La commission des affaires économiques a examiné, conjointement avec la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, le rapport d'information de M. Julien Aubert, de Mmes Marie-Noëlle Battistel et Sabine Buis, sur la mise en application de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, qui nous a occupés de longs mois dans le cadre de la commission spéciale présidée par mon prédécesseur François Brottes, est une loi fondatrice, constitutive d'une nouvelle ère : celle de la transition énergétique. C'est une grande loi de cette législature : elle constitue une véritable révolution pour notre pays et pour nos concitoyens. Elle permet de renforcer l'indépendance énergétique de la France en promouvant la sobriété énergétique et en organisant la rénovation des bâtiments, le développement des transports propres et des énergies renouvelables. La lutte contre le réchauffement climatique et la réduction des émissions de gaz à effet de serre figurent parmi ses ambitions principales. Au niveau européen, la France a été l'un des premiers pays de l'Union européenne à adopter un tel texte, ce qui a placé le pays à la pointe de la transition énergétique mondiale. On peut estimer que cette exemplarité a en partie contribué au succès de la COP21 en décembre 2015.
Le texte est le fruit d'un travail de longue haleine. Le sujet a donné lieu à un débat national public et le projet de loi a suscité des discussions parlementaires très riches, avec quelque 150 heures de débats en séance publique et plus de 5 000 amendements déposés, dont près de 1 000 furent adoptés. La procédure parlementaire a été elle-même longue et à la hauteur des enjeux, avec la création de la commission spéciale. Le projet de loi a été débattu en première lecture à l'Assemblée nationale en septembre 2014 et adopté le 14 octobre 2014 ; la lecture définitive a eu lieu le 22 juillet 2015.
Le chantier de sa mise en application est titanesque. Près de 80 % des mesures d'application par décret ont déjà été publiées. Le travail de la mission d'information commune aux commissions des affaires économiques et du développement durable, qui va vous être présenté par son président et par ses rapporteurs, permet d'évaluer l'ampleur de ce qui a déjà été fait et de ce qui reste encore à faire.
Nous aurons l'occasion cet après-midi, lors de l'examen en commission élargie de la mission budgétaire « Écologie, développement et mobilité durables », de revenir sur le sujet avec les ministres concernés, notamment Mme Ségolène Royal. Il sera particulièrement intéressant de les entendre sur l'enveloppe financière de la transition énergétique et sur la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).
Depuis 2008, le Parlement est chargé par la Constitution d'évaluer les politiques publiques, et, au premier chef, les lois qu'il vote. Cette mission est souvent délaissée au profit d'autres priorités, mais le rapport que nous vous présentons aujourd'hui dément cette affirmation.
La loi du 17 août 2015 est une loi importante. Elle engage de façon programmatique notre avenir et celui des générations futures. Elle appelle à modifier nos habitudes de vie et à renouveler nos pratiques économiques, non seulement dans le domaine de la production énergétique, par le développement des énergies renouvelables, mais aussi en matière de modes de transport, d'éclairage public, de circulation urbaine. Elle incite à renouveler le débat public, à mieux maîtriser la consommation d'énergie, mais aussi à faire preuve d'une plus grande solidarité, par exemple avec le chèque énergie – c'est l'article 201.
On peut juger ses objectifs trop ambitieux. On peut estimer que la part du nucléaire dans le mix énergétique doit être égale au plafond de 63,2 gigawatts prévu par l'article 187, ou au contraire qu'elle doit être ramenée le plus vite possible à 50 % de la production d'électricité, objectif qu'il est prévu d'atteindre à l'horizon 2025. On peut juger que les délais imposés aux acteurs, qu'il s'agisse de la prohibition d'objets ou d'emballages en plastique ou de la reprise des déchets, sont trop courts, ou au contraire trop longs. Mais l'on ne peut pas passer à côté de l'essentiel : cette loi, comme la COP21 qui l'a suivie, invite à une modification des comportements, progressive mais durable.
La mission commune à nos deux commissions a voulu analyser chacun des articles, ce qui, eu égard à l'ampleur du texte et à la diversité des sujets, n'était pas chose aisée. On recense ainsi dans la loi, 167 renvois à des mesures d'application, 56 habilitations à légiférer par ordonnance et 104 renvois au décret, sans compter les incidences sur de nombreux autres textes : agrément des éco-organismes, concessions, arrêtés municipaux sur la circulation urbaine, etc. Les problèmes posés sont parfois purement économiques, parfois fiscaux, parfois sociétaux, parfois exclusivement juridiques, toujours environnementaux.
Certes, vingt-six rapports sont demandés au Gouvernement par le Parlement, mais trois seulement sont publiés si l'on compte du « jaune » budgétaire, qui devrait l'être dans les jours qui viennent. La mission a été sensible à l'absence du rapport sur les colonnes montantes prévu à l'article 33, mais ce n'est qu'un exemple parmi de nombreux autres.
On s'interroge parfois sur le rôle législatif de la commission du développement durable. Je constate que l'apport parlementaire, sous l'égide des deux commissions, a été essentiel à la loi comme au présent rapport. Je tiens à en remercier Sabine Buis, Marie-Noëlle Battistel et Julien Aubert, mais aussi les autres membres de la mission, qui a procédé à cinq tables rondes et auditionné les représentants de 28 organismes ou administrations, soit environ 200 personnes.
Si nos observations sont nombreuses et souvent précises, elles ne visent pas à mettre en cause des responsabilités, mais nous invitent à nous interroger collectivement sur ce qui fonctionne et ne fonctionne pas dans le texte, quitte à nous poser rétrospectivement des questions sur la qualité de la loi. Le Parlement n'est certainement pas le plus mal placé pour juger son propre travail. De telles propositions n'ont pas pour conséquence d'augmenter la dépense publique, pas plus qu'elles ne nous enferment dans la critique systématique ou dans l'autosatisfaction. Évaluer la loi, c'est précisément en assurer un suivi concret, éventuellement pour la modifier si, un an après son vote, l'implication des acteurs, les circonstances, ou des blocages le nécessitent. En tout cas, le Parlement ne saurait se désintéresser de la loi qu'il vote ni des perspectives qu'elle ouvre. Voilà pourquoi nous avons tenu à étudier chaque article, même les plus anodins, sans aller jusqu'à interpréter le texte, mais en tentant de nous défaire de celles de ses analyses qui s'avéraient créer des blocages. J'appelle mes collègues à poursuivre demain ce travail d'évaluation : c'est la vie quotidienne de nos concitoyens qui est en jeu.
Les rapporteurs de la mission ont exercé les responsabilités suivantes. Julien Aubert a été rapporteur pour l'ensemble du texte. Marie-Noëlle Battistel était rapporteure pour les titres I – objectifs de la transition énergétique et de la politique énergétique –, V – énergies renouvelables –, VII – efficacité et compétitivité – et sur les chapitres III et IV du titre VIII, relatifs à l'application territoriale et aux dispositions spécifiques à l'outre-mer. Sabine Buis était responsable des titres II, sur la rénovation des bâtiments, et IV, sur l'économie circulaire. Denis Baupin était initialement chargé des titres III – transports et qualité de l'air –, VI – sûreté nucléaire et participation citoyenne – et VIII – programmation énergétique et transition énergétique dans les territoires – à l'exception du chapitre IV. À la suite de la démission de Denis Baupin, puis de la disparition du groupe Écologiste, qui ont modifié la composition de la mission, j'ai repris ces parties du rapport.
Le titre II est sans doute celui qui suscite le plus d'insatisfaction, alors que c'est lui qui fixe l'objectif de rénovation de 500 000 logements par an. On attend encore la définition des bâtiments à énergie positive comme des critères de performance énergétique minimale visés à l'article 12, y compris pour les habitations à loyer modéré (HLM), auxquels la réglementation ancienne continue de s'appliquer. La RT (réglementation thermique) 2012 est en cours de modification. L'individualisation des compteurs de chauffage d'immeubles ne progressera que très lentement. On attend également une réglementation d'ensemble pour le secteur tertiaire.
Quatre exemples, en particulier, témoignent du fait que la loi est insuffisamment appliquée.
D'abord, le retard pris par le décret sur le carnet numérique de suivi du logement visé à l'article 11 et qui concerne en principe les permis de construire déposés au 1er janvier 2017. Il semble que le Gouvernement invoque des difficultés techniques ; mais, si le décret ne paraît pas, il n'est pas question de laisser le problème non résolu. Contrairement à l'objet même de la loi, qui est de mieux informer les bailleurs et les locataires, propriétaires ou copropriétaires, un rapport d'inspection de janvier 2016 conclut ainsi : « Le cadre défini par la loi du 17 août 2015 est considéré par les juristes consultés comme insuffisant pour que puisse être pris un texte réglementaire définissant le carnet numérique sous la forme d'un service en ligne. » Mais l'on voit mal où résident ces insuffisances et qui a réclamé un service en ligne. Cette expertise remet en réalité en cause le financement et le consentement des acteurs, ainsi que la place de la puissance publique. Ce n'est pas la loi qui parle de service en ligne ; la forme numérique du carnet n'en impose nullement la diffusion généralisée par internet, ni la création d'un fichier informatique au sens de la loi de 1978. Les notaires l'ont parfaitement compris, qui y voient l'occasion d'homogénéiser les obligations en cas de vente. Il n'est question ni dans la loi ni dans les faits d'instaurer un système de consultation publique géré par la puissance publique et d'accès payant. S'il est nécessaire d'apporter une précision législative à ce sujet, je suis toute prête à le faire. Ce document est essentiel et la loi ne doit pas rester inappliquée sur ce point.
Le deuxième exemple est le retard, tout aussi inacceptable, qu'a pris la définition des critères de performance minimale.
Concernant ensuite l'article 14, si la presse a fait état d'un cas de ravalement de façade aberrant alors même que l'esthétique justifie une dérogation, la réglementation des travaux dits « embarqués » par le décret n° 2016-711 du 30 mai 2016 relatif aux travaux d'isolation en cas de travaux de ravalement de façade, de réfection de toiture ou d'aménagement de locaux en vue de les rendre habitables a été, à l'inverse, critiquée au motif qu'elle comporte de très nombreuses exceptions à la nécessité d'isoler les bâtiments.
Quant à l'article 33, qui demande un rapport sur les colonnes montantes – le président y a fait référence –, il est inacceptable qu'au moins le rapport du conseil général de l'environnement n'ait pas été rendu disponible. Certes, la question de la propriété des colonnes n'est pas tranchée par la jurisprudence, et le médiateur de l'énergie en a été abondamment saisi. Enedis, chargé de la gestion du réseau de distribution d'électricité, persiste à refuser d'intégrer à ses frais des colonnes qui, selon lui, appartiendraient aux propriétaires et copropriétaires des immeubles concernés, lesquels sont dans l'incapacité de faire face à des coûts élevés, de 10 000 à 20 000 euros par colonne. Il y a donc un blocage, et les décisions des tribunaux ne convergent pas – je renvoie à notre rapport pour davantage de détails.
Ce dossier présente peu d'aspects positifs. Je note toutefois que le syndicat intercommunal de la périphérie de Paris pour les énergies et les réseaux de communication (Sipperec) a signé avec Enedis, le 14 avril 2016, un accord prorogeant pour les dix prochaines années la concession de distribution d'électricité sur le territoire des 82 communes du ressort du syndicat et qu'il a été convenu à cette occasion que les deux parties prendraient conjointement en charge la rénovation, chaque année, de 500 colonnes montantes d'électricité sous maîtrise d'ouvrage du Sipperec. Peut-être convient-il d'être pragmatique et d'inciter à étendre des dispositifs qui fonctionnent. Il faut en tout cas chercher à sortir des difficultés juridiques actuelles.
Pourquoi le volet bâtiment est-il aussi difficile à mettre en oeuvre ? À cela, deux raisons. D'abord le comportement de certains acteurs, dont le centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), qui semble ignorer la loi ou vouloir en différer l'application, par exemple s'agissant de l'individualisation des compteurs de chauffage dans les immeubles collectifs. Ensuite, et surtout, nous n'avons sans doute pas pris la mesure technique de certaines dispositions, par exemple de ce que la domotique peut apporter, et nous ne raisonnons pas suffisamment, comme législateur, de manière globale.
En revanche, je juge positivement le mécanisme, reconduit, du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE).
Je conclurai en indiquant brièvement – mais sans doute y aura-t-il des questions sur ce point – que les compteurs Linky et Gazpar se mettent en place, non sans réticences sur le terrain, et que, après l'organisation d'une table ronde, nous consacrons à ce sujet dans le rapport de longs développements que j'espère exhaustifs.
Quelques mots sur le titre III, relatif aux transports et à la qualité de l'air.
La consommation d'énergie dans les transports s'élève à 48,7 millions de tonnes équivalent pétrole (Mtep) ; 59 % des émissions de NOx, au moins 27 % des émissions de gaz à effet de serre, au moins 130 millions de tonnes de CO2 et 17 % des émissions de particules sont imputables aux transports.
C'est donc essentiellement sur les alternatives à l'automobile que la loi peut avoir un effet significatif : covoiturage, vélo, carburants alternatifs sont autant de recours que le texte promeut, notamment par les dispositions de l'article 41 prévoyant l'implantation de 7 millions de points de recharge pour les véhicules électriques.
Le partage entre essence et diesel a fait par ailleurs l'objet d'aménagements de nature fiscale, que je juge personnellement bons : la convergence fiscale sur cinq ans promue par Delphine Batho et la préférence accordée au SP95-E10, toutes deux retenues par la PPE, permettent aux industriels de s'adapter à la diminution progressive de la diésélisation du parc.
S'agissant des mesures relatives au vélo – indemnité kilométrique, déduction fiscale des achats par les entreprises, aires de stationnement –, le fonctionnement du dispositif est plutôt satisfaisant, même si le rapport suggère des améliorations. De même, les aéroports, en dépit d'un texte qui comporte trop d'aléas, jouent le jeu des programmes de réduction des gaz à effet de serre visés à l'article 45.
Au contraire, l'implication des concessionnaires d'autoroutes et du syndicat des transports d'Île-de-France (STIF) me paraît en l'état insuffisante, ou du moins indéterminée, d'autant que l'augmentation récemment annoncée des tarifs d'autoroute a été notamment justifiée par la nécessité de répondre à la demande d'aménagement d'aires de covoiturage. En revanche, celle de la régie autonome des transports parisiens (RATP) est indéniable ; je vous renvoie sur ce point à notre commentaire sur l'article 37.
La limitation de la vitesse en milieu urbain, la création de zones de circulation restreinte en ville, qui concernera 20 métropoles, et de vignettes destinées à déterminer le niveau de pollution par référence aux dates de mise en circulation des véhicules sont parfois contestées, notamment par ceux que ces mesures touchent, mais elles contribueront très certainement à améliorer le parc automobile, autant que le bonus-malus.
Dans ce volet, sont passées inaperçues l'instauration d'un délit de « défapage » – ou d'altération volontaire d'un mécanisme antipollution sur un véhicule – dont j'espère qu'il sonnera le glas de ce qu'il faut bien appeler des trafics sur internet, mais aussi la sécurité d'approvisionnement des hydrocarbures par navires, qui pose selon la mission des problèmes juridiques complexes.
Au total, et sans vouloir céder à la facilité de la formule, les transports avancent dans le bon sens !
Les 33 articles du titre IV consacré à l'économie circulaire, dont 22 d'application directe, sont très largement dus au débat parlementaire. La loi a ainsi été enrichie d'un volet relatif au tri, à la collecte et au traitement des déchets dans le cadre du système de responsabilité élargie du producteur (REP) appliqué à de nouveaux domaines : tissus d'ameublement, literie, bouteilles de gaz ; la question de l'extension du dispositif à la maroquinerie est posée par l'article 92.
La situation de la France en matière de tri et de retraitement est satisfaisante. Le taux de recyclage des déchets est de 60 % ; en 2011, celui des emballages était de 88 % pour les papiers et cartons, 74 % pour les métaux, 23 % pour les plastiques et 71 % pour le verre. Mais, évidemment, il faut toujours mieux faire.
Ce titre fixe donc de nouveaux objectifs, volontaristes, de tri et de traitement des déchets et de réduction de leurs volumes. S'il comporte quelques prohibitions, dont celle, emblématique, des sacs et ustensiles de vaisselle en plastique, il adopte plutôt une approche souple, incitant de manière non directive à des comportements vertueux. Peut-être, sur certains points, la loi gagnerait-elle à mieux définir, à prohiber ou encore à sanctionner de manière adaptée. Je renvoie sur ce point au rapport, qui ouvre des pistes.
On peut se féliciter de l'interdiction des ustensiles de cuisine en plastique en 2020 et de celle, dès 2017, des sacs plastiques et d'envoi de publicité et de presse, en dépit des protestations prévisibles émises par certains professionnels. Ce sont des mesures d'intérêt général ; 5 milliards de sacs plastiques non dégradables sont mis en circulation chaque année, alors même que des produits de substitution existent.
Sur ce point, je tiens à rendre hommage à l'administration qui a fourni un travail d'ampleur, y compris au niveau européen, puisque la question fait l'objet d'une directive. Je le dis aux professionnels : si vous voulez continuer à voir des océans pollués, des bords de routes souillés, des forêts salies, battez-vous contre ces dispositions, mais assumez vos choix devant l'opinion publique !
Je salue donc le décret du 30 mars 2016 et souhaite que ce texte s'applique dans les meilleures conditions. Je salue également la bonne mise en oeuvre de la REP pour la reprise des bouteilles de gaz, à propos de laquelle la mission nourrissait des inquiétudes.
Sur cette partie du texte, j'ai toutefois trois regrets.
D'abord, l'article 55 de la loi sur l'économie bleue a différé d'un an l'entrée en vigueur d'un système de REP applicable aux navires de plaisance. C'est un combat d'arrière-garde : cette REP concerne 41 000 tonnes de déchets et 14 000 navires à déconstruire ou à rénover, soit une source évidente de pollution et un vaste gisement industriel. Ce report n'étant nullement justifié, nous proposons de revenir à une application plus rapide du texte.
Ensuite, à l'article 91, après un long combat, l'ensemble de la presse a fini par être exonéré de l'éco-contribution financière, au nom de critères sans doute discutables. Tout en rendant hommage au travail de nos collègues Bardy et Miquel, la mission regrette que la presse magazine, compte tenu de ses caractéristiques d'impression, bénéficie de cette exonération alors que sa situation est objectivement très différente de celle de la presse quotidienne et des gratuits. Les critères doivent être revus dans un sens plus conforme à l'objectif de la loi, s'agissant notamment du recours aux blisters, et devenir évolutifs, surtout quant à la qualité du papier utilisé. Qu'on laisse aux acteurs un temps d'adaptation est une chose ; qu'on les laisse tous en dehors de la loi en est une autre.
Enfin, la reprise des déchets de construction suscite un blocage : les professionnels soumis à l'obligation ont entrepris de la contester juridiquement, alors que ce secteur produit 247 000 tonnes de déchets. On peut, certes, relever que ce ne sont pas les producteurs qui sont assujettis, ni même l'ensemble des distributeurs ; mais le critère du public concerné par le marché de gros est justifiable. En outre, le rayon choisi – de dix kilomètres – et la possibilité de mutualiser la reprise – le texte parle d'« organisation », n'excluant pas une mutualisation au profit de déchetteries déjà installées – rendent l'obligation gérable. Il est regrettable que l'on en soit à un stade contentieux. Votre mission souhaite que le texte soit modifié, si nécessaire, pour permettre la mutualisation des aires de reprise des déchets du BTP.
Le titre V de la loi vise à promouvoir les énergies renouvelables. Il constitue donc le levier principal pour parvenir aux objectifs ambitieux fixés à l'article premier en matière de diversification des sources d'énergie. Ce titre qui couvre les articles 104 à 122, complété par le volet de la PPE consacré à l'offre d'énergie, joue par conséquent un rôle essentiel, notamment sur les questions d'achat d'énergie aux producteurs, de méthanisation et d'hydroélectricité.
En application de l'article premier, la part des énergies renouvelables doit être portée à 23 % de la consommation finale brute d'énergie d'ici à 2020. Y parviendrons-nous avec les outils dont nous disposons aujourd'hui ?
Il apparaît à la mission que c'est l'énergie photovoltaïque qui offre aujourd'hui les perspectives de développement les plus prometteuses.
La situation de l'hydraulique est satisfaisante, notamment parce que cette énergie ne présente pas d'intermittence, que nombre d'équipements sont amortis, qu'elle crée une synergie environnementale positive et qu'elle est entièrement mature ; la ressource est déjà largement exploitée, mais un développement mesuré peut être envisagé ; il est d'ailleurs prévu. En juin 2016, la production hydraulique renouvelable a couvert à elle seule près de 20,8 % de la consommation française d'électricité brute. C'est à ce jour l'énergie renouvelable la plus efficace et la plus utile à l'équilibre du mix.
Concernant le photovoltaïque, le lancement de deux appels d'offres – l'un pour les installations au sol, de 1 000 mégawatts par an sur six ans, l'autre pour les centrales sur bâtiment, pour un volume de 450 mégawatts par an sur trois ans – annoncé par la ministre le 28 juin 2016, à l'occasion des journées nationales de l'énergie solaire, est conforme à l'objectif prévu pour 2018. Le rapport combat aussi l'idée fausse selon laquelle les industries seraient étrangères, notamment chinoises : il existe désormais un tissu industriel français et des équipements fiables.
Quant à la méthanisation, l'objectif est de développer en France, à l'horizon 2020, 1 000 méthaniseurs à la ferme, contre 90 fin 2012, mais nous partons de très loin et la comparaison européenne ne nous est pas favorable. En effet, si notre pays a été pionnier de la méthanisation en Europe dans les années 1980, notre politique énergétique, davantage tournée vers le nucléaire, n'a pas donné la priorité au développement de la filière tandis que d'autres pays européens s'engageaient plus nettement sur cette voie. La France est ainsi aujourd'hui loin derrière l'Allemagne, l'Italie, les Pays-Bas et le Danemark. Il faudra donc quadrupler d'ici à 2020 la puissance installée. Votre rapporteure salue la large concertation qui a conduit au décret, et qui va dans le bon sens.
Les dispositions essentielles du titre V tendent à faire des garanties d'origine et du complément de rémunération deux systèmes exclusifs l'un de l'autre, à permettre à l'éolien terrestre de bénéficier à la fois d'une obligation d'achat et du complément de rémunération, à mieux définir les droits des consommateurs électro-intensifs, à relever à 50 mégawatts les seuils d'autorisation d'exploiter, à fixer un délai de raccordement de 18 mois, pouvant cependant être suspendu en application du décret du 1er avril 2016 – c'est l'article 105 – ou encore à développer le financement participatif. On remarquera que les leviers utilisés ne sont guère fiscaux – à l'exception d'une mesure très limitée concernant le photovoltaïque, à l'article 114 –, mais essentiellement économiques.
Le contexte est marqué par d'importants événements, dont l'arrêt de plusieurs générateurs décidé par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et la situation d'Areva, mais aussi par des tendances plus longues : la stabilisation des prix de l'énergie, la maîtrise de la consommation, le recours à des sources décarbonées, l'introduction d'une concurrence.
Il est difficile de trouver le bon mix énergétique : les problèmes de coût, de raccordement au réseau, d'acceptabilité des riverains se mêlent. Mais la loi trace un chemin général clair et l'arrêté du 24 avril 2016 fixe des objectifs chiffrés et programmés.
Une partie importante du rapport est consacrée à l'hydroélectricité. Vous le savez, je suis favorable au regroupement des bassins et, à cette fin, la méthode du barycentre peut être satisfaisante. Mais, à terme, c'est l'ouverture unilatérale à la concurrence qu'il faut combattre. Car, en remettant les concessions en concurrence, l'État perd définitivement le contrôle de la production d'électricité la plus compétitive du mix énergétique et l'une des plus flexibles, notamment en période de pointe, ce qui la rend essentielle à la réussite de la transition énergétique. Je reste vigilante sur cette question.
Certains décrets sont encore attendus, par exemple sur le complément de rémunération et les appels d'offres.
Concernant cette partie du texte, je formulerai trois suggestions. Premièrement, revoir la définition de la notion de cours d'eau, prévoir une cartographie précise et revoir le classement des cours d'eau à chaque révision de SDAGE (schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux) ou de SAGE (schéma d'aménagement et de gestion des eaux). Ce point a été évoqué lors de l'examen de la loi, mais n'a pas été intégré au texte.
Deuxièmement, revoir les conditions d'indemnisation des dommages miniers à l'article 122, notamment pour les ruisseaux couverts et les canaux d'amenée d'eau abandonnés par suite d'une cessation d'exploitation, qui sont actuellement à la charge des propriétaires du sol ; l'entretien en est particulièrement difficile et l'absence d'entretien peut entraîner d'importants dysfonctionnements.
Troisièmement, prévoir un débat parlementaire annuel sur l'énergie et l'application de la loi.
Le titre VI, relatif à la sûreté nucléaire, est l'un des plus courts, avec dix articles seulement, mais il n'en est pas moins important.
Les dispositions sur l'information du public ou l'autorisation et le fonctionnement des installations nucléaires de base (INB) relevant totalement de la compétence législative, seuls trois décrets étaient nécessaires. Les articles 128 et 129 renvoient largement aux ordonnances, qui devaient être prises dans des délais de dix ou six mois.
Ce titre contient les dispositions de la loi qui adaptent les conditions de fonctionnement des centrales nucléaires. Force est de constater qu'elles ne les bouleversent pas. La sécurité nucléaire et les pouvoirs de l'ASN sont renforcés par une importante ordonnance du 10 février 2016, qui tend également à lutter contre les actes de malveillance.
Je regrette que l'application de la loi n'ait pas permis de clarifier les choix futurs. Le principe du plafonnement global de la production d'électricité nucléaire, prévu dans un autre titre, à l'article 187, et celui du démantèlement des installations après deux ans de cessation de fonctionnement, prévu par le présent titre à l'article 127, aboutissent en définitive à reporter les choix au lieu d'en anticiper les conséquences. Or, en la matière, on ne peut se satisfaire de manoeuvres dilatoires. Ce ne serait conforme ni à la volonté de transition et de programmation à moyen terme qui préside à la loi, ni à la nécessité de sécuriser les exploitants, les acteurs économiques et les citoyens. L'application de la loi et la PPE représentent donc de ce point de vue une occasion manquée.
La loi contient toutefois les dispositions suivantes.
D'abord, elle limite le recours à la sous-traitance ; le décret d'application établit cette limite au rang deux par rapport à un intervenant extérieur, trois par rapport à l'exploitant. On peut regretter que les filiales ne soient pas suffisamment prises en considération.
Ensuite, elle prévoit des modalités de suivi médical spécifiques et adaptées pour les travailleurs exposés à des rayonnements ionisants. L'ordonnance prétend supprimer cette disposition ; la mission y est fermement opposée.
Enfin, aux termes de la loi, toute INB qui cesse de fonctionner pendant deux ans doit être démantelée. À ce sujet, compte tenu des divergences d'analyse sur les conditions financières des démantèlements, il nous paraîtrait opportun d'en confier le chiffrage à un organisme paritaire indépendant afin que l'expertise précède la décision et ne soit pas un élément de polémique.
Le titre VII porte sur les procédures.
La mission considère que tout démantèlement de centrale doit être précédé d'un débat public organisé par la commission nationale du débat public. Cette autorité administrative indépendante est compétente sur saisine du maître d'ouvrage, de façon systématique pour les plans et programmes nationaux et pour tout projet d'équipement dont le marché excède un montant de 300 millions d'euros ; en deçà de ce seuil, elle peut être saisie par dix parlementaires ; elle peut également l'être par le Gouvernement à propos d'un projet de réforme d'une politique publique. L'ordonnance du 3 août 2016 retient en outre un droit d'initiative citoyenne. Il faut donc étendre le champ d'intervention de la CNDP afin qu'un débat soit organisé, sans doute à l'échelon régional, qui semble le plus pertinent, avant une cessation d'exploitation.
Il faut aussi conforter la place du médiateur de l'énergie, qui doit rester une autorité indépendante, dotée de la personnalité morale.
Cette partie du rapport comporte également une analyse de l'éolien. On relève des blocages juridiques, notamment l'absence d'un décret sur la non-implantation dans les zones de défense. S'il faut souligner le lancement en avril 2015 d'un appel d'offres pour l'implantation d'un troisième site offshore, et si la PPE souhaite améliorer la procédure d'appel d'offres pour l'éolien en mer posé, il semble difficile de conclure que la loi imprime une impulsion réellement nouvelle en matière d'éolien.
La production a certes augmenté, passant à 17 243 gigawattheures en 2014, et les objectifs en termes de puissance installée sont ambitieux : 15 000 mégawatts au 31 décembre 2018, 21 800 mégawatts – option basse – et 26 000 mégawatts – option haute – au 31 décembre 2023.
Le prix d'achat est garanti : l'article 10 de la loi du 10 février 2000 pose le principe d'un rachat obligatoire de l'électricité produite par les installations utilisant les énergies renouvelables d'une puissance supérieure à 12 mégawatts, seuil résultant de l'ordonnance du 3 août 2016. Le tarif de rachat est publié par arrêté ; il est actuellement fixé par un arrêté du 17 juin 2014. L'existence même de ce tarif est un élément contraint du marché : il se répercute nécessairement sur le niveau global des prix.
La loi vise à lever certains blocages. Cependant, malgré toutes ces mesures, l'éolien a du mal à s'imposer, pour des raisons tenant à l'acceptabilité sociale, ainsi qu'aux difficultés d'implantation sur terre comme sur mer. En outre, le désengagement d'Areva ne peut être considéré comme favorable au développement du secteur.
La Cour administrative d'appel de Nancy a reconnu qu'une éolienne était divisible du reste d'un parc éolien soumis à permis de construire. L'arrêt rend en outre nécessaire une réponse circonstanciée de l'administration pour chacune des éoliennes composant un projet de parc.
Le rapport présente également une analyse du prochain TURPE (tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité) à l'article 160, du projet « Tulipe » sur l'adaptation du réseau GRDF à la cessation de l'importation du gaz de Groningue, mais aussi de la CSPE (contribution au service public de l'électricité) dans sa dernière partie.
L'article 176, au titre VIII, porte sur la PPE.
Les retards qui ont marqué le processus d'examen de la PPE ont à leur tour conduit à différer l'application de plusieurs éléments de la loi. La mission se prononce donc pour une réécriture simplifiée de la disposition législative actuelle et pour un meilleur partage des domaines de la loi, du décret et de la partie non impérative de la programmation. La PPE étant un document hybride, complétant la loi, il n'est pas étonnant que le texte soit difficile à établir et qu'il faille même, au cas où la publication interviendrait tardivement, prévoir des anticipations législatives transitoires, sur le modèle du projet de ratification d'une ordonnance sur les énergies renouvelables qui comporte un article 5 ainsi rédigé : « pour l'application du I de l'article L. 446-5 du code de l'énergie, les objectifs définis par arrêté du ministre chargé de l'énergie valent programmation pluriannuelle de l'énergie, jusqu'à la date de publication de la programmation pluriannuelle de l'énergie mentionnée à l'article L. 141-1 du même code ».
Bref, l'expérience de la PPE n'est pas satisfaisante, et la loi ne l'est sans doute pas non plus : on a voulu faire de la PPE un pilier de la transition énergétique, mais ce document finit par être bien décevant – et il n'est même pas encore paru.
La France est le pays dont la part d'électricité d'origine nucléaire est la plus importante : 77 % en 2014, selon le bilan électrique de RTE (Réseau de transport d'électricité), soit 416 térawattheures, provenant des 58 centrales. C'est dans ce titre VIII que figure le plafonnement global du parc nucléaire à 63,2 gigawatts, en référence auquel la PPE prévoit un décret de démantèlement de Fessenheim avant le 31 décembre 2016.
En ce qui concerne la dernière partie, on peut regretter la parution tardive du décret sur la stratégie nationale de mobilisation de la biomasse et faire état de la satisfaction qu'inspire la PPE corse.
Cette partie analyse l'évolution et l'affectation de la CSPE. Sa fiscalisation s'imposait ; la création d'un compte d'affectation spéciale nous paraît également une bonne chose. On regrettera toutefois que l'habilitation demandée par le Gouvernement à l'article 200, à propos du développement des réseaux électriques intelligents, soit devenue caduque.
En ce qui concerne les outre-mer, nous avons effectué un déplacement en Guadeloupe et en Martinique en mai dernier, afin d'évaluer l'application de la loi dans ces territoires. La loi leur a envoyé un signal fort en fixant des objectifs très ambitieux et en prévoyant une procédure de consultation substantielle en vue de l'établissement des PPE régionales, mais nous avons constaté que l'application de la transition sur place rencontrait des difficultés concrètes. Ces territoires ne sont pas connectés au réseau électrique de la métropole et sont relativement peu peuplés, ce qui complique l'instauration d'une véritable économie circulaire. La préservation du foncier agricole, nécessaire au maintien d'une agriculture durable, empêche parfois certains projets touchant les énergies renouvelables de voir le jour. Toutefois, les atouts nécessaires à une transition énergétique réussie sont bien présents, qu'il s'agisse des énergies renouvelables, de la mobilité durable, du bâtiment durable ou du recyclage, notamment celui des véhicules usagés.
Le rapport comporte en outre de nombreuses propositions destinées à faciliter la réussite de la transition énergétique outre-mer. Il recommande en particulier de conforter les agences locales de l'énergie et de territorialiser les appels d'offres, afin de prendre en considération les caractéristiques propres à chaque territoire, ainsi que le dispositif des certificats d'énergie en fixant une obligation d'économies d'énergie spécifique à l'outre-mer.
Mon travail ne consistait pas à rejouer le débat sur la loi de transition énergétique, au cours duquel l'opposition avait manifesté une forme de scepticisme combatif vis-à-vis des dispositions les plus décalées, mais bien à accompagner les rapporteurs de manière transversale, donc moins spécifique compte tenu du temps qui nous était alloué, et avec un oeil critique.
En ce qui concerne la tonalité générale du rapport, je commencerai par les éléments positifs. Les conditions de travail de la mission diffèrent de celles, quelque peu rocambolesques, dans lesquelles on avait adopté la loi, en temps limité et en piétinant les droits de l'opposition. Ici, la présence d'un rapporteur de l'opposition nous a permis de réfléchir à un diagnostic commun et de prendre tous part aux auditions sur un pied d'égalité, grâce à la grande intelligence et au grand sens de la diplomatie qui caractérisent le président Chanteguet.
Sur certains points, nous convergeons fortement. Les rapporteurs ont fait part de leurs critiques de manière diffuse et adoucie ; en réalité, le molosse adopté en 2015 a perdu quelques dents – heureusement, d'ailleurs, notamment s'agissant de l'article 6 sur la rénovation énergétique, déclaré anticonstitutionnel. Je regrette parfois que le commentaire n'aille pas plus loin, par exemple pour signaler les conséquences négatives de la rénovation énergétique pour les seniors : à ce propos, les rendez-vous que j'ai pu avoir, hors du cadre des auditions, révèlent une très grande inquiétude concernant certains aspects du texte.
Nous sommes d'accord sur l'empilement du complément de rémunération et de l'obligation d'achat. Le rapport présente un schéma qui montre comment l'on rémunère les producteurs d'énergies alternatives et note une complexification. On constate également que, concernant l'effacement diffus, tout n'est pas « calé ».
Enfin – c'est l'une des principales critiques formulées par la mission –, la PPE est en décalage par rapport aux ambitions initiales.
Sur d'autres points, nous sommes en divergence. Il faut une vision lucide de l'avenir du nucléaire dans notre pays. Le rapport n'y insiste pas assez, mais la comparaison avec l'Allemagne montre que la limitation du recours au nucléaire peut entraîner des conséquences très négatives sur les émissions de carbone. Concernant le coût social et économique de la transition énergétique, on aurait apprécié quelques paragraphes supplémentaires sur les externalités négatives de la coexistence du nucléaire et d'une forte part d'énergies renouvelables du point de vue de l'équilibrage du réseau et du recours aux énergies fossiles.
S'agissant du compteur Linky, qui a fait l'objet d'une vaste campagne de désinformation, les auditions ont montré, me semble-t-il, que les critiques étaient largement infondées. Le rapport aurait donc pu affirmer plus clairement et fermement que le dispositif ne comporte pas de dangers pour la santé.
Je ne suis pas tout à fait d'accord avec certaines propositions formulées par les rapporteurs. Ainsi, avant de préconiser l'extension à la fonction publique de l'indemnité kilométrique vélo, peut-être faudrait-il en calculer le coût. J'invite également à la prudence s'agissant de l'article 68 et de l'idée d'étendre aux cours d'eau l'interdiction d'utilisation des produits phytosanitaires, alors que nous sommes en pleine crise agricole et qu'un arrêté en cours de discussion avec la profession suscite les plus vives inquiétudes en raison de ses conséquences potentielles sur les surfaces cultivables. De même, à propos des sacs plastique, prenons garde aux conséquences économiques d'un mécanisme de sanction tel que le préconise le rapport à l'article 75. Nos divergences ne portent pas nécessairement sur l'objectif, mais sur les modalités de mise en oeuvre du dispositif : n'oublions pas que toute transformation sociale a un coût.
Enfin, en ce qui concerne le démantèlement des centrales nucléaires, le rapport propose la création d'un organisme d'évaluation indépendant ou l'organisation d'une consultation régionale lors de chaque démantèlement. Ayant l'honneur de présider une mission parlementaire en cours sur la faisabilité technique et financière du démantèlement des infrastructures nucléaires, vous comprendrez que je ne puisse m'associer à ces propositions sans risquer de couper l'herbe sous le pied à sa rapporteure, Mme Romagnan. En attendant ses conclusions, je resterai donc en retrait.
Je ne suis pas hostile, par principe, à la création d'un organisme indépendant, même si le terme est un peu vague et que je commence à me méfier des fameuses autorités administratives indépendantes (AAI). Est-ce la Cour des comptes qui est visée ? Un autre organisme ? Quant à la consultation régionale, j'estime à titre personnel que, s'agissant du nucléaire, la multiplication des consultations, des concertations et la recherche de la transparence, sans faire progresser d'un iota la compréhension mutuelle, encombrent la procédure de décision d'une série d'étapes supplémentaires qui nuisent à notre réactivité. Bref, trop de consultation tue la consultation !
Pour finir, je remercie mes collègues de leur coopération et du débat qui s'est ouvert pendant les longues journées d'auditions.
Merci au président de la mission et à ses rapporteurs du travail conséquent et efficace qu'ils ont fourni en peu de temps – la mission a été constituée en janvier dernier – sur un texte très vaste. Nous sommes convenus, avec Jean-Paul Chanteguet, de demander à Ségolène Royal de venir rapidement devant nos deux commissions pour une séance spécifiquement consacrée à l'application de la loi, car, si son suivi est assuré par les parlementaires, il importe que ces derniers entendent la réaction du Gouvernement. Le sujet sera naturellement évoqué cet après-midi en commission élargie, mais nous n'aurons pas le temps d'explorer toutes les propositions du rapport.
Je m'exprimerai au nom du groupe Socialiste, écologiste et républicain.
L'heure n'est pas au bilan, mais à l'évaluation, voire à la réévaluation si j'ai bien entendu Julien Aubert. Cette démarche fait suite à la co-construction qui a présidé au vote de la loi, les deux exercices contribuant à réhabiliter le travail parlementaire.
La loi, ainsi que les plans d'action qui l'accompagnent, permettra à la France de concourir plus efficacement à la lutte contre le dérèglement climatique et de renforcer son indépendance énergétique en équilibrant mieux ses différentes sources d'approvisionnement.
Le chemin fut long et passionnant, depuis la première conférence environnementale et le débat national sur la transition énergétique, en passant par l'examen législatif au cours duquel nous avons enrichi le texte de nouvelles dimensions que nos territoires ont à coeur de défendre. La loi nous a également permis de faire progresser notre pays en vue de la COP21. Alors que la COP22 va s'ouvrir au Maroc, saluons le travail de Ségolène Royal, ministre de l'environnement, qui obtient aujourd'hui encore de très bons résultats dans le processus de signature de l'accord de Paris à travers le monde.
Le texte a pour ambition de créer l'élan d'une écologie positive qui lève les freins, libère les initiatives et apporte à chacun des bénéfices tangibles. Il constitue à la fois un point de départ et une boîte à outils. Voici maintenant plus d'un an qu'il a été promulgué ; les résultats sont déjà au rendez-vous et les outils qu'il contient sont employés. Car il ne s'agit pas seulement d'une loi d'intention, mais aussi d'une loi d'action, grâce à plusieurs instruments concrets pour un nouveau modèle énergétique, plus vert, plus décentralisé, plus démocratique, plus digitalisé.
Ces intentions et ces actions, il importe d'en contrôler la mise en oeuvre. C'est tout l'intérêt de cette mission d'information commune. Je salue le travail d'évaluation conduit par nos collègues.
À ce jour, près de trois quarts des actes réglementaires requis ont été publiés. Tous les titres de la loi sont concernés ; je n'en citerai que quelques-uns à titre d'exemple.
En ce qui concerne la partie consacrée aux bâtiments, secteur très émetteur de gaz à effet de serre, le dernier arrêté, du 12 octobre, fixe les critères d'attribution par les collectivités locales d'un bonus de constructibilité de 30 % aux permis de construire concernant les bâtiments exemplaires du point de vue énergétique et environnemental ou à énergie positive. Je songe également au décret relatif aux obligations d'économies d'énergie spécifiques à réaliser au bénéfice des ménages en situation de précarité énergétique, un acte réglementaire lui aussi essentiel.
S'agissant des transports, qui constituent le secteur le plus émetteur de CO2, de nombreuses dispositions sont en cours d'application. Je ne peux pas ne pas mentionner le décret relatif à la prime à l'acquisition de véhicules propres en remplacement de véhicules polluants. Je pourrais également évoquer celui du 11 février 2016 relatif au versement d'une indemnité kilométrique vélo par les employeurs privés, que certains jugent cependant peu ambitieux.
Plusieurs outils de la partie consacrée à l'économie circulaire ont également été mis en oeuvre. L'un, très concret, a enfin vu le jour en mars dernier au terme d'une longue concertation, avec la publication du décret fixant les conditions d'application de l'interdiction des sacs plastiques à usage unique et ses exceptions.
Des décrets ou arrêtés ont également été publiés en vue de développer les énergies renouvelables, d'équilibrer nos sources d'énergie et de valoriser les ressources de nos territoires, de renforcer la sûreté nucléaire et d'améliorer l'information des citoyens, de simplifier et clarifier les procédures afin de gagner en efficacité et en compétitivité.
Dans le secteur de l'éolien, enfin, beaucoup a été fait, avec la réforme de la participation du public, l'autorisation unique, la réduction des délais de raccordement, le financement participatif et la participation des communes au capital des sociétés d'énergie renouvelables.
À cela s'ajoutent la stratégie nationale bas carbone et le budget carbone, la prise en considération des enjeux climatiques dans le reporting RSE (responsabilité sociétale des entreprises), un sujet qui nous a beaucoup mobilisés au cours des débats et le chèque énergie.
D'autres dispositions ne sont pas encore appliquées, mais les textes réglementaires sont en préparation, comme le relève le rapport. Parmi ceux-ci, l'un des plus attendus est sans doute la PPE de la France métropolitaine, qui était soumise à la consultation du public jusqu'au 15 octobre, et celles de l'outre-mer. Je pense également au décret définissant le critère de performance énergétique minimale à respecter pour qu'un logement soit décent.
En 2014 et 2015, l'urgence était au vote de la loi ; en 2016 et 2017, l'urgence est d'en réussir la mise en oeuvre, qui me semble plutôt bien partie !
Au vu du travail colossal accompli par les rapporteurs, et puisque la mission a souhaité que l'un d'entre eux – Julien Aubert, auquel nous rendons un hommage particulier – soit issu de l'opposition, les députés du groupe Les Républicains approuveront la publication du rapport d'information.
Nous avions en revanche voté contre la loi, examinée dans des conditions que Julien Aubert a suffisamment rappelées et auxquelles je me contenterai d'ajouter celles, ubuesques, de la commission mixte paritaire, qui la distinguent de toutes celles – une vingtaine – auxquelles j'ai participé.
Par respect et par amitié, je me suis gardé de le citer. Mais cette CMP restera dans les annales : alors que les parlementaires Les Républicains de l'Assemblée et du Sénat étaient assez nombreux pour qu'elle puisse aboutir, la majorité l'a sciemment fait échouer.
À l'époque, Julien Aubert avait fourni un énorme travail en menant l'« autre » débat sur la transition énergétique, avant l'examen de la loi, multipliant les auditions et formulant de véritables contre-propositions. Nous avions ainsi adopté une démarche de co-construction à propos de l'éolien, du solaire, du zéro charbon, du gaz, de l'hydroélectricité et d'une baisse du nucléaire qui soit fondée sur une analyse technique et financière du rapport coût-efficacité plutôt que sur une idéologie décrétée par le Président de la République – une approche que nous n'avons eu de cesse de dénoncer au cours des débats.
Ce dont les rapporteurs de la majorité comme de l'opposition viennent de nous faire part nous donne raison : beaucoup de regrets – pas encore de remords –, de retards, d'inefficacité.
Nous le répétons, nous allons avoir des problèmes considérables au moment de la pointe de consommation hivernale.
En ce qui concerne la rénovation énergétique des bâtiments, on déplore un retard, pour ne pas dire que l'on constate un échec. C'est que l'on a confondu à l'époque politique sociale et politique énergétique.
Nous aurions aussi aimé que soit soulevé l'important problème de l'effet du rééquilibrage entre essence et diesel sur les rejets de CO2, qui doit être chiffré pour les années à venir.
Enfin, Julien Aubert a rappelé les inquiétudes que suscite la question de l'agriculture. Ce secteur ne fournit-il pas un bon exemple de la surenchère des normes européennes, à laquelle le président de la Commission européenne lui-même souhaitait ce matin que l'Union européenne mette fin ?
Le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste se joint aux remerciements déjà adressés aux rapporteurs et se réjouit de la position constructive adoptée par l'opposition.
Tout le monde peut s'engager dans la stratégie nationale qui définit la marche à suivre vers une économie bas carbone permettant d'atteindre les objectifs d'atténuation des émissions fixés lors de la COP21 – le fameux facteur 4 à l'horizon 2050. Nous continuons de progresser sur cette voie ; c'est très positif.
J'en viens au rapport d'information proprement dit.
S'agissant de la rénovation énergétique, nous aurions préféré une évaluation avant et après travaux pour disposer d'un bilan clair des progrès accomplis et pour optimiser les dépenses fiscales. Nos amendements n'ont pas été adoptés, mais les nouvelles règles ont permis de créer de nouveaux marchés en réduisant les coûts grâce aux bâtiments à énergie positive, à l'intégration du bois ou encore aux compteurs de chauffage individuels. Nous appuyons fermement les mesures de soutien destinées à aider les particuliers à financer la rénovation énergétique de leur logement : la réforme du CITE, la réforme de l'éco-prêt à taux zéro, la possibilité de cumuler les deux depuis le 1er mars dernier.
Nous saluons bien sûr le moindre recours aux centrales à charbon et la progression de la production d'électricité à partir des énergies renouvelables, hors hydroélectricité – un sujet en soi.
La procédure des appels d'offres a été développée à propos du photovoltaïque, avec des lots distincts selon la puissance. Cette méthode nous paraît efficace. Il fallait de toute façon rompre avec les tarifs de rachat et leurs évolutions parfois brutales, qui ne permettaient pas un développement équilibré de la filière.
La filière éolienne présente certaines difficultés. Bien que verte, elle génère des nuisances dont il ne faut pas faire abstraction et suscite localement de nombreuses dissensions. Il y a un effort pédagogique à faire dans ce domaine. Aux yeux de l'opinion publique, les projets éoliens procèdent d'une démarche qui n'est ni écologique ni économique, mais seulement financière. Il a été question des financements participatifs ; il faudrait que nous puissions répandre cette idée. Quant à la dimension écologique, on peut comprendre qu'il soit difficile d'admettre des installations qui atteignent 180 mètres de hauteur au milieu de cinq villages. Quelles mesures vont être mises en oeuvre pour remédier à ce problème ?
S'agissant du financement, comment expliquez-vous l'absence du « jaune » budgétaire prévu à l'article 174, que vous déplorez dans le rapport ?
Enfin, comme l'a dit Christophe Bouillon, cette loi est une loi d'action ; elle doit exister dans les territoires. Or, dans les territoires, les choses bougent : je songe au PETR (pôle d'équilibre territorial et rural) du sud de l'Aisne et aux TEPOS (territoires à énergie positive), qui créent une puissante dynamique non seulement d'acceptabilité, mais bien de prise en charge par les habitants, avec les « familles à énergie positive » ou la méthanisation à la ferme. Ainsi, cette loi est une chance pour la France, mais surtout pour ses territoires ruraux et son agriculture. Je termine par des questions plus précises.
Faut-il revoir les objectifs de l'article premier ? Celui-ci n'est-il pas trop ambitieux ?
En quoi la PPE, qui a mis du temps à être produite, n'est-elle pas satisfaisante ?
J'interviendrai de manière plus approfondie sur le sujet cet après-midi en commission élargie à propos de mon avis budgétaire sur le programme 181, mais comment est géré l'arrêt récent des réacteurs ? Existe-t-il un risque de pénurie d'électricité, un risque pour la facture des consommateurs ? Quelles sont les échéances de reprise d'activité ? L'audition du gendarme du nucléaire par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) n'incite guère à l'optimisme et fait craindre de nouveaux arrêts. Quel est votre sentiment sur ce point ?
Enfin, et puisque nous parlons maintenant, après l'urgence, de la phase d'application, je citerai la fable de La Fontaine Le Lion et le Rat : « Patience et longueur de tempsFont plus que force ni que rage » ! Je ne doute pas que, avec le temps, nous allons continuer d'améliorer cette loi.
Le bilan de l'application d'une loi conduit à relever non seulement ses aspects positifs, mais aussi ses manques et ses erreurs ; c'est sur cet aspect que se concentrera mon intervention au nom du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
L'article 85 relatif au recyclage des navires concerne semble-t-il les seuls navires de mer, alors que nos cours d'eau sont jonchés de navires en train de couler ou déjà coulés et où l'on trouve du pétrole lourd, par exemple. Je suis confronté au problème dans ma commune : il en coûte 600 000 euros à l'État pour enlever une petite péniche ! Quand on sillonne un cours d'eau comme l'Oise, par exemple, et que l'on voit le nombre de bateaux échoués sur la berge depuis des décennies, on se demande comment agir rapidement pour empêcher les rivières d'être polluées lorsque leur coque finit par se percer. Le texte ne prévoit rien à ce sujet.
L'article 95 ne parle pas des déchets « inertes » issus du dragage des rivières. J'avais tenté de remédier au problème dans le cadre du projet de loi de finances. Quand on drague une rivière, on récupère de la terre en quantité faramineuse, mais qui ne peut être utilisée par l'agriculture parce qu'elle contient, même à faible dose, des métaux lourds et d'autres polluants. Il faut donc la jeter dans une décharge ; mais, comme la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) est très élevée, personne ne le fait, pas même l'État : on la stocke quelque part et on laisse les choses se faire. Je me suis battu pour que l'on crée en France des centres d'enfouissement qui pourraient accueillir ces terres et les traiter pour qu'elles redeviennent peu à peu cultivables. Mais, si on ne le fait pas, il ne faut pas appliquer un montant de TGAP aussi dissuasif – plusieurs dizaines d'euros la tonne !
L'article 112 sur la méthanisation ne parle pas des problèmes de transport. Or, dans mon territoire, les Belges viennent chercher ce qui est le plus intéressant à méthaniser dans le monde agricole, nous laissant le reste, et parcourent 200 à 250 kilomètres en camion pour emmener ces déchets dans un centre de méthanisation en Belgique, le tout pour quelques centimes de plus par tonne. On ne peut pas laisser faire des choses pareilles tout en parlant de développement durable et de CO2 ! Soyons un peu plus cohérents.
En ce qui concerne l'article 125, je suis d'accord avec le président. Rappelons-nous l'affaire de l'amiante. On sait depuis 1905 que l'amiante est cancérigène, mais il aura fallu attendre les années 1990 pour prendre des dispositions de suivi des salariés. Tous ceux qui étaient exposés à l'amiante n'en bénéficiaient pas, et, quand ils avaient des problèmes de santé liés à l'amiante, on disait que c'était à cause de la cigarette, ou d'autres facteurs qui n'avaient rien à voir. Pourtant, ils sont morts ! Avec le suivi des personnes qui travaillent dans les centrales nucléaires, on risque de revivre le même phénomène ; ce n'est pas normal.
Quant aux concessions hydroélectriques, on nous annonce que 72 % du potentiel est condamné. Va-t-on enfin aller étudier la situation sur le terrain au lieu de laisser les services de l'État supprimer de manière rigide et sans discussion des centrales qui ne nuisent pas du tout à la circulation des poissons ? Les microcentrales – une par ci, une par là – sont en train de disparaître pendant que l'on vante l'éolien et les autres énergies renouvelables.
Il faut aussi interdire l'utilisation du fioul en zone inondable : à chaque inondation, des centaines de cuves à fioul se retournent – le pétrole est plus léger que l'eau – et polluent.
Enfin, on évoque le financement du démantèlement des centrales nucléaires, mais j'aurais aimé des éléments concrets sur celui des éoliennes, qui va coûter une fortune ! La ministre nous a un jour parlé de 50 000 euros ; cela me paraît irréaliste.
Le risque, quand on donne des chiffres, c'est qu'arrive toujours un moment où l'on peut les vérifier : le Gouvernement se trouve souvent pris en flagrant délit de contradiction entre les proclamations et les résultats.
Le groupe de l'Union des démocrates et indépendants soutient les objectifs inscrits dans la loi relative à la transition énergétique : 32 % d'énergies renouvelables dans la consommation énergétique totale et réduction de 30 % de la consommation d'énergies fossiles à l'horizon 2030, réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2030. Ils doivent permettre de préserver l'environnement et de lutter contre la catastrophe annoncée.
Nous déplorons pourtant, avec la totalité des grandes organisations environnementales – peu citées jusqu'à présent –, que les moyens alloués ne soient pas du tout à la hauteur de ces objectifs. Nous restons encore paralysés par la peur de franchir le pas ; il faut pourtant changer radicalement de modèle.
En matière de consommation d'énergies renouvelables, les chiffres montrent déjà que nous n'atteindrons pas nos objectifs. Il faudrait donc soutenir une augmentation du prix de l'électricité qui permette de financer le développement de ces énergies. En matière de logement, point crucial pour diminuer notre consommation d'énergie et notre production de gaz à effet de serre, l'objectif était de plus de 500 000 logements rénovés chaque année. Or nous n'en rénovons guère que 250 000 à 280 000 – et encore : il faudrait vérifier ce qu'il y a derrière ces chiffres. Il faudrait donc assurer une complète stabilité fiscale, mais aussi décentraliser les moyens d'intervention ; c'est le modèle de tous les pays du centre de l'Europe, et c'est la seule voie qui nous permettrait d'atteindre nos buts.
Je fais également miennes les critiques de l'Autorité environnementale, qui estime que la PPE est un document flou et qui regrette par exemple l'absence d'indicateurs quantifiés relatifs aux différentes filières. D'autres organisations, comme Amorce, ont également soulevé des problèmes. Il faudra d'urgence remettre la PPE à plat.
Je reviens rapidement sur la question nucléaire. J'étais présent, avec Julien Aubert, à la Conférence mondiale de l'énergie qui s'est tenue récemment à Istanbul. Il n'y a pas de condamnation du modèle nucléaire ; au contraire, beaucoup considèrent que celui-ci n'a pas dit son dernier mot. Avec la diversification du mix énergétique et la multiplication des modes de production, nous aurons toujours besoin d'une production énergétique de ce type. Le Gouvernement n'a malheureusement prévu aucune trajectoire claire pour le nucléaire, et je comprends la frustration de ceux qui ont fait campagne pour la diminution de cette part.
Il existe néanmoins quelques points positifs. Je pense surtout à la progression de la taxe carbone, obtenue surtout grâce au combat des parlementaires, au premier rang desquels Jean-Paul Chanteguet, avec un objectif de 56 euros la tonne en 2020 et 100 euros en 2030. Le plus facile a été fait ; et je formule le voeu que tous ceux qui conseillent les candidats à l'élection présidentielle continuent cette progression.
Je commence par féliciter les rapporteurs de la qualité de leur travail.
La transition énergétique présente aussi des enjeux économiques et sociaux : en favorisant les énergies renouvelables, en encourageant de nouveaux modes de consommation, en isolant les bâtiments, nous allons créer des milliers d'emplois durables et non délocalisables. C'est pour nos territoires une opportunité de croissance et de développement.
Si la transition énergétique fait naître des espoirs, elle suscite aussi des inquiétudes, par exemple au Havre. Pour qu'elle constitue une réussite économique et pour qu'elle soit bien acceptée, il ne faut pas brûler les étapes : il ne faut pas, par exemple, augmenter unilatéralement la taxe carbone dès 2017 ou envisager la suppression de l'exonération de la taxe intérieure de consommation sur le charbon (TICC) pour les centrales à charbon ; de ce point de vue, la proposition d'un débat annuel sur l'énergie me paraît d'ailleurs judicieuse.
Il ne faut pas non plus décréter la fermeture des centrales à charbon dès 2023 sans prévoir l'avenir de ces sites industriels et de leurs salariés. La date de 2023 ne doit pas être comprise comme une fin en soi, mais comme une étape sur le chemin de la reconversion industrielle. Nous devons d'abord créer les infrastructures de production d'énergie renouvelable, soutenir les investissements dans l'éolien ou la reconversion des sites polluants : c'est une condition indispensable à la réussite de la transition énergétique dans ces territoires industriels maritimes, aujourd'hui en grande difficulté.
J'adresse également mes félicitations aux rapporteurs.
Je reviens sur l'épineux dossier nucléaire. La loi prévoit un plafonnement de notre capacité de production et la réduction de la part du nucléaire dans la production d'électricité. Mais votre rapport permet de constater que notre production de CO2 s'accroît ; il montre aussi la mauvaise situation de l'Allemagne.
Serons-nous capables de tenir les engagements pris lors de la COP21 ? Ne risquons-nous pas une envolée de la facture d'énergie des ménages ?
Le prix de la tonne de carbone n'évolue que peu. Le rapport n'établit pas de comparaisons avec d'autre pays : ne pourrait-on pas l'envisager ?
Je félicite moi aussi les rapporteurs de leur remarquable travail sur cette loi très dense.
Mes premières questions porteront sur le renouvellement des concessions hydro-électriques, et donc sur la mise en oeuvre des articles 116 à 118 de la loi. Chacun connaît les efforts de Marie-Noëlle Battistel pour trouver une solution qui soit compatible avec le droit européen mais qui ne détruise pas le modèle français de concession. Malgré tous nos efforts au moment de l'examen de la loi, la Commission européenne a adressé une mise en demeure à la France. Un décret a été publié en avril 2016 : répond-il aux objections soulevées par la Commission ? Où en sont les négociations avec celle-ci ?
Où en est-on de la création des sociétés d'économie mixte hydroélectriques ?
J'aimerais également savoir si les mesures prises en faveur des entreprises électro-intensives ont été efficaces.
Je souligne, comme mes collègues, la grande qualité de ce rapport.
Je n'insisterai ici que sur un problème, particulièrement délicat : celui des colonnes montantes, sur lequel le rapport revient en détail. Il faut bien sûr se préoccuper du coût de leur rénovation. Mais il est désormais impossible, pour certains usagers, d'obtenir le branchement électrique de leur appartement. Je connais ainsi un jeune couple qui a acheté un logement en copropriété. ERDF leur a assuré qu'il n'y avait pas de problème d'alimentation électrique ; mais cette réponse ne portait que sur le réseau jusqu'au bâtiment, et non sur l'intérieur. Or, après avoir entièrement rénové le logement, et après avoir obtenu du Comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité (Consuel) une attestation de conformité électrique, ce jeune couple s'est vu refuser le branchement par Enedis, au motif de la non-conformité à la norme dite C14-100 de la distribution collective dans la copropriété.
Voilà un cas très précis où la loi a provoqué un durcissement d'Enedis, qui refuse désormais d'effectuer des branchements en cas de non-conformité.
Je salue à mon tour le travail des rapporteurs.
Les écologistes se sont beaucoup impliqués dans les débats sur cette loi. Je regrette le retard pris par notre pays en matière de réduction de la part du nucléaire dans notre mix énergétique. Le Gouvernement manque du courage nécessaire pour agir en cohérence avec les objectifs fixés par la loi. En particulier, la PPE devrait conduire à la fermeture de 5 à 8 réacteurs d'ici à 2018, et de 19 à 24 réacteurs supplémentaires d'ici à 2023. C'est trois fois plus que ce que prévoit le Gouvernement. Ce n'est pas là un choix dogmatique, mais une condition nécessaire au développement des énergies renouvelables.
S'agissant de la méthanisation, où en est le secteur ? Le décret encadrant l'usage des cultures à vocation alimentaire dans les méthaniseurs, paru cet été, est-il appliqué ?
J'en viens enfin à la lutte contre le gaspillage. Quel bilan dressez-vous des « territoires zéro déchet zéro gaspillage » ? Comment continuer ce mouvement ? Si la loi Garot sur l'obligation du don pour les supermarchés a été largement médiatisée, la mesure qui prévoit un plan « anti-gaspi » dans les cantines scolaires est en revanche passée inaperçue. Une sensibilisation est-elle prévue ? Quels moyens sont consacrés à cette mesure, qui permettrait d'apprendre aux futurs adultes l'importance de la lutte contre le gaspillage ?
Le travail des rapporteurs est en effet impressionnant. Il montre, et c'est réconfortant, que nous avançons.
Il est évidemment beaucoup plus coûteux et plus difficile d'isoler un bâtiment par l'intérieur plutôt que par l'extérieur ; de plus, cela entraîne des pertes importantes de surface habitable. On constate donc aujourd'hui un désintérêt vis-à-vis des bâtiments anciens en zone rurale. Nous risquons d'y perdre une partie de notre patrimoine. Il faudrait donc, à mon sens, valoriser les efforts d'isolation par l'intérieur, et donc de préservation de l'aspect extérieur, peut-être grâce à la Fondation du patrimoine et à des diminutions d'impôts.
En ce qui concerne la méthanisation, le rapport estime qu'il n'y aura pas de méthanisation à la ferme tant qu'il n'y aura pas de cultures dédiées. C'est parfaitement exact, et toutes les études le prouvent. C'est une question qu'il faut trancher.
Enfin, s'agissant des distances d'implantation des éoliennes, leur autorisation est maintenant subordonnée non seulement au respect de la distance d'au moins 500 mètres des habitations, mais aussi au respect d'une distance appréciée au regard de l'étude d'impact. Par expérience, je peux vous assurer que ce sera une source de contestations infinies. Ce sera, disons-le, tout à fait ingérable.
Je partage les préoccupations déjà exprimées sur le renouvellement des concessions hydroélectriques. La France doit garder la main, en prêtant toutefois attention aux disparités existant entre ce qui se pratique sur le Rhin et sur le Rhône : sur le Rhône, 25 % du chiffre d'affaires est reversé aux collectivités locales, contre 0 % sur le Rhin !
Monsieur le président, vous avez évoqué l'arrêté annonçant la fermeture de la centrale de Fessenheim. Beaucoup d'élus Les Républicains en Alsace sont hostiles à cette fermeture, vous le savez. On nous a parlé de l'éventuelle arrivée d'un constructeur américain de voitures électriques ; mais il n'y a aujourd'hui aucune solution de repli, alors que 800 emplois directs et 1 200 emplois indirects sont concernés. Les gens ne savent pas ce qui va se passer, et cette situation est inacceptable. La dissymétrie entre ce que l'on a fait pour Belfort et ses 400 emplois – que j'approuve entièrement – et l'indifférence qui règne autour de Fessenheim est inadmissible.
Enfin, il est dommage que l'écotaxe poids lourds n'ait pas été évoquée : elle est au coeur de la transition énergétique. Les élus alsaciens souhaitent la mise en oeuvre d'une taxe de ce type, au moins sur le sillon rhénan : nos routes sont en effet encombrées par de nombreux poids lourds étrangers qui cherchent à échapper à la taxe allemande. Nous souffrons de ce report.
Je ne ferai que quelques observations rapides sur le titre II et la rénovation énergétique des logements. J'ai été un peu surprise d'entendre que le succès n'était pas au rendez-vous. Le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de notre Assemblée a rendu un rapport sur ce sujet le 19 octobre dernier : il en ressort que nous rénovons 395 000 logements par an, soit 79 % de l'objectif national de 500 000. Ce rapport indique également que nous dépensons beaucoup d'argent pour cela : environ 11 milliards d'euros annuels. Il souligne aussi, c'est vrai, que ces rénovations ne sont pas toujours de qualité. En tout cas, 79 %, ce n'est pas si mal !
Pour le reste, et toujours s'agissant du titre II, il me semble que le rapport montre les travers de la loi, que certains d'entre nous avaient déjà notés lors de son élaboration : pour mener véritablement à bien la transition énergétique, il faut absolument lier la question de l'habitat à celle de l'énergie. Sans collaboration très étroite entre les acteurs de ces deux secteurs, y compris les collectivités locales, nous n'avancerons guère. Nos actions dans le domaine de la transition énergétique et dans celui du logement ont malheureusement été parallèles ; or il est à mon sens indispensable de les faire converger.
Mes observations porteront sur l'économie circulaire. La définition claire et ambitieuse inscrite au titre IV de la loi a permis à la France de prendre le leadership sur ce sujet, devenu un enjeu majeur. La Commission européenne, qui estime qu'une stratégie d'économie circulaire à l'échelle européenne pourrait créer 2 millions d'emplois, prépare un paquet législatif ambitieux. À l'occasion de la COP22, l'accent sera mis sur l'économie circulaire comme modèle de développement pour le continent africain, un modèle qui permet de préserver et surtout de mieux utiliser les ressources.
Il ne s'agit donc pas de garder les yeux rivés sur des indicateurs quantitatifs ; il faut dessiner une stratégie pour faire bouger tout ce qui fait société : culture, éducation, fiscalité, soutien aux innovations… Nous entrons dans un monde en forte mutation, pas seulement en raison de la révolution numérique : je regrette profondément que nous ne disposions d'aucune stratégie nationale de transition vers l'économie circulaire, comme le prévoyait la loi, et que le Parlement soit peu associé à ces travaux.
L'avance prise par la France est en train de se résorber ; pire encore, certaines collectivités très engagées – Paris et sa métropole notamment – sont abandonnées sans vision claire. Il faut le rappeler au Gouvernement.
Je m'inquiète du sort de notre ancien rapporteur Denis Baupin, qui a disparu pour les raisons que l'on sait : participe-t-il régulièrement aux travaux de la Commission ? Sinon, les conséquences de son absence ont-elles été tirées par l'Assemblée nationale ?
Franchement, je ne vois pas du tout le rapport ! Il existe une obligation de présence. Je n'ai pas vu M. Baupin depuis plusieurs mois et je m'inquiétais de sa situation.
En tout cas, notre collègue est un militant anti-nucléaire qui aura coûté très cher à notre pays et aura affecté le rayonnement de notre filière d'excellence. Les choix faits dans cette loi, notamment à l'article premier, auront de lourdes conséquences, entre autres en matière d'emploi. Je n'évoquerai pas ici l'acharnement contre la centrale de Fessenheim. Il faudra revenir sur ce texte, et notamment sur l'article premier.
Je souhaite m'exprimer ici sur les compteurs Linky. Leur mise en place se fait avec difficulté ; certaines collectivités ont même cru judicieux de délibérer à leur sujet. Ces problèmes viennent de notre manque de réaction complaisant vis-à-vis d'une campagne de désinformation anti-scientifique sur les prétendus effets de ces compteurs. S'il existait des effets sanitaires des radiofréquences, nous le saurions : tous les travaux ont montré le contraire.
Qu'en est-il de la mise en oeuvre de l'article 28 ? Le rapport de l'Agence nationale des fréquences (ANFr) permettra-t-il enfin de lever toutes les interrogations en matière de santé publique ?
Je félicite les rapporteurs de ce travail remarquable. Il montre toute l'importance d'une loi qui aborde de façon quasi exhaustive les sujets liés à la transition énergétique – les polémiques sur le nucléaire ont pu occulter cet aspect. C'est un très grand texte, qui honore le Parlement, en particulier l'Assemblée nationale.
S'agissant des transports, enjeu considérable, je regrette que la France n'ait pas défini de stratégie très claire en ce qui concerne l'hydrogène. Nous allons installer beaucoup de prises électriques pour les voitures hybrides, sur lesquelles nous étions en retard, et dont le bilan énergétique est plutôt moyen si l'on tient compte des métaux rares qui servent à construire les batteries. Mais, aujourd'hui, Toyota a de nouveau dix ans d'avance sur nous et commercialise la première voiture à hydrogène.
S'agissant d'autre part des normes sur les produits phytosanitaires, la façon dont le Gouvernement applique la loi m'inquiète. La révision de l'arrêté considère, de manière très curieuse, que ce sont les productions végétales qui sont nuisibles, et non les produits phytosanitaires. Au lieu de supprimer ceux-ci, on s'apprête donc à réduire celles-là, en exigeant qu'elles s'écartent de vingt mètres des zones d'habitation, des haies, des ruisseaux… Pour vous donner une idée, cela revient à faire disparaître le vignoble du Médoc et des Graves. Imaginez les conséquences sur nos campagnes, mais aussi sur nos exportations ! Il y a là un problème de gouvernance : il faudrait peut-être mettre en place plus de protections transitoires, et encourager la recherche sur des produits alternatifs. Mais ne condamnons pas une surface agricole qui est l'une des plus remarquables d'Europe et du monde.
Je félicite moi aussi les rapporteurs.
L'article 91, qui porte sur l'extension à la presse de la REP papier, fait l'objet d'une analyse approfondie dans le rapport. Une mission m'a été confiée, ainsi qu'à Gérard Miquel, sur ce sujet, à la suite du vote quelque peu électrique de cette loi : la presse n'avait guère été auditionnée avant les débats. Nous avons essayé de déminer le terrain.
Le décret paru reprend nos préconisations, et je m'en félicite ; l'ensemble des acteurs sont satisfaits de ces nouvelles règles. Je souligne, contre ce que vous écrivez dans le rapport, que ce décret aurait pu ne jamais exister, car nombreux étaient ceux qui s'opposaient à sa parution.
Plus globalement, la REP papier fonctionne mal ; et c'est une mesure d'écologie punitive. Plus on a de papier à recycler, plus le papier recyclable est recyclé, plus l'éco-contribution augmente ! Il faudrait vraiment réfléchir à une refonte du système. Pendant la préparation du rapport, nous avons dû faire face à un lobbying très actif des collectivités locales, dont l'objectif était de gagner le plus d'argent possible, quitte à exporter ensuite le papier recyclé – car c'est une pratique qui se développe. Les plus grands défenseurs de l'augmentation de l'assiette de l'éco-contribution ne sont pas toujours des écologistes : ne soyons pas dupes !
Je voudrais revenir sur l'électro-mobilité. L'objectif des 7 millions de points de charge est ambitieux ; je rappelle néanmoins que, lors de la discussion d'une proposition de loi que vous aviez rapportée en 2014, Madame la présidente, le Gouvernement avait souhaité que les opérateurs soient encouragés. Mais ceux-ci ne sont pas tous au rendez-vous ! Certains investissements ont été décalés : je pense par exemple à ceux de l'entreprise Bolloré. Où en sont concrètement les déploiements ?
Le rapport évoque peu la question de l'hydrogène. Imaginons pourtant que nous utilisions plus de 2,5 millions de véhicules hybrides d'ici à 2030, et 1,9 million de véhicules électriques : le matin du 1er août, ou le soir à dix-neuf heures, nos réseaux électriques vont-ils résister ? Nous allons au-devant de vraies difficultés, que l'hydrogène permettra peut-être de pallier en partie.
Pourtant, lorsque l'on se déplace à Bruxelles pour défendre un projet de déploiement de l'hydrogène dans l'Ouest de la France, on apprend que ce projet ne peut être retenu par l'Europe, parce que le Gouvernement français n'a pas prévu que les autoroutes de l'hydrogène atteignent cette région ! Nous devrons être vigilants sur ce point.
Ma question portera sur le titre II et les économies d'énergie dans le bâtiment.
Le coût budgétaire du CITE a été multiplié par trois en quelques années. Ce dispositif est efficace : son existence permet d'engager plus de travaux. Mais la question de l'« effet prix » du crédit d'impôt se pose. Sommes-nous certains qu'il bénéficie aux consommateurs, aux ménages qui ont vraiment besoin de lutter contre les « passoires énergétiques » ?
D'autre part, les crédits de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) sont aujourd'hui stables, mais la question de ses ressources n'est toujours pas réglée. L'article 20 prévoyait la création d'un Fonds de garantie pour la rénovation énergétique, et le rapport exprime une grande insatisfaction quant au retard pris dans l'application de ce texte. Il s'agissait pourtant de mettre à la portée de tous la rénovation énergétique.
Aujourd'hui, lorsque l'on construit un bâtiment, on porte une grande attention à la performance énergétique et donc à l'isolation : les maisons se mettent à ressembler à des boîtes hermétiques ! Mais la question commence à se poser d'éventuels effets sur la santé des habitants. Il est bon de dépenser de l'argent pour protéger la planète, mais il serait dommage que cela entraîne des dépenses de santé supplémentaires… Le rapport, je crois, n'aborde pas ce sujet, sur lequel nous devrions peut-être nous pencher.
Cette loi doit permettre aux pouvoirs publics, mais aussi à tous les citoyens, d'agir pour la croissance verte : il y a un travail important à mener pour créer des emplois durables, préserver l'environnement et adapter nos modèles économiques. Dans mon département, un projet vise à fédérer différents partenaires – GRDF, Enercoop… – pour développer des unités de production, de stockage et de distribution de biogaz à destination des véhicules, afin de valoriser les déchets organiques. Un autre, le projet Buxor, vise à développer un nouvel engrais 100 % naturel à partir du compost de broussaille.
Le Fonds de financement de la transition énergétique est un outil essentiel pour développer tous ces petits projets du quotidien qui permettront, aux côtés des grandes actions publiques, d'atteindre nos objectifs.
Les rapporteurs ont en effet réalisé un excellent travail.
Les territoires, je crois, se sont vraiment approprié l'idée de transition énergétique. Malheureusement, la restriction des zones en raison de contraintes militaires bloque de nombreux projets. Le traitement se fait au cas par cas, sans règle nationale.
Je me félicite des efforts faits pour lancer des fermes pilotes offshore. Des réponses doivent être apportées aux projets en cours dans les jours qui viennent.
Avez-vous évalué les résultats de la mise en place du chèque énergie ?
Monsieur Accoyer, pour obtenir une réponse à votre question sur l'absence des parlementaires, il faudra vous adresser au Président de l'Assemblée nationale.
Merci de ces nombreuses questions ; nous n'aurons malheureusement pas le temps de répondre à toutes.
S'agissant du renouvellement des concessions hydro-électriques, la loi propose une boîte à outils qui doit permettre le renouvellement de concessions d'une grande partie du parc hydro-électrique français ; la méthode du barycentre est efficace et équilibrée. Les décrets d'application correspondent bien à l'esprit dans lequel les parlementaires ont voté cette loi.
Concernant les discussions avec la Commission européenne, nous avons évolué ; des discussions avec le Gouvernement et les concessionnaires sont en cours pour déterminer l'organisation des vallées et les conditions de prolongement des concessions. J'insiste, vous l'entendez, sur un renouvellement ou un prolongement des concessions, et non sur une mise en concurrence. Je demeure évidemment très vigilante.
En ce qui concerne les industries électro-intensives, elles sont très satisfaites des dispositifs votés : leurs tarifs n'étaient plus suffisamment attractifs, mais ils le redeviennent, puisque 250 dossiers ont été traités par RTE, et 191 se sont vu octroyer notamment l'abattement du TURPE, pour un montant abattu depuis le 1er janvier de 123 millions d'euros.
S'agissant du financement participatif, beaucoup d'acteurs, notamment les petites collectivités territoriales, craignent les contentieux. Pour les rassurer, le décret aurait peut-être pu apporter plus de précisions sur les seuils de participation des collectivités aux sociétés par actions et préciser le statut de l'intermédiation. Mais le processus n'en est qu'à ses débuts : la confiance devrait s'instaurer peu à peu.
En ce qui concerne l'hydrogène, je suis d'accord avec M. Leboeuf et M. Savary : il n'y a pas dans notre pays d'orientation hydrogène très claire, et c'est regrettable. Le rapport demandé au Gouvernement sur un plan de développement du stockage des énergies renouvelables par hydrogène décarboné – c'est l'article 121 – n'a pas été rendu. Notre rapport se prononce pour un soutien à la mobilité à l'hydrogène par l'intermédiaire de la commande publique et pour la prise en charge par les acteurs privés de l'extension du réseau des stations distribuant l'hydrogène. C'est un sujet d'avenir, dont il faut se préoccuper.
S'agissant des craintes pour la santé provoquées par l'installation du compteur Linky, les rapports de l'ANFr lèvent toutes les inquiétudes.
M. Krabal s'interrogeait sur le « jaune » budgétaire prévu à l'article 174, sur le financement de la transition énergétique. Il n'est pas encore paru, mais comme il s'agit d'une annexe budgétaire, cela est imminent.
S'agissant de la PPE, il me demandait de préciser pourquoi je me déclare insatisfait. Tout d'abord, le décret n'est pas publié, même si nous en connaissons certains éléments.
L'article 176 dispose que la PPE « définit les objectifs quantitatifs de la programmation et l'enveloppe maximale indicative des ressources publiques de l'État et de ses établissements publics mobilisées pour les atteindre ». Cet engagement n'est pas tenu, et ces chiffres ne figurent pas dans le projet. D'autre part, si la stratégie de développement de la mobilité propre y figure, la stratégie nationale de mobilisation de la biomasse ou le plan de programmation de l'emploi et des compétences ne font pas partie du projet de PPE.
La France est le pays le plus nucléarisé du monde, avec ses cinquante-huit réacteurs ; 76 % de notre électricité est d'origine nucléaire. Notre dépendance vis-à-vis du nucléaire est donc particulièrement forte : dans quelques semaines, vingt et un réacteurs seront arrêtés, et l'on se demande si nous ne risquons pas des coupures lors des pics de demande. Mme la ministre de l'environnement a écrit à Jean-Bernard Lévy, PDG d'EDF, pour s'en inquiéter.
Diminuer la part de l'électricité nucléaire dans le mix énergétique nous paraît donc une priorité. Mais cette baisse appelle une anticipation, pour répondre aux questions des salariés et de tous les acteurs locaux.
En effet, le Président de la République s'était engagé à fixer un prix plafond de la tonne de carbone, ce qui aurait eu des conséquences importantes sur la viabilité des centrales thermiques à charbon. Cet engagement n'est pas réalisé, parce que les acteurs locaux comme les salariés s'y sont opposés – ce que l'on peut très bien comprendre.
Dans ce domaine, il est particulièrement indispensable de prévoir, de programmer.
Jean-Marie Sermier a évoqué le prix de la tonne de carbone. Sur les outils destinés à donner un prix au carbone, je vous renvoie à l'étude de la Caisse des dépôts et consignations, qui dresse un panorama de soixante-dix pays dans lesquels de tels dispositifs existent, et donne des indications sur les prix.
Monsieur Chassaigne, nous attendons le rapport sur les colonnes montantes. Nous l'avons réclamé. Il existe un rapport du Conseil général de l'environnement et du développement durable, mais il n'est pas public, ce que nous regrettons particulièrement.
Je regrette, comme M. Straumann, l'abandon de l'écotaxe. Mais je me permets de rappeler ici qu'il a voté contre la publication du rapport que j'ai présenté sur ce sujet.
S'agissant de l'hydrogène, nous sommes effectivement en retard sur les autres pays. Monsieur Leboeuf, vous allez bientôt, je crois, en tant que président du syndicat départemental d'énergie et d'équipement de la Vendée, inaugurer dans ce département une station hydrogène : nous serons heureux de la visiter.
S'agissant du CITE, l'avis du comité des experts sur le projet de PPE est clair : « il faut prendre garde à l'explosion de cette ligne fiscale qui, budgétée en 2016 à 1,4 milliard d'euros, devrait en consommer cette année plus de 2 milliards. Ce levier fiscal, s'il crée de l'activité dans le secteur du bâtiment, ne satisfait que médiocrement l'objectif d'efficacité énergétique. Le crédit d'impôt développement durable (CIDD) finançait des bouquets de travaux, dont la performance énergétique était avérée ; le CITE finance des équipements isolés […] dont l'efficacité n'existe que si, dans le temps, d'autres travaux complémentaires interviennent. Les hypothèses de coût du dispositif sur la période paraissent mériter d'être interrogées ».
J'approuve à titre personnel cette analyse, et il conviendra d'estimer l'effet d'aubaine créé par le CITE et son efficacité réelle.
Le Fonds de garantie pour la rénovation énergétique, prévu à l'article 20, devait être doté de 1,5 milliard d'euros. Aujourd'hui, des crédits ont été redirigés vers ce fonds, mais il n'y a pas de moyens nouveaux, à l'exception d'une dotation de 250 millions d'euros allouée par la loi de finances rectificative pour 2015 et qui doit financer les 212 « territoires à énergie positive ». Les autres crédits identifiés dans différents documents ne constituent pas des financements nouveaux : 50 millions d'euros sont issus des fonds propres de la CDC ; 150 millions d'euros de recettes sont liés aux certificats d'économie d'énergie ; 300 millions d'euros sont alloués aux actions existantes du programme d'investissement d'avenir (PIA). Les 750 millions d'euros de crédits budgétaires prévus n'ont pas été inscrits dans la loi de finances initiale pour 2016.
Le chèque énergie a été expérimenté dans quatre départements. Nous constatons que le montant moyen de 150 euros paraît insuffisant : les ONG estiment qu'il faudrait atteindre 250 à 400 euros. L'extension du chèque énergie est prévue ; mais il faudra débourser des sommes très importantes, car 5 millions de foyers sont aujourd'hui en situation de précarité énergétique. L'augmentation du prix de la tonne de carbone, grâce à la contribution climat-énergie, devrait permettre de financer ce dispositif.
Nous n'avons pas répondu à toutes vos questions et nous vous demandons de bien vouloir nous en excuser.
Je partage entièrement des points de vue exprimés à droite – notamment par Alain Leboeuf, qui soulignait l'insuffisante réflexion sur le coût et le développement des infrastructures et la participation des industriels – comme à gauche – notamment par Gilles Savary. Sur les produits phytosanitaires, on a en effet trop souvent tendance aujourd'hui à multiplier les normes et les interdictions sans mesurer le risque pour l'économie réelle, et le risque de faire tout simplement disparaître des cultures.
Les questions ont fait surgir un problème de fond : celui du financement de la transition énergétique. Le rapport aurait pu insister sur ce point. Il y a par exemple une certaine cécité sur le CITE, si vous me permettez cette formule.
Le problème, c'est bien celui du coût de la tonne de CO2 évitée. Il ne suffit pas de mettre des milliards sur la table ; il faut nous interroger sur les mesures qui seront vraiment utiles – rénovation énergétique, développement des énergies vertes, interdiction de certaines énergies polluantes…
L'année dernière, la facture énergétique de la France s'est allégée de 11 milliards d'euros, grâce à la baisse du prix des énergies fossiles ; mais nous n'avons pas su tirer parti de cette moindre dépendance pour créer, grâce à des mécanismes d'équilibrage des prix à la pompe, des ressources pour la transition énergétique.
Dans l'article premier sont inscrits des objectifs très ambitieux – trop, à mon sens, contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure. Ils sont surtout très peu financés, et c'est là, je le répète, le vrai problème. Nous avons beaucoup parlé du nucléaire ; mais nous devrions surtout nous poser la question du poids des énergies fossiles, ne serait-ce qu'en raison de notre dépendance vis-à-vis de producteurs extérieurs.
S'agissant du nucléaire, d'ailleurs, on dit qu'il serait nécessaire, pour atteindre les objectifs du Gouvernement, de fermer une vingtaine de réacteurs : eh bien, nous y sommes, et nous craignons maintenant des coupures ! On me répondra que nous ne disposons pas encore du potentiel photovoltaïque et éolien destiné à compenser ces fermetures. Mais, si nous ne parvenions pas à le construire, nous serions en 2025 dans la situation d'aujourd'hui : au moindre choc de demande d'électricité, les Français risquent de comprendre brutalement que c'est bien le nucléaire qui fournit à notre pays une énergie peu chère et qui permet à notre économie d'être compétitive.
La Commission des affaires économiques et la Commission du développement durable autorisent successivement la publication du rapport d'information.
Information relative à la commission
La commission a nommé Mme Béatrice Santais rapporteure sur le projet de loi ratifiant les ordonnances n° 2016 1019 du 27 juillet 2016 relative à l'autoconsommation d'électricité et n° 2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d'électricité à partir d'énergies renouvelables et visant à adapter certaines dispositions relatives aux réseaux d'électricité et de gaz et aux énergies renouvelables (n° 4122).
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mercredi 26 octobre 2016 à 9 h 30
Présents. - M. Damien Abad, Mme Brigitte Allain, M. Frédéric Barbier, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, M. Philippe Bies, M. Yves Blein, M. Marcel Bonnot, M. Christophe Borgel, M. Jean-Claude Bouchet, M. André Chassaigne, M. Dino Cinieri, Mme Karine Daniel, M. Yves Daniel, Mme Fanny Dombre Coste, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Christian Franqueville, M. Georges Ginesta, M. Daniel Goldberg, M. Jean Grellier, M. Antoine Herth, M. Henri Jibrayel, M. Philippe Kemel, M. Jean-Luc Laurent, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Jacqueline Maquet, Mme Marie-Lou Marcel, M. Philippe Armand Martin, Mme Frédérique Massat, M. Kléber Mesquida, M. Yannick Moreau, M. Philippe Naillet, M. Hervé Pellois, Mme Josette Pons, M. Dominique Potier, M. François Pupponi, M. Franck Reynier, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. Éric Straumann, M. Alain Suguenot, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Jean-Marie Tétart, Mme Catherine Troallic, M. Fabrice Verdier
Excusés. - M. Bruno Nestor Azerot, M. Denis Baupin, Mme Michèle Bonneton, M. Daniel Fasquelle, M. Laurent Furst, Mme Pascale Got, M. Thierry Lazaro, M. Serge Letchimy, M. Jean-Claude Mathis, M. Bernard Reynès, M. Thierry Robert, M. Jean-Paul Tuaiva, Mme Catherine Vautrin
Assistaient également à la réunion. - M. Bernard Accoyer, M. Christophe Premat, M. François Vannson