COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES
Mardi 20 décembre 2016
Présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente de la Commission
La séance est ouverte à 17 h 10
I. Audition de M. Jean Arthuis, président de la commission des budgets du Parlement européen
Monsieur le président, notre commission des affaires européennes est très heureuse de vous accueillir pour la première fois, et d'aborder avec vous des questions économiques et financières dans un contexte où les ressources sont à la fois plus nécessaires que jamais pour relever les défis auxquels l'Union européenne est confrontée mais également toujours plus contraintes. Plus largement, nous serons heureux d'entendre l'Européen très convaincu et engagé que vous êtes de longue date s'exprimer sur la situation actuelle de l'Union et sur les priorités pour l'avenir.
Un mot, tout d'abord, du contexte. Les résultats du référendum britannique et la perspective du Brexit sont tout à la fois un défi important et une source d'incertitudes. Quelles seront la nature et l'ampleur des conséquences économiques du Brexit ? Et, même s'ils ont redit, à Bratislava, leur volonté de travailler ensemble, qu'en sera-t-il de la réaction des vingt-sept autres États membres ? Évidemment, la perspective de la sortie du Royaume-Uni, qui bénéficie d'un rabais sur sa contribution au budget de l'Union européenne, aura des implications sur les questions budgétaires, particulièrement à l'heure où se négocie la révision à mi-parcours du cadre financier pluriannuel.
Par ailleurs, le contexte sécuritaire, d'une part, et la crise des réfugiés, d'autre part, ont amené les chefs d'État et de gouvernement à prendre des engagements forts. Ces annonces impliquent des dépenses supplémentaires dans un contexte de finances publiques encore dégradées, où les marges de manoeuvre restent rares. Nous serions heureux de vous entendre sur chacun de ces sujets.
L'année 2017 sera importante pour le cadre financier pluriannuel actuellement en vigueur. Les crises inédites et successives auxquelles l'Union européenne a dû faire face en 2015 en matière de migrations et de sécurité ont souligné, une nouvelle fois, l'intérêt que revêtirait l'introduction d'une plus grande flexibilité, dans ce cadre financier pluriannuel de l'Union européenne comme dans les moyens au service de l'exécution budgétaire.
Nous souhaiterions vous entendre sur les perspectives de révision. Les dernières négociations sur l'actuel cadre avaient été particulièrement difficiles et l'introduction, à l'initiative du Parlement européen, d'une clause de révision à mi-parcours était l'une des conditions de l'accord. Par ailleurs, les montants de l'actuel cadre financier pluriannuel sont moins importants que les montants précédents, alors que l'Union européenne doit relever des défis plus nombreux. Quel est votre sentiment sur ce point et quelle sera la position du Parlement européen, plus particulièrement celle de la commission des budgets, dans les négociations à venir ?
Le groupe d'experts de haut niveau sur les « ressources propres », présidé par M. Mario Monti, que nous avons auditionné l'année dernière, publiera prochainement ses conclusions. Dans cette perspective et dans celle, plus large, d'une Union budgétaire, nous aimerions votre avis sur l'avenir du système « ressources propres ». Que peut-on espérer en la matière ? Notre commission s'est toujours montrée favorable à un renforcement des capacités budgétaires de l'Union européenne. Que pouvez-vous nous dire de l'avancée des travaux sur ce point ? Il me semble que vous avez dit que budget serait un peu plus copieux que prévu, mais le sera-t-il suffisamment ?
Plus généralement, nous serions heureux d'entendre votre point de vue sur la situation actuelle de l'Union, sur les crises multiples auxquelles elle doit faire face et sur les solutions possibles. Et, puisque nous avons engagé au sein de notre commission un travail sur l'avenir de l'Union, quelles sont selon vous les priorités ? Quelles réformes vous semblent nécessaires ? Le renforcement de la zone euro est-il la première tâche à laquelle nous devons nous attacher, et par quelles voies ? Faut-il, par exemple, un budget de la zone euro ? Le cas échéant, pour quoi faire et avec quelles recettes ? Quand la Grèce est réprimandée parce qu'elle essaie, à la suite de résultats économiques plutôt corrects, de faire un effort en faveur des plus démunis, la zone euro a-t-elle toujours du sens ? Ou bien servira-t-elle une fois de plus à montrer que l'Union européenne n'est qu'un grand marché ? Ces questions sont-elles abordées par votre commission ?
Enfin, comment approfondir la démocratie européenne et la rendre enfin plus proche des citoyens ? Quel rôle pour les parlements de ce point de vue ?
Madame la présidente, je vous remercie de m'avoir convié à cet échange. Je suis très attaché à des relations aussi fréquentes et riches que possible entre les membres des parlements nationaux et les membres du Parlement européen.
Siégeant au Parlement européen depuis le renouvellement de 2014, j'en préside la commission des budgets. Je m'efforce de comprendre le fonctionnement de nos institutions et je dois vous avouer qu'on a souvent le sentiment, au Parlement européen, d'être dans une bulle et non pas suffisamment proche du terrain et des citoyens. En fait de démocratie européenne, c'est peu dire que l'Europe ne parle pas aux Européens, et le budget non plus ! Du moins celui-ci permet-il de se faire une opinion sur les prérogatives de l'Union européenne. Au fond, l'Union n'est-elle pas encore une addition d'égoïsmes nationaux ? Si elle a une compétence exclusive pour négocier des traités de libre-échange, si elle multiplie donc les initiatives de ce point de vue, il m'arrive de penser qu'il serait bon de mettre ces négociations au service d'une vision et d'une stratégie.
Notre budget est plutôt modeste : 158 milliards d'euros en engagements et seulement 134 milliards d'euros en paiements. La différence entre le montant des engagements et celui des paiements tient au fait que les opérateurs, les acteurs locaux, les collectivités publiques, comme les entreprises, les laboratoires, les ONG mettent du temps à se saisir des nouveaux programmes, du fait de leur complexité parfois dissuasive, dont la Commission européenne prend l'initiative dans chaque cadre financier pluriannuel de sept ans. En raison d'une complexité souvent dissuasive, les engagements sont, dans les premières années d'un cadre financier, d'un montant nettement inférieur aux plafonds prévus.
Voté à l'automne 2013, le cadre actuel couvre les années 2014 à 2020. Un membre du Parlement européen élu après qu'a été approuvé le cadre financier pluriannuel a l'impression, en matière budgétaire, que chaque année une tranche est coupée et que les marges de manoeuvre sont vraiment infimes. Représentant environ 1 % du produit intérieur brut européen, ce budget est financé par des ressources propres à hauteur de 10 %, constituées par les droits de douane – mais dans la mesure où nous n'arrêtons pas de signer des traités de libre-échange, ils fondent comme neige au soleil… Les 90 % restants émanent des États membres et, compte tenu de leurs situations budgétaires respectives, vous imaginez leur ardeur à mettre la main à la poche… Contrairement à l'Assemblée nationale, le Parlement européen n'est pas compétent en matière de recettes. Budgétairement hémiplégique, il ne discute que des dépenses ; qui plus est, le Conseil soupçonnant sans doute les parlementaires enclins à la dépense, le niveau des dépenses est lui-même enchâssé dans un cadre financier pluriannuel.
Le cadre actuellement en vigueur a été décidé à l'automne 2013. Si j'en crois ce qu'on m'a dit, le débat a été vif. L'autorité budgétaire est constituée de deux branches : le Conseil et le Parlement. Le Conseil a fait pression pour réduire les plafonds d'engagements et de paiements ; le Parlement a accepté un compromis, mais à une double condition. D'une part, le cadre devait être révisé à mi-parcours ; d'autre part, une étude devait être menée sur les ressources propres – les premières conclusions du groupe de haut niveau présidé par Mario Monti seront rendues publiques le 12 janvier, à l'occasion d'une présentation devant la commission des budgets au Parlement européen. Le cadre est donc extrêmement contraint, d'autant que pratiquement 80 euros sur 100 dépensés repartent vers les États, par deux canaux : d'une part, le fonds de cohésion, en l'occurrence le fonds européen de développement régional (FEDER) et le fonds social européen ; d'autre part, la politique agricole commune (PAC). Pratiquement, la part réservée à chaque État membre est calculée à l'euro près. Ne restent de nature supranationale qu'entre 20 % et 25 % de ce budget, dont le tiers, ou presque finance les services de la Commission européenne, du Parlement européen, du Conseil, de la Cour de justice de l'Union européenne, de la Cour des comptes européenne et des agences. Ce qui reste pour donner du sens à des actions supranationales est extrêmement modeste : je songe au programme de recherche Horizon 2020 et au programme d'infrastructures de communication Connecting Europe Facility, mais aussi aux actions visant à conforter la présence de l'Europe dans le monde, c'est-à-dire l'action humanitaire et cet embryon de démarche pour la justice, la sécurité et la défense communes.
Du coup, à chaque fois que survient une crise, nous nous retrouvons pris au dépourvu, faute de moyens pour y faire face. Nous l'avons constaté avec ces migrations massives qui auraient pourtant pu être anticipées : ce sont les printemps arabes qui ont déclenché la destruction de l'État en Libye et les événements en Syrie, et c'est à ce moment que les flux migratoires ont pris cette ampleur considérable. Comme toujours, l'Europe a réagi avec un certain décalage, d'autant que les crédits prévus dans le cadre financier pluriannuel 2014-2020 pour les migrations et l'accueil des réfugiés étaient d'un montant moindre que ceux du cadre 2007-2013. C'est dire notre capacité d'anticipation…
En matière de migration, en vertu des accords de Dublin, les États membres ont gardé toutes leurs prérogatives. Jusqu'à une date récente, les moyens de l'agence FRONTEX lui permettaient seulement de tenir des statistiques à propos des franchissements illégaux des frontières. En application des accords de Schengen, opérants à partir de 1995, les frontières intérieures ont disparu et les États membres ayant des frontières extérieures sont responsables du contrôle de celles-ci. Ainsi, les flux arrivant en Europe par Lampedusa ou la Sicile sont de la responsabilité des Italiens ; de même, si des migrants arrivent des côtes turques sur les îles grecques, c'est la Grèce qui est responsable. Certes, un corps européen de garde-côtes et de gardes-frontières a été créé récemment, mais, lorsqu'ils interviennent, ces garde-côtes et gardes-frontières restent sous la responsabilité de l'État concerné. C'est dire si la maîtrise des flux migratoires reste un défi – je doute que nous ayons mis en place les moyens appropriés.
Que se passe-t-il en cas de crise ? Nous l'avons vu avec la crise de l'euro, quand il fut nécessaire de mettre quelque peu la main à la poche pour venir en aide à la Grèce, dans le cadre d'accords supranationaux avec les créanciers. Nous l'avons surtout vu avec les migrations.
Lorsque M. Juncker a pris ses fonctions de président de la Commission européenne, il a constaté, non sans pertinence, que l'Europe souffrait depuis dix ans d'un déficit d'investissement – privé comme public. En l'absence de crédits disponibles dans le budget, il a imaginé un dispositif relevant de l'ingénierie financière, avec effet de levier : le fonds européen d'investissement stratégique, la Banque européenne d'investissement (BEI), qui est à l'Union européenne ce que la Caisse des dépôts et consignations est à l'État français, étant chargée de mettre en oeuvre les moyens dégagés par ledit fonds. Pour gager les garanties, il fallait quand même bien sortir un peu d'argent du budget de l'Union européenne : on a prévu un engagement de 16 milliards d'euros, la BEI contribuant pour sa part à hauteur de 5 milliards d'euros, ce qui fait un total 21 milliards d'euros, permettant de couvrir 63 milliards d'euros. Il a été décidé que les établissements financiers et bancaires qui auraient recours au fonds européen d'investissement stratégique devraient s'engager à hauteur du quintuple de cette garantie de 63 milliards d'euros dont ils bénéficieraient. Cinq fois soixante-trois font 314 : voilà comment on a pu dire que 315 milliards d'euros étaient dégagés pour faciliter les investissements publics et privés. On a commencé par prendre 8 milliards d'euros. Le débat a été très difficile. Il a fallu raboter non sur ce qui revient aux États – autrement dit sur les fonds de cohésion ou la PAC – mais sur ce qui est supranational, c'est-à-dire Horizon 2020 et Connecting Europe Facility, autrement dire sur les investissements d'avenir !
Quand le budget n'offre pas les moyens nécessaires, on crée un satellite budgétaire. Pour faire face à la crise migratoire, nous avons bien sûr voulu nous attaquer aux causes des migrations, dont nombre viennent d'Afrique et procèdent de motifs économiques. Pour les prévenir, nous avons intérêt à aider les pays africains à se développer ; l'Afrique compte aujourd'hui 1,2 milliard d'habitants, elle en aura probablement 2 milliards d'ici à vingt-cinq ans, on peut donc anticiper des flux migratoires importants. Comment venir en aide à l'Afrique ? Nous avons inventé un nouvel instrument financier, un trust fund : on prend un peu d'argent dans le budget de l'Union européenne, et les États sont invités à compléter. Suivant la même logique, nous avons créé un trust fund for Syria – je ne sais pas comment vous traitez cela dans le cadre de la loi de finances. Et lorsque M. Erdoğan a demandé, en plus des 650 millions d'euros perçus chaque année par la Turquie au titre de la pré-adhésion, de l'argent pour arrêter de laisser passer un certain nombre de migrants – ce qui constituait, semble-t-il, une activité assez lucrative pour certains opérateurs turcs –, nous avons créé une facilité budgétaire au bénéfice de la Turquie à hauteur de 3 milliards d'euros. Comme le budget n'offre pas les moyens de répondre à ces nouveaux défis, on crée de nouveaux instruments, multipliant ainsi les satellites qui échappent au contrôle des parlements, tant des parlements nationaux que du Parlement européen.
J'ai fait dresser un diagramme représentant ce que j'appelle la galaxie budgétaire de l'Union européenne, et il n'est pas simple pour les citoyens de l'Union européenne de comprendre le contenu de ce document ! L'Europe gagnerait en crédibilité démocratique si elle était mesure d'établir un budget lisible et compréhensible : sur ce plan, les marges de progression sont considérables. Notre budget est donc corseté, et nous manquons terriblement d'instruments de flexibilité.
Est venue la révision du cadre financier pluriannuel, sur laquelle nous avons fondé maints espoirs, estimant que nous devions tirer les conséquences des crises récentes et prévoir des crédits de paiement et de fonctionnement à la hauteur des enjeux. La discussion a été extrêmement difficile. Nos collègues Mme Isabelle Thomas et M. Jan Olbrycht ont commencé à travailler il y a plus de deux ans, dès le lendemain du renouvellement du Parlement, pour préparer cette révision à mi-parcours.
La Commission européenne, qui devait présenter sa propre vision, a rendu public son projet au mois de septembre dernier ; ce document, à la vérité, ne fait pour l'essentiel que reprendre le cadre financier pluriannuel, en insistant toutefois sur la nécessité d'utiliser les plafonds prévus, en prévoyant quelques marges pour les dépasser éventuellement, via certains instruments financiers tout à fait exceptionnels, pour faire face à des crises.
Très vite, nous avons compris que le Conseil était peu disposé à aller dans ce sens. La Commission européenne avait prévu pour les quatre années 2017, 2018, 2019 et 2020 une enveloppe d'argent frais de l'ordre de 12 milliards d'euros. Sous présidence slovaque, le Conseil a été diligent et sa dernière proposition prévoit un supplément de crédits de l'ordre de 6 milliards d'euros – à peu près 1 milliard d'euros en redéploiement – démarche classique – et 5 milliards d'euros d'argent frais. Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas trouvé d'accord. En matière budgétaire, c'est le Conseil ECOFIN, composé des ministres des finances, qui est compétent, et il statue à la majorité simple, mais, lorsqu'il s'agit du cadre financier pluriannuel ou de sa révision, la compétence revient au Conseil Affaires générales, où les décisions doivent être prises à l'unanimité. Le Conseil s'est heurté à la réserve formulée par le gouvernement italien, et, malgré ses efforts, la présidence slovaque n'a pu aboutir. Tout laisse à penser que c'est sous la présidence maltaise que les travaux seront conclus.
La position du Parlement européen est délicate. Nous avons tenu un certain nombre de réunions informelles pour essayer de convaincre le Conseil de la nécessité et de l'opportunité d'augmenter telle ou telle ligne de crédits – pour les migrations, pour l'accueil des réfugiés, pour la flexibilité des actions humanitaires dans des pays dévastés par la guerre et la terreur. Le Conseil s'est montré extrêmement réticent. Nous avons aussi insisté sur l'emploi des jeunes. Au sein de l'Union européenne, ce sont plus de cinq millions de jeunes qui sont au chômage ; c'est un véritable fléau. En moyenne, c'est un jeune sur quatre, mais dans certains pays, le chômage touche plus d'un jeune sur deux ; seuls les pays ayant une longue pratique de l'apprentissage, tels l'Allemagne, les Pays-Bas et l'Autriche, sont relativement épargnés. Nous avons donc insisté sur la nécessité de renouveler une initiative prise à la fin de l'année 2013, lors d'une rencontre entre Mme Merkel et M. Hollande : Youth Employment Initiative. L'évaluation de l'usage qui a été fait des 6 milliards d'euros prévus à l'époque étant relativement lente, nous avons instamment prévenu le Conseil que le Parlement européen n'était pas disposé à accepter une révision qui ne comporterait pas des suppléments de crédits significatifs pour l'emploi des jeunes en Europe. Le message n'a été que partiellement entendu si l'on en croit la dernière version sur la table, qui a suscité la réserve des Italiens. Ces derniers, en première ligne sur le front des migrations depuis que la frontière grecque est gardée par les autorités turques, réclament pour leur part des crédits supplémentaires pour l'accueil des réfugiés et le contrôle des frontières. Voilà où nous en sommes de la révision du cadre financier pluriannuel, et les Italiens n'ont toujours pas levé leur réserve.
Les ressources propres suscitent l'espoir de nombre de mes collègues, mais de nouvelles ressources propres ne pourraient être que des impôts. Cela supposerait que la nature institutionnelle du Parlement européen change, car nous serions là dans l'esquisse d'un système fédéral. Quelles pourraient-elles être exactement ? On parle beaucoup d'un impôt sur les sociétés, mais les cultures fiscales varient d'un pays à l'autre : chacun a sa martingale, ses exonérations, ses déductions, ses abattements, ses crédits d'impôt recherche… Ce n'est pas si simple d'avoir une assiette commune ; nonobstant le projet ACCIS (Assiette consolidée commune d'impôt sur les sociétés), je doute fort que les États membres arrivent à se mettre d'accord. Ce pourrait être la TVA, mais ce n'est pas évident non plus : la TVA repose sur un mécanisme de récupération, et chaque État membre est comptable des transferts de récupération entre fournisseurs, distributeurs et consommateurs. À moins de décider qu'une certaine fraction de la masse de TVA collectée par un État sera allouée au budget de l'Union européenne. On peut aussi imaginer, avec des taxes carbone aux frontières extérieures, le rétablissement de droits de douane dans une version écologique.
Quoi qu'il en soit, si l'Europe avait des ressources propres supplémentaires, il faudrait se poser la question de savoir qui en supporte le poids. Directement ou indirectement, c'est toujours le citoyen. Dans ces conditions, il faudrait que corrélativement à la perception de ces nouvelles ressources propres les impôts levés à l'échelle nationale par les États membres ou les collectivités territoriales soient allégés en conséquence ; et si tel était le cas, je suis porté à penser que la contribution des États membres au budget de l'Union européenne serait immédiatement révisée à la baisse… J'ai peine à imaginer que des ressources propres permettraient d'arrondir le budget de l'Union européenne, à moins d'accabler les contribuables – hypothèse que je ne suis pas prêt à valider.
On parle aussi de la taxe sur les transactions financières, mais rien n'est plus délocalisable qu'une transaction financière. Voudrait-on faire un cadeau à la place de Londres, au moment même où Londres s'apprête à prendre ses distances vis-à-vis de l'Union, qu'on ne s'y prendrait pas autrement ! J'ai cru comprendre que, malgré les réserves du Gouvernement, qui redoute une délocalisation des activités et des emplois, le Parlement français avait donné un petit coup de pouce à une telle fiscalité.
Une question va se poser très vite : comment allons-nous préparer le prochain cadre financier pluriannuel ? D'ailleurs, est-il légitime de prévoir, comme par le passé, un tel cadre financier ? J'ai le sentiment que nous sommes à la fin d'un cycle et que nous cherchons vainement, dans les discours que nous tenons les uns et les autres, à faire dire à ce budget ce qu'il n'a pas les moyens d'accomplir. Car il est modeste, enfermé dans un corset étroit, et la vraie question est la suivante : quelle Europe voulons-nous instituer ? En d'autres termes, quelles compétences imaginons-nous pour cette Europe à l'heure de la mondialisation ? Il m'arrive de penser que, dans maints domaines – diplomatie, défense, lutte contre les paradis fiscaux –, les États membres n'ont plus les moyens d'assumer leurs prérogatives de souveraineté nationale.
Ainsi, lorsque l'État fédéral américain se fâche pour obtenir des autorités suisses la levée du secret bancaire, il l'obtient au bout d'une semaine. Pour leur part, les Européens ont été incapables de définir une position commune à l'égard de la Suisse… Tel n'aurait pas été le cas s'il avait existé une autorité européenne chargée de lutter contre la fraude fiscale. C'est à cette seule condition que nous pouvons être efficaces.
De même, pour lutter contre le terrorisme, nous avons voté la mise en place d'un registre des données de passagers aériens – passenger name record (PNR) –, mais, en réalité, nous avons prévu vingt-huit PNR sans obligation pour les États membres à mettre les informations en commun ! Autrement dit, nous n'avons pas vraiment répondu à l'objectif de communication instantanée des données entre les différentes autorités nationales.
En définitive, il faut se poser la question suivante : l'Europe que nous connaissons aujourd'hui est-elle davantage qu'un simulacre d'Europe ? Il m'arrive de penser que le budget européen est, du fait de sa modestie, un simulacre de budget, qui n'offre pas de véritables moyens. On implore l'Europe de s'engager, mais celle-ci n'en a pas les moyens, ni institutionnellement ni budgétairement. C'est à cela qu'il faut réfléchir.
Il existe un premier cercle : la zone euro. Le jour où l'on a créé la zone euro, on a partagé une souveraineté, mais le débat a été discret. Ma conviction est que l'on a pris ce jour-là un billet aller sans retour vers l'intégration politique. À l'époque, on n'a pas cru devoir mettre en place un gouvernement économique, financier et budgétaire, puisque l'on avait adopté un règlement de copropriété, que l'on a appelé le pacte de stabilité et de croissance. Mais, lorsque certains ont transgressé les règles du pacte, ils n'ont fait l'objet d'aucune sanction. Du coup, nous nous retrouvons aujourd'hui sans règles ni gouvernement.
Pour aborder ce problème, la commission des budgets et la commission des affaires économiques et monétaires du Parlement européen ont pris l'initiative de rédiger un rapport sur ce que pourrait être un budget de la zone euro, ce qui est une façon de s'interroger sur la gouvernance de ladite zone. Les rapporteurs sont mes collègues Reimer Böge, membre du Parti populaire européen (PPE), et Pervenche Berès, membre de l'Alliance des socialistes et démocrates (S & D). Le problème de l'Europe est qu'elle n'est pas gouvernée, qu'il n'y a pas de leadership : la Commission n'est pas un gouvernement ; parmi les États membres et leurs dirigeants, il n'y a pas véritablement de leader capable d'entraîner les autres pour aller de l'avant.
Or la solidarité entre les partenaires de la zone euro est, selon moi, sans commune mesure avec celle qui existe entre les vingt-huit États membres au titre du marché intérieur. Nous l'avons notamment constaté lorsque la Grèce s'est retrouvée en situation de cessation de paiements : certes, on aurait pu l'abandonner à son triste sort, mais on a assez vite compris que, si elle était surendettée, c'est parce que des créanciers aveugles lui avaient fait confiance trop facilement, et on s'est aperçu que lesdits créanciers se trouvaient en France et en Allemagne. Et nous n'étions pas malheureux lorsqu'il s'agissait pour nos entreprises de travaux publics de rénover les stades grecs, d'installer un métro à Athènes ou à Thessalonique, ou pour nos entreprises d'armement de compléter le dispositif militaire de la Grèce pour lui permettre de contenir une éventuelle agression turque ! D'autre part, nous étions à la limite d'un risque systémique : si nous avions laissé la Grèce sortir de la zone euro, la communauté financière internationale aurait pu douter de la pérennité de l'euro. Après la Grèce, les spéculateurs se seraient probablement intéressés à l'Italie, à l'Espagne et peut-être à d'autres pays. C'en eût été fini de l'euro.
Pour tirer la conséquence de cette solidarité, il a fallu imaginer un mécanisme de mutualisation du surendettement, que l'on a appelé le mécanisme européen de stabilité financière (MESF). Il s'agit d'un autre instrument financier hors budget, autrement dit d'un angle mort du contrôle budgétaire. Ce sont les parlements nationaux qui votent les crédits nécessaires pour doter le capital du MESF ou pour garantir les emprunts émis par celui-ci, mais aucun parlement ne le contrôle, pas plus le Parlement européen que les parlements nationaux. Je m'étonne d'ailleurs que nous n'ayons pas une autre attitude sur la question de la gouvernance de la zone euro lorsque nous nous réunissons au titre de l'article 13 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire, dit pacte budgétaire européen – fiscal compact. Nous devrions nous réunir au moins une fois par mois dans ce format et demander à la Commission européenne et à l'Eurogroupe de rendre des comptes.
L'Europe fonctionne comme si elle se résumait à un club de chefs d'État et de gouvernement ou de ministres. Pourtant, plusieurs d'affaires auraient pu ou pourraient favoriser l'émergence d'une opinion publique européenne : le LuxLeaks, les Panama Papers et, aujourd'hui, le Football Leaks. Si certaines multinationales ne paient pas d'impôts en Europe, c'est parce que les États membres sont suffisamment stupides pour se faire mutuellement concurrence et inciter les dirigeants de ces sociétés à s'installer chez eux en leur disant qu'ils n'y paieront pas d'impôts ! Que s'est-il passé sur ce dossier ? À la fin du mois de juin dernier, les ministres des finances se sont réunis un vendredi à Bruxelles et ont publié un communiqué pour dire qu'ils avaient trouvé un accord pour lutter contre l'évitement de l'impôt. C'est beau comme l'antique ! En réalité, ils n'ont rien changé, car il ne fallait pas gêner l'Irlande qui applique un taux d'impôt sur les bénéfices des sociétés de 12,5 %, voire de zéro dans bien des cas, ni tel ou tel pays d'Europe centrale qui avait un problème de TVA… Si l'opinion publique se saisissait de ces dossiers, il me semble que les données du problème changeraient.
Quant aux Grecs, ce sont des gens adorables : on leur donne le soir un projet de loi, ils le votent dès le lendemain matin… Le problème, c'est que ces lois ne sont jamais appliquées. Mais cela permet de cocher la case imposée par le Fonds monétaire international (FMI) ou la Commission européenne… Lorsque je me suis rendu en Grèce en février 2012, dans le cadre de la mission que le Premier ministre m'avait confiée sur l'avenir de la zone euro, j'ai rencontré le directeur de l'autorité statistique grecque. Le pauvre homme était en pleine dépression : alors qu'il avait dit la vérité, qu'il s'était efforcé de donner une image fidèle de la situation des finances publiques grecques, il se voyait poursuivi devant une juridiction pénale à l'initiative d'une fraction du parlement grec au motif qu'il avait porté atteinte à l'honneur du pays ! Nous l'avons auditionné récemment au Parlement européen, par visioconférence, car il s'est réfugié aux États-Unis, étant toujours poursuivi pour la qualité du travail qu'il a accompli !
Les pénalités que l'on veut infliger aux États qui transgressent les règles sont contestables dans leur principe : si cet État est déjà déficitaire, ce sont ses partenaires qui devront lui prêter de l'argent pour qu'il paie son amende. En revanche, il serait utile de mettre les petites turpitudes et autres dysfonctionnements sur la place publique, car c'est l'opprobre qui fait bouger les États, c'est l'opinion publique qui peut amener les parlementaires et les gouvernants à agir. L'urgence est là : l'Europe est un déficit démocratique.
Nos concitoyens attendent, j'en suis persuadé, qu'on leur propose une certaine vision de l'Europe à l'heure où la mondialisation suscite tant de peurs et d'angoisse. Le monde est dangereux, et il va bien falloir l'organiser. Or aucun État membre, pas même la France en dépit des valeurs dont elle est héritière et porteuse, ne peut prétendre influencer à lui seul l'organisation du monde et prévenir les dangers qu'il recèle. Seule l'Europe peut le faire.
Au moment où les Américains sont sans doute tentés par l'isolationnisme, peut-être serait-il temps de s'interroger sur les capacités de sécurité et de défense en Europe. Nous avons fait un premier pas : le Parlement européen a voté, avec le soutien de la Commission, une enveloppe de 80 millions d'euros pour la recherche en matière militaire, dont une première tranche de 25 millions pour 2017. C'est ce qu'on appelle une « action préparatoire », les actions préparatoires étant au Parlement européen ce qu'est la réserve parlementaire au Parlement français. J'espère que les États membres se mettront rapidement d'accord sur l'utilisation de ces 25 millions ; cela ne va pas être si simple. D'autre part, il y a eu des prises de position au sommet de Bratislava, et la France et l'Allemagne viennent de publier des déclarations communes. On peut donc espérer une avancée dans le domaine de la défense et de la sécurité. Selon moi, ce débat ne peut plus attendre.
J'en viens au Brexit. La phase précédant le référendum britannique m'avait rendu malheureux. Au mois de février 2016, les Britanniques avaient demandé en substance, par la voix de M. Cameron, que l'on révise les traités sur deux points : que l'on cesse de dire, d'une part, que l'Europe était un projet d'intégration politique et, d'autre part, que la monnaie européenne était l'euro, ce qui était une façon de renoncer à utiliser la monnaie comme une arme économique et financière, ainsi que le font les Américains lorsqu'ils infligent des amendes aussi lourdes à des banques ou à des industriels européens, par exemple à Alstom. J'avais trouvé ces sollicitations honteuses, mais le président du Conseil européen, M. Donald Tusk, avait donné satisfaction à M. Cameron pour qu'il puisse se présenter devant ses électeurs avec quelques chances de maintenir le Royaume-Uni au sein de l'Union européenne. Et pendant ces quatre mois – je le dis sous le contrôle de mon collègue Bruno Gollnisch ici présent –, nous n'avons pas eu le droit de dire qu'il y avait un problème.
D'autre part, alors que le projet de budget pour l'année suivante est habituellement déposé au mois de mai, on nous a informés qu'il ne le serait cette fois-ci qu'à la fin du mois de juin, lorsqu'on y verrait un peu plus clair. Vous voyez donc quelles peuvent être la pusillanimité et la fébrilité au niveau européen.
D'ailleurs, le Brexit est curieux à certains égards, car le fonctionnement de l'Union européenne avait été très largement formaté par les Britanniques. Si l'on ne pouvait pas avancer, c'est parce qu'ils s'y opposaient chaque fois ; ils avaient vraiment mis l'Europe à leur main.
Au lendemain du vote britannique, les chefs d'État et de gouvernement des vingt-sept se sont réunis. Comme le frein avait été levé, on pensait qu'ils allaient trouver l'embrayage… mais on ne peut pas dire qu'ils soient allés bien loin. Peu de temps après, M. Hollande, Mme Merkel et M. Renzi se sont rencontrés sur l'île de Ventotene, lieu hautement emblématique. Et, là non plus, on n'a pas senti le grand souffle européen. Il y a comme un déficit d'ambition de la part de nos chefs d'État et de gouvernement, qui s'évertuent à prolonger l'illusion qu'ils ont encore en main toutes les prérogatives de souveraineté, au risque de donner en spectacle leur propre impuissance, ce qui exaspère naturellement un nombre croissant de nos concitoyens.
Nous ne savons pas encore très bien à quel moment les Britanniques vont déclencher la procédure prévue à l'article 50 du traité sur l'Union européenne. Mme Theresa May a annoncé qu'elle le ferait à la fin du mois de mars 2017. Les Britanniques disposeront alors de deux ans pour négocier leur sortie.
Nous commençons à évaluer les conséquences du Brexit. Nous pouvons anticiper que le budget européen perdra la recette annuelle acquittée par le Royaume-Uni, mais que, en contrepartie, l'Union n'aura plus à débourser ce qui est versé actuellement à ce pays au titre des différentes politiques, notamment de la politique de cohésion et de la politique agricole commune. Au total, la diminution nette de ressources sera de 5 à 7 milliards d'euros selon les années, sachant qu'il faudra aussi tenir compte des engagements pour payer les retraites des fonctionnaires et des parlementaires britanniques. Mais pour l'heure, les parlementaires britanniques sont toujours présents. Ils continuent à participer aux travaux législatifs et à présider des commissions – elles sont nombreuses au Parlement européen.
Chacun se prépare à la négociation. Le président Juncker a désigné M. Michel Barnier comme négociateur au nom de la Commission. Le président Schulz, avec l'accord du bureau, a chargé M. Guy Verhofstadt de représenter le Parlement européen dans les discussions. J'espère que l'Europe aura une véritable position de négociation, car je ne voudrais pas que les Britanniques soient tentés de jouer les États membres les uns contre les autres, au détriment des intérêts européens. Peut-être souhaiteront-ils rester au sein du marché unique, selon les mêmes modalités que les Norvégiens actuellement ? Dans ce cas, ils devront passer à la caisse : la Norvège paie environ 96 euros par habitant pour bénéficier de l'accès au marché unique. Dans ces conditions, je ne suis pas sûr que la sortie du Royaume-Uni aura des conséquences budgétaires considérables, d'autant que le budget européen est ce qu'il est. L'important, c'est que l'Europe sache très précisément ce qu'elle veut. Les Britanniques ont laissé entendre qu'ils voulaient garder leur place au sein du marché intérieur tout en rétablissant un contrôle strict sur les migrations en provenance de l'Union européenne. Or ce n'est pas possible : on ne peut pas dissocier les libertés de circulation.
Quant au Parlement européen, il est dans l'état d'agitation que vous pouvez imaginer depuis que le président Schulz a annoncé son prochain départ, alors qu'il aurait pu être candidat à sa propre succession. Qui que soit le nouveau président élu, j'espère qu'il sortira le Parlement de son activité traditionnelle, qui relève en partie de l'occupationnel, et qu'il l'invitera à s'exprimer dans les débats sur l'avenir de l'Europe, notamment pour la faire mieux comprendre aux citoyens.
Lorsque vous retournez dans vos circonscriptions en tant que parlementaires nationaux, vous allez à la rencontre de vos électeurs. Pour un député européen, ce n'est pas si simple : les circonscriptions couvrent plusieurs régions administratives et comptent autour de dix millions d'habitants, et l'on traite à Strasbourg et à Bruxelles de questions qui intéressent peu les médias. Être parlementaire européen, c'est bien souvent rester dans un purgatoire médiatique, au-dessous des radars. Le vrai privilège, c'est donc d'être invité pour une audition par la commission des affaires européennes de l'Assemblée nationale ! (Sourires et applaudissements.)
Merci pour ce mot de conclusion ! Plus le Parlement européen et les parlements nationaux travaillent ensemble, plus ils rendent les choses lisibles.
Je vous remercie, monsieur le président, pour votre brillant exposé.
L'Europe est déjà mal perçue dans nos circonscriptions. Si les Français entendaient ne serait-ce qu'une petite partie de ce que vous venez de dire, elle le serait plus mal encore. Je sais que vous avez raison sur le fond, mais vous avez employé des mots durs, notamment lorsque vous avez parlé de « simulacre d'Europe ».
On se demande si l'euro n'est pas aujourd'hui la seule chose qui nous raccorde à l'Europe. Alors que les Américains taxent nos entreprises, nous n'arrivons pas à taxer les multinationales, notamment celles du secteur internet. Plus grave : alors que de pauvres gens se noient en mer Méditerranée, la France, pays des droits de l'homme, et l'Europe sont pratiquement impuissantes, bien que l'on ait beaucoup discuté de FRONTEX. Si, malgré les attentats qui se sont produits hier à Berlin ou en juillet à Nice, nous ne prenons pas conscience que nous devons tous nous mettre autour de la table et discuter sérieusement sans que chacun s'y limite à récupérer son bout de gras, nous ne nous en sortions pas !
On a fait l'Europe monétaire. Compte tenu de ce qui se passe, on aurait pu faire une Europe de la défense, qui n'existe pas aujourd'hui. Lorsque la France intervient au Mali, elle se défend elle-même, mais elle défend aussi une partie de l'Europe. Or, lorsqu'il est question du budget européen, personne ne tient compte des moyens que notre pays consacre à la défense.
J'ai vraiment apprécié l'ensemble de votre intervention. J'y ai même appris des choses que je ne connaissais pas. Vous vous êtes montré réaliste sur l'Europe, comme vous l'avez toujours été. Vous avez parlé de manière très directe, notamment sur les questions financières. Vous avez notamment évoqué le plan qui a été lancé pour lutter contre le chômage des jeunes. Vous avez aussi expliqué que, chaque fois qu'il est nécessaire d'agir, on crée un petit satellite budgétaire. À force, personne ne les contrôle et on ne sait plus où on en est. Cela devient grave.
Il est temps qu'on se pince les fesses ! Alors que le terrorisme est à nos portes, on ne bouge pas, on ne fait pas l'Europe de la défense. C'est tout de même dommage !
Raison de plus pour la faire, cette Europe !
Merci, monsieur le président, pour votre exposé très stimulant, y compris pour ceux qui, comme moi, ont une vision des institutions européennes très différente de la vôtre.
Vous avez notamment évoqué le problème des ressources propres. Pour ma part, je me suis toujours étonné que la majorité de l'institution parle de la nécessité de trouver des ressources propres alors que l'Union européenne en a déjà une : les droits de douane. Cependant, vous nous donnez une information très intéressante : ceux-ci n'abondent le budget européen qu'à hauteur de 10 %, ce qui est très peu. D'où ma question : n'avez-vous pas le sentiment, que, en concluant des traités de libre-échange avec le monde entier, on a, d'une part, tué la poule aux oeufs d'or s'agissant des ressources financières, et, d'autre part, amoindri la raison d'être même de l'Union européenne ?
En effet, l'Union européenne était une zone de libre-échange et un marché commun entre des pays où les niveaux de salaires et de protection sociale étaient, du moins à l'origine, à peu près les mêmes. Il y avait la libre circulation totale des personnes, des biens, des services et des capitaux, mais aussi, malgré tout, certaines protections vis-à-vis du reste du monde. Or on a abaissé ces protections. Si le libre-échange doit s'exercer à l'échelle du monde entier, quelle est, dès lors, la raison d'être d'une telle union régionale, qui, de surcroît, est de plus en plus dépourvue de ressources financières ?
Vous avez très justement relevé la différence entre la réaction de nos autorités, nationales et européennes, et celle d'autres pays, en particulier les États-Unis, sur un certain nombre de dossiers, notamment les paradis fiscaux. Quel est votre sentiment à propos de l'affaire BNP-Paribas ? Considérant que leur législation relative aux embargos a une valeur universelle, les États-Unis ont prélevé d'autorité sur la banque 9 milliards de dollars, soit 7 milliards d'euros, sur la base d'une décision de justice – on me rappellera que la justice est indépendante, mais il y aurait beaucoup à dire sur le sujet. Dans cette affaire, n'êtes-vous pas frappé par le silence des autorités européennes, notamment du président du Conseil européen, M. Tusk, du président de la Commission européenne, M. Juncker, et même de nos collègues députés européens ? Ce silence assez complaisant n'a d'égal que la passivité des autorités gouvernementales françaises.
Monsieur le président, je vous remercie à mon tour pour votre exposé très intéressant.
S'agissant du Brexit, vous avez appelé l'Europe à adopter une position commune vis-à-vis du Royaume-Uni, tout en laissant entendre que vous n'étiez pas du tout sûr que tel serait le cas et que, très probablement, le Royaume-Uni profiterait de l'absence de position commune pour en tirer, comme souvent – je le dis en toute amitié à l'égard de nos partenaires britanniques –, tous les avantages, à la fois ceux qui sont liés, de leur point de vue, à la sortie de l'Union européenne et ceux qui sont liés au fait d'y rester. Telle est notre crainte. Quel est votre avis sur ce point ?
Ne pensez-vous pas que, pour être plus compréhensible et lisible par nos concitoyens, l'Europe gagnerait à être identifiée avec un certain nombre de projets d'investissement, fussent-ils modestes ? De mon point de vue, de tels projets font actuellement défaut. Le président Pompidou disait que l'on ne tombe pas amoureux d'un taux de croissance. De la même manière, je doute que l'on puisse tomber amoureux du diagramme présentant le processus budgétaire européen que vous nous avez montré ! Compte tenu de vos compétences en matière budgétaire, je vous invite d'ailleurs à jeter un coup d'oeil à un autre diagramme, qui n'a rien à envier au vôtre : celui qui décrit le fonctionnement de la métropole du Grand Paris. Nous avons désormais cinq niveaux d'administration territoriale : la métropole, les territoires, les communes, les départements et la région – rien que ça ! Le processus budgétaire européen semble presque simple au regard du fonctionnement de ladite métropole…
Je pourrais malheureusement donner des exemples tout aussi complexes dans la nouvelle région Auvergne-Rhône-Alpes…
La zone euro est-elle vraiment encore porteuse de sens ? Peut-elle avoir un rôle contracyclique grâce auquel nous pourrions envisager une assurance chômage européenne ? Faut-il ou non créer un parlement de la zone euro pour en finir avec les ambiguïtés de l'Europe à plusieurs vitesses ou bien continuons-nous avec le bricolage actuel – la zone euro restant tout de même quelque peu plus représentative de l'Europe ? Un grand emprunt commun n'aurait-il pas du sens s'il permettait, en particulier, une mutualisation de l'endettement ?
Pour ce qui est des ressources propres, on ne peut pas à la fois demander l'abandon des droits de douane et ne pas vouloir entendre parler de taxe carbone aux frontières. Car dans ce cas, ce ne seraient plus les contribuables qui paieraient, mais bien ceux qui ne respecteraient pas les règles européennes, notamment en matière de développement durable. Ce détail a son importance au moment de la COP 22 et alors qu'il y a loin des grandes déclarations, la main sur le coeur, aux réalités techniques compliquées tant au plan mondial qu'au plan européen. Ne devons-nous donc pas travailler à nouveau sur ces ressources propres qui seraient alimentées, d'une part, par l'extérieur et, de l'autre, par les contribuables – et lesquels ? Il faut en outre avoir présent à l'esprit que si, à travers la taxe sur les transactions financières, on ne vise que les flux financiers, on court le risque de délocalisations.
Enfin nous voyons tous que la mondialisation telle qu'elle s'est développée jusqu'à présent est remise en cause par un très grand nombre de citoyens un peu partout dans le monde. Cette mondialisation – essentiellement perçue comme une dérégulation, donc nuisible à tous – ayant conduit au Brexit, à l'élection de Donald Trump, le moment n'est-il pas venu de la repenser à partir de l'Union européenne ?
L'Europe est d'autant plus mal perçue, sur le terrain, que les chefs d'État et de gouvernement et même, parfois, les parlementaires nationaux, l'incriminent sitôt que quelque chose dysfonctionne. C'est commode. Il est vrai que, plutôt que de respecter le principe de subsidiarité, l'Union européenne édicte des réglementations dont certaines paraissent quelque peu superfétatoires, mais il faut bien s'occuper… Alors on fait des règles, comme dans les ministères ! De surcroît, lorsque l'Europe édicte une règle, il est rare que le ministère concerné par sa transposition n'en rajoute pas une couche ; et c'est même le cas des régions, désormais chargées de la gestion des fonds européens – le service ad hoc, à Nantes où je me trouvais récemment, compte cinquante personnes ! Ainsi, lorsqu'il s'agit de décliner un programme européen, on l'agrémentera de quelques dispositions réglementaires particulières.
Tout ce monde s'auto-entretient, si je puis m'exprimer ainsi ; on fabrique de la règle alors qu'on a besoin de liberté et alors qu'on attend de l'Europe qu'elle s'occupe des grandes choses, comme le déclare de temps en temps Juncker, et qu'elle cesse de se mêler de l'accessoire ; mais les États veulent garder pour eux les domaines les plus importants même s'ils n'ont plus les moyens de les assumer, et de fait donnent en spectacle leur propre impuissance, ce qui est dramatique pour la démocratie. Dès lors, je le répète, on se rabat, au niveau européen, sur l'accessoire, on ne cesse de voter sur tout, pratique renforcée par le rating : l'usage des indicateurs de performance par ailleurs source d'infantilisation.
On s'interroge par conséquent sur la valeur ajoutée européenne : quelle est celle du budget s'il ne s'agit que de produire des règles ? En outre, le décalage entre les engagements et les paiements est considérable. Certes, ce n'est pour l'heure pas très gênant du fait du faible nombre d'engagements qui permet de payer les factures du précédent cadre financier pluriannuel ; mais je gage qu'en 2018, 2019 et 2020 les factures impayées vont s'amonceler. Ce qu'on appelle le reste à liquider entre les engagements et les paiements représente plus de 200 milliards d'euros, à savoir une fois et demie le budget annuel.
J'en viens à l'Europe de la défense. La France intervient avec l'efficacité qu'on sait et pas grand monde, en Europe, n'est capable d'assumer les opérations militaires qu'elle mène, même si elle a tendance à intervenir avant même d'avoir consulté ses partenaires. Il faudrait donc concevoir un dispositif qui permette d'en parler et de se mettre d'accord avec les partenaires européens avant de s'engager. Le système Athena est très compliqué ; des battle groups sont mobilisés mais n'interviennent jamais ; nous disposons sur étagère de nombreux dispositifs mais qui ne servent à rien… Or l'élection de Trump aux États-Unis devrait provoquer un choc pour tous les Européens que nous sommes. Et, sans écarter l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN), nous pourrions tout de même nous préoccuper de constituer un pilier européen de la défense pourvu d'un minimum d'autonomie, de capacité d'intervention.
Quand vous rencontrez des collègues provenant des pays baltes, ils vous disent vivre dans l'angoisse, vous mettent en garde contre la désinformation russe. J'ai rencontré récemment un haut fonctionnaire européen d'origine lettonne qui hésite à retourner avec sa famille dans son pays ! Or que ferait l'Europe dans l'hypothèse d'une initiative militaire ? Alep est une honte pour l'Europe ; on fait des déclarations, des discours… Au mois de juillet dernier je suis allé à Gaza, en Palestine… L'Europe est le principal donateur dans la région ; mais si une conférence de la paix devait se tenir, nous ne serions même pas autour de la table !
Si je me montre critique vis-à-vis de l'Europe, ce n'est pas pour demander moins d'Europe, au contraire !
On nous berne. L'Europe est mal menée et ce sont les chefs d'État et les gouvernements que je mets ici en cause qui, à l'heure de la mondialisation, font preuve d'une sorte de corporatisme gouvernemental. Cela ne peut pas durer. Et je suis sûr que si je tenais ce discours devant vos électeurs, nous en discuterions et que cela pourrait les intéresser.
Ce sont en effet de vraies questions. Tous ceux qui vous disent qu'ils vont régler les problèmes nationaux tout seuls, sans l'Europe, vous racontent des histoires. C'est vrai en tout cas pour l'immigration, pour le développement de l'Afrique. Chaque pays, en Afrique, continue à travailler avec ses anciennes colonies, mais ce n'est pas ainsi que nous allons y arriver. Nous avons un fonds européen de développement, distinct du budget européen – on peut se demander pourquoi –, mais chacun persiste à faire du bilatéral…
Je suis allé en mission en Turquie, à Gaziantep, en Jordanie, au Liban… À chaque fois, la délégation européenne était flanquée de celles des États membres, et la coordination n'était pas simple. Qu'est-ce qui peut bien justifier une telle pratique ? En matière diplomatique, j'ai vu, au cours de l'examen du budget, qu'on allait acheter un immeuble à Pékin et un autre à Tokyo. Pourquoi ? Pour y installer des représentants du service européen des affaires extérieures, autrement dit pour ajouter une vingt-neuvième ambassade aux vingt-huit ambassades européennes déjà présentes. Qu'est-ce qui peut justifier cela ? Ne pourrait-on créer des consulats généraux communs aux pays de l'Union européenne ? Vos électeurs ont compris tout cela et si vous leur dites autre chose, ils auront l'impression que vous leur racontez des salades. Je préfère donc dialoguer avec eux afin de partager une analyse, établir un diagnostic et débattre avec eux de solutions dignes du XXIe siècle.
Pour ce qui est des ressources propres, monsieur Gollnisch, elles se réduisent à pas grand-chose : ce sont les droits de douane. Or, comme ils proviennent essentiellement des Pays-Bas, ce dernier pays en garde une partie pour ses bons et loyaux services – ils sont hyper-compétitifs le domaine du dédouanement… et évidemment partisans de l'ouverture au monde !
Vous m'avez également interrogé sur les traités de libre-échange. Mes convictions sont libérales mais je ne veux pas d'un dogme de libre-échange. La signature d'un traité de libre-échange doit en effet correspondre à une vision stratégique. Cela a-t-il du sens, par exemple, de prévoir, dans le cadre du CETA négocié avec le Canada, des importations de boeuf, même modestes, alors que le marché européen est saturé de viande de boeuf ? Même sur le plan écologique, le fait que de la viande soit transportée d'un bout à l'autre du monde n'est pas convenable – or le libre-échange est très avantageux d'un point de vue fiscal puisque tout le carburant maritime et aérien est totalement exonéré de taxes, à l'inverse du transport sur notre territoire, lourdement taxé.
Quant au TTIP tel qu'envisagé, comment y serais-je favorable avant que ne soit achevé le marché intérieur ? Commençons par employer notre énergie à cette dernière tâche : un ensemble de 500 millions de consommateurs a tout de même les moyens de négocier la dragée haute. Aussi, avant de discuter de traités de libre-échange, notre préoccupation première devrait être de renforcer la gouvernance de l'Union européenne et, j'y insiste, d'achever la constitution du marché intérieur. Notre secteur du téléphone compte vingt-huit autorités de régulation, vingt-huit autorités de la concurrence. On veut relancer l'investissement mais qui peut bien en avoir envie, sachant que, dans la perspective d'une nécessaire harmonisation, les règles vont devoir changer ? Le Fonds européen pour les investissements stratégiques (European Fund for Strategic Investments – EFSI), promu par M. Juncker, c'est très bien, mais il faudrait commencer par sécuriser l'euro afin de dissiper les doutes des investisseurs internationaux et, je le répète encore une fois, par achever un marché intérieur encore marqué par une très forte fragmentation dans de nombreux domaines.
Quant à l'amende infligée par la justice américaine à BNP-Paribas, elle a été négociée entre les parties : la banque n'a pas eu d'autre choix que de la payer si elle voulait garder sa licence aux États-Unis.
J'ai fait part de mon indignation quand M. Cameron a demandé qu'on cesse de considérer l'euro comme la monnaie de l'Union européenne. Il écartait en effet par-là l'idée que les Européens puissent nourrir l'ambition, comme l'ont les Américains, de se servir de leur monnaie en tant que de besoin pour éventuellement infliger des amendes à des opérateurs économiques qui n'auraient pas respecté un embargo ou d'autres dispositions.
Pour ce qui est du Brexit, monsieur Herbillon, j'espère que les Européens vont trouver une position commune car il est vrai qu'il ne doit pas être très difficile d'opposer un membre de l'UE à un autre – toujours à cause de l'absence de gouvernance. Il faut savoir que nos chefs d'État et de gouvernement, quand ils se rendent pour une journée à Bruxelles, sont accompagnés, dans l'avion ou dans le train, par quatre ou cinq journalistes pour parler d'autre chose que de l'UE ; c'est que l'Europe est gouvernée par les diplomates, par le Comité des représentants permanents (COREPER) ; or ces représentants de chacun des États membres ne sont pas là pour faire des embardées ; tout se passe gentiment et donc ne bouge pas beaucoup.
Il va bien falloir que les parlements nationaux s'emparent politiquement de ces questions.
Un certain nombre de réponses qu'attendent nos concitoyens, si on les veut pérennes, ne peuvent qu'être européennes.
Quels projets sont-ils susceptibles de faire rêver ? Le système Galileo est en service depuis jeudi dernier.
Enfin ! Et il fonctionne, ce qui est plutôt une bonne nouvelle pour l'Europe.
Autre projet : Erasmus. Il faudrait que le bilinguisme soit la règle en Europe. On se sent analphabète, au Parlement européen lorsqu'on ne parle pas anglais. Or si l'on veut être complètement opérationnel sur le plan politique, il vaut mieux être bilingue, faute de quoi on sera immédiatement confronté à des difficultés. Vous imaginez quel sera le fonctionnement d'un parlement où vingt-trois langues doivent être traduites et bientôt vingt-quatre avec le gaélique et qui sait vingt-cinq avec le turc si Chypre est unifiée – on est près d'atteindre une limite.
L'espace, également, est un vrai projet européen, ne serait-ce que pour faciliter les communications par internet.
Bref, vous avez raison, il faut que nous fassions rêver. À défaut, cependant, l'Europe doit protéger et je réponds ici en partie à M. Gollnisch : je ne suis pas favorable au désarmement commercial. Dans le contexte de la mondialisation, mettre en contact des régions aussi contrastées, au plan social et au plan économique, c'est prendre le risque de délocalisations massives. J'ai remis un rapport sur ce thème, au nom du Sénat, il y a vingt-trois ans ; je m'y indignais qu'on ait étendu l'union douanière européenne à la Turquie. De ce jour, toutes nos industries des secteurs de l'électroménager, de la télévision, de la vidéo… sont parties en Turquie. Certes, cela permet d'acheter des téléviseurs moins chers, mais au prix d'une forte augmentation du chômage. Prenez l'acier, par exemple : les Chinois en produisent pour l'équivalent de plusieurs années de consommation mondiale. Le dumping est ici total. Eh bien, les Américains soumettent l'acier chinois à des droits de douane de 250 % quand l'Europe les taxe à hauteur de seulement 20 %, et en s'excusant !
On ne peut continuer ainsi ; je le répète : l'Europe doit protéger aussi bien militairement qu'économiquement. Une telle protection fait partie de l'arsenal des politiques. Il s'agit donc de pratiquer un protectionnisme intelligent.
J'en reviens à Erasmus, auquel je n'ai fait qu'allusion. Je tâche de développer un projet visant à permettre à nos apprentis de passer, en tant que tels, une année dans un autre pays. L'inconvénient est qu'on compte autant de statuts de l'apprentissage que d'États membres de l'Union européenne. Nous avons lancé un projet pilote. La première année fut des plus difficiles, la deuxième en tirera les enseignements et son bilan ne devrait pas être mauvais. La Commission européenne vient du reste de reprendre ce projet dans son programme et va élaborer un projet de statut type de l'apprentissage en Europe. Il ne s'agira pas seulement de former des ouvriers professionnels mais aussi des ingénieurs et d'établir des passerelles entre l'enseignement général et la vie professionnelle.
L'une de vos questions, madame la présidente, portait sur la zone euro. Nous y avons beaucoup travaillé et avons d'ores et déjà réalisé un progrès considérable : nos rapporteurs vont tâcher de rédiger un rapport de moins de trois pages. En effet, les rapports de l'Union européenne comptent en général vingt-cinq pages et, comme il n'y a pas de majorité, c'est un peu l'arbre de Noël : tout le monde entend participer au vote et, à la fin, le rapport ne ressemble plus à rien.
Nous allons donc essayer de rédiger un rapport de deux voire trois pages au maximum, ce qui est une révolution.
J'en viens plus précisément à la zone euro. Le mécanisme européen de stabilité financière pourrait très bien faire office de fonds monétaire européen, à condition que soit mis en place un contrôle parlementaire. En outre, si l'on veut qu'existe un budget de la zone euro, il faut une direction du trésor. Dans le même temps, je note que le service européen d'action extérieure comprend 3 000 collaborateurs alors qu'il n'y a pas de politique extérieure !
La zone euro est en général présidée par le représentant d'un pays dont la notation financière est de première qualité – AAA ; ce fut d'abord un Luxembourgeois, c'est aujourd'hui un Néerlandais. Néanmoins, le secrétariat est assuré par le directeur de cabinet du ministre des finances du pays qui préside le groupe euro. Or, je le répète, je pense qu'il faut une direction du trésor pour, notamment, coordonner les émissions d'emprunts. De surcroît, il faudra créer un parlement de la zone euro. À défaut et en attendant, il sera toujours possible de créer une commission de surveillance, au sein de laquelle siégeraient plusieurs parlementaires européens des pays membres de la zone euro, ainsi que des délégations des commissions des finances ou des budgets, des chambres nationales de la zone euro. Le but n'est seulement de se voir, comme on le fait à Bruxelles actuellement et où, finalement, il ne se passe rien et où, donc, chacun perd un peu son temps, mais de travailler en fonction de critères très stricts. De même, le semestre européen lui non plus ne sert à rien : on remet au Parlement européen un rapport qui ne fait de mal à personne et il ne se passe donc rien.
Or, à un moment donné, il faudra bien mettre les comptes sur la table. Je suis allé en mission en Grèce dans le cadre de l'assistance financière. Nous avons passé deux jours formidables mais nous n'avons pas vu un seul document ! Comment dès lors signifier à nos collègues grecs qu'ils se moquent vraiment de nous sur tel ou tel point ? Une prise de bec terrible a lieu en ce moment car les Grecs veulent verser une prime de Noël. On s'indigne souvent de l'austérité qu'on leur impose, mais s'ils n'appartenaient pas à la zone euro, les Grecs n'auraient jamais pu dépenser autant d'argent : ils n'en auraient pas trouvé sur le marché… Ce paradoxe vaut pour la France : avant la création de l'euro, on craignait d'avoir à dévaluer le franc par rapport au deutsche mark, source de honte pour le chef du gouvernement et pour le chef de l'État. Depuis l'avènement de l'euro, finie la crainte de la dévaluation ! On accuse ainsi l'euro de participer à l'austérité mais, j'y insiste, tous ceux qui s'en plaignent n'auraient jamais pu dépenser autant !
Un budget de la zone euro doit prémunir contre les chocs symétriques et les chocs asymétriques.
Il faut en outre conditionner les aides versées aux États à un code de convergence : on ne pourra pas continuer à faire l'Europe avec des fiscalités aussi différentes, avec des codes du travail aussi différents, avec des codes environnementaux aussi variables d'un pays à l'autre. Donc, je le répète, un parlement de la zone euro est nécessaire ou, à tout le moins, une commission de l'euro ; or, vous vous en souvenez, madame la présidente, quand la crise grecque a éclaté, la création d'une telle commission s'est révélée impossible.
Vous m'avez également interrogé sur la taxe carbone qui ne serait pas acquittée par les consommateurs. Un jour, cette taxe retombera pourtant bel et bien, si je puis dire, sur ces derniers car elle conditionne le prix de l'argent et le prix de l'argent conditionne le coût des investissements. Ce sont toujours les citoyens qui finissent par payer. Aussi avons-nous tort de transiter par l'entreprise parce qu'une telle pratique peut susciter des délocalisations d'activité et d'emplois. Si nous étions tous très vertueux, dans la diversité de nos engagements politiques, nous poserions le principe selon lequel l'impôt est toujours payé par le citoyen. C'est en effet un peu un sophisme que d'affirmer que des impôts sont payés par des entreprises : je n'en connais pas beaucoup qui ne trouvent pas le moyen de les répercuter sur le prix des produits ou des services proposés aux consommateurs.
Pour ce qui est plus précisément de la taxe carbone, elle s'apparentera à des droits de douane intelligents. Vous ne pouvez pas demander à un industriel de votre circonscription de faire des efforts et le laisser concurrencer par un industriel qui aura fabriqué des biens dans un pays où l'on n'applique pas les mêmes contraintes, qui vous envahira avec ses produits et tuera votre industriel. Il y va de la loyauté de la concurrence.
Je finirai par la mondialisation. Elle est là et ne va pas reculer. L'homme a envahi la planète et il faut en tirer les conséquences. Il est inutile de pleurer sur la mondialisation : il faut faire avec et organiser le monde. Et pour l'organiser en faisant partager nos valeurs, il n'y a que l'Europe qui puisse peser de tout son poids. Prenons l'exemple des réunions du Fonds monétaire international (FMI). J'y ai participé en tant que ministre : il y avait un Américain, un Canadien, un Japonais et quatre Européens. Il n'était pas difficile dans ces conditions pour l'Américain d'essayer de mettre les Européens en porte-à-faux les uns par rapport aux autres. Il serait donc bon qu'un jour il y ait un seul représentant de la zone euro aux réunions du FMI, ne croyez-vous pas ? Et je ne parle pas du Conseil de sécurité des Nations unies…
Pour me résumer, je ne doute pas de l'Europe parce qu'elle est la solution à la plupart de nos problèmes.
Vos propos sont stimulants et nous redonnent du courage. Vous nous poussez à réfléchir et nous vous inviterons de nouveau volontiers pour dialoguer avec nous.
II. Examen du rapport d'information de MM. Christophe Caresche et Michel Herbillon sur le lancement du semestre européen 2017
Madame la Présidente, Mes chers collègues. Nous vous présentons aujourd'hui, comme chaque année à cette période, notre rapport sur le lancement du Semestre européen et je vous prie d'excuser mon collègue Christophe Caresche, qui est malade et m'a chargé de rapporter nos travaux en notre nom à tous les deux.
Le 16 novembre dernier, la Commission européenne a lancé le septième exercice du Semestre européen, cycle de coordination des politiques économiques, en publiant son examen annuel de croissance, sa recommandation de politique économique concernant la zone euro, son avis sur les projets de plans budgétaires ainsi que le rapport sur le mécanisme d'alerte et le rapport conjoint sur l'emploi.
Si la plupart des constats s'inscrivent dans la continuité des exercices précédents, nous relevons une nouveauté s'agissant de l'orientation de la politique budgétaire de la zone euro. La Commission européenne suggère en effet une légère expansion budgétaire dans un contexte économique plus solide quoiqu'encore incertain. Cette orientation légèrement positive ne fait, pour l'heure, pas l'objet d'un consensus entre les États membres et doit être débattue dans les prochaines semaines.
Nous y voyons deux enseignements majeurs. Tout d'abord, ce changement de cap semble amorcer une nouvelle ère pour la politique économique de la zone euro en marquant la fin du moment de la consolidation budgétaire nécessaire, après la crise économique et financière, en raison de la situation fortement dégradée des finances publiques européennes. Ensuite, elle nous semble bienvenue dans un contexte où la reprise économique est réelle mais encore fragile et, par ailleurs, caractérisée par une faiblesse persistante de l'investissement, en dépit des premiers résultats positifs et encourageants du Plan d'investissement pour l'Europe (dit « Plan Juncker ») lancé en novembre 2014 par le Président de la Commission européenne.
Ma première observation est la suivante. Dans un premier temps, la Commission européenne confirme l'amélioration de la situation économique européenne et préconise une légère « politique de relance » en zone euro.
Exposant, dans son examen annuel de croissance, les priorités économiques et sociales de l'Union européenne pour l'année à venir, la Commission européenne réaffirme, pour 2017, l'actualité des axes identifiés en 2016 et souligne, conformément au discours sur l'état de l'Union de son Président, le 14 septembre 2016, la nécessité de poursuivre les efforts en faveur de la jeunesse et du tissu productif européens.
La Commission européenne confirme la reprise économique observable en Europe mais souligne également les incertitudes croissantes de l'environnement global. S'agissant de la reprise, les indicateurs relatifs à l'investissement, au taux d'emploi, au taux de chômage, à la situation des finances publiques et à l'évolution du produit intérieur brut (PIB) illustrent la plus grande solidité de l'économie européenne. On ne peut que s'en réjouir. Ainsi, selon les prévisions d'automne 2016 de la Commission européenne, la croissance du PIB réel dans l'Union européenne devrait s'établir à 1,8 % en 2016 (1,7 % en zone euro) et à 1,6 % en 2017 (1,5 % en zone euro). L'amélioration de la situation de l'emploi devrait se poursuivre en 2017 : huit millions de nouveaux emplois ont été créés depuis 2013 et si la tendance observée se poursuit, l'objectif fixé en la matière dans la stratégie Europe 2020 pourrait bel et bien être atteint d'ici 2020 (pour mémoire, l'objectif est de parvenir à un taux d'emploi de 75 % au sein de l'Union européenne). Le taux de chômage devrait, pour sa part, diminuer, passant de 8,6 % en 2016 à 8,3 % en 2017. Enfin, l'évolution globale de l'endettement public est encourageante : le déficit public moyen de la zone euro, supérieur à 6 % en 2009-2010, est désormais inférieur à 2 % (1,8 % en 2016) et devrait, selon la Commission européenne, continuer de diminuer pour atteindre 1,5 % du PIB en 2017. Il s'agit donc là d'une série d'éléments positifs.
Toutefois, les facteurs d'incertitude qui pèsent sur la croissance européenne ne doivent pas être négligés : la crise a eu, sur le potentiel de croissance et le niveau d'investissement, des effets dévastateurs que les initiatives telles que le Plan Juncker et la mise en oeuvre des réformes structurelles ne sont pas encore parvenues à faire disparaître. Par ailleurs, le ralentissement de la croissance dans les principaux pays émergents, les tensions géopolitiques, les évolutions du prix du pétrole et la « normalisation » de la politique monétaire de la Réserve fédérale américaine comme de la Banque centrale européenne sont autant de facteurs qui augmentent l'incertitude économique au niveau global.
À la lumière de tous ces éléments, nous considérons que la reprise économique en Europe doit davantage s'appuyer sur les moteurs internes de la croissance (c'est-à-dire la consommation et l'investissement) que des politiques budgétaires et structurelles bien calibrées peuvent contribuer à stimuler.
Dans un tel contexte, la Commission européenne confirme l'actualité des priorités de politique économique de l'année 2016. Ainsi, le « triangle vertueux » de la Commission Juncker est-il maintenu, à savoir : la stimulation de l'investissement ; la mise en oeuvre des réformes structurelles et la poursuite de politiques budgétaires responsables.
Analysant, dans le cadre de la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques (PDM), la situation des États membres, la Commission européenne conclut cette année qu'un bilan approfondi se justifie pour treize États membres, contre dix-neuf l'année dernière. Cette relative réduction du nombre de pays susceptibles de présenter des déséquilibres macroéconomiques confirme l'amélioration de la situation d'ensemble de l'économie européenne. En ce qui concerne le rapport sur le mécanisme d'alerte, la Commission européenne souligne les éléments suivant. L'ajustement macroéconomique opéré est asymétrique : il s'est poursuivi dans les pays présentant un déficit extérieur ou endettés vis-à-vis de l'extérieur alors que les excédents courants demeurent importants et continuent même de croître dans certains pays, à l'instar de l'Allemagne.
Le désendettement du secteur privé se poursuit à un rythme lent et fortement inégal : dans certains pays, le niveau encore élevé de la dette privée et publique limite les possibilités d'investissement et fragilise l'économie ; en outre, le désendettement le plus rapide n'intervient pas toujours dans les pays où il est le plus nécessaire.
Le secteur bancaire rencontre des difficultés, notamment liées à sa moindre rentabilité financière et à la présence de prêts improductifs dans certains bilans d'établissements bancaires et financiers.
La hausse des prix du logement s'accélère de manière préoccupante dans certains pays. Enfin, l'amélioration observée sur les marchés du travail ne suffit pas à éradiquer la « détresse sociale », en particulier dans les pays les plus durement touchés par la crise financière et des dettes souveraines.
Nouveauté notable, la Commission européenne propose cette année une légère expansion de la politique budgétaire de la zone euro. Dans un contexte de croissance économique « résiliente mais modeste », la Commission européenne insiste sur la nécessité d'une orientation budgétaire positive pour la zone euro. Rappelant que le cadre budgétaire et institutionnel actuel de l'Union européenne ne contient, pour l'heure, aucune règle ou instrument permettant de gérer l'orientation budgétaire de la zone euro, elle souligne que la recommandation sur la politique économique de la zone euro constitue un document de référence de nature à orienter les efforts entrepris au niveau national par les États membres. Outil de « soft law », cette recommandation – qui est une avancée du point de vue de la coordination des politiques économiques – voit son efficacité conditionnée à la bonne volonté des États membres d'en suivre les préconisations.
Nous indiquons, à cet égard, qu'il serait sans doute opportun de réfléchir, notamment dans la perspective des réformes institutionnelles à entreprendre pour approfondir l'Union économique et monétaire, aux modalités susceptibles de conférer à la recommandation de politique économique de la zone euro une dimension plus contraignante. Nous avions évoqué cette question dans le cadre du groupe de travail dont nous faisions tous deux partie et dont MM. Philip Cordery et Arnaud Richard vous ont présenté, il y a quelques semaines, les travaux. Nous pensons qu'il s'agit d'une question à se poser.
Après l'assainissement budgétaire réalisé après la crise, entre 2011 et 2013, l'orientation budgétaire de la zone est globalement neutre sur la période 2014-2017. Restrictive en 2011-2013, neutre en 2014-2015 et légèrement expansionniste en 2016, l'orientation devrait être, en 2017, globalement neutre. Une légère expansion budgétaire permettrait de redynamiser l'économie européenne dont le potentiel de croissance demeure en deçà de son niveau d'avant-crise.
Ma deuxième observation porte sur l'avis de la Commission européenne sur les projets de budget nationaux, qui reflète une orientation globalement neutre de la politique budgétaire.
La Commission européenne souligne que l'ajustement budgétaire se poursuit, comme en témoignent les prévisions concernant l'évolution du déficit agrégé : de l'ordre de 2 % du PIB en 2015, de 1,8 % en 2016, ce dernier devrait en effet s'établir à 1,5 % du PIB en 2017. La Commission européenne indique toutefois que les positions budgétaires des États membres sont soutenues par la faiblesse des coûts d'emprunt et sont, par conséquent, fragiles.
De manière générale, aucun des projets de plan budgétaire analysés par la Commission européenne ne présente de manquement particulièrement grave aux règles du Pacte de stabilité et de croissance. En revanche, dans certains cas, les ajustements budgétaires présentés sont insuffisants ou risquent de l'être.
S'agissant des pays relevant du volet préventif du Pacte, cinq États membres (Allemagne, Estonie, Luxembourg, Pays-Bas et Slovaquie) présentent un plan budgétaire conforme au PSC ; quatre (Autriche, Irlande, Lettonie et Malte) un plan budgétaire globalement conforme au PSC et six (Belgique, Chypre, Lituanie, Italie, Slovénie et Finlande) présentent des risques de non-conformité aux règles du PSC.
S'agissant des pays relevant du volet correctif du Pacte, le plan budgétaire de la France est jugé globalement conforme au PSC, tandis que celui de l'Espagne et du Portugal présente un risque de non-conformité, relativement marginal pour le Portugal qui pourrait relever du volet préventif du Pacte en 2017.
Plus précisément, l'avis sur le projet de plan budgétaire de la France conclut à une globale conformité aux dispositions du Pacte mais la prudence et la vigilance demeurent de mise. Nous rappelons que l'avis rendu par le Haut Conseil pour les Finances publiques sur le projet de loi de finances établi pour l'année 2017 par le Gouvernement souligne le caractère optimiste des hypothèses de croissance sur lesquelles il repose et considère, compte tenu des informations dont il dispose, que le retour du déficit nominal sous le seuil des 3 % du PIB est « incertain ».
Moins inquiète, en dépit de prévisions de croissance plus modestes que celles du Gouvernement français, la Commission européenne considère que le document qui lui a été transmis est globalement conforme aux règles du PSC quoique les efforts décrits soient inférieurs aux recommandations formulées par le Conseil dans le cadre de la procédure pour déficit excessif. De manière générale, la Commission européenne considère que la France n'a réalisé que des progrès limités dans la mise en oeuvre des réformes structurelles suggérées dans le cadre des recommandations spécifiques pays par pays publiées au printemps dernier et que nous avions étudiées dans notre précédent rapport sur la clôture du Semestre européen 2016.
Nous considérons qu'il est indispensable de poursuivre les efforts entrepris en matière d'assainissement budgétaire, à plus forte raison étant donné qu'à politique inchangée, la Commission européenne estime que la situation de la France pourrait devenir préoccupante en 2018. L'ajustement graduel et progressif permet de limiter les effets récessifs des ajustements sur la croissance et doit demeurer une priorité pour les années à venir. Outre les bénéfices évidents associés à un retour à des finances publiques saines ou, a minima, conformes aux règles de la discipline budgétaire, le respect par la France de ses engagements budgétaires est une condition essentielle de sa crédibilité et de son influence en Europe. Dans le contexte qui est celui du Brexit, une France aux finances publiques plus saines lui permettra de voir sa voix porter davantage.
Enfin, ma troisième observation est la suivante. La Commission européenne et le Conseil confirment également l'amélioration de la situation de l'emploi qui ne saurait toutefois dispenser les États membres de poursuivre leurs efforts.
Le rapport conjoint sur l'emploi est un document important qui illustre directement le renforcement de la dimension sociale du Semestre européen auquel nous avons souhaité consacrer quelques développements. De manière générale, l'évolution de la plupart des indicateurs du marché de l'emploi illustre une amélioration de la situation en Europe. Le taux de chômage et le taux de chômage de longue durée, qui constituent deux des trois nouveaux indicateurs du tableau de bord de la Commission européenne dans le cadre de l'analyse des déséquilibres macroéconomiques, enregistrent un recul mais demeurent encore à des niveaux élevés dans certains États membres.
Le phénomène de pauvreté et les inégalités sociales demeurent également importants et nécessitent une véritable relance du processus de convergence des économies. Les inégalités nuisent en effet à la productivité et à la croissance et contribuent à creuser la fracture sociale en Europe.
La Commission européenne relève les efforts entrepris par certains États membres pour réformer et moderniser leurs systèmes de protection sociale et leurs systèmes de santé mais invite les États membres à poursuivre les efforts entrepris.
Nous indiquons, enfin, que la France se situe dans une situation intermédiaire s'agissant du taux de chômage et du taux de chômage des jeunes ; dans une situation « à surveiller » s'agissant du taux de jeunes sans emploi qui ne suivent ni études ni formation et du revenu disponible brut des ménages ; et affiche des performances supérieures à la moyenne en matière de risque de pauvreté et s'agissant des inégalités.
Je vous remercie pour ce travail clair et efficace. J'ai une observation à formuler concernant la pauvreté. Un certain nombre de rapports, publiés la semaine dernière, démontrent qu'il y a, en Allemagne, une grande pauvreté. Plus de seize millions de personnes y vivent sous le seuil de pauvreté alors que la richesse d'une partie infime de la population augmente, comme dans d'autres pays d'ailleurs. On s'aperçoit donc qu'après avoir promu pendant des années un modèle allemand de plein-emploi et de richesse, des fragilités apparaissent. Il me semble donc que l'idée de relancer la convergence des économies est plus que jamais nécessaire et peut permettre de redonner un sens à l'Europe. Je pense également qu'il pourrait être opportun de relancer, au sein du couple franco-allemand, des questionnements sur le Brexit, la dimension sociale de l'Union européenne et les travailleurs détachés notamment.
Dans cette perspective, c'est une très bonne chose que les indicateurs sociaux soient davantage pris en compte dans le Semestre européen.
III. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution
Sur le rapport de la Présidente Danielle Auroi, la Commission a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.
l Communication écrite
La Commission a approuvé les textes suivants :
Ø ENERGIE
- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 201227UE relative à l'efficacité énergétique (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (COM(2016) 761 final – E 11687).
- Proposition de directive du Parlement européen au Conseil modifiant la directive 201031UE sur la performance énergétique des bâtiments (COM(2016) 765 final – E 11707).
l Textes « actés »
Aucune observation n'ayant été formulée, la Commission a pris acte des textes suivants :
Ø CONSOMMATION et PROTECTION des CONSOMMATEURS
- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la définition, la présentation et l'étiquetage des boissons spiritueuses, l'utilisation des noms de boissons spiritueuses dans la présentation et l'étiquetage d'autres denrées alimentaires, ainsi que la protection des indications géographiques relatives aux boissons spiritueuses (COM(2016) 750 final – E 11682).
Ø DROIT CIVIL
- Règlement d'exécution du Conseil remplaçant les annexes A, B et C du règlement (CE) n° 13462000 relatif aux procédures d'insolvabilité (1145116 – E 11439).
Ø ENVIRONNEMENT
- Règlement (UE) de la Commission portant modification de l'annexe VI du règlement (CE) n° 10052009 du Parlement européen et du Conseil relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone (D04794801 – E 11667).
- Règlement Commission modifiant le règlement (CE) n° 33897 du Conseil relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce (D04828402 – E 11710).
- Règlement de la Commission modifiant l'annexe VII du règlement (CE) nº 19072006 du Parlement européen et du Conseil concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), en ce qui concerne la sensibilisation cutanée et abrogeant le règlement (UE) 20161688 de la Commission (D04851001 – E 11711).
Ø RELATIONS EXTERIEURES
- Proposition conjointe de décision du Conseil relative à la conclusion de l'accord-cadre entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et l'Australie, d'autre part (JOIN(2016) 51 final – E 11692).
- Proposition conjointe de décision du Conseil relative à la conclusion de l'accord de partenariat sur les relations et la coopération entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la Nouvelle-Zélande, d'autre part (JOIN(2016) 54 final – E 11693).
l Textes « actés » de manière tacite
En application de la procédure d'approbation tacite, dite procédure 72 heures, adoptée par la Commission les 23 septembre 2008 (textes antidumping), 29 octobre 2008 (virements de crédits), 28 janvier 2009 (certains projets de décisions de nominations et actes relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) concernant la prolongation, sans changement, de missions de gestion de crise, ou de sanctions diverses, et certaines autres nominations), 16 octobre 2012 (certaines décisions de mobilisation du fonds européen d'ajustement à la mondialisation), et 1er décembre 2015 (mesures de dérogations en matière de TVA, de décisions relatives à la réduction facultative de droits d'accise et de décisions relatives aux contributions nationales pour financer les tranches du Fonds européen de développement), celle-ci a approuvé tacitement les documents suivants :
Ø INSTITUTIONS COMMUNAUTAIRES
- Projet de décision du Conseil portant nomination de membres titulaires et de membres suppléants, pour la Bulgarie, la Lituanie, le Luxembourg, l'Autriche et la Slovaquie, du conseil de direction de la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail (1551516 – E 11712).
Accords tacites de la Commission liés au calendrier d'adoption par le Conseil
La Commission a également pris acte de la levée tacite de la réserve parlementaire, du fait du calendrier des travaux du Conseil, pour les textes suivants :
Ø COMMERCE EXTERIEUR
- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (UE) nº 13872013 portant suspension des droits autonomes du tarif douanier commun sur certains produits agricoles et industriels (COM(2016) 783 final – E 11716).
- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (UE) nº 13882013 portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires autonomes de l'Union pour certains produits agricoles et industriels (COM(2016) 784 final – E 11717).
Ø POLITIQUE ETRANGERE ET DE SECURITE COMMUNE (PESC)
- Décision du Conseil concernant le soutien de l'Union aux activités de l'Agence internationale de l'énergie atomique dans le domaine de la sécurité nucléaire et dans le cadre de la mise en oeuvre de la stratégie de l'Union européenne contre la prolifération des armes de destruction massive (1495816 LIMITE – E 11720).
- Décision du Conseil modifiant la décision 2014512PESC concernant des mesures restrictives eu égard aux actions de la Russie déstabilisant la situation en Ukraine (1500016 LIMITE – E 11721).
IV. Nomination de rapporteurs d'information
Sur proposition de la Présidente Danielle Auroi, la Commission a nommé rapporteurs d'information :
- MM. Christophe Caresche et Michel Herbillon, sur le lancement du semestre européen 2017.
La séance est levée à 19 heures