La commission a procédé à l'audition de M. François Brottes, président du directoire de Réseau de transport d'électricité (RTE).
Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui M. François Brottes, président du directoire de Réseau de transport d'électricité (RTE). Nous l'avions déjà entendu le 11 mai dernier sur l'actionnariat de RTE et les négociations du TURPE 5 (tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité). Nous aborderons aujourd'hui principalement la question de la capacité de notre système de production, de distribution et de transport d'électricité à faire face à l'hiver qui s'annonce.
L'une des missions premières de RTE est d'assurer l'équilibre du réseau, et donc l'accès à l'électricité vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept, dans le cadre – c'est essentiel à nos yeux – d'une intégrale solidarité entre les territoires. Vous avez dit placer cet hiver, Monsieur le président, sous « forte vigilance ». C'est également notre préoccupation : vous savez mieux qui personne que la commission des affaires économiques travaille beaucoup sur ce sujet. La transition énergique est en train de se mettre en place petit à petit. Nous venons de consacrer une mission d'information à l'application de la loi, et nous recevrons la ministre chargée de l'énergie la semaine prochaine pour en évoquer les premiers résultats.
Quelle est aujourd'hui la situation en matière de production d'électricité ? Quels sont les scénarios envisagés ? Dans quelle mesure les mécanismes adoptés par le Parlement dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte permettront-ils la compensation de la baisse de production des sites nucléaires ? Combien de mégawatts le développement des interconnexions permettra-t-il d'importer ?
Je vous remercie d'avoir répondu très rapidement à notre invitation.
Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, c'est bien volontiers que je me plie à cet exercice. Je concentrerai mon propos introductif sur l'hiver prochain, mais je répondrai éventuellement à d'autres questions, dès lors qu'elles relèvent de la compétence de RTE.
Je vais essayer d'être pédagogique, même si certains parmi vous connaissent parfaitement le sujet : il ne me paraît pas inutile de dessiner d'abord le cadre de notre action.
Le métier de RTE – entreprise publique qui détient le monopole du transport de l'électricité – est de garantir l'équilibre entre l'offre et la demande d'électricité à la seconde, en temps réel. Il faut qu'il y ait en permanence autant d'électrons qui rentrent sur le réseau que d'électrons qui sortent : sinon, c'est le black-out. C'est un peu un métier d'acrobate, reconnaissons-le ! Qui plus est, il faut aussi avoir conscience que RTE n'est pas en mesure de produire de l'électricité ; nous ne nous occupons que de son transport vers des consommateurs qui ne sont pas nos clients, mais qui sont les clients des fournisseurs d'énergie.
Pour réduire les incertitudes, nous avons recours à une méthode éprouvée : anticiper autant que possible. Plusieurs mois, plusieurs années à l'avance, RTE réalise un diagnostic sur la sécurité d'approvisionnement, à long, moyen et court termes, à l'échelle française comme à l'échelle européenne – je reviendrai sur les interconnexions.
De fait comme de droit, RTE est la vigie du système électrique ; le bilan prévisionnel, que j'envoie également à votre commission chaque année, étudie les risques courus par notre réseau, à l'aune d'un « critère de défaillance » fixé par les pouvoirs publics – notion un peu théorique, mais qui représente, en gros, le curseur du risque accepté par le pays. Ce risque correspond à une moyenne de trois heures d'arrêt possible de la fourniture d'électricité pour une année – ce qui nous fait, même si ce n'est pas ainsi qu'elle se répartit, trente secondes par jour. C'est en tout cas sur cette maille-là que nous nous calons.
Nous sommes dans une industrie du temps long – investir pour construire une centrale de production, quelle qu'elle soit, cela prend des années. Notre but est donc d'offrir une grande visibilité aux producteurs, aux investisseurs et aux opérateurs afin qu'ils puissent mobiliser leurs capacités pour couvrir les besoins futurs.
Le temps qui est laissé à tous les acteurs – producteurs, consommateurs, traders, fournisseurs – pour réaliser l'équilibre de l'offre et de la demande va de quelques mois à une heure avant le « temps réel », c'est-à-dire le moment où l'électricité doit être fournie. Ceux qui vendent de l'électricité doivent pouvoir annoncer et prouver qu'ils couvriront exactement les besoins en électricité de leurs clients : il n'est pas question de vendre de la poudre de perlimpinpin… Pour cela, certains ont leurs propres moyens de production ; d'autres passent des contrats de gré à gré, se servent de l'ARENH (accès régulé à l'électricité nucléaire historique), bien connue en ces murs, des marchés à terme, plusieurs mois à l'avance, des marchés spots, à J-1, et même depuis quelques semaines du marché dit « infrajournalier », une demi-heure avant la séquence en temps réel. Les acteurs jonglent entre toutes ces possibilités en fonction du rapport entre l'offre et la demande, mais aussi en fonction des prix : les coûts ne sont pas forcément les mêmes selon le type de marché. C'est tout un business…
RTE participe à l'élaboration des règles des mécanismes de marché à l'échelle française et à l'échelle européenne, et travaille en étroite collaboration avec les bourses d'échange – nous sommes actionnaire et membre fondateur de la bourse EPEX (European Power Exchange) – ainsi qu'avec les autres gestionnaires de réseau de transport (GRT) européens dans le cadre de l'ENTSO-E (European Network of Transmission System Operators for Electricity). Nous travaillons notamment sur les aspects techniques et sur la certification des offres… Nous sommes parvenus à une harmonisation des règles à l'échelle européenne.
Une heure avant le temps réel, les acteurs doivent disposer exactement de la quantité d'électricité nécessaire à l'approvisionnement de leurs clients. Sinon, ils seront pénalisés par la suite : c'est ce que j'appelle le syndrome de la promesse non tenue. Si l'obligation n'est pas respectée, on se fait taper sur les doigts.
Durant ce laps de temps d'une heure, et jusqu'à la seconde qui précède le temps réel, c'est RTE qui prend la main pour corriger les déséquilibres des fournisseurs, déséquilibres qui sont en principe résiduels.
En cas de déséquilibre, RTE dispose de différentes catégories de produits, que nous appelons les « réserves » : la réserve tertiaire peut être activée à la demi-heure ou au quart d'heure avant le temps réel ; la réserve secondaire une minute avant ; la réserve primaire une seconde avant. Cela montre à quel point l'exercice exige une vigilance de tous les instants.
Ces produits peuvent être consignés par les GRT, contre rémunération : des obligations sont imposées aux producteurs, et certaines de leurs installations sont placées en dessous de leur puissance maximale afin que nous puissions disposer d'un « ruban » disponible pour les réserves primaires et secondaires. Nous avons également la faculté d'organiser, à l'avance, des appels d'offres pour constituer une partie de la réserve tertiaire.
Ces réserves peuvent également être activées sans consignation préalable par une sorte d'appel aux bonnes volontés. Nous pouvons tout d'abord les utiliser sur la base des déclarations de disponibilité des producteurs : la loi oblige ceux-ci à déclarer leur production disponible au GRT, qui en rend compte sur la plateforme « Transparence » ; celle-ci nous indique ainsi, par exemple, quels sont les réacteurs en fonctionnement. Il ne s'agit pas d'une interprétation de RTE : c'est une information que nous produisons en nous fondant uniquement sur les déclarations de chaque producteur. Nous pouvons également agir grâce aux offres déposées par les opérateurs d'effacement ou les consommateurs, ou bien par des pays voisins.
RTE sélectionne les offres nécessaires pour répondre à la situation du moment, là aussi bien sûr contre rémunération.
En parallèle, à chacune de ces échéances, RTE gère la disponibilité de nos cinquante interconnexions, en lien avec les GRT frontaliers mais aussi, en amont, au sein du CORESO (COoRdination of Electricity System Operators), qui rassemble des informations jusqu'à la veille du temps réel sur les productions disponibles dans les pays voisins. Ces derniers savent ainsi ce qui sera disponible à partir de la France.
Si vous achetez de l'électricité à l'étranger, il faut payer l'électricité, mais aussi réserver la capacité de transit dans les « tuyaux » d'interconnexion. Sur le marché journalier, le prix de l'électricité achetée inclut le prix de la capacité de transit – en quelque sorte, le service est compris. Pour d'autres échéances, il faut passer par des mécanismes d'enchère pour réserver un droit de passage. C'est un peu complexe…
C'est technique, et financier de surcroît.
Les effacements – c'est-à-dire la possibilité de reporter une consommation, voire d'en faire l'économie – peuvent désormais participer à tous les mécanismes. C'est une fierté nationale : la France est pionnière en la matière. L'Europe réfléchit à un paquet « hiver » dans le domaine de l'électricité, au sein duquel les effacements devraient trouver leur place – ce qui permettrait à nos opérateurs d'effacement de déployer leurs talents au-delà de nos frontières. Le Parlement a ouvert la voie à la création de ces opérateurs indépendants, qui peuvent procéder à des effacements indépendamment de l'accord du fournisseur du site effacé. Certains fournisseurs proposent d'ailleurs maintenant des effacements dans leur formule, ce qui n'est pas tout à fait transparent pour nous aujourd'hui : nous devrions pouvoir les chiffrer à la mi-décembre. Cela nous complique un peu la vie lorsqu'il s'agit de comptabiliser le disponible.
Grâce à ce cadre juridique unique, l'effacement a pris place dans tous les mécanismes que je vous ai exposés, du très court au très long terme. Sur le marché journalier, c'est le dispositif NEBEF (notification d'échanges de blocs d'effacement), qui permet de considérer que les blocs d'effacement sont équivalents à des blocs d'énergie et ainsi de maintenir l'équilibre du réseau. Les effacements représentent désormais 10 % des réserves activables à la seconde, et jusqu'à 40 % des réserves activables au quart d'heure ou à la demi-heure. Enfin, un appel d'offres leur est dédié ; prévu par la loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, dite loi « NOME », il a été prolongé par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, en attendant la mise en place du mécanisme de capacité, qui verra le jour au 1er janvier prochain. Les primes versées en 2016 dans le cadre de cet appel d'offres ont représenté 30 millions d'euros.
Le mécanisme de capacité que j'évoquais à l'instant, et sur lequel nos équipes ont énormément travaillé, en lien avec les pouvoirs publics, a finalement reçu l'aval de la Commission européenne – ce qui est une excellente chose. Il montera en puissance progressivement, car nous devons nous assurer de l'adhésion de tous les acteurs ; nous nous employons à ratisser le plus largement possible pour mobiliser tous ceux qui pourraient être intéressés. En tout cas, ce dispositif permettra d'utiliser au mieux les effacements, et de façon durable. C'est un point essentiel : si les capacités manquent à l'approche du temps réel, seuls les effacements peuvent permettre d'équilibrer le réseau suffisamment rapidement. Il est plus facile d'effacer très vite que d'enclencher un nouveau processus de production.
Dans ce cadre, comment exercerons-nous nos missions au cours de l'hiver 2016-2017 ?
Chaque année, nous analysons les risques que présente l'hiver à venir ; nous nous livrons d'ailleurs au même exercice pour l'été, depuis la canicule de 2003. Nous examinons trois grands paramètres : la météo, qui influe sur la consommation, et sur laquelle vous avez peut-être plus d'influence que nous…
Les deux autres paramètres, ce sont la production et les capacités d'échange aux frontières.
Nous misons sur une consommation durablement stable. L'efficacité énergétique est là, les réflexes d'économie d'énergie aussi. Même s'il y a quelques transferts d'usage vers l'électricité, la consommation stagne, voire pourrait diminuer à moyen terme. Le record français de consommation a été atteint le 8 février 2012, avec 102 gigawatts (GW). Depuis quatre ans, il n'a plus été atteint : l'an dernier, le maximum a été de 89 GW seulement. La pointe de ce soir devrait se situer à 70 GW.
Toutefois, notre consommation demeure très sensible aux évolutions des températures : la France représente 50 % de la thermosensibilité européenne, en raison notamment de notre usage du chauffage électrique. Une baisse d'un degré de la température crée un besoin supplémentaire de 2 400 mégawatts (MW), c'est-à-dire l'équivalent de deux réacteurs nucléaires ou de la consommation de Paris intra muros.
Les difficultés potentielles se rencontrent à deux moments de la journée : celui que nous appelons le « plateau du matin », entre huit et treize heures, et la « pointe du soir », autour de dix-neuf heures. Le reste du temps, la situation est confortable. Voilà pourquoi tout report de consommation hors des heures de pointe est utile. Demain, le stockage devrait nous aider à lisser un peu les courbes.
Cet hiver sera toutefois particulier, car la disponibilité du parc de production est en nette baisse. Je le disais, nous travaillons à partir des données transmises par les producteurs grâce à la plateforme Transparence. À l'heure où je vous parle, la disponibilité du parc nucléaire est historiquement basse : dix réacteurs sont arrêtés pour des raisons soit de rechargement de combustible (cela concerne deux réacteurs), soit de visite décennale (quatre réacteurs), soit de visite périodique (deux réacteurs), soit d'arrêt fortuit (deux réacteurs).
Par ailleurs, dix-huit réacteurs sont concernés par la décision de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) du 18 octobre dernier de procéder à des contrôles de la composition de l'acier des générateurs de vapeur : six ont déjà fait l'objet de contrôles et ont été remis en fonctionnement ; huit sont arrêtés pour cause de contrôle, et quatre seront arrêtés pour contrôle dans les prochaines semaines.
Au total, quarante réacteurs sur cinquante-huit fonctionnent. Par ailleurs, la capacité de production thermique a diminué de 1 200 MW par rapport à l'hiver dernier, et le niveau de l'eau dans les barrages est au plus bas depuis dix ans.
L'éolien et le photovoltaïque contribuent désormais à la sécurité de l'approvisionnement, et pour une part non marginale : ils représentent en effet 1 900 MW supplémentaires par rapport à l'hiver dernier, avec un taux de disponibilité de 30 % pour l'éolien, contre 20 % il y a quelques années, et de 40 % pour le photovoltaïque – sur le plateau du matin, s'entend : le soir, le photovoltaïque, n'est pas disponible…
Le volume des effacements s'élèvera cet hiver à 3 150 MW, dont 1 500 pour l'interruptibilité, activable en quelques secondes. Nous avons pour cela signé un accord avec vingt et un industriels : ces gros consommateurs acceptent que leur connexion soit interrompue au moment où le réseau est en situation critique. Ces procédures ont déjà été utilisées, notamment pendant les incendies survenus cet été dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA), et elles fonctionnent. C'est nouveau, et très important.
L'analyse de la situation française doit être replacée dans un contexte européen. Il existe un marché européen de l'électricité : il arrive que les prix soient plus intéressants ailleurs que chez nous, et les interconnexions permettent alors d'acheter ailleurs même s'il existe une production locale. Mais, cet hiver, c'est surtout le renforcement de la sécurité de notre approvisionnement que permet le réseau européen qui sera déterminant.
Notre capacité technique d'importation est de 12 200 MW, ce qui représente 30 % d'augmentation par rapport à l'an dernier, en raison de l'ouverture d'une importante liaison complémentaire avec l'Espagne, mais aussi parce qu'a été mise en place – sous l'impulsion notable de Mme Clotilde Levillain, membre du directoire de RTE – la méthode « flow-based », nouveau modèle de calcul et d'allocation des capacités d'échanges d'électricité disponibles aux interconnexions entre la France, le Benelux et l'Allemagne. Nous sommes fiers de ce procédé qui permet d'optimiser de façon très fine l'usage des interconnexions.
En moyenne, toutefois, la moyenne des mégawatts disponibles à l'importation se situera plutôt – comme l'an dernier – entre 7 000 et 9 000 MW, compte tenu des besoins des autres pays et des capacités de production disponibles : s'il fait froid chez nous, il fera froid ailleurs aussi, sans doute…
Dans le scénario météorologique d'un hiver « normal », c'est-à-dire dont les températures se situeraient dans les moyennes qui nous sont fournies par Météo France à partir des données des trente dernières années, compte tenu de la consommation prévue et des moyens de production disponibles, nous pensons que tout se passera bien : nos marges de manoeuvre sont suffisantes.
En cas de vague de froid importante, c'est-à-dire au cas où les températures descendraient en dessous de trois degrés sous la moyenne, ou extrême, avec des températures inférieures de dix degrés à la moyenne, nous devrions peut-être adopter des solutions exceptionnelles. Si nous établissons cette différence entre vagues de froid « importante » et « extrême », c'est parce que les capacités de production ne sont pas identiques à chaque moment. Ainsi, pour les trois premières semaines du mois de décembre, le risque de mobilisation de moyens exceptionnels apparaîtrait si la température descendait de trois degrés en dessous des normales de saisons – qui sont établies à six degrés.
Le premier de ces moyens exceptionnels, c'est la mobilisation citoyenne – ce n'est pas un vain mot. Nous lancerions des appels nationaux aux consommateurs afin qu'ils économisent l'énergie, en diminuant la température de leur logement, par exemple, et qu'ils reportent autant que possible leur consommation hors des heures de pointe. Les pouvoirs publics réfléchissent à des actions ; nous-mêmes lancerons, le 5 décembre prochain, un outil grand public sur l'application que nous avons appelée « éCO2mix » permettant de faire apparaître des alertes destinées aux consommateurs. Cela peut faire sourire, mais RTE a déjà lancé depuis plusieurs années le dispositif ÉcoWatt, en PACA et en Bretagne. Les élus, la presse et les radios locales se sont beaucoup impliqués pour sa réussite ; et dès que nous déclenchons EcoWatt, la consommation baisse de 1 % environ, grâce à nos 100000 volontaires. Les effets de l'acte citoyen utilisé à bon escient ne sont donc nullement marginaux. Le même outil sera bientôt disponible à l'échelle nationale.
Le deuxième moyen exceptionnel, c'est l'interruptibilité, que j'ai déjà citée. Nous ne l'utilisons bien sûr qu'en cas de menace significative, car la gêne peut être réelle, même si les vingt et un industriels aujourd'hui concernés ont donné leur accord. Ils sont rémunérés, puisqu'ils rendent un service à la collectivité – l'enveloppe est de 100 millions d'euros.
Le troisième moyen exceptionnel, c'est une baisse de la tension de 5 % sur les réseaux de distribution. Cette solution permet d'économiser jusqu'à 4 000 MW, soit quatre réacteurs nucléaires. Cela se traduit notamment par une légère baisse de l'intensité des lumières et par une performance légèrement moindre des plaques de cuisson…
Si nous manquons vraiment de chance, qu'il fait extrêmement froid et que la production est encore moindre qu'annoncé, la solution ultime serait de recourir à des délestages programmés tournants, par îlots. Nous épargnerions naturellement les pompiers, les hôpitaux, etc. Ces délestages peuvent durer jusqu'à deux heures. C'est le dernier recours, pour préserver à tout prix l'équilibre entre l'offre et la demande et éviter le black-out.
Vous le voyez, j'ai dressé une liste exhaustive des solutions dont nous disposons ; nous sommes très vigilants, mais loin d'être dépourvus de moyens d'agir.
Nous réactualiserons tout au long de l'hiver ce scénario, en fonction de l'évolution des informations dont nous disposons.
Merci de ces éléments, pour partie rassurants – car vous soulignez aussi que la France, en raison notamment de son fort taux de chauffage électrique, est très sensible aux variations de température, et que la production disponible est basse. Serons-nous le pays qui connaîtra les plus grandes difficultés cet hiver ?
Les estimations d'EDF sont moins pessimistes que les vôtres : en particulier, l'entreprise pense que les réacteurs qui doivent être contrôlés par l'ASN devraient pouvoir être à nouveau raccordés au réseau au début de l'année 2017. Cette vision vous paraît-elle réaliste ?
Vous avez parlé des contrats d'interruptibilité déjà signés, grâce à la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, avec vingt et un industriels volontaires. Cela vous paraît-il suffisant ? D'autres sites vont-ils rejoindre ces pionniers ?
Vous avez également dit qu'il était possible de baisser la tension électrique générale de 5 %. On peut s'inquiéter, même si vous vous êtes voulu rassurant, des conséquences qui cela pourrait entraîner sur la qualité du courant et, du coup, sur les appareils électriques.
La Commission européenne a approuvé un mécanisme de capacité : facilitera-t-il la gestion de l'approvisionnement en électricité dès cet hiver ?
S'agissant du récent débat sur l'actionnariat de RTE, l'évolution du capital telle qu'elle est aujourd'hui prévue vous permettra-t-elle de développer votre projet industriel ? Les analyses que vous venez de nous exposer, comme la nature des solutions exceptionnelles, ne confirment-elles pas que le choix d'un caractère public pour RTE est le bon ? Cette entreprise apparaît comme tout à fait cruciale pour notre pays.
Vos analyses me semblent également conforter la nécessité de nous appuyer sur une solidarité des territoires plutôt que sur l'autonomie de chacun : on comprend bien qu'on est plus solide avec des réseaux bien reliés entre eux.
Certains plaident pour la mise en place d'opérateurs européens de réseaux. Qu'en pensez-vous ?
Je ne peux pas conclure sans parler d'hydroélectricité, dont la maîtrise par l'État est tout à fait primordiale. Les discussions avec la Commission européenne se poursuivent. En 2013, le rapport de la mission d'information de notre commission sur l'hydroélectricité avait proposé l'établissement d'un mécanisme de type « ARENH hydraulique », avec un volume d'énergie hydraulique mis sur le marché et ouvert à la concurrence. Qu'en pensez-vous ?
Tout annonce un hiver tendu sur le plan électrique. RTE craint que la faible disponibilité du parc nucléaire ne rende difficile d'établir l'équilibre du réseau. Nous n'avons pas les mêmes chiffres : j'ai compris que vingt des cinquante-huit réacteurs étaient à l'arrêt, dont douze pour des contrôles de sûreté demandés par l'ASN. Dans ces conditions, RTE sera peut-être contraint d'adopter des mesures exceptionnelles, selon une progressivité associant la mobilisation citoyenne, l'interruptibilité, une baisse de tension et des délestages.
La mise en place de mesures exceptionnelles destinées à éviter la pénurie d'électricité aura nécessairement des conséquences financières pour RTE : à combien estimez-vous ce surcoût ?
Plus généralement, à combien s'élève l'enveloppe globale d'importation d'électricité depuis les pays frontaliers ?
Enfin, comment se passe votre dialogue avec la ministre de l'environnement, qui a indiqué qu'il n'existait pas de risque de pénurie. Vous semblez beaucoup moins optimiste, et il est très probable qu'il y aura cet hiver des périodes de crise. Comment vous répartirez-vous les rôles pour informer les Français ?
La Bretagne fait face depuis des années à une situation délicate, en matière d'alimentation électrique, du fait de sa configuration péninsulaire. La Bretagne ne produit que 13 % de l'électricité qu'elle consomme, c'est dire si elle compte sur la production du reste de la France. D'ailleurs, l'hiver, on constate régulièrement que les capacités du réseau atteignent leurs limites dans l'acheminement de l'énergie vers les consommateurs.
En décembre 2010, RTE a signé, avec la région, l'État, L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) et l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), le pacte électrique breton afin, notamment, de maîtriser la demande. Cette opération semble avoir réussi : alors que la population de la Bretagne augmente de 25 000 habitants par an, la consommation d'électricité stagne depuis quelques années. Le deuxième objectif du pacte est l'augmentation des énergies renouvelables et le troisième la sécurisation de l'alimentation électrique.
Or les mois qui viennent vont être cruciaux, vous l'avez rappelé, Monsieur François Brottes, puisque la capacité de production nationale sera réduite du fait de l'indisponibilité d'une partie du parc nucléaire.
Le pacte électrique breton, tel qu'il a été signé en 2010, sera-t-il réellement en mesure de sécuriser l'approvisionnement énergétique de la Bretagne cet hiver, et le réseau sera-t-il assez puissant pour délivrer de l'énergie sans interruption jusqu'aux pointes finistériennes ?
Je vous remercie, Monsieur le président François Brottes, pour la précision de votre exposé liminaire.
Ma première question a trait à l'interconnexion du réseau européen. On sait qu'en Allemagne des centrales à charbon tournent à fond et que des centrales à gaz, pour des raisons économiques, sont à l'arrêt, notamment dans le sud du pays. Peut-on y voir pour nous, en cas de difficulté, une possibilité d'importer de l'électricité ? D'ailleurs, pourrez-vous nous préciser si la France sera importatrice ou exportatrice d'électricité l'été prochain ?
La réglementation a imposé, dans toutes les maisons de retraite et dans tous les groupes hospitaliers, l'installation de systèmes de production électrique particulièrement importants, uniquement pour assurer la sécurité de la fourniture d'électricité. Avez-vous pensé à l'utilisation de ce potentiel en cas de difficulté ?
Enfin, le réseau routier français commence à se faire vieux – et pas seulement depuis quatre ans, je ne suis pas en train de polémiquer –, nos réseaux d'eau et d'assainissement vieillissent extrêmement vite, alors qu'il faudra cent trente ans pour les renouveler, notre réseau de canaux se dégrade rapidement lui aussi. Quel est l'état du réseau électrique ? A-t-il fait l'objet, depuis dix, quinze ou vingt ans, d'un investissement suffisant ? Est-il adapté à l'évolution des modes de production qui sont de plus en plus décentralisés, avec des régions en souffrance comme la Bretagne, déjà citée, ou bien le Sud-Est ? Bref, notre réseau électrique est-il digne d'un grand pays comme la France ?
Merci, Monsieur le président du directoire de RTE, pour toutes les informations très précises que vous venez de nous donner. La mise en place de la transition énergétique et le développement de l'électricité d'origine renouvelable conduit à produire plus localement et de manière plus diffuse sur le territoire. Comment répondre à ce défi ?
Le maillage territorial des lignes électriques doit-il faire l'objet d'adaptations à la marge ou bien d'une restructuration beaucoup plus importante ? La construction de nouvelles lignes à haute tension est-elle au programme ? Pouvez-vous nous indiquer quelles méthodes et techniques vont être mises en place pour faire face à ce défi ?
En somme, quelles sont les conséquences du développement des énergies renouvelables pour RTE en matière d'investissements ? Peut-on avoir un ordre de grandeur pour les dix ans à venir ?
Récemment, j'ai rencontré des responsables de la distribution d'électricité en Allemagne et de grands distributeurs séparent l'acheminement d'électricité « traditionnelle » de celui de l'électricité d'origine renouvelable. Selon vous, cette séparation pourrait-elle se révéler judicieuse en France ?
Enfin, où en est l'Europe de l'énergie et en particulier l'Europe de l'électricité ? De quelle manière RTE est-il concerné, au-delà des échanges dont vous nous avez parlé ? Quelles évolutions vous paraissent-elles souhaitables ?
Pour finir, je reprendrai votre conclusion, Monsieur le président. Grâce à la diversification de l'origine de l'électricité, avec en particulier la montée en puissance des énergies renouvelables, grâce aux dispositifs que vous avez mentionnés, tout devrait finalement bien se passer cet hiver malgré l'arrêt de dix réacteurs nucléaires pour visite décennale ou pour remplacer le combustible. En guise de clin d'oeil, j'en conclus qu'on peut donc très bien se passer de ces dix réacteurs nucléaires…
Pendant votre allocution introductive, Monsieur le président François Brottes, j'ai pensé aux discussions que nous avons eues la semaine passée au sein de cette commission sur l'autoconsommation d'électricité : monte-t-elle en puissance ? A-t-elle une influence sur l'activité de RTE ?
Vous ne serez pas surpris que ma deuxième question concerne l'enfouissement – je l'ai déjà abordée avec vous. Vous m'aviez permis, en tant qu'ancien maire d'une commune bretonne, de chiffrer le montant d'un investissement destiné à enterrer des lignes électriques. Dans la zone d'aménagement concerté (ZAC) en construction qui faisait l'objet de cette évaluation, nous étions parvenus à un montant de 1 000 euros par habitant, soit 2 millions d'euros par kilomètre de ligne ou encore 10 000 euros par logement construit. Ces chiffres sont considérables au regard des moyens d'une petite ville. Peut-on dès lors imaginer un mode de financement adapté à des situations particulières comme celle que je viens d'évoquer, sachant que l'environnement est fortement dégradé dans des secteurs récemment urbanisés à proximité de lignes qui ont parfois cinquante ou soixante ans. Autant, à l'époque, ces lignes ne posaient pas de problèmes, autant, aujourd'hui, la population nourrit à leur encontre quelques craintes, en plus des préoccupations de développement durable.
On sait que le réseau est plus fragile en Bretagne, dans le Sud-Est de la France et dans d'autres régions périphériques. J'ai découvert qu'un groupe de réflexion entre la France, l'Allemagne et la Suisse était en train de se constituer afin d'évaluer le risque de black-out dans la région des trois frontières. Nous nous trouvons là au centre du noeud européen. Or la difficulté est que les centrales françaises sont moins disponibles, notamment celle de Fessenheim, de même que d'autres centrales allemandes, ce qui, au total, fragilise la vallée du Rhin. Tout le monde est, par conséquent, très inquiet dans cette région frontalière jusque-là réputée sans risque : il va de soi que les Allemands et les Suisses, l'hiver prochain, serviront en priorité leur propre marché.
Vous êtes revenu, Monsieur le président du directoire de RTE, sur l'intérêt d'importer de l'électricité pour parer aux difficultés que nous risquons de connaître l'hiver prochain – de l'importer grâce, bien sûr, à des systèmes d'interconnexion avec nos voisins européens. Je souhaite vous interroger sur un projet que vous connaissez bien, et qui concerne une circonscription très proche de celle dont vous étiez l'élu : l'interconnexion entre les postes de Grand-Île et Piossasco, autrement dit le projet Savoie-Piémont. Il s'agit d'un chantier exemplaire pour une interconnexion peut-être la plus longue du monde – 190 kilomètres de ligne électrique entièrement souterraine. Vous avez beaucoup travaillé sur ce dossier, notamment avec l'État italien qu'il fallait peut-être finir de convaincre de l'intérêt de cette interconnexion. La mise en service de cette liaison pourra-t-elle avoir lieu en 2019, comme on l'avait imaginé ?
Pour renforcer et sécuriser l'alimentation électrique à long terme, de nombreux projets sont en cours, dont celui de Nantes métropole où l'on construit de nouveaux ouvrages au nord de l'agglomération. Ces travaux, bien que nécessaires, ont un impact non négligeable sur l'activité agricole du fait de l'emprise prélevée pour la construction de nouveaux postes, par exemple à Orvault. RTE s'était engagé à retrouver une surface de terres exploitables équivalente. Cela a-t-il été possible ? De manière plus générale, lors du lancement de tels projets qui la concernent directement, la profession agricole est-elle consultée, et si oui, comment ?
Ma question concerne en partie ma circonscription. La ligne à très haute tension (THT) reliant Avelin à Gavrelle, dont les travaux sont censés commencer d'ici à un an, est un projet d'importance pour l'organisme que vous dirigez. Cette ligne qui, dans sa configuration actuelle, a des capacités limitées, avec pour conséquence des risques de surcharge, doit être remplacée par un double circuit d'une capacité de 400 000 volts. Faisant partie du réseau Nord de France, elle a une incidence directe sur la fourniture de l'électricité d'une grande aire géographique allant de la métropole lilloise à la région parisienne, en passant par l'Arrageois.
Son tracé a été validé par une décision de la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) du 13 mars 2015 et la commission d'enquête a rendu un avis favorable sur l'enquête publique qui s'est déroulée du 11 avril au 11 mai. Ce projet d'envergure traversera les départements du Nord et du Pas-de-Calais sur une distance de trente kilomètres, incluant dix-neuf communes dont certaines à l'habitat dense. La phase des travaux s'étalera, en y incluant le démontage de la ligne existante, sur deux années.
Pouvez-vous, d'une part, nous renseigner sur l'impact écologique et sanitaire du projet et, d'autre part, nous assurer que la longueur des travaux n'occasionnera ni perturbation dans la distribution d'électricité sur l'aire géographique concernée, ni gêne pour les riverains de cet ouvrage à l'utilité incontestable ?
Merci, Monsieur le président du directoire de RTE, de nous avoir transmis toutes ces informations plutôt rassurantes, en particulier pour la région Bretagne, dans une situation de fragilité en matière de fourniture d'électricité, fragilité très bien résumée par Mme Annick Le Loch qui a par ailleurs rappelé la signature il y a trois ans du pacte électrique breton.
Quel regard portez-vous sur l'amélioration apportée par ce pacte électrique ?
Ce dernier prévoit la création d'une ligne à haute tension de 225 000 volts entre Lorient et Saint-Brieuc – soit une centaine de kilomètres – afin de renforcer le transport d'électricité régionale. Qu'en est-il de l'avancée de ces travaux ? Seront-ils achevés avant novembre 2017, comme cela a été annoncé ?
Merci au président François Brottes pour les éléments d'information fort détaillés qu'il nous a livrés.
La situation est préoccupante, en effet. Notre capacité de production, cet hiver, sera inférieure d'environ 11 300 MW à celle de l'hiver dernier. Sont en cause les difficultés que le président François Brottes a rappelées et qui sont liées au parc nucléaire, aux arrêts pour maintenance de routine mais également en réponse aux demandes de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) de vérification supplémentaire de certains réacteurs. Cette situation conjoncturelle est encore compliquée par le choix grave, contestable à mes yeux, d'organiser concomitamment la fin des centrales thermiques à flamme. En fermant progressivement ces installations, ce sont encore 5,2 GW de capacité de production que nous allons perdre ! Or faut-il rappeler que le thermique à flamme sert précisément à éviter les déficits de production d'énergie et que, à ce titre, ces centrales sont essentielles à l'équilibre de notre mix énergétique ?
La montée en puissance des énergies renouvelables est en effet, pour l'instant, loin de compenser l'arrêt du thermique à flamme, en particulier l'hiver où les journées sont moins chaudes et où les nuits sont par définition plus longues que les jours. Or, en raison de l'intermittence des énergies renouvelables, nous allons devoir faire face à une difficulté l'hiver prochain.
Au-delà de cette inquiétude, plus forte encore cette année que l'année dernière, il apparaît qu'un déficit structurel doit être anticipé pour les quatre prochains hivers au moins, voire davantage si l'on retient le scénario thermique bas.
Le système électrique français est en crise. Il faut espérer qu'il n'y aura pas de nouvelle mauvaise surprise ni d'arrêt supplémentaire de réacteur. Dans ce contexte, la fermeture du deuxième réacteur de Fessenheim, programmée pour fin décembre, devrait être reportée. Qu'en pensez-vous, Monsieur le président François Brottes ?
Si déjà, en 2016, RTE en est à envisager des mesures drastiques pour compenser l'éventuel déficit d'énergie produite – et l'on ne saurait s'en remettre qu'à la seule météorologie –, comment envisagez-vous de gérer le déficit structurel pour les années à venir ? Ne faut-il pas réviser la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte ?
Je regrette de n'avoir pu entendre l'intervention du président François Brottes mais la densité des travaux parlementaires provoque parfois des conflits d'agendas et je vous prie donc de bien vouloir m'en excuser. Si, dans son intervention, M. François Brottes a déjà répondu aux deux questions que je vais poser, je me référerai au compte rendu.
Lors de la présentation de l'étude réalisée par RTE sur l'équilibre entre l'offre et la demande d'électricité pour l'hiver 2016-2017, vous avez expliqué que le développement des énergies renouvelables, les capacités d'importation, l'effacement et les économies d'énergie compenseront en partie la baisse globale de production des sites nucléaires. Or nous savons que les énergies renouvelables ont la particularité d'être intermittentes, ce qui remet en cause la fiabilité des prévisions. Avec la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte, nous avons choisi d'augmenter la part de ces énergies dans notre mix énergétique ; mais il faut pouvoir disposer d'outils de prévision précis afin de mieux intégrer ces sources d'énergie dans notre mix et de ne pas compromettre la sécurité de notre alimentation électrique. Dans quelle mesure peut-on compter sur la production d'énergies renouvelables pour pallier le manque d'énergie nucléaire ?
En outre, un nouveau mécanisme de capacité assurera à partir de cet hiver la sécurité de l'alimentation électrique. Il a fait l'objet d'une consultation approfondie de la Commission européenne, qui a finalement estimé, le 8 novembre dernier, qu'il était compatible avec les réglementations communautaires. Cela va néanmoins vous forcer à réviser les règles du marché de capacité d'ici à la fin de l'année. Quelles garanties avez-vous finalement donné à la Commission européenne pour remplir les objectifs fixés ? De son côté, le Gouvernement envisage d'introduire les contrats pour différence en 2019 afin d'assurer la sécurité de l'approvisionnement. Ces contrats sont-ils complémentaires et dans quelle mesure le nouveau mécanisme de capacité donnera davantage de visibilité aux investissements à long terme ?
Mme Marie-Noëlle Battistel m'a interrogé sur la manière dont cela se passait dans les autres pays. Je rappelle que, sur le marché européen de l'électricité, on compte 341 interconnexions, 19 pays couplés, ce qui fait 525 millions de citoyens européens interconnectés. Nous ne pouvons plus ignorer cette dimension aujourd'hui, la France prenant sa part puisque notre situation géographique est assez centrale entre la péninsule ibérique, les pays du Nord, le Royaume-Uni, l'Irlande… La bourse de l'électricité EPEX SPOT, en 2015, a vu transiter 20 % de la consommation électrique française : ce n'est ni marginal, ni intermittent, c'est devenu une pratique assez courante et qui sera amenée à se renforcer. J'indique à ce propos à Mme Béatrice Santais que la liaison France-Italie verra le jour à la date prévue : l'ensemble des pouvoirs publics, le régulateur et la Commission européenne ont donné un avis favorable à notre demande touchant à un des bipôles. L'échéance sera tenue. Cette liaison France-Italie sera la bienvenue et sera bien utile dans le dispositif. Votre territoire peut être fier de la réalisation de l'une des interconnexions les plus longues – mais vous risquez d'être doublés par un projet de 550 kilomètres sur lequel nous travaillons entre la France et l'Irlande, à ceci près qu'il sera sous-marin et non montagnard.
Mme Marie-Noëlle Battistel se demande si les échanges seront susceptibles, en Europe, de bien se passer. Il existe d'autres difficultés dans d'autres pays : en Belgique, deux réacteurs feront potentiellement défaut ; en Suisse, ce sera le cas d'un réacteur ; au Royaume-Uni, on a annoncé des fermetures de centrales thermiques… Le mix énergétique évolue dans les autres pays, ce qui pourrait amener à des réductions de disponibilités. Si je vous ai fait état d'un potentiel des interconnexions de 7 000 à 9 000 MW, c'est parce que nous savons comment cela se passe chez nos voisins. Le travail de prévision de RTE est réalisé en étroite collaboration avec les autres opérateurs de transport d'électricité européens. Nous ne faisons de science-fiction dans aucun domaine. C'est du reste la raison pour laquelle je ne répondrai pas aux questions qui touchent à l'évolution du parc ou aux décisions de l'ASN : je n'ai pas compétence à le faire, contrairement au président de l'ASN ou d'EDF. RTE se contente, avec rigueur, de prendre en compte les instructions qu'on lui donne et de les appliquer jusqu'à ce qu'on lui en donne d'autres. Mon statut m'interdit de vous dire autre chose que ce que je peux dire et surtout que ce que je sais.
Mme Marie-Noëlle Battistel m'a également interrogé sur l'interruptibilité : il n'y a pas d'autre site potentiel volontaire d'interruptibilité. Je ne dis pas qu'il n'y en aura plus jamais, mais s'il reste du potentiel du côté de l'effacement – et nous sommes train de travailler à la mobilisation de nouveaux sites industriels –, pour ce qui est de l'interruptibilité, nous avons fait le tour des disponibilités.
Vous avez posé une question sur l'évolution du capital de RTE. Une discussion est en cours au sujet de la constitution d'un pacte d'actionnaires entre le groupe Caisse des dépôts et consignations et EDF ; elle devrait s'achever vers la fin du mois de novembre. L'entreprise RTE, si ce pacte est signé, sera davantage publique qu'elle n'était dans la mesure où le capital d'EDF comporte une part privée significative alors que la structure du groupe Caisse des dépôts et consignations est davantage publique. Cette évolution n'aura pas d'impact sur notre trajectoire d'investissements. Nous resterons un opérateur très indépendant de ses actionnaires puisque nous sommes sous la surveillance du régulateur avec l'obligation de ne favoriser personne. Nous resterons fidèles à cette éthique que la loi nous impose. Il est vrai que la Caisse des dépôts et consignations est un actionnaire public significatif, très ancré dans les territoires ; mais la nouvelle configuration, j'y insiste, ne modifiera ni nos gènes, ni notre projet d'entreprise.
Cela m'amène à la question de M. Laurent Furst sur l'évolution du réseau. Notre projet est de doubler le réseau électrique d'un réseau numérique. Nous avons en particulier besoin de connaître en temps réel tout ce qui se passe sur le plan météorologique – jusqu'à la force du vent –, et de pouvoir anticiper les pics de production des énergies renouvelables. L'intermittence est un défaut quand l'énergie est absente, mais quand elle est produite, encore faut-il pouvoir la gérer. Or, désormais, nous maîtrisons tout cela à merveille : nous créons même des lignes virtuelles qui se substituent à de grosses infrastructures – et nous ne pouvons le faire que parce que nous disposons d'infrastructures lourdes ; bref, la numérisation du réseau devient un second métier pour l'électricien que nous sommes.
C'est une obligation impérieuse parce que le mix électrique fait jouer des partenaires nouveaux aux comportements parfois erratiques. Dès lors que nous avons affaire à des consommateurs et à des producteurs plus nombreux et aux comportements différents – certains autoproduisent pour autoconsommer –, le réseau garant de la sérénité, de la sécurité et de l'équilibre se doit de faire preuve d'une capacité de compréhension des phénomènes qui va nous amener à gérer des centaines de milliers de données supplémentaires. Nous sommes donc en train d'équiper le réseau suivant une même trajectoire d'investissements. Toutefois, nous remplaçons des investissements destinés aux infrastructures lourdes par des investissements plus légers consacrés au numérique.
J'en profite pour préciser que notre réseau de transport d'électricité est en bon état : nous y investissons 1,5 milliard d'euros chaque année. Des équipes de maintenance très compétentes travaillent sur le terrain. Nous sommes très vigilants : le programme de sécurisation du réseau que nous avons lancé pour faire face aux tempêtes pour les dix ans à venir est pratiquement terminé. Nous nous employons donc à donner de l'intelligence en plus. Non seulement c'est nécessaire, mais le numérique permet de gérer les problèmes plus vite qu'en construisant de nouvelles infrastructures : c'est toujours un peu compliqué. Comme l'a fait remarquer M. Hervé Pellois, les gens n'aiment guère les pylônes… Il est parfois plus facile de doubler un circuit comme celui d'Avelin-Gavrelle que de construire une nouvelle ligne.
Certains souhaitent qu'on enfouisse davantage les lignes électriques qu'on ne peut le faire : une telle opération a un coût. Nous ne sommes pas une entreprise qui fait du business pour le business : nous sommes exclusivement rémunérés par le tarif ; c'est le consommateur, avec l'accord du régulateur, qui paie tout ce que nous faisons. Je n'ai pas le droit d'engager l'entreprise pour aller faire du business en dehors du secteur régulé. On peut certes s'y employer par le biais de filiales, mais ces dernières sont plus en devenir qu'en capacité de s'épanouir… La loi a posé une règle : le MESIL (mise en souterrain d'initiative locale), établissant un principe de contribution des collectivités territoriales, quelles qu'elles soient, et, en fonction de la vétusté du réseau, RTE met plus ou moins au pot. Cela est calé par les textes et je n'ai pas connaissance qu'on ait empêché des projets de voir le jour. Mais cela oblige la collectivité demandeuse à investir de façon significative ; et si parfois l'emprise foncière ainsi libérée permet de dégager des subsides suffisants, c'est moins vrai à d'autres endroits. En tout état de cause, je peux difficilement aller au-delà de ce que le régulateur accepte de financer par le tarif d'utilisation du réseau public d'électricité (TURPE).
Je remercie M. Lionel Tardy d'avoir refait l'inventaire des leviers exceptionnels dont nous disposons mais il me semble l'avoir moi-même fait de façon exhaustive dans mon intervention liminaire.
… plutôt que de ne pas les dire du tout.
Je reprends la formule de M. Lionel Tardy : il y a une progressivité ; le dernier levier évoqué – les délestages – n'est susceptible d'être activé que dans le cas où nous serions dans une situation critique. Reste que c'est valable pour l'hiver qui arrive comme ce l'était pour l'hiver dernier… Nous n'inventons pas la Lune.
Nous ne mettons pas en oeuvre davantage de moyens spécifiques en termes de personnels lors d'un hiver à forte vigilance. Nous sommes en veille constante ; parfois, les choses sont plus faciles, mais nos compétences sont mobilisées en permanence. C'est ce que nous avons fait, par exemple, pour mettre en oeuvre le mécanisme de capacité, et, avant cela, le marché de l'effacement. Une fois le nouveau dispositif mis en place, une fois la vitesse de croisière atteinte, les équipes mobilisées passent à autre chose. Mais une situation un peu plus tendue dans le rapport offre-demande n'engage pas nécessairement de moyens complémentaires ; il nous arrive de constituer des cellules de crise, mais ce peut également être lié à des incidents techniques sur notre réseau ou d'autres réseaux.
L'Europe est à peu près coupée en trois en matière de réseaux électriques et nous sommes tous solidaires et liés. Souvenez-vous du black-out – du « grand incident », en français – en 2006 : à cause d'une erreur d'appréciation de l'opérateur allemand E.ON, toute l'Europe de l'Ouest a été plongée dans le noir pendant trois quarts d'heure. J'ai toujours dit que les électrons ne s'arrêtaient pas aux frontières ! Si les opérateurs de réseaux travaillent en permanence ensemble, c'est bien dans le but de nous prémunir de ce type d'incident, et pas seulement à une échelle régionale donnée. Ajoutons que chaque pays a ses propres problèmes. Les Suisses, par exemple, commencent à se préoccuper un peu différemment de ces questions car lorsque l'énergie hydraulique n'est pas au rendez-vous en France, rien ne dit qu'elle le soit forcément en Suisse… Il y a des « liaisons climatiques » que chacun peut comprendre.
Nous avons deux moments compliqués dans la journée, qu'il faut gérer ; le reste du temps, il n'y a pas de difficultés. N'allons pas faire croire que nous nous trouverions en permanence dans une situation compliquée. Ces deux moments de pointe caractérisent notre mode de consommation. De ce fait, il ne faut pas simplement travailler sur un mix énergétique plus diversifié, mais adopter des modes de consommation différents ; dans cette optique, l'effacement et les reports de consommation permettent d'élimer les moments de pointe, et il ne faut pas se contenter d'opposer énergies renouvelable et nucléaire.
Monsieur Lionel Tardy, sur la disponibilité de notre parc nucléaire, je n'ai pas eu l'impression d'émettre une opinion différente de la vôtre ; dix-huit de nos réacteurs sont à l'arrêt ; certains sont sortis de la phase de test, mais d'autres vont y entrer ; deux réacteurs sont en phase de redémarrage. Sur les autres questions, je n'ai pas de compétence pour vous répondre ; je vous ai invités à vous tourner vers le président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN).
Madame Annick Le Loch, j'ai éprouvé une grande satisfaction lorsque nous sommes allés fêter la nomination de la Bretagne et des Pays de la Loire comme « territoires de réseau électrique intelligent » avec les présidents Jean-Yves Le Drian et Bruno Retailleau, et le pacte breton a été largement évoqué à cette occasion. Nous avons fortement contribué à ce pacte, sa réussite étant liée à la mobilisation des élus de la région et à l'intégration du dispositif ÉcoWatt. La ligne souterraine que vous avez évoquée sera bien inaugurée dans les délais prévus, en 2017. La région ne produisait récemment que 7 % de ce qu'elle consommait, mais vous avez doublé la mise. Vous avez parlé d'un seuil de 13 %, et il me semble qu'il atteint désormais 15 %, grâce à une mobilisation très significative et une implication citoyenne, jouant sur tous les leviers : un transit un peu différent, des productions complémentaires et le secteur des énergies marines – offshore flottant, hydrolienne – qui arrivera pleinement à maturité dans peu de temps. L'hydrolien, notamment, va monter en puissance de façon significative ; rappelons qu'il n'est pas sujet aux intermittences, puisque les marées ne s'arrêtent jamais. La région a de belles perspectives dans ce domaine, d'autant plus que les industriels sont très impliqués ; on travaille en collaboration avec des grandes entreprises, situées près de Saint-Nazaire – je vous concède que ce n'est plus la Bretagne, mais c'est tout de même plus près qu'Ajaccio (Sourires) –, pour placer les postes électriques sous la mer, car il ne suffit pas d'éloigner les éoliennes du littoral pour recueillir l'assentiment de la population s'il faut construire un poste électrique sur la plage… Le pacte breton a eu des effets significatifs, même si l'indisponibilité actuelle de certains groupes des centrales de Cordemais et de Civaux ne manque pas de poser question. Rappelons que c'est le réseau de transport qui permet à la Bretagne, comme à la région PACA, de bénéficier d'un service de prix et de qualité identiques à celui dont disposent toutes les autres parties du territoire ; cette solidarité s'appuie sur une péréquation, et le réseau national et européen donnera la possibilité aux énergies marines de demain de trouver preneur en dehors de la péninsule bretonne. Bref, nous ne sommes pas spécialement inquiets pour la Bretagne dont nous connaissons la capacité à se mobiliser pour affronter, avec beaucoup de réalisme, toutes ces questions.
Monsieur Laurent Furst, c'est aux distributeurs qu'il revient de valoriser les productions locales, et j'espère qu'ils s'impliquent dans cette démarche. Les groupes électrogènes des hôpitaux pourraient participer aux mécanismes de marché, mais les hôpitaux s'y refusent pour l'instant. Ils seraient les bienvenus, mais je peux comprendre qu'ils privilégient leurs propres besoins et qu'ils n'osent pas activer cette sécurité pour d'autres.
Les pays sont souverains en matière de mix énergétique et électrique : c'est à l'Allemagne de choisir ses modes de production en fonction de ses valeurs environnementales et ses intérêts économiques. La capacité des interconnexions n'est pas saturée, et les échanges énergétiques entre les pays pourront s'opérer.
Madame Michèle Bonneton, le réseau de distribution français est vaste et porté par un seul opérateur, Enedis, dans 95 % du territoire – le reste étant assuré par des régies antérieures à la loi de 1946, comme à Strasbourg ou à Grenoble –, alors qu'il existe une multitude de petits distributeurs dans les autres pays. À un moment où nous devons faire preuve de cohésion pour que tout se passe bien, il n'est pas stupide d'avoir moins d'interlocuteurs… Je ne suis pas témoin de ce qui se passe dans les autres pays, mais j'ai quelques échanges avec mes collègues européens…
L'Europe de l'énergie et de l'électricité existe : l'interconnexion de millions d'Européens a créé un marché et une solidarité électrique ; chacun se trouve dans une situation d'interdépendance avec les autres, et le dialogue se révèle quotidien. Mais nous souhaitons conserver, à la maille de la journée, une gestion du réseau à l'échelle nationale. Faire des prévisions à l'échelle européenne, c'est indispensable ; mais ensuite, pour faire en sorte que tout se passe bien en temps réel, il vaut mieux agir en proximité. Déléguer la gestion du temps réel à une entité par trop éloignée serait prendre le risque d'une réelle inadéquation entre la réalité du problème et la solution à trouver.
Monsieur Hervé Pellois, l'autoproduction a de beaux jours devant elle, parce que c'est ainsi : de plus en plus de personnes, de quartiers ou de structures souhaiteront en faire. Associée à du stockage, l'autoproduction a du sens, mais le réseau de transport restera indispensable pour garantir la sécurité d'approvisionnement et pour permettre à ces entités de production d'écouler leurs électrons. Reste que le développement de l'autoproduction change notre modèle. D'où la discussion que nous avons avec notre régulateur ; le réseau sera moins utilisé pour le transit, mais davantage dans un but d'assurance. Et comme il doit garantir non seulement l'équilibre, mais également une réserve de puissance utilisable à tout moment, le modèle économique et, par conséquent, le prix ne seront pas tout à fait les mêmes qu'à l'époque où nous étions rémunérés au transit… Ce mouvement s'observe dans tous les réseaux européens : il n'est pas spécifique à la France. Certains pays européens ont anticipé cette évolution de comportement : entre la part réseau et la part énergie, la rémunération du réseau dans certains pays est désormais calculée à 100 % sur la puissance. On constate une augmentation de 16 à 17 % de ce que le réseau de distribution refoule dans le réseau de transport à cause des pics de production d'énergies renouvelables. C'est un phénomène nouveau, qui a un impact sur le réseau ; on s'y adapte car c'est notre métier, et en plus on aime cela… Reste que cela change le modèle économique. Et à ce titre, l'autoproduction fait bouger les lignes – si j'ose dire, moi qui en ai 105 000 kilomètres dans mon portefeuille !
Monsieur Yves Daniel, nous avons en général d'excellentes relations avec la profession agricole et nous associons les chambres d'agriculture et les agriculteurs à nos travaux. Oui, nous avons pris l'engagement de trouver la même emprise que celle des nouveaux postes dans la région nantaise – je vous écrirai pour vous le confirmer tout à fait officiellement. Les agriculteurs sont parmi ceux qui comprennent le mieux les questions auxquelles nous sommes confrontés. Ils sont chargés de la mission d'intérêt général d'alimenter la population ; ils comprennent d'autant mieux la nôtre qui est celle de fournir de l'électricité au même prix dans tous les endroits du pays. Et de temps en temps, eux aussi ont besoin d'énergie…
Madame Jacqueline Maquet, je n'aurais pas mieux expliqué les raisons nous ayant poussés à réaliser des travaux sur la ligne Avelin-Gavrelle. Une signature est nécessaire pour engager le projet, et les travaux débuteraient en 2019, la ligne devant être mise en service en 2021. On construira un pylône « équilibre » qui ressemblera à un mât de bateau exprès pour vous, Madame Jacqueline Maquet ! J'ai étudié tout le parcours de la ligne : le nouveau tracé s'éloigne des maisons actuelles, mais n'emporte pas pour autant l'adhésion de l'ensemble des riverains. Les élus ont bien compris que la sécurisation de l'agglomération de Lille, qui se réindustrialise, impose des exigences de qualité, de quantité et de puissance d'énergie qui ne sont pas toujours remplies actuellement. Cette ligne y participera. La Belgique n'est pas loin, et le circuit de l'interconnexion sera renforcé pour couvrir tous les besoins. Nous ne faisons pas cela pour faire plaisir, mais parce que c'est nécessaire, et nous essayons de le faire du mieux possible. Toutes les précautions environnementales ont été prises, d'où les avis positifs que ce projet a recueillis, et il n'y aura pas de coupure liée à ces travaux. Notre équipe sur le terrain est à la disposition des élus et des associations pour expliquer, en toute transparence, nos opérations sur cette ligne : telle est notre éthique !
Madame Jeanine Dubié, le mécanisme de capacité est un dispositif inventé en France, qui fera école en Europe. Il garantit que les vendeurs d'électricité en aient suffisamment pour faire face à la demande – le même raisonnement vaut pour l'effacement. Il va monter progressivement en puissance car il apporte au gestionnaire de réseau une meilleure qualité de service en nous assurant une visibilité encore plus précise. Ce mécanisme ouvrira le champ de l'intervention à de nouveaux opérateurs, il permettra de trouver des solutions économiques pour des utilisations de production à des moments précis, qui n'ont pas encore suffisamment de réponse et il garantira l'approvisionnement en « vraie » électricité et en effacement.
Monsieur Jean-Luc Laurent, je n'ai pas à commenter la législation et je prends acte de la production électrique mise à la disposition du réseau de transport ; certes, nous n'avons rien en trop pour cet hiver ! Nous travaillons à l'élargissement du champ des possibles, en nous concentrant sur la consommation : c'est un élément très important, dès l'instant où il est régulé différemment, pour réduire notre dépendance à la production. Nous sommes également très proactifs sur l'interconnexion pour élargir le champ des possibles. Mais ce n'est pas à moi de commenter l'adaptation des textes en vigueur à ces actions.
Il faudra poser la question à la ministre lorsque nous l'interrogerons la semaine prochaine.
Pouvez-vous confirmer qu'un seul réacteur de Fessenheim, et non deux, est arrêté ? L'arrêt du deuxième est-il bien prévu pour décembre prochain ?
Selon les informations disponibles à ce jour, Fessenheim 1 s'interrompra à partir du 10 décembre et fonctionnera à nouveau au début du mois de janvier prochain. Fessenheim 2, réacteur de 900 mégawatts, qui était indisponible depuis le 18 juin, reprendra son activité le 31 mars 2017. Toutes ces informations sont consultables sur le site Transparence.
Les producteurs d'électricité proposent des contrats d'électricité verte, cette offre existant déjà aux États-Unis. Il me semble que vous ne savez pas trier les électrons dans le réseau, si bien que je m'interroge sur la nature de l'électricité vendue : est-elle verte ou compensée ? La communication entourant ces contrats est-elle suffisamment claire ?
Même si je ne suis pas sûr d'avoir la compétence requise, je vais vous répondre, car je m'étais posé à peu près la même question dans une vie antérieure… Les vendeurs prennent l'engagement de fournir une offre intégralement composée d'énergies renouvelables. Évidemment, nous ne trions pas les électrons à la frontière pour distinguer ceux viennent du nucléaire, de l'éolien ou du thermique ! Tous les électrons se mélangent dans le réseau… Chaque vendeur doit garantir un niveau de production disponible pour fournir ses clients, et certains d'entre eux s'engagent à n'apporter en fourniture que des énergies renouvelables. C'est en tout cas ce que j'ai compris.
Madame la présidente, après cette audition, j'ai compris que nous avions besoin d'un hiver doux, pluvieux pour remplir les barrages et venteux pour les éoliennes : je vous suggère donc, sur le ton de l'humour, d'organiser une rencontre avec les présidents de Météo France et de la Française des Jeux !
J'ai été précis. Je vous ai indiqué que Météo France établit, sur le fondement de trente ans de données, la courbe d'un hiver de référence moyen : et si, au mois de décembre prochain, la température était trois degrés en dessous de celle de l'hiver de référence moyen, nous serons obligés de recourir aux moyens complémentaires.
Nous surveillerons la courbe des températures avec attention ! Nous vous remercions, Monsieur le président, d'avoir répondu à nos questions.
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mercredi 16 novembre 2016 à 16 h 30
Présents. - M. Frédéric Barbier, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, Mme Michèle Bonneton, M. Yves Daniel, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, M. Laurent Furst, M. Jean Grellier, M. Jean-Luc Laurent, Mme Annick Le Loch, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Jacqueline Maquet, Mme Frédérique Massat, M. Hervé Pellois, Mme Béatrice Santais, M. Éric Straumann, M. Lionel Tardy
Excusés. - M. Denis Baupin, M. Jean-Claude Bouchet, M. Georges Ginesta, M. Philippe Armand Martin, M. Germinal Peiro, Mme Josette Pons, M. Bernard Reynès
Assistait également à la réunion. - Mme Virginie Duby-Muller