Commission des affaires économiques

Réunion du 6 juillet 2016 à 9h30

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La réunion

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La commission a procédé à l'audition de M. Matthias Fekl, secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger.

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Mes chers collègues, nous avons le plaisir d'auditionner le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Chaque fois que nous l'avons sollicité, M. Matthias Fekl a répondu présent. Le plus souvent, il s'agissait d'auditions conjointes, menées avec d'autres commissions. Ce n'est pas le cas aujourd'hui, et vous pourrez, chers collègues, poser toutes les questions qu'une actualité brûlante vous inspire.

Cette audition se tient à une date particulièrement opportune, au lendemain d'un certain nombre d'annonces qui concernent la ratification de l'Accord économique et commercial global – en anglais Comprehensive Economic and Trade Agreement (CETA) –conclu entre l'Union européenne et le Canada, et le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement – Transatlantic Trade and Investment Partnership (TTIP) – en cours de négociation entre l'Union européenne et les États-Unis – une nouvelle série de négociations va commencer prochainement. Au sein de notre commission, nous avons déjà organisé des tables rondes, notamment sur les aspects agricoles et industriels de la question. Nous vous savons très engagé, Monsieur le secrétaire d'État, mais nous avons besoin d'un certain nombre de précisions.

Naturellement, le tourisme fait également partie de nos dossiers de prédilection, et de nos compétences. Je vous sais fort engagé en cette matière également, et un certain nombre de parlementaires sont aussi très impliqués. Pouvez-vous nous dresser un bilan de la mise en oeuvre des contrats de destination ? La promotion des territoires comme destinations touristiques est importante.

Hier, notre commission s'est réunie pour travailler sur les exportations. Nous avons d'abord auditionné la directrice générale de Business France. S'est ensuite tenue une table ronde avec trois femmes chefs d'entreprise. Leurs entreprises, relativement florissantes, exportent, mais peuvent rencontrer certaines difficultés : l'exportation a un coût spécifique, et requiert une forte motivation. Parfois, malgré des efforts de simplification et de clarification, qui ont notamment pris la forme d'une fusion de différents outils d'aide à l'export, l'information n'est pas aisément accessible, et les dispositifs manquent de lisibilité. Il faudra redoubler d'efforts dans ces domaines. Elles nous ont également fait part d'un certain nombre de difficultés concrètes, rencontrées au quotidien, qui concernent la protection des marques et des brevets ou les déclarations douanières. Le rôle de la commission des affaires économiques est aussi de se pencher sur ces sujets. Je sais que vous-même êtes régulièrement en contact avec ces entreprises, mais notre rôle est aussi de vous faire part d'un certain nombre de remontées, et de certaines problématiques – je songe à l'accès à BPIfrance.

Elles nous ont aussi beaucoup parlé du volontariat international en entreprise (VIE), outil important selon elles, mais il reste parfois difficile, notamment pour des entreprises de taille modeste, d'y accéder directement, car cela coûte cher. Elles souhaiteraient donc un portage par de grands groupes. Cette possibilité est déjà ouverte, mais peut-être n'est-ce pas suffisamment clair, ni suffisamment simple. Je crois que certains outils devraient être réajustés.

Nous avons beaucoup parlé des régions. Nous vous interrogerons notamment sur les nouvelles compétences qu'a pu leur donner, en matière économique et de commerce extérieur, la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe). Comment votre action, Monsieur le secrétaire d'État, et celle des régions s'articulent-elles ? Nous savons que des conventions doivent être signées entre Business France et l'Association des régions de France (ARF) sur ces sujets, mais il faut remettre de la lisibilité. Surtout, il y a parfois des doublons entre les chambres de commerce et d'industrie, les régions et d'autres acteurs économiques. Or l'efficacité suppose qu'une seule équipe, soudée, soit à la manoeuvre.

C'est pour toutes ces raisons que les parlementaires sont nombreux aujourd'hui pour vous entendre, et vous interroger.

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Matthias Fekl, secrétaire d'état chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger

Merci, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, pour votre invitation. C'est toujours un plaisir et un honneur pour moi que de m'exprimer devant votre commission, dans le cadre d'auditions conjointes ou pas ; je suis, en tout cas, à la disposition du Parlement.

Je vais essayer d'évoquer en une vingtaine de minutes les différents sujets que vous avez abordés, Madame la présidente. Ils sont tout de même très vastes ; aussi pourrai-je préciser mon propos ensuite, à la faveur de vos questions.

Représentant 8 % de notre richesse nationale, et avec 2 millions d'emplois qui y sont liés, le tourisme est un secteur majeur de notre économie, en pleine expansion. Selon les projections de l'Organisation mondiale du tourisme, agence spécialisée de l'Organisation des Nations Unies (ONU), le nombre de touristes aura presque doublé en 2030, passant d'un milliard actuellement à 1,8 milliard en 2030. La France est la première destination touristique au monde, avec 85 millions de touristes accueillis l'an dernier. L'objectif est d'en accueillir 100 millions par an à l'horizon 2020. Le tourisme, ce sont des métiers magnifiques, partout, dans nos régions, dans nos territoires, dans les territoires que vous connaissez. La volonté du Gouvernement est donc forte, même s'il s'agit évidemment de mener cette politique en lien avec les acteurs de terrain. M. Laurent Fabius l'a pilotée au Quai d'Orsay à partir de 2014 ; c'est désormais M. Jean-Marc Ayrault qui le fait. Au niveau des secrétaires d'État, je travaille étroitement avec Mme Martine Pinville, plutôt chargée des aspects internes, notamment le suivi des métiers, tandis que je m'occupe plutôt de la promotion, à l'international.

L'actualité est contrastée. Des faits que je ne mets évidemment pas sur le même plan, mais qui se conjuguent, ont pu dissuader des touristes de venir et compromettre l'organisation d'événements : les attentats qui ont frappé notre pays, un certain nombre de phénomènes météorologiques, etc. Les chiffres ne sont donc pas bons, notamment à Paris et dans la région capitale. Il est un peu tôt pour un bilan exhaustif et précis ; je le ferai dès que nous aurons des données fiables. Il faut, bien sûr, distinguer selon les secteurs, les types de tourisme, etc., mais nous savons que la tendance n'est pas très bonne. La situation est globalement meilleure dans les autres régions. Des gens souhaitent visiter la France mais évitent, pour les raisons que j'ai indiquées, Paris. La mobilisation est très forte, notamment de la part de la maire de Paris et de la présidente du conseil régional d'Île-de-France.

J'ai réuni hier les acteurs des contrats de destination. Il s'agit là de marques touristiques à vocation internationale que nous avons contractualisées, avec les acteurs territoriaux, au ministère des affaires étrangères. Au-delà de la qualité des projets, les contrats de destination devaient remplir deux grands critères. Le premier était d'avoir une lisibilité à l'international. S'il y a une chose dont les touristes se moquent, ce sont les limites administratives françaises : quand on va quelque part, on ne se demande pas en permanence dans le ressort de quelle entité administrative on se trouve. Il faut travailler ensemble, c'est l'idée de ces contrats de destination, et cela fonctionne. Le deuxième critère, c'est la lisibilité depuis l'international. Chaque territoire doit s'en sortir, pouvoir jouer sa carte, mais, en même temps, quand on présente quelque chose, il faut que ce soit lisible, que les gens découvrent de grandes destinations. Lors de chacun de mes déplacements à l'étranger, j'ai à coeur de faire la promotion de ces contrats de destination.

Je lance d'ailleurs une invitation par votre intermédiaire : que tous les acteurs du tourisme qui le souhaitent m'accompagnent dans les déplacements à l'international. Chaque fois, nous organisons des rendez-vous très précis, avec des relais, que ce soit des tour-opérateurs, des journalistes ou des blogueurs qui font la tendance. Nous avons ciblé, bien sûr, les pays au très fort potentiel mais aussi ceux dont les ressortissants ont été moins nombreux à visiter notre pays l'an dernier – le Japon, les États-Unis, la Chine ainsi qu'un certain nombre de nos voisins européens. Il ne faut pas hésiter. Cela fonctionne, et cela peut apporter un plus. Nous continuons à travailler la question, et nous préparons en ce moment la conférence annuelle du tourisme, qui se tiendra à la fin de l'année. L'idée est aussi d'actualiser la feuille de route issue des Assises du tourisme et de travailler avec tous les professionnels. Il s'agit non pas de décréter une politique depuis Paris mais, au contraire, d'associer les acteurs du tourisme – collectivités territoriales, opérateurs publics et entreprises – à cette construction. Vraiment, Mesdames et Messieurs les députés, n'hésitez pas, c'est extrêmement porteur.

Un fonds d'investissement d'un milliard d'euros est mis en place à la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Il n'est pas si fréquent, pour moi, d'annoncer quelque part qu'il y a de l'argent : j'en profite donc. En l'occurrence, il y a de l'argent pour accompagner la montée en gamme de notre offre touristique, l'innovation, les hébergements. Il ne faut pas hésiter. Le directeur général de la CDC fait en ce moment un tour de France pour présenter ce fonds et les critères d'éligibilité. Cela peut intéresser beaucoup de monde, y compris dans vos territoires. Nous savons qu'il faut adapter l'offre. Les différents axes de travail que nous avions identifiés avec les professionnels, autour de l'accueil, de l'hébergement, du numérique, exigent aussi un accompagnement financier. C'est l'idée de ce fonds, qui peut par ailleurs être complété par des fonds du programme d'investissements d'avenir (PIA), qui s'orientent aussi vers le tourisme – il faut respecter un critère d'innovation assez exigeant, mais qui permet aussi de faire entrer les projets « dans les clous ».

Nous pouvons évidemment parler des aspects numériques de la question, mais le Parlement y a déjà beaucoup travaillé. Une étape importante a été franchie. L'idée est double. Il s'agit tout d'abord de veiller à ce que la concurrence entre les nouveaux acteurs du tourisme – les plateformes – et les acteurs traditionnels soit équitable. Des règles, des normes très exigeantes s'appliquent aux professionnels du tourisme. Toute concurrence déloyale est évidemment hors de question. Votre assemblée y a travaillé et la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour une République numérique est parvenue à un bon équilibre. Dans le même temps, il faut aussi s'inscrire dans les tendances. L'objectif de 100 millions de touristes ne pourra être atteint que si de nouveaux types d'hébergement y contribuent et si, par ailleurs, les professionnels du tourisme s'engagent totalement dans le numérique – ils le font effectivement. Il faut marcher sur ses deux jambes, tout en veillant vraiment à une grande équité de la concurrence et, bien sûr, en luttant contre les abus et les fraudes.

Sur le commerce extérieur, je ferai le point sur un certain nombre de négociations en cours, avant de vous dire un mot sur le « Brexit » et ses conséquences, telles que nous pouvons aujourd'hui les anticiper. Je répondrai aussi à vos interrogations sur les petites et moyennes entreprises (PME).

En ce qui concerne ce fameux CETA, dont la négociation s'est achevée au mois de septembre 2014, lors du sommet entre l'Union européenne et le Canada, plusieurs aspects doivent être évoqués. Sur le fond, le Gouvernement considère que c'est globalement un bon accord pour notre économie, car il porte à un niveau très élevé la reconnaissance de nos indications géographiques et de nos appellations. Ce que j'ai appelé la « diplomatie des terroirs » y est largement reconnue. Vous savez que notre diplomatie est mobilisée : si nous voulons défendre les terroirs de France, il faut aussi les défendre avec beaucoup de force dans les négociations internationales pour faire reconnaître ce concept d'indication géographique. Récemment, aux États-Unis, j'ai rencontré des producteurs eux-mêmes attachés à ce système d'indications géographiques. Ne cédons donc rien sur ce point. Chaque fois qu'un État accepte d'entrer vraiment dans le jeu des indications géographiques, il faut regarder cela de très près. Quarante-deux nouvelles indications géographiques sont reconnues par le Canada, qui concernent notamment les produits laitiers et la charcuterie, et s'ajoutent aux indications géographiques déjà reconnues en 2004 dans les vins et spiritueux. Il y a donc là une très forte protection de nos indications géographiques. J'entends dire que toutes nos indications géographiques ne sont pas reconnues par le Canada. C'est vrai, mais nous avons centré nos demandes sur celles pour lesquelles il y avait des problèmes, celles qui étaient le plus fortement l'objet d'une concurrence. Certes, l'Osso Iraty n'est pas reconnu par l'accord avec le Canada, mais il n'y est l'objet d'aucune concurrence ; je réexaminerai la question lorsque l'on m'aura présenté un producteur canadien d'Osso Iraty ! Il faut aller jusqu'au bout des raisonnements commerciaux, et la France se concentre évidemment sur les indications géographiques confrontées à des difficultés.

Par ailleurs, le Canada a très largement ouvert ses marchés publics, notamment à nos PME. La réciprocité est un enjeu très fort. La France défend l'idée de réciprocité dans les échanges. L'Europe est très ouverte en ce qui concerne l'accès à ses marchés publics ; d'autres le sont beaucoup moins. Le Canada a fait des efforts d'ouverture importants, y compris en impliquant les provinces, qui sont liées par cet accord.

Le Canada est en outre le premier État à reprendre la proposition française de cour de justice commerciale internationale pour remplacer l'arbitrage privé, que j'avais élaborée. Il y a eu beaucoup de débats ces derniers temps, et vous-mêmes avez travaillé sur ces sujets. L'arbitrage privé permet à de grandes entreprises d'attaquer des règles démocratiques devant des tribunaux privés ; ce n'est évidemment pas acceptable, et l'Assemblée nationale avait émis des souhaits extrêmement précis. J'avais élaboré une proposition dont l'objet était notamment de remplacer les arbitres privés par des juges publics, rémunérés par les États et non par les entreprises, soumis à des règles déontologiques très strictes prévenant les conflits d'intérêts, et aussi d'interdire que des choix de politique publique soient contestés – les États ont le droit d'édicter des règles et de les faire respecter. Le Canada a été le premier État à accepter cette cour. Je signale à ceux qui aiment la politique qu'il l'a fait après les élections et la nomination du nouveau gouvernement. Sous le gouvernement de M. Stephen Harper, la position canadienne était très claire : c'était un refus pur et simple d'entendre parler du sujet. C'est sous le gouvernement de M. Justin Trudeau que les choses ont évolué.

En ce qui concerne la ratification du CETA, disons les choses poliment : la Commission européenne a essayé tout au long des dernières semaines de contourner les parlements nationaux. Je m'étais cependant engagé devant vous, en commission comme dans l'hémicycle : la France considère que cet accord porte sur des compétences européennes et des compétences nationales, et qu'il nécessite donc une double ratification parlementaire, au niveau européen et au niveau national. La Commission a essayé, y compris au plus haut niveau, de contourner cette réalité, considérant que cela présentait des difficultés. C'est d'ailleurs vrai : doivent se prononcer à la fois les vingt-huit parlements nationaux et, dans certains pays, les parlements régionaux, mais, à l'heure où la légitimité de ces discussions commerciales est contestée, le pire serait précisément de vouloir régler le problème en « zappant » des lieux de légitimité, en particulier le Parlement. La Commission a finalement changé d'avis hier, après que plusieurs États membres, dont la France, se sont exprimés avec force, voire virulence ; je m'en réjouis. Il aurait été impensable que les choses ne se déroulent pas ainsi. La France considère que c'est un bon accord, et le Gouvernement vous invitera à le ratifier, mais vous déciderez.

L'accord avec les États-Unis est négocié depuis 2013. J'ai été le premier membre d'un gouvernement à émettre, dès l'année dernière, des réserves très fortes, à formuler des exigences très fortes, à définir des critères très forts. Le Président de la République a confirmé cette stratégie au cours des derniers mois ; le Premier ministre s'est également exprimé à ce propos, notamment ces tout derniers jours. La stratégie de la France est très claire. Elle n'a pas varié depuis que je suis chargé de ce dossier, et elle ne variera pas : nous souhaitons la transparence des négociations, nous souhaitons que la proposition d'une cour de justice commerciale internationale soit reprise, comme elle l'a été par le Canada, l'idée étant, à terme, de nous doter d'une cour de justice multilatérale et non pas simplement bilatérale, compétente entre des pays précis ; nous souhaitons que nos entreprises, notamment nos PME, puissent avoir accès aux marchés publics américains ; nous souhaitons de la réciprocité. C'est bien de prôner le libéralisme en permanence, mais, très sincèrement, il n'y a plus maintenant que la Commission européenne qui l'envisage de manière dogmatique et béate. Les États-Unis, eux, font preuve d'une très forte réactivité et mettent en oeuvre des instruments de défense commerciale de manière extrêmement efficace. C'est positif ; je respecte cela, et je le dis franchement. Ce n'est pas moi qui jetterai la pierre à un État qui applique des procédures et des règles pour se défendre. Simplement, l'Europe doit être à la hauteur des enjeux. Si la méfiance se répand, c'est aussi parce que toutes les promesses, parfois faramineuses, des accords commerciaux n'ont pas été tenues dans leur intégralité – pour l'exprimer en termes diplomatiques. Soyons très exigeants sur ce point.

Nous avons un rendez-vous très important, les 22 et 23 septembre prochains à Bratislava : le conseil informel des ministres du commerce extérieur. La Commission européenne fera alors un rapport sur l'avancement des négociations. Nous attendons un rapport d'étape extrêmement précis, non des généralités lénifiantes. Ce sera pour le Gouvernement un temps d'analyse extrêmement important, ce que n'a pas été le Conseil européen. Contrairement à ce que la Commission a essayé de faire croire, il n'y a eu absolument aucune « reconfirmation de mandat », ou que sais-je : il n'existe pas de procédure de « reconfirmation de mandat » en droit européen. Ce sont donc des manoeuvres extrêmement grossières, et peu intéressantes, visant sans doute à rejeter la responsabilité sur tel ou tel. Au Conseil européen, nous avons eu droit à une présentation très « synthétique » – soyons polis – de l'état d'avancement des négociations et, ensuite, à une quasi-absence de débat, mais il était prévu qu'il en soit ainsi au lendemain du Brexit. Le Président de la République a rappelé une nouvelle fois les exigences françaises, et la Commission a demandé aux États de lui signer un chèque en blanc, ce qu'ils ont refusé. Voilà très exactement où nous en sommes. Prochain rendez-vous à la rentrée.

Le Brexit est évidemment un événement très important. Politiquement, c'est la première fois qu'un État membre décide – en l'occurrence, par voie de référendum – de quitter l'Union européenne. Aux conséquences économiques s'ajoutent des conséquences politiques. L'effet de souffle peut, en effet, être extrêmement puissant sur d'autres États européens, comme à l'intérieur même du Royaume-Uni.

Du strict point de vue du commerce extérieur, d'abord, à court terme, rien ne change sur le plan juridique. Le Royaume-Uni reste membre de l'Union européenne. La France souhaite que les autorités britanniques notifient rapidement leur demande de sortie au titre de l'article 50 du traité sur l'Union européenne – ce choix leur appartient et, si nous souhaitons que cette notification soit faite rapidement, ce n'est pas dans un esprit répressif, c'est dans un souci de clarification. Deux séries de négociation commenceront dès la notification : d'une part, des négociations de sortie de l'Union européenne, dont le traité dispose qu'elles doivent être conclues dans un délai de deux ans ; d'autre part, des négociations sur les modalités d'association économique du Royaume-Uni à l'Union européenne, pour lesquelles aucun délai n'est fixé. Plusieurs scénarios sont possibles, mais la situation est inédite, les choses vont donc s'inventer au fur et à mesure. Selon un premier scénario, de forte intégration, le Royaume-Uni rejoindrait l'Espace économique européen, comme l'a fait, par exemple, la Norvège. Un autre scénario, intégré aussi, mais selon d'autres modalités, serait celui d'une adhésion du Royaume-Uni à l'Union douanière ; ce sont là les termes de l'association de la Turquie à l'Union européenne. Les accords commerciaux s'appliquent aux pays membres de l'Union douanière, mais sans qu'ils participent de quelque manière que ce soit aux négociations. Dans un troisième scénario, seraient conclus des accords de libre-échange avec le Royaume-Uni, comme c'est déjà le cas avec d'autres pays du monde. Dans un dernier scénario, aucun accord spécifique ne serait conclu et le Royaume-Uni serait considéré comme tout État membre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Tels sont les grands scénarios juridiques.

Nous tenons évidemment à garder des liens très étroits. C'est avec le Royaume-Uni que nous faisons notre premier excédent commercial : 14 milliards d'euros l'an dernier. Ce sont 30 000 entreprises françaises qui exportent vers le Royaume-Uni, lequel reçoit 8 % de nos exportations. Ces quelques chiffres illustrent bien l'étroitesse des liens qui existent. Nous aurons évidemment à coeur de suivre la question de très près.

À court terme, c'est au cours de la livre sterling que nous devons être le plus attentifs. C'est là que se situe l'impact, qui peut se transmettre par deux courroies. La première est le tourisme, avec les parités de pouvoir d'achat des Britanniques. Ceux qui avaient décidé de venir en vacances en France cet été reviendront-ils sur leur décision ? Nous suivons cela de près. La situation varie d'une région à l'autre, mais il peut y avoir un impact. La deuxième courroie est celle des exportations. Nous suivons aussi cela.

J'en viens aux exportations des PME, dossier auquel j'attache énormément d'importance et sur lequel je travaille beaucoup. J'ai organisé l'an dernier, au Quai d'Orsay, le premier forum des PME à l'international. La deuxième édition a eu lieu le mois dernier, toujours au Quai d'Orsay, avec encore plus de participants. Je me suis engagé dans un tour de France des PME exportatrices, avec ces forums des PME qui se mettent en place dans chacune des grandes régions, nouvellement créés ou issus de partenariats avec des forums préexistants qui fonctionnent déjà très bien. J'étais ainsi lundi à Vannes, où 1 400 entreprises bretonnes étaient présentes.

L'idée est, à chaque fois, de présenter notre feuille de route autour de la simplification. L'an dernier, les travaux étaient centrés autour de la simplification du dispositif. Il y avait beaucoup de travail, et il en reste, je le reconnais très volontiers. Business France, à la demande du Président de la République, est devenu réalité en moins d'un an, avec la fusion d'Ubifrance et de l'Agence française des investissements internationaux (AFII), pour lier exportations et attractivité du pays – cette même attractivité devra être envisagée au regard du Brexit. Nous avons énormément travaillé avec les douanes, qui sont engagées dans un plan de quarante mesures de simplification extrêmement apprécié des PME, notamment le guichet unique douanier, maintenant dématérialisé à plus de 95 %, dont des PME nous ont encore fait l'éloge. Nous travaillons aussi à la simplification du parcours à l'export. Pour la première fois, nous avons réussi à mettre en place un parcours cohérent pour les PME, qui articule les différents intervenants de l'accompagnement et permette à chaque PME de savoir à chaque étape à qui s'adresser. Tout cela donne de premiers résultats et en France et à l'international, avec les conventions signées entre Business France et les chambres de commerce et d'industrie (CCI).

Les VIE sont également très importants. Il y en avait 8 000 il y a deux ans, il y en aura 10 000 à l'horizon 2017. Ce dispositif représente une chance extraordinaire pour les jeunes qui en bénéficient et pour les entreprises qui l'utilisent. Pour que les PME y aient davantage accès, nous avons mis en place des formules de portage par les grands groupes ou de mutualisation entre PME. Cela commence à vraiment monter en puissance, et je ne saurais trop encourager les uns et les autres à y recourir chaque fois que cela leur semble opportun. Les PME sont vraiment l'objet d'une très grande attention. En la matière, nous pouvons parler d'une continuité, puisque c'est l'un de mes prédécesseurs, appartenant à une autre majorité, M. François Loos, qui avait inventé l'expression « chasser en meute ». C'est vraiment un travail de long terme qu'il faut mener, car nous sommes en retard, notamment par rapport aux Allemands. Cela suppose la structuration de filières liées à un grand groupe. Cela suppose aussi une montée en puissance des PME, pour qu'un plus grand nombre d'entre elles deviennent des entreprises de taille intermédiaire (ETI), mais cela implique des réformes qui ne dépendent pas de moi. C'est cet échelon, très robuste, exportateur, innovant, qui peut donner encore plus de force à une économie.

Un dernier mot, sur les chiffres du commerce extérieur. La situation est très dégradée, avec plus de 45 milliards d'euros de déficit l'an dernier. Certes, le déficit était supérieur à 70 milliards d'euros en 2011 et l'amélioration a été continue, mais elle procède largement de facteurs exogènes : le cours de l'euro et le prix de l'énergie. Cette année, la tendance sera sans doute à nouveau à la dégradation de notre solde, à cause non pas du ralentissement des exportations mais de l'augmentation des importations. Le début de reprise constaté se traduit en effet, dans certains secteurs, par une demande adressée à l'étranger ; mécaniquement, le déficit commercial s'aggrave. Il faut donc poursuivre tout le travail entrepris sur la compétitivité, c'est extrêmement important – mais le sujet ne relève pas de ma compétence.

En ce qui concerne les leviers d'action dont je dispose, j'ai été très heureux de l'augmentation du nombre d'entreprises exportatrices : de 2014 à 2015, il est passé de 121 000 à 125 000 ; 4 000 nouvelles PME se sont donc lancées à l'export. C'est très positif, d'autant que nous avons un retard à rattraper par rapport à l'Allemagne, qui compte trois fois plus d'entreprises exportatrices, mais aussi par rapport à l'Italie, qui en compte deux fois plus. Il s'agit d'un problème structurel de notre économie. Poursuivons le travail, en cohérence avec l'objectif que j'ai assigné à Business France : accompagner, de manière individualisée, 3 000 nouvelles entreprises à l'export.

Je suis à votre disposition pour tenter de répondre à vos questions.

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Monsieur le secrétaire d'État, les possibles conséquences politiques et économiques du Brexit nous interpellent. La France est l'un des rares pays européens dont le commerce extérieur avec le Royaume-Uni soit excédentaire – vous avez évoqué le chiffre de 14 milliards d'euros.

Je crains ainsi que la filière viticole française ne soit exposée à une hausse des prix sur son deuxième marché d'exportation. Certaines études évoquent une perte de marché, d'ici à 2019, de 200 millions d'euros, sur un total de 625 millions d'euros. Plus largement, quelles seraient les conséquences pour l'économie française d'une fermeture de ce marché à nos produits ?

En ce qui concerne le Partenariat transatlantique, le Premier ministre a récemment dénoncé les propositions formulées par les États-Unis. Quel est le point de vue du Gouvernement sur l'évolution des négociations ? Sont-elles à la hauteur des promesses formulées à leur ouverture ? Comment envisagez-vous leur avenir ? Si elles échouaient, le marché européen ne serait-il pas isolé et ne laisserions-nous pas la voie libre aux États-Unis pour définir l'ensemble du périmètre de futurs échanges internationaux ?

En ce qui concerne la diplomatie des terroirs, et la nécessaire protection des indications géographiques, l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques a été adopté il y a maintenant plus d'un an, au mois de mai 2015. Cinq ratifications sont nécessaires pour qu'il entre en vigueur. Cela vous semble-t-il envisageable à court terme ?

Un grand nombre d'appellations viennent d'être reconnues par la Chine, ainsi que des indications géographiques par le Canada. Ce mouvement est-il appelé à s'étendre ? Certains font effectivement valoir que les appellations à protéger restent nombreuses.

L'interprofession française de l'élevage et des viandes nous interpelle : le CETA ferait peser une menace immédiate sur la filière bovine française. Quel est votre sentiment ?

Comment le Gouvernement compte-t-il améliorer et augmenter le nombre de PME actives à l'exportation ? Où en sommes-nous de la mise en place de la simplification des procédures douanières et du guichet unique national ?

Vous avez été, avec M. Laurent Fabius, à l'origine de pôles d'excellence. Une discussion semble s'être amorcée sur la création d'un futur pôle d'excellence sur le nautisme et les ports de plaisance. Où en est ce dossier ?

Ma dernière question porte sur l'oenotourisme. En 2010, la France accueillait chaque année environ 7,5 millions de visiteurs dont 2,5 millions d'étrangers pour des séjours autour du vin. Le rapport remis par M. Michel Bernard, au mois de septembre dernier, révélait que notre offre dans ce domaine restait peu structurée par rapport celle des destinations concurrentes. Pourtant, grâce à un développement de l'offre et une réelle promotion, l'oenotourisme pourrait représenter près de 4 millions de visiteurs internationaux par an à l'horizon 2020. Quel sentiment vous inspirent les préconisations de ce rapport ? Quelles sont les actions déjà mises en oeuvre ?

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Avez-vous mesuré, Monsieur le secrétaire d'État, l'impact qu'aurait le Brexit sur nos échanges commerciaux avec la Grande-Bretagne ? Vous avez rappelé qu'elle représentait 8 % de nos exportations, et que c'était le premier excédent commercial français, notre commerce extérieur n'étant, pour le reste, pas en très grande forme…

Nous accueillons de nombreux touristes britanniques sur le littoral nord de la France, mais pas seulement là. Les Britanniques sont présents dans de nombreuses régions françaises. Quel sera l'impact du Brexit de ce point de vue ? Il a déjà des effets sur le tourisme en France, en raison du décrochage de la livre sterling.

Des chiffres récents ont montré que les investissements étrangers en France avaient baissé, alors qu'ils avaient augmenté de 20 % en Grande-Bretagne. Que va-t-on faire ? Quelles conséquences peut-on tirer du Brexit ? Comment rebondir et attirer de nouveau les investissements étrangers en France en faisant de notre appartenance à l'Union européenne un argument ?

Secrétaire d'État chargé des Français de l'étranger, vous n'avez pas dit un mot des 300 000 Français qui vivent aujourd'hui en Grande-Bretagne. Vous rendrez-vous sur place ? Les Allemands présents au Royaume-Uni ont reçu un message de Mme Angela Merkel. Les Français, eux, n'ont eu aucun message de M. François Hollande. Il serait grand temps que le chef de l'État ou vous-même vous rendiez à Londres, ou, du moins, que vous envoyiez un message à nos compatriotes, extrêmement inquiets.

En ce qui concerne le tourisme, l'image de la France et de Paris est très dégradée. Les professionnels, en particulier à Paris, sont aujourd'hui soucieux. C'est la conséquence de facteurs que nous ne maîtrisons pas, notamment les attentats, l'état d'urgence, la météo, mais aussi d'un certain nombre que vous devriez maîtriser. Je pense notamment à cette série de grèves qui a donné une image épouvantable de notre pays ou aux violences survenues au début de l'Euro, retransmises par toutes les chaînes de télévision d'Europe et du monde. Tout cela a tout de même contribué à dégrader l'image de Paris et de la destination France. Chargé de la promotion du tourisme, qu'allez-vous faire ? Ne faudrait-il pas des moyens exceptionnels pour rétablir l'image de la France à l'étranger ? Un « comité d'urgence économique » doit se réunir en juillet. Vous n'en avez pas parlé, mais que peut-on en attendre ? Quelles mesures allez-vous prendre avec M. Jean-Marc Ayrault pour essayer, si c'est possible, de réparer cette image très abîmée de la France à l'étranger ?

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Les filières agricoles françaises subissent depuis quelques années l'embargo russe. Certains pays européens, comme l'Allemagne et l'Espagne, ont identifié de nouveaux marchés, notamment pour la production porcine. Quelles actions le Gouvernement français a-t-il conduit pour identifier de nouveaux marchés qui puissent se substituer aux marchés perdus ? Malheureusement, nous sommes un certain nombre à craindre que les parts de marché perdues ne soient difficiles à reconquérir.

Comme je suis député de Bretagne, la question de l'agroalimentaire me préoccupe au plus haut point. Or j'observe que, dans l'ouest de la France, que ce soit en Normandie, en Bretagne, dans le Poitou, nos amis chinois investissent beaucoup dans la filière laitière, notamment dans la construction d'outils industriels. La France est reconnue comme un grand pays producteur de lait, notamment en raison des garanties qu'elle offre en matière de sécurité sanitaire et alimentaire, en termes de qualité des produits mis sur le marché et du point de vue du respect de l'environnement, sans parler la dimension sociale et sociétale. Nonobstant les réelles vicissitudes que la production laitière connaît actuellement en France et en Europe, la consommation mondiale va augmenter. J'aurais voulu connaître la stratégie de l'État, particulièrement en termes d'accompagnement des groupes privés et coopératifs dans leurs investissements et à l'export.

À propos du tourisme, vous avez notamment évoqué les attentats et la météo, mais vous avez fait fi des mouvements sociaux. Or l'image du pays, très moyenne, se dégrade. Nous donnons celle d'un pays qui a du mal à s'adapter et à avancer. Quel est votre point de vue ?

À l'issue d'une réforme territoriale annoncée comme une réforme d'envergure par le Premier ministre, M. Manuel Valls, au mois d'avril 2014, le tourisme est une compétence partagée. Quelle est votre stratégie pour développer cette compétence du côté des régions et assurer une certaine clarté ?

Vous avez annoncé une enveloppe d'un milliard d'euros pour accompagner la montée en gamme de l'offre touristique. Qui peut mobiliser cette enveloppe ? Les régions, les professionnels du tourisme, les opérateurs ?

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La semaine dernière, le Premier ministre a très clairement annoncé que la France ne voulait plus s'inscrire dans ces négociations sur le traité de libre-échange transatlantique, que nous allions nous désengager et que l'Europe ne devait pas aller plus loin. Qu'en est-il ? Les négociations sont-elles complètement arrêtées ? Ou ne s'agit-il que d'un effet d'annonce non suivi d'actes concrets ? Subissez-vous des pressions, par exemple sous la forme de menaces de mesures de rétorsion à l'encontre des productions françaises spécifiques ? Par le passé, certains fromages, certains vins ont pu en être victimes.

Vous vous en doutez, les relations avec Cuba me tiennent également à coeur. Or vous vous êtes fort impliqué, Monsieur le secrétaire d'État, pour développer les relations entre nos deux pays, notamment à la suite de l'accord signé avec le Club de Paris, le 12 décembre dernier. La totalité des intérêts de retard sont annulés mais Cuba doit rembourser intégralement un arriéré de 2,6 milliards de dollars. Parallèlement, la France s'est engagée à convertir 230 millions de dollars de dette pour accompagner des projets de développement à titre d'« effort bilatéral additionnel ». Qu'en est-il de ces investissements ? Et ce montant est-il uniquement dédié à de grands projets de modernisation que je qualifierais de lourds, ou bien peut-il servir à accompagner nos échanges commerciaux avec Cuba ? C'est l'Agence française de développement (AFD) qui doit gérer cela. Le Président de la République, lors de son voyage à Cuba, avait annoncé l'ouverture d'un bureau à La Havane. Où en sommes-nous ?

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Monsieur le secrétaire d'État, vous nous avez tous rassurés sur la consultation du Parlement sur la ratification du CETA, en tant qu'accord mixte.

Cela dit, quelles garanties ce traité offre-t-il sur le principe de précaution en matière sanitaire et environnementale ? Il crée un conseil de la coopération réglementaire, réunissant entreprises et administrations de l'Union européenne et du Canada. Cette coopération réglementaire vise à la convergence des normes, par harmonisation ou reconnaissance mutuelle. Or, inspiré, de ce point de vue, du droit de l'OMC et du droit américain, le CETA comporte très peu d'allusions au principe de précaution européen. N'ouvre-t-on pas aux entreprises et aux administrations un droit à réglementer, et donc à instaurer des normes moins contraignantes ?

Par ailleurs, les secteurs bovin et porcin redoutent beaucoup l'impact des contingents d'importation de 65 000 tonnes de boeuf et de 75 000 tonnes de porc dont bénéficiera le Canada, notamment sur les prix, même si cela représente peu dans l'Union européenne. Pouvez-vous nous rassurer ?

Enfin, les indications géographiques sont-elles suffisamment protégées par cet accord ? La reconnaissance des appellations d'origine protégées (AOP) est invoquée pour plaider en faveur du CETA : quelque 140 ou 150 AOP européennes reconnues par le Canada. Leur nombre total est cependant bien supérieur : ainsi, ce sont 1 300 appellations d'origine reconnues par l'Union européenne qui ne seront pas protégées dans le cadre du CETA. Par exemple, une seule des trois AOP de fromage de brebis françaises est protégée, discrimination qui semble contraire au droit européen et au règlement sur les AOP. Les producteurs de fromage lésés et leur organisation pourraient saisir la Cour de justice de l'Union européenne pour faire reconnaître leurs droits. Les indications géographiques sont-elles donc suffisamment protégées ?

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En ce qui concerne le TTIP, vous avez, Monsieur le secrétaire d'État, signalé que les instances européennes se réuniraient le 23 septembre prochain, mais, compte tenu du calendrier électoral américain et de l'ouverture, ensuite, d'un cycle d'élections au sein de l'Union européenne, jusqu'à quelle date pouvons-nous espérer parvenir à un accord ?

Vous avez signalé que la « reconfirmation de mandat » n'était pas prévue par les traités et n'avait pas de réalité juridique. Existe-t-il, cependant, un concept de « rebasage » du mandat de la Commission européenne? Autrement dit, est-il possible de revenir sur le mandat initialement donné ? Je vous le demande car le Brexit aura probablement des conséquences de ce point de vue : le poids relatif des pays plus attachés à la défense de la production agricole européenne pourrait être plus important que celui des pays plus sensibles au développement du commerce et à une vision plus libérale des échanges internationaux.

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Vous venez, Monsieur le secrétaire d'État, de confirmer que la Commission européenne a décidé, ce mardi 4 juillet, de proposer le CETA comme un accord mixte. Cela signifie qu'il sera soumis à la ratification des parlements nationaux. Apparemment, c'est une bonne nouvelle. Cependant, le communiqué publié hier par la Commission européenne indique que l'objectif est précisément que l'accord soit adopté rapidement. De plus, il est bien expliqué qu'il pourra être mis en oeuvre de manière provisoire dès le feu vert du Conseil européen – la suppression des barrières douanières pourrait donc être appliquée directement.

Je me pose donc quelques questions de bon sens sur la pertinence de cet accord et sur plusieurs points de la procédure qui est engagée. Ce traité remet en question le principe de précaution, véritable outil, au coeur de la législation européenne, pour faire respecter les normes environnementales et sanitaires, voire sociales. Or, dans une allocution prononcée le 17 mai dernier, vous avez précisé que vous seriez très attentif au respect des standards sociaux et environnementaux. Si le principe de précaution n'est pas intégré dans cet accord, il me semble difficile d'y parvenir. Enfin, ce traité fait peser un risque certain sur le secteur de l'élevage : près de 65 000 tonnes de viande en provenance des feedlots arriveraient sur un marché français déjà très affecté par la crise. Quant aux indications géographiques protégées, je m'associe aux questions posées par M. André Chassaigne, Mme Marie-Hélène Fabre et Mme Annick Le Loch.

Pour l'ensemble de ces raisons, nous avons besoin de réponses claires : sur quoi allons-nous être consultés ? Quand et comment le serons-nous ? Par ailleurs, si le Gouvernement exprime devant l'Assemblée nationale son désaccord sur le TTIP, quelle est la teneur réelle de ses interventions au niveau européen ?

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Je salue d'abord tout le travail effectué depuis 2012 sur l'attractivité de notre pays, sur notre diplomatie économique, sur le tourisme, sur notre diplomatie des terroirs, mais aussi le travail d'internationalisation des PME. Cette action, qui était tout à fait nécessaire, commence aujourd'hui à porter ses fruits.

Les entreprises exportatrices reçues hier par notre commission ont cependant souligné deux difficultés importantes. La première, évoquée par les trois entreprises entendues, est cet isolement, cette difficulté à s'adosser à de grands groupes ou encore, comme vous l'avez dit, à « chasser en meute », à travailler au sein des filières. Comment envisagez-vous ce problème ? La seconde tient aux coûts. Comment faire en sorte que ceux d'une entreprise qui se lance dans l'export soient réduits ?

Élue de l'Hérault, département anciennement rattaché au Languedoc-Roussillon et, désormais, à l'Occitanie, et terre très appréciée des Britanniques, je voulais savoir si vos services avaient déjà quelques chiffres de nature à rassurer les professionnels du tourisme. Des questions se posent à propos de la saison qui commence.

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Pour atteindre cet objectif, raisonnable, de 100 millions de visiteurs par an, pouvez-vous être plus précis sur le fonds d'investissement d'un milliard d'euros ? Ce n'est quand même pas très lisible pour les professionnels.

Ensuite, avez-vous avancé sur la question du prélèvement spécifique sur les visas, destiné à financer Atout France, dont le budget est quand même ridicule au regard de ses objectifs ?

Par ailleurs, a-t-on chiffré l'effet des problèmes de sécurité, des attentats, des phénomènes climatiques, des grèves ? L'année 2016 devait être celle des records, à cause d'un certain nombre d'événements tout à fait positifs pour notre pays. Peut-être le nombre des visas vous permet-il d'indiquer une tendance.

En ce qui concerne, enfin, les accords transatlantiques, je m'associe à l'inquiétude exprimée par tous mes collègues. Tout à l'heure vous avez été très précis, notamment sur la protection des produits identifiés, mais j'aimerais votre avis sur les produits non identifiés. L'origine des produits, les conduites d'élevage, les modes d'exploitation, la traçabilité sont un enjeu important pour l'Europe.

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Le Président de la République l'a dit : la France est favorable à l'ouverture de négociations entre l'Europe et l'Australie pour pouvoir investir et commercer plus facilement. Un accord entre la France et l'Australie me paraît d'autant plus nécessaire qu'il s'inscrirait dans une relation privilégiée entre les deux États mais aussi, à une plus grande échelle, entre l'Union européenne et l'Australie. La déclaration conjointe de partenariat stratégique entre la France et l'Australie de 2012 ou l'accord-cadre conclu en 2015 entre l'Union européenne et l'Australie ont réaffirmé ces liens qui nous unissent plus que jamais.

Le statut de puissance économique et commerciale de l'Australie, douzième puissance économique mondiale, deuxième produit intérieur brut (PIB) par habitant des pays du G20, justifie également un accord de libre-échange. L'Australie présente de nombreux atouts dont il s'agit de profiter le plus efficacement possible. Cependant, comme dans les négociations sur le TTIP et le CETA, nous devons rester vigilants sur certains principes essentiels pour notre agriculture et pour notre culture, comme la réciprocité, l'accès aux marchés publics et la transparence. Des négociations sur un accord de libre-échange entre l'Union européenne et l'Australie se sont ouvertes au mois de février dernier, mais pouvez-vous nous préciser votre point de vue, Monsieur le secrétaire d'État ?

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La Grande-Bretagne a choisi le Brexit parce qu'elle critiquait l'opacité du fonctionnement, le manque de transparence de l'Union européenne et, quand vous racontez les négociations sur le TTIP, nous avons l'impression que certains de ces arguments sont fondés. Le paradoxe est que le pays le plus favorable à ce traité était précisément le Royaume-Uni. Cela pose un petit problème logique, qui débouche, à mes yeux, sur un petit problème juridique. Le Royaume-Uni a un pied dedans, pour influencer des négociations avec les États-Unis, auxquels elle est très favorable. Cependant, lorsqu'elle aura quitté l'Union européenne, elle sera peut-être amenée à négocier un traité de libre-échange avec celle-ci. Et, puisqu'elle est favorable au TTIP, pourquoi ne pas imaginer qu'elle puisse un jour conclure un traité de libre-échange avec les États-Unis ? Juridiquement, comment articuler le fait que le Royaume-Uni pèse dans la négociation d'un traité auquel il ne sera peut-être pas partie avec le fait qu'il pourra être amené, dans quelques années, à négocier un traité de libre-échange avec l'Union européenne ? Quelle muraille de Chine permettra d'éviter un conflit d'intérêts ?

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Les parlements nationaux auraient donc, aux dernières nouvelles, à se prononcer sur le CETA, mais – car il y a un « mais » – seulement dans les domaines qui sont de la compétence des États, pas sur ceux qui sont de la compétence exclusive de l'Union européenne. Mais qu'est-ce qui est de la compétence exclusive de celle-ci ? Ce n'est pas très clair, même si la question est abordée par les accords de Marrakech et le traité de Nice. Seraient de la compétence exclusive de l'Union européenne les marchés publics et tout ce qui concerne l'agriculture, notamment indications géographiques et quotas, mais quid des services, de la culture, des données personnelles ? Pourquoi ne pas demander à la Cour de justice de l'Union européenne de se prononcer sur cette question très importante, d'autant que le CETA porte également sur les normes ? Le risque est en effet de donner le sentiment que les parlements nationaux n'auraient de pouvoir que sur des sujets mineurs. La question est d'autant plus importante que le CETA s'appliquera de manière anticipée, probablement dès 2017, et ce sans étude d'impact, dans les domaines de la compétence exclusive de l'Union européenne.

Par ailleurs, les entreprises des États-Unis qui ont des filiales au Canada pourront, dans le cadre de cette application anticipée, venir sur le marché européen aux conditions fixées par le CETA. Ne serait-ce donc pas un cheval de Troie des entreprises américaines ?

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Le 20 mai dernier a été adoptée, avec l'Acte de Genève, la révision du système d'enregistrement international assurant la protection des noms désignant l'origine de produits. La France a bien sûr cosigné ce texte. Depuis de longs mois, vous plaidez pour une meilleure reconnaissance de ces indications géographiques. La loi relative à la consommation a permis la création d'indications géographiques pour les produits manufacturés mais où en sommes-nous de ce point de vue au niveau européen, Monsieur le secrétaire d'État ?

Vous avez également évoqué la diplomatie des terroirs, pour la promotion des productions à l'international. Vous avez plaidé dans les instances européennes et internationales pour la reconnaissance des terroirs dans l'ensemble des accords commerciaux. Leur protection est un enjeu majeur pour la France et c'est bien sûr l'un des points clés de la négociation avec les États-Unis. Tout à l'heure, vous avez évoqué la stratégie de la France et le rendez-vous du 22 et 23 septembre. Pouvez-vous nous en dire plus sur ces sujets ?

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Les traités transatlantiques ne cessent d'inquiéter nos concitoyens. Il y a quelques mois vous aviez parlé d'asymétrie, de manque de réciprocité et d'absence de transparence des négociations à propos du TTIP. Il est vrai que ces traités constituent certainement des opportunités économiques, il faut savoir le dire, mais il est également vrai qu'ils menacent l'agriculture, en particulier l'élevage, déjà fortement malmené.

Je tiens, Monsieur le secrétaire d'État, à relayer les fortes inquiétudes exprimées dans mon département agricole de la Mayenne. Le CETA prévoit l'ouverture du marché européen à 65 000 tonnes de viande bovine canadienne produites au sein de parcs d'engraissement intensif. Il est indispensable de préserver l'agriculture française. Vous avez parlé de réciprocité et de diplomatie des terroirs – beau slogan ! –, d'indications géographiques protégées, mais s'il y a concurrence, il faut que ce soit à armes égales. Or les modes de production canadiens et américains sont bien différents des nôtres et les produits qui en sont issus, massivement exportés vers l'Europe, peuvent être fatals à nos éleveurs. Que compte faire le Gouvernement pour préserver nos agriculteurs et nos éleveurs et, surtout, pour enrayer quelque peu cette psychose générale ? Quelles informations leur donner qui leur ouvrent des perspectives économiques en cette période de crise agricole généralisée ?

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Monsieur le secrétaire d'État, nous vous avons vu ravi de participer à l'Open de l'international à Vannes. Vous avez vu quels moyens importants peuvent mobiliser une région et des chambres consulaires lorsque ces acteurs s'unissent au service de la performance à l'exportation. Pouvez-vous nous dire quelques mots des conventions conclues entre l'État et les régions par rapport à Business France ? Comment les choses peuvent-elles s'articuler au niveau national ?

Comme les prestations de Business France sont payantes, les petites entreprises n'y recourent pas forcément très facilement. Ne pourrait-on instaurer une sorte de droit de tirage, une facilité, d'une durée d'un an, pour leur permettre de plus aisément monter un dossier d'export ?

J'imagine que la question de l'accès aux marchés publics se pose avec une acuité particulière dans le cadre des négociations avec les États-Unis, notamment à cause des États fédérés, très respectueux du Buy American Act. Les négociations avancent-elles ? Nous savons aussi à quel jeu les États-Unis peuvent se livrer avec les réglementations. Compte tenu de celles appliquées par la Food and Drug Administration (FDA), une seule entreprise française vend de la charcuterie aux États-Unis, on ne peut pas vendre de pommes, etc. C'est une situation très particulière.

En ce qui concerne la cour de justice commerciale internationale que vous voulez mettre en place, certains juristes considèrent qu'il ne sera pas très facile de l'articuler avec la Cour de justice internationale de La Haye. Qu'en pensez-vous ?

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Vous avez reconnu tout à l'heure, Monsieur le secrétaire d'État, que le tourisme souffrait de divers maux, liés à une conjoncture particulière et à des facteurs extérieurs. Cependant, le problème est aussi structurel. Certes, vous vous êtes attelé à la tâche, mais on vous sent quelque peu frileux dans le domaine précis du numérique. Je songe notamment aux plateformes de location de chambres d'hôtel ou de chambres d'hôtes, qui pourraient se développer. La startup française Pilgo, dont les débuts sont prometteurs, pourrait bénéficier de votre soutien. Par ailleurs, vos services tendent à vouloir réglementer d'autres initiatives, moins hexagonales, comme Airbnb. Il s'agit quand même de veiller à ce que notre pays ait une image accueillante, notamment auprès des touristes asiatiques.

La question de la propreté dans les toilettes offre un exemple de cette frilosité à bien organiser les notations ou les plateformes d'échanges. Cela peut paraître anodin mais toute une série de pays mettent en place aujourd'hui des systèmes de notation. Pardon de le dire aussi crûment, mais la France a l'image d'un pays sale, notamment auprès des Asiatiques, en particulier des Japonais, très attachés à la propreté. Notre pays ne se distingue pas vraiment en la matière. En revanche, aux États-Unis, un petit logo sur la porte des restaurants renseigne sur la propreté des toilettes. Que comptez-vous faire ?

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Vous avez rappelé, Monsieur le secrétaire d'État, que la France était la première destination touristique du monde. Notre gastronomie renforce l'attractivité de notre territoire. Or qui dit gastronomie dit terroir, savoir-faire, circuits courts, mais aussi bons vins. Les circuits touristiques organisés dans les départements viticoles, dans le cadre des destinations « Vignobles et Découvertes », labellisées, offrent à tous ceux qui le veulent de découvrir le territoire, l'histoire, le patrimoine, des paysages, mais aussi des savoir-faire locaux, des produits. Indirectement, c'est toute une économie qui s'en trouve soutenue : l'hébergement, la restauration, les découvertes culturelles, les sports de pleine nature. La promotion de cette qualité, de ces produits du terroir est légitime.

Il y a cependant une contradiction. Dans le cadre de l'EuroBasket 2015, j'ai reçu une délégation de journalistes finlandais, à qui j'ai fait découvrir tous ces terroirs et tous ces circuits. Ils m'ont demandé comment la France, par la voix d'une ministre, pouvait stigmatiser autant le vin, en l'assimilant à des produits industriels ? Je m'interroge sur la cohérence des messages du Gouvernement. Je salue vraiment votre action en faveur des destinations, mais quel message envoyons-nous, dans le même temps, en disant « c'est mauvais pour la santé » ? Il faudrait rappeler à certaines personnes qu'une journée sans vin est une journée sans soleil – mais peut-être une journée sans sourire aussi...

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Je m'interroge sur la place des régions en matière d'exportations et de tourisme.

À juste titre, l'une des intervenantes auditionnées hier soir par notre commission trouvait anormal que l'aide à l'exportation fasse l'objet de politiques différentes d'une région à une autre ; c'est une rupture d'égalité entre les entreprises françaises qui cherchent à conquérir des marchés étrangers. Ne faudrait-il pas une certaine cohérence nationale en la matière ?

Par ailleurs, je m'interroge, à l'heure de ces grandes régions « XXL » sur l'articulation entre les comités régionaux du tourisme et les agences départementales du tourisme. En Alsace, les agences régionales, sur le périmètre des anciennes régions, sont maintenues, et viennent directement concurrencer les agences départementales, qui ont fusionné. Nous n'avons donc en rien réduit le millefeuille et nous nous trouvons toujours avec des structures en concurrence. C'est totalement illisible.

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L'agriculture est un volet majeur des négociations du Partenariat transatlantique sur le commerce et l'investissement. Le problème de la viande est au coeur des débats. La Commission européenne affirme que les accords de libre-échange actuellement négociés ne remettront pas en cause les standards de production agricole européens. Elle n'apporte cependant aucune garantie quant au maintien et à la reconnaissance des produits sous signe officiel de la qualité et de l'origine. La révision de l'Arrangement de Lisbonne a contribué à la reconnaissance de quarante-deux indications géographiques françaises supplémentaires dans le cadre du CETA, qui s'ajoutent aux vins et spiritueux déjà protégés depuis l'accord de 2003. Cependant, dans le cadre des négociations du TTIP, la question de la protection des signes d'identification de la qualité et de l'origine est renvoyée à un groupe de travail ultérieur. L'exclusion du secteur agricole du champ de l'accord ne serait-elle pas la seule garantie d'une protection efficace des productions sous identification géographique ? Pourriez-vous, Monsieur le secrétaire d'État, nous préciser votre ligne ?

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Monsieur le secrétaire d'État, vous avez dit souhaiter que le nombre de touristes accueillis en France passe de 80 à 100 millions et rappelé que notre pays était la première destination du monde. Le problème est que le touriste anglais qui se rend en Italie, le touriste allemand qui se rend en Espagne passent par la France et sont comptabilisés dans nos statistiques. Nous ne sommes pas la première puissance touristique mondiale en chiffre d'affaires, ni en valeur ajoutée : nous sommes derrière les États-Unis, derrière l'Espagne. Ne faudrait-il pas donner des chiffres vrais et parler vrai ? Vous l'avez d'ailleurs fait à propos du commerce extérieur.

Un point m'a toujours semblé un peu oublié. On parle souvent des retraités anglais dans le sud-ouest de la France, qui apportent beaucoup à l'économie française, mais la France ne devrait-elle pas développer une vraie politique d'accueil de retraités d'Europe du Nord, en s'appuyant sur sa ruralité, sur le nombre de propriétés disponibles, sur le nombre de terrains à bâtir ? Il y a là de la richesse et des emplois à créer.

Enfin, fusionner deux organismes peut être utile, mais, en soi, cela ne saurait être la finalité d'une politique publique : c'est un outil. En revanche, lors de l'audition, hier, de la directrice générale de Business France, nous avons noté que les dotations de l'État à cette agence avaient diminué de 17 % en quelques années. Voilà qui est une politique publique, aux conséquences absolument considérables ! Cet organisme verra-t-il encore ses dotations baisser ? Peut-il atteindre ses objectifs avec si peu de moyens ?

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Je poserai deux questions sur l'accueil touristique en montagne dans un contexte de concurrence internationale effrénée, alors que la France va perdre la première place mondiale à l'issue de la dernière saison hivernale. D'une part, la question du transfert des offices de tourisme aux intercommunalités suscite de vives inquiétudes, notamment dans les stations de ski de marque territoriale, qui se retrouveraient avec un office de tourisme intercommunal, dans la même intercommunalité que des stations concurrentes. Des dérogations sont à l'étude dans le cadre de l'acte II de la loi montagne, mais qu'en pensez-vous ? D'autre part, en ce qui concerne la réhabilitation de l'immobilier de tourisme, force est de constater que les mesures incitatives actuelles peinent encore à montrer leurs résultats. Que pensez-vous de l'application du dispositif de défiscalisation Censi-Bouvard en faveur de la réhabilitation de l'immobilier de loisir en lieu et place de l'immobilier neuf ?

Je souscris par ailleurs aux propos de ma collègue Michèle Bonneton : les entreprises françaises s'inquiètent de la possibilité pour les entreprises américaines établies au Canada d'accéder au marché français et d'être ainsi soumises à une moindre réglementation.

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Tout d'abord, une bien mauvaise nouvelle : nous ne sommes plus la première destination touristique du monde ! La Chine nous est passée devant. Cela ne nous empêchera pas de continuer à développer notre économie touristique.

Comme mon collègue Philippe Le Ray, j'aimerais des précisions sur la mobilisation de ce fonds de un milliard d'euros mis à disposition par la Caisse des dépôts et consignations.

Je veux aussi appeler votre attention sur deux problèmes que rencontrent les acteurs du tourisme en ce début d'été.

La première difficulté concerne l'application de la loi NOTRe et les offices intercommunaux. Plusieurs membres du Gouvernement sont intervenus à ce propos. Le premier, M. André Vallini, avait annoncé que les stations classées de tourisme en général bénéficieraient d'une dérogation. Ensuite, M. Jean-Michel Baylet est intervenu pour dire que ce ne serait le cas que des stations touristiques de montagne, mais cette catégorie n'existe plus aujourd'hui, il n'y a plus que des stations classées de tourisme. Nous ne savons donc plus à qui nous adresser pour faire en sorte qu'une dérogation s'applique vraiment le plus vite possible et que les préfets cessent les actions qu'ils mènent actuellement pour faire fermer des offices du tourisme de stations classées de tourisme – cela vaut pour le littoral mais aussi pour l'ensemble du territoire.

Le décret dit « plage » de 2006 préoccupe également beaucoup les élus du littoral méditerranéen, qui en demandent la révision. Il ne s'agit pas de la seule défense d'intérêts personnels des exploitants : il y va de notre économie et de l'emploi. Ce décret est bien trop restrictif, et nous vous demandons vraiment de nous soutenir pour qu'il puisse être révisé.

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Le secteur touristique est un pan important de l'économie réunionnaise, rassemblant 4 700 entreprises à la fin de l'année 2013, soit à peu près 9,8 % du tissu d'entreprises de l'île. Ces entreprises n'en sont pas moins réellement inquiètes aujourd'hui, plus précisément les agences de voyages.

J'ai été prévenu par le Syndicat national des agences de voyages (SNAV) des modifications contractuelles imposées par l'Association du transport aérien international – International Air Transport Association (IATA). À la mi-octobre 2015, elle a validé, à l'occasion de la dernière Passenger Agency Conference, l'instauration de nouvelles règles, de nouveaux critères financiers plus stricts, de délais de paiement raccourcis, sous couvert d'assainissement du secteur et de limitation du risque. Je cite TourCom : « Dans les faits, ce renforcement n'a rien à voir avec le risque de défaillance des agences, proche de zéro depuis des années. Il s'agit, en réalité, de la première étape d'une stratégie beaucoup plus vaste consistant à nettoyer et resserrer le marché autour de quelques grands monopoles ».

Ce durcissement des critères financiers, qui ne s'applique pas aux compagnies aériennes, risque de mettre en péril de nombreuses très petites entreprises (TPE) et PME. Je pense que ce problème concerne également toutes les agences de voyages de France. Le passage d'un paiement mensuel à un paiement bimensuel au Billing and Settlement Plan serait aussi un coup porté aux consommateurs, qui, de fait, n'auront plus droit aux facilités des paiements, et à la trésorerie des agences qui travaillent avec les collectivités locales, où les délais de paiement sont d'environ un mois. Ma question est simple : quelles mesures pourraient être prises pour accompagner ces entreprises, que ces récentes décisions mettent dans des difficultés qui pourraient être fatales à certaines d'entre elles ?

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Je ne reviendrai pas, Monsieur le secrétaire d'État, sur le comité d'urgence économique pour le tourisme. Je sais que vous êtes déjà mobilisé depuis plusieurs mois sur ce dossier. Il reste cependant beaucoup de choses à faire. Une question manifestement un peu récurrente est l'utilisation du fonds d'investissement d'un milliard d'euros de la Caisse des dépôts et consignations.

Nous étions ensemble il n'y a pas si longtemps en Bourgogne. Étaient évoqués des projets liés à l'oenotourisme, qui sont bien sûr prioritaires à mon avis, et permettent d'aménager le territoire. Je ne parlerai pas de la cité des vins de Beaune, mais pourquoi pas ? S'il reste un peu d'argent, c'est l'occasion de drainer sur des territoires une clientèle touristique, notamment étrangère, et peut-être d'augmenter le nombre de nuitées. Nous sommes en effet une destination importante mais nous sommes encore trop une zone de passage. Bien évidemment, si nous voulons développer l'offre touristique, il faut aussi permettre aux touristes étrangers de rester plus longtemps.

J'en viens à l'aménagement du territoire. Nous l'avons vu lors de l'examen du projet de loi pour une République numérique, nous sommes effectivement confrontés à des situations de concurrence déloyale. À cause d'organismes comme Airbnb, une vraie question se pose, qui concerne les pôles très denses. Les territoires ruraux, eux, demanderaient plutôt des aménagements comme celui-ci. Pourra-t-on éventuellement, dans le cadre d'une nouvelle politique touristique, définir la France des territoires et, dans ces conditions, avoir une vraie politique d'aménagement ? Les touristes, aujourd'hui, sont nécessaires, pour un développement homogène en France.

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Le Brexit sonne comme une heure de vérité pour l'économie européenne et les choix que les Européens devront faire au cours des prochaines années. La crise de l'acier, sur un autre continent, rappelle la concurrence déloyale de la Chine, avec une surcapacité de 300 millions de tonnes et un dumping social et environnemental qui menace des dizaines de milliers d'emplois européens. Se fait aussi jour une aspiration globale à de nouvelles régulations au XXIe siècle : la puissance publique instaurerait un devoir de vigilance des multinationales, pour la protection des droits humains. Elle veillerait à la transparence fiscale, pour que la vie économique se déroule sous le signe de la justice. Et puis la COP21 nous invite à une certaine sobriété pour garantir la survie des générations à venir, celles qui sont dans les cours de récréation aujourd'hui.

Ne devons-nous pas rompre avec cette mondialisation et cette croissance « Shadoks » ? Je ne sais pas si cela vous évoque quelque chose, Monsieur le secrétaire d'État, vous êtes jeune… Les Shadoks pompaient, pompaient, pompaient… ; c'était à l'image de l'absurdité d'un échange économique qui ne produisait pas de réel bénéfice. Ne sommes-nous pas face à une croissance et une mondialisation « Shadoks » ? L'urgence n'est-elle pas de refonder un projet européen ou, si j'en crois le Premier ministre, un projet des États-nations en matière d'économie, avec de nouvelles régulations ? N'est-il pas temps de marquer une pause, de nous interroger sur les implications d'une adoption du CETA par les parlements nationaux et sur les conséquences délétères de son application à titre provisoire ? Le moment n'est-il pas venu de refonder un accord européen avant même de signer quelque contrat transatlantique qui soit ? L'urgence n'est-elle pas la paix autour de la Méditerranée ? Des accords économiques ne devraient-ils pas plutôt nous lier au Maghreb et à l'Afrique, qui sont certainement pour l'Europe un champ de développement autrement porteur que celui dessiné par les traités que nous évoquons ?

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Le commerce extérieur est placé sous la tutelle du Quai d'Orsay. Ce transfert est inédit sous la Ve République et provoque des frictions entre administrations, Monsieur le secrétaire d'État, mais l'objectif est de mieux mobiliser notre réseau d'ambassades pour les entreprises et pour permettre la promotion de la marque France.

Comment s'est donc passé le transfert de tutelle entre Bercy et le Quai d'Orsay ? S'agit-il d'un véritable transfert ou d'une cotutelle ? Le secrétariat d'État au commerce extérieur est resté silencieux à propos du projet de constructions de deux réacteurs nucléaires à Hinkley Point, alors même que ce dossier aurait pu entrer dans son champ de compétence. Quelle est la clé de répartition des dossiers entre Bercy et le Quai d'Orsay ? Et le réseau diplomatique est-il bien adapté à la culture business ? De ce point de vue, je voudrais vous interroger sur le rôle des conseillers du commerce extérieur, dans le cadre de la nouvelle répartition des tâches entre Business France et les conseils économiques au sein des ambassades.

Enfin, un amendement proposé par notre collègue Monique Rabin, rapporteure spéciale de la commission des finances chargée du commerce extérieur, a été adopté en commission des finances lors de l'examen du projet de loi de règlement et d'approbation des comptes 2015, aux termes duquel le développement international de l'économie française et le commerce extérieur doivent être l'objet d'un « orange » budgétaire. Y êtes-vous favorable ?

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Monsieur le secrétaire d'État, je vous laisse le soin de répondre comme vous l'entendez à ces quelque vingt-six interventions.

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Matthias Fekl, secrétaire d'état chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger

Je souhaite vraiment répondre à chacun. Cependant, si cela vous convient, je ne répéterai pas ma réponse lorsqu'une question m'a été posée plusieurs fois.

Vous m'avez interrogé, Madame Marie-Hélène Fabre, sur l'impact du Brexit sur les filières viticoles, question qui relève de la prospective. Je ne suis pas partisan d'affoler les différents secteurs. À court terme, la situation est juridiquement inchangée. La baisse de la livre sterling depuis plusieurs années, plus forte encore depuis le Brexit, a un impact sur les exportations, mais il n'y a pas d'urgence juridique. Nous souhaitons que les choses soient clarifiées rapidement, mais, juridiquement, tout n'est pas bouleversé du jour au lendemain. Il faut regarder les choses à tête reposée. Nous suivons évidemment de très près la question, pour ce secteur comme pour tous les autres. Il faut être vigilants et nous sommes en contact avec les professionnels des différentes filières. Avec MM. Michel Sapin et Emmanuel Macron, après le Brexit, nous avons réuni la cellule de continuité économique. Elle se réunira autant que nécessaire. Le Gouvernement et l'ensemble de notre diplomatie économique sont totalement mobilisés.

Je suis longuement revenu sur le TTIP dans mon propos liminaire. La position du Gouvernement est extrêmement claire, elle n'a pas varié d'un iota depuis que j'ai l'honneur d'être chargé de cette question, et elle ne changera pas. Tout le monde a été d'une parfaite clarté, et tous ceux qui essaient d'instiller le doute, notamment du côté de la Commission européenne, soit n'ont pas bien écouté tout ce que j'ai dit dans l'ensemble des réunions, y compris à Bruxelles, depuis ma nomination, soit n'ont pas travaillé leurs dossiers, soit sont de mauvaise foi, soit sont entrés dans une nouvelle phase – tout le monde a maintenant compris que les négociations ne fonctionnaient pas bien, ce que j'ai été le premier à dénoncer dès l'année 2015, et ils seraient donc maintenant à la recherche d'un éventuel bouc émissaire à qui faire porter la responsabilité d'un éventuel échec. J'assume parfaitement le fait que la France a été la première à tirer la sonnette d'alarme dans ces négociations et à dire la vérité sur tout ce qui n'allait pas. S'il en est, dans le système, que cela dérange – et nous sentons effectivement un certain affolement ici ou là –, moi, cela ne me dérange pas. Ma position est constante, elle a été élaborée en lien permanent avec vous, parlementaires, et j'insiste sur le fait que les parlementaires de la majorité comme de l'opposition ont travaillé sur ce sujet à l'Assemblée comme au Sénat. Beaucoup de résolutions ont été adoptées à une très large majorité, parfois à la quasi-unanimité. Essayer d'enfoncer le coin est absurde. Je me suis efforcé de bâtir une position française cohérente qui puisse faire largement consensus. Et, à écouter les prises de position des principaux responsables de l'opposition, j'ai le sentiment que nous pouvons nous retrouver bien plus qu'il ne semble à première vue – que Bruxelles considère donc bien cela.

J'ai aussi élaboré cette position en lien permanent avec la société civile, les syndicats, les organisations non gouvernementales et les filières économiques, c'est-à-dire les représentants des entreprises, secteur par secteur. Encore hier, j'ai réuni au Quai d'Orsay le comité de suivi stratégique de la politique commerciale, qui réunit des parlementaires, dont certains d'entre vous, la société civile – syndicats, organisations non gouvernementales (ONG) – et les filières économiques. Personne, même dans le milieu économique, ne m'a dit que je faisais fausse route et qu'il fallait, en l'état, conclure l'accord, négocié dans des « conditions formidables ». Qu'on ne fasse donc aucun procès d'intention à la France, ni à moi, ni aux deux têtes de l'exécutif, ni aux différentes personnalités politiques qui se sont exprimées. Ce n'est pas acceptable et, chaque fois que la France sera attaquée sur sa position sur ce sujet, je répondrai comme je l'ai encore fait hier. Encore une fois, c'est une position sérieuse, qui répond à des valeurs, à des préoccupations démocratiques et citoyennes et aussi à des intérêts économiques bien compris, qui sont défendus dans cette négociation. Que les choses soient parfaitement claires. Pour ma part, je ne dévierai pas d'un iota de cette position. Nous suivons le dossier de très près, et nous considérons que nous avons des raisons très précises de poser nos exigences. Dès lors que cette position nous paraît juste, nous la défendons, et ce jusqu'au bout.

Je me suis également efforcé de travailler avec d'autres partenaires européens, en particulier l'Allemagne, en la personne de mon homologue et de celle du vice-chancelier Sigmar Gabriel. Avec ce dernier, nous avons encore récemment écrit à la Commission européenne pour rappeler un certain nombre de nos exigences ; cela concernait en particulier le processus de ratification du CETA. Que chacun considère attentivement la chronologie et le fond des prises de position : depuis bientôt deux ans, il n'y a pas eu de variation sur ce point. Je ne suis pas le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur qui viendra devant vous essayer de vous faire ratifier à tout prix un accord qu'il trouverait mauvais pour les intérêts économiques et pour la stratégie commerciale de la France. Je suis désolé d'être un peu solennel et dur sur ce point, mais cela me semble indispensable. Au vu de ce qui se passe par ailleurs en Europe, que chacun assume ses responsabilités. Un certain nombre de faits, y compris en Grande-Bretagne, confirment ce que j'ai écrit dans la stratégie du commerce extérieur de la France que j'ai tenu à présenter devant vous, au mois de décembre dernier – c'est la première fois qu'un tel document était présenté devant le Parlement. Je ne retire pas une ligne à ce texte, connu de tous. Que l'on ne vienne pas dire qu'il y a des changements de position, de la fluctuation ou de la « friture » sur la ligne. Tout cela, c'est n'importe quoi ! Je répondrai chaque fois qu'il le faudra, dans ce sens, à tous ceux qui pensent pouvoir faire les malins. Il n'y a pas à faire le malin là-dessus. J'entends que ces sujets sérieux soient traités avec sérieux.

Vous avez été très nombreux à m'interroger sur la diplomatie des terroirs, notamment sur la question des quotas de viande. Plusieurs professionnels m'ont écrit à ce sujet. Je sais que cela préoccupe les filières viande, particulièrement dans le contexte actuel, car leur situation est très compliquée. Les quotas de viande négociés avec le Canada ne sont pas négligeables, je ne prétendrai pas le contraire. Nous considérons cependant qu'ils peuvent être absorbés par le marché européen et national, à la condition que la Commission européenne soit très attentive à la question des quotas globaux, car plusieurs négociations en cours se juxtaposent. Je n'ai cessé de relayer l'idée qu'il fallait que les quotas globalement octroyés dans les différentes négociations respectent l'équilibre des marchés internes, français et européens. Le message est passé, la Commission européenne l'a entendu, en particulier pour les négociations en cours avec le Mercosur. Le président argentin, s'exprimant hier à Berlin, a ainsi insisté sur le fait qu'il voulait que la France bouge sur ces questions. Il a déploré l'attitude dure de notre pays sur ces questions agricoles, mais la France restera vigilante, et le Président de la République a été extrêmement clair lors de ses différents entretiens avec ses homologues, dans le cadre de visites d'État en Amérique latine au mois de mars dernier. La chancelière Angela Merkel a d'ailleurs confirmé que l'Allemagne suivrait elle aussi de très près ces questions agricoles. La diplomatie des terroirs, dans le cadre de la diplomatie économique, est donc totalement mobilisée sur la question.

Nous sommes également mobilisés pour une reconnaissance toujours plus forte des indications géographiques, qui méritent d'être protégées. Un pas très important a été fait avec la révision de l'Arrangement de Lisbonne pour améliorer cette protection : de nouveaux États sont entrés dans le dispositif et le nombre d'appellations et d'indications protégées est plus élevé. Nous continuerons d'y travailler, c'est une constante de notre diplomatie. La question justifie un travail de fond très important, de long terme, par-delà les alternances.

En ce qui concerne le nautisme et les ports de plaisance, nous sommes en train de bâtir une politique spécifique avec les professionnels du secteur. Lors de plusieurs déplacements, j'ai eu l'occasion de présenter à des professionnels étrangers ce qui existe en la matière – vous savez que nous avons pris toute une série de décisions. Cela fait partie des nouvelles formes de tourisme : slow tourisme, écotourisme, navigation fluviale. Des choses extraordinaires se font. J'ai fait plusieurs déplacements en France, et beaucoup de déplacements à l'étranger pour présenter cette offre, que nous continuerons à structurer. Je suis évidemment à votre disposition si vous souhaitez poursuivre cet échange sur ce point.

Avec M. Laurent Fabius, nous avons confié une mission sur l'oenotourisme au viticulteur Michel Bernard, qui a beaucoup travaillé avec les professionnels de la filière. Je sais que beaucoup d'entre vous sont mobilisés sur cette question, et s'inquiètent d'une possible contradiction entre la promotion du vin et un certain nombre d'autres règles. Le Président de la République avait pris l'engagement, à Vinexpo, de revenir à l'équilibre initial de la loi Évin, et c'est ce qui a été fait ; le Parlement y a travaillé, de manière transpartisane. L'équilibre actuel me semble bon, et je ne suggère pas de rouvrir le débat sur la loi Évin : ce serait la pire des choses, y compris pour le secteur viticole. Il faut faire de la prévention, lutter contre l'alcoolisme, faire de la prévention routière, mais cela ne signifie pas qu'il faille s'acheminer vers une société aseptisée où tout serait interdit. Je ne fais pas partie des membres du Gouvernement qui craignent d'être photographiés un verre de vin à la main. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de valoriser, avec un certain nombre d'entre vous, des destinations oenotouristiques. Ce sont des métiers magnifiques, ancrés depuis très longtemps dans notre pays, le vin est un produit de civilisation, et il doit être défendu comme tel. Je me suis ainsi rendu à Vinexpo, à Hong Kong, pour soutenir à la fois la filière vitivinicole et l'oenotourisme français. Le Président de la République a été le premier Président à se rendre à Vinexpo, à Bordeaux, pour inaugurer la manifestation. C'était un engagement extrêmement fort, y compris sur le plan symbolique, reconnu comme tel par les professionnels. Il a récidivé, si j'ose dire, en inaugurant, avec le maire de Bordeaux, la Cité du vin dans cette ville. Je sais qu'il y a d'autres projets, y compris en Bourgogne : évidemment, le Gouvernement regardera attentivement les différents aspects. Nous avons, par ailleurs, mis en place le site en anglais VisitFrenchWine, qui permet de recenser les différentes initiatives. Je vous invite à populariser ce site, porte d'entrée très forte sur l'oenotourisme français. Nous travaillons – mais cela suppose que les professionnels l'acceptent – sur la possibilité d'indiquer, le cas échéant, par une étiquette sur les bouteilles, que le domaine viticole est visitable, une étiquette dans la langue du pays où est vendue la bouteille : « Domaine visitable dans le cadre de VisitFrenchWine ». C'est tout simple, tout bête, mais redoutablement efficace. C'est une préconisation du rapport de M. Michel Bernard, qui me semble très opportune.

Nous n'avons pas de chiffres fiables quant à l'impact du Brexit sur le tourisme, mais nous avons quelques remontées, provenant de Bretagne. Les professionnels indiquent que beaucoup de réservations étaient déjà faites et prévoient plutôt une neutralité du Brexit de ce point de vue – c'est un sentiment, non une donnée chiffrée. Il est certain qu'il y aura un impact, c'est mécanique. Nous suivons donc évidemment cela d'extrêmement près, mais nous ne disposons pas d'outils pour agir sur le cours de la livre sterling. Nous souhaitons aussi, dans le cadre de la clarification rapide des relations du Royaume-Uni avec l'Union européenne, que la situation puisse se rétablir. Il est tout de même assez probable que la Grande-Bretagne, grande économie, rétablisse ses équilibres.

Nous sommes très mobilisés sur la question des investissements étrangers et de l'attractivité, mais nous souhaitons agir de manière élégante. Contrairement à d'autres pays qui ont pu se comporter ainsi chaque fois que la France connaissait des difficultés, nous ne sommes pas des vautours, et vous n'entendrez pas de déclarations fracassantes tous azimuts. Nous n'en examinons pas moins de très près, en lien avec Bercy, les moyens d'attirer des sièges sociaux dans notre pays et de tirer les conséquences du fait que le Royaume-Uni ne sera plus une porte d'entrée dans le marché commun. On ne peut être à la fois dedans et dehors. Bercy, le Quai d'Orsay et Business France sont donc mobilisés. La France est une très bonne porte d'entrée dans le marché européen parce que située au coeur de ce marché.

Pour cette même raison, elle est peut-être plus traversée que d'autres pays par le tourisme, je le reconnais très volontiers, et le Gouvernement ne propose pas de déplacer la France ailleurs en Europe. (Sourires.) Cependant, les touristes comptabilisés dans les statistiques passent au moins une nuit en France, et nous avons plutôt eu tendance à sous-évaluer leur nombre qu'à le surévaluer. Par exemple, pendant longtemps, l'outre-mer n'a pas été comptabilisé dans les chiffres du tourisme. C'est à la fois absurde et choquant : les outre-mer font pleinement partie de notre pays, ils attirent beaucoup de touristes, ils développent souvent des politiques touristiques très fortes. Nous travaillons d'ailleurs sur leur insertion dans leurs contextes régionaux respectifs, et nous essayons de bâtir sur cette base, entre les outre-mer et les pays étrangers qui leur sont proches, des destinations communes. J'ai eu l'occasion de le faire à Cuba et en Afrique du Sud. Monsieur Philippe Naillet, nous pourrons examiner la question pour La Réunion. Nous essayons d'y organiser un déplacement en lien avec des pays limitrophes, et nous pourrons regarder ensemble, avec tous les élus de terrain, comment avancer. Le travail sur l'insertion des outre-mer dans le contexte régional est prometteur, il y a là un potentiel.

À la demande de l'exécutif, notre ambassadrice à Londres est en contact permanent avec la communauté française. Elle a adressé, au nom de l'exécutif, des messages. Il s'agit d'informer sur la situation mais aussi de ne pas affoler tout le monde. Je le répète : juridiquement, aujourd'hui, la situation n'est pas modifiée. Elle le sera, et les droits de nos ressortissants au Royaume-Uni feront évidemment partie du paquet des négociations ; nous demanderons des protections et des droits extrêmement forts. Leur situation juridique va donc changer, mais pas du jour au lendemain. Cela laisse le temps de bien expertiser. La communauté française de Londres est effectivement une de nos toutes premières communautés d'expatriés : nous comptons 120 000 résidents londoniens inscrits au registre des Français établis hors de France ; il y en a sans doute 200 000 ou 300 000 au total. C'est une communauté très forte, très jeune, très dynamique, très mobile, et nous sommes très attentifs à cette question.

Beaucoup de choses sont faites pour la promotion du tourisme et l'image de la France. M. Jean-Marc Ayrault a décidé le lancement d'une campagne, notamment sur les réseaux sociaux, pilotée par Atout France. J'ai déjà réuni à plusieurs reprises des prescripteurs en matière de tourisme au Quai d'Orsay : des journalistes, des blogueurs, des tour-opérateurs. Je le fais lors de chacun de mes déplacements, pour aller directement vers ceux qui font les tendances et travailler avec eux. Par ailleurs, lorsque M. Laurent Fabius était au Quai d'Orsay, nous avons assoupli les politiques de visa, ceux-ci sont désormais délivrés en quarante-huit heures en Chine – bientôt en vingt-quatre heures. Plus d'un tiers des visas dans le monde sont désormais délivrés en quarante-huit heures. La grande mobilisation des consulats en la matière fait sentir ses effets : le nombre de touristes venant de certains pays a explosé.

Le comité d'urgence économique se réunira la semaine prochaine autour de M. Jean-Marc Ayrault. L'idée est de faire le point sur les résultats chiffrés à Paris et en Île-de-France. La situation y est plus compliquée qu'ailleurs, compte tenu des différents événements intervenus. Il s'agit de faire le lien avec les différents professionnels. Je me permets par ailleurs d'appeler votre attention sur un déplacement que je ferai à la rentrée, à Macao, car nous souhaitons évidemment nouer toujours plus de liens en matière touristique. S'y tiendra un grand forum touristique dont la France sera l'invitée d'honneur. Je souhaite pouvoir conduire la délégation la plus étoffée, la plus qualitative possible, sur tous les aspects de notre tourisme, à la fois les simplifications administratives, les différentes destinations – les contrats de destination et les différents territoires s'inscrivent dans ce déplacement à un niveau de représentation le plus élevé possible. Nous rencontrerons tous les décideurs chinois en matière de tourisme : investisseurs, décideurs politiques, des opérateurs, etc. C'est une opération très importante, que nous préparons activement. Je me permets de le dire parce que, dans les différents territoires, cela peut vraiment avoir un impact fort.

L'impact de la situation russe est très concentré sur certains secteurs, mais très fort. J'étais à Moscou il y a quelques semaines, pour faire le point. Il s'agissait à la fois de faire lever un certain nombre d'embargos qui ne nous semblent pas justifiés et de faire le point avec les autorités russes. C'est la France qui, avec l'Allemagne, est à l'origine du format dit « Normandie », et c'est nous qui avons rouvert les négociations avec la Russie. La France, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité, a pour vocation d'être le garant de la paix aux frontières de l'Union européenne. Elle suit donc de très près la situation en Ukraine. Elle tient à ce que toutes les parties – je dis bien : toutes – mettent en oeuvre l'accord de Minsk ; M. Jean-Marc Ayrault l'a encore confirmé très récemment. Il s'agissait aussi de discuter, d'échanger et de faire en sorte d'avancer. Nous souhaitons évidemment que les sanctions puissent être levées dans les meilleurs délais. Cela n'en suppose pas moins le respect des accords de Minsk. Il y a un certain nombre de questions essentielles qui se posent, aux portes de l'Union européenne. Nous travaillons aussi sur l'accès à des débouchés alternatifs, Monsieur Thierry Benoit – j'ai réuni au Quai d'Orsay des ambassadeurs de pays d'Asie, de pays du Golfe, en fonction des productions concernées. Nous avons déjà obtenu plusieurs levées d'embargo, notamment sanitaires, et vous savez que la France bénéficie maintenant, sur les viandes, du meilleur statut de risque possible à l'Organisation mondiale de la santé animale : le statut de pays à « risque négligeable » vis-à-vis de l'encéphalopathie spongiforme bovine. Dans plusieurs pays du Golfe, dans plusieurs pays d'Asie, il y a des débouchés très concrets. Nous travaillons étroitement avec M. Stéphane Le Foll.

Les investissements chinois dans le lait sont suivis de très près, car la question est sensible. L'État et Business France suivent chaque investissement, au regard de la sensibilité de la filière. Je suis à votre disposition, si vous souhaitez, que l'on regarde tel ou tel investissement précis.

Vous avez été nombreux à m'interroger sur le rôle des régions dans le tourisme ; il est indispensable. J'ai réuni hier, au Quai d'Orsay, les vice-présidents chargés du tourisme des différentes régions, qui allaient, par ailleurs, travailler à l'Association des régions de France (ARF), et j'ai rencontré la semaine dernière le président de celle-ci, M. Philippe Richert. La région est chef de file. C'est une compétence partagée, parce qu'il a été considéré que certains territoires avaient besoin de continuer à pouvoir se battre sur leur tourisme. Cela me paraît juste. Il faut un chef de file identifié, mais il ne s'agit pas non plus d'encourager des phénomènes de concentration, de métropolisation ou d'accentuation du caractère touristique de zones déjà touristiques. La stratégie française vise à ce que l'ensemble des territoires français bénéficient du tourisme, à la fois de grands sites réputés, mais aussi des territoires qui développent de nouvelles formes touristiques, plus tournées vers le tourisme familial, le tourisme de l'authenticité, l'oenotourisme, le slow tourisme, la navigation, le vélo, et qui répondent à des demandes très fortes. Huit Européens sur dix indiquent vouloir changer de rythme de vie. Ce type de tourisme participe à cela.

Je souhaitais réunir les nouveaux vice-présidents chargés du tourisme maintenant que les élus régionaux ont pris leurs marques, pour que nous avancions ensemble. Évidemment, sans les régions, rien ne peut se faire ; c'est une évidence. Ce niveau territorial est aussi un niveau d'impulsion. Quant au fonds de un milliard d'euros, c'est la Caisse des dépôts et consignations qui s'en occupe. Son directeur général présente le dispositif dans les régions, mais si vous le souhaitez, je peux organiser une réunion d'information avec lui, avec les professionnels et avec vous, parlementaires, pour que vous soient indiqués les critères d'éligibilité et précisés les différents aspects, pour que vous puissiez ensuite relayer l'information. Cela répondrait sans doute à une demande assez importante.

Monsieur le président André Chassaigne, j'ai passé quatre jours aux États-Unis récemment – c'était mon plus long déplacement depuis ma nomination. J'ai eu un très long entretien avec mon homologue, l'ambassadeur Michael Froman, représentant spécial du Président Barack Obama sur les questions de commerce. Ce fut un entretien très approfondi, très constructif. L'un et l'autre sommes fermes sur nos positions, mais le ton n'était absolument pas aux menaces. Dans ces négociations, chacun défend un certain nombre de principes et d'intérêts, mais je suis le premier à considérer que nous avons besoin de négocier beaucoup de choses avec les États-Unis. Les Américains sont des partenaires très forts pour la France : en matière diplomatique, en matière de lutte contre le terrorisme, en matière économique. De très nombreuses entreprises américaines travaillent ici, 450 000 emplois ont été créés en France par des entreprises américaines. De très nombreuses entreprises françaises travaillent aux États-Unis dans tous les domaines, et près d'un demi-million d'emplois ont été créés là-bas aussi. Il faut cependant que ce soient de bonnes négociations, des négociations d'avenir, qui intègrent les nouveaux sujets : l'environnement, les droits sociaux, les règles, la sécurité. C'est cela qui est en jeu. Quand les négociations se passent mal, je le dis et le déplore, mais il ne s'agit pas dire que nous ne négocierons plus jamais rien avec les États-Unis. Ce serait absurde, et ce serait une faute, mais il faut tenir fermement sur nos positions. C'est ce que les États-Unis font, c'est ce que nous faisons aussi.

Merci, Monsieur André Chassaigne, pour les propos élogieux que vous m'avez adressés en évoquant Cuba. Nous y avons consacré beaucoup de temps parce que le moment est historique. Je suis le premier membre d'un gouvernement occidental qui se soit rendu à Cuba après les annonces américano-cubaines de levée d'embargo et M. François Hollande a été le premier chef d'État à s'y rendre, au mois de mai dernier. Nous avons négocié avec le Club de Paris un accord tout à fait substantiel d'allégement de la dette, avec un mécanisme « allégement de dette contre projets » – pour résumer. J'aurai l'occasion de me rendre au cours des prochains mois à Cuba pour constater les progrès, pour installer la commission mixte économique qui examinera les différents dossiers et pour vérifier que l'accord de Paris est respecté et que les projets sont au rendez-vous. Il y a déjà beaucoup d'entreprises au travail, dans la construction, dans le bâtiment, dans le tourisme, dans différents secteurs, y compris la santé, l'agriculture. Un certain nombre sont emblématiques. Il s'agit de construire, à un moment où Cuba souhaite diversifier ses relations économiques, pour ne pas être du jour au lendemain dépendant économiquement d'un seul pays, voisin, légèrement au Nord… Les opportunités sont fortes, la concurrence européenne aussi, mais nous avons répondu présents. Nous avons étoffé notre service économique et nous avons installé le bureau de Business France à Cuba. La diplomatie économique travaille donc là-bas de manière extrêmement sérieuse, mais je sais que le président du groupe d'amitié que vous êtes, qui était de la visite d'État, suit cela de près.

Madame Annick Le Loch, le Gouvernement considère que le principe de précaution n'est pas remis en cause par l'accord avec le Canada. J'ai reçu, la semaine dernière, un rapport d'experts mandatés par une ONG, Foodwatch. Nous sommes en train de regarder cela, évidemment. Un certain nombre de droits, de préférences collectives sont respectés. La reconnaissance par le droit de l'Union européenne et de la France du principe de précaution et leur droit à le faire appliquer ne nous semblent pas remis en cause.

Monsieur Antoine Herth, il n'y a pas de date limite pour trouver un accord. Simplement, il y aura un rendez-vous important en septembre, à Bratislava. Ce qui est sûr, c'est que certains voudraient conclure hâtivement, mais j'ai toujours dit qu'un accord rapide serait un accord mauvais pour la France, parce que toutes les demandes françaises nécessitent de longues négociations. Nous sommes exigeants, nous ne souhaitons pas un accord à tout prix ni un accord au rabais. Nous avons des demandes très précises, élaborées avec les filières économiques.

Je le répète, il n'y a pas de « reconfirmation » de mandat. Dans le droit européen actuel, le mandat ne peut pas non plus être retiré. Les États donnent mandat à la Commission européenne, qui négocie et revient avec un projet d'accord, puis les États l'acceptent ou le refusent. Politiquement, il est évident que, lorsque certains États demandent la fin d'une négociation, personne n'imagine de continuer à négocier – certains États comme la France plus que d'autres, c'est la réalité, même si on peut le regretter sur le plan des principes. La réalité politique est donc distincte de la réalité juridique. Je suis en train de réfléchir, par ailleurs, à un processus de réactualisation des mandats. Un certain nombre de négociations se fondent sur des mandats qui ont dix ou quinze ans, alors même que les réalités économiques des pays ont changé. Il faudrait envisager soit la caducité des mandats en l'absence d'accord au bout d'un certain nombre d'années, soit une obligation de réactualisation.

Je m'exprimerai bientôt sur les propositions françaises de remise à plat de la politique commerciale européenne. Il y a beaucoup à faire. La stratégie du commerce extérieur que nous avions élaborée et qui a fait l'objet d'un débat parlementaire comportait beaucoup de propositions, mais le Brexit confirme qu'il est urgent de retravailler beaucoup de sujets ; je ferai donc des propositions.

Les parlements seront consultés sur le CETA, c'est incontestable et c'est maintenant – enfin – officiel, y compris du côté de la Commission européenne. Nous en avons discuté hier dans le cadre du comité stratégique de suivi, et je peux vous adresser une note très précise, secteur par secteur, précisant ce qui concerne le niveau européen et ce qui concerne le niveau national. Je suis même disposé à rendre publique cette note sur la page du site internet du Quai d'Orsay que j'ai mise en place pour rendre compte des négociations commerciales internationales.

Je pense avoir été suffisamment clair sur ce qu'on dit à Paris et ce qu'on dit à Bruxelles. Tous les verbatim sont disponibles, et personne ne peut prétendre découvrir la position française. Je renvoie ceux qui font semblant à mes interventions du 27 septembre 2015 et à tout ce qui a précédé. Ils liront noir sur blanc exactement ce que le Président de la République et le Premier ministre ont reconfirmé encore récemment. Pas de mauvaise foi ni de jeu politicien en la matière : c'est pénible et désobligeant et ce n'est pas sérieux !

Comment favoriser encore l'exportation des PME ? Une feuille de route est en place. De nombreuses régions sont également en train de regrouper leurs opérateurs, et les grandes régions joueront un rôle leader.

J'étais en Bretagne lundi. Il y a là un modèle qui fonctionne, parce que tout le monde a joué le jeu. Autour de la région et de l'opérateur régional, les chambres consulaires, les conseillers du commerce extérieur de la France, les différents intervenants ont décidé de travailler ensemble, laissant un peu de côté leur ego et leurs préoccupations propres. Cela fonctionne bien dans beaucoup d'autres régions. Il faut vraiment « y aller » ensemble ; vu la gravité de la situation, nous ne pouvons nous permettre des querelles intestines, parfois picrocholines. J'examine la question pays par pays, région par région, mais ce n'est pas l'État qui va décréter pour les régions ce qui doit être fait, ce n'est pas du tout l'esprit de la loi NOTRe. Chacun doit assumer sa part du travail.

Monsieur Philippe Le Ray, vous avez été rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur les crédits de la mission « Tourisme ». Le prélèvement spécifique sur les visas abonde le budget d'Atout France de 5 millions d'euros. La question des recettes d'Atout France est évidemment importante, mais la question des recettes de Business France a aussi été posée. Que nous aurait-on dit si, après une fusion, nous avions augmenté les budgets ? Que nous aurait dit l'opposition, Monsieur Laurent Furst ? On nous aurait accusés de nous moquer du monde : « Vous avez procédé à cette fusion en annonçant que cela permettrait des économies et, ensuite, vous augmentez les budgets ! Vous n'êtes pas respectueux, et, d'ailleurs, nous proposons, nous, de réduire deux, trois, quatre, cinq fois plus la dépense publique que vous ! ». Il faut être un brin cohérent, mais les Français sont souverains et nous verrons quel est leur choix. Simplement, nous attendons de connaître, très précisément, ce que vous augmenterez et ce que vous diminuerez, en matière d'export mais aussi en ce qui concerne toute une série d'autres services publics qui intéressent les Français. Quand on lance des polémiques, il faut les assumer jusqu'au bout, et regarder les implications jusqu'au bout. Un certain nombre de vos collègues proposent purement et simplement la suppression de Business France. Soit il faut augmenter les recettes, soit il faut supprimer ! Mettez-vous au moins d'accord sur ce sujet, cela donnera beaucoup de lisibilité à ceux qui travaillent sur l'export.

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Pour les débats internes, nous prenons exemple sur la majorité ! (Sourires.)

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Matthias Fekl, secrétaire d'état chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger

Un point pour vous ! (Nouveaux sourires.)

Madame Jacqueline Maquet, en tant que présidente du groupe d'amitié France-Australie, vous suivez de très près la question de l'accord de libre-échange. Il est possible qu'un mandat soit donné au début de l'année prochaine. Des contrats très importants avec l'Australie ont été annoncés récemment, notamment en matière de défense ; le ministre de la défense est extrêmement mobilisé. Nous serons attentifs aux sensibilités et aux points offensifs et défensifs classiques de la France dans ces négociations, en particulier en matière agricole – avec l'Australie comme avec la Nouvelle-Zélande, les enjeux sont très importants.

M. Julien Aubert a raison sur la question de l'influence du Royaume-Uni. La France, par la voix du Président de la République, a dit vouloir une clarification rapide. On ne peut pas être à la fois dedans et dehors. Je le répète, à court terme, juridiquement, rien n'est changé, mais il faut une clarification rapide. Nous devrons examiner comment le Royaume-Uni sera associé à l'Union européenne – je vous ai indiqué les différents scénarios envisageables. Par ailleurs, mais je m'exprime à titre personnel, je crois qu'une fois le Royaume-Uni sorti de l'Union européenne, les hauts fonctionnaires britanniques n'auront plus leur place dans les institutions communautaires – je parle de ceux qui ont un pouvoir de décision ou une influence sur la décision. Il n'est pas possible d'être dedans et dehors, c'est comme dans un gouvernement, il faut être extrêmement clair. Il n'est pas possible d'être dehors et de conserver une influence substantielle sur les décisions qui seront prises. Il faudra aller au bout de la logique du Brexit, non dans un esprit revanchard ou punitif mais dans un esprit de cohérence. Je suis en désaccord, à ce propos, avec les prises de position récentes du président Jean-Claude Juncker, mais je ne parle que des fonctionnaires britanniques qui ont un pouvoir de décision ; la situation des autres est évidemment différente.

Nous verrons quel est l'avis de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) sur l'accord de libre-échange avec Singapour. Ce qui est sûr, c'est qu'une remise à plat des politiques européennes est nécessaire, y compris des différents processus d'élaboration et de validation. Il y a un problème quand toute politique commerciale de l'Union peut être bloquée sur n'importe quel accord. Il y a là un véritable enjeu de crédibilité de l'Union européenne sur la scène commerciale internationale, mais la question ne peut être réglée en sortant, au détour d'un accord, les parlements nationaux du processus de validation. Il faut que les différents lieux de représentation démocratique soient associés dès le début des négociations et même dès la fixation du mandat, et tout au long du processus. Je réfléchirai à des propositions avec mes homologues européens, mais les choses ne peuvent se faire en catimini. Cela doit se faire sur des bases solides, rigoureuses, sérieuses, respectueuses de la démocratie.

Je suis en lien direct avec beaucoup de filières agricoles, qui m'interpellent et qui suivent ces questions. Elles ont reconnu que les questions agricoles étaient l'objet d'un suivi très précis et très rigoureux. J'y travaille en lien avec M. Stéphane Le Foll.

En ce qui concerne le Buy American Act, l'analyse française est que les États-Unis ne souhaiteront pas bouger sur ce sujet, symboliquement très important pour eux. C'est par ailleurs respectable, et il serait souhaitable qu'un Buy European Act puisse aussi être mis en oeuvre. Réciprocité, lucidité, sur ce qu'est la mondialisation et réalisme : nous avons beaucoup à gagner, nous avons aussi beaucoup à perdre. Ne soyons pas naïfs. Prêcher naïvement et de manière dogmatique le libéralisme sans regarder la réalité du monde d'aujourd'hui, avec un capitalisme financiarisé et des dérives oligarchiques à tous les étages de l'économie mondiale, c'est ne pas regarder la réalité en face.

Monsieur Dominique Potier, vous avez fait un certain nombre de remarques à ce propos. Ne soyons pas gentils et naïfs, car cela se paye, dans les filières économiques, dans les régions, au niveau de l'emploi et, ensuite, avec un vote extrémiste à force de détresse. C'est aussi ce que nous avons vu récemment, avec un certain nombre d'événements en Europe. Chacun doit vraiment être lucide.

Nous regardons comment pourrait s'articuler la cour de justice commerciale internationale que nous appelons de nos voeux avec la Cour de La Haye, qui est une institution du droit international public. Ce qui est sûr, c'est que la France veut bâtir une cour de justice commerciale internationale multilatérale. Un premier jalon est posé avec le Canada. C'est vraiment un tournant dans le droit commercial : pour la première fois un État accepte cela – le Vietnam l'a également fait. Sur cette base, nous pouvons bâtir une cour qui, à terme, sera multilatérale et gérera les 3 600 accords qui existent dans le monde en matière d'arbitrage privé. Cela prendra évidemment du temps, mais la diplomatie française a fait une proposition très offensive, innovante, volontariste, réaliste, pour remettre des règles dans la mondialisation, remettre du choix démocratique. Nous espérons évidemment que cela puisse voir le jour.

Dans le numérique, il n'y a aucune frilosité. C'est même l'un des axes des Assises du tourisme portées par le Quai d'Orsay. Nous travaillons étroitement sur la question. Simplement, nous souhaitons de l'équité, de la réciprocité dans les différents échanges. On ne peut nous dire d'un côté qu'il faut respecter les hôteliers et de l'autre qu'il faut tout ouvrir sur le numérique. Il faut être raisonnable sur ces deux piliers, que le tourisme classique aille sur le numérique, et c'est ce qu'il fait, et, par ailleurs, que les autres respectent les règles. La loi a posé des critères qui me semblent extrêmement intéressants, et c'est un secteur en grand mouvement. J'ai même indiqué que nous ne pourrions pas atteindre nos objectifs sans le secteur du numérique et les évolutions en cours. Nous suivons cela précisément.

Quant à la propreté d'un certain nombre de lieux, je suis preneur de toute réflexion susceptible de nous éclairer. N'hésitez donc pas, Madame Sophie Rohfritsch, à adresser une note au Gouvernement. Elle sera lue attentivement.

J'ai répondu sur l'oenotourisme. D'après les sondages, les raisons de venir en France sont, d'abord, culture et patrimoine et, ensuite, gastronomie et vin. Je soupçonne un peu d'hypocrisie dans l'ordre des préférences, mais, après tout, cela va ensemble.

Votre proposition sur l'accueil des retraités est très intéressante, Monsieur Laurent Furst. Sur ma proposition, le Premier ministre a confié à votre collègue Christophe Bouillon une mission sur le tourisme des seniors. Il aura donc à coeur, très certainement, d'aborder sur ce sujet, qui peut paraître anecdotique mais ne l'est pas du tout ; vous avez raison de le souligner. Nous attendons avec beaucoup d'impatience les conclusions de M. Christophe Bouillon.

Nous avons débattu dans l'hémicycle de la question des intercommunalités. Nous cherchons les bonnes formules, notamment en montagne, où se rencontrent des situations très spécifiques. Nous examinons la question très attentivement, en lien avec les parlementaires qui se mobilisent par rapport à cette question des stations classées et des intercommunalités.

Évidemment, l'oenotourisme, nouvelle forme, extrêmement offensive, de tourisme, doit être valorisée. C'est l'excellence française qui est en jeu. Les vins et les spiritueux sont par ailleurs l'un de nos principaux excédents commerciaux, juste après l'aéronautique. Nous sommes en train de mettre au point une mesure – après la mesure en Airbus, la mesure en Rafale, une mesure en fûts ou en bouteilles.

Monsieur Dominique Potier, vous suivez de très près la crise de l'acier. Avec le ministre de l'économie, nous sommes mobilisés sur la réciprocité, en cette matière comme en d'autres, sur les instruments de défense commerciale. Vous avez raison, il s'agit d'une vision de la mondialisation. C'est pour cela que la France défend maintenant dans les négociations commerciales l'idée que les accords commerciaux doivent comporter des clauses environnementales et sociales de même effet juridique que les stipulations de droit commercial. Tout cela va ensemble. Il faut construire une cohérence de notre diplomatie : la COP21 et les différents accords qui suivent doivent former un ensemble cohérent. Conclure l'accord de Paris n'a aucun sens s'il s'agit de le détricoter ensuite par d'autres accords. Le Président de la République a confirmé, lors de la Conférence environnementale, que la France ne signerait désormais que des accords commerciaux dans lesquels le droit environnemental était considéré au même titre que le reste. Et nous défendons l'idée, chère à plusieurs ONG, que le droit environnemental puisse être invoqué devant les mécanismes d'arbitrage d'État à État – qui n'ont rien à voir avec l'arbitrage évoqué précédemment – et donc être opposables et contraignants.

Sincèrement, Monsieur Jean-Luc Laurent, en matière d'administration du tourisme et du commerce extérieur, il y a eu des frictions au départ, mais elles ne me semblent vraiment plus d'actualité. Les directions de Bercy et du Quai d'Orsay travaillent étroitement ensemble, et je veux les en remercier. Hier, j'étais à la réunion sur les contrats de destination organisée par la direction générale des entreprises ; c'était une réunion intéressante, d'une portée opérationnelle tout à fait réelle. Vous savez que M. Jean-Paul Huchon mène en ce moment une réflexion sur la gouvernance en matière de tourisme. Ce sera toujours un sujet interministériel, et il y aura toujours différentes compétences à mobiliser. Il faut donc avancer, mais la conférence annuelle sur le tourisme, à la fin de l'année, est aussi un rendez-vous de mobilisation de tous les acteurs publics et privés en la matière.

Le dossier d'Hinkley Point est suivi par le ministre de l'économie. Je suis l'ensemble des sujets, mais il suit cette question de très près. Il n'y avait absolument aucune raison que je m'exprime de manière différente sur ce thème. Le dossier est suivi par Bercy et le Gouvernement de très près et très précisément, et notre diplomatie économique est cohérente. Nous n'avons pas à prendre des positions contradictoires sur les différents sujets, mais si vous souhaitez des précisions sur tel ou tel aspect, nous sommes évidemment l'un comme l'autre à votre disposition.

Pardon d'avoir été trop long. Je suis à votre disposition chaque fois que vous le souhaitez.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous voyagez trop, mais il est vrai que des rendez-vous extrêmement réguliers nous conviendraient. En tout cas, merci pour vos réponses, complètes. Prenons rendez-vous pour la rentrée, peut-être à votre retour de Macao.

Permalien
Matthias Fekl, secrétaire d'état chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger

Très volontiers.

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 6 juillet 2016 à 9 h 30

Présents. – Mme Brigitte Allain, M. Frédéric Barbier, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, M. Philippe Bies, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. André Chassaigne, M. Jean-Michel Couve, M. Yves Daniel, Mme Fanny Dombre Coste, Mme Corinne Erhel, Mme Sophie Errante, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Fasquelle, M. Laurent Furst, M. Daniel Goldberg, M. Jean Grellier, M. Antoine Herth, Mme Laure de La Raudière, M. Jean-Luc Laurent, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Jacqueline Maquet, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Kléber Mesquida, M. Philippe Naillet, M. Hervé Pellois, M. Dominique Potier, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. Éric Straumann, M. Alain Suguenot, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Fabrice Verdier

Excusés. – M. Damien Abad, M. Bruno Nestor Azerot, M. Jean-Claude Bouchet, M. Dino Cinieri, Mme Jeanine Dubié, Mme Pascale Got, M. Thierry Lazaro, M. Serge Letchimy, M. Bernard Reynès, M. Thierry Robert, M. Lionel Tardy, M. Jean-Marie Tétart, Mme Catherine Troallic, M. Jean-Paul Tuaiva, Mme Catherine Vautrin

Assistaient également à la réunion. – M. Julien Aubert, M. Guillaume Chevrollier, M. Christophe Léonard, Mme Sophie Rohfritsch, M. Jean-Pierre Vigier