Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du 11 septembre 2012 à 16h15

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • HCB
  • OGM
  • scientifique
  • éthique

La réunion

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Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a entendu M. Jean-François Dhainaut, président du Haut Conseil des Biotechnologies.

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Nous avons le plaisir d'accueillir M. Jean-François Dhainaut, président du Haut conseil des biotechnologies (HCB), accompagné de MM. Jean-Christophe Pagès et Hamid Ouahioune, respectivement président du comité scientifique et secrétaire général du Haut conseil.

La commission avait déjà auditionné M. Dhainaut sous la précédente législature, le 3 mai 2011, en vue de sa nomination à la présidence de ce Haut Conseil à la suite de la démission de Mme Catherine Bréchignac. Je rappelle que, professeur des universités, vous présidiez auparavant l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES).

Lors de cette audition, vous aviez jugé nécessaires de nouvelles modalités de travail entre les deux comités du Haut conseil, le comité scientifique et le comité économique, éthique et social. Où en est-on aujourd'hui ? Des groupes de travail mixtes ont-ils été mis en place ? De façon plus générale, depuis votre nomination, avez-vous modifié votre approche sur l'équilibre à trouver entre expertise scientifique et réflexion sociétale ?

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Jean-François Dhainaut, président du Haut Conseil des biotechnologies

Mesdames et messieurs les députés, le président du comité scientifique, le secrétaire général et moi-même sommes heureux et honorés de nous entretenir avec vous. Christine Noiville, présidente du comité économique, éthique et social, se trouve malheureusement retenue par une autre réunion : elle ne pourra vraisemblablement pas nous rejoindre et vous prie de l'en excuser.

Le HCB, créé par la loi du 25 juin 2008 relative aux organismes génétiquement modifiés (OGM), est une instance indépendante chargée d'éclairer la décision publique. Placé auprès de cinq ministères – environnement, agriculture, santé, recherche et consommation –, il a pour mission de rendre des avis sur toutes les questions relatives aux biotechnologies, parmi lesquelles figurent naturellement les OGM.

Deux comités le composent : le comité scientifique et le comité économique, éthique et social. Laissant le soin à Jean-Christophe Pagès de vous parler du premier, je dresserai le bilan général des travaux du Haut Conseil et vous dirai quelques mots du comité économique, éthique et social – celui-ci a connu quelques turbulences en fin d'année dernière, à la suite desquelles le Premier ministre de l'époque m'avait demandé de formuler des propositions.

Depuis sa création, tant sous ma direction que sous la présidence antérieure de Catherine Bréchignac, le HCB a bien travaillé. Il a instruit 3 130 dossiers, dont plus de 3 000 concernant l'utilisation confinée d'OGM, qu'il s'agisse de recherches ou de production industrielle. Le reste des dossiers concerne la dissémination à titre expérimental, la culture ou l'importation de plantes génétiquement modifiées (PGM), des essais de thérapie génique ou des médicaments vétérinaires. Nous avons également traité de demandes post-commercialisation ou relatives à la législation nationale et européenne. Enfin, nous avons répondu à une saisine parlementaire.

Si une majorité de dossiers concerne l'utilisation confinée des OGM, ce sont les autres qui soulèvent le plus de problèmes. Deux d'entre eux nous ont longuement occupés : d'une part, la fixation du seuil pour le « sans OGM » ; d'autre part, les conditions de coexistence entre cultures OGM et non OGM. Nous avons ainsi été amenés à travailler sur le maïs, le soja, la betterave, la pomme de terre, la vigne.

En dépit de l'énergie considérable déployée par Christine Noiville pour faire travailler l'ensemble des parties prenantes en bonne intelligence, les représentants de deux organisations professionnelles agricoles (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles et Jeunes agriculteurs), de l'Association nationale des industries alimentaires (ANIA), du Groupement national interprofessionnel des semences et plants (GNIS) et de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) ont quitté fin 2011 le comité économique, éthique et social. Ces cinq démissions ont bien sûr des raisons multiples. Toujours est-il que certains, pensant que le comité était une instance de négociation et non de concertation, regrettaient que les choses n'avancent pas aussi vite qu'ils l'auraient souhaité. Il faut le reconnaître, le précédent gouvernement a aussi parfois tergiversé. Mais comment penser que dix-huit mois suffiraient à résoudre tous les problèmes relatifs aux OGM, sujet qui suscite depuis longtemps un débat très passionnel ?

Le Premier ministre François Fillon m'a demandé de revoir l'ensemble des acteurs et de tracer des perspectives d'évolution pour ce comité composé de parties prenantes défendant chacune ses positions, et qu'il n'est donc pas si aisé de faire fonctionner malgré son rôle essentiel pour refléter la position de la société vis-à-vis de certaines innovations. J'ai pris mon bâton de pèlerin et j'ai reçu tous les membres des deux comités. J'ai également sollicité l'avis de diverses personnalités reconnues dans le domaine des biotechnologies. J'ai ensuite remis au Premier ministre un rapport ouvrant quelques pistes de réflexion, sur lequel nous continuons de travailler avec le nouveau Gouvernement. Ce travail n'a pas été vain puisque ceux qui avaient démissionné se déclarent aujourd'hui prêts à revenir discuter.

Quelles propositions avons-nous formulées ?

Tout d'abord, il y a l'élaboration d'une charte pour une vision commune du HCB. Quand bien même les différentes parties n'ont pas la même vision des OGM, leur présence dans cette instance répond à un objectif commun. Pour éviter les malentendus et, partant, faciliter la formulation des avis, nous avons rédigé une charte. Après son examen par les deux comités, elle devrait être achevée fin octobre. Sur certains points, elle complète le règlement intérieur ; par ailleurs, elle rappelle le rôle de concertation – et non de négociation – du comité économique, éthique et social, ainsi que les obligations des membres du Haut Conseil (confidentialité, respect de la légalité, loyauté et investissement dans les travaux). Elle traite également de la meilleure façon d'exprimer les positions divergentes, ce qui n'est pas tâche facile, et des modalités du dialogue entre les deux comités.

Un autre point important est la clarté des priorités du Haut conseil. Le cadre politique dans lequel il évolue doit être aussi explicite que possible pour qu'il exerce correctement ses missions.

Il faut également, en complément du savoir scientifique, consolider l'expertise socio-économique. Ce n'est pas facile car les études sont extrêmement rares, leur méthodologie même est discutée. Très peu d'entre elles ont été effectuées en France, voire aucune. Trois solutions sont envisageables.

La première serait de confier cette expertise socio-économique au comité scientifique, c'est-à-dire à des experts et non à des parties prenantes, mais cela ne serait pas sans soulever des difficultés.

La deuxième consisterait à donner au comité économique, éthique et social les moyens de réaliser cette expertise, en lui adjoignant des personnalités qualifiées. Mais ses membres, parmi lesquels on ne compte aujourd'hui que trois experts, sont très attachés à leur qualité de partie prenante et ne souhaitent pas que le CEES se transforme en un second comité scientifique.

La troisième solution, que nous retiendrions mais qui reste à avaliser par le Gouvernement, serait une nouvelle entité spécifiquement chargée de l'expertise socio-économique. Il pourrait s'agir d'un groupe externe ou interne au HCB, voire mixte, qui épaulerait le comité économique, éthique et social dans l'évaluation socio-économique.

Bien que la loi n'en donne pas explicitement mission au Haut conseil, il faudrait également renforcer l'information du public. Avec notre effectif actuel, l'objectif paraît difficile à atteindre. Nous avons rénové notre site internet pour le rendre plus accessible, mais nous manquons de moyens pour aller au-delà.

Enfin, il conviendrait de revoir les modalités de gouvernance du Haut conseil. Plus de souplesse de fonctionnement serait nécessaire. Il faudrait notamment remplacer rapidement les membres démissionnaires. L'architecture même du Haut Conseil gagnerait sans doute à être revue, mais ce n'est là qu'un point de détail par rapport au reste.

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Jean-Christophe Pagès, président du comité scientifique du Haut Conseil des biotechnologies

Le gros de notre activité consiste à instruire des dossiers de recherches menées en laboratoire, que celles-ci soient fondamentales ou appliquées à l'agronomie et à la santé publique. Le HCB a pour mission de vérifier l'adaptation des locaux de recherche aux risques que peuvent présenter les OGM manipulés.

Face à l'augmentation du nombre des dossiers, ceux-ci seront préalablement saisis sur un serveur informatique du ministère de la recherche et transmis par voie électronique au HCB. Cela devrait permettre un traitement plus fluide, d'autant que le risque théorique faible pour l'environnement n'est plus soumis qu'à simple déclaration.

Le nombre de dossiers de thérapie génique augmente de nouveau depuis un an. Alors que ces méthodes avaient suscité un vif enthousiasme au début des années 2000, la survenue d'effets adverses chez plusieurs patients – notamment lors d'essais menés à l'hôpital Necker à Paris – avait conduit à interrompre beaucoup de programmes. Depuis, la recherche a progressé et des perspectives thérapeutiques apparaissent, par exemple pour le traitement de cécités d'origine génétique. Ce pan de notre activité devrait donc s'accroître. Plusieurs essais sont également en cours en cancérologie, où des virus transgéniques se sont révélés capables de détruire des tumeurs. Pour ce qui est des médicaments et des vaccins vétérinaires, notre activité ne devrait pas beaucoup évoluer. En ce qui concerne les plantes génétiquement modifiées, nous instruisons des dossiers de demande de mise en culture ou d'importation ; cette activité stagne du fait des interrogations sur les modalités d'examen des dossiers au niveau européen et sur la nécessité d'une évaluation socio-économique.

Nos deux comités viennent également d'être saisis des protocoles de surveillance biologique proposés par le Comité de surveillance biologique du territoire (CSBT). Créée également par la loi du 25 juin 2008, cette instance est chargée de définir ces protocoles suite à des autorisations de mise en culture d'OGM sur le territoire national. Au terme de leur examen, nous validerons ces propositions ou nous demanderons des modifications.

J'en viens aux relations entre le comité scientifique et le comité économique, éthique et social. Dès le début, nous avions pris certaines libertés en organisant des groupes de travail communs, afin que les sujets intéressant les deux comités puissent être abordés en concertation. Cela a été le cas pour la définition du « sans OGM », même si l'implication du comité scientifique a été modeste et limitée à l'apport de données techniques pour lancer la réflexion. Un autre groupe de travail commun a concerné les conditions de coexistence entre cultures OGM et non-OGM. C'est ce dernier qui a défini les questions abordées et la façon dont elles le seraient, participant parallèlement aux élaborations de l'avis du comité scientifique et de la recommandation du comité économique, éthique et social.

Le comité économique, éthique et social adresse parfois des questions au comité scientifique, pour rendre ses avis plus clairs et en faciliter la lecture. De nous-mêmes, nous nous efforçons d'ailleurs de proscrire le jargon. Il m'arrive, accompagné d'un ou plusieurs experts, de me rendre devant l'autre comité. Les discussions, moins formelles que les échanges écrits, sont souvent plus faciles et plus constructives. Certes, un scientifique qui a étudié pendant dix ans une bactérie ne pourra jamais réduire son travail à dix pages, mais nous ferons tous les efforts nécessaires pour rendre les données plus accessibles. Le nombre de groupes de travail à mettre en place sera augmenté en tant que de besoin.

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Je donne maintenant la parole à nos collègues, et en premier lieu aux porte-parole des groupes.

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Nous sommes très heureux, M. le président, de vous réauditionner, d'autant que c'est le Parlement qui est à l'origine de la création du HCB. Je ne reviens pas sur la nécessité d'une telle instance indépendante. Sa composition a-t-elle aujourd'hui besoin d'être modifiée, tant en nombre qu'en qualité ? Faudrait-il par exemple y adjoindre d'autres personnalités ?

Pourriez-vous nous dire quelques mots de ses moyens humains et financiers ?

Le Parlement avait souhaité que le HCB l'éclaire sur l'impact environnemental et sanitaire, mais aussi sur les dimensions économique et sociale des OGM. Vous avez cité des incidences positives. Existe-t-il des incidences négatives avérées sur la santé, animale ou humaine ? Que peut-on dire aujourd'hui de l'impact économique et social des OGM, dans les pays en développement et dans les grands pays producteurs agricoles ?

Le HCB a-t-il des homologues européens ? Si oui, quels liens entretient-il avec eux ? Pourriez-vous enfin nous rappeler brièvement les principales divergences entre les 27 pays de l'Union européenne sur le sujet des OGM ainsi que les débats qui animent la Commission européenne et le Parlement européen ?

Comment le Parlement a-t-il usé de son droit de saisine du HCB, qu'il avait souhaité instaurer par la loi ?

Notre pays, l'une des grandes nations agricoles du monde, est très attaché aux labels de qualité de ses productions. Un effort considérable a été fait, lors des deux dernières législatures, en faveur de l'agriculture biologique. Sa coexistence pérenne avec une agriculture utilisant les OGM est-elle possible concrètement ou envisageable ? À qui doit être imputée, selon vous, la responsabilité en cas de contamination extérieure non intentionnelle de productions bio par des OGM ?

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Il est hors de question de transférer la responsabilité de la décision politique en matière d'OGM à une instance comme le HCB, seulement chargée d'éclairer cette décision. Quelle que soit la complexité de la matière, il appartient aux pouvoirs publics d'assumer leurs choix comme les responsabilités ou les accidents qui découlent de mauvaises pratiques. N'y a-t-il pas d'ailleurs une relative contradiction entre leur souhait d'être éclairés dans leurs décisions et le fait que, la plupart du temps, celles-ci se traduisent par l'édiction de normes ? Il est délicat de « normer » des innovations, ce qui vous est pourtant demandé. Le Haut conseil sera, par sa nature, toujours saisi de questions nouvelles.

Évaluer un risque est difficile en soi. Évaluer son acceptabilité l'est encore davantage. Existe-t-il un suivi des avis du Haut conseil, de façon à savoir si des effets positifs espérés ou des effets négatifs redoutés se sont avérés ? Si tel n'est pas le cas, il faudrait sans doute agir en ce sens. Il importe de savoir si les résultats ont été à la hauteur des espoirs car aucun risque ne vaut d'être couru sans contrepartie. Les mêmes interrogations se posent en matière de veille.

Il faudrait augmenter les moyens du Haut conseil, avez-vous dit, car le nombre de dossiers à traiter augmente. Mais dispose-t-on d'assez de personnel compétent dans le domaine de l'évaluation du risque et de son acceptabilité ? Il faudrait développer de nouvelles formations en ce domaine ou compléter celles qui peuvent exister, de façon que décideurs publics, économiques et scientifiques, s'imprègnent davantage de cette culture particulière du risque inhérent à l'utilisation des biotechnologies.

Enfin, qu'en est-il de l'approche internationale, indispensable dans l'évaluation de ces risques ?

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Le HCB, où la concertation est la règle, pourrait être un modèle de la démocratie environnementale que nous appelons de nos voeux. Dans votre rapport, vous suggérez pourtant certaines évolutions. Cette instance, unique en France comme à l'étranger, possède en réalité les défauts de ses qualités. Sa composition rend difficile le consensus. Où en est votre réflexion sur cette composition ? Quid d'une meilleure représentation de certains segments de la filière agricole et de la filière agro-alimentaire ?

Vous souhaiteriez également une évolution de la gouvernance. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet ?

Il faudrait, avez-vous dit, consolider l'expertise socio-économique. Les missions du HCB vous semblent trop floues sur ce point. Quelles évolutions vous paraîtraient souhaitables, au niveau national comme européen ?

La communication sur les OGM est très importante, comme sur tous les sujets environnementaux. Une totale transparence est nécessaire. Vous déplorez que les avancées et les convergences obtenues au HCB n'aient pas été relayées comme il l'aurait fallu et que le grand public ne soit pas suffisamment informé de vos travaux. D'instance consultative, le HCB ne devrait-il pas devenir décisionnel ? Comment traduire en actes ses avis ?

Les sciences dures sont tenues pour l'alpha et l'oméga de l'expertise scientifique. Or la sociologie, l'économie, la géographie, la philosophie, et même la théologie, sur des sujets comme la thérapie génique, sont tout aussi importantes. Pour ce qui est de l'acceptabilité des risques, une approche multidisciplinaire la plus large possible me paraît indispensable. Qu'en pensez-vous ?

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Si chacun se félicite de disposer en France d'une instance comme le HCB, le bilan que vous dressez suscite des interrogations. Quelle est son efficacité par rapport aux véritables enjeux comme l'acceptabilité du risque présenté par les OGM ou le respect de la démocratie ?

Nos concitoyens ignorent l'existence de ce Haut conseil : comme vous le soulignez dans votre rapport, il devrait disposer de davantage de moyens pour traiter de manière plus approfondie les questions qui lui sont soumises. Il intervient de manière morcelée, ce qui n'est pas le plus adéquat pour répondre de manière scientifique compte tenu de la complexité des risques. Les réponses apportées devraient être plus intelligibles et moins segmentées. Mais il faut pour cela trouver des appuis aux niveaux européen et international, faute desquels on se heurte rapidement à des limites.

J'assistais récemment dans mon département à une assemblée agricole, où a été abordée la question des OGM : les agriculteurs présents se félicitaient de s'être opposés à l'expérimentation de culture de betteraves transgéniques prévue dans un village du département, ce qui leur permet aujourd'hui de mettre en avant la qualité et la spécificité de leur production.

Bien que l'on réfléchisse depuis des années, je ne discerne pas plus clairement aujourd'hui qu'hier les avantages et les inconvénients des OGM. À vous entendre, il semble que l'on ait peu progressé. Pourquoi ? En volume, les travaux du HCB sont très satisfaisants. Sur le plan qualitatif, nous restons sur notre faim.

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Tout d'abord, je me félicite que le principe de précaution soit unanimement reconnu.

L'utilisation d'OGM ne risque-t-elle pas de porter irrémédiablement atteinte à la biodiversité ?

Comme cela a été dit, il est important d'associer des spécialistes de sciences humaines – sociologues, économistes, philosophes – à la réflexion sur les OGM. Donnons un peu moins de place, ou plutôt juste leur place, leur place juste, aux sciences dures. Ne perdons jamais de vue la société future dans laquelle nous voulons vivre lorsque nous évaluons les risques des biotechnologies. Que signifierait une nature totalement contrôlée par l'homme ? Quelles conséquences pourraient en résulter ?

Comment prenez-vous en compte les messages des lanceurs d'alerte, personnalités engagées ou experts ? Comment ces messages sont-ils traités puis répercutés vers le grand public ? Il est difficile de toucher le citoyen lambda et d'être compris de lui sur ces sujets complexes où s'imbriquent aspects scientifiques et philosophiques voire théologiques. Qu'en pensez-vous ? Comment faire pour que demain tous puissent partager une vision de la société que nous voulons pour le futur ?

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Le rapport rédigé en 2001 par Pierre Kopp et Thierry Laurent, intitulé Biotechnologies et hautes technologies : le retard français, et le dossier que la revue Décision Santé a récemment consacré au retard de croissance des « biotechs » françaises, laissent à penser que notre pays aurait raté le train des biotechnologies en raison d'un déficit d'investissements publics et privés – je pense notamment à ceux des industries pharmaceutiques. J'aimerais recueillir votre avis sur ce point. Avons-nous toujours un retard structurel par rapport aux autres pays, notamment ceux de l'Union européenne ? Comment le combler ? Sans doute avez-vous quelques idées en la matière.

Enfin, quelle place pour la France dans la stratégie de bioéconomie à l'horizon 2030 établie par l'OCDE ? Au-delà de vos missions, il vous appartient de tracer des perspectives.

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Vous avez fait allusion à l'interruption des recherches de l'INRA sur des porte-greffes de vigne génétiquement modifiés à Colmar, en août 2010, suite à leur arrachage par des militants anti-OGM. Cette expérimentation était conduite afin d'induire une résistance des vignes à la maladie dite du court-noué : celle-ci touche environ deux tiers des vignobles français et entraîne un dépérissement progressif, particulièrement des cépages de pinot noir, ce qui a pour conséquence des pertes de récoltes, une baisse de la qualité des vins et un raccourcissement de la vie des vignes. Aucun traitement n'est disponible pour la combattre. Où en est donc ce programme de recherche ?

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L'agriculture a de multiples enjeux territoriaux, économiques, environnementaux, mais aussi alimentaires et de santé publique. Assurer la sécurité alimentaire est un objectif auquel nous tenons tous. Le ministre de l'agriculture, Stéphane Le Foll, a confirmé le maintien du moratoire sur les OGM, dans la mesure où ceux présents sur le marché avec une caractéristique pesticide ou de tolérance à herbicide suscitent l'inquiétude pour leurs effets sur l'environnement – et sur l'homme. Particulièrement attachée à l'agriculture durable, j'estime que nous ne pouvons accepter la culture des OGM en plein champ du fait des risques de diffusion sur les autres productions. À la lumière de vos recherches, ne vous semble-t-il pas utile de poser des règles strictes interdisant les cultures OGM dans notre pays tant que ne sera pas acquise la certitude de leur innocuité pour l'homme et son environnement ?

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Les recommandations du comité économique, éthique et social apportent des éléments de compréhension et de contexte, en replaçant les dossiers instruits dans un cadre socio-économique. Vous avez souligné la nécessité d'une réelle évaluation des risques et des bénéfices des OGM. Pensez-vous être un jour en mesure de donner une réponse claire, et si possible objective, quant à la nocivité des OGM ? Dans quel délai ?

Selon Christine Noiville, les démissions des mois passés étaient dues à un contexte politique et réglementaire abscons et à l'impression, partagée par plusieurs membres, d'être instrumentalisés. Avez-vous le sentiment que ce contexte s'est amélioré depuis le changement de majorité ?

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L'outil n'a de valeur que par la qualité de celui qui s'en sert. La loi de 2008 a créé un outil dont l'objectif était de dédramatiser le débat sur les OGM : la constitution de ce Haut Conseil devait permettre, grâce à la nomination d'un certain nombre de personnes dites responsables, un débat serein. Tel n'a pas été le cas. Le comité économique, éthique et social n'a pas su trouver ses marques : dès la première séance, la désignation du vice-président avait donné le ton. Il n'est donc pas surprenant que nous ayons abouti à des difficultés : ses membres ne sont pas des experts, mais des parties prenantes. Comment apporter une expertise sereine lorsque l'on milite ? Cette ambiance a atteint son paroxysme lors du fauchage de Colmar. Avons-nous encore une chance d'avoir un débat serein dans notre pays ? Les uns et les autres seront-ils un jour capables de s'écouter ? Les propos que viennent de tenir certains de nos collègues le confirment : nous n'avons pas su laisser la place aux essais et à l'expérimentation. Si les études ne sont pas disponibles dans notre pays, c'est tout simplement qu'elles ne sont jamais allées jusqu'au bout en raison des arrachages.

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Je me suis penché sur différents avis rendus par le comité scientifique sur des demandes d'autorisation de mise sur le marché de produits génétiquement modifiés à des fins d'importation, de transformation ou d'utilisation en alimentation humaine et animale. Les rédacteurs de ces avis observent régulièrement que les études d'impact présentées par les demandeurs d'une autorisation ne se réfèrent qu'à une importation dans les régions de l'Union européenne de climat tempéré, sans tenir compte des particularités climatiques d'outre-mer. J'aimerais que vous m'indiquiez les impacts particuliers que peut avoir l'importation de soja ou de maïs génétiquement modifié dans les climats équatoriaux ou tropicaux. En fonction de votre réponse, et face à la récurrence des constats de vos experts, vous paraît-il nécessaire de préciser la réglementation afin que les importateurs évaluent systématiquement les risques dans nos territoires à climat tropical ou équatorial ?

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À la suite des démissions intervenues au sein du comité économique, éthique et social, le président de la commission environnement de la FNSEA, Pascal Ferey, a déclaré de manière lapidaire : « Nous n'y reviendrons que sous trois conditions : l'arrêt des indemnisations des personnes qui y siègent ; la fin de l'hypocrisie sur les conclusions qui sont interprétées comme bon leur semble par les politiques ; la nomination de rapporteurs neutres pour les missions d'enquête. » Souhaitez-vous réagir à cette déclaration ?

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Jean-François Dhainaut, président du Haut Conseil des biotechnologies

Je vous remercie d'avoir insisté sur l'interaction des comités, qui est vraiment nécessaire. Elle permet à l'ensemble des parties prenantes de dialoguer, ce qui n'existait pas auparavant, mais également de s'entretenir avec les scientifiques, ce qui n'existait pas davantage. C'est tout l'intérêt de ce Haut Conseil. Ne lui demandons cependant pas l'impossible, à savoir pacifier en un ou deux ans une opposition qui dure depuis maintenant une vingtaine d'années et qui suscite dans notre pays un débat passionnel. Prenons l'exemple de la recherche clinique : il a fallu près de vingt ans pour parvenir à des règles claires – et encore la récente loi Jardé ne répond-elle pas à toutes les problématiques. Ne nous leurrons donc pas : il faudra du temps pour que tout le monde se comprenne. Laissons passer la crise d'adolescence. Je ne réagirai donc pas à la déclaration de M. Ferey, car je souhaite apaiser le débat. Ses propos ont d'ailleurs été tenus dans un contexte particulier.

J'en viens à la composition du HCB. Après une longe réflexion, nous estimons qu'il n'y a pas lieu de modifier le comité scientifique : les différentes parties prenantes, y compris les sciences sociales, sont bien représentées – tout comme d'ailleurs au comité économique, éthique et social – avec des sociologues, des juristes et des économistes. Le comité économique, éthique et social compte bien sûr davantage de membres qui travaillent sur l'éthique, puisque c'est son rôle.

Nous avons fait le choix d'un groupe d'experts, le comité scientifique, apportant son expertise au comité économique, éthique et social, qui réunit les parties prenantes. Loin d'être négative, l'existence de ce dernier assure une ouverture vers la société. Certains d'entre vous l'ont d'ailleurs qualifié, à juste titre, de laboratoire d'expérimentation. Nous avons évoqué quelques pistes pour faire évoluer sa composition mais, pour la plus grande part, nous la maintiendrions volontiers. Je crains en effet qu'à vouloir en faire trop, nous n'ouvrions la boîte de Pandore. Vous savez combien le sujet des OGM est complexe, et vos questions reflètent d'ailleurs les oppositions entre les défenseurs de la biodiversité et ceux qui estiment qu'on a cassé les biotechnologies en France. Bref, nous ne tenons pas à modifier la composition du HCB, mais les deux comités ont besoin d'apports quantitatifs.

L'heure n'est certes pas à évoquer cette question, mais il est clair que les moyens du HCB sont relativement faibles au regard de ses homologues européens. La FNSEA et le GNIS, notamment, estiment que la charge de travail des experts est trop lourde. Un secrétariat plus étoffé serait une aide précieuse.

Quant à assurer des actions à destination du grand public, nous ne pouvons tout simplement pas : nous n'avons pas les moyens. Notre travail est déjà très lourd et de qualité. Moi qui ai présidé l'AERES, qui rendait 10 000 évaluations par an, j'ai été très favorablement impressionné par la qualité des rapports du comité scientifique et des recommandations du comité économique, éthique et social.

Vous m'interrogez sur les instances européennes. Les convergences priment sur les divergences. Néanmoins, la France doit oeuvrer davantage à se mettre d'accord avec ses alliés européens, les oppositions se manifestant plutôt avec des pays non européens.

Le droit de saisine des parlementaires n'a été exercé qu'une fois. C'est peu. Il serait souhaitable que vous en usiez davantage.

Il est ardu de comparer la France et les grands pays qui se sont lancés dans la culture des OGM, car ceux-ci possèdent généralement de grandes étendues. Les études sont donc peu transférables.

Le problème de la responsabilité de la coexistence des cultures OGM et non OGM est difficile à résoudre. Nous avions préconisé la création de groupes de travail à l'échelle régionale, ce qui nous paraissait plus pertinent qu'une réflexion nationale.

Plusieurs orateurs ont évoqué un transfert de la décision vers la technocratie. Il ne saurait évidemment en être question. Notre rôle n'est pas de trancher, mais d'identifier les risques et les bénéfices. Nous n'entendons pas aller au-delà. Les politiques ne connaissent pas forcément les dernières données scientifiques. Il est important que nous leur apportions un éclairage, s'agissant tant de la santé que de l'environnement, afin de nourrir une réflexion sociétale. La relation établie entre le comité scientifique et le comité économique, éthique et social est à cet égard très riche : les vraies questions ont été posées.

J'en viens au suivi de nos avis. Ceux qui concernent les thérapies géniques sont bien suivis. En ce qui concerne les PGM, il existe désormais un Comité de surveillance biologique du territoire (CSBT), dont vous parlera Jean-Christophe Pagès.

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Jean-Christophe Pagès, président du comité scientifique du Haut Conseil des biotechnologies

Je suis heureux que certains d'entre vous aient lu les avis du comité scientifique. Permettez-moi de revenir sur quelques éléments qui sont nécessaires à la compréhension de ce que nous y faisons. Nous devons identifier des risques pour la santé animale ou humaine ainsi que pour l'environnement. Nous examinons les dossiers qui nous sont soumis afin de vérifier si l'ensemble des questions qui doivent être posées l'ont été, et si la méthodologie des demandeurs permet de tirer des conclusions définitives. C'est là une nuance importante. Très souvent, nous sommes conduits à critiquer la méthodologie, sans pour autant identifier de risque majeur qui nous amènerait à préconiser un rejet de la demande. Nous ne l'avons fait qu'une seule fois, pour la betterave H7-1, en raison d'une possibilité de dissémination des pollens vers des betteraves sauvages, et quand bien même aucun autre risque n'avait été identifié.

Bref, lorsque des risques sont repérés, nous les signalons. Mais dans la majorité des cas, nous n'avons pas à le faire. Néanmoins, nous donnons les limites de notre analyse. Là est toute la difficulté : aucun comité scientifique ne dira qu'il n'y a aucun risque. Pour autant, les dangers identifiés peuvent-ils être assumés ? Comment vérifier leur réalisation ou mesurer leur portée ? C'est une question particulièrement importante, qui a conduit à la création du Comité de surveillance biologique du territoire (CSBT). Espérons que les moyens de remplir cette mission lui seront donnés.

En matière d'OGM, aucun péril pour la santé ou l'environnement n'est à ce jour identifié, en-dehors donc des pollens de betterave transgénique – et ce quand bien même les pratiques associées aux OGM peuvent avoir un impact comme n'importe quelle pratique agricole. Une question se pose ici au décisionnaire et aux acteurs des filières agronomiques : faut-il ou non utiliser cette technologie, et dans quelle mesure le faire en l'absence de risque environnemental identifié ?

J'en viens aux nouvelles technologies. Nous entendons par là les technologies qui vont changer la qualité des OGM ou générer des plantes que l'on ne pourra pas distinguer des non OGM. Une réflexion est en cours à l'échelle européenne. Le groupe de travail mis en place pour évaluer un certain nombre de procédés a rendu son expertise. Il a été décidé que chacune des technologies serait évaluée au cas par cas. C'est une bonne solution, dans la mesure où la mise en oeuvre à grande échelle de certaines d'entre elles est actuellement inenvisageable – il s'agit en fait plus de perspectives technologiques que de nouvelles technologies. En revanche, certaines auront des applications relativement proches. Des consultations seront donc proposées prochainement.

La question de la participation de théologiens à l'évaluation de la thérapie génique est délicate. À mon sens, elle n'est pas du ressort du HCB, qui s'intéresse aux risques associés et non à la pertinence d'un procédé. Je rappelle d'ailleurs qu'il s'agit de thérapie génique somatique, qui concerne le patient et uniquement le patient – autrement dit, il n'y a pas de risque pour l'espèce.

Si la question de la biodiversité doit être posée, je rappelle que les OGM ne sont pas les seuls acteurs de la modification de la biodiversité. Pour certains OGM comme le soja, pour lequel il n'y a pas d'espèce compatible en Europe, l'action de modification de la biodiversité viendrait de la culture du soja en lui-même – qu'il soit OGM ou non – et non d'un soja OGM qui diffuserait des gènes modifiés. Le cas de la betterave est différent, d'où les réserves que nous avions émises. La question peut être posée pour le colza, puisqu'il y a des espèces qui peuvent être fertilisées par des espèces naturelles. Cette question n'est pas ignorée, mais nous l'abordons de façon partielle. Les questions que pose la biodiversité dépassent en effet largement celle des OGM.

Nous sommes à l'écoute des lanceurs d'alerte, à commencer par les parlementaires à travers l'exercice de leur droit de saisine. La question que M. Grosdidier, alors député, nous avait posée concernait le travail d'une équipe française à propos de la toxicité en santé animale pour certains OGM. Nous avions analysé divers articles et nous lui avions adressé le compte-rendu de notre travail. Un grand nombre de forums nous interrogent également régulièrement en tant que scientifiques. Nous prenons en compte ces différents points de vue.

Si nous précisons que les études d'impact présentées par les demandeurs d'une autorisation ne se réfèrent qu'à une importation dans les régions de l'Union européenne de climat tempéré, c'est parce que les évaluations ne sont pas faites pour l'outre-mer. En l'absence de données pour ces territoires à climat tropical ou équatorial, nous ne pouvons pas – en toute rigueur scientifique – proposer des mesures de surveillance qui vont servir de socle au CSBT pour construire les protocoles de surveillance. Il nous semble important de prendre cette précaution, dont la portée est cependant limitée. Le maïs est en effet peu cultivé à la Martinique. On en trouve à la Réunion, mais sur de toutes petites parcelles. Les éventuels impacts environnementaux seraient donc modestes.

Comme l'a indiqué Jean-François Dhainaut, nous manquons de données pratiques sur un grand nombre de questions. À mon sens, toutes les évaluations demandées au HCB et à ses homologues sont des évaluations de gradation des risques. En l'absence d'identification de risques, des mises en oeuvre sont réalisées ainsi que des mesures de suivi et des adaptations. Des maïs transgéniques sont cultivés en Europe, notamment en Espagne et au Portugal ; il y a un suivi, et des ajustements sont proposés lorsque des impacts sont notés. Je n'ai pas l'impression que cela se passe mal.

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Jean-François Dhainaut, président du Haut Conseil des biotechnologies

La pluridisciplinarité me paraît bien établie au HCB. Je l'ai déjà dit, l'interaction entre les sciences biologiques et les sciences de l'homme y est assurée. C'est je crois un point très important.

Je voudrais également redire que le HCB n'est pas décisionnaire. Qu'il y ait ou non culture de PGM en France n'est pas une problématique pour nous.

S'il est une question qui doit être soulevée au plan européen, c'est celle de la recherche. C'est un domaine complexe, et on ignore comment vont évoluer les OGM. Certes, rien ne semble avoir un avenir immédiat, mais il ne faut pas fermer la porte.

Quant au contexte politique, je forme des voeux pour que nous puissions travailler bien, et dans un espace clarifié. Il est très important que l'on nous indique dans quels domaines travailler et que l'on nous fixe des priorités.

Enfin, je voudrais dire que baigner dans un contexte militant n'empêche pas les choses d'avancer. Si cela paraît si difficile, ce n'est pas tant du fait des opinions différentes que parce que nos données sont encore parcellaires. C'est pourquoi il est important que la recherche progresse, en particulier sur l'environnement : nous pourrons alors donner au politique des éléments plus précis. Du point de vue sanitaire, les données sont plus solides.

Quant aux aspects socio-économiques, ils sont fondamentaux. Il y a encore trente ans, l'évocation des données médico-économiques suscitait l'étonnement ; désormais, on ne fait plus rien sans elles. Favorisons à présent la recherche dans le domaine socio-économique.

Le HCB est un laboratoire pour confronter les scientifiques et les différentes parties prenantes sur ce sujet difficile. Encore une fois, n'attendons pas qu'il conduise une discussion sereine en quelques mois ; que les gens se parlent et se comprennent est déjà une avancée.

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Jean-Christophe Pagès, président du comité scientifique du Haut Conseil des biotechnologies

Sur le problème de la responsabilité en cas de contamination, je voudrais rappeler comment le comité scientifique a construit son avis sur la coexistence – alors même que la question ne nous avait pas été posée. C'est une approche qui met l'accent sur les semences, car c'est la coexistence est importante sur la durée : il s'agit de garantir que les semences non OGM resteront non OGM. C'est une préoccupation importante, puisqu'un grand nombre des plantes cultivées en France ont des semences issues de pays où l'on cultive des OGM. Le ministère de l'agriculture exerce une surveillance sur les semences importées, afin de bloquer celles qui contiendraient des OGM. L'importateur a la responsabilité de s'assurer de l'absence de semences OGM dans ses produits.

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Jean-Christophe Pagès, président du comité scientifique du Haut Conseil des biotechnologies

La responsabilité est une des questions sur lesquelles le HCB avait demandé une concertation entre les différents acteurs. Nous avions en outre suggéré à la représentation nationale de se saisir de la question, car il n'appartient pas au HCB de décider qui doit porter cette responsabilité.

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C'est un point fondamental. Vous partez des semences ; je vais partir du produit fini. Prenons le cas d'un exploitant agricole qui a bâti sa stratégie sur une production de qualité ou sur une démarche d'agriculture biologique pour laquelle il lui a fallu de nombreuses années. Accrédité et contrôlé par des organismes indépendants, en contrepartie du respect d'un cahier des charges drastique, il a décroché des contrats commerciaux et gagné la confiance des consommateurs, qui achètent un produit labellisé par la République française et par l'Union européenne. Imaginons que cet agriculteur se trouve contaminé de manière extérieure et involontaire, et que la présence d'organismes soit détectée lors d'un contrôle de la marque distributeur ou de l'organisme certificateur : il risque le refus de sa marchandise, le retrait de son accréditation, voire l'engagement d'une procédure devant un tribunal par la marque distributeur pour manquement, escroquerie ou tromperie au consommateur. Vous invitez le Parlement à se saisir de cette question. J'attire pour ma part l'attention du président de notre Commission sur ce débat de fond, que j'ai déjà eu l'occasion de soulever en tant que parlementaire en mission sur l'agriculture biologique ou sur la mortalité des abeilles.

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Lorsque nous avons étudié ces questions, il y a deux ou trois ans, nous avions le cas d'un agriculteur bio des Deux-Sèvres qui avait perdu son label. Cela a été démontré, il n'y a pas de coexistence possible : chaque fois qu'il y a eu des OGM quelque part, il y a eu contamination. C'est donc celui qui sème des OGM qui est responsable.

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Jean-Christophe Pagès, président du comité scientifique du Haut Conseil des biotechnologies

C'est en un sujet complexe. Dans notre avis sur la coexistence, nous avons proposé des mesures techniques pour garantir une présence fortuite d'éléments transgéniques inférieure à 0,1%. En revanche, il ne nous appartient pas de mettre en place les mécanismes d'indemnisation, de compensation ou d'information.

Permettez-moi de vous apporter une petite précision en ce qui concerne les abeilles. J'avais publié dans Les Echos, avec Jean-Jacques Leguay, un point de vue qui n'a pas été restitué intégralement. On associe fréquemment la présence de pollens OGM avec la mortalité des abeilles. Or, à ce jour, aucune donnée scientifique ne permet de lier un quelconque OGM avec la mortalité des abeilles. Pour l'apiculture, c'est un problème de commercialisation qui se pose, celui de la possibilité de détecter des pollens OGM dans le miel. Le comité scientifique s'était saisi de cette question et avait donné des éléments de définition du « sans OGM » : étant donné les quantités de pollen présentes dans le miel et les modes de dissémination du maïs, espèce visitée – mais peu – par les abeilles, nous avions estimé que des aspects techniques faisaient que la pertinence de cette recherche de pollens OGM n'était peut-être pas assurée. Tel est le point de vue scientifique. Pour ce qui est des transactions commerciales, c'est une autre affaire : il est nécessaire de clarifier la situation.

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Jean-François Dhainaut, président du Haut Conseil des biotechnologies

Les différents points que vous soulevez sur la responsabilité ont été étudiés dans les recommandations sur la coexistence du comité économique, éthique et social. Il n'a bien sûr pas tranché, mais il a dénombré les problèmes posés.

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Permettez-moi de vous poser une dernière question : quels sont le budget et le nombre d'emplois du HCB ?

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Jean-François Dhainaut, président du Haut Conseil des biotechnologies

Nous n'avons pas de problème sur notre budget de fonctionnement. Du point de vue des ressources humaines, en revanche, nous sommes sous-équipés, si bien que nous ne pouvons aider réellement les experts et les parties prenantes. Incontestablement, nous avons besoin de plus de moyens humains pour assurer toutes nos missions. Je le répète, nous ne pouvons assumer des actions à destination du grand public dans les conditions actuelles. Nous nous cantonnons dans ce domaine à notre site internet.

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Hamid Ouahioune, secrétaire général du Haut Conseil des biotechnologies

Le HCB a été mis en place en mai 2009 avec 5 équivalents temps plein (ETP). Aujourd'hui, on en dénombre 7, et bientôt 8, grâce au soutien des ministères de l'agriculture et de la recherche, qui ont chacun mis un personnel à disposition. Ces effectifs sont suffisants pour travailler dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui. En revanche, ils sont trop restreints pour permettre d'améliorer le fonctionnement du HCB, d'apporter un appui plus fort aux experts et de se caler sur les pratiques qui existent au plan européen.

Le budget de fonctionnement s'élève à un million d'euros, salaires compris. Le HCB n'a pas de problème budgétaire. Nous avons surtout besoin de compétences extrêmement pointues. Si nous sommes en progression, ce dont je me félicite, nous sommes encore sous-dotés par rapport à nos homologues européens, notamment belge et britannique.

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Je vous remercie d'avoir éclairé la Commission par vos réponses.

Informations relatives à la commission

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La Commission a désigné M. Alexis Bachelay rapporteur pour avis sur le projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social (n° 195), et notamment sur son article 15 qui concerne le Grand Paris. Il présentera ses conclusions dès la semaine prochaine.

La présidente de la commission des affaires européennes, Danièle Auroi, m'a proposé la création d'un groupe de travail commun portant sur les questions ferroviaires. Nous avons convenu de centrer les thèmes qui seraient abordés sur la libéralisation des transports ferroviaires et sur la préparation du quatrième « paquet ferroviaire » de l'Union européenne. Chacune des deux commissions désignera cinq membres. Je vous propose d'attribuer trois places à la majorité et deux à l'opposition. Les responsables des groupes voudront bien me communiquer les noms de leurs candidats.

M. Pierre MONGIN, PDG de la RATP, propose d'organiser une visite du chantier du prolongement de la ligne 4 du métro parisien, le jeudi 27 septembre à 8h45. Si vous êtes intéressés, je vous prie de contacter le secrétariat de la commission.

Enfin, j'envisage d'organiser une visite du mondial de l'automobile pour découvrir les innovations en matière de voitures écologiques et de transports durables. Cette visite pourrait avoir lieu le mercredi 3 octobre à 17h. De nouveau, si vous êtes intéressés, je vous prie de contacter le secrétariat de la commission.

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Au nom des commissaires UMP, je remercie la présidence d'avoir pris l'initiative d'une saisine pour avis sur le projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public. Toutefois, je considère qu'il serait opportun que la Commission fasse de même en ce qui concerne la proposition de loi sur la tarification de l'énergie.

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Je reconnais volontiers le bien-fondé de cette remarque. Mais la Commission manque de temps et de moyens humains pour procéder à l'examen de ce texte. Je rappelle que le Règlement permet à chaque député d'intervenir tant en commission des affaires économiques qu'en séance publique, lors de la discussion générale ou à l'occasion de l'examen des articles.

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mardi 11 septembre 2012 à 16 h 15

Présents. - M. Yves Albarello, M. Christian Assaf, M. Alexis Bachelay, M. Serge Bardy, M. Denis Baupin, Mme Catherine Beaubatie, M. Philippe Bies, M. Florent Boudié, M. Christophe Bouillon, M. Jean-Louis Bricout, Mme Sabine Buis, M. Yann Capet, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, Mme Florence Delaunay, Mme Fanny Dombre Coste, M. David Douillet, M. Philippe Duron, Mme Sophie Errante, M. Olivier Falorni, M. Jean-Christophe Fromantin, M. Laurent Furst, Mme Geneviève Gaillard, M. Claude de Ganay, M. Alain Gest, M. Michel Heinrich, M. Jacques Krabal, Mme Valérie Lacroute, M. François-Michel Lambert, M. Alain Leboeuf, Mme Viviane Le Dissez, M. Arnaud Leroy, M. Michel Lesage, M. Olivier Marleix, M. Franck Marlin, M. Philippe Noguès, M. Bertrand Pancher, M. Rémi Pauvros, M. Philippe Plisson, Mme Catherine Quéré, Mme Marie-Line Reynaud, Mme Sophie Rohfritsch, M. Martial Saddier, M. Gilbert Sauvan, M. Jean-Marie Sermier, Mme Suzanne Tallard, M. Jean-Pierre Vigier

Excusé. - M. Jacques Alain Bénisti

Assistait également à la réunion. - M. Patrick Lebreton