La réunion commence à onze heures cinq.
Mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir excuser le président Bartolone, qui ne peut être présent ce matin.
L'article 146-3 du Règlement dispose que les rapporteurs du Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques présentent au Comité un rapport de suivi de la mise en oeuvre de leurs conclusions à l'issue d'un délai de six mois suivant la publication de leur rapport initial.
C'est sur le fondement de cet article que nous allons aujourd'hui examiner le rapport de suivi de l'évaluation des politiques publiques en faveur de la mobilité sociale des jeunes, qui nous avait été présenté au mois de décembre 2013.
Nos deux rapporteurs sont Régis Juanico, pour la majorité, et Jean-Frédéric Poisson, pour l'opposition.
Nous avons remis, au mois de décembre 2013, le rapport intitulé « Construire des parcours de progression sociale pour et avec les jeunes ». Ce rapport initial recommandait trois pistes d'action : une gouvernance plus efficace qui associe mieux les jeunes à la conduite des politiques publiques ; une réforme de l'orientation qui laisse plus de place aux choix individuels et une adaptation de l'offre de formation qui rende plus visibles les filières professionnelles et fasse de la lutte contre le décrochage scolaire la priorité des priorités des politiques publiques ; un renforcement des aides à l'emploi et à l'autonomie des jeunes, ce qui passe notamment par une simplification des aides à l'insertion et la création d'un droit de tirage via le compte personnel de formation (CPF) et par un réaménagement des aides au logement, des bourses d'études et du permis de conduire.
Un peu plus d'un an après, nombre de nos préconisations ont été engagées, notamment à travers le plan « Priorité jeunesse », ou reprises dans un certain nombre d'annonces du ministère de l'éducation nationale – je pense notamment à l'orientation et au décrochage scolaire –, dans des lois comme celle sur la formation professionnelle ou en matière d'aide à l'insertion des jeunes. Je pense à la garantie jeunes et plus récemment aux mesures de simplification du permis de conduire qui figurent dans le projet de loi présenté par M. Macron.
Ces réformes vont dans le bon sens même si certaines restent à traduire concrètement dans la vie des jeunes. C'est ce sur quoi nous vous proposons de faire le point ensemble.
Nous avons constaté une forme de continuité d'une génération à l'autre, de reproduction sociologique du statut, plus importante en France que dans d'autres pays, ce qui signifie que les jeunes Français ont davantage de mal à s'élever au-dessus de la condition de leurs parents et à accéder à l'autonomie. Lors de notre déplacement à Saint-Etienne, on nous a expliqué que, malgré un nombre important de dispositifs de soutien, d'aides, d'acteurs sociaux, etc., les jeunes éprouvaient de grandes difficultés à accéder à la formation, et tout simplement à quitter leur quartier. Ils ont du mal à sortir de leur milieu d'origine pour aller chercher ailleurs des solutions favorisant leur autonomie, leur insertion dans la vie professionnelle et sociale.
Par ailleurs, contrairement aussi à ce qui se passe dans d'autres pays européens, le schéma d'apprentissage est dominé par le modèle selon lequel on se forme d'abord et on travaille ensuite. En France, on ne sait pas se former un peu, puis travailler, puis continuer à se former et recommencer à travailler, etc. On – c'est-à-dire les employeurs – privilégie une sorte de parcours linéaire qui empêche les jeunes de travailler tant qu'ils ne se sont pas suffisamment formés. Naturellement, les choses évoluent, mais ce modèle est encore extrêmement présent dans les esprits. Cela pose la question de la capacité des enseignants à imaginer d'autres schémas, à appréhender le monde de l'entreprise, et aussi la question des passerelles qui doivent exister entre les deux. Cette situation a été pointée dans le rapport que nous avons remis il y a un an, mais elle est encore extrêmement prégnante.
Cela dit, on constate tout de même que l'accès aux diplômes d'enseignement supérieur est plus facile maintenant, et plus largement ouvert à des personnes issues de milieux qui ne sont pas favorisés à l'origine, ce dont il faut se féliciter. Toutefois, on note une forte prégnance de l'échec scolaire en France, et les comparaisons par rapport aux pays voisins ne sont pas flatteuses, ce qui, d'une certaine façon, vient contrebalancer cette possibilité élargie d'accès à l'enseignement, y compris supérieur.
L'accès au baccalauréat est plus difficile pour les élèves issus des catégories sociales défavorisées, et il y a une sorte de pré-orientation vers l'enseignement professionnel. Grosso modo, un élève qui ne réussit pas dans les filières d'enseignement général part dans l'enseignement professionnel, où l'on a moins besoin d'être bon en français et en mathématiques. On considère que c'est une solution qui permet à peu de frais de maintenir sous statut scolaire des jeunes dont on estime qu'ils n'ont pas grand-chose à faire dans l'enseignement général.
Vous trouverez, à la page 4 de la synthèse de notre rapport, un schéma qui montre l'empilement des mesures d'aide à l'emploi des jeunes… Si quelqu'un s'y retrouve, qu'il le dise ! Pour notre part, nous n'avons toujours pas compris. Le rapport initial contient un bel organigramme en couleur patiemment préparé par les services – ils ont dû s'y reprendre à huit reprises pour le faire – qui explique qui décide quoi. Vous avez là la preuve de l'incapacité de la puissance publique à proposer un schéma clair.
Les politiques publiques en faveur des jeunes bénéficient de 85 milliards d'euros par an, dont 25 milliards hors éducation nationale pour la tranche des 6-25 ans.
J'en viens à l'adaptation des parcours de formation initiale, et plus particulièrement à la question de l'orientation.
Nous estimons que l'orientation doit être moins subie et mieux choisie. Cela nécessite que les collégiens soient sensibilisés beaucoup plus tôt au monde du travail. Dans le cadre du collège dit unique, nous avions dit qu'il fallait une offre diversifiée de formations, du type troisième alternative, qui s'adapte aux publics les plus défavorisés.
Un an plus tard, des changements sont intervenus qui découlent de l'article 47 de la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République puisqu'au parcours de découverte des métiers et des formations (PDMF) s'est substitué le parcours individuel d'information, d'orientation et de découverte du monde économique et professionnel (PIIODMEP). Ce nouveau parcours, qui concerne tous les élèves, commencera dès la sixième, comme nous l'avions préconisé dans le rapport, et non plus en cinquième. Il repose sur des pratiques pédagogiques innovantes, et notamment des ressources numériques qui sont mises en place dans les établissements, même si le plan numérique est encore en gestation et qu'il sera appliqué en 2016. Il contient des outils intéressants, puisque l'on apprend aux élèves, dès le collège, à rédiger un curriculum vitae ou une lettre de motivation.
Cette réforme de l'orientation au collège ne pourra réussir que si l'on trouve tous les relais nécessaires dans tous les établissements : chefs d'établissement, professeurs principaux, enseignants, conseillers d'orientation-psychologues, mais aussi tous les personnels éducatifs. Cela nécessite une mobilisation de tous les jours.
Nous avions insisté également sur l'implication des familles dans les choix d'orientation de leurs enfants. Une expérimentation a été réalisée dans 107 collèges depuis la rentrée 2013 ; elle associe plus étroitement les familles au choix d'orientation et leur permet de choisir en fin de troisième. Cette expérimentation n'a pas bouleversé fondamentalement les décisions effectives d'orientation, prises par les enseignants notamment, mais on a constaté une responsabilité accrue des parents, ce qui induit une plus grande implication de leur part dans le choix d'orientation. Par ailleurs, cela stimule les équipes éducatives. Il n'y a donc que des avantages à impliquer davantage les parents.
Une autre expérimentation a été évaluée, dans le cadre du Fonds d'expérimentation de la jeunesse. Elle concerne la « mallette des parents » en troisième. Cette méthode, qui va être généralisée, permet aujourd'hui, à travers deux réunions avec les parents d'élèves, de réduire de 30 % le redoublement et le nombre de décrocheurs potentiels. Cela veut dire que si l'on a un accompagnement, si l'on associe mieux les parents au choix d'orientation de leurs enfants, on peut obtenir des résultats très concrets. J'ajoute que ce dispositif efficace coûte très peu cher aux finances publiques.
Nous avions insisté sur la nécessité de former les enseignants à l'orientation. Certes, des textes existent déjà qui font de ce type de formation un objectif, parfois même une obligation. C'est le cas notamment de l'arrêté du 27 août 2013. La Cour des comptes a indiqué qu'il fallait intégrer cette dimension dans la formation des enseignants. Mais on constate que tout cela est très peu suivi d'effets.
Les documents de l'ONISEP sont bien conçus, mais ils demeurent d'un accès assez difficile. J'ai consulté, par curiosité, le site de l'ONISEP relatif à la région Poitou-Charentes. Le document d'orientation en fin de troisième, qui est destiné à tout le monde, fait soixante-quatorze pages, celui de fin de seconde quarante-deux pages. Il est en couleurs, très agréable à lire, très complet, mais on y retrouve tous les défauts du système actuel, c'est-à-dire un empilement de mesures dans lesquelles il est difficile de trouver une cohérence quand on n'est pas un « professionnel de la profession », selon l'expression de Jean-Luc Godard. Je mets un parent, qui se pose des questions sur le sort de son rejeton à la fin de la classe de troisième, au défi de s'y retrouver. Il faut donc faire en sorte que ceux qui publient de telles brochures aient une démarche plus simple et moins exhaustive.
En outre, la formation des enseignants à l'orientation ne concerne pas les enseignants déjà en activité alors que, bien évidemment, ils ne sont pas moins concernés que leurs collègues. Il faut donc l'élargir à l'ensemble des enseignants.
La manière d'intégrer les parents dans l'école et de faciliter les échanges entre les enseignants et le monde économique est surtout une question de culture. Il n'est pas nécessaire de légiférer, et il y a des gens qui font des choses formidables dans leur coin. Ce n'est donc pas un problème de moyens ni d'outils, mais de regard et de culture. C'est pour cela que le sujet est aussi difficile.
J'en viens maintenant à l'orientation scolaire intégrée au service public régional de l'orientation (SPRO). La loi sur la formation professionnelle fait de la région le pivot du SPRO tout au long de la vie professionnelle. C'est une bonne méthode qui pourra être reprise dans d'autres domaines, peut-être dans la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe). Ce système a été expérimenté dans huit régions. Pour notre part, nous avons auditionné la région Centre. Ce qui a été expérimenté nous a paru très convaincant. L'État définit au niveau national la politique d'orientation des élèves et des étudiants, mais c'est la région qui élabore un plan régional de développement des formations et de l'orientation professionnelle et qui coordonne les acteurs. Ce schéma pourrait être reproduit pour d'autres politiques publiques.
Un accord-cadre relatif au service public régional de l'orientation tout au long de la vie et à la prise en charge des jeunes sortant sans diplôme du système de formation initiale a été signé entre l'État et l'Association des régions de France (ARF). Certes, nous allons attendre l'évaluation de l'expérimentation dans les huit régions, mais il existe déjà un service public régional de l'orientation, avec des actions coordonnées qui permettront un meilleur accès aux informations.
Toutefois, je mettrai un bémol. Nous avions préconisé un portail unique d'information et d'orientation, comme pour la lutte contre le décrochage scolaire. Or nous avons l'impression d'une information limitée, compartimentée par région, qui ne répond pas aux questions que se posent, par exemple, ceux qui souhaitent savoir comment être logé, accueilli ou transporté dans une région alors qu'ils viennent d'une autre. Il y a là certainement matière à améliorer les choses. Il ne faut pas perdre de vue cette ambition de constituer, sur l'ensemble du territoire national, un portail unique d'accès aux informations concernant l'orientation scolaire et professionnelle.
Comme notre sujet initial concernait la mobilité sociale des jeunes et leur accès à l'autonomie, donc à l'emploi, nous nous sommes penchés sur l'apprentissage. Mais je rappelle que nous avons écarté tout ce qui touche à l'éducation nationale en tant que telle, c'est-à-dire le statut des enseignants ou le contenu des programmes.
Si le nombre d'apprentis n'augmente pas, il ne régresse pas non plus, en dépit des mesures récentes de rehaussement des seuils à partir desquels les entreprises sont éligibles à la prime d'apprentissage. Ainsi, une prime de 1 000 euros par apprenti et par an est accordée aux entreprises de moins de onze salariés, et une prime unique de 1 000 euros est versée par la région aux entreprises de moins de 250 salariés en cas d'embauche supplémentaire On constate qu'une très forte proportion de ces contrats d'apprentissage bénéficie de ces primes.
Le dispositif est encore très difficile d'accès pour les jeunes très peu qualifiés. Mais il ne s'agit plus uniquement d'un problème d'origine sociale. Il y a des jeunes d'origine sociale plutôt favorisée qui n'ont pas de qualification, et il y a des cancres de famille riche. Ceux-là ne trouvent pas plus que les autres de possibilité d'apprentissage. Or l'apprentissage est la manière la plus efficace et la plus rapide d'entrer sur le marché du travail. En la matière, il convient donc de faire des efforts particuliers.
Nous avons aussi évacué de notre réflexion ce débat sans fin qui consiste à savoir si la droite traitait mieux que la gauche l'apprentissage, ou inversement. En tout état de cause, et malgré les systèmes mis en place, on ne sait toujours pas comment parvenir à cet objectif de 500 000 apprentis d'ici à 2017, ni comment traiter le problème des jeunes sans qualification et qui n'accèdent pas à des filières de l'apprentissage.
M. Poisson met le doigt sur un constat qui peut être unanimement partagé, c'est-à-dire qu'il faut éviter une politique de stop and go ou de changement constant de règles, comme ce fut le cas il y a quelques années pour les contrats aidés. Quand on veut parvenir à l'objectif qu'on s'est fixé, surtout lorsqu'il s'agit d'un objectif quantitativement ambitieux, mieux vaut reconnaître ses erreurs, même si elles remontent à six mois ou à un an seulement, et corriger le dispositif, que persévérer dans l'erreur. Le dispositif est désormais stabilisé, et il faut absolument le maintenir afin de garantir le recrutement d'un certain nombre d'apprentis, notamment de faible qualification.
La loi du 5 mars 2014 sur la formation professionnelle comporte des mesures nouvelles. D'abord, les centres de formation d'apprentis (CFA) ont désormais la possibilité d'aider les apprentis à trouver des contrats d'apprentissage. Par ailleurs, le compte personnel de formation (CPF) sera ouvert, dès l'âge de quinze ans, aux titulaires d'un contrat d'apprentissage. Ce compte peut faire l'objet d'abondements en heures pour assurer une formation. La loi prévoit également une possibilité d'embauche en contrat à durée indéterminée (CDI) pour les apprentis.
Nous avions clairement établi que la question du double hébergement constituait un frein à l'apprentissage. Des efforts ont été réalisés dans le cadre du plan d'investissement d'avenir (PIA). 8 600 places ont été construites, dont 80 % ont servi à des apprentis et le PIA 2 prévoit 12 000 places supplémentaires d'ici à 2020, en privilégiant les lycées professionnels et les zones en tension.
Là aussi, je mettrai un bémol. Le logiciel AFFELNET, qui permet de recenser les voeux d'orientation des élèves, ne prend toujours pas en compte l'offre des CFA. Par ailleurs, il faut mieux faire connaître les possibilités d'hébergement et les aides annexes bien en amont des choix.
Il peut y avoir une forme d'hiatus entre le statut des apprentis et le type de contrat qu'ils doivent signer, ce qui dissuade certains maîtres d'apprentissage de recruter. C'est pourquoi nous avions invité les partenaires sociaux à inclure le plus régulièrement possible cette question dans le programme de négociations, afin de faire évoluer le statut juridique des apprentis et de rassurer ainsi le futur employeur. On sait bien que, parmi les freins à l'embauche d'un apprenti, certains touchent à l'application du droit du travail, mais je n'ai pas trouvé trace de réflexions ni d'évolutions à ce sujet, en particulier dans les conversations en cours.
J'en viens à la transition entre l'enseignement secondaire et l'enseignement supérieur. Là encore, notre réflexion n'a pas porté sur le fait de savoir s'il était pertinent que 50 % des étudiants obtiennent un diplôme de l'enseignement supérieur. Nous sommes allés sur le terrain, au lycée public Pierre-Mendès-France de Rennes notamment, où nous avons constaté qu'il existe des mécanismes de transition, de facilitation, pour acclimater plus rapidement les étudiants de terminale au milieu universitaire et éviter que le saut qualitatif entre ces deux univers, qui demeurent assez largement indifférents l'un à l'autre, ne soit trop brusque. Ce principe vaut aussi entre le collège et le lycée. Le passage d'un niveau à l'autre n'est pas bien assumé aujourd'hui par le système en place, et il ne fait pas l'objet de documents d'ordre général.
Il faut apprendre à traiter les trois années qui précèdent et les trois années qui suivent le baccalauréat comme un bloc pédagogique sans rupture au milieu, faute de quoi on ne permettra pas aux élèves sortant de terminale de bien appréhender l'université, où ils sont trop souvent livrés à eux-mêmes. Et comme les bacheliers que « produit » l'enseignement secondaire sont moins à même que par le passé d'acquérir des connaissances nouvelles de manière autonome, l'université représente pour eux une marche beaucoup plus haute à franchir. Que l'on soit d'accord ou non avec l'objectif de 50 % de diplômés de l'enseignement supérieur, il faut absolument favoriser des systèmes d'orientation dès la classe de première et prévoir des conventions particulières entre les différents établissements concernés.
Une fois de plus, nous avons constaté que beaucoup d'initiatives existent déjà, qu'elles sont mises en place de manière pragmatique par les équipes pédagogiques, les parents, les entreprises, les organisations professionnelles, les centres d'apprentissage. Un texte normatif n'est pas forcément nécessaire.
Les « cordées de la réussite » sont des mécanismes d'accompagnement d'élèves du secondaire ou de classe préparatoire par des établissements du supérieur et des entreprises. Leur déploiement, selon que la zone concernée est urbaine ou rurale, pose la question de la mobilité géographique et des moyens car, plus les distances à parcourir sont grandes, plus les déplacements sont compliqués pour les élèves, et onéreux, ce qui grève les budgets.
La loi du 11 juillet 2014 comprend des dispositions qui encadrent de manière plus précise les stages : remboursement des frais de transport, tickets-restaurant, gratification. En fait, on ne sait pas si le fait de rémunérer les stagiaires constitue ou non un handicap à leur recrutement. J'ai soutenu, dans la discussion de la loi du 20 août 2008, des mesures relatives à la rémunération des stagiaires. Comme un employeur qui accueille un stagiaire plus de deux mois doit désormais lui verser une gratification, il n'y a pas de raison que le stagiaire ne soit pas éligible aux dispositifs sociaux ouverts aux autres salariés.
Venons-en aux dispositifs de deuxième chance. La lutte contre le décrochage scolaire est l'un des axes fondamentaux. Que, chaque année, 140 000 à 150 000 jeunes quittent le système scolaire sans diplôme ni qualification constitue un véritable gâchis économique et social. Un plan national de lutte contre le décrochage scolaire a donc été annoncé.
Les travaux préparatoires ont mis en évidence que le niveau de mathématiques en sixième joue un rôle fondamental. On observe en effet que, parmi les 10 % des élèves les plus faibles en mathématiques, près d'un sur deux a quitté le système scolaire sans diplôme, et que les enfants de milieux défavorisés sont surreprésentés dans cette catégorie. Ces travaux préparatoires ont montré également le poids de l'orientation subie dans le décrochage scolaire. L'absentéisme frappe surtout l'enseignement professionnel et, dans l'académie de Lyon, une étude met en évidence un taux de décrochage scolaire plus élevé chez les élèves qui choisissent le lycée professionnel le plus proche de chez eux sur un plan géographique. Enfin, le décrochage a un caractère progressif. Les risques de décrochage sont plus élevés lors des changements de cycle et au retour des vacances ou des stages.
Je rappelle brièvement les grandes lignes du plan de lutte contre le décrochage scolaire : la mise à disposition d'un numéro national unique, la mobilisation de tous les acteurs, l'implication des parents, le renforcement de la prévention notamment par le suivi des absences, les dispositifs de remédiation. Nous avions aussi souligné tout l'intérêt des micro-lycées, des écoles de la deuxième chance. Certains de ces dispositifs de deuxième chance seront évalués cette année par la Cour des comptes.
On constate une baisse du décrochage scolaire, que l'on peut expliquer par la modification méthodologique des questionnaires. Le taux de sortants se situe aux alentours de 9,7 %, sachant que l'objectif est de parvenir à 9,5 %.
La Garantie jeunes est un dispositif nouveau qui va tout à fait dans le sens de la simplification des aides à l'insertion professionnelle des jeunes les plus en difficulté. Vous connaissez le mécanisme : en contrepartie d'un parcours d'intégration, d'insertion et de mise en situation professionnelle, un jeune de dix-huit à vingt-cinq ans, sans qualification, qui ne touche pas le RSA, recevra une allocation d'un montant de l'ordre d'un peu plus de 400 euros. La mission locale est chargée, dans les six à huit premières semaines, de suivre, dans un cadre collectif et de façon très étroite, ces jeunes et de les mettre en situation professionnelle par le biais de stages, de CDD, d'immersion dans les entreprises. En échange, l'État verse aux missions locales 1 600 euros par jeune concerné. Ce dispositif, expérimenté dans une vingtaine de territoires français, sera étendu à soixante-dix territoires, répartis dans toute la France, l'objectif étant de passer de 10 000 à 50 000 jeunes, pour toucher les plus précaires et les plus pauvres. Certes, il existe des difficultés pratiques liées à la montée en charge du dispositif, mais nous les avons identifiées en auditionnant les acteurs de terrain. Nous mentionnons dans le rapport les améliorations que les missions locales nous ont suggérées. Nous souhaitons en particulier qu'au volet « insertion professionnelle » soit ajouté un volet « santé publique », car on constate souvent un état sanitaire dégradé chez les jeunes de moins de vingt-cinq ans.
Nous avons constaté avec satisfaction que la loi du 5 mars 2014 a rendu le compte personnel (CFP) de formation plus accessible aux jeunes qui n'ont pas d'expérience ni de qualification professionnelle particulière. Ceci leur permettra d'acquérir le socle de compétences nécessaire à la suite de leur vie professionnelle, ou de suivre des formations répertoriées, agréées par les branches ou les collectivités. S'ils le souhaitent, les conseils régionaux peuvent accompagner la démarche des jeunes, qui pourront éventuellement conserver leur statut scolaire pendant leur formation, ce qui évite les ruptures définitives. Comme il est généralement difficile de retourner à l'école lorsqu'on l'a quittée, mieux vaut mêler les différents modes de formation. Par ailleurs, le regard porté par les entreprises sur les jeunes non qualifiés doit évoluer : il faut les mettre en confiance afin de les inciter à s'engager plus avant dans ce genre de recrutement.
Une grande loi sur le travail est attendue. J'insisterai, lors de sa discussion, sur la nécessaire simplification du recours à la validation des acquis de l'expérience (VAE), évoquée dans la version initiale du rapport, car celle-ci est difficile pour une population souvent mal à l'aise à l'écrit. Je mets au défi quiconque, placé dans de telles conditions, de remplir un dossier et de le faire aboutir avec succès sans accompagnement. Il y a là un réel enjeu de simplification, car c'est un outil intelligent qu'il faut absolument maintenir. Le problème est qu'il a été conçu par des universitaires pour des gens qui n'ont, pour la plupart, pas vocation à le devenir. C'est assez regrettable, car chacun s'accorde à reconnaître que l'absence de diplôme ne signifie pas que l'on n'a rien appris en deux ou trois ans d'exercice d'un métier. L'expérience mérite d'être prise en compte, et les certifications professionnelles de branche sont un système qui fonctionne très bien. Il ne faut pas que les textes eux-mêmes, qui relèvent plus du domaine réglementaire que législatif, constituent un handicap supplémentaire pour ceux qui ont du mal à entrer dans le dispositif.
Nous avons fait une proposition ambitieuse au sujet de l'autonomie des jeunes, et des bourses étudiantes en particulier, sur la base du constat qu'environ 650 000 étudiants, soit 35 %, bénéficient de bourses, ce qui constitue une progression de 14 points en cinq ans : nous demandons que cette proportion atteigne, à terme, 50 %. Le Gouvernement a créé un échelon 0 bis, destiné aux classes moyennes et assorti d'une bourse de 1 000 euros par an, permettant de couvrir des publics qui, jusque-là, ne l'étaient pas, et porté à 5 500 euros par an le montant des bourses pour les étudiants les plus défavorisés, ceux de l'échelon 7. Nous étions favorables au maintien des bourses au mérite, que nous considérions comme un instrument de la méritocratie, moyennant un aménagement du dispositif pour tenir compte du fait que le nombre des mentions très bien s'est considérablement accru ces dernières années. Nous n'avons pas été suivis sur ce point, mais on peut évaluer à 200 millions d'euros l'augmentation des dotations destinées aux bourses. Il s'agit d'un indéniable progrès, qui bénéficie en majorité aux étudiants des filières technologiques plutôt qu'à ceux des écoles de commerce.
Dans les domaines du logement et du permis de conduire, des progrès ont été accomplis, certes, mais ils demeurent insuffisants. S'agissant du logement étudiant, 43 000 places seront créées d'ici 2018, notamment par les centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) et par les bailleurs sociaux. Dans les académies où la situation est la plus tendue, un effort a été consenti en faveur du logement dans le parc privé, avec les baux de colocation puis avec la création de la caution locative étudiante, pour laquelle le nombre de dossiers acceptés a été multiplié par dix entre 2013 et 2104.
En ce qui concerne le permis de conduire, nous avons recommandé dans notre rapport de faciliter son accès en réduisant les délais et en abaissant le coût. Le ministre de l'intérieur avait pris certaines mesures : allongement de la durée de validité de l'épreuve théorique, aménagement des modalités d'attribution des places d'examen, habilitation d'organismes agréés supplémentaires pour l'épreuve théorique. Nous avons insisté sur le volet scolaire et nous avons été suivis : la sensibilisation à la sécurité routière sera renforcée, particulièrement en classe de seconde. Nous avons toutefois identifié une difficulté : une convention avait été passée avec les organismes représentatifs des entreprises utilisant beaucoup d'apprentis – Union professionnelle artisanale (UPA) et Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) –, qui permettait de développer l'apprentissage anticipé de la conduite, formule couronnée de succès par un fort taux de réussite et par un taux d'accident et de mortalité réduits à 20 %, mais cette convention n'a pas produit ses effets, ce qui est regrettable car l'absence de permis de conduire constitue un frein à l'apprentissage.
Telles sont, madame la présidente, les grandes lignes du contenu de notre rapport de suivi du rapport déposé il y a un an sur la mobilité sociale des jeunes.
Je salue la qualité de ce rapport, qui ne se résume pas à une évaluation des dispositifs existants, assortie de préconisations, mais qui met également au jour des pratiques très positives et trop peu connues.
La mobilité des jeunes est nécessaire pour la formation, pour l'emploi, pour l'autonomie en général, et l'on voit bien que les handicaps, qu'ils soient financiers, sociaux ou géographiques, ont une fâcheuse tendance à se cumuler. Le milieu rural en fournit une bonne illustration, et toute la carte des formations est à revoir, car elle reste pensée en fonction de la proximité géographique. Les étudiants de Harvard sont loin d'habiter tous à vingt kilomètres de leur université, et j'ai pu constater dans ma propre circonscription que déplacer de sept kilomètres un lycée pose un problème à la fois pratique, social et culturel. Il y a vingt-cinq ans, j'ai expérimenté une formule de précontrat en fin de troisième : études payées, débouchant sur un recrutement. J'ai réuni toutes les administrations et tous les organismes concernés : tous m'ont dit que c'était impossible, et pourtant nous l'avons fait. Des jeunes qui seraient restés chez eux, en se contentant des formations disponibles sur place, sont allés habiter pendant trois ans en internat, à 200 kilomètres, et ont trouvé du travail à leur retour. La preuve est donc faite que c'est possible et que ça ne coûte pas très cher. Si on laisse les établissements ou les centres de formation monter des formations de leur côté, et les jeunes et leurs familles se débrouiller avec ce qu'on leur propose, ça ne marche pas. Il faut qu'à un moment donné les deux parties se rencontrent pour surmonter les obstacles. Sinon, les familles les moins aisées n'ont jamais la force pour le faire.
La linéarité constitue, elle aussi, un écueil. Une étude du CNRS a montré que le choix d'orientation des jeunes est conditionné par les métiers qu'ils peuvent observer dans leur vie quotidienne. Les jeunes urbains s'orientent très rarement vers l'élevage, et les jeunes ruraux très peu vers l'informatique. Il faut donc ouvrir le champ des possibles à ceux pour qui il est le plus réduit. Les enseignants, que je respecte beaucoup par ailleurs, n'ont pas dans leur formation l'obligation de passer un CAP, ce qui leur conférerait une certaine forme d'exemplarité auprès de leurs élèves et pourrait créer une proximité entre les différents types de formation. Je pense également que, quelle que soit la réussite future d'un jeune, il faut lui demander de passer, vers la troisième, la partie théorique d'une des dix grandes familles de CAP. De cette façon, un jeune qui se trouve bloqué en fin de première ou après le bac pourra mettre à profit cette base acquise sans régresser et, le moment venu, se comparer à des personnes exerçant d'autres professions, comme du temps du service national, où l'on s'entendait souvent demander combien de fautes on avait commis lors du certificat d'études...
Le tableau des aides est un casse-tête, une sorte de Rubik' cube, une matrice tridimensionnelle irrésolue. Il faut passer de l'obligation contrôlée, comparable à une montre suisse tellement perfectionnée qu'elle ne fonctionne plus, à une initiative responsable. Il faut accepter que ceux qui ont des décisions à prendre assument leurs choix et rendent des comptes. C'est là la voie de la simplification.
Par ailleurs, le rapport envisage-t-il un lien entre les dispositifs présentés et l'engagement citoyen, dans le service civique notamment ?
La question se pose, enfin, du mérite et de la mention. Pour ma part, je ne suis pas sûr d'avoir eu beaucoup de mérite à obtenir une mention. Il y a plus de mérite, même à un niveau de moindre reconnaissance, à s'élever, à monter la marche supérieure lorsqu'elle est haute, qu'à se maintenir au sommet quand on s'y trouve déjà. Pour moi, le mérite ne se confond pas avec l'élite.
J'ai beaucoup appris de ce rapport, dont je salue la qualité. Je m'interroge sur le déterminisme social et la reproduction des inégalités, qui font qu'un enfant d'ouvrier ou d'employé devient souvent ouvrier ou employé lui-même. Le rapport a-t-il déterminé les causes de ce phénomène sur lesquelles il conviendrait d'agir ?
Par ailleurs, si les conditions de stage se sont améliorées, je constate que beaucoup de jeunes ne trouvent pas de stage. La caricature pourrait être celle de l'enfant de parents turcs se résignant à travailler au kebab du coin… Je suis effarée de voir des jeunes qui, bien que possédant les diplômes requis, ne trouvent pas de stage en cabinet d'avocats du fait de leurs origines. L'accès au premier stage est très important, car c'est par lui que se constitue un premier réseau professionnel. Mais les candidats au stage sont souvent sous-utilisés ou occupent des postes subalternes. Comment faire pour que chacun obtienne un stage correspondant à son niveau d'études ? Je m'interroge sur le bien-fondé du versement de 1 600 euros à la mission locale en échange d'un travail qui constitue sa vocation naturelle.
Les auteurs du rapport ont-ils été confrontés, en tant que parents, aux documents d'orientation ? Même avec un bon niveau d'études, ils sont incompréhensibles lorsque votre enfant ne suit pas la voie royale.
Enfin, je veux dénoncer une incohérence : un élève qui s'engage dans l'apprentissage d'une langue ne pourra pas toujours, notamment s'il change d'orientation, continuer cet apprentissage.
S'agissant de la « balkanisation » des aides, pourquoi n'avoir pas proposé la création d'une autorité indépendante ou d'une administration de mission qui rationaliserait ce labyrinthe, remettrait de l'ordre et éliminerait les doublons, pour ensuite y associer l'Éducation nationale ? Le rapport insiste sur la nécessité d'arriver à 500 000 apprentis, et prétend que leur nombre est stable, alors qu'un tableau montre qu'entre 1994 et 2005 il a singulièrement crû. La raison en est connue : le tissu économique français se délite. Les entreprises sont remplacées par des TPE ou des EURL, généralement créées par des cadres. C'est la conséquence des choix macroéconomiques désastreux effectués depuis trente ans.
En ce qui concerne le permis de conduire, chaque fois que j'ai réfléchi à un système d'aide, les auto-écoles m'ont fait la même recommandation : ne donner les aides qu'une fois le permis obtenu, sinon le taux de décrochage est trop important.
Merci, chers collègues, pour vos appréciations sur le rapport.
En ce qui concerne le déterminisme social, je ne suis pas particulièrement « bourdieusien », mais, comme tout le monde, je constate que le regard porté sur les quartiers et sur les personnes, lui, existe bien. Avons-nous proposé des solutions ? Oui. Le rapport initial s'attachait particulièrement aux voies de sortie de ces environnements au sein desquels les individus restent confinés faute de moyens matériels. Élu d'une circonscription rurale d'Île-de-France, je vois bien que, là où il y a des moyens de transport, il y a des centres de formation, et que, là où les premiers font défaut, les seconds sont absents. C'est l'un des effets du cloisonnement que nous avons constaté partout ; ce pays meurt du cloisonnement. Il faut faire entrer tous ces univers en communication les uns avec les autres.
Lorsque nous demandons le regroupement des aides au sein des services régionaux, tant le système est complexe et les acteurs multiples, on nous répond : « Laissez-nous nos pauvres, sans eux nous ne pouvons pas fonctionner » ! Certes, mon propos est caricatural, mais l'imbroglio semble impossible à démêler. Nous attendons de voir ce que proposera le projet de loi NOTRe. Nous avons déposé des amendements par le passé, et il n'est pas impossible que nous en redéposions certains dans le cadre de ce nouveau débat.
S'agissant du décloisonnement, le rapport évoque l'expérience conduite dans le collège d'Andrézieux, dans la Loire, où les élèves ont fait des enquêtes sur les divers métiers exercés au sein de l'établissement. On a fait venir les parents qui n'étaient plus venus à l'école depuis longtemps, et on a mis les gens en relation au lieu de se borner à leur dire qu'il y avait un centre de décision qui distribuait des aides. On ne peut pas se contenter de cocher des cases et de voir, après benchmarking, si les gens entrent dedans. Il est faux de dire qu'il n'y a que les montagnes qui ne se rencontrent pas : beaucoup d'acteurs locaux n'y parviennent pas non plus…
Aux missions locales, nous avons régulièrement posé la question de savoir combien coûte un jeune accompagné. Nous n'avons jamais obtenu le même chiffre, car il varie en fonction des interlocuteurs et donc, des bases de calcul. Ainsi, il est très difficile d'estimer le montant des aides délivrées par les collectivités locales : certaines sont en numéraire, d'autres en nature.
Sur le permis de conduire, nous sommes dans la plus grande incertitude puisque le projet de loi dit Macron est en cours d'examen et que nous ne savons pas, à cette heure, ce que contiendra son article 9.
À Mme Chapdelaine qui s'interroge sur les missions locales et les aides aux des jeunes sans qualification, je répondrai que nous avons demandé la simplification et la clarification des quelque quatre-vingts dispositifs créés depuis 1977. Les jeunes qui sont sans emploi et qui, ne relevant pas de Pôle Emploi, sont dirigés vers les missions locales, qui leur proposent des dispositifs globaux prenant aussi en compte les problèmes de logement et de santé, et ils doivent savoir à qui s'adresser. Le bon dispositif est aussi le plus simple.
À l'occasion d'un rapport élaboré avec notre collègue Michel Heinrich, je m'étais livré à l'étude du millefeuille administratif, dans lequel même les acteurs sociaux se perdent parfois. À mes yeux, la Garantie jeunes constitue une avancée décisive, car elle permettra d'atteindre des jeunes qui ne sont ni scolarisés, ni employés, ni en formation, ni bénéficiaires du RSA puisqu'ils ont moins de vingt-cinq ans. Dans les départements qui l'ont expérimentée, une commission sélectionne des jeunes et les inscrit dans un parcours de suivi et d'accompagnement d'un an, organisé par les missions locales. Le bénéficiaire s'engage à suivre le parcours et, en retour, reçoit 430 euros d'allocation mensuelle. Les huit premières semaines de ce parcours sont collectives, et consacrées à une remise à niveau de certaines compétences de base. L'État consacre à ce dispositif 1 600 euros par jeune. Au terme de cette étape, le jeune est reçu par sa mission locale et mis à intervalles réguliers, pendant un an, en situation professionnelle : stage, immersion en entreprise, voire contrat de travail. Si ce dispositif simplifié d'aide à l'insertion professionnelle des jeunes en grande difficulté est bien celui que nous réclamions, les autres guichets existant à l'échelon territorial restent à simplifier. Il faudrait coordonner le service public régional de l'orientation (SPRO) et le service public de l'emploi au sein des régions, mais cela crée des difficultés avec Pôle Emploi…
Monsieur Caullet, notre premier rapport comportait des propositions relatives à l'engagement citoyen, sujet qui fait l'objet d'un vif débat au sein de notre groupe.
Je partage l'opinion de François Chérèque, président de l'Agence du service civique, qui considère que nous n'avons pas les moyens de rétablir la conscription, surtout pour une durée brève, que ce soit en termes financiers ou en termes de possibilités d'accueil. En revanche, il est possible de mobiliser différents outils dans un parcours citoyen, autour de l'âge de dix-sept ou dix-huit ans, et de conforter le lien armée-nation, particulièrement dans le cadre de la Journée défense et citoyenneté, qu'il faut rendre plus longue, avec des rendez-vous plus réguliers. Certains dispositifs doivent être améliorés, le service civique en fait partie : il y a aujourd'hui quatre à cinq demandes pour une place disponible. Il est de notre responsabilité de parlementaires d'obtenir que sa dotation soit portée de 70 millions d'euros à 600 ou 700 millions d'euros, ce qui permettrait d'amener l'effectif des participants, au service des associations et des collectivités, à 250 000 par an.
D'autres dispositifs sont également à mobiliser, qui touchent les jeunes beaucoup plus tôt, notamment ceux qui sont déjà sortis du système scolaire, et que l'on peut confier à des services très encadrés, tels l'Établissement public d'insertion de la défense (EPIDe). Il faut que nous disposions d'une palette d'outils susceptible de replacer ces jeunes dans des parcours de citoyenneté, et ce avant l'âge de dix-sept ou dix-huit ans.
Méfions-nous des solutions chimériques, telles que le retour du service national obligatoire. Réservons plutôt, au cours de la formation initiale, au lycée ou même au collège, des périodes durant lesquelles les jeunes pourraient non seulement effectuer des stages de découverte en entreprise, mais aussi des périodes d'engagement ou de mobilité internationale ou européenne. Il faut agir sur tous ces leviers en même temps.
Le principal, à mes yeux, réside dans l'éducation, la lutte contre le décrochage scolaire et la prise en charge précoce de jeunes à la dérive.
Je vous remercie, messieurs les rapporteurs, pour la qualité des travaux que vous avez menés.
Le Comité autorise la publication du rapport.
La séance est levée à douze heures vingt-cinq.