Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du 16 décembre 2015 à 9h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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  • réglementation
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La réunion

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Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a examiné le rapport de M. Jean-Louis Roumégas sur la proposition de loi visant à intégrer le principe de substitution dans le cadre réglementaire national applicable aux produits chimiques (n° 3277).

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Ce matin, nous examinons la proposition de loi visant à intégrer le principe de substitution dans le cadre réglementaire national applicable aux produits chimiques, que le groupe Écologiste a inscrit dans la journée réservée du jeudi 14 janvier 2016 et sur laquelle nous avons nommé rapporteur M. Jean-Louis Roumégas.

Compte tenu de la suspension des travaux parlementaires du 18 décembre au 12 janvier, il est nécessaire d'examiner aujourd'hui cette proposition de loi.

À l'issue du délai de dépôt, le secrétariat de la Commission a enregistré quarante-cinq amendements, dont dix-sept ont été retirés par leurs auteurs avant leur publication.

L'amendement CD41 de M. Jean-Louis Roumégas a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40, car créant une charge pour un établissement public.

Il nous reste donc vingt-sept amendements à examiner.

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Je commencerai la présentation de cette proposition de loi en évoquant les mots prononcés par le Président de la République lors de la Conférence environnementale de novembre 2014 : « Le XXIe siècle doit être le siècle de l'hygiène chimique ». Il faisait référence à l'augmentation des maladies chroniques, des cancers, des maladies cardio-vasculaires, des maladies respiratoires, de l'obésité, du diabète, des maladies neurologiques, des troubles de la reproduction, qui menacent la santé des populations et la pérennité de nos systèmes de santé.

Les chiffres de l'assurance maladie sont têtus : songez que, si le taux des maladies chroniques était le même qu'il y a quinze ans, le déficit de l'assurance maladie serait nul.

La vision classique d'une augmentation de ces maladies liée au vieillissement de la population, à la sédentarité, aux progrès du dépistage et aux seules conséquences du tabagisme et de l'alcool, apparaît de moins en moins pertinente.

Nous disposons de tous les éléments pour comprendre que la diminution de l'espérance de vie en bonne santé de nos populations est l'indicateur d'une mauvaise qualité de notre environnement et que toute dégradation de celui-ci a un impact sur notre santé.

Cette proposition de loi apporte un début de réponse à l'épidémie de maladies chroniques reconnues par l'OMS, en agissant à la source des pollutions causées par les substances toxiques. Cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR), perturbateurs endocriniens, polluants volatils, métaux lourds, nanomatériaux, additifs alimentaires sont autant de substances auxquelles nous sommes exposés quotidiennement et tout au long de la vie.

S'il est un constat que nous devons partager, c'est que le temps de la chimie ne sera jamais celui de la réglementation : 100 millions de substances chimiques sont répertoriées dans le monde, il s'en invente 10 000 par jour, 143 000 sont en circulation dans l'Union européenne, et le règlement REACH n'en cible que 30 000.

Oui, à l'échelon européen, REACH a constitué une avancée juridique majeure. Pour la première fois, des obligations ont renversé la charge de la preuve des autorités publiques vers l'industrie. Ce règlement est une source d'inspiration pour plusieurs pays dans le monde.

Non, REACH ne suffit pas aujourd'hui à protéger efficacement nos populations.

Ce fut l'objet d'un long débat lors de sa création : le règlement REACH est basé sur le principe de gestion, non sur celui de substitution. En dehors de trente substances dites « soumises à autorisation », rien n'oblige les industriels à substituer une substance – CMR, par exemple – reconnue toxique au-delà d'un certain seuil, même lorsqu'il existe sur le marché une alternative à coût économique raisonnable. Cette logique est inadaptée au nouveau paradigme toxicologique qui s'impose avec les perturbateurs endocriniens : les effets sur la santé sont plus nocifs à faible dose qu'à forte dose, et lorsque les substances interagissent entre elles par « effet cocktail ».

De plus, faute de moyens, seuls 5 % des dossiers sont effectivement contrôlés, alors que, selon l'Agence européenne des produits chimiques, 60 % des dossiers sont incomplets. Ce constat est partagé par les gouvernements des pays scandinaves qui ont appelé, dans une lettre à la Commission européenne de mars 2015, à mettre en place des réponses complémentaires à REACH.

À ceux qui considèrent que la France doit attendre un battement de cil de la Commission européenne pour agir à l'échelon national, a fortiori en matière de santé publique, je veux dire ceci : cette posture désespère les populations, qui l'expriment dans les urnes – je vous renvoie au scrutin de dimanche dernier…

À la minute où je vous parle, la Cour européenne de justice rend son jugement sur la plainte déposée par la Suède contre la Commission européenne pour n'avoir pas établi, comme elle s'y était engagée, une définition des perturbateurs endocriniens, en 2013. Je rappelle que la France s'est jointe à la plainte de la Suède et que la Commission européenne a été condamnée ce matin. Combien d'années faudra-t-il avant de répondre à nos concitoyens qui, étude après étude, découvrent qu'ils sont exposés à des perturbateurs endocriniens dans leur alimentation, l'eau qu'ils boivent, leurs vêtements, leurs meubles, leurs produits d'entretien, leurs poches de perfusion ou les jouets de leurs enfants ?

L'ONG ChemSec, dans une liste qui sert de référence à la Commission européenne, évalue à 830 les substances hautement préoccupantes selon les critères de REACH, mais qui ne sont aujourd'hui ciblées par aucun règlement : au rythme de REACH – trente substances « soumises à autorisation » depuis 2007 –, il faudra 100 ans pour inciter les industriels à substituer ces substances.

Je vous propose donc d'examiner un dispositif visant à intégrer le principe de substitution dans le cadre réglementaire national et dans le respect des contraintes imposées par le droit européen. Le principe de substitution peut être défini comme le « remplacement des substances dangereuses par des alternatives sans danger, quand de telles alternatives existent et à un coût économique raisonnable ».

Pour certaines entreprises, la substitution constitue déjà un objectif à atteindre. Néanmoins, plusieurs études s'accordent sur le fait qu'en l'absence d'incitation réglementaire, la substitution sera marginale : un rapport de l'OCDE de 2003 démontre l'inefficacité des approches volontaires, tant sur l'étendue des démarches que d'un point de vue économique.

Les interventions du législateur sont donc particulièrement indiquées pour favoriser l'innovation dans le secteur de la chimie, sujet à une grande inertie due à de fortes économies d'échelle et à des lacunes dans l'information des consommateurs.

L'innovation est d'autant plus nécessaire que l'industrie chimique est confrontée à la pression croissante des consommateurs, des détaillants et des investisseurs, qui exigent des produits plus sûrs. Un climat anxiogène, parfois irrationnel, dicté par la rumeur, fragilise l'industrie. Dans le même temps, les économies émergentes se positionnent pour devenir des leaders de la chimie innovante.

Enfin, les entreprises qui adoptent des pratiques exemplaires peinent à faire valoir leurs efforts et à y trouver un avantage compétitif. Elles observent que l'Agence européenne des produits chimiques n'affiche que les aspects négatifs de la chimie et ne valorise pas la substitution, car son rôle se limite à la gestion des aspects négatifs.

Au vu de ce contexte, le moment est opportun pour imaginer une stratégie de substitution des substances chimiques préoccupantes et remettre la chimie au service du bien-être de nos populations.

Je tiens, à ce stade, à préciser la méthode qui a guidé cette proposition de loi. Nous avons mené, dans le cadre de mon rapport d'information sur les perturbateurs endocriniens en 2013, puis au cours de ces derniers mois, une vingtaine d'auditions, des agences sanitaires – l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), et l'institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS) –, aux entreprises, comme Carrefour, ou aux producteurs, comme Bayer, l'Union des industries chimiques, la Fédération des cosmétiques – majors et PME –, la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA), COSMED et Solvay, en passant par les organisations non gouvernementales (ONG) nationales et européennes et les cabinets de consulting, qui font déjà du conseil aux entreprises en matière de substitution.

Cette proposition de loi pose des principes d'intérêt général. Le dialogue doit permettre d'affiner le dispositif, au service de la protection des populations et dans un esprit de confiance restaurée entre services publics, État, industries et consommateurs.

Le dispositif préconisé par cette proposition de loi reconnaît dans son article 1er un devoir d'audit des substances chimiques préoccupantes et des alternatives existantes, sur la base d'une liste qui serait définie par le Gouvernement. Le pari central du dispositif est qu'un processus de recensement obligatoire est nécessaire pour faire découvrir aux entreprises des possibilités de substitution ou d'usage différent, et les inciter à les adopter. Ce devoir de recensement consiste simplement en une obligation de moyens : la mise en oeuvre des options identifiées dans le plan est volontaire. Son degré d'analyse et, par conséquent, son coût, sont modestes.

Notre ambition n'est réalisable qu'à condition d'accompagner les entreprises. En France, l'aide technique à la substitution se limite à un site internet proposé par l'Anses sur le partage d'expériences de substitution réussies de substances CMR et à un accompagnement de l'INERIS pour la substitution du seul bisphénol A.

Au niveau européen, il n'existe pas non plus de plateforme officielle d'aide à la substitution, mais il existe des plateformes associatives et des plateformes nationales dans les pays scandinaves.

Nous proposons que l'INERIS mette en place une banque de données de substitutions réussies ou de pistes de substitution pour les substances de la liste définie. La plateforme de l'INERIS permettra également aux entreprises de savoir sur quelles substances elles pourraient mutualiser leurs efforts de recherche en matière de substitution.

Nous proposons également que le Gouvernement établisse un label qui valorise les démarches vertueuses. Il pourrait s'agir d'un label rassurant les investisseurs des entreprises concernées sur le degré d'anticipation des entreprises vis-à-vis de la réglementation chimique.

Nous proposons enfin, à l'article 2, une incitation fiscale, sous la forme d'une majoration du crédit d'impôt recherche pour les entreprises ayant réalisé des démarches de substitution vertueuses.

Enfin, à l'article 3, nous proposons un étiquetage pour les produits contenant des substances ayant fait l'objet de recommandations particulières de l'Anses et qui ne font l'objet que d'une publication sur internet. L'étiquetage est aussi une mesure d'incitation pour l'ensemble des entreprises du secteur.

Il ne s'agit pas d'une surtransposition puisqu'en termes réglementaires, il n'y a pas d'obligation nouvelle pour les entreprises. Nous nous en tenons aux obligations réglementaires au niveau européen. Ce texte propose une information, une sensibilisation et une incitation pour les entreprises françaises à aller vers une innovation ciblée dans le sens d'une meilleure protection sanitaire des populations.

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J'ai noté, à la lecture de cette proposition de loi et en écoutant votre intervention, monsieur le rapporteur, qu'elle se fondait sur un cercle vertueux, basé sur l'incitation et le recensement, les pouvoirs publics se chargeant de recenser ce qui est le plus problématique et essayant d'inciter les entreprises à adopter les possibilités de substitution. Il faut ensuite délivrer une information positive afin que les entreprises qui se lanceraient dans cette démarche y trouvent un gain de compétitivité par rapport à celles qui ne le feraient pas.

De ce point de vue, la démarche est originale. Elle n'est pas une charge contre l'industrie chimique, mais au contraire, une forme de réhabilitation de la chimie de demain, qui doit être en mesure de proposer de plus en plus de produits de substitution et de passer à une gestion incitative.

La philosophie de ce texte, fondée sur l'incitation, l'aide, le recensement et l'information, rend la démarche intéressante. Toutefois, il reste un certain nombre de difficultés, s'agissant notamment de la question des incitations, qui serait plus à sa place dans une loi de finances.

À l'article 1er, l'audit reste obligatoire. Or, pour des entreprises de petite taille, ce sont des charges importantes. De la même façon, il y a encore beaucoup de précisions à apporter en ce qui concerne l'information.

Autant, du point de vue de la philosophie du texte, je pense qu'il est possible d'aboutir à un texte intéressant et positif, répondant à une vraie préoccupation et favorisant la mise en mouvement du secteur, autant dans la forme, la discussion est inaboutie. Nous aurons sans doute le temps, d'ici à l'examen en séance publique, de perfectionner ce texte pour en gommer les incertitudes et aboutir à un texte plus consensuel.

À ce stade, en attendant la discussion des amendements, la position du groupe Socialiste, républicain et citoyen penche vers l'abstention, afin de ne pas barrer la route à une démarche intéressante.

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Cette proposition de loi instaure le principe de substitution dans le cadre réglementaire national pour les produits chimiques. Nous partageons la définition qui est donnée du principe de substitution comme « le remplacement des substances dangereuses par des alternatives sans danger, quand de telles alternatives existent et à un coût économique raisonnable ».

Mais nous soulignons en même temps que l'encadrement législatif et réglementaire des produits chimiques doit reposer sur un cadre communautaire harmonisé afin que les dispositions applicables au niveau national ne soient pas une nouvelle source de distorsion de concurrence vis-à-vis de nos partenaires européens. Même si vous dites, monsieur le rapporteur, que vous ne surtransposez pas, vous créez des obligations supplémentaires d'affichage par rapport aux autres pays européens.

Au niveau européen, le règlement REACH, qui instaure une gestion européenne des risques liés à l'utilisation des substances chimiques, représente une avancée juridique majeure. Il prévoit, en effet, des obligations à l'encontre des producteurs et importateurs de substances chimiques et le renversement de la charge de la preuve des autorités publiques vers l'industrie.

Il s'agit de recenser, d'évaluer et de contrôler les substances chimiques. Depuis quelques années, des équipes sont mobilisées pour travailler sur ces substances et, d'ici à 2018, plus de 30 000 substances chimiques seront connues et leurs risques potentiels établis. L'Europe disposera ainsi des moyens juridiques et techniques pour garantir à tous un haut niveau de protection contre les risques liés aux substances chimiques.

Les dispositions de ce règlement sont claires : tous les industriels doivent enregistrer au niveau européen les substances qu'ils fabriquent ou importent en quantité supérieure à une tonne par an. Après enregistrement, plusieurs hypothèses sont aujourd'hui possibles.

Aller plus loin risque de nous exposer à sortir du cadre communautaire. Lors des demandes de mise d'autorisation sur le marché (AMM) des produits contenant une ou plusieurs substances dont on envisage la substitution ou lors du renouvellement des AMM des produits, les États membres ont l'obligation de procéder à l'évaluation comparative des produits, selon les principes fixés par le règlement européen. Cela veut dire qu'à chaque fois, on vérifie qu'il n'existe pas un produit plus compatible avec la qualité environnementale.

Il existe aujourd'hui une réglementation européenne claire. Par ailleurs, des équipes travaillent dans les entreprises chimiques à la réalisation de produits qui génèrent moins de risques. Ces produits sont intégrés petit à petit dans les différentes matières actives des produits utilisés.

Le Président de la République lui-même s'était prononcé pour ne faire que transposer la réglementation européenne, non la surtransposer.

C'est la raison pour laquelle le groupe Les Républicains votera, en l'état, contre ce texte.

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Au groupe Union des démocrates et indépendants, nous sommes tout à fait conscients de l'importance de la lutte contre les substances chimiques préoccupantes qui peuvent menacer la santé des travailleurs et, plus généralement, celle de l'ensemble de nos concitoyens.

Si l'objectif de la proposition de loi peut paraître louable, nous sommes néanmoins perplexes en ce qui concerne son application.

D'abord, il est demandé aux fabricants, aux importateurs ou aux utilisateurs en aval de substances chimiques préoccupantes de faire un diagnostic annuel. Or la réalisation d'un tel diagnostic risque de représenter une contrainte particulièrement lourde pour ces entreprises, qui ne sont pas préparées à un tel changement. D'autant que le code du travail contient déjà plusieurs articles prévoyant la substitution des produits chimiques dangereux par d'autres produits moins dangereux.

De plus, la réglementation européenne prévoit déjà un enregistrement qui devrait permettre le recensement de plus de 30 000 substances chimiques d'ici à 2018. Il existe donc un véritable risque de doublon. Par ailleurs, en cas de manquement, les entreprises peuvent être soumises à d'importantes sanctions financières. Plutôt que d'accompagner utilement les entreprises, ce texte prévoit de les sanctionner, ce qui ne nous paraît absolument pas opportun.

Si nous nous accordons à dire que les entreprises doivent se pencher sur la problématique de la substitution, il faut prendre en compte le fait qu'une telle transition entre les produits chimiques préoccupants et leurs alternatives ne se fera pas du jour au lendemain.

En outre, il reste encore aujourd'hui difficile d'évaluer les effets de certains produits sur la santé ou sur l'environnement. Il ne faut donc pas prendre le risque de tomber dans un climat anxiogène, qui ne serait bénéfique pour personne. En effet, les études se contredisent et il est difficile de voir clair sur les risques que représente un produit.

Si l'idée d'une majoration du crédit d'impôt recherche peut sembler bonne, nous nous interrogeons sur les critères qui seront mis en place pour définir la majoration. Comment peut-on mesurer qu'une entreprise a suffisamment contribué à la recherche de substances alternatives ? De plus, le moyen de financement paraît plutôt fragile.

Le droit d'information des consommateurs est légitime. Néanmoins, ce texte ne prévoit qu'un pictogramme pour les femmes enceintes, pictogramme qui existe déjà sur des produits qui ne contiennent pourtant pas de substances chimiques préoccupantes. Ne risque-t-on pas de brouiller le message ? Et quid des autres consommateurs, qui méritent aussi d'être informés ?

Enfin, nous aimerions connaître le rôle du principe de précaution, qui s'applique seulement à des risques non avérés. Ce principe a déjà permis l'interdiction de certains insecticides. Peut-il être invoqué pour certaines substances chimiques préoccupantes ?

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Je remercie mon collègue Jean-Louis Roumégas de présenter une proposition de loi qui met l'accent sur ce qui doit désormais être le coeur de nos préoccupations sanitaires : la pollution de notre environnement par des milliers de substances toxiques, une pollution multiforme, qui est présente partout, dans l'air que nous respirons, les produits que nous mangeons, les cosmétiques, l'eau, les produits d'ameublement etc.

Le dernier exemple en date a été donné par l'association Foodwatch, qui s'est intéressée aux hydrocarbures aromatiques d'huile minérale présents dans les emballages de produits alimentaires, notamment dans l'encre utilisée sur les emballages. Selon l'Autorité européenne de sécurité des aliments, ou European food safety authority (EFSA), ces substances « peuvent être à la fois mutagènes et cancérogènes ». Foodwatch a analysé plusieurs centaines de produits alimentaires et a découvert que la plupart étaient contaminés par ces substances, qui migrent de l'emballage vers l'aliment. Cette pollution toxique est présente partout et pose un vrai défi sanitaire.

La semaine dernière, dans notre commission, nous avons examiné un texte d'un de nos collègues écologistes sur la pollution de l'air : si l'impact sanitaire de la pollution de l'air est très souvent cité – car c'est une pollution qu'on perçoit dès qu'on sort de chez soi et dont les effets ont été largement étudiés –, ce n'est pas la seule source de pollution environnementale qui affecte notre santé, loin de là.

Cette proposition de loi fournit un chiffre que nous devrions tous connaître : selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), 8 % des décès dans le monde sont liés aux substances toxiques. À ce jour, 100 millions de substances chimiques sont répertoriées dans le monde et il en circule plus de 100 000 dans l'Union européenne. Si toutes ces substances chimiques ne sont pas toxiques – heureusement –, beaucoup le sont et, surtout, une grande partie n'a pas fait l'objet d'une évaluation sanitaire. Seules trente et une substances sont aujourd'hui interdites par le règlement européen REACH.

Notre médecine curative semble dépassée pour lutter contre cette menace sanitaire. Un signe révélateur et inquiétant de cette menace est la stagnation de l'espérance de vie en bonne santé dans les pays occidentaux. (Murmures sur divers bancs)

Lutter contre ces maladies environnementales, c'est changer notre façon de concevoir la médecine et passer du soin à la prévention. Lutter contre la prolifération des produits chimiques est indispensable. Il vaut mieux prévenir que guérir, et agir en amont coûte relativement peu au regard du coût des maladies environnementales pour nos comptes sociaux. Le coût sanitaire annuel des seuls perturbateurs endocriniens s'élèverait à 157 milliards d'euros dans l'Union européenne, soit 1,2 % du produit intérieur brut (PIB). En France, le coût de la pollution de l'air intérieur est évalué à 19 milliards d'euros par an par l'Anses, et un récent rapport sénatorial estime le coût global de la pollution de l'air, intérieur et extérieur, en France, à plus de 100 milliards d'euros par an, soit deux fois plus que le tabac.

Cette proposition de loi est donc un pas important pour lutter contre cette catastrophe sanitaire. Elle introduit le principe de substitution, qui est défini comme « le remplacement des substances dangereuses par des alternatives sans danger, quand de telles alternatives existent et à un coût économique raisonnable ». Ce texte vise plus précisément à imposer aux entreprises un audit des substances toxiques utilisées, et à aider ces entreprises à substituer des substances sans danger à ces substances toxiques.

Il s'agit d'aller de l'avant et de ne pas attendre qu'un produit soit interdit pour réfléchir à son remplacement. Si cette proposition de loi est adoptée, les entreprises françaises auront mieux anticipé les changements et auront alors un réel avantage compétitif face aux entreprises étrangères.

Cette proposition de loi prévoit également un système de labellisation. Le label permettra aux entreprises engagées dans cette détoxification de se démarquer, et donc d'accroître leur compétitivité.

Enfin, l'étiquetage prévu à l'article 3 est également indispensable. C'est un gage de transparence, et les consommateurs ont le droit de connaître les risques des produits qui les entourent.

Il faut cesser d'opposer la santé humaine, l'emploi et l'entreprise. Cette opposition nous a menés à des drames tels que ceux de l'amiante, et nous avons vécu ces débats hier encore en séance publique à propos du diesel. Il est aujourd'hui impératif de comparer le coût de l'inaction à celui de l'action.

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Nous pouvons être favorables au principe de la substitution, mais la proposition de loi risque de semer l'inquiétude chez les industriels de notre pays. Alors que le Gouvernement semblait avoir compris la nécessité de la simplification administrative, la majorité va renforcer les charges administratives et augmenter les coûts pour nos entreprises.

Depuis dix ans, les entreprises ont fait face à une hausse du coût de la gestion réglementaire de 300 % : cette augmentation porte atteinte à leur compétitivité, car les ressources qui y sont consacrées réduisent d'autant celles disponibles pour l'innovation.

En matière de sécurité des produits, des améliorations sont intervenues, telles que la création d'une Agence européenne des produits chimiques et la mise en place du règlement REACH.

Par ailleurs, les nouvelles obligations que vous souhaitez introduire n'ont fait l'objet d'aucune étude d'impact. Je ne suis donc pas favorable à cette proposition de loi qui va à l'encontre des intérêts économiques de notre pays sans apporter aucune valeur ajoutée concrète pour la protection de la santé et de l'environnement. J'ajoute que le Président de la République s'était engagé à ne pas aller au-delà de la réglementation européenne.

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Le principe de substitution peut être séduisant en première approche, car les éléments de fond liés à la santé et à l'environnement méritent toute notre attention. Mais, dans ce débat nécessaire, cette proposition de loi apporte des éléments qui ne sont pas quantifiés. De plus, les solutions proposées ne s'appuient sur aucune démarche scientifique ni analyse d'impact social ou économique, que ce soit sur les entreprises ou le milieu rural.

Je ne peux pas voter un texte dont les conséquences ne sont ni connues, ni maîtrisées, sans approche scientifique réelle. Ce n'est peut-être pas de la surtransposition, mais cela en a l'esprit au regard du cadre communautaire.

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On ne peut qu'être favorable sur le principe à cette proposition de loi tendant à imposer aux entreprises françaises de trouver des alternatives aux substances chimiques préoccupantes. Nous partageons l'absolue nécessité de protéger la santé humaine et l'environnement, d'ailleurs un certain nombre d'entreprises y travaillent.

De telles dispositions concernant les substances cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques existent déjà dans le code du travail et dans le règlement européen REACH.

Alors que le Gouvernement dit vouloir simplifier les procédures pour éviter la paralysie des entreprises – le Premier ministre le répète à l'envi et les Français l'ont fait comprendre lors des dernières élections – cette proposition de loi est une surréglementation qui ne fera qu'ajouter de la complexité aux dispositifs qui existent déjà. C'est contraire à l'effort de simplification qui est voulu pour nos entreprises.

Cette proposition nuira en outre à la compétitivité de nos entreprises tant au sein de l'Union européenne qu'hors de l'Europe. Une étude d'impact nous semble donc absolument nécessaire avant de pouvoir nous prononcer sur ce texte. En l'état, nous nous opposerons à cette proposition.

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Nous comprenons tous l'intérêt de la substitution, mais ce texte est inutile : les règlements européens incitent déjà à la substitution. Une fois de plus, nous voulons aller au-delà de la réglementation européenne, ce qui est une constante française, quelles que soient les majorités.

Par ailleurs, le droit du travail prévoit déjà l'évaluation des produits dangereux sur les lieux de travail et la substitution. C'est une politique omniprésente dans notre industrie, et ce texte ne peut que pénaliser nos entreprises.

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Sur le fond, c'est une idée utile. Mais cette proposition pose des problèmes sur la forme. Nous n'avons pas suffisamment d'évaluations pour connaître son impact sur les entreprises.

Les principes de substitution et d'incitation sont deux bons principes, mais s'il ne faut pas opposer la nécessité de maîtriser les produits chimiques dangereux et l'emploi, il ne faut pas non plus se tromper de niveau. Les contraintes que nous mettrions en place pour les entreprises en France réduiraient notre activité économique.

Je ne partage pas votre constat, monsieur le rapporteur, concernant le vote des Français dimanche dernier. Je l'interprète comme un appel à régler les problèmes de chômage, d'économie et de niveau de vie plutôt qu'un appel à plus d'écologie.

Battons-nous pour votre proposition, mais au niveau européen, qui me semble le bon niveau.

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M. Jean-Louis Roumégas fait référence à l'espérance de vie en bonne santé, qui serait menacée par les produits chimiques. Mais celle-ci est très élevée en France : nous sommes classés parmi les meilleurs pays de l'OCDE à ce titre.

Nous devons tous être très attentifs à la situation de l'industrie agroalimentaire dans notre pays. Nous vivons une crise de confiance à la suite de l'affaire de la viande de cheval et de l'avis de l'OMS sur la viande et les produits de charcuterie. Veillons à ne pas l'aggraver en imposant, malgré les dispositions législatives et réglementaires qui existent déjà pour protéger nos concitoyens, des indications qui instilleront un doute supplémentaire.

Nous devons mettre tout ce qui concerne l'alimentation sur la table, et décider une fois pour toutes de ce que nous devons faire, en collaboration avec l'industrie agroalimentaire, qui fait des efforts sur l'étiquetage ou le gaspillage alimentaire. Ce type de message négatif est relativement dangereux, nous devons y être attentifs.

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L'intention de ce texte est louable. Mais comme mes collègues, je crains la surréglementation, maladie bien française, qui se manifeste par la volonté d'utiliser le droit pour vivre bien, en tout et en permanence. Au final, collectivement, nous vivons moins bien à force de tout surréglementer.

Je veux souligner ce chiffre qui m'obsède : 7,5 millions d'emplois dans l'industrie allemande, 2,5 millions dans l'industrie française. L'écart s'est creusé de manière très rapide, en conséquence du problème de compétitivité du « site France ». Ce sont des motifs de compétitivité économique, mais aussi l'accumulation réglementaire, qui le rendent moins attractif, et ce genre de textes y contribue.

Pour répondre à Mme Laurence Abeille, je ne trouve pas inintéressant que l'on évalue économiquement la qualité de l'air et d'autres éléments, mais les mesures que nous prenons peuvent aussi être évaluées économiquement. J'aimerais que ces évaluations se fassent lorsqu'il faut défendre des politiques favorables à l'environnement, mais aussi quand on défend l'économie de notre pays.

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Vos nombreuses interventions témoignent de votre intérêt pour le sujet abordé, à défaut de partager les solutions proposées. La question de la substitution est un sujet d'avenir : la Commission européenne commence à y travailler ; des ONG proposent déjà des démarches de substitution au niveau européen ; et tout le monde conçoit la nécessité de compléter la réglementation actuelle avec le principe de substitution. La simple démarche d'interdiction ou d'autorisation prévue par la réglementation actuelle n'est pas suffisante, il faut une démarche positive, et c'est l'esprit de cette proposition de loi.

Je remercie Jean-Yves Caullet de sa bonne compréhension de la proposition de loi. Il s'agit en effet d'une démarche positive, et non pas d'écologie punitive. Je suis tout à fait disposé à faire évoluer le texte d'ici à son examen en séance publique, nous avons déjà pris langue avec les différents ministères pour améliorer le dispositif et le rendre plus opérationnel.

Le sujet de l'incitation peut bien entendu évoluer : le bonus au crédit d'impôt recherche n'est qu'une proposition. Pour avoir auditionné les entreprises, je peux vous dire qu'elles attendent que l'éligibilité de la recherche et du développement en matière de substitution soit mieux reconnue. Alors que certains rapports parlementaires ont dénoncé une affectation à mauvais escient du crédit impôt recherche, nous aurions intérêt à le cibler sur des objectifs sanitaires.

Le caractère obligatoire de l'audit est la seule obligation prévue par le texte. Il faut au moins informer les gens, mais il n'y a pas ensuite d'obligation d'action : nous respectons le cadre réglementaire européen. Faut-il renoncer à cette obligation d'information, de sensibilisation et de diagnostic ? Une telle obligation de diagnostic a été instituée en matière thermique sans l'assortir d'une obligation de travaux. Je suis prêt à réfléchir à d'autres solutions si elles ont l'appui du Gouvernement, telles qu'une incitation suffisamment forte pour être efficace. Mais ce serait dommage, car il ne s'agit pas d'une obligation coûteuse pour les entreprises.

Monsieur Jean-Marie Sermier, vous prétendez, avec plusieurs de vos collègues du groupe Les Républicains, que cette proposition va au-delà du cadre européen. Ce n'est pas le cas : nous ne modifions pas la réglementation, il s'agit toujours d'appliquer la réglementation européenne, en particulier REACH et les réglementations sur les cosmétiques, les produits phytosanitaires, les biocides, et j'en passe. Il s'agit simplement d'aider les entreprises à s'adapter à ces réglementations et à anticiper davantage leur évolution. Certaines entreprises le font déjà, j'en conviens, mais pas toutes. Ce n'est d'ailleurs pas fait de façon ciblée du point de vue sanitaire ; les adaptations répondent davantage à des objectifs de marketing qu'à de réelles évolutions durables.

Prenons l'exemple des parabènes. Les entreprises, sous la pression des distributeurs et des consommateurs, ont remplacé les parabènes par le methylisothiazolinone, ou MIT, qui pose d'autres problèmes toxiques, en particulier d'allergies. Cette substitution a répondu à un besoin marketing, mais elle aurait mérité d'être instruite par les pouvoirs publics pour mieux orienter les entreprises et les consommateurs. C'est l'exemple d'une substitution sur laquelle les entreprises ont investi mais qui n'a pas eu d'effet durable et qui n'a pas apporté d'amélioration pour la population. Nous proposons une autre démarche.

Il ne s'agit donc pas de créer un climat anxiogène, mais plutôt de sortir du climat de rumeur et de réaction irrationnelle ou marketing, soumis à l'émotion médiatique, pour aller vers une démarche raisonnée, appuyée par les pouvoirs publics. Cela permettrait aux entreprises de s'engager dans une démarche plus rationnelle et plus durable. La plateforme que nous proposons de mettre en place sous l'égide de l'Institut national de l'environnement industriel et des risques – l'INERIS – peut donner aux entreprises des informations sur les substitutions qui ne sont pas sûres et qu'il ne convient pas de faire en l'état.

Monsieur Yannick Favennec, je pense effectivement que le diagnostic n'a pas à être annuel, un diagnostic tous les cinq ans pourrait suffire. Nos auditions se sont déroulées sous forme de tables rondes réunissant les industries, les organisations non-gouvernementales, les services de l'État, les agences sanitaires et les bureaux d'études qui pratiquent déjà ce type de diagnostic. Ce format a permis de nous assurer qu'il ne s'agissait pas d'une contrainte lourde. Cela n'a rien de comparable à ce qui est fait lorsque l'on évalue une substance avant son autorisation, c'est un simple diagnostic sur la présence de substances préoccupantes.

La liste de ces substances préoccupantes devra par ailleurs être établie par le Gouvernement. Cela peut être la liste candidate de REACH, ou bien aller au-delà, car nos agences sanitaires font elles-mêmes des recommandations, à l'instar de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail. Cette liste devra être évolutive, et il n'est évidemment pas question de la fixer dans une loi.

Le travail de diagnostic est donc simple : il s'agit de faire un recensement des substances préoccupantes figurant dans cette liste, et de proposer les substitutions déjà connues. Il est question non pas d'évaluer de nouveaux procédés ou de nouvelles substances, mais simplement de prévenir les entreprises que des expériences de substitution déjà connues peuvent être mises en oeuvre. C'est donc un diagnostic simple, dont le coût a été estimé par les bureaux d'études entre 5 000 et 10 000 euros selon la taille des entreprises et le nombre de substances utilisées.

L'obligation faite aux entreprises peut très bien être modulée dans le temps, ou échelonnée en fonction de la taille des entreprises. Nous pourrions y réfléchir d'ici à l'examen en séance publique. Pour des grandes entreprises ou des PME, le coût est négligeable, mais je conçois que cela puisse poser un problème pour les TPE.

Je remercie Laurence Abeille d'avoir insisté sur le coût de l'inaction. Si la présente proposition ne représente qu'un marché de quelques centaines de millions d'euros au niveau national, l'inaction, elle, se traduirait par un coût de plusieurs milliards du fait des maladies respiratoires et d'autres maladies chroniques déclenchées aussi bien par la pollution de l'air extérieur que de celle de l'air intérieur – de ce point de vue, je vous renvoie à la notion d'exposum, aujourd'hui reconnue et introduite dans le code de la santé publique.

Je remercie nos collègues du groupe Les Républicains pour leurs interventions, qui ont souvent eu pour objet de souligner l'importance de ne pas surréglementer, afin de ne pas trop compliquer la vie des entreprises. Je veux dissiper tout malentendu : le seul point de la proposition qui pourrait éventuellement être considéré comme une surréglementation serait l'obligation pour les entreprises de réaliser un audit, si cette obligation était maintenue. Peut-être l'obligation d'établir un diagnostic est-elle insoutenable pour certaines entreprises, et je suis disposé à faire évoluer le texte en tenant compte de cette difficulté. Tout le reste de la proposition repose sur le principe du volontariat : il ne s'agit que d'inciter et de soutenir les entreprises allant dans le bon sens, et non d'imposer de nouvelles réglementations – ce qui serait de toute façon impossible.

J'en profite pour vous indiquer que, dans l'affaire des perturbateurs endocriniens, la Cour de justice de l'Union européenne, saisie par la Suède, vient de condamner la Commission européenne pour carence. Il est dangereux de laisser croire aux gens que l'on ne peut rien faire parce que l'Europe nous empêche d'agir : une telle attitude peut faire des dégâts, notamment sur le plan électoral, comme nous l'avons vu récemment. Tel n'est pas le cas avec ce texte, notre proposition ne relevant pas de la dimension européenne : tout ce qui a trait aux incitations fiscales, à l'information aux entreprises et à l'adaptation de celles-ci s'inscrit uniquement dans le cadre des politiques économiques et fiscales de niveau national, et il n'est pas prévu d'évolution constitutionnelle au niveau européen, ni de modification des traités de nature à inverser le cours des choses. Renvoyer à une harmonisation européenne pour se dispenser d'agir, cela revient à dire que l'on renonce à toute politique économique ou fiscale tant qu'il ne se passe rien au niveau européen : il me paraît difficile de soutenir un tel point de vue.

En conclusion, je voudrais vous citer un exemple concret et vous indiquer quels ont été les effets, sur les plans sanitaire et économique, d'une réglementation similaire à celle que nous proposons. Aux États-Unis, dans l'État du Massachusetts – donc dans un cadre fédéral, beaucoup plus intégré que le cadre européen, sur le plan économique comme sur le plan réglementaire –, il existe une loi appelée Toxics Use Reduction Act (TURA), qui impose aux entreprises un recensement des produits chimiques utilisés et une planification visant à réduire ces produits chimiques, avec l'accompagnement d'agences d'État. Vingt ans après l'entrée en vigueur de cette loi, l'utilisation des produits toxiques a été divisée par deux, et la dispersion environnementale de ces produits a été diminuée de 90 %, ce qui n'empêche pas le Massachusetts d'être un État à l'économie florissante, abritant le MIT de Cambridge, mais aussi des entreprises en pointe au niveau mondial dans le secteur de l'innovation technologique.

Nous proposons pour notre part un dispositif plus simple, prévoyant l'accompagnement par des agences d'État, mais aussi l'intervention d'un nouvel acteur, le conseil sanitaire pour les entreprises. Ce métier existe déjà, sous la forme de bureaux d'études qui ne demandent qu'à se développer : ce serait un moteur de croissance et un moteur pour l'innovation des entreprises. Je vous invite, mes chers collègues, à y voir une aide à l'innovation et à la croissance – une croissance dirigée vers un secteur d'avenir, à savoir le mieux-être sanitaire de nos populations – plutôt qu'un frein au développement des entreprises.

La Commission en vient à l'examen des articles.

Article 1er

La commission est saisie de l'amendement CD37 du rapporteur.

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Cet amendement, qui vise à préciser la définition des entreprises concernées par l'audit chimique créé par l'article 1er, affine notamment la notion d'« utilisateurs en aval », présente dans le texte. Nous sommes disposés à retravailler cette mesure avant la séance publique, en tenant compte des remarques émises sur la taille des entreprises et leur éligibilité aux aides. Entre-temps, je vous invite à adopter cet amendement en l'état.

La Commission adopte l'amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD35 et CD36 du rapporteur.

Elle examine ensuite l'amendement CD38 du rapporteur.

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Cet amendement vise à préciser que les alternatives à l'utilisation des substances chimiques peuvent être chimiques ou non.

La Commission adopte l'amendement.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CD7 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l'amendement CD39 du rapporteur.

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Cet amendement, qui répond à des objections qui m'ont été faites au cours du débat, a pour objet de préciser que l'audit prévu à l'article 1er consiste en une simple « estimation » permettant de s'assurer que chaque entreprise s'est interrogée sur la question de la substitution des substances préoccupantes.

La Commission adopte l'amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD8, CD9, CD10, CD11 et CD12 du rapporteur.

Elle examine ensuite l'amendement CD40, 3e rectification du rapporteur.

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Cet amendement vise à déplacer la définition de la liste des substances concernées par le processus de substitution en l'insérant à l'alinéa 17.

La Commission adopte l'amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD13, CD14 et CD44 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l'amendement CD15 du rapporteur.

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Les auditions auxquelles nous avons procédé ont mis en évidence que l'INERIS n'avait pas la compétence pour établir lui-même la liste des substances concernées par l'audit prévu. Il reviendra donc à l'État de fixer cette liste par décret.

La Commission adopte l'amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD16, CD17 et CD18 du rapporteur.

Elle examine ensuite l'amendement CD45 du rapporteur.

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Le texte prévoit un décret en Conseil d'État pour définir les modalités de mise en oeuvre du label. Or, un tel décret n'est pas nécessaire pour lancer ces démarches ; à titre d'exemple, l'INERIS, sur demande du ministère de l'écologie, délivre des labels pour les papiers thermiques « sans Bisphénol A ». L'INERIS dispose de l'expertise pour étudier la qualité des demandes des entreprises.

Nous avons donc précisé que le ministre chargé de l'environnement peut attribuer un label aux entreprises concernées.

La Commission adopte l'amendement.

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Après recomptage des votes, à la demande du groupe Les Républicains, il ressort qu'une majorité se dessine pour adopter l'article.

La Commission adopte l'article 1er ainsi modifié, les groupes les Républicains et UDI votant contre.

Article 2

La Commission adopte successivement les amendements de précision juridique CD21, rédactionnel CD19 et de clarification rédactionnelle CD20 du rapporteur.

Puis elle adopte l'article 2 ainsi modifié.

Article 3

La Commission adopte successivement les amendements de précision CD42 et CD43, et l'amendement rédactionnel CD22 du rapporteur.

Puis elle adopte l'article 3 ainsi modifié.

Titre

La commission adopte l'amendement rédactionnel CD23 du rapporteur.

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Nous en venons aux explications de vote sur l'ensemble

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Si les amendements adoptés au cours de cette séance précisent un certain nombre de choses, ils ne lèvent pas complètement l'objection portant sur l'obligation mise à la charge des entreprises, ce qui empêche que notre Commission exprime une large adhésion aux orientations de ce texte. J'insiste sur le fait qu'il est proposé un processus de validation par les agences de la démarche effectuée par les entreprises, ce qui induit un élément de confiance à l'égard de l'information délivrée aux consommateurs – un élément important, à mes yeux, si l'on veut éviter que des substitutions ne se fassent à mauvais escient.

En résumé, les améliorations apportées au texte sont utiles, mais ne suffiraient pas à ce que nous adoptions ce texte en séance publique en son état actuel, c'est pourquoi j'invite nos collègues à faire preuve de sagesse lors du vote sur l'ensemble de la proposition qui va avoir lieu au sein de notre Commission dans quelques instants.

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Je vous remercie de m'accueillir au sein de votre Commission, au sein de laquelle je n'ai pas le droit de vote – je suis ici aujourd'hui pour exprimer la position du groupe Écologiste en l'absence de François de Rugy, qui vous prie de l'excuser.

Nous sommes tout à fait favorables à ce que ce texte soit retravaillé avant et pendant la séance publique, mais chacun est convenu que les amendements qui viennent d'être adoptés ont amélioré le texte. Certains peuvent avoir des réticences, mais le vote qui va avoir lieu ici ne changera rien à l'amélioration du texte d'ici à son examen en séance publique, ni à ce que sera le vote final, c'est pourquoi il serait dommage de ne pas adopter en Commission cette proposition de loi telle qu'elle a été amendée.

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Je remercie les deux députés qui viennent de s'exprimer, et j'exprime une reconnaissance particulière à Jean-Yves Caullet qui, après avoir prôné l'abstention en début de séance, nous invite désormais à la sagesse. Je souhaite évidemment que nous travaillions, avec l'ensemble des membres de la Commission qui le souhaitent, à l'amélioration de ce texte d'ici à son examen en séance publique, afin de parvenir au plus large consensus possible. Notre objectif ne doit pas être d'aboutir à une proposition de loi en forme de témoignage, mais d'obtenir un texte constituant une véritable avancée, même modeste, et les débats que nous venons d'avoir m'ont convaincu que c'était chose possible.

La Commission rejette l'ensemble de la proposition de loi modifiée.

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 16 décembre 2015 à 9 h 30

Présents. - Mme Sylviane Alaux, M. Yves Albarello, M. Guy Bailliart, M. Serge Bardy, M. Jacques Alain Bénisti, M. Sylvain Berrios, M. Florent Boudié, M. Christophe Bouillon, Mme Sabine Buis, M. Vincent Burroni, M. Alain Calmette, M. Patrice Carvalho, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Luc Chatel, M. Guillaume Chevrollier, Mme Florence Delaunay, Mme Françoise Dubois, M. Olivier Falorni, M. Yannick Favennec, M. Jean-Marc Fournel, M. Laurent Furst, Mme Geneviève Gaillard, M. Alain Gest, M. Charles-Ange Ginesy, M. Michel Heinrich, M. Jacques Kossowski, Mme Valérie Lacroute, M. Alain Leboeuf, Mme Viviane Le Dissez, Mme Marie Le Vern, M. Philippe Martin, M. Gérard Menuel, M. Rémi Pauvros, M. Christophe Priou, Mme Catherine Quéré, Mme Sophie Rohfritsch, Mme Barbara Romagnan, M. Jean-Louis Roumégas, M. Jean-Marie Sermier, Mme Suzanne Tallard, M. Jean-Pierre Vigier

Excusés. - M. Julien Aubert, Mme Chantal Berthelot, M. Jean-Pierre Blazy, M. Alain Chrétien, M. Jean-Jacques Cottel, M. David Douillet, M. Christian Jacob, M. Franck Marlin, M. Bertrand Pancher, M. Philippe Plisson, M. Napole Polutélé, M. Martial Saddier, M. Gilbert Sauvan, M. Gabriel Serville, M. Thomas Thévenoud

Assistaient également à la réunion. - Mme Laurence Abeille, Mme Cécile Duflot