Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Réunion du 13 mai 2015 à 15h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • CCI
  • agent
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La réunion

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Nous auditionnons maintenant des représentants de syndicats de salariés du réseau des chambres de commerce et d'industrie (CCI) : l'UNSA, la CGT, la CFDT et la CFE-CGC. Pourriez-vous nous rappeler quelles ont été les conséquences des décisions, prises par l'État, de prélèvement sur les fonds de roulement des CCI et de diminution progressive de leurs recettes ? Comment cela a-t-il été vécu par le personnel ? Il nous importe de savoir comment cette situation est ressentie, comment l'avenir peut se construire avec les femmes et les hommes que vous représentez et comment vous réagissez aux remarques des présidents des CCI que vous servez. À quel point aussi la façon dont les services rendus aux entreprises est hétérogène sur le territoire.

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Jeannine Marty, de la CGT CCI Paris-Ile-de-France

Je vous remercie de nous avoir invités, d'autant plus chaleureusement que la CGT, bien que syndicat représentatif au niveau national, a rarement le droit de parole en commission paritaire nationale. Notre syndicat est exclu, en outre, de tous les groupes de travail nationaux au sein du réseau consulaire.

J'insisterai sur les points les plus importants : les menaces pesant sur l'emploi au sein du réseau consulaire, la remise en cause de la légitimité et de la lisibilité de ce réseau, la difficulté qu'il y a à faire vivre le droit social consulaire et enfin, l'absence de démocratie syndicale au sein de ce même réseau.

Tout d'abord, depuis des mois, les menaces de licenciements se multiplient : CCI France en a annoncé 6 000 puis 7 000. Devant vous, Pierre-Antoine Gailly, président de la CCI Paris-Ile de France a annoncé plusieurs centaines de suppressions d'emplois potentielles au sein de la CCI de Paris. Ces licenciements contraints viennent s'ajouter aux plans de départs volontaires et aux mises à la retraite d'office. Pour les salariés, le chantage à l'emploi est incessant. Chaque réduction de la dotation fiscale se traduit sur le terrain par des menaces de licenciement. À chaque fois, les économies sont supportées par les agents du réseau et se traduisent par des suppressions d'emplois.

La mise en application de la loi de juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux services a davantage épargné les prés carrés des présidents et les intérêts des CCI régionales et territoriales que permis de préserver la pérennité des emplois et missions du réseau. Peu de CCI ont entrepris de rationaliser leur train de vie. Nous vous alertons aujourd'hui solennellement quant à l'impact de la réorganisation actuelle du réseau sur ses salariés. Cette désorganisation est accentuée par le « plan emploi consulaire » (PEC), dont le volet relatif aux départs volontaires est mis en oeuvre au sein de certaines CCI en l'absence de vision stratégique. Si, pour les CCI, l'impact sur l'exécution des missions est réel, pour leurs salariés, cette désorganisation se traduit avant tout par des risques psychosociaux, du découragement, du stress et de la démotivation. Les comités d'hygiène et de sécurité enregistrent une forte augmentation de ces risques au sein des chambres.

Une véritable réflexion doit être conduite, tant sur le devenir du réseau et sur sa gouvernance que sur ses missions, afin de mettre un coup d'arrêt à la multiplication des licenciements contraints et des mutations forcées. Aujourd'hui, les emplois et la santé au travail des agents du réseau sont des variables d'ajustement. Pour la pérennité des missions du réseau, il est temps que ceux-ci soient préservés. Le législateur que vous êtes et le Gouvernement ont décidé de réduire les dotations fiscales des CCI. Il vous appartient également aujourd'hui de veiller à prévenir les conséquences de ces réductions sur nos agents et sur leurs emplois.

Le réseau consulaire connaît actuellement une véritable crise d'identité et de légitimité. Le caractère sui generis du réseau est fondé sur le fait que les CCI sont dirigées par des représentants élus par leurs entreprises et que le droit social consulaire est créé par une commission paritaire nationale. Pourtant, on enregistre depuis toujours une faible participation des chefs d'entreprise aux élections consulaires. En 2010, le taux de participation moyen national à ces élections a été de 17 %. Il semble donc que les entreprises ressortissantes aient du mal à s'impliquer dans la gouvernance du réseau.

La légitimité et la lisibilité des CCI pourraient être restaurées en élargissant leur gouvernance et en développant leurs missions de service public et d'intérêt collectif au plus près des territoires et des entreprises. Lorsque nous avons été auditionnés en 2010 dans le cadre de la discussion de la loi précitée, nous avions exprimé le souhait que la gouvernance des CCI soit assurée par de véritables conseils d'administration où siègeraient, à côté des élus consulaires, des élus des collectivités territoriales et des représentants du personnel. Cet élargissement des sensibilités permettrait d'asseoir la transparence et la légitimité des décisions prises par le réseau. En effet, les CCI tendent à se dégager de plus en plus de leurs missions de service public et d'intérêt collectif pour devenir des cabinets de consultants vendant des services marchands – avec plus ou moins de succès, car elles ont des frais de structure relativement lourds, de sorte que les services proposés sont chers. Ancrer les CCI dans leur caractère d'établissements publics administratifs nous permet de garantir des missions d'appui, de conseil et de formation à destination de tous et sur tous les territoires.

Enfin, s'agissant du droit social consulaire, le principal problème vient du fait que les CCI ne sont soumises ni au code du travail ni à aucun des trois codes de la fonction publique. Notre droit social est très lacunaire, et se caractérise par des exceptions généralisées. J'en veux pour preuve le fait que notre statut et ses annexes font 200 pages seulement, contre 3 000 pages pour le code du travail. Notre statut a d'autant plus de mal à progresser que les commissions paritaires nationales tiennent le plus souvent d'une sorte de théâtre de boulevard : les délégations y travaillent à huis clos selon une culture du secret ; on y alterne blocages et travail dans l'urgence ; et lorsqu'on y aboutit à des accords, ceux-ci sont peu sécurisés juridiquement. À titre d'exemple, dans la plupart des CCI, le PEC ne connaît pas le succès escompté, tant du point de vue des CCI elles-mêmes que des agents.

Je terminerai par le manque de démocratie syndicale. Aujourd'hui, nous sommes un syndicat représentatif, avec 18 % d'audience. Pourtant, nous ne siégeons toujours pas en commission paritaire nationale. C'est le jeu de la répartition des sièges. Mais nous sommes également toujours exclus de toutes les négociations préalables : nous ne sommes donc pas destinataires des textes et ne participons à aucun groupe de travail national. Il conviendrait de restaurer la démocratie syndicale dans l'esprit de la loi de 2010.

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Gilles Morisseau, président de l'UNSA-CCI

L'UNSA-CCI, dont je suis le président, détient deux sièges sur six en commission paritaire nationale. Le syndicat est présent dans toutes les instances nationales et locales. Autonome, il vise à défendre les salariés des chambres de commerce et ces chambres mêmes en tant qu'institution. Il est également prêt à signer des accords dès lors qu'ils sont protecteurs des salariés.

En premier lieu, je souhaiterais évoquer les métiers et l'expertise des personnels des CCI. Nos présidents ont parlé ici même, depuis leur position d'élus entrepreneurs, de la particularité de la gestion des CCI. Les représentants de la tutelle ont abordé les difficultés de réorganisation de notre réseau, mais peu de choses ont été dites de la multitude d'expertises des personnels. On ne peut pas vouloir régler le sort des CCI et grever leur financement sans prendre en compte les multiples activités du réseau, ni en évaluer l'efficacité.

La qualité et la diversité des services rendus à l'économie sur les territoires sont pour nous évidentes et probantes. Nos collègues développent des expertises nombreuses dans le cadre d'actions concrètes de soutien aux entreprises et de formation. Parmi ces missions, on peut citer l'aide à la création d'entreprises, les centres de formalités, l'appui au développement des activités industrielles, commerciales et de services, un réseau de conseillers très spécialisés à disposition des entreprises dans les domaines de l'innovation, de l'international, des process industriels, de la transition énergétique, des études économiques, de la transmission d'entreprises, des programmes de financement et de l'aide aux entreprises en difficulté.

Le rôle des CCI est également prépondérant en matière de formation initiale. Nombre de nos collègues, enseignants en centre de formation d'apprentis, ont une véritable pratique de leur métier et du public accueilli. L'expertise des chambres de commerce est également favorisée par la proximité des entreprises, qui permet de trouver facilement des maîtres d'apprentissage. C'est une priorité du Gouvernement, mais ce sont bien les CCI qui disposent de l'expertise nécessaire pour mettre en relation apprentis et maîtres d'apprentissage. Elles ont aussi de grandes écoles, pour lesquelles les inquiétudes sont nombreuses.

Ce bel outil, fondé sur un travail de terrain et la capacité d'agir localement, court un risque de sabotage. Affaiblir les CCI par des baisses de ressources et ne répercuter celles-ci que sur la masse salariale, c'est les conduire dans une spirale descendante telle que leurs 26 000 salariés hommes et femmes perdront leur légitimité sur le terrain.

S'agissant de la régionalisation, nous observons que la loi de 2010 a été appliquée a minima par nos dirigeants du fait de sa dimension non prescriptive. De nombreux freins et une multiplicité de pouvoirs autonomes locaux et d'intérêts divergents en ont bloqué l'application. Nous considérons la régionalisation comme une nécessité pour légitimer le rôle des CCI, pour renforcer leur visibilité et pour sécuriser nos emplois. Il est vrai que la régionalisation en cours crée des difficultés sociales qu'il nous faut régler, mais on peut aussi anticiper les choses afin d'évoluer dans nos métiers.

Notre organisation territoriale pourrait être moins coûteuse et plus cohérente qu'elle ne l'est aujourd'hui, à condition de disposer de schémas régionaux clairs et homogènes sur tous les territoires et d'une unité décisionnelle des CCI, à condition aussi que leurs missions soient précisées. Le nombre de centres de décision et celui des structures juridiques du réseau pourraient être revus afin de rendre ce dernier plus efficace. Le réseau des CCI doit mettre ses moyens dans l'opérationnel – l'appui concret aux entreprises – plutôt que dans le structurel.

S'agissant des personnels, la mutation de nos métiers et de notre organisation, qui aurait dû être anticipée depuis la loi de 2010, doit maintenant se faire dans l'urgence. Une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences doit accompagner cette mutation. En tant que syndicat, nous savons la difficulté, en période de crise, de mener une telle démarche. Cela nécessite une volonté sincère des employeurs, ainsi que des moyens adaptés. Avoir réduits ceux-ci alors que les CCI doivent restructurer 26 000 postes revient d'une certaine manière à nous empêcher de le faire. Les plans de départs volontaires dans le cadre du PEC ont permis ou permettront le départ de 800 à 1 000 salariés dans des conditions que nous jugeons correctes. Ces plans doivent être prolongés de manière à éviter des licenciements massifs. L'UNSA-CCI déplore néanmoins un manque de stratégie, de visibilité de l'organisation future des CCI, qui empêche nos collaborateurs de mieux se positionner. La pyramide des âges est plus favorable à une transition sur plusieurs années qu'à des actions rapides et manquant de recul.

Il nous semble également important de changer de culture managériale, de sorte que cette dernière soit moins hiérarchisée et plus structurée par projet et par compétences. Cela est rendu possible par la nature de notre métier. Nous assurons la promotion dans les industries des méthodes de gestion innovantes comme le lean management, que nous pourrions nous appliquer à nous-mêmes. Cela permettrait de réduire des taux d'encadrement qui nous semblent excessifs, du fait de niveaux hiérarchiques superposés et d'un morcellement des pouvoirs dans le réseau actuel.

L'échec relatif de la loi de 2010 pose également une question quant au rôle de l'État : exerce-t-il une tutelle assez forte sur les chambres de commerce ? Est-il assez prescriptif ? Ne doit-il pas donner plus d'orientations stratégiques ? Nous préconisons un dialogue plus concret sur chaque territoire entre les CCI, l'État, les régions et les collectivités locales pour coordonner et rationaliser les actions de soutien à l'économie et pour produire un effet de levier inexistant aujourd'hui.

En ce qui concerne votre question, relative à l'appréciation des baisses de ressources décidées en 2014, notre syndicat ne peut que s'opposer à ces baisses ainsi qu'au prélèvement opéré, sans réelle connaissance de l'action concrète des personnels des CCI sur les territoires, sans prendre en considération l'impact des investissements que génèrent les chambres ni les conséquences de ces décisions sur nos emplois.

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Sylvia Vuarnet, présidente de la CFC-CGC réseaux consulaires, conseillère technique à la Commission paritaire nationale

Tous les échanges que nous avons suivis jusqu'à présent ont été très instructifs pour nous. Évidemment, nous connaissons les discours tenus par notre tutelle et par les présidents de CCI, Mais il y a des différences entre ce qui est dit à l'extérieur, que ce soit à vous ou aux journalistes, et ce qui est dit au personnel.

Nous nous accordons tous sur le fait que, dans le contexte économique que l'on sait, tout le monde doit fournir un effort. Mais sur qui cet effort doit-il peser en priorité ? L'État a affirmé en audition qu'il se sentait chez lui dans les CCI, ce qui est normal puisqu'il en est le propriétaire en titre.

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Sylvia Vuarnet, présidente de la CFC-CGC réseaux consulaires, conseillère technique à la Commission paritaire nationale

Non. Nous l'avons entendu dans la bouche de M. Riché, et c'est la vérité. Ensuite, les présidents de CCI ont eux aussi affirmé qu'ils étaient chez eux, au motif que ce sont les entreprises qui financent le réseau par les taxes qu'elles acquittent. Or, s'ils se sentent propriétaires des CCI, ils n'en sont en réalité que les locataires.

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Sylvia Vuarnet, présidente de la CFC-CGC réseaux consulaires, conseillère technique à la Commission paritaire nationale

Exactement.

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Lorsque la réforme a été annoncée au cours de la discussion de la loi de finances, plusieurs parlementaires de droite comme de gauche ont souligné que l'argent des réseaux consulaires n'était pas celui de l'État, mais celui des agriculteurs, des entreprises et des commerçants. Ce à quoi le Gouvernement a répondu que les chambres d'agriculture et les CCI n'auraient pas eu cet argent si le législateur et lui-même ne s'étaient pas mis d'accord pour imposer une taxe... Derrière ce débat se profile la question de l'acceptabilité de la réforme.

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On a beaucoup entendu dire – et je l'ai moi-même affirmé – que cette ponction avait été faite sur l'argent des entreprises pour rembourser la dette de l'État. Tenez-vous un tel discours, ou s'agit-il pour vous d'une contribution publique qui retourne au budget de l'État ?

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Sylvia Vuarnet, présidente de la CFC-CGC réseaux consulaires, conseillère technique à la Commission paritaire nationale

C'est le point épineux, car le nerf de la guerre se trouve dans les caisses des CCI. Et l'Inspection générale des finances (IGF) a estimé que celles-ci se portaient plutôt bien. Mais soyons clairs : c'est dû au fait que ces sommes ont été thésaurisées.

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Ce peut aussi être le fruit d'une bonne gestion.

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Laurence Dutel, secrétaire générale de la CFDT-CCI

Je prendrai deux exemples. L'argent du régime spécial de retraite des agents de l'ex-CCI de Paris – régime qui n'existe plus, mais qui subsiste pour quelques-uns d'entre eux – était dans le fonds de roulement de la CCI. Si la ponction est trop importante, comment verser leur retraite à ces agents ? D'autre part, les CCI ont investi dans les centres de formation d'apprentis. Or, avec cette ponction, elles ne pourront plus le faire alors que le renouvellement du matériel est nécessaire, surtout dans les formations techniques.

Nous avons beau adresser des demandes répétées, nous ne disposons d'aucune information claire sur les budgets des CCI. Par conséquent, le ministère nous affirme qu'elles ont des réserves tandis que nos présidents nous disent qu'ils n'ont plus rien, qu'ils ne peuvent plus augmenter les salaires ni investir et qu'ils doivent diminuer la masse salariale.

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Fabrice Kaluzny, directeur équipement et territoires de la CFE-CGC

Je regrette que pour élaborer le chiffrage de ce prélèvement, CCI-France ait trop peu collaboré avec la tutelle. À titre personnel, je suis directeur des équipements, c'est-à-dire de services commerciaux qui font du chiffre d'affaires. Les trois millions d'euros qui ont été prélevés sur notre CCI proviennent essentiellement de deux investissements en cours, consistant à construire un nouveau port et un hôtel d'entreprises, et des recettes de nos services de formation et de nos services commerciaux – c'est-à-dire de bénéfices de bonne gestion. Ces investissements ont été engagés depuis 2010 dans la perspective qu'ils soient rentables très rapidement et puissent s'autofinancer, de façon à rendre service aux entreprises dans des domaines d'intérêt collectif pour notre territoire. Or, la tutelle n'a pas analysé la provenance de cet argent, mais a seulement pris en compte le niveau de notre fonds de roulement à un moment donné. Les 3 millions d'euros prélevés sur notre CCI représentent entre 75 % et 80 % de notre dotation annuelle.

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Jeannine Marty, de la CGT CCI Paris-Ile-de-France

Il est difficile de répondre par oui ou par non à votre question, madame la rapporteure, car il y a peu de transparence dans les données budgétaires communiquées par les CCI aux partenaires sociaux. Comme l'a indiqué Mme Dutel, la dette sociale qui correspond à la « queue de comète » de l'ancien régime d'assurance vieillesse de la CCI de Paris était dans son fonds de réserve. Mais à cela s'ajoute que le train de vie des CCI peine à évoluer : au moment même où les CCI se plaignent de ces restrictions budgétaires, les primes d'objectifs des directeurs, qui constituent plus qu'un quatorzième mois de salaire, ont été étendues du périmètre de l'ancienne CCI de Paris à celui de toute la CCI de Paris-Île-de-France, hors CCI territoriales. Par conséquent, si la diminution des dotations entraîne de véritables difficultés budgétaires, rendant difficile la conduite de certaines missions, dans le même temps, la réflexion sur les économies possibles n'a pas été menée jusqu'au bout.

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Voulez-vous dire que les directeurs des CCI n'ont pas bien compris le message ?

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Jeannine Marty, de la CGT CCI Paris-Ile-de-France

Je dis que la réflexion des CCI n'a pas été menée à son terme de façon à permettre une réduction de leur train de vie qui préserve leurs missions de service public et leurs emplois.

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Sylvia Vuarnet, présidente de la CFC-CGC réseaux consulaires, conseillère technique à la Commission paritaire nationale

L'État s'est comporté au cours de ces dernières années comme un propriétaire négligent, de sorte que les usufruitiers ont revendiqué la propriété des CCI. Et lorsque le Gouvernement a réclamé une ponction et une baisse de la ressource fiscale des CCI, les usufruitiers se sont dit que les choses n'allaient pas se passer ainsi car ils avaient entre leurs mains 26 000 salariés dévoués pour leur servir d'otages. Entre la fin du mois de mai 2014 et aujourd'hui, le nombre de salariés qu'ils menacent de licencier est passé de 3 000 à 7 500. Certains présidents ont affirmé avec conviction et sincérité qu'ils géraient les CCI comme des entreprises de services, oubliant qu'ils ne sont que les usufruitiers d'établissements publics appartenant à l'État et que ces 26 000 salariés sont des agents publics. Nous savons qu'ils ne mettront pas 7 000 salariés à la porte et que nous sommes de simples otages. Vous jouez en effet dans cette affaire, en quelque sorte, un rôle de journalistes. Or, lorsque des journalistes se mettent à parler des otages, tous les espoirs sont permis pour les sauver… Il faut absolument empêcher la pérennisation de ce système de menaces qui dure depuis un an, et qui est d'autant plus invivable pour les personnels que 5 000 des 26 000 salariés, soit 19 % des effectifs, sont amenés à partir à la retraite dans les cinq ans à venir. Ces chiffres datent de 2012, car le système d'information de gestion des ressources humaines de CCI-France n'est pas en mesure de produire un bilan social plus récent…

Ensuite, n'oublions pas que ne relevons pas de Pôle Emploi, et que les CCI s'auto-assurent. Or certains présidents, qui ont affirmé gérer leurs CCI comme des entreprises de services et ne dépendre qu'à hauteur de 15 % de la ressource fiscale, ont annoncé des plans de licenciement pour faire face à la baisse de ladite ressource, alors même que leurs CCI ne paient pas un centime du prélèvement opéré car ils ont pris garde de ne pas thésauriser trop de liquidités, et font planer la menace de ce qu'ils appellent des « licenciements collectifs », mais qui n'en sont pas. J'en viens à présent à leur double discours. Les présidents de CCI vous affirment que la diminution de la ressource fiscale et l'imposition d'un prélèvement les contraindront à licencier, oubliant de vous préciser qu'il reviendra à notre propre caisse, la Caisse d'allocations chômage des chambres de commerce et d'industrie (CMAC), de payer les chômeurs. On se demande donc où se trouve l'économie réalisée. Et, alors qu'ils vous parlent de licenciements pour motif économique, ils nous expliquent, à nous, que cela n'est pas prévu par nos statuts – qu'ils se garderont bien de mettre à jour – et que nous ne pourrons donc pas bénéficier des dispositions de la convention UNEDIC à laquelle nous sommes soumis, bien que nous relevions d'un établissement public. Cette convention prévoit que la période de 180 jours sans indemnisation de chômage s'applique aux licenciements pour motif personnel mais pas aux licenciements pour motif économique. Nous leur avons aussi demandé d'élaborer un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) pour sécuriser les conditions de ces licenciements et assurer une formation décente des personnes licenciées ; sans parler de l'aspect fiscal puisque, sans PSE, toutes les indemnités versées par l'employeur sont imposables. C'est d'ailleurs ce dernier point qui explique que le plan emploi consulaire, qui n'est pas un PSE ni un plan de départ réel, n'ait eu aucun succès, alors même qu'un ancien président de CCI a affirmé qu'il ferait le plus grand plan social de France !

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Laurence Dutel, secrétaire générale de la CFDT-CCI

Je souhaiterais revenir sur la question des licenciements. En commission paritaire nationale (CPN), l'UNSA et la CFDT ont voté un plan emploi consulaire « volet I » favorisant les départs volontaires, les présidents de CCI présents lors de la négociation en CPN ayant accepté en échange de mesurer le bénéfice de ces départs volontaires avant de recourir aux licenciements. Mais parallèlement, la CCI Rhône-Alpes a licencié des personnels, sans essayer de reclasser les salariés licenciés dans une CCI territoriale voisine. Il y a donc une dichotomie entre le discours tenu en commission paritaire nationale et les décisions prises à l'échelon local, CCI-France affirmant qu'elle n'a pas les moyens d'imposer les décisions prises en CPN à l'ensemble du réseau. Nous le vivons avec difficulté car d'une CCI à l'autre, les agents ne sont pas traités de la même façon.

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Cela signifie donc qu'il n'y a ni homogénéité ni concertation entre les CCI régionales.

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Laurence Dutel, secrétaire générale de la CFDT-CCI

Bien que la loi ait confié un rôle prépondérant à CCI-France, cette dernière ne joue pas ce rôle aujourd'hui et nous renvoie régulièrement au tribunal administratif en cas de non-respect des accords conclus au niveau national, affirmant qu'elle ne peut rien faire. Nous n'avons donc nullement le sentiment d'appartenir à une fédération.

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Concrètement, vous nous dites qu'une décision prise en CPN n'est pas opposable aux différentes CCI.

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Gilles Morisseau, président de l'UNSA-CCI

Lorsque l'on signe un accord en CPN pour préparer des plans de départs volontaires et que des CCI régionales se mettent à licencier dans le même temps sans appliquer cet accord, la faiblesse de représentation du niveau national par rapport au niveau régional, et plus encore la faiblesse de représentation régionale par rapport au niveau local, sont telles que la pyramide des pouvoirs est inversée. Au niveau régional, on a des difficultés à homogénéiser la gestion des ressources humaines et le traitement des salariés, qui sont régionalisés depuis le 1er janvier 2013, et les syndicats ont beaucoup de mal à obtenir que toutes les CCI d'une même région mènent la même action. Et lorsque nous demandons en CPN pourquoi il en est ainsi et comment faire pour que ce l'on négocie au niveau national soit prescriptif, on nous répond que l'employeur régional est autonome et on nous suggère de faire un recours devant le tribunal administratif si nous n'arrivons pas à faire respecter les accords nationaux.

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Jeannine Marty, de la CGT CCI Paris-Ile-de-France

Le droit social qui nous régit reste très lacunaire. Les CCI tendent à le rapprocher tantôt du droit public, tantôt du droit privé, selon ce qui les arrange, laissant les agents du réseau fort démunis. Aujourd'hui, tout ce qui n'est pas prévu explicitement dans un accord voté en CPN reste dans une zone de non-droit. La seule faculté qui reste aux agents consulaires pour faire valoir leurs droits est d'adresser une requête au juge administratif. Les CCI se sentent à l'aise avec ce régime d'exception, qui leur permet de faire vivoter la spécificité de leur droit.

Les personnels des CCI sont des agents publics dont l'emploi peut être supprimé. Ils peuvent être licenciés si aucun reclassement n'est possible. Aujourd'hui, dans le cadre de cette procédure de licenciement pour suppression d'emploi, les CCI peuvent mettre en avant un motif économique, ce qu'elles ne se privent pas de faire. Néanmoins, lorsque le salarié est licencié, il ne bénéficie pas de la diminution des différés d'indemnisation ; et le fisc déclare ne pas pouvoir se prononcer sur le régime fiscal des indemnités versées. Les agents ne bénéficient pas non plus d'un compte personnel de formation ni d'un contrat de sécurisation de l'emploi. Le droit social consulaire ne progresse pas assez vite pour répondre aux besoins des CCI. C'est pourquoi nous demandons l'abandon de cette exception et le rapprochement de ce droit du droit de la fonction publique territoriale. On s'appuierait ainsi sur un droit qui a vécu.

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Pourquoi pas des contrats de droit privé ? Certains droits protecteurs dont ne bénéficient pas vos collègues sont parfaitement reconnus en droit privé, et plus robustes – quoi qu'on en dise – que dans le droit de la fonction publique.

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Jeannine Marty, de la CGT CCI Paris-Ile-de-France

Si nous faisons cette proposition, c'est parce que nous sommes des agents publics.

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Certes, mais ce n'est pas forcément la solution idéale.

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Monsieur Morisseau, vous vous êtes dit très favorable à la régionalisation prévue par la réforme de 2010. Or, je me souviens que de nombreuses personnes y étaient opposées à l'époque, notamment au regard des risques de suppression d'emplois et de concentration qu'elle présentait. On pouvait alors distinguer trois types d'approches : ceux qui étaient intéressés par la régionalisation, ceux qui, au contraire, prônaient la métropolisation et ceux, assez nombreux, qui étaient favorables à une départementalisation. Quant aux personnels, ils ne sont pas exprimés d'une voix unanime. Il me semble donc qu'en cinq ans, la situation a considérablement évolué, peut-être en raison de l'évolution de notre organisation territoriale. Pourriez-vous nous repréciser les choses ?

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Gilles Morisseau, président de l'UNSA-CCI

Pour nous, représentants des salariés, la régionalisation peut effectivement susciter des craintes dans la mesure où elle suppose une évolution de nos emplois supports qui peuvent devoir être concentrés. Réorganiser un réseau tel que le nôtre demande beaucoup d'énergie et de moyens humains. Le réseau consulaire doit aussi préparer une mutation de ses emplois et de ses métiers et organiser une formation continue en interne afin que nos collègues salariés des CCI puissent conserver leurs missions.

Par ailleurs, la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notre) confère des pouvoirs étendus aux futures grandes régions en matière de développement économique. Par conséquent, pour que les CCI puissent partager des missions avec ces régions, il faut qu'elles soient organisées à ce niveau-là, sinon elles ne pourront être forces de négociation et de proposition dans une région plus large.

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Nous tenions déjà le même débat il y a trente-cinq ans, lorsque je m'occupais des chambres de commerce comme chef de bureau à la direction du budget. Je partage le sentiment du président Olivier Carré : pendant longtemps, on a pensé que le régime des trois fonctions publiques – d'État, territoriale et hospitalière – était plus protecteur que le droit privé. C'était peut-être vrai il y a quarante ans, mais aujourd'hui on peut se poser la question. Ne seriez-vous pas favorable à la négociation d'une convention collective applicable à l'ensemble des agents des CCI ? Car vous vous trouvez actuellement dans une situation curieuse : une partie des personnels sont des agents publics tandis qu'une bonne part de ceux des concessions relève du droit privé.

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Monsieur Kaluzny, pourriez-vous nous confirmer qu'il y a bien à peu près 60 % d'agents publics et 40 % de salariés de droit privé dans les CCI ?

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Fabrice Kaluzny, directeur équipement et territoires de la CFE-CGC

La notion d'agent contractuel est complexe dans les CCI. Elle désigne notamment des agents de droit privé relevant d'une convention collective, dont le statut pose problème car la caisse mutuelle des CCI à laquelle ils sont affiliés ne leur assure qu'un salaire de remplacement en cas de licenciement, mais pas de contrat de sécurisation professionnelle ni aucune autre prestation prévue par les accords professionnels de droit privé. C'est notamment ce qu'ont subi une vingtaine de salariés licenciés par l'aéroport de Dijon.

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Nous pourrions souligner cette hétérogénéité et les perturbations qu'elle crée, et suggérer une adaptation du statut à l'évolution consulaire – visant à la fois à solidifier ce statut et à y apporter de la souplesse. Cela poussera sans doute alors le Gouvernement à inciter les CCI à mettre de l'ordre en leur sein.

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Fabrice Kaluzny, directeur équipement et territoires de la CFE-CGC

Nos agents de droit public sont très impliqués dans l'exercice de leurs missions de service public et veillent à garantir une égalité de traitement entre les entreprises. Ils ne suivent pas une logique de cabinet de consultants privés. Nous proposons donc par exemple que, lorsqu'un accord national interprofessionnel (ANI) est validé par les organisations syndicales nationales et par l'ensemble des organisations professionnelles d'employeurs, la tutelle joue tout son rôle en l'inscrivant systématiquement à l'ordre du jour de la CPN de façon à faire peser sur elle une obligation de transposition de ces accords dans les douze mois qui suivent. Autre exemple, le droit individuel à la formation (DIF), qui a été créé, appliqué puis remplacé, n'a jamais été à l'ordre du jour dans le réseau consulaire.

Lorsque l'on parle de l'argent des CCI, on oublie de dire qu'une partie de celui-ci sert à payer les salariés. Nous souhaiterions donc que, comme le préconise le rapport de l'IGF, 20 % du prélèvement, à hauteur de 135 millions d'euros, serve à alimenter un fonds de restructuration des CCI. Car, si la CMAC verse un salaire de remplacement, elle n'assure pas les missions d'accompagnement des agents licenciés. Pourquoi ne pas lui confier la mission, aujourd'hui assurée par le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) pour les fonctionnaires territoriaux, de veiller à ce que les autres employeurs embauchent en priorité les agents licenciés à disposition ?

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Le système applicable à la fonction publique territoriale a fait exploser des centres de gestion comme celui du Var, où certains employeurs ont licencié des agents, faisant porter la charge d'embauche sur les autres employeurs du département. Et, en réformant ce système, on l'a bétonné encore davantage, ce qui a abouti à une véritable gabegie. Je vous déconseille donc de vous inspirer du modèle de la fonction publique territoriale. Il faudrait avoir le courage de changer de modèle et d'exiger la négociation d'une convention collective ce qui ne nécessite aucune intervention de l'autorité publique. Contrairement à ce que vous pouvez croire, la convention collective, seul outil du dialogue social, est bien plus protectrice que le système actuel, car cela fait trente ans que la tutelle ne reprend pas les accords que vous passez, de sorte qu'ils n'ont pas force de loi. Si vous demandez au Parlement de basculer dans un système de conventions collectives, qui réunirait la collectivité de travail, vous connaîtriez un vrai progrès social, quand bien même cela perturberait les traditions syndicales.

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Laurence Dutel, secrétaire générale de la CFDT-CCI

La CFDT ayant trois sièges sur six à la commission paritaire nationale, je puis vous dire que les agents sont attachés à leur statut et qu'ils ne souhaitent pas la négociation d'une convention collective, d'autant que nos interlocuteurs ne sont pas disposés, du fait de la carence de la tutelle, à discuter. Nous voudrions au contraire une tutelle beaucoup plus forte, qui impose des schémas prescriptifs.

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M. de Courson vient d'expliciter la mécanique que vous dénoncez, à savoir que tout le monde, employés comme employeur, se réfugie derrière la logique d'un statut « Potemkine ». Cela peut fonctionner tant qu'il n'y a pas de difficultés majeures d'adaptation : les problèmes sont réglés à la marge et, quand il le faut, on prend des décisions qui arrondissent les angles, si bien que tout le monde sort content de la négociation. Mais, lorsqu'il y a changement structurel, cette logique explose, et les agents peuvent se retrouver en réelle difficulté. Vous avez d'ailleurs vous-même souligné qu'ils ne bénéficiaient pas du DIF, alors même que des accords nationaux avaient été conclus. Bien qu'étant dans l'opposition, j'observe avec un regard très bienveillant l'évolution des droits sociaux dans notre pays, et j'estime que leur individualisation est vraiment protectrice du salarié du XXIe siècle. Peut-être qu'au départ, vos employeurs auront des réticences à cette évolution avant de percevoir qu'ils y ont intérêt. Il ne faut pas se fermer a priori à toute réforme au motif qu'un statut existe depuis trente ans.

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Martin Gazzo, secrétaire général adjoint de la CFDT-CCI

Vous nous avez demandé de comparer le statut des chambres de commerce à celui des chambres de métiers. Or ces dernières, bien qu'elles soient soumises à un statut qui a la même histoire que le nôtre, ont très rapidement réussi, après 2004, à instituer un DIF, une commission nationale de la formation professionnelle, une commission nationale chargée de régler les différends entre salariés et employeurs, et à mener une véritable politique nationale de formation. En revanche, les présidents des chambres de commerce refusent de négocier sur ces sujets, considérant qu'il est hors de question que leurs salariés aient un droit à la formation. Et même sous le régime de la convention collective, nous aurions les mêmes difficultés.

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Les conventions collectives signées dans les concessions aéroportuaires offrent à leurs salariés une situation bien meilleure que la vôtre. Et toute l'évolution des quinze ans à venir se fera à votre détriment. À un moment donné, il faut donc avoir le courage de faire sa révolution copernicienne. Mais être délégué, ce n'est pas seulement suivre ses troupes : c'est parfois leur dire dans quelle direction avancer.

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Martin Gazzo, secrétaire général adjoint de la CFDT-CCI

C'est justement nous qui avons négocié ces conventions collectives !

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Sylvia Vuarnet, présidente de la CFC-CGC réseaux consulaires, conseillère technique à la Commission paritaire nationale

Nous savons tous que le statut ne convient pas en l'état : le réseau n'a plus rien à voir aujourd'hui avec ce que prévoit la loi de 1952 qui est devenue contradictoire avec celle de 2010. Quant à la loi de 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, elle exclut la CGT de la négociation alors que celle-ci est représentative.

Par contre il faut, condition indispensable pour négocier une convention collective dans les chambres de commerce, changer radicalement le mode de financement du paritarisme, car les CCI sont le seul endroit où l'employeur finance directement les syndicats, et de façon discrétionnaire – ce qui, d'ailleurs, va dans le sens de ce que vous nous dites.

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Nous en prenons acte mais ce point est presque hors sujet. La représentation syndicale paraît effectivement devoir être revue afin qu'il n'y ait pas que trois syndicats reconnus au sein de la CPN.

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Gilles Morisseau, président de l'UNSA-CCI

Certes, notre statut, datant de 1952, est incomplet et n'a pas été adapté à toutes les évolutions sociales ni aux accords interprofessionnels qui ont été conclus depuis. Mais ne croyez-vous pas que ce soit le plus mauvais moment pour envisager un changement de statut des personnels, compte tenu des difficultés que nous vivons au quotidien dans le dialogue social ? Quant au mode de financement des syndicats, on peut en reparler. Loin d'être riches, ces organisations disposent de très faibles moyens dans le monde consulaire. La régionalisation de 2013, loin de nous avoir apporté des moyens supplémentaires, nous a même fait perdre des postes de délégués syndicaux. Nous n'avons même pas les moyens aujourd'hui de couvrir une grande région, car nous ne pouvons nous déplacer partout. Alors que nous représentons 26 000 salariés, les trois syndicats présents en CPN n'ont pas un seul salarié permanent pour remplir cette mission. Nous travaillons à un rythme effréné, compte tenu des accords que nous demande de négocier CCI-France.

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Je vous remercie d'avoir évoqué des sujets qui n'avaient pas été abordés à l'occasion des précédentes auditions. Je souhaiterais néanmoins recadrer les choses : ce n'est pas à cette mission, de vous dire ce que vous avez à faire. En revanche, nous retirons de nos échanges des éléments intéressants pour l'objectif que nous nous sommes assignée, qui vise à réfléchir à la réforme de demain.

De ce qui a été dit jusqu'à présent, je retiens que vous réclamez un positionnement beaucoup plus fort de la tutelle, tout comme CCI-France. Il conviendrait cependant que vous nous précisiez ce que vous en attendez exactement, compte tenu du désir d'indépendance des présidents de CCI qui agissent sur le terrain. Vous avez aussi soulevé un problème de réorganisation interne, doutant que tous les gisements d'amélioration de la productivité, à tous les échelons de la hiérarchie, aient été pris en compte.

Vous avez évoqué le manque de transparence ayant entouré le prélèvement budgétaire effectuée l'année dernière. Il est vrai qu'il a été très difficile de connaître exactement les comptes, et donc les possibilités plus ou moins grandes dont disposait chaque chambre d'apporter sa contribution. Nous avons depuis lors reçu des éléments qui nous ont certainement manqué au moment où nous en avons décidé. En revanche, je n'avais encore jamais entendu dire, jusqu'à présent, que le fonds de roulement ponctionné comprenait des réserves destinées à faire face à des dépenses sociales. Si c'est toujours le cas, nous pourrions interroger le Gouvernement à ce sujet car le prélèvement a été calculé en fonction du poids économique de chaque chambre de commerce et du nombre de jours de fonds de roulement ; à aucun moment, on ne nous a informés de la nécessité d'une réserve pour couvrir des dépenses à caractère social.

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Si M. Morisseau s'est clairement prononcé au sujet de la régionalisation, quelle est l'analyse des autres représentants syndicaux sur ce sujet ainsi que sur les dispositions du projet de loi « Macron » qui viennent d'être adoptées au Sénat concernant les schémas d'organisation, et qui prévoient de donner un caractère prescriptif aux schémas directeurs ?

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Jeannine Marty, de la CGT CCI Paris-Ile-de-France

Je confirme à Mme Rabin qu'une part du fonds de réserve de la CCI de Paris était liée à la « queue de comète » de notre régime spécial d'assurance vieillesse. J'imagine que, dans d'autres chambres, il existe des dettes sociales liées aux allocations de fin de carrière.

Pour revenir sur les propos de M. de Courson, il nous semble vraiment que le mode de fonctionnement fondé sur un statut particulier, faisant exception à tout, arrive à son terme. Nous n'avons aucune réponse claire sur ce qui devrait être. Néanmoins, la création des établissements d'enseignement supérieur consulaire (EESC) va entraîner un grand chambardement : petit à petit, toutes les écoles de commerce vont devenir des structures de droit privé. Des salariés seront mis à leur disposition dans un premier temps mais pourront opter directement pour un statut de droit privé.

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Sylvia Vuarnet, présidente de la CFC-CGC réseaux consulaires, conseillère technique à la Commission paritaire nationale

La loi de 2010 sur la régionalisation a posé un problème de délégation de pouvoir entre les CCI, chacune d'entre elles étant une entité juridique autonome. Ces délégations de pouvoir ont entraîné des mises à disposition de personnel et des délégations de gestion des ressources humaines de sorte qu'aujourd'hui, lorsqu'une CCI territoriale décide de supprimer des postes, les agents doivent être reclassés, mais les CCI territoriales de la même région, ayant une entité juridique autonome, ne veulent pas des salariés du voisin. Ces refus de reclassement au sein d'une même région posent un problème de ressources humaines. Ensuite, comment parvenir, comme le souhaite le président Marcon et d'autres, à rendre prescriptifs les schémas sectoriels des CCI régionales s'ils restent tels qu'ils sont actuellement, c'est-à-dire, selon le rapport du Sénat sur le projet de loi « Macron », descriptifs, flous et non chiffrés, très généraux ?

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Fabrice Kaluzny, directeur équipement et territoires de la CFE-CGC

Je regrette que le volet de ce projet de loi consacré aux CCI traite de la question de la répartition de la taxe, des élections consulaires et de nombreux cas individuels, mais pas du tout du problème du personnel des CCI. Comment les instances représentatives du personnel vont-elles fonctionner dans ces CCI fusionnées ? Chaque CCI aura son interprétation et sa pratique.

Nous nous plaignons nous aussi du manque de transparence, non seulement du point de vue financier mais également en ce qui concerne les assemblées générales auxquelles nous ne sommes pas invités. Nous n'avons même pas accès aux relevés de décision des établissements publics que sont les chambres de commerce !

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Il vous faut saisir la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA).

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Fabrice Kaluzny, directeur équipement et territoires de la CFE-CGC

Il n'y a pas d'autre moyen, car la loi de 2010 dispose que ces assemblées générales ne sont pas publiques. Par conséquent, alors que, en novembre dernier, une CCI territoriale a décidé de supprimer 25 % de ses postes, nous n'avons pu savoir si le sujet était à l'ordre du jour de l'assemblée générale régionale. Et, trois mois après, nous ne savions toujours pas s'il avait été traité, ni si l'assemblée régionale avait décidé d'un licenciement ou non. Ce n'est qu'en commission paritaire régionale que nous avons appris qu'avaient été décidés des départs volontaires. Il est donc nécessaire d'instaurer une obligation de publicité des décisions des assemblées générales régionales, comme dans tout établissement public.

S'agissant de la tutelle, nous avons proposé que, dans une phase transitoire d'ici à l'adoption d'un statut plus privé, elle inscrive systématiquement à l'ordre du jour les accords nationaux interprofessionnels. D'autre part, le respect de notre droit n'est contrôlé au niveau local par personne, ni par l'inspecteur du travail ni par le préfet, si bien que, lorsque nous avons un problème d'interprétation de notre statut, on nous invite à déposer une requête auprès du tribunal administratif. Peut-être la tutelle pourrait-elle jouer un rôle un peu plus prégnant, au niveau décentralisé, en la matière.

Enfin, vous avez bien conscience du fait que les CCI sont toutes dans des situations très différentes de sorte qu'il est impossible à CCI-France, selon ses dires, de faire appliquer ses décisions.

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Laurence Dutel, secrétaire générale de la CFDT-CCI

Il était illusoire de penser que la régionalisation et la fusion des CCI territoriales permettraient de faire des économies. Malgré la révolution culturelle que cela implique, je rejoins M. Morisseau pour dire qu'il serait catastrophique de tout réformer en même temps. Si l'avènement des grandes régions au début de l'année 2016 est cohérent au niveau européen, la régionalisation actuelle des CCI est encore balbutiante, de sorte que nous ne sommes pas du tout préparés à cet avènement.

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Gilles Morisseau, président de l'UNSA-CCI

Mme Vautrin nous a demandé quelle organisation future nous préconisions. Or, la démultiplication des typologies d'organisation possibles, système de menu à la carte où chaque territoire choisit l'option qu'il veut – entre CCI régionales, départementales et territoriales, bénéficiant ou non de la personnalité morale –, remettra en cause la cohérence et la visibilité de notre réseau. Il sera également difficile pour les personnels de bénéficier d'une égalité de droit et des mêmes possibilités d'évolution, parmi les différentes structures juridiques. Dans certains endroits, on maintiendra des pouvoirs locaux tandis que dans d'autres, les pouvoirs seront régionalisés. La loi de 2010 sera donc encore plus complexe à appliquer.

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Fatiha Fadil, de la CGT CCI

N'oubliez pas que les CCI détiennent le deuxième rôle en matière d'enseignement après l'éducation nationale. La réduction de la dotation des CCI a donc un impact énorme sur de nombreuses écoles ainsi que sur des formations importantes. Ainsi le travail effectué depuis quarante-sept ans par les CCI d'Île-de-France avec des jeunes en difficulté pour les insérer dans la vie sociale et professionnelle vient-il de connaître un coup d'arrêt.

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N'hésitez pas, mesdames et messieurs, à compléter vos propos par écrit. Je vous encourage aussi à réagir aux prochaines auditions de notre mission et à réfléchir à l'opportunité de réviser votre statut. Vous semblez considérer cette révision comme insurmontable au motif que vous êtes déjà confrontés à un défi conjoncturel. C'est parfois en plaçant la barre plus haut que l'on résout les difficultés du moment, car si tout le monde s'engage dans une vraie réflexion, cette dernière pourra aboutir à un projet qui mette les salariés en phase avec les évolutions futures des réseaux consulaires. Mesdames, messieurs, je vous remercie.