COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Mardi 1er octobre 2013
(Présidence de M. Jean-Pierre Door, doyen d'âge, puis de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)
La séance est ouverte à onze heures cinq.
(Présidence de M. Jean-Pierre Door, président d'âge)
La Commission procède d'abord au renouvellement de son bureau.
Outre le président d'âge, le bureau d'âge est constitué des deux plus jeunes commissaires, à savoir M. Laurent Marcangeli et Mme Fanélie Carrey-Conte.
– Nomination du président
La Commission est saisie de la candidature de Mme Catherine Lemorton pour le groupe SRC.
Le nombre de candidats n'étant pas supérieur au nombre de sièges à pourvoir, Mme Catherine Lemorton est proclamée présidente de la Commission, conformément à l'article 39, alinéa 4, du Règlement.
(Présidence de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)
Je vous remercie de me renouveler votre confiance. J'ai pris grand plaisir à présider les travaux de notre Commission depuis un an, même si cela n'a pas toujours été facile et si nous avons beaucoup travaillé. Je remercie chacun de vous de participer activement aux travaux de la Commission. Il y règne, me semble-t-il, une ambiance agréable, ce qui n'empêche pas que chacun y défende ses convictions.
– Nomination des vice-présidents
La Commission est saisie des candidatures de Mme Martine Carrillon-Couvreur, de MM. Jean-Patrick Gille et Christian Hutin pour le groupe SRC, et de M. Jean-Pierre Door pour le groupe UMP.
Je vous félicite pour votre brillante réélection, madame la présidente. J'espère que vous saurez conserver leur qualité à nos débats dans un contexte devenu difficile.
Aux termes de l'article 39 du Règlement, « la composition du bureau de chaque commission s'efforce de reproduire la configuration politique de l'Assemblée et d'assurer la représentation de toutes ses composantes. » Pourtant, seuls deux des six groupes parlementaires que compte notre Assemblée – le groupe UMP et le groupe SRC – devraient siéger au bureau de notre Commission. C'est d'autant plus regrettable que d'autres commissions font une place aux groupes minoritaires dans leur bureau, et que vous les associez vous-même, par l'intermédiaire des responsables de groupe, aux réunions du nôtre. Pourquoi ne pas aller jusqu'au bout de la démarche ? La plupart des groupes considèrent d'ailleurs qu'à terme, tous devraient être représentés au sein des bureaux des commissions.
Vous n'êtes pas le seul à exprimer ce désir. Le groupe RRDP souhaite également être représenté au bureau et le groupe écologiste avait fait la même demande l'an dernier. Cependant, l'équilibre évoqué par l'article 39 est un équilibre global : il n'est pas dit que dans chaque commission, le bureau doive comporter un représentant de chaque groupe. Au surplus, aucune commission n'a pris le risque que la majorité puisse un jour se retrouver minoritaire au sein du bureau.
Cela étant, le fait que seuls deux groupes soient représentés au bureau ne semble pas poser problème pour l'organisation des travaux de la Commission. Nous avons ainsi porté de quatre à six membres la composition de la mission d'information que nous avons créée au mois de juin sur la mise en oeuvre de la loi portant création des emplois d'avenir – ce qui vous a permis d'y trouver place vous-même. Le plus important n'est pas de siéger au bureau, mais de travailler ensemble et des décisions sont prises en ce sens. Ainsi, encore, sera bientôt créée la mission d'information sur les caisses d'allocations familiales demandée par votre groupe, qui y disposera d'un poste de président ou de rapporteur. Vous pouvez donc constater que le fait que tous les groupes ne soient pas représentés au bureau n'est pas préjudiciable à la démocratie.
Vos arguments sont légitimes, madame la présidente. Néanmoins, il faut veiller à ce que la diversité représentée à l'Assemblée nationale puisse s'exprimer à tous les niveaux, y compris celui des bureaux des commissions. Nous aurons l'occasion d'en reparler dans le cadre des réflexions en cours sur le fonctionnement de notre Assemblée. Nous avons fait le choix de fixer à quinze membres le seuil requis pour constituer un groupe politique. Chacun de ceux-ci a des droits : il faut qu'ils soient respectés.
Quant aux méthodes de travail, je prends acte de vos intentions. Le groupe RRDP souhaite également la création de missions d'information et il espère avoir satisfaction lui aussi.
Permettez-moi de faire observer que lors des discussions générales de textes de lois, le temps de parole des orateurs des groupes dans notre Commission ne dépend pas de leur poids relatif au sein de notre Assemblée : il est fixé à cinq minutes pour chacun, ce qui est déjà une entorse à la stricte application du principe de proportionnalité.
Le nombre des candidats n'étant pas supérieur au nombre des sièges à pourvoir, Mme Martine Carrillon-Couvreur et MM. Jean-Pierre Door, Jean-Patrick Gille et Christian Hutin sont élus vice-présidents de la Commission, conformément à l'article 39, alinéa 4, du Règlement.
– Nomination des secrétaires
La Commission est saisie des candidatures de Mmes Gisèle Biémouret et Martine Pinville et de M. Jean-Louis Touraine pour le groupe SRC et de M. Bernard Perrut pour le groupe UMP.
Le nombre des candidats n'étant pas supérieur au nombre des sièges à pourvoir, ils sont élus secrétaires de la Commission, conformément à l'article 39, alinéa 4, du Règlement.
Le bureau de la Commission est donc ainsi constitué :
Présidente : Mme Catherine Lemorton
Vice-présidents : Mme Martine Carrillon-Couvreur
M. Jean-Pierre Door
M. Jean-Patrick Gille
M. Christian Hutin
Secrétaires : Mme Gisèle Biémouret
M. Bernard Perrut
Mme Martine Pinville
M. Jean-Louis Touraine
Puis la Commission poursuit, sur le rapport de M. Michel Issindou, l'examen des articles du projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites (n° 1376).
Article 3 : Mécanisme de pilotage du système de retraite
La Commission examine les amendements AS 88 de M. Arnaud Robinet, AS 240 de Mme Jacqueline Fraysse et AS 331 de M. Dominique Tian, tendant à la suppression de l'article.
Au lieu de tirer le meilleur parti de celles qui existent déjà, cet article crée une nouvelle instance consultative dont rien ne justifie l'existence, le comité de surveillance des retraites dont la composition est en outre incomplète : elle devrait au moins faire une place aux représentants des régimes de retraite.
Mieux vaudrait donner une nouvelle impulsion au comité de pilotage des retraites (COPILOR), qui a le mérite d'associer l'ensemble des acteurs prenant en charge le risque vieillesse – il serait d'ailleurs possible d'élargir dans le même esprit les missions du comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie, actuellement placé auprès de la Commission des comptes de la sécurité sociale, pour ajouter à ses compétences le suivi des dépenses d'assurance vieillesse : il lui reviendrait alors d'alerter le Gouvernement et le Parlement en cas d'évolution défavorable de ces comptes.
Faut-il aussi rappeler qu'en 2010, Mme la ministre s'opposait à la création de toute nouvelle instance de pilotage, pour préserver le Conseil d'orientation des retraites (COR) ?
Le comité de surveillance des retraites qu'il nous est proposé de créer par cet article 3 sera une instance très technocratique : constitué d'experts nommés par le Gouvernement et dont l'indépendance sera donc toute relative, il sera principalement chargé d'édicter des recommandations à caractère technique en vue d'assurer ce que vous appelez la pérennité financière du système. Mais cette pérennité dépend en réalité de choix politiques, portant sur la durée d'assurance, sur le niveau des cotisations et sur le taux de remplacement. Aussi demandons-nous la suppression de cet article : nous disposons déjà de tous les outils utiles pour réfléchir à l'avenir des retraites et pour proposer le cas échéant des modifications du système.
Mon amendement est identique. Je reprends à mon compte les arguments développés par M. Robinet.
Le COPILOR a eu une existence éphémère si tant est qu'il ait existé : institué par la loi de 2010, il ne s'est réuni qu'une seule fois – en 2011 – et n'a rendu aucun avis. Je m'étonne donc que vous défendiez une instance que vous n'avez pas su ou pas voulu faire vivre.
Il faut dire que sa composition avait l'inconvénient de reproduire à peu de chose près celle du COR. Celle du comité de surveillance des retraites sera plus restreinte puisqu'il ne comprendra que des experts, à la différence du COR où siègent en outre, parmi ses 39 membres, des représentants des organisations de salariés et d'employeurs aussi bien que de l'administration. De plus, ce comité n'aura pas vocation à animer le débat. Même si celle des experts n'est pas toujours assurée, il jouira ainsi d'une indépendance lui permettant de se situer « au-dessus de la mêlée » et de porter un regard objectif sur la situation. Je suis donc défavorable à ces amendements de suppression.
Cet article n'est ni plus ni moins qu'une mesure de « détricotage » de la loi de 2010. On remplace un comité par un autre, alors qu'il serait bien plus simple d'élargir les missions de celui qui est déjà en place !
La création de ce comité de surveillance va-t-elle au moins de pair avec la suppression d'autres instances ? Nous avons trop tendance à multiplier les nouvelles structures sans supprimer celles qu'elles remplacent.
Le Premier ministre a réuni cet été tous les membres du Gouvernement pour un nouveau comité interministériel consacré à la modernisation de l'action publique, dont l'objectif était de simplifier en vue de faire des économies. En décembre 2012, il avait annoncé la suppression de cent commissions administratives jugées inutiles. Bref, il prétendait « faire le ménage » dans le maquis des commissions, comités consultatifs et autres conseils stratégiques. La création du comité de surveillance va au rebours de ce discours !
J'avoue d'autre part ne pas comprendre la position du rapporteur, qui s'est opposé hier à un amendement qui proposait de mener une réflexion nationale sur un certain nombre de sujets allant des conditions d'une plus grande équité à la mise en place d'un régime universel ou encore à la facilitation du libre choix des assurés, réflexion qui aurait été portée par le COPILOR.
Je siège au COR depuis sa création et j'ai siégé au COPILOR. En cette ère de la simplification, je pense sincèrement que la proposition de M. Robinet – qui consiste à donner de nouvelles prérogatives aux instances existantes – est la meilleure.
Comme l'a dit M. Accoyer, nous ne cessons de créer des autorités et des commissions en tout genre. Il m'avait pourtant semblé que l'on nous avait annoncé un choc de simplification. La session ordinaire commence mal !
Le COR n'a pas vocation à rendre des arbitrages : sa mission est de poser un diagnostic. Les syndicats qui y siègent nous ont dit clairement qu'ils ne souhaitaient pas sortir de ce rôle pour prendre des décisions. C'est d'ailleurs pour cela que cette instance fonctionne bien.
Quant au COPILOR, il n'existe tout simplement pas ! Nous allons donc le remplacer par un comité de surveillance beaucoup plus réduit puisqu'il ne comportera que cinq membres, qui s'appuieront sur les travaux du COR ou de la direction de la sécurité sociale pour donner un avis – car il ne s'agit que d'un avis, madame Fraysse, et il serait tout de même dommage de se priver de l'expertise dont nous disposons dans notre pays. Cet avis pourra être suivi de recommandations, mais l'État gardera son pouvoir de décision. Il n'y a donc pas lieu de redouter la création de ce comité.
Encore une fois, le COPILOR n'a pas fonctionné : il ne s'est réuni qu'une seule fois en trois ans.
Je suis surpris que l'opposition s'acharne à refuser tout pilotage. Si vous aviez fait une vraie réforme des retraites au lieu de vous contenter d'une adaptation financière de court terme qui révèle aujourd'hui son insuffisance, vous auriez certainement souhaité disposer d'une instance de suivi à même d'éclairer par ses conseils le Gouvernement et le Parlement sur l'ensemble des éléments et des paramètres à prendre en compte pour une saine gestion du système de retraites. C'est justement ce à quoi tend cet article. Il est légitime de poser la question de la place des « sages » dans une démocratie mais, en l'occurrence, le dernier mot reviendra au Parlement. N'ayez donc pas peur du pilotage !
Nous ne supprimons pas seulement le COPILOR, mais aussi la commission de garantie des retraites, et cela pour créer une instance plus modeste. Il y a donc bien simplification !
La Commission rejette les amendements de suppression.
Puis elle examine, en discussion commune, l'amendement AS 201 de M. Philippe Vigier et les amendements identiques AS 89 de M. Arnaud Robinet et AS 360 de M. Dominique Tian.
Il importe de tailler dans le maquis des agences, commissions, comités consultatifs et autres conseils stratégiques. Pourquoi ne pas renforcer le rôle et les attributions du COR, auteur de deux rapports – l'un en décembre 2012 et l'autre en janvier 2013 – qui ont permis d'alerter la représentation nationale et le Gouvernement sur la nécessité de mesures ? C'est ce que propose notre amendement AS 201, qui vise à supprimer au profit du COR le comité de surveillance que vous créez. Il ne s'agit pas de déposséder le Parlement, mais d'élargir les prérogatives du Conseil d'orientation et de lui assigner pour mission d'éclairer le Gouvernement et la représentation nationale. Cela permettrait de concilier simplification, efficacité et exigence de représentativité.
Comme aime à le rappeler la Garde des Sceaux, la loi doit être respectée. Or celle du 9 novembre 2010, portant réforme des retraites, a fixé à l'année 2013 le début de la réflexion sur les conditions d'une réforme systémique de la prise en charge collective du risque vieillesse, permettant par exemple de passer à un régime par points. Le Gouvernement nous soumet aujourd'hui un nouveau texte au mépris du rendez-vous ainsi fixé. Nos concitoyens attendent pourtant, très légitimement, que nous réduisions le nombre des régimes ainsi que les différences dans les conditions d'acquisition et de liquidation des droits à pension. L'objectif de pérennité financière doit aller de pair avec un objectif d'équité et de transparence des droits acquis. Il est donc indispensable de poursuivre le rapprochement des régimes afin de consolider le pacte social.
Comme il vient d'être dit, le présent projet de loi ne reprend pas les termes de l'engagement de la loi de 2010, qui prévoyait l'organisation d'une réflexion nationale sur les objectifs, les caractéristiques et la possibilité d'une réforme systémique. Il serait pourtant salutaire de réfléchir aux conditions d'une plus grande équité entre les régimes de retraite légalement obligatoires, à la mise en place d'un régime universel, par points ou en comptes notionnels, dans le respect du principe de répartition au coeur du pacte social qui unit les générations, et enfin aux moyens de faciliter le libre choix par les assurés du moment et des conditions de leur cessation d'activité. Le texte aurait dû nous permettre d'avancer dans cette direction.
L'amendement de M. Vigier est d'autant plus pertinent que le maintien du COR a toujours fait l'objet de votes unanimes en commission des affaires sociales. Le renforcement de son rôle serait la solution la plus judicieuse.
Je note avec amusement que l'exposé sommaire de l'amendement de M. Robinet parle à propos de ce texte de « nouvelle réforme », alors que l'opposition n'a de cesse de lui dénier cette qualité. Oui, il s'agit bien d'une véritable réforme, qui se fonde sur un souci d'équité – contrairement à celle qui l'a précédée, qui ne prenait en compte que l'invalidité, et non la pénibilité.
Enfin, je fais observer que le COR ne disparaît pas, ce qui nous permet de lui adjoindre un dispositif qui le complétera utilement.
Ne rouvrons pas le débat d'hier soir. Pour l'heure, nous avons le souci de rétablir les comptes et de procéder à une réforme juste et équitable. La réforme systémique viendra en son temps.
Laissons donc au COR, qui la remplit parfaitement aujourd'hui, sa mission qui est de poser un diagnostic, de dresser un état des lieux. Encore une fois, ses membres ne veulent pas prendre de décisions. Sa composition suffirait d'ailleurs à l'interdire, les syndicats ne souhaitant pas négocier la réforme des retraites. Le comité de surveillance remplira une autre mission, complémentaire en effet.
L'article 3 assigne au comité de surveillance des retraites un quadruple rôle : un rôle de communication, un rôle d'information sur l'évolution du système, un rôle d'analyse – par exemple de la situation comparée des hommes et des femmes – et un rôle d'avis. Mais il ne va pas jusqu'au bout. Pourquoi ne pas conduire une réflexion plus globale, qui serait bien nécessaire pour assurer l'avenir de notre système de retraites ? Il est regrettable que ce ne soit pas le cas.
La Commission rejette successivement l'amendement AS 201 et les amendements identiques AS 89 et AS 360.
Elle est saisie de l'amendement AS 399 du rapporteur.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS 199 de M. Francis Vercamer.
Jean-Luc Préel, qui fut longtemps un membre très actif de notre Commission, proposait à chaque réforme des retraites de mettre en oeuvre un régime universel par points. Avec cet amendement, nous nous inscrivons dans la continuité de cette démarche et je suis heureux de voir le groupe UMP nous rejoindre, après avoir accepté, en 2010, notre amendement visant à engager la réflexion sur une réforme systémique. J'espère qu'un jour la majorité se ralliera à son tour à cette position !
Notre amendement propose d'aller un peu plus loin que la loi de 2010, en chargeant le COR de réfléchir aux « conditions de mise en oeuvre d'un régime universel à points ou à compte notionnel ».
Le COR a émis en 2010 un avis sur les différents systèmes de la sorte existant en Europe. Il a donc fait son travail d'expertise et de diagnostic. Il appartiendra au politique de se prononcer un jour – mais certainement pas dans l'immédiat. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
La Commission en vient à l'amendement AS 40 de M. Gérard Cherpion.
Nous avons déjà dans notre pays environ 700 commissions, comités, observatoires ou hauts conseils : on peut donc s'interroger sur l'opportunité de créer ce comité de surveillance des retraites. Nous préférerions que les missions que vous voulez lui confier le soient plutôt au COR, qui est « un lieu permanent d'études et de concertation entre les principaux acteurs du champ des retraites ». Nous proposons donc de supprimer les alinéas 3 à 28.
Je répète que le COR ne peut être une instance de proposition. Laissons-le faire ce qu'il sait bien faire : diagnostics et état des lieux. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements AS 485 de la commission des finances et AS 282 et AS 283 de M. Gérard Sebaoun.
L'amendement AS 485 tend à faire du comité de surveillance un « conseil d'évaluation et d'orientation stratégique ». Cet organisme aura en effet pour mission de suivre l'évolution financière de l'ensemble des régimes ainsi que l'évolution des inégalités et des dispositifs, et il aura à suggérer des orientations.
Mes amendements visent à faire de cette instance un « comité de suivi », plutôt que de surveillance. Ce dernier terme suggère en effet, assez souvent, une notion d'activité secrète : on parle de télésurveillance, de vidéosurveillance, de surveillance électronique. La dénomination proposée est plus simple et correspond bien aux missions confiées au comité : suivre les régimes de retraite en s'aidant de toutes les compétences nécessaires, afin de formuler les meilleures propositions possibles.
Je suis surpris par ces amendements : les compétences évoquées se superposent à certaines de celles du COR, ce qui pourrait annoncer le début de la fin pour ce dernier !
Je voterai en faveur des amendements de M. Sebaoun, qui me paraissent emporter la conviction.
Merci de ce prompt renfort !
On peut partager certains attendus du rapporteur pour avis, mais la dénomination de comité de suivi nous paraît à la fois nécessaire et suffisante.
Je trouve l'amendement du rapporteur pour avis très intéressant, car il va dans le sens d'une rationalisation des comités et conseils. Il conduira en effet nécessairement à un moment donné à la mort du COR.
Je ne peux retirer cet amendement, qui a été adopté par la commission des finances, mais, ayant entendu M. Paul, je me rallie à titre personnel à la proposition de M. Sebaoun.
Nous soutiendrons l'amendement du rapporteur pour avis, qui nous semble aller dans le bon sens. Il faut mettre un terme à cet enchevêtrement de commissions – le comité de pilotage, le comité de surveillance, le COR… Si vous aviez accepté d'élargir les compétences du COR, vous n'en seriez pas maintenant à démêler ce que doit être votre position !
Avis défavorable sur l'amendement du rapporteur pour avis, d'autant que lui-même n'y tient pas – et que vous le reprenez à votre compte ! Je suis en revanche favorable aux amendements de M. Sebaoun : l'appellation « comité de suivi » est pertinente.
La Commission rejette l'amendement AS 485, puis adopte successivement les amendements AS 282 et AS 283.
Elle adopte l'amendement AS 400 rédactionnel du rapporteur.
On finirait presque par prendre les habitudes qui étaient les vôtres quand vous étiez dans la majorité !
L'adoption de l'amendement AS 400 a pour effet de faire tomber les amendements AS 129 de M. Jean-Noël Carpentier et AS 41 rectifié de M. Gérard Cherpion.
L'adoption de l'amendement AS 400 prive le vôtre, ainsi que celui de M. Cherpion, de tout support. Je note en outre qu'à la place des mots « quatre personnalités », supprimés, vous souhaitiez écrire : « huit personnalités »…
D'autre part, le décret d'application précisera les conditions de mise en oeuvre de cette disposition.
Je proposais un amendement de fond. Le comité de suivi sera amené à faire des recommandations. Or vous avez reconnu tout à l'heure, monsieur le rapporteur, que les experts n'étaient pas toujours indépendants : intégrons donc dans sa composition des membres de la représentation nationale ! Cela me paraît d'autant plus judicieux que, selon votre rapport, ces recommandations « s'imposeront (…) comme un élément essentiel du débat public ».
En effet. De plus, on ne peut prétendre instituer un comité d'experts indépendants et nommer en son sein des politiques.
Je ne pense pas que l'amendement de M. Carpentier tombe ; il tend à améliorer la rédaction proposée par le rapporteur.
Je suis d'autre part choqué qu'on laisse entendre que nous ne serions ni experts ni indépendants : certains députés sont au moins autant experts que les experts attitrés et ils sont totalement indépendants ! L'amendement a tout son sens.
Ces amendements tendent à regrouper, dans un esprit de consensus, des personnes d'origines différentes – dont, s'agissant du second, une nommée par le président de l'Assemblée nationale et une autre par celui du Sénat. Ils sont parfaitement justifiés.
Le comité de suivi ne doit pas ressembler à une sorte de commission paritaire, où seraient représentés tous nos groupes politiques. Sa neutralité, qui lui est conférée par la présence d'experts indépendants, est la condition pour qu'il fasse les recommandations les plus objectives possibles.
Il faut essayer de s'en tenir à des idées simples et claires et le projet du Gouvernement va d'ailleurs dans ce sens. Le travail de recommandation, de conseil et de suivi doit être mené par des experts, même si je ne crois pas à l'indépendance absolue de ceux-ci. Ce serait une confusion des genres d'ajouter à cette instance des parlementaires, qui sont engagés et font parfois des choix très tranchés – à l'image du dernier ouvrage de M. Robinet, intitulé La mort de l'État-providence, dont je viens de prendre connaissance. Cela étant, le dernier mot doit naturellement revenir au Parlement, comme défenseur de l'intérêt général.
Je précise que mon amendement différait de celui de M. Cherpion, en ce que je ne proposais pas de supprimer les experts du comité, mais d'enrichir leur réflexion grâce à l'adjonction de deux parlementaires de chaque assemblée.
La Commission examine ensuite l'amendement AS 332 de M. Dominique Tian.
Il est choquant de renvoyer à un décret en Conseil d'État le soin de préciser les missions du comité. Je pense que le texte doit affirmer expressément que celui-ci a pour fonction de s'assurer d'une réelle convergence des règles en vigueur dans les régimes de retraite – selon le principe : à contribution égale, retraite égale – ainsi que de l'équilibre financier, à terme, du système de retraite.
Le comité de suivi aura bien évidemment pour mission de suivre l'évolution des retraites dans tous les régimes et de s'assurer des équilibres globaux de ceux-ci, ainsi que de l'équilibre financier à terme du système de retraite. Cela fait partie de ses attributions et il est inutile d'en rajouter.
Je ne vous comprends pas : en quoi est-il gênant de préciser que ce comité s'assure de l'équilibre financier du système ? Vous dites qu'il ne faut pas retirer au Parlement ses prérogatives : or il nous revient de faire en sorte que cet organe soit exigeant dans son travail et rende des comptes à la représentation nationale.
La définition des missions du comité, qui est l'élément le plus important, doit être précisée par le projet de loi. Renvoyer à un décret en Conseil d'État le soin de le faire ne me paraît pas pertinent, surtout quand on connaît les délais de publication de ces textes réglementaires.
La Commission rejette l'amendement AS 332.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS 401 du rapporteur.
Elle en vient à l'amendement AS 284 de Mme Linda Gourjade.
Cet amendement tend à rappeler la mission première du Conseil d'orientation des retraites, qui est notamment de prendre en considération les évolutions économiques dans ses projections financières.
Avis favorable. Cette précision a tout son sens, le comité de suivi devant s'appuyer sur les perspectives financières et démographiques présentées par le COR.
Cet amendement va « détricoter » le COR, instance de réflexion produisant à la fois des analyses et des suggestions qu'il convient de conserver comme telle. On aura finalement deux organismes qui se ressembleront et le comité de suivi semble créé pour faire plaisir à certains ou pour y placer ceux qui n'ont pu trouver place au Conseil d'orientation !
Monsieur Jacquat, vous connaissez bien le COR pour y avoir siégé quelques années, comme moi d'ailleurs – pendant près de dix ans. Il s'agit d'un organe ayant pour mission d'établir un diagnostic partagé, et où siègent des représentants des partenaires sociaux et des caisses, ainsi que des experts. Il rend un rapport annuel et des rapports intermédiaires, mais jamais on ne lui a demandé des recommandations – à une exception près : en 2010, vos amis de l'ancienne majorité l'ont sollicité pour qu'il formule des orientations pour une réforme, mais il s'y est refusé à l'unanimité, son directeur faisant valoir que cette instance n'avait pas vocation à se substituer à l'Assemblée nationale ou au Gouvernement. Il doit rester tel que l'a créé Lionel Jospin : un lieu de débat ouvert, à partir des données fournies par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), par l'INSEE ou par tout autre organisme.
Quant au comité de suivi, il sera composé de représentants des caisses et aura pour mission de nous éclairer sur les problématiques financières et sur les paramètres à prendre en compte en matière d'espérance de vie et d'équilibres financiers, ainsi que de faire des propositions. Ces deux structures sont donc bien distinctes : le pire serait de laisser croire qu'elles ont la même vocation. Et, de la même manière que vous avez salué la création du COR, je suis convaincu que dans quelques années, vous saluerez celle du comité de suivi !
Monsieur le rapporteur pour avis, il est vrai que le COR a été sollicité pour qu'il se prononce sur la demi-part accordée aux veuves, mais le Gouvernement lui a également adressé l'année dernière, en vue de préparer le présent projet, une double commande pour faire le point sur la situation des retraites – ce dont personne ne s'est plaint. Les missions du COR peuvent donc très bien être élargies. Nous n'y sommes d'ailleurs pas opposés, mais nous refusons la création d'une nouvelle instance.
Je suis en désaccord avec vous. Cet amendement renforce le COR puisqu'il permet au comité de suivi de s'appuyer plus largement sur le diagnostic élaboré par ce dernier.
La Commission adopte l'amendement AS 284.
Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel AS 402 du rapporteur.
Elle est saisie de l'amendement AS 24 de M. Arnaud Robinet.
Le système français des retraites a fait régulièrement l'objet de réformes, et celles menées par les gouvernements de la droite et du centre ont permis d'économiser un peu plus de 120 milliards d'euros. Sans la réforme de 2010, le déficit ne serait pas de 20 milliards d'euros, mais de 50 !
Cela dit, ces réformes sont relativement anxiogènes pour nos concitoyens. Ils ont le sentiment que notre système de retraites est si opaque qu'ils ne peuvent en maîtriser les règles. De plus, la qualité du service rendu est très variable selon les organismes de retraite, alors qu'il est essentiel qu'elle soit identique pour tous. Tant qu'on n'aura pas le courage de procéder à une réforme systémique, cette opacité demeurera. Les différents régimes doivent offrir à chacun, tout au long de sa vie professionnelle, les moyens de prendre les bonnes décisions pour bénéficier de la meilleure retraite possible. Afin d'évaluer les progrès réalisés dans ce domaine, le comité de suivi devrait donc s'assurer de la qualité des services rendus aux usagers par les organismes chargés de la gestion des régimes de retraite légalement obligatoires, ainsi que par les services de l'État chargés de la liquidation des pensions.
Ce n'est pas le rôle du comité de suivi. L'information de l'usager, qui est en effet importante, s'est fortement améliorée ces derniers temps. Le GIP Info Retraite a fait un excellent travail. Ceux qui ont atteint l'âge de 35 ans ont bénéficié de premières informations sur leur future retraite et ceux qui ont eu 55 ans ont reçu un décompte approximatif de leur pension à venir. Nous allons encore renforcer cette information des usagers par d'autres dispositions du projet de loi, notamment grâce à la création d'un GIP interrégimes, qui contribuera à lever les barrières entre nos 35 régimes.
Les Français ont en effet des inquiétudes quant à leur retraite : on observe une méconnaissance des dispositifs et les évolutions législatives alimentent leurs craintes. Il serait donc important d'évaluer notre système d'information et de communication. Le refuser me paraît une erreur.
Cet amendement est intéressant. Le rapporteur a insisté sur la nécessité d'avoir un système plus transparent et lisible : or il est vrai que le calcul de la retraite est assez anxiogène pour nos compatriotes. Comme on sait qu'avec ce texte, nous n'aurons pas le régime unifié que nous appelons de nos voeux, pourquoi ne pas accepter davantage de transparence et refuser de mesurer si l'indice de satisfaction de nos concitoyens s'améliore ? Vous vous privez d'une arme en refusant cet amendement ! Je rappelle que seulement 30 % des Français ont confiance dans le mode de calcul de leur pension et comprennent le fonctionnement du régime de retraite auquel ils sont rattachés.
Le GIP Info Retraite est plébiscité par l'ensemble de nos concitoyens, qui trouvent les informations qu'il délivre tout à fait remarquables. En outre, je suis persuadé qu'il est capable de s'autoévaluer pour améliorer le cas échéant ce qui doit l'être.
La Commission rejette l'amendement AS 24.
Elle est saisie de l'amendement rédactionnel AS 403 du rapporteur.
Mentionnons les femmes avant les hommes – pour respecter l'ordre alphabétique ! (Sourires.)
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS 107 de M. Pouria Amirshahi.
Il s'agit d'un amendement pédagogique, destiné à faire mieux comprendre – et mieux prendre en compte – les difficultés auxquelles se heurtent nos compatriotes établis hors de France. Ceux-ci peuvent avoir eu des activités dans différents pays : or, au moment de la retraite, la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) refuse, pour le calcul de leur pension, d'appliquer cumulativement les droits ouverts par les conventions bilatérales de sécurité sociale passées avec la France. Il est donc nécessaire que, dans son rapport, le comité de suivi analyse aussi les raisons et les conséquences de cette impossibilité de bénéficier des droits résultant de la totalité des périodes d'activité à l'étranger. En général, le cumul est limité à deux périodes car la CNAV ne prend en compte que deux conventions au plus. Je précise que la situation diffère selon que nos compatriotes résidaient dans l'Union européenne ou au dehors, mais nous avons tenu, à plusieurs députés des Français établis hors de France, représentant ces deux catégories, à appeler votre attention sur cette question.
Je rappelle que 2,5 millions de Français vivent en dehors de notre pays, ce qui est exceptionnel – tous les pays ne peuvent se prévaloir d'une diaspora aussi importante. Ces expatriés sont loin d'être tous des « évadés fiscaux » et nous avons tout intérêt à les soutenir car ils contribuent à notre rayonnement international, qu'ils soient cadres dans une entreprise ou au service d'une administration. Il est nécessaire d'encourager cette mobilité en prenant en compte, le moment venu, la totalité de leur carrière professionnelle, même si les législations du travail diffèrent d'un pays à l'autre. Nous souhaitons donc réunir les conditions pour que la CNAV accepte le cumul des conventions bilatérales.
Le problème soulevé dans cet amendement est réel mais renvoie à deux cas distincts, selon que les pays de résidence ont ou non signé des accords bilatéraux avec la France. Dans le premier cas, la difficulté – relevée par le conseil de surveillance de la CNAV lorsque j'y siégeais – vient de l'extrême diversité de ces conventions, d'où un imbroglio juridique qui conduit à ce que nos compatriotes ayant travaillé et cotisé à l'étranger se voient refuser, une fois de retour dans notre pays, le bénéfice de la retraite à laquelle ils ont droit, ou doivent attendre de longues années avant de l'obtenir. Dans le deuxième cas, le problème tient à ce que nos compatriotes qui ont travaillé dans des entreprises françaises situées à l'étranger se voient appliquer le droit social local. Quoi qu'il en soit, tous méritent toute notre attention car ils se sentent totalement abandonnés, d'autant qu'après avoir perçu un salaire tout à fait correct du fait de leur éloignement, ils se retrouvent dans la misère.
Cet amendement et les précédents visent à étendre la liste des missions du comité de suivi telles qu'elles figurent déjà aux alinéas 9 à 11 de l'article 3. N'est-ce pas incohérent avec l'alinéa 8, qui renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de préciser ces missions ?
Il convient de laisser le comité de suivi travailler sur tous les sujets. La pire des choses serait que la loi, se substituant au règlement, précise l'essentiel de ce que doit contenir le décret. Cela étant, Pouria Amirshahi soulève ici un réel problème. La commission des finances a d'ailleurs adopté un amendement portant article additionnel après l'article 29 qui prévoit la remise d'un rapport au Parlement détaillant les conditions d'application des conventions bilatérales existantes en matière de retraite et évaluant leur mise en oeuvre pour les Français ayants droit de systèmes étrangers dès lors qu'ils ne résident plus dans le pays concerné. Comme l'a très justement rappelé Denis Jacquat, la difficulté réside dans le fait que plusieurs États n'appliquent pas le principe de réciprocité pour l'accès aux droits à la retraite, certains allant jusqu'à ne pas verser de pension de retraite aux cotisants qui quittent leur territoire. Il nous faut donc disposer d'un rapport complet sur le sujet – comme le prévoit notre amendement – et faire en sorte que les États concernés appliquent le principe de réciprocité de telle sorte que chacun puisse bénéficier d'une pension de retraite quel que soit le lieu où il aura travaillé. Ce problème – qui ne touche pas les expatriés puisqu'ils relèvent du régime général – concerne 2,5 millions de Français partis travailler à l'étranger dans des entreprises privées mais aussi, pour certains, dans le secteur public – par exemple les Français ayant enseigné en Australie.
Le sujet est complexe : il importe en effet de connaître la réalité des montants cotisés et de déterminer pourquoi il reviendrait au système de retraites français de financer les pensions correspondantes. Nous avons d'ailleurs rédigé un rapport faisant état des fraudes documentaires et des problèmes d'identité et de reconstitution des carrières longues des Français ayant cotisé à l'étranger. À cette occasion, nous avons rencontré – chose étonnante – des personnes ayant commencé à cotiser à l'âge de deux ou quatre ans ! Si la question n'a pu être réglée jusqu'à présent, c'est qu'il est fort difficile de vérifier la véracité des versements effectués à l'étranger par les entreprises. Un tel système risquant d'alimenter la fraude, je vous incite à la prudence.
M. Amirshahi soulève une vraie question : celle de la difficulté à faire valider le temps de travail effectué à l'étranger. Or il convient d'encourager les Français à aller travailler au-delà de nos frontières, et il faut par conséquent que nous disposions d'une véritable connaissance du sujet. Je suggère donc à notre collègue de demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport à cet effet. Cela étant, le comité de suivi n'a pas à examiner des questions juridiques qui doivent plutôt être traitées dans des lois à venir, en sorte que ces Français qui nous représentent à l'étranger puissent faire valider leurs droits à retraite.
Si la question soulevée par Pouria Amirshahi est très importante, l'avis du rapporteur me paraît sage. En effet, on ne peut charger le comité de suivi d'examiner des situations particulières. Le sujet est complexe : il s'agit d'éviter que des conventions bilatérales ne se transforment en accords multilatéraux de fait. En effet, si la France a conclu des accords bilatéraux avec plusieurs pays, ces derniers ne souhaitent pas forcément se retrouver liés par un accord entre eux par l'intermédiaire de la France. Il nous appartient donc de voir comment simplifier la situation de nos ressortissants à l'étranger, alors même qu'aujourd'hui, c'est la convention la plus favorable qui leur est appliquée. Je serais donc favorable à ce que le COR consacre un rapport spécifique à cette question.
Il me paraîtrait préférable d'adopter cet amendement comme un amendement d'appel, quitte à ce que la majorité le retire s'il s'avère que celui de la commission des finances après l'article 29 peut faire évoluer la situation plus rapidement.
J'ajoute que nous faisons en sorte de pouvoir signer le plus de conventions possible avec les pays où travaillent des ressortissants français – nous l'avons fait récemment avec le Brésil et avons engagé une concertation avec le Pérou – de manière à éviter que ceux-ci ne se retrouvent à travailler pendant de longues périodes dans des pays avec lesquels nous n'avons conclu aucun accord – ce qui est malheureusement encore le cas, y compris avec des pays très importants.
La Commission rejette l'amendement AS 107.
Elle adopte ensuite, successivement, les amendements rédactionnels AS 405 et AS 404 du rapporteur.
Elle est saisie de l'amendement AS 137 de Mme Fanélie Carrey-Conte.
Si le comité de suivi a pour mission de réfléchir aux prévisions de financement et aux paramètres d'évolution de notre système de retraite, il nous paraît important que le législateur affirme clairement l'orientation que doivent prendre certaines de ses recommandations, en particulier celles qui concernent l'évolution de la durée d'assurance. En effet, la rédaction actuelle de l'alinéa 16 revient à n'admettre que des évolutions à la hausse de cette durée – supérieures, par conséquent, à celle que prévoit l'article 2 adopté hier. Cela pose problème, non seulement pour les raisons évoquées hier dans le cadre du débat sur l'allongement de la durée de cotisation, mais aussi parce que l'espérance de vie sans invalidité n'a pas augmenté depuis 2006. Il importe donc de préciser que, si l'évolution de la durée d'assurance doit faire l'objet de recommandations du comité de suivi, celles-ci ne pourront être orientées qu'à la baisse, en fonction notamment des évolutions du contexte économique.
Je comprends votre position. Cependant, dans la mesure où nous ignorons quelle sera la situation future, le comité de suivi doit être en mesure de réfléchir aussi bien à l'opportunité d'un allongement qu'à celle d'un raccourcissement de la durée d'assurance. Nous avons la certitude que, l'article 2 du projet de loi fixant la règle applicable jusqu'en 2035 – soit pendant une vingtaine d'années –, seul le législateur pourra la modifier. Le comité doit cependant conserver la possibilité d'émettre un avis sur le sujet. Il se peut d'ailleurs qu'en 2035 ou lorsque le comité aura à émettre un avis, nous ayons le choix, non seulement entre un allongement et une réduction de la durée d'assurance, mais aussi entre jouer sur cette durée et relever les petites pensions ou le taux de remplacement, ou encore diminuer le taux de cotisation. Il convient donc de faire en sorte que chacun puisse se prononcer à ce moment-là et non de restreindre la capacité du comité à réfléchir dans la durée. La précaution proposée me paraissant inutile, j'émets un avis défavorable à cet amendement.
Le comité de suivi étant censé rendre un rapport chaque année, j'imagine qu'il formulera des recommandations tous les ans, y compris sur la durée d'assurance et y compris entre 2020 et 2035. Mon amendement me semble donc utile à cet égard. Compte tenu des débats sur l'allongement de la durée de cotisation, si nous ne l'adoptons pas, nous maintiendrons dans le texte une ambiguïté préjudiciable à l'orientation que nous souhaitons donner à long terme à notre système de retraite. En outre, puisque le IV de l'article tend à encadrer par décret les recommandations formulées par le comité de suivi en matière de taux de remplacement et de cotisation, pourquoi ne pas en faire autant s'agissant de la durée d'assurance ?
Je vais néanmoins retirer cet amendement pour le redéposer en séance publique car je ne désespère pas de vous convaincre de sa pertinence.
Partageant les préoccupations de Mme Carrey-Conte, je regrette qu'elle ait retiré son amendement car je m'apprêtais à le voter. J'ajoute que l'avis défavorable émis par le rapporteur est loin de me rassurer.
L'amendement AS 137 est retiré.
La Commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements AS 237 de Mme Jacqueline Fraysse, AS 286 de Mme Linda Gourjade et AS 285 de M. Jean-Marc Germain.
Je souhaite que les recommandations du comité de suivi tiennent compte, non pas de l'évolution de l'espérance de vie en général, mais de celle de l'espérance de vie sans incapacité, c'est-à-dire sans limitation des fonctions essentielles pour mener une vie autonome. L'Institut national d'études démographiques a en effet montré que la part de vie sans limitations fonctionnelles tendait plutôt à diminuer aujourd'hui.
L'amendement AS 286 dispose quant à lui que les recommandations du comité de suivi tiendront compte, non seulement de l'évolution de l'espérance de vie et de la durée de retraite, mais aussi de celle du niveau de la population active et de la productivité. Il s'agit ainsi de prendre en considération les politiques publiques menées en faveur de l'emploi, de l'innovation et des investissements d'avenir, et non seulement des évolutions de l'espérance de vie, consécutives au progrès scientifique.
Tout en maintenant l'espérance de vie parmi les paramètres que doit prendre en compte le comité de suivi dans ses réflexions, notre amendement AS 285 vise, dans le même esprit que l'amendement AS 237 de Mme Fraysse, à y ajouter l'espérance de vie sans incapacité. C'est en effet à cet égard que l'on observe les inégalités les plus fortes : ainsi un cadre aujourd'hui âgé de soixante ans a la perspective de bénéficier de vingt-huit années de retraite en bonne santé, contre dix-huit seulement pour un ouvrier, soit un écart de dix ans ! Ce fait inacceptable doit alimenter les réflexions du comité.
Si le débat sur l'évolution de l'espérance de vie en bonne santé a déjà eu lieu en 2010, je souhaiterais cependant citer une étude de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) qui montre que, dans l'Union européenne, en 2011, l'espérance de vie à soixante-cinq ans était de 18 ans pour les hommes et de 21,4 ans pour les femmes. Elle a donc augmenté. Plus intéressant encore, l'espérance de vie en bonne santé a elle aussi augmenté de façon significative depuis 2005, soit d'1,5 an pour les hommes et d'1,6 an pour les femmes.
L'amendement AS 237 supprimant la référence à l'espérance de vie « tout court », je lui préfère l'amendement AS 285. Les deux me paraissant compatibles, j'émets également un avis favorable à l'amendement AS 286.
La Commission rejette l'amendement AS 237. Puis elle adopte successivement les amendements AS 286 et AS 285.
La Commission en vient ensuite à l'amendement AS 288 de M. Jean-Marc Germain.
Cet amendement vise à corriger la définition du rôle du comité de suivi, qui me paraît excessivement négative dans la mesure où y sont seulement envisagées, en filigrane, les hypothèses d'une dégradation de la situation. Il convient, dans l'esprit du projet de loi, de prendre également en compte la possibilité d'évolutions de la démographie, de la productivité ou de la croissance plus favorables que celles qui ont fondé les prévisions du COR. En cas de retour à meilleure fortune, nous souhaitons donc affirmer trois priorités, au profit du pouvoir d'achat des retraités les plus modestes, de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la prise en compte de la pénibilité.
Au risque de vous surprendre, je me déclarerai plutôt favorable à cet amendement. Le groupe UMP considère en effet que, si l'on recule l'âge de départ à la retraite à 65 ans à l'horizon 2026 et que l'on continue à augmenter la durée de cotisation comme le prévoit la loi de 2003, une fois que l'équilibre aura été atteint et si les caisses de retraite enregistrent des excédents, il conviendra de redonner du pouvoir d'achat aux retraités, notamment en diminuant les cotisations salariales ou patronales.
Je trouve l'amendement de M. Germain très intéressant. Mais il signe un aveu de faiblesse considérable car il prévoit qu'en cas d'excédent, il conviendra de renforcer le pouvoir d'achat des retraités les plus modestes. Or, nous n'avons cessé depuis hier de dénoncer la menace que représente votre non-réforme à cet égard. Ainsi, lorsque vous reportez du 1er avril au 1er octobre la date de revalorisation des retraites, vous entamez le pouvoir d'achat des plus modestes. Et il est irréaliste d'envisager l'hypothèse qu'il puisse y avoir des excédents alors que les hypothèses de croissance retenues par le COR, d'1,6 % à partir de 2011, sont surestimées. Enfin, les propositions que nous avons formulées hier nous auraient permis non seulement de garantir l'équilibre des retraites beaucoup plus rapidement que vous ne le ferez – et vous savez très bien que le déficit ne sera pas comblé puisqu'il manquera 14 ou 15 milliards d'euros en 2020 – mais également de satisfaire à l'exigence d'améliorer le pouvoir d'achat des plus modestes.
Cet amendement est aussi très intéressant en ce qu'il révèle à quel point le système est peu solidaire et à quel point les inégalités sont fortes. Il conviendrait toutefois de le compléter afin d'y mentionner le plus grand déséquilibre – celui qui existe entre les secteurs public et privé.
Nous en avons discuté pendant une grande partie de la soirée d'hier, mais vous n'étiez pas là. Nous n'allons pas relancer ce débat maintenant !
Chers collègues de l'opposition, je comprends que cet amendement vous paraisse quelque peu surréaliste : comme vous avez subi dix ans de déficits chroniques, l'idée même d'un retour à meilleure fortune vous paraît sans doute impossible. Souffrez cependant que, sans méconnaître les difficultés de la période, nous adoptions un point de vue différent.
Je n'irai pas jusqu'à faire l'exégèse de la pensée de l'opposition, mais il me paraît que votre discours d'aujourd'hui tranche avec celui que vous avez tenu hier soir : vous avez tenté de faire croire à l'opinion que les Français allaient percevoir des pensions plus faibles au motif qu'ils partiraient à la retraite avant d'avoir cotisé suffisamment pour percevoir une retraite à taux plein. Or ce n'est pas du tout dans ce sens que vont nos propositions. Cet amendement traduit au contraire notre volonté constante d'améliorer la situation des retraités les plus modestes – débat que nous aurons d'ailleurs lorsque nous examinerons l'article 4. Et nous sommes très attachés, notamment en cas de retour à meilleure croissance, à faire progresser de façon très régulière le pouvoir d'achat de ces retraités. Il me semble donc qu'avec un peu de réflexion et de bonne volonté, vous pourriez même voter cet amendement.
L'exposé sommaire de cet amendement fait effectivement mention d'une priorité en faveur de l'amélioration du pouvoir d'achat des retraités les plus modestes et les plus fragiles. Or, si je souscris entièrement à cet objectif, il nous faut porter une attention particulière aux causes de cette fragilité. Il existe en effet des gens qui, arrivés tardivement dans notre pays, n'y ont pas cotisé ou insuffisamment, et dont la retraite est par conséquent très faible. Il serait donc de bon ton que le Gouvernement reprenne à son compte les conclusions que nous avons tirées dans le rapport que nous avons consacré il y a quelques mois aux immigrés âgés.
En outre, puisque l'on évoque les plus modestes et les fragiles, il conviendrait que l'on parle aussi des quatre millions de veuves que compte notre pays. Ces personnes souhaiteraient que l'on fasse un geste à leur égard, soit en augmentant le niveau des pensions de réversion, soit en relevant le plafond du cumul entre pension de réversion et retraite. Il est en effet plus difficile pour une veuve de vivre seule que pour une personne divorcée.
Si certains députés de l'opposition semblent prêts à rallier notre amendement et à soutenir une augmentation du pouvoir d'achat des retraités les plus modestes, ce serait à condition que l'âge de départ à la retraite soit fixé à soixante-cinq ans. Or, malheureusement, les personnes les plus défavorisées sont précisément celles dont l'espérance de vie est la plus réduite. Par conséquent, peu parmi elles jouiraient alors longtemps de cette augmentation, à supposer qu'elles parviennent à l'âge requis. Autant dire que nous devons absolument maintenir en l'état notre amendement. Il a le mérite d'être à la fois rassurant – parce que la réforme est structurante – et optimiste puisque, par rapport à des pays tels que l'Allemagne, nous bénéficions d'atouts considérables, qu'il s'agisse de notre démographie ou de ressources disponibles à terme pour l'ensemble de notre système de retraites. Cet amendement est porteur d'espoir pour l'avenir !
Avis favorable à cet amendement, inspiré d'intentions tout à fait louables. Le véritable enjeu consistera en effet à nous assurer en permanence que la retraite de nos concitoyens se situe à un niveau décent. Si nous dégageons des excédents, cet objectif pourra être prioritaire. Il nous faudra certes effectuer un arbitrage, comme le soulignait Mme Carrey-Conte, entre amélioration du niveau de vie, réduction de la durée d'assurance et réduction du niveau des cotisations mais, si d'autres utilisations peuvent ainsi être envisagées, la priorité donnée au pouvoir d'achat me paraît parfaitement correspondre à l'objectif que nous poursuivons à travers cette réforme.
La Commission adopte l'amendement AS 288.
Elle examine ensuite l'amendement AS 25 de M. Arnaud Robinet.
Régulièrement réformé, le système de retraites français reste d'une opacité rare. Des études ont d'ailleurs montré que plus de la moitié des Français en considère les règles comme très obscures. Mais il existe aussi des disparités dans la qualité du service rendu, selon les régimes et les organismes de retraite concernés. Or il est essentiel que nos concitoyens soient égaux à cet égard, quel que soit le régime auquel ils sont rattachés. Le comité de suivi que vous proposez de créer doit donc pouvoir formuler des recommandations sur la qualité du service rendu aux usagers par les organismes assurant la gestion des régimes de retraite légalement obligatoires, ainsi que par les services de l'État chargés de la liquidation des pensions.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement AS 314 de Mme Fanélie Carrey-Conte.
Dans sa rédaction actuelle, le projet de loi ne mentionne que trois leviers à propos desquels le comité de suivi peut formuler des recommandations : la durée d'assurance, les transferts du fonds de réserve des retraites et le niveau du taux de cotisation. Nous proposons d'y ajouter la faculté d'affecter au système de retraites d'autres ressources que les cotisations, notamment pour financer les prestations non contributives. Nous suivons en cela plusieurs préconisations du Haut conseil de financement de la protection sociale, qui nous a invités à une réflexion ouverte sur les sources de financement de notre protection sociale.
Notre système de retraites s'appuie à 80 % sur des cotisations, mais cela signifie que, pour les 20 % restants, les sources de financement sont déjà d'une autre nature. J'émets un avis favorable à cet amendement, étant entendu qu'il ne doit pas conduire à dénaturer l'esprit de ce système, essentiellement contributif.
Monsieur le rapporteur, si cet amendement avait été proposé par le groupe UMP, y auriez-vous été favorable ?
La Commission adopte l'amendement.
La Commission est ensuite saisie de l'amendement AS 200 de M. Philippe Vigier.
C'est à un débat irréel que cette Commission s'est livrée tout à l'heure, à propos du pouvoir d'achat des retraités et de l'équilibre général de notre système de retraites ! En effet, il ne s'agit pas uniquement pour nous de fixer la retraite à soixante-quatre ou à soixante-cinq ans ; en revanche, vous, en ne modifiant pas l'âge légal de départ à la retraite tout en augmentant la durée de cotisation, vous condamnez les gens à subir une décote. Ayez donc le courage de reconnaître que vous organisez la diminution du niveau des retraites. Chacun le sait, le COR l'a écrit, Mme Yannick Moreau aussi.
J'en viens à notre amendement AS 200. Hier, j'ai insisté sur la nécessité d'établir un pacte de confiance avec les Français. Pour y parvenir, et puisque nous ne sommes pas parvenus à supprimer le comité de suivi, pourquoi ne pas faire de celui-ci une force de propositions sur un champ beaucoup plus large que ne le prévoit le projet ? Pour nous, ses recommandations devraient reposer sur trois piliers : la fixation d'un taux de cotisation maximal, ce qui serait le meilleur moyen de protéger le pouvoir d'achat des retraités, l'assurance d'un taux de remplacement minimal – soit le niveau de retraite que les Français auront la garantie d'atteindre une fois achevée leur vie professionnelle – et celle d'un montant de retraite également minimal, cela pour apporter une réponse aux plus modestes.
Nous partageons votre intention d'assurer un revenu minimum aux retraités. C'est pourquoi nous avons souhaité que les recommandations du comité de suivi ne puissent conduire ni à baisser le taux de remplacement des retraités en deçà d'un certain plancher, ni à augmenter les taux de cotisation des actifs au-delà d'un certain plafond. Il y aura donc, comme en Allemagne, un « tunnel » dont il ne sera pas possible de sortir : c'est la feuille de route que nous donnons au comité, et c'est un choix politique que nous assumons. Je suis donc défavorable à votre amendement.
La Commission rejette l'amendement.
Les amendements AS 238 et AS 239 de Mme Jacqueline Fraysse sont retirés.
La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS 406, AS 407 et AS 408 du rapporteur.
Elle adopte l'article 3 modifié.
La séance est levée à treize heures cinq.