteur ? Vous avez évoqué la participation des PME aux tables rondes de la conférence des ambassadeurs. Les députés pourraient également être des relais utiles pour ces entreprises. Cependant, j'ai le sentiment que le ministère des affaires étrangères reste peu tourné vers les parlementaires.

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S'agissant du réseau consulaire, nous constatons un retrait de l'État depuis quinze ans, alors même que les communautés françaises à l'étranger ont augmenté d'environ 30 %. Les ministres successifs ont souvent mis en avant les progrès réalisés en matière de dématérialisation des procédures. Je les reconnais, mais ce n'est qu'une partie de la réponse. Nous n'avons pas de retour d'expérience cohérent sur la série de réformes qui ont été lancées dans le réseau consulaire – je pense en particulier à la mise en place des consulats généraux d'influence ou à gestion simplifiée, ainsi qu'à la création des pôles consulaires régionaux, notamment de celui de Vienne.

Vous avez évoqué les expériences qui seront menées en Allemagne. Vous allez notamment conférer le titre de consul général à des directeurs d'institut culturel ou à des responsables de bureaux d'Ubifrance. Ce sera notamment le cas à Stuttgart. Or, le Bade-Wurtemberg compte la population française la plus importante d'Allemagne et celle-ci se répartit dans l'ensemble du Land. Que pourra faire le directeur d'institut culturel également consul général, s'il ne dispose pas au moins d'un agent dédié aux activités consulaires qui lui permette de travailler au contact de la communauté française ?

D'autre part, comment allez-vous gérer le réseau des consuls honoraires ? Quels moyens leur accorderez-vous ? Ils sont aujourd'hui très modestes. Continuerez-vous à privilégier le recrutement de nationaux du pays d'accueil, qui ne peuvent pas, par exemple, établir des procurations pour les élections ? Dans les pays où les distances sont grandes, tels que l'Australie, les agents du consulat se déplacent avec des valises Itinera, sortes de mini-consulats mobiles qui permettent notamment la prise d'empreintes biométriques. Allez-vous en étendre l'utilisation aux pays où les communautés françaises sont denses ? Je plaide pour ma part en ce sens.

Qu'en est-il des crédits affectés aux tournées consulaires ? L'activité d'un consulat ne se réduit pas à la délivrance d'actes d'état civil. Or, dans plusieurs villes de ma circonscription, les Français n'ont pas vu d'agent du consulat depuis longtemps.

D'une manière générale, je souhaite que la réflexion sur l'évolution du réseau consulaire français soit menée en commun avec la représentation nationale.

Enfin, que va-t-il advenir de la Maison de France à Berlin ? De nombreux Berlinois se sont émus de l'annonce de sa vente au mois d'avril dernier. Je souhaite bien sûr que l'institut culturel reste à la même adresse.

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Lorsque j'étais dans l'opposition, j'ai dénoncé le manque de moyens attribués au ministère des affaires étrangères. Je continue à le faire maintenant que je suis dans la majorité.

Il est tout à fait bienvenu que le ministère des affaires étrangères fasse de la diplomatie économique. Le président Mitterrand se plaignait parfois que les ambassadeurs ne connaissent pas les entreprises françaises présentes dans leur pays de résidence et n'aient aucune idée des marchés potentiels. Les choses ont heureusement beaucoup changé depuis lors.

Vous avez travaillé avec deux ministres du commerce extérieur successifs et vous avez certainement relevé, comme nous tous, la multiplicité des intervenants en matière de commerce extérieur. Il y a des doublons inutiles, il faut davantage de coordination. Ubifrance, que je préside, devrait être placée sous la tutelle non seulement du ministère de l'économie et des finances, mais aussi du ministère des affaires étrangères. Cela dit, nous ne devons pas non plus faire n'importe quoi au nom de la rationalisation. Je m'interroge sur le rapprochement envisagé entre Ubifrance et l'AFII, alors que ces deux agences font des métiers très différents. Mme Clara Gaymard, qui a présidé l'AFII avec une compétence reconnue par tous, estime que ce serait une absurdité.

D'autre part, la promotion du tourisme doit être un aspect essentiel de notre diplomatie économique. M. Destot l'a montré dans son rapport sur la Chine : multiplier par dix le nombre de touristes chinois en France reviendrait à réduire le déficit de notre commerce extérieur de 30 %.

Enfin, à l'instar de M. Lellouche, je souhaite évoquer le problème de l'aide déliée. La France continue à faire acte de repentance. Nous semblons nourrir un complexe, alors que les Britanniques n'hésitent pas à pratiquer l'aide liée de manière déguisée. J'espère que les choses se passeront mieux au Mali qu'au Kosovo, où les retombées économiques de notre intervention ont été très faibles. Par contraste, de nombreuses entreprises anglo-saxonnes ont décroché des contrats en adoptant un habillage kosovar, et ont ainsi violé le principe de l'aide déliée. Quelle est votre position sur cette question ?

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Quels sont aujourd'hui les critères d'évaluation d'une représentation diplomatique ? Cela reste pour moi un mystère. Comme partout, il existe au sein du ministère des affaires étrangères des agents de qualité variable. Cependant, le système de carrière et le statut constituent une contrainte : si le ministère parvient sans difficulté à identifier les meilleurs, il doit aussi continuer à employer les médiocres et les moins bons, au détriment de notre pays. Y a-t-il eu des évolutions sur ce point ?

Notre représentation s'est renforcée dans les grands pays émergents, notamment en Chine, mais elle demeure insuffisante. Le ministère dispose-t-il de la souplesse nécessaire pour s'adapter rapidement aux évolutions en cours ?

Enfin, avez-vous pratiqué une analyse comparative – benchmarking – des expériences étrangères en matière de diplomatie économique ?

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Je tiens à saluer la compétence des agents qui travaillent au sein de nos réseaux à l'étranger.

Compte tenu de l'évolution de nos relations avec nos partenaires européens, ne pourrions-nous pas réfléchir à une évolution de nos structures dans ces pays ? En outre, au-delà de la colocalisation de nos implantations, ne devrait-on pas envisager une coopération fonctionnelle plus approfondie entre pays européens dans certaines parties du monde ?

Nos postes multilatéraux jouent un rôle très important et je m'inquiète de notre désengagement financier au sein des institutions onusiennes, qui nuit à notre autorité politique. Il paraît nécessaire de redéployer nos contributions au budget ordinaire de ces organisations vers les fonds verticaux.

La France a toujours été présente et active au sein des organisations internationales, qui sont source de puissance et d'autorité. Cependant, nous assistons aujourd'hui à une nouvelle répartition des postes à tous les niveaux au sein de ces organisations. Nous devons donc veiller à placer des Français qui y fassent carrière sur le long terme. Certains pays ont une politique des ressources humaines très offensive dans les organisations internationales et parviennent ainsi à préparer efficacement les décisions qu'elles prennent.

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Qu'en est-il en particulier en sein de la Commission européenne ?

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À l'instar de mes collègues, je regrette la persistance du manque de moyens. En revanche, je salue la réflexion qui a été engagée pour fixer des priorités et des objectifs clairs, après une révision générale des politiques publiques (RGPP) qui consistait uniquement à réduire les moyens. Aujourd'hui, lorsqu'un consulat est fermé, le ministère crée des permanences sur le terrain. Les valises Itinera jouent un rôle important à cet égard.

Ne sous-estimons pas l'importance des pays proches de la France. Les communautés françaises des pays de l'Union européenne représentent la moitié des Français de l'étranger. Nous exportons cinq fois plus au sein de l'Union que vers l'Asie. La Belgique est le deuxième partenaire économique de la France, mais n'est pas un pays prioritaire pour le redéploiement des agents du ministère, ce qui pose problème. Au Luxembourg, où réside pourtant la sixième communauté française au monde, la France ne dispose que d'un consul adjoint et de sept agents, qui sont donc soumis à une forte pression.

En matière immobilière, certaines cessions sont justifiées. En revanche, la vente de certains immeubles symboliques qui constituent des atouts pour notre diplomatie d'influence – la Maison de France à Berlin, la maison Descartes à Amsterdam – ne rapportera pas grand-chose à l'État.

Comme l'a dit M. Bacquet, la coordination est essentielle tant en matière culturelle qu'économique. Elle commence à fonctionner sur le terrain, car l'impulsion est très forte. En revanche, il reste des progrès à faire à Paris. Certains acteurs indépendants de l'État mériteraient d'être mieux associés sur le terrain : la Mission laïque française dans le domaine culturel, les chambres de commerce dans le domaine économique.

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Vous avez été pendant sept ans représentant permanent de la France auprès de l'Union européenne et étiez très attaché à la présence française au sein de la Commission européenne. Quelle est aujourd'hui notre politique en la matière ? Nous pourrions placer de jeunes Français à des postes relativement modestes au sein de différentes directions générales, qui feraient ensuite carrière et seraient pour nous des relais d'influence.

Pouvons-nous tirer des leçons des expériences étrangères en matière de réorganisation et d'amélioration de l'efficacité ? Vous avez notamment évoqué le Foreign Office.

Que pensez-vous de la politique de coopération décentralisée menée par les régions ou les grandes villes ?

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La question que vient de poser M. Quentin est très importante. En effet, l'action internationale de la France ne se limite pas à celle de l'État. C'est aussi celle des entreprises, des collectivités territoriales, des associations et des ONG. D'ailleurs, ces différents acteurs abordent certains pays, notamment africains, en ordre dispersé – pour dire le moins. Cela nuit à la visibilité et à l'efficacité de notre diplomatie.

La création d'ambassadeurs régionaux est parfois évoquée. À l'instar de M. Bacquet, je souhaite que l'on recherche la cohérence et la coordination. Or, nous disposons déjà d'ambassadeurs bilatéraux, de nombreux ambassadeurs itinérants et de représentants spéciaux pour la diplomatie économique – qui font d'ailleurs du bon travail. Quelles seront les fonctions exactes de ces ambassadeurs régionaux ? En matière de diplomatie économique, l'approche régionale est-elle la bonne ? Ne convient-il pas plutôt de tenir compte de la diversité des pays, de leur niveau de développement et de la taille des marchés ? Ce qui vaut pour la Chine, le Brésil et l'Inde ne vaut pas pour le Vietnam, le Chili et l'Indonésie. D'autre part, les PME et les ETI – j'ai moi-même dirigé une PME dans le passé – ne peuvent pas aborder les marchés de la même manière. Il ne faudrait pas mettre en place, sur la base d'un raisonnement purement conceptuel, un dispositif analogue aux préfets de région qui ne correspond guère aux réalités internationales.

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Pierre Sellal, Secrétaire général du ministère des affaires étrangères

Notre expérience en matière de politique des visas a montré que nous devons utiliser chacun de nos moyens d'action au service d'objectifs plus larges : développement des échanges économiques, attractivité, promotion du tourisme. Pendant longtemps, la politique des visas a été conçue en fonction d'un objectif principal, voire exclusif : le contrôle de l'accès au territoire au nom de la sécurité et de la maîtrise des flux migratoires. Mais nous nous sommes rendu compte que cette politique – c'est-à-dire la manière dont nous accueillons les demandeurs, la rapidité avec laquelle nous leur délivrons un visa, les facilités plus ou moins grandes que nous leur accordons pour voyager – constitue un instrument d'attractivité très efficace. Lorsque nous sommes performants, nous attirons en France des touristes, des hommes d'affaires et des investisseurs. Lorsque nous le sommes moins que d'autres, nous perdons des parts de marché, notamment au bénéfice de nos partenaires Schengen. C'est d'ailleurs un domaine dans lequel le benchmarking est essentiel. Nous avons repensé notre politique des visas avec le ministère de l'intérieur. Nous considérons désormais qu'elle doit servir deux objectifs à parts égales : la sécurité et l'attractivité. Nous avons ainsi ajouté un instrument à notre panoplie.

Le cas de la Chine a été le plus flagrant. Au nom de l'objectif prioritaire de sécurité et des contrôles en résultant, nous avions fini par détourner le flux des demandeurs de visas à nos dépens et au profit des autres membres de l'espace Schengen, notamment de l'Allemagne, en particulier à Shanghai. En conséquence, le nombre de voyageurs chinois a immédiatement diminué sur Air France et augmenté sur Lufthansa, de même que le nombre de touristes chinois a baissé en France et crû en Allemagne. Aujourd'hui, nous avons rétabli la situation et nous délivrons les visas plus rapidement que nos partenaires en Chine, ce qui nous confère un avantage comparatif. Cet exemple illustre bien le nouvel état d'esprit qu'il convient d'adopter et les moyens concrets à mettre en oeuvre pour renforcer notre attractivité.

D'autre part, la politique des visas est un domaine dans lequel nous pouvons aller plus loin dans la mutualisation des moyens avec nos partenaires Schengen. En particulier, l'externalisation du traitement des demandes peut être réalisée de manière commune. Cela permet de réaliser des économies, notamment en matière immobilière.

La pression sur nos moyens est constante depuis trente-cinq ans ! Les efforts demandés au ministère au titre de la RGPP hier et du redressement des comptes publics aujourd'hui sont du même ordre de grandeur que ceux qui sont demandés aux autres administrations, mais ils s'ajoutent aux contributions antérieures.

Les ambassadeurs thématiques ne constituent en rien une particularité française. Toutes les diplomaties désignent des ambassadors-at-large – pour reprendre la terminologie américaine – ou des représentants spéciaux pour remplir une mission ponctuelle, diriger une délégation ou prendre en charge une négociation particulière. En ce qui concerne la France, ces ambassadeurs sont pour les deux tiers des agents du ministère des affaires étrangères : ils ne représentent donc pas une dépense supplémentaire. La Cour des comptes avait étudié la question à votre demande et avait évalué le coût de ces ambassadeurs à 0,2 % de la masse salariale du Quai d'Orsay. En outre, vous pourrez constater dans les semaines qui viennent qu'il n'y a pas de statu quo en la matière, monsieur Loncle.

La France est très bien représentée au sein du SEAE, tant quantitativement que qualitativement. De nombreux diplomates français ont en effet participé à la procédure de sélection assez complexe afin de rejoindre le SEAE. Au bout de deux ans, les Français étaient la première nationalité au sein du service. Ils le restent, mais depuis un ou deux ans, les choses sont un peu plus difficiles, nos grands partenaires ayant manifesté une volonté de rattrapage et Mme Ashton menant une politique visant à équilibrer la représentation de tous les États membres. Mais la France demeure le pays qui compte le plus de diplomates nationaux au sein du SEAE. En 2014, le mandat de Mme Ashton prendra fin et M. Vimont, secrétaire général exécutif, partira en retraite. Nous nous employons à préparer la relève.

Nous avons un dispositif très complet d'identification des postes à caractère stratégique au sein de la Commission européenne. Il ne s'agit pas seulement des postes les plus élevés dans la hiérarchie. En effet, les responsables d'unités de la Commission peuvent jouer un rôle essentiel : leurs propositions de directive ou leurs avis en matière d'aides d'État ou d'opérations de concentration industrielle remontent souvent jusqu'au collège des commissaires sans être modifiés de manière substantielle. Parallèlement, nous repérons, au sein des services de la Commission, les fonctionnaires susceptibles d'occuper ces postes.

De plus, nous préparons la mise en place de la nouvelle Commission. Nous identifions, au sein du vivier des fonctionnaires nationaux et de celui des fonctionnaires français de la Commission, ceux qui sont susceptibles d'occuper des postes dans les cabinets des futurs commissaires en fonction de leur expertise et de leurs compétences, notamment linguistiques. Nous serons prêts au moment où interviendront les désignations des membres de la Commission.

D'une manière générale, la situation demeure très favorable pour la France, tant au sein de la Commission que du SEAE. Mais la compétition est rude. La position des États fondateurs a été ébranlée par les élargissements successifs, ce qui était inévitable. Notre stratégie est donc en partie défensive : nous nous efforçons de conserver aux Français les postes que nous considérons les plus importants. Mais nous veillons également au renouvellement des générations. C'est là une tâche essentielle de notre représentation permanente à Bruxelles. Je continue à suivre ce dossier personnellement.

Vous avez raison, monsieur Lellouche : nos actions de coopération et les expertises techniques que nous finançons doivent aussi contribuer à nos objectifs économiques. Il faut une stratégie globale en la matière. En revanche, j'éviterais de poser la question de l'aide liée en termes binaires ou de principe : nous risquerions d'être perdants dans ce débat à l'OCDE. Il convient de profiter de chacune des actions que nous engageons dans un pays donné pour atteindre nos objectifs économiques, mais de manière aussi intelligente et habile que possible.

Dans le cadre de la modernisation de l'action publique (MAP), nous avons décidé une mise à plat du dispositif français d'expertise internationale. C'est un domaine dans lequel notre action présente des faiblesses, car nous sommes mal organisés. Alors que l'Allemagne dispose d'un opérateur unique, doté de 2 000 à 3 000 experts et d'une surface financière de 1 à 1,5 milliard d'euros, la France compte près d'une dizaine d'agences ministérielles compétentes. Or, il conviendrait de dépasser une certaine masse critique pour bénéficier pleinement des fonds multilatéraux, en particulier européens. Votre souci de valoriser au mieux nos actions de coopération au service de nos objectifs économiques est bien celui qui anime notre réflexion sur l'expertise, monsieur Lellouche.

Nous pouvons tirer deux enseignements de notre échec dans le domaine nucléaire à Abou Dabi. D'abord, quelle que soit la qualité de notre relation politique avec un pays donné, la réalité reste celle de la concurrence internationale : la terre entière se rue sur les marchés du Golfe. Il convient donc toujours de formuler l'offre la plus compétitive en termes de coût comme de qualité. Ensuite, nous jouons perdants si nous partons divisés. Notre échec tient avant tout à notre défaut d'organisation : nous n'avons pas su construire, avec nos champions du nucléaire, un consortium capable d'affronter la concurrence coréenne. Mais la leçon a été retenue : nous sommes aujourd'hui en mesure de constituer une véritable équipe française susceptible de répondre à l'appel d'offres que lancera peut-être l'Arabie saoudite si elle décide de mettre en oeuvre son programme nucléaire.

Monsieur Charasse, il existe en effet un risque que le conflit politique en République centrafricaine prenne un tour religieux et interconfessionnel. Nous devons donc rester clairs dans nos objectifs et agir avec détermination pour les réaliser : procéder au désarmement des milices de manière aussi impartiale que possible – ce que font nos soldats sur le terrain ; rétablir la sécurité – c'est la priorité absolue ; faciliter autant que possible l'acheminement de l'aide humanitaire, en particulier à Bangui, où la situation est dramatique ; préparer la transition politique, qui ne dépend pas de nous, mais sans laquelle aucun des objectifs précédents ne sera durablement atteint.

Certes, la situation demeure très préoccupante, mais il serait excessif de parler d'enlisement. En outre, nous travaillons à obtenir une participation européenne. Il ne s'agit pas, madame la présidente, de transformer l'intervention française en opération européenne. Nous souhaitons que l'action européenne complète la nôtre et celle de l'Union africaine de manière aussi efficace que possible. La mission de l'Union européenne pourrait avoir plusieurs volets : sécurisation, aide humanitaire et, à l'avenir, formation des forces de sécurité centrafricaines.

La diplomatie parlementaire doit faire partie de notre panoplie. La visite d'une délégation parlementaire est un moyen supplémentaire de marquer la présence de la France dans un pays donné. Certains de nos partenaires, en particulière l'Allemagne, pratiquent une diplomatie parlementaire plus active que la nôtre, tant à l'échelle européenne qu'au niveau mondial. Le ministère et les ambassadeurs font tout pour encourager et accompagner la diplomatie parlementaire, dans tous les domaines.

La diplomatie économique doit en effet s'adresser non seulement aux grands groupes, mais aussi aux PME et aux ETI. Nous nous sommes aperçus que beaucoup de celles-ci connaissaient mal, d'une part, les opportunités sur les marchés extérieurs et, d'autre part, notre organisation politico-administrative. Les ambassadeurs pour les régions, qui connaissent bien le fonctionnement de l'appareil diplomatique, peuvent jouer un rôle d'intermédiaire et leur apporter une aide précieuse : les informer, les orienter vers le bon guichet ou la bonne procédure, les aider à établir un contact avec les postes ou les ambassadeurs.

En outre, il convient d'encourager la logique de filière. Nous avions d'ailleurs conçu la partie économique de la dernière conférence des ambassadeurs dans cet esprit. Dans chaque grand secteur économique, une grande entreprise peut jouer un rôle de chef de file et entraîner derrière elle de nombreuses PME et ETI. C'est déjà ce qui se fait dans les secteurs de l'énergie et des transports. Nous cherchons à organiser notre équipe dans le domaine nucléaire selon ce même schéma. Nous aurons à poursuivre nos efforts et imiter nos partenaires allemands, plus efficaces que nous pour l'organisation de filières sectorielles.

Le développement des communautés françaises à l'étranger constitue un atout remarquable, sur lequel on peut s'appuyer. Nous sommes conscients du rôle que joue pour cela la qualité des services consulaires, mais nous cherchons à organiser ces services afin qu'ils soient aussi efficaces et peu coûteux que possible. Dans des pays tels que l'Espagne, l'Italie ou l'Allemagne, nous maintiendrons un maillage serré, mais nous concentrons l'état civil et l'aide sociale dans les postes consulaires les plus importants. Nous ne disposons pas d'un nombre d'emplois suffisant pour confier l'ensemble des compétences actuelles à tous les postes.

Je suis d'accord avec vous, monsieur Le Borgn' : il importe de maintenir une relation de proximité avec les communautés françaises, sous des formes diversifiées. Et si nous fermons des consulats – il n'y a cependant aucune fermeture prévue en Europe en 2014 –, nous devons donner les moyens de fonctionner aux dispositifs de substitution, en particulier aux consuls honoraires. Et être en mesure d'apporter des prestations à nos compatriotes grâce aux dispositifs électroniques mobiles que vous avez évoqués.

S'agissant de la Maison de France à Berlin, nous évaluons les différences options. Aucune décision définitive n'a été prise.

Pourquoi le ministère des affaires étrangères conduit-il une politique de cessions immobilières ? D'une part, certaines implantations ne sont plus adaptées à nos besoins. Il peut s'agir de bâtiments à caractère somptuaire ou de surfaces libérées par d'autres administrations qui ont renoncé à leurs services à l'étranger et dont nous n'avons pas l'usage. D'autre part, ces cessions nous permettent de financer nos investissements : la création de nouvelles ambassades, la restructuration et l'entretien du parc existant, la sécurisation de nos implantations.

Mais la logique financière n'est pas exclusive : les opérations immobilières visent à mieux structurer nos implantations, afin de renforcer notre capacité d'action, notre efficacité et notre rayonnement. Tel a été le cas en Argentine, où nous avons vendu une résidence certes séduisante, mais éloignée du centre et peu adaptée aux besoins d'un ambassadeur aujourd'hui. Nous en avons profité pour restructurer l'ambassade elle-même et en faire un outil de représentation et de travail à la disposition de l'ensemble des services de l'État. Enfin, nous avons dégagé un bénéfice utilisable dans d'autres opérations.

En matière immobilière, nous prenons chacune de nos décisions après en avoir mesuré toutes les conséquences. Lorsqu'une cession ne paraît pas opportune au vu de l'état du marché, ou parce qu'elle reviendrait à brader le patrimoine de l'État, nous ne la réalisons pas. En outre, il nous faut parfois tenir compte du caractère symbolique de certaines implantations qui contribuent au rayonnement de la France dans un pays donné. Mais nous ne devons pas non plus être entravés par la seule force des traditions ou de l'inertie.

Je vous rejoins, Monsieur Bacquet : l'efficacité en matière économique est affaire de cohérence et de coordination. Il est arrivé que nous ne tirions pas tous dans le même sens, notamment à Abou Dhabi. S'agissant du rapprochement envisagé entre Ubifrance et l'AFII, on doit concilier deux exigences : respecter la spécificité de chaque métier et améliorer l'efficacité de notre dispositif. Il ne faudrait pas, bien sûr, fragiliser notre expertise et nos compétences en procédant à une restructuration administrative hasardeuse. Nous devons au contraire les renforcer. La réflexion est en cours et nous nous efforçons de trouver le meilleur compromis possible. Quant à la piste de la double tutelle, elle est susceptible d'apporter en effet davantage de cohérence à notre dispositif.

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Ne nous focalisons pas uniquement sur le rapprochement entre Ubifrance et l'AFII. D'autres solutions existent pour améliorer la coordination : la contractualisation avec Sopexa, le travail en commun avec Ubifrance et les chambres de commerce à l'étranger. En outre, M. Destot insiste avec raison sur la promotion du tourisme. Un regroupement entre Ubifrance et Atout France serait beaucoup plus cohérent. « Vendre » la France et promouvoir l'attractivité de la France restent deux métiers différents. Vous avez d'ailleurs fait une distinction très intéressante, monsieur le secrétaire général : certaines de nos implantations à l'étranger – par exemple en Algérie – ont un intérêt majeur pour développer nos exportations, mais n'en ont guère pour attirer les investissements en France. Je regrette que le ministère de l'économie et des finances ne semble pas le comprendre.

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Pierre Sellal, Secrétaire général du ministère des affaires étrangères

La Chine bénéficiera du mouvement de redéploiement de 300 emplois que nous allons effectuer à partir des États-Unis et des postes les mieux dotés en Europe et au Maghreb, vers les grands pays émergents.

Nous devons en effet adapter nos implantations et l'allocation de nos moyens à l'évolution des rapports de puissance et aux nouvelles influences. Mais sans renoncer à nos atouts traditionnels dans le bassin méditerranéen, dans l'espace francophone et en Europe. Notre forte présence dans ces régions a également des retombées économiques. Nous nous efforçons de maintenir un équilibre entre ces deux exigences, et de ne pas céder prématurément aux effets de mode en concentrant massivement des effectifs dans un pays au détriment d'un autre. Il n'en reste pas moins que deux critères sont essentiels dans l'allocation de nos moyens : le potentiel que représente le pays considéré pour nos échanges, le besoin relatif d'une présence et de moyens d'action publics dans ce pays. Nous n'attendons évidemment pas la même chose de notre réseau diplomatique dans les pays émergents et dans les États limitrophes de la France en matière de promotion de nos exportations.

Je suis bien sûr tout à fait d'accord pour étendre les dispositifs de coordination à tous les acteurs qui contribuent d'une manière ou d'une autre à l'action extérieure de la France. Tel est bien notre objectif, tant à Paris que dans les postes. À l'étranger, la mise en cohérence est plus facile en raison de l'unité de lieu et du rôle de coordination des ambassadeurs qui n'est guère contesté. Nous allons cependant leur donner des moyens supplémentaires et préciser que ce rôle s'étend à tous les acteurs. Je tiens à vous rassurer, monsieur Cochet : le ministère dispose d'un vivier de fonctionnaires de très grande qualité et il a aujourd'hui les moyens d'évaluer ses agents de manière précise. Lorsque nous repérons des défaillances ou des insuffisances, nous en tirons immédiatement les conséquences.

La décision du ministre de ne pas rattacher le réseau culturel à l'Institut français a été motivée avant tout par notre souci de coordination, au-delà même du coût budgétaire qu'aurait représenté une telle restructuration. Nous avons souhaité que la compétence culturelle reste entre les mains du ministère. Cela n'enlève rien au rôle que devra jouer l'Institut français, qui s'est remarquablement imposé, dans les années qui viennent.

Madame Ameline, nous devons en effet réfléchir à une coopération fonctionnelle accrue entre le SEAE et les diplomaties nationales. La France est en pointe dans ce débat. Certains États membres, en particulier ceux qui disposent d'un réseau diplomatique peu étendu, considèrent que les délégations de l'Union européenne leur apportent la présence dont ils ont besoin. Mais nos grands partenaires, l'Allemagne et le Royaume-Uni au premier chef, ont une vision beaucoup plus restrictive : ils ne souhaitent guère étendre les compétences et le champ d'action des délégations. Depuis plusieurs années, j'essaie de convaincre mes interlocuteurs allemands qu'il serait logique de mutualiser davantage nos moyens dans le domaine consulaire, dans la mesure où nous avons créé l'espace Schengen et instauré une politique commune des visas. Ils me répondent que l'affaire est délicate pour eux sur le plan juridique, seul un fonctionnaire allemand ayant le droit de procéder à certaines opérations. Parfois, ils avouent franchement qu'ils ne souhaitent pas se priver d'un instrument utile dans la compétition économique internationale. Quant aux Britanniques, c'est pour eux une question de principe : la compétence consulaire est liée, de leur point de vue, à la souveraineté.

Le Quai d'Orsay consacre près de la moitié de son budget aux organisations internationales sous forme de contributions obligatoires ou de participations au financement des opérations de maintien de la paix. Cela réduit d'autant ses marges de manoeuvre budgétaires. C'est pourquoi nous jouons un rôle actif dans la maîtrise des dépenses des organisations internationales. Pour la première fois, le budget des Nations unies n'augmentera pas, voire diminuera légèrement cette année. Les grands contributeurs sont tous soumis à une discipline budgétaire dans le cadre national. Quant à nos contributions volontaires, elles ont atteint un niveau en deçà duquel notre rôle politique risque d'être contesté – vous le relevez avec raison, madame Ameline. Depuis dix ou quinze ans, nous avons fait porter sur ces contributions une partie importante de l'effort budgétaire qui nous était demandé. Aux yeux de la direction du budget, il s'agit de dépenses auxquelles nous ne sommes pas tenus. Nous devrons être très vigilants sur cette question à l'avenir.

La coopération décentralisée est un des instruments de notre panoplie. Nous devons être plus dynamiques dans ce domaine et mieux coordonner les actions. Un dispositif a été mis en place à cette fin à la suite du rapport de M. Laignel sur l'action extérieure des collectivités territoriales. Le ministre suit ce dossier de très près. La réunion de coordination qui se tiendra la semaine prochaine sera l'occasion de fixer de nouveaux objectifs en matière de coopération décentralisée.

Monsieur Quentin, nous nous sommes en effet inspirés de certaines expériences de nos partenaires en matière de réorganisation. Ainsi, nous avons repris des Britanniques la formule de l'ambassade au format très allégé : l'ambassadeur sera logé dans la chancellerie et ne disposera plus de résidence à part. Nous allons expérimenter cette formule dans treize postes à partir de cette année. En revanche, nous n'avons pas souhaité organiser les fonctions de back office sur une base régionale comme les Britanniques l'ont fait. Selon notre expérience, il vaut mieux concentrer le maximum de tâches de gestion administrative au niveau de l'administration centrale plutôt que de créer des échelons régionaux intermédiaires. Le modèle des préfectures de région ne paraît guère pertinent pour l'action internationale.

Le Foreign Office avait organisé l'année dernière à Londres un séminaire sur son organisation et ses performances, auquel il avait invité des entreprises, des journalistes, des universitaires et des parlementaires. Je ne résiste pas au plaisir de mentionner l'une de ses conclusions : nos amis britanniques ont dit espérer qu'ils disposeraient, dès 2014, de la deuxième diplomatie au monde en termes d'efficacité, après la diplomatie française !

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Je vous remercie, monsieur le secrétaire général.

Informations relatives à la commission

Au cours de sa réunion du 8 janvier 2014, la commission a nommé :

– M. Jean-Pierre Dufau, rapporteur sur le projet de loi d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale (n° 1627) ;

– Mme Chantal Guittet, rapporteure sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord de coopération administrative entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Bulgarie relatif à la lutte contre l'emploi non déclaré et au respect du droit social en cas de circulation transfrontalière de travailleurs et de services (n° 782) ;

– M. Jean-René Marsac, rapporteur sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'entente entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec relative à l'Office franco-québécois pour la jeunesse (n° 1099) ;

– Mme Marie-Louise Fort, rapporteure sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation du protocole commun relatif à l'application de la convention de Vienne et de la convention de Paris (n° 976).

La séance est levée à midi.