La réunion débute à 16 heures 30.
Présidence de M. Dominique Raimbourg, président.
La commission auditionne Mme Anne Hidalgo, maire de Paris, sur le projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain (n° 4212) (MM. Jean-Yves Le Bouillonnec et Patrick Mennucci, rapporteurs).
Mes chers collègues, je souhaite en votre nom la bienvenue à Mme Hidalgo, ainsi qu'à ses deux adjoints qui l'accompagnent : M. Emmanuel Grégoire, chargé des ressources humaines, des services publics et de la modernisation de l'administration, et M. Mao Peninou, chargé des questions relatives à la propreté, à l'assainissement, à l'organisation et au fonctionnement du Conseil de Paris.
Avec cette audition, la commission des Lois commence à se pencher sur le projet de loi relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain, dont Jean-Yves Le Bouillonnec et Patrick Mennucci sont les rapporteurs.
C'est un texte important. Il a subi plusieurs modifications au Sénat : les dispositions relatives au regroupement des quatre premiers arrondissements de Paris, ainsi qu'à l'assouplissement des critères d'accès au statut de métropole, ont été supprimées. Il sera discuté dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale à partir du mardi 13 décembre.
C'est pour cette raison que nous avons souhaité, au sein de la commission des Lois, procéder à cette audition, mais aussi à celle de M. Michel Cadot, préfet de police de Paris, et de M. Jean-François Carenco, préfet de la région Île-de-France, que nous entendrons respectivement à dix-huit heures trente et à dix-neuf heure trente.
Ces auditions ont le mérite d'être publiques. Cela permettra de mettre tous les éléments du débat sur la table, et de faire taire les critiques habituelles selon lesquelles on ne dirait pas tout…
Madame la maire de Paris, je vous suis d'autant plus reconnaissant d'avoir bien voulu venir devant notre commission que je connais la lourdeur de votre tâche : vous dirigez une ville-capitale, ce que les sociologues appellent une « ville-monde », en tout cas une ville de deux millions d'habitants, qui emploie près de 50 000 fonctionnaires. Mais je vous laisse nous parler du projet relatif à son statut, en vous renouvelant mes remerciements.
Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, chers collègues et amis parisiens – de la majorité ou de l'opposition – présents dans la salle, j'ai le plaisir de vous retrouver avec des membres de notre équipe : mes adjoints et mon directeur adjoint de cabinet.
D'abord, pourquoi proposer un nouveau statut de Paris ?
Il nous est apparu, notamment en discutant avec le Gouvernement et plus particulièrement avec le Premier ministre, que le statut de Paris n'avait pas été modifié depuis longtemps et qu'il méritait d'être modernisé. Il s'agit de permettre à la ville de Paris, tout en restant la ville-capitale, de s'approcher le plus possible du statut de droit commun des communes françaises.
Nous sommes partis du constat que la complexité des rapports entre la ville et l'État, qui ont été façonnés par l'histoire, risquait d'aboutir à des confrontations liées à leurs compétences respectives. Nous avons avancé dans la réflexion, et défini plusieurs axes possibles de modernisation.
Premièrement, la ville est à la fois commune et département, mais la délimitation de la compétence départementale, assurée par les conseillers de Paris qui ont un double statut, communal et départemental, est aujourd'hui assez artificielle : mêmes élus, même assemblée, mêmes commissions, mêmes sujets. Pourtant, la loi nous contraint à avoir deux budgets différents, le budget du département étant alimenté par une subvention de la commune. Tout cela n'a pas beaucoup de réalité concrète.
Je suis à la fois maire de Paris et présidente du département de Paris, et lors des sessions de l'assemblée parisienne, il faut faire sonner la cloche pour montrer que l'on passe de l'ordre du jour municipal à l'ordre du jour départemental. Au-delà de la simplification de ce cérémonial, on se facilitera la tâche en fusionnant commune et département. Lorsqu'il y aura un seul et même budget, la procédure budgétaire sera beaucoup plus claire et plus en rapport avec la réalité de l'institution – mais, bien entendu, les élus parisiens continueront d'exercer les compétences départementales de cette nouvelle entité, sous ce nouveau statut.
C'est d'autant plus important que toutes les grandes villes du monde sont en train de « métropoliser » un certain nombre de fonctions, qui doivent être envisagées, définies, organisées à une échelle plus large que celle de la ville-centre. La création de la Métropole du Grand Paris s'est ainsi accompagnée de celle de « territoires » regroupant plusieurs communes pour former des ensembles qui aient du sens, tant du point de vue des relations entre les différentes communes regroupées que de celui de l'organisation de la vie des habitants et des services qui leur sont proposés.
Paris, dans cet ensemble métropolitain, clarifie son organisation en unifiant commune et département, en devenant un « territoire » à l'image de ceux qui l'entourent. Le premier axe de ce projet de loi est donc cette fusion.
Le deuxième sujet que nous avons voulu aborder, et sur lequel le Gouvernement a souhaité que nous travaillions ensemble – et nous avons très bien travaillé avec le préfet de région et le préfet de police – est la clarification et la réorganisation d'un certain nombre de compétences.
Certaines compétences sont héritées de l'histoire. À ce propos, je rappelle que Paris n'a pu élire un maire qu'à partir de 1977, à la suite de la loi du 31 décembre 1975. Son premier maire élu a été Jacques Chirac. Auparavant, nous étions sous le coup d'une punition datant de la Commune de Paris : il nous était interdit d'avoir un maire.
Vous avez raison. Mais la Commune a conforté la volonté du pouvoir central de ne pas donner la possibilité au peuple de Paris d'élire un maire, car c'était considéré comme dangereux... De ce fait, nous avons une organisation particulière dans un certain nombre de domaines. Certaines compétences relèvent de l'État alors que, dans beaucoup d'autres villes, elles relèvent de la municipalité.
En matière de compétences, notre objectif a été simple : nous rapprocher le plus possible du droit commun des autres villes, à une exception près - la police municipale.
Nous avons un débat sur ce sujet avec nos collègues de l'opposition parisienne qui, elle, est favorable à la création d'une police municipale. Pour ma part, je ne souhaite pas aller jusque-là car je pense, a fortiori dans le contexte de menace terroriste que nous vivons, que l'organisation de la coopération entre ville et préfecture est aujourd'hui satisfaisante.
Même si l'on se rapproche du droit commun pour certaines polices spéciales, liées par exemple à l'insalubrité, Paris reste la capitale de la France, et abrite de nombreuses institutions, nationales ou internationales. Une grande part, pour ne pas dire l'essentiel, de l'activité de la police nationale est concentrée sur la vigilance que requiert la présence de ces grandes institutions, qu'elles soient politiques, économiques ou médiatiques. Si je n'ai pas voulu aller jusqu'à créer une police municipale, c'est que je pense que ce statut de capitale de la France nous amène à travailler en étroite collaboration avec la police nationale.
Au cours des années 2015 et 2016 qui ont été particulièrement difficiles, cette collaboration avec la préfecture de police – comme avec le Parquet sur les aspects terroristes – a constitué un atout. Nous avons organisé l'Euro 2016, qui fut une grande réussite : chacun était à son poste et chacune des institutions – qui auraient pu avoir tendance à être en compétition – a dialogué avec l'autre sans rencontrer de difficulté.
La coproduction et la coopération sont organisées de façon très claire, à partir de la subvention que la ville verse à la préfecture de police. Cette subvention importante, proche de 300 millions d'euros, finance la part de l'activité de la police nationale qui a une incidence directe dans la vie et la sécurité des Parisiens. En revanche, j'ai souhaité que certaines polices spéciales, qui sont aujourd'hui du côté de l'État, que ce soit à la préfecture de région ou à la préfecture de police, reviennent du côté de la ville – avec, bien sûr, des transferts des personnels.
Il en sera de même des compétences en matière de circulation et de voirie. Nous sommes une ville, je suis décentralisatrice – comme Pierre Lellouche – et j'estime que le maire doit pouvoir assumer et décider sur ces sujets-là.
La question des compétences constitue donc le deuxième axe de ce projet de loi. Reste le troisième, à savoir la question des arrondissements et de l'organisation territoriale de Paris.
Avant même les élections de 2014, le Conseil constitutionnel avait été consulté sur la répartition des conseillers de Paris en fonction de la population des arrondissements, sur l'équilibre et la justesse de la représentation des élus parisiens. Prenez le plus petit arrondissement de Paris, le 1er arrondissement, qui compte 17 000 habitants ; il y a cent cinquante ans, il en comptait 150 000, tandis que le 15e arrondissement, qui était alors naissant et comptait à peine 15 000 habitants, en a aujourd'hui 235 000 !
Le Conseil constitutionnel a été de nouveau consulté lorsque nous avons eu à décider de la représentation du conseil de Paris, donc des Parisiens, au sein de la Métropole du Grand Paris. Il a formulé un certain nombre d'avis, que nous avons bien sûr retenus, notamment sur la question de la représentation des Parisiens en fonction de l'arrondissement dans lequel ils résident.
Nous avons souhaité travailler à un regroupement. Plusieurs hypothèses étaient possibles. Certains pouvaient imaginer un jeu de « chamboule-tout », consistant à découper les arrondissements, supprimer les frontières actuelles et ne pas respecter les limites des quartiers. Nous n'avons pas du tout fait ce choix. Nous avons fait un choix pragmatique, guidé par l'idée de regrouper plusieurs arrondissements – comme on l'a fait à Marseille ou à Lyon – sans que cela ait d'incidence sur les équilibres politiques et démocratiques de la ville.
Plusieurs hypothèses ont été étudiées par le groupe de travail qui a réuni l'ensemble des groupes politiques de l'Hôtel de ville – du moins ceux qui l'ont souhaité.
On pouvait, par exemple, se donner pour but – par exemple en regroupant le 8e arrondissement avec le 9e ou le 10e – d'aboutir à des arrondissements de taille à peu près identique. On pouvait aussi adopter une attitude plus mesurée, en se bornant à prendre en compte une certaine réalité, à savoir l'unité du coeur de Paris, constitué des 1er, 2e, 3e et 4e arrondissements. D'ores et déjà, une partie de la vie démocratique et culturelle s'organise de façon regroupée dans ces arrondissements : autour d'un conservatoire commun ; autour de grands projets, comme celui des Halles, qui concerne ces quatre arrondissements et qui a donné lieu à la consultation de leur population. Il y avait donc une logique et une réalité qui justifiaient que nous travaillions sur cette hypothèse, qui est celle que je défends et que je présente.
Je sais qu'il y a, ici et là, des velléités d'aller plus loin. Mais si l'on s'attaque à d'autres arrondissements, à d'autres regroupements, on risque de toucher aux équilibres politiques de la capitale, et ce n'est pas du tout ce que nous souhaitons. D'ailleurs, le Conseil d'État lui-même, dans un avis très explicite, considère que le regroupement que nous défendons est un « plus » démocratique pour la représentation des Parisiens.
Si la loi est votée, ces quatre arrondissements deviendront autant de secteurs, et les habitants garderont naturellement leur code postal. D'ici à 2020 – date de la prochaine élection municipale – nous travaillerons avec les habitants, pour que la qualité du service de proximité soit au rendez-vous.
Avant de répondre à vos questions, je voudrais aborder un dernier point, auquel Jacques Chirac, Jean Tiberi, Bertrand Delanoë et moi-même avons toujours été très attachés : l'unité et le statut de Paris. Au moment où l'on fait la métropolisation, Paris doit garder l'unité de son statut. Celle-ci ne doit pas être mise en échec par les transferts de compétences envisagés entre mairie centrale et mairie d'arrondissements.
L'unité de Paris tient à un certain nombre d'éléments : la collecte de l'impôt, qui se fait à l'échelle de la commune, c'est-à-dire Paris ; le statut du personnel de la ville de Paris, qui est un statut parisien, et non un statut d'arrondissement.
D'autres éléments, importants à rappeler, n'empêchent pas la déconcentration. D'ailleurs, nous proposons le transfert d'un certain nombre de compétences supplémentaires aux arrondissements. Mais l'unité est pour nous un repère, comme elle le fut pour mes prédécesseurs.
Madame la maire, messieurs les adjoints, nous sommes très heureux de vous recevoir. Cette audition est la marque de la considération que l'Assemblée nationale porte à Paris, et de l'importance de Paris pour notre pays.
Dans le projet de loi initial, le Gouvernement avait prévu de déléguer de nouvelles compétences aux maires d'arrondissement, notamment en matière de gestion des équipements de proximité, ou d'avis pour les installations sur la voie publique – les terrasses en particulier.
Le Sénat, après en avoir débattu, a souhaité aller plus loin, trop loin selon nous, car l'unicité de Paris se trouverait remise en cause si le statut des mairies d'arrondissement se rapprochait de celui des communes du reste du pays – sans le rejoindre tout à fait cependant, au risque de rendre la commune impossible à gérer : ainsi, la question du statut juridique des maires d'arrondissement n'est pas abordée, alors que le statut juridique des communes, qui sont dotées de la personnalité morale, leur permet d'accomplir certains actes.
Dans ce contexte, Madame la maire, les rapporteurs proposeront de rétablir certains des éléments prévus par le texte initial du Gouvernement. Cela étant, nous sommes intéressés par cette discussion sur le rapport entre la ville et ses arrondissements. Nous avons rencontré nos collègues maires d'opposition, dont M. Goasguen, et ceux de votre majorité – Parti socialiste et Europe Écologie Les Verts (EELV). Sans doute y a-t-il quelques clarifications à apporter sur la façon dont la ville entend répartir les rôles entre la mairie centrale et les mairies d'arrondissement, ainsi que sur les processus de concertation en vigueur. Nous avons en effet le sentiment que l'appréciation n'est pas la même en fonction de la personne à laquelle on s'adresse, et nous aimerions que vous nous fassiez connaître la position de la ville.
Bien qu'elle soit de moindre importance, la deuxième question que j'aborderai fait les titres de la presse : il s'agit de la fusion des quatre premiers arrondissements.
Le rapporteur que je suis considère cette fusion comme tout à fait justifiée, notamment au vu des remarques faites par le Conseil constitutionnel. Mais cette disposition a été supprimée par le Sénat, au motif qu'elle ne serait pas nécessaire. Il nous semble au contraire qu'elle renforce le principe de l'égalité devant le suffrage. Je vous confirme d'ores et déjà que les rapporteurs ont l'intention de la réintroduire.
Cela étant, nous souhaitons recueillir votre avis et votre assentiment sur une autre question, qui ne relève pas de la politique, mais de la vie quotidienne : les rapporteurs estiment qu'il conviendrait sans doute de supprimer toute référence aux secteurs 2, 3 et 4, le premier secteur étant constitué des 1er, 2e, 3e et 4e arrondissements, le secteur 5 étant le 5e arrondissement, le secteur 6 le 6e arrondissement, et ainsi de suite, ce qui éviterait aux Parisiens concernés de confondre mairie d'arrondissement et secteur électoral. À Marseille, il arrive régulièrement qu'un habitant du 7e arrondissement, par exemple, se rende à la mairie du 7e secteur, qui comprend les 13e et 14e arrondissements. S'il est trop tard pour résoudre le problème à Marseille, où chacun des huit secteurs regroupe deux arrondissements dont les numéros ne correspondent pas au sien, on peut au moins l'éviter à Paris…
Monsieur le président, je vais prolonger les questions de Patrick Mennucci, en faisant naturellement mienne sa satisfaction d'avoir pu obtenir de vous la tenue de cette audition, certes un peu particulière, mais qui est à la mesure de l'enjeu.
Le premier objectif de ce projet de loi est la création d'une collectivité à statut particulier, dénommée « Ville de Paris », qui se substitue à la commune et au département de Paris. C'est l'aboutissement d'un travail progressif, qui a commencé avec l'unification des instances et la mutualisation des services.
Nous voudrions savoir quelles seront, d'ici au 1er janvier 2019, les étapes auxquelles seront confrontées ces deux collectivités, qu'il s'agisse de la mise en oeuvre concrète de cette fusion ou de la prise en compte du modèle institutionnel que constituaient tant la ville de Paris que le département.
De nouvelles missions seront octroyées à la ville de Paris. Nous connaissons bien, dans cette commission, tout ce qui est sous-jacent au processus de transfert de compétences, grâce aux débats qui ont eu lieu autour de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale (MAPTAM) – et de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe). Nous voudrions donc vous interroger sur l'étude d'impact, qui évalue à 111 millions d'euros le coût des nouvelles missions qui seront attribuées à la ville de Paris à l'occasion de cette nouvelle étape institutionnelle. Comment ce montant a-t-il été évalué ? La méthode diffère en effet des techniques habituelles des commissions d'évaluation des transferts de charges que nous connaissons bien.
Ensuite, cet objectif, qui a été sans nul doute partagé par les services de l'État, et qui est au coeur des questionnements de nombre de vos administrés, vous paraît-il réaliste ?
Nous aimerions également vous entendre évoquer les grandes responsabilités qui sont les vôtres en matière d'accueil des fonctionnaires qui relevaient auparavant de la préfecture de police. Comment appréhendez-vous cet enjeu ? Comment allez-vous prendre en compte les inquiétudes des intéressés, notamment en cas de changement de situation ?
Nous avons reçu hier toutes les organisations syndicales. Allez-vous, en particulier, prendre en considération les préoccupations des agents de surveillance de la ville de Paris, le plus important corps des fonctionnaires de la Préfecture de police qui va rejoindre vos effectifs ? Comment allez-vous intégrer leur activité, dans la mesure où vous allez détenir des compétences totales dans certains domaines ? Je pense notamment au contrôle du stationnement qui, je vous le rappelle, est la conséquence directe de la loi MAPTAM.
Madame la maire, le groupe socialiste est particulièrement satisfait de l'inscription à notre ordre du jour de ce texte, qui va permettre de moderniser le statut de la ville de Paris, de créer une collectivité à statut particulier, de gagner en lisibilité et en efficacité.
Un certain nombre de questions restaient posées, mais vous y avez apporté, pour l'essentiel, des réponses lors votre intervention liminaire. Je souhaiterais cependant évoquer quatre points.
Premièrement, la modernisation du statut de Paris : les débats, y compris au Sénat, ont montré qu'un consensus était possible. Malgré tout, un certain nombre de modifications ont été apportées au texte, parmi lesquelles la suppression de la commission permanente et la création d'une conférence des maires. Je pense qu'il serait utile, pour notre commission, de connaître votre position et celle de la ville de Paris en ce domaine. Quelle est votre préférence en matière d'organisation et de règlement intérieur ?
Deuxièmement : l'équilibre de la répartition des pouvoirs et des compétences entre les mairies d'arrondissement et la mairie centrale. Vous avez abordé le sujet, et les rapporteurs ont déjà annoncé qu'ils déposeraient des amendements visant à rétablir le texte initial.
Pour nous, il est totalement exclu que ce texte soit l'occasion de faire évoluer le statut de Paris vers une fédération de communes dont l'autonomie serait telle que plus rien ne serait possible en matière d'égalité fiscale, de solidarité ou de gestion d'un certain nombre de politiques particulièrement importantes, comme la politique du logement. Mais nous avons compris, en vous écoutant, que la version initiale du texte avait votre préférence sur les articles additionnels introduits par le Sénat après l'article 16.
De la même manière, vous nous avez indiqué avoir une nette préférence pour le scénario de fusion des quatre premiers arrondissements de Paris. Là aussi, les rapporteurs ont exprimé leur volonté de rétablir le texte initial.
Je ferai deux commentaires pour conforter votre propos. D'abord, l'écart de population entre l'arrondissement le moins peuplé et l'arrondissement le plus peuplé est passé d'un facteur 3,9 en 1972 à un facteur 13,9 en 2015. La formule proposée par le Gouvernement, en lien avec celles et ceux qui ont préparé le texte, permet de revenir à un écart de 6,1. Quant à l'écart dereprésentativité entre les conseillers de Paris par rapport à la moyenne parisienne, il varie de +24 % à -19 % ; ce qui est proposé permettra de revenir à un écart compris entre +9 % et -6 % selon les arrondissements.
Troisièmement, on peut s'interroger sur les compétences de la préfecture de police qui seraient déléguées à la ville de Paris. Je fais écho aux questions de Jean-Yves Le Bouillonnec sur la transition, sur le statut des agents et sur l'équilibre qu'il faudra certainement là aussi rétablir.
Enfin, ce texte permettra-t-il d'apporter des réponses techniques à un certain nombre de problématiques, notamment les aménagements urbains, les partenariats à ouvrir ou à aménager avec la SNCF, notamment dans le dixième arrondissement, ou encore avec l'État, dans le cadre de la préparation des Jeux olympiques ?
Monsieur le président, je tiens à dire combien je suis heureux de rencontrer ici la maire de Paris et ses adjoints. Je n'ai pas eu l'occasion de suivre de très près les travaux du Sénat, et il me faudra rafraichir mes connaissances à partir de votre rapport.
Cela étant, je suis élu de Paris depuis longtemps, et je voudrais soumettre quelques propositions à la commission pour essayer d'améliorer ce texte – s'il n'est pas trop tard.
Je voudrais d'abord évoquer, en reprenant vos termes, madame la maire, la question de la métropolisation. À la suite de modifications législatives plus ou moins obscures ces dernières années, il y aura désormais une région, une métropole, et une ville dont le statut va se trouver modifié.
N'y a-t-il pas un échelon de trop ? Autrement dit, ne peut-on faire des économies, alors que l'on est en train de faire des dépenses supplémentaires pour ce nouveau statut et qu'on en fait déjà d'autres pour la métropole ? Ne peut-on poser la question de l'organisation territoriale au niveau de la région ? À votre avis, est-il sensé d'ajouter un échelon intermédiaire entre la ville et la région ? Personnellement, je pense qu'on peut en faire l'économie et que l'on y gagnerait en termes d'impôts, de visibilité et d'efficacité.
Ma deuxième question concerne le scrutin, et elle est liée à la réforme des secteurs.
L'argument avancé est qu'il y a un problème de représentation démocratique, et qu'il faut regrouper pour mieux représenter. Est-ce à dire que, par définition, une petite commune serait mal représentée ? Il y a là une logique qui m'échappe. Quoi qu'il en soit, vous posez la question démocratique, et vous la résolvez par la sectorisation.
De mon côté, je poserai la question démocratique comme on l'a fait au moment des dernières élections présidentielles aux États-Unis. Mme Clinton était majoritaire en voix, mais elle n'a pas été élue pour autant présidente. Si je fais un parallèle avec les élections à Paris, madame Hidalgo, j'observe que vous n'êtes pas majoritaire en voix dans le 15e arrondissement, où vous étiez candidate. Plus généralement, j'observe qu'à Paris la gauche est parfois majoritaire en voix, et parfois minoritaire. Il n'empêche qu'avec le découpage et le mode de scrutin actuel, en raison de la modification sociologique et du nombre des conseillers de Paris qui élisent le maire, on peut s'attendre à une majorité de gauche ad vitam aeternam.
Nous sommes entre responsables politiques et nous disons les choses telles qu'elles sont. Il y a une « réserve d'Indiens » de la bourgeoisie parisienne à l'Ouest et, inversement, une « réserve d'Indiens » favorable à la gauche à l'Est. Je suis le seul député d'opposition de Paris non élu par des « Indiens », car ma circonscription – que Mme Hidalgo veut amputer de l'un de ses arrondissements – est à cheval sur l'Est et sur l'Ouest. J'ai donc quelque raison de m'exprimer sur le sujet.
Quoi qu'il en soit, et en dehors de toute référence personnelle, j'observe qu'il en est ainsi depuis Hausmann : à l'Ouest les « bourgeois », à l'Est le « petit peuple ». Avec la transformation sociologique de la ville et l'émigration forcée des classes moyennes hors de la ville en raison du coût du logement, Paris concentre à la fois les plus aisés, qui ont les moyens de se loger à Paris, et les plus aidés. Voilà pourquoi aujourd'hui, à Paris, les scores sont de 80 % en faveur de la gauche à l'Est et de 80 % en faveur de la droite à l'Ouest.
Seulement, la taille des arrondissements et le nombre des conseillers de Paris fait que, mécaniquement, la droite est vouée à rester minoritaire. Donc, on a une maire de Paris minoritaire dans le 15e arrondissement, mais largement élue par les conseillers de Paris du fait du mode de scrutin.
Madame la maire, puisque vous parlez de rapprocher le Paris du droit commun, allons jusqu'au bout du raisonnement et faisons en sorte que les Parisiens élisent leur maire au suffrage universel !
Il me semble que la question du mode d'élection du maire de Paris mérite d'être posée. Ce n'est pas par le biais de la sectorisation que l'on résoudra ce problème de représentativité démocratique. Pour ma part, je préférerais que l'on passe par le suffrage universel. Je proposerai des amendements en ce sens, et on verra bien s'ils seront ou non retenus.
J'en viens au troisième sujet : la police municipale.
C'est un débat que j'avais lancé dès 2001, au moment des attentats aux États-Unis, avec votre prédécesseur, M. Delanoë, qui n'avait pas eu que des mots aimables à mon endroit lorsque j'avais souligné qu'il était impensable qu'en cas d'attentat le maire de Paris puisse dire que la sécurité des Parisiens relève du seul préfet de police. J'ai été membre de la commission d'enquête sur les attentats de 2015. Il y aurait beaucoup à dire, notamment sur les relations entre le service de recherche, assistance, intervention, dissuasion (RAID) et la brigade de recherche et d'intervention (BRI). Pour moi, il est indispensable que le premier garant de la sécurité des Parisiens soit le maire : c'est lui qui détient la légitimité pour cela, au plus près des habitants. Il n'est pas envisageable de faire une demi-réforme comme celle que vous proposez.
Je terminerai par la sectorisation. Je ne comprends pas très bien votre réforme, madame la maire. Une réorganisation administrative, pourquoi pas ? Mais elle ne doit pas toucher aux arrondissements. Il faut conserver leur identité : les Parisiens sont tous attachés émotionnellement à leur arrondissement, si petit soit-il. Vous savez aussi bien que moi que chacun des arrondissements est un regroupement de quartiers à la personnalité propre. Nous appartenons à ces arrondissements comme ils nous appartiennent.
La réorganisation ne doit pas s'apparenter non plus à un « bidouillage » politique, compte tenu du mode d'élection du maire de Paris. Regardez la carte et vous verrez que ce que je dis est exact : la capitale est coupée en deux, avec un Est dominé par la gauche et un Ouest dominé par la droite. Ce n'est pas sain pour l'avenir.
Merci, madame la maire, d'être venue, accompagnée de vos adjoints.
Ma première question concerne les transferts de compétences de la préfecture de police vers la municipalité. Cette évolution sera un grand progrès pour les Parisiennes et les Parisiens, qui ne comprenaient pas très bien à qui s'adresser, entre les agents de la police nationale et les agents de la ville. La ville de Paris a d'ores et déjà anticipé ce mouvement en créant la brigade de lutte contre les incivilités. Pourriez-vous nous en dire plus ?
Ma deuxième question porte sur la déconcentration des pouvoirs de la mairie centrale vers les mairies d'arrondissement. Paris a, en la matière, « un temps d'avance », pour reprendre la formule de Bertrand Delanoë. Vous avez manifesté la volonté, que les élus du groupe socialiste partagent, de garantir l'égalité des Parisiennes et des Parisiens en matière de services municipaux : quel que soit l'arrondissement où ils vivent, ils doivent pouvoir être accompagnés de la même manière par les conseillers de Paris et le personnel des mairies d'arrondissements. Toutefois, ces pratiques sont avant tout une interprétation du texte de la loi PML. Verriez-vous une objection à leur donner pour tout ou partie une traduction législative ? Les graver dans le marbre de la loi éviterait tout retour en arrière.
Dernière question : le groupe socialiste avait défendu lors d'une précédente législature une proposition de loi intitulée « Pour une urbanité réussie, de jour comme de nuit », qui visait à donner aux maires et aux municipalités des pouvoirs nouveaux en cas d'occupation illégale du domaine public, en particulier dans l'hypothèse où la disposition des terrasses ou des étalages contrevient aux règlements en vigueur. Elle prévoyait une gradation des sanctions, dépendant du caractère répété des faits et de la commercialité du linéaire – un dépassement d'un mètre n'a pas la même valeur sur les Champs-Élysées, en zone touristique internationale (ZTI), ou dans des quartiers moins fréquentés. Pensez-vous que le projet de loi pourrait intégrer de telles dispositions ou préférez-vous vous en tenir aux dispositions très ambitieuses qu'il contient déjà ?
Beaucoup de questions ont porté sur les évolutions apportées par le Sénat.
Je commencerai par les relations entre les mairies d'arrondissement et la mairie de Paris. Au moment où nous métropolisons en essayant de regrouper des fonctions et des compétences qui doivent s'exercer sur un périmètre plus large, au moment où les territoires réfléchissent à une nouvelle répartition des compétences en s'inspirant de la loi du 31 décembre 1982 relative à l'organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon et des établissements publics de coopération intercommunale, dite « loi PML », il ne me paraît pas judicieux d'émietter l'unité de la commune : ce serait affaiblir le statut de Paris et risquer l'échec puisque des fonctions essentielles comme la fiscalité et le personnel relèvent de la commune.
Dans le nouveau territoire parisien, les relations entre les mairies d'arrondissement et la mairie centrale doivent rester fondées sur l'unité de la commune de Paris – rappelons que les maires d'arrondissement ne sont pas des maires de plein exercice, puisque les arrondissements ne sont pas des communes. Dans le même temps, les mairies d'arrondissement, grâce à des pouvoirs déconcentrés, doivent pouvoir assurer une gestion de proximité, rôle très important auquel je tiens beaucoup.
Le Sénat a formulé des propositions qui me paraissent source de complexité. Pour les décisions relatives aux terrasses, il a ainsi prévu que la mairie centrale fournisse une explication si elle ne suit pas l'avis du maire d'arrondissement. Cela supposerait pour les services de la mairie centrale de justifier par écrit des milliers de décisions prises chaque jour.
Le logement et l'urbanisme relèvent aujourd'hui de la mairie centrale. Le jour où chaque arrondissement pourra décider de sa politique en matière de logement, il n'y aura plus de possibilité d'installer des logements sociaux dans un arrondissement comme le 16e, sauf bien sûr si le maire le décide, monsieur Goasguen…
Et le déséquilibre entre Est et Ouest, que Pierre Lellouche estime si problématique, ne serait que renforcé. Cette compétence du logement doit à l'évidence être exercée à l'échelle de la commune, comme c'est le cas dans toutes les villes de France.
Bien sûr, cela n'exclut pas des mécanismes renforçant le lien entre mairies d'arrondissement et mairie centrale. Il existe d'ores et déjà une conférence de programmation des équipements, qui réunit le maire de Paris et l'ensemble des maires d'arrondissement. Mon prédécesseur a décidé – et j'ai poursuivi dans cette voie – que certaines compétences départementales seraient prises en compte par les mairies d'arrondissement : s'agissant des collèges, compétence départementale et non municipale, les délibérations sont ainsi passées du conseil départemental au conseil d'arrondissement.
Oui, car la loi ne le permet pas, mais la question ne se posera plus avec la fusion entre commune et département.
N'alourdissons pas la loi inutilement. La loi qui précise les pouvoirs des mairies d'arrondissement offre déjà de réelles possibilités aux maires d'arrondissement, même si, bien sûr, elles dépendent aussi de la volonté de la mairie centrale d'actionner ou non ces leviers.
Pierre Lellouche considère que le véritable enjeu démocratique est le changement de mode de scrutin pour les élections parisiennes. Nous n'avons pas choisi d'entrer par cette porte, préférant nous attacher à l'organisation institutionnelle.
Vous dites, monsieur Lellouche, que le maire de Paris devrait, comme dans toutes les communes de France, être élu au suffrage universel. C'est une erreur puisque, dans toutes les communes de France, c'est le conseil municipal qui élit le maire, et non les citoyens directement. À Paris, c'est le Conseil de Paris, conseil municipal de la commune, qui élit le maire. Nous sommes donc dans le droit commun sur ce point.
La différence avec les autres communes de France, c'est l'existence d'arrondissements. Des listes sont présentées dans chaque arrondissement ; sur ces listes, des conseillers sont élus qui élisent ensuite le maire.
La base de l'élection est donc l'arrondissement et c'est à ce niveau que s'exerce la prime majoritaire. Si demain, le maire de Paris était élu à partir d'une liste couvrant l'ensemble des arrondissements, la prime majoritaire s'appliquerait à l'échelle de la commune.
Il faudrait une loi d'exception.
Et si j'avais été élue sur une liste parisienne, j'aurais obtenu une majorité beaucoup plus confortable. Majoritaire en voix et en sièges, j'aurais été avantagée plus encore par la prime majoritaire.
N'étant pas particulièrement masochiste, je pourrais être calculatrice et appeler à la mise en place d'un tel mode de scrutin. Néanmoins, je considère qu'il ne s'agit pas d'un bon dispositif car il prive les maires d'arrondissement du rôle politique qui est le leur. Aujourd'hui, les candidats à la mairie d'arrondissement conduisent leur liste à l'échelle de l'arrondissement comme le candidat à la mairie de Paris conduit la totalité des listes d'arrondissement – mon identification comme candidate à la mairie de Paris sur ma liste, « Paris qui ose », était très claire ; pour d'autres listes, la visibilité du chef de file était moindre.
À l'échelle des arrondissements, les maires sont connus de leurs administrés, qui votent d'abord pour eux. Retirer ce pouvoir aux électeurs, ce serait revenir au système qui prévalait au début du mandat de Jacques Chirac, quand les maires d'arrondissement étaient considérés comme des « collaborateurs » du maire de Paris – pour employer un terme d'actualité. Avec ce système, j'aurais pu, par exemple, choisir qui serait le maire du 16e arrondissement. Et je ne suis pas absolument sûre, cher Claude Goasguen, que je vous aurais désigné ; j'aurais peut-être plutôt porté mon choix sur Thomas Lauret, voyez-vous…
Il me semble beaucoup plus intéressant, d'un point de vue démocratique, de préserver l'équilibre du pouvoir actuel entre le local et le central. Mais si certains veulent se faire « hara-kiri », libre à eux !
J'en viens à des questions plus concrètes.
D'abord, pour dire que je trouve judicieuse la proposition de Patrick Mennucci de passer du secteur 1 directement au secteur 5, afin de faire correspondre le numéro de secteur au numéro d'arrondissement. Ce système serait plus lisible.
Beaucoup de questions ont porté sur la compensation de 111 millions d'euros versée à la ville de Paris pour ses nouvelles missions. Il faut bien voir que cette somme, qui repose sur une juste estimation, ne constitue pas de l'argent en plus puisqu'elle sera déduite de la subvention que la ville verse à la préfecture de police.
S'agissant des nouvelles compétences des personnels, notamment en matière de circulation et de stationnement, d'une certaine façon, nous avions anticipé le mouvement.
La police nationale se consacre aux tâches qui relèvent de la sécurité nationale. Lors des attentats, l'unité de commandement de tous les services de police et une coopération poussée entre la maire de Paris et le procureur de Paris, présents ensemble pendant toutes les opérations, ont permis d'éviter des problèmes analogues à ceux qui se sont posés entre la BRI et le RAID.
La façon dont la maire de Paris et le préfet de police ont travaillé pour préparer l'Euro 2016 et les festivités du 14 juillet a été extrêmement efficace : chacun était à sa place sans pour autant qu'il y ait d'un côté le responsable de la police municipale et de l'autre le responsable des services en charge de la lutte contre le terrorisme. Il faut une coopération entre le ministère de l'Intérieur et la mairie de Paris. De ce point de vue, la présence du préfet de police au conseil de Paris constitue un élément important, que je ne remets pas en cause. Je ne vois pas pourquoi, par exemple, le maire de Paris aurait la responsabilité et le droit d'autoriser ou non des manifestations d'ampleur nationale. Ce n'est pas à lui d'en décider.
La répartition des compétences a été bien définie et nous souhaitons la prolonger en mettant en place un dispositif de proximité. Nous avons créé une brigade de lutte contre les incivilités qui permet de soulager la police nationale, souvent appelée à intervenir pour régler des problèmes de voisinage, de propreté sur la voie publique ou de stationnement, alors qu'elle a vocation à remplir d'autres fonctions.
En concertation avec les organisations syndicales, nous avons souhaité profiter des transferts de compétences pour placer sous l'autorité de la mairie de Paris les agents de surveillance de la ville de Paris (ASP), que nous payons et qui sont aujourd'hui principalement affectés par la préfecture de police à la verbalisation du stationnement. Il faut savoir qu'à Paris, en dehors des personnes munies d'une carte de stationnement résidentiel, neuf automobilistes sur dix ne paient pas le stationnement. Recherchant l'efficacité à un moment où les budgets des collectivités doivent contribuer au redressement national, nous avons considéré que ces dépenses de personnel n'étaient pas bien affectées. La mairie de Paris va donc récupérer ces agents. Sur la base du volontariat, avec des formations adéquates, certains pourront travailler à d'autres postes. Emmanuel Grégoire ici présent s'occupe d'organiser des passerelles, qui constituent une ouverture pour beaucoup d'ASP qui ne se voyaient pas se consacrer ad vitam æternam au contrôle du stationnement. Nous avons déjà eu beaucoup de réponses positives. Et j'ai pu constater l'enthousiasme des agents affectés à la nouvelle brigade de lutte contre les incivilités qui fonctionne sept jours sur sept et quasiment vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Tous m'ont dit comme ils étaient heureux d'effectuer ces missions de proximité. Aux 1 900 agents municipaux déjà en place, viendront s'ajouter 2 000 autres agents : au 1er janvier 2018, ce dont donc près de 4 000 agents en uniforme qui pourront répondre aux problèmes de voisinage, de stationnement, de propreté et à rassurer Parisiens et touristes.
Ces changements supposent, bien sûr, une négociation avec les organisations syndicales. Le préfet de Paris et moi-même les avons rencontrées. Je comprends que certaines inquiétudes s'expriment. Elles portent principalement sur le statut de la ville de Paris. Je tiens à souligner que ce transfert constitue pour la plupart des agents une véritable opportunité professionnelle. Nous discutons avec la préfecture du cas de ceux, minoritaires, qui ne souhaitent pas être transférés.
D'autres questions ont porté sur certaines modifications à apporter par amendements : y aurait-il place pour des dispositions concernant la SNCF, les Jeux olympiques, le Grand Paris ? Oui, si elles ne sont pas totalement en dehors du champ du projet de loi.
Je terminerai, monsieur Lellouche, par vos remarques sur les échelons : faut-il en supprimer un ?
Plusieurs villes-mondes émergent à travers la planète et s'organisent en métropole. Les acteurs économiques présents dans ces villes savent que l'échelon métropolitain est indispensable. La loi relative à la Métropole du Grand Paris comporte sans doute des lacunes, mais elle a le mérite d'exister et d'apporter une solution à un problème qui se pose à toutes les grandes agglomérations mondiales. Paris est la seule métropole à dimension mondiale que nous ayons en France. Ne pas la doter d'une gouvernance propre serait affaiblir son attractivité alors qu'elle est dans une compétition acharnée avec d'autres métropoles mondiales. C'est ainsi qu'après le Brexit, la région Île-de-France, la Métropole du Grand Paris, le Gouvernement et moi-même avons pris des mesures pour attirer les investissements.
Je considère que la région n'est pas le bon échelon. Pour qu'elle soit en mesure de représenter la métropole, il faudrait changer le mode de scrutin afin qu'elle soit l'émanation des maires et non de listes composées de personnes qui n'ont pas forcément réussi à l'échelle municipale – pardon de dire cette vérité, connue de tous les partis.
Ce qui pose problème, ce sont les dimensions de la région Île-de-France, qui sont trop petites. Pour que la région constitue un atout pour la Métropole du Grand Paris, il faudrait que son périmètre soit étendu jusqu'aux côtes, car nous sommes la seule métropole de dimension mondiale à n'avoir pas d'accès à la mer. Cela permettrait de surcroît un travail de mise en cohérence des métropoles les unes avec les autres.
Je vous poserai trois questions, madame la maire.
À la première, vous avez déjà répondu pour partie mais je me permets d'y revenir car je ne suis pas convaincu par votre argumentation. Je ne comprends pas pourquoi vous n'étendez pas le regroupement des arrondissements au-delà des 1er, 2e, 3e et 4e, car cela permettrait d'estomper les fortes disparités démographiques qui subsistent dans Paris.
Le regroupement, outre qu'il permettrait des économies, renforcerait l'efficacité des services. Ce processus de mutualisation est d'ailleurs déjà en marche dans plusieurs arrondissements, par exemple entre le 5e et le 6e arrondissements.
Pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? Vous dites qu'il ne faut pas mettre à mal les équilibres politiques au sein du conseil de Paris. Or, ceux-ci ne dépendent pas du périmètre des arrondissements, mais d'un ratio entre nombre d'élus et nombre d'habitants. Le regroupement d'arrondissements permettrait au contraire une meilleure représentation des conseillers de Paris – c'est d'ailleurs le sens de la décision du Conseil constitutionnel. Nous pourrions réfléchir à un découpage où chaque arrondissement comprendrait une population entre 100 000 et 200 000 habitants. Cette réforme ne serait pas herculéenne.
Avec ma deuxième question, je ne vais sans doute pas me faire beaucoup d'amis... (Sourires.) Vous suggérez de créer une commission permanente au sein du Conseil de Paris, ce qui est une façon de reconnaître les lourdeurs du fonctionnement de cette instance qui comporte un nombre élevé d'élus – 163 –, susceptibles d'aborder toute sorte de sujets. Cela aurait tout de même un inconvénient : un coût financier élevé. Il est en effet prévu que les membres de la commission permanente touchent une indemnité supérieure de 10 % à l'indemnité de conseiller de Paris, laquelle est déjà la plus avantageuse de France pour un mandat local. Si je ne tiens pas à ce qu'elle soit revue à la baisse, j'estime qu'il n'est pas raisonnable de l'augmenter.
Si vous visez une meilleure efficacité, pourquoi n'avoir pas songé à diminuer le nombre de conseillers de Paris ? Le ratio entre le nombre d'habitants et le nombre de conseillers de Paris est extrêmement faible : il y a un conseiller de Paris pour 13 000 habitants, soit un ratio équivalent à celui des conseillers départementaux des zones rurales de montagne alors que Paris est le territoire le plus densément peuplé de France. Dans les conseils départementaux des zones urbaines, le ratio est au minimum d'un conseiller départemental pour 20 000 et il atteint même un pour 30 000 dans le Nord. Réduire le nombre de conseillers de Paris à une centaine présenterait un double avantage : de meilleures conditions de travail pour les conseillers, des économies substantielles pour la collectivité.
Ma troisième question concerne les pouvoirs de circulation. J'approuve totalement l'orientation qui vise à faire appliquer le droit commun, donc à transférer au maire de Paris des pouvoirs en la matière. Nous avions d'ailleurs déjà amorcé cette évolution tout à fait souhaitable lorsque Daniel Vaillant était ministre de l'intérieur. Mais, s'agissant des grands axes de circulation parisiens ayant un impact immédiat sur les communes de banlieue et d'Île-de-France – tels que les voies sur berges, entre autres –, la décision doit-elle appartenir au seul maire de Paris ? Ne faut-il pas y associer l'exécutif d'autres collectivités ? On pourrait ainsi demander au président de la Métropole du Grand Paris de rendre non pas un avis conforme – ce qui créerait un risque d'immobilisme, voire de paralysie – mais un avis simple sur les décisions prises par le maire de Paris concernant ces grands axes. Si je vous pose cette question, c'est qu'elle a été soulevée à la suite de la décision que vous avez prise concernant les voies sur berges. J'approuve personnellement votre décision sur le fond mais cette revendication me paraît légitime.
Il ne s'agit pas, en réalité, de se prononcer pour ou contre votre projet ou celui qu'a adopté le Sénat mais de réfléchir – ensemble, si possible – à l'élaboration d'un nouveau statut de Paris et du Grand Paris. Bien que je ne souscrive ni au projet parcellaire que vous présentez en fin de législature ni à celui du Sénat, ils montrent tous deux qu'en toute hypothèse, le statut actuel est insuffisant.
La loi NOTRe a fait évoluer le statut des grandes métropoles de Lyon et Marseille, ce qui rend caduque le traitement dans un seul et même texte de loi du statut de Paris, Lyon et Marseille. Ces trois villes ont désormais chacune leur propre organisation. Cela me paraît logique : le fait que Gaston Defferre – le seul ministre décentralisateur, d'ailleurs, auquel je rends hommage – ait réuni dans le même texte les trois villes avait des connotations politiques, propres à cette époque, qu'on ne saurait oublier. On omet en effet trop souvent de dire qu'avant la loi PML actuelle, qui a été mise au rancart, il y avait un autre projet de loi beaucoup plus intéressant, allant beaucoup plus loin, qu'avait proposé Gaston Defferre et que j'avais soutenue contre Jacques Chirac à l'époque – car je n'étais pas dans la même formation politique que lui. Ce texte mérite d'être réexaminé car il organisait, à Paris notamment, une vraie décentralisation – contrairement à la deuxième loi PML.
Ceci m'amène à répondre à ce qu'a dit tout à l'heure M. Mennucci concernant les statuts. Bien sûr, il ne s'agit pas de rétablir l'unité fiscale à Paris. Je le regrette d'ailleurs car j'en serais le grand bénéficiaire …
… mais entre la loi sur les collectivités locales et le statut de l'arrondissement, actuellement inexistant, il y a ce que l'on appelle en droit public la personnalité morale – que reconnaissait le premier projet de loi de Gaston Defferre. L'arrondissement avait été reconnu comme entité juridique n'ayant pas, bien entendu, la totalité du pouvoir de la collectivité locale – notamment sur le plan fiscal – mais, n'ayant pas non plus le statut que nous connaissons, celui dans lequel l'arrondissement est res nullius. Si vous saviez, madame la maire, ce que c'est qu'être maire d'arrondissement aujourd'hui, compte tenu de la gestion de votre municipalité et de votre administration – très compétente, d'ailleurs –, vous vous apercevriez que je suis très souvent pris à partie concernant vos propres décisions car les gens considèrent souvent que le maire d'arrondissement et le maire de Paris, c'est la même chose ! Heureusement, j'ai un organe assez fort pour me distinguer, dans la presse et ailleurs, sinon nous serions considérés quasiment comme des adjoints – comme sous Jacques Chirac, qui leur en avait d'ailleurs donné le titre... J'ai quelquefois beaucoup de mal à expliquer que ce n'est pas moi qui suis responsable de la propreté dans mon arrondissement. Quand on lit avec attention ce qui se passe au sein du conseil de Paris, on s'aperçoit que la politique qui est actuellement mise en place n'est pas du tout la même que celle de Bertrand Delanoë. Celui-ci, dans les dernières années de son mandat, était réellement favorable à une décentralisation. Au contraire, nous sommes aujourd'hui aux prises avec une véritable recentralisation car, en réalité, les pouvoirs des conseillers d'arrondissement n'existent pas, par manque de moyens financiers et du fait du statut des personnels.
Parlons justement de ce statut. Vous n'hésitez pas à le modifier quand il s'agit du personnel communal ou du personnel départemental - vous allez d'ailleurs bien vous amuser quand vous découvrirez les différences de primes entre ces personnels... Cela prouve donc qu'en réalité on peut modifier un statut. Je comprends que vous ne veuillez pas le faire dans la mesure où les syndicats sont contre. Mais cela fait que nous assistons à une politique de centralisation.
Non seulement ce projet est centralisateur mais, en outre, il ne tient pas compte de la nécessaire ouverture de la capitale sur le Grand Paris. Je rappelle que le Paris actuel a été construit par Napoléon III et que le périphérique correspond parfaitement à la circonférence établie sous le Second Empire. Or, de l'eau a coulé sous les ponts depuis lors ! Paris est désormais une ville qui étouffe dans son périphérique. Cela ne veut pas dire qu'il faille supprimer Paris, mais que le problème du Grand Paris devient majeur. Ce Grand Paris ne se trouve pas dans la métropole. Vous nous dites que vous voulez, par la fusion entre le département et la commune, constituer un territoire, mais les autres territoires de la métropole ont 200 000, 250 000, 300 000, 730 000 habitants pour le plus peuplé d'entre eux – soit l'équivalent de trois arrondissements parisiens. Votre projet va donc entraîner la constitution d'un seul territoire de deux millions d'habitants face à douze territoires de 200 000 à 700 000 habitants. Je rappelle que le Grand Paris ne réunit que 3,5 millions d'habitants, quand le Grand Londres en comporte 10 millions. Il faudra donc, un jour ou l'autre, examiner la question du Grand Paris. À titre personnel, je ne suis pas hostile à une réforme de l'élection du conseil régional, car le Grand Paris va s'imposer au-delà de la métropole actuelle. L'élaboration de la loi NOTRe a été perturbée par des résultats électoraux imprévus, si bien que la Métropole est un peu bancale. Si la création de cette dernière est une bonne chose, Paris reste, à l'intérieur de son périphérique, centralisé voire hypercentralisé.
J'ai le sentiment que la loi que vous nous proposez, madame la maire, est provisoire et sera remise en chantier rapidement. La nécessité de concevoir un statut de Paris qui soit moderne et qui lutte à la fois contre la centralisation et contre l'étouffement de la capitale est tellement forte que si une nouvelle majorité parlementaire est élue, l'une de ses priorités sera probablement d'établir un nouveau projet, différenciant Paris de Lyon et de Marseille et conférant à la capitale une modernité qu'elle n'a plus. J'espère que le débat, que vous nous imposez aujourd'hui assez précipitamment et en fin de législature, aura lieu cette fois en début de législature et que nous pourrons y participer dans un meilleur esprit. Ma déclaration n'est pas contre vous, Anne Hidalgo – vous savez à quel point je vous estime : elle est favorable à la modernité de Paris et à son ouverture sur le Grand Paris, et vise à lutter contre la centralisation. Mais je serai peut-être plus virulent en séance publique… (Sourires.)
Nous n'avons pas souvent l'occasion, à l'Assemblée nationale, de traiter du statut particulier de la ville-capitale. Souffrez, les uns et les autres, qu'au-delà de ce débat parisien bien légitime quelques représentants des autres régions s'intéressent eux aussi à la réalité de ce qu'est la capitale, ville-monde qui entraîne aujourd'hui l'ensemble du pays et a vocation à accompagner des mutations fortes dans tous nos territoires.
Le siècle qui se prépare sera certainement celui des communes et de leur regroupement. Le législateur reviendra peut-être sur certaines évolutions, y compris sur le texte dont nous discutons aujourd'hui. Pour autant, nous avons besoin de cette loi. Il conviendrait de tirer des enseignements de l'expérience des communautés d'agglomération, des communautés urbaines et des métropoles existantes, en redécoupant les villes-centres – qui ont un poids hégémonique au sein de leur intercommunalité – en quartiers, en regroupements de quartiers ou en arrondissements, c'est-à-dire en des entités de taille comparable à celle des autres communes. L'avenir des territoires en dépend.
Nous devrons certainement rediscuter de l'ensemble de ces questions lors de l'examen des amendements et je lirai avec attention les préconisations de nos rapporteurs, qui ont particulièrement approfondi le sujet, comme nous l'avons vu tout à l'heure à l'occasion des questions qu'ils ont posées.
Le choix d'un statut très spécifique, tel que prévu dans le projet de loi avant son passage au Sénat et tel que souhaitent le rétablir les rapporteurs, est certainement l'un des plus pertinents qui soient, dans la mesure où Paris a aujourd'hui une échelle qui n'est plus comparable à celle des autres métropoles nationales ou européennes, telles que Lyon par exemple, mais bien plutôt aux autres villes-mondes. J'ai eu le plaisir, madame la maire, d'assister lundi et mardi derniers au rassemblement que vous avez organisé à l'Hôtel de ville avec nombre de vos homologues venus d'un peu partout dans le monde. La plupart du temps, les projets de smart cities, c'est-à-dire de villes intelligentes, sont plutôt techniques, visant à en améliorer l'efficience, dans les domaines de l'énergie et des transports. Ils sont tous plus passionnants les uns que les autres mais correspondent assez peu à des projets de vie. Or, ce qui est ressorti de ces deux journées, c'est à quel point il importe que les habitants des territoires participent à la vie de ces villes-mondes. C'est, je crois, en ce sens qu'il faut entendre notre réflexion sur le nouveau statut de la ville de Paris. Ce dernier a-t-il été conçu conformément à votre projet de ville intelligente ou, en tout cas, de ville des intelligences ? Si ce n'est pas le cas, quels outils législatifs et réglementaires pourraient accompagner des expérimentations qui profiteraient non seulement au reste du territoire, mais aussi aux entreprises les plus en pointe ? Ces dernières ont en effet besoin d'être accompagnées avant de pouvoir rayonner sur le reste du monde.
Je ferai quatre remarques, qui sont autant de questions.
Première remarque,nous avons certes besoin d'un nouveau statut de Paris, mais pas de la réforme que vous nous proposez là. C'est une réforme de convenance pour vous-même, madame la maire, et sans doute de complaisance de la part du pouvoir, qui ne peut ignorer que ce projet de loi ne résout aucun des problèmes réels qui se posent. Nous avons besoin d'une refonte globale, rendue plus urgente encore par la naissance d'une métropole mal ajustée – couche administrative supplémentaire dont l'articulation avec les autres institutions est incertaine, voire problématique sur certains points, et mal comprise, c'est peu de le dire, par la population. Cette refonte globale va bien au-delà de la fusion entre commune et département – qui est d'ailleurs discutable. Si l'on veut imaginer une fusion entre le département et une métropole-région, comment fera-t-on une fois que le département de Paris aura fusionné avec la commune ? La fusion rend impossibles d'autres réformes plus ambitieuses, qu'il ne faudrait pas écarter si vite, sans en avoir débattu.
Deuxième remarque, il n'y a pas assez – il n'y a presque rien en fait – dans ce texte sur les transferts de compétence entre l'État et la ville. Je ne m'étendrai pas sur le sujet. Nous avons parlé de la police municipale. Nous en reparlerons dans d'autres enceintes. Mais cette réforme du statut apparaît déjà comme une occasion manquée.
Troisième remarque, cette réforme ne prévoit rien quant aux transferts de compétence entre la mairie centrale et les arrondissements. Or, nous assistons à une recentralisation rampante. On donne de toutes petites miettes aux arrondissements, tandis que les politiques mises en place leur retirent le peu de pouvoirs qu'ils avaient. Je n'en citerai que deux exemples. La réforme de la restauration scolaire entraîne la suppression du rôle des caisses des écoles et la centralisation de la passation des commandes – alors même que ces caisses étaient un outil de proximité. La restauration scolaire ne figure certes pas dans le texte, mais cet exemple illustre à quel point ce projet de loi met en scène un transfert irréel de compétences quand, dans le même temps, est menée une politique de recentralisation – que les Parisiens dénoncent d'ailleurs. Autre exemple, le budget participatif est en fait un moyen de contourner le budget des arrondissements, en faisant semblant de le confier aux Parisiens, et en s'arrangeant pour faire financer pour partie par les arrondissements des politiques municipales.
Dernière remarque, on parle peu depuis le début de cette réunion du regroupement des quatre premiers arrondissements. Je voudrais quand même qu'il soit dit, entendu et noté que ce regroupement n'est pas sans arrière-pensées politiques. Il est faux de dire comme vous le faites, madame la maire, que ce regroupement se fera à équilibre politique constant. Lors de la dernière élection, il a manqué cinquante-cinq voix, dans les conditions que l'on sait, pour que le 4e arrondissement bascule de gauche à droite. Dans la nouvelle configuration, il manquera de l'ordre de 3 000 voix pour que les quatre premiers arrondissements le fassent. Comme le disait Pierre Lellouche, on s'interdit ainsi pour toujours une alternance à Paris. On verrouille définitivement les choses. Quand vous dites que vous n'avez pas d'arrière-pensées politiques, vous manipulez les chiffres, comme lorsque vous additionnez vos voix avec celles de Danielle Simonnet – nous en avons l'habitude, nous, mais les autres collègues peut-être un peu moins…
Je ne suis pas de l'avis de l'oratrice précédente. Cette réforme me paraît au contraire bienvenue pour pouvoir aménager et améliorer un statut de Paris dont, à l'usage, on a vu les dysfonctionnements. Je ne crois pas non plus qu'il sera – comme on nous le dit – évident de remettre en cause cette réforme rapidement, puisqu'en 1983, quand les mairies d'arrondissement ont été créées, on nous a dit pis que pendre de la réforme, et que cette réforme est finalement rentrée dans les moeurs et a été acceptée par la population et par les élus.
La réforme qui nous est aujourd'hui proposée me semble répondre à plusieurs difficultés majeures. Ainsi, l'idée qu'une commission permanente fonctionne entre les sessions du conseil de Paris me semble intéressante. Enfin, je ne pense pas qu'il y ait actuellement trop de conseillers de Paris dans les arrondissements de gauche – ceux de l'Est parisien –, qui doivent répondre aux besoins d'une population très diversifiée et faisant face à de gros problèmes, alors qu'il y a dans les autres arrondissements une population à la fois moins nombreuse et plus favorisée. La réforme proposée me semble ainsi rétablir un équilibre en faveur des quartiers de l'Est.
En cette fin de quinquennat, ce projet de loi tardif est l'occasion pour l'opposition de constater l'immense bazar territorial qui a été l'oeuvre de ce gouvernement, en particulier en Île-de-France. Commune, territoire, département, métropole, région : on ne compte pas moins de cinq niveaux d'action territoriale sur un même territoire, et je ne suis vraiment pas certain que ce soit optimal. J'observe d'ailleurs que le même bazar a également été créé dans les autres régions. À l'heure où nous devrions rationaliser la dépense publique, l'accumulation des niveaux de décision et la multiplication des contractualisations – souvent peu rigoureuses sur le plan juridique –, des partenariats croisés, des schémas et des planifications ont fait perdre leur latin à nombre d'élus et d'acteurs du secteur privé, ébahis par la complexité territoriale qui s'est aggravée ces dernières années.
Je ferai une seconde remarque concernant le droit électoral. Je ne reviendrai pas sur ce qui a été dit par des orateurs sans doute plus qualifiés pour mesurer l'incidence, à Paris, de la réforme que vous proposez, mais je voudrais verser au débat, en toute liberté, une proposition s'agissant du mode de scrutin qui permet de désigner non seulement, in fine, le maire de Paris ainsi que les conseils d'arrondissement. Il existe une option novatrice qui permettrait à la fois de renforcer la légitimité du maire de Paris et de préserver l'existence et la légitimité des arrondissements. Elle consisterait à proposer aux électeurs parisiens de s'exprimer sur un bulletin à double entrée, leur permettant de choisir, d'une part, le maire et les conseillers d'arrondissement, et, d'autre part, le maire de Paris. Je ne verrais pour ma part que des avantages – je le dis en tant que député, mais aussi comme chef de l'opposition dans une ville chef-lieu d'un département rural, l'Yonne – à ce qu'un système similaire soit instauré aussi, du reste, dans l'ensemble des autres communes, afin que le maire de Paris comme celui des autres communes soit bien désigné directement par le suffrage universel. Nous pouvons, je pense, être raisonnablement novateurs sur ce sujet comme sur bien d'autres.
Ce projet de loi est certes tardif mais il est aussi le produit de plusieurs évolutions. On ne peut lui reprocher d'être insuffisamment ambitieux et, en même temps, de retoucher un statut qui mérite d'être modifié. J'ai connu le statut établi par Valéry Giscard d'Estaing en 1975 qui s'est appliqué en 1977 : c'était affreux. Heureusement qu'on a adopté la loi « PML » sans aller, cher Claude Goasguen, jusqu'aux vingt mairies de plein exercice, qui ont duré vingt-quatre heures – parce que c'était, pour le coup, trop ambitieux et trop brutal. Voilà pourquoi la réforme par petites touches ne me dérange pas, au contraire. Je rappelle que, depuis l'adoption de la loi « PML », il y a eu plusieurs réformes de ce type, qui visaient à tenir compte de l'évolution de la réalité. Nous avons par exemple réglé certaines questions en 2001.
Le présent projet de loi va dans ce sens : pas de brutalité, pas de manipulation et, globalement, une amélioration même si des questions peuvent légitimement se poser. En 1977, il pouvait arriver, que dans un arrondissement, une majorité issue du suffrage universel soit représentée par un tiers d'élus, face à deux tiers de représentants désignés soit par le maire de Paris soit par la majorité du Conseil de Paris. Les commissions d'arrondissement ne servaient alors strictement à rien. Je crois donc que nous avons fait évoluer les choses de manière positive, dans le sens de la proximité, et que les maires d'arrondissement ont commencé à acquérir une certaine légitimité, même si les deux « grands chelems » réalisés par Jacques Chirac en 1983 et 1989 n'ont pas permis d'aller plus loin. Il aura fallu attendre 1995 pour que Paris s'éveille. Jusque-là, les choses étaient plus figées. Les maires d'arrondissement étaient même des adjoints sans attributions particulières – pas même les attributions de logements, si vous voyez à quoi je fais allusion... Une loi qui viendrait maintenant bousculer les choses ne serait donc pas souhaitable.
De la même manière, puisque cela a été évoqué par Pierre Lellouche, l'idée d'élire le maire de Paris au suffrage universel direct, en dérogeant au droit commun, serait une grave erreur. La personnalisation de la vie politique n'est pas une avancée – je le dis pour tout le monde. Lorsqu'un maire est élu à la tête d'une liste – ou pas, d'ailleurs, puisqu'il est arrivé qu'une tête de liste ne devienne pas maire –, on peut parler de démocratie collective. L'avantage du mode de scrutin de Paris, Lyon et Marseille est qu'il s'est accompagné d'une nouvelle loi électorale comportant une part de proportionnelle, conciliant ainsi la majorité et la diversité. Ce mode de scrutin, que Gaston Defferre a fait adopter pour les élections de 1983, n'est remis en cause par personne. Je disais d'ailleurs à Jacques Chirac, au moment de son deuxième grand chelem : « L'opposition serait dans votre majorité s'il n'y avait pas ce mode de scrutin qui permet à votre vraie opposition d'être représentée. » Cela est vrai, cher Claude Goasguen. Il ne faut donc pas vouloir tout chambouler.
Ce projet de loi présente l'avantage de simplifier le droit en vigueur. Il n'y a que nous qui sachions qu'il y a un département à Paris – et un peu les contribuables s'ils regardent leur avis d'imposition. C'est une entité qui n'a pas de légitimité politique établie. La fusion entre commune et département est donc une simplification utile, même si personne ne s'en apercevra vraiment.
S'agissant des autres évolutions envisagées, il me semble positif de renforcer la proximité, notamment en matière de sécurité, d'autant qu'il existe déjà une brigade contre les incivilités. Il est positif également que la ville reprenne, fonctionnellement, les ASP créés par Bertrand Delanoë en 2001. Je me demande néanmoins qui dirigera ces agents. Le système actuel évite au moins que les maires d'arrondissement soient saisis des contraventions discutées, contentieuses. Je ne crois pas que le préfet de police fasse « sauter » les contraventions, et c'est très bien ainsi. Il conviendra de veiller à ce que les élus de proximité ne soient pas confrontés à cette question. Je me réjouis que la ville prenne des dispositions pour faire rentrer l'argent des contrevenants mais je ne voudrais pas que prospèrent, en fonction des équipes municipales, des pratiques non conformes à l'intérêt général.
Par ailleurs, il faut refuser toute police municipale à Paris. J'ai une certaine expérience en la matière : je pense que ce qui nous est proposé est équilibré et juste, et qu'il ne serait pas raisonnable de créer une police municipale susceptible d'agir en contradiction avec la police nationale dans une ville qui est, entre autres choses, le siège du Gouvernement et du Parlement.
Il ne faudrait pas non plus que la démocratie de proximité, donc la légitimité des élus d'arrondissement, soit remise en cause. Je suis très attaché à l'équilibre qui a été trouvé, avec un maire de Paris qui dispose d'une majorité au Conseil de Paris et qui tire sa légitimité de cette élection au second degré ainsi que de la totalisation des votes au niveau des arrondissements. Les Parisiens sont maintenant attachés à cette formule. Ils s'identifient aux équipes qu'ils ont élues.
Enfin, j'en viens à la fusion des quatre arrondissements. Certains ont demandé pourquoi on n'en fusionnait pas davantage : on peut toujours faire mieux, et on pourra toujours revenir sur cette question mais la fusion envisagée présente l'avantage de ne pas chambouler l'équilibre politique. Nous aurions d'ailleurs échoué si nous avions voulu, à travers cette opération, trahir le suffrage universel. Atteindre une échelle tenable sur le plan administratif et qui permette quelques économies me semble correspondre à une juste évolution qui n'est guère contestable. Mais il me semble qu'aller plus loin nous ferait courir le risque de cette contestation. La fusion me semble raisonnable et moderne, et j'accepte le principe qu'elle ne soit qu'une étape.
Je demanderai à Mao Peninou de répondre à ce qui concerne la propreté mais aussi le fonctionnement du Conseil de Paris, Christophe Caresche ayant notamment posé des questions relatives à la commission permanente et au nombre de conseillers de Paris. Puis je demanderai à Emmanuel Grégoire de répondre aux questions portant sur le personnel et sur les relations entre mairie centrale et mairies d'arrondissement. Enfin, j'apporterai des précisions aux autres orateurs.
La commission permanente existe déjà pour le département de Paris. Nous avons toutefois fixé à zéro le montant de l'indemnité versée à ses membres, ce qui évite les problèmes que vous soulevez, monsieur Caresche. Je ne sais pas ce que fera le prochain Conseil de Paris si cette loi est adoptée en l'état, mais c'est lui qui aura la responsabilité de décider du sort de cette indemnité, ainsi que de déterminer les contours, le nombre de participants et le champ de compétences de la commission permanente – qui aujourd'hui, ne se réunit jamais. Dans le cadre de la fusion de la ville et du département en une entité unique, il nous a semblé raisonnable de maintenir cette possibilité pour l'avenir et de laisser les prochaines équipes municipales décider de l'utiliser comme elles le souhaitent, comme cela se pratique aujourd'hui, sans poser aucun problème, dans la totalité des assemblées départementales et régionales. Pour ma part, je crois que, si l'équipe actuelle est reconduite en 2020 comme nous le promet l'opposition depuis le début de cette réunion, l'indemnité restera fixée à zéro.
Je sais que l'on réfléchit beaucoup à la diminution du nombre de conseillers de Paris, mais aussi à celle du nombre de députés. Je ne me prononcerai pas sur ce dernier point, mais, au conseil de Paris, une telle diminution créerait un problème de représentation de l'opposition. Le scrutin par arrondissement, dès lors qu'on le maintient – ce à quoi je suis favorable pour les raisons qui ont été exprimées par plusieurs d'entre vous et par la maire de Paris tout à l'heure –, ne permet pas la représentation au conseil de Paris de membres de l'opposition dans les 1er, 2e et 4e arrondissements. Et, dans un arrondissement comme le 19e, la diminution du nombre d'élus au conseil de Paris ramènerait celui des représentants de l'opposition de deux à un, ce qui poserait à ladite opposition des problèmes de fonctionnement au quotidien. Le nombre actuel de conseillers me semble donc adéquat, car il permet la représentation, dans chaque arrondissement, de la majorité et de l'opposition.
Les administrations parisiennes ont, en vertu d'un décret de 1994, un régime dérogatoire au droit commun de la fonction publique, qui leur permet d'avoir des statuts particuliers fixés par l'assemblée délibérante. C'est un sujet auquel les organisations syndicales sont très sensibles – à raison, puisque nous considérons que c'est un facteur important d'efficacité du service public parisien.
J'en profite pour lever deux objections. Les ASP, qui sont effectivement le corps le plus concerné par les transferts de personnel, ne posent aucun problème d'un point de vue strictement statutaire, notamment parce qu'il ne s'agit que de la transposition du statut d'un corps qui, partout ailleurs en France, relève de la fonction publique communale.
De la même façon, la fusion entre le département et la commune ne pose pas non plus de difficulté. Cela fait bien longtemps que, pour des raisons d'efficacité et de simplicité, les corps ont été mis en commun. Il n'y a qu'une seule spécificité, valable pour l'ensemble des conseils départementaux, et qui tient au fait que certains personnels relèvent du titre IV, c'est-à-dire de la fonction publique hospitalière ; ils continueront à en relever.
Vous évoquiez aussi des difficultés relatives au bloc indemnitaire : cela fait longtemps que le ménage a été fait en la matière. Le législateur le sait probablement, puisque vous avez examiné, il y a quelques mois, des réformes importantes en matière de régime indemnitaire dans la fonction publique.
J'en viens à la relation entre la mairie centrale et les mairies d'arrondissement. Le projet de loi vise un juste équilibre entre un effort de déconcentration au service de l'efficacité des politiques publiques et le souhait d'assurer la coordination des politiques publiques territoriales menées à l'échelle de la ville de Paris : il ne serait pas concevable que des orientations différentes en la matière soient prises au niveau de l'arrondissement.
Enfin, vous semblez dire que l'équilibre politique serait bousculé par le projet de rapprochement des quatre arrondissements en un secteur. C'est contraire aux faits, puisqu'une stricte transposition des résultats de 2014 sur ce nouveau secteur aurait pour seule conséquence d'augmenter le nombre de conseillers de Paris de l'opposition. Telle est la réalité arithmétique consécutive à ce rapprochement, et tout ce qui tendrait à laisser entendre le contraire serait une erreur factuelle.
L'avis du Conseil d'État montre, lui aussi, que cela n'entraînera pas de déséquilibre et que, bien au contraire, l'opposition sera représentée là où elle ne l'est pas aujourd'hui – notamment dans les très petits arrondissements. Du fait d'une modification de la loi antérieurement à l'élection de 2014, l'opposition dans les 2e et 4e arrondissements n'est plus représentée au Conseil de Paris. L'effet direct d'un regroupement serait de donner à l'opposition la possibilité d'avoir des élus supplémentaires. C'est un fait établi si l'on part des résultats de la dernière élection.
Je voudrais revenir sur une remarque de Christophe Caresche concernant les avis conformes en matière d'axes de circulation. Des dispositions ont été prises récemment sur le sujet, notamment concernant la voirie parisienne. Elles sont tout à fait satisfaisantes puisqu'elles prévoient l'obligation pour la mairie de Paris de recueillir l'avis conforme de l'autorité de l'État pour certaines voies. C'est par exemple sur avis conforme du préfet que nous avons pu prendre l'arrêté interdisant la circulation sur la voie Georges-Pompidou. Votre proposition aurait pour conséquence de rendre obligatoire l'avis conforme du maire de Paris sur des voies régionales et municipales d'autres communes, ce qui, de mon point de vue, ne simplifierait pas l'action publique.
Je souhaiterais également rectifier certains chiffres cités par Claude Goasguen : le Grand Paris compte 7 millions d'habitants et non pas 3 millions, et le Grand Londres en compte 8 millions. Il y a longtemps, par ailleurs, que Paris n'est plus enfermée dans son périphérique : Bertrand Delanoë avait engagé ce travail alors que j'étais sa première adjointe chargée, notamment, de l'urbanisme et de l'architecture. Je me suis attachée, à ses côtés, à favoriser la relation entre Paris et les villes de l'agglomération, et plusieurs élus de ces villes sont ici présents, qui peuvent témoigner de l'effort accompli depuis quinze ans dans cette direction. Je pourrais citer Cachan, avec Jean-Yves Le Bouillonnec, mais aussi André Santini à Issy-les-Moulineaux ou Bernard Gauducheau à Vanves, qui sont les premiers maires avec lesquels nous avons réfléchi à ces ouvertures.
Ce travail précurseur, mené il y a quinze ans, a abouti à la création d'une conférence métropolitaine. Bien sûr, certains ont pu être insatisfaits parce qu'ils voyaient autrement la Métropole du Grand Paris. Mais la création de cette instance n'en est pas moins importante.
Aujourd'hui, la ville n'est pas enserrée dans son périphérique, puisqu'elle travaille sur des projets d'aménagement communs au-delà de celui-ci. Je citerai notamment le projet que nous menons avec le Val-de-Marne : d'un côté le secteur d'aménagement de Bercy-Charenton, que connaît bien Sandrine Mazetier, de l'autre une ZAC du Val-de-Marne.
Cela fait donc déjà plusieurs années que nous avons franchi le périphérique et que nous coopérons de façon assez intéressante. D'ailleurs, l'exemple du Grand Paris et de la Métropole du Grand Paris intéresse beaucoup certaines métropoles étrangères qui cherchent elles-mêmes un modèle institutionnel pour associer les maires à leur travail et construire une relation avec la ville-centre.
J'en reviens aux propositions et aux commentaires de M. Belot.
Il est vrai que la question de la relation entre la ville-centre et les villes au sein d'une agglomération se pose. Elle devrait d'ailleurs se poser aussi d'un point de vue budgétaire et fiscal. Par exemple, les charges de centralité ne sont pas prises en considération. À Paris, celles-ci atteignent 700 millions d'euros annuels, alors même – et c'est très bien ainsi – que les mécanismes de péréquation ont un effet redistributif puissant. De fait, chaque année, plus de 500 millions d'euros du budget de la ville sont versés à la péréquation nationale,– pour 60 % – et régionale – pour 40 % – ces pourcentages étant en cours de révision dans l'actuelle loi de finances. Dans cette relation entre ville-centre et villes de la métropole, il est très important de prévoir des dispositions de péréquation, de fiscalité et de prise en compte des charges de centralité.
Vous l'avez très bien dit, la métropole de Paris représente 30 % du PIB national. On voit bien qu'il y a un intérêt, qui n'est pas simplement parisien, pas simplement métropolitain, pas simplement régional, mais bien national, à l'attractivité de cette métropole. Celle-ci joue un rôle de locomotive, et c'est une source de redistribution vers les autres territoires. Il faut mener cette réflexion jusqu'au bout. Ce n'est pas l'objet de cette loi, mais il faudra en tenir compte, soit en loi de finances, soit dans les lois relatives au dispositif institutionnel territorial.
Vous avez évoqué le statut spécifique de Paris. Nous souhaitons aller le plus possible vers le droit commun, pour que Paris n'ait pas un statut d'exception, sauf en matière de sécurité – et ce n'est pas ce qui s'est passé à Nice qui me fera changer d'avis, bien au contraire.
À Paris, il y a une police nationale et des services qui, dans la proximité, assurent la tranquillité publique. Je ne me prononce pas pour les autres villes, mais je considère que, pour Paris, c'est le bon dispositif, car lorsque l'on crée deux institutions, chacune essaie tout naturellement de prendre le pas sur l'autre, ce qui est à éviter absolument dans le contexte que nous connaissons aujourd'hui. Compte tenu, qui plus est, des restrictions budgétaires, ce serait prendre un risque énorme pour la sécurité des Parisiens, des touristes, de toutes celles et tous ceux qui fréquentent la métropole, que de s'engager de façon aventureuse dans la création d'une police municipale. Je reste donc fermement opposée à cette proposition.
Vous avez parlé, monsieur Belot, des smart cities. Il faut sans doute réfléchir à des dispositifs d'expérimentation plus importants, donner à des villes comme Paris – qui sait produire de l'énergie à partir des énergies renouvelables – la capacité d'exploiter et de distribuer l'énergie, et créer des fonds pour investir, notamment, dans la transition écologique et énergétique.
Ce dernier point me tient beaucoup à coeur. Pour moi, c'est un défi majeur. Aujourd'hui, sur la planète, 70 % de l'investissement en faveur de la transition écologique et énergétique provient de financements publics. Je suis très attachée à ce que les pouvoirs publics puissent continuer d'investir puissamment, notamment pour fixer les orientations et donner des impulsions. Mais cela ne suffira pas : il faut que les milliards qui sont aujourd'hui disponibles viennent s'investir dans la transition écologique et énergétique. Je pense qu'une ville comme Paris a besoin d'un fonds, type fonds souverain, pour accueillir en toute transparence ces financements et développer l'investissement.
Je m'arrêterai là, car je ne veux pas me prêter à un débat politicien. On peut toujours dire qu'il faudrait faire ceci et cela, mais pas de cette façon, etc. Je ne sais pas répondre à ce genre de remarques et ne souhaite pas me lancer dans un tel débat.
Ce qui m'anime, c'est le souci d'efficacité, la volonté de répondre aux besoins des habitants, de ne pas faire l'impasse, au moment où l'on métropolise, sur la proximité nécessaire. Pour moi, la proximité est dans les arrondissements, sans qu'il soit besoin de toucher aux pouvoirs de la ville en matière d'urbanisme, en matière fiscale, en matière de permis de construire, en matière de personnel – autant d'éléments structurants de cette ville, de son identité et de son équilibre.
Ce qui m'anime, c'est la volonté de répondre mieux, même avec moins de moyens, aux attentes de nos concitoyens, qui ne nous disent pas qu'il faut moins de services publics. Dans les quartiers populaires, on sait très bien que la présence publique, par le biais de services publics de qualité, est indispensable. Mais pour s'en sortir, dans le contexte de tension extrême que nous connaissons, notamment sur le plan budgétaire, il faut se réorganiser. C'est ce que nous avons fait de façon très volontariste à Paris, en regroupant des directions, en modifiant nos processus de production de services, de façon être plus efficaces sans porter atteinte à la qualité du service rendu.
C'est dans cet état d'esprit que s'inscrit ce projet, dont je remercie Daniel Vaillant d'avoir dit qu'il était aussi un projet raisonnable. Pourquoi aurions-nous proposé de tout chambouler ? Paris, ça marche ! En termes d'attractivité, nous sommes dans le « top 4 » des grandes villes du monde. Ce n'est pas pour rien que cette ville continue à intéresser !
Nous nous sommes engagés tous ensemble pour les Jeux olympiques, et je vous en remercie. Quand je vois les réactions que Paris provoque chez nos interlocuteurs, je me dis que « ça marche » et qu'il ne faut pas tout changer. Cette ville s'appuie sur des fondamentaux solides – dont l'administration parisienne, que je veux saluer ici. Contentons-nous de simplifier, de clarifier, de moderniser, et de répondre à l'attente de nos concitoyens.
Les Parisiens sont fiers de leur ville, de leur arrondissement, et plus encore de leur quartier. Ils attendent de nous que nous ne prenions pas de retard. Bertrand Delanoë voulait avoir « un temps d'avance », et je reprends volontiers cette formule qu'a citée Sandrine Mazetier. Prenons donc un temps d'avance, ne nous laissons pas doubler, car la compétition est féroce.
Pour autant, n'oublions pas qui nous sommes. Cette ville aime sa diversité et s'en satisfait. Il existe, c'est vrai, un Est et un Ouest de Paris, mais l'un et l'autre se rencontrent. Ainsi, de nombreux enfants de l'Ouest habitent aujourd'hui au centre ou dans les quartiers comme le 10e ou le 11e arrondissement. C'est le signe que Paris fait société !
Ce projet de loi nous permettra d'être plus efficaces et de partager une même vision, partagée mais non partisane – le sujet n'est pas là. Nous sommes en fin de législature, mais à peine au milieu du mandat de l'équipe municipale parisienne. Voter maintenant ce texte permettra aux Parisiens de s'adapter, de travailler, et d'en apprécier la concrétisation d'ici les élections municipales de 2020.
Merci, monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, pour cette audition particulièrement importante, et passionnante pour la maire de Paris que je suis.
Merci, madame la maire. Après votre plaidoyer éloquent, je n'ai plus qu'à souhaiter « bonne chance à Paris ! »
La réunion s'achève à 18 heures 50.
Membres présents ou excusés
Présents. - M. Luc Belot, Mme Françoise Descamps-Crosnier, M. Olivier Dussopt, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, M. Guillaume Larrivé, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Anne-Yvonne Le Dain, Mme Sandrine Mazetier, M. Patrick Mennucci, Mme Elisabeth Pochon, M. Dominique Raimbourg, M. Daniel Vaillant
Excusés. - M. Ibrahim Aboubacar, M. Jean-Paul Bacquet, Mme Huguette Bello, M. Dominique Bussereau, M. Sergio Coronado, M. Marc Dolez, Mme Laurence Dumont, M. Joaquim Pueyo, Mme Maina Sage, M. Roger-Gérard Schwartzenberg
Assistaient également à la réunion. - M. Christophe Caresche, M. Claude Goasguen, Mme Anne-Christine Lang, M. Pierre Lellouche, Mme George Pau-Langevin