La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l’Assemblée a commencé l’examen des crédits relatifs à la mission « Travail et emploi » (no 2260, annexe 47 ; no 2264, tomes V, VI et VII).
J’appelle maintenant les crédits de la mission « Travail et emploi », inscrits à l’état B.
Je suis saisie d’un amendement no 455 présenté par le Gouvernement. La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, pour le soutenir.
Il s’agit d’un amendement important, car il minore de 29 millions d’euros les dépenses faites sur le budget du ministère de l’emploi au titre des emplois aidés. Cette minoration résulte de la mise en place d’une contribution du Fonds d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, le FIPHFP.
Cette contribution participe au financement des emplois aidés, par parallélisme avec la mesure prévue à l’article 62 du projet de loi de finances pour 2015, qui établit la contribution, pour le même montant je crois, de l’Association de gestion du Fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées, l’AGEFIPH, pour les emplois aidés dans le secteur privé.
Le Gouvernement vous proposera tout à l’heure d’adopter cet amendement à l’article 62, qui est, je l’ai dit dans mon discours de Beaune, de bonne et saine gestion, puisqu’il mobilise des ressources dormantes, sans remettre en cause les moyens de la politique de l’emploi.
Il ne remet pas en cause le programme d’action du Fonds. Il faut rappeler, à cette occasion, que ce dernier dispose de réserves financières importantes, que l’on évaluait fin 2013 à près de 400 millions d’euros, 394 millions exactement. Cela est d’autant plus nécessaire que des dépenses nouvelles sont notamment induites par la majoration de l’enveloppe des emplois aidés qui a été adoptée en commission et que nous allons examiner ce soir.
L’amendement à l’article 62 qui vous sera proposé met donc en place une contribution annuelle de 29 millions d’euros par le FIPHFP au bénéfice de l’Agence de services et de paiement, établissement public administratif en charge, pour le compte de l’État, du versement des aides financières aux employeurs au titre des contrats aidés dans le secteur non marchand.
Il modifie ainsi l’article 62 du projet de loi de finances pour 2015, qui prévoit d’ores et déjà un prélèvement, je l’ai dit, d’un montant équivalent sur l’AGEFIPH, qui sera à destination de l’Agence de services et de paiement.
Je vous rassure, comme j’aurai l’occasion de le faire au sujet de l’AGEFIPH : la contribution complémentaire de ce Fonds sera intégralement utilisée pour financer une partie des emplois aidés à destination des travailleurs handicapés dans le secteur non marchand.
Ces 29 millions d’euros correspondent au financement d’environ 10 000 emplois aidés alors même que 50 000 travailleurs handicapés bénéficiaient déjà d’emplois aidés en 2013.
Cette contribution n’est donc qu’un co-financement qui n’a rien de limitatif quant au nombre de bénéficiaires d’emplois aidés.
La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
La commission des finances n’a pas eu à se prononcer sur la proposition qui vient de nous être soumise. Toutefois, il convient de préciser que le FIPHFP dispose actuellement de 394 millions d’euros de trésorerie, et que l’essentiel, c’est-à-dire les mesures en faveur des travailleurs handicapés, y compris dans la fonction publique, est préservé.
On peut penser que la parallélisme qui est proposé par le Gouvernement entre le prélèvement fait sur l’AGEFIPH et celui qui nous est proposé ici est cohérent.
Il faut réaffirmer, comme le ministre l’a fait, que dans tous les cas, les engagements du Gouvernement en faveur des travailleurs handicapés, qu’ils travaillent dans le secteur privé ou public, se situent à un niveau élevé. En effet, les engagements financiers de l’État ont progressé, entre 2012 et 2015 – nous aurons l’occasion de l’évoquer à nouveau au moment de la discussion sur l’AGEFIPH – de plus de 21 %.
La commission des finances ne s’est donc pas prononcée sur cet amendement. J’émets à titre personnel un avis favorable.
Nous sommes un peu inquiets. Effectivement, à propos de l’article 62, de part et d’autre de cet hémicycle nous souhaitions nous assurer que les 29 millions d’euros de ponction sur l’AGEFIPH iront bien, en dernier ressort, aux personnes handicapées.
Une telle proposition avait d’ailleurs été faite par le groupe d’études « Intégration des personnes handicapées » présidé par Barbara Pompili. Or votre amendement, monsieur le ministre, réduit le financement de l’État au titre des emplois aidés.
Vous acceptez des amendements du groupe socialiste – 30 000 contrats d’accompagnement dans l’emploi et 15 000 emplois d’avenir de plus – sans nous avoir dit, en commission élargie, comment vous les financerez.
Au vu de cet amendement, on a le sentiment que vous allez en financer une partie grâce aux fonds de l’AGEFIPH. Nous n’avons encore aucune garantie que les 29 millions d’euros seront bien destinés exclusivement à l’emploi des personnes handicapées. Cela nous inquiète, car nous savons très bien que le taux de chômage des personnes handicapées est deux fois supérieur à la moyenne.
La représentation nationale a un devoir vis-à-vis de ces personnes. La rédaction de cet amendement ne nous donne aucune assurance qu’ils seront les bénéficiaires uniques de cette mesure.
Une remarque de forme, monsieur le ministre : nous découvrons cet amendement à l’instant. Il vient de nous être distribué à nos places, sans que nous ayons pu l’étudier. Le rapporteur doit, je pense, commencer par dire que, n’en ayant pas connaissance, il ne peut exprimer un avis. Il doit également dire qu’il aurait préféré qu’on l’examine d’abord en commission.
Comme disait ma collègue, c’est effectivement un amendement qui est lourd de sens. De plus, sa rédaction peut prêter à confusion : il va donc falloir que vous nous éclairiez.
L’AGEFIPH, mais tout le monde le sait ici, sert à aider les emplois handicapés et les personnes handicapées à s’insérer et à disposer d’un poste de travail aménagé. Elle sert aussi à adapter les lieux de travail pour des personnes difficilement employables. Son action s’adresse donc à un public handicapé.
Nous avons l’impression que, par cet amendement, vous financez des emplois aidés au moyen d’un prélèvement sur des fonds réservés au handicap. Il s’agit en quelque sorte de récupérer un « fond de tiroir », c’est-à-dire 29 millions d’euros, et de l’employer au financement des emplois aidés et pas du tout à celui de l’insertion des personnes handicapées.
Il s’agit d’un problème assez grave, me semble-t-il, sur un document dont, peut-être, je critique approximativement la rédaction, mais qui vient d’être déposé il y a moins de deux minutes sur nos tables.
Nous sommes très inquiets et a priori pas du tout favorables à cet amendement, à moins que vous nous éclairiez, monsieur le ministre.
Je voudrais donner quelques éléments complémentaires. Faut-il rappeler que depuis 2012 les crédits consacrés au handicap ont progressé de près de 20 % ? On ne peut nous faire de procès d’intention sur ce point, ce que d’ailleurs vous ne faites pas.
Nous aurons, de plus, l’occasion de le voir tout à l’heure, 500 postes vont être ajoutés dans les entreprises adaptées. Il ne peut donc y avoir ni doutes ni procès d’intention.
Mais je voudrais quand même rappeler qu’il y a, aujourd’hui, 50 000 travailleurs handicapés qui bénéficient d’emplois aidés. Par ailleurs, même si tout à l’heure vous ne le faisiez pas, vous dénoncez quand même un peu notre politique puisque vous dites qu’il y a trop d’emplois aidés.
50 000 travailleurs handicapés bénéficient aujourd’hui d’emplois aidés. 29 millions d’euros correspondent au financement de 10 000 travailleurs handicapés occupant des emplois aidés. Il faut dire les choses : il s’agit d’une mesure de bonne gestion. Des réserves, soit 394 millions d’euros, existent, et le prélèvement envisagé ne nuirait pas du tout au fonctionnement du Fonds.
Il s’agit en fait d’activer des réserves un peu passives.
Je fais écho aux propos de nos collègues, puisque le débat a eu lieu en commission élargie, monsieur le ministre, après votre audition. Une grande unanimité s’est faite autour du fléchage des moyens vers les personnes en situation de handicap qui ont droit à ces emplois.
Une série d’amendements ont donc été déposés pour s’assurer du fléchage de ces crédits. J’ai constaté que le Gouvernement en avait déposé un dans le même sens.
Le rapporteur spécial a fait état des 389 millions d’euros de trésorerie de l’AGEFIPH. Cela voudrait-il dire, et je souhaiterais obtenir un éclaircissement à ce sujet, que nous avons affaire à un bas de laine trop important, dans lequel nous pourrions puiser pour financer un certain nombre de ces dispositifs d’emplois aidés ?
Cela a fait débat au sein de la commission des affaires sociales. Considérez-vous que ce bas de laine est un peu trop important ? Une négociation a-t-elle lieu en ce moment avec l’AGEFIPH ?
Une réponse à ces questions permettrait peut-être de nous rassurer tous quant à l’utilisation de ces fonds. Nous aurons peut-être plus tard, au cours du débat, la garantie que ce seront bien les personnes handicapées qui en bénéficieront.
Mes chers collègues, pas trop d’arguties sur une question comme celle-la, s’il vous plaît ! Je suis, au titre du centre de gestion du Pas-de-Calais, signataire d’une convention avec l’AGEFIPH. Je connais ses mérites. Je sais que ses moyens ont été sensiblement accrus, mais je sais aussi qu’ils ne sont pas dépensés, en tous cas pas autant qu’il conviendrait. Pour quelle raison ?
Parce que nos collectivités territoriales ont encore trop peu d’appétence pour le recrutement des handicapés. Il y a encore trop de résistances. Si le point de passage pour convaincre les collectivités territoriales de garder plus longuement et définitivement lesdits collaborateurs qui auront été testés est celui des contrats aidés, c’est une bonne démarche.
Je rejoins tous les parlementaires qui ont exprimé le souhait que les crédits soient effectivement fléchés vers les travailleurs handicapés. Mais le fait de reprendre 29 millions d’euros à l’AGEFIPH – et il ne s’agit pas là du premier prélèvement opéré sur cette agence – veut dire qu’elle ne ferait pas tout à fait le travail qu’elle doit faire en faveur des travailleurs handicapés.
Je voudrais tout de même, comme Gérard Cherpion l’a fait en commission, rappeler quelques chiffres : le nombre de placements durables, supérieurs à un an, effectués par l’AGEFIPH a progressé de 58 % entre 2013 et 2014.
Le plan de développement de l’alternance, qui fait partie des objectifs du Gouvernement, a aussi porté ses fruits puisque 4 700 contrats d’apprentissage ont bénéficié de l’aide de l’AGEFIPH en 2013, soit une augmentation de plus de 20 % par rapport à 2012.
Enfin, en 2014, l’AGEFIPH envisage une progression de 28 % de ses contrats d’apprentissage, ce qui veut tout de même dire que l’Agence fait son travail en matière de placement des travailleurs handicapés.
Je souscris à cet amendement : je pense qu’il est, comme l’a dit le ministre, de bonne gestion de valoriser ces ressources qui ne sont, semble-t-il, pas utilisées par le Fonds.
Je voudrais, monsieur le ministre, vous poser la question suivante : vous parlez aujourd’hui de 29 millions d’euros, ce qui correspond à 10 000 contrats aidés bénéficiant à des personnes handicapées. Cela veut-il dire que 10 000 contrats de plus seront signés, ou que la contribution que vous opérez sur le Fonds va financer 10 000 contrats existants ?
Je voudrais simplement une petite précision, monsieur le ministre. Vous prenez 29 millions du fonds d’insertion des personnes handicapées de la fonction publique pour les destiner au financement des emplois aidés, de même que 29 millions d’euros de l’AGEFIPH. Cela signifie-t-il que vous prenez au total 58 millions sur l’insertion des personnes handicapées pour les mettre dans un régime commun ?
Protestations sur les bancs du groupe UMP
…mais ce n’est pas le cas en effet, et de regarder la réalité.
Il n’y a pas une trésorerie cachée, des excédents, qu’il s’agit de piller. Les comptes de l’AGEFIPH elle-même ne seront pas en équilibre à la fin de cette année, ce qui, même si elle a une trésorerie importante, nous oblige à nous projeter dans l’avenir.
Il ne s’agit pas non plus de boucher un trou dans le financement d’autres politiques ; on sait combien l’État est mobilisé sur la question du travail des travailleurs handicapés.
Le ministre a parlé tout à l’heure d’une augmentation de 21 %, mais regardons les chiffres. En 2012, les crédits de paiement étaient à 512 millions d’euros, et ils venaient déjà d’être augmentés. Nous sommes cette année à 621 millions d’euros. Même si l’affectation peut poser un problème juridique, on voit bien que la mobilisation des crédits de l’État est largement supérieure au prélèvement qui est proposé ici. Une contribution de 29 millions de l’AGEFIPH, cela équivaut à ce qui est prélevé sur le fonds pour les travailleurs publics : l’opposition pourrait admettre qu’il y a un juste équilibre dans cette volonté de faire contribuer ces deux caisses à l’effort public de redressement de nos comptes publics, et en particulier au financement du travail et de l’emploi.
Pour toutes ces raisons, il ne faut pas s’inquiéter mais nous devons être vigilants sur l’avenir de l’AGEFIPH mais, surtout, sur les politiques publiques permettant d’accompagner l’insertion dans le travail des travailleurs handicapés.
Nous avons deux discussions en même temps si je comprends bien puisque le problème de l’AGEFIPH, dont il sera question plus tard, a déjà été évoqué. J’ai rencontré sa présidente et nous sommes convenus d’activer une partie du fonds à hauteur de 29 millions d’euros.
Ce qui est clair, c’est qu’il y aura un plus grand nombre de travailleurs handicapés qui bénéficieront de contrats aidés, environ 10 000 sur les 29 millions de l’AGEFIPH, et 10 000, cela a été fort bien expliqué par M. Janquin, sur le fonds d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, en complément des 50 000 travailleurs handicapés environ qui bénéficient déjà d’emplois aidés.
Ce qui a été dit sur le fonds d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique est tout à fait exact. Cela vaut aussi pour l’AGEFIPH : il y a malheureusement encore un grand nombre d’entreprises qui préfèrent payer une pénalité plutôt que d’embaucher des travailleurs handicapés. Nous le verrons tout à l’heure quand nous parlerons de l’aide au poste dans les entreprises adaptées, nous ferons encore un effort supplémentaire.
Soyez donc rassurés, il ne s’agit absolument pas de porter atteinte aux personnes handicapées. Le rapporteur l’a rappelé, il y a 21 % de crédits de paiement supplémentaires depuis 2012. C’est une cause commune et, là, il s’agit d’activer des dépenses un peu passives.
Que je sache, monsieur le ministre, si l’AGEFIPH peut financer des postes pour les personnes handicapées, c’est tout simplement parce que, vous venez de le rappeler, des entreprises ne respectent pas leur obligation de 6 % d’embauche et lui versent donc des pénalités. Ces fonds doivent donc être exclusivement destinés à l’emploi des personnes handicapées.
Or vous écrivez dans l’exposé sommaire que « cet amendement de crédits permettra aussi de réduire la charge, pour le budget général de l’État, de l’augmentation du volume d’emplois aidés souhaitée par la commission des finances comme par la commission des affaires sociales », c’est-à-dire les deux amendements de la majorité socialiste.
Quelle part sera donc consacrée à doter ces emplois aidés supplémentaires qui, encore une fois, n’iront pas à 100 % à des personnes handicapées ?
J’ai bien entendu les commentaires de M. le ministre, qui me rassurent. Je pense que c’est une très belle et très forte incitation à l’emploi des personnes handicapées en milieu ordinaire, dans la continuité et la logique de la loi de 2005 relative à l’égalité des chances et à la citoyenneté des personnes handicapées.
Je suis tout à fait favorable au fait qu’on trouve une utilisation aux réserves de l’AGEFIPH, mais y a-t-il 10 000 emplois aidés de plus ou financez-vous les 10 000 emplois aidés dont profitent les handicapés avec ces fonds ? C’est une question extrêmement simple à laquelle, je suis désolé, monsieur le ministre, nous n’avons pas eu de réponse.
L’amendement no 455 est adopté.
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour soutenir l’amendement no 327 .
L’amendement no 327 est retiré.
La parole est à M. Olivier Falorni, pour soutenir l’amendement no 324 .
Cet amendement concerne les maisons de l’emploi et la pérennisation de leur financement.
Ces maisons de l’emploi ont subi plusieurs réductions drastiques de leurs budgets : réduction de 21,45 % dans la loi de finances de 2011, de 34 % dans la loi de finances de 2012, maintien en 2013, mais nouvelle réduction, de 50 %, dans la loi de finances de 2014, pour atteindre un budget de 26 millions d’euros, contre 82 millions en 2010, auxquels se sont ajoutés 10 millions versés sous forme d’appel à projets de GPTEC lancés par les DIRECCTE.
Le bilan partagé des maisons de l’emploi, initié par le ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social réalisé en juin 2014, a reconnu de façon très objective leur rôle et leur valeur ajoutée dans les territoires. L’ensemble des partenaires auditionnés au cours des travaux d’évaluation soulignent la grande place que les MDE ont progressivement dessinée sur les territoires.
Cet amendement a pour objet d’appeler l’attention du Gouvernement sur l’inadéquation de la procédure d’appel à projets à la réalité de la fonction et de la place des maisons de l’emploi.
Les appels à projets ont eu de nombreuses incidences négatives sur l’activité des maisons de l’emploi : modalités et délais de réponse différents selon les régions, délais de réalisation variables, parfois tellement courts qu’ils ne peuvent permettre de mettre en oeuvre une réelle action de GPTEC, qui requiert du temps pour obtenir des résultats. Ce sont, selon nos enquêtes, 8,3 millions d’euros qui ont été attribués.
En application des dispositions de la loi organique relative aux lois de finances, il est proposé une diminution des crédits de l’action 3 du programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi » et des crédits de l’action 1, sous-action 1, du programme 111 « Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail », qui doivent pouvoir être rationalisés. Ces crédits seraient transférés vers l’action 1 du programme 102 « Accès et retour à l’emploi ».
La commission des finances n’a pas eu à se prononcer mais, étant rapporteur depuis trois ans, je voudrais rappeler le contexte de l’approche gouvernementale, qui, en dépit du changement de ministre, reste la même.
Les crédits alloués aux maisons de l’emploi ont fortement baissé de 2010 à 2012. En 2012, Michel Sapin a souhaité qu’il soit procédé à une évaluation de l’efficacité des maisons de l’emploi et a décidé de maintenir les engagements financiers. Une telle photographie a eu lieu en 2013. Il y a des éléments très intéressants et d’autres plus négatifs, je pense ainsi à une maison de l’emploi qui sous-traitait 72 % de son activité à des bureaux d’études divers et variés mais, à l’évidence, le travail des maisons de l’emploi est particulièrement important.
Le Gouvernement a alors considéré, et c’est encore le discours qu’il tient aujourd’hui, qu’il fallait spécialiser l’engagement de l’État, notamment sur deux axes considérés comme prioritaires, dans lesquels l’action des maisons de l’emploi pouvait avoir un effet de levier, mais les maisons de l’emploi ont aussi besoin d’un accompagnement, qui est territorial, et les situations sont très hétérogènes.
Il est important d’avoir cela en tête et, même si, l’année dernière, j’ai défendu un amendement de 10 millions d’euros pour financer des opérations de GPEC, c’est un peu différent aujourd’hui. Il y a un rapprochement des maisons de l’emploi sur le territoire et, si nous maintenions les dotations de l’État à un niveau particulièrement élevé, cet effort de concentration, de rationalisation ne serait pas pérennisé dans la durée.
En plus, cet amendement me pose en plus un problème de gage. Il y a 10 millions sur le programme 103 et 5 millions sur le programme 111, qui n’est doté que de 82 millions et dont la première action concerne la sécurité au travail. On ne sait donc pas où on pourrait les prendre et on affaiblirait d’autres dispositifs particulièrement importants.
Au-delà de cet élément, le discours sur les maisons de l’emploi a toujours été clair depuis au moins trois ans. Il est important qu’elles contribuent aussi à l’effort de rationalisation mais, surtout, parce qu’elles ont un impact territorial particulièrement important, que les collectivités locales puissent prendre le relais sur d’autres axes que les axes prioritaires définis par l’État.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.
Je l’ai évoqué dans mon intervention, le problème des maisons de l’emploi, que je connais bien, est lié d’une certaine manière à la fusion qui s’est produite en 2008 entre les ASSEDIC et l’ANPE. La politique lancée par M. Borloo a été alors totalement revisitée et c’est la raison pour laquelle vous avez abaissé leurs crédits de près de 60 % entre 2008 et 2012.
Les maisons de l’emploi sont très différentes les unes des autres en réalité. Il y en a qui fonctionnent très bien, d’autres moins bien. Elles couvrent environ un tiers du territoire et peuvent faire appel, au niveau territorial, aux crédits de la GPEC ou des mutations économiques quand elles ont un vrai projet.
Le financement de leur fonctionnement est garanti à hauteur de 26 millions d’euros comme l’année dernière. Il y a eu alors, par amendement, un abondement pour tenir compte des appels à projets. Il y a moins de MDE que l’année dernière, parce que quelques-unes ont fermé. Certaines sont portées à bout de bras par les collectivités locales alors que d’autres ne reçoivent aucune aide. Je sais d’ailleurs à peu près où elles sont aidées et où elles ne le sont pas. Je peux en parler à mon aise, puisque j’en ai créé et dirigé une à Dijon.
Bref, il y a des endroits où les collectivités participent, d’autres où elles ne participent pas. L’État garantit le fonctionnement à hauteur de 26 millions d’euros, comme l’année dernière, c’est un engagement qui a été pris. Il leur demande de se recentrer sur deux axes et elles peuvent faire appel à des crédits de droit commun en matière de GPEC ou de mutation économique si elles ont un vrai projet, ce à quoi correspondait ce montant de 10 millions l’année dernière. S’il y a encore de vrais projets, je ne doute pas qu’il y en ait, il y sera donc répondu favorablement au niveau territorial.
Vous n’avez pas dit, monsieur le ministre, si vous êtes ou non favorable à l’amendement, que nous soutenons, de notre collègue. A l’occasion de cet amendement, où il est proposé d’abonder le budget des missions locales de 15 millions d’euros, je reviens sur l’amendement précédent qui a été retiré. Nous sommes passés un peu vite dessus !
L’amendement précédent demandait 30 millions d’euros supplémentaires pour les missions locales ; il a été retiré. Or, juste avant, vous nous avez proposé un amendement qui ponctionne 29 millions d’euros sur l’AGEFIPH, en nous disant que cela allait certainement combler le financement d’une partie des emplois aidés que vous aviez acceptés en supplément. En rapprochant les deux montants, nous sommes très inquiets. Qu’allez-vous faire de ces 29 millions d’euros que vous ponctionnez sur le fonds de roulement de l’AGEFIPH, alors même que le rapporteur nous a dit qu’elle ne serait peut-être pas en équilibre à la fin de l’année ? Les millions passent d’un budget à l’autre de façon un peu trop rapide et j’aimerais comprendre pourquoi l’amendement de notre collègue a été retiré tout à l’heure, alors qu’il voulait abonder de 30 millions d’euros les missions locales.
L’amendement no 324 n’est pas adopté.
Comme l’a très bien rappelé notre collègue, les maisons de l’emploi ont été créées à partir de 2005 et, depuis, de très nombreux rapports ont été faits pour évaluer leur travail. Certaines le font très bien et atteignent leurs objectifs, d’autres le font moins bien. Vous avez resserré leurs axes de travail et les missions locales ont aussi joué le jeu : le dernier cahier des charges a donc été adopté. Toutefois, elles ont besoin d’un peu de lisibilité. En effet, tous les ans, nous avons la même discussion sur les maisons de l’emploi et leur budget. Pour les maisons de l’emploi qui font correctement leur travail, et dont vous avez très certainement la liste, monsieur le ministre, il va devenir très compliqué, puisque les critères sont devenus plus étroits et que, malheureusement, leurs dotations diminuent, de faire la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et d’anticiper les mutations économiques.
Elles pourront, certes, demander de bénéficier aussi de fonds de droit commun. Mais ces derniers ne sont pas non plus en augmentation. Les régions et les préfets auront sans doute du mal à opérer des choix qui reviendront, en quelque sorte, à partager la pénurie. Nous vous demandons, au moins pour les maisons de l’emploi qui fonctionnent bien, une dotation supplémentaire, comme l’an dernier, pour qu’elles continuent de bien faire leur travail, d’autant que le chômage a augmenté – cela ne vous a pas échappé. Nous aimerions également, monsieur le ministre, que vous vous engagiez à faire perdurer ce cahier des charges pendant plusieurs années.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 254 .
Monsieur le ministre, je ne suis pas tout à fait d’accord avec vous. À l’époque où les maisons de l’emploi ont été créées, ce n’était pas simplement pour rapprocher l’ANPE et l’ASSEDIC, c’était pour mettre les élus au centre de la politique de l’emploi. C’est d’ailleurs pour cela que l’on demandait aux collectivités locales de participer à leur financement. Par la suite, des ratios ont été fixés : 70 % du financement incombait à l’État et 30 % aux collectivités locales.
Si cela avait été fait dans le seul but de rassembler deux organismes d’État, je ne vois pas pourquoi nous serions allés chercher le concours des collectivités locales. Il s’agissait bien de mettre l’élu au coeur du dispositif et celui-ci demeure au coeur du dispositif, que Pôle emploi existe ou non. La fusion des deux structures d’État n’a rien changé à la volonté des élus de s’occuper de l’emploi local, notamment des mutations, de la gestion prévisionnelle des emplois et compétences et du développement de l’entreprise sur le territoire. Nous sommes bel et bien dans la territorialisation. Dans chaque bassin d’emploi, il y a une maison de l’emploi qui travaille avec les élus locaux et les organismes d’emploi pour développer l’emploi.
Cela fait des années que l’on nous dit que certaines maisons fonctionnent bien et d’autres non et, partant, que l’on va agir en fonction de la maison concernée. Cela fait des années que je suis rapporteur dans cet hémicycle ; cela fait des années que j’entends le même discours ; cela fait des années que la DIRECCTE fait la même chose, qu’elle donne un coup de rabot indifféremment sur toutes les maisons de l’emploi. On tue donc d’un même coup celles qui fonctionnent bien et celles qui ne fonctionnent pas bien. Votre prédécesseur, monsieur le ministre, m’a tenu exactement le même discours il y a un an – nous nous en souvenons parfaitement avec M. Gille qui était rapporteur sur l’emploi.
Il faut pouvoir donner aux maisons de l’emploi, à un moment, les moyens de fonctionner et de travailler dans leur territoire.
Je suis le président de la maison de l’emploi de Marseille. Je sais donc à peu près à quoi cela sert et si c’est utile. Si l’État cesse de financer, comme il le fait actuellement, ces maisons, c’est la collectivité locale, en l’occurrence la mairie de Marseille, qui sera obligée de mettre la main à la poche pour une mission dont on reconnaît généralement qu’elle est plutôt bien exercée. Les maisons de l’emploi qui n’étaient pas très utiles sont, quant à elles, mortes de leur belle mort. Ce qui est très dérangeant, c’est que nous allons avoir 26 millions d’euros d’autorisations, alors que nous en avions 46 millions l’an dernier.
Les maisons de l’emploi vont donc probablement subir des coupes extrêmement sévères. On pense généralement que celles qui ont survécu, qui ont fait des mutations et respecté les deux priorités que le ministère du travail avait fixées ont essayé d’être disciplinées et obéissantes. Or les services de l’État vont se retirer d’un dispositif qui est jugé plutôt efficace dans la lutte contre le chômage. Ce n’est assurément pas un bon signal qui est envoyé aux acteurs, d’autant qu’ils se réunissent et qu’ils sont efficaces ! Nous proposons tout simplement d’augmenter la dotation. Avec les maisons de l’emploi, nous sommes de fait très proches du terrain et implantés dans des villes touchées par le chômage et soumises à des mutations difficiles – je pense par exemple à celle de Marseille qui est très utile et appréciée et où les uns et les autres se retrouvent pour définir des stratégies et appliquer les consignes de l’État. Cet amendement est soutenu par un certain nombre de nos collègues,…
…notamment Philippe Vitel qui s’occupe de la maison de l’emploi de Toulon, également très efficace. Monsieur le ministre, c’est un très bon dispositif, désormais salué après que les mutations nécessaires ont été accomplies. Ce n’est vraiment pas un bon signal adressé aux acteurs que de baisser les dotations.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 253 .
C’est un amendement de repli. Comme je sais que vous n’avez pas grand-chose dans vos poches, monsieur le ministre, j’ai choisi de proposer également un amendement de repli, en me disant que vous pourriez trouver plus facilement 10 millions que 15 millions d’euros. Néanmoins, comme vous avez réussi à trouver 29 millions d’euros tout à l’heure et que sera présenté bientôt un amendement de plusieurs centaines de millions d’euros, je pense que vous pourrez trouver 15 millions d’euros comme je le demande dans mon premier amendement. Si par hasard, vous n’y parveniez pas, vous pourriez toujours trouver 10 millions.
La parole est à Mme Kheira Bouziane, pour soutenir l’amendement no 335 .
Cet amendement va dans le même sens que ceux que viennent de défendre mes collègues. Je ne reviens pas sur la fonte des budgets des maisons de l’emploi, mais je voudrais quand même rappeler, après Francis Vercamer, que nous avons déjà vécu ce débat lors de l’examen du budget 2014. Les maisons de l’emploi ont souvent été stigmatisées ; on a minimisé, voire remis en cause leur action. Mais nous disposons désormais d’un bilan partagé sur les maisons de l’emploi, réalisé en juin dernier sous la direction de Mme Bouillaguet, et ce bilan est positif. Il reconnaît de façon objective le rôle et la valeur ajoutée des maisons de l’emploi dans les territoires. Cette appréciation est d’ailleurs partagée par un bon nombre d’élus, toutes appartenances politiques confondues. L’ensemble des partenaires soutiennent l’action des maisons de l’emploi en tant qu’outil d’animation, de développement, d’ingénierie territoriale, de mobilisation des acteurs économiques et de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Ce sont des acteurs impliqués dans les politiques de l’emploi, des outils souples et réactifs qui se conforment à l’évolution du territoire.
On leur a reproché leur hétérogénéité, mais je vois là plutôt une qualité.
Dans la mesure où les territoires ne sont pas identiques, il n’y a rien d’étonnant à ce qu’elles ne le soient pas non plus et qu’elles ne mènent pas les mêmes actions partout. Ce sont donc des outils de territoire au service de l’emploi, qui permettent de fédérer l’ensemble des acteurs et qui concentrent leurs actions en direction des mutations. Elles ne sont pas en concurrence, ni avec Pôle emploi, ni avec les DIRECCTE. D’ailleurs, les comparer avec celles-ci n’a pas de sens. Les unes sont des actrices de dynamique dans le territoire, des outils de proximité, alors que les autres sont des représentantes de l’État en région, garantes des politiques nationales de l’emploi. Je pourrais également ajouter les différences qu’elles ont avec Pôle emploi, mais je vais m’arrêter ici.
Un dernier mot, si vous me le permettez, madame la présidente. À l’heure où l’on recherche toujours plus d’efficacité dans le financement public, on observe que les crédits du programme 103 sont majoritairement attribués à des cabinets de conseil plus coûteux et pour lesquels il n’y a ni suivi d’action ni ancrage territorial.
Il faut remettre le débat là où il se pose ; c’est pourquoi je vais revenir sur certains des propos qui viennent d’être tenus. Madame Le Callennec, vous parlez de baisse des dotations. Monsieur Tian, je cite vos propos, vous avez dit « Si l’État cesse de financer, comme il le fait actuellement, ces maisons… » et vous avez donné le chiffre de 46 millions d’euros de l’an dernier. L’an dernier, au projet de loi de finances, c’était 26 millions d’euros qui étaient inscrits et le ministre s’est engagé à maintenir ces crédits.
La proposition qui nous est faite s’élève à 26 millions d’euros. Il est donc injuste de dire qu’il y a une baisse des dotations. Votre chiffre est faux, monsieur Tian, puisque vous vous êtes tout simplement trompé de 20 millions d’euros. En revanche, comme je l’ai dit tout à l’heure, un amendement de 10 millions d’euros a été proposé.
Premier élément de réponse : il n’y a pas de baisse des dotations. Il convient de signaler que la subvention de fonctionnement des maisons de l’emploi est stable. Elle était de 26 millions d’euros l’an passé, elle sera de 26 millions d’euros cette année. En revanche, j’ai porté un amendement – je n’ai d’ailleurs pas le souvenir de vous avoir vu, monsieur Tian, dans cet hémicycle –…
…pour 10 millions d’euros supplémentaires. Précisons que cette somme correspondait aux anciens contrats de plan État-région et que ces financements, notamment dans le cadre de la GPEC, n’ont plus forcément lieu d’être.
Deuxième élément de réponse : ces 10 millions d’euros, parce qu’il y a eu un petit décalage dans les appels à projet présentés par le ministère et mis en oeuvre localement par les DIRECCTE, sont en cours de mobilisation.
On ne peut donc pas dire à la fois qu’il y aura une baisse immédiate de crédits avec la disparition de ces 10 millions alors que et que les actions qui viennent d’être financées depuis octobre seront réalisées en cours d’année dans ce cadre précis.
Surtout, je veux insister sur la dimension territoriale majeure de l’action portée par les maisons de l’emploi. Je ne doute donc pas que les collectivités locales, et certainement, monsieur Tian, la communauté urbaine de Marseille, ne manqueront pas de s’engager pour accompagner les politiques locales grâce à la portée territoriale des maisons de l’emploi.
Nous savons bien que vous voulez inverser la proportion du financement.
Je voudrais donner quelques éléments de réponse à Mme Le Callennec, à M. Tian, à M. Vercamer et à Mme Bouziane. J’ai entendu quelques confusions dans les propos qui ont été tenus. Monsieur Vercamer, je n’ai jamais fait de confusion entre la fusion de l’ANPE et de l’ASSEDIC et le rôle des maisons de l’emploi. J’ai dit que c’est à partir du moment où il y a eu la fusion, curieusement, que la politique qui avait été mise en oeuvre par M. Borloo a été abandonnée par le gouvernement de l’époque, soit à partir de 2008-2009. D’ailleurs, vous savez bien que les crédits sont passés d’une centaine de millions d’euros à 60 millions d’euros environ. On ne peut pas se prévaloir de sa propre turpitude !
Madame Bouziane, les maisons de l’emploi n’ont en effet rien à voir avec les DIRECCTE. Ces maisons diffèrent de fait d’un bassin d’emploi à l’autre. Et les aides des collectivités locales sont également différentes. Certaines portent à bout de bras leur maison de l’emploi. L’engagement pris par le Gouvernement et celui que je prends, comme cela a été rappelé par le rapporteur, c’est de maintenir les crédits de fonctionnement des maisons de l’emploi à hauteur de 26 millions d’euros, ainsi que l’avait proposé mon prédécesseur l’année dernière, dans le cadre de la loi de finances. Les 10 millions d’euros ajoutés l’année dernière par amendement, devaient permettre de répondre aux appels à projets.
Le Gouvernement propose donc cette année de garder la partie dépenses de fonctionnement au même niveau, ce qui ne diffère guère des conclusions du rapport de Mme Bouillaguet, et que les maisons de l’emploi puissent faire appel au financement GPEC – gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences – dans le cadre du programme 103 sur lequel 40 millions d’euros sont encore disponibles. Celles qui présenteront les meilleurs projets seront ainsi financées.
Madame Bouziane, rassurez-vous, les DIRECCTE travaillent la main dans la main avec certaines maisons de l’emploi. Dans plusieurs territoires chers au coeur des intervenants – je pense à M. Janquin –, les maisons de l’emploi ont bénéficié de financements dans le cadre du pacte d’avenir,…
… et il y a même eu des crédits qui leur ont été attribués suite à des initiatives locales pour animer une démarche de GPEC territoriale. Et puis, il doit en aller de même pour les financements des régions. L’évolution de leurs compétences ne les empêchera pas, comme le fait l’État, de s’engager sur des crédits de droit commun lorsque les maisons de l’emploi leur proposeront des projets structurants.
Par conséquent, vous voyez, mesdames, messieurs les députés, que nous sécurisons les crédits de fonctionnement des maisons de l’emploi, qu’on leur donne la possibilité de faire appel, dans le cadre du programme 103, aux crédits relatifs à la GPEC et aux mutations économiques, ainsi que de mettre en oeuvre des projets avec l’aide des collectivités locales qui, je n’en doute pas d’après ce que vous dites, vont les soutenir absolument – même si l’on peut vérifier que c’est pas toujours le cas. L’avis est donc défavorable à ces amendements.
Pourquoi faire si compliqué quand on peut faire si simple ?… Monsieur le ministre, il y en a encore ici quelques-uns à être député et maire – ce n’est plus mon cas, certains en éprouvent quelques regrets –, mais cela va se terminer. En tant que maires, vous êtes les uns et les autres habitués à signer des conventions d’objectifs avec les grandes associations de vos communes. J’entends encore un Premier ministre nommé Michel Rocard dire : « Qui paye, commande. » Cela veut dire que l’État maintient les moyens de fonctionnement des maisons de l’emploi, les moyens nécessaires à leur action politique sur le terrain,…
… à condition que celles-ci travaillent sur les deux axes privilégiés par le Gouvernement. Les élus ont été appelés, de par leur connaissance du terrain, à y participer, et l’État leur dit : « Messieurs les élus locaux, si vous voulez faire plus ou autre chose, financer au titre de votre collectivité pour que les maisons de l’emploi aient davantage de moyens. » C’est « qui paye, commande » et pas autre chose. Cela me paraît logique.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Il faut d’abord faire un peu d’histoire. Vous avez évoqué, monsieur le ministre, les baisses de crédit certaines années. C’est vrai, mais parce que les maisons de l’emploi ont été créées pour accompagner les contrats de transition professionnelle, et quand on a évolué vers d’autres dispositifs, les crédits ont en effet été transférés ailleurs. Les maisons de l’emploi ont pu alors s’adapter parce qu’elles avaient déjà pris racine dans l’environnement économique et dans l’environnement de l’emploi de leurs territoires. Ceux-ci sont totalement hétérogènes, et de ce fait, les 175 maisons que compte la France exercent différemment leurs fonctions : certaines travaillent avec des missions locales, d’autres, comme celle que j’administre depuis plus de dix ans, ont fusionné avec le PLIE – le plan local pour l’insertion et l’emploi – et donnent satisfaction à tous.
Financièrement, les 10 millions alloués l’an dernier par voie d’amendement sont déjà dépensés, ce 3 novembre, à hauteur de 8,8 millions.
Ces crédits seront certainement utilisés en totalité d’ici la fin de l’année. De plus, on a demandé cette année aux maisons de l’emploi, peut-être à juste titre, de revoir leur copie, d’être plus proches des milieux et des quartiers difficiles. C’est ainsi qu’une autre dynamique a été remise en place.
Je vais citer quelqu’un que vous connaissez bien, monsieur le ministre : « Ne pas voter un amendement d’au moins 10 millions est une mise à mort définitive des maisons de l’emploi. Elles ne pourront plus résister à cet ultime coup de rabot. Le rejet de cet amendement aurait pour conséquence le licenciement de 1 200 personnes. » Voilà ce qu’a écrit Jean Le Garrec, ancien ministre socialiste, président de l’Alliance ville emploi, et réputé pour son bon sens. Oui, aujourd’hui, il faut continuer. Les maisons de l’emploi ont besoin de ce coup de pouce. Je rappelle que les crédits qui leur étaient attribués s’élevaient encore à plus de 50 millions en 2013. Ils devaient être amputés de moitié l’an dernier, soit 26 millions, avant d’être finalement remontés à 36 millions par voie d’amendement. Nous demandons simplement que les crédits soient maintenus à ce niveau.
Je m’inscris complètement dans la continuité des propos de Mme Bouziane. Il faut maintenir les budgets des maisons de l’emploi en en abondant la partie fonctionnement. Je tiens aussi à répercuter l’inquiétude des élus locaux quant à la survie des maisons de l’emploi. Plusieurs d’entre nous l’ont rappelé : les crédits sont passés de 82 millions en 2010 à 26 millions dans le PLF pour 2015. Une chute aussi brutale constitue évidemment un vrai risque pour nos territoires, et j’ai du mal à l’accepter. Nombreux sont les députés, sur tous les bancs, à partager cette opinion, n’en déplaise à certains.
Monsieur le ministre, sur votre territoire vous avez créé la maison de l’emploi, et vous savez mieux que moi combien elles sont indispensables. En effet, vous connaissez la qualité de leur expertise en matière de comparaison entre emploi et formation, mais aussi concernant la GPTEC – la gestion prévisionnelle territoriale de l’emploi et des compétences. Vous connaissez également leur capacité à élaborer des projets et à mener des expérimentations. Je peux vous dire que sur un territoire rural comme le mien, cela compte : on a besoin d’ingénierie de projets et de mettre en place des expérimentations. Vous savez aussi, et c’est un point important, les liens permanents qu’elles entretiennent avec les entreprises, même si ce n’est pas toujours facile au niveau local, et avec les élus. M. Vercamer a dit qu’il est nécessaire que l’élu soit au centre des politiques territoriales de l’emploi. Vous n’ignorez pas non plus leur capacité à mobiliser l’ensemble des publics concernés, les institutions et les services de l’État. Une telle mobilisation me semble indispensable, monsieur le ministre, pour décliner des politiques nationales en politiques territoriales. Je citerai un exemple : à l’heure où Mme la ministre de l’écologie nous demande une forte mobilisation pour la transition énergétique, qui mieux que les maisons de l’emploi pour orchestrer un sujet aussi transversal ? Qui mieux que les maisons de l’emploi, avec leurs partenaires – l’agence de développement et de la maîtrise de l’énergie, la région, les entreprises, les organismes paritaires collecteurs agréés – pour mobiliser les forces vives ?
En plus, les projets partagés par les maisons de l’emploi, je pense à ce qui passe dans mon territoire, où on travaille sur le développement durable…
Sourires.
J’ai presque fini. Des projets sont aussi soutenus par Alliance ville emploi, ce qui permet de développer sur l’ensemble du territoire ces politiques locales ainsi démultipliées.
Pour les votes sur les amendements identiques, je vais consulter l’Assemblée par assis et levé.
Sur l’amendement no 335 , je suis saisie par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
L’amendement no 253 n’est pas adopté.
Je comprends tout à fait que mes collègues socialistes aient déposé un amendement balai censé apporter un peu de volontarisme au budget du Gouvernement, mais ils vont tout de même achever les maisons de l’emploi. Peut-être que quand on les a créées, l’on aurait dû les fusionner avec les PLIE et les missions locales, mais c’est évidemment un peu facile à dire maintenant.
En l’occurrence, comment imaginer des structures cofinancées par des collectivités locales et dont le budget, tous les ans, soit remis en cause ? Chacun voit bien, dans ses territoires, les conséquences en termes de négociation de leur budget. Monsieur le ministre, vous avez été pendant treize ans maire de Dijon : je suis sûr que les maisons de l’emploi étaient tous les ans pour vous, jusqu’au 5 avril 2014, un sujet à traiter dans les arbitrages budgétaires. Ne me dites pas que vous n’étiez pas attentif à votre bassin d’emploi. Au-delà de la sécurité, des transports, de l’urbanisme et de la culture, c’était certainement votre sujet de prédilection. Laisser supposer que seul Pôle emploi – qui fait très bien son travail et que je ne remets pas en cause – est une structure qui valorise l’emploi et qui aide à l’emploi dans les bassins est une ineptie.
Depuis le début, ce ne sont pas les politiques, vous comme nous, qui sont contre les maisons de l’emploi, mais l’administration, qui considère qu’il ne doit pas y avoir deux structures, supposées redondantes, pour développer l’emploi dans les territoires.
Au passage, je note que Mme Bouziane a très bien expliqué en soutenant son amendement – et je suis désolé qu’elle ne soit pas suivie par ses collègues socialistes – qu’elles sont hétérogènes.
Monsieur le ministre, vous vous rassurez en disant qu’il n’y avait pas encore eu la fusion entre les ASSEDIC et l’ANPE quand vous avez créé la maison de l’emploi à Dijon. Mais ce n’était pas leur objet : elles devaient agir en coopération avec tous les acteurs du territoire. Croire que comme Pôle emploi a été créé, on peut les mettre à mal est une vraie ineptie.
Je le conçois comme un amendement d’appel auprès du ministre, bien que beaucoup de réponses aient déjà été apportées au cours de cette discussion. Je ne vais pas entrer dans les détails sur l’utilité et sur la pertinence des maisons de l’emploi, qui sont en effet reconnues par tous ici. J’ai constaté que le groupe socialiste, dans son ensemble, était très attaché à cette forme de réponse de proximité, notamment dans les secteurs ruraux.
J’ai entendu la référence à Jean Le Garrec. J’ai eu beaucoup de plaisir à siéger à ses côtés et je sais combien il est engagé dans l’insertion.
Si j’ai déposé cet amendement, c’est aussi en reconnaissance de son travail dans cette assemblée et, aujourd’hui, à travers les missions qui sont les siennes.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le ministre, une question me taraude : vous dites que le montant global disponible sera de 36 millions, voire 40 millions d’euros, compte tenu des crédits qui pourront être récupérés au titre des GPEC ; je prends acte de cette bonne solution, mais il y a aussi les crédits du fonds social pour l’emploi, mal consommés aujourd’hui, et les contrats de plan État-région pourraient, eux aussi, être utilisés, ainsi que des programmes dits leaders organisés par l’Union européenne. Qu’en pensez-vous ? Je vous demande de missionner un membre de votre ministère, un inspecteur par exemple, pour savoir comment on peut conserver les missions liées aux maisons de l’emploi en leur permettant de prétendre à des financements autres que ceux de l’État. Comme tous ici, je suis évidemment très engagé dans les maisons de l’emploi.
La parole est à Mme Kheira Bouziane, pour soutenir l’amendement de repli no 336.
La proposition de M. Terrasse va dans le bon sens. Sur un certain nombre de sujets, les maisons de l’emploi peuvent se mobiliser dans le cadre d’appels à projets lancés par le Gouvernement ou par les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi. Il existe aussi des programmes européens « Leader », hélas assez peu utilisés en France ; on verra quelles candidatures seront présentées sur ces enjeux majeurs que sont ceux de l’emploi.
Il ne faut pas négliger la capacité qu’ont les maisons de l’emploi à répondre aux politiques de l’emploi : la plupart y parviennent. Je pense que la garantie apportée par l’État, via le maintien de son engagement à hauteur de 26 millions d’euros, donnera aux maisons de l’emploi les moyens de s’adapter et de répondre aux futurs appels à projets. Il ne me semble pas nécessaire de les doter de crédits supplémentaires. Avis défavorable, donc.
Monsieur Terrasse, je dois dire que j’ai été sensible à votre argumentation ; on reconnaît en vous le parlementaire qui connaît, et de près, la vie locale : voilà qui aide à comprendre les choses !
Il est vrai qu’il existe aujourd’hui des fonds européens, issus du programme « Leader » ou du Fonds social européen, qui ne sont pas forcément bien mobilisés, en raison des difficultés d’accès à ces crédits – ou plutôt de la complexité des procédures qui permettent d’y avoir accès. Si vous acceptiez de retirer votre amendement, je prendrais l’engagement de lancer une mission d’inspection afin que ces fonds soient mobilisés au profit des maisons de l’emploi qui en ont besoin.
L’amendement no 266 avait été déposé en commission des finances, mais il n’a pas été repris par le rapporteur spécial. À la suite de la réponse du ministre, j’accepte de le retirer.
L’amendement no 266 est retiré.
J’espère que les membres du groupe socialiste voteront en faveur de l’amendement de leur collègue, Mme Bouziane.
Vous dites, monsieur le ministre, que l’on peut mobiliser les fonds européens. Nous sommes justement en pleine négociation. D’une part, cela est d’une extrême complexité, d’autre part, tout dépend désormais des régions : pour bénéficier des fonds, il faut passer sous les fourches caudines de leurs présidents. Quand on est du bon bord, ça va, mais quand on ne l’est pas, il est plus compliqué d’accéder à certains fonds publics !
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Puisque les maisons de l’emploi ont reçu mission de concentrer leur action sur deux axes, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et l’accompagnement des mutations économiques, définis par vous-même, l’idéal serait que vous fassiez un geste en faveur d’un financement direct de ces maisons de l’emploi, qui sont également soutenues par les collectivités locales.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 41 Nombre de suffrages exprimés: 37 Majorité absolue: 19 Pour l’adoption: 13 contre: 24 (L’amendement no 335 n’est pas adopté.)
L’amendement no 336 n’est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur spécial, pour soutenir l’amendement no 114 .
L’amendement no 114 est retiré.
La parole est à Mme Monique Iborra, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales pour l’emploi, pour soutenir l’amendement no 257 .
Cet amendement, identique à celui qui avait été adopté par la commission des finances, propose de majorer de 7 millions d’euros les crédits dédiés au financement des aides au poste dans les entreprises adaptées.
J’avais en effet présenté le même amendement, quoique gagé différemment ; la commission des finances y avait émis un avis favorable. Il s’agit d’un engagement majeur en faveur du travail des personnes handicapées.
Oui, le Gouvernement est lui aussi favorable à cet amendement, qui prévoit la création de 500 aides au poste supplémentaires en 2015, pour un coût de 7 millions d’euros. Leur répartition sur le territoire tiendra compte des situations locales et de la qualité de l’accompagnement et de l’insertion dans l’emploi offert par les structures concernées. Il s’agit d’un nouveau pas en avant.
En conséquence, je lève le gage afin que le financement de la mesure soit étudié de manière globale, au vu du résultat des votes sur l’ensemble des amendements relatifs à la mission « Travail et emploi ».
Monsieur le ministre, vous aviez évoqué en commission élargie une sous-consommation des aides au poste ; nous nous étions d’ailleurs permis de vous en demander la raison. Si l’on ne peut que se réjouir de voir leurs crédits augmenter – bien que l’on ait toujours des doutes quant aux enveloppes qui pâtiront du transfert de fonds –, je me demande comment vous allez faire pour qu’ils ne soient plus sous-consommés. Il me semble que les entreprises adaptées aspiraient à une plus grande souplesse, notamment via un recours plus aisé au temps partiel, ce qui supposerait que l’Agence de services et de paiement l’accepte. Donnerez-vous des instructions en ce sens ?
Il s’agit bien évidemment d’une bonne initiative, mais il convient de lire aussi la dernière phrase de l’exposé sommaire : « Ces sommes [seront] issues d’une minoration à due concurrence des crédits de l’action no 1 : « Anticipation et accompagnement des conséquences des mutations économiques sur l’emploi » du programme 103 : « Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi » ».
C’est donc directement sur le budget de l’aide de l’État aux maisons de l’emploi que l’argent sera récupéré ! S’il s’agit d’une bonne chose que d’aider les entreprises adaptées, c’en est une très mauvaise que de diminuer les capacités financières des maisons de l’emploi. Vous prenez dans une poche pour remplir l’autre : il y aura comme un sentiment d’amertume.
L’amendement no 257 est adopté.
La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement no 281 .
Cet amendement tend à récupérer 1 million d’euros dans le cadre des dispositifs de soutien à l’insertion par l’activité économique, l’IAE.
Cela fait plusieurs fois, monsieur le ministre, que je vous interroge, vous personnellement ou vos services, sur une mesure que, pour la plupart d’entre nous, nous soutenons : la réforme de l’IAE et les dispositifs qui en découlent, notamment la nouvelle aide au poste et le CDDI, contrat à durée déterminée d’insertion, qui apporte une plus-value à celles et ceux qui peuvent en bénéficier. Cette aide au poste comprend un volet forfaitaire de 19 500 euros et un volet modulable, soumis à certains critères. Pour que les structures intéressées puissent prétendre à ces 2, 5 ou 10 % supplémentaires, un certain nombre de DIRECCTE font valoir des obligations de résultat – probablement sur directive du ministère. Cela nous inquiète, car, dans le cadre de l’application du CDDI, plusieurs structures se trouvent en difficulté financière : elles subissent des pertes sèches et certaines d’entre elles – dont je tiens la liste à votre disposition – pourraient être contraintes à fermer à la fin de l’année, l’application du seul forfait de 19 500 euros ne leur permettant pas de couvrir la totalité de leurs frais. Il faudrait pour cela qu’elles puissent également prétendre à la part modulable ; or, vu les critères imposés par les DIRECCTE, elles risquent de ne jamais obtenir les moyens qui leur sont dus. Le transfert de crédits que nous proposons permettrait de remédier à cette situation.
Je souhaite réaffirmer l’importance de l’IAE pour le modèle d’économie responsable dont nous avons besoin. Le secteur a obtenu une revalorisation de 25 millions en 2014 et il bénéficiera encore en 2015 de plus 18 millions, grâce à la mise en oeuvre de la nouvelle modalité de cofinancement élaborée par le ministère et le Conseil national de l’insertion par l’activité économique, qui vise à harmoniser le financement apporté aux différentes structures tout en intéressant ces dernières via une aide au poste modulée.
Par rapport à ces enjeux, votre amendement, qui porte sur 1 million d’euros, serait presque un amendement d’appel ! Il reflète surtout l’inquiétude partagée par plusieurs organismes que certaines exonérations ne soient plus accordées du fait d’un recours à des CDDI plutôt qu’à des contrats aidés. J’en avais été informé dans le cadre de la préparation de mon rapport et nous avions été sollicités pour apporter cette amélioration financière.
Je précise que l’article 20 du projet de loi de financement de la sécurité sociale a prévu le maintien des exonérations pour les ateliers et chantiers d’insertion dans le cadre des CDDI. Il n’existe donc aucun surcoût que l’aide au poste ne couvre pas totalement. Il me semble par conséquent préférable de rester dans le cadre de l’effort proposé par le Gouvernement, à savoir une revalorisation de 18 millions d’euros ; votre amendement, même s’il ne porte pas sur une somme importante, n’a pas lieu d’être, si ce n’est pour confirmer le soutien apporté à l’IAE. Compte tenu de la difficulté de l’exercice budgétaire, la commission a émis un avis défavorable.
Je ne reprendrai pas l’argumentaire du rapporteur. Je comprends fort bien votre souci, monsieur Cavard, et je souhaite vous rassurer : je visitais l’autre soir encore une entreprise d’insertion, et des représentants d’ateliers et chantiers d’insertion étaient présents ; sachez que je leur porte la plus grande attention. Ils sont très attentifs à la réforme qui a été mise en place et pensent qu’elle va dans le bon sens – mais cela, vous le savez déjà.
J’ai toutefois vu poindre une critique, à savoir que l’aide au poste en fonction du profil pourrait éveiller la tentation de jouer sur le quantitatif plutôt que sur le qualitatif ; il faut aussi prendre en compte l’effort substantiel fourni par certaines structures en accueillant des personnes encore plus en difficulté que d’autres et en les plaçant avec efficacité. Mais il s’agit d’une part minime.
Comme cela a été dit parle rapporteur, pour ce qui est des surcoûts, le dispositif est garanti par l’article 20 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, et avec les 18 millions de cette année, on en sera à une augmentation de plus de 40 millions d’euros de la dotation : voilà bien la preuve que l’insertion par l’activité économique est une des priorités du Gouvernement. Aussi vous demanderai-je de retirer votre amendement – même si j’en comprend les motivations.
J’entends vos arguments, monsieur le ministre, et je vais par conséquent retirer mon amendement. Toutefois, je tiens à votre disposition la liste des entreprises en difficulté et j’aimerais que nous puissions travailler ensemble sur leur cas. Je veux bien croire que, dans la plupart des départements de France, les structures soient bénéficiaires du nouveau dispositif, mais un certain nombre d’entre elles – je ne rentrerai pas dans les détails ce soir –, ont subi un « choc » en raison de la façon dont il a été mis en place au niveau local. Je me propose donc de me rapprocher de vos services afin de vous informer de la situation de ces entreprises et d’étudier comment, avec les moyens existants, les DIRECCTE pourraient leur apporter une réponse.
L’amendement no 281 est retiré.
Je suis saisie de quatre amendements, nos 302 , 256 , 460 et 461 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 302 et 256 sont identiques.
Les amendements nos 460 et 461 sont également identiques.
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l’amendement no 302 de la commission des finances.
Serait-il possible, madame la présidente, de demander au président Le Roux de défendre l’amendement no 461 . Si celui-ci est adopté, cela entraînera le retrait des amendements précédents.
L’amendement du président Le Roux est plus loin dans la liste des amendements, deux autres doivent être examinés auparavant.
Je n’en doute pas, mais il y a plusieurs amendements en discussion commune. Je propose donc qu’ils soient tous examinés les uns après les autres, puisqu’il est prévu que des amendements soient examinés avant l’amendement no 461 , même si je souhaite être agréable au président Le Roux.
Madame la rapporteure pour avis, soutenez-vous l’amendement no 256 ou bien est-il défendu ? Ou laissez-vous le président Le Roux le défendre ?
Cet amendement, adopté par la commission des affaires sociales, est identique à l’amendement no 302 de la commission des finances. Il a pour objet de majorer de 480 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 200 millions d’euros en crédits de paiement les montants dédiés aux contrats aidés. Il s’agit de financer de 50 000 contrats aidés supplémentaires en 2015 : 35 000 contrats d’accompagnement vers l’emploi, ou CAE, et 15 000 emplois d’avenir. Un reliquat de 15 millions d’euros est affecté à l’accompagnement des missions locales chargées de prescrire les emplois d’avenir.
Il me semble que cet amendement pourrait être retiré au profit des amendements identiques nos 460 , de la commission des finances, et 461, présenté par le président Le Roux au nom du groupe socialiste.
Monsieur le rapporteur spécial, devons-nous considérer que l’amendement no 460 est défendu ?
Le Gouvernement a communiqué, il y a quelques jours encore, sur la réussite des emplois d’avenir, en cette période par ailleurs difficile pour l’emploi.
Traditionnellement, quand des besoins se font jour en cours d’année, il est possible de procéder à des abondements. Au sein du groupe socialiste, nous avons trouvé que nous devions, dès ce projet de loi de finances initial pour l’année 2015, relever d’emblée le nombre d’emplois aidés et d’emplois d’avenir par rapport aux prévisions du projet de loi de finances. Mme Iborra et nous défendons la même proposition, M. Castaner ne l’a pas fait mais son amendement allait dans le même sens : il s’agit de majorer la programmation des emplois aidés à raison de 30 000 contrats supplémentaires pour les contrats d’accompagnement vers l’emploi et de 15 000 contrats supplémentaires pour les emplois d’avenir. Dans le même temps, 5 000 emplois supplémentaires pourraient être prévus dans le cadre du service civique.
Je sais, monsieur le ministre, que vous en discuterez avec votre collègue M. Kanner. Nous souhaitons que ces efforts puissent être orientés, demain, vers ceux qui rencontrent les plus grandes difficultés dans leur recherche d’emploi, car ce dispositif peut aussi permettre l’insertion, la constitution de réseaux et l’intégration dans la vie active.
Quant au financement, Mme Iborra vient d’en indiquer les grandes lignes. Je sollicite bien entendu M. le ministre pour faire en sorte que cette mesure ne soit finalement pas gagée sur les contrats de génération, comme le propose l’amendement du groupe socialiste. Bien sûr, contrats d’avenir et contrats aidés sont utiles pour l’emploi, mais les montants évoqués ne peuvent bien entendu pas être pris sur les contrats de génération. Même si ce dispositif connaît une réussite moindre que ceux dont nous parlons, il mérite d’être poursuivi et amplifié.
J’imagine, monsieur le rapporteur spécial, que la commission des finances est favorable à l’amendement no 461 ?
Oui, madame la présidente, mais précisons que les amendements nos 460 et 461 n’ont pas été discutés en commission. En commission, les montants avancés étaient de 200 millions d’euros en crédits de paiement, et portaient donc sur 35 000 CAE et 15 000 emplois d’avenir. L’élément nouveau, que le président Le Roux vient d’évoquer, c’est cet engagement qui porterait sur 5 000 emplois liés au service civique.
Il est important de préciser qu’il ne s’agit pas forcément de faire du chiffre, mais, puisque les députés de l’opposition évoquaient une baisse du budget, j’ai en tête le fait que lorsqu’ils sont arrivés au pouvoir en 2002 le budget du travail et de l’emploi était de 16,6 milliards d’euros et qu’ils l’ont réduit à 9,7 milliards d’euros, alors même que le nombre de chômeur progressait d’un million ! Cela dit, il ne s’agit pas forcément de faire du chiffre, il s’agit notamment de se donner les moyens de cette ambition forte qui est de maîtriser le chômage des jeunes et même de consolider ce qui est une réussite de ce gouvernement : la baisse du chômage des jeunes, dans ce pays, depuis deux ans.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Je crois particulièrement important que nous nous mobilisions sur ce sujet, et je sais que l’opposition reste très attachée aux emplois aidés, puisqu’elle détient le record historique du nombre d’emplois aidés, atteint au cours du premier semestre de l’année 2012. Cherchez l’erreur ! Il est vrai que cela avait permis une mobilisation particulièrement forte. À ce moment-là, l’opposition aimait particulièrement les emplois aidés.
Pour toutes ces raisons, je salue que la mobilisation proposée dans le cadre de l’amendement no 461 , qui prévoit aussi que 15 millions d’euros soient affectés aux missions locales. C’est important de le préciser parce que ça permettra de faire tomber toute une série d’amendements que nous aborderons tout à l’heure. Elle est de nature à permettre d’atteindre les objectifs fixés pour l’emploi des jeunes et aussi à garantir aux missions locales la poursuite de leur travail d’accompagnement, en cette matière et plus globalement, sur nos territoires, au quotidien. J’ai effectivement cru entendre tout à l’heure que nous étions tous très attachés à la politique territoriale, et les missions locales en sont un acteur majeur.
Je remercie le rapporteur de ses explications.
Monsieur le président Le Roux, dans un contexte économique difficile, il faut faire un effort important en faveur des politiques d’aides à l’emploi, par la mobilisation des contrats aidés. C’est un premier constat.
À cet égard, je l’ai rappelé tout à l’heure, le projet de loi de finances pour l’année 2015 prévoit près de 3 milliards d’euros de crédit de paiement pour les emplois aidés, ce qui n’est pas rien. C’est un niveau proche de celui de l’an dernier, qui était de 3,2 milliards d’euros en loi de finances initiale.
En termes de volume, les prescriptions prévues en 2015, 400 000, sont en léger recul, c’est vrai, par rapport à la loi de finances pour 2014. Toutefois, il faut le rappeler, la programmation de contrats du secteur marchand augmente. Elle passe de 40 000 à 80 000 et celle des emplois d’avenir est stable par rapport à la loi de finances initiale pour 2014, mais en baisse par rapport aux prescriptions en 2014.
C’est là qu’il y a toujours un jeu entre le flux et le stock. Le stock de jeunes en emplois d’avenir, à la fin de l’année 2015, est de 150 000 ; je l’ai annoncé l’autre jour. La qualité, je voudrais le dire également ici, y compris à l’opposition, la qualité des contrats aidés est une préoccupation constante. On ne fait pas du volume en rétrécissant la durée des emplois aidés dans l’ensemble du secteur non-marchand hors ateliers et chantiers d’insertion, puisqu’elle était de 6,6 mois – disons 6 mois et demi – sur l’ensemble en 2012. À la fin du mois de septembre, elle était de 11,3 mois. Voyez donc que l’on a fait des contrats plus longs, et la durée permet l’insertion dans le monde du travail. Nous répondons ainsi à une demande, une demande qui datait même du Grenelle de l’insertion, si vous voyez ce que je veux dire.
Le ciblage sur les publics les plus fragiles reste une priorité. Ainsi 82 % des jeunes qui sont en emploi d’avenir n’ont pas le baccalauréat. Et, je le redis, je m’inscris en faux contre les articles qu’on a pu lire ces jours-ci. Une étude très précise de la DARES, que je vous communiquerai, montre quelle est la portée réelle de ces emplois d’avenir, son effet sur l’insertion de ces jeunes qui étaient loin de tout dans l’emploi, son effet grâce aux formations qu’ils reçoivent, puisque 78 % des formations ont été réalisées ou sont en voie de réalisation.
Je comprends votre préoccupation quant aux volumes de contrats aidés, et, dans un contexte, monsieur le président Le Roux, de persistance d’un chômage élevé, que personne ne peut nier, je ne peux qu’accueillir favorablement cette initiative parlementaire, je l’ai dit l’autre jour, qui vise à majorer le nombre des emplois aidés dans le secteur non marchand de 30 000 et celui des emplois d’avenir de 15 000. Votre initiative permettra ainsi, en 2015, une programmation de 300 000 CAE et de 65 000 emplois d’avenir. Le Gouvernement accueille par ailleurs favorablement votre initiative relative au service civique. C’est aussi un outil essentiel d’insertion des jeunes. Et, pour permettre d’assurer un accompagnement des jeunes en emploi d’avenir, il est également tout à fait légitime de prévoir concomitamment l’augmentation des crédits d’accompagnement versés aux missions locales, à hauteur de 15 millions d’euros.
J’en viens, dernier élément, au gage. Vous gagez les crédits supplémentaires pour les emplois aidés sur les crédits du contrat de génération, en supprimant presque totalement le financement de ce dispositif. Le Gouvernement ne peut l’accepter, et il apportera une réponse dans le courant de la discussion budgétaire.
D’abord, je trouve que la formule « initiative du groupe socialiste » est un peu dédaigneuse, même si je trouve l’initiative elle-même courageuse et volontariste. La majorité joue son rôle de majorité, et c’est bien. Il est vrai qu’il est assez rare, dans ce débat budgétaire, d’examiner un amendement aussi important, qui témoigne d’un tel volontarisme, un amendement d’une majorité qui montre plus de volontarisme que le gouvernement qu’elle soutient. C’est un peu inquiétant mais cela répond à ce que je disais dans mon intervention de tout à l’heure.
En ce qui concerne les emplois aidés, le stop-and-go n’est pas bon du tout, et il est très bien de vouloir mettre l’accent sur les emplois aidés. Cependant, le Gouvernement, l’administration, les préfets sont les mieux à même de savoir s’il y a un besoin. Vous l’avez très bien dit, monsieur le président Le Roux, en présentant votre amendement : c’est souvent le Gouvernement qui ouvre des lignes de crédits au fil de l’année s’il y a des besoins. C’est pourquoi je suis un peu mal à l’aise par rapport à cet amendement. C’est plutôt au Gouvernement de faire cela, ou, d’ailleurs, de ne pas le faire ; certaines années, au cours de la législature précédente, je vous l’accorde, il ne l’a pas fait.
Ce que je voudrais vous dire, monsieur le ministre, comme si j’étais membre du groupe socialiste, c’est que le Gouvernement n’est là que parce que la majorité lui a accordé sa confiance. Ce n’est donc pas simplement une initiative du groupe socialiste, c’est un acte de volontarisme du groupe majoritaire, et je trouve cela très bien. J’aurais aimé que ce groupe majoritaire fasse montre de plus de volontarisme sur les allocations familiales. Je l’ai dit à Mme Clergeau, qui aurait dû voter notre amendement de suppression, ce qui l’aurait rendue beaucoup plus forte pour se battre avec le Gouvernement sur ce sujet.
En tout cas, c’est un signe extrêmement favorable.
Une question se pose, monsieur le ministre, et vous n’y avez pas répondu. Il s’agit quand même de 480 millions d’euros ; ce n’est pas une paille. Que vous ne sachiez pas sur quoi va être gagée cette mesure, c’est quand même un peu inquiétant. Voilà un vrai sujet. Pourrait-on quand même avoir des éclaircissements sur ce gage avant la fin de l’examen des crédits de la mission ? Nous sommes déjà inquiets à propos des maisons de l’emploi. Si, en plus, il faut trouver 480 millions d’euros, ça va être compliqué.
Bien évidemment, nous soutiendrons cet amendement, puisque nous considérons que les emplois aidés sont non pas des emplois de seconde catégorie mais de vrais emplois. On peut les appeler comme on veut, certains, dans certaines régions, avaient même inventé, pour d’autres types d’emploi, la formule « emploi tremplin », puisqu’il s’agissait de permettre à des publics cibles d’acquérir un certain nombre de compétences nouvelles.
Je voudrais cependant interroger celles et ceux qui ont déposé ces amendements, particulièrement notre collègue président Le Roux, puisqu’il a présenté l’amendement no 461 . Pour rendre accessibles ces emplois aidés, il faut aussi, en face, des employeurs. Or, dans le secteur non-marchand, dont on a beaucoup parlé ces derniers temps – je pense notamment au secteur de l’économie sociale, dont 70 % des structures sont associatives –, la question du coût est liée à celle des moyens donnés aux associations pour qu’elles puissent embaucher, y compris dans le cadre des contrats aidés, et jouer ce que j’ai envie d’appeler leur rôle citoyen, pour qu’elles puissent former des gens qui pourront évidemment, ensuite, trouver d’autres types d’emploi. J’aperçois d’ailleurs ma collègue Françoise Dumas, rapporteure de cette commission d’enquête sur les associations, je crois qu’elle rencontre tous les jours des acteurs pour essayer de voir quels moyens qui peuvent être donnés à ces structures. La question que nous évoquons est donc liée à celle de l’économie sociale.
L’autre dimension, c’est la question de la formation. Je parle devant des gens qui le savent depuis longtemps : il y a eu des dispositifs de contrats aidés dans lesquels l’État prenait en charge une partie du financement de la formation. Ce n’est plus le cas en ce qui concerne les CAE – pour les emplois d’avenir, c’est autre chose, il conserve évidemment cette obligation. Certaines des régions vers lesquelles ont s’est parfois tourné ont opposé un refus, partant du principe que ça relevait non pas de leurs compétences mais de la compétence de l’État. Puisque cet amendement no 461 , que nous approuvons, a pour objet de rouvrir les enveloppes, saisissons l’occasion d’y réfléchir, notamment en vue de la réforme territoriale. Faisons en sorte que cela puisse entrer dans le champ des compétences des régions, faisons en sorte qu’elles puissent participer aux dispositifs dont nous débattons ici et financer une partie ou la totalité des formations de ces contrats.
Je partage peu l’optimisme de mon collègue de l’UDI qui trouve heureux que le groupe socialiste prenne cette initiative.
Oui, pourquoi pas ? Après tout, si M. Le Roux fait désormais partie des frondeurs, c’est une nouvelle, bonne ou mauvaise, je n’en sais rien – plutôt bonne pour nous. M. Le Roux a bien le droit de fronder comme les autres.
Cela dit, vous avez eu du mal à cacher votre enthousiasme, M. le ministre : à la seule question vraiment pertinente qui vous a été posée, vous avez répondu : « on verra plus tard ». Il s’agit tout de même de 480 millions d’euros ! Vous les avez balayés de la main, d’un geste un peu exaspéré adressé à M. Le Roux – ce qui nous a presque gênés.
À vrai dire, je vous comprends, monsieur le ministre : nous avons abondamment entendu parler de vous ces dernières semaines, entre les interviews qui ont été publiées, et celles qui ont failli l’être mais ne l’ont pas été…
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.
On s’y perd un peu, quand on veut connaître la stratégie du Gouvernement !
Vous avez créé, en effet, les 150 000 emplois d’avenir promis par François Hollande au cours de la campagne présidentielle, mais à quel coût ? 1,4 milliard d’euros : ce n’est pas rien ! Il faut rappeler que 75 % de ces emplois sont à la charge du contribuable.
Ce sont des emplois extrêmement chers !
Et 7 % de ces contrats seulement sont accompagnés d’une formation qualifiante.
Lisez plutôt la presse, et vous verrez !
Ce sont essentiellement des associations qui ont profité de ces emplois d’avenir ; or on sait qu’elles vont rencontrer de grandes difficultés à cause de la diminution des subventions publiques. Ce sont ensuite les collectivités territoriales qui y ont recouru, à hauteur de 30 %, or vous êtes en train de les mettre en pièces. La plupart des contrats durent d’un an à trois ans.
Tout cela coûte très cher, et M. Le Roux propose d’en faire un peu plus. Je comprends, monsieur le ministre, que vous soyez étonné par cette proposition des frondeurs, emmenés ce soir par M. Le Roux.
Vous savez que les associations et les collectivités territoriales peuvent conclure des CAE – contrats d’accompagnement vers l’emploi. J’appelle votre attention sur le fait qu’avec la baisse des dotations des collectivités territoriales de 3,7 milliards d’euros, cela sera très compliqué pour elles d’embaucher. Vous souhaitez augmenter les volumes : on a vu sur le terrain que les préfets demandent aux missions locales ou aux maisons de l’emploi de se mobiliser pour faire du chiffre. Ce n’est pas si simple : certes, l’État met la main à la poche, mais les collectivités territoriales et les associations devront aussi le faire. Est-ce réaliste ?
Par ailleurs, le bilan des emplois d’avenir est plus mitigé que celui que vous avez présenté, monsieur le ministre. Seuls 41 % des jeunes en emploi d’avenir sont ce que l’on appelle des « décrocheurs », alors que ces décrocheurs devraient être la cible prioritaire. J’ai fait partie de la mission d’information sur la mise en oeuvre de la loi portant création des emplois d’avenir, présidée par Jean-Marc Germain : au cours des travaux de cette mission, nous avons bien précisé que les emplois d’avenir sont destinés aux jeunes peu ou pas qualifiés, y compris dans les quartiers défavorisés, et qu’ils doivent, le plus possible, être assortis d’une formation qualifiante. Dans les faits, seuls 7 % des jeunes en emploi d’avenir suivent une formation qualifiante. De plus, 38 % des jeunes ayant bénéficié d’un emploi d’avenir sont de nouveau au chômage six mois après la fin de cet emploi d’avenir. Les emplois d’avenir ne sont donc pas la panacée que vous décrivez !
Vous avez décidé de mettre le paquet sur les emplois d’avenir, mais cela se fera au détriment de l’apprentissage et de l’alternance. Vous allez communiquer massivement sur les emplois aidés, et moins sur l’apprentissage et l’alternance. Quant au service civique, qui est une excellente mesure, un très bon dispositif, ce n’est pas un emploi : c’est une aide à l’insertion professionnelle des jeunes. Par cet amendement, vous proposez d’en augmenter le nombre : je croyais pourtant que les services civiques relevaient de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Est-ce à dire que les 5 000 services civiques supplémentaires que vous proposez, monsieur le président Le Roux, seront aussi financés par l’enveloppe supplémentaire de 175 millions d’euros prévue par votre amendement ? Ou bien leur coût sera-t-il imputé à la mission « Sport, jeunesse et vie associative » ?
Je trouve l’intervention de M. Cavard particulièrement juste. Il a évoqué un problème important : le soutien à la vie associative. Surtout, il a estimé que cette question est loin d’être anodine en matière d’emploi. On dit, traditionnellement, que ce secteur représente un formidable vivier d’emploi. Au-delà de ce lieu commun, il est vrai que dans le monde associatif, toute une génération arrive à la fin de sa carrière. Il s’agit de toute cette génération d’animateurs formés dans les années 1970, qui doit à présent être relayée sur le terrain. Les emplois d’avenir peuvent y participer. Le monde associatif a besoin de professionnalisation : il faut pour cela de la formation. C’est une question essentielle, qui rend nécessaire un investissement de l’État et des régions. Il faut aussi, si le FONJEP – Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire – veut s’investir sur cette question, qu’on ne le prive pas des moyens qui lui permettraient d’assumer une nouvelle responsabilité dans ce secteur.
Je souhaite que le Gouvernement se rende compte que toute une génération de travailleurs associatifs va partir, et aura besoin d’être remplacée. Le dispositif que nous allons adopter peut aider à ce remplacement, mais ne suffira pas. Il faudra donc, en plus de cela, veiller aux moyens de la vie associative, et à la question de la formation. Vous avez fort bien posé ce problème, monsieur Cavard.
Je profite de l’occasion pour revenir sur les emplois d’avenir. Un article a paru ce matin dans Le Figaro à ce sujet ; cet article est très orienté, il confine même à la malhonnêteté intellectuelle.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
J’assume ce point de vue : je l’ai dit à la journaliste qui a écrit l’article. Je vous invite à lire la note de la DARES dont M. le ministre a donné quelques éléments tout à l’heure. Cette étude, menée avec le recul nécessaire, rappelle que 155 000 emplois d’avenirs ont été signés. À la fin du mois de septembre dernier, 113 000 jeunes étaient en emploi d’avenir, dont 23 000 dans le secteur marchand. Au départ, il était prévu que la part du secteur marchand serait limitée à 10 % ; ce chiffre a été augmenté par la suite, ce qui s’est avéré un succès. Dans ce cas-là, monsieur Tian, les emplois d’avenir ne sont pris en charge par l’État qu’à hauteur de 35 %. 83 000 emplois d’avenir ont été conclus dans le secteur non marchand. Je rappelle également que 7 000 personnes sont concernées par les emplois d’avenir professeur.
Tous ces emplois sont signés pour une durée relativement longue : ils peuvent être signés en CDI, et beaucoup d’entre eux sont signés pour une durée de trois ans.
Dans la fonction publique, ils ne peuvent être conclus que pour une année renouvelable. La moyenne s’établit d’ores et déjà à 31 mois pour le secteur marchand, et à 25 mois pour le secteur non marchand. Et 90 % de jeunes concernés sont employés à temps complet, puisque les emplois d’avenir ne peuvent être à temps partiel que par dérogation.
Par ailleurs, tous les jeunes en emploi d’avenir ont signé une convention de formation : c’est obligatoire. 36 % d’entre eux s’orientent vers une formation qualifiante. Ce n’est pas nécessairement un problème : si cette proportion était de 100 %, vous nous diriez que c’est en concurrence directe avec les formations en alternance !
Nous ne dirions pas cela, au contraire, nous nous réjouirions de cette réussite !
Ce n’est pas le choix que nous avons fait. Malgré cela, un tiers des formations d’adaptation et d’accompagnement dont bénéficient les jeunes en emploi d’avenir sont des formations qualifiantes.
En outre, le taux de rupture des emplois d’avenir est beaucoup plus faible que pour les autres contrats aidés : c’est un indicateur important. Ce taux est de 8 % dans le secteur non marchand, ce qui est très faible ; il est un peu plus important dans le secteur marchand.
Je me souviens des débats qui ont eu lieu au moment de l’adoption de ce dispositif, des critiques qui avaient alors été formulées : je voudrais les réfuter. D’abord, j’insiste sur le fait que ces emplois d’avenir sont de vrais emplois ; les jeunes concernés le vivent comme cela. Des études sont menées pour connaître le point de vue des jeunes eux-mêmes : il est très positif. Ensuite, contrairement à ce que vous disiez, madame Le Callennec, ce dispositif a touché sa cible, puisque 83 % des jeunes en emploi d’avenir n’ont pas de diplôme, ou seulement un diplôme inférieur au baccalauréat. Et 36 % d’entre eux se trouvent dans les zones prioritaires, à savoir les départements d’outre-mer, les zones urbaines sensibles ou les zones de revitalisation rurales.
Cela correspond bien aux objectifs que nous nous étions fixés.
Pour terminer, j’espère que nous voterons l’amendement présenté par M. Le Roux, car il permettra de poursuivre ce dispositif, ce qui est une excellente chose. Le Gouvernement avait prévu 50 000 emplois d’avenir supplémentaires pour 2015 ; nous allons porter ce chiffre à 65 000. C’est un peu moins que le nombre d’emplois d’avenir créés cette année, mais il y a un effet de stock.
Certains ont osé déplorer le coût de ces emplois pour les jeunes, mais consacrer 1,4 milliard d’euros pour faire progresser le taux d’emploi des jeunes, et faire reculer le chômage, c’est une bonne chose ! J’ai encore en tête les exonérations sur les heures supplémentaires, qui ont coûté 4,5 milliards d’euros, sans contribuer à créer des emplois !
Plusieurs questions ont été posées à propos des 5 000 services civiques supplémentaires, auxquels sera consacrée une enveloppe de 25 millions d’euros. Pourquoi ne sont-ils créés que maintenant ? Parce qu’ils découlent d’une annonce faite par le Président de la République le 18 septembre 2014. Il fallait que cette annonce fasse son chemin : c’est pourquoi cette enveloppe n’a pas été prévue dans le texte initial. Ces 25 millions d’euros de crédits seront fléchés sur la mission « Sport, jeunesse et vie associative » et feront l’objet d’un abondement sur la dotation du ministère concerné. Mais ils sont inclus dans le dispositif global proposé par cet amendement, qui vise à accompagner 50 000 jeunes.
L’amendement no 461 est adopté.
Les crédits de la mission « Travail et emploi », modifiés, sont adoptés.
J’appelle maintenant l’article 62 du projet de loi, rattaché à cette mission.
La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir l’amendement no 275 .
Cet amendement vise à supprimer l’article.
On ne prend pas en compte les efforts réalisés par l’AGEFIPH – Association de gestion pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées – en termes de placement. Le nombre de placements durables, c’est-à-dire supérieurs à un an, a progressé de 58 % en deux ans. 4 700 contrats d’apprentissage ont bénéficié de l’aide de l’AGEFIPH en 2013, soit 20 % de plus qu’en 2012. La progression attendue pour cette année est de 28 %, alors qu’au niveau national, l’apprentissage subit une baisse de l’ordre de 10 % à 20 %. 56 000 actions de formation ont été financées par l’AGEFIPH, dont 21 000 formations qualifiantes. Au total, l’AGEFIPH remplit largement son rôle. Ses résultats sont exemplaires, et vous voulez prélever 29 millions d’euros sur son budget !
Je n’ai pas assisté au début de cette discussion, à cause d’un problème de train. Vous m’excuserez donc de ne pas avoir bien compris la manoeuvre que vous proposez.
J’ai l’impression que cet article procède à un double tour de passe-passe : d’une part, 29 millions d’euros sont pris à l’AGEFIPH, d’autre part, cette somme n’est pas entièrement consacrée aux emplois aidés pour les personnes handicapées ! Pourquoi ce double prélèvement – car c’est bien de cela qu’il s’agit – aux dépens des personnes handicapées ? Au moment où l’on demande aux collectivités de faire des efforts en matière d’aménagement de leurs établissements, pourquoi leur prendre de l’argent susceptible d’aider des personnes handicapées à se former ? Il y a là une contradiction importante.
Nous avons déjà longuement discuté de cela tout à l’heure. Je me bornerai donc à rappeler l’avis de la commission : défavorable.
L’amendement no 275 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 318 rectifié et 325 rectifié .
La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement no 318 rectifié .
Cet amendement est identique à l’amendement suivant, no 325. Simplement, ils n’ont pas la même provenance. Notre collègue Isabelle Le Callennec a évoqué tout à l’heure le groupe d’études sur l’intégration des personnes handicapées, qui est transpartisan. L’ensemble de ce groupe soutient ces deux amendements identiques.
Nous avons eu ce débat tout à l’heure, monsieur le ministre : cet amendement vise à garantir que les fonds prélevés à l’AGEFIPH soient bien réservés aux personnes en situation de handicap. J’ai entendu tout à l’heure M. le rapporteur spécial expliquer qu’il serait difficile, du point de vue administratif et légal, de flécher ces fonds. Il n’en serait pas moins dommage que l’argent pris à l’AGEFIPH ne serve pas à faire profiter les personnes handicapées d’un certain nombre de ces emplois aidés.
Cet amendement ne fait donc que prolonger les discussions que nous avons eues au début de cette séance.
La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour soutenir l’amendement no 325 rectifié .
Je m’exprime au nom du groupe d’étude sur l’intégration des personnes handicapées. Mme Pompili s’excuse de ne pouvoir être présente : elle souhaitait qu’un membre du groupe d’études présente cet amendement, qui rejoint celui de mes deux collègues.
Monsieur le ministre, vous avez accepté tout à l’heure un amendement dont le coût s’élève à 30 millions d’euros. Il y a encore quelques instants, un amendement représentant un coût de 175 millions a été adopté. Plus tôt, un amendement portant sur l’aide au poste a également été adopté – avec notre soutien – pour un coût de 7 millions d’euros. Vous avez levé tous les gages.
Je n’ai qu’une question à vous poser : où comptez-vous trouver les financements de tous ces dispositifs ? Je répète que nous sommes inquiets quant à ces 29 millions d’euros, dont nous avons bien compris qu’ils ne seront pas tous destinés à l’emploi des personnes handicapées. Quelques millions se perdront forcément : certes, ils seront consacrés à des emplois aidés, mais pas pour des personnes handicapées – sauf à ce que vous nous prouviez le contraire.
Je ne reviendrai pas sur le fond de la discussion. Je rappelle d’abord que les personnes handicapées représentent 9,2 % des bénéficiaires des différents contrats aidés. Ce sont les chiffres de l’année 2013, car nous n’avons pas ceux de 2014.
Ensuite, s’agissant des inquiétudes sur la possible baisse des fonds, nous avons donné tout à l’heure les indications permettant de vous rassurer quant à la pérennité des deux structures, en particulier de l’AGEFIPH. Il ne faut pas être inquiets, mais il ne faut pas négliger l’importance du travail de l’AGEFIPH et les garanties que le Gouvernement doit lui donner.
Monsieur Cavard, même s’il est techniquement impossible de prévoir une affectation, le Gouvernement pourrait nous présenter un état précis des moyens mobilisés à travers l’ensemble des dispositifs du ministère pour accompagner les travailleurs handicapés. Je pense que les montants présentés – plus de 630 millions d’euros – dépasseront très largement ce que nous évoquions. Sans avoir à prévoir une affectation, cela devrait garantir que les crédits du ministère profitent largement aux travailleurs handicapés, et ce n’est que justice. Je pense que le Gouvernement pourra produire assez rapidement ce document sans qu’il soit nécessaire de conditionner notre vote.
M. Cavard et Mme Le Callennec souhaitent vraiment avoir l’assurance que la contribution de l’AGEFIPH au financement des emplois aidés soit bien utilisée au bénéfice des personnes handicapées. Je vous rassure à nouveau : la contribution de l’AGEFIPH ne représente qu’une participation à l’effort réalisé par l’État sur les emplois aidés pour les travailleurs handicapés.
Ainsi, en 2013, ont été prescrits au bénéfice des travailleurs handicapés 11 % des CAE, 8 % des CIE et 3 % des emplois d’avenir. Le rapporteur a demandé à l’instant un état précis, dont je souhaite effectivement qu’il soit communiqué aux parlementaires. Cela représente plus de 50 000 emplois en contrats aidés, pour un coût de plus de 180 millions d’euros. Nous sommes loin des 29 millions d’euros, qui représentent environ 10 000 contrats ! De plus, ces taux sont en progression selon les données disponibles de l’année 2014 ; ainsi, 12 % des bénéficiaires de CAE sont des travailleurs handicapés. Je vous rassure : l’augmentation du nombre des contrats aidés marchands de 40 000 en 2014 à 80 000 en 2015 va également participer de cet objectif.
Aussi, pourquoi ne pas flécher le financement des contrats vers les financeurs ? Vous le comprendrez aisément, monsieur le député, cela complexifierait le système de gestion des emplois aidés par l’Agence de services et de paiement – l’ASP –, qui serait contrainte de développer des circuits de gestion, dont le coût n’aurait pas d’effet réel sur la politique en faveur des travailleurs handicapés. J’indique à nouveau que je prends l’engagement de vous communiquer un état précis et vous demande de bien vouloir retirer vos amendements. À défaut, j’y serai défavorable.
J’ai bien entendu les arguments du ministre et du rapporteur spécial, ainsi que les garanties répétées sur les personnes en situation de handicap. Pour ma part, je retire mon amendement, mais je ne peux préjuger du retrait de l’amendement suivant, présenté au nom du groupe d’études.
J’ai entendu votre engagement, monsieur le ministre, à fournir des documents aux parlementaires sur l’ensemble des dispositifs. Mais, au vu du prélèvement de 29 millions d’euros sur le budget de l’AGEFIPH et sur celui du Fonds d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique – le FIPHFP –, qui fait l’objet de l’amendement no 453 , il serait aussi intéressant de nous fournir d’ici à la fin de l’année 2015 un bilan sur l’ensemble de ces dispositifs. Cela achèvera sûrement de nous rassurer sur leur utilisation au bénéfice des personnes qui y avaient droit !
L’amendement no 318 rectifié est retiré.
Sans vouloir être indiscret, monsieur le ministre, je n’ai toujours pas compris s’il s’agissait bien de 10 000 contrats aidés supplémentaires, car ce n’est pas très clair. Mais vous saurez sûrement nous l’expliquer !
Par ailleurs, je comprends tout à fait que vous vouliez dynamiser une réserve dormante de l’AGEFIPH et que le fléchage soit une vue de l’esprit – on peut se faire plaisir ce soir, mais c’est peu envisageable. Il reste que, au vu des propos du rapporteur spécial sur la situation de l’AGEFIPH, le Gouvernement risque de prendre l’habitude de la mettre à contribution au fil des années. Vous avez certainement rassuré la présidente de l’AGEFIPH sur ce point, mais pourriez-vous également rassurer la représentation nationale ?
Vous dites également que 11 % des bénéficiaires de CAE et 3 % des bénéficiaires des emplois d’avenir sont des travailleurs handicapés. Que font le Gouvernement et l’AGEFIPH pour combler la différence entre 3 % et 11 % ?
Je ne peux pas prendre la responsabilité de le retirer au nom de tout le groupe d’études sur le handicap. Sachez qu’on restera extrêmement vigilants, monsieur le ministre.
L’amendement no 325 rectifié n’est pas adopté.
J’ai déjà évoqué ce sujet tout à l’heure. Le présent amendement vise à mettre en place une contribution annuelle de 29 millions d’euros par le FIPHFP au bénéfice de l’ASP, établissement public administratif en charge, pour le compte de l’État, du versement des aides financières aux employeurs au titre des contrats aidés dans le secteur non marchand. Il modifie l’article 62 du projet de loi de finances pour 2015, qui prévoit d’ores et déjà un prélèvement d’un montant équivalent par l’AGEFIPH, à destination également de l’ASP.
Je le répète, ce prélèvement complémentaire sera donc intégralement utilisé pour financer une partie des emplois aidés à destination des travailleurs handicapés dans le secteur non marchand. Je dis bien une partie, car ce montant représente 10 000 emplois aidés, alors qu’il en existe déjà 50 000. Il ne remet pas en cause le programme d’action du fonds, ce dernier disposant de réserves financières importantes, de l’ordre de 394 millions d’euros.
Je ne peux garantir à M. Richard ce qui se passera l’année prochaine pour l’AGEFIPH, mais toute décision sera prise en concertation avec elle.
La commission ne s’est pas prononcée, mais il s’agit d’un amendement de coordination avec l’amendement no 455 , dont nous avons débattu en début de séance. Avis favorable.
L’amendement no 453 est adopté.
L’article 62, amendé, est adopté.
Nous en venons aux amendements portant article additionnel après l’article 62. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 396 .
Le présent amendement vise à créer une nouvelle aide, qui a déjà été évoquée. Elle est destinée aux entreprises de moins de 250 salariés qui recrutent un ou plusieurs apprentis supplémentaires, comme annoncé lors de la grande conférence sociale et confirmé lors des Assises de l’apprentissage. D’un montant de 1 000 euros par contrat d’apprentissage, elle sera versée aux entreprises pour les contrats signés à partir du 1er juillet 2014, sans aucune autre obligation. Son renouvellement pour les années suivantes est conditionné à la conclusion d’un accord de branche avant le mois de juin 2015.
L’entreprise doit justifier la date de conclusion du contrat d’apprentissage ; il lui suffit de démontrer qu’elle n’a pas employé d’apprentis depuis le 1er janvier. Pour les entreprises de moins de 11 salariés, l’aide au recrutement d’un apprenti supplémentaire sera cumulable avec la prime à l’apprentissage. Son bénéfice sera ouvert à l’expiration du délai de rupture unilatérale des deux premiers mois. Comme la prime d’apprentissage prévue pour les moins de 11 salariés, l’aide au recrutement d’apprentis supplémentaires sera versée par les régions, dans le cadre de leur compétence exclusive en matière d’apprentissage et dans un souci de lisibilité des dispositifs.
Je l’ai confirmé par écrit aux exécutifs des régions, l’État compensera cette charge pesant sur les régions, au vu du nombre de primes effectivement versées chaque année. Le montant de ce dispositif est évalué à 60 millions d’euros et sera pris en charge par une ouverture de crédits sur la mission « Travail et emploi ». Je l’ai dit, à partir de la campagne 2015, le versement de l’aide aux entreprises sera conditionné à la conclusion d’un accord de branche, avec des engagements quantitatifs et qualitatifs en matière de développement de l’apprentissage – je crois que vous y êtes sensibles.
Même s’il s’avère que la plupart des professions relèvent d’une branche professionnelle, un dispositif spécifique pour les entreprises artisanales pourrait être envisagé en s’appuyant sur la Confédération nationale de l’artisanat, qui pourrait recevoir un mandat des fédérations patronales.
Nous l’avons rappelé, l’apprentissage a subi un sort peu enviable ces deux dernières années : une baisse de 8 % des entrées en apprentissage entre 2012 et 2013 et de 14 % depuis le premier semestre de 2014.
Certes, les Assises de l’apprentissage ont eu lieu, monsieur le ministre, mais le 19 septembre seulement. Or, les apprentis font leur rentrée dans les centres d’apprentis des entreprises dès le début du mois de septembre. Il y a donc eu un regrettable retard à l’allumage, qui n’a pas pu être rattrapé.
Pour l’heure, vous fixez des objectifs d’embauche d’apprentis aux entreprises. J’espère qu’elles vont effectivement pouvoir les atteindre car, dans la conjoncture actuelle, il n’est plus aussi facile de recruter des apprentis. Je pense en particulier aux artisans du bâtiment ou au secteur des travaux publics, qui avaient jusqu’à présent une tradition d’embauche des apprentis. Compte tenu de leur situation, il ne sera pas si facile pour ces entreprises d’atteindre les objectifs. Si, il y a deux ans, on n’avait pas condamné l’apprentissage, comme je crains que vous l’ayez fait, on n’en serait peut-être pas arrivé à cette situation.
Vous prévoyez d’allouer 60 millions d’euros à ce dispositif, monsieur le ministre – mais vous ne les avez pas. Là encore, donc, il est assez amusant de constater que vous prévoyez d’inscrire ces crédits dans un futur projet de loi de finances rectificative, puisque vous indiquez vouloir respecter les engagements du Gouvernement concernant la maîtrise des dépenses de l’État. À nouveau, les annonces ne sont pas suivies d’effets concrets. Les 60 millions prévus par cet amendement ne sont pas de la monnaie sonnante et trébuchante inscrite dans le PLF 2015. Il faudra encore attendre.
Or, les régions vont peut-être s’engager sur cette prime. Qui nous dit que l’État compensera ces dépenses, et quand le fera-t-il ?
L’amendement no 396 est adopté.
Cet amendement a pour objet d’autoriser les régions à verser une prime d’apprentissage à des entreprises de moins de 50 salariés pendant une période de trois ans. Le Gouvernement a supprimé les indemnités compensatrices forfaitaires – ICF – pour instaurer une prime à l’apprentissage qui ne concernera que les entreprises de moins de 10 salariés.
À l’heure actuelle, au vu de l’importance du chômage des jeunes, il paraît absolument nécessaire de valoriser la filière de l’apprentissage. Il faut donc ouvrir le champ de cette prime et permettre ainsi aux petites entreprises, et non simplement aux très petites entreprises, d’en bénéficier.
Votre amendement est un peu étrange, car le Gouvernement a dépassé votre attente en élargissant le bénéfice de la prime aux entreprises de moins de 250 salariés. Si nous venions à l’adopter, par mégarde, on réduirait le nombre d’entreprises éligibles. Comme l’a évoqué le ministre à l’instant sans en donner le montant, le Gouvernement a même prévu que la prime soit doublée pour les entreprises de moins de 11 salariés en la portant à 2 000 euros, car l’efficacité de la prime augmente pour les petites entreprises. Cet amendement va dans le bon sens, mais le Gouvernement a largement dépassé ses ambitions. Je suis défavorable à son adoption, car il nous ferait revenir en arrière.
Effectivement, cet amendement semble satisfait. Nous allons donc le retirer.
L’amendement no 91 est retiré.
Avis défavorable, d’autant que je n’ai pas compris pourquoi l’exposé des motifs évoquait un sujet qui n’a rien à voir avec l’article.
En découvrant cet amendement à l’instant, j’ai également constaté une incohérence entre le texte et l’exposé des motifs. Il est donc plus prudent de le retirer.
L’amendement no 92 est retiré.
J’appelle les crédits du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage », inscrits à l’état D.
Les crédits du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage », modifiés, sont adoptés.
Nous abordons l’examen des crédits relatifs à la solidarité, à l’insertion et à l’égalité des chances (no 2260, annexe 45, avis no 2264, tomes VI et VII).
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Madame la présidente, monsieur le vice-président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur spécial, madame, monsieur les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les députés, le Gouvernement fait de la solidarité une priorité. C’est pourquoi les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » sont préservés, afin de répondre aux besoins d’accompagnement des publics vulnérables et de tenir les engagements du Gouvernement, en particulier en matière de lutte contre la pauvreté.
Le programme 304, « Lutte contre la pauvreté », comporte pour 2015 les crédits correspondant au financement du RSA activité, qui revient à l’État. La hausse des crédits affectés au RSA en 2015 correspond en réalité à une opération de simplification des règles dans le cadre du transfert du produit des prélèvements de solidarité de l’État vers la Sécurité sociale. Cette perte de recettes a été compensée par l’apport de crédits budgétaires à hauteur de 1 735,9 millions d’euros et par le transfert d’une fraction de la contribution de solidarité de 1 %, soit 200 millions d’euros.
La réaffectation de ces dépenses au budget de l’État est une bonne nouvelle puisque nous maîtriserons mieux leur évolution. En effet, si nous constatons un manque de financement au regard des besoins, nous ouvrirons des crédits complémentaires en fin de gestion. L’État ne manquera pas à ses obligations envers les bénéficiaires du RSA.
Les crédits affectés au RSA incluent par ailleurs la revalorisation exceptionnelle du revenu de solidarité active qui est prévue dans le plan de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale ; elle sera de 2 % chaque année, soit 10 % au bout de 5 ans.
Le programme 304 comporte une mesure d’économie : aucun abondement n’est en effet prévu en 2015 au titre de l’aide personnalisée de retour à l’emploi, l’APRE. Je veux ici vous expliquer cette décision.
Créée en 2009, l’APRE a souffert de son éparpillement, lié à la diversité des opérateurs chargés de la prescrire, et d’une complexité de gestion qui a entraîné une sous-consommation chronique conduisant à une diminution régulière du montant des crédits alloués à cette prestation depuis 2010. Le choix a donc été fait par le Gouvernement de privilégier une simplification des aides autour de l’opérateur principal qu’est Pôle Emploi, qui délivre des aides à la mobilité et à la garde d’enfant destinées prioritairement aux publics les plus en difficulté depuis leur refonte intervenue au début de l’année 2014.
Pôle Emploi s’est en effet vu assigner, dans sa convention tripartite 2015-2017, l’objectif de développer son action en direction des publics fragiles et doit renforcer à ce titre l’accompagnement global des personnes, en s’appuyant sur 1 000 conseillers dédiés.
Concernant l’aide alimentaire, le budget est en hausse de 3,5 % afin de répondre à une demande croissante. Cette augmentation, qui concerne l’ensemble des lignes budgétaires dédiées à l’aide alimentaire, permet de préserver à la fois le volume des denrées distribuées – je vous rappelle qu’elles bénéficient par ailleurs du financement européen du Fonds européen d’aide aux plus démunis, le FEAD, qui a été sécurisé pour sept ans à hauteur de 500 millions d’euros pour les fonds européens et 88 millions d’euros pour les fonds de l’État français –, les montants des subventions aux associations et les épiceries sociales, lesquelles sont désormais financées de façon spécifique.
Les crédits du programme « Handicap et dépendance », le programme 157, sont composés aux trois quarts des financements de minima sociaux destinés spécifiquement aux personnes ayant un handicap : l’allocation aux adultes handicapés et l’allocation supplémentaire d’invalidité. Cette dépense restera dynamique dans les années à venir : puisqu’il s’agit de dépenses de guichet, les prestations seront versées aux personnes qui y ont droit.
Concernant les établissements et services d’aide par le travail, les ESAT, nous n’avons pas prévu de création de places. En revanche, nous faisons des efforts budgétaires pour ces établissements : d’une part, nous avons revalorisé le tarif plafond, qui était stable depuis plusieurs années, et, d’autre part, nous privilégions les projets de modernisation de l’outil productif, afin que les ESAT puissent se positionner sur des marchés porteurs. C’est dans cette perspective que nous avons ouvert un atelier sur l’emploi et la formation professionnelle des personnes handicapées dans le cadre de la Conférence nationale du handicap qui se tiendra à la fin de l’année. Un rapport parlementaire a par ailleurs été confié à Annie Le Houerou sur l’accompagnement dans le travail des personnes handicapées.
J’en viens au programme 137, « Égalité entre les femmes et les hommes ». Le Gouvernement travaille à faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes dans la vie professionnelle, économique, politique et sociale, à promouvoir les droits des femmes et à lutter contre les violences sexistes et la prostitution. Depuis 2012, les crédits consacrés à ces sujets ont augmenté de 25 % afin de financer les mesures du quatrième plan triennal de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes, telles que les accueils de jour pour les femmes victimes de violences ou le numéro d’accueil téléphonique et d’orientation des femmes victimes de toutes formes de violences.
Vous le voyez, mesdames, messieurs les députés, la solidarité, la justice sociale, la lutte contre l’exclusion, l’égalité entre les femmes et les hommes sont des priorités pour ce gouvernement. C’est le sens du travail collectif que Marisol Touraine, Laurence Rossignol, Pascale Boistard et moi-même entendons mener. Soyez assurés que notre engagement au service des plus vulnérables est total.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Nous allons écouter à présent les porte-parole des groupes qui, je le rappelle, disposeront chacun de cinq minutes pour s’exprimer.
La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, chers collègues, la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » regroupe quatre programmes pour un montant total de 15,75 milliards d’euros.
La hausse de ce budget est quasiment automatique puisqu’elle est liée à l’augmentation du nombre d’allocataires du RSA et à la revalorisation des prestations ; allocation aux adultes handicapés et RSA. C’est la traduction de l’aggravation des difficultés que vivent nos concitoyens.
Il est heureux que le Gouvernement assume ces dépenses de solidarité. Cependant, nous avons des craintes sur la façon dont vous allez financer le RSA, madame la secrétaire d’État. Ces craintes sont justifiées. Rien que dans le Nord, le manque à gagner pour financer les principales allocations s’élève à 335 millions d’euros, avec une dette globale de 3 milliards du fait de compensations insuffisantes.
En effet, le RSA activité souffre d’une insuffisance de financement qui date de plusieurs années. En 2013, cela a généré un manque de 147,9 millions d’euros, une dette qui a été reportée sur 2014. En 2014, la situation s’est aggravée : la Cour des comptes estimait alors que l’insuffisance des dotations du FNSA, le Fonds national des solidarités actives, qui finance le RSA, était de l’ordre de 300 à 500 millions d’euros.
Le tableau va encore se noircir en 2015, à cause du pacte de responsabilité. Pour financer les milliards offerts au patronat, le Gouvernement a opéré un glissement des recettes du FNSA vers la Sécurité sociale.
Le prélèvement de solidarité sur les revenus du patrimoine et les produits de placement est désormais intégralement affecté à la Sécurité sociale. Le Gouvernement doit compenser cette désaffectation par une dotation budgétaire de 1,7 milliard d’euros. Cela confirme ce que nous disions de l’examen du budget de la Sécurité sociale : ces jeux d’écritures ne résolvent pas la question, ils la déplacent.
Notre question est simple : où allez-vous trouver 1,7 milliard pour la dotation au FNSA ?
Allez-vous ponctionner un autre budget ou aggraver le déficit ? Face à une telle situation, nous pouvons aussi nous demander si la dotation proposée sera en adéquation avec les besoins. Cette interrogation est également valable pour l’AAH.
Au-delà des questions financières, ces lignes budgétaires sont la traduction des choix politiques du Gouvernement. Or, les intentions affichées sont souvent contredites. Prenons l’exemple de la lutte contre la prostitution : il sera difficile de décider du financement de certaines actions si elles ne sont pas inscrites dans la loi. Or, la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel est bloquée au Sénat. Pourquoi ne pas avoir hâté l’inscription de ce texte à l’ordre du jour de la Haute assemblée lorsque celle-ci était dominée par le Parti socialiste ?
Cette faiblesse politique se lit également dans d’autres programmes. Concernant le programme « Handicap et dépendance », le Gouvernement affirme que la mise en accessibilité est une priorité. Pourquoi alors avoir retardé la date de mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d’habitation et de la voirie ? Il n’y a aucun volontarisme financier sur cette question. La décision de faire porter la charge de ces aménagements sur les collectivités territoriales, alors que sont fortement réduites leurs dotations financières, va poser des problèmes. Les communes ne pourront pas faire face seules.
Nous avons le même souci avec le programme « Égalité entre les femmes et les hommes ».
Durant les débats sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015, la secrétaire d’État chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie, Mme Laurence Rossignol, a confirmé la réforme du congé parental. Celui-ci serait réparti entre les deux parents à raison de vingt-quatre et douze mois. Or, le montant du complément de libre choix d’activité versé pendant le congé parental pour remplacer le salaire est faible. C’est donc le conjoint au salaire le plus bas qui est incité à prendre ce congé pour ne pas trop affaiblir le pouvoir d’achat du couple. Du fait de l’inégalité salariale persistante, ce sont donc très souvent les mères qui prennent le congé parental.
Avec cette réforme, et sous prétexte d’égalité entre les femmes et les hommes, vous comptez sur le fait que les hommes renoncent à leurs douze mois de congé parental, afin de réaliser des économies. Là encore, les nobles intentions sont contredites.
Enfin, nous ne pouvons pas passer sous silence la baisse des effectifs de cette mission, alors que le rapporteur a souligné que l’amoindrissement des « moyens des services chargés de missions importantes en lien avec des collectivités elles-mêmes en difficulté […] met en danger le service public et ses exigences de continuité et d’égalité sur tout le territoire. »
Les députés du Front de gauche estiment qu’il faut se donner les moyens de sa politique. C’est pourquoi ils voteront contre ce budget.
La parole est à Mme Gisèle Biémouret, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la solidarité n’est pas un vain mot ; le Gouvernement le prouve avec ce budget, qui est marqué par un effort financier important dans un contexte budgétaire pourtant contraint.
Au travers de l’évolution des crédits de cette mission, qui sont globalement en hausse, le Gouvernement a souhaité réaffirmer les principes qui le guident depuis deux ans : justice sociale, simplification et lisibilité des politiques publiques. Les engagements pris lors de l’adoption du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale continuent à être tenus et les mesures promises sont déployées selon le calendrier prévu. Ainsi, la hausse des crédits du programme 304 permettra la revalorisation de 2 % du RSA au 1erseptembre 2015, dans la perspective d’une revalorisation de dix points d’ici à 2017.
Après l’annonce en août dernier par le Président de la République de la future fusion de la prime pour l’emploi et du RSA activité proposée par notre collègue Christophe Sirugue, il convient de souligner à nouveau l’urgence de réformer le dispositif du RSA, trop complexe dans ses démarches et qui n’a finalement atteint qu’une infime partie de ses bénéficiaires potentiels.
Les crédits de l’aide alimentaire sont préservés et le modèle de l’épicerie sociale est soutenu par une aide nationale. Ainsi, les 32 millions d’euros budgétés par l’État, en augmentation de 2 %, seront complétés par le FEAD à hauteur d’un peu plus de 68,5 millions d’euros pour répondre à l’augmentation attendue du nombre de bénéficiaires estimé à 4 millions en 2015.
La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » prend également sa part dans la réforme de nos politiques sociales en supprimant des programmes inopérants comme celui de l’APRE afin que les aides soient mieux ciblées autour de l’opérateur Pôle emploi. Nous saluons d’ailleurs la création de l 000 postes de conseillers destinés à l’accompagnement global des personnes vulnérables en recherche d’emploi.
Les politiques publiques en faveur des personnes en situation de handicap ou de dépendance témoignent aussi de cette volonté d’accompagner les personnes les plus en difficultés en préservant le financement de l’allocation supplémentaire d’invalidité et en augmentant les crédits dédiés aux ESAT et à l’allocation aux adultes handicapés, dont le nombre de bénéficiaires augmente et qui a été revalorisée en octobre dernier.
Avec les crédits du programme 137, le Gouvernement entend poursuivre la politique d’égalité entre les femmes et les hommes, inscrite dans une politique interministérielle plus large avec des actions conduites dans le cadre de partenariats. Là encore, nous pouvons exprimer notre satisfaction quant aux politiques menées depuis deux ans et demi, puisque la France est passée la semaine dernière de la quarante-cinquième à la seizième place dans le classement mondial en matière d’égalité entre les femmes et les hommes.
La parité progresse dans les secteurs de l’éducation et de la santé. La place des femmes dans la vie politique et leur participation à la vie économique sont renforcées.
Réduire la pauvreté et les inégalités est un investissement d’avenir. Vous avez confirmé, madame la secrétaire d’État, que l’État ne manquerait pas à ses obligations, que ce soit envers les bénéficiaires du RSA ou les personnes porteuses de handicap bénéficiaires des minimas sociaux.
A travers cet engagement financier important et continu, l’État montre ainsi sa volonté d’être aux côtés de nos concitoyens les plus vulnérables, dans un souci d’égalité républicaine et de justice sociale visant à amortir les difficultés sociales engendrées par les effets de la crise. Pour ces raisons, les députés membres du groupe SRC voteront ce budget.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame et messieurs les rapporteurs, le budget de la mission « Solidarité et insertion » s’élève à 15,5 milliards d’euros, un budget stable par rapport à 2014. Compte tenu du temps dédié à chaque groupe, je concentrerai mon propos sur le RSA, l’économie sociale et solidaire, le handicap et la dépendance.
Le budget 2015 met en oeuvre l’une des mesures phares du plan pauvreté, annoncé il y a bientôt deux ans : la revalorisation du RSA de 2 % au 1erjanvier 2015, financée par une fraction de la contribution exceptionnelle de solidarité, à hauteur de 200 millions d’euros. Je rappelle que le RSA est porté par les conseils généraux et que ce sont les caisses d’allocations familiales qui liquident les droits. Depuis plusieurs mois, les départements doivent faire face à l’augmentation du nombre de bénéficiaires, consécutive à la hausse du chômage et du nombre de demandeurs d’emploi en fin de droits.
L’État finance le RSA activité, le RSA jeunes et la prime de Noël par l’intermédiaire du Fonds national des solidarités actives, le FNSA. Jusqu’à présent, ce fonds était alimenté par une fraction du prélèvement de solidarité sur les produits de placement et les revenus du patrimoine, à hauteur de 1,37 milliard d’euros, que venait compléter une subvention d’équilibre de l’État du programme 304.
À compter de 2015, l’ensemble des produits du prélèvement de solidarité seront affectés à la Sécurité sociale pour financer les allégements de charges votés cet été dans le PLFSS rectificatif. La dotation du FNSA augmente de l’équivalent de la fraction qui lui était précédemment versée – 1,7 milliard –, auquel il faut ajouter la contribution de 735 millions du programme 304, pour atteindre 2,3 milliards, comme en 2014. À l’UMP, nous continuons à nous interroger sur la provenance de cette somme de 1,7 milliard : comment est-elle financée, si ce n’est par le déficit et la dette ?
De même, nous nous interrogeons sur les raisons de la suppression de l’aide personnalisée de retour à l’emploi, l’APRE. Celle-ci permettait aux bénéficiaires du RSA de lever les freins à la reprise d’un emploi en favorisant l’acquisition ou la réparation d’un véhicule, l’achat d’une carte de transport, la garde d’enfants. Financée par le FNSA, l’APRE s’élevait à 35 millions dans le PLF pour 2014. Une réforme était attendue, certes, mais pas une suppression ! Pôle emploi devra assumer cette mission, mais sans aucuns moyens supplémentaires.
Enfin, ce budget oublie la fusion de la prime pour l’emploi et du RSA activité, pourtant annoncée cet été, mais que le Président de la République ajourne à 2016. Le Gouvernement a préféré supprimer la première tranche d’impôt sur le revenu, décision que nous désapprouvons à l’UMP car l’impôt sur le revenu – payé, déjà, par moins d’un Français sur deux – se concentre encore davantage sur un nombre plus restreint de contribuables, notamment les classes moyennes, pour lesquelles la coupe est pleine.
On avait cru que le Gouvernement voulait faire une priorité de l’économie sociale et solidaire, avec sa grande loi sur l’ESS promulguée le 31 juillet. Et pourtant, les crédits sont en baisse, pour la deuxième année consécutive : 4,7 millions d’euros contre 5 millions d’euros l’an dernier ! Sur le terrain, les acteurs de l’ESS manifestent leur déception et s’inquiètent avec raison de la baisse des dotations aux collectivités locales.
Les responsables d’associations, notamment, avancent des propositions, comme celle que je vous soumets. Le secteur de l’ESS n’émarge pas au CICE mais souhaite, en contrepartie, bénéficier d’un allégement de la taxe sur les salaires que paient les structures non assujetties aux impôts commerciaux. Cet allégement existe bien, mais il a été plafonné à 20 000 euros par structure. Au-delà de 15 à 20 salariés, les associations s’estiment désavantagées par rapport aux entreprises. Pensez-vous leur donner satisfaction, madame la secrétaire d’État ?
L’allocation pour adulte handicapé, l’AAH, constitue la part la plus importante du programme « Handicap et dépendance », avec 8,5 milliards d’euros. Après avoir été revalorisée de 25 % lors de la précédente législature, elle s’établit désormais à 800 euros par mois. La somme des contributions des conseils généraux et des deux sources de financement que sont la branche maladie de la Sécurité sociale et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie s’élève à 55 milliards d’euros
Si nous reconnaissons les efforts réalisés dans ce domaine, nous voulons néanmoins exprimer un regret : la grande loi sur la dépendance n’est toujours pas en vue. La loi d’adaptation de la société au vieillissement est en cours de discussion, mais ne fait apparaître que quelques mesures nouvelles, pour 645 millions d’euros. Elle ne répond pas à la question du reste à charge en établissement et n’est certainement pas à la hauteur des enjeux du financement de la dépendance, quand on sait que les besoins se chiffrent à plusieurs milliards d’euros pour les vingt prochaines années. Gouverner, c’est anticiper !
Malgré les avancées que nous saluons, comme l’aide alimentaire aux plus démunis, trop d’incertitudes sur les financements de vos politiques, trop de décalages entre les annonces et leur traduction dans les faits et une anticipation insuffisante des futurs besoins de solidarité nous conduisent à ne pas voter, en l’état, les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame et messieurs les rapporteurs, la violence de la crise qui secoue notre société nécessite plus que jamais la mise en oeuvre de politiques publiques de solidarité et de cohésion sociale ambitieuses et efficaces.
Quand la cohésion sociale est menacée, l’ambition de la République est contrariée, la confiance en l’avenir fragilisée, le progrès économique et social impossible. Cette menace nous guette et je sais combien vous y êtes attentive, madame la secrétaire d’État.
La France compte aujourd’hui deux millions de personnes vivant avec moins de 651 euros par mois et neuf millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté. Je veux également évoquer ces 440 000 enfants qui ont basculé dans la pauvreté à cause de la crise, des enfants qui se trouvent en première ligne face à la précarité, à l’échec scolaire et au chômage à venir. Ils incarnent le malaise d’une France en proie à une colère sourde et symboliseront notre plus grande faillite – sans vouloir incriminer telle ou telle famille politique. Nous devons trouver une réponse à la hauteur de leur détresse et leur donner espoir dans l’avenir.
Dans ce contexte, la progression continue des crédits alloués à la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » aurait pu constituer un signal positif vis-à-vis des plus fragiles. Il n’en est rien. Aucune réforme d’ampleur permettant de lutter efficacement contre la progression de la précarité et de la pauvreté en France n’est envisagée.
Vous préférez un catalogue de mesures utiles, mais insuffisantes, à ce que nous avions pu entreprendre sous la précédente mandature : un véritable plan de cohésion sociale mobilisant l’ensemble des acteurs, l’État, les territoires, les partenaires du dialogue social et le monde associatif.
Il en est ainsi de la revalorisation du RSA de 2 % au 1er septembre 2015, engagement pris à l’issue de la conférence nationale contre la pauvreté, mais qui ne constitue malheureusement qu’un pansement sur la plaie ouverte qu’est la pauvreté, ainsi que le montre le récent avis du conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, le CNLE.
J’ajoute que les objectifs de ce dispositif, que les départements peinent désormais à financer en raison de l’insuffisance de la participation de l’État et de l’augmentation constante du nombre de bénéficiaires, sont de plus en plus confus. L’effet incitatif du RSA, censé favoriser le retour a l’emploi, est également insuffisant.
Or aucune réforme de ce dispositif n’est préfigurée dans cette mission. Qu’est-il advenu, madame la secrétaire d’État, de la réforme de la prime pour l’emploi, qui devait permettre de protéger les plus précaires ? Il y a urgence !
Je souhaite souligner également que les dépenses de l’État en faveur des personnes en situation de handicap, qui visent à assurer un revenu d’existence et à soutenir l’activité professionnelle, représentent plus de 80 % des crédits de la mission. Si ces crédits sont indispensables, nous regrettons une fois encore que le Gouvernement ne mette pas en oeuvre une politique globale, mobilisant toutes les politiques publiques de la nation, afin d’éliminer progressivement toutes les barrières susceptibles d’entraver l’accomplissement personnel et professionnel des personnes handicapées ou en perte d’autonomie. Il s’agit d’ailleurs d’une proposition que nous avions formulée lors de l’examen du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement, récemment adopté par l’Assemblée nationale.
Notre groupe s’inquiète également de la suppression du financement de l’aide personnalisée de retour à l’emploi. Les aides personnalisées mises en place par Pôle Emploi et soutenues par les départements seront-elles suffisantes, alors que les crédits de la mission « Travail et emploi » subissent une baisse de 1,6 milliard d’euros en trois ans et que la réforme des collectivités territoriales en cours fait peser une lourde menace sur la survie des conseils généraux ? Rien n’est moins sûr.
Enfin, nous dénonçons avec force le tour de passe-passe budgétaire, que vous n’êtes pas le premier gouvernement à employer. Il consiste à relever la dotation de l’État au financement du fonds national des solidarités actives afin de compenser le transfert à la Sécurité sociale du prélèvement de solidarité sur les revenus du patrimoine et les produits de placement. Ce transfert vient en effet compenser financièrement les allégements de charges prévus dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité, faute de véritables économies budgétaires. J’imagine que nos collègues de la majorité l’auront bien compris. Avec vous, la solidarité est donc intégralement financée par de la dette !
Madame la secrétaire d’État, cette mission n’est pas à la hauteur de la menace que la crise fait peser sur notre cohésion sociale. Nous ne nous opposerons pas pour autant à l’adoption des crédits, en raison de la revalorisation du RSA, vitale pour les plus fragiles, tout en regrettant que vous n’apportiez aucune solution globale et pérenne à la montée de la pauvreté et des inégalités.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame et messieurs les rapporteurs, il me sera impossible de vous donner en cinq minutes un avis équilibré sur les sujets fondamentaux abordés par la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». Théoriquement inscrite dans le plan de lutte contre la pauvreté, cette mission comprend le programme 304 « Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire », le programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes », le programme 157 « Handicap et dépendance » et le programme 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative ».
Dans l’ensemble, le budget de cette mission est constant, voire augmente sensiblement, même si, comme vous l’avez rappelé, madame la secrétaire d’État, l’augmentation massive du budget du programme 304 est artificielle, celui-ci étant constitué à 90 % de transferts de fonds lié au mécanisme de financement du RSA.
Si nous approuvons la revalorisation du RSA de 2 % au 1er septembre 2015, ce revenu de solidarité reste faible, notamment au regard du seuil de pauvreté estimé en France à 60 % du revenu médian, soit près de 900 euros par mois. 9 millions de personnes sont concernées et 2 millions de personnes se trouvent en situation de grande pauvreté, avec moins de 651 euros par mois pour vivre.
Depuis le transfert de la compétence Insertion aux départements en 2003, les budgets des conseils généraux affectés à l’allocation RSA n’ont cessé d’augmenter, cette charge n’ayant pas été compensée entièrement par l’État – je parle devant des personnes convaincues ! Dans mon département, le Gard, après la décentralisation du RMI, celle de la prestation de compensation du handicap et les maisons départementales des personnes handicapées, le différentiel accumulé et non compensé entre recettes de l’État et dépenses auprès des bénéficiaires s’élève à plus de 600 millions d’euros ! Pour faire face, les collectivités départementales puisent dans leur budget de fonctionnement, au détriment de politiques locales moins bien financées, et pourtant cruciales : le sport, l’éducation populaire, la culture ou encore le soutien au tissu associatif.
Il est socialement injuste que la fiscalité locale, telle la taxe foncière, serve en partie à compenser des budgets insuffisants pour verser une allocation de solidarité de droit, pour laquelle d’autres sources de financement de niveau national, voire européen, seraient bien plus adaptées.
Dans ce contexte, vous comprendrez que nous ne pourrons accepter la réduction de près de 3 milliards d’euros des dotations aux collectivités locales, prévue par le projet de loi de finances pour 2015.
Par ailleurs, le budget que nous examinons ce soir prévoit la disparition de l’aide personnalisée de retour à l’emploi, l’APRE. Cette aide était utile aux bénéficiaires du RSA en situation de retrouver un emploi, puisqu’elle permettait de lever différentes difficultés, liées à la mobilité, à la garde d’enfants et autres frais annexes incontournables et difficilement surmontables dans une période de transition. L’APRE était d’ailleurs complétée la plupart du temps par des crédits locaux, notamment ceux des CCAS ou de conseils généraux.
Sa suppression est justifiée ici par une prétendue « non-demande » de ces enveloppes financières.
Nous touchons ici à un sujet qui nous est cher, tout autant qu’à notre collègue Christophe Sirugue, et établi par François Cherèque dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté. Il s’agit du non-recours aux droits. Les soixante et une mesures de ce plan sont regroupées en sept thématiques dont la première est justement l’accès aux droits. Nous sommes nombreux à nous en préoccuper et à vouloir la mise en oeuvre de mesures de simplification et d’automatisation pour réduire le « non-recours ». Dans cette situation, il ne pourrait donc être question de supprimer des droits et des mesures d’aides aux plus démunis sous prétexte qu’ils ne sont pas demandés. Ce serait un mauvais choix.
Un autre sujet nous préoccupe particulièrement : l’action 12 du programme 304 prévoit un peu plus de 4 millions d’euros en faveur de l’économie sociale et solidaire. Ce montant est insuffisant au regard des objectifs de la loi relative à l’économie sociale et solidaire que nous avons votée en juillet dernier et pour laquelle les écologistes se sont beaucoup impliqués. Cette loi n’est pas un « gadget », elle a pour vocation de permettre un changement d’échelle de l’ESS, alternative à l’économie dominante et aux marchés financiers.
Pour y travailler sérieusement, il est nécessaire de sortir l’économie sociale de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » où elle n’a pas sa place, pour ce qui concerne spécifiquement l’économie sociale – je pense en particulier aux moyens dédiés au développement des coopératives, SCOP ou SCIC, ou à la reprise d’entreprises par les salariés, ainsi qu’à tous les dispositifs territoriaux concourant à ce développement.
Nous proposerons tout de même des amendements à ce budget, tout en étant contraints par la technique budgétaire qui nous oblige à gager des crédits au sein de la même mission. Nous en verrons très vite les limites.
Nous jugeons insuffisants les crédits pour les projets territoriaux de coopération économique qui reçoivent un accueil favorable en région.
Mais Carole Delga, secrétaire d’État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire auprès du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique n’a semble-il, au vu de l’intitulé de ses fonctions, pas de missions pour les politiques de solidarité dont il s’agit aujourd’hui. C’est sans doute pour ces raisons qu’elle n’est pas avec nous ce soir.
C’est avec ces réserves et ces regrets que, pour ce qui concerne les crédits de la mission dans son ensemble, et au vu des principaux sujets qu’ils traitent, le groupe écologiste votera ce budget dans un contexte avéré d’aggravation des situations d’exclusion sociale, devenu très préoccupant, comme le souligne le rapport de l’IGAS.
La parole est à M. Olivier Falorni, dernier orateur inscrit, pour le groupe RRDP.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, dans le cadre de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », quatre programmes de poids budgétaire très inégal, dont la totalité des crédits s’élève à 15,75 milliards d’euros, nous sont présentés. Le nouveau programme 304 ayant absorbé l’ancien programme 106 « Actions en faveur des familles vulnérables » et désormais intitulé « Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire », il contient des crédits en forte augmentation.
Le groupe RRDP note que l’État tient les engagements qu’il a pris dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté adopté le 21 janvier 2013. En effet, le RSA sera revalorisé de 2 % le 1er septembre 2015, en plus de la revalorisation indexée sur l’inflation. En plein contexte budgétaire serré, c’est un signe fort et important envoyé à nos concitoyens les plus démunis.
Concernant les crédits du programme 157 « Handicap et dépendance », nous remarquons que ces derniers représentent à eux seuls 74 % des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » et s’élèvent à 11,6 milliards d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.
Suite aux deux projets de loi habilitant le Gouvernement à adopter des mesures législatives pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d’habitation et de la voirie pour les personnes handicapées et pour l’adaptation de la société au vieillissement, ces crédits en faveur des personnes âgées en perte d’autonomie et des personnes handicapées sont maintenus et même augmentés, puisque la dotation du programme 157 connaît une hausse de 1,4 % par rapport à l’année dernière.
Cet engagement financier du Gouvernement confirme donc votre volonté, madame la secrétaire d’État, de répondre au besoin de compensation de la perte d’autonomie, qu’elle résulte du handicap ou de l’avancée en âge. Nous saluons cette démarche.
Nous notons aussi l’effort consenti en faveur de l’aide à l’investissement pour les établissements et services d’aide par le travail – les ESAT. Ces crédits sont en augmentation de 41,35 millions d’euros. Cet effort est non seulement nécessaire mais également bienvenu. Nous regrettons toutefois que le nombre de places en ESAT stagne, tant l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap est un élément fondamental pour leur permettre d’accéder à plus d’autonomie.
Concernant le programme 137, depuis 2012, ces crédits consacrés aux actions destinées à faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes dans la vie professionnelle, économique, politique et sociale, tout comme la promotion des droits, la prévention et la lutte contre les violences sexistes, ont significativement augmenté de 25 %, ce qui va de pair avec la volonté du Gouvernement, depuis le début de la mandature, de s’engager en faveur d’un renforcement de l’égalité, volonté manifestée par la loi-cadre du 4 août 2014 relative à l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.
Cette année encore, nous voyons diminuer les crédits prévus sur le programme de soutien 124 qui concerne l’ensemble des moyens de fonctionnement des administrations participant à la mise en oeuvre des politiques sociales et sanitaires. Comme cela a été rappelé lors des discussions en commission élargie, l’État devrait cesser d’amoindrir les moyens des services chargés de missions importantes en lien avec des collectivités elles-mêmes en difficulté. En effet, cela met en danger le principe de continuité et d’égalité territoriale du service public.
En conclusion, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste constate que les crédits de la mission s’élèvent désormais à 15,75 milliards d’euros pour 2015, marquant ainsi une augmentation de près de 2,18 % des crédits alloués par rapport à l’année précédente. Ainsi, malgré les fortes contraintes budgétaires que l’on connaît, ce PLF 2015 tend vers plus de justice sociale et de solidarité, notions partagées au sein de notre groupe parlementaire. Pour toutes ces raisons, madame la secrétaire d’État, nous voterons les crédits de la mission. Je vous remercie.
Nous en venons aux questions et je rappelle que la durée des questions et des réponses est fixée à deux minutes.
La parole est à Mme Françoise Dumas, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Je voudrais revenir à un élément essentiel de la prise en charge du handicap et de la perte d’autonomie : les aides techniques. Du déambulateur ou de la prothèse auditive au fauteuil roulant le plus perfectionné, elles ne constituent rien de moins que la partie matérielle tangible de la compensation de nombreux handicaps. Elles facilitent le quotidien de la plupart des personnes handicapées et de leurs proches. Elles seraient sans doute des objets banals du quotidien si l’inflation régulière et croissante de leur prix ne devait nous alerter sur un marché peu ou pas régulé et encore assez inégalitaire. De nombreuses études font en effet état du niveau très élevé des prix de ces aides en France. Contrairement à la plupart des pays européens, le nôtre associe une solvabilisation importante, du fait notamment de la mise en place de la prestation de compensation du handicap par la loi du 11 février 2005, au libre choix des aides par les personnes handicapées. Or, les prescriptions des médecins sont souvent imprécises et par là même laissent aux prestataires la possibilité d’orienter les patients et leurs familles vers des produits plus onéreux ou plus ou moins rentables.
Cette particularité française conduit à l’inflation artificielle des prix et ouvre la voie aux effets d’aubaine bien identifiés par l’IGAS et la Cour des comptes dans leurs récents travaux. Il en résulte un niveau de prise en charge par la prestation de compensation du handicap ou la Sécurité sociale de plus en plus éloigné des prix constatés sur le marché et des restes à charge très inégaux selon les territoires, en raison notamment de l’absence de régulation nationale des fonds départementaux de compensation du handicap.
Nos auditions ont révélé l’existence d’un marché des aides techniques opaque à plus d’un titre : méconnaissance de leur disponibilité, des mécanismes d’élaboration, de leur coût de fonctionnement. Il est difficile pour le patient de savoir ce qu’il paie réellement.
À cet égard, la loi relative à la consommation de mars 2014 apporte des réponses salutaires comme l’information sur le tarif de responsabilité des produits de santé, mais cela reste encore insuffisant.
Madame la secrétaire d’État, quelles sont les réflexions en cours pour améliorer la réglementation de ce marché très spécifique des aides techniques et lutter contre sa tendance inflationniste ? Le développement d’alternatives à l’acquisition individuelle systématique, prêts, locations, achats groupés, peut-il être encouragé ?
Vous avez raison, madame la députée, de souligner les problèmes que pose la prise en charge des aides techniques pour les personnes. Rappelons que l’aide technique est définie par le code de l’action sociale et des familles comme tout instrument, équipement ou système technique conçu pour compenser la limitation d’activité d’une personne du fait de son handicap.
En effet, ces aides techniques peuvent être remboursées tout ou partie, par l’assurance maladie, la prestation compensatoire du handicap ou les fonds de compensation départementaux.
Le Gouvernement s’appuie sur les conclusions d’une mission diligentée par l’IGAS courant 2013 pour mener une réflexion afin d’améliorer l’observation du prix et du marché des aides techniques via la caisse nationale de solidarité et d’autonomie, de produire et diffuser une information indépendante, fiable et de qualité sur les aides techniques pour que les personnes soient correctement informées, enfin de mettre en place un dispositif de prise en charge des aides techniques efficace et de maîtrise de la dépense publique afin d’aboutir à une régulation des prix des équipements.
La mutualisation des achats fait partie des solutions envisagées. Une réflexion est en cours sur le sujet et devrait prochainement aboutir.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Le programme 304 relevant de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » comporte le volet RSA qui fera l’objet de mon intervention.
Alors qu’il serait légitime et normal que, chaque année, le Gouvernement prenne des mesures structurelles pérennes, celles-ci sont inlassablement reportées. C’est ainsi le cas de la fusion de la prime pour l’emploi et du RSA activité, que le Président de la République a reportée à 2016 alors qu’elle constituait une source d’économie importante et qu’elle permettait de proposer une prestation plus juste et plus efficace en matière de retour à l’emploi.
Au lieu de s’atteler à cette réforme pragmatique, vous préférez manipuler en mauvais bricoleurs l’impôt sur le revenu, en supprimant la première tranche d’imposition. Or, cette logique rend cet impôt encore plus injuste en le concentrant sur une catégorie, celle des classes moyennes.
Par ailleurs, le programme 304 ne prévoit aucun abondement du Fonds national des solidarités actives au titre de l’aide personnalisée de retour à l’emploi. Créée en 2009, cette aide était à l’origine conçue pour s’adapter aux besoins des personnes engagées dans la recherche d’un emploi. Il convient de regretter cette quasi-suppression de l’APRE dont le coût avait été évalué à 35 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2014 et qui permettait aux bénéficiaires du RSA de lever certains freins à la reprise d’un emploi.
Ainsi, il était possible pour les bénéficiaires d’acquérir ou de réparer un véhicule nécessaire pour leurs démarches et pour postuler à un nouvel emploi. Vous justifiez cette mesure par le fait que, depuis 2011, les taux de consommation de cette aide sont restés bas et très disparates d’un département à l’autre. À défaut de réformer ce dispositif, vous avez donc préféré purement et simplement le supprimer, alors même que, parallèlement, les moyens conférés à Pôle Emploi n’augmenteront pas cette année, les crédits de la mission « Travail et emploi » subissant une baisse de 1,6 milliard d’euros en trois ans.
J’ai donc trois questions. Quand allez-vous mener la fusion entre le RSA et la prime pour l’emploi mais aussi remettre à plat le RSA jeunes ? Quand allez-vous résoudre le problème du RSA jeune qui a bénéficié à moins de 8 000 personnes en 2014, ce qui tend à démontrer les limites de son efficacité ? Enfin, pourquoi avoir supprimé l’aide personnalisée de retour à l’emploi ?
Le Président de la République a annoncé la fusion du RSA et de la prime pour l’emploi en août dernier, madame la députée. Vous comprenez bien qu’il s’agit d’une mesure de grande ampleur qui ne saurait être appliquée en quelques jours, y compris parce que les bases ressources et les bénéficiaires de ces deux dispositifs ne sont pas les mêmes. Il faut donc procéder à un examen approfondi avant de mettre la mesure en oeuvre. Nous nous appuyons pour ce faire sur les travaux de très grande qualité qu’a déjà réalisés M. Sirugue en 2013.
Permettez-moi toutefois de vous rappeler quelques chiffres concernant les dispositifs actuels, auxquels est consacré un montant total de 4 milliards d’euros. La prime pour l’emploi bénéficie à 6,3 millions de foyers fiscaux pour une dépense annuelle de 2,5 milliards, le taux de recours étant de 100 %. Le montant mensuel moyen de la prime est de 36 euros par contribuable, et peut atteindre un maximum de 80 euros pour une personne seule. Quant au RSA activité, il touche plus de 800 000 bénéficiaires directs auxquels s’ajoutent 8 000 bénéficiaires du RSA jeunes, pour une dépense annuelle totale de 1,5 milliard et un taux de recours très bas – de l’ordre de 32 % ; le montant mensuel moyen du RSA activité est de 176 euros par foyer. Enfin, les deux prestations sont coordonnées, puisque le RSA activité perçu entraîne la diminution à due concurrence de la prime pour l’emploi perçue l’année suivante.
Mme Touraine étant chargée de ce dossier, le ministère des affaires sociales étudie actuellement toutes les hypothèses. Différentes pistes sont en cours de chiffrage afin d’atteindre les objectifs que le Gouvernement a fixés pour cette réforme : procéder rapidement à la fusion – même si cela ne signifie pas forcément au 1er janvier prochain – et prendre en compte les jeunes de 18 à 25 ans, qui posent actuellement un problème, mais aussi améliorer l’incitation à l’activité, puisque c’est l’objectif premier de ces deux dispositifs, et surtout éviter qu’il y ait des perdants parmi les plus modestes. C’est là l’essentiel : il suffit de « faire tourner les ordinateurs » pour qu’il y ait des perdants, y compris parmi les familles les plus modestes, en raison de la différence entre les bases ressources. Mieux vaut prendre quelques semaines supplémentaires pour se prémunir contre ce risque et appliquer correctement la réforme.
S’agissant de l’APRE, il ne s’agit aucunement d’une suppression, comme je l’ai indiqué dans mon propos liminaire ; simplement, aucune budgétisation n’est prévue cette année. Si l’on constatait au cours des prochaines années que les mesures de Pôle emploi ne suffisent pas, il serait toujours temps de rebudgétiser cette aide qui, sur le plan législatif, existera toujours. Dans l’état actuel des choses, les moyens étaient trop dispersés entre un nombre excessif d’opérateurs et, dans la plupart des cas, l’argent n’était pas dépensé : en fin d’année, en effet, les départements disposaient encore d’une bonne partie des fonds concernés. Je le répète : il n’y aura donc pas de budgétisation cette année, mais nous verrons que faire au cours des années suivantes.
Ma question – qui reflète un désir, et non une obsession – portera une nouvelle fois sur l’action 12 du programme 304, c’est-à-dire le maigre budget consacré à l’économie sociale et solidaire.
Ces crédits sont non seulement modestes, mais ils diminuent, ce qui nous préoccupe d’autant plus que la loi qui encadre ce secteur, très attendue, vient d’être adoptée en juillet dernier.
En outre, il faudrait enfin différencier entre deux types d’entreprises : les entreprises solidaires d’utilité sociale, d’une part, dont on parle souvent et qui, pour un certain nombre d’entre elles, peuvent relever de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » et, d’autre part, des entreprises plus classiques telles que les coopératives, les coopératives d’intérêt collectif ou encore les mutuelles, qui font la force de l’économie sociale et qui n’ont vraiment pas leur place dans cette mission.
Comment le Gouvernement pourra-t-il dans ces conditions financer les appels à projets, concernant par exemple les programmes territoriaux de coopération économique ? Vous connaissez bien ce type de structure, madame la secrétaire d’État, puisque vous avez visité à Montpellier le pôle Realis, qui est une véritable réussite financée en lien avec l’État et la région. Or, aujourd’hui, le financement prévu ne suffira qu’à couvrir dix projets retenus, mais de nombreuses régions demandent à en bénéficier.
Il en va de même pour le financement de la Chambre française de l’économie sociale et solidaire : les dirigeants que le groupe d’études sur l’économie sociale et solidaire a auditionnés nous ont alerté et indiqué qu’ils avaient saisi le Gouvernement concernant le bon fonctionnement de cette instance que nous avons créée dans la loi. En toute franchise, le budget proposé pour cette mission vous en donnera-t-il les moyens ? De même, le conseil national des chambres régionales de l’économie sociale s’est sérieusement interrogé sur leur avenir financier et sur les crédits qui seront votés dans ce budget.
Il serait donc temps, madame la secrétaire d’État, que vous nous indiquiez comment vous comptez donner une dimension budgétaire à cette loi sur l’économie sociale et solidaire. Pourriez-vous agir comme relais au plus haut niveau, auprès du Président de la République et du Premier ministre, pour que nous puissions enfin espérer transférer l’action 12 dans la mission Économie plutôt que de la laisser dans la mission Solidarité ?
Le Gouvernement partage votre réflexion, monsieur le député, concernant la présentation de cette action relative à l’économie sociale et solidaire dans la mission Économie plutôt que dans la mission Solidarité. Il me semble que d’autres membres du Gouvernement vous ont répondu dans le même sens au cours des années précédentes.
Permettez-moi toutefois de vous apporter quelques précisions. Tout d’abord, le programme 304 n’est pas le seul instrument dont dispose le Gouvernement pour soutenir les entreprises de l’économie sociale et solidaire. Celles-ci peuvent bénéficier de produits spécifiques de la BPI France, notamment des prêts et des garanties pour un montant total de 500 millions d’euros. Puisqu’il s’agit de véritables acteurs économiques, ces entreprises peuvent demander des prêts et ne pas se contenter de subventions.
D’autre part, des mesures de soutien à l’emploi ont été mises en oeuvre dans le secteur privé non lucratif : je pense aux contrats d’avenir et aux contrats de génération qui sont des aides substantielles d’une grande utilité pour l’économie sociale et solidaire.
Enfin, le soutien financier prévu par le programme 304 permet de subventionner les organismes nationaux et locaux de l’économie sociale et solidaire, et vise précisément à appuyer la mobilisation des acteurs du secteur dans le cadre de l’application de la loi sur l’ESS. Sur les crédits prévus, un montant de 1,4 million sera attribué aux chambres régionales de l’économie sociale et solidaire, soit une augmentation de 40 % par rapport à 2014.
J’appelle les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », inscrits à l’état B.
La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement no 319 .
Cet amendement est dans la droite ligne des propos que je tiens depuis le début du débat ; vous aurez donc compris que son but consiste à ne rien lâcher. J’ai bien entendu, madame la secrétaire d’État, que vous allez vous engager, comme vos collègues, à faire que nous puissions espérer que la mission Économie intègre un certain nombre d’actions concernant l’économie sociale et solidaire : très bien.
Le présent amendement vise à transférer 15 millions d’euros au programme relatif à l’économie sociale et solidaire. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, d’avoir dressé la liste de mécanismes de soutien bien connus, mais pensez-vous vraiment qu’une coopérative utilisera le dispositif des emplois aidés ou des emplois d’avenir ? Non ; c’est une entreprise comme les autres, et ces dispositifs n’ont rien de spécifique aux entreprises du secteur de l’ESS.
Quant à la BPI, je suis le premier à soutenir l’accès de ces entreprises aux 500 millions prévus, mais je vous rappelle qu’il ne s’agit que d’une infime partie fléchée vers ce secteur en comparaison des fonds prévus pour l’ensemble de l’économie. Cela n’empêche pas qu’il faille évidemment y recourir, quitte à ce que l’on augmente ce montant.
Ainsi, le montant de 15 millions prévu par l’amendement, qui est élevé, permettra de financer l’ensemble des projets territoriaux de coopération, puisqu’à l’heure actuelle, vous ne pourrez en financer qu’une dizaine – il est donc indispensable d’abonder les crédits prévus pour ce faire, ainsi que pour le financement d’un certain nombre de têtes de réseaux.
Je vous félicite naturellement pour le million supplémentaire que vous consacrez au conseil national des CRES, mais j’estime que l’économie sociale et solidaire mérite mieux. Pour conclure et répondre par avance à la réflexion qui me sera faite, je reconnais qu’il faut « gager » ces 15 millions ailleurs dans la même mission ; or celle-ci n’est pas le réceptacle adéquat pour le budget de l’économie sociale et solidaire, je l’ai dit. De ce point de vue, je conçois que le gage proposé peut ne pas être adapté.
Je remercie M. Cavard de nous donner l’occasion de passer du rôle d’observateur à celui d’acteur, même modeste… La question qu’il pose avec le mérite de la cohérence et de la persévérance a tout son sens. On l’a d’ailleurs rappelé lors du débat sur la mission Travail et emploi : l’économie sociale et solidaire concerne des dizaines, voire des centaines de milliers d’emplois non délocalisables. M. Cavard a raison d’insister sur le fait qu’il s’agit là de véritables emplois dans de véritables entreprises, qu’elles prennent une forme associative ou autre. Il connaît d’ailleurs bien ces entreprises, puisqu’il en a visité deux dans la ville dont je suis le maire…
D’autre part, il faut encourager le soutien aux initiatives régionales. La BPI, madame la secrétaire d’État, ce n’est pas le budget de l’État ! Certes, l’État intervient avec la Caisse des dépôts, mais ne confondons pas tout et gardons-nous d’additionner ce qui ne saurait l’être.
M. Cavard a aussi raison de noter l’emplacement incongru de l’économie sociale et solidaire dans le programme 304, alors qu’il s’agit d’une mission économique. Cela revient presque à donner le sentiment que cette économie serait celle des pauvres, alors que l’économie des riches relèverait de la mission Économie. Il est donc urgent de déplacer ce programme dans une autre mission.
Cela étant, comme vous-même l’avez prévu, cher collègue, je ne saurais approuver le gage proposé. Le domaine que vous visez, c’est-à-dire les politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative, connaît déjà d’extrêmes difficultés et se retrouve à l’os, voire pire compte tenu de la suppression de 258 emplois en 2015. Il est donc impossible de prendre des crédits sur cette ligne. Je note toutefois, madame la secrétaire d’État, que M. Rebsamen a tout à l’heure levé des gages pour des montants bien plus importants.
Il vous appartient donc de lever ce gage pour que nous puissions concrètement soutenir l’économie sociale et solidaire – auquel cas je serais favorable à cet amendement !
Quel est l’avis de la commission des affaires sociales, monsieur Sirugue ?
La commission a naturellement émis un avis défavorable – même si nous sommes nombreux à partager le souhait que les crédits relatifs à l’économie sociale et solidaire soient transférés dans la mission Économie : c’est une question de cohérence.
Certes, la BPI ne relève pas des crédits de l’État, mais j’estime qu’il ne faut pas négliger l’intervention publique dans sa globalité, y compris le soutien apporté à l’économie sociale et solidaire. Quant à l’amendement, il prévoit un prélèvement sur des crédits nécessaires pour régler des loyers immobiliers, ce qui nous compliquerait beaucoup la tâche ; c’est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas accepter cet amendement.
Monsieur le député, si j’ai bien compris, vous proposez de diminuer de 15 millions d’euros les crédits de l’action 12 « Affaires immobilières » du programme 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » au profit de l’action 12 « Économie sociale et solidaire » du programme 304 « Lutte contre la pauvreté, revenu de solidarité active et expérimentation sociale ».
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Le programme 124, programme support des ministères en charge de la santé, des affaires sociales, du sport, de la jeunesse, de l’éducation populaire, de la vie associative et des droits des femmes, supporte déjà depuis 2010 les économies gouvernementales avec moins 5 % en 2010, moins 2,5 % en 2011, moins 7 % en 2013, moins 4 % en 2014 et moins 5 % en 2015, pour les crédits hors titre 2.
Les crédits inscrits sur l’action « Affaires immobilières », soit presque 78 millions d’euros en autorisations d’engagement et 74 millions d’euros en crédits de paiement, sont destinés à couvrir l’ensemble des loyers privés et domaniaux des sites occupés par les ministères en charge de la santé, des affaires sociales, du sport, de la jeunesse, de l’éducation populaire, de la vie associative et des droits des femmes, en administration centrale comme en outre-mer.
Y sont également inscrites les dépenses relatives aux locaux – entretien, gardiennage, fluides, réparations. Ce chiffrage tient compte des coûts réels des loyers, qu’ils soient privés ou budgétaires, et donc des revalorisations – plus 1,54 % pour les loyers privés.
C’est pourquoi il est impossible, au regard du principe de sincérité, de gager sur ces crédits la hausse de 15 millions d’euros que vous proposez sur l’économie sociale et solidaire.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de m’expliquer pourquoi le gage n’est pas bon, mais, comme l’a fait remarquer le rapporteur spécial Nicolas Sansu, vous pourriez éventuellement reconnaître l’intérêt de ma demande d’une revalorisation de 15 millions. Car je ne sais toujours pas si vous êtes d’accord avec moi sur la nécessité d’abonder l’économie sociale et solidaire ! J’ai compris qu’il n’était pas possible d’ôter cette somme là où je le proposais, et j’ai d’ailleurs moi-même reconnu que le gage n’était pas satisfaisant, mais c’est parce que l’ESS n’est pas inscrite dans la bonne mission : ce n’est pas à moi, parlementaire, mais au Gouvernement et à ses services qu’il appartient de faire que le gage porte sur la bonne mission.
Si vous étiez d’accord sur le fait que ces moyens seront bien utilisés par le secteur de l’économie sociale et solidaire, il vous serait possible, comme nous l’avons fait tout à l’heure dans le cadre de la mission « Travail et emploi », de lever le gage. Mais je n’ai pas compris si vous étiez prête à le faire, madame la secrétaire d’État.
L’avis du Gouvernement est défavorable.
Mes chers collègues, dans la discussion budgétaire il ne s’agit pas de « gage » mais de compensation.
L’amendement no 319 n’est pas adopté.
J’appelle les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », inscrits à l’état B.
Les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » sont adoptés.
J’appelle maintenant l’article 60 du projet de loi, rattaché à cette mission.
L’article 60 est adopté.
Prochaine séance, demain, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Suite de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2015 : mission « Outre-mer ».
La séance est levée.
La séance est levée, le mardi 4 novembre 2014, à zéro heure trente-cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly