Séance en hémicycle du 20 mars 2013 à 15h00

La séance

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La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

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La parole est à M. Philippe Vigier, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.

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Madame la ministre des affaires sociales et de la santé, malgré la réforme indispensable que nous avions menée en 2010, notre système de retraites est à nouveau menacé de faillite.

Votre majorité est au pied du mur, vous ne pouvez plus vous défiler et vous opposer à toute réforme comme vous l'avez fait en 1993, en 2004 et en 2010. François Hollande a trahi ses électeurs en laissant penser qu'il reviendrait sur la réforme de 2010. Il n'en a rien été.

En réalité, qu'avez-vous fait ? Vous avez augmenté les cotisations pour les salariés et baissé les pensions des retraités avec une nouvelle taxe. Pire, la revalorisation annoncée des retraites pour 2013 conduira à baisser encore le pouvoir d'achat des salariés. Aujourd'hui, dans votre propre camp, des voix s'élèvent pour réclamer des décisions responsables.

Le groupe UDI salue ce revirement et vous demande solennellement de faire dès aujourd'hui trois choix clairs. Tout d'abord, le choix de l'action : cessez de tergiverser ! Nous n'avons pas besoin d'une énième commission pour réformer les retraites, alors que les enjeux sont connus de tous. Le dialogue avec les partenaires sociaux doit débuter dès aujourd'hui.

Ensuite, faites le choix de la responsabilité, qui passe par le relèvement de l'âge légal de départ en retraite à 62 ans dès 2015, et par l'accélération de la convergence entre régime public et régime privé.

Enfin, faites le choix d'une réforme ambitieuse en mettant en place un système de retraites par points, qui seul tiendra compte des parcours professionnels, de la pénibilité du travail et de l'allongement de l'espérance de vie, et fera disparaître progressivement les régimes spéciaux.

Madame la ministre, le Gouvernement va-t-il faire enfin le choix du courage et de la responsabilité pour répondre aux inquiétudes légitimes des Français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.)

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le député, vous nous demandez de reprendre les mêmes recettes que celles mises en oeuvre lors de la réforme de 2010, c'est-à-dire l'absence de concertation. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Vous voulez que nous fassions, comme vous, une réforme reposant exclusivement sur le relèvement de l'âge légal de départ en retraite, alors que ce sont précisément ces recettes, ces mesures, qui nous conduisent aujourd'hui à reprendre complètement le travail que vous avez laissé inachevé. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

La vérité, c'est que vous n'avez pas engagé de réforme des retraites. C'est pourquoi aujourd'hui, nous avons à faire face à l'inefficacité de votre politique et à l'injustice des mesures que vous avez adoptées.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Conformément au calendrier que le Gouvernement s'est fixé, nous allons engager une concertation avec les partenaires sociaux pour aboutir à des mesures courageuses, qui permettront d'inscrire dans la durée nos régimes de retraite.

Ce qui est absolument nécessaire, monsieur le député, c'est de donner une perspective aux jeunes générations. C'est de leur garantir que, parvenues à l'âge de la retraite, elles pourront compter, à leur tour, sur la solidarité nationale. C'est pourquoi la commission mise en place autour de Mme Yannick Moreau doit faire des recommandations avant le mois de juin. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Ces recommandations s'appuieront sur quatre principes. Le premier est le maintien du principe de la retraite par répartition. Le deuxième principe est celui de la solidarité entre les générations. Le troisième principe réside dans la prise en compte de la qualité des carrières professionnelles, qui devra constituer l'un des éléments d'appréciation du départ en retraite. Enfin, la réforme des retraites devra se faire conformément aux principes de justice, et pas simplement en fonction d'un équilibre financier à atteindre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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La parole est à Mme Eva Sas, pour le groupe écologiste.

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Ma question s'adresse à M. le ministre du budget.

Plusieurs députés du groupe UMP. Lequel ?

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Monsieur le ministre, la lettre de cadrage envoyée le 8 mars dernier aux membres du Gouvernement faisait état de 5 milliards d'euros d'économies supplémentaires à réaliser en 2014, sur tous les ministères sans exception.

Pourtant, Didier Migaud qualifiait hier la réduction des déficits déjà réalisée en 2013 d'effort structurel « sans précédent ». À plusieurs reprises, le Fonds monétaire international a estimé que la France devait s'engager dans une réduction des déficits « plus modérée ». L'Organisation de développement et de coopération économique elle-même, dans son rapport sur l'économie française remis hier au ministre de l'économie, estime qu'« il ne faut pas ajouter de rigueur à la rigueur ».

Dans ce contexte, n'est-il pas temps d'infléchir la trajectoire budgétaire et de redonner à la France la politique d'investissements qu'elle mérite ? Je pense notamment aux investissements dans la transition écologique, qui font cruellement défaut depuis le début de la législature.

Ces investissements sont essentiels à double titre. D'une part, la France s'est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 14 % entre 2005 et 2020 et se doit de respecter ses engagements internationaux. D'autre part, nous ne sortirons pas de cette crise sans une relance de l'investissement, d'un investissement intelligent qui prépare notre économie à un monde de ressources rares.

Je pense en particulier à deux secteurs : celui des transports et celui de la rénovation thermique des bâtiments. Aujourd'hui, vous le savez, les financements en matière de transport ferroviaire ne permettent ni le développement du fret, ni la desserte de régions sous-dotées comme la région PACA, ni même l'entretien des réseaux existants. Par ailleurs, votre gouvernement a fait de la rénovation thermique des bâtiments une priorité nationale.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous préciser quelle politique d'investissement sera suivie par ce gouvernement pour faire de la France, comme le souhaite le Président de la République, « la nation de l'excellence environnementale » ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

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La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget. (Applaudissements nourris sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Levez-vous donc !

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Mes chers collègues, veuillez écouter la réponse du ministre, s'il vous plaît.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Madame la députée, vous m'interrogez sur la nécessité d'engager une stratégie d'investissement destinée à garantir, dans les années qui viennent, notre capacité à atteindre l'objectif de croissance.

Je voudrais tout d'abord insister sur le fait que la croissance ne sera pas possible si nous ne maintenons pas la trajectoire de rétablissement des comptes publics dans laquelle le Gouvernement s'est engagé. La Commission européenne a d'ailleurs reconnu dans ses appréciations sur la politique budgétaire du Gouvernement que les deux tiers des efforts accomplis entre 2010 et 2013 l'ont été depuis que ce gouvernement est en position de responsabilité.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Si nous ne maintenons pas nos efforts de rétablissement des comptes publics, nous risquons de voir les taux d'intérêt du marché obérer les chances de croissance de notre pays, comme c'est déjà le cas dans d'autres États. Nous devons donc maintenir la trajectoire de sérieux budgétaire mais, dans le même temps, faire en sorte que celle-ci soit compatible avec la croissance : c'est précisément la stratégie décidée par le Premier ministre et le Président de la République. C'est la raison pour laquelle, comme vous l'avez indiqué dans votre question, nous déployons une stratégie volontariste qui consiste à ce que des domaines prioritaires – la transition énergétique, les transports de demain, la numérisation du territoire – puissent bénéficier d'investissements stratégiques d'avenir pour créer les conditions de la croissance.

Comme vous le savez, se tiendra demain une conférence importante sur le logement qui vise à définir la nature des investissements à réaliser dans le bâtiment pour améliorer le bilan thermique des constructions. Nous allons agir de même pour les énergies renouvelables dans le cadre du débat sur la transition énergétique conduit par la ministre Delphine Batho. Nous allons le faire également en améliorant la fiscalité environnementale ; vous avez vous-mêmes participé au groupe de travail de M. de Perthuis qui prépare des propositions en ce sens. Nous allons le faire autour des transports de demain. Le Premier ministre l'a annoncé le 6 mars dernier concernant le Grand Paris et ce sera au tour du ministre des transports dans quelques semaines au sujet des transports de demain. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

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La parole est à M. Yves Fromion, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Monsieur le ministre de la défense, la nation rend un hommage fraternel au caporal Van Dooren du premier régiment d'infanterie de marine d'Angoulême mort pour la France au Mali. Son engagement sans limite, comme celui de tous ses compagnons d'armes, où qu'ils servent notre pays, commande à la nation de leur apporter un soutien indéfectible. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI et sur quelques bancs du groupe SRC.)

C'est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaite vous interpeller ici sur les rumeurs de plus en plus persistantes de réduction du budget de la défense qui accompagnent les travaux du livre blanc que vous conduisez.

Vous connaissez mieux que quiconque l'état réel de nos forces : leurs points forts, qui ont permis au Président de la République de s'engager avec succès au Mali, mais aussi leurs faiblesses, qui excluent tout relâchement de l'effort budgétaire sauf à rompre la cohérence de notre outil de défense, ce qui serait prendre une lourde responsabilité.

Votre livre blanc soulignera à nouveau la diversité et la gravité croissantes des menaces qui pèsent et qui pèseront sur notre pays, mais aussi sur nos ressortissants, où qu'ils se trouvent, comme c'est le cas au Mali. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Dans un monde où tous les États se réarment, à l'exception des États européens, qui semblent avoir perdu le sens de l'histoire, la France ne peut baisser sa garde.

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Notre siège au Conseil de sécurité de l'ONU, notre position de puissance nucléaire, l'importance de nos intérêts, notamment maritimes, le poids stratégique de nos industries de défense nous interdisent tout relâchement dans notre effort de défense.

Monsieur le ministre, le groupe UMP souhaite savoir ce qu'il en est des intentions qui vous sont prêtées, car il y va de notre indépendance nationale et de notre place dans le monde.

Les soldats que l'on a envoyés se battre au Mali au péril de leur vie attendent aussi votre réponse. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur le député, je vous remercie d'avoir rendu hommage au caporal Alexandre Van Dooren, qui est mort au combat pour la France il y a quelques jours et auquel un hommage solennel sera rendu samedi. Je salue également à nouveau l'unanimité de l'Assemblée nationale dans le soutien à nos forces armées au Mali qui mènent un combat exemplaire.

Vous l'avez rappelé, monsieur le député, le Président de la République a initié le 13 juillet dernier un livre blanc sur la défense et la sécurité nationale. Il l'a fait parce que la donne stratégique avait changé, et ce pour trois raisons. Tout d'abord, la crise des finances publiques que nous connaissons et qui vaut pour nous comme pour les autres pays du monde, en particulier les pays européens, crée des contraintes budgétaires. Ensuite, la nouvelle donne découle du nouveau positionnement des États-Unis, plutôt orienté désormais vers la zone Asie-Pacifique que vers la protection de l'Europe. Enfin, des menaces nouvelles se présentent.

Les conclusions du livre blanc seront soumises prochainement au Président de la République sous la responsabilité de M. Géhenno et une loi de programmation militaire sera déposée sur le bureau de l'Assemblée nationale à l'automne dont les dispositions budgétaires seront intégrées dans le projet de loi de finances pour 2014.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Les lois de programmation militaires, vous et moi en avons connu plusieurs : chaque fois la conclusion est difficile, délicate et nécessite des arbitrages.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Ces arbitrages seront d'ailleurs d'autant plus difficiles cette année que j'ai constaté, quand je suis arrivé au ministère, un différentiel de 4 milliards d'euros entre ce qui était prévu et ce qui était effectivement mis en oeuvre.

Nous avons le souci de pouvoir nous appuyer demain sur des forces armées cohérentes et efficaces,…

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

…cohérentes avec les nouvelles menaces qui se font jour, cohérentes avec la solidité de nos forces, mais aussi avec l'effort que la nation peut consacrer à sa propre défense dans ces périodes difficiles. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à Mme Jacqueline Maquet, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé du budget.

Depuis dix mois, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault met en place une stratégie offensive pour permettre à la France de sortir de la crise. La fierté de notre majorité parlementaire est de soutenir cette politique courageuse et volontariste qui replace au coeur des politiques gouvernementales la France qui produit, la France qui se bat, la France qui innove, la France qui crée des emplois. Ceux qui, hier, n'avaient d'yeux que pour les rabais fiscaux aux plus fortunés et à quelques multinationales auraient été mieux inspirés d'en faire de même.

Monsieur le ministre, nous avons franchi la semaine dernière une nouvelle étape vers la consolidation de notre appareil productif avec la signature des premières conventions de préfinancement du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi. Pour redresser la compétitivité de notre pays, nous permettons aux entreprises de réduire leur masse salariale de 6 % pour les rémunérations inférieures à 2,5 fois le SMIC.

Cet effort unique dans l'histoire budgétaire de notre pays s'élève à 20 milliards d'euros ; nous en accélérons les effets grâce au préfinancement proposé aux très petites entreprises et aux petites et moyennes entreprises. Dès maintenant, ces entreprises peuvent disposer d'une avance de trésorerie financée par la Banque publique d'investissement, autre outil novateur porté sur les fonts baptismaux par ce gouvernement. Ce sont bien les TPE et les PME qui recèlent les gisements d'emploi, de développement et de créativité qui peuvent permettre à la France de retrouver le chemin de la croissance.

Monsieur le ministre délégué, certains avaient annoncé qu'ils iraient chercher la croissance avec les dents et s'étaient contentés de mots. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, lui, va chercher la croissance avec des actes concrets, utiles et volontaristes.

Pouvez-vous nous dire comment le préfinancement du CICE va permettre d'accélérer la mise en place du pacte de compétitivité porté par notre majorité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs des groupes RRDP et écologiste.)

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La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Je vous remercie, madame la députée, pour votre question qui aborde le problème de la compétitivité de nos entreprises et des mesures que nous pouvons prendre pour l'améliorer.

La dégradation continue, depuis de nombreuses années, de la compétitivité des entreprises françaises aboutit à un solde du commerce extérieur – laissé par nos prédécesseurs – de 75 milliards d'euros (Exclamations sur les bancs du groupe UMP. – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC),…

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

…là où l'Allemagne affiche un excédent de 150 milliards.

Le Premier ministre a souhaité que des dispositions soient mises en oeuvre à la suite du rapport Gallois, notamment le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, qui représente un effort de 20 milliards au bénéfice des entreprises qui investissent. Cette mesure bénéficiera à près de 1,5 million d'entreprises et permettra de remettre le système productif français sur le chemin de la compétitivité.

Nous avons décidé de mettre en oeuvre ce plan de façon extrêmement rapide pour qu'il soit efficace et qu'il permette d'engager le redressement de notre système productif. Très concrètement, les instructions fiscales ont d'ores et déjà été rédigées, qui permettront de mettre en oeuvre le CICE – je pense notamment à l'instruction du 26 février dernier, qui vise à faire en sorte que ce dispositif soit simple, accessible et qu'il puisse entrer en vigueur rapidement.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Nous avons également créé les conditions pour que les entreprises ayant des difficultés de trésorerie, notamment les PME, les PMI et les ETI, puissent avoir accès à une avance de 85 % de la part de la Banque publique d'investissement. (« Hou ! hou ! » sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Cela me fait un plaisir incommensurable de vous saluer, mesdames et messieurs les députés de l'opposition. Je me rends compte que vous éprouvez une certaine joie de me voir ici. Je vais faire en sorte qu'elle ne soit pas déçue, soyez-en sûrs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Nous avons par ailleurs mis en place un dispositif qui permet aux banques de garantir les prêts octroyés par la BPI à hauteur de 50 %, ce qui devrait vous réjouir.

Par ces mesures, nous créons les conditions pour que l'objectif d'améliorer la compétitivité se mette en oeuvre concrètement.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Voilà la politique du Gouvernement ; c'est l'exact inverse de ce qu'a fait la précédente majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs des groupes écologiste et RRDP.)

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La parole est à M. Germinal Peiro, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Monsieur le ministre, depuis votre prise de fonctions en mai 2012, vous vous êtes totalement mobilisé pour apporter le soutien du Gouvernement au secteur agricole et agroalimentaire de notre pays. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Il faut rappeler que, sur le plan de la balance commerciale, ce secteur de l'économie nationale est excédentaire ; qu'il est un fort pourvoyeur d'emplois ; qu'il participe largement à l'aménagement du territoire et à la qualité des paysages ; et qu'à travers l'excellence de nos productions nationales, il porte loin la renommée de la gastronomie et de la culture françaises.

Vous vous êtes clairement engagé pour une agriculture de production qui puisse allier la performance économique et la performance environnementale.

Vous vous êtes clairement engagé dans le soutien à toutes les formes d'agriculture, qui vont des grandes cultures aux circuits courts, en passant par l'agriculture de montagne et l'agriculture biologique.

Au niveau européen, vous vous êtes battu pour obtenir une réforme qui rende la politique agricole commune plus efficace, plus équitable et plus acceptable pour la société, tout en maintenant un haut niveau budgétaire.

Hier s'est tenu à Bruxelles le conseil des ministres européens de l'agriculture. Pouvez-vous nous indiquer les grandes lignes de l'accord qui est intervenu à cette étape des négociations et définir vos priorités pour soutenir l'agriculture nationale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs des groupes écologiste et RRDP.)

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La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, vous avez évoqué le conseil des ministres de l'agriculture, qui a eu lieu lundi et mardi ; la réunion s'est terminée tard hier soir.

Cette réunion a défini la position du conseil des ministres de l'agriculture sur la réforme de la politique agricole commune. L'accord obtenu fait suite à un vote au Parlement européen.

Quels sont les résultats au regard des objectifs que nous nous étions fixés ? Nous avons garanti la diversité des agricultures. Surtout, la situation de l'élevage sera mieux prise en compte.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Il en va de même pour la question de l'environnement. Au niveau du Parlement européen comme dans l'accord qui a été trouvé hier soir, les résultats sont positifs.

Je vous en donnerai trois exemples.

Le premier concerne le couplage des aides, qui est un élément essentiel pour le soutien à l'élevage. La Commission proposait 10 % ; nous avons obtenu un accord qui permet de l'établir à 12 %.

Ensuite, sur la question des premiers hectares – la Commission parle dorénavant de « paiements redistributifs », ce qui désigne la capacité qui sera donnée à chaque pays d'accorder des primes supplémentaires aux premiers hectares des exploitations, en l'occurrence, pour la France, ce seront les cinquante premiers –, nous avons obtenu gain de cause, au conseil comme au Parlement européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe écologiste.)

Enfin, la question de l'environnement a été depuis le début un sujet de débat ; il est essentiel, pour l'orientation de l'agriculture, de la prendre en compte, non pas d'ailleurs pour opposer l'économie et l'écologie, mais pour faire en sorte que l'on soit capable, demain, de combiner ces deux enjeux qui donneront à la France des potentialités pour le développement de son agriculture. Sur cette question, la France a obtenu à la fois le maintien des 30 %, l'adoption des trois règles concernant le verdissement et, pour les surfaces d'intérêt écologique, la fixation d'un niveau de 5 % – cette proportion est un peu plus faible que celle qu'avait fixée la Commission, mais plus élevée que celle que le Parlement avait prévue.

Telles sont les orientations et les résultats de notre action ; nous aurons l'occasion d'en débattre dans le cadre de la loi d'avenir pour l'agriculture. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs des groupes écologiste et RRDP.)

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La parole est à M. Alain Marsaud, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire

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Nous regrettons que la question posée par M. Yves Fromion n'ait pas reçu une réponse suffisante. Il est vrai qu'elle est douloureuse puisqu'elle concerne le budget de la défense nationale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

J'associe mon collègue Jacques Myard à cette question sur la Syrie.

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Monsieur le ministre des affaires étrangères, le Président de la République et vous-même avez fait part récemment de votre souhait de mettre fin à l'embargo européen sur la fourniture d'armes à la Syrie, au motif que la diplomatie a échoué et que le régime Assad est sans doute largement armé par l'Iran et par la Russie, notamment.

Nul ici ne pense à soutenir ce régime : le père et le fils ont suffisamment démontré leur capacité à assassiner, dans le passé comme dans le présent.

Cependant, décider unilatéralement, ou même avec le Royaume-Uni, d'armer la résistance est lourd de conséquences, car les résistants les plus actifs, nous le savons, sont avant tout des djihadistes.

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Nicolas Sarkozy l'a fait en Libye ! (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.)

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Quelles armes létales envisagez-vous de fournir ? Quels groupes comptez-vous armer, voire surarmer, puisque l'Arabie saoudite et le Qatar les ont déjà largement équipés ?

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Quels sont vos moyens de contrôle sur la destination et sur l'usage de ces armes ?

Enfin, alors même que nous découvrons que l'on combat nos soldats au Mali avec des armes et des munitions provenant de Tripoli ou de Bengazi, l'on nous presse de fournir des armes antichars et des missiles sol-air à la résistance syrienne : sommes-nous prêts ici à assumer un attentat contre un avion de ligne dans trois mois, ou dans trois ans ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

Debut de section - Permalien
Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères

Nous avons eu récemment l'occasion de discuter en commission des affaires étrangères de cette question, que chacun, bien sûr, a à l'esprit.

La situation en Syrie est absolument dramatique. Une centaine de personnes meurent chaque jour, les réfugiés se comptent par milliers et l'embrasement gagne l'ensemble de la région.

Il n'y a pas opposition entre l'action diplomatique, absolument nécessaire, et l'action sur le terrain militaire. D'un côté, Bachar el-Assad refuse de bouger, dans la mesure où le contrôle de l'aviation lui permet de bombarder impunément la résistance ; de l'autre, les Russes s'appuient sur ce refus pour dire qu'ils n'y peuvent rien.

La bonne solution – vous l'avez esquissée – est diplomatique. Mais nous avons acquis la conviction qu'il n'y aura pas d'avancée diplomatique si, sur le terrain, les choses n'évoluent pas. D'où la question – qui n'est pas encore tranchée – de la levée de l'embargo.

Bien évidemment, si l'embargo devait être levé, il nous faudrait acquérir la certitude que les destinataires des armes ne les retourneront pas contre nous.

Debut de section - Permalien
Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères

Nous sommes en train de travailler sur cette question.

Vous avez évoqué le fait que les armes livrées en Libye se retrouvent aujourd'hui au Mali. Si nous avons soutenu l'intervention en Libye, nous constatons aussi qu'il n'y a pas eu de suivi.

Debut de section - Permalien
Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères

Nous ne voulons pas nous retrouver dans la même situation. Nous ne ferons pas en Syrie les mêmes erreurs que celles qui ont été commises à d'autres moments. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

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La parole est à M. Vincent Feltesse, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Hier, lors d'un vote solennel, nous avons adopté en première lecture la loi sur la refondation de l'école. Au mois de février, nous adoptions la loi sur les contrats de génération, dont les premiers se mettent en place cette semaine, et au mois d'octobre, la loi sur les emplois d'avenir.

Un fil rouge relie ces trois lois : la jeunesse de notre pays. Elle est l'objet d'un engagement fort de François Hollande et nous impose le devoir de réussir. Nous avons tous en tête ce chiffre inacceptable : 25 % des jeunes sont au chômage.

Madame la ministre, vous avez présenté ce matin en conseil des ministres votre projet de loi sur l'enseignement supérieur et la recherche. Il est l'aboutissement d'un long processus de concertation, qui a été marqué notamment par la tenue des assises de la recherche et par la remise du rapport de notre collègue Jean-Yves le Déaut.

Ce projet de loi comporte plusieurs volets, dont l'un concerne la réussite étudiante. On le sait, la question des études est fondamentale pour l'insertion professionnelle : la capacité de s'insérer est supérieure si la personne a eu accès à une licence ou à un master. Mais alors que l'objectif est que 50 % d'une classe d'âge accède au niveau licence, nous avons perdu cinq points ces cinq dernières années.

Madame la ministre, que proposez-vous concrètement pour la réussite étudiante dans votre projet de loi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe écologiste.)

Plusieurs députés UMP. Allô !

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La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

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Geneviève Fioraso, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Vous avez raison, le niveau de qualification et le nombre de jeunes diplômés de l'enseignement supérieur sont essentiels car ils conditionnent l'insertion professionnelle des jeunes, le dynamisme de notre économie et notre développement.

Depuis une dizaine d'années, la situation s'est dégradée : le taux de réussite en licence a baissé et la présence à l'université des jeunes issus de milieux modestes – qui s'amoindrit avec la durée des études – a diminué.

Le projet de loi sur l'enseignement supérieur et la recherche s'appuie sur une large concertation nationale et sur deux rapports. L'objectif que nous avons fixé – 50 % de jeunes diplômés – sera atteint grâce à la mise en oeuvre de plusieurs mesures nouvelles : l'accueil prioritaire des bacheliers professionnels et technologiques dans les filières STS et DUT pour éviter à ces jeunes, souvent d'origine modeste, de subir un échec à l'université ; l'accompagnement dans l'orientation, du lycée à la licence, insuffisant aujourd'hui ; le rapprochement entre grandes écoles et établissements d'enseignement supérieur, en particulier les universités, car notre système dual et parallèle, où les voies ne se croisent jamais, est unique au monde ; le renforcement des liens entre établissements et entreprises, avec des stages encadrés dès la licence et le doublement de l'alternance ; l'ouverture à l'économie ; un grand plan numérique ; la simplification radicale des intitulés de formation – est-il bien sérieux de conserver 10 000 masters ? ; une ouverture à l'international.

La grande rupture qu'instaure ce projet de loi, c'est qu'il concerne les familles et les étudiants. Il s'agit d'une mobilisation générale pour la qualification des jeunes, la réussite de leur parcours et pour le redressement de notre pays. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

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La parole est à Mme Claudine Schmid, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Ce week-end, l'Europe et le FMI ont décidé d'imposer à Chypre une taxe sur tous les dépôts bancaires, mesure jugée confiscatoire par les Chypriotes, qui se sont d'ailleurs rués sur les distributeurs. Dans l'incertitude, le système financier est toujours à l'arrêt.

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Cette nuit, cependant, et en dépit d'un amendement préservant les petits déposants, le Parlement chypriote n'a pas approuvé le plan d'aide internationale. C'est un échec cuisant. C'est le rejet de la gouvernance européenne dans sa politique directive. Ce rejet constitue une première, aux conséquences des plus incertaines pour la zone euro.

Les grands argentiers ont pris le risque de relancer la défiance contre la monnaie unique. Immédiatement, les bourses et l'euro ont fortement baissé. Les dirigeants chypriotes et européens vont devoir s'entendre sur une nouvelle version du plan de sauvetage, à moins que Chypre ne choisisse une solution non européenne.

La décision de taxer les dépôts bancaires contredit l'esprit, sinon la lettre, de l'engagement européen de soutenir la monnaie unique quoi qu'il arrive et de garantir tous les dépôts, sans exception, jusqu'à 100 000 euros. Désormais, ce n'est plus le cas. S'il est répété que la taxation des dépôts chypriotes est une mesure à caractère exceptionnel, voire unique, un principe sacro-saint a toutefois été bafoué.

J'aurai donc deux questions. Avez-vous mesuré, monsieur le Premier ministre, les conséquences de cette décision sur le ressenti de nos concitoyens à l'heure où l'Union européenne connaît une crise de confiance ?

En outre, si à Chypre ou dans un autre État européen les comptes des déposants devaient être touchés, prendriez-vous pour nos compatriotes des mesures identiques à celles prises par le gouvernement britannique pour ses ressortissants ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Madame la députée, je rappellerai tout d'abord que Chypre est dans une situation tout à fait exceptionnelle. Le montant de la recapitalisation de ses banques s'élève à 17 milliards d'euros, soit l'équivalent de son PIB. Son système bancaire est hypertrophié, puisque le niveau des dépôts y représente dix-sept fois le PIB. Et les pratiques des banques chypriotes sont très éloignées des pratiques bancaires usuelles qui prévalent dans la plupart des pays de l'Union européenne. Les dépôts étrangers y sont notamment très importants, ce qui justifie d'ailleurs que ces banques fassent aujourd'hui l'objet d'un audit.

Face à cette situation très particulière, qui ne ressemble en rien, je le répète, à celle des autres banques l'Union européenne, plusieurs décisions ont été prises. En premier lieu, l'Union européenne a marqué sa solidarité, à travers une aide de 10 milliards d'euros, destinée à remettre sur les rails le système bancaire chypriote, qui a vocation, comme tous les systèmes bancaires européens, à financer l'économie réelle.

Par ailleurs, nous avons considéré comme normal qu'un certain nombre d'oligarques russes et autres gros déposants contribuent à cet effort, car le contribuable européen n'a pas vocation à redresser à lui seul la situation d'un système bancaire caractérisé par son opacité.

Enfin, je ferai remarquer que le taux de l'impôt sur les sociétés est, à Chypre, anormalement bas. Nous devons profiter de la situation qui prévaut à Chypre pour engager l'harmonisation fiscale et demander à Chypre d'augmenter ses taux.

L'Eurogroupe a souhaité que des dispositions soient prises pour que les petits déposants ne soient pas taxés. La discussion doit se poursuivre à ce sujet. Le Parlement chypriote a rejeté la proposition de taxation d'un certain nombre de petits déposants. Nous souhaitons parvenir, avec la troïka, à une solution définitive, qui fasse reculer la spéculation et permette aux banques chypriotes de financer à nouveau l'économie réelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. Gwenegan Bui, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Ma question, à laquelle j'associe mes collègues Chantal Guittet et Paul Molac, s'adresse à M. le ministre chargé de l'agroalimentaire.

Le 27 février dernier, le tribunal de commerce de Rennes a placé les abattoirs de porc du groupe Gad en redressement judiciaire, ouvrant un délai de six mois pour sauver l'outil industriel et les emplois.

De Lampaul Guimiliau à Saint-Martin-des-Champs, de Saint-Nazaire à Josselin, ce sont plus de 1 700 salariés et leurs familles, des centaines d'éleveurs, en Bretagne et dans l'ouest, qui sont en sursis et dans l'angoisse du chômage.

La situation à laquelle sont confrontés Gad et l'ensemble de la filière porcine est le résultat de difficultés nationales et européennes, qui s'aggravent. C'est d'abord la forte hausse du coût des céréales, pénalisante pour les éleveurs. C'est, ensuite, la baisse de la production, due à l'empilement des règles européennes relatives au bien-être animal et des normes environnementales, qui sont utiles au regard des conséquences écologiques que l'on connaît, mais qui conduisent à des investissements très importants.

Enfin, dans un secteur où la masse salariale représente 80 % de la valeur ajoutée, nos concurrents européens, et surtout allemands, s'appuient sur un arsenal législatif déloyal. Cela crée une distorsion de concurrence, avec l'absence de salaire minimum dans la branche et avec la possibilité de recruter, via des prestataires de services roumains ou polonais, des salariés de l'est dont le coût oscille entre 4 et 7 euros de l'heure, alors qu'il dépasse 20 euros en France.

Ces avantages se traduisent par une réduction d'au moins cinq centimes d'euros par kilo de viande traité en abattage-découpe. Ils procèdent d'une interprétation extensive de la directive européenne relative au détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services. Cette interprétation fausse la concurrence et sape les fondements du vivre-ensemble européen !

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire comment le Gouvernement entend agir pour protéger l'emploi des salariés de Gad et redonner des perspectives d'avenir à toute la filière porcine française ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. le ministre délégué chargé de l'agroalimentaire.

Debut de section - Permalien
Guillaume Garot, ministre délégué chargé de l'agroalimentaire

Monsieur le député, la filière porcine traverse en effet une période très difficile, marquée à la fois par une baisse de la production et une hausse du coût des aliments pour animaux, tout cela dans un contexte européen très rude.

Ces difficultés, nous les avons anticipées, avec Stéphane Le Foll. Dès l'automne dernier, nous avons réuni l'ensemble des acteurs de la filière pour essayer de bâtir une nouvelle stratégie. Ce travail d'anticipation, qui aurait dû être fait depuis des années, n'avait jamais été mené. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - Permalien
Guillaume Garot, ministre délégué chargé de l'agroalimentaire

Le groupe Cecab et sa filiale Gad en paient aujourd'hui les conséquences. L'entreprise Gad a en effet été placée en redressement judiciaire. Il reviendra au tribunal de commerce de Rennes de se prononcer sur l'avenir des sites d'abattage et de transformation. Mais j'affirme ici à tous ses salariés que nous serons aux côtés des ouvriers ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

C'est avec l'ensemble des opérateurs de la filière, y compris le groupe Cecab, que nous allons explorer toutes les pistes économiques et industrielles possibles. Il nous appartient de définir collectivement un nouvel avenir pour l'ensemble de la filière porcine, et nous présenterons très prochainement, avec Stéphane Le Foll, ces nouvelles orientations, afin de concilier la performance économique, la mutation écologique – c'est très important – et…

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La parole est à M. Daniel Fasquelle, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Avant de poser ma question, je voudrais dire à M. Cazeneuve qu'il ne manque pas de culot car c'est tout de même avec la complicité du Gouvernement socialiste que l'Europe a mis en place un système de taxation invraisemblable des épargnants chypriotes, de tous les épargnants. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP - exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Après tout, ce n'est pas étonnant de votre part puisque vous ne cessez de taxer les Français, tous les Français, depuis que vous êtes au pouvoir.

Par ailleurs, nous avons bien compris votre objectif, madame Fioraso. L'autonomie des universités est l'une des rares réformes que le gouvernement socialiste n'a pas encore remise en cause mais la démarche est malheureusement lancée. Nous avons bien compris votre objectif depuis ce matin. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

J'en viens à ma question qui s'adresse à M. le Premier ministre. Grâce à l'action des gouvernements successifs sous l'impulsion du président Jacques Chirac, de nombreuses initiatives ont été prises pour faciliter l'accueil en milieu scolaire des enfants handicapés.

La France a néanmoins un retard encore important à rattraper, en particulier sur la scolarisation des enfants autistes.

Comment expliquer, dans ces conditions, que dans le cadre de la loi de refondation de l'école, un amendement donne désormais à l'éducation nationale la possibilité de demander le retrait de l'école des enfants et adolescents handicapés ?

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Cet amendement, proposé par les députés socialistes et adopté avec le soutien du ministre Vincent Peillon, représente une incroyable régression.

Est-ce là votre idée de la justice ? Est-ce là l'école de la République que vous nous préparez ? Une école où l'on n'accepterait que les enfants qui sont dans la norme ?

Monsieur le Premier ministre, les enfants handicapés ont besoin d'être au contact des autres pour progresser, mais c'est aussi grâce à eux que les jeunes Français pourront s'ouvrir au monde et devenir des citoyens responsables.

Monsieur le Premier ministre, allez-vous entendre la voix des familles qui sont profondément choquées et qui vivent douloureusement cette nouvelle stigmatisation ?

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Monsieur le Premier ministre, ma question est simple et je la pose au nom des familles. Allez-vous, oui ou non, renoncer à cette mesure qui opère un incroyable retour en arrière et représente une régression inacceptable ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe UDI.)

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La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.

Plusieurs députés UMP. Et des rythmes scolaires ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

Monsieur le député Daniel Fasquelle, je suis très étonné du ton que vous avez adopté pour poser cette question. Le projet de loi qui a été voté hier par l'Assemblée nationale, dans la continuité de la loi de 2005, reconnaît l'école inclusive pour la première fois, à la fois dans le rapport annexé et dans le code de l'éducation.

Ce Gouvernement, dès son entrée en fonction, a pris comme première mesure de recruter 1500 auxiliaires de vie scolaire individualisés pour accompagner les enfants en situation de handicap. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

Lors du débat parlementaire, la commission a proposé un amendement dont l'état d'esprit n'est pas du tout celui que vous dites, …

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

…voulant jouer sur la souffrance des gens. Il s'agit au contraire d'améliorer les liens entre les maisons départementales des personnes handicapées et l'État.

Dès ce matin, ma collègue Marie-Arlette Carlotti, au nom du Gouvernement, a fait savoir qu'en deuxième lecture au Sénat, du fait de l'émotion provoquée, nous allions reformuler (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.) l'amendement d'origine parlementaire. Vous le saviez. Le droit à l'éducation des enfants en situation de handicap comme de tous les enfants a été réaffirmé par cette loi. Nous y mettons les moyens…

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

…dans un esprit d'union et de continuité par rapport à la loi de 2005. Je considère que le ton que vous avez employé, alors que vous vous êtes informés, vous déshonore ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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Ce n'est pas acceptable ! (Clameurs sur les bancs du groupe UMP.)

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S'il vous plaît, mes chers collègues, je voudrais donner la parole à M. Marie-Jeanne. (Le tumulte se poursuit)

Nous avons bien compris que vous n'étiez pas d'accord avec le ministre de l'éducation mais je vous rappelle que, dans le cadre des questions d'actualité, il est le seul à pouvoir formuler une réponse et qu'il est maître de sa réponse. (Même mouvement et claquements de pupitre sur quelques bancs du groupe UMP.)

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La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine. (Exclamations prolongées sur les bancs du groupe UMP.) Du calme, mes chers collègues, encore une fois seul le ministre est responsable du contenu de sa réponse.

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J'espère que je ne suis pas l'objet d'un tel ressentiment ! (Sourires.)

Monsieur le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, depuis ma question au Gouvernement en date du 23 octobre 1997, concernant la loi « Sapin » et malgré les modifications successives apportées à la législation européenne, la problématique du transport public routier de personnes et du transport terrestre de marchandises en Guadeloupe et en Martinique reste entière.

En effet, leur réalité géographique étant ce qu'elle est, « une île restant une île », il apparaît difficilement concevable d'y adapter une réglementation prévue pour de vastes pays ayant des frontières terrestres communes.

Ces temps-ci, on parle beaucoup de la mise en place du « paquet routier » européen.

Là encore, les exigences qu'il prévoit pour l'accès à la profession restent toujours inadaptées à notre situation particulière.

N'est-ce pas M. Jean-Claude Gayssot, alors ministre des transports du gouvernement de Lionel Jospin qui déjà avait reconnu qu'eu égard aux usages en vigueur depuis plusieurs décennies en Martinique et en Guadeloupe, rendant difficile l'application de la loi d'orientation des transports intérieurs et de la loi Sapin, il était nécessaire de prendre des mesures tenant compte de cette réalité ?

Monsieur le ministre, n'est-il pas temps de sortir de l'impasse dans laquelle nous entraîne un tel cortège de mesures inappropriées ? (Applaudissements sur certains bancs du groupe GDR.)

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Monsieur Alfred Marie-Jeanne, vous venez de poser une question importante qui mérite une écoute respectueuse, sur tous les bancs de cette Assemblée (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) tant elle constitue un enjeu pour les outre-mer.

Vous avez raison de souligner qu'un certain nombre de textes, notamment des textes d'origine européenne, posent des difficultés d'application sur les territoires, particulièrement ceux d'outre-mer.

La prise en compte des outre-mer est une priorité que le Président de la République a affirmée. Elle est honorée par le Premier ministre, elle est concrétisée par l'ensemble des membres du Gouvernement au côté de Victorin Lurel pour que, sur chacune des politiques publiques, soit déclinée la prise en compte des enjeux particuliers des outre-mer.

À preuve, dès mon arrivée à la tête du ministère des transports, de la mer et de la pêche, j'ai eu à coeur de défendre la reconnaissance du statut de région ultrapériphérique pour l'ensemble des outre-mer, ce qui était un combat compliqué.

Vous faites référence aux trois règlements européens, dits « paquet routier ». C'est en effet un enjeu important et les obligations communautaires doivent être adaptées à la fois dans leur contenu mais également dans leurs modalités et leurs caractéristiques, aux spécificités des régions ultrapériphériques. C'est déjà le cas pour ce qui est de la Martinique. C'est vrai pour l'exigence du niveau de capacité financière et plus généralement pour les conditions permettant d'être inscrit au registre des professionnels. C'est vrai d'un certain nombre de phases transitoires qui sont aménagées pour permettre aux professionnels de la route d'appliquer progressivement un certain nombre de normes. C'est vrai également de la concrétisation des capacités de professionnels.

Soyez assurés de l'engagement de ce ministère et de l'ensemble du Gouvernement pour poursuivre la mise en place des dispositions adaptées. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. Arnaud Robinet, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Monsieur le ministre de l'éducation nationale, c'est par votre attitude que vous vous déshonorez ! Retournez à l'école pour apprendre la politesse et le respect ! Nous demandons au Premier ministre, au nom du Gouvernement, de présenter des excuses au groupe UMP. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Monsieur le Premier ministre, à Dijon, le chef de l'État a parlé de « courage » au sujet des retraites. Quoi de plus inquiétant quand on sait que la gauche n'a jamais eu le courage de réformer notre régime de retraite ? Ce sont des gouvernements de droite et du centre qui ont pris les décisions courageuses et responsables pour le sauvetage de nos retraites.

Sans la réforme de 2010, ce ne seraient pas 20 milliards d'euros de déficit qui seraient prévus à l'horizon 2020, mais 40 milliards ! Alors que nous poursuivions un objectif, celui de préserver le pouvoir d'achat des retraités et de sauver notre système par répartition, vous, par pure démagogie, vous appeliez à un retour à la retraite à soixante ans.

Prise par décret, la mesure du mois de juillet dernier va alourdir le déficit de nos régimes d'environ 7 milliards d'euros sur le quinquennat et mettre en péril l'ensemble de notre système de retraites.

Plus largement, c'est l'ensemble de votre politique économique de fuite en avant qui a de lourdes répercussions sur l'emploi, et donc, sur les rentrées de cotisations.

Monsieur le Premier ministre, vous avez mis en place une commission : c'est de l'enfumage. Nous connaissons les solutions à apporter. À un problème démographique, une solution démographique. Ayez le courage de dire aux Français qu'il va falloir travailler plus longtemps ! Ayez le courage de réformer de façon systémique notre système de retraites ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Ayez le courage de garantir l'équité entre le public et le privé ! Ce qui est humiliant, madame Lebranchu, c'est cette inégalité entre le privé et le public concernant le jour de carence ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Ne vous cachez pas derrière les partenaires sociaux qui ont décidé une désindexation des retraites ! Ne tournez pas autour du pot et dites la vérité aux Français ! Quelles solutions envisagez-vous ? Faites preuve de courage au moins une fois sur ce dossier ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le député, vous parlez beaucoup de courage, mais qu'avez-vous fait, vous, pour nous donner des leçons de courage ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Qu'avez-vous fait, puisque nous devons aujourd'hui reprendre la réforme des retraites ? (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Où est le courage quand ce sont celles et ceux qui ont commencé à travailler jeunes qui avaient à assumer l'ensemble des mesures que vous avez fait voter ? Où est le courage dans des mesures qui, aujourd'hui, laissent nos régimes de retraite en déficit et sans financement ? (Même mouvement.) Où est le courage lorsque des générations qui arrivent sur le marché du travail ne savent pas si elles pourront compter, demain, sur la solidarité entre les générations ?

Je vous le dis, monsieur le député, ce gouvernement saura faire preuve de courage, parce que le courage, c'est la responsabilité financière, mais c'est aussi la justice et l'équité, ainsi que la volonté que les carrières professionnelles soient prises en compte au moment du départ en retraite. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé, et nous l'assumons avec fierté, que les hommes et les femmes qui ont commencé à travailler jeunes pourront désormais partir en retraite à 60 ans sans attendre 62 ans comme vous le leur aviez imposé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Nous prendrons les mesures courageuses qui s'imposent et tous les Français seront appelés à contribuer.

Pour nous, monsieur le député, le courage, c'est inscrire une perspective financière, mais aussi une perspective de justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. Régis Juanico, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Ma question, à laquelle j'associe mon collègue Pascal Deguilhem, s'adresse à Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative.

Madame la ministre, le Centre national pour le développement du sport, le CNDS, a été créé en 2006, à la suite du FNDS – le Fonds national pour le développement du sport – pour soutenir le développement de la pratique sportive dans les territoires. Outre l'État, le CNDS associe à sa gouvernance le mouvement sportif et les collectivités locales.

Le CNDS constitue un outil majeur pour assurer la vitalité de la pratique sportive pour le plus grand nombre. Les élus présents dans cette assemblée peuvent tous témoigner de l'importance de ses interventions pour soutenir les projets des clubs locaux, les équipements portés par les collectivités territoriales et l'accès à la pratique sportive des publics qui en sont les plus éloignés.

À l'origine, la vocation du CNDS a toujours été de financer le sport amateur et le sport pour tous, l'État se concentrant sur les aides nationales aux fédérations sportives et sur le soutien au sport de haut niveau. Des moyens publics importants, de l'ordre de 270 millions d'euros, sont consacrés chaque année à cet établissement public.

À votre prise de fonction, madame la ministre, vous avez alerté les administrateurs sur la situation financière catastrophique du CNDS, avec une dette cumulée estimée à 485 millions d'euros fin 2012, héritage des décisions préjudiciables du précédent gouvernement.

En tant que rapporteur spécial des crédits du sport, j'ai moi-même tiré la sonnette d'alarme lors de l'examen du dernier budget sur les dérives du passé qui ont consisté à faire financer par le CNDS les grands équipements sportifs ou les grands événements internationaux, au détriment de sa vocation initiale.

Madame la ministre, un conseil d'administration du CNDS s'est tenu hier : pouvez-vous nous éclairer sur la situation actuelle de l'établissement et sur les mesures que vous comptez proposer afin que le CNDS continue à soutenir la pratique du sport pour tous, mais aussi la promotion de la santé par le sport sur nos territoires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à Mme la ministre des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative.

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Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative

Monsieur le député, vous avez raison de partager notre inquiétude s'agissant de cet outil essentiel qu'est le Centre national pour le développement du sport, pour le soutien au sport pour tous dans nos territoires.

Cette inquiétude a motivé deux actions : le préserver et le réformer.

Il fallait le préserver car, en 2012, cet établissement public avait engagé presque 500 millions d'euros pour l'exercice 2012, les dépenses excédant les recettes de 100 millions d'euros. Telle est la réalité ! Cet établissement public allait disparaître à court terme si nous n'avions pas pris des mesures essentielles pour préserver son avenir. Ces mesures, nous les avons prises en responsabilité, avec le mouvement sportif, et avec une très grande majorité des administrateurs, pour redresser les comptes du CNDS et lui assurer des recettes. Je remercie le Premier ministre, dont l'arbitrage a permis, malgré la baisse des droits télévisés, de maintenir les recettes du CNDS.

Nous devons également être attentifs aux dépenses. Nous allons recentrer ses missions, mais aussi diminuer les frais de fonctionnement et supprimer un certain nombre de grands projets pour lesquels l'établissement public ne disposait d'aucune recette.

Hier, lors du conseil d'administration, nous avons pu constater que l'endettement de l'établissement public avait été réduit. Cela étant, nous ne pouvions prendre qu'un quart des dossiers, parce qu'il est indispensable de réformer les critères d'intervention de cet établissement pour entrer dans une logique qui vise à lutter résolument contre l'inégalité d'accès aux pratiques sportives dans les territoires. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Oui, nous remettons au coeur du projet du Gouvernement la lutte pour l'accès au sport pour tous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe écologiste.)

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La parole est à M. Jacques Moignard, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste

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Ma question s'adresse à madame la ministre des affaires sociales et de la santé. En ce moment se tient, pour la 24e année consécutive, la semaine d'information sur la santé mentale, enjeu majeur de société et de santé publique. Le lien direct entre santé mentale et actes suicidaires est ainsi mis en lumière. Ce fléau touche chaque année plus de 200 000 personnes, soit une tentative toutes les deux minutes, et cause 11 000 décès, trois fois plus que les accidents de la route !

Les chiffres révèlent que 57 % des décès par suicide sont le fait des 35-65 ans et qu'ils surviennent après plusieurs tentatives. Il est impératif de se pencher sur ce phénomène qui touche également les adolescents et les jeunes adultes. Les antécédents familiaux et personnels, l'isolement social, les difficultés liées à la précarité et aux possibles discriminations s'avèrent être des facteurs de risque et des explications de ces drames. Le passage de l'adolescence à l'âge adulte est spécialement délicat, en particulier à notre époque caractérisée par des errements comportementaux dus à l'offre exponentielle des sollicitations de toute nature.

Face à ce problème majeur de santé publique, le Gouvernement s'est engagé le mois dernier à mettre en place une politique de prévention. Cet engagement ponctue positivement le programme national d'action contre le suicide qui court de 2011 à 2014. La création d'un observatoire national, la formation renforcée des professionnels de santé et l'incitation à la mise en réseau des acteurs institutionnels et associatifs devraient contribuer à prévenir encore mieux les passages à l'acte et les récidives.

Pouvez-vous, madame la ministre, nous indiquer les éléments significatifs de prévention prévus jusqu'au terme du programme national en 2014 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.)

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

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Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Nous sommes en effet au coeur de la 24e semaine annuelle d'information sur la santé mentale. J'ouvrirai d'ailleurs dans deux jours les rencontres des conseils locaux de santé mentale à Lyon. Vous mettez l'accent, monsieur le député Moignard, sur ce défi important pour notre société qu'est la lutte contre les suicides. Vous avez rappelé des statistiques qui recouvrent des drames bien réels : 200 000 tentatives et 11 000 morts par suicide chaque année, dont un tiers de personnes âgées. Parmi les jeunes de 15 à 24 ans, le suicide est la deuxième cause de mortalité après les accidents de la route. Nous devons donc nous mobiliser collectivement.

J'ai exposé il y a quelques semaines, devant le conseil économique social et environnemental, la mobilisation du Gouvernement pour faire placer davantage la prévention du suicide au coeur des préoccupations de santé publique. De ce point de vue, j'ai mis en avant trois orientations : mieux comprendre, mieux prévenir et mieux accompagner. Il faut mieux comprendre car, en dépit de l'ampleur du phénomène, nous ne disposons pas toujours des éléments d'information permettant d'identifier les causes et les âges précis. Un observatoire national du suicide sera donc prochainement mis en place, tant la connaissance est indispensable. Mieux prévenir consiste à former davantage les professionnels de santé, mal préparés à lutter contre le suicide et à le prévenir. Il faut enfin mieux accompagner car celles et ceux qui font une tentative de suicide ne le sont pas suffisamment à l'hôpital lorsqu'ils peuvent en sortir.

Tel est le sens de la mobilisation du Gouvernement. C'est tous ensemble, monsieur le député, que nous devons faire en sorte de faire reculer le suicide dans notre pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP et sur quelques bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Je m'adresserai d'abord au ministre de l'éducation nationale. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Abandonnez, monsieur le ministre, les paroles et les gestes déplacés régulièrement répétés ici ! Vous déshonorez et le Gouvernement et le Parlement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe UDI.)

Ma question s'adresse à madame la ministre des affaires sociales et de la santé. Les orientations baptisées « pacte de confiance à l'hôpital » par vous-même, madame la ministre, à la suite d'un rapport qui vous a été remis, font douter qu'il y ait un pilote dans l'avion.

La loi HPST qui vous irrite a clarifié en son temps la gouvernance par la mise en place de nouvelles instances de pilotage et a doté l'hôpital d'une chaîne hiérarchique claire et responsable. Le corps des directeurs hospitaliers et la fédération hospitalière de France ont adopté cette loi. Vous en êtes profondément choquée et prétendez que des mécontentements règnent au sein de l'hôpital. C'est que votre politique est dirigée à la petite semaine ! Le pacte de confiance ministériel, peu lisible, n'y changera rien.

La suppression du jour de carence pour les fonctionnaires hospitaliers ne représente pas moins de 70 millions d'euros à la charge de l'hôpital. La remise en cause de la tarification à l'activité, contraire à ce que font nos voisins européens, fragilise un peu plus les finances de l'hôpital public. Le maintien des 35 heures n'arrange rien au déséquilibre dans les services hospitaliers. La baisse des tarifs hospitaliers publics est sèchement critiquée par les personnels hospitaliers.

Cette opération médiatique n'a qu'un but, tourner la page de la loi Bachelot. Mais ces orientations relèvent du cosmétique ! Comment comptez-vous, madame la ministre, défendre le système hospitalier public sans toujours détricoter ce qui a été fait avant vous ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

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Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Permettez-moi de vous dire que vous ne manquez pas d'air, monsieur le député Door ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

En effet, compte tenu de la situation dans laquelle vous avez laissé l'hôpital public, donner des leçons à ce gouvernement sur la manière dont il faut le gérer relève au mieux de l'impudence et au pire de l'irresponsabilité ! Vous avez raison, monsieur Door, nous voulons tourner la page de la loi HPST ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Cette loi est funeste pour l'hôpital public, qu'elle a ravalé au rang d'une entreprise comme une autre. Elle a fait comme si médecins et soignants ne devaient pas être écoutés sur la manière de conduire l'hôpital public. Le résultat de votre politique, c'est le règne d'un climat d'incertitude, de défiance et d'anxiété dans nos établissements. C'est pourquoi nous avons fait voter, dès la loi de financement de la sécurité sociale, le rétablissement de la notion de service public hospitalier, qui doit être reconnu à part entière. C'est aussi pourquoi nous avons mis fin à la convergence entre les tarifs de l'hôpital public et ceux du secteur privé.

Nous comptons poursuivre dans cette voie. Dans quelques semaines, des textes réglementaires modifieront la gouvernance de l'hôpital afin de rendre sa place à la communauté soignante. Nous réengagerons par la suite le dialogue social en dédiant une enveloppe financière aux contrats locaux d'amélioration des conditions de travail au bénéfice de chaque hôpital. Enfin, nous moderniserons le financement de l'hôpital public.

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Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

La tarification à l'activité ne peut servir de fil conducteur à une politique ambitieuse de santé. Nous voulons prendre en compte l'évolution des besoins des patients et de la santé au XXIe siècle, non mener des guerres idéologiques de temps révolus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Situation de l'hôpital public

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La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures trente-cinq.)

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L'ordre du jour appelle la discussion et le vote sur la motion de censure déposée, en application de l'article 49, alinéa 2, de la Constitution, par M. Christian Jacob et 144 membres de l'Assemblée.

La parole est à M. Jean-François Copé, premier orateur inscrit, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Monsieur le Premier ministre, nous avons, cet après-midi, un devoir particulier.

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Un devoir qui s'impose à vous comme à nous : faire de ce débat un moment démocratique, un moment de vérité, l'une de ces circonstances rares où il est donné à l'exécutif, si puissant dans nos institutions, d'écouter l'opposition en se demandant si, par hasard, il n'y a pas aussi à apprendre d'elle.

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Je suis persuadé, monsieur le Premier ministre, que vous ne considérerez pas le débat sur cette motion de censure avec légèreté ou condescendance. Vous savez que c'est un rendez-vous important pour éclairer le peuple français sur la situation et l'avenir de notre nation. Car c'est bien de cela qu'il est question. Et, croyez-moi, je ne monte pas à cette tribune le coeur léger. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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J'y viens habité d'une forme de tristesse ou, plus exactement, de gravité, née d'un spectacle insupportable : l'affaiblissement, le recul et, je le redoute, la menace d'une défaite de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Je ne viens pas ici vous dire avec je ne sais quelle fierté partisane que nous avions raison et que nous vous avions prévenus.

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Non, l'heure est beaucoup trop grave et rend nécessaire le rassemblement de toutes les forces de la nation. Avec une vraie, profonde, ferveur patriotique, je viens, au nom de l'ensemble de l'opposition UMP, vous adjurer de changer de chemin pendant qu'il en est encore temps.

Je vais, dans un instant, critiquer sans concession votre politique. Je vais le faire en me concentrant sur les aspects économiques et sociaux. Il y aurait pourtant beaucoup à dire sur vos échecs en matière de sécurité, sur le démantèlement de notre politique pénale,…

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Vous avez laissé la France dans un état lamentable !

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…sur la violence qui monte, l'intégrisme qui menace, la peur qui grandit.

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Nous y reviendrons dans les prochains jours. Pour l'heure, je veux dénoncer votre politique économique et sociale dans l'espoir que vous y réfléchissiez et même que vous l'infléchissiez.

Notre nation connaît des heures extrêmement difficiles, notre peuple, une inquiétude considérable et croissante. Certes, il a su montrer dans son histoire tant de courage et d'abnégation qu'il pourrait aujourd'hui encore faire la preuve de cette endurance à la peine, qui fut si souvent sa grandeur. Encore faudrait-il que ces efforts aient un sens, que ces sacrifices ne soient pas vains et que l'on n'exige pas de lui un service inutile. Or, aujourd'hui, ce qui aiguise l'inquiétude des Français, c'est la conscience de plus en plus vive que l'on ne prend ni les bonnes décisions, ni la bonne direction. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP.)

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Les Français voient que vous vous trompez de diagnostic, que vous nous administrez une mauvaise médecine et que vous aggravez le mal que vous prétendez guérir. Ils regrettent aussi que vous ne doutiez pas davantage, que vous n'écoutiez pas davantage ceux qui ne pensent pas comme vous. Les questions au Gouvernement qui viennent de s'achever en ont donné une triste illustration.

Vous semblez avoir la certitude de ceux qui, persuadés d'être dans le vrai puisqu'ils sont dans la doctrine, marchent avec détermination vers l'abîme. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Alors, bien sûr, vous allez nous expliquer que tout est de la faute de Nicolas Sarkozy – je vous entends déjà –, que vous n'y êtes pour rien du tout et que vous avez besoin de temps. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Bref, le coup de l'héritage. Il est tellement plus facile de régler des comptes que de rendre des comptes. Mais alors, il va falloir aussi justifier vos mensonges aux Français.

Pourquoi leur avoir fait croire que, Nicolas Sarkozy parti, les problèmes se régleraient en claquant des doigts ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Pourquoi avoir nié l'ampleur de la crise en promettant que vous pourriez raser gratis ? Avant l'élection, votre acharnement contre Nicolas Sarkozy servait à masquer les faiblesses de votre programme (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), mais pour gouverner, il n'est d'aucun secours ; au contraire. Dès votre arrivée au pouvoir, par cette même obsession antisarkozyste, vous avez commis à nos yeux une première erreur majeure, en rayant d'un trait de plume des avancées décisives pour notre économie (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) : la défiscalisation des heures supplémentaires, le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, la fin de la retraite à soixante ans, la création d'une TVA antidélocalisation. D'un trait de plume, vous avez ainsi abaissé le pouvoir d'achat des Français, aggravé le déficit de l'État et de nos caisses de retraite, augmenté le coût du travail et affaibli notre compétitivité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

La responsabilité, c'est vous, et personne d'autre, qui la portez.

En réponse à cette motion de censure, vous nous lirez les longs paragraphes que vos conseillers vous ont forcément préparés pour vous défausser de votre responsabilité (Protestations sur les bancs du groupe SRC)…

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…en incriminant le passé. Les Français ne seront pas dupes ! Car c'est sur vous que les Français, y compris ceux qui vous ont élus, s'interrogent. Ils s'interrogent sur la justesse de vos choix et donc sur votre capacité à décider du destin de notre pays en cette période de crise.

Je veux le dire très clairement, contrairement à ce que vous faisiez dans l'opposition, il n'est pas question pour nous de nier la réalité de la crise qui est omniprésente, de nier que les difficultés de la France viennent de loin, que c'est son modèle qui s'essouffle et que c'est ce modèle qu'il faut repenser, comme nous avions commencé de le faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Oui, l'économie planétaire a radicalement changé. D'immenses forces concurrentielles se sont levées dans le monde, des États souverains géants disposent d'une main-d'oeuvre nombreuse et d'une épargne abondante, des entreprises sont devenues extraordinairement puissantes. La révolution du numérique, l'internationalisation du transport, de la communication, de la finance font que nous nous trouvons désormais aux prises avec ces forces immenses sur un seul et même théâtre d'opération : l'économie mondiale.

Ce glissement a amplifié l'affaiblissement du continent européen, donc du modèle français. Notre croissance annuelle était de 6 % dans les années 1950, de 3 % dans les années 1970, de 1 % dans les années 2000. L'heure de vérité a sonné : ou nous refondons notre modèle pour le rendre compétitif ou nous sortirons de l'histoire.

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Je viens ici vous demander d'abandonner l'immobilisme dans lequel vous êtes en train de plonger notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Quelle impudence. Avez-vous oublié que vous avez gouverné pendant dix ans ?

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Il est une condition qui est un impératif : assumer de véritables réformes, loin des petits calculs électoralistes de court terme dont vous abreuvez l'ordre du jour de l'Assemblée nationale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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Rappelez-vous le général de Gaulle et Jacques Rueff, en 1958. Regardez, aujourd'hui, l'Allemagne, monsieur le Premier ministre : elle aussi, vieux pays du Vieux continent, avec, elle aussi, une protection sociale très développée et des habitudes revendicatives fortes, et qui a dû digérer le choc de la réunification.

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Certes, l'Allemagne ne réussit pas tout, mais regardez comme elle a relevé le gant dans cette bataille mondiale. Ce qui est possible pour l'Allemagne est possible pour la France. J'ai même la conviction que l'on peut faire mieux que les Allemands ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Oui, nous sommes l'un des pays européens qui peut le mieux tirer son épingle du jeu : nous avons une démographie dynamique, des travailleurs qualifiés, productifs, des infrastructures puissantes, une épargne abondante. Alors, que manque-t-il donc ?

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Manquent les bonnes décisions adossées à un grand dessein. Tout est là, monsieur le Premier ministre. Tout le sens de cette motion, c'est de lancer un message d'alerte au gouvernement que vous dirigez, mais aussi, et je veux le dire devant la représentation nationale, un message d'espoir aux Français, en leur montrant qu'il y a un autre chemin. Alors, vite, sortez de l'impasse dans laquelle vous êtes en train de perdre la France ! Pour cela, commencez par tirer les conclusions de vos échecs.

Pour l'année 2013, François Hollande avait pris devant les Français quatre engagements solennels, quatre engagements qui permettent de juger de l'efficacité de sa politique.

Premièrement, vous aviez promis d'inverser la courbe du chômage en 2013. François Hollande le répétait encore le 21 décembre dernier.

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Deuxièmement, vous aviez promis d'atteindre un taux de croissance de 0,8 % – ce qui n'était déjà pas très ambitieux.

Troisièmement, vous aviez promis un déficit public à 3 %, dès cette année.

Quatrièmement, vous aviez promis de réorienter l'Europe avec un budget de croissance.

De ces quatre engagements fixés par François Hollande, en pleine connaissance de la situation de crise, que reste-t-il (« Rien ! » sur les bancs du groupe UMP) alors que l'audit de la Cour des comptes que vous aviez vous-même commandé a donné quitus de sa gestion à la majorité précédente ?

Premier engagement : le chômage. Le seuil des 10 %, hélas, est franchi. Chaque jour, depuis que M. Hollande est Président de la République, la France compte 1 000 chômeurs de plus. Malgré les créations d'emplois publics et la multiplication des contrats aidés, vous baissez les bras et annoncez que le chômage va continuer d'augmenter.

Deuxième engagement : la croissance. Là encore, les belles promesses n'ont évidemment pas été tenues. Loin des 0,8 %, nous atteindrons à peine 0 %.

Troisième engagement : le déficit public. Vous ne contrôlez plus rien. La perspective du retour à l'équilibre est, hélas ! totalement derrière nous. Nous devrions atteindre 3,7 % du PIB en 2013 et probablement 4 % en 2014. Avec vous, la France est incapable de tenir ses engagements.

Quatrième engagement : la relance européenne – et là, on atteint le pire résultat. Que dire ? Le retour à la réalité vous a tellement ridiculisés. Pour la première fois, le budget de l'Union européenne sera en baisse pour les sept prochaines années. L'Allemagne, le Royaume-Uni, les pays d'Europe du Sud même vous ont ri au nez ! Vos vaines promesses de renégociation du pacte de stabilité budgétaire resteront comme le symbole d'une gigantesque imposture électorale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Récapitulons : quatre engagements pour 2013, quatre renoncements et quatre échecs. Qu'avez-vous fait de la France, monsieur le Premier ministre ?

François Hollande, Président de la République, comme il disait :…

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…le chômage s'est lourdement aggravé, les faillites d'entreprises se sont multipliées.

François Hollande, Président de la République : la croissance française s'est effondrée ; le déficit et la dette se sont creusés.

François Hollande, Président de la République : la relance européenne s'est volatilisée.

Ces échecs ne sont pas le fruit du hasard. Ils sont le résultat de vos choix politiques en début de mandat. François Mitterrand avait prononcé cette phrase terrible : « Contre le chômage, on a tout essayé. ». Vous, c'est contre l'emploi que vous avez tout essayé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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Vous avez brisé l'élan réformateur lancé par la précédente majorité.

Vous avez alourdi le coût du travail et les contraintes qui pèsent sur les entreprises.

Vous avez insulté tous ceux qui prennent des risques et entreprennent.

Vous avez repoussé toutes les réformes courageuses.

Vous avez dépensé sans compter dès le premier mois du quinquennat, transformant le 6 mai 2012 en jour du Père Noël : augmentation du RSA, de l'allocation de rentrée scolaire, 60 000 promesses d'embauches dans la fonction publique. Comment voulez-vous tenir dans ces conditions ?

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Nous avons fait tout ce que vous n'avez pas fait !

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Et surtout, vous avez fait un choix fou, incroyable, irresponsable, le choix d'imposer à tous les Français un choc fiscal sans précédent. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Trente-deux milliards d'euros d'impôts en 2012 : un véritable coup de massue qui a assommé d'un coup tous les moteurs de l'économie française.

En dix mois, monsieur Ayrault, François Hollande a plus augmenté les impôts que la droite en cinq ans de crise. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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Depuis votre arrivée au pouvoir, le taux des prélèvements obligatoires a augmenté de 1,4 point.

Pire, monsieur Ayrault, vous avez menti aux Français : vous avez juré, la main sur le coeur, que neuf foyers sur dix seraient épargnés par les hausses d'impôts. C'était le 27 septembre 2012 sur France 2. Pourtant, chaque jour, vous en rajoutez des hausses d'impôt et contrairement à vos promesses de campagne, ce sont les classes moyennes qui sont vos premières victimes !

Vous avez décidé de relever de 0,1 point par an jusqu'en 2017 les cotisations vieillesse pour financer le retour partiel à la retraite à soixante ans. Qui sont visés : les riches ou les classes moyennes ? Pour un ouvrier qualifié touchant 1,3 SMIC, cette mesure se traduira par une perte de 120 euros chaque année !

Vous avez décidé de défiscaliser les heures supplémentaires et de supprimer les exonérations de charges salariales. Qui sont visés : les riches ou les classes moyennes ? Pour les 9 millions de salariés qui effectuaient des heures supplémentaires, cette mesure se traduira par une perte de pouvoir d'achat de 500 euros en moyenne tous les ans.

Vous avez décidé d'augmenter le forfait social de 8 % à 20 % sur l'épargne salariale. Qui sont visés : les riches ou les classes moyennes ? Cette mesure réclamera un effort de l, 2 milliard pour les 7 millions de salariés qui bénéficient du dispositif.

Et il en va de même pour le gel du barème de l'impôt sur le revenu, qui affectera 16 millions de contribuables, et pour la hausse des prélèvements sociaux sur les entrepreneurs indépendants, avec une perte pour 1 million de professions libérales, commerçants, indépendants, auto-entrepreneurs. Et je n'oublie pas la création d'une contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie pour les 8 millions de retraités imposables, la baisse du quotient familial, le passage aux cotisations sur la base du salaire réel pour les emplois à domicile ou encore la hausse de la redevance télé.

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De millions en milliards, vous avez étranglé les Français. Tous nous disent aujourd'hui qu'ils ne consomment plus, qu'ils n'investissent plus, qu'ils n'embauchent plus.

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Et lorsque, de plus en plus nombreux, des jeunes talents, des contribuables aisés, des entreprises quittent le pays, ils laissent une charge encore plus lourde pour les classes moyennes qui restent. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Vous avez cru que la célèbre formule « trop d'impôt tue l'impôt » était un slogan de droite. Vous découvrez que c'est une réalité !

Dès cette année, les rentrées fiscales ont chuté. Nous sommes au bord de la révolte fiscale et vous refusez de le voir. Au bout de dix mois au pouvoir, vous voilà résignés, fatigués. En fait, vous comptez les jours, espérant que la crise passe. Vous vous accrochez de manière presque infantile à l'idée qu'un jour ou l'autre, la reprise économique effacera vos erreurs.

Consciemment ou pas, vous vous contentez de conserver le plus longtemps possible des acquis dépassés au lieu d'inventer l'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Désormais, vous êtes au pied du mur. Soit François Hollande continue de louvoyer, spectateur impuissant du lent déclin économique et moral de notre pays, et alors, après être entré dans l'histoire comme le Président des impôts, il y restera comme le Président du chômage et du déclassement ; soit il change radicalement de politique pour porter les réformes que le XXIe siècle rend impératives et alors – je le dis avec solennité – il créerait les conditions d'une union nationale, dans l'intérêt du pays tout entier. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Aujourd'hui, au nom de l'opposition, je veux inviter François Hollande à faire ce choix du courage et de la grandeur. Je veux dessiner les contours d'une autre politique, une politique de relèvement de notre appareil productif, une politique fondée sur la confiance qui mise sur le génie de la France et le talent des Français, une politique qui renoue avec l'espérance et le goût de l'avenir !

Cette autre politique passe par un « big bang » économique et social.

Cette formule, je l'ai à dessein empruntée à Michel Rocard, en espérant qu'elle vous parle, monsieur le Premier ministre. Après tout, souvent méprisé par son propre camp, Michel Rocard a parfois eu l'audace de la lucidité dans les diagnostics qu'il formulait.

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Cette proposition de « big bang » économique et social est fondée sur une conviction inébranlable : la France est une grande nation. Tout la qualifie pour jouer dans le haut du classement. Si les bonnes décisions sont prises, les effets peuvent s'en faire sentir en très peu de temps.

Cela exige un préalable : faire le bon diagnostic.

Pour cela, il y a un indicateur que personne ne prend en compte alors qu'il est tout aussi important que le déficit budgétaire, c'est celui du déficit commercial : 67 milliards d'euros en 2012 pour la France alors que l'Allemagne a connu un excédent de 188 milliards.

Plusieurs députés du groupe SRC. À cause de vous !

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Qu'est-ce que cela veut dire ? Que notre modèle économique est totalement déséquilibré. Les Français produisent de moins en moins et sont obligés d'importer une part croissante de ce qu'ils consomment. Conséquence : un déficit en hausse et des usines qui ferment. Nous consommons, mais ce sont les autres qui produisent !

La crise française n'est pas une crise de la demande. C'est une crise de l'offre. Ce n'est pas notre capacité à consommer qui pose problème, c'est notre capacité à produire. Oui, ce qui est en cause, c'est notre capacité à produire et à vendre plus de biens et services. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Nous ne sortirons de l'ornière profonde dans laquelle nous nous enfonçons que si nous sommes capables de changer de modèle de croissance.

Dans les années à venir, 90 % du surcroît de demande adressé à l'Europe proviendra de pays non européens. Notre avenir dépendra donc de notre capacité à intégrer la valeur ajoutée, ici, sur le territoire national en produisant en France et de notre capacité à vendre à l'international et de nous arrimer à la croissance mondiale. C'est ce défi qui est posé. Il commande de produire plus et mieux.

C'est ce que j'ai appelé le front des producteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Je m'explique : avant d'être des consommateurs, nous devons être des producteurs. Oui, tous les Français sont des producteurs : les ouvriers, les employés, les cadres, les entrepreneurs, les chercheurs, les investisseurs, les créateurs, les agriculteurs, les artisans, les professions libérables, les fonctionnaires même qui produisent des services publics. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mobilisons toute la communauté nationale en faveur de ce « front des producteurs », un front qui tourne le dos à la lutte des classes à laquelle vous vous référez si souvent et qui associe le travail et le capital, bref : toutes les forces de la France rassemblée au lieu d'être stigmatisée comme elle l'est aujourd'hui.

Ce n'est pas vous, monsieur le Premier ministre, qui créez les emplois dans notre pays. Ce sont les producteurs qui vont embaucher, ce sont les investisseurs qui vont financer la reprise, ce sont les Français eux-mêmes qui vont sortir de la crise. Oui, mais à condition que vous cessiez de les brider et de les matraquer, à condition que vous arrêtiez de pointer du doigt la différence et la réussite.

Pour cela, il y a quatre impératifs.

Premièrement, il faut libérer les Français de l'étranglement. Je vous demande d'arrêter immédiatement toute hausse d'impôts ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Il est même impératif de baisser les prélèvements obligatoires, tout particulièrement lorsqu'ils touchent le travail et les outils de production.

Renoncez notamment à cette folie pure qu'est l'alignement de la fiscalité du travail et du capital, comme vous voulez le faire. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) Écoutez donc les économistes de gauche.

Relisez Henri Sterdyniak, initiateur du Manifeste des Économistes Atterrés – par votre politique. Relisez Philippe Aghion, conseiller du parti socialiste : « Il n'y a aucune étude théorique sérieuse qui justifie que le capital soit taxé à l'identique du travail. Le capital, c'est de l'épargne. Ce sont donc des revenus accumulés qui ont déjà été taxés. Taxer les revenus du capital revient donc à taxer deux fois le travail. » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Il faut atterrir, comprendre ce qu'est la réalité du monde d'aujourd'hui.

Certes, il faut baisser drastiquement la dépense publique inutile. Mais, pour l'instant, vous en êtes incapables. Pire, vous l'augmentez. Il n'y a qu'un poste budgétaire que vous vous apprêtez à sacrifier en toute irresponsabilité : la défense nationale. Ben voyons ! Dans un siècle où l'instabilité rend l'effort de défense indispensable, vous baissez la garde. C'est irresponsable alors que tant de nos soldats sont engagés au service des valeurs de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Osez plutôt lancer de véritables réformes structurelles ! En cette période de crise, les fonctionnaires qui bénéficient de la protection de l'emploi doivent prendre part aux efforts demandés. Ils y sont prêts. Il nous faut envisager qu'ils puissent travailler trente-neuf heures par semaine, être moins nombreux et mieux payés, mieux considérés aussi, mieux reconnus dans leur carrière. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

De la même manière, monsieur le Premier ministre, peut-être pourriez-vous donner l'exemple avec votre Gouvernement. Sans vous faire offense, il y a dans votre équipe pléthorique de trente-huit ministres plusieurs personnes dont les Français ne connaissent ni le nom ni l'activité. Quinze ministres pour piloter l'action publique, il me semble que ce serait largement suffisant. (Exclamations sur quelques bancs du groupe SRC.)

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Baissons le nombre d'élus à tous les échelons. Quelle erreur, de ce point de vue, d'être revenus en arrière sur la fusion des conseillers généraux et régionaux. Quelle idée absurde de mettre deux conseillers généraux par canton, en tuant par la même occasion la représentation de nos territoires ruraux. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDI.)

La sécurité sociale ne peut pas être épargnée par l'effort de maîtrise budgétaire : réforme des retraites avec convergence totale des régimes du privé et du public, refonte des indemnisations chômage, réforme du régime des intermittents du spectacle, convergence des tarifs entre l'hôpital et les cliniques privées, lutte massive contre ces fraudes sociales que nous dénonçons sans relâche.

Aucune piste ne doit être écartée dès lors qu'il s'agit de courage politique.

À cela, il y a une condition : ne pas démanteler notre politique familiale, car c'est une politique d'investissement pour l'avenir.

Monsieur le Premier ministre, qu'avez-vous donc contre les familles ? Pourquoi refusez-vous de soutenir ceux qui prennent la responsabilité d'élever des enfants qui sont une chance pour la société tout entière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Pourquoi faites-vous comme si un revenu de 4 400 euros était la même chose pour une personne seule ou une famille avec deux ou trois enfants à charge ?

Les Français préfèrent-ils un déclin démographique compensé par un surcroît d'immigration, ou bien une politique familiale ambitieuse au service d'une démographie dynamique ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP. – Exclamations et huées sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

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Deuxième impératif : libérer le travail. Il faut une profonde transformation de notre rapport au travail. J'ai demandé un moratoire sur les 35 heures, parce que j'ai bien compris que, par idéologie, vous n'étiez pas prêts à les abandonner. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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Et vous, pourquoi ne les avez-vous pas supprimées ?

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Mais au moins, suspendez-les ! Lancez sans attendre des négociations entreprise par entreprise car, si l'on n'augmente pas le temps de travail, la feuille de paye des salariés s'effondrera, comme on le constate déjà, hélas ! en Espagne, en Italie, en Grèce ou à Chypre.

N'oubliez pas non plus les autres chantiers : contrat de travail unique, allègement des procédures prud'homales, rétablissement de la TVA anti-délocalisation – nous avons mille exemples de mesures concrètes à adopter pour libérer l'économie !

Par ailleurs, croire qu'une poignée d'emplois jeunes réglera le problème du chômage des jeunes est bien désolant, alors que vous n'avez rien fait pour l'apprentissage. Pis, quelle erreur d'avoir laissé M. Peillon nous imposer de voter en catimini la suppression de l'apprentissage à quatorze ans pour les jeunes qui le souhaitent ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Troisième impératif : arrêtons, comme le disait Georges Pompidou, d'« emmerder les Français » ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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Arrêtons de faire perdre du temps et de l'énergie à ceux qui se battent pour l'emploi : les patrons de PME, les artisans, les agriculteurs, qui embauchent, innovent et exportent.

Le code du travail : 3 600 articles ! La feuille de paye : 22 lignes ! Simplifions la vie des Français. Imaginons, par exemple, de doubler les seuils sociaux qui entravent le développement des PME : il n'est pas normal que l'embauche d'un cinquantième salarié entraîne la multiplication de toutes les contraintes.

Quatrième impératif : gagnons la bataille de l'imagination. Il faut produire plus, mais il faut aussi produire mieux, produire nouveau, produire durable. Plutôt que de faire de la France un enfer fiscal, faites-en un paradis de l'innovation, de la recherche et du développement !

Par miracle, vous n'avez pas supprimé le crédit d'impôt recherche. Mais alors, allons plus loin : permettez, par exemple, à ceux qui innovent de toucher les fruits de leurs inventions, comme c'est le cas aux États-Unis ou en Israël. Faites en sorte que ceux qui ont fait fortune en France restent en France, pour investir et innover ici plutôt que de l'autre côté de la frontière !

Travaillez avec nous à une vraie réforme de l'éducation nationale, monsieur Peillon, plutôt que de vous livrer à cette pantomime sur les rythmes scolaires qui exaspère les Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

En libérant ainsi les énergies, vous n'irez pas contre la justice sociale, bien au contraire, monsieur le Premier ministre. C'est par la croissance et la création de richesses que l'on peut redistribuer. Dans une société figée, les espoirs sont bridés, les rêves sont anémiés et vos allocations n'y changeront rien.

La vraie justice sociale, qui a inspiré les rédacteurs du Conseil national de la Résistance et permis la reconstruction, ne consiste pas dans l'assistanat et la gestion de la pénurie.

« Le changement, c'est maintenant », chantiez-vous à tue-tête ; eh bien, les Français rêvent que vous changiez, maintenant. Changez de politique, non pour satisfaire l'orgueil de l'opposition, mais pour le bien de la France.

Je ne vous demande pas de faire une politique de droite, je vous demande de faire une bonne politique (Sourires et exclamations sur les bancs du groupe SRC),…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…une politique pour tous les Français.

Il existe, à gauche, des figures qui pourraient vous inspirer, en France comme à l'étranger. Soyez Schröder, lançant les réformes qui ont permis à l'Allemagne de sauver son modèle social en renforçant sa compétitivité. Soyez Blair, modernisant dans un même mouvement et le Labour et le Royaume-Uni.

Soyez Mendès France, soyez Clemenceau ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Mais ne soyez pas le Mitterrand des nationalisations et de la retraite à soixante ans ! Ne soyez pas le Jospin des 35 heures et des emplois jeunes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Si vous engagez ce grand changement que j'appelle de mes voeux, alors nous serons à vos côtés. Mais il ne s'agit pas seulement de changer de politique : il convient aussi de changer votre manière de gouverner, parce que notre pays a besoin, pour se battre, de se rassembler, d'avoir confiance en lui-même et en ceux qui le dirigent. Il a besoin de courage et de droiture.

Certes, M. Cahuzac a démissionné sous la pression judiciaire, et si les faits étaient avérés, ce serait extrêmement grave. Mais notre honneur est d'avoir respecté la présomption d'innocence ; honneur dont vous avez singulièrement manqué lorsque vous étiez dans l'opposition ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

De plus, vous ébranlez la confiance dans la parole publique en multipliant les dérapages, monsieur Ayrault. Vous laissez vos ministres remettre en cause l'autorité républicaine : pas de désaveu quand le ministre en charge de l'éducation nationale, celui-là même qui prétend donner des cours de morale à nos enfants, s'exprime en faveur de la dépénalisation du cannabis ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Pas de renvoi quand votre ministre des anciens combattants annonce en plein hémicycle une libération d'otages qui n'a, hélas, pas eu lieu !

Pas de condamnation quand votre ministre en charge de l'outre-mer ose comparer Chavez à Léon Blum et au Général de Gaulle,…

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…Chavez, ce dictateur au petit pied dont les atteintes aux libertés fondamentales ont été dénoncées par toutes les ONG du monde, et devant lequel votre allié électoral, Jean-Luc Mélenchon, verse des larmes de crocodile ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

L'impunité est permanente, et pas seulement en paroles : vos actes témoignent également d'un dangereux manque de lucidité. Laissez-moi vous citer deux exemples emblématiques qui ont semé le plus grand trouble dans l'esprit des Français.

Premier exemple : la suppression du jour de délai de carence pour les agents de la fonction publique. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.) Comment avez-vous pu accepter une telle décision, qui divise le peuple de France, avec, d'un côté les travailleurs du public, qui bénéficieraient d'attentions privilégiées de votre part, et, de l'autre, ceux du privé, qui n'auraient que des devoirs ?

Les travailleurs du privé n'ont pas la garantie de l'emploi, leur rémunération nette est inférieure en moyenne de 15 % à celle du public et leur durée du travail supérieure en moyenne de 7 % : qui peut l'accepter ?

Quant aux fonctionnaires, vous les méprisez en les traitant comme une clientèle que l'on achète avec l'argent des autres. Vous avez pourtant affaire à un corps qui, dans son immense majorité, est dévoué au service de l'État, capable de comprendre et d'accepter les impératifs d'une bonne gestion des deniers publics. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Deuxième décision, qui ne vous honore pas – c'est un euphémisme – : l'amnistie que vous avez laissé voter au Sénat pour les syndicalistes qui ont commis des délits de destructions, de dégradations ou de détériorations, encourant une peine de cinq ans d'emprisonnement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

En soutenant cette mesure d'amnistie, vous donnez votre bénédiction à la violence et vous exposez nos forces de l'ordre à la brutalité. En effet, qui sème le vent récolte la tempête : à peine la loi votée au Sénat, dix-neuf policiers ont été blessés le 7 mars dernier, lors d'une manifestation devant le siège de l'entreprise Goodyear !

Je sais qu'il se trouve à gauche des républicains sincères qui partagent le trouble ressenti par les Français. Qu'ils aient le courage de partager aussi cette dénonciation !

Par ailleurs, le camouflet électoral reçu dimanche dernier dans l'Oise – votre parti n'étant même pas présent au second tour – ou encore l'échec retentissant du premier déplacement de François Hollande à Dijon montrent le fossé qui vous sépare des Français. Il ne s'agit pas d'incompréhension, mais d'un rejet !

En Bourgogne, François Hollande a expliqué à nos concitoyens : « La crise que nous avons traversée a été rude. Je parle déjà au passé composé, presque à l'imparfait. » Que de légèreté dans ce propos ! Quelle indécence pour nos concitoyens frappés chaque jour par la montée du chômage ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Pour étouffer la clameur des Français, vous multipliez les manoeuvres de diversion. Mais en ces heures difficiles, comprenez qu'il faut vous concentrer sur l'essentiel : oeuvrez au rassemblement national et abandonnez les ferments de la division. Remisez votre projet de mariage et adoption pour tous ! Remisez votre droit de vote des étrangers ! Remisez vos tripatouillages de scrutins électoraux ! Vous ne devez avoir en tête que la sortie de la crise et l'intérêt de la France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Monsieur le Premier ministre, vous n'avez plus la confiance des Français ni l'estime de vos électeurs, et vous allez d'échecs en échecs ; peut-être cela pourrait-il vous permettre de vous libérer. Ne pensez plus le nouveau monde avec les vieux concepts. Faites confiance aux Français. Croyez en la France !

Prenez part avec nous à ce front des producteurs que j'appelle de mes voeux et que nous allons, à l'UMP, mobiliser sur tout le territoire. Ce front des producteurs qui n'est ni de gauche, ni de droite, mais qui garantira le progrès social et la prospérité de notre nation dans une économie mondialisée.

Cette motion de censure constitue un premier avertissement, celui que de nombreux Français veulent par notre voix vous adresser. Ce front des producteurs porte l'héritage des valeurs qui font la force de la France : le mérite, le travail, l'ingéniosité, la générosité – en trois mots : la liberté, l'égalité, la fraternité !

Voilà, monsieur le Premier ministre, pourquoi il vous faut dès maintenant changer de politique. Vous n'avez plus de temps à perdre : changez maintenant car, après, il sera trop tard, et les Français sauront vous le rappeler ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, dont de nombreux députés se lèvent, et du groupe UDI.)

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La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. (Les députés des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP se lèvent et applaudissent longuement. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Monsieur le député Copé, en écoutant votre réquisitoire contre mon gouvernement, je songeais à cette phrase de Clemenceau,…

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

…que vous avez d'ailleurs cité : « Ne craignez pas de vous faire des adversaires : si vous n'en avez pas, c'est que vous n'avez rien fait. » Nous agissons pour la France et je suis fier de m'être fait des adversaires ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

Toutefois, je n'ai pas le goût ni le temps de me consacrer à ces querelles. Le 6 mai 2012, le peuple français a tranché les responsabilités : il vous a censurés et nous a mandatés ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Je sais que vous m'attendez pour un règlement de compte.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Mais pour ma part, je vous invite au redressement de la nation.

J'ai la conviction profonde que l'honneur de la politique consiste à s'élever à la hauteur des grandes épreuves que subit la France et à faire preuve de courage pour transcender nos différences lorsque l'intérêt général du pays l'exige. Mesdames, messieurs les députés, nous sommes présents au rendez-vous qui commande d'aller à l'essentiel ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Il nous faut repenser un projet national et européen que la crise et les mutations du monde ont profondément ébranlé.

Il nous faut répondre à cette angoisse du déclassement personnel et collectif qui s'est installée depuis plusieurs années dans tous les esprits, dans tous les foyers, même les mieux protégés.

Il nous faut réveiller l'espoir en nous-mêmes et en notre capacité de nous en sortir ; j'ai la conviction que la France peut y parvenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Pour cela, mesdames et messieurs les députés, la France doit s'aimer davantage et apprécier ce qu'elle réalise de noble, de grand et d'universel. Elle doit reconnaître ses nombreux atouts, admettre qu'elle consent beaucoup d'efforts et faire preuve de courage, d'initiative et d'audace pour conserver son rang dans le grand concert des nations.

Sans cesse, on lui renvoie la même image d'une puissance déclinante, incapable de se réformer et de s'adapter aux grandes évolutions. Un jour, on vante les vertus du modèle britannique, un autre celles du modèle allemand ; puis l'on cite les exemples américain, brésilien, et même récemment russe, pour certains. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Or mon modèle, mesdames et messieurs les députés, c'est la France ! Ma référence, c'est la République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC, dont de nombreux députés se lèvent, et des groupes écologiste, GDR et RRDP.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Debout !

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Mesdames, messieurs de l'opposition, vous ne cessez d'imposer au pays une vision négative de lui-même ; comment, dès lors, pouvez-vous vous étonner de voir prospérer les démagogues ?

Quand, chaque jour, on concède une part de nos valeurs, on offre la nation en pâture au dénigrement, on sème la peur, il ne faut pas s'étonner de récolter les fruits amers du populisme.

La peur, mesdames et messieurs les députés, ne constitue pas un programme : elle conduit à la paralysie, ce dont nous ne voulons pas ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

C'est pour lutter contre cette résignation que j'ai été mandaté par le Président de la République. J'ai pour mission de traiter l'urgence économique, de vaincre le chômage de masse,…

Plusieurs députés du groupe UMP. Au travail !

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

…de défaire l'injustice. Mais il me faut surtout répondre au doute qui taraude la nation tout entière. Comment retrouver le chemin de notre destin ? Comment repenser le modèle français, quand tous vos discours paraissent le condamner ? Il ne s'agit pas de sortir d'une dépression passagère, mais de réarmer le pays, de lui donner la force de faire face aux nouvelles mutations du monde. Voilà la mission du Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

À ces questions, il y a trois réponses possibles.

La première est celle du repli sur le carré national, la fermeture des frontières, la sortie de l'euro, la fuite en avant dans la dépense publique. Cet enfermement est le contraire de la grandeur. Il désigne sans cesse des boucs émissaires, cherche toujours des excuses à son impuissance et conduit au déclin les pays qui s'y sont abandonnés. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Je récuse avec la même force, monsieur Copé, la tentation du « teapartisme », cette combinaison du libéralisme économique et d'une droite autoritaire et ultraconservatrice, qui conduit à amputer la République de ses valeurs d'égalité et de fraternité. Ce n'est pas la solidarité qui nous tire vers le bas, mais ceux qui la défont et qui, ce faisant, affaiblissent la capacité de la France à s'en sortir et à maîtriser son destin. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Le nouveau modèle français que je défends repose sur l'idée que les valeurs constitutives de la République sont les leviers de notre modernisation, qu'elles ne sont pas le problème mais la solution. C'est parce qu'ils ont remis la France en concordance avec ses valeurs que les grands républicains de notre histoire ont réussi à redresser et à moderniser notre pays. C'est parce que nous aurons le même courage de changer, de réformer ce qui bloque notre société, que nous la redresserons. Cessons d'accuser les autres (« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP), de penser qu'ils sont la cause de nos difficultés. Le secret de notre réussite, ce sont nos réformes. Et j'affirme ici que les réformes que nous avons engagées sont fidèles à ce que nous sommes profondément, nous, le peuple français.

Mesdames, messieurs les députés, je sais où je vais. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC – Rires et exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.) Je sais comment y parvenir. Je sais ce que la France doit être au terme de ce quinquennat ; c'est à cela que je me suis attaqué dès le premier jour. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Un État désendetté qui soit respecté ; une fiscalité stable mais juste ; une économie affermie par la réindustrialisation et par l'écologie ; des entreprises dont la compétitivité repose autant sur la montée en gamme que sur la qualité du dialogue social ; des nouvelles sécurités pour le travail, qui cassent la logique du chômage de masse et la précarité et relancent la mobilité sociale et salariale ; une protection sociale assainie et plus juste ; une société responsabilisée et plus soudée qui fait vivre ses principes de laïcité et d'égalité des droits ; enfin une jeunesse qui a la certitude d'avoir sa place…

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

…et qui réveille chez tous l'envie du progrès : de tout cela, je prends l'engagement devant vous. C'est le programme du quinquennat et c'est là que nous voulons conduire la France ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

Oui, mesdames, messieurs les députés, le pacte que nous voulons nouer avec les Français, il est d'abord là, dans cette volonté de retrouver la maîtrise d'un destin collectif. C'est tout le sens de mon combat contre la dette. En se substituant à l'effort industriel et productif, en alimentant la spirale spéculative, la dette a aliéné la liberté de la France de décider par elle-même de sa propre politique. Elle l'a rendue dépendante des banques et des marchés financiers. Elle a affaibli son influence en Europe et dans le monde.

Oui, la dette est l'ennemie de la France parce qu'il n'y a pas de souveraineté dans la dépendance des marchés financiers et qu'il n'est pas juste de laisser la facture à nos enfants et petits-enfants. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

Oui, j'ai pris l'engagement, avec le Gouvernement, de ramener les comptes à l'équilibre en 2017, parce que restaurer les finances publiques c'est dégager des marges de manoeuvre pour investir. Cet effort a démarré dès le premier jour.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

La réduction de notre déficit structurel est sans précédent : elle représente 2 % de la richesse nationale en 2013. Aucun gouvernement n'y était jamais parvenu. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Oui, nous mettons de l'ordre dans les finances publiques. En dix mois, mon gouvernement a eu le courage de faire les trois choses que vous n'avez jamais osé faire :…

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

…réduire les déficits, comme aucun de nos prédécesseurs sous la Ve République ne l'avait fait ; rétablir la justice des prélèvements en demandant l'effort à ceux qui ont le plus, quand vous, mesdames, messieurs de l'opposition, avez ponctionné les classes populaires et les classes moyennes (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC) ; engager un programme d'économies sans précédent. Le Gouvernement va continuer de le faire. Vous avez déposé le bilan de la France. Nous, nous le redressons ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

Quand je veux réhabiliter ce principe élémentaire de gestion rigoureuse de l'argent public, ce n'est pas pour substituer une austérité de gauche à une austérité de droite, ce n'est pas pour accabler les Français de taxes et d'impôts. (Rires et exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.) L'essentiel du redressement de nos finances viendra de l'effort sur la dépense publique auquel chacun doit prendre sa part et la prendra.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Ma rigueur, c'est d'abord cette détermination – je dis bien : cette détermination – réformiste, assumée et sans faille. « Gouverner, c'est choisir », affirmait Pierre Mendès France. La politique, pour moi et les membres de mon gouvernement, ne peut se concevoir comme un simple ajout de promesses nouvelles que l'on additionne aux acquis sans jamais se poser la question du règlement de la facture. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

J'assume devant vous et devant les Français la stratégie de compétitivité qui impose que la nation consente, en effet, un effort historique pour rétablir son appareil productif et industriel.

J'assume la modernisation de l'action publique et la nouvelle loi de décentralisation, parce que dans le pacte séculaire qui unit la France et son État, chaque fois que la puissance publique a donné l'exemple et l'impulsion, la société tout entière s'est mise en mouvement. C'est ce à quoi nous voulons parvenir.

J'assume d'entreprendre la rénovation complète de notre protection sociale. La laisser se scléroser dans les déficits, c'est la rendre inégalitaire et de moins en moins protectrice.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cela fait neuf mois que vous êtes au pouvoir !

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Mais j'assume aussi, avec la même fierté, d'avoir entrepris les grands programmes d'investissements qui vont produire la croissance : le programme de transition écologique (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP) ; le plan numérique, qui équipera tous les territoires de la France en haut débit ; le nouveau Grand Paris, qui va remodeler la région capitale et bénéficiera à l'ensemble du pays ; la relance du logement abordable, grâce à l'encadrement des loyers, au programme de cession gratuite des terrains, au programme de 150 000 logements sociaux chaque année et à l'isolation thermique, mais aussi aux ordonnances à venir (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP),qui serviront exclusivement à nettoyer l'accumulation de normes et de réglementations bureaucratiques. Nous le ferons aussi pour les entreprises et les collectivités locales. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

J'assume la refondation de l'école, qui s'attaque aux racines du décrochage de notre système éducatif, et, surtout, partout, la grande bataille de l'emploi. Nous lui avons donné tous les moyens disponibles,…

Plusieurs députés du groupe UMP. Ah bon ?

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

…nous lui avons consacré toutes les réformes : le pacte de compétitivité, les contrats de générations, les emplois d'avenir, la Banque publique d'investissement, la réforme bancaire, l'accord sur la sécurisation de l'emploi et la réforme à venir de l'orientation et de la formation professionnelle.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Vous avez voté ces réformes, mesdames, messieurs les députés de la majorité, et je vous en remercie. Je le dis avec force : grâce à tous ces outils, nous gagnerons ensemble la bataille de l'emploi ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

En dix mois – car ces réformes ont été votées en dix mois –, nous avons fait ce que vous n'avez pas fait en dix ans. Qu'on m'oppose un précédent dans l'histoire de notre pays où des réformes d'une telle ampleur ont été conduites avec tant de constance et de cohérence, en si peu de temps ! Je demande qu'on me le dise, car cela ne s'est encore jamais produit.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Désormais, comme je viens de le dire, les outils sont là. C'est pourquoi j'appelle chacune et chacun à la mobilisation pour les mettre pleinement en oeuvre et leur donner toute leur force, afin de permettre aux Français d'avoir toutes leurs chances et aux réformes que vous avez votées de porter leurs fruits, pour eux, pour leurs enfants et pour la France. Voilà notre responsabilité collective ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Ma rigueur, c'est l'esprit de responsabilité. Mais il n'y a pas de responsabilité sans exemplarité (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI), pas de consentement aux réformes si ceux qui ont le plus ne contribuent pas le plus à l'effort nécessaire, et c'est ce que nous avons engagé. C'est pour cela que nous avons entrepris la réforme fiscale que vous avez contestée il y a quelques instants, monsieur Copé, réforme qui rétablit l'équilibre entre le capital et le travail. C'est pour cela que nous avons mis en place une tranche supérieure sur l'impôt sur le revenu, supprimé le bouclier fiscal et rétabli l'impôt de solidarité sur la fortune que vous aviez supprimé.

Nous avons veillé à protéger le pouvoir d'achat des classes populaires, plafonné les rémunérations des dirigeants des entreprises publiques. Dans quelques semaines, mesdames, messieurs les députés, je vous proposerai un projet de loi pour que ces mesures s'appliquent aussi aux dirigeants des grandes entreprises privées. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Cette rigueur de comportement doit s'imposer également à nous, représentants de la nation, quoi qu'il en coûte – je dis bien : quoi qu'il en coûte. Je salue en cet instant Jérôme Cahuzac, qui a fait preuve de dignité et de responsabilité en présentant, hier, sa démission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Je tiens à le remercier ici pour son action remarquable et courageuse au Gouvernement, car il a été un excellent ministre du budget au service de la France. (Mêmes mouvements.)

Nous devons être exemplaires, quand nous demandons des efforts aux citoyens. La moindre des choses pour les responsables publics, c'est, en effet, de donner l'exemple. C'est pourquoi, avec le Président de la République et tous les membres du Gouvernement, nous avons diminué de 30 % nos rémunérations. (Interruptions sur les bancs du groupe UMP.)

Nous avons également défini des règles draconiennes de comportement et d'éthique au sein du Gouvernement. Les assemblées, monsieur le président, ont entrepris la même démarche. Eh bien, nous irons jusqu'au bout : avant l'été, je vous soumettrai le projet de loi abrogeant le cumul des mandats. (Mmes et MM. les députés des groupes SRC et écologiste se lèvent et applaudissent. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Viendra juste après un projet de loi contre les conflits d'intérêts. Vous aurez également à débattre, réunis en Congrès, des modifications constitutionnelles qui enracineront la démocratie sociale et l'indépendance de la justice dans notre loi fondamentale.

Ma rigueur, c'est l'égalité des droits et la responsabilisation des citoyens.

Mon gouvernement s'honore d'ouvrir, avec l'appui de la majorité parlementaire, le mariage aux personnes de même sexe. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mon gouvernement s'honore d'avancer dans l'égalité des droits entre les femmes et les hommes, de traquer partout toutes les formes de discrimination et de marginalisation.

Mais il met la même détermination à faire respecter tout ce qui doit fonder notre vivre-ensemble et l'autorité de la République : la sécurité, la laïcité, le civisme, la responsabilité personnelle. Nous ne céderons pas un pouce de terrain au crime et à la délinquance. (Vives interruptions sur les bancs du groupe UMP.) Ils trouveront partout l'État en face d'eux. La police et la justice travailleront en commun. Dure avec la délinquance, dure avec les causes de la délinquance : telle est et restera la ligne de conduite de mon Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Ma rigueur, c'est la justice sociale : rétablir le primat du travail sur la rente, de l'utilité sociale sur le privilège, de la solidarité sur l'individualisme.

Ma rigueur, c'est la réforme et c'est un langage de vérité que j'assume. Ce langage de vérité, je le revendique, parce qu'il est temps de sortir d'un paternalisme du non-dit qui infantilise le pays, qui, au bout du compte, bloque toutes les réformes, fait monter les corporatismes et empêche la France de retrouver la maîtrise de son destin. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Voilà la vérité que je dois au pays. J'ai le courage de la dire, je n'ai pas peur, car c'est l'exigence des Françaises et des Français. La confiance dont vous avez parlé, monsieur Copé, elle se construit dans la vérité qu'on doit au peuple français.

Nous n'avons pas de temps à perdre pour redresser la France, mais nous ne la redresserons pas sans les Français eux-mêmes. Nous ne pouvons pas reprendre notre destin en main sans construire avec eux un véritable compromis historique. Le Gouvernement en a jeté les bases, avec la conférence sociale. Il a fixé une feuille de route, avec des objectifs et un calendrier précis. Alors on me dit : « C'est trop long ». (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Eh bien, c'est le contraire : le Gouvernement propose, on négocie et on décide ! Cela fait trente ans qu'on parlait de réformer le marché du travail en donnant plus de souplesse aux entreprises et plus de sécurité aux salariés. Là où tous les gouvernements se sont cassé les dents, six mois de négociations permanentes encouragées par le Gouvernement ont permis d'y parvenir. C'est donc bien la bonne méthode et cette méthode, je la revendique. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Je voudrais, à cet instant, rendre hommage aux partenaires sociaux. Ils ont posé la première pierre de ce compromis.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Il rompt avec la préférence nationale pour les licenciements et il pose les fondations de la sécurisation des parcours professionnels, pour lequel la gauche et les organisations syndicales se battent depuis si longtemps.

Le monde du travail doit retrouver toute sa place dans la République.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Il est redevenu acteur à part entière de la bataille du redressement.

Alors, soyons-en fiers ! C'est une victoire collective. Elle met fin à l'idée d'une France bloquée, incapable de se réformer. Nous avons fait la preuve ensemble qu'un grand compromis était possible. C'est cela, la solution pour réformer et préparer l'avenir de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Ce qui a été possible pour le marché du travail, nous pouvons le réussir pour la réforme des retraites. Là encore, la négociation a permis d'avancer, grâce à un premier accord entre les partenaires sociaux sur les retraites complémentaires.

Nous le savons, les colmatages d'urgence ne suffisent plus à endiguer la révolution démographique de l'espérance de vie. Pour sauver les principes solidaires du régime par répartition, il faut en réduire les injustices, mais il faut en consolider le financement. (Interruptions sur les bancs du groupe UMP.)

C'est la discussion que le Gouvernement ouvrira avec les partenaires sociaux avant l'été. Chacun devra fournir des efforts, mais nous appliquerons le même esprit de justice que celui qui nous a conduits, l'été dernier, à rétablir pour ceux qui avaient travaillé si jeunes et si dur la retraite à soixante ans.

Il en ira de même pour la branche famille : l'universalité devra être conciliée avec la justice pour résorber son déficit. Le nouveau modèle français consiste, non pas à détruire les acquis que nous avons construits pas à pas depuis le Conseil national de la Résistance, mais à réformer pour préserver et construire l'avenir dans l'efficacité et la justice. Voilà ce que nous voulons pour la France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Ce que je veux, c'est que chacun se sente responsable de la sécurité sociale, que celle-ci fasse la preuve qu'en se réformant, elle reste plus protectrice et moins chère que l'assurance privée qu'on ne cesse de vanter. Nous sommes, nous, attachés à la sécurité sociale comme ferment de l'unité et de la cohésion nationale. (Même mouvement.)

Ce compromis historique pour vaincre la crise s'adresse à tous les Français : j'en appelle à la responsabilité et à la mobilisation de tous. Je sais pouvoir compter sur chaque membre du Gouvernement et sur tous les députés de la majorité. Je suis fier d'être à la tête d'une équipe talentueuse, dont la seule préoccupation est l'intérêt général et le service du pays. Voilà, mesdames et messieurs les députés, l'équipe que je dirige. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP. – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Je sais combien les efforts que je demande aux Français sont difficiles. Je sais que, pour ceux qui souffrent, aucun changement n'est assez rapide. Mais ce que je veux, c'est que chaque Français soit partie prenante du redressement et s'approprie les réformes. Ce que je veux, c'est que nous écrivions ensemble un épisode majeur de notre histoire. La France s'est souvent crue à terre, parce que lui manquait le ciment d'un projet collectif, parce que les germes de la division avaient ruiné son âme. Chaque fois, elle s'est relevée parce qu'elle a trouvé en elle, non pas un homme providentiel, mais l'incarnation d'un grand dessein qui la mobilise et qui la fédère. Voilà ce que je propose aujourd'hui devant vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Quand la France répond à l'appel des Maliens, nous sommes fidèles à cet esprit de solidarité, au coeur des grands enjeux de ce siècle, notamment la lutte contre le terrorisme et toutes les formes d'intégrisme. Nous sommes là où nos valeurs nous conduisent naturellement, là où les peuples amis nous attendent.

Au Mali, notre armée est notre honneur.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Elle est la preuve que la France peut être à la hauteur de ses ambitions et, je m'y engage, elle continuera à l'être partout où ce sera nécessaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

Nous ferons tout pour libérer nos otages. J'aurai l'occasion, lundi prochain, de recevoir les groupes parlementaires, les représentants des commissions et les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat. Nous pourrons faire un point précis avant que s'engage – même si nos troupes, dès la fin du mois d'avril, vont commencer à rentrer – le débat prévu au-delà des quatre mois d'engagement, conformément à la Constitution.

Et l'Europe ?

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

L'Europe, comme le disait si bien Jean Monnet, elle « est née dans l'épreuve, elle grandira dans l'épreuve ».

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Un socialiste qui cite Jean Monnet, c'est grave !

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Eh bien, c'est maintenant ou jamais le moment de le prouver. Un monde de 9 milliards d'individus confronte les vieilles nations européennes à leur destin : soit elles se replient sur elles-mêmes, au risque d'une rivalité qui les a déjà conduites à la catastrophe ; soit elles forment un bloc de solidarité attentif à ses peuples, volontaire face à ses concurrents, uni devant les périls. Il faut changer l'orientation de l'Europe, dominée aujourd'hui par des majorités conservatrices. Les élections au Parlement européen de l'année prochaine doivent être le grand rendez-vous des peuples européens, qui doivent eux aussi prendre en main le destin de l'Europe !

Un bloc de solidarité, cela veut dire porter secours à Chypre, pour éviter la faillite de ce pays, mais c'est aussi demander au gouvernement et au parlement chypriotes, comme l'a fait Pierre Moscovici en toute clarté, contrairement à ce que j'ai entendu tout à l'heure…

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

…que les très riches déposants participent fortement à l'effort nécessaire, en sus de l'aide qu'accordent à ce pays les mécanismes européens de stabilité. Il faut protéger, parce que c'est légitime, les petites gens, les gens modestes, les épargnants, qui n'ont pas à payer la facture des erreurs graves qui ont été commises par les marchés financiers. Voilà la position de la France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

La solidarité, oui, mais la justice aussi, et cela vaut pour l'Europe.

Ce bloc de solidarité, c'est bien sûr le respect des règles communes auxquelles les États ont souscrit librement. C'est le cas de la France : ses engagements doivent s'appliquer scrupuleusement et elle les respectera.

Mais notre engagement, c'est aussi notre combat pour une nouvelle stratégie de croissance et la réorientation de l'Europe, combat pour lequel, dès le premier jour, François Hollande, Président de la République, a donné toute sa ferveur et apporté toute sa force. Ce combat a porté ses fruits, mais il est nécessaire de le poursuivre et de l'approfondir. (Interruptions sur les bancs du groupe UMP.)

Aujourd'hui, en effet, nous avons besoin de croissance en Europe. Or, la croissance ne peut pas seulement résulter d'un grand marché unique à l'intérieur de l'Europe, il faut aussi une politique industrielle et une politique énergétique communes.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Airbus et EADS fonctionnent ; il nous en faut beaucoup d'autres : c'est ainsi que nous redonnerons confiance en l'avenir de l'Europe et du projet européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mesdames, messieurs les députés, ce dont la France a besoin,…

Plusieurs députés du groupe UMP. C'est d'un Premier ministre !

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

…c'est une confiance en elle-même, c'est de forger une volonté commune pour se redresser.

Dans votre motion de censure, monsieur Copé, vous ne l'avez absolument pas compris. Vous rejouez les divisions du précédent quinquennat et vous vous trompez de destinataire. Ce n'est pas à mon gouvernement qu'il fallait l'adresser, c'est à mon prédécesseur,…

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

…à son héritage d'impuissance et de renoncements ! (« Fillon ! Fillon ! » et vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR, écologiste et RRDP.)

Vous vous êtes tout simplement trompé d'adresse !

Au lieu de commencer à faire l'inventaire de vos propres échecs, vous n'avez rien d'autre à proposer au pays qu'une censure.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Nul n'a oublié, en France, les 600 milliards de dettes supplémentaires, les vingt-quatre nouvelles taxes, le million de chômeurs en plus, l'industrie sinistrée avec 750 000 emplois détruits, le déficit du commerce extérieur inégalé. La part de la dépense publique est passée en cinq ans de 52 % à plus de 56 % de la richesse nationale. Oui, mesdames et messieurs les députés de l'UMP, vous avez affaibli la France et, pourtant, le président sortant, vous l'avez sans doute oublié, avait soutenu en janvier que la crise était derrière nous.

Eh bien, au mois de juillet dernier, dans ma déclaration de politique générale, j'ai dit que la crise n'était pas derrière nous, j'ai dit la vérité (Protestations sur les bancs du groupe UMP), j'ai dit la tâche immense qui nous attendait, j'ai dit la formidable mutation du monde que nous devions affronter. C'est bien pourquoi je ne regarde pas derrière moi, mais devant. C'est cela qui importe car notre nation est à la croisée des chemins et c'est notre responsabilité de l'aider à réussir. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

Le risque existe, si vous continuez de cette façon, de s'enliser dans des confrontations stériles qui feront le bonheur de tous les populismes. Si nous prenons une autre voie, et c'est celle que je propose, la France retrouvera le sens d'un destin commun. La crise n'efface pas les oppositions politiques, elle ne fait pas disparaître les intérêts de classe ; mais la grandeur de la République est de savoir les dépasser, de faire de chaque citoyen le dépositaire du destin de tous.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Très juste !

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

C'est pourquoi, mesdames et messieurs les députés, en rejetant cette motion de censure, c'est à cette formidable mobilisation pour le redressement de la France que je vous appelle. (Les députés du groupe SRC et de nombreux députés des groupes écologiste et RRDP se lèvent et applaudissent longuement, (Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Jean-Louis Borloo. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UDI et UMP.) J'invite ceux qui doivent se rendre à une réunion à se presser afin que nous puissions écouter l'orateur dans de bonnes conditions.

Plusieurs députés du groupe UMP. Les cumulards s'en vont !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les membres du Gouvernement, mes chers collègues, la motion de censure déposée par le principal groupe de l'opposition méritait un peu de considération et des réponses. Souhaitant faire de ce débat autre chose qu'un moment de rhétorique, l'autre groupe de l'opposition a pris la peine de vous écrire il y a deux jours une lettre très républicaine. Il s'agissait plutôt de vous donner l'occasion de progresser sur des décisions très pratiques – je pense à trois très graves décisions que vous avez prises au cours des dix derniers mois. Or force est de constater que pas un mot de votre discours – pas un mot ! – ne répond aux questions légitimes de l'opposition. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

Monsieur le Premier ministre, je vous ai écrit cette lettre loyalement et j'avais même prévenu le président de l'Assemblée que nous demanderions quelques minutes de suspension de séance pour réunir notre groupe au titre de l'article 58, alinéa 3, afin d'analyser la situation. Et là, quelle stupéfaction ! Quel talent pour éviter de répondre à toutes les questions que se posent les Français et les deux groupes de l'opposition. (Même mouvement.)

Vous avez avoué vous-même tout à l'heure, au détour d'une phrase dont je ne sais pas si vous avez mesuré la portée, qu'il ne s'agissait pas seulement de surmonter une dépression passagère. Je crains que la politique que vous menez ne vous donne raison. (Applaudissements et sourires sur les bancs du groupe UMP.)

S'il est indispensable de leur répondre, monsieur le Premier ministre, c'est que, dans la situation actuelle, les Français sont perdus. Ils ne comprennent pas l'écart entre vos promesses électorales et vos décisions. Ils ne comprennent pas les décisions qui vont contre l'emploi et le pouvoir d'achat. Bref, malgré leurs efforts, ils ne comprennent pas ce que vous faites.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ils essaient aussi d'écouter ce que dit l'opposition. Vous avez raté l'occasion de répondre aux Français. Je vais donc m'y employer. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

Vous avez rappelé, reprenant Mendès France, que gouverner c'était choisir ; seulement, vous n'êtes pas obligé de choisir à chaque fois l'erreur. (Applaudissements et rires sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

Votre première et grave erreur, manifestement, est l'attaque sans précédent menée contre le pouvoir d'achat des salariés du public et du privé, lorsque vous avez supprimé le dispositif fiscal et social en faveur des heures supplémentaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur quelques bancs du groupe UMP.) Et, pour être très franc, je me suis demandé quelle mouche vous avait piqués ! Est-ce que la première décision à prendre, en France, pour défendre le travail et les salariés méritants, c'est de commencer par les cogner ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Stupéfiant !

En réalité, j'ai compris : vous suivez toujours le dogme éculé et chimérique du partage du travail. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.) Vous nous avez revendu l'idée de la création d'emplois alors que votre décision n'a créé aucun emploi. Pire, elle en a détruit car vous avez réduit la souplesse dans les entreprises, la compétitivité, annulé la baisse du coût du travail de l'heure marginale et vous avez assassiné le pouvoir d'achat des salariés du public et du privé. (Même mouvement. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Monsieur le Premier ministre, au nom du groupe UDI et, j'imagine, de mes amis du groupe UMP (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC), mais surtout au nom des 9,5 millions de salariés méritants du public et du privé, je vous demande de revenir sur cette mesure néfaste. Ce serait un soulagement pour 10 millions de foyers français et la reconnaissance de leur travail. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

Par ailleurs, vous avez pris des décisions catastrophiques qu'aucun gouvernement n'aurait même pu imaginer dans des secteurs qui ne relèvent que du Gouvernement, des secteurs où les décisions ne dépendent ni des Chinois ni des Américains ni de l'euro ni du dollar mais de nous seuls.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ces deux secteurs sont le bâtiment et les services à la personne. Je m'explique. (Sourires sur les bancs du groupe SRC.)

Ne riez pas : vous êtes en train de provoquer la plus grande crise du logement depuis l'époque de l'abbé Pierre ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP. – Les députés du groupe UDI et plusieurs députés du groupe UMP se lèvent pour applaudir.) Vous avez, dans un premier temps, fait quelque chose d'extraordinaire, je le répète, que personne ne pouvait imaginer et que personne, du reste, n'avait évoqué pendant la campagne électorale de peur sans doute de passer pour fou.

Vous avez éteint trois moteurs en augmentant la TVA sur le logement social,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…en augmentant la TVA sur les économies d'énergies – vous qui ne cessez d'évoquer la transition énergétique –, et en augmentant la TVA sur les travaux d'amélioration de l'habitat social. Une TVA qui est passée de 7 à 10 %. (Protestations et « C'est vous ! » sur de nombreux bancs des groupes SRC, et écologiste.)

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Mes chers collègues, comme cette augmentation a déjà eu lieu une première fois il y a dix-huit mois,…

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Ah, tiens !

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…le coup de grâce que vous avez porté aura été d'augmenter de 100 % la TVA dans un secteur aussi sensible. Et je passe sur la fin, ou presque, des prêts à taux zéro pour l'accession populaire à la propriété. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur de nombreux bancs du groupe UMP.) Je passe sur l'effondrement des éco-PTZ : nous en étions à 8 000 par mois contre 700 actuellement. Je passe sur l'arrêt total des économies d'énergie dans les bâtiments d'État. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et écologiste.) Je vous le demande à nouveau solennellement, la profession vous le demande : ramenez à 5,5 % le taux de la TVA que vous aviez porté à 10 %. En matière d'efficacité énergétique, d'amélioration de l'habitat, de construction de logements sociaux et pour le privé et pour le locatif privé, diminuez le taux de 20,5 % à 10 %, au moins pendant trois ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur quelques bancs du groupe UMP.)

Monsieur le Premier ministre, ce secteur devait créer 100 000 emplois par an – vous l'aviez annoncé – alors que vous en détruisez 100 000 par an. Et cela risque de s'aggraver. L'emploi, dans le secteur du logement, est un impératif non seulement économique mais encore social. Jamais, dans un secteur fragilisé, on n'aura pris autant de décisions négatives aussi rapidement.

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Je vais maintenant aborder la plus scandaleuse des mesures scandaleuses : les services à la personne, les services à domicile.

Debut de section - Permalien
me Marie-Christine Dalloz

C'est vrai !

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Pas un enfant de sixième ne peut comprendre ce que vous êtes en train de faire. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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Par idéologie ou par ignorance – ce qui parfois revient au même –, vous avez résumé ce secteur à une aide fiscale aux très riches avec d'ailleurs un certain mépris pour ce type de travaux que vous avez l'habitude d'appeler « petits boulots ». Quelle erreur et quel mépris pour ces professionnels formés, qui font un travail difficile, délicat, de confiance avec des personnes fragiles, qui apportent du bien-être, de la qualité de vie,…

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…qu'il s'agisse des gardes d'enfants, des soins à domicile, de l'aide au maintien à domicile, de l'aide à la petite enfance,…

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…de l'aide scolaire, de l'aide à mobilité, de la lutte contre la dépendance, de l'aide aux handicapés. Il n'est pas possible que vous sacrifiiez ces métiers vitaux pour nos compatriotes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Quelle erreur et quel mépris que de ne pas savoir qu'il ne s'agit pas de « petits boulots ». Ce sont 2,2 millions de professionnels formés et qui agissent dans tout le territoire de la République, 28 000 organismes agréés, des conventions collectives. Savez-vous combien cela représente d'heures par an ? Deux milliards pour 4,5 millions de familles françaises qui en profitent, pendant une heure, de temps en temps, deux à quatre fois par semaine. Mais ces heures, elles sont vitales : elles changent la vie de ces familles.

Pour lancer ce plan qui a solvabilisé, professionnalisé ce secteur en croissance de 100 000 à 130 000 emplois par an, on avait créé une petite agence. La belle affaire : quatorze fonctionnaires ! Eh bien, c'est la première qu'on va dissoudre, mes enfants ! Extraordinaire !

Elle était chargée de l'ajustement, du développement des chèques emploi service et des chèques emploi service universels…

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Sans parler de l'ingénierie qui se trouve derrière !

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…et vous décidez de la supprimer, comme vous avez supprimé le forfait et une partie des allègements, sous prétexte, encore une fois, qu'ils ne concerneraient que les plus fortunés. Quelle erreur ! De grâce, revenez sur votre décision !

Monsieur le Premier ministre, les chiffres sont implacables : vous pouvez le constater dans votre région. Vous êtes en train de détruire entre 100 000 et 150 000 emplois par an dans un secteur qui en créait entre 100 000 et 120 000 au cours des dernières années. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

Monsieur le Premier ministre, si l'on ajoute, au bâtiment et au logement, les services à la personne, l'écart entre les bons et les mauvais choix que vous avez faits, pour paraphraser Pierre Mendès France, ce seront 300 000, 400 000, peut-être même 500 000 emplois ! La conséquence de vos choix, pour vous donner une image, ce sont deux fermetures du site industriel d'Aulnay-sous-Bois tous les deux jours !

Alors, de grâce, revenez sur ces trois erreurs manifestes, qui sont antisociales, contraires à l'emploi et mauvaises pour les comptes publics. La disparition de 400 000 emplois, savez-vous ce que cela représente dans les comptes publics ? Dix milliards d'euros, tous comptes publics confondus, donc une aggravation du déficit public.

Vous aviez promis la croissance aux Français, et ils ont l'austérité : ils ne savent plus où ils vont. C'est pourquoi la troisième chose que nous vous avons demandée, c'est de dire la vérité aux Français sur la trajectoire des prélèvements obligatoires. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et sur quelques bancs du groupe UMP.) Vous ne voyez pas qu'ils ne comprennent plus rien ? Ils ne refont plus la chambre de leurs enfants, (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et écologiste), ils ne changent plus de voiture, l'artisan ne remplace plus son matériel et on n'investit plus dans les PME et les TPE. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

Si vous voulez relancer la croissance, il faut rétablir la confiance. Il faut que vous parliez aux Français aujourd'hui, ou bien le Président de la République s'en chargera la semaine prochaine : dites-leur qu'ils peuvent être tranquilles et que vous vous engagez à ne plus augmenter les prélèvements obligatoires. Et alors, vous verrez, la France de la confiance et de la croissance va renaître.

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Monsieur le Premier ministre, tout ce que je vous ai écrit dans cette lettre, il n'y a pas un expert, pas un syndicat, pas une association, pas un parlementaire – pas même, soit dit en passant, au sein de votre propre camp – pas un élu, pas un chef d'entreprise, pas un citoyen qui ne le reconnaisse.

Faites le tout de suite ! Si vous aviez l'ombre d'un doute, sachez que c'est ce que souhaitent les Français. Je tiens à votre disposition, monsieur le Premier ministre, et j'en ai bientôt fini… (« Ah ! » sur les bancs des groupes SRC et écologiste.) Je comprends que mon discours soit douloureux pour vous…

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Je tiens à votre disposition, disais-je, les résultats d'un sondage réalisé par un grand institut, dont je ne citerai pas le nom. Ces résultats sont stupéfiants et montrent que les Français sont intelligents, au cas où vous ne l'auriez pas remarqué. (Sourires sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

L'institut de sondage leur a demandé ce qu'ils pensaient de ce que vous leur proposez et je vais vous livrer les résultats. D'abord, 88 % des Français sont favorables au rétablissement de tous les dispositifs relatifs aux services à la personne, notamment à celui de la malheureuse petite agence à qui vous en voulez, sans que l'on sache pourquoi. (Même mouvement.) Ensuite, 88 % des Français sont favorables au réaménagement du prêt à taux zéro pour les primo-accédants à la propriété.

Le résultat suivant est un peu moins bon : 84 % des Français seulement sont favorables au retour à la TVA à 5 ou 5,5 % sur les travaux permettant de faire des économies d'énergies et sur la construction de logement, notamment de logements sociaux. Par ailleurs, 71 % des Français sont favorables au rétablissement du système de défiscalisation des heures supplémentaires… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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…et, écoutez-moi bien, 73 % pensent que l'engagement solennel du Président de la République de ne pas augmenter les prélèvements est de nature à recréer de la croissance et de l'emploi.

Monsieur le Premier ministre, vous disiez que l'honneur de la République, c'est de prendre les bonnes décisions pour les Français. Moi, je crois que l'honneur de la République, ce serait de dire aujourd'hui : « Nous nous sommes trompés. »

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Je sais qu'il est difficile d'admettre que l'on s'est trompé. C'est très difficile, monsieur le Premier ministre, mais c'est aussi la grandeur de la fonction, c'est ce qui fait les hommes d'État.

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Je vous ai dit que nous voulions apporter une opposition résolue, mais constructive. Je vous ai dit que nous serions la vigie lucide, indépendante et exigeante de cette législature. Avant toute chose et indépendamment des circonstances politiques, notre rôle est de servir notre pays.

Nous avions cru qu'en votre qualité de chef du Gouvernement, vous aborderiez, avec la courtoisie républicaine requise, les vraies questions, celles qui engagent quelques centaines de milliers de chômeurs en France. Malheureusement, votre discours de cet après-midi, qui a commencé par de vives envolées, s'est lourdement écrasé. (Sourires sur les bancs des groupes UDI et UMP.) Dans ces conditions, puisque huit Français sur dix vous demandent de revenir sur vos erreurs, nous ne pourrons que voter la censure. (Les députés des groupes UDI et UMP se lèvent et applaudissent.)

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La parole est à M. François de Rugy, pour le groupe écologiste.

Mes chers collègues, si vous voulez sortir, faites-le rapidement pour ne pas gêner l'orateur…

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, chers collègues – et je m'adresse particulièrement à vous, chers collègues de l'UMP, il est donc dommage que vous vous en alliez, car j'ai quelques petites choses à vous dire.

En entendant tout à l'heure M. Copé prononcer son réquisitoire avec l'aplomb qu'on lui connaît, mais qui est devenu inversement proportionnel à sa crédibilité actuelle, (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur plusieurs bancs du groupe SRC.) une expression imagée de François Mitterrand m'est revenue en mémoire. En 1981, au lendemain du débat qui l'avait opposé au président sortant, il confiait avoir eu le sentiment de s'être retrouvé face à un conducteur qui, après avoir précipité son véhicule dans le fossé, lui aurait demandé, à lui, de repasser son permis de conduire.

Vous souhaitez, monsieur Copé – c'est le texte de votre mention qui le précise – qu'on ne parle plus du passé : on vous comprend ! Tout le monde a en tête le gouffre financier que vous avez créé, les inégalités que vous avez creusées, les réformes que vous avez éludées, l'effondrement industriel et commercial auquel vous avez assisté passivement. Même M. Fillon le reconnaît maintenant, mais sans doute êtes-vous en désaccord sur ce sujet, comme sur les autres…

Les Français n'ont pas oublié l'affaiblissement systématique des services publics que vous avez organisé. Les scandales qui touchent aujourd'hui l'industrie agroalimentaire montrent concrètement que l'État est à présent désarmé pour assurer l'une de ses missions fondamentales, le contrôle qui doit garantir la sécurité et la protection du consommateur.

Il semble qu'une partie des membres de l'UMP ait conscience de tout cela, puisque plusieurs dizaines de députés de votre groupe ne sont pas signataires de votre texte.

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Sans doute ont-ils voulu signifier par là qu'ils ne souhaitaient pas être associés à une manoeuvre qui ne servira à rien, sinon à consolider auprès de vos militants une légitimité interne que vous n'avez pas réussi à conquérir pleinement par les urnes.

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L'Assemblée nationale avait été prise à témoin, et même instrumentalisée, lors de votre psychodrame interne, avec la scission, puis la reconstitution de votre groupe, aussi grotesques qu'incompréhensibles pour les Français.

Vous convoquez de nouveau l'Assemblée aujourd'hui, pour constater l'unité de façade que vous essayez péniblement de reconstituer. Je note au passage que votre texte a reçu par avance le soutien des députés de l'extrême droite : peut-être entendez-vous par là faire un petit signe dans le sens de ce que certains, sur vos bancs, espèrent peut-être en silence : une alliance plus large, terriblement inquiétante.

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Alors que dix années de politique de droite ont conduit à une explosion inégalée du chômage, cette instrumentalisation de nos institutions, au profit de la politique interne d'un parti, l'UMP, a quelque chose de choquant et de pathétique.

Puisque vous vous êtes permis de citer Georges Pompidou, j'ai envie, monsieur Copé, de le paraphraser à mon tour, en vous invitant à cesser d'emmerder l'Assemblée par vos manoeuvres incessantes d'obstruction et de retardement. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP, dont de nombreux membres quittent l'hémicycle.)

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Car enfin, revenons-en aux fondamentaux : à quoi sert une motion de censure ? Une motion de censure vise à sanctionner une politique qui, arrivée à un terme donné, n'aurait pas porté ses fruits. Or chacun a parfaitement conscience que ce n'est pas en dix mois que l'on peut juger d'une politique et de ses résultats. Même François Fillon l'a dit avant-hier.

Une motion de censure a pour but d'engager une majorité alternative dans une politique alternative, susceptible d'être plus efficace, et que les Français appelleraient de leurs voeux. Mais à part des déclarations à l'emporte-pièce, des appels répétés aux économies, appels d'autant plus vains qu'ils ne sont jamais accompagnés de propositions concrètes, on ne trouve pas, dans vos propos, la moindre trace d'une politique alternative !

Quand, au cours des débats qui se sont succédé, votre groupe a-t-il émis la moindre proposition ? On a pu le constater lors des débats budgétaires, à propos du mariage pour tous, ou encore la semaine dernière lors du débat sur l'école : l'UMP ne connaît pas d'autre pratique que l'opposition systématique et stérile aux projets de la majorité.

On aurait presque envie de s'arrêter là, tant le caractère artificiel de votre démarche saute aux yeux. Pour le groupe écologiste, les choses sont claires : nous voterons contre cette motion de censure.

Monsieur Copé, ce n'est pas un scoop : nous sommes en désaccord complet avec vos orientations. Quand je vous ai entendu, j'ai eu l'impression que finalement, ce que vous proposiez aux Français, c'était Sarkozy, en pire. Nous autres, députés écologistes, non seulement nous souhaitons que le Gouvernement poursuive son action, mais nous affirmons qu'il n'y aurait rien de pire que de céder à la tentation de la pause dans les réformes.

Comme tous les députés, nous sommes quotidiennement au contact des Françaises et des Français, et nous percevons leurs attentes, et même leurs impatiences. Les Françaises et les Français sont lucides. Ils savent que la situation économique et financière de l'ensemble des pays européens est extrêmement dégradée. Ils perçoivent, et ils le déplorent, que l'Europe tarde toujours à agir et que les égoïsmes des États triomphent trop souvent, alors même que l'Europe serait le niveau pertinent pour répondre à la crise.

Les Français savent que notre pays a accumulé un retard considérable au cours des dernières années dans la lutte contre l'endettement, dans la définition d'une stratégie industrielle susceptible de préparer le rebond économique, dans l'adaptation des services publics aux besoins de la société, dans la prise en compte de la diversité des modes de vie de la société française, ainsi que dans la mise en oeuvre de la transition écologique de nos modes de production et de consommation.

À ces retards dans maints domaines s'ajoutent les nombreux blocages d'ordre institutionnel, administratif et organisationnel que connaît notre société. Le Président de la République a eu raison de les souligner récemment et il s'emploie désormais à les supprimer.

Chaque fois que le Gouvernement s'engagera pour faire sauter les blocages de la société, chaque fois qu'il s'engagera dans la voie du soutien à l'innovation, comme on vient de le faire avec la loi sur l'école, dans la voie de la décentralisation ou de la négociation entre partenaires sociaux, il aura tout notre soutien. C'est ainsi que nous remettrons le pays en mouvement. C'est ainsi que les Français verront nos perspectives d'action.

La situation laissée par dix années de gouvernements de droite est très difficile. Nous sommes lucides sur la situation, ainsi que sur l'exigence forte que les Françaises et les Français expriment à l'égard de la majorité. Quand la situation est complexe, comme elle l'est aujourd'hui partout en Europe, la principale difficulté, c'est d'être simple, pour identifier des objectifs, sans pour autant être simpliste dans l'élaboration des solutions.

Puisque cette motion de censure prétend se concentrer sur la politique budgétaire et financière, parlons-en. La politique de redressement budgétaire a été engagée avec force dès après les dernières élections législatives. Ce n'est pas un but en soi ; c'est une nécessité qui doit être l'occasion de réformer notre fiscalité pour la rendre socialement plus juste et écologiquement plus efficace.

Nous avons commencé à le faire en alignant la fiscalité du capital sur celle du travail. Nous devons maintenant le faire en réformant l'impôt sur le revenu, fusionné avec la CSG et prélevé à la source, comme nous nous y étions engagés. C'est ce que nous attendons du nouveau ministre du budget et c'est la condition sine qua non pour rendre le redressement acceptable, notamment pour les Français aux revenus modestes et pour les classes moyennes.

Rendre la fiscalité intelligente, c'est taxer enfin les activités et les produits anti-écologiques pour récompenser les comportements positifs et pour financer les investissements utiles à la transition écologique. Cette mutation sera le moteur du rebond de l'activité économique et de la création d'emplois nouveaux. En Allemagne, près de 400 000 emplois ont été créés grâce au virage pris il y a treize ans dans le secteur de l'énergie. Le plan d'isolation des logements doit, lui aussi, être un élément majeur de notre politique économique et sociale. Il est créateur d'emplois et de pouvoir d'achat et contribue à la politique de lutte contre le changement climatique.

Ajoutons que de manière générale, comme le rappelle souvent la ministre de l'égalité des territoires et du logement, un logement construit équivaut presque à deux emplois créés. C'est pourquoi nous attendons beaucoup du discours du Président de la République demain sur ce sujet.

Monsieur le Premier ministre, vous aurez compris que nous souhaitons ardemment que le Gouvernement poursuive et intensifie son action dans le domaine de la transition énergétique. Là encore, rien ne serait pire que la tentation de la pause. Je le dis d'autant plus tranquillement que je sais que ce n'est ni votre tempérament, ni votre ligne de conduite depuis que vous guidez l'action du Gouvernement.

La loi de programmation sur la transition énergétique et le volet de la loi de finances portant sur la fiscalité écologique sont deux rendez-vous majeurs de 2013. Vous pouvez compter sur la présence des députés écologistes à vos côtés pour les réussir.

Concernant la réduction des déficits, vous connaissez notre soutien à une stratégie durable et adaptée à la conjoncture. La trajectoire est bonne, la pente ne doit pas être trop rude car le remède pourrait être pire que le mal. Tout comme il a fallu augmenter les recettes, il faut réduire un certain nombre de dépenses. Mais nous savons que vous êtes attachés comme nous au fait que l'État et les collectivités locales puissent assumer le financement des services publics essentiels à la vie quotidienne.

Monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, sur les questions budgétaires et fiscales qui sont aujourd'hui en débat, les écologistes sont au rendez-vous de l'action solidaire de la majorité. Nous y sommes avec une ambition réformatrice intacte pour la justice sociale et l'écologie. Les premiers pas ont été faits vers plus de justice, reste à faire le choix en matière d'efficacité par l'écologie. Nous travaillons là-dessus, nous sommes mobilisés sur ces objectifs, sans nous laisser distraire par les opérations politiciennes telles que cette motion de censure, à laquelle nous nous opposons totalement. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.)

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La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, le débat de censure est souvent un moment important de la vie parlementaire. C'est l'occasion principale pour l'opposition de présenter ses conceptions, ses propositions, de faire connaître ses solutions alternatives face au Gouvernement.

Mais, parfois, cette motion de censure peut aussi devenir un exercice plus rituel, plus convenu, qui présente un caractère assez automatique. Dans ce cas, l'opposition du moment présente une motion qui comporte toute une série de critiques contre le gouvernement – souvent systématiques et excessives – formulées à la manière d'un réquisitoire contre la gestion gouvernementale récusée en bloc.

Votre motion, chers collègues de l'opposition, entre plutôt dans cette seconde catégorie et ne se caractérise pas par un excès de nuances.

Cela frappe d'autant plus qu'elle intervient dans des conditions particulières de délai et de calendrier. Vous avez exercé le pouvoir pendant dix ans et ce Gouvernement n'est en fonction que depuis dix mois. Cela représente, chacun en conviendra, deux durées d'action très inégales. Aussi, les difficultés que vous évoquez aujourd'hui résultent souvent de vos propres décisions, lorsque vous étiez naguère aux responsabilités, il y a seulement quelques mois.

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Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Et oui !

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En effet, on ne peut oublier certaines données que le nouveau Gouvernement a trouvées et qui ne résultaient pas de son fait, mais de la gestion précédente : le « paquet fiscal » de 2007, qui a pesé sur les finances publiques ; une progression massive du chômage, avec un million de demandeurs d'emploi de plus en cinq ans ; un déficit public qui s'élevait à 5,2 % du PIB ; enfin une flambée de la dette publique, qui s'est accrue de 600 milliards d'euros en cinq ans.

Votre motion de censure pourrait se remémorer davantage ce proche passé. Et un peu plus de mémoire appellerait un peu plus de mesure.

En tout cas, dans cette situation, le redressement des comptes publics était indispensable. Ce redressement des comptes s'effectue, au moins sur le plan structurel, c'est-à-dire au plan du déficit calculé indépendamment de l'effet de la conjoncture économique. Le premier président de la Cour des comptes, monsieur Migaud, a déclaré en février dernier devant notre Assemblée : « l'effort structurel de réduction du déficit en 2012 a été très significatif » et « les mesures annoncées pour 2013 représentent un effort considérable, et même sans précédent. » Cette situation est d'ailleurs constatée par la Commission européenne qui a reconnu les efforts budgétaires et les réformes structurelles déjà réalisés par notre pays.

Au budget 2013, l'augmentation des prélèvements obligatoires fournit les deux tiers de cet effort de redressement, et les économies sur les dépenses publiques un tiers seulement. Cette répartition n'est sans doute pas la plus opportune. Lors des débats budgétaires de l'été 2012, notre groupe avait recommandé que la baisse de la dépense soit prioritaire par rapport à l'effort fiscal. D'ailleurs les pistes d'économies ne manquaient pas, notamment du côté des agences publiques de l'État.

Aujourd'hui chacun l'admet : la réduction de la dépense doit être primordiale. Le rapport 2013 de la Cour des comptes le souligne dans les termes suivants : « La priorité absolue est désormais d'intensifier l'effort de maîtrise de la dépense dans l'ensemble des administrations publiques. »

Il faut d'ailleurs reconnaître les efforts significatifs déjà réalisés. En 2012 et pour la première fois, la dépense publique a diminué, alors qu'elle avait augmenté en moyenne de 5 à 6 milliards d'euros par an les années précédentes. Il en ira de même en 2013 et 2014, avec des économies importantes et des réformes structurelles.

Dans cette perspective, la MAP, la « modernisation de l'action publique », a été lancée en décembre dernier. Il ne s'agit pas d'appliquer des normes automatiques ou forfaitaires, comme cela a été fait naguère, mais d'évaluer avec précision quarante politiques publiques en 2013 pour veiller à la fois à leur qualité et à leur coût.

Bien sûr, le retour à la croissance conditionne tout le reste. Pour donner un nouvel élan à notre économie, il faut créer et mobiliser tous les instruments nécessaires. C'est le sens du pacte national élaboré par Louis Gallois, et c'est l'objet du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi qui a été spécialement conçu pour aider les entreprises à embaucher, à investir et à innover. Par ailleurs, la Banque publique d'investissement, installée en février dernier, soutient les projets innovants des PME et des entreprises de taille intermédiaire.

L'action pour la croissance et l'emploi est bien évidemment la priorité essentielle car le chômage constitue toujours une épreuve, et parfois une épreuve collective, notamment quand il frappe les jeunes en grand nombre. Le travail étant le principal facteur d'intégration à la vie sociale, les jeunes sans emploi peuvent avoir le sentiment d'une société qui refuse de les accueillir, qui les laisse en marge ou à l'écart. C'est la raison de la création des contrats de génération et des emplois d'avenir : pour faciliter l'accès des jeunes à la vie professionnelle.

Monsieur le Premier ministre, la situation est difficile et les citoyens attendent et espèrent le changement. Mais depuis dix mois, avec le soutien de la majorité, beaucoup a déjà été réalisé ou entrepris.

Plusieurs mesures nouvelles sont intervenues qui concernent très concrètement la vie quotidienne de nos concitoyens, souvent parmi les moins favorisés, telles que l'augmentation de l'allocation de rentrée scolaire ; l'attribution de moyens nouveaux à l'éducation, qui avait été longtemps délaissée ; une loi en cours d'adoption pour refonder l'école de la République ; la mobilisation du foncier public en faveur du logement ; l'encadrement des loyers à la relocation ; la loi bancaire pour mieux protéger l'épargne des Français ; et bien d'autres mesures encore.

Cette démarche de réformes a un premier mérite : le respect de la démocratie. Car, avant d'être ainsi adoptées, toutes ces mesures avaient été proposées et exposées aux Français, de manière précise, pendant les campagnes présidentielle et législatives du printemps 2012. Pierre Mendès France – que nous vous remercions d'avoir cité – considérait l'élection comme un contrat passé entre les élus et les citoyens ; un contrat clair et formel, qui devait être respecté et appliqué scrupuleusement. Or la démocratie, c'est la loyauté du débat public. C'est la fidélité aux engagements pris devant le suffrage universel et ratifiés par les électeurs. Bref, vous avez été élu sur un programme, et vous l'appliquez.

Mais en même temps, vous vous attachez à gouverner pour tous, sans distinction ni différence entre vos concitoyens. Vous ne pratiquez pas le clivage, voire la stratégie de la tension, comme certains l'ont fait naguère. Vous recherchez, au contraire, le consensus et le dialogue. L'objectif est de construire une société apaisée, une société de concorde.

Monsieur le Premier ministre, vous connaissez notre majorité. Elle n'est pas uniforme, elle n'est pas monolithique ou monocolore, elle est pluraliste et diverse. Elle se compose de plusieurs groupes, dont chacun a son histoire, sa tradition particulière, son identité spécifique, et entend les maintenir. Ce pluralisme n'est pas un défaut, mais un atout, car il favorise le débat au sein même de la majorité pour parvenir ensemble aux meilleures décisions possibles.

Dès lors, depuis juin dernier, comme les autres groupes, le groupe RRDP a eu l'occasion d'exprimer des différences, des divergences, voire des désaccords sur tel ou tel point, même si cela n'a pas empêché la solidarité sur les grands choix. Bien sûr, nous ne sommes pas d'accord sur tout, ni avec la totalité de vos décisions, mais nous sommes d'accord sur beaucoup, notamment sur l'essentiel.

Nous vous répétons donc notre confiance dans votre action, dans votre volonté de réforme, dans votre fidélité aux valeurs républicaines, celles qui ont fait l'histoire mais qui feront aussi l'avenir de notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et SRC.)

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La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe de la gauche démocrate et républicaine.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, disons-le d'emblée : nous ne sommes pas dupes de l'objet de cette motion de censure. Derrière la mise en cause de la responsabilité politique du Gouvernement, l'UMP continue à se complaire dans les manoeuvres politiciennes qui ne sont pas à la hauteur des attentes de nos concitoyens confrontés à une crise impitoyable pour les plus faibles.

L'opposition cherche ainsi à occulter ses responsabilités en se défaussant des conséquences de sa politique calamiteuse.

Car enfin, chers collègues de droite, quel était votre objectif pendant les dix années au cours desquelles vous étiez en responsabilité, pour ne pas dire votre unique objectif ? Tout simplement la création de valeur actionnariale au détriment du développement des capacités productives, en sacrifiant l'investissement productif et les salaires.

L'ampleur de la crise qui sévit depuis 2008 a pourtant révélé la faillite de ce modèle. Mais vous vous êtes toujours refusé à remettre en cause les règles du système. Bien au contraire, vous avez permis aux marchés et aux banques de sortir gagnants et de se refaire une santé sur le dos de nos concitoyens.

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Pour confirmer ce constat, rappelons-nous des propos de Michel Barnier, commissaire européen au marché intérieur : le sauvetage des banques européennes a coûté 37 % du PIB européen, permettant ainsi aux banques de transférer leur dette vers celle des États, aux frais des contribuables. Entre octobre 2008 et octobre 2011, ce sont 4 500 milliards d'euros d'aides d'État qui ont été réinjectés dans les banques européennes.

Chacun le sait : les États européens ont financé ce plan de sauvetage des banques par les cures d'austérité, présentées en remède universel.

Au final, la part de la dette qui peut être indiscutablement assignée à la finance elle-même représente, pour la France, les vingt points de PIB qui séparent 2007 de 2011 !

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C'est de ce processus dont vous avez été les promoteurs infatigables.

Et, contrairement à ce que vous affirmez dans le texte de votre motion de censure, les causes de nos difficultés ne sont pas à chercher dans le niveau prétendument trop élevé des dépenses publiques, ou dans le fait que les Français vivraient au-dessus de leurs moyens. Elles sont à chercher dans les choix politiques désastreux que vous avez opérés, notamment l'allégement de la fiscalité des plus fortunés et les 172 milliards d'euros de niches fiscales et de cadeaux divers et variés accordés aux entreprises, sans la moindre contrepartie en termes d'emplois, tout cela au nom de la compétitivité. Or, votre politique n'a nullement été synonyme de création d'emplois. Elle n'a pas non plus permis d'éviter que nos entreprises industrielles ne se délocalisent.

Dans la Confession d'un enfant du siècle, Alfred de Musset s'interrogeait : « On ne sait, à chaque pas que l'on fait, si l'on marche sur une semence ou un débris. » Chers collègues de droite, avec votre bilan, la question ne se pose pas. Cinq millions de nos concitoyens sont aujourd'hui au chômage ; le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté a augmenté de 20 % en dix ans ; notre balance commerciale affiche un déficit record de 70 milliards d'euros ; 500 000 emplois ont été détruits dans le secteur industriel depuis 2008.

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Au regard de ce bilan, le texte de votre motion de censure est pour le moins troublant. Que proposez-vous ? De nouvelles coupes franches dans les dépenses publiques !

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Vous voulez ajouter l'austérité à l'austérité, alors que l'immense majorité des économistes, jusqu'au FMI, alertent l'ensemble des pays de l'Union des effets récessifs des politiques de rigueur imposées par les règles européennes.

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Contre toute logique, vous continuez de vous faire les avocats intransigeants d'une orthodoxie budgétaire aveugle qui fixe aux États européens des objectifs de réduction de déficit totalement irréalisables.

Vous invoquez, en outre, un prétendu matraquage fiscal. Vous ne ferez pourtant pas oublier que le gouvernement Fillon a consacré les derniers mois de son quinquennat à faire adopter des hausses successives de TVA, dont la fameuse TVA anti-sociale.

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Bien entendu, vous avez aussi réduit de moitié l'impôt sur la fortune : c'est un marqueur politique pour vous.

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Nous avons combattu ces mesures. Nous sommes d'autant plus à l'aise pour dénoncer aujourd'hui votre attitude que nous n'avons pas ménagé nos critiques à l'égard des hausses de TVA votées ces derniers mois. Nous continuons de considérer que le Gouvernement doit supprimer ces mesures. Ce même gouvernement a eu, en revanche, raison de revenir sur les cadeaux fiscaux consentis aux privilégiés sans aucune utilité économique. Mais il faut encore aller beaucoup plus loin, monsieur le Premier ministre, dans le sens de la justice fiscale, en renforçant notamment la progressivité de l'impôt et les dispositions de taxation du capital improductif.

L'opposition tente aujourd'hui de capitaliser sur le mécontentement d'un certain nombre de nos concitoyens, mais les Français ont tourné le dos à sa politique : ils ne veulent plus d'une politique au service des forces de l'argent. Bien au contraire, lors des scrutins présidentiel et législatif de l'an dernier, c'est une profonde volonté de changement qui s'est exprimée. Cette volonté s'est d'autant plus affirmée que la crise s'intensifie en Europe et en France, et que le chômage s'accroît dans des proportions inquiétantes, sans perspective de sortie de crise à court et moyen termes.

Les Français attendent une réelle alternative politique. Si nombre de nos concitoyens expriment aujourd'hui leur déception et parfois leur colère, c'est qu'ils attendent du Gouvernement qu'il se donne enfin les moyens du changement,…

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…qu'il se dote enfin d'une vraie ambition économique et sociale.

Mais il faut bien le dire, monsieur le Premier ministre : nous sommes loin du compte ! Où sont les mesures attendues de revalorisation des salaires et de soutien au pouvoir d'achat des ménages ? Où sont les mesures de lutte contre les licenciements boursiers et l'avidité des actionnaires ?

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Où sont les politiques sociales ambitieuses en matière de santé, de retraite et d'emploi ?

Nous avons, quant à nous, la conviction que la gauche doit incarner la résistance au pouvoir de la finance. Sinon, nous sommes convaincus que la politique gouvernementale ira dans le mur. Elle en prend malheureusement le chemin en succombant aux sirènes de la course à la compétitivité, qui détruit des milliers d'emplois et les solidarités sur lesquelles repose notre pacte républicain.

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Terrible renoncement ! À l'inverse, la priorité est aujourd'hui d'infléchir la politique européenne et, face aux fanatiques de l'austérité, de retrouver le chemin de la raison.

Le Président de la République a eu tort de faire profil bas sur la scène européenne en acceptant le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance en Europe sans le renégocier. Il a eu tort de se contenter d'un pacte de croissance de 120 milliards d'euros sur trois ans qui consiste, pour l'essentiel, en des dépenses déjà programmées.

Il est nécessaire de promouvoir une profonde réorientation de la politique européenne, qui prenne l'exact contre-pied du projet d'accord du Conseil européen sur le futur cadre financier pluriannuel de l'Union européenne, lequel ouvre la voie à sept années d'austérité et de ralentissement économique en Europe en reniant la plus élémentaire solidarité européenne. En refusant d'approuver ce projet, le Parlement européen a ouvert une brèche dans le dogme de la réduction des déficits. La France doit se saisir de cette opportunité pour convaincre ses partenaires de la nécessité de rompre avec les politiques ruineuses de restriction budgétaire promues par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel.

Il faut pour cela desserrer l'étau d'une politique monétaire trop rigide et rétablir une politique de change. L'action de la Banque centrale à l'égard des banques doit désormais être guidée par le refus de prêter de l'argent à celles qui financent des opérations spéculatives. Le préalable de cette mesure est la réalisation d'une vraie séparation entre les banques de dépôt et les banques d'affaires. Il est temps de mettre la politique monétaire et le système bancaire au service de la société.

Pour les députés du Front de gauche, il n'y a pas de fatalité au triomphe de la logique libérale de mise en concurrence des territoires et des peuples. Il n'y a pas de fatalité à la désindustrialisation de nos territoires. Il n'y a pas de fatalité à voir le MEDEF imposer ses vues dans un accord qui organise le recul des droits des salariés. C'est parce que nous refusons cette fatalité que nous combattrons pied à pied l'accord de prétendue sécurisation de l'emploi,…

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…accord minoritaire qui facilite les licenciements et offre aux employeurs de baisser les salaires et d'augmenter le temps de travail.

Nombreux sont ceux, bien au-delà des rangs du Front de gauche, qui attendent du Gouvernement un changement de cap en faveur de la relance et de l'emploi.

Nous ne voterons pas pour autant la motion de censure proposée par la droite, dont les motivations et les arguments sont une invitation à l'austérité dogmatique et systématique. Nous ne voterons pas cette motion de censure qui invite le Gouvernement à reproduire les erreurs de ses prédécesseurs. Nous pensons, au contraire, que le temps est venu pour l'ensemble de la gauche de rebattre les cartes de la politique actuelle et de prendre en compte l'humain d'abord.

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Chers collègues, vous pouvez compter sur notre détermination à agir dans ce sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

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La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, chers collègues, ainsi, avec le sens de la nuance et des priorités qui le caractérise, le président de l'UMP voudrait nous inviter à censurer le Gouvernement moins d'un an après que celui-ci a été formé et s'est mis au travail. Venant du président d'un parti qui n'a jamais cru bon, ne serait-ce qu'une seule fois, de remettre en cause les décisions prises par un gouvernement qui, après avoir lui-même déclaré la France en faillite, s'est attaché avec méthode à aggraver la situation de notre pays dans des proportions jamais atteintes auparavant, la posture – car c'en est une ! – pourrait faire sourire.

Là n'est pas le problème. Pour le président de l'UMP, il y a aujourd'hui une chose plus urgente que le redressement de la France : c'est le redressement de son image personnelle. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.) Cette journée n'y suffira certainement pas !

Une fois encore – une fois de trop ! –, le Parlement devient – heureusement, seulement l'espace d'un après-midi – un lieu de thérapie de groupe pour la droite…

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…et un moyen supposé de ressouder une famille encore mal remise d'un quasi-divorce. Alors que la France doit faire face à des défis immenses, alors que ses troupes sont engagées sur des théâtres d'opérations périlleux en Afrique, alors que le Gouvernement se consacre au redressement du pays, à l'assainissement de nos comptes publics et au sauvetage de notre industrie,…

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…voilà ce qui mobilise la droite aujourd'hui : une question de leadership et d'ascendant pris l'un sur l'autre.

Un débat sur une motion de censure aurait pourtant pu être utile pour le Parlement. Un tel débat peut être éclairant pour les Français ; il peut être l'occasion – le Premier ministre en a fait la démonstration à l'instant –…

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…de faire le point sur la politique menée, de l'illustrer et de convaincre du bien fondé des choix arrêtés. Mais il en est de la politique comme du sport : pour que l'événement reste captivant, il faut être deux. Monsieur le Premier ministre, vous étiez bien seul cet après-midi ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)

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La critique était tellement infondée que nous avons trouvé qu'il n'y avait qu'un seul joueur, une seule équipe sur le terrain. Vous avez incarné fortement cette équipe au service de la France, monsieur le Premier ministre.

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Pour que ce débat soit utile, éclairant et démonstratif, il eût fallu que l'UMP se décidât enfin à remplir avec maturité son rôle d'opposition. Pour être audible – à défaut d'être crédible encore –, l'opposition ne pourra pas s'exonérer sans fin d'un inventaire lucide de la politique qu'elle a accompagnée sans rechigner aux côtés de Nicolas Sarkozy. À défaut d'assumer son bilan, l'opposition serait bien inspirée, dans les circonstances exceptionnelles que nous connaissons, de se mettre avec nous au seul service du pays.

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Est-ce ce que vous faisiez quand nous étions au pouvoir ?

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Plus que jamais droite dans ses bottes, l'opposition est tout à la fois amnésique, cynique et parfois même comique.

Amnésiques, vous l'êtes parce que vous avez mené pendant dix ans la politique que nous subissons aujourd'hui et qui a donné les résultats que l'on sait.

Cyniques, vous l'êtes aussi aujourd'hui – c'est plus grave – par la virulence de votre critique : vous semblez parier sur l'échec de la gauche plutôt que sur la réussite de la France. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.) Ce n'est pas la première fois dans l'histoire de la droite dans l'opposition et de la gauche au pouvoir.

Comiques, vous l'êtes enfin en toutes circonstances : alors que les épreuves que rencontre notre pays appellent à se départir de l'esprit de clan, et seulement dix mois après l'arrivée au pouvoir de la nouvelle majorité, le résultat de vos dix années au gouvernement fait apparaître la critique à laquelle vous vous livrez aujourd'hui grotesque et désolante. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

En fait, alors que le Président de la République et son Gouvernement s'attachent depuis dix mois à parler de la France, vous ne parlez que de vous. Au désordre idéologique et politique qui est le vôtre, nous opposons la cohérence et la constance de l'action menée par le Premier ministre et par chacun de ses ministres au service du redressement de la France et au service des Français. Personne n'a oublié que votre politique a provoqué 600 milliards d'euros de dette supplémentaires…

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…et un déficit abyssal des comptes publics en cinq ans. Au contraire, notre politique rend possible le redressement dans la justice, cette grande oubliée du quinquennat précédent. Elle ne fait ni de l'austérité – vous l'avez dit, monsieur le Premier ministre – ni de l'augmentation des déficits la voie vers une économie à nouveau prospère. La France a besoin d'une politique qui maîtrise la dépense publique sans mettre un coup d'arrêt aux dépenses utiles et à celles qui préparent l'avenir. C'est ce que fait le Gouvernement, dans la justice, en veillant à ce que ceux qui peuvent le plus ne soient plus ceux qui contribuent le moins : voilà un changement de politique majeur ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)

Personne n'a oublié – c'est plus grave – que votre politique a produit un million de chômeurs supplémentaires en cinq ans sans qu'aucune mesure à la hauteur de ce fléau ne soit jamais prise. Au contraire, notre politique consiste à soutenir la compétitivité des entreprises et à mettre en oeuvre des dispositifs innovants pour soutenir l'emploi, notamment l'emploi des jeunes qui sont les premières victimes de cette crise. Contrairement à vous, nous voulons relever ce défi. Nous mesurons chaque jour le chemin parcouru en moins d'un an : emplois d'avenir, pacte pour la compétitivité et l'emploi, contrats de génération, accord sur la sécurisation de l'emploi.

Il y a un maître mot dans tous les dispositifs que nous mettons en oeuvre depuis neuf mois : c'est l'emploi, qui est au coeur des priorités du Gouvernement. L'emploi est l'engagement quotidien du Premier ministre et des ministres. Il est l'objectif constant du Président de la République. Il est aussi l'objectif de toute notre majorité. Voilà pourquoi nous soutenons aujourd'hui le discours du Premier ministre et l'action du Gouvernement : parce que c'est l'emploi et rien d'autre qui est au coeur de l'action que nous menons tous les jours. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) C'est ce que nous voulons dire aux Français, et nous le disons fortement puisque vous nous en donnez l'occasion.

Votre politique a aussi, hélas, fait l'impasse sur l'avenir en condamnant notre école au déclin. Notre politique en la matière est celle de la refondation de l'école de la République.

Personne n'a oublié non plus que votre politique en matière de sécurité ou de justice était celle des coups de menton sur les plateaux de télévision, alors que toujours moins de policiers étaient affectés auprès des Français.

Et que dire de l'insupportable mépris dont vous faites preuve à l'égard d'une institution judiciaire malmenée et souvent stigmatisée par celui-là même qui devait en assurer la défense et la réputation ? Pour notre part, nous conduisons une politique visant à assurer la sécurité des Français en consacrant plus de moyens à la police et à la justice, et en concentrant ces moyens-là où ils sont nécessaires, c'est-à-dire là où vivent les premières victimes des incivilités et des violences, là où sont les Français que vous avez abandonnés ces dix dernières années et qui ont subi de plein fouet votre politique sociale, économique et de sécurité en étant confrontés à toutes les difficultés.

Notre politique, c'est aussi de faire confiance à ceux que vous vilipendiez hier, à ces corps intermédiaires, à ces partenaires sociaux si précieux pour mobiliser l'ensemble de la société et construire le nouveau modèle français décrit par le Premier ministre. Oui, nous soutenons la politique menée par notre majorité parce que c'est celle qui rassemble notre pays, celle qui peut réunir notre peuple, quand vous n'aimiez rien tant que le diviser et le fracturer.

Ce rassemblement est pour nous une exigence, une responsabilité qui devrait être partagée sur tous les bancs de notre assemblée. Notre démocratie, notre république sont fragilisées par la crise et les populismes. Et, comme nous devons refuser tout ce qui oppose les Français entre eux, nous devons combattre tout ce qui peut aggraver la fracture entre les Français et leurs représentants.

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C'est notre devoir d'exemplarité, une exemplarité revendiquée par le Président de la République et par le Premier ministre, qui, loin de nous affaiblir, nous renforce aujourd'hui, dans cette période de crise.

Enfin, plutôt que d'opposer les Français entre eux,…

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…nous leur proposons une ambition collective consistant à refonder notre modèle social afin de le préserver. Nous voulons que, irriguées par les valeurs de solidarité, d'universalité et de justice sociale qui étaient celles du Conseil national de la Résistance, les réformes engagées et celles qui restent à engager durant le quinquennat s'inspirent de ces principes.

Le Premier ministre a rappelé avec force le sens de son action et les fondements de la politique qu'il met en oeuvre sous l'autorité du Président de la République. Il a défini les contours du nouveau modèle social français, un modèle modernisé, adapté, préservé. Pour que ce nouveau modèle social nous permettre d'organiser la société française sur la base de la justice et d'un partage équitable des efforts et des richesses, nous devons, bien entendu, restaurer les marges de manoeuvre de notre pays rongé par la crise et les mauvais choix effectués au cours de ces dix dernières années – et singulièrement de ces cinq dernières années.

Oui, nous appelons les Français à cet effort. Oui, nous appelons les Français au redressement. Oui, nous appelons les Français à la mobilisation pour contribuer à la cohésion et à la réussite de notre pays, parce que, comme le disait François Mitterrand, il ne saurait y avoir une France qui gagne si l'autre perd. Ces dernières années, toute votre politique n'a été faite qu'au profit d'une partie des Français. Aujourd'hui, nous souhaitons les rassembler tous sur un nouveau destin pour le pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Valérie Pécresse a déclaré, il y a quelques jours : « Je ne crois pas que la motion de censure, à elle seule, pourra restaurer la crédibilité de l'UMP. Je pense qu'il faut aujourd'hui que nous soyons en proposition ».

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Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Quelle lucidité !

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Tout est dit : vous voulez censurer, nous voulons proposer. Vous voulez détruire, nous voulons construire. Vous voulez dénigrer et diviser, nous voulons rassembler et entraîner.

Monsieur le président de l'UMP, votre activisme procédurier n'aura trompé personne, ou pas longtemps, même pas les membres de votre groupe dont tous, loin s'en faut, ne sont pas signataires de votre initiative incongrue. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC.) Vous ne proposez rien, vous ne construisez rien, et vous en êtes réduits à ressasser sans cesse les mêmes antiennes.

La dernière a pour nom moratoire : vous dites vouloir un moratoire sur les 35 heures. Outre le fait que l'on se demande ce que cela peut bien vouloir dire, comment ne pas dénoncer, une fois encore, ce qu'il faut bien appeler une posture, quand on se rappelle que vous avez eu dix ans, pas une année de moins, pour mettre en oeuvre cette proposition ? Vous ne faites rien quand vous êtes dans la majorité, mais vous avez la mémoire courte quand vous retournez à l'opposition !

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De la même manière, vous voulez, toutes affaires cessantes, vous attaquer aux normes qui étoufferaient notre économie. Mais, monsieur le censeur, ces normes n'étouffaient-elles pas l'économie ces dix dernières années, quand vous étiez au pouvoir ? À moins qu'il ne s'agisse d'un terrible aveu de votre part, celui de l'impuissance dans l'action, compensée par la véhémence dans l'opposition ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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Quel sens de la formule ! Vous en avez d'autres comme ça ?

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Eh oui, c'est bien ce qui vous caractérise : l'impuissance quand vous êtes aux responsabilités, la véhémence quand vous êtes dans l'opposition.

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En fait, je peux tout de même vous rejoindre sur un point. Vous avez raison de dire que nous ne menons pas la politique souhaitée par l'opposition – et il faudra vous y faire. Je vais vous dire pourquoi : c'est parce que nous n'oublions pas – écoutez bien, vous qui voulez censurer le Gouvernement aujourd'hui – que cette politique injuste, brutale et inefficace que vous avez menée a été, elle, censurée par deux fois par le peuple. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Monsieur le Premier ministre, au nom des députés socialistes, républicains et citoyens, je vous le dis : nous souhaitons que vous mainteniez le cap fixé par le Président de la République, que vous continuiez à alimenter ce nouveau modèle,…

Plusieurs députés du groupe UMP. Toujours plus d'impôts, voilà le nouveau modèle !

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…cette nouvelle proposition aux Français que vous avez détaillée.

Au nom du groupe que j'ai l'honneur de présider, je vous assure, monsieur le Premier ministre, de notre confiance, de notre soutien, de notre détermination, de notre mobilisation – et, puisque c'est de cela qu'il s'agit aujourd'hui, de la totale confiance de chacun des membres de votre majorité. (Les députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent.)

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, voici dix mois que la nouvelle majorité est en place, que tous les pouvoirs sont entre ses mains dans cette maison, mais aussi au Sénat, dans presque toutes les régions, dans une majorité de communes et de départements. Aux yeux de tous, vous semblez totalement libres d'agir. Pourtant, vous êtes prisonniers.

Prisonniers, d'abord, de l'Union européenne, elle-même captive des banques. Vous ne prenez pas vos conseils ici, auprès de la représentation parlementaire, vous ne prenez pas non plus vos ordres du peuple français. Vos ordres viennent de Bruxelles, c'est-à-dire de la City, de Wall Street et de n'importe quel carrefour où le capital financier fait voyager ses milliards. Vous ne défendez pas les Français. Vous n'êtes qu'un gros boulon parmi d'autres dans la formidable machine mondiale à rançonner les populations.

Prisonniers, ensuite, de vous-mêmes, de votre idéologie, c'est-à-dire de vos illusions. Si certaines illusions sont charmantes, les vôtres sont macabres, car elles portent en elles la mort du réel. Le réel, voilà votre ennemi. Aussi n'est-il pas étonnant de constater que toute votre politique se résume à la fabrication d'une illusion masquant le réel, que vous espérez ainsi rendre supportable à nos concitoyens. Le chômage de masse ? Vite, un nouveau TUC, un nouveau gadget pour faire du bruit médiatique. Votre seul but est bien de masquer la réalité, de faire croire que le chômage est une fatalité, une sorte de catastrophe naturelle qui ne doit rien aux décisions politiques prises depuis trente ans dans des cénacles mondialistes et imposées au peuple à grand renfort de mensonges. La dette publique ? Vite, on augmente les impôts en ciblant notamment les classes moyennes, puisque les très riches sont ceux qui commandent et que les très pauvres ne peuvent guère payer – ils seront tout de même touchés, eux aussi, par la hausse de la TVA.

Naturellement, il n'est jamais question de faire payer la dette aux banquiers, au contraire. Avec le mécanisme européen de stabilité que vous avez ratifié, les banquiers pourront emprunter auprès de la banque européenne à un taux faible, pour prêter au Mécanisme européen de stabilité à un taux plus élevé – qui, lui-même, prêtera aux États à un taux encore plus élevé. Vous vous dites socialistes, mais vous n'êtes que les chefs du rayon France du capitalisme financier mondial. Toute votre oeuvre consiste à masquer la réalité, que ce soit la réalité de la crise, celle de l'abandon de nos souverainetés, celle de la surdélinquance, celle d'une immigration clandestine pathogène, celle d'un État qui n'est plus qu'un spectre désemparé, puisque désormais hors de son corps, hors de sa chair – en fait hors de la Nation, hors du peuple français.

Il n'est donc pas étonnant de constater que le seul moment où l'on peut enfin distinguer, chez vous, quelque apparence de volonté, c'est lorsqu'il s'agit de briser le réel, de le nier. On le voit bien avec votre projet de mariage homosexuel et ses appendices : adoption, GPA, PMA et, demain, promotion de l'euthanasie. Mais même dans ce domaine, vous allez dans le sens du mondialisme suicidaire : destruction de la Nation, du mariage, de la famille, de tout repère, de tout ce qui peut faire obstacle au laisser-circuler, au laisser-vendre. Fin de l'homme et de la femme, du citoyen, place au consommateur, place au gender, place au narcisse, place au malléable, à l'isolé, à celui pour qui la patrie se résume à son compte Facebook, et pour qui la famille est constituée de ceux qui achètent les mêmes objets que lui.

Au regard de tout ce que je viens de vous dire – le temps de parole qui m'est alloué m'interdisant d'en dire davantage –, vous aurez compris que je m'apprête à voter la censure de votre gouvernement. Je sais que, ce faisant, je me trouverai dans la minorité de cette assemblée. Il n'y a plus, en effet, que dans ces travées que vous pouvez compter sur une majorité. La France n'a pas confiance en vous. Les Français vous ont-ils d'ailleurs jamais fait confiance ? Vous avez été élus par défaut, par rejet d'un président du fait de la division des droites.

Dans un instant, la motion de censure sera rejetée. Il faudra vous contenter de cette petite satisfaction car, en dehors des murs de ce palais, votre politique ne provoque que colère, incompréhension et désespoir. Je le répète : vous niez le réel. Prenez garde à ce que celui-ci ne vienne un jour jusqu'ici vous demander les comptes que vous devez à la Nation et au peuple !

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La discussion est close.

Je vais maintenant mettre aux voix la motion de censure.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je rappelle que seuls les députés favorables à la motion de censure participent au scrutin, et que le vote se déroule dans les salles voisines de l'hémicycle.

Le scrutin va être ouvert pour trente minutes : il sera donc clos à dix-neuf heures vingt-cinq.

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La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante-cinq, est reprise à dix-neuf heures trente.)

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La séance est reprise.

Voici le résultat du scrutin :

Majorité requise pour l'adoption de la motion de censure, soit la majorité absolue des membres composant l'Assemblée …………………………………..287

Pour l'adoption………………………………..228

La majorité requise n'étant pas atteinte, la motion de censure n'est pas adoptée. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Questions à la ministre chargée de la politique du logement.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures trente-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Nicolas Véron