Commission des affaires économiques

Réunion du 17 mai 2016 à 16h15

Résumé de la réunion

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  • foncier
  • lait
  • producteur
  • qualification

La réunion

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La commission a examiné pour avis le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (n° 3623), sur le rapport de M. Dominique Potier.

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Le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique fait l'objet d'une autre saisine pour avis de la part de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire ; la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République étant, pour sa part, saisie au fond. Ces trois commissions se partagent l'examen du texte dans le cadre d'une délégation formelle, qui n'est pas prévue par les textes, au titre de laquelle les amendements que nous aurons adoptés seront repris dans le texte adopté par la commission des lois.

Le présent projet de loi vise à instaurer davantage de transparence dans le processus d'élaboration des décisions publiques et dans la vie économique, notamment dans le secteur agricole. Il contient également des mesures sur la transparence de la régulation financière. Sur les cinquante-sept articles qui le composent, la commission des affaires économiques en examinera sept, la commission des finances, dix-huit, et la commission des lois, trente-deux.

Nous sommes saisis de l'article 25, sur la durée de validité du chèque ; des articles 30 et 31, qui concernent les mesures relatives à l'amélioration de la situation financière des exploitations agricoles ; de l'article 36, sur les délais de paiement ; de l'article 38 modifiant les règles applicables au stage de préparation à l'installation des artisans ; des articles 43 et 44, sur les exigences en matière de qualification professionnelle.

Certains des articles dont nous sommes saisis concernent le domaine de compétence du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, qui se trouve parmi nous.

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Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique

Je reviendrai sur la philosophie des articles qui concernent mon domaine de compétence, après quoi je souhaite que nous ayons la discussion la plus ouverte possible.

Plusieurs dispositions du texte relèvent de la démarche sur les nouvelles opportunités économiques que nous avons entreprise à l'automne dernier puis conduite pendant plusieurs mois avec des organisations professionnelles, des organisations syndicales, des experts, des intellectuels et des entrepreneurs.

Nous commençons à pratiquer une grammaire de la production qui ne suit pas les règles de l'économie de rattrapage dans le cadre de laquelle nous avons construit notre droit du travail, nos régulations classiques. Au sein de l'économie de l'innovation accélérée absolue dans laquelle nous nous trouvons, les cycles sont beaucoup plus rapides et les entreprises et les différents acteurs doivent pouvoir s'y adapter beaucoup plus facilement – c'est tout le débat qui vient d'avoir lieu avec le projet de loi sur le travail.

Le potentiel de création d'activités est très fort pour les très hautes qualifications – les plus adaptées à un cycle d'innovation important et qui se trouvent libérées des tâches les plus répétitives, grâce en particulier aux logiciels et à la modernisation de l'appareil productif –, mais aussi pour les qualifications beaucoup plus modestes. Or, les rigidités de l'économie française rendent difficile d'aller assez vite et assez fort dans les phases d'innovation et de forte création. Parfois même, elles constituent des barrières à la création d'emplois faiblement qualifiés.

Aussi les dispositions qui vous sont soumises visent-elles précisément à aider notre tissu économique à s'adapter, cela autour de trois axes.

D'abord, il faut faciliter le développement des activités et des emplois pour les travailleurs peu qualifiés, en particulier les travailleurs indépendants. Nous avons là un potentiel d'emplois très fort, que ce soit dans le secteur industriel, dans les services ou dans l'artisanat. Or, depuis vingt ans, nous avons pris des dispositions législatives et réglementaires fondées sur les principes, que nous entendons préserver et défendre parce que nous les considérons comme intangibles, de la sécurité et la santé du travailleur et du consommateur, mais qui ont dans le même temps créé des contraintes qui rendent plus difficile la création d'activité dans certains secteurs et sans que cela soit, pour le coup, forcément justifié.

Avec les articles 43 et 44, nous proposons, par conséquent, d'établir les principes d'un nouveau dispositif en matière de qualifications professionnelles et de définition des métiers. En ce qui concerne les qualifications, il s'agit, tout en maintenant les principes évoqués de sécurité et de santé, de ne pas créer de barrières excessives ou, en tout cas, de permettre la valorisation des acquis de l'expérience (VAE). Je pense ainsi à l'accord auquel nous sommes parvenus dans le secteur de la coiffure après des mois d'échanges, et qui va conduire à une vraie modernisation puisque les conditions pour ouvrir un salon seront soit d'être titulaire d'un brevet professionnel, ce qui était la seule possibilité jusqu'à aujourd'hui, soit, désormais, d'être titulaire d'un certificat d'aptitude professionnelle (CAP) et de justifier d'une expérience à valoriser. La situation était si ubuesque qu'elle ne permettait pas à une coiffeuse ou à un coiffeur justifiant de quinze ans d'expérience de reprendre un salon parce qu'elle ou il n'avait qu'un CAP.

Pour ce qui est des métiers, question particulièrement difficile, nous avons progressivement – notamment, il faut bien l'admettre, à cause de la loi relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises (loi dite « ACTPE ») – multiplié les tâches nécessitant des qualifications et donc créé des rigidités à l'entrée.

En examinant les amendements, vous allez donc vous interroger sur le fait de savoir si, pour être coiffeur, carrossier ou artisan boulanger, il faut bel et bien justifier de tel niveau de qualification, alors que nous vivons dans un monde où, pour ouvrir une pizzeria ou devenir restaurateur, aucune qualification préalable n'est requise. Tout ce qui relève du registre du commerce ne fait l'objet d'aucune qualification préalable. Ne reconnaît-on pas pour autant la valeur de ces métiers, n'est-on pas à même de distinguer la qualité des prestations offertes ?

Nous avons décidé dans le passé, dans le secteur de l'artisanat et des métiers, de façon non homogène avec les dispositions en vigueur dans le commerce, d'établir une barrière en termes de qualification. Si elle se justifie par le respect des principes de santé et de sécurité, elle doit néanmoins rester proportionnée. Or de nombreuses activités annexes rattachées à des métiers restent, par ce seul fait, relativement fermées. L'onglerie, par exemple, s'est beaucoup développée ces dernières années, souvent en contravention avec les dispositions en vigueur : cette activité relève-t-elle du secteur esthétique ou non ? Les salons consacrés à la coiffure africaine relèvent-ils des conditions aujourd'hui requises ? Les laveurs de voitures ne peuvent ouvrir leur activité, car dans les textes et la pratique de plusieurs chambres des métiers, on leur demande d'avoir un CAP de carrossier – laver des voitures est considéré comme une activité annexe de la carrosserie. Il s'agit donc de déterminer quelles activités peuvent être détachées des métiers principaux pour stimuler l'entreprenariat.

La réalité du terrain, vous la connaissez mieux que moi : des activités sont créées dans de nombreux endroits en contravention même du droit en vigueur. En 2015, un tiers des crédits accordés par l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE), a concerné des concitoyens n'ayant pas le niveau prérequis pour exercer l'activité dans laquelle ils entendaient se lancer. L'objectif du texte est, par conséquent, d'aider à l'entreprenariat pour des métiers faiblement qualifiés, ce qui n'enlève rien à la reconnaissance accordée à d'autres secteurs en termes de sécurité et de santé – principes, j'y insiste, que le texte réaffirme.

La création d'entreprise est un élément d'émancipation économique et sociale. C'est très important pour ceux de nos concitoyens qui, n'étant pas faits pour les études académiques ou n'ayant pas fait ce choix, s'orientent vers les voies professionnelles – jusqu'à présent insuffisamment reconnues. Pour ces derniers, l'entreprenariat peut être une voie d'entrée dans la vie économique plus facile que le salariat ; trouver un client peut être plus facile que trouver un employeur. Certains préfèrent le risque entrepreneurial à la subordination qu'implique le salariat. Il ne faut donc pas les priver de cette option qui n'est pas exclusive des autres, et pour cela renforcer l'homogénéité entre ce qui relève du commerce et ce qui relève de l'artisanat et des métiers.

Le deuxième axe consiste à faciliter la création et le développement d'entreprises. L'objectif est de faciliter le parcours de croissance. Nous proposons, par exemple, de supprimer l'obligation d'ouvrir un compte bancaire professionnel pour les microentreprises, qui peut constituer un obstacle à l'entreprenariat. Nous proposons également de revenir sur l'obligation de réaliser un stage préalable à l'installation pour les métiers artisanaux. Dans certains territoires, on met trop de temps à délivrer l'attestation de validation du stage – qui est, pour plusieurs métiers, une obligation récente. Or nous avons souvent affaire à des personnes dans des situations fragiles et qui ont besoin de travailler. Devoir attendre parfois plusieurs mois au lieu de cinq jours constitue une rigidité exorbitante, surtout compte tenu des qualifications qu'apporte ce stage. Nous proposons donc de réduire ce délai.

Le texte vise également à faciliter la croissance de l'entreprise, en lissant les effets de seuil qui peuvent se révéler très préjudiciables aux autoentrepreneurs, mais aussi en ouvrant un droit d'option à ceux qui n'ont pas initialement choisi le régime de la microentreprise mais dont ils pensent qu'il pourrait leur être profitable pour éviter cette défiance permanente entre ces deux catégories – il s'agit de proposer à des artisans, ou autres, qui sont au régime réel, d'opter chaque année pour le régime de la microentreprise dans le cas où ils y trouveraient avantage. Les analyses réalisées par le ministère des finances montrent que 10 à 12 % des artisans qui sont au régime réel auraient intérêt à adopter le régime de la microentreprise. Ce dernier, dont certains entrepreneurs veulent la disparition, permet de démarrer plus facilement et plus rapidement.

Nous proposons, par ailleurs, pour la transformation d'une entreprise individuelle en société, la suppression de nombreuses obligations coûteuses et peu utiles.

Enfin, le troisième axe est la modernisation du régime de financement des startups, des petites et moyennes entreprises (PME) et des entreprises de taille intermédiaire (ETI). Il s'agit d'améliorer le dispositif juridique en matière de délais de paiement – élément essentiel de développement de l'économie. Ces délais sont, depuis 2008, beaucoup plus encadrés. Nous avons amélioré ce dispositif grâce à la loi relative à la consommation et à la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques. Nous proposons de durcir encore davantage les règles, car le non-respect des délais de paiement pénalise en premier lieu les plus faibles ou les acteurs dont la croissance est la plus dynamique, qui ont besoin d'un fonds de roulement important ou qui sont fragiles dans leur cycle parce qu'en train d'investir. De surcroît, le respect des délais relève de ce que j'appellerais l'ordre public économique : la loi du plus fort ne saurait prévaloir. Nous entendons, par conséquent, relever le plafond de l'amende administrative en la matière.

Nous proposons, en outre, de favoriser l'orientation à long terme des investissements des régimes de retraite supplémentaire en aménageant ces derniers et en donnant aux entreprises de l'économie sociale et solidaire l'accès aux ressources du livret de développement durable.

Vous le voyez, l'esprit du texte est de faciliter la création, le développement et le financement d'entreprises dans une économie dont les cycles sont beaucoup plus rapides. Il est donc indispensable d'offrir la palette d'instruments qui permettra à nos entreprises, à nos entrepreneurs et à nos concitoyens de répondre aux défis de l'économie contemporaine.

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Le premier objectif du présent projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, projet de loi dit « Sapin II », est non seulement de hisser la France au niveau des meilleurs standards européens, mais aussi d'en faire une pionnière dans la lutte pour une économie saine. En effet, l'établissement de limites et d'une certaine transparence constitue la contrepartie du libéralisme – système que nous avons désormais adopté. Il s'agit de construire une économie robuste autant qu'agile, une économie responsable. Tel est notre dessein commun.

J'observe, notamment pour ce qui concerne l'agriculture, que nos différences sont minimes. Ensemble, nous souhaitons revenir sur les rapports léonins introduits par la loi de modernisation de l'économie (LME), rétablir la capacité pour les producteurs d'être entendus dans les négociations, obliger les plus puissants à se montrer transparents dans la constitution des prix et éviter que ne soient commercialisés des contrats qui n'ont pas à l'être. Bref, il est question d'« assainir » la loi LME, à défaut de la réformer radicalement, ce qui nécessiterait des travaux dépassant largement le cadre du projet de loi Sapin II.

La partie concernant M. Emmanuel Macron porte sur la modernisation des petites entreprises – domaine en pleine mutation, en plein bouillonnement. Je suis très attaché au travail comme « lieu » de première intégration, d'apprentissage de la citoyenneté. Il nous faut repenser le chômage comme un désoeuvrement, comme une privation de l'oeuvre, elle-même émancipatrice par nature pourvu que l'écosystème le permette.

Permettre à des personnes exclues du monde du travail de l'intégrer doit être notre priorité. De multiples politiques publiques tentent avec plus ou moins de succès, plus ou moins de violence, de répondre à cet enjeu. Je souhaite vraiment que les propositions ici faites ne soient pas caricaturées, mais soient entendues dans ce qu'elles ont de juste, quitte à ce qu'elles soient, le cas échéant, modérées afin que nous parvenions au consensus le plus large.

Nous devons donner à chaque génération sa chance d'innover, d'entrer dans la vie active, et ce ne doit pas être forcément au prix d'un retour sur des conquêtes populaires : je pense à la reconnaissance du statut des artisans, à la fierté de nos jeunes apprentis lorsqu'ils obtiennent un diplôme qualifiant qui leur permet d'être reconnus dans la société.

C'est cet équilibre que nous entendons trouver. Plutôt que d'opposer la vieille économie à la nouvelle, les insiders aux outsiders – ce qui relèverait du poncif –, je préfère des formules qui préservent les uns et les autres. Je suis sûr que nous pouvons promouvoir les jeunes entrepreneurs, toujours fragiles, qui prennent des risques et qui, dans nos villes et nos campagnes, inventent en partie le tissu économique du futur. Plutôt que d'opposer entre elles toutes ces personnes issues des milieux populaires, qu'elles soient artisans ou en train de construire des entreprises d'un nouveau type, nous devons consolider l'écosystème économique auquel nous sommes si attachés et nous concentrer sur la dénonciation des authentiques privilégiés que cible le projet de loi Sapin II : ceux qui, appartenant au monde de la finance internationale, trichent, ceux qui méprisent les droits de l'homme et du citoyen, ceux qui fabriquent une mondialisation sans foi ni loi.

Nous devons, en matière d'entreprenariat populaire, trouver des terrains d'entente, organiser des transitions plutôt que des fractures.

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Je m'attarderai surtout sur les articles 38 et 43. Il paraît très compliqué, une fois qu'on a entamé son activité, qu'on est immatriculé, de revenir en arrière pour aller passer un stage. Pour autant, il me semble difficile de supprimer complètement le stage de préparation à l'installation, même s'il ne donne pas satisfaction dans sa configuration actuelle.

Vous avez évoqué, Monsieur le ministre, la possibilité de revoir les régimes de dérogations. Quel élargissement proposez-vous ? Une concertation serait la bienvenue, car nous souhaitons une mise en cohérence des dispositifs proposés avec ceux, notamment, de la loi dite « Pinel ». Le rapporteur a raison de considérer que nous devons éviter de tout remettre à plat.

S'agissant de l'article 43, on a noté l'absence des représentants des professions dans la procédure d'élaboration du décret.

Vous vous êtes engagé sur la validation des acquis de l'expérience. Vous avez évoqué le cas de la coiffure ; les députés du groupe Socialiste, républicain et citoyen souhaitent que ce dispositif soit étendu à tous les secteurs. Les parcours ne sont, en effet, plus linéaires mais multiples et nécessitent que la VAE soit accessible non seulement aux titulaires du baccalauréat mais aussi à ceux qui ne le sont pas. Il faut permettre à certains de réaliser de petits travaux ou de travailler dans le secteur des services, où la demande est forte. Il n'en reste pas moins que nous devons garantir aux utilisateurs transparence et professionnalisme en matière de sécurité et de santé, certes, mais également dans le rendu du travail fourni.

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Je salue la bonne initiative consistant à saisir notre commission d'articles portant sur des sujets importants comme la situation financière des exploitations agricoles, les délais de paiement ou l'entreprenariat individuel. Les amendements que nous avons déposés visent d'ailleurs davantage à modifier et à ajuster les dispositions proposées plutôt qu'à les supprimer, ce qui montre que nous allons plutôt dans le même sens.

Permettez-moi, avant d'aborder les articles dont nous sommes saisis, Monsieur le ministre, une petite incise sur l'article 16 relatif à la commande publique. De la commande publique à la question des délais de paiement, il n'y a qu'un pas. Or l'État doit montrer l'exemple, car nombre de nos entreprises sont souvent victimes, de sa part, de délais de paiement que je qualifierais d'outranciers.

Une fois pour toutes, nous devons nous dire que le rapport Hagelsteen et la loi LME, c'était il y a huit ou neuf ans : le monde bouge et nous conduit à agir différemment. À cet égard, l'article 30 est l'exemple type de l'adaptation à laquelle nous devons nous préparer dans la perspective de la fin des quotas laitiers. Il était important que nous puissions obtenir des réponses dans un contexte de guerre des prix que se livrent les acteurs de la grande distribution et dont les conséquences sont très lourdes pour les producteurs.

J'insisterai sur la publication des comptes des entreprises. Loin de moi l'idée que les distributeurs ne doivent pas les publier. Je pense plutôt aux PME et aux TPE : la publication de leurs comptes – qui détaillent la vie de l'entreprise – peut offrir aux distributeurs un moyen de pression sur elles. C'est pourquoi nous devrions adopter le principe, si vous me permettez l'expression : « publication avec modération ». Bien sûr, les groupes de grande taille et les distributeurs doivent publier leurs comptes, mais, j'y insiste, nous devons faire attention aux petites entreprises familiales pour lesquelles une telle obligation peut constituer une source de fragilité.

Vous avez insisté, Monsieur le ministre, sur les délais de paiement. Nous devons, en effet, avancer sur le sujet et j'estime que nous pouvons aller encore plus loin que le texte. Il faudra, en particulier, préciser comment la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) pourra intervenir. Texte après texte, on confie à cette dernière de plus en plus de missions alors qu'on sait combien ses conditions de travail sont difficiles. Comment pourra-t-elle effectuer ses nouvelles missions ?

En ce qui concerne la qualification professionnelle, les éléments mis en avant sont souvent la sécurité et la santé. Le texte va dans le bon sens en matière de clarification. Pour reprendre l'exemple de la coiffure, on ne peut pas ouvrir un salon si l'on ne peut justifier des diplômes requis, mais on peut être coiffeur à domicile et sans contrôle. C'est dire si le principe de sécurité est ici mis à mal !

De plus en plus de nos concitoyens souhaitent pouvoir créer leur job. Dans cette perspective, la valorisation des acquis de l'expérience doit être encouragée, puisqu'elle peut jouer un vrai rôle d'ascenseur social et permettre à ceux qui ne sont pas faits pour les études ou à ceux qui ont subi des échecs professionnels de rebondir, de changer de voie.

Le texte compte donc des dispositions intéressantes, et nous serons attentifs, Monsieur le rapporteur, au sort que la majorité réservera à nos amendements de bon sens.

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Les dispositions que le Gouvernement propose pour lutter contre la corruption et promouvoir la transparence, nous les attendons depuis 2012. Ce texte est donc bienvenu. Certes, il n'est pas complet, mais il permettra à la France de combler une partie de son retard par rapport aux pays anglo-saxons.

Nous regrettons qu'aucune disposition ne soit prévue pour lutter contre la fraude internationale à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – autrement appelée « carrousel de la TVA » –, qui fait perdre à notre pays au moins 10 milliards d'euros par an, selon le rapport de M. Alain Bocquet.

Notre commission est saisie, notamment, des articles relatifs à la transparence, et plus particulièrement dans le domaine de l'agriculture. Le monde agricole va de crise en crise, et les agriculteurs comptent beaucoup sur nous pour améliorer leur situation. Les mesures proposées ne nous semblent toutefois pas suffisantes, et c'est pourquoi les députés du groupe Écologiste proposeront plusieurs amendements pour les compléter.

Ainsi défendrai-je la mise en place, en cas de crise dans une filière, de coefficients multiplicateurs pour tous les produits agricoles et alimentaires, comme il en existe déjà pour les fruits et légumes. De même, je défendrai un amendement prévoyant que, sur l'étiquette d'un produit, en magasin, soit indiqué le prix auquel le producteur a vendu sa production, afin de respecter le principe de transparence. Nous présenterons également des amendements visant à encadrer et à réguler la vente au déballage des fruits et légumes sur la voie publique, sur les aires de stationnement. Des abus croissants ont été observés dans certaines régions, en particulier dans le Sud-Ouest. Il s'agit ainsi de lutter contre cette forme de concurrence déloyale pour les commerçants de proximité en fruits et légumes.

Nous proposons, par ailleurs, de revenir sur la suppression de l'obligation d'un stage préalable à l'inscription au répertoire des métiers. Les organisations qui encadrent ces stages, et dont nous avons rencontré les représentants, se sont engagées à les mettre en place dans un délai relativement court – entre un et deux mois.

Pour ce qui est du dispositif prévu à l'article 43, il n'est satisfaisant ni pour les entrepreneurs et artisans, ni pour les salariés, ni non plus pour les consommateurs. Nous sommes attachés aux savoirs professionnels et à leur transmission. Le Gouvernement a fait valoir à plusieurs reprises que certaines activités ne nécessitaient pas de formation. Or seul un très petit nombre d'activités est concerné. Nous pensons que qualité et sécurité des réalisations nécessitent une formation ou au moins une expérience suffisante et, à ce titre, la validation des acquis de l'expérience peut être une piste fort intéressante.

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Naturellement, le groupe Union des démocrates et indépendants aborde ce texte de façon constructive.

Sur la forme, Monsieur le ministre, vous nous avez habitués, déjà, à un certain mélange des genres. Vous avez été capable, dans la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite « loi Macron », d'aborder des domaines aussi divers que le permis de conduire, le transport par cars et l'ouverture des magasins le dimanche. Ici, vous êtes capable, dans le même texte, d'évoquer le manquement à la probité, la transparence dans les rapports entre les représentants d'intérêts et les pouvoirs publics, la régulation financière, les relations commerciales, l'amélioration des parcours de croissance des entreprises. Comme dirait M. Charles de Courson, vous êtes un Arlequin du libéralisme ! La loi Sapin II n'est-elle pas, finalement, la loi Macron II qui devait porter sur les nouvelles opportunités économiques ?

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Je précise que seuls quinze articles du texte concernent le ministre de l'économie.

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Je m'adresse au ministre ici présent, Madame la présidente. L'écoutant attentivement et avec plaisir, je me disais que ses explications devraient s'adresser à ceux qui « dorment debout la nuit » plutôt qu'à nous : ils comprendront mieux et pourront enfin aller se coucher !

J'en viens au fond. Nous présenterons une bonne quinzaine d'amendements sur tout ce qui a trait aux relations commerciales entre la grande distribution, les industriels et les producteurs.

J'ai bien compris que le Gouvernement serait très attentif, quant au volet agricole, à la question de la cessibilité des contrats laitiers. J'ai également noté qu'il serait tout aussi vigilant sur les questions de renforcement des sanctions à l'encontre de toutes les entreprises, du secteur commercial comme du secteur industriel, qui ne publieraient pas leurs comptes.

Je suis plus dubitatif, à ce stade de la discussion, sur la volonté du Gouvernement d'avancer de manière très précise sur la question des relations commerciales, et d'adapter la loi LME. Depuis 2012, tout de même, il nous explique qu'il y a un réel déséquilibre dans les relations entre les centrales d'achat, les industriels et les producteurs. Il faut donc procéder à un rééquilibrage, et nous proposerons donc des amendements en ce sens. Nous irons même jusqu'à ouvrir le débat sur la dissipation, en quelque sorte, d'une forme d'oligopole : on ne compte en France que quatre ou cinq centrales d'achat.

Nous observons avec attention votre volonté d'offrir de nouvelles opportunités aux professions indépendantes, aux artisans, même s'il convient de veiller à ne pas casser tout l'effort des chambres des métiers pour valoriser l'artisanat, notamment le travail des jeunes apprentis. C'est pourquoi nous souhaitons défendre les stages de préparation à l'installation : nous craignons que la réduction de la portée de ces stages, voire leur suppression, n'aboutisse à la dévalorisation, à la fragilisation des métiers concernés.

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Je m'interroge, Monsieur le ministre, sur le niveau de concertation que vous avez mis en place avec les organisations professionnelles. Vous êtes, semble-t-il, parvenu à faire accepter vos propositions aux organisations professionnelles du secteur de la coiffure. Mais, plus généralement, dans le cadre de votre conception très moderne du dialogue social, et qui n'a rien à voir avec Arlequin ou la Commedia dell'Arte, quelles sont les mesures que vous avez réussi à partager avec les organisations professionnelles, et en particulier avec celles du bâtiment ?

Vous venez de réitérer votre volonté – j'allais dire votre obsession – de libérer l'activité, que vous avez déjà développée avec la fameuse loi Macron. Or j'ai le sentiment que la souplesse que vous introduisez risque de tirer de nombreux métiers vers le bas, de favoriser la multiplication de petits métiers, qui permettrait, certes, éventuellement, et de façon assez artificielle, de lutter contre le chômage, mais de métiers à faible revenu, exercés sur des temps limités, selon une forme de tourniquet. On sait, pour le constater dans nos territoires, que certaines personnes qui s'orientent vers un métier sans qualification pourraient ne pas tenir longtemps.

Certains métiers exigent une qualification. Contrairement à ce que vous affirmez, je pense même que les métiers du bâtiment, par exemple, exigent plus de qualification qu'il y a quelques décennies, notamment en matière d'isolation, d'économie d'énergie ou d'emploi de nouveaux matériaux. On constate que des consommateurs ayant fait appel à des entreprises insuffisamment formées, ont rencontré par la suite des difficultés liées à la mauvaise qualité du travail réalisé. En milieu rural, les exemples en matière d'assainissement non collectif ne manquent pas : combien de particuliers ont eu affaire à des entreprises qui croyaient bien faire et ont installé un assainissement non collectif ne répondant pas aux normes, puis se sont rendu compte, à l'occasion d'un contrôle, qu'il fallait tout recommencer parce que l'entreprise n'avait pas les compétences nécessaires ?

Avez-vous bien évalué les effets pervers de cette sorte de libéralisation de certains métiers ?

Vous entendez ne pas obliger les microentrepreneurs à ouvrir un compte bancaire professionnel. Plutôt que l'introduction de plus de souplesse, la réponse pourrait consister en un organisme public d'accompagnement qui, grâce à la maîtrise publique, pourrait servir de levier de développement et d'accompagnement des entreprises plutôt que de les jeter dans les griffes de banquiers qui ne vont pas supporter longtemps des déséquilibres de trésorerie ou le non-remboursement de crédits.

Vous allez dire que c'est une obsession chez moi, mais derrière tout cela, c'est une société qui va perdre ses repères. Cette multitude de petits métiers en train d'apparaître est une façon artificielle de lutter contre le chômage, un faux-semblant dont on ne mesure pas suffisamment les conséquences aujourd'hui.

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Merci, Monsieur le ministre, Monsieur le rapporteur, pour votre présentation de ce texte, que le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste accueille avec bienveillance.

En ce qui concerne l'article 25, qui vise à réduire la durée de validité des chèques de douze à six mois, nous ne comprenons pas bien le sens de cette disposition, si ce n'est qu'elle tend à diminuer l'incertitude liée à l'encaissement du chèque, que ce soit pour les entreprises ou pour les ménages. Toutefois, si l'on en croit l'étude d'impact, cette mesure vise, à terme, la disparition du chèque. Il convient d'être prudent en la matière, car il s'agit d'un moyen de paiement encore très utilisé, notamment par les personnes âgées. Il est très ancré dans les pratiques, et il ne faut pas imaginer pouvoir le faire disparaître dans la précipitation. Quoi qu'il en soit, il conviendrait de rassurer ceux qui s'en inquiètent.

L'interdiction de la cession à titre onéreux des contrats de vente de lait de vache, prévue à l'article 30, était une proposition du rapport d'information sur l'avenir des filières d'élevage, rédigé par nos collègues Mme Annick Le Loch et M. Thierry Benoit. Elle figurait également dans la proposition de loi en faveur de la compétitivité de l'agriculture et de la filière agroalimentaire, dont le rapporteur était M. Antoine Herth. C'est une bonne mesure, attendue par la profession agricole.

D'une manière générale, tout ce qui peut rapprocher le prix final payé par le consommateur du coût de la production agricole va dans le bon sens. Il nous faut trouver le bon équilibre et le bon réglage, car nous sommes tous ici conscients que les déséquilibres sont trop grands actuellement et que les acteurs en position de force ont un pouvoir de négociation bien trop élevé, qui joue en défaveur des producteurs agricoles. Il faut rétablir un minimum d'équité entre producteurs et transformateurs, mais également entre producteurs et grande distribution.

Nous avons déposé un amendement sur le renforcement de l'encadrement de la vente au déballage des fruits et légumes, car elle pénalise les primeurs qui subissent une concurrence déloyale.

Nous avons pu constater l'impuissance des petites mesures d'ajustement de la LME. Il est donc nécessaire de remettre un peu d'équité dans ces relations commerciales.

Enfin, nous allons examiner des dispositions sur l'artisanat et l'entreprenariat. Vous connaissez l'attachement de notre groupe aux artisans et aux commerces de proximité. Nous proposerons des amendements visant à assurer la défense des savoir-faire professionnels et la qualité du service pour le consommateur et le client.

En ce qui concerne l'obligation préalable du stage de préparation à l'installation, même si des difficultés pratiques se posent aujourd'hui en termes de délais et d'organisation, il ne nous paraît pas opportun de déporter ce stage. Quitte à en améliorer les conditions pratiques, nous en souhaitons le maintien, car nous devons défendre la professionnalisation.

Le même type de questions se pose pour les articles 43 et 44. Certes, il faut fluidifier et simplifier, mais il ne faut pas non plus trop baisser la garde au regard des qualifications requises. La reconnaissance des savoir-faire détenus par l'artisan, quel que soit son corps de métier, mérite d'être soutenue et encouragée. Nous vous proposerons plusieurs amendements d'amélioration en ce sens.

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À l'article 38, la mesure d'assouplissement du stage de préparation à l'installation suscite l'inquiétude de certains professionnels, notamment parce qu'elle a pour objectif d'accélérer le processus d'immatriculation que chacun doit respecter pour installer son entreprise. En tenant compte de la diversité croissante des profils et des parcours des créateurs d'entreprise, cette disposition pose plus largement la question de l'adaptation de notre cadre réglementaire à l'évolution des modèles et des réalités de l'entreprise.

Sur le terrain, comment mieux accompagner ces nécessaires évolutions ? Parallèlement aux dispositions prévues, quels outils souhaitez-vous mettre en place pour conduire le changement ? Quels relais trouver au sein du tissu économique local pour porter ces messages, alors même qu'on doit aussi faire face à une grande hétérogénéité des profils de créateurs ?

Ce point spécifique illustre, selon moi, les blocages qui perdurent parfois au sein de TPE et de PME, alors même que nos modèles économiques entrepreneuriaux doivent évoluer. C'est un sujet sur lequel j'ai eu l'occasion d'intervenir à plusieurs reprises, s'agissant notamment de la transformation numérique des PME, des TPE, voire des autres entreprises. On est plutôt confronté à un problème de méthodologie en matière de mode de gouvernance, de choix d'un dispositif efficace de transformation pour le numérique, et d'accompagnement des stages d'installation. Sur quels partenaires pensez-vous vous appuyer, avec quelle déclinaison locale dans les régions, pour avoir les processus de création les plus efficients possibles ?

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Ce projet de loi tant attendu est, encore une fois, un texte fourre-tout, comme le projet de loi pour une République numérique. Ce manque de cohérence se lit d'ailleurs dans l'avis du Conseil d'État, qui a littéralement charcuté le texte que lui avait transmis le Gouvernement et qui a noté l'insuffisance de l'étude d'impact. Sur certains points, cela devient une habitude.

De nouveau, nous sommes devant un patchwork de mesures, sur l'agriculture, les moyens de paiement, l'artisanat, le lobbying – cette dernière partie sera sans doute la plus intéressante à examiner. Il y a également pas moins de dix-sept habilitations à légiférer par ordonnances, dont cinq seulement en vue de transposer des directives européennes. Ce texte va sans doute devenir la voiture-balai des dispositions qui n'ont pas été prises pendant le quinquennat, par manque de préparation et par manque de volonté. Nous y reviendrons, notamment en ce qui concerne l'agriculture.

Le volet économique est assez maigre et se concentre notamment sur l'artisanat, mais pas forcément sous l'angle de la modernisation. Si mes souvenirs sont bons, le projet de loi sur le travail devait aussi comporter des dispositions sur le financement des entreprises. Le ministre de l'économie que vous êtes avait évoqué, l'année dernière, des mesures pour faire émerger une économie de l'innovation, qui devaient être inscrites dans la loi sur les nouvelles opportunités économiques (NOÉ). Elles devaient ensuite figurer dans le projet de loi pour une République numérique, puis dans cette loi Sapin II. Là encore, rien du tout !

Il y a, à mon avis, beaucoup plus à attendre des amendements et des ajouts que du contenu du projet de loi en l'état. J'attends donc beaucoup de l'examen des 216 amendements soumis à la commission des affaires économiques.

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Vous avez raison, Monsieur le ministre, il faut faire bouillonner le système, apporter de l'air frais, donner des opportunités à nos jeunes, mais néanmoins ne pas déraper.

En ce qui concerne les indépendants, il y a des filets de sûreté, s'agissant notamment de la sécurité et de la santé. Mais il faut veiller à préserver les qualifications et à ce que les règles de l'art soient respectées. La santé et la sécurité ne suffisent pas, des malfaçons de toute sorte peuvent rendre les choses extrêmement délétères pour les usagers. D'autant qu'ensuite, il y aura des décrets qui laisseront apparemment toute latitude pour arbitrer, ici ou là, des facilités pour telle ou telle profession.

S'agissant des autoentrepreneurs, depuis le début cette législature est marquée par l'hésitation. On a tenté de remettre en cause le principe, de le réfréner, puis de le libérer, pour revenir en arrière, donner à nouveau des possibilités, changer les seuils : on cherche la bonne maille sans la trouver. En tout cas, il y a là un risque de concurrence déloyale.

Pour ce qui est de l'agriculture, nous devons absolument soutenir nos paysans. Il faut de la transparence dans la fixation des prix, mais il faut aussi connaître les coûts de production des paysans et leurs marges, afin de leur donner la possibilité de négocier en amont avec les transformateurs et en aval avec les distributeurs.

Enfin, il y a le problème du foncier, qui est majeur, avec le risque de contournement des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) pour un certain nombre de ventes ou encore de démantèlement des exploitations familiales.

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J'ai déposé quelques amendements visant à rééquilibrer les relations commerciales entre distributeurs et fournisseurs, mais aussi à mieux rémunérer les producteurs agricoles. Je pense aux producteurs de viande et aux producteurs de lait, qui vendent au-dessous de leur prix de revient et qui subissent depuis plusieurs mois une forte volatilité des prix de production.

Les productions agricoles et les produits alimentaires ne sont pas n'importe quels produits. Or, malgré un renforcement du formalisme et des sanctions, à travers la loi de mars 2014, relative à la consommation et la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, les négociations commerciales, notamment celles de 2016, ont été, aux dires de certains industriels, encore plus « sanglantes » que celles de 2015.

Ce n'est pas faute d'avoir tout essayé à travers la médiation, les comités de suivi, les tables rondes, les contrats de filières. Il semble que rien ne change. Nous le savons tous, les dispositions législatives ne régleront pas tout. C'est aux acteurs de repenser leur place et leur rôle dans l'économie et dans les filières, de pacifier les relations commerciales et de mettre un terme à une guerre des prix néfaste pour un grand nombre d'entre eux.

Monsieur le ministre, comment faire mieux respecter, notamment par les distributeurs, les dispositions législatives actuelles dont tout le monde s'accorde à dire qu'elles sont suffisantes ? Le bilan de la LME doit être fourni pour décembre 2016. Pourrait-il servir de base à une modification de ses dispositions ?

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Ce texte est effectivement un fourre-tout qui, certes, peut aller dans le bon sens, mais ne répond pas aux enjeux actuels.

En ce qui concerne les articles 43 et 44, il y a un risque de diminution de la qualité des ouvrages et de dévalorisation des métiers, avec la remise en cause d'un certain nombre d'obligations en matière de qualification. L'objectif de simplification est louable, mais la baisse de la courbe des exigences n'entraîne pas forcément celle du chômage, car les deux ne sont pas corrélées. Je ne suis pas sûr que ce soit la meilleure des réponses à apporter à ces métiers artisanaux.

En ce qui concerne les articles 30 et 31, relatifs au secteur agricole, les outils prévus suffiront-ils à rééquilibrer les rapports de force ? Des propositions ont été faites, notamment dans la proposition de loi dont notre collègue Antoine Herth était le rapporteur, ainsi que dans le rapport de la mission sur l'avenir des filières d'élevage, que nous avons rendu, avec Mme Annick Le Loch et M. Thierry Benoit. Certaines ont été prises en compte, mais il en faudrait d'autres pour aller davantage dans le sens d'un rééquilibrage des rapports de force, s'agissant notamment de la guerre des prix. Que pensez-vous de la notion d'abus de dépendance économique, que vous avez un temps soutenue ?

Pour ce qui est de l'économie de l'innovation, le projet de loi Sapin II, finalement, est en retrait au regard de ce qu'il y avait dans le projet de loi Macron II, un certain nombre de dispositions étant passées à la trappe. Allez-vous, par voie d'amendements gouvernementaux, rétablir ces dispositions, dont certaines étaient intéressantes ? Je citerai la fin de l'obligation d'un double compte bancaire pour les microentreprises, la facilitation des prises de décision dans les entreprises, avec des assemblées générales dématérialisées pour des sociétés non cotées, et l'instauration d'un droit à une seconde chance, qui est un droit à rebondir, notamment quand on connaît la liquidation judiciaire.

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Les dispositions de l'article 43 sur les qualifications professionnelles applicables aux activités artisanales suscitent de très vives inquiétudes au sein du monde artisanal. La loi Pinel avait pris en compte la qualité et les savoir-faire des artisans, et mis en place le contrôle des qualifications dont on devait justifier et non plus simplement déclarer pour obtenir l'immatriculation au répertoire des métiers. La qualification par activité et non plus par groupe d'activités présente aussi un risque.

La loi Pinel définissait les conditions de la qualité d'artisan. Les artisans devaient justifier d'un diplôme, d'un titre ou d'une expérience professionnelle. L'article 43 remet en cause cette obligation de qualification pour certaines professions des activités artisanales, sauf celles qui présentent un risque pour la santé ou la sécurité des personnes. Ces mesures sont préjudiciables et ne tiennent pas compte de la complexité des métiers ni de l'évolution de leur technicité. Qui plus est, à un moment où l'on demande de plus en plus de qualification – par exemple, pour obtenir le label « Reconnu garant de l'environnement » (RGE), requis pour bénéficier du crédit d'impôt transition énergétique –, l'article 43 renvoie à un décret qui n'intègre pas l'avis des professionnels.

Ces modifications auront de graves conséquences, en particulier dans le secteur du bâtiment, puisque cet article introduit aussi la possibilité de scinder les métiers.

Permettez-moi, pour finir, de relayer une interrogation de responsables de chambres de métiers : où s'arrête le bricolage et où commence l'artisanat ?

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Tout le monde s'accorde à dire que la France est très en retard en matière de lutte contre la corruption économique. Elle est, en effet, classée vingt-troisième par la principale organisation de la société civile qui se consacre à la transparence et à l'intégrité de la vie publique et économique. Or le projet de loi Sapin II déçoit, par son manque d'ambition, les organisations non gouvernementales (ONG), les associations et les spécialistes.

Selon vous, Monsieur le ministre, en matière de lutte contre la corruption, les amendements introduits à la suite de l'avis du Conseil d'État réduisent-ils significativement la portée des chapitres consacrés à l'encadrement du lobbying et à la protection des lanceurs d'alerte, comme le pensent les ONG, les associations et les spécialistes ?

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En ce qui concerne les produits alimentaires et agroalimentaires, êtes-vous favorable à des mesures législatives allant dans le sens d'une décartellisation de la grande distribution, en particulier des quatre principaux groupes de centrales d'achat ou groupements d'achat ?

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J'ai, moi aussi, une question concernant l'article 43, sur lequel j'ai déposé un amendement de suppression. Cet article engendre des inquiétudes au niveau national, au sein des organisations professionnelles, sur les territoires et au sein des entreprises.

Nous avons bien compris votre volonté de faire naître d'autres types d'activités qui ne soient préjudiciables ni au TPE, ni aux PME, mais la rédaction actuelle du texte ne convient pas. De plus, les quelques éléments dont nous disposons aujourd'hui concernant le décret nous semblent insuffisants.

Notre commission a travaillé sur ce sujet, notamment dans le cadre de la loi Pinel, dont l'application fait l'objet de travaux encore en cours de la part de collègues parlementaires. Nous disposons également des travaux de M. Laurent Grandguillaume. Bien entendu, nous ne sommes pas là pour nous opposer de façon dogmatique aux mesures qui sont proposées. Nous essayons seulement d'accompagner votre texte, de le bonifier, et le rapporteur a déposé des amendements.

Nous devons avancer, notamment sur l'article 43, et dépassionner les débats sur nos territoires. Les TPE et les PME craignent, en effet, de voir leur activité exposée à une concurrence déloyale. On ne peut pas les déposséder de certaines activités, car elles n'arriveront plus à conserver un équilibre économique.

Nous sommes prêts à accompagner ce texte, à le retravailler, d'autant que, d'ici à la séance publique, nous aurons le temps d'organiser de nouvelles tables rondes. Vous avez réussi à apaiser certaines tensions, notamment chez les professionnels de la coiffure et du ramonage ; nous devons y parvenir aussi pour celles qui existent parmi nos concitoyens, les députés, et plus généralement dans le monde économique, qui est pourvoyeur d'emplois, et aussi de salariat, sur nos territoires. Le salariat, nous y croyons, et je sais que vous y croyez aussi.

Nous nous engageons à vos côtés, Monsieur le ministre, pas contre vous, pour faire en sorte que tout le monde soit rassuré, qu'un inventaire précis soit dressé et que les consultations nécessaires soient menées pour donner à ces dispositions le plus d'efficacité possible.

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Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique

Ma méthode est celle de la co-construction, car je considère que la vérité n'est pas détenue par quelques-uns seulement.

La question des qualifications professionnelles a fait l'objet de nombreuses remarques. Nous vivons sous le régime de la loi de 1996, qui a défini les éléments de sécurité et de santé, et mis en place un dispositif pour les qualifications et les métiers. Avec le temps, du fait des réseaux consulaires comme de l'administration, celui-ci a eu tendance à se rigidifier et n'a pas toujours accompagné la vie économique.

À ce titre, l'article 16 de la loi relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises revient sur cet équilibre en prévoyant une qualification par métiers, alors que la qualification s'appréciait jusqu'à présent au niveau du domaine d'activité, ce qui permettait aux artisans détenteurs d'un CAP dans l'un des métiers du domaine d'activité d'en exercer toutes les tâches. Or, au titre de la loi ACTPE, ces artisans seraient obligés de repasser un CAP pour pouvoir remplir des missions qu'ils accomplissent actuellement. Si le décret n'a pas été pris, c'est parce qu'il aurait créé une insécurité juridique difficile à gérer. Allez donc expliquer à des gens qui ont un CAP en électricité et qui, jusqu'à présent, accomplissaient des tâches connexes, qu'il leur faut passer un autre CAP ou acquérir une autre qualification !

Forts de cela, nous avons procédé à une concertation. Dialoguer, pour moi, ce n'est pas considérer que les parties prenantes, qui représentent des intérêts catégoriels, connaissent forcément la voie à suivre pour aller dans le sens de l'intérêt général.

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C'est une forme de reconnaissance de la lutte des classes !

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Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique

Je reconnais pleinement la lutte des classes, mais la question est de savoir comment jaillit l'intérêt général. Il ne jaillit pas en suivant la totalité des intérêts catégoriels, sinon, c'est l'inaction publique qui prévaut.

Certaines professions ont accepté de bouger. Avec le secteur de la coiffure, nous avons réussi, en cheminant, à trouver des accords qui ont conduit, alors que ce n'était pas le cas jusqu'à présent, à reconnaître les acquis de l'expérience pour faire évoluer des situations devenues ubuesques.

Nous n'avons pas eu la même réussite avec la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB), ce que je regrette. J'ai vu le président Patrick Liébus à plusieurs reprises, il y a eu un vrai travail de concertation, mais la CAPEB refuse de bouger, tant sur le sujet des qualifications que sur celui de la microentreprise. L'équilibre obtenu pour le régime de la microentreprise dans le cadre de la loi ACTPE ou du rapport Grandguillaume ne la satisfera jamais puisqu'elle veut la suppression de ce régime. Or je pense que c'est mauvais pour notre économie.

Un gros travail a été fait par les services du ministère, et une mission de plusieurs mois a été confiée à Mme Catherine Barbaroux, qui a consulté, organisé la concertation et produit un travail public qui a conduit à ces propositions.

En ce qui concerne les qualifications, il ne s'agit pas de revenir sur tout, mais de reconnaître les acquis de l'expérience, et l'avancée importante ici est que la VAE se fait de manière simple. Dans l'artisanat, il suffit de justifier de trois années d'expérience professionnelle. Là aussi, il faut éviter les comportements malthusiens. Nous voulons pouvoir décliner ce que nous avons obtenu dans le secteur de la coiffure.

Hors la coiffure, dans tous les autres métiers, l'entrée en termes de qualification se fait par le CAP. Nous ne proposons, pour aucun métier, de revenir sur le CAP. Ce qui est en question, c'est l'accès à des types d'activité et le caractère détachable de certaines d'entre elles. Là est le coeur du problème, en particulier pour le bâtiment. Je suis tout à fait favorable à l'amendement de votre rapporteur, qui tend à préciser que le décret sera pris après avoir consulté les professionnels. C'est un point dont il faut, en effet, s'assurer, et il en est de même en matière de VAE.

Ensuite, l'idée est d'assurer les garanties, de définir le périmètre et le modus operandi des activités détachables. Je vais vous en donner la philosophie à travers quelques exemples.

Il est déraisonnable que le lavage de voitures relève des activités régies par le CAP de réparateur automobile et de carrossier. C'est pourtant le cas dans beaucoup de chambres des métiers.

Dans le bâtiment, il est évident qu'il faut maintenir l'ensemble des activités du gros oeuvre – maçonnerie, charpente, couverture – et du second oeuvre – pose de portes, de fenêtres, électricité – dans le champ des métiers régis par des qualifications, car il s'agit d'éléments qui touchent à la sécurité et à la santé.

Pour ce qui relève de la bonne façon, il y a deux catégories. Les pratiques qui relèvent d'une garantie décennale doivent s'inscrire dans le plein champ des métiers de l'artisanat. Il y a ensuite la différenciation par le prix. Pour autant, faut-il qu'il y ait une barrière sur tout à l'entrée ? Nous proposons que les activités de peinture n'ayant pas pour but une modification de la maçonnerie ou de la charpente, par exemple, puissent faire l'objet d'activités détachables, comme toutes les petites tâches qui existent aujourd'hui dans le secteur du bâtiment. Car, là aussi, nous voyons ces activités disparaître de nos territoires.

En Belgique ou en Allemagne, il existe encore beaucoup de petits métiers. S'ils n'existent plus chez nous, c'est parce qu'ils ont été regroupés au sein de métiers plus importants, avec une barrière à l'entrée. Les rigidités que nous avons introduites empêchent certains de créer leur propre activité. On constate d'ailleurs un contournement manifeste de nos propres réglementations. Mais, avant tout, interrogez-vous sur la progression à deux chiffres des magasins de bricolage, des bricoleurs du dimanche et de celles et ceux qui ont choisi le régime de la microentreprise dans ce secteur. C'est le serpent qui se mord la queue ! Pour repeindre deux murs, on n'a pas besoin de faire appel à quelqu'un qui a de multiples CAP ni à une entreprise de gros oeuvre qui offre une garantie décennale. On les repeint soi-même, on demande l'aide de son voisin s'il est plus doué ou on fait appel à quelqu'un qui fait du « tout oeuvre », de manière totalement illégale.

Nous faisons preuve aujourd'hui d'une hypocrisie manifeste face à la réalité de notre économie. Le décret donnera un cadre et un environnement juridique stable à des femmes et à des hommes qui créent légitimement des activités qui ne requièrent pas ces qualifications, qui veulent simplement travailler, avoir des clients et s'améliorer au fil de leur pratique. Est-ce une régression civilisationnelle que d'aller en ce sens ? Je ne le crois pas plus que je ne le croyais pour le nombre de dimanches travaillés. Je vous invite à observer ce qui existe dans la restauration. Il n'y a pas d'autre secteur que celui-ci qui ait davantage valorisé le savoir-faire et la qualité dans notre pays. Demain, vous pouvez ouvrir un restaurant. Vous serez distingué par les étoiles ; les clients ne reviendront pas si vous faites de la mauvaise cuisine ; vous serez contrôlé par les services d'hygiène et les services vétérinaires pour tout ce qui relève du domaine public, mais on parle bien de la même chose. Pourtant, vous ne pouvez pas faire de la peinture à domicile.

Compte tenu des règles d'ordre public qui existent en matière de sécurité, en matière sociale, sanitaire et autres, les règles qui ont été ajoutées pour les seules professions relevant du registre des métiers sont déjà exorbitantes. Penser qu'on ne peut en rien les infléchir relève d'une forme de distance avec la réalité. Je ne saurais vous recommander d'aller dans ce sens.

Les aménagements que nous voulons préciser par décret concernent aussi l'esthétique. En la matière, il s'agit de clarification, car le réel n'attend ni les lois, ni les règlements. Plus de 10 000 salons d'onglerie se sont créés. S'il y avait une stricte interprétation des textes, ils seraient en parfaite illégalité.

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Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique

Si vous voulez aller les fermer vous-même, Monsieur le député, je vous invite à le faire.

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C'est l'État qui en a le pouvoir, pas moi !

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Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique

Ce serait une erreur. Ces salons doivent faire l'objet d'une reconnaissance. Certaines chambres des métiers acceptent l'immatriculation sans qualification professionnelle, d'autres non, considérant que ces salons relèvent de l'esthétique. Il faut clarifier ce cadre. Lorsqu'il y a manipulation de produits chimiques dangereux, il faut une qualification à l'entrée, car cela relève de l'esthétique ; s'il s'agit de produits non susceptibles de nuire à la santé ou à la sécurité, nous proposons de laisser continuer.

Ce sont ces aménagements que nous proposons de faire de manière transparente, en consultant les professionnels, mais en sachant bien faire prévaloir ce qui relève de la volonté de préserver les savoir-faire, de valoriser les gestes et les métiers. Le meilleur moyen pour y arriver, c'est l'apprentissage. Il faut développer tous les éléments de différenciation, comme le titre de Meilleur ouvrier de France, que chaque profession a su créer. Ce sont des signes de reconnaissance dans un parcours et de qualification accrue, pas des barrières à l'entrée. Bien entendu, il faut conserver ces dernières pour tout ce qui concerne la santé et la sécurité, mais, pour le reste, il faut les refuser. La barrière à l'entrée n'est qu'une forme de malthusianisme puisqu'elle vise à protéger contre l'initiative individuelle. C'est une mauvaise protection, qui détruit des emplois et décourage les individus d'entreprendre sur notre territoire.

Pour ce qui est du stage préalable à l'installation, j'ai entendu vos arguments. Le SPI a été généralisé par des lois récentes, mais il existe depuis 1982-1983 de manière optionnelle. Je rappelle que ce stage ne donne pas les qualifications indispensables à l'exercice de l'activité. De surcroît, il est demandé pour toute activité qui relève du registre des métiers, mais vous pouvez ouvrir un magasin de photocopieuses, un restaurant ou une pizzeria sans l'avoir suivi. Le SPI ne concerne pas les métiers relevant du registre du commerce. Je ne propose pas de le supprimer, mais est-ce un drame absolu si on ne l'a pas suivi ? Je ne le crois pas. Sinon, il faudrait le généraliser à tous les métiers relevant du registre du commerce, ce qui n'irait pas dans le sens d'une simplification de la vie économique.

L'objectif du SPI est d'améliorer les capacités de gestion de celles et de ceux qui vont s'installer dans des activités relevant du registre des métiers. C'est important, mais pas indispensable. Nombre d'activités relevant du registre du commerce marchent très bien, alors qu'elles ne requerraient pas d'avoir suivi ce stage.

Je répète que je ne propose pas de le supprimer, mais je trouve insupportable que des candidats à l'installation doivent aujourd'hui attendre pendant des mois qu'on leur délivre ce SPI, et, de ce fait, ne peuvent pas commencer leur activité. Il conviendrait, dès lors que la demande est faite à la chambre de métiers, que celle-ci prenne trente jours au maximum pour délivrer le stage et les formations. Au-delà de trente jours, on doit rentrer dans le cadre du principe « silence vaut accord ». Il faudrait également assouplir les dispenses en étendant aux organismes autres que les chambres des métiers la possibilité de fournir des formations équivalentes, afin de ne pas se retrouver dans une situation grise, dont je comprends l'inconfort.

Votre rapporteur a exprimé le souhait qu'on puisse s'installer avant d'avoir purgé ce délai d'un mois. Néanmoins, je vous incite à y réfléchir, car nous resterons dans une situation où des individus ayant toutes les qualifications du métier et ayant suivi toutes les procédures devront attendre un mois avant de créer leur activité, ce qui, au regard des règles de compétitivité et d'attractivité, n'est pas bon. Comment expliquer qu'en France, des investisseurs internationaux peuvent créer une entreprise ou une succursale en dix jours, mais que celui qui veut devenir coiffeur a, lui, l'obligation d'attendre un mois ? Je ne trouve pas que ce soit juste, mais si on n'arrive pas à faire mieux avec les chambres des métiers, allons dans ce sens !

D'autres éléments sont à prendre en compte. S'agissant de publics fragiles, qui ont besoin de travailler pour subvenir à leurs besoins, ces préoccupations justes peuvent parfois produire des effets injustes. En tout cas, je suis ouvert aux pistes proposées par votre rapporteur, qui me semblent aller dans le sens de la clarté. Mais il faut faire en sorte que celles et ceux qui veulent s'installer et rentrer dans l'activité économique ne soient pas les premières victimes de délais non justifiés.

En ce qui concerne la commande publique, l'État, Madame Catherine Vautrin, n'est pas un mauvais payeur, contrairement aux établissements de santé et à certaines collectivités locales. Certains ministères sont en situation difficile, celui de la justice et celui des affaires sociales, notamment, selon les chiffres publiés il y a quelques semaines par l'Observatoire des délais de paiement. Pour le reste, y compris pour ce qui relève de la commande publique en masse, les délais ont été réduits. Vous avez raison pour ce qui est du ministère de la justice, mais bien souvent, les artisans attendent les paiements de certains établissements hospitaliers et collectivités locales. J'ai demandé que l'Observatoire rende ces données publiques ; elles figurent dans son premier rapport. J'ai inscrit les entreprises publiques dans le champ de la loi LME, ce qui n'était pas le cas jusqu'à la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques. Elles font désormais l'objet des mêmes sanctions que les autres entreprises.

Les délais pour l'État ont été renforcés. Il s'agit, à chaque fois, de moyennes, et vous avez raison de dire que certains cas aberrants demeurent. Cela étant, la moyenne aujourd'hui est de 24,7 jours par an, contre 45,7 jours en 2011. La situation s'améliore, alors qu'elle s'est dégradée pour le secteur privé, ce qui a conduit à renforcer les sanctions. Maintenant, il faut pouvoir contracter avec le secteur social et local. C'est ce que j'ai demandé en écrivant aux présidents des associations concernées, et que nous allons finaliser d'ici à l'été.

En ce qui concerne la transparence des comptes et leur publication, les mesures prévues par le texte sont plutôt de simplification puisqu'elles permettent le dépôt dématérialisé, avec une gestion simplifiée pour les PME. Il n'y a pas de mesures transversales concernant la publication des comptes dans ce projet de loi, qui ouvre même la possibilité, pour les PME, de ne pas publier leurs comptes. Nous avions essayé de faire la même chose dans la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, en combinant souci de compétitivité, en cas de risque de prédation de certains concurrents dans des marchés extrêmement réduits, et souci de transparence.

Une disposition propre au secteur agricole figure à l'article 31, en la possibilité d'une astreinte en cas de non-dépôt des comptes, mais uniquement pour les sociétés de transformation de produits agricoles. Cette disposition répond à une situation très particulière ; elle permet d'avoir la certitude que l'acteur intermédiaire ne capte pas les effets des contraintes imposés à la filière au titre de la LME. C'est un soupçon que nous avons eu à propos des mesures prises l'été dernier. Il s'agit, en l'espèce, d'une filière avec une forte concentration en termes de distribution, une relative concentration au niveau de la transformation et un grand éclatement des producteurs. S'il n'y a pas de transparence au niveau des comptes, il est impossible de savoir si l'effort demandé au distributeur n'a pas été capté par le transformateur, au détriment des producteurs.

Les problèmes du secteur agricole ne se limitent pas aux relations commerciales, même si celles-ci sont structurantes. Ils relèvent aussi de problèmes conjoncturels, et de problèmes structurels dans certains secteurs. Pour autant, nous avons, sur la question des relations commerciales, à travers la loi relative à la consommation, la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques et ce texte, largement accru la capacité de sanction vis-à-vis des comportements les plus déviants ou les moins acceptables. Il faut continuer dans ce sens.

S'agissant des relations commerciales, Madame Annick Le Loch, d'abord, nous faisons mieux respecter la loi. Nous avons augmenté les contrôles de près de 80 %, ce qui a provoqué des tensions lors des dernières négociations. J'avais prévenu les acteurs avant l'ouverture de ces négociations. Il fallait le faire, mais cela a, en effet, créé beaucoup de problèmes dans certains secteurs. Nous voulions également mieux orienter ces contrôles pendant les négociations elles-mêmes, ce que nous avons fait. Les sanctions, qui avaient été renforcées dans des textes précédents, ont pu être appliquées. Nous voulons encore accroître les sanctions pour certaines catégories de comportements dysfonctionnels.

Avec M. Stéphane Le Foll, nous voulons favoriser l'esprit de partenariat. Ce qui marche le mieux, ce sont les contrats de filières par lesquels ces dernières s'organisent. Lorsque le producteur, le distributeur et le transformateur parviennent à se mettre autour de la table et à trouver un accord sur la non-volatilité des prix et la juste marge, l'intérêt de toute la filière est pris en compte et tout tient. C'est vers cela que doivent tendre les filières les plus fragiles. C'est pourquoi nous avons besoin d'instruments pour inciter en particulier les transformateurs à aller plus loin.

Nous avons demandé un bilan de la LME. Les premières amodiations seront proposées dans le débat. L'idée n'est pas de revenir aux pratiques antérieures, qui étaient encore plus opaques et brutales, c'est de réussir à articuler les différents enjeux. La principale difficulté aujourd'hui, c'est que plusieurs facteurs se conjuguent : la LME s'applique à plein dans un contexte déflationniste, alors même que des filières comme celles du porc ou du lait sont profondément sinistrées par l'absence d'investissement pendant quinze ou vingt ans et que les dispositifs communautaires qui les protégeaient ont été levés.

Nous ne consacrons pas toute notre énergie à endiguer les effets de la LME en rétablissant des dispositifs protecteurs, nous cherchons plutôt à réduire la volatilité des prix des matières premières ou de certains composants lorsqu'elle n'est répercutée que sur les producteurs. Pour le lait, par exemple, les prix sont fixés en fonction de l'évolution des prix mondiaux, ce qui ne correspond pas à la réalité du marché et place certains producteurs dans des situations intenables. Nous avons demandé une étude sur ce point à FranceAgriMer. Nous ferons, à mi-année, un bilan, avec M. Stéphane Le Foll, pour voir s'il n'est pas possible de changer une partie de ces éléments.

Par ailleurs, la loi relative à la consommation permet de rééquilibrer le rapport entre les distributeurs et les producteurs lorsque la volatilité n'existe qu'aux dépens de l'un d'entre eux. Les prix peuvent être revus en cours d'année pour donner un peu d'oxygène.

Avec le contrat de filière et les dispositions du présent projet de loi, nous avons un ensemble qui doit permettre une amélioration.

La grande distribution, évoquée par M. Charles de Courson, constitue bien un élément structurant. Aujourd'hui, nous n'avons pas de levier à actionner sur les regroupements en centrales d'achat, car, selon l'avis rendu par l'Autorité de la concurrence, ces rapprochements ont des visées, non pas capitalistiques, mais de stratégies d'achat, essentiellement à l'international. Les services de la DGCCRF et l'Autorité de la concurrence surveillent de très près ces situations pour s'assurer qu'elles n'emportent aucune conséquence sur le marché national. Si tel était le cas, des sanctions seraient prises.

Reste que nous avons un problème structurel, avec une situation d'oligopole impliquant des dizaines de milliers de fournisseurs et soixante millions de consommateurs, situation qui joue évidemment à l'avantage de l'oligopole. Les textes permettent-ils, pour autant, de démanteler cet oligopole ? Cela semble très difficile. Dans la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques nous avions amorcé un début de solution en permettant aux franchisés qui le voudraient de s'autonomiser ou de changer d'enseigne. C'est dans la capacité à s'affranchir du pouvoir d'enseigne qu'on peut redonner de la vitalité. Je crois également beaucoup aux contrats de filières pour faire rempart à la seule logique déflationniste, dont il est clair qu'elle rend très difficile de sortir de la logique oligopolistique. De fait, dans une logique de baisse des prix, donc de baisse de coûts marginaux, le plus grand est systématiquement avantagé. Tant que nous ne parviendrons pas à créer les régulations permettant de revaloriser les productions de qualité et à mettre en place des contrats de filières opérants, nous aurons énormément de mal à laisser à certains acteurs la capacité de survivre hors de l'oligopole.

Je constate, comme vous, que la situation n'est pas pleinement satisfaisante, même si elle présente certains avantages – nous avons de grands groupes puissants qui exportent et embauchent. Je crains cependant qu'il n'existe pas de mesure magique pour supprimer ces oligopoles et qu'il faille en passer par les éléments structurels que j'ai évoqués.

Pour ce qui concerne les mesures relatives aux nouvelles opportunités économiques qui ne figureraient pas dans ce texte et si, à défaut de NOÉ, on voulait chercher un messie, je veux vous rassurer sans même attendre la discussion des amendements parlementaires.

Monsieur Damien Abad, la responsabilité personnelle pour insuffisance d'actifs qui n'est plus engagée en cas de simple négligence, c'est prévu à l'article 48 ; les assemblées générales réunies sous forme dématérialisée, c'est à l'article 46 ; le double compte pour les microentreprises est à l'article 39.

Monsieur Lionel Tardy, ce texte reprend aussi des dispositions sur le financement de l'innovation, en particulier celles qui permettent d'y réorienter 10 à 20 milliards d'euros – on y trouve ce que l'on a appelé les « fonds de pensions à la française » qui consistent, en réalité, à créer un statut ad hoc avec des règles prudentielles relevant de Solvabilité 1. Le projet de loi introduit également les fonds européens d'investissement à long terme – dit ELTIF, pour European long-term investment funds – qui pourront faire du financement en fonds propres, mais également prêter en direct par dérogation au monopole bancaire. On y trouve aussi diverses dispositions techniques destinées à fluidifier le financement en dette des entreprises, qui sont particulièrement structurantes pour l'économie de l'innovation.

Concernant cette dernière, Madame Corinne Erhel, vous avez raison de souligner les nombreuses mesures prises par ailleurs en termes de conduite du changement et de numérisation de notre économie, qui ne relèvent pas uniquement de la loi. Les diverses chambres des métiers se sont engagées à aller en ce sens. Les coiffeurs ont, par exemple, pris des positions extrêmement fortes en la matière. Cela passe par un changement des formations apportées aux artisans et du contenu des stages de préparation à l'installation. La même démarche a été initiée dans le secteur industriel, dans le cadre de « l'industrie du futur » avec l'objectif de 2 000 PME, TPE et ETI accompagnées d'ici à la fin de l'année sur ces sujets.

Une question de M. Éric Alauzet portait sur la concurrence déloyale que constituerait le statut fiscal de la microentreprise. Les microentrepreneurs ne bénéficient en aucun cas d'un statut spécifique : ils sont soumis aux mêmes règles d'installation ou de qualification que les autres entrepreneurs. Seul le régime fiscal qui leur est appliqué est différent : il donne des facilités déclaratives en matière de TVA et de cotisation foncière des entreprises (CFE), et permet d'obtenir des allégements fiscaux, à condition de ne pas avoir de charges à déclarer. C'est un régime hyper simplifié.

Nous proposons, dans le projet de loi, d'augmenter la flexibilité pour la sortie du régime, de façon à éviter le déclenchement trop rapide du couperet que subissent ceux que leur développement dans l'entreprenariat conduit à franchir un seuil. Ceux-là, pour éviter de basculer, optimisent autour du seuil, ce qui favorise plutôt les activités non déclarées et des comportements malthusiens visant à ne pas dépasser le seuil en question.

Il y aurait concurrence déloyale si l'entrepreneur au régime réel ne pouvait pas passer au régime simplifié. C'est pourquoi nous proposons de donner chaque année un droit d'option entre l'un ou l'autre régime, selon qu'il est le plus intéressant. Cela permettra de clore des débats qui sont devenus complètement irrationnels en France, notamment celui qui existe entre taxis et VTC et qui se double d'un débat entre le régime de microentrepreneur et le régime normal. On verra ainsi que les taxis n'ont aucun intérêt à passer au régime de la microentreprise qui ne permet pas de déduire ses charges – je ne connais pas beaucoup de taxis qui facturent l'essence à leurs clients. Ce régime n'a guère d'intérêt pour ceux qui ont des charges minimales ; il est plus intéressant pour les prestataires de services, en particulier intellectuels. Il peut être utilisé dans le secteur du bâtiment – et c'est pourquoi nous renforçons les contrôles –, par des individus qui font acheter le matériel par leurs clients et ne facturent plus que la pose, comme une prestation de service. Une analyse fine montre pourtant que l'application des règles de TVA grève plutôt le coût total. Nous estimons que 10 à 12 % des entrepreneurs qui sont aujourd'hui au régime réel auraient intérêt à opter pour la microentreprise.

Mon collègue Michel Sapin répondra lui-même aux questions portant strictement sur la lutte contre la délinquance financière, car je ne porte pas ces articles qui ne sont pas en discussion aujourd'hui.

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La commission saisie au fond du projet de loi, et les deux commissions saisies pour avis recevront conjointement Michel Sapin, la semaine prochaine.

Merci, Monsieur le ministre, d'avoir répondu à nos questions.

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J'ai déjà souligné nos convergences avec le Gouvernement sur les questions agricoles ; sur les dispositions relatives à l'artisanat et aux petites entreprises, nous sommes sur la voie de la convergence. S'agissant de dispositions qui ne sont pas au coeur de la loi, le débat gagnerait à ce que nous parvenions à trouver des points d'accord en commission afin de présenter des amendements d'appel auxquels le Gouvernement puisse répondre. De la sorte, la séance pourrait être consacrée au sujet essentiel de la loi Sapin II : la lutte contre la corruption et la finance déloyale.

Le ministre a mentionné des amendements du rapporteur, qui visent à revaloriser le SPI, à le replacer logiquement avant l'immatriculation et à souligner l'importance d'une validation des acquis de l'expérience nouvelle formule par laquelle seraient reconnus le talent et l'énergie de toute une catégorie sociale de jeunes entrepreneurs détenant des savoir-faire, mais auxquels il manque une qualification. Si nous réussissons à instaurer une logique de transition et de passerelle entre les différentes économies, nous ne les opposerons pas, et nous permettrons à ceux qui sont aujourd'hui exclus du monde du travail et de l'entreprenariat d'y entrer, à leur juste place, sans dévaloriser ceux qui ont obtenu un diplôme et qui ont emprunté d'autres chemins.

Sur les sujets agricoles, nous n'en sommes pas au Grand Soir de la réforme de la loi de modernisation de l'économie, même si, à de multiples reprises au cours de ce mandat, nous avons souhaité revenir sur ce texte et dénoncé ses effets pervers. La logique du pouvoir d'achat tire les prix vers le bas au bénéfice des consommateurs, à court terme, mais joue en défaveur de l'économie réelle qui est l'âme de nos territoires. Les travaux commandés par les ministres de l'économie et de l'agriculture sur ce sujet devraient être rendus en fin d'année. À chaque fois que nous pourrons revenir sur les effets délétères de la LME, nous le ferons.

Nous entendons bien franchir d'autres étapes avec le projet de loi Sapin II, et remettre de la transparence, de l'équité et de la justice dans le dispositif de la LME. Cependant, s'agissant de débats qui ne pourront pas être tranchés aujourd'hui, et en présence de propositions péchant par manque de réalisme, je vous inviterai à vous rallier à un amendement du rapporteur qui constituera un appel fort au Gouvernement à se prononcer sur des sujets d'avenir comme les contrats de filières, que nous pourrions baptiser contrats tripartites, ou la pluriannualité. En séance, sur ce texte, et dans les dernières lois de finances de cette législature, je souhaite que nous puissions privilégier un certain type de rapports commerciaux. Nous aurions ainsi introduit un logiciel de transition qui, à défaut du Grand Soir, constituerait un petit matin du changement pour davantage d'équité et de justice envers ceux qui entreprennent dans ce pays.

Dans le monde agricole, la question du foncier domine toutes les autres, car elle peut structurellement handicaper le modèle français. Notre négligence commune en la matière a ouvert des brèches que nous avions largement signalées dans la loi d'avenir agricole. Des événements spectaculaires, comme la captation par des sociétés d'investissement – et peu m'importe qu'elles soient d'origine chinoise, française ou australienne – de 1 700 hectares, dans le Berry, ont constitué une alerte forte sur ce sujet. Nous sommes aujourd'hui, en quelque sorte, des « lanceurs d'alerte » concernant l'emprise de sociétés spéculatives sur le foncier français. Je vous proposerai d'adopter des amendements afin d'ouvrir le débat sur ce sujet en séance. Il est urgent d'affirmer que l'espace rural français n'est pas un supermarché, de faire évoluer le droit pour assurer la protection du foncier, problème derrière lequel se trouvent la biodiversité, la valeur ajoutée, l'emploi, le réseau et l'aménagement du territoire. Nous devons aller aux limites qu'impose la Constitution pour retrouver du droit dans un domaine qui ne peut pas être dérégulé pour être abandonné à un libéralisme sauvage.

Le projet de loi Sapin II pourrait ainsi, de façon très symbolique, mettre des limites à la concentration capitalistique et au jeu de la finance, au nom d'une saine économie qui permet à une génération d'agriculteurs d'en remplacer une autre pour remplir sa mission sur nos territoires et pour l'alimentation de la planète.

La commission en vient à l'examen des articles du projet de loi.

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Sur les 272 amendements qui ont été déposés, 39 ont été retirés, 17 ont été déclarés irrecevables, dont 13 se situant hors du champ de notre saisine qui ont été transmis aux commissions compétentes, et 4 tombant sous le coup de l'article 40 de la Constitution. Nous devons, en conséquence, en examiner 216.

Article 25 (article L. 131-59 du code monétaire et financier) : Réduction de la durée de validité du chèque d'un an à six mois

La commission est saisie de l'amendement CE234 de M. Jean-Luc Laurent.

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Il s'agit de supprimer l'article 25, qui tend à faire passer d'un an à six mois la durée de validité des chèques.

Si l'intention de modernisation des paiements est louable, nous bénéficions de l'expérience du plafonnement du règlement en numéraire qui s'est, à mon avis, révélée très négative. De nombreuses personnes, en particulier celles qui sont âgées, qui ont des revenus modestes ou sont éloignées du numérique et des nouvelles techniques de communication, peuvent se trouver en difficulté lors de modifications brutales comme la réduction de la durée de validité des chèques. Il est inutile de bouleverser les choses et, si elles doivent évoluer, au moins faut-il leur en laisser le temps.

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Avis défavorable. Certes, c'est une mesure susceptible de troubler les personnes âgées, mais elle ne sort pas d'un chapeau : elle est issue des assises des moyens de paiement, où toutes les associations de consommateurs et de représentants des citoyens ont convenu que les inconvénients du chèque valable un an étaient supérieurs à ceux que la réforme induirait.

Néanmoins, j'entends parfaitement qu'il y a besoin d'une transition, c'est pourquoi je propose que le nouveau délai de validité des chèques entre en vigueur le 1er juillet 2017 pour les chèques émis à compter de cette date. Cela nous laisse une année pour nous adapter, étant entendu que, à terme, l'évolution tend vers les moyens de paiement numériques.

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Je soutiens l'amendement de M. Jean-Luc Laurent. La possession d'un terminal de carte bancaire est très coûteuse pour les tout petits commerçants. Moi-même, lorsque j'étais présidente d'une coopérative d'utilisation de matériel agricole (CUMA), je recevais parfois plusieurs chèques datés et signés le même jour, que l'on me demandait de déposer à la banque de façon échelonnée tous les mois. Les artisans d'art, les marchands de plein vent reçoivent des chèques qu'ils n'encaissent parfois qu'après leur saison. Six mois, cela passe très rapidement !

Tout est fait pour que nous n'utilisions que la carte bancaire au profit des seuls banquiers.

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L'article 25 m'a plongé dans des abîmes de perplexité. À lire l'étude d'impact, le chèque aurait plusieurs inconvénients. On y parle de « circuit d'encaissement peu fluide ». Première nouvelle ! « Le risque d'impayés pour les commerçants » conduit « nombre d'enseignes à les refuser », nous explique-t-on encore. Mais cela dépend du montant, puisque les banques paient en deçà d'un certain montant. Est également invoqué l'argument des « coûts de traitement pour les banques et les commerçants ». C'est vrai pour les banques qui se sont toujours battues pour réduire ces coûts, alors qu'elles sont elles-mêmes à l'origine de la gratuité des chèques. Cela, en plus de la « sur-bancarisation française », explique que 14 % des paiements sont effectués par chèque en France, bien plus que dans d'autres pays européens.

Monsieur le rapporteur, combien de chèques sont aujourd'hui payés entre six mois et un an, et au-delà d'un an ? La proportion doit être infime. Je ne comprends pas du tout ce que l'on recherche avec cette mesure, et l'étude d'impact n'en dit rien.

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Je partage l'analyse de notre rapporteur, car l'article 25 est le fruit d'une réelle concertation. Je ne peux, par ailleurs, soutenir la position de mes collègues qui reviendrait à laisser se développer un système dans l'illégalité : un chèque, ça se signe à une date donnée, avec une date donnée, et ça s'encaisse.

Certes, il y a la question des chèques de caution et de la sécurisation de certains autres moyens de paiement, mais, dans les faits, je reçois aussi des citoyens qui ont du mal à gérer les chèques en raison de leur trop longue échéance. Il faudra, à coup sûr, accompagner les citoyens dans la modernisation des moyens de paiement, et c'est le travail des banques. Ramener la validité des chèques à six mois d'ici à un an me semble une mesure adaptée. Elle n'impose pas une énorme pression à nos concitoyens.

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Si j'appartenais à votre commission, je voterais l'amendement de M. Jean-Luc Laurent. Sous couvert d'une prétendue modernisation des moyens de paiement, on organise un flicage et une traçabilité permanente. Il en va de la liberté individuelle ! Nous ne pouvons déjà plus payer en numéraire au-delà de 1 000 euros, alors que, chez nos voisins allemands, 82 % des paiements sont effectués en espèces. La traçabilité dans toutes les transactions sera, à mon avis, totalement contraire aux libertés individuelles et fondamentales.

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Je répète qu'il ne s'agit pas d'une lubie de méchants banquiers ou d'un ministre capricieux, mais d'une recommandation d'assises auxquelles participaient les représentants des consommateurs dans leur diversité. Elle me paraît être de bon sens.

Madame Brigitte Allain, j'ai moi aussi été président d'une CUMA : le délai de six mois pour le dépôt de chèques correspond à la pratique la plus courante. Il est déjà assez difficile à gérer, car il arrive qu'on ne se souvienne plus. La validité d'un an pose d'autres problèmes. J'ai reçu dans ma permanence des familles en difficulté parce qu'elles avaient oublié avoir demandé au médecin spécialiste qui avait soigné leur enfant de n'encaisser leur chèque qu'après un délai d'un an

Je vous demanderai, dans l'amendement CE270, qui suit, que cette mesure de simplification et de modernisation n'entre en vigueur que le 1er juillet 2017, ce qui nous laissera plus d'un an pour la mettre en oeuvre.

La commission rejette l'amendement.

Elle examine, en discussion commune, les amendements CE270 du rapporteur pour avis et CE87 de M. Damien Abad.

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Plus de 2,5 milliards de chèques ont été émis en 2014, pour un montant total de plus de 1 200 milliards d'euros. C'est une spécificité de la France, qui est à l'origine de plus de 70 % des chèques émis au sein de l'Union européenne.

Il semble nécessaire, pour faire accepter une initiative qui va dans le bon sens, de laisser du temps aux consommateurs et de leur donner une date butoir connue de tous à l'avance : le 1er juin 2017. Tel est le sens de l'amendement CE87.

La commission adopte l'amendement CE270.

En conséquence, l'amendement CE87 tombe.

Puis la commission donne un avis favorable à l'adoption de l'article 25 modifié.

Après l'article 25

La commission est saisie de l'amendement CE252 du rapporteur pour avis.

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Cet amendement très technique vise principalement à rendre la procédure de surendettement plus efficace en permettant à la commission de surendettement d'imposer des mesures aux parties sans passer préalablement par une phase de négociation amiable, dès lors que le débiteur n'est pas propriétaire d'un bien immobilier. Il poursuit en cela la réforme engagée par la loi de séparation et de régulation des activités bancaires du 26 juillet 2013. La phase de négociation amiable serait ainsi limitée aux seuls dossiers dans lesquels le débiteur est propriétaire d'un bien immobilier.

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Je suis surpris que l'on modifie au mois de mai une rédaction résultant d'une ordonnance datant du mois de mars.

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L'ordonnance en question ne faisait que codifier le code de la consommation : les dispositions que nous souhaitons faire évoluer sont bien issues de la loi de 2013.

La commission adopte l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CE253 du rapporteur pour avis.

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Cet amendement élargit la compétence de l'actuel Observatoire de la sécurité des cartes de paiement (OSCP) à l'ensemble des moyens de paiement scripturaux, conformément aux objectifs de la stratégie nationale sur les moyens de paiement, publiée le 15 octobre 2015. Depuis sa mise en place, l'OSCP a joué un rôle essentiel en tant qu'instance de veille et de concertation entre tous les acteurs concernés pour la conduite d'une stratégie efficace de prévention de la fraude sur les paiements par carte.

La commission adopte l'amendement.

Avant l'article 30

La commission examine, en présentation commune, les amendements CE271 rectifié et CE261 du rapporteur pour avis.

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J'ai dit, avant que nous n'entamions l'examen des articles, combien la question de la régulation du foncier était importante. Nous partageons avec le ministre de l'agriculture l'objectif de revenir sur les dispositions de 2006. Les événements de l'Indre nous ont alertés. Je soutiens, sur ce sujet, les amendements CE271 rectifié et CE261 qui résultent de la mobilisation de députés issus de tous les bancs de notre assemblée.

J'insiste sur le fait que la nationalité des investisseurs n'est pas en cause, même si l'émoi suscité peut-être légitime. Le problème tient bien à l'opacité des opérations. D'une certaine façon, les pouvoirs publics ont été spectateurs d'une captation de foncier par des sociétés d'investissement qui ont utilisé toutes les failles de la loi d'avenir pour l'agriculture. Le côté spectaculaire et provoquant de l'opération récente nous invite à réagir.

Lors d'une audition de préparation du projet de loi Sapin II, avec Mme Brigitte Allain, MM. Yves Daniel, Paul Molac et d'autres députés, nous avons réuni dans une même salle tous les syndicats agricoles, l'assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA) et la fédération nationale des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (FNSAFER), à qui nous avions demandé de faire remonter des propositions pour ouvrir le débat sur le foncier, dont on sait que le marché fonctionne selon deux poids deux mesures. Il s'agit d'apporter de l'équité et de la transparence. Certaines sociétés sont opaques et ne permettent pas la préemption par la puissance publique par l'intermédiaire des SAFER. Les voies de contournement sont multiples, mais celle-là est majeure.

Les deux amendements que je soutiens sont donc issus d'un travail de concertation avec les organisations professionnelles agricoles. Ils donneront sans doute lieu à des débats en séance, mais je propose que nous marquions dès aujourd'hui notre volonté d'agir. Un sentiment d'impuissance en la matière serait délétère. Outre la captation d'hectares de foncier, il faut mesurer l'effet sur l'ensemble de l'économie. Dans l'Indre, des transactions se sont opérées au triple du prix du marché, alors qu'un tel phénomène est signalé plutôt dans les zones à forte valeur ajoutée – vignobles, zone périurbaine, zones frontalières. Une telle surévaluation des biens fonciers n'est supportable par aucun exploitant ni aucun jeune agriculteur.

L'amendement CE271 rectifié vise à rendre obligatoire la délivrance d'une nouvelle autorisation d'exploiter à chaque fois qu'une société change de main. Le contrôle se ferait donc par l'autorisation de travailler sur les terres.

L'amendement CE261 supposerait de spécialiser les sociétés portant du foncier en fonction de leur capacité à être contrôlées et préemptées par la SAFER. Cela supprimerait l'inégalité actuelle qui permet tous les trafics et dénature profondément l'esprit des régulations mises en place de façon immémoriale par des logiques patrimoniales, et, de façon plus sociale, par les lois Pisani d'après-guerre, qui ont visé à équilibrer le pouvoir entre le propriétaire de la terre et l'exploitant. Elles ont permis de garantir, autant que possible, le renouvellement des générations. Il ne s'agit pas de freiner l'entreprise, mais, au contraire, de favoriser la capacité d'entreprendre de tous ceux qui veulent nourrir la terre.

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La propriété du foncier agricole est un enjeu capital. Des spéculations sont déjà à l'oeuvre et ce phénomène pourrait s'amplifier dans l'avenir, les terres agricoles devenant un objet financier comme n'importe quel autre bien, ce qui nuirait à la production de produits agricoles et alimentaires qui appartiennent à notre culture et mettrait à mal de nombreux agriculteurs. Les amendements du rapporteur nous font beaucoup progresser dans le contrôle de la propriété du foncier agricole, et je m'en réjouis.

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Je partage l'idée qu'il faut affirmer le droit de préemption des SAFER, car elles ont une expérience et un savoir-faire irremplaçables. Même en Île-de-France, certaines mutations de foncier agricole méritent d'être suivies avec attention. Mais qu'en est-il des acquisitions que souhaiteraient faire les communes ou d'autres institutions publiques ? J'ai cru comprendre que seules les SAFER pouvaient acquérir et détenir du foncier.

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J'estime qu'il faut croire un ministre lorsqu'il s'exprime dans l'hémicycle. M. Stéphane Le Foll, répondant à une question que je crois avoir été posée par M. Paul Molac, a affirmé que personne n'avait vu arriver l'affaire des transactions du Berry, mais que ce type d'opération n'était plus possible depuis la publication, le 1er janvier 2016, de décrets d'application de la loi d'avenir pour l'agriculture. Les dispositions qui nous sont proposées aujourd'hui seraient donc sans portée et constitueraient une posture politique destinée à un public donné. Dans ce cas, est-il opportun de les voter ?

Concernant le foncier, un problème de fond n'a jamais été résolu : nous n'allons pas attendre ad vitam aeternam que les agriculteurs achètent eux-mêmes tout le foncier. Les structures économiques des exploitations sont déjà extrêmement lourdes, les conditions de l'adaptation et de l'évolution sont complexes, si vous ajoutez l'achat à cette équation, vous ajoutez à l'exercice de production qui caractérise l'agriculture, avec tous les problèmes de compétitivité entre pays européens, un exercice hypercapitalistique, avec accumulation d'un capital que l'on ne sait plus transmettre. L'alternative consiste à attirer des capitaux extérieurs. Mais comment y parvenir ?

Nous n'avons rien contre le fait de prendre des dispositions qui permettraient de régler définitivement le problème des 1 700 hectares berrichons – en supposant que le ministre ne nous ait pas dit toute la vérité en séance. Cependant, elles donnent un signal supplémentaire qui risque de faire fuir tous les investisseurs franco-français, que ce soit les familles, les groupes d'assurance, les institutions bancaires… Nous avons besoin d'attirer des capitaux pour porter le foncier français. C'est en attirant mieux les capitaux français que nous fermerons la porte aux investisseurs extérieurs. La solution proposée ne règle pas le problème, elle ne fait que le repousser.

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Il s'agit de permettre aux SAFER, non d'acquérir du foncier, mais d'exercer un contrôle lorsque des parts de société sont cédées. Aujourd'hui, elles disposent d'un droit de préemption en cas de transfert de foncier mais pas en cas de transfert de parts. Le ministre répondait l'autre jour que les dispositions adoptées dans le cadre de la loi d'avenir pour l'agriculture permettent plus de transparence, mais cela n'implique pas que les SAFER peuvent intervenir. Peut-être ne faut-il pas faire fuir les investisseurs, mais, dans le Bordelais, la spéculation sur le foncier via des sociétés est bel et bien une réalité. Les prix ont atteint de tels niveaux que pratiquement plus personne ne peut acheter de terres viticoles !

Nous n'avions pu aboutir dans le cadre de la loi d'avenir pour l'agriculture, car le droit de propriété a une valeur constitutionnelle, mais le contrôle exercé n'est pas du tout le même selon que ce sont des terres ou des parts de société qui sont vendues.

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Les remarques de Mme Brigitte Allain sont intéressantes et utiles.

Le problème tient à ce que la vocation des sociétés concernées n'est pas clairement précisée. Nous avons déjà débattu de la préemption des parts de société par la SAFER lors de l'examen de la loi d'avenir pour l'agriculture. Le problème de fond est que la SAFER n'a pas vocation à devenir actionnaire d'une entreprise agricole. Son rôle serait éventuellement de préempter des parts de sociétés dont l'objet est limité à la détention de terres agricoles.

Ensuite, ne permettre la prise de participation que de personnes qui décident et exploitent effectivement serait contre-productif. Nous devrions plutôt, comme en matière de transports, distinguer l'infrastructure et l'exploitant. Il faudrait réserver la détention du foncier à des sociétés du type des sociétés civiles immobilières ; la détention du foncier, à l'exclusion de son exploitation, serait leur seul objet social. Alors, nous pourrions donner la possibilité de préempter des parts de société aux SAFER, dont la vocation est de détenir le foncier, de le remettre en circulation, de l'affecter à l'installation d'agriculteurs, mais pas de participer elles-mêmes à la production laitière et à l'élevage des cochons.

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Je voudrais être certaine de ne pas mal comprendre l'amendement CE261. Imaginons une reconversion de personnes dont l'activité ne présentait auparavant aucun rapport avec l'agriculture ou la viticulture. Si cet amendement est adopté, pourront-elles racheter tout ou partie d'une exploitation agricole ?

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Monsieur Jean-Luc Laurent, si une commune, dans le cadre de ses prérogatives, souhaite acquérir du foncier, elle s'entend avec la SAFER. Ce sont là des acquéreurs qui essaient d'agir dans l'intérêt général.

Les questions de M. Antoine Herth et de Mme Catherine Vautrin méritent des réponses précises. Oui, il y a un problème de portage du foncier en agriculture. L'intervention de spéculateurs, ayant un horizon d'investissement de trente ans, voulant recycler des fonds acquis dans d'autres domaines peut tripler le prix de terres normalement vendues à 3 000 ou 5 000 euros l'hectare. Leur logique n'est pas du tout celle de l'exploitant, qui doit payer un loyer, faire avec le cours du lait, de la viande ou des céréales.

Jusqu'à présent, le marché du foncier agricole s'est efforcé, bon an mal an, de coller à la réalité de l'économie agricole. Aujourd'hui, spéculant sur le fait qu'il faudra nourrir 10 milliards d'individus en 2050, des personnes introduisent des logiques de production incompatibles avec notre souci d'un développement équilibré des territoires, d'une logique de coopération. Les logiques financières visent à extraire la valeur ajoutée de nos territoires pour l'exporter au service d'autres finalités. La question du portage du foncier n'est pas réglée par l'intervention de ce type de porteurs de capitaux.

En revanche, je milite comme vous pour que familles, amis et citoyens investissent dans le foncier. Je suis fier d'être, avec d'autres, à l'origine d'un groupement foncier agricole (GFA) de 150 citoyens, qui a reconquis plusieurs hectares de terres viticoles des Côtes-de-Toul et installé, grâce à un portage foncier coopératif, deux jeunes viticulteurs, avec une insertion et des contrats commerciaux à la clé. C'est une belle histoire. Je suis pour que l'on favorise un investissement foncier régulé, et non pas sauvage comme dans l'Indre.

Je veux rassurer Mme Catherine Vautrin à propos de l'amendement CE261. Il s'agit de dire, que lorsqu'un intervenant extérieur, fonds de pension ou autre, prendra le contrôle d'une société, qu'elle soit française ou chinoise, qui détient plusieurs milliers d'hectares, alors l'autorisation d'exploiter pourra être réexaminée. Si la finalité de la société reste de faire travailler les dix agriculteurs établis sur ces terres, personne n'y verra aucun inconvénient. S'il s'agit, en revanche, de mettre ce foncier dans des circuits douteux, alors nous pourrons l'empêcher. C'est tout. Le travail des commissions départementales d'orientation agricole (CDOA) réformées est de déterminer qui peut en priorité exploiter des terres. La menace de l'intervention de la SAFER ne vise qu'à réguler le marché, elle n'a pas vocation à être pérenne.

M. Antoine Herth soulignait la difficulté de prendre des parts de sociétés qui possèdent autre chose que du foncier agricole. Si je n'ai pas déposé d'amendement, c'est que la profession agricole s'est elle-même saisie de la difficulté. Souvent, les groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC) possèdent du foncier, mais aussi des bâtiments, des salles de traite, des troupeaux. Comment une SAFER peut-elle intervenir ? La spécialisation des sociétés aura des conséquences sociales et fiscales importantes, ces sujets ne peuvent donc être abordés à la légère.

J'ai proposé, avec l'amendement CE261, une logique de contrôle par l'usage des terres. Pour ce qui est de l'amendement CE271 rectifié, je l'ai assorti d'une prudente référence à un délai fixé par voie réglementaire pour laisser le temps de s'assurer de sa solidité juridique et constitutionnelle. Il vise à ce qu'aucune société possédant du foncier n'échappe au radar. Aujourd'hui, il y a deux poids, deux mesures. C'est comme si, sur la route, un véhicule dépassant la limite autorisée de 10 kilomètres heure devait en rendre compte, alors que des poids lourds roulant à 200 kilomètres heure ne sont pas contrôlés par le radar. En l'état de la loi, ces véhicules ne sont pas hors-la-loi ; ce sont même les principaux vecteurs des agrandissements. Nous ne sommes pas contre les agrandissements, mais nous voulons continuer à contrôler ce qui se passe sur notre territoire, au service des agriculteurs de notre pays.

Le ministre de l'agriculture a insisté sur le fait que, grâce aux dispositions de la loi d'avenir pour l'agriculture, nous sommes informés, mais nous sommes des spectateurs impuissants, qui ne peuvent pas intervenir. Il a demandé au Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux de chercher des solutions. Sans doute pourra-t-il nous faire des propositions en séance, et nous pourrons nous entendre.

La commission adopte successivement les amendements CE271 rectifié et CE261.

Elle est saisie de l'amendement CE98 de M. Damien Abad.

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Je me proposais de reprendre des dispositions issues de la proposition de loi sur la compétitivité des filières agricoles ainsi que du rapport de la mission sur l'avenir des filières d'élevage, mais, des trois amendements que j'ai voulu déposer, un seul a surmonté l'obstacle de l'article 40 de la Constitution : celui qui porte sur le régime des baux ruraux.

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Ne refaisons pas tous les débats de la loi d'avenir pour l'agriculture. Nous essayons ici, modestement, de combler quelques failles. Les baux ruraux, véritable passion française, nous renvoient à Tanguy-Prigent, aux lois Pisani, à la grande histoire. Ne revenons pas, aujourd'hui, sur l'équilibre délicat entre bailleurs et preneurs auquel nous sommes parvenus. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CE187, CE189, CE188 et CE190, tous de Mme Michèle Bonneton.

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Ces amendements procèdent tous du même esprit. Il s'agit d'améliorer la transparence du prix payé par le consommateur et de le lier au prix auquel l'agriculteur a vendu sa production à un transformateur ou à un commerçant. La mise en place de coefficients multiplicateurs fait partie des moyens qui permettent de faire face aux crises agricoles.

Par l'amendement CE187, nous proposons d'étendre cette possibilité, déjà ouverte pour les fruits et légumes périssables, à l'ensemble des produits agricoles et alimentaires. Nous souhaitons aussi préciser que le taux du coefficient est fixé par voie réglementaire après avis de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires.

L'amendement de repli CE188 exclut les produits alimentaires du dispositif, car il serait peut-être un peu moins compliqué de le réserver aux produits agricoles.

L'amendement CE189 permet l'application du coefficient multiplicateur aux produits agricoles et alimentaires après consultation, non pas forcément de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, mais des organisations et organismes compétents. Ainsi le Gouvernement aura-t-il un peu plus de latitude au moment de prendre son décret.

L'amendement de repli CE190 vise à appliquer un coefficient multiplicateur aux seuls produits agricoles, après consultation des organisations et organismes compétents.

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Je souscris pleinement à l'esprit dont procèdent ces amendements. Cependant, le dispositif instauré pour les fruits et légumes périssables n'a jamais été mis en oeuvre. Si cela avait été le cas, cela aurait immédiatement suscité une très vive réprobation de la Commission européenne, et la France aurait été condamnée.

Exprimons plutôt notre souci de conditions de production normales, dignes, respectueuses de l'environnement dans les contrats de filière, à travers une réforme de la LME dont nous pouvons poser dès à présent les jalons, à travers les accords tripartites ou la pluriannualité chère à Guillaume Garot.

Les dispositions que vous proposez en l'occurrence n'ont aucune chance d'être mises en oeuvre. Je le regrette, mais je ne puis émettre qu'un avis défavorable.

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Échaudés par les contrats en général, les agriculteurs sont relativement sceptiques quant à l'efficacité des contrats de filière.

Peut-être faudrait-il explorer une autre voie et demander une expérimentation sur le fondement de l'article 222 du règlement européen relatif à l'organisation commune de marché unique. Cela avait été fait pour l'étiquetage des viandes. Lors de l'examen de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, nous avions beaucoup débattu de cet étiquetage, sans aboutir. Or, deux ans plus tard, nous y sommes. Ne soyons donc pas trop timides, et avançons !

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Au cours des heures d'audition consacrées à la préparation de cette loi, nous avons ensemble cherché de nouveaux compromis équitables entre producteurs, transformateurs et distributeurs, chère collègue. Je propose que votre proposition d'une expérimentation soit débattue en séance. Le ministre pourra vous répondre. Mieux, je vous invite à travailler avec son cabinet pour que de telles voies soient explorées. Des annonces seront sans doute faites. Pour ma part, je voudrais aussi des contrats tripartites rénovés et des expérimentations.

Les amendements sont retirés.

La commission examine l'amendement CE206 de M. Guillaume Garot.

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Les réelles difficultés d'application de la loi LME ont été évoquées en discussion générale, ainsi que les déséquilibres patents entre grande distribution, transformateurs, producteurs. Le risque, souligné par le ministre de l'économie, d'une déflation des prix alimentaires est réel. Quelles solutions envisager pour que le travail de chacun soit rémunéré et que la valeur propre de l'alimentation soit reconnue dans l'économie ?

En prohibant les prix abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation, cet amendement élèverait un garde-fou, à l'heure où nous constatons des dérives. La course aux prix bas a des effets délétères, pour ne pas dire mortifères, sur l'économie générale de toute une filière : les prix bas tuent l'investissement, l'innovation, l'exportation.

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Nous souscrivons à l'analyse des auteurs de l'amendement et partageons leur indignation. Avec ce prix plancher, vous reprenez, sous une forme un peu différente, une disposition défendue lors de l'examen d'une proposition de loi du groupe Les Républicains.

Cependant, je vous invite plutôt, cher collègue, à vous rallier aux amendements suivants, qui reprennent une idée similaire et auxquels je suis favorable. Ils sont extrêmement attendus et nous devons les défendre avec force en séance, auprès du ministre. Je le dis à M. Thierry Benoit, Mme Catherine Vautrin et tous ceux qui sont engagés dans ces combats : nous suivons les mêmes logiques, il est temps d'aboutir.

Si je vous prie, cher Guillaume Garot, de bien vouloir retirer votre propre amendement, c'est parce qu'il présente deux inconvénients majeurs.

Premièrement, le coût moyen cache des différences. Dans la même orientation technico-économique des exploitations agricoles (OTEX), dans la même petite région, deux entrepreneurs auront des coûts de production, et donc des marges, extrêmement différents. Nous l'observons sur nos territoires : les écarts-types sont considérables. Les plus-values, les accès aux marchés, le recours aux intrants sont tellement différents ! De ce point de vue, il n'est pas pertinent de se fonder sur les coûts moyens.

Deuxièmement, cette logique de coût moyen ne tient pas dans la durée. Nous avons tous voulu des prix minima pour le porc, pour le lait, mais cet affichage forcené d'un coût de production moyen conduit avant tout à se faire voler des marchés par des concurrents low cost ou dont les conditions de production diffèrent grandement. Si le prix doit être au menu des discussions, il ne faut pas en faire une condition préalable, ou alors nous courons le risque de créer des illusions, de perdre des marchés et, peut-être, d'occulter des disparités qu'il nous faut chercher à réduire par une politique de développement, de réorganisation et de modernisation.

L'amendement CE206 est retiré.

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CE29 de M. Antoine Herth, qui fait l'objet des sous-amendements CE267 et CE266 du rapporteur pour avis, CE43 de Mme Catherine Vautrin et CE216 de Mme Annick Le Loch, et les amendements CE228 de Mme Jeanine Dubié et CE154 de M. Thierry Benoit.

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L'amendement CE29 vise à améliorer les dispositifs de contractualisation prévus par la loi en prévoyant des références à des indicateurs publics de coûts de production en agriculture. Les sous-amendements du rapporteur permettront d'en améliorer la rédaction et d'éviter certains écueils.

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Mes sous-amendements me permettent de répondre à quasiment tous ceux qui, ici, partagent les mêmes préoccupations.

Il me semble que l'approche par les marges n'est pas pertinente, car elle ne permet pas d'être réactif : les marges sont reconstituées avec un délai de dix-huit mois. Par ailleurs, j'ai déjà évoqué le problème des moyennes.

Les uns et les autres, vous avez eu l'intelligence de parler d'un faisceau de prix. Cette approche répond aux objections que j'élevais à propos de l'amendement CE206 de M. Guillaume Garot. Produire du lait de Comté à 800 mètres d'altitude, ce n'est pas la même chose que produire du lait dans le Pas-de-Calais, en Bretagne ou dans le Centre. Un faisceau de prix reflète la diversité des bassins et des modes de production.

J'aimerais aussi que l'on retienne un prix indicatif, par exemple 320 ou 330 euros les 1 000 litres de lait, en deçà duquel le modèle qui nous est cher n'est plus tenable – le modèle de l'exploitation à taille humaine, respectueuse de son environnement, engagée dans l'agro-écologie, que l'on retrouve dans 75 % du croissant laitier, dans le Grand Est et surtout le Grand Ouest, où la production de lait reste massive, et qui concourt à l'équilibre de nos territoires, à la protection de l'eau, à la biodiversité. En deçà de ce prix, nous basculons dans un autre modèle : les usines à lait, l'import-export, le bas de gamme.

Tel est l'esprit de ces deux sous-amendements CE267 et CE266.

Cependant, l'amendement CE266 a été rédigé dans la précipitation. Je propose de le rectifier dans la rédaction suivante : « qui reflètent la diversité des bassins et des modes de production au regard de la triple performance économique, sociale et environnementale des exploitations définie à l'article L. 1 ».

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Effectivement, nous militons tous en faveur de la même logique de prise en compte des coûts de production et pour qu'un terme soit mis à la destruction de valeur généralisée.

Nous avons cherché des références pour déterminer le prix. Les propositions que vient de faire le rapporteur pour avis, notamment avec le sous-amendement CE266 rectifié, sont tout à fait constructives, et j'y adhère. La spécificité des bassins de production et la réalité des coûts seraient reconnues, de même que la qualité du travail, dans ses dimensions économique, sociale et environnementale. Il nous restera, ensuite, à travailler sur la relation avec le distributeur et sur le prix de l'industriel, mais chaque chose en son temps.

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Je souscris totalement aux arguments qui viennent d'être développés et j'approuve les modifications proposées

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L'amendement CE228 participe du même esprit. Je pense que, sous-amendé comme le propose le rapporteur, l'amendement de M. Herth répond à nos préoccupations.

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Effectivement, nous sommes tous d'accord sur la nécessité d'établir un lien entre les coûts de production, la marge des éleveurs et le prix payé par les consommateurs. Ce n'est quand même pas la même chose de vendre des produits agricoles qui deviennent des denrées alimentaires que de vendre des CD ou des abonnements téléphoniques ! La guerre des prix a fait beaucoup de mal à l'agriculture, mais les lignes commencent à bouger.

La commission adopte successivement les sous-amendements CE267 et CE266 rectifié.

Puis elle adopte les amendements CE29, CE43 et CE216, sous-amendés.

En conséquence, les amendements CE228 et 154 tombent.

Puis la commission examine, en discussion commune, les amendements CE37 de M. Antoine Herth et CE153 de M. Thierry Benoit et les amendements identiques CE42 de Mme Catherine Vautrin, CE215 de Mme Annick Le Loch et CE227 de Mme Jeanine Dubié.

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L'amendement CE37 a pour objet de préciser que « le contrat, contenant des volumes et un prix, est conclu avant le 30 novembre de l'année précédente ». Il s'agit de disposer de références solides en matière de coûts de production.

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Avant le printemps, les industriels négocient les conditions générales de vente avec la grande distribution. Nous proposons par l'amendement CE153 une période de négociation préalable entre producteurs et industriels, qui permettrait de tenir compte des coûts de production, des marges, des revenus des producteurs.

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La loi relative à la consommation, dite loi « Hamon », précisait que les conditions générales de vente devaient être adressées le 30 novembre. Pour être certains que les coûts de production sont bien pris en compte, exigeons que la négociation soit terminée avant l'envoi des conditions générales de vente. J'ai longtemps été réticente à l'inscription de dates dans un texte législatif, mais la loi Hamon a elle-même fixé les dates du 1er mars et du 30 novembre ; restons donc dans la même logique.

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J'ajoute qu'il s'agit d'intégrer complètement les producteurs dans des négociations dont ils sont aujourd'hui exclus, alors que ce sont eux qui fournissent les produits et les matières premières ensuite transformés par les industriels. Donnons-leur toute la place qu'ils méritent.

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Encore une fois, je ne peux que souscrire à l'esprit dont procèdent ces propositions. Je suis de cette sensibilité régulatrice qui souhaite prendre en compte les coûts et les attentes légitimes des producteurs.

Se pose cependant un problème technique : les contrats laitiers sont non pas annuels mais d'une durée de cinq ans. Quant aux discussions sur le prix, en matière de lait, la « paye de lait », comme disent les éleveurs, est mensuelle. Des accords-cadres annuels seraient inadaptés à cette double réalité.

Par ailleurs, tous les observateurs le disent, notamment l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, il ne serait ni réaliste sur le plan technique, ni souhaitable sur le plan commercial de faire fi de la question des débouchés de nos transformateurs – des niches à forte valeur ajoutée aux marchés étrangers. Confrontés à une dégradation de leurs conditions économiques et ne sachant à l'avance quels seront ces débouchés, ils seraient tentés de se fournir auprès de pays dont la production accrue a déjà déstabilisé le marché et qui deviendraient nos premiers concurrents.

Il me coûte de vous le dire, chers collègues, mais je pense qu'il faut renoncer à cette proposition. Je vous invite à retravailler sur la question des contrats tripartites, de la pluriannualité, à saisir le ministre de la question en séance, éventuellement par un amendement qui ne poserait pas ces difficultés techniques.

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Comme vous tous, chers collègues, j'avais été interpellée par les syndicats agricoles sur cette question, mais c'est plutôt la rigidité du calendrier fixé qui pose problème – l'échéance du 30 novembre pose notamment un certain nombre de problèmes en viticulture. Je n'approuve donc pas ces amendements.

Les amendements CE37, CE153, CE42, CE215 et CE227 sont retirés.

La commission est saisie de l'amendement CE182 de Mme Michèle Bonneton.

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L'article L. 441-3 du code de commerce dispose que, lors d'une vente, la facturation incombe au vendeur. Dans de nombreuses filières agricoles, néanmoins, l'usage veut que l'acheteur se charge de facturation – le vendeur délègue, en quelque sorte, la facturation à l'acheteur. Ce service, souvent intégré au contrat de fourniture, a nécessairement un coût.

L'une des difficultés est que le vendeur peut s'en trouver lié pour une longue durée, par mandat, à l'acheteur. La loi dispose ainsi que la durée de certains contrats de fourniture, par exemple les contrats laitiers, est d'au moins cinq ans. Ainsi, en même temps qu'un contrat de fourniture de lait, le producteur signe généralement un contrat de délégation de facturation à l'acheteur, les deux contrats étant généralement liés et de même durée. Or la puissance des grandes laiteries est sans commune mesure avec celle de la plupart des agriculteurs, et, pour modifier ce double contrat, il faut aller devant le juge – perspective souvent rédhibitoire.

Par cet amendement, nous proposons de dissocier le mandat de facturation du mandat de fourniture de produits agricoles et de limiter à un an la durée du mandat de facturation.

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Votre préoccupation est légitime, et la situation doit évoluer, mais cela ne peut se faire qu'à travers des mesures réglementaires, puisque le dispositif que vous visez relève de l'article R. 631-10 du code rural et de la pêche maritime. Le mieux serait donc d'interpeller le ministre de l'agriculture en séance sur cette question.

L'amendement est retiré.

La commission est saisie de l'amendement CE147 de M. Thierry Benoit.

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Depuis quatre ou cinq ans, l'Union européenne agite comme un hochet devant le nez des agriculteurs le dispositif de la contractualisation. Puisqu'elle permet également la création d'associations d'organisations de producteurs (AOP), nous proposons que le rôle de ces organisations de producteurs (OP) soit véritablement reconnu et que ce soit elles qui négocient les contrats de vente pour le compte de leurs adhérents. Cela encouragerait les éleveurs, parfois très individualistes, à y adhérer pour pouvoir peser davantage dans les négociations avec les grands industriels.

Je ne vois pas de raison de rejeter cet amendement qui va dans le sens des préconisations européennes.

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On peut ne pas être d'accord avec tout ce que recommande l'Europe. Par ailleurs, votre amendement « casserait » un décret lui-même structurant pour les AOP. Il est, de plus, ambigu : l'OP devrait-elle négocier et commercialiser les droits à produire ?

C'est un fait, l'abandon des quotas laitiers et des mécanismes de régulation afférents qui relevaient surtout de l'État et de l'Union européenne a conduit à une balkanisation de la production qui s'avère un véritable désastre, les uns ayant choisi de se regrouper en groupements de producteurs, d'autres en OP ou en AOP, à l'échelle des grandes ou des petites régions, d'autres encore par filière ou par entreprise. Tout est donc à réinventer.

Les syndicats agricoles que nous avons auditionnés prônent la création de grands bassins laitiers qui ne soient pas directement liés aux entreprises. Les OP y auraient en charge, non la gestion commerciale, mais la décision d'attribuer des contrats laitiers à ceux qui en ont le plus besoin – jeunes agriculteurs s'installant, fermes de taille moyenne ayant besoin de s'agrandir ou de se consolider, AOP ayant besoin de volume pour couvrir un marché prometteur, au plan local ou international. À défaut d'une régulation par les prix, nous aurions une régulation par les volumes. C'est dans cette optique que votre proposition est intéressante, car elle permettrait une véritable convergence des producteurs, dans l'esprit des quotas laitiers. Je suggère donc que vous la soumettiez au ministre en séance.

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Il y a, sur le marché du lait, une segmentation en amont des pratiques culturales et des modes de valorisation de la production, qu'il s'agisse d'une certification haute valeur environnementale (HVE), Bleu-Blanc-Coeur ou oméga naturels. Ce qu'attendent nos agriculteurs, c'est moins des normes que des solutions pour les aider à valoriser leur production.

L'amendement est retiré.

Article 30 (article L. 631-24-1 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) : Interdiction de la cessibilité marchande des contrats laitiers

La commission examine, en discussion commune, les amendements CE175, CE195 et CE194 de M. Yves Daniel et les amendements identiques C79 du rapporteur pour avis, CE34 de M. Antoine Herth, CE39 de Mme Catherine Vautrin, CE58 de M. Lionel Tardy et CE225 de Mme Jeanine Dubié.

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Le phénomène de vente de contrats entre producteurs laitiers et industriels prend de l'ampleur, ce que dénoncent de nombreux syndicats agricoles. On ne peut, en effet, donner gratuitement l'autorisation de produire à quelqu'un pour qu'il vende ensuite ce droit.

Ce système d'achat de débouchés freine l'installation de jeunes agriculteurs et favorise dans le même temps l'agrandissement d'exploitations à forts capitaux. Pour éviter une augmentation considérable du coût de l'installation et permettre aux exploitations de toutes tailles de vivre de leur production, les amendements CE175, CE195 et CE194 proposent d'empêcher la cession à titre onéreux des contrats laitiers soit par l'interdiction pure et simple de la contractualisation, soit en portant de cinq à douze ans – durée retenue pour l'amortissement du matériel nécessaire à une exploitation laitière – la période d'interdiction, soit enfin en portant cette durée à neuf ans, ce qui correspond à la durée d'un bail rural.

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Je suis, comme vous, profondément choqué que l'on puisse commercialiser ce droit à produire, mais on ne peut empêcher un contrat de faire l'objet d'une transaction commerciale au-delà d'une certaine durée, que le ministre a fixée à cinq ans et que plusieurs d'entre vous ont proposé d'étendre à sept ans. Je vais dans leur sens car, au-delà, il y a un risque d'inconstitutionnalité. Sept ans sont un maximum dont nous ne sommes pas non plus assurés qu'il soit validé par le Conseil constitutionnel.

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Nous sommes tous d'accord pour accroître la durée d'interdiction de cession à sept ans, en espérant que le Conseil constitutionnel ne s'y opposera pas.

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Autant prévoir une durée plus longue que la durée initiale puisque, pour des raisons juridiques, cette durée ne peut être que temporaire et non renouvelée.

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Il s'agit de maintenir le caractère temporaire de l'interdiction, mais en en allongeant la durée.

Les amendements CE175, CE195 et CE194 sont retirés.

La commission adopte les amendements identiques C79, CE34, CE39, CE58 et CE225.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CE41 de Mme Catherine Vautrin, CE59 de M. Lionel Tardy et CE226 de Mme Jeanine Dubié, et l'amendement CE80 du rapporteur pour avis.

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Afin d'éviter le contournement du dispositif, ces amendements posent de nouvelles interdictions sur les cessions à titre onéreux de contrats portant sur l'achat de lait de vache et les étendent à l'ensemble des laits.

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Notre amendement a deux objets : d'une part, l'extension de la mesure à tous les laits, pour une question d'équité ; d'autre part, l'extension de l'interdiction aux transferts totaux ou partiels des obligations nées d'un contrat de fourniture de lait. Cela permettra de couvrir toute la réalité des cessions à titre onéreux, en empêchant les montages juridiques permettant le contournement de la loi.

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Ces amendements visent l'ensemble des transferts et des obligations nées d'un contrat de fourniture de lait et empêchent les montages juridiques ayant vocation à limiter l'application de la loi.

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L'amendement CE80 propose une rédaction plus conforme à la légistique en spécifiant que la mesure s'applique aux cessions totales comme partielles. Je suggère donc le retrait des amendements précédents.

Les cessions partielles ont déjà fait beaucoup de dégâts, puisque la simple cession partielle d'un quota laitier permettait de s'affranchir de l'interdiction de retourner une prairie permanente.

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Nous parlons ici d'interdire la cession marchande des contrats afin d'empêcher la spéculation dénoncée par l'étude d'impact. Mais abordons la question sous un autre angle : le contrat en tant que tel constitue de la valeur pour une exploitation agricole et participe de sa richesse. Comment identifier précisément cette valeur et à quel endroit du bilan la faire figurer ? Comment la déclarer au fisc ?

La loi d'orientation agricole de 2006 permet d'intégrer cette valeur au fonds agricole – équivalent du fonds de commerce –, mais ce dernier reste assez peu utilisé, alors que cela permettrait de freiner la survalorisation du foncier.

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L'amendement du rapporteur a pour objet d'empêcher que la cession, même partielle, du contrat laitier soit possible mais, à la différence de nos amendements, il ne concerne que le lait de vache. N'y aurait-il pas moyen de préciser que cette mesure s'applique à tous les laits ?

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Je voudrais signaler à M. Antoine Herth que les contrats laitiers sont aujourd'hui des contrats de volume et non des contrats de prix. Il serait donc compliqué de les valoriser, et la question du prix attaché à ces contrats mérite sans doute d'être posée.

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M. Antoine Herth pose la question de la valeur marchande des contrats dans la valorisation d'une exploitation. Mais la transmission de cette dernière ne s'accompagne pas nécessairement de la transmission du contrat, lequel peut être tombé en désuétude si l'exploitation ne produit plus de lait. Par ailleurs, selon la proposition ouverte par M. Thierry Benoit, c'est désormais à l'organisation professionnelle (OP) qu'il reviendrait de répartir les volumes.

Reste que je ne suis pas certain qu'il faille traduire en valeur ce droit à produire lié au contrat, mais l'argument sur la valeur du foncier pourrait m'inciter à reconsidérer la question. Tout cela mérite qu'on y réfléchisse, mais contentons-nous, pour le moment, de poser des garde-fous en interdisant les transactions pendant sept ans.

Quant à la question posée par Mme Michèle Bonneton, elle a une explication technique : le lait de brebis et le lait de chèvre ne font pas l'objet de contrats au sens des contrats laitiers. Néanmoins, on évoque le fait que les contrats puissent devenir obligatoires, notamment pour le lait de chèvre : cela peut justifier le dépôt en séance d'un amendement précisant que ces mesures s'appliquent non au lait de vache mais au lait sous contrat.

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Cette discussion m'évoque la pêche et les quotas attachés aux bateaux. Lorsqu'un marin-pêcheur vend son bateau il vend également le quota attaché à celui-ci. Or ce quota n'est normalement pas monnayable, car le quota de pêche est attribué à la France de manière collective, et il ne peut pas être transféré individuellement.

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Je propose que nous organisions une table ronde avec la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) et les autres acteurs concernés, sur la question des droits à produire.

La commission rejette les amendements identiques CE41, CE59 et CE226.

Puis elle adopte l'amendement CE80.

Elle est ensuite saisie de l'amendement CE40 de Mme Catherine Vautrin.

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L'amendement CE40 propose d'adapter la problématique de la cession des contrats aux producteurs coopérateurs qui, aux termes de l'article L. 521-1-1 du code rural et de la pêche maritime, ont la double qualité d'associés détenteurs de parts sociales et d'apporteurs de leur production. En application de cette double qualité, les parts détenues au capital de la coopérative sont indissociables de la production apportée, et le nombre de parts détenues est défini en fonction de cette dernière – d'où le fait que les coopératives sont nécessairement des entreprises à capital variable. En coopérative, si l'associé coopérateur souhaite céder son engagement d'activité, cela ne peut passer que par la cession de ses parts à leur valeur nominale. La cession doit être agréée par le conseil d'administration de la coopérative, qui déterminera avec le nouveau coopérateur l'engagement corrélatif.

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La coopérative appartenant au producteur, celui-ci dispose d'une double qualité : il est associé et apporteur de production à la coopérative. À ce titre, il ne peut, à proprement parler, exister de cession d'un contrat à titre marchand. Votre proposition ne peut donc pas être retenue mais j'en saisis l'esprit. Elle pose la question des OP dans la mesure où, en effet, les coopératives, qui gèrent la transmission et le partage des moyens de production de façon tout à fait spécifique, ne sont pas concernées par ce dispositif des cessions mais représentent malgré tout 55 % de la collecte. La cohabitation entre les différentes structures est donc un vrai défi que nous devons relever. D'où l'importance que cette loi Sapin II puisse être l'occasion d'un travail en profondeur sur les questions de régulation, pour nous permettre de réussir la transition vers l'après-quotas.

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Vous me certifiez que les coopératives ne sont pas concernées ?

L'amendement CE40 est retiré

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CE77 et CE78 du rapporteur pour avis.

Elle en vient ensuite à l'amendement CE142 de M. Thierry Benoit.

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Afin d'encourager en amont la structuration de la production, nous souhaitons encourager la création d'OP et d'associations d'organisations de producteurs (AOP) et impliquer dans la cession des volumes, non seulement le cédant et le preneur, mais aussi les OP et les industriels.

Cet amendement confie donc à l'OP la gestion et l'attribution des volumes. En effet, il est ressorti du rapport sur l'avenir des filières d'élevage que nous avons produit avec Mme Annick Le Loch que le gré à gré posait de grandes difficultés aux jeunes agriculteurs, pour qui il était indispensable que les OP organisent la négociation et la répartition des volumes.

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Dans la mesure où seulement 18 % des volumes totaux collectés en France le sont chez des éleveurs adhérents à une OP, votre amendement n'est pas une solution. Je pense donc préférable que nous attendions les conclusions de la table ronde à laquelle je vous ai conviés pour nous faire notre doctrine à partir du rapport du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) et proposer des voies d'amélioration lors de la discussion en séance publique. Je suis certain que vous aurez l'oreille du ministre.

L'amendement est retiré.

La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 30 modifié.

Après l'article 30

La commission est saisie des amendements identiques CE33 de M. Antoine Herth, CE47 de Mme Catherine Vautrin, CE157 de M. Thierry Benoit, CE214 de Mme Annick Le Loch et CE231 de Mme Jeanine Dubié.

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Il s'agit d'instaurer un cadre commun pour chacun des acteurs de la filière, agriculteurs comme industriels.

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Il s'agit d'instaurer un dialogue permanent entre les différents maillons des filières, en incluant les distributeurs ou les industriels, souvent absents.

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Notre amendement a pour objet d'instaurer, sous l'égide du médiateur des relations commerciales agricoles, une discussion entre tous les maillons de la filière pour l'ensemble des productions agricoles. Il est nécessaire, en effet, d'approfondir le dialogue interprofessionnel.

Par ailleurs, la conférence de filière, dont les modalités de mise en oeuvre sont renvoyées à un décret, présenterait l'intérêt de fournir un cadre commun à l'ensemble des acteurs.

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L'enfer est pavé de bonnes intentions, et votre proposition risque de nous attirer les foudres de la Commission européenne, pour qui le simple fait d'évoquer cette conférence dans la loi est contraire au dogme libéral, sachant qu'elle a déjà dénoncé la réunion et les contacts qu'a établis, dans l'urgence, le ministre de l'agriculture au moment de la crise laitière et de la crise du porc, obligeant toutes les parties prenantes à se justifier et à prouver qu'il ne s'agissait pas d'une entente illicite. Même si je partage votre idée, mon avis est donc défavorable.

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Il y a une différence entre la table ronde convoquée par le ministre et l'organisation d'une conférence réunissant les différents professionnels.

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La rédaction de l'amendement est identique à celle de la proposition de loi en faveur de la compétitivité de l'agriculture et de la filière agroalimentaire adoptée par le Sénat. Elle ne comporte aucune référence ni aux prix, ni aux volumes mais précise que la conférence examine la situation de l'année en cours et les perspectives d'évolution des marchés agricoles et agroalimentaires concernés pour l'année à venir.

Par ailleurs, les positions européennes évoluent, la Commission commençant notamment à se rallier à nos propositions en matière d'identification d'origine. Il n'est donc pas exclu qu'elle fasse de même sur cette question, et il me semble que nous avons pris les précautions suffisantes dans la rédaction de l'amendement.

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Les auditions que nous avons menées dans le cadre de notre mission d'information sur l'avenir des filières d'élevage nous ont confirmé que, dans certaines filières, la tension est telle qu'elle empêche tout dialogue.

Si le mot conférence vous gêne, Monsieur le rapporteur, parlons de convention, de sommet ou de colloque, mais il faut que l'ensemble des acteurs, dont les producteurs, puissent échanger et s'entendre sur les diagnostics, les enjeux et les défis que doit relever la filière, notamment en matière de sécurité sanitaire, sans qu'il soit question d'une quelconque négociation sur les prix. Nous devons être audacieux et convaincre le ministre.

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Une grande partie de mon engagement et de mes combats est consacrée à développer ce type de dialogue, et il me coûte de vous opposer un refus, mais le ministère de l'économie et le ministère de l'agriculture nous ont tous les deux alertés sur le risque juridique. La Fédération nationale des producteurs de lait nous a également mis en garde sur les conséquences juridiques qu'auraient à subir les producteurs si une telle conférence était dénoncée et que cela faisait jurisprudence.

Par prudence, je vous invite donc à retirer ces amendements et à prendre le temps de réfléchir à une proposition qui aille dans ce sens mais dont nous soyons assurés qu'elle ne présente aucun risque juridique.

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Il est important que cette question soit débattue dans l'hémicycle pour envoyer un message à l'exécutif.

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Cela peut-être une piste, à l'image de ce qui s'est produit en juillet 2015, lors de la crise agricole, lorsque M. Stéphane Le Foll avait organisé au Parlement une réunion des producteurs, des transformateurs et des distributeurs, qui sont parvenus à s'écouter.

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Madame Chantal Guittet ne propose pas une séance de bavardages en salle Lamartine mais d'aborder le sujet dans l'hémicycle, par le biais d'un amendement d'appel.

Les amendements sont retirés.

La commission en vient à l'amendement CE262 du rapporteur pour avis.

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Il s'agit d'un amendement d'appel, qui propose que, dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les pistes de renforcement des missions de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires ainsi que sur l'opportunité de favoriser fiscalement et réglementairement, en matière agroalimentaire, la mise en place de contrats tripartites et pluriannuels entre les agriculteurs, les transformateurs et les distributeurs. J'espère néanmoins que cet amendement pourra tomber en séance au profit de propositions que pourrait nous faire le ministre.

Nous avons été capables de favoriser dans l'agriculture un modèle coopératif qui représente aujourd'hui 50 % de la transformation et de la collecte des biens agroalimentaires. Nous avons su favoriser les coopératives d'utilisation de matériel agricole (CUMA) et les groupes de développement contre l'individualisme des agriculteurs. Nous devons maintenant être capables d'obtenir au plan commercial des avantages fiscaux et réglementaires qui favorisent les accords tripartites et les ententes.

La commission adopte l'amendement.

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 17 mai 2016 à 16 h 15

Présents. - M. Damien Abad, Mme Brigitte Allain, M. Frédéric Barbier, M. Thierry Benoit, M. Philippe Bies, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. Christophe Borgel, M. Jean-Claude Bouchet, M. André Chassaigne, M. Yves Daniel, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, Mme Sophie Errante, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Christian Franqueville, M. Jean Grellier, M. Antoine Herth, M. Philippe Kemel, M. Jean-Luc Laurent, Mme Annick Le Loch, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Hervé Pellois, M. Dominique Potier, M. Michel Sordi, M. Éric Straumann, M. Lionel Tardy, Mme Catherine Vautrin

Excusés. - M. Bruno Nestor Azerot, M. Laurent Furst, Mme Pascale Got, M. Serge Letchimy, Mme Josette Pons, M. Thierry Robert, Mme Béatrice Santais, Mme Catherine Troallic, M. Jean-Paul Tuaiva

Assistaient également à la réunion. - M. Éric Alauzet, M. Charles de Courson, M. Guillaume Garot, M. Jean-Jacques Guillet, Mme Sophie Rohfritsch