Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Réunion du 10 janvier 2017 à 17h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • exécutif
  • paritaire
  • parité
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La réunion

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La séance est ouverte à 17 heures.

Présidence de Mme Catherine Coutelle, présidente.

La Délégation procède à l'audition de Mme Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues », sur le bilan des mesures adoptées en matière de parité.

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Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui Mme Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi », qui oeuvre pour la parité dans les instances élues ». Je vous remercie, madame, d'avoir répondu favorablement à l'invitation de la Délégation aux droits des femmes.

Nous avons souhaité dresser le bilan de notre activité législative durant ces cinq dernières années. Il me semble que nous avons bien avancé, même si, bien sûr, il reste beaucoup à faire.

On peut voir le verre à moitié vide ou à moitié plein. Je lisais, dans un journal du soir, que le fait d'afficher l'égalité femmes-hommes comme une priorité était un signe d'échec. J'estime, au contraire, que c'est le signe d'une grande réussite. Le fait que des candidats à l'élection présidentielle, considèrent l'égalité femmes-hommes comme une priorité est loin d'être négatif, car cela n'était pas gagné d'avance.

Votre association, qui regroupe plusieurs associations, est très attentive à l'évolution de la place des femmes aux postes de responsabilité, notamment dans la vie politique.

Nous avons avancé sur ce sujet puisque nous avons instauré la parité partout – chambres consulaires, fédérations sportives etc. J'étais, en fin de semaine, avec des sportifs qui étaient heureux de me montrer un document sur la féminisation dans le football. Cela reflète plus ou moins la réalité, mais au moins, ils ont cette notion en tête et ils se sentent culpabilisés s'ils ne font rien dans ce sens.

En ce qui concerne la parité dans les intercommunalités, je peux vous dire que ce n'est pas la première préoccupation des élus qui sont aujourd'hui en grande discussion sur les nouvelles intercommunalités. Il y a tellement de paramètres à prendre en compte que celui de la parité n'est pas nécessairement le premier…

Votre association travaille sur les avancées concernant la place des femmes en politique, au regard des lois qui sont votées. La loi du 17 mai 2013 relative aux conseils départementaux est d'une totale efficacité. Pour ma part, je n'étais pas très favorable au binôme, mais le résultat est là. Les conseils départementaux ont changé d'atmosphère, mais cela ne signifie pas pour autant qu'il y a beaucoup de présidentes de départements.

Enfin, les femmes sont toujours vice-présidentes dans des secteurs jugés plus « féminins ». Elles peinent encore à avoir des responsabilités dans des domaines moins connotés.

Vous nous parlerez sans doute de votre enquête sur les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et vous nous ferez part de vos propositions.

En ce qui concerne les élections législatives, nous avons doublé le montant de la retenue sur les subventions versées aux partis politiques ne respectant pas la parité. Certains ont pris en compte cette nouvelle pénalité, mais j'ai le sentiment que d'autres n'ont pas tout à fait compris ce qui allait leur arriver.

Concernant les élections sénatoriales, il y a des listes paritaires, mais on a constaté d'étonnants contournements de la loi consistant à présenter plusieurs listes avec, en tête de liste, un homme, alors qu'auraient dû figurer sur la même liste un homme, une femme, un homme, etc. :le troisième homme fait parallèlement une liste dissidente, pour avoir plus de chances d'être élu.

Nous attendons également, madame Danet, vos suggestions pour aller plus loin dans la parité.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

L'association « Elles aussi » est un réseau pluraliste d'associations de femmes, dont certaines sont des associations d'élues ou d'anciennes élues.

Nous agissons à deux niveaux : au niveau national pour essayer de faire évoluer les lois et les pratiques, et au niveau local pour rendre les femmes élues plus visibles et les encourager à s'engager en politique.

Le bilan de cette législature est positif en ce qui concerne les droits des femmes, du plus réel – les violences, le sexisme, l'égalité professionnelle – au plus symbolique – la parité dans les instances de décision, politiques d'abord, puis son extension dans les sphères économiques et sociales. La parité permet aujourd'hui une meilleure écoute et une meilleure prise en compte de la problématique de l'égalité femmes-hommes.

En ce qui concerne la parité en politique, nous notons des progrès par rapport aux exigences d'« Elles aussi », s'agissant de la parité dans toutes les élections, de la limitation du cumul des mandats et de l'amélioration du statut de l'élu.e.

Je vais faire maintenant un tour d'horizon des progrès réalisés.

Je commencerai par les gouvernements paritaires, résultat d'une volonté politique…

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

En effet. Mais il y a un petit bémol, dans la mesure où on a l'impression qu'on ne pourrait pas former un gouvernement resserré si l'on voulait respecter la parité. J'ai ainsi trouvé la composition du premier gouvernement un peu trop élargie.

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Vous voulez sans doute dire que les grands ministères sont réservés aux hommes ?

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire. Je pense qu'on a beaucoup de mal à former un gouvernement resserré en respectant la parité, donc, on fait un gouvernement plus large pour y arriver.

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Je pense qu'on ne veut pas donner de ministères régaliens aux femmes.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

On l'a fait. Ma critique porte simplement sur le fait que c'est probablement à cause de la parité qu'il n'y a pas de gouvernement resserré. Cela étant, le bilan est plutôt satisfaisant sur ce plan.

J'en viens à la loi du 17 mai 2013 sur les élections municipales, communautaires et départementales.

En ce qui concerne les départements, ce fut une véritable révolution pour ces assemblées qui étaient restées réfractaires à la féminisation. Elles sont passées de 13,9 % à 50,1 % de femmes et les exécutifs sont paritaires. Il s'agit d'un mode de scrutin binominal majoritaire tout à fait nouveau et que nous promouvions puisqu'en 2007, nous l'avions inscrit parmi nos exigences. En réalité, nous le demandions pour les élections législatives. Les élections départementales sont un galop d'essai. Peut-être cela fera-t-il exemple…

Nous avons recueilli des témoignages positifs de femmes réélues sur le changement d'ambiance au sein de ces conseils où il y a aujourd'hui moins de machisme. Seul bémol, il n'y a que 10 % de femmes présidentes et 35 % de femmes premières vice-présidentes. Toutefois, la proportion est meilleure que celle enregistrée dans les mairies, où il n'y a que 28,5 % de femmes premières adjointes.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

C'est d'ailleurs l'une de nos demandes.

L'association « Femmes élues de l'Isère », membre d'« Elles aussi », est en train de finaliser une étude qualitative sur les binômes du conseil départemental, qui devrait être publiée au mois de février.

L'abaissement du seuil pour l'obligation d'un scrutin de liste paritaire aux communes de 1 000 habitants et plus a permis l'élection de 16 000 femmes supplémentaires et des exécutifs paritaires dans ces communes.

Cela étant, on nous a rapporté le cas d'un maire qui a élu un par un ses adjoints. N'élisant qu'un adjoint à chaque élection, cela lui a permis de contourner l'obligation de parité. L'opposition a réagi après la nomination du troisième adjoint, laquelle a été annulée, mais les premières nominations n'ont pas été annulées, parce qu'elle s'y est pris trop tard. Je crois que cela s'est passé dans le Rhône. C'est la première fois que nous constatons un tel détournement de la loi. Cela reste toutefois anecdotique.

Les têtes de listes affirmant ne pas trouver de femmes candidates, nous avons organisé des rencontres entre des femmes élues locales et des candidates potentielles, et publié un guide de la candidate. À ces hommes têtes de liste qui prétendaient ne pas trouver de femmes candidates, je répondais qu'il leur suffisait de demander à une femme figurant sur leur liste de trouver d'autres femmes et qu'elle en trouverait. Car quand les femmes sont têtes de liste, on constate qu'il n'y a jamais de problème…

J'en arrive à la question du gros déficit de femmes têtes de liste, et donc, maires ou présidentes. Je rappelle qu'il n'y a que 16 % de femmes maires.

Nous commençons une étude en Bretagne pour comprendre ce gros déficit de femmes maires et proposer des actions pour y remédier. Je ne peux pas vous dire quand cette étude sera terminée, car cela dépend de la déléguée aux droits des femmes.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Oui. La Bretagne a une culture paritaire assez importante et c'est le conseil régional qui finance une partie de cette étude, que nous menons avec des associations de maires et le concours de la délégation territoriale aux droits des femmes. La publication de cette étude dépend de la déléguée régionale qui, pour l'instant, est débordée, mais l'étude est lancée. Elle nous permettrait d'aboutir à des actions pour remédier au déficit de femmes maires et pourrait être mise à profit dans d'autres régions.

En ce qui concerne l'exécutif, on pourrait commencer par instituer la parité entre maire et premier maire-adjoint.e, ainsi qu'entre président.e et premier vice-président.e. C'est également une recommandation du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE). On pourrait aussi imposer une alternance stricte femme-homme dans les exécutifs en élisant une liste qui inclurait la tête de liste, c'est-à-dire que si un homme est tête de liste, le candidat suivant est forcément une femme.

Il est évident que les partis politiques ont un rôle important à jouer en investissant plus de femmes. Il est inscrit dans la Constitution qu'ils doivent favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. Malheureusement, il y a le jeu incessant de marchandages politiques appuyé par l'action des réseaux qui font obstacle à l'arrivée des femmes en préservant les mandats de ceux qui sont déjà en place.

J'en viens à nos propositions.

Comme une grande partie du financement des partis politiques vient des impôts et taxes que paient les citoyennes et les citoyens, ne peut-on pas imposer la parité dans les instances exécutives et notamment dans les commissions des investitures ? C'est à Bruxelles, où je suis allée assister, fin novembre, à des réunions avec des femmes responsables politiques européennes, qu'a été faite cette suggestion.

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Nous avons inscrit dans la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi, dite « loi Rebsamen », l'obligation d'une représentation paritaire dans les syndicats pour les négociations salariales, car l'égalité professionnelle n'avance pas très vite. Nous l'avons fait, malgré des réticences exprimées par des syndicats. Cela m'a étonnée, mais ils disaient qu'ils n'allaient pas trouver de femmes disponibles etc.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Dans la mesure où les partis politiques profitent d'un financement public, ne pourrait-on pas leur imposer des règles ? Y avez-vous déjà réfléchi ?

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Nous en avons beaucoup discuté, mais pour ma part, je ne suis pas favorable aux dispositifs de type « représentation miroir », c'est-à-dire d'objectif chiffré fonction de la part des femmes dans la population représentée.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Nous n'y sommes pas non plus favorables.

Par ailleurs, il faudrait également rendre plus visibles les femmes qui ont des responsabilités pour inspirer d'autres femmes.

Pour préparer les élections municipales, nous avions demandé au cabinet de Mme Najat Vallaud-Belkacem si nous pouvions faire une campagne publicitaire pour promouvoir les femmes. La réponse a été nette : « Nous n'avons pas les moyens financiers ». Autrement dit, il n'y a pas eu de volonté politique.

De notre côté, nous essayons d'agir au plan local, mais nous ne sommes pas implantées partout localement. Nous avons organisé, en 2011 et en 2014-2015, une action intitulée « La Marianne de la Parité » pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ayant le mieux mis en oeuvre la parité. La présence de la presse locale lors de cet événement permet de véhiculer l'idée de la parité. Ce que l'on peut regretter, c'est que, pour assister aux cérémonies que nous organisions, les maires hommes envoyaient plutôt la première adjointe. Autrement dit, il y avait pléthore de femmes lors de ces cérémonies et très peu d'hommes.

J'en viens à notre enquête sur la parité dans les intercommunalités.

Nous avons fait cette enquête parce que nous estimons que ces assemblées sont encore trop peu connues du public, alors qu'elles sont devenues des lieux de plus en plus importants du pouvoir local. Comme le disait Marylise Lebranchu, 80 % des investissements des communes sont faits au niveau des intercommunalités. En outre, elles organisent la vie quotidienne des citoyens.

Lors de nos recherches, nous sommes allés sur le site internet des mairies, mais nous n'avons pas vu beaucoup d'onglets « intercommunalités ». C'est regrettable, car c'est là qu'est le pouvoir local.

Nous avons voulu évaluer les effets du nouveau mode de scrutin avec le fléchage pour les communes de 1 000 habitants et plus, qui concerne en réalité 26 % des communes. Nous avons constaté qu'il n'y avait aucun effet sur les exécutifs.

Nous avons aussi voulu alerter sur le manque de parité et disposer d'un repère objectif avant les importantes recompositions qui se sont déroulées d'abord en janvier 2016, s'agissant notamment des métropoles et de la région parisienne. Début 2017, c'est la grande majorité des intercommunalités qui se recomposent. Il y a déjà des exemples d'exécutifs qui ne comptent pas une seule femme. Que deviendront les femmes dans cette nouvelle organisation qui se déroule entre deux élections générales ?

Notre enquête est un travail collectif réalisé par le bureau d'« Elles aussi », les associations membres et quelques partenaires. Elle est exhaustive puisque nous avons réussi à étudier 2 127 intercommunalités. C'est seulement sur une douzaine d'intercommunalités que nous n'avons pas réussi à recueillir des informations, même en faisant des recherches sur internet, par mail et par téléphone. Au téléphone, nous avons été généralement bien accueillies, au secrétariat, par des femmes qui nous répondaient très vite si elles avaient la liste et qui s'intéressaient à la réalité des faits.

Nous avons présenté les résultats de cette enquête au niveau national, régional et départemental, et nous avons fait une distinction par catégorie de population des intercommunalités : les petites de moins de 10 000 habitants et les plus grosses de plus de 50 000 habitants. C'est là qu'apparaissent des disparités.

Au niveau des assemblées, le nombre de conseillères communautaires est de 32 %, contre un peu moins de 25 % auparavant. Il y a donc un progrès.

Au niveau national, 24 % des conseils comptent plus de 40 % de femmes, se rapprochant ainsi d'une certaine parité, mais 10 % comptent moins de 20 % de femmes.

Au niveau de la gouvernance, 8 % de femmes seulement sont présidentes. Il n'y a donc aucun progrès par rapport aux élections précédentes. Les femmes dans l'exécutif, c'est-à-dire les présidentes et les vice-présidentes, ne sont que 18 %. Nous avons trouvé 23 % d'exécutifs sans femmes et seulement 8 % d'exécutifs comptant 40 % ou plus de 40 % de femmes, et ils sont généralement restreints. Mais cela va changer avec la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) parce que la plupart des exécutifs vont être plafonnés à seize. À la limite, on peut dire que l'exécutif restreint favorisait les femmes.

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Les communautés sont en train de s'agrandir. Dans ma circonscription, par exemple, l'une d'entre elles va passer de treize à quarante communes, mais la loi n'a pas prévu quarante vice-présidents.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Elle en autorise seize maximum.

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Seize pour quarante communes. Il y a donc un certain nombre de communes dont les maires ne seront pas vice-présidents et, pour ma part, je vois se profiler très majoritairement des hommes, parce que les maires sont majoritairement des hommes. Il y a actuellement une régression de la féminisation dans ce domaine.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Au niveau de la population, ce sont les plus petites intercommunalités, de moins de 10 000 habitants, qui comptent le moins de femmes en pourcentage. C'est le cas des conseils où il y a moins de 20 % de femmes. Les pourcentages de femmes dans les conseils sont plus élevés dans les intercommunalités de plus de 50 000 habitants.

C'est un peu différent au niveau des exécutifs. Bien sûr, c'est encore le cas pour les petites intercommunalités, mais il y a aussi des exécutifs sans femmes au niveau des intercommunalités de plus de 50 000 habitants.

Si 85 % des exécutifs sans femmes appartiennent à des EPCI de moins de 20 000 habitants, 81 % des exécutifs comptant au moins 40 % de femmes appartiennent aussi à des EPCI de moins de 20 000 habitants, ce qui veut dire que la répartition au niveau des exécutifs n'est pas la même que dans les assemblées, mais aussi qu'il existe des exécutifs sans femmes dans les EPCI de 50 000 habitants : c'est ce qui nous a étonnées.

Voilà pour ce qui est de l'exécutif strict.

Nous avons aussi observé les bureaux. On aurait pu penser que le nombre de femmes allait augmenter sensiblement dans les exécutifs élargis, mais cela n'a pas été le cas. On gagne 1 % maximum.

J'en viens à la répartition géographique. Vous avez, sur le document que je vous ai remis, deux cartes représentant, par département, la part des femmes dans les conseils communautaires et dans les exécutifs. Elles montrent des disparités, la façade ouest étant favorable aux femmes, contrairement au Nord et à l'Est.

Le pire département est celui de la Lozère qui compte 61 % d'exécutifs sans femmes, et cinq conseils ne comptent qu'une ou deux femmes. On peut dire qu'en Lozère, les femmes sont passées à la trappe.

Au total, nous avons trouvé, en France, neuf conseils avec une seule femme et vingt avec seulement deux femmes.

Comme on pouvait s'y attendre, il y a une corrélation entre le nombre de femmes dans les exécutifs et le nombre de femmes maires, avec quelques disparités. Les départements les mieux positionnés sont ceux d'outre-mer, qui comptent un certain nombre de femmes dans les exécutifs et dans les assemblées.

Au niveau qualitatif, nous avons observé les délégations confiées aux vices-présidentes. Nous n'avons pas pu le faire de façon scientifique parce que, malheureusement, les dénominations sont très diverses….

Les plus récurrentes, bien sûr, concernent l'action sociale, l'enfance, la jeunesse, la culture, le tourisme et la communication.

Les moyennement récurrentes concernent les finances, l'environnement, le développement durable et la politique de la ville.

Les moins récurrentes, enfin, concernent l'eau, l'assainissement, les déchets, les transports, la voirie, les travaux, l'aménagement du territoire, le développement économique, le commerce et l'artisanat, l'urbanisme.

On peut noter un léger progrès en ce qui concerne les délégations de finances, qui ne sont pas systématiquement confiées à des hommes.

Nous pointons le fait que les politiques publiques d'égalité femmes-hommes sont plutôt absentes. Nous n'avons trouvé qu'une seule vice-présidente ayant cette délégation, et dix-neuf intercommunalités seulement ont signé la Charte européenne pour l'égalité des femmes et des hommes dans la vie locale. Je crois, madame Olivier, que les plus nombreuses se situent dans l'Essonne.

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C'est le département numéro un en la matière.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Grâce à vous !

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Malheureusement, le mouvement s'est arrêté.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

En ce qui concerne le cumul des présidences, une grande majorité concerne la vice-présidencedes conseils départementaux. Il y a également des parlementaires, mais les parlementaires qui cumulent se trouvent plutôt dans les grosses intercommunalités où ils sont maires et présidents. Dans les intercommunalités plus petites, ce sont plutôt des vice-présidents ou des présidents de conseils départementaux.

Nous avons relevé le cas d'un sénateur président d'un département et d'une intercommunalité. À cause de la loi sur le non-cumul des mandats locaux, il est simple conseiller municipal dans sa mairie, mais on peut se demander, dans les faits, qui est véritablement à la tête de la mairie…

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Votre étude correspond à ce que nous pouvons constater. Il y aura très prochainement des évolutions puisque le seuil pour constituer les intercommunalités est passé à 15 000 habitants.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

La moyenne serait de 20 000 habitants.

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Oui, et même au-delà. En ce qui concerne ces nouvelles intercommunalités, le problème se pose lorsqu'il y a trois présidents pour un fauteuil, car il s'agit souvent de trois hommes présidents. De la même façon, on peut se demander qui sera le maire lorsqu'on regroupe deux communes. Le souci, en l'occurrence, ce n'est pas d'introduire de la parité, c'est qu'il y a déjà trop de présidents sortants pour un seul siège. S'agissant d'une élection à second degré, nous n'avons pas trouvé la solution pour imposer la parité, y compris dans les exécutifs des EPCI. Comme le dit le Haut Conseil, tant que la loi est muette, les choses n'avancent pas.

On nous a souvent demandé de cesser d'inscrire la parité dans la loi, au prétexte qu'on ne trouverait pas de femmes candidates… Pourtant, les communes de plus de 1 000 habitants en ont trouvé et ont fait des listes paritaires. Quand la loi oblige, on y arrive ! Par conséquent, je pense qu'il faudra repasser par une loi sur les intercommunalités d'ici à la prochaine échéance de 2020.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Le pourcentage de femmes dans les assemblées des nouvelles intercommunalités en 2016 a régressé partout.

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Nous nous y attendions. Au niveau des conseils, il régresse partout.

Au niveau de l'exécutif, c'est moins net. Le pire cas est celui de la métropole Grand Paris. Dans les exécutifs, on est passé de 28 % de femmes avant la fusion à 14 %, et dans les conseils, de 47 % à 28 %, sachant qu'il s'agit de grosses villes, que le fléchage aurait pu favoriser.

Ainsi, l'exécutif de la grosse communauté d'agglomération Saint-Germain-Boucles de la Seine passe de 18 % de femmes à 12,5 %. Il ne compte que deux femmes sur seize. Pour l'assemblée, il y a peu de différence puisqu'on passe de 44 % à 43 %. Je pense que c'est dû au fléchage, qui fait que ce ne sont que de grosses villes.

Il y a donc une diminution du nombre de femmes dans toutes les assemblées. Au niveau des exécutifs, c'est variable.

Dernièrement, dans l'Eure-et-Loir, L'Écho Républicain mentionnait une nouvelle intercommunalité dont le président déclarait qu'il s'agissait d'une grande transition. En réalité, il n'y avait pas de femme dans l'exécutif et une seule femme dans l'exécutif élargi, ce qui a apparemment semblé tout à fait normal au journaliste de L'Écho Républicain, qui n'y a rien trouvé à redire. Nous avons donc envoyé une lettre à ce président pour le féliciter, et une copie de la lettre à L'Écho Républicain…

En ce qui concerne les recompositions, il s'agit d'une régression annoncée puisqu'il n'y a que 16 % de femmes maires.

À cela, s'ajoute un flou dans la rédaction de la loi NOTRe du 17 août 2015, concernant les communes de 1 000 habitants et plus, qui devaient réélire en décembre dernier leurs conseillers communautaires en cas de changement de périmètre. La loi prévoit bien des listes paritaires quand le nombre de conseillers augmente, mais pas quand il diminue. L'esprit de la loi demeure, mais nombreux sont ceux qui se sont engouffrés dans la brèche.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

En effet.

Le cabinet d'une maire nous a transmis une lettre du préfet du Val-d'Oise indiquant que la parité n'était pas obligatoire dans ces listes puisqu'elle n'était pas inscrite dans la loi.

Je peux citer l'exemple d'un maire qui a écrit, en préparant la délibération, que la parité n'était pas obligatoire, et qui a déclaré qu'il n'y aurait que des hommes. Nous avons vivement réagi, nous sommes allées jusqu'à la commission des lois, et il n'a pas osé aller jusqu'au bout : il a fini par faire une liste paritaire.

Nous avons envoyé une lettre à tous les préfets et préfètes pour leur demander de veiller à la parité. Nous n'avons eu qu'une seule réponse vraiment positive, toujours du côté de la Bretagne, en Loire-Atlantique, qui est vraiment vertueuse dans ce domaine. Le préfet nous a assuré qu'il allait veiller à la parité dans les six fusions à venir. Les autres nous ont simplement répondu qu'ils connaissaient la loi.

Nous avons également, fin novembre, lancé un appel aux maires et aux présidents des intercommunalités qui vont fusionner afin qu'ils respectent la parité dans les listes pour toutes les communes de plus de 1 000 habitants et qu'ils élisent des vice-présidentes dans les exécutifs.

Nous considérons que le fléchage n'est qu'une première étape. En 2020, nous devrions pouvoir changer de mode de scrutin, s'agissant d'assemblées qui vont avoir de plus en plus de compétences qui touchent au quotidien des personnes et qui englobent nombre de compétences auparavant dédiées aux communes. Ce sont des organismes de plus en plus importants.

Au train auquel évolue la proportion de femmes maires – leur nombre augmente de 2 % tous les six ans –, on ne peut guère s'attendre à une féminisation « naturelle » des assemblées communautaires. Il faudrait mettre en place un scrutin intercommunal indépendant des élections municipales. Cette solution avait été envisagée sous la forme d'un scrutin de liste proportionnel avec prime majoritaire, lors de la préparation du projet de loi de 2013. Ce mode de scrutin a réapparu au cours des débats relatifs à la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », dans un amendement soutenu par Mme Nathalie Appéré. Adopté par l'Assemblée nationale et rejeté par le Sénat, cet amendement, contre lequel les maires étaient vent debout, n'a pas été retenu par la commission mixte paritaire.

Nous pensons que la réforme territoriale constitue une opportunité pour développer d'autres modes de gouvernance et de travail pour les élus municipaux et communautaires, qui feraient respirer la vie politique locale et donneraient l'occasion de redistribuer les responsabilités, de déléguer, de travailler collectivement avec les moyens modernes d'échange, d'intégrer plus volontairement des conseillers municipaux aux commissions intercommunales, de favoriser la concertation…

Nous proposons d'instituer un système d'élection au suffrage universel direct sur liste paritaire pour les intercommunalités autour d'un projet réellement communautaire et non municipal, de manière à respecter l'exigence de parité dans les conseils communautaires et les exécutifs, et l'articulation de la gouvernance des communes avec celle de la communauté.

Nous souhaitons aussi que soit mis en place le non-cumul des mandats exécutifs : les membres de l'exécutif communautaire ne devraient pas appartenir à l'exécutif communal. En effet, le double mandat décisionnel peut faire hésiter les femmes. L'exercice de deux mandats exécutifs constitue souvent un frein pour elles : nous en avons rencontré qui avaient refusé une vice-présidence d'intercommunalité parce qu'elles exerçaient déjà des responsabilités dans leur commune.

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Je ne partage pas cette position Aujourd'hui, nos concitoyens ne connaissent pas bien les intercommunalités alors qu'ils sont parfaitement informés du rôle des mairies. On répète même sur le terrain que les mairies sont les « entrées » des intercommunalités. Si vous créez deux instances exécutives totalement séparées, il y aura une concurrence entre des blocs qui s'affronteront pour revendiquer leurs résultats respectifs, car c'est comme cela que l'on se fait réélire. Avec un trop grand nombre d'échelons, trop de logiques différentes joueraient, et les uns et les autres se heurteraient. Je sais que mon propre parti est favorable à l'élection directe des intercommunalités. Si l'on en arrive là, alors il faudrait fusionner les communes.

L'intercommunalité ne fonctionne selon moi que si l'on travaille ensemble et que l'on assume sa responsabilité au sein de la communauté. On entend souvent les mairies se défausser à tort sur l'intercommunalité, comme les pays membres de l'Union européenne le font parfois avec Bruxelles. L'intercommunalité, c'est comme l'Europe : chaque commune membre participe à la décision commune, même si sa position d'origine n'a finalement pas été majoritaire.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

On voit de tout : l'intercommunalité à laquelle appartient la commune dans laquelle j'habite a refusé que les maires d'opposition accèdent aux postes de vice-présidents, et l'audit financier effectué avec les fonds publics ne leur a pas été communiqué !

Vous parliez de fusions : nous connaissons le cas d'une intercommunalité, en Bretagne, dont toutes les communes ont fusionné. Cela dit, dans les faits, comme Mme Estelle Grelier, la secrétaire d'État chargée des collectivités territoriales, nous l'a confirmé, ce sont les hommes et non les femmes qui deviennent maires des « nouvelles communes » issues des fusions.

En tout état de cause, il faut relancer la discussion. En 2020, nous ne pourrons pas nous contenter du fléchage ! Il semble que, pour les scrutins relatifs à certaines métropoles, la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, dite « loi MAPTAM », a introduit une part de suffrage universel direct en mettant en place un double collège à partir de 2020.

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Votre étude montre clairement que la parité a fortement progressé dans de nombreuses assemblées. Le nombre de femmes élues est désormais beaucoup plus élevé. L'argument selon lequel il n'existait pas de vivier tombe de lui-même : contrairement à ce que l'on nous disait, on a trouvé des femmes pour se présenter.

Un problème continue néanmoins de se poser s'agissant des intercommunalités. Nous avons cherché une solution, mais nous n'avons pas réussi à en trouver une qui soit satisfaisante.

Il nous faudra aussi franchir une étape supplémentaire en travaillant sur l'exécutif, les présidences et les têtes de liste. Il est toutefois difficile d'imposer des règles sur ce dernier sujet.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

C'est la raison pour laquelle nous misons sur les partis et leur commission d'investiture.

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Honnêtement, les partis politiques ne désignent pas les têtes de liste de 36 000 communes françaises !

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Pour les communes de plus de 20 000 habitants, ils peuvent décider d'écarter les femmes en suscitant des listes dissidentes : j'ai connu des situations de ce type.

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La majorité des communes de France sont des petites communes avec des listes d'intérêt communal. J'étais favorable, comme vous, à la mise en oeuvre de la parité pour toutes les communes, mais nous ne sommes même pas parvenus à nos fins pour celles comptant 500 à 1 000 habitants. On nous répétait que l'on ne trouverait pas de candidates : c'est faux ! Je viens d'entendre un élu, qui tenait il y a peu ce discours, se féliciter publiquement, lors de ses voeux, de la présence des femmes dans son département…

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Les femmes travaillent, cela plaît aux hommes…

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Chères collègues, pour les prochaines élections législatives, disposez-vous d'informations sur ce que décideront vos partis politiques respectifs en matière de parité ?

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

J'ai entendu que Les Républicains présenteraient 40 % de femmes. Ils continueraient donc de payer le même montant de pénalités.

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Du côté du Parti socialiste, je crois qu'il y aura un peu plus de 50 % de candidatures féminines.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Il faut aussi voir dans quelles circonscriptions les femmes sont candidates !

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Pour ce qui concerne les élections sénatoriales, on en revient à la loi du 10 juillet 2000 avec une avancée pour le collège électoral : suite à la réforme de 2013, dix-sept départements sont passés au scrutin de liste. Cela a eu un faible impact sur les résultats de 2014 : on compte seulement dix élues supplémentaires par rapport à 2011.

Nous savons que les « petites listes » sont défavorables aux femmes, car les têtes de liste sont très majoritairement des hommes – ils étaient 78,2 % aux sénatoriales de 2014 –, ce qui entraîne la création de listes dissidentes, le troisième homme voulant être en tête de liste pour avoir plus de chances d'être élu.

Afin de renforcer la parité, nous proposons la généralisation du scrutin de liste sur de grandes circonscriptions, par exemple de la taille des nouvelles régions, associée au non-cumul des mandats. Si elle est appliquée, cette dernière disposition devrait permettre un renouvellement des élus au Sénat.

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Le non-cumul des mandats s'appliquera : pour les élections de 2017, il n'y a pas d'alternative.

Ceux qui veulent revenir sur la réforme pourront évidemment le faire, mais ils légiféreront pour les échéances électorales de 2020. Juridiquement, le délai n'est pas suffisant pour qu'une autre majorité revienne sur le non-cumul avant les élections prévues cette année ; ceux qui disent le contraire ne sont pas réalistes. Les prochains élus à l'Assemblée et au Sénat ne pourront pas exercer les fonctions de maires. Quoi qu'il arrive, pour tous les députés, la prochaine législature sera celle du non-cumul. Je pense qu'il sera ensuite difficile de revenir en arrière.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

M. François Fillon aurait annoncé aujourd'hui qu'il ne reviendrait pas sur cette réforme.

J'en viens à la loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes. L'extension de la parité dans les sphères économiques et sociales constitue une réelle avancée qui participe à la construction d'une culture de la parité dans laquelle femmes et hommes partagent le pouvoir dans toutes les espaces de la société. Il est encore trop tôt pour une évaluation : le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes la mènera en temps voulu. Je crois cependant que vous avez déjà constaté des avancées sur le terrain…

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Nous nous sommes intéressés aux chambres de métiers et aux chambres de commerce. Il faudra aussi se pencher sur la situation des fédérations sportives qui se renouvellent à l'occasion des jeux Olympiques.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

La France a chuté à la soixante-troisième place dans le monde pour le nombre de femmes députées : elle se situe juste derrière l'Irak. Les pénalités financières auxquelles s'exposent les partis ont doublé. Néanmoins, pour notre part, nous n'avons jamais été favorables à ce mode d'incitation financière. Nous trouvons même scandaleux qu'un système donne la possibilité de payer pour ne pas partager le pouvoir avec les femmes.

Les petits partis respectent à peu près la règle des candidatures paritaires, car ils ont besoin du financement de l'État – ils ont aussi peu de sortants –, mais les grands partis, n'hésitent pas, à s'en affranchir et à payer des pénalités. Le parti Les Républicains annonce déjà qu'il ne présentera que 40 % de candidates. De plus, les sortants étant majoritairement des hommes qui se représentent, les femmes sont investies dans des circonscriptions difficiles à remporter. Elles sont, pour la plupart, des candidates de deuxième choix.

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Les femmes sortantes sont trop peu nombreuses, mais lorsqu'elles se représentent, constatez-vous dans vos partis des tentatives du côté des hommes de leur reprendre leur circonscription ?

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À ma connaissance, il n'y a pas de litiges s'agissant des sortantes !

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Lorsqu'une circonscription est réservée aux femmes, les hommes se demandent souvent pourquoi ça tombe sur eux. C'est à ce moment qu'il y a des tentatives de mise en cause.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

On constate par ailleurs que de nombreux hommes jeunes abandonnent la politique pour retourner dans la vie professionnelle : c'est nouveau !

À la mise en place de sanctions financières, nous préférons le changement de mode de scrutin. Nous avons toujours été favorables au scrutin binominal qui donne une parité des résultats. Lors de la table ronde organisée par votre Délégation, le 9 mars 2016, nous avons constaté que, pour la première fois, plusieurs députés se prononçaient pour cette solution s'agissant des élections législatives.

Par ailleurs, la limitation du cumul dans le temps des mandats parlementaires diminuerait la proportion de sortants. Elle permettrait de placer des femmes dans des circonscriptions plus faciles à remporter. Un consensus semble se dégager pour un maximum de trois mandats consécutifs, mais rien n'a encore été fait en la matière.

Nous estimons que le rapport sur les politiques locales d'égalité entre les femmes et les hommes pour les collectivités territoriales de plus 20 000 habitants, prévu par la loi du 4 août 2014, est un bon exercice qui vise à faire réfléchir les collectivités aux politiques d'égalité en leur sein et sur leur territoire. Cela concerne moins de 1 300 collectivités qui rassemblent toutefois un très grand nombre d'habitants. Il s'agit d'un premier pas pour faire prendre conscience des inégalités entre les femmes et les hommes, et réfléchir aux moyens de les combattre en y associant un budget, même si nous sommes encore loin du gender budgeting.

L'application de ce dispositif à partir de début 2016 doit cependant encore être évaluée. Nous sommes plutôt pessimistes. La seule sanction possible semble être l'annulation du vote du budget si le rapport n'est pas présenté – encore faut-il que les groupes d'opposition soient au courant. Le guide du Centre Hubertine Auclert, publié en mai 2016, aurait été envoyé par le service des droits des femmes à toutes les collectivités concernées, y compris en province.

Il faut aussi évoquer la loi du 31 mars 2015 visant à faciliter l'exercice, par les élus locaux, de leur mandat. Elle comporte des mesures en faveur du retour à l'emploi en fin de mandat, qui peuvent inciter les femmes à occuper des postes au sein des exécutifs : droit individuel à la formation, bilan de compétences, et validation des acquis de l'expérience. Nous avons salué cette loi qui allait dans le même sens que la campagne menée par notre réseau dès 2012 pour la reconnaissance des acquis de l'élu local en proposant un droit à un bilan des acquis de ces derniers à l'approche de la fin de mandat. La loi étend certains droits des élus des collectivités de 20 000 habitants et plus à ceux des collectivités de 10 000 habitants et plus. C'est une bonne chose, même si ces droits ne concernent pas la majorité des élus locaux.

Beaucoup d'élus ne bénéficient pas encore d'un parcours sécurisé entre vie politique et vie professionnelle. Cela touche plus particulièrement les femmes. Elles réduisent plus souvent que les hommes leur activité professionnelle pour exercer correctement les responsabilités liées au mandat. Cette situation constitue un frein pour leur engagement politique. De nombreuses adjointes décident de travailler à mi-temps, ce qui réduit drastiquement leur retraite.

L'inégal accès à la vie publique est aussi lié aux inégalités entre femmes et hommes dans le monde économique. On reproche souvent aux femmes de ne pas s'engager, mais ont-elles les mêmes facilités que les hommes pour le faire ? Comment concilier engagement électoral, travail et famille quand la situation financière et l'emploi sont plus précaires pour les femmes que pour les hommes ?

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Vous avez raison : sur le terrain, on constate que les femmes prennent plus souvent que les hommes un mi-temps professionnel lorsqu'elles deviennent adjointes. Est-ce, selon vous, parce qu'elles sont déjà astreintes à des « doubles journées » et qu'elles doivent, davantage que les hommes, concilier vie professionnelle et personnelle ?

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Les femmes s'imposent d'abord des freins à elles-mêmes. Elles hésitent à s'engager lorsqu'elles ont des responsabilités professionnelles. Elles demandent systématiquement le soutien de leur famille, conjoint et enfants, ce que les hommes ne font pas. Ensuite, parce qu'elles sont toujours confrontées à un procès en incompétence, elles doivent, plus que les hommes, prouver leurs qualités. Cela les amène à travailler davantage leurs dossiers, ce qui explique qu'elles aient besoin de demander des mi-temps. Il n'y a pas d'études sur le sujet, et je ne sais pas si vous l'avez constaté, mais je me demande si le taux de divorce des femmes engagées dans la vie politique n'est pas supérieur à la moyenne…

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Nous ne mettrons peut-être pas cet argument en avant pour attirer les femmes vers la politique !

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Tant que les salaires des femmes seront inférieurs de 20 % à ceux des hommes, ce sont toujours elles qui prendront un temps partiel pour exercer un mandat.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Quoi qu'il en soit, l'implication dans un mandat local représente une charge considérable.

Nous sommes très heureuses que Mme Laurence Rossignol, ministre de la famille, de l'enfance et des droits des femmes, ait lancé un plan contre le sexisme dont l'impact est bien réel. Il suffit de voir l'écho qu'il recueille sur les réseaux sociaux.

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Le site recueillant les remarques sexistes à l'université est impressionnant. Des étudiantes rapportent ce qu'elles ont entendu. Ces propos témoignent d'un immense mépris : « On n'a pas besoin de femmes ingénieurs ! » « Les femmes sont nettement moins intelligentes ! »

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

« Elles font Sciences Po pour trouver un mari ! » « Elles n'ont pas besoin de savoir compter sinon pour faire le marché ! ». La parole des victimes se libère pour dénoncer le machisme et le sexisme.

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France 5 a diffusé un reportage passionnant sur le harcèlement sexuel au travail : les témoignages montrent la difficulté de prouver les faits. Ils montrent surtout les dégâts psychologiques et physiques considérables que provoque le harcèlement sur le très long terme, bien après qu'il a pris fin. Dans la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, dite « loi travail », nous avons assoupli le régime de la preuve dans le milieu professionnel. Mme Marylin Baldeck, déléguée générale de l'Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) m'a confirmé qu'il était encore trop tôt pour constater les effets de cette mesure. J'espère qu'elle permettra aux femmes d'obtenir des condamnations : elles ont besoin de cette reconnaissance des faits pour se reconstruire.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Aujourd'hui, les procédures sont interminables, et la parole des femmes est toujours mise en doute.

Nous saluons le fait que le soixante-dixième anniversaire du premier vote des femmes ait été célébré, en particulier par l'Assemblée nationale. Les premières femmes députées ont aussi été « rendues visibles », et le buste d'Olympe de Gouges trône maintenant au Palais Bourbon.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Tout cela donne de la visibilité aux femmes : c'est très positif !

Les choses évoluent, mais lors des dernières élections départementales j'ai encore vu des affiches faisant le bilan détaillé des expériences et du savoir-faire des candidats masculins alors que celles des candidates défendaient le simple fait qu'elles étaient « compétentes », sans autres précisions – comme s'il y avait un doute sur ce sujet –, tout en ajoutant qu'elles « participaient au bien-être de la population » !

Nous pensons qu'il faudra approfondir le travail de révision de la Constitution déjà entrepris. Le principe de parité a rencontré et rencontre encore de très fortes résistances. Il a donné lieu à de multiples manoeuvres de contournement. Actuellement, selon l'article 1er de la Constitution, la République « assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion » et « la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales ». Le socle philosophique de notre Constitution, en omettant la distinction de sexe et en éludant l'exigence de parité, pose donc les limites du travail législatif. Il serait temps de réviser ces dispositions pour y inscrire l'exigence de parité, et demander à la loi de « garantir », plutôt que de « favoriser », l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. J'ai bien conscience qu'il s'agit d'une proposition ambitieuse, mais rien n'empêche de rêver.

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Nous sommes d'accord pour que cela soit inscrit dès qu'une révision constitutionnelle sera mise en oeuvre !

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Nous remercions votre délégation pour tout le travail accompli pendant cette législature. Il y a eu des avancées réelles. Nous espérons qu'elles ne seront pas remises en cause mais, au contraire, améliorées lors de la prochaine législature.

Pour l'avenir, nous estimons qu'il faut travailler sur la parité dans les intercommunalités avant 2019 pour être prêts en 2020. Le déficit de têtes de liste féminines constitue l'autre point majeur sur lequel nous devons oeuvrer. Nous attendons également des changements en ce qui concerne les modes de scrutin pour la présence des femmes au Parlement.

Vous nous l'avez confirmé, madame la présidente, la loi sur le non-cumul des parlementaires sera appliquée dès 2017 ; nous espérons que la législation portera demain aussi sur la limitation du cumul des mandats dans le temps.

Nous resterons vigilantes et nous continuerons à jouer notre rôle de force de propositions. Nous poursuivrons également notre travail sur les intercommunalités.

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Nous vous remercions pour les travaux longs et complexes que vous avez effectués. Je me souviens avoir tenté de dénombrer les femmes et les hommes élus dans mon département : à l'époque, la préfecture refusait de nous dire si ceux qui se prénommaient Claude ou Dominique étaient des hommes ou des femmes. Nous avons progressé depuis. Généralement, nous constatons partout une présence des femmes accrue dans la vie politique française malgré les freins que vous décrivez.

Cela dit, j'assistais, il y a quelques jours, à des voeux lors desquels un gendarme m'a montré un encart publicitaire pour une formation prévue en mars 2017 représentant une petite fille avec un texte ainsi rédigé : « Osez réaliser vos rêves, devenez auxiliaire de ménage ! »

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Les associations se sont insurgées, et cette publicité a été retirée !

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Sur les réseaux sociaux circulent en ce moment les propos d'un journaliste, éditorialiste dans un hebdomadaire, selon lequel l'égalité salariale entre les hommes et les femmes aurait pour conséquence de couler l'économie française.

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Les étudiantes dont nous parlions rapportent qu'un professeur d'économie estime que le niveau du chômage en France s'explique par le nombre de femmes en emploi.

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Lorsque nous avons proposé une loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel, on nous a aussi expliqué que cela aggraverait le chômage !

Madame Danet, nous vous remercions de nous avoir fourni des données sur la parité dans les intercommunalités. Il est clair qu'il y a un problème, et que nous devons travailler pour améliorer les choses. Peut-être serait-il intéressant de voir ce qui se passe ailleurs, même si je crains que les structures similaires n'existent pas vraiment à l'étranger ?

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Nous avions cherché une solution, mais nous n'avions rien trouvé. À l'étranger, il n'y a pas souvent ce type de structure élue au second degré. La seule solution pour favoriser la parité consisterait à mettre en place une élection directe, même si je suis réticente à l'idée de faire coexister deux structures élues de la même manière.

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Peut-être faut-il supprimer les départements en laissant subsister les deux pôles essentiels de la réforme territoriale que sont les régions, d'une part, et le bloc communal et intercommunal, d'autre part ?

Pour conclure par une anecdote, une élue m'a raconté qu'elle avait demandé récemment à des élèves d'une école primaire qui visitaient une mairie s'ils savaient ce que représentait la statue figurant Marianne. « La sainte vierge » s'est-elle entendue répondre ! Même s'il s'agissait d'élèves d'une école catholique, disons qu'il reste du travail à faire en éducation civique !

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Anecdote pour anecdote, une dame d'un certain âge, fort sympathique, s'est adressée à moi pour me parler d'un problème de voisinage. Je l'ai invitée à évoquer le sujet avec le maire de sa commune, qui se trouvait dans la salle. Elle m'a alors répondu : « Non, lui, je ne vais pas le déranger pour ça ! » Cela en dit long sur la place des femmes en politique !

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Armelle Danet, coprésidente de l'association « Elles aussi, pour la parité dans les instances élues »

Nous présenterons notre étude sur les intercommunalités dans plusieurs départements. Nous l'avons déjà fait en Indre-et-Loire, je crois aussi que nous irons en Haute-Savoie. Cela peut avoir un impact auprès des élus locaux et de la presse locale.

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Madame Danet, nous vous remercions pour la présentation de vos travaux et de vos réflexions.

La séance est levée à 18 heures 20.