Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Réunion du 13 mai 2015 à 9h30

Résumé de la réunion

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La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L'ÉDUCATION

Mercredi 13 mai 2015

La séance est ouverte à 9 heures 35.

(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la Commission)

La Commission examine pour avis, sur le rapport de M. Jean-Patrick Gille, l'article 20 du projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi (n° 2739).

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L'article 20 du projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi concerne le régime spécifique d'assurance chômage des intermittents du spectacle, aujourd'hui inscrit dans les annexes VIII et X à la convention d'assurance chômage.

Notre commission a logiquement souhaité émettre un avis sur cet article, car il traite d'un sujet qui est loin de lui être étranger. Elle l'a en effet déjà abordé à de multiples reprises. Dès l'été 2012, sa première décision sous cette législature a même consisté à constituer une mission d'information commune avec la commission des Affaires sociales sur les conditions d'emploi dans les métiers artistiques. M. Jean-Patrick Gille en était déjà le rapporteur, et elle était placée sous la présidence de M. Christian Kert. Après neuf mois de travaux, elle nous a soumis un rapport d'information que nous avons adopté à l'unanimité en avril 2013. Nous avions donc vu venir la nouvelle crise de l'intermittence du spectacle, ce qui ne nous a malheureusement pas permis d'éviter qu'elle ait lieu. Il arrive que l'on ne parvienne pas à prévenir ce que l'on sait anticiper.

En réaction à cette crise, le Premier ministre a confié en juin 2014 à Mme Hortense Archambault, M. Jean-Denis Combrexelle et M. Jean-Patrick Gille une mission de concertation et de proposition qui, le 7 janvier dernier, a rendu un rapport intitulé : « Bâtir un cadre stabilisé et sécurisé pour les intermittents du spectacle ». Ses trois auteurs, venus présenter leurs conclusions devant notre commission le 28 janvier dernier, ont exprimé le souhait que soient retranscrits dans la loi un certain nombre de principes concernant l'assurance chômage des intermittents du spectacle, ainsi que les grandes modalités de négociation des annexes VIII et X qui régissent ce régime spécifique. Ce voeu est exaucé par l'article 20 du projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi, présenté le 22 avril dernier en conseil des ministres.

Compte tenu de ces précédents et de la parfaite connaissance du dossier de M. Jean-Patrick Gille, qui a opportunément quitté la commission des Affaires sociales pour nous rejoindre, c'est tout naturellement que nous l'avons désigné comme rapporteur pour avis.

Avant de lui céder la parole, je vous signale encore que le Gouvernement a engagé la procédure accélérée sur le projet de loi qui sera examiné la semaine prochaine par la commission des Affaires sociales saisie au fond, puis, en séance publique, à partir du mardi 26 mai.

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La commission des Affaires culturelles et de l'éducation s'est saisie pour avis de l'article 20 du projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi, dont le principal objet, traduisant la volonté du Gouvernement de trouver une solution pérenne aux crises récurrentes dans le spectacle vivant, est de conférer une base législative au régime particulier d'indemnisation au titre de l'assurance chômage des intermittents du spectacle.

Ce régime particulier, justifié par la discontinuité spécifique de l'emploi des artistes et des professionnels de la création dans le spectacle vivant ou enregistré, structuré selon une économie de projets, trouve sa traduction dans l'existence des annexes VIII et X à la convention d'assurance chômage, existence reconduite à chaque négociation entre partenaires sociaux interprofessionnels. Mais la précarité juridique de ces annexes, qu'il serait, en droit, possible de remettre en cause – une tension naît d'ailleurs à ce sujet lors de chaque renégociation – ne crée pas les conditions propices à apaiser les inquiétudes des professionnels concernés. De cette situation découle la nécessité de pérenniser dans la loi des règles spécifiquement applicables aux intermittents, tout en restant dans le cadre de la solidarité interprofessionnelle.

Ce point constituait l'une des principales préconisations contenues dans le rapport que Mme Hortense Archambault, M. Jean-Denis Combrexelle et moi-même avons remis le 7 janvier dernier au Premier ministre. La mission de concertation qui nous avait été confiée avait esquissé un scénario de sortie de crise de nature à « bâtir un cadre stabilisé et sécurisé pour les intermittents du spectacle », en s'appuyant avant tout sur la responsabilisation des acteurs de la profession.

Je ne rappellerai pas dans le détail le contexte du conflit dans lequel s'inscrivait cette mission, car vous le connaissez tous parfaitement. Je concentrerai mon propos sur le contenu de l'article 20, qui met en place des mécanismes assez largement inédits et qui reprend certaines des préconisations de la mission de concertation, en s'en éloignant parfois néanmoins, je vais y revenir.

Quatre points structurent cet article. Le premier est relatif à la consécration législative de l'existence de règles spécifiques pour l'indemnisation chômage des intermittents.

La mission de concertation avait préconisé de consacrer dans la loi l'existence même d'un régime spécifique d'indemnisation du chômage adapté aux métiers de spectacle afin d'apaiser les discussions et de donner un cadre clair aux parties prenantes, tout en maintenant ce régime dans la solidarité interprofessionnelle. C'est ce que fait l'article 20 du projet de loi.

Cette sanctuarisation ne vaut cependant pas acceptation des optimisations excessives du recours à l'intermittence dans certains secteurs professionnels. Il est en conséquence prévu une obligation de réexamen des listes des emplois pouvant être pourvus en contrat à durée déterminée d'usage (CDDU) – cela fera l'objet du quatrième point.

L'article 20 comporte un deuxième point essentiel : la mise en place d'une forme de délégation de négociation du niveau interprofessionnel vers le niveau professionnel. Cette délégation est toutefois encadrée.

La mission de concertation avait plaidé pour un renouvellement des méthodes de dialogue entre les niveaux professionnel et interprofessionnel. Elle avait en particulier insisté sur la nécessité que le niveau interprofessionnel consulte le niveau professionnel avant toute négociation sur l'assurance chômage afin qu'une situation analogue à celle qui avait prévalu lors de la dernière négociation ne puisse se reproduire. La consultation du niveau professionnel constituait pour nous un élément essentiel, car l'analyse des crises montre qu'elles ont systématiquement pour origine des décisions que l'interprofession prend pour le secteur professionnel, sans que celui-ci ait voix au chapitre : il se retourne alors vers l'État qui ne peut qu'affirmer qu'il n'y est pour rien. À défaut de remettre à plat ce jeu à trois, nous diagnostiquions un retour systématique des crises. Pour sortir de ce triangle infernal, il nous apparaissait indispensable d'assurer la reconnaissance du niveau professionnel, toute la difficulté consistant à articuler les deux niveaux de négociation en respectant la légitimité ultime du niveau interprofessionnel.

Sur ce sujet, l'article 20 du projet de loi va finalement plus loin que nos préconisations, puisqu'il met en place un mécanisme de délégation de négociation du niveau interprofessionnel au niveau professionnel, accompagné d'un encadrement par le niveau interprofessionnel et d'un principe de reprise obligatoire par l'interprofession de tout accord professionnel respectant les orientations fixées préalablement par la négociation interprofessionnelle.

Comment les choses se dérouleront-elles en pratique ? L'interprofession – c'est-à-dire les cinq confédérations syndicales et les organisations patronales – devra d'abord établir un document de cadrage fixant les objectifs de la négociation par les professionnels et comprenant deux éléments : une « trajectoire financière » et des « principes applicables à l'ensemble des bénéficiaires du régime d'assurance chômage ». Pour être repris par le niveau interprofessionnel, le futur accord devra nécessairement respecter ces éléments. La négociation se tiendra ensuite au niveau professionnel, et deux cas de figure pourront se présenter. Si un accord est trouvé qui respecte les délais fixés par l'interprofession et les orientations du document de cadrage, l'interprofession n'aura pas d'autre choix que de le reprendre dans la convention d'assurance chômage – c'est la raison pour laquelle j'ai évoqué une « délégation » de l'accord. Si aucun accord n'est trouvé ou si un accord ne respecte pas les conditions fixées, il reviendra alors à l'interprofession de négocier : on retournera en quelque sorte au droit commun de la négociation.

J'appelle votre attention sur un troisième point auquel je souhaite apporter quelques modifications. Il s'agit de la pérennisation du comité d'experts, que nous avions créé dans le cadre de la mission de concertation, chargé d'apporter un soutien aux négociateurs du niveau professionnel.

Lors de la mission de concertation, il est très vite apparu nécessaire, pour remettre tous les acteurs autour d'une même table de négociation, d'organiser une expertise partagée, transparente et consensuelle sur la méthode, fondée sur l'élaboration d'un outil de simulation des modifications des règles fixées par les annexes VIII et X. Un groupe d'experts a été mis en place, composé des principaux organismes et services disposant d'une expertise statistique dans le domaine – Unédic, Pôle emploi, Audiens, les services des études et des statistiques des ministères de la culture et du travail –, ainsi que de deux personnalités qualifiées, le sociologue Mathieu Grégoire et l'économiste Jean-Paul Guillot. Tout au long des travaux de la mission, ce groupe indépendant a produit des analyses – qui figurent en annexe du rapport de la mission de concertation. Ces analyses n'ont pas été contestées par les différents participants et ont servi de base à leurs discussions. Cette expérience réussie a montré que du croisement des données émanant de divers opérateurs pouvaient naître une meilleure connaissance des réalités de terrain et une approche plus fine des chiffrages des mesures envisagées. À partir de dix mille cas réels, ce groupe d'experts a mis en place une modélisation du régime permettant de simuler tout changement d'un paramètre et d'évaluer les effets croisés ou cumulés de modifications de plusieurs d'entre eux, ce qui constitue une indéniable avancée – même si des discussions ont toujours lieu sur la mesure des effets de comportement.

Je me félicite que l'article 20 reprenne en partie notre idée, puisqu'il crée un comité d'expertise, composé de représentants des services de l'État, de Pôle emploi, de l'Unédic, ainsi que de personnalités qualifiées désignées par l'État et les partenaires sociaux aux niveaux professionnel et interprofessionnel. Deux types de missions lui sont confiés.

La principale, à mes yeux, est celle d'appui technique aux organisations patronales et salariales, notamment celles du secteur professionnel. Jusqu'à ce jour, non seulement ces dernières n'étaient pas consultées, mais elles devaient aussi s'en remettre aux seules expertises de l'Unédic. Ce comité sera chargé d'expertiser et de chiffrer les différentes propositions soumises au cours des négociations.

Selon la rédaction du projet de loi, la mission de ce comité consisterait, en deuxième lieu, à rendre un avis sur le respect, par l'accord conclu au niveau professionnel, des orientations du document de cadrage préalablement établi par l'interprofession. De mon point de vue, le comité doit avant tout être un groupe d'appui pour le secteur professionnel et lui permettre de se doter d'une expertise. J'avoue être moins enthousiaste en ce qui concerne son second rôle : il faudrait à mon sens modérer le texte sur ce point ; nous en débattrons.

Un quatrième point structure enfin l'article 20 : la redéfinition des listes d'emplois ouvrant droit au recours au contrat à durée déterminée d'usage (CDDU). L'article 20 du projet de loi prévoit l'obligation d'un réexamen, d'ici au 31 janvier 2016, de la liste des emplois pouvant être pourvus par la conclusion de CDDU. Cette disposition reprend, une nouvelle fois, l'une des préconisations de la mission de concertation, laquelle avait estimé qu'un toilettage des listes des métiers ouvrant droit au recours aux CDDU figurait parmi les mesures à prendre pour réguler l'usage de ce type de contrats et bâtir une politique de l'emploi dans le spectacle vivant et enregistré. Pour autant – et je souhaite insister sur ce point –, il ne faut pas que cette disposition soit, à tort, interprétée comme une autorisation de recruter en CDDU tous les personnels occupant un emploi figurant sur ces listes, alors qu'un tel recrutement doit avant tout répondre aux critères du recours au contrat à durée déterminée (CDD) et que les employeurs doivent être incités à recruter en priorité en contrat à durée indéterminée (CDI). Si les chauffeurs figurent par exemple parmi les emplois susceptibles d'être pourvus en CDDU, cela ne doit concerner que ceux qui travaillent ponctuellement sur une tournée, dont l'embauche relève du régime du CDD, et pas le chauffeur permanent de telle vedette ou celui de telle société de production, qui doivent signer des CDI.

Je vous présenterai un certain nombre d'amendements dont l'objet est, en premier lieu, de préciser certains points de la procédure de négociation en deux temps, qui pouvaient prêter à confusion et, en second lieu, de repositionner le comité d'expertise. Il s'agit de faire de l'appui aux négociations pour le niveau professionnel sa mission principale. Je propose donc de supprimer la faculté pour l'interprofession de désigner certaines des personnalités qualifiées qui composeront le comité et de retirer à ce dernier la possibilité d'émettre des « avis » qui l'amèneraient d'une certaine façon à sanctionner le travail d'autres instances. Il me semblerait plus conforme à son rôle d'expert qu'il travaille à des « évaluations ».

Sous réserve de l'adoption de ces amendements et peut-être aussi de certains de ceux qui nous sont proposés par nos collègues ce matin, je vous invite à vous prononcer favorablement sur l'article 20 qui consacre l'existence même du régime des intermittents, lui reconnaissant toute la légitimité de sa spécificité, tout en le maintenant dans la solidarité interprofessionnelle, ce qui est essentiel.

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Je sais l'ensemble des membres de cette commission très attentifs à la création et à la culture, piliers de l'exception culturelle française que nous défendons ensemble ardemment. Personne ici n'a donc besoin qu'on lui rappelle que l'intermittence n'est ni une profession ni un statut, mais un mode d'indemnisation de salariés relevant des annexes VIII et X du régime d'assurance chômage. Il serait faux de prétendre qu'il en est autrement, ce que les médias font pourtant régulièrement.

Ces annexes, conçues pour prendre en compte la spécificité des métiers de la culture et de la création, notamment une forme « d'hyperflexibilité structurelle » imposée aux salariés du secteur, constituent un élément moteur du développement et du rayonnement des politiques culturelles de notre pays. Je pense pouvoir m'exprimer au nom de tous les membres du groupe SRC – mais sans doute cette volonté est-elle répandue bien au-delà de notre groupe –, pour rappeler que, depuis le début du quinquennat, l'une de nos ambitions a été de donner aux artistes et techniciens du spectacle vivant, du cinéma et de l'audiovisuel, un cadre social refondé qui permette de sortir des crises périodiques qu'a connues ce régime et de la fragilisation qui en a découlé, tant pour les salariés et les créateurs eux-mêmes que pour un secteur économique en plein développement – secteur qui, rappelons-le, représente année après année une part grandissante des richesses produites par notre pays.

En effet, si nous convenons tous que la culture est un élément moteur de l'émancipation des hommes, elle est aussi depuis plusieurs décennies un secteur d'activité primordial pour notre économie, comme l'a mis en évidence en décembre 2013 le rapport intitulé « L'apport de la culture à l'économie en France », rédigé conjointement par des membres des inspections générales des Finances et des Affaires culturelles.

Pourtant, pour ceux qui, encore nombreux, se tiennent éloignés des réalités d'un secteur d'activité aux modèles divers et particuliers, les annexes VIII et X de la convention d'assurance chômage apparaissent, au pire, comme de surprenants privilèges pour les salariés qui en bénéficient ou, au mieux, comme une anomalie de gestion. Il aura sans doute fallu l'annulation du festival d'Avignon en 2003, alors que certains cherchaient déjà à remettre en cause ces annexes, pour prouver par l'exemple l'importance de la culture dans les performances économiques et le rayonnement des territoires.

Aujourd'hui, nous sortons enfin d'un long processus semé d'embûches. Après l'échec de l'accord national interprofessionnel (ANI) sur ce sujet, et pour mettre fin à des crises récurrentes et rechercher une solution pérenne, le Premier ministre a mis en place, en juin 2014, une mission de concertation qu'il a confiée à Mme Hortense Archambault, ancienne co-directrice du festival d'Avignon, à M. Jean-Denis Combrexelle, ancien directeur général du travail, et à notre rapporteur pour avis M. Jean-Patrick Gille. Ce dernier avait déjà formulé dans un rapport datant de 2013 plusieurs propositions qui, j'en suis certain, nourriront aussi, mais sans doute dans un climat apaisé, les nécessaires réflexions que nous aurons à mener autour de ces annexes, sans craindre désormais qu'elles soient remises en cause.

Cette mission a réuni pour la première fois autour d'une même table l'ensemble des acteurs concernés par l'intermittence : le patronat, les syndicats, mais aussi la coordination des intermittents et les entreprises du spectacle. À cet égard, cette forme de concertation est allée au-delà de la concertation tripartite que les partenaires sociaux appelaient de leurs voeux dans l'ANI du 22 mars 2014, sans néanmoins oublier la légitimité et la responsabilité des organisations représentatives.

Le Gouvernement a saisi l'opportunité de la discussion du projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi pour inscrire dans la loi l'existence des règles spécifiques d'indemnisation des intermittents du spectacle, ainsi que l'instauration d'un mécanisme permettant aux partenaires sociaux représentatifs du secteur du spectacle de négocier ces règles spécifiques dans un cadre défini par les partenaires sociaux au niveau interprofessionnel.

Désormais, les annexes VIII et X de la convention d'assurance chômage, qui étaient jusqu'ici une construction purement conventionnelle dont l'existence pouvait être remise en cause à chaque renégociation de la convention, seront sécurisées. Cela évitera sans doute que certaines organisations patronales entrent dans les négociations avec comme arme de chantage ultime la menace d'une suppression pure et simple de ces annexes. Le dialogue social y gagnera sans nul doute en qualité pour le bien de l'ensemble des partenaires du secteur.

Par ailleurs, l'article 20 instaure une nouvelle méthode de gouvernance qui permettra aux partenaires sociaux de déterminer l'enveloppe financière des annexes en laissant le soin aux professionnels du spectacle de fixer un certain nombre de règles.

Alors que certains élus de droite, sans doute moins bien informés que ceux de notre commission, parlent encore des « privilèges » accordés aux intermittents, sans comprendre que le régime d'indemnisation n'a pas uniquement pour vocation d'être en équilibre, mais qu'il vise à soutenir des personnes précaires et néanmoins indispensables à cette économie particulière, nous pouvons nous féliciter que l'engagement du Gouvernement ait été tenu, de surcroît dans un contexte où le budget de la Culture pour 2015 est préservé, voire en augmentation pour l'année à venir en ce qui concerne les crédits dédiés à la création, à en croire les lettres de cadrage du ministère.

Si le débat sur l'intermittence n'est pas clos pour autant, comme notre rapporteur pour avis nous l'a rappelé, le groupe SRC ne peut que se féliciter de l'avancée majeure que constitue la création d'un cadre stabilisé.

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Rares sont les parlementaires de droite qui s'offusquent de la condition d'intermittent du spectacle. Je crois même que nous pensons unanimement que l'intermittence est indispensable. Encore faut-il qu'elle soit correctement encadrée. C'est pourquoi nous restons vigilants à l'égard du travail mené par notre excellent rapporteur pour avis, devenu le grand spécialiste de ce sujet.

Nous avons tendance à considérer que, si l'article 20 constitue une réponse aux annonces faites par le Premier ministre et aux propositions de la mission de concertation, il s'agit surtout d'une sorte d'affichage destiné à mieux contenir les inquiétudes des intermittents, dont nous savons qu'ils exercent des professions très souvent précarisées. Au regard de la réalité de la situation de l'intermittence et de la technicité des problèmes à résoudre, nous avons le sentiment que ce texte ne changera pas grand-chose au fond des problèmes. À voir les réactions mitigées des partenaires sociaux, organisations d'employeurs ou de salariés, il est même clair qu'il suscite plutôt une inquiétude quant à une éventuelle remise en cause du respect de la solidarité interprofessionnelle qui caractérisait jusqu'à présent le régime d'assurance chômage et à laquelle nous tenons tous.

La création d'un fonds spécifique est-elle acceptable sur un plan financier ? Qui le financera, comment et à quel niveau ? On peut craindre aussi que d'autres secteurs d'activité ne sollicitent à leur tour la création d'un régime spécifique.

Certes, la nécessité de mieux associer les organisations de salariés et d'employeurs représentatives de l'ensemble des professions du spectacle à la négociation des règles de l'assurance chômage est apparue à tous, mais est-il vraiment nécessaire d'instaurer une sorte de négociation à double niveau, l'une au niveau interprofessionnel pour fixer les règles de droit commun, et une autre au niveau sectoriel pour définir les règles d'indemnisation de l'intermittence ? Cette double négociation appelle quelques réserves, le rapporteur pour avis lui-même l'a laissé entendre, même si le document de cadrage et la trajectoire financière qu'il impose permettront de respecter les principes applicables à l'ensemble des bénéficiaires du régime d'assurance chômage. Nous espérerons avec vous que cette démarche, qui consiste à vouloir redonner un cadre à la négociation, permettra de renouer le dialogue et d'apaiser les crispations qui demeurent. Elle permettra aussi aux diverses organisations interprofessionnelles et représentatives d'anticiper leur niveau de responsabilité dans la négociation à mener.

La création d'un comité d'expertise suscite quelques interrogations. Notre rapporteur pour avis répond d'ailleurs à certaines d'entre elles en présentant des amendements. On peut en premier lieu craindre la mise en place d'une structure trop imposante : la composition du comité me paraît trop imprécise et je crains que la multiplication de ses membres ne l'empêche de réagir rapidement lorsque des demandes lui seront adressées. J'avais noté que le texte ne précisait pas la nature des avis émis : seront-ils seulement consultatifs ou devront-ils être obligatoirement suivis ? Le rapporteur pour avis nous a annoncé un amendement qui, en tout état de cause, résoudra ce problème.

La révision de la liste des métiers qui ouvrent droit au bénéfice des règles d'assurance chômage propres aux intermittents paraît plus que nécessaire, mais le calendrier proposé semble pour le moins optimiste. S'agissant d'un texte qui n'en est aujourd'hui qu'au stade du projet de loi, vous envisagez une mise en oeuvre au 1er janvier 2016 : je ne suis pas certain que cela soit tout à fait réaliste…

De façon générale, nous avons bien conscience que vous souhaitez apporter une réponse à une question réelle. Il nous semble cependant que cette réponse reste catégorielle et sectorielle.

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Notre Commission a eu à plusieurs reprises l'occasion de traiter du problème des intermittents. Ce fut notamment le cas, le 8 avril dernier, lors de l'audition de M. Mathieu Gallet, président-directeur général de Radio France, que nous avons interrogé sur les personnels précaires au sein du groupe qu'il dirige. Si les personnels permanents des services publics – je pense aussi à France Télévisions – bénéficient de conditions de travail correctes, il existe aussi une face cachée de ces établissements pour ce qui concerne les précaires et les intermittents.

Nous avons déposé plusieurs amendements sur ce texte attendu. Je voudrais évoquer l'un d'eux que je ne vois pas dans la liasse, mais que nous présenterons pour la séance publique. Il concerne la trajectoire financière fixée par l'interprofession. Au nom de l'intérêt fondamental de l'exception culturelle française, le régime des intermittents ne doit pas faire l'objet d'un bilan circonscrit : il doit bel et bien être examiné à la lumière de l'activité d'un secteur culturel pris dans son ensemble. C'est uniquement sur la base du constat d'une activité économique culturelle florissante dans laquelle le secteur du spectacle vivant a toute sa part qu'il est raisonnable d'apprécier le statut des intermittents. Cette analyse se trouvait dans un rapport de notre collègue Aurélie Filippetti, ancienne ministre de la Culture. Il me semble extrêmement important de prendre en compte cette solidarité interprofessionnelle. Pourquoi exiger des seuls intermittents un bilan financier positif en matière de chômage ? Demande-t-on aux tourneurs fraiseurs ou à d'autres professions de fournir des comptes équilibrés ?

Par ailleurs, nous estimons qu'il est important d'intégrer les intermittents aux discussions des annexes VIII et X qui sont des documents complexes. Nous devons faire en sorte que tous les professionnels puissent être consultés et participer aux discussions.

Il me semble enfin qu'il est temps que nous nous saisissions du problème des congés de maternité et des arrêts maladie qui constituent aujourd'hui des périodes très délicates de la vie des intermittents.

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Ma chère collègue, trois des amendements que vous avez déposés ont été déclarés irrecevables par le président de la commission des Finances au titre de l'article 40 de la Constitution. Il ne semble en effet guère contestable que la suppression d'un cadrage financier est susceptible d'entraîner la « création ou l'aggravation d'une charge publique ». C'est la raison pour laquelle ces amendements ne sont pas soumis à l'examen de notre commission.

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Nous pouvons remercier notre rapporteur pour avis d'avoir accompli son travail dans un contexte parfois difficile et houleux. Il nous avait présenté, le 28 janvier dernier, le rapport intitulé « Bâtir un cadre stabilisé et sécurisé pour les intermittents du spectacle », rédigé avec Mme Hortense Archambault et M. Jean-Denis Combrexelle au sein d'une mission de concertation, qui apportait une lueur d'espoir aux professionnels du champ culturel. Je me réjouis de voir enfin sa matérialisation législative. Les intermittents du spectacle dans leurs différentes catégories professionnelles ont été écoutés ; il faut aussi les entendre. En effet, les crises et protestations régulières, souvent justifiées, ont fortement montré qu'il était urgent de s'atteler à une réforme de ce statut afin d'apporter des garanties juridiques et un nouveau cadre social à ses bénéficiaires, tout en s'attachant à lutter contre tous types d'utilisations irrégulières du dispositif.

Rappelons-le encore : si la famille des intermittents regroupe des profils divers, la grande majorité d'entre eux sont touchés par la précarité et doivent s'en remettre à la débrouille au jour le jour, entre des contrats de courte ou très courte durée. Le statut des intermittents est alors une chance, chance que nous ne devons pas leur subtiliser. Il représente la possibilité pour ces acteurs culturels d'acquérir une relative stabilité et d'exercer leur métier plus sereinement. Ce statut singulier est aussi, je tiens à le souligner, une opportunité pour la culture française d'avoir le rayonnement qu'elle mérite.

Je suis soulagée que l'article 20 recrée les conditions d'un dialogue serein. Cela permet de mieux envisager l'avenir pour toutes les parties concernées et de se recentrer sur le plus important : parvenir à pérenniser le statut des intermittents dans de meilleures conditions. Le Gouvernement a décidé d'aller plus loin dans les méthodes de négociation que ce que vous aviez préconisé dans le cadre de la mission de concertation. Il souhaite mettre en place une négociation en deux temps afin d'éviter les nouveaux blocages et les ruptures de dialogue. Nous nous en réjouissons en attendant la concrétisation de ces négociations. Je relève que la pérennisation du comité d'expertise reste encore à évaluer dans le temps. Si nous devons être optimistes, gardons toutefois à l'esprit que l'on ne peut, à ce stade, mesurer tous les effets des dispositions contenues dans le texte et les réactions qu'elles susciteront.

Je soutiens également pleinement la redéfinition par voie de négociation, avant le 31 janvier 2016, de la liste des métiers du spectacle vivant ouvrant droit au régime de l'intermittence. Trop d'abus ont eu lieu qui ont parfois altéré l'image des métiers du spectacle. Je déplore d'entendre aujourd'hui encore, hors de notre assemblée il est vrai, les avis tranchés de ceux qui jugent la situation des intermittents « avantageuse » et pensent qu'ils sont en quelque sorte « privilégiés ». Tous les métiers du spectacle nécessitent un investissement et un réel don de soi, et la plupart des intermittents voudraient bien être davantage sur scène, derrière une caméra, ou encore aux manettes d'une régie. II était donc important de rappeler les conditions pour conclure un CDDU, même si nous avons conscience que cela ne pourra éviter tous les écueils, et si nous savons qu'il sera nécessaire de mettre en place des contrôles complémentaires.

Enfin, j'aimerais aborder la sanctuarisation du statut des intermittents que permet l'article 20. S'il était nécessaire d'entériner dans la loi l'existence d'un régime particulier, permettez-moi d'exprimer quelques doutes, qui ont aussi été relevés par la Coordination nationale des intermittents et précaires (CIP), quant à la capacité réelle de ce projet de loi à sanctuariser véritablement ce statut, mais aussi à prendre en compte les avancées obtenues. En effet, seule est abordée l'existence même de ce statut, justifiant alors des règles dérogatoires. Mais ne peut-on pas craindre qu'une législation trop floue, qui n'aborde pas les tenants et les aboutissants du statut, ne sécurise pas, in fine, les personnes concernées, en tout cas de manière durable ?

Je crois qu'il est avant tout indispensable d'opérer une clarification du positionnement de la France. Si notre pays se targue à juste titre de son rayonnement culturel, une ambiguïté persiste pourtant quand l'État montre sa volonté de soutenir la culture et ses acteurs par le statut des intermittents sans pour autant en assumer pleinement l'existence et les conséquences qui en résultent. Les politiques publiques culturelles sont manifestement imbriquées avec l'économie. Ayons le courage de le dire : un régime spécial se justifie tout à fait et je le soutiens avec force !

Soyons justes et reconnaissons que ce texte contient des avancées que nous ne pouvons qu'encourager. Nous voulons croire dans la volonté du Gouvernement d'assurer une meilleure protection juridique des intermittents. Le groupe RRDP votera en faveur de l'article 20. Nous veillerons cependant à ce que ces dispositions constituent pour les catégories professionnelles concernées une avancée efficace qui s'inscrive dans le temps.

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Je me félicite de constater que le Gouvernement respecte son engagement en nous proposant d'inscrire dans la loi l'existence du régime spécifique des intermittents du spectacle. La sécurisation de leur parcours professionnel et de leurs conditions de vie constitue une question essentielle pour eux-mêmes, mais aussi pour l'avenir du spectacle et, partant, pour celui de la culture. Les difficultés rencontrées cette année par les festivals, les structures et initiatives culturelles ne peuvent que conduire à s'inquiéter de ce devenir. J'ai souvenir que Mme la ministre de la Culture, en réponse à une question que je lui avais posée au sujet de la baisse de la dotation pour les festivals, avait répondu sur le statut de l'intermittence.

Le 28 janvier dernier, nous avons entendu en audition les coauteurs du rapport remis au Premier ministre, intitulé « Bâtir un cadre stabilisé et sécurisé pour les intermittents du spectacle ». Ce travail faisait suite à la mobilisation des intermittents contre l'accord Unédic du 22 mars 2014, ratifié par le Gouvernement contre l'avis des principales organisations des personnels. Ceux-ci contestaient le relèvement des cotisations, le plafonnement du cumul des allocations et revenus d'activité, ainsi qu'une augmentation du différé d'indemnisation qui créait un délai entre l'ouverture du droit et la perception de l'indemnisation en fonction des revenus et du nombre d'heures de travail réalisées.

Depuis, le Gouvernement est intervenu sur le plan financier pour compenser les effets du différé d'indemnisation – sans pourtant en annuler le principe – et vous a confié, monsieur le rapporteur pour avis, une mission dont l'aboutissement est l'article du projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui. Toutefois, les dispositions législatives qu'il nous est proposé d'adopter peuvent encore être améliorées. Ainsi, en ce qui concerne le processus de négociation décrit par le II de l'article 20 que nous discutons et l'articulation entre le cadrage interprofessionnel et la négociation intérieure au régime spécifique, nous souhaitons relayer les inquiétudes des syndicalistes au sujet du rôle conféré au comité d'expertise. S'ils ne remettent pas en cause la création de ce comité, ils s'interrogent sur le fait de lui confier la mission de valider le cadrage financier des accords résultant des négociations.

Enfin, le dispositif d'établissement des listes des emplois pouvant être pourvus par des CDDU pourrait être amélioré par l'adoption de mesures susceptibles de limiter le recours à ces contrats lorsque des emplois pérennes sont possibles.

Le spectacle ne peut vivre sans artistes et sans techniciens. Je voudrais ici rendre hommage à leur combativité, car, depuis de longues années, ils se mobilisent pour que la loi – et donc la République – leur reconnaisse le droit à disposer d'un régime spécifique d'assurance chômage prenant acte de la spécificité de leurs métiers tout en garantissant à ceux qui les exercent les moyens de vivre de leur travail. Nous nous prononcerons positivement pour l'adoption de ce texte, tout en demeurant vigilants.

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Je voudrais saluer la consécration dans la loi, par le projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi, des annexes VIII et X de la convention d'assurance chômage qui déterminent les modalités du régime particulier d'indemnisation des intermittents du spectacle. Il s'agit là d'un progrès social et de la reconnaissance de la spécificité du métier des intéressés. La loi conférera davantage de lisibilité et de stabilité à un régime qui était jusqu'à présent remis en cause à chaque négociation de la convention d'assurance chômage. L'article 20 garantit que la négociation des règles spécifiques d'indemnisation du chômage incombe à l'ensemble des partenaires sociaux du secteur du spectacle. Elle répond à l'une des préconisations du rapport remis au Premier ministre le 7 janvier dernier : notre rapporteur pour avis considère même que la méthode retenue par le Gouvernement va plus loin que ce qu'il avait lui-même suggéré, dans le cadre de la mission de concertation.

Pouvez-vous apporter des éclaircissements sur le sort réservé à une revendication des intermittents, qui souhaitent un retour au principe de la date anniversaire, c'est-à-dire le calcul des droits à indemnisation à date fixe sur douze mois ?

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Cet article 20 n'est pas une bonne idée et l'on se leurre en croyant qu'il va régler la question des intermittents. Il va au contraire créer par la loi un régime d'exception. Si l'on commence à graver dans le marbre des exceptions aux règles de l'assurance chômage, celles-ci risquent de se multiplier, empêchant ainsi un futur gouvernement de prendre le problème à bras-le-corps.

À cela s'ajoute la création d'un comité d'expertise censé articuler les niveaux professionnels et interprofessionnels, mais qui ne pourra qu'alourdir le dispositif des règles de négociation de l'indemnisation du chômage. Il vient s'inscrire dans un dispositif d'une étonnante complexité, comme on s'en aperçoit à la lecture de l'exposé des motifs : « Pendant la négociation des accords » relatifs à l'assurance chômage, « les partenaires sociaux représentatifs de l'ensemble des professions du spectacle seront invités à négocier entre eux ces règles spécifiques. » On imagine ce que cela peut donner. Ce qui est présenté par le Gouvernement comme une nouvelle méthode de dialogue social n'est en fait qu'un méli-mélo de négociations et d'avis dans lequel on se perd et dont je doute de l'efficacité. Les quelques amendements que vous présentez n'y changeront d'ailleurs rien.

On ne s'y prendrait pas autrement si l'on cherchait à noyer le poisson. Dans tous les cas, si l'on veut placer ce projet de loi sous le signe de la simplification – puisque c'est, paraît-il, la marque de fabrique du Gouvernement –, cet article ne doit pas y figurer.

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La qualité de ce texte doit beaucoup à vos travaux, à votre insistance, à votre obstination, monsieur le rapporteur pour avis. L'article 20 fait place à la culture et garantit la stabilité de la situation de ses acteurs. Il ne crée pas une exception, mais consacre la particularité de l'intermittence. Il institue un cadre procédural pour les négociations professionnelles : l'élaboration d'un document de cadrage précisera leurs objectifs, notamment en termes de trajectoire financière et de respect des règles applicables à l'ensemble des bénéficiaires du régime de l'assurance chômage, ainsi que les délais dans lesquels ces négociations doivent aboutir. Pouvez-vous nous donner des précisions sur le travail à fournir pour déterminer les périmètres et procédures d'élaboration de ce document ?

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L'article 20 reprend une bonne partie du rapport remis en 2013 par nos collègues Gille et Kert, et concrétise les engagements pris par le Premier ministre. Cependant, en sanctuarisant le régime des intermittents du spectacle, en faisant entrer dans le corps de la loi ce qui n'était inscrit que dans des annexes, ne crée-t-il pas un précédent qui permettra demain à d'autres catégories de demander à sortir du système de l'assurance chômage ?

Ce dispositif entérine l'inégalité devant les règles d'indemnisation du chômage entre les intermittents du spectacle et les salariés du secteur privé. Mais on doit aussi, à son propos, se poser la question des intérimaires. Vous avez évoqué, monsieur le rapporteur pour avis, le travail restant à venir au sujet du recours à ces contrats d'intermittence. Qui distinguera et contrôlera les contrats n'ayant pas vocation à bénéficier de ce régime ?

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Graver les annexes VIII et X dans le marbre de la loi afin de mieux garantir le droit des intermittents du spectacle, c'est faire oeuvre de justice, car c'est soutenir à la fois la création artistique et ceux qui connaissent la plus grande précarité professionnelle et pour qui la durée d'indemnisation du chômage est moins longue que dans le régime général. Sécuriser leur condition, c'est aussi mieux accompagner la création de ceux qui font vivre la politique culturelle de la France et notre promesse républicaine de liberté. N'oublions pas que la culture contribue chez nous sept fois plus au produit national brut (PIB) que l'industrie automobile.

L'article 20 concrétise la volonté renouvelée du Gouvernement en faveur de la culture. La feuille de route annoncée par le ministre du travail et de l'emploi et la ministre de la Culture devrait compléter ces nouvelles mesures législatives, et renforcer la pérennisation des contrats de travail dans ce secteur. Je tiens à saluer la création, par la mission de concertation, du comité de liaison avec Pôle emploi, qui devra continuer à améliorer l'accès aux droits des intermittents.

Je voudrais signaler que, depuis quelques jours, différents collectifs se mobilisent pour que les droits des intermittents soient pleinement reconnus par Pôle emploi lorsqu'ils travaillent dans le cadre de pratiques amateurs, que ce soit pour des stages ou dans le cadre d'activités périscolaires ou scolaires. Leurs interventions au titre de la médiation culturelle et de la démocratisation sont essentielles.

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Après les trop nombreuses crises qui ont agité le secteur du spectacle, de la production audiovisuelle et cinématographique, particulièrement en 2003 et 2014, le Premier ministre a annoncé vouloir sécuriser et stabiliser les régimes d'assurance chômage de ces professions. En l'état, et à l'heure même où s'ouvre le festival de Cannes, le texte du projet de loi semble loin d'être à la hauteur de cette ambition. Si le législateur entend apporter la sérénité nécessaire aux décisions en les préservant de tout aspect émotionnel, il se contente surtout d'inscrire dans la loi la spécificité du statut des professionnels du secteur afin de la légitimer. En d'autres termes, non seulement il ne réforme rien d'un système qui, à maintes reprises, a montré ses limites et son insuffisance, mais il affirme que, désormais, il n'y aura plus lieu d'en débattre.

Je m'interroge sur la création d'un énième comité d'expertise ad hoc, comme sur la traduction concrète de son rôle à la fois d'appui et de contrôle dans le cadre des négociations des accords professionnels du secteur. Je demeure sceptique quant au caractère innovant du double niveau de négociations qui, à l'évidence, ajoutera la complexité à l'opacité. Enfin, je déplore que le recours injustifié au CDDU, pratique régulièrement dénoncée par la Cour des comptes, ne soit pas davantage abordé, particulièrement en termes de répression d'abus dont les premières victimes sont les contribuables. Ce n'est pas cela que nos concitoyens attendent de leurs représentants, et je regrette le peu de courage et d'ambition du Gouvernement devant ce chantier.

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L'article 20 reprend les propositions de l'excellent rapport sur les intermittents du spectacle rédigé par Mme Archambault, M. Combrexelle et M. Gille : la responsabilisation des partenaires sociaux ; l'encadrement du recours au CDDU ; la lutte contre la précarisation ; l'amélioration de la protection sociale des intermittents ; l'institutionnalisation du comité d'experts qui figurera désormais dans la loi. Avec ces acquis, l'article 20 inscrit dans le code du travail que la spécificité des métiers du cinéma, de l'audiovisuel et du spectacle vivant justifie la présence de règles particulières aux intermittents du spectacle, annexées au règlement général de la convention d'assurance chômage. Je salue une avancée tant attendue.

Cependant, pouvez-vous, monsieur le rapporteur pour avis, apporter quelques précisions au sujet de l'évolution du guichet unique du spectacle occasionnel (GUSO) ?

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Nous étions nombreux à attendre les dispositions de l'article 20, quatre mois après la remise du rapport de la mission menée par Jean-Patrick Gille et les engagements du Premier ministre. Il était temps que nous passions par la loi pour rassurer les intermittents. Peut-être le sujet aurait-il mérité un projet ou une proposition de loi spécifique, mais le projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi paraît cependant un véhicule convenable.

L'article 20 institutionnalise un comité d'experts sur les règles spécifiques applicables en matière d'indemnisation des artistes et techniciens intermittents du spectacle. C'est la méthode à laquelle a recouru la mission que vous avez pilotée. La composition de ce comité doit être déterminée par décret. Une place sera-t-elle réservée en son sein aux associations qui ne sont pas juridiquement des partenaires sociaux ?

Les ministres de la culture et du travail ont fait part de leur intention de lancer des négociations entre les partenaires sociaux du spectacle, afin de mieux encadrer le recours aux CDDU et de lutter contre la précarisation de l'emploi. Ne craignez-vous pas que la démarche gouvernementale fasse doublon et empiète sur le travail parlementaire ?

L'article 20 inscrit dans la loi les principes fondamentaux de l'intermittence, mais il semble que d'autres chantiers doivent s'ouvrir, comme la préparation d'une circulaire relative à l'accès des intermittents aux indemnités journalières de maladie et de maternité, la mise en place d'un comité de liaison avec Pôle emploi ou la modernisation du GUSO. Pouvez-vous nous apporter des précisions à ce sujet ?

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L'enthousiasme est tel que je m'en voudrais de jouer les rabat-joie ; permettez-moi cependant de lire le courrier de la coordination des intermittents et précaires (CIP) du 3 mai dernier : « La “sanctuarisation” de l'intermittence n'en est pas une. Elle n'entérine aucune des avancées promises, malgré des mois de concertation, malgré les déclarations volontaristes réitérées du Premier ministre Manuel Valls. Un texte tellement flou qu'une lecture distraite pourrait y discerner des avancées alors qu'il est en réalité totalement creux. Le titre II ne fait que constater l'intérêt de la démarche de concertation entreprise sans en tenir compte. Aucun engagement concret n'est inscrit dans la loi […]. En réalité, derrière une prétendue sanctuarisation, le ministre jette les bases de la création d'une caisse autonome pour l'intermittence ».

Le sujet est complexe et il ne s'agit pas pour moi de jeter la pierre à qui que ce soit, mais, lorsqu'on se réclame du dialogue social, le moins que l'on puisse faire n'est-il pas d'écouter les partenaires sociaux ? Nombreux sont les députés qui ont salué une formidable avancée : à la lumière du texte que je viens de lire, on peut s'interroger sur sa réalité. Je suis très attaché à l'intermittence, car je crois la culture essentielle : un récent rapport de l'Inspection générale des finances et de l'Inspection générale des affaires culturelles a montré qu'elle contribue pour 3,2 % à la richesse nationale et emploie 670 000 personnes. Le projet de loi n'apaise aucune des inquiétudes qui se sont exprimées, car on ne voit pas pourquoi les représentants des intermittents accepteraient de négocier dans le cadre d'une enveloppe budgétaire réduite – l'assurance chômage leur a versé 1,3 milliard d'euros tout en ne percevant que 250 à 300 millions d'euros de cotisations. Comment améliorer effectivement le système ?

Nous débattons aujourd'hui des principes, mais on peut s'inquiéter de ce qui se passera en 2016, quand on en viendra au concret et qu'il faudra renégocier.

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Mon cher collègue, il y a quelque chose de rafraîchissant à vous entendre comme porte-parole d'une coordination !

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Monsieur de Mazières, c'est en posant des principes que l'on permet des avancées concrètes. Il se trouve que, avec ce texte, nous faisons les deux en même temps.

Depuis le 31 janvier dernier, le nombre d'heures nécessaire pour bénéficier des indemnités journalières est passé de 200 à 150 heures par trimestre, ce qui, en soi, constitue un progrès. Une circulaire viendra préciser les conditions d'accès des intermittents à ces prestations : avez-vous quelques précisions à nous apporter à ce sujet ?

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M. le rapporteur pour avis expliquera sans doute que cela relève du domaine réglementaire, non de la loi.

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Michel Pouzol l'a dit, le texte dont nous débattons s'inscrit dans la continuité des travaux que notre collègue Christian Kert et moi-même avons menés à l'Assemblée nationale, puis de ceux de la mission de concertation. Il ne s'agit pas pour autant de régler ici l'intégralité de la question, mais de traiter ce qui relève du domaine législatif. D'autres avancées relèvent du domaine réglementaire, de circulaires, des pratiques – notamment avec Pôle emploi – et de la négociation. La réponse n'est pas étatique, puisqu'elle doit passer par la négociation : on peut désapprouver le choix que nous faisons, mais on ne peut pas, en l'occurrence, parler de dirigisme.

Des inquiétudes se sont fait jour et se sont traduites par une forme étonnante d'alliance objective du MEDEF et de la CIP, qui considèrent l'un et l'autre que le projet de loi ne sanctuarise pas l'intermittence, mais prépare au contraire la création d'une caisse autonome. Le choix retenu par le texte est, à l'inverse, d'établir des règles spécifiques dans le cadre du régime de solidarité interprofessionnelle, d'articuler le régime général et des règles particulières répondant à la spécificité de l'emploi culturel.

Sans doute ces inquiétudes s'expliquent-elles par l'intervention de l'État dans le financement. Ceux-là mêmes qui réclamaient que l'État intervienne protestent dès que celui-ci prend en charge le différé – il s'agissait en l'occurrence de sortir de la crise –, car ils voient dans cette solution un cheval de Troie. Il n'est pourtant question que de sanctuariser les annexes et d'améliorer le fonctionnement du régime.

Une conférence sur l'emploi dans le secteur culturel se tiendra au mois de septembre prochain, dans la droite ligne des annonces faites par le Premier ministre le 7 janvier dernier, annonces qui concernaient également les crédits de la culture et du spectacle vivant pour 2015 et 2016. La conférence devrait aboutir à la constitution d'un fonds pour l'emploi. Il faut conforter l'intermittence tout en la contenant et trouver un dispositif de sortie par le haut, afin d'éviter un recours excessif à ce statut. La situation du chauffeur employé en CDDU peut sembler, au départ, constituer une facilité pour l'employeur et un avantage pécuniaire pour le salarié mais, à terme, personne n'a à y gagner, ni l'intéressé ni la collectivité.

Avec le double niveau de négociation, tous les intéressés – non seulement les salariés mais également les organisations représentatives des employeurs – auront voix au chapitre. Ce secteur professionnel est mûr et capable de s'organiser. Deux scénarios étaient possibles : soit on imposait la concertation au sein du secteur, soit on prévoyait une forme de délégation de la négociation en ce qui concerne les annexes VIII et X. Le Gouvernement a choisi la seconde solution, à la grande surprise des acteurs qui réclamaient un changement, mais ne s'attendaient pas à un tel dispositif, retenu pour sa solidité juridique comme en atteste l'avis du Conseil d'État qui a achevé de déterminer le Gouvernement. Reste à savoir qui négociera, car la profession n'est pas tout à fait déterminée à ce sujet et cette question, que nous aborderons avec les amendements, est en cours de règlement.

Le comité d'expertise ne doit pas être un nouveau comité Théodule. Il s'agit de responsabiliser la profession en la dotant d'une expertise afin de signifier que l'Unédic n'en a pas le monopole. L'Unédic est compétente dans le domaine interprofessionnel, et les professionnels le sont dans celui des règles particulières. Cela a été un des éléments de la crise que nous avons dénouée en 2014. Depuis dix ans, la CIP et des syndicats émettaient des propositions qui n'avaient jamais fait l'objet d'une expertise ou d'une évaluation. Nous nous sommes attelés à ce travail, avons organisé le débat, trouvé des accords, et les résultats ne se sont pas fait attendre.

Ainsi, madame Langlade, le débat relatif au retour à la date anniversaire a permis de dédramatiser la situation. Nous ne l'avons pas inscrit dans la loi, car on ne peut pas, d'un côté, demander aux acteurs de négocier et, de l'autre, leur donner la réponse à l'avance. L'expertise a montré que, contrairement à ce qui a pu être dit, le coût n'est pas exorbitant. Les annexes du rapport remis au mois de janvier montrent que le comité d'experts a déjà travaillé et établi des projections. Il faut conserver aux professionnels du secteur le droit de bénéficier d'une expertise reconnue par tous. C'est pourquoi je ne souhaite pas que le comité se prononce sur l'ensemble du dispositif par un avis sanctionnant la conformité de l'accord au cadrage. Le nombre de ses membres ne doit d'ailleurs pas être très élevé, mais comprendre quelques statisticiens spécialistes de la question. Il ne s'agit pas d'organiser des colloques, mais d'être immédiatement opérationnel dans l'analyse des chiffres.

Le calendrier optimiste de la révision des listes d'emplois me semble raisonnable. Si les choses n'allaient pas aussi vite que souhaité, je fais confiance au Sénat pour apporter un peu de sagesse. Christian Kert a considéré que le texte ne répondait pas à l'ensemble de la problématique, mais comment pourrait-il en être autrement, puisque seul l'aspect législatif est traité ? Le législateur se borne à améliorer la négociation relative aux règles particulières au sein d'un cadre paritaire réunissant l'Unédic et l'interprofession.

Un amendement relatif à la trajectoire financière est tombé sous le coup de l'article 40 de la Constitution, mais la disposition qui était proposée existe déjà. L'Unédic participe à la discussion et propose des solutions adaptées à l'état des finances. Le débat principal porte sur le régime d'assurance chômage, qui concerne potentiellement 20 millions de personnes, puis viennent les annexes dont le sort est souvent réglé à la fin des négociations, au milieu de la nuit. Celles-ci servent alors de variables d'ajustement, ce qui est d'autant plus facile que les intéressés ne sont jamais vraiment représentés. Ainsi en vient-on à prendre des décisions qui ne sont pas parfaitement éclairées du point de vue technique. C'est pourquoi le texte a prévu une négociation en amont : soit elle aboutit en respectant la trajectoire financière fixée par l'interprofession, auquel cas le texte s'imposera, soit elle échoue, mais les éléments de la discussion demeureront. Encore une fois, l'ensemble du dispositif repose sur la responsabilisation du secteur professionnel.

En réponse à la question de Mme Attard au sujet des « matermittentes », j'indique qu'un décret a d'ores et déjà abaissé de 200 à 150 heures trimestrielles la durée nécessaire et qu'une circulaire a été prise à l'intention des services sociaux. Cela ne règle pas tous les problèmes et nous dialoguons avec l'administration sur ce sujet mal connu. Un consensus existe pour trouver une solution, qui ne relève pas du domaine législatif. Au demeurant, si un signal législatif était nécessaire, nous l'intégrerions dans la loi.

Mme Hobert, comme M. de Mazières, a relayé les inquiétudes de la CIP, dont les revendications sont contradictoires : d'un côté, on veut rester dans l'interprofession et, de l'autre, on réclame un statut. M. Tardy bondirait à ces propos, car, dans son esprit, statut signifie caisse et régime spécial : or la tendance n'est pas à la multiplication des régimes spéciaux. La CIP, avec qui nous avons beaucoup dialogué, sait qu'elle ne sera pas partie à la négociation, puisqu'elle ne constitue pas une organisation représentative au sens de la loi, même si son influence est grande sur la profession. Au demeurant, ses représentants ont participé à l'expertise et apporté les propositions parmi les plus intéressantes grâce à leur parfaite connaissance des dossiers.

Je remercie Mme Marie-George Buffet d'avoir exprimé sa satisfaction en constatant que le Gouvernement tenait ses engagements. J'ai pris connaissance de ses amendements qui portent sur les questions de l'avis et de l'expertise ; nous nous situons bien dans une démarche de simplification du processus.

À Mme Colette Langlade qui m'a interrogé au sujet du retour à la date anniversaire, je répète que l'on ne peut à la fois inciter à la négociation et en imposer les conclusions. J'entends bien que cela rassurerait certains, mais inscrire dans la loi les règles spécifiques tuerait la négociation, alors qu'il ne s'agit que de fixer le cadre de celle-ci et de fournir les moyens de l'expertise.

Pour relativiser les inquiétudes de M. Tardy, je rappelle que le comité d'expert ne constitue pas une commission de plus : il garantit le droit des acteurs d'avoir accès à une expertise. Il s'agit d'un processus de subsidiarité au sein duquel les décisions sont prises par les intéressés ou au plus près d'eux. Mme Martinel a trouvé une excellente formule en réponse aux propos de M. Tardy : on ne crée pas une exception, on consacre une spécificité.

C'est bien l'interprofession qui va établir le document de cadrage à l'occasion des discussions sur le régime général. Elle le fait déjà, mais le document sera désormais communiqué aux autres organismes intéressés. Puisque des acteurs vont être conduits à mener une négociation dans la négociation, ils doivent avoir connaissance des enjeux.

Mme Dominique Nachury s'est montrée assez critique au sujet de l'inégalité de traitement entre le secteur privé et les intermittents. Je rappelle que ces derniers sont des salariés de droit privé. N'alimentons pas les inquiétudes en laissant croire que l'interprofession va se désengager du système ! On se demande plutôt, d'habitude, si c'est bien à elle de le financer, si c'est bien, par exemple, à la caissière du supermarché de financer le festival d'Avignon, auquel elle n'assiste peut-être pas. On ne peut pas formuler les deux critiques en même temps. Le Gouvernement, suivant en cela les propositions de nos rapports successifs, a choisi de rester dans l'interprofession, de la conforter tout en la contenant.

On s'est également demandé qui exerçait le contrôle. Je rappelle que le CDDU, forme particulière de CDD, relève du droit commun : il relève donc des contrôles exercés par l'inspection du travail. Celle-ci a des priorités au niveau national : le secteur du spectacle et de l'intermittence est l'un de ceux qu'elle contrôle le plus souvent. En second lieu, il y a le juge : lorsqu'une décision arbitraire est prise, la partie lésée a, en général, gain de cause devant les prud'hommes ; une ligne de financement est d'ailleurs prévue à cet effet à Radio France. Certes, nous avons affaire ici à un contexte spécifique : alors que, d'habitude, on s'assure que le patron n'exploite pas le salarié, il y a, dans ce secteur, une sorte d'accord tacite pour abuser du CDDU. Le chauffeur dont il a déjà été question plus tôt dans nos débats peut accepter de ne pas être en CDI, mais plutôt en CDDU permanent, car cela lui permet de travailler ailleurs en parallèle. Il fait alors le calcul qu'il y gagne financièrement. Mais, arrivé à quarante-cinq ans, il s'aperçoit qu'il n'a pas cotisé suffisamment pour sa retraite. Je peux témoigner, pour l'avoir constaté lors des nombreuses réunions plénières que nous avons tenues, du fait que la profession, notamment les syndicats d'employeurs, souhaite mettre elle-même de l'ordre dans tout cela. C'est sur cette autorégulation de la profession que nous parions.

C'est ainsi qu'il faut comprendre le quatrième point de l'article. Nous demandons à la profession de travailler sur les listes d'emplois, mais, dans la perspective de la conférence pour l'emploi culturel prévue pour septembre 2015 et dont les discussions préparatoires commenceront dès fin mai-début juin, la question se posera aussi de savoir s'il faut aller plus loin dans l'encadrement du CDDU. Voilà d'ailleurs un problème que vous auriez pu soulever. La mission de concertation a formulé des propositions tendant à ce que la requalification en CDI soit automatique au-delà de 600 ou de 900 heures travaillées ; mais, du fait des effets de seuil, si tout le monde fait 899 heures, cela ne suffira pas à résoudre le problème : il convient donc de se montrer pragmatique. Symétriquement, il faudrait interdire tout CDDU de moins d'une demi-journée. Aujourd'hui, il existe des CDDU d'une heure ! C'est excessif.

Quoi qu'il en soit, plutôt que d'inscrire dès à présent ces dispositions dans le texte, nous avons opté pour une phase de négociation par la profession elle-même, et nous verrons si un accord interbranche se dégage ou s'il est nécessaire de légiférer sur ce point. Pour l'instant, nous nous sommes limités aux listes d'emplois – compte tenu des réserves que j'ai indiquées –, puisque cet aspect faisait consensus. Dans la mesure où la profession bénéficie d'un système spécifique, elle doit apprendre à le réguler collectivement.

Je remercie notre collègue Allossery d'avoir rappelé un autre aspect qui ne figure pas dans la loi et n'a d'ailleurs pas à y figurer : la création au sein de Pôle emploi, à l'intention des intermittents, d'une ligne téléphonique dédiée, d'un médiateur et d'un comité de liaison sur le modèle de ce qui existe dans les régions, Pôle emploi services ayant en quelque sorte vocation à faire office de quatorzième région. Les contacts en seront facilités.

Les rapports avec Pôle emploi sont d'autant plus importants que celui-ci ne traite pas moins de 4 millions de contrats. Ce traitement, par voie numérique, fonctionne bien, mais, au moindre dysfonctionnement, c'est la catastrophe pour la personne concernée : ses heures ne sont plus comptabilisées, elle cesse brutalement d'être indemnisée et comme le processus est entièrement automatisé, elle a beaucoup de mal à trouver un interlocuteur physique à qui expliquer la situation. C'est ce problème – que Pôle emploi a bien compris – que nous cherchons à résoudre.

Madame Arribagé, le recours abusif aux CDDU est bien abordé, de manière implicite, par le quatrième point, comme je viens de l'expliquer.

À Mme Bouillé, M. Féron et Mme Faure, je veux confirmer qu'il est nécessaire de relancer le GUSO, qui avait du mal à se réunir et était quelque peu livré à lui-même. Cela ne dépend toutefois pas du législateur, mais de la profession. Cet aspect relève du volet relatif à Pôle emploi, puisque celui-ci est l'opérateur.

Le comité d'expertise est à mes yeux, je le répète, un groupe de travail. En ce sens, l'important est d'y faire siéger les bonnes personnes : la question de la représentativité ne se pose pas à cet égard. Or, ces personnes, nous les avions trouvées. Je serais donc d'avis de ne pas modifier la composition du comité, d'autant que le dispositif fonctionne déjà très bien.

M. de Mazières m'a questionné sur l'amélioration effective du système. D'abord, la sanctuarisation des annexes est un gage d'apaisement ; je l'ai senti sur le terrain. Ensuite, nous faisons le pari de la reconnaissance d'une branche devenue « mûre » et de sa capacité à négocier en interne et à articuler sa négociation à celle de l'interprofession, loin de remettre celle-ci en cause.

Cette articulation entre les deux niveaux de négociation est cruciale, comme nous le verrons en examinant les amendements. La démarche n'a rien d'étatiste ni de dirigiste ; elle a toute sa place dans un texte sur le dialogue social, car l'enjeu est bien de crédibiliser et renforcer celui-ci au sein d'une profession et d'un secteur économique en plein essor. Le moment est venu de le faire. Tous mes interlocuteurs, que je salue ici, en sont capables, et la concertation que nous avons menée pendant six mois a créé les conditions de la réussite.

La Commission en vient à l'examen de l'article 20.

Article 20 : Régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle

La Commission est saisie de l'amendement AC6 de Mme Isabelle Attard.

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Afin d'améliorer le dialogue social, cet amendement prévoit une consultation similaire à celle qui a été instaurée par la loi du 5 mars 2014 entre organisations professionnelles d'employeurs au niveau national et interprofessionnel et organisations d'employeurs au niveau national et multiprofessionnel.

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Vous proposez d'ajouter à la procédure de négociation, qui comporte déjà beaucoup d'étapes, un dialogue entre l'interprofession et la profession, plus précisément entre les syndicats employeurs de l'interprofession et les syndicats employeurs de la profession.

Dans le silence de la loi, rien ne l'empêche ; j'invite d'ailleurs ces partenaires – principalement la Fédération des entreprises du spectacle vivant, de la musique, de l'audiovisuel et du cinéma (FESAC) et le MEDEF – à procéder ainsi, et je sais qu'ils sont en train de le faire. Quant au fond, donc, je suis favorable à de tels rapprochements.

Toutefois, cela n'aurait pas de sens d'inscrire l'obligation de ce dialogue dans la loi. La démarche de la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle n'était pas la même : il n'est pas question ici d'une consultation préalable obligatoire, mais d'une délégation de négociation. L'amendement n'aurait pas non plus de sens pour les organisations de salariés. Au total, il risquerait même de compliquer les choses.

J'ai fait valoir les mêmes arguments auprès des organisations d'employeurs demandeuses. Je vous invite donc à retirer cet amendement, à défaut de quoi j'émettrai un avis défavorable.

L'amendement est retiré.

La Commission examine ensuite l'amendement AC7 de Mme Isabelle Attard.

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Actuellement, les organisations représentatives ne sont définies nulle part, alors que les interlocuteurs qui conduiront les négociations doivent être clairement identifiés pour que les accords soient reconnus par tous. Il convient donc de définir ces organisations par arrêté. C'est ce que propose cet amendement.

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Comme toujours lorsqu'une négociation est organisée, la délicate question de la représentativité se pose. Puisque notre but est de constituer formellement ce secteur professionnel, il faudra en effet désigner précisément, et « graver dans le marbre » d'un arrêté, les organisations qui ont toute légitimité pour siéger à la table des négociations.

Mon premier mouvement était donc de déposer un amendement identique au vôtre. Je me suis toutefois heurté à une difficulté technique. Dans les autres secteurs, pour mesurer la représentativité, on organise des élections dont les résultats sont consolidés en partant des différentes entreprises, après quoi un arrêté valide cette évaluation. Mais, dans celui qui nous intéresse, la mesure de la représentativité n'est pas faite. D'abord, il n'existe pas de critères de représentativité dans certaines branches de l'audiovisuel. Ensuite, la culture compte un très grand nombre de secteurs dont certains très syndicalisés, où l'on vote beaucoup, et d'autres où ce n'est pas du tout le cas. En additionnant les voix, on créerait d'importantes distorsions en faveur des premiers ; en additionnant des pourcentages, on se heurterait à d'autres difficultés : cette solution n'est guère praticable du point de vue arithmétique.

Si nous inscrivons dans la loi le principe d'un arrêté de mesure de la représentativité, nous ne pourrons pas en disposer avant 2017, ce qui bloquera la négociation. Certes, l'exécutif pourrait prendre ses responsabilités et, à la lumière de ce que l'on sait du secteur, proposer une évaluation, fût-elle moins rigoureuse. Mais les organisations qui ne figureraient pas dans l'arrêté risqueraient alors de former un contentieux dans lequel elles auraient des chances d'obtenir gain de cause.

Avis défavorable, donc, à cet amendement.

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Je maintiens l'amendement, car le signal est important pour les différentes parties prenantes du dialogue. Je comprends parfaitement vos raisons, mais il me paraîtrait quelque peu regrettable d'arguer que l'exécutif ne serait pas à la hauteur, ou que nous n'aurions pas pris nos responsabilités.

La Commission rejette l'amendement.

Elle en vient ensuite à l'amendement AC11 du rapporteur pour avis.

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Je rectifie cet amendement de précision à l'alinéa 8 de l'article pour rétablir les mots « respect de principes », qui figuraient dans le texte initial, à la place des mots « rappel des principes ». Les autres modifications apportées par l'amendement restent inchangées.

La Commission adopte l'amendement AC11 ainsi rectifié.

Puis elle aborde l'amendement AC12 du rapporteur pour avis.

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Cet amendement simplifie la rédaction du texte. Soit l'accord respecte le document de cadrage, auquel cas il doit être repris par l'interprofession ; soit il ne le respecte pas, ou bien aucun accord n'est trouvé, et dans ces deux situations il n'y a pas d'accord et il revient à l'interprofession de négocier. Il s'agit, là encore, de se prémunir contre tout risque de contentieux.

La Commission adopte l'amendement.

Elle en vient ensuite à l'amendement AC13 du rapporteur pour avis.

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Il s'agit de modifier le fonctionnement du comité d'expertise, qui s'apparente quelque peu à une usine à gaz. Le texte consacre cinq lignes à expliquer qui va participer à la désignation des personnalités qualifiées. Je propose d'exclure de cette liste les organisations interprofessionnelles, car c'est au secteur professionnel que le comité d'expertise doit servir d'appui. L'interprofession a déjà l'Unédic. Elle n'appréciera pas, mais il s'agit à mes yeux d'un signe important, même s'il ne change pas tout.

Tel est le sens de cet amendement et des suivants : le comité d'expertise n'est pas un comité Théodule chargé de décider je ne sais quoi, c'est bien à l'expertise et à l'appui de la profession qu'il est voué.

La Commission adopte l'amendement.

Elle est ensuite saisie de l'amendement AC14 du rapporteur pour avis.

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Cet amendement précise que le décret établissant la composition du comité d'expertise traite également de son fonctionnement – donc aussi de son financement, soit dit en passant.

La Commission adopte l'amendement.

Puis elle examine l'amendement AC15 du rapporteur pour avis.

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Cet amendement de cohérence supprime la possibilité pour l'interprofession de demander son avis au comité. En effet, l'objet de l'alinéa est de créer un droit à l'expertise pour le secteur professionnel – une question qui a fait l'objet d'un conflit pendant dix ans –, une sorte de droit de tirage, qui est naturel dès lors que le comité d'expertise est, je le répète, un groupe d'appui pour la profession.

La Commission adopte l'amendement.

Elle aborde ensuite l'amendement AC16 du rapporteur pour avis.

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Il s'agit de remplacer la notion d' « avis » du comité d'expertise par celle d'évaluation ». En effet, le comité d'expertise n'a pas à juger du bien-fondé des propositions, mais seulement à en évaluer les conséquences.

La Commission adopte l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement AC1 de Mme Marie-George Buffet.

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Il s'agit également ici de revoir le rôle du comité d'expertise, qui ne doit pas être un censeur, mais une instance d'évaluation. Mon amendement est toutefois satisfait par l'amendement suivant du rapporteur pour avis.

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En effet. Après avoir envisagé de déposer le même amendement que le vôtre, je m'en suis finalement tenu à une rédaction plus simple, qui ne déséquilibre pas le texte. Elle conserve l'idée que le comité évalue in fine le coût de l'éventuel accord – les éléments figurent déjà dans les annexes de notre rapport sur l'intermittence –, mais sans recourir au mécanisme de l'avis, dont on devrait se demander s'il est ou non conforme et qui conduirait à instituer une nouvelle commission d'arbitrage. Tel est le sens de l'amendement AC17 qui va venir en discussion.

L'amendement est retiré.

La Commission adopte ensuite l'amendement AC17 du rapporteur pour avis.

Puis elle aborde l'amendement AC2 de Mme Marie-George Buffet.

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Cet amendement s'inscrit dans le droit fil des propos du rapporteur sur l'utilisation abusive des CDDU dans des cas où le CDI devrait s'imposer.

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Je comprends les arguments qui sous-tendent cet amendement. Toutefois, un recrutement en CDDU n'est aujourd'hui possible que si, d'une part, certaines conditions, définies par le code du travail, sont réunies et si, d'autre part, l'emploi figure sur la liste de ceux qui permettent la conclusion d'un tel contrat. Dès lors, en l'état actuel du droit, la nature de l'activité est déjà prise en considération, ou, du moins, devrait l'être. Nous pourrons y revenir en commission des Affaires sociales, mais votre amendement n'apporte rien de nouveau à cet égard.

Quant aux excès, je suis conscient de leur existence et j'espère que le réexamen des listes permettra d'y mettre fin. Il importe de faire comprendre qu'il ne suffit pas que l'emploi figure sur la liste. Les syndicats ont appelé mon attention sur ce problème. Nous devons continuer à travailler en ce sens et je suis tout disposé à le faire avec vous.

Pour ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

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Dans l'attente des travaux de la commission des Affaires sociales, je le retire, et je le redéposerai si nécessaire en vue de la séance publique.

L'amendement est retiré.

L'amendement AC3 de Mme Marie-George Buffet est également retiré.

La Commission est saisie de l'amendement AC10 de Mme Isabelle Attard.

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Le rapport sur l'intermittence recommande de prendre en considération le problème des périodes de maladie et de maternité des intermittents. L'amendement tend à inscrire cette recommandation dans le projet de loi, pour que les conclusions de notre rapporteur, de Mme Archambault et de M. Combrexelle sur cette question dont nous avons longuement parlé il y a plusieurs mois ne soient pas oubliées.

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Je me suis déjà exprimé sur cette importante question qui a fait l'objet de nombreuses rencontres. Elle est aujourd'hui au coeur d'une négociation que l'on dit sur le point d'aboutir, mais qui dure depuis longtemps. Dans l'attente des éléments supplémentaires que j'espère obtenir du Gouvernement en séance publique, je suis donc d'avis que nous adoptions cet amendement, afin de faire progresser une discussion qui n'a que trop duré, sur une question pourtant très consensuelle.

L'amendement est adopté.

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Avant que nous ne votions sur l'ensemble du texte, je salue le travail de Jean-Patrick Gille et précise que le groupe UMP s'abstiendra sur le vote.

La Commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 20 modifié.

La Commission en vient à l'examen en nouvelle lecture, sur le rapport de M. Yves Durand, du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant transformation de l'université des Antilles et de la Guyane en université des Antilles, ratifiant diverses ordonnances relatives à l'enseignement supérieur et à la recherche et portant diverses dispositions relatives à l'enseignement supérieur (n° 2656).

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À la suite de l'échec, le 11 mars dernier, de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant transformation de l'université des Antilles et de la Guyane en université des Antilles, nous devons aujourd'hui nous prononcer sur le dernier texte adopté par l'Assemblée, en l'espèce celui issu de la première lecture du 19 février.

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Ce projet de loi a pour objet principal d'organiser la gouvernance de la nouvelle université des Antilles, née de la scission du pôle guyanais, à la suite des mouvements de grève de l'automne 2013, avec l'ancienne université des Antilles et de la Guyane.

Ainsi que mon prédécesseur Christophe Premat l'avait clairement exposé en première lecture, cette université, créée en 1982 par la réunion d'unités et de centres d'enseignement supérieur dont certains étaient implantés dans ces régions depuis fort longtemps, subit de longue date de fortes tensions, nourries par les rivalités historiques que chacun connaît, par des stratégies d'affirmation territoriale parfois contradictoires et par des besoins locaux souvent divergents.

Or, dans le même temps, elle est confrontée à de redoutables défis : la concurrence des établissements métropolitains, qui attirent beaucoup plus d'étudiants que les établissements « locaux », et le taux de chômage des moins de vingt-cinq ans, qui atteint des proportions effrayantes dans cette partie de notre territoire – 60 % en Guadeloupe et 70 % en Martinique –, d'où la nécessité d'une formation très efficace, en particulier dans l'enseignement supérieur.

Notre conviction unanime, qui s'est exprimée lors du débat en première lecture, est la suivante : les Antilles ont besoin d'une université unie et forte, forte parce qu'unie, qui seule peut disposer de la masse critique suffisante pour attirer les meilleurs étudiants et enseignants-chercheurs et nouer des partenariats indispensables dans les zones caraïbe et américaine qui l'entourent.

L'histoire mérite d'être brièvement rappelée, car elle est assez complexe et explique la décision que je vous demanderai de prendre.

Dès le premier semestre 2014, le Gouvernement s'est attaché à traiter le traumatisme causé par le retrait du pôle guyanais de l'ensemble composé par les Antilles et la Guyane en définissant, en étroite négociation avec les acteurs locaux, une gouvernance équilibrée, dotant chacun des deux pôles guadeloupéen et martiniquais d'une forte autonomie, susceptible d'apaiser les tensions qui les opposent, tout en préservant une direction centrale forte, capable de conduire une stratégie universitaire ambitieuse.

Il y a là – c'est tout l'objet du projet de loi – une forme de contradiction entre deux exigences : d'une part, le respect d'un certain degré d'autonomie confié à des pôles qui demeurent différents, en particulier du point de vue géographique ; d'autre part, la préservation d'une unité indispensable à la création de la dynamique universitaire que la situation exige.

L'ordonnance du 17 juillet 2014, dont le projet de loi sollicite la ratification, s'appuie ainsi sur deux piliers. Premièrement, elle accorde aux conseils de ces pôles des compétences propres et, par cohérence, confie à chaque vice-président de pôle la mission d'animer et d'exécuter leurs travaux, ainsi que la qualité d'ordonnateur des recettes et dépenses et d'autorité de gestion des personnels concernés. Il s'agit en somme de satisfaire la première exigence en reconnaissant la diversité des pôles. Deuxièmement, au nom de l'unité, qui fera la force de l'université, l'ordonnance conserve à l'échelon central les prérogatives les plus importantes.

Seules deux dispositions dérogent au droit commun.

D'abord, l'ordonnance a introduit un élément de souplesse et de dialogue dans la répartition des moyens entre les pôles. Lors du débat en première lecture, l'Assemblée nationale a en effet choisi, contre un amendement du Gouvernement, de conserver le texte initial, plus souple, donc plus évolutif, et plus respectueux de la logique d'autonomie de l'université et de ses pôles. Dans cet esprit favorable au consensus entre les acteurs locaux, ces derniers sont d'ailleurs parvenus, il y a quelques semaines, à un accord sur la répartition des moyens en 2015, assorti d'une très légère augmentation des dotations accordées par l'État à la nouvelle université.

La seconde exception concerne le point sans doute le plus débattu : l'alternance à la présidence de personnalités issues de chacun des deux pôles. La tradition veut en effet depuis 1982 que Guadeloupéens et Martiniquais se relayent pour exercer cette fonction. La rupture avec cette coutume, en 2010, a d'ailleurs sans doute largement contribué à aggraver les tensions au sein de l'université. Cependant, le principe constitutionnel de liberté des suffrages ne permettait pas d'imposer directement cette règle. L'ordonnance a dès lors emprunté une autre voie, en interdisant le renouvellement du mandat du président, et en portant sa durée à cinq ans pour lui permettre de mener des projets à moyen terme.

En première lecture, le Sénat a modifié le texte de l'ordonnance, notamment pour préciser la répartition des services entre les pôles et l'université et pour rapprocher du droit commun la composition du conseil d'administration. L'Assemblée nationale a souscrit à l'ensemble de ces dispositions, à l'exception d'une innovation fondamentale qui a contraint la commission mixte paritaire, réunie au Sénat, à constater son échec. En effet, le Sénat a altéré l'équilibre de la nouvelle gouvernance en liant l'élection des vice-présidents de pôles, aujourd'hui désignés par chacun des conseils de pôles, à celle du président de l'université. Il s'agit du fameux « ticket », qui est soumis au vote du seul conseil d'administration.

Je comprends la logique de cette disposition qui s'inspire des objectifs de la loi relative à l'enseignement supérieur et à la recherche (ESR) qui incite au regroupement des universités pour leur donner plus de poids. Soucieuse de favoriser la cohérence de l'action des dirigeants, cette idée risquait cependant de porter atteinte à l'unité de l'université des Antilles en raison des tensions très fortes qu'elle pouvait créer. Elle a dès lors rencontré une vive opposition sur le terrain, en rompant avec l'accord unanime recueilli sur l'ordonnance par le Gouvernement à l'été 2014, et en étant interprétée comme un signe de défiance à l'égard de l'autonomie des pôles, garante de la bonne marche de cette université – même si cela peut paraître contradictoire.

Elle fait en effet courir le risque qu'un vice-président puisse être élu dans un « ticket » par le conseil d'administration sans jouir de la confiance du conseil de pôle auquel il appartient. Or, il est inutile de prendre un tel risque de tensions entre les deux composantes du pôle pour garantir la cohérence de l'université, puisque les décisions essentielles que sont la stratégie de l'établissement, les budgets ou la répartition des moyens entre les pôles continuent, conformément au droit commun, de relever du conseil d'administration de l'université, qui conserve ainsi toutes les clefs de l'unité. La reconnaissance de la diversité et de l'existence de deux pôles au sein de l'université ne nuit pas à la force de celle-ci puisque son conseil d'administration conserve les prérogatives les plus importantes.

Ce projet de loi entend donner la force de l'unité en reconnaissant la diversité afin de se prémunir contre les tensions. Je reconnais la difficulté de l'exercice auquel je vous invite, mais, un accord ayant été conclu, il est de notre devoir de donner à cette université toutes les chances de prendre son destin en main.

C'est pourquoi l'Assemblée nationale a choisi, le 19 février, d'en revenir à la solution initiale retenue dans l'ordonnance de 2014. Je vous invite donc à adopter en nouvelle lecture le projet de loi voté par l'Assemblée, sous réserve de quelques modifications strictement rédactionnelles, et à rejeter en conséquence les deux amendements visant à réintroduire le « ticket », avant que le Gouvernement ne nous demande, si les deux chambres persistent dans leurs positions respectives, à trancher définitivement.

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Pour résumer, vous plaidez pour l'unité dans la diversité !

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Plus exactement, la préservation de la diversité pour construire l'unité.

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Monsieur le rapporteur, votre excellent travail nous a permis de saisir les enjeux essentiels du projet de loi portant transformation de l'université des Antilles. Il s'agit de mettre fin à une succession de crises par l'adoption de statuts qui s'inscrivent dans le cadre de la loi ESR de juillet 2013, mais qui tiennent aussi compte des particularités locales. Vos arguments trouvent un écho particulier alors que le Président de la République a réaffirmé ces jours-ci aux Antilles le principe d'équité entre les pôles universitaires, appelant les deux composantes « à faire vivre l'unité ».

C'est dans cet esprit que le Sénat et l'Assemblée nationale se sont attachés à conforter l'unité de la nouvelle université et à rapprocher son fonctionnement, autant que possible, du droit commun des universités, tout en préservant l'indispensable autonomie des pôles mise en place par l'ordonnance du 17 juillet 2014. Mais les deux assemblées ont échoué à s'entendre sur une innovation introduite par le Sénat tendant à lier l'élection du président de l'université et des vice-présidents de pôle universitaire régional sous la forme d'un « ticket » de candidats, soumis au seul vote du conseil d'administration.

Votre rapport témoigne du souci de consensus et d'équilibre de cette ordonnance de 2014, qui repose sur quatre points : tenir compte de l'échec des aménagements de l'ordonnance de 2008 concernant le pôle guyanais, ces derniers ayant abouti à des grèves et à la sécession du pôle guyanais ; permettre un net renforcement de l'autonomie des deux pôles régionaux en les assimilant au regroupement de composantes universitaires prévu par la loi ESR ; préserver l'unité de l'université, en octroyant aux organismes centraux des prérogatives prévues par le code de l'éducation ; garantir l'existence de pôles à l'unité renforcée, en prescrivant de la souplesse et du dialogue dans la répartition des moyens et en interdisant le renouvellement du mandat du président.

C'est dans cette logique que l'Assemblée a rejeté la formule du « ticket » qui suscitait des tensions. Nous suivrons donc votre recommandation de ne pas revenir sur l'équilibre atteint par l'Assemblée en première lecture. Cependant, afin de souligner la nécessité d'un pôle consolidé, je souhaite revenir sur quelques éléments de contexte. Vous en avez cité certains, comme les difficultés des étudiants : les diplômés de l'enseignement supérieur, qui représentent 42 % des métropolitains de vingt-cinq à trente-quatre ans, ne sont que 27 % en Martinique et 22 % en Guadeloupe. Aujourd'hui, un quart seulement des bacheliers reste aux Antilles, la plupart partant étudier en métropole.

Le Président de la République, lors de son déplacement aux Antilles, a annoncé la création d'une troisième école de la deuxième chance, ainsi qu'une augmentation des dotations budgétaires de 750 000 euros pour l'université commune.

Le rayonnement universitaire par la recherche est nécessaire. L'université travaille déjà étroitement avec de nombreux instituts, comme l'Institut Pasteur ou l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture ; l'installation dans les deux pôles de centres de recherche et de lutte contre le cancer a également été annoncée.

Comment ce projet de loi s'inscrit-il dans la volonté de consolider toute la chaîne d'enseignement et de recherche aux Antilles ?

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Nous ne partageons pas l'avis du rapporteur sur la gouvernance proposée, ainsi qu'en témoigne l'amendement que nous avons déposé.

Pour repousser d'éventuelles modifications, vous invoquez l'accord politique qui est intervenu. Avouez que cette conception du travail parlementaire est pour le moins étonnante. S'il s'agit simplement de ratifier un texte déjà arbitré, il eût été préférable de l'annoncer dès le départ. Je suis surpris qu'il ait fallu passer par tous ces épisodes pour aboutir à la conclusion que le Parlement n'a pas grand-chose à dire, puisque la version du Gouvernement doit prévaloir.

D'autre part, s'agissant de l'équilibre entre unité et autonomie, vous mettez en cause la viabilité de l'innovation introduite par le Sénat, tout en reconnaissant son caractère séduisant. Il est possible de prendre le contre-pied de votre argument : c'est précisément le texte que vous nous proposez d'adopter qui pose problème. Vous créez une situation dans laquelle chaque pôle va désigner de son côté un responsable, tandis que le président sera élu séparément par le conseil d'administration. Comment cette gouvernance à trois têtes peut-elle fonctionner, dès lors que les élections sont indépendantes ? Au lieu de favoriser l'unité, vous amplifiez l'éclatement. Au contraire, la présentation d'une candidature commune obligerait à trouver un accord politique en amont.

L'absence de « ticket » entre le président et les vice-présidents porte en germe l'éclatement potentiel de l'université. Votre texte conduit à un démantèlement de l'université des Antilles contre lequel nous nous insurgeons. Il va à l'encontre du point de vue défendu par Mme Fioraso elle-même, qui insistait sur la nécessité de bâtir des établissements de taille significative. Les grands perdants de votre politique, ce seront les Antillais eux-mêmes.

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En première lecture, déjà, nous avions regretté que ce projet de loi aille à l'encontre des préconisations de la loi ESR en matière de regroupements d'universités, en déplorant d'ailleurs que la nouvelle université créée en Guyane ne respecte pas ce seuil de viabilité. Mais admettons que, pour le bon fonctionnement de ces universités, nous devions en arriver là…

Toutefois, il me faut dire un mot du travail parlementaire. Pour être respectés de nos concitoyens, nous devons d'abord nous respecter nous-mêmes et respecter le travail accompli en commission. Discutons-nous de l'avenir de l'université des Antilles ou tentons-nous de camoufler un détournement de fonds européens dans une université ? Des éléments extérieurs, financiers et politiques, ne viennent-ils pas polluer et ridiculiser notre débat ? Nous valons mieux que ça. Dans la mesure où, en première lecture, ce texte a été adopté à l'unanimité par notre commission et par celle du Sénat, il est important que nous puissions en débattre en toute connaissance de cause en séance publique.

Le texte que vous nous proposez d'adopter a fait l'objet d'un accord politique avec les élus locaux. Soit. Mais il me semble que se pose ici la question, chère au groupe écologiste, du cumul des mandats. Nous savons les dégâts que peut causer le cumul des mandats de président de conseil régional et de député en cas de conflit d'intérêts.

Ce texte, qui doit permettre à de nombreux étudiants de travailler en toute sérénité, devrait faire consensus. Mais il montre que notre système est à bout de souffle. Alors même que nous cherchons à redonner confiance dans les hommes et femmes politiques qui exercent consciencieusement leur mandat, ce qui s'est passé dans l'hémicycle en première lecture est une honte pour le travail parlementaire.

J'ai déposé un amendement visant à réintroduire le « ticket », qui est un gage de viabilité et de sérénité en même temps que la garantie d'un projet global pour l'université. Il permet d'empêcher la division et les conflits que peuvent susciter des objectifs politiques ou scientifiques divergents. Nous refusons la suppression de l'avancée que représente la création du « ticket ». J'ajoute que rien ne s'oppose à ce que plusieurs trios en compétition soient départagés par un vote démocratique et serein.

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Nous sommes aujourd'hui de nouveau amenés à définir les contours du paysage universitaire des départements français d'Amérique. Ce paysage a évolué sous l'impulsion d'une revendication guyanaise à laquelle le Gouvernement a fait droit sans aucune concertation préalable avec les parlementaires antillais.

Je rappelle encore une fois que le texte déposé au Sénat en décembre 2014 ne tirait pas toutes les conséquences du démantèlement de l'université des Antilles et de la Guyane (UAG), décidé fin 2013, alors même que la composante guyanaise de l'UAG devenait une université de plein exercice par décret à la fin de juillet 2014. Évidemment, privée de sa composante guyanaise, l'UAG ne pouvait espérer une amélioration de sa situation sans une refonte importante de son organisation.

Aujourd'hui, nous retrouvons en nouvelle lecture le texte débattu et voté par l'assemblée en février dernier après d'âpres discussions sur le modèle de gouvernance de l'université des Antilles.

Le texte initial, voté par le Sénat, vise principalement la continuité et la sécurité juridique, l'université des Antilles conservant la même personnalité juridique que l'UAG dans toutes ses dimensions, aussi bien en sa qualité d'employeur et d'ordonnateur que dans la délivrance des diplômes.

Parmi les avancées proposées, le texte clarifie les éléments constitutifs des pôles universitaires régionaux, afin de distinguer les services qui leur sont propres des services communs et de l'administration générale de l'université. Il répond ainsi à la nécessité d'acter l'autonomie des pôles universitaires dans les deux régions.

Mais les sénateurs ont, à mon sens, péché par excès dans leur tentative d'apporter une solution aux divergences qualifiées – à tort selon moi – d'identitaire. En voulant garantir la cohérence stratégique et l'unité de l'établissement par la mise en place d'un « ticket », ils sont revenus sur des dispositions qui correspondaient à la position exprimée par les élus des collectivités de Martinique et de Guadeloupe.

En juillet 2014, les élus antillais avaient expressément indiqué leur souhait de voir figurer dans le texte le principe d'élections libres des vice-présidents par les conseils de chaque pôle universitaire régional, afin que les pôles exercent pleinement leur autonomie dans le respect du projet global de l'université. Ce point est important : je souhaiterais que la Commission sécurise définitivement son application, pour consolider le climat de confiance indispensable à l'avenir de l'université.

Je déposerai, au besoin, un amendement pour permettre d'intégrer le patrimoine mobilier et immobilier de chacun des pôles dans les éléments à prendre en compte pour la répartition des moyens. À ce sujet, j'aimerais savoir si le renforcement des moyens de l'université de 750 000 euros annoncé par le Président de la République est appelé à être pérennisé.

Il ne tient qu'à nous de faire en sorte que cette refondation universitaire soit l'occasion de bâtir une réelle offre d'avenir pour notre jeunesse et de renforcer les moyens d'expertise de nos laboratoires.

J'entends les interrogations de certains collègues, mais j'aurais aimé qu'ils fassent preuve d'autant d'intérêt pour les autres enjeux qui concernent directement l'outre-mer. Vous l'avez dit, le taux de chômage des jeunes est de 60 % en Guadeloupe ; les difficultés liées à l'invasion des algues sargasses sont ignorées. J'aimerais que les parlementaires prennent sur ces sujets décisifs la défense des outre-mer avec la même énergie qu'aujourd'hui. J'aimerais aussi qu'on arrête de prendre toutes les décisions à Paris. À cet égard, je regrette que l'Agence de la biodiversité récemment créée soit installée en métropole, alors que la France possède le deuxième domaine maritime au monde, précisément grâce aux outre-mer.

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En première lecture, le président Alfred Marie-Jeanne disait : « La mutilation de l'université des Antilles et de la Guyane a été un échec flagrant. Son onde de choc n'a pas fini de faire des dégâts. Ce qui se mijote autour de la création de l'université des Antilles laisse présager le pire. J'ai l'intime conviction que les tractations en cours n'ont qu'un but inavoué : celui de nous acheminer vers une seconde séparation. »

C'est l'avenir même de l'université des Antilles qui se joue. Une université ne peut pas rayonner – et donc attirer étudiants et chercheurs – si elle n'offre pas, par sa dimension et ses moyens, de bonnes conditions de travail. Cela passe par des moyens budgétaires ; à cet égard, la Commission n'a pas de leçons à recevoir quant au combat qu'elle mène pour garantir des moyens à l'université de la République. Mais cela passe aussi par la gouvernance. La gouvernance, ce n'est pas seulement la représentation de la diversité, mais aussi des choix d'orientation, de politique universitaire.

L'idée d'une direction en « ticket », défendue par le Sénat, – direction élue sur la base d'un débat d'orientation si plusieurs trios étaient candidats –, devait apporter une garantie de cohérence dans la gestion de l'université. C'est ce qui avait conduit la Commission à adopter cette proposition à l'unanimité. Nous avons été très surpris de ce qui s'est passé ensuite en séance. Mais chacun est bien sûr libre d'évoluer dans son opinion.

Le groupe GDR maintiendra son abstention.

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J'ai conscience que l'exercice auquel je me livre demande une certaine capacité d'adaptation…

Je veux remercier ceux qui ont soutenu ce rapport. Je veux aussi rassurer ceux qui ont présenté l'amendement rétablissant le « ticket » – et, par la même occasion, écarter de faux débats. Je mets de côté les jugements moraux sur le Parlement ; le rôle du Parlement est de voter la loi, mais aussi de l'adapter aux besoins réellement constatés et de dissiper les incompréhensions lorsqu'elles se manifestent. Quant aux allégations de détournement de fonds, je rappelle qu'une procédure judiciaire est en cours.

Aucun d'entre nous ne souhaite la scission de l'université antillaise. Nombre d'entre nous regrettent la sécession du pôle guyanais, mais elle est aujourd'hui une réalité avec laquelle il nous faut composer. Nous devons donner toutes les chances à l'université des Antilles d'atteindre la masse critique lui permettant d'attirer ou de retenir les étudiants et les chercheurs.

Le débat n'oppose pas les tenants de la séparation de l'université et les partisans de l'unité. Il s'agit d'offrir à l'université les meilleures conditions pour vivre dans la cohérence et l'unité. Initialement, nous avions suivi pour ce faire la logique de la loi ESR reposant sur la réunion des universités, dont la nécessité n'est pas remise en cause. Mais, appliquée à l'université des Antilles, cette logique crée des tensions qui, loin de renforcer la cohérence, paraissent porteuses de bien des risques d'explosion. Le renforcement de la cohérence est assuré par les prérogatives attribuées au conseil d'administration de l'université, au nombre desquelles figure la stratégie. Celle-ci doit être acceptée par les deux pôles qui, pour des raisons historiques et géographiques, sont une réalité qu'il faut prendre en compte. La reconnaissance de cette diversité passe non pas par un « ticket », mais par des vice-présidents, solidaires de la direction unique et représentatifs du pôle.

En écoutant Patrick Hetzel, je repensais au choix que j'ai fait d'associer la commune dont je suis maire à la ville de Lille. Toutes proportions gardées, cette expérience, qui a été difficile, a apporté force, cohérence et développement à ma commune ainsi qu'à la métropole tout entière. C'est tout ce que je souhaite avec ce texte qui déroge en partie à l'esprit de la loi ESR, mais la situation particulière l'exige. Nous voulons tous la réussite de l'université des Antilles.

La Commission en vient à l'examen de l'article restant en discussion.

Article 1er : Ratification de l'ordonnance n° 2014-806 du 17 juillet 2014 modifiant le chapitre unique du titre VIII du livre VII de la troisième partie du code de l'éducation relatif aux dispositions applicables à l'université des Antilles et de la Guyane pour y adapter le titre V de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AC3, AC5, AC4, AC6 et AC7 du rapporteur.

Elle examine ensuite les amendements identiques AC1 de M. Patrick Hetzel et AC2 de Mme Isabelle Attard.

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J'ai déjà défendu cet amendement qui rétablit l'élection d'un « ticket » pour le président et les deux vice-présidents. Je note que nos positions sur cet aspect de la gouvernance sont inconciliables.

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Comment un président d'université peut-il être solidaire de quelqu'un qui a été élu sans lien avec lui ? Je maintiens donc l'idée du « ticket ».

Je suis d'accord avec le rapporteur : nous sommes là pour confronter nos visions de la gouvernance ; nous pouvons être en désaccord, mais nous devons voter la loi en toute connaissance de cause. Si vous avez l'impression que je donne des leçons, j'en suis navrée. Mais je considère que, lorsque les accords politiques et les problèmes financiers nous échappent ou ne sont pas évoqués en toute transparence, nous ne votons pas en toute connaissance de cause.

Sans faire ombrage à notre rapporteur actuel, je tiens à rendre hommage au travail admirable du rapporteur Christophe Premat qui a auditionné toutes les parties prenantes et admis, en toute connaissance de cause, la pertinence de l'idée du « ticket ». Je maintiens mon amendement.

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Je n'ai rien à ajouter aux réponses que je viens d'apporter. J'émets donc un avis défavorable à ces amendements.

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Je souhaite rectifier une affirmation : le « ticket » n'a pas été voté à l'unanimité en commission au cours de la première lecture, car j'ai personnellement voté contre.

Je tiens à dire à certains collègues que nous cherchons à trouver les solutions pour apaiser la situation.

En outre, la présidente actuelle de l'université a été élue par les trois pôles sans que personne ne remette en cause sa légitimité.

Je suis heureux d'entendre mes collègues députés de l'Hexagone parler avec tant de passion de l'outre-mer. J'aimerais toutefois qu'ils mettent autant d'énergie à défendre les Ultramarins qu'ils en consacrent aujourd'hui à défendre l'idée du « ticket ». Je maintiens que ce « ticket », c'est l'explosion de l'université assurée. La solution se trouve dans l'apaisement, de la même manière que la répartition des moyens a d'ores et déjà fait l'objet d'un compromis.

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Je rappelle qu'il n'y a pas ici de députés de l'Hexagone, mais des députés de la nation. La notion d'Hexagone, incontestable du point de vue géographique, n'existe pas du point de vue institutionnel.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AC8 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l'article 1er modifié.

Elle adopte enfin l'ensemble du projet de loi modifié.

La séance est levée à douze heures trente-cinq.