Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du 26 septembre 2012 à 9h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a organisé une table ronde sur la prise en compte des enjeux d'aménagement du territoire par les administrations publiques, avec la participation de M. Emmanuel Berthier, délégué interministériel à l'aménagement du territoire (DATAR), de M. Guy Waiss, chef de service, adjoint au directeur général de l'enseignement scolaire (ministère de l'Education nationale), du lieutenant-colonel Sylvain Renier et du chef d'escadron Frédéric Poisot (Direction générale de la Gendarmerie nationale, ministère de l'Intérieur), de M. Jean-Bernard Kovarik, adjoint au directeur général des infrastructures, des transports et de la mer (ministère de l'Ecologie, du Développement durable et de l'Energie), de Mme Véronique Malbec, directrice générale des services judiciaires, et de Mme Nathalie Recoules, sous-directrice de la performance et des méthodes (ministère de la Justice), et de M. Daniel Lenoir, directeur général de l'Agence régionale de santé du Nord-Pas-de-Calais.

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Je vous souhaite à tous la bienvenue pour cette table ronde, la première d'une série que la Commission a décidé d'organiser sur les sujets relevant de sa compétence, à savoir le développement durable et l'aménagement du territoire. Nous traiterons donc aujourd'hui de la façon dont les administrations publiques prennent en compte les enjeux de l'aménagement du territoire.

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Rappel au règlement, fondé sur l'article 58-1 !

Le groupe UMP salue bien sûr l'organisation de cette table ronde, mais j'appelle votre attention, monsieur le président, sur le fait que depuis le début de la nouvelle législature, nos conditions de travail ne cessent de se dégrader.

Hier, nous étions dans l'hémicycle, de quinze heures à près de trois heures du matin, pour examiner le texte relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement. Ce matin, après un petit déjeuner de travail, nous participons à cette table ronde. À quinze heures, nous rejoindrons l'hémicycle pour terminer l'examen du texte sur le foncier et commencer celui de la proposition de loi relative à la tarification progressive de l'énergie, qui concerne également très directement notre Commission.

Vous conviendrez, monsieur le président, que ce rythme, qui s'apparente à de la précipitation, n'est pas compatible avec un travail de qualité digne du Parlement français. C'est pourquoi je vous demande, au nom de mon groupe, de faire part de ma remarque en Conférence des présidents.

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Je n'y manquerai pas. Il est vrai que notre rythme de travail est particulièrement soutenu.

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Emmanuel Berthier, délégué interministériel à l'aménagement du territoire

C'est avec enthousiasme que nous avons répondu à votre invitation, la prise en compte de l'aménagement du territoire par les administrations publiques étant le coeur de métier de la DATAR.

Sur le sujet, le Gouvernement a innové dans son organisation : Mme Cécile Duflot a été nommée ministre de l'égalité des territoires et du logement ; à ce titre, elle est en charge de l'aménagement du territoire et, si elle a sous sa responsabilité la politique de la ville et le projet du Grand Paris, elle a compétence sur chaque composante du territoire, qu'il soit rural ou urbain.

La DATAR, qui est un service du Premier ministre, est « mise à disposition » de dix ministres. Pour quatre d'entre eux – la ministre de l'égalité des territoires et du logement, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, le ministre de l'économie et des finances et le ministre du redressement productif –, cela figure expressément, sans autre précision, dans leur décret d'attribution, mais la Délégation est également mise à disposition de leurs trois ministres délégués et, « en tant que de besoin », du ministre de l'intérieur et de la ministre en charge de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique. Elle peut enfin être mise à la disposition du ministre en charge du travail et de l'emploi.

Cette organisation est plus claire que les précédentes. Désormais, comme l'ont confirmé les arbitrages rendus dans le cadre de la préparation du plan triennal, le programme 112 appartient au périmètre du Premier ministre, étant entendu qu'il revient à la ministre en charge de l'aménagement du territoire de le défendre devant le Parlement.

Quelles sont les méthodes utilisées par les administrations publiques pour prendre en compte l'aménagement du territoire ? Chacun des ministres s'occupe d'affaires territoriales et prend en compte les territoires dans les politiques qu'il propose au Premier ministre et au Président de la République. La DATAR vérifie la cohérence de ces dernières dans le cadre d'un travail interministériel. Nous participons ainsi chaque année, sous le pilotage du cabinet du Premier ministre, à 900 réunions interministérielles.

En ce qui concerne l'actualité de nos travaux, le Premier ministre a adressé en août à tous les ministres une circulaire leur demandant d'analyser les missions qu'ils auront à conduire et de réfléchir à la décentralisation de certaines compétences comme aux politiques publiques appelées à rester dans la sphère de l'État.

La DATAR est fortement mise à contribution par les ministres. Ainsi, en matière de gestion des fonds européens, le Président de la République a souhaité que soit transférée vers les collectivités territoriales la gestion de l'audit et de la certification des fonds. Nous y travaillons, dans le cadre interministériel et sous le pilotage étroit du Secrétariat général des affaires européennes.

Par ailleurs, le cabinet de Mme Cécile Duflot réfléchit aux formes que pourrait prendre la contractualisation après le vote de la future loi de décentralisation.

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Guy Waiss, chef de service, adjoint au directeur général de l'enseignement scolaire, DGESCO du ministère de l'éducation nationale

L'objectif 7 du programme 141 de l'éducation nationale dispose que celle-ci doit « promouvoir un aménagement équilibré du territoire éducatif en optimisant les moyens ». Sans aller jusqu'à parler d'oxymore, je dirai que c'est un véritable défi que notre administration doit relever là.

Pour répartir les moyens alloués à chaque académie, nous nous fondons sur trois critères principaux – l'état des structures existantes, la géographie du territoire et les conditions socio-économiques.

L'éducation nationale étant une administration fortement déconcentrée, il appartient ensuite à chaque recteur d'organiser son réseau éducatif à partir de critères qui peuvent lui être propres, même s'il est tenu par des consignes nationales. Ainsi la fermeture ou l'ouverture d'une classe ou d'une école n'obéit plus à des critères nationaux.

Ces critères d'attribution traduisent une triple volonté nationale : celle de maintenir le réseau éducatif le plus large possible, de privilégier les territoires qui en ont le plus besoin et de promouvoir l'organisation de réseaux afin de donner aux structures existantes une efficacité optimale.

Rien, naturellement, ne peut être fait sans un lien étroit avec les collectivités territoriales, d'abord pour une raison institutionnelle puisque, dans le second degré, l'éducation nationale ne peut fermer ou ouvrir un établissement sans l'accord de ces collectivités, la décision revenant au préfet ; pour une raison relationnelle ensuite, dans la mesure où toute décision prise par l'éducation nationale a des conséquences directes pour les collectivités – par exemple, la fermeture d'une école a une forte incidence sur les transports scolaires, pris en charge par le conseil général ; inversement, l'ouverture d'un établissement scolaire du second degré a un impact sur la répartition des moyens à laquelle nous devons procéder.

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lieutenant-colonel Sylvain Renier, chef du bureau des études à la Direction des opérations et de l'emploi, Direction générale de la Gendarmerie nationale

Je suis plus particulièrement chargé de réfléchir à l'adaptation du dispositif de gendarmerie dans les territoires.

Rattachée depuis 2009 au ministère de l'intérieur, la gendarmerie emploie 97 000 hommes et femmes, militaires ou civils, et assure la sécurité de 96 % du territoire, regroupant 50 % de la population – soit environ 31 millions d'habitants.

Le défi qu'elle doit aujourd'hui relever est d'adapter le service de sécurité aux évolutions sociodémographiques de notre pays. Elle s'appuie pour cela sur un maillage territorial qui fait sa force, au même titre que le statut militaire et la concession de logements par nécessité absolue de service. Avec quelque 4 000 brigades réparties sur l'ensemble du territoire, métropolitain et ultramarin, la gendarmerie assure continuité du service, proximité avec la population et disponibilité permanente.

La baisse continue de notre budget depuis 2009 nous amène à réfléchir à une adaptation, voire à une rénovation du maillage territorial, en maintenant naturellement notre présence sur l'ensemble des territoires. Ce n'est pas toujours facile en zone rurale, mais force est de constater que la gendarmerie y est parfois le dernier service public présent.

Nous réfléchissons également aux redéploiements entre police et gendarmerie pour recentrer celle-ci sur son coeur de métier – la sécurité des territoires péri-urbains et ruraux – et nous nous interrogeons sur l'intérêt qu'il y aurait pour nous à être présents dans les Maisons de services publics.

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Jean-Bernard Kovarik, adjoint au directeur général des infrastructures, des transports et de la mer, DGITM, ministère des transports

Je veux avant toute chose souligner l'intérêt de cette table ronde pour la DGITM, dont l'une des missions est de favoriser l'accessibilité aux réseaux de transports, aux services publics et à un certain nombre d'autres équipements.

Le code des transports évoque à de nombreuses reprises l'impératif d'aménagement équilibré des territoires comme l'un des principes devant guider la politique des transports.

Cet aménagement équilibré repose sur un certain nombre de piliers : la déconcentration, une organisation hiérarchisée des compétences dans le domaine des transports et la contractualisation avec les institutions représentatives des territoires. J'y ajouterais volontiers la programmation et la planification, mais je ne développerai pas ce point compte tenu de la mission confiée à M. Gallois et de celle qui réfléchit au devenir de l'avant-projet de schéma national des infrastructures de transports.

La déconcentration est au coeur de la nouvelle étape de la décentralisation annoncée par le Président de la République. Nous travaillons actuellement sur cette question, avec le cabinet du ministre.

En matière de contractualisation, il faut citer deux outils : le volet « transports » des contrats de projet, dont le taux d'avancement devrait atteindre 70 à 80 % fin 2012, et les programmes de développement et de modernisation des itinéraires routiers (PDMI), dont l'avancement ne devrait pas dépasser les 40 %.

D'autres démarches ad hoc ont été mises en place, notamment pour développer les transports en commun en site propre. Deux appels à projet, en cours de réalisation, ont abouti à plus que décupler les montants initialement prévus au niveau national. S'agissant du volet « transports » de la région Île-de-France, les étapes successives de la contractualisation et de la révision ont conduit à doubler les masses financières consacrées à la modernisation et au développement des grands projets en région capitale.

Je souligne la nécessité de prendre en compte les territoires peu denses, ruraux ou péri-urbains, qui sont le lieu d'une compétition entre les légitimes souhaits de rentabilité socio-économique des investissements et la non moins impérieuse nécessité d'assurer la solidarité entre les territoires. Ceux qui interviennent dans la chaîne de décision sont souvent partagés entre le souhait, exacerbé en période de rareté des crédits publics, d'un rapide retour sur investissement et la nécessité, à plus long terme, d'assurer l'accessibilité de tous les territoires. Se pose donc la question d'une meilleure coordination entre les autorités organisatrices de transports de tous niveaux. La création d'une autorité organisatrice de la mobilité durable, proposée par le Président de la République, y pourvoira-t-elle ?

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Véronique Malbec, directrice générale des services judiciaires du ministère de la justice

Si vous avez invité le ministère de la justice à cette table ronde, c'est probablement pour nous entendre sur la réforme de la carte judiciaire…

J'aborderai le sujet en commençant par quelques chiffres. En 2008, notre territoire comptait 1 206 implantations judiciaires. Au 1er janvier 2011, il n'en compte plus que 819, après la suppression de 437 d'entre elles et la création de 14 juridictions.

Certaines de ces suppressions étaient sans doute nécessaires car la carte judiciaire n'avait pas été aménagée depuis 1958. Le ministère de la justice a souhaité rationaliser ses implantations pour procurer à nos concitoyens un service de meilleure qualité, toute la difficulté étant de concilier l'accès de tous à la justice et la garantie pour chacun de trouver une juridiction en état de fonctionner. Le critère retenu a été celui de la taille critique : les juridictions supprimées ne disposaient pas d'un nombre satisfaisant de magistrats et de greffiers, ou leur activité était insuffisante.

Pour élaborer la nouvelle carte judiciaire, le ministère a donc retenu des critères relatifs à l'activité et à l'environnement judiciaires, mais aussi au développement démographique de la région, à la situation géographique des juridictions et à leurs conditions d'accès, tout en tenant compte des spécificités de certains territoires – ainsi plusieurs juridictions ont été maintenues en raison des difficultés d'accès à la voisine la plus proche, en particulier dans les régions de montagne.

Les quatorze nouvelles juridictions se composent de sept tribunaux d'instance et juridictions de proximité, d'un conseil de prud'hommes, de cinq tribunaux de commerce et d'un tribunal mixte de commerce. Nous avons également créé l'an dernier la cour d'appel de Cayenne – la trente-sixième cour d'appel de notre pays – car ce territoire était rattaché depuis 1958 à la cour d'appel de Fort-de-France dont l'éloignement posait de graves problèmes.

Le Président de la République et la Garde des sceaux n'entendent pas revenir sur cette carte judiciaire, mais procéder à son aménagement, toujours dans le souci de faciliter l'accès à la justice, et revoir éventuellement le ressort des cours d'appel, qui ne correspond pas aux autres circonscriptions administratives. Ils comptent également revoir le périmètre des tribunaux d'instance et de grande instance et redéfinir les compétences des uns et des autres.

Enfin, nous réfléchissons actuellement à l'extension des guichets uniques de greffe, à la déjudiciarisation de certains contentieux et au développement de la médiation et de la conciliation.

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Daniel Lenoir, directeur général de l'Agence régionale de santé, ARS du Nord-Pas-de-Calais

Je constate que je suis le seul régional de l'étape !

Les ARS, qui n'ont que trois ans d'existence, sont donc une jeune administration publique. Elles sont le fruit d'une double déconcentration. La première est fonctionnelle : l'État leur a confié un certain nombre de ses compétences, en faisant le choix de l'établissement public administratif plutôt que celui du service déconcentré dans la mesure où ces agences ont aussi à gérer des compétences relevant de l'assurance maladie. La seconde déconcentration est géographique, puisqu'il existe une agence dans chaque région.

Le fait que les ARS soient des établissements publics de l'État signifie que la politique de santé reste une politique nationale et que la prise en charge des soins relève de la solidarité nationale. En d'autres termes, ces agences ont à tenir la promesse constitutionnelle de garantir à tous les citoyens la protection de la santé, qui recouvre non seulement la prise en charge des frais de santé par la sécurité sociale, mais aussi l'accès de tous à une offre de santé de qualité sur l'ensemble du territoire.

Pour cette nouvelle organisation de la politique de santé, le maître mot a été la « territorialisation », qui se traduit dans les projets régionaux de santé. Celui du Nord-Pas-de-Calais a notamment pour objectif d'organiser les parcours de santé. Le premier acte en a été de définir les territoires d'intervention de l'ARS. Nous avons défini quatre niveaux.

Le premier est celui de la planification régionale, à travers trois schémas : le schéma de l'offre de soins – qui ne concernait que les soins hospitaliers mais a été étendu aux soins ambulatoires –, le schéma de l'organisation médico-sociale, domaine dans lequel l'ARS partage ses compétences avec les conseils généraux, et le schéma de la prévention.

La région est également le niveau où s'organise le recours, le niveau des centres de référence – en premier lieu le centre hospitalier régional université (CHRU), qui apporte sa contribution aux hôpitaux en matière de démographie des professionnels de santé – et le niveau où sont gérées les infrastructures lourdes, telles que notre système Télé-AVC qui permet de traiter un AVC en moins d'une heure en faisant intervenir un neurologue ou un radiologue avec l'aide de la télé-imagerie. C'est enfin l'échelon de la coopération transfrontalière, étant rappelé que nous partageons plus de 300 km de frontière avec la Belgique.

Les territoires de santé, où se gèrent les infrastructures hospitalières, forment le deuxième niveau de territorialisation. Il leur incombe d'organiser l'ensemble des disciplines de recours. Afin d'assurer la qualité et la sécurité des soins, la médecine hospitalière exige des plateaux techniques de taille suffisante. Il importe que les disciplines de recours soient réparties de la façon la plus équilibrée possible au sein de chaque territoire, dans les hôpitaux ou dans le cadre de coopérations entre communautés hospitalières. Dans le Nord-Pas-de-Calais, comme dans d'autres régions, les territoires de santé ne sont pas « calés » sur les départements, mais sur les infrastructures hospitalières : ainsi le territoire du littoral comprend aussi Dunkerque et celui de l'Artois, le Douaisis.

Nous avons introduit un troisième niveau de territorialisation, que j'appelle les zones de proximité, afin d'assurer la programmation des équipements médico-sociaux. Dans la mesure où nous partageons des compétences avec les conseils généraux, nous avons retenu pour procéder au découpage de ces zones les circonscriptions d'action définies par ceux-ci – cette forte territorialisation est une autre spécificité de la région Nord-Pas-de-Calais, composée de deux départements regroupant chacun près de deux millions d'habitants.

Le Nord-Pas-de-Calais souffre moins que d'autres régions de la désertification médicale, mais est néanmoins affecté dans quelques zones rurales et urbaines – l'ancienne zone minière, la métropole Roubaix-Tourcoing et l'arrière-pays du littoral, qui souffrira dans les prochaines années d'une insuffisance de médecins généralistes. Or les dispositifs conventionnels mis en place par l'assurance maladie ont instauré un zonage qui permet de gérer les dispositifs incitatifs – ou « désincitatifs » – à l'installation, mais qui est probablement trop fin par rapport à l'enjeu et qui ne permet pas une bonne gouvernance dans la mesure où il s'appuie sur les pseudo-cantons de l'INSEE, découpage plus statistique qu'administratif. C'est la raison pour laquelle la ministre a souhaité la définition d'un autre niveau d'intervention pour la médecine de proximité.

Les zones de proximité telles qu'elles ont été définies me semblent être le bon espace pour organiser les parcours de soins. Chacune est dotée d'un centre hospitalier, d'équipements médico-sociaux et de programmes locaux de promotion de la santé, et cet espace est facilement gouvernable.

Le dernier niveau de territorialisation est celui des initiatives locales, formalisées dans les contrats locaux de santé. Cet espace de coopération avec les collectivités territoriales permet d'intégrer, en sus du soin, d'autres politiques de santé comme l'éducation à la santé, qui relève de l'éducation nationale, la promotion de la santé, mais aussi l'action sur les déterminants de santé qui dépend d'autres politiques publiques – ainsi l'accès aux soins dépend beaucoup de la politique des transports et la lutte contre la pollution de l'air dépend totalement de la politique de l'environnement.

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Nous venons de couvrir à peu près tous les domaines dont dépend la réalisation de la promesse républicaine d'égalité – entre territoires comme entre tous ceux qui les habitent – telle qu'elle vient d'être renouvelée par le Président de la République et par le Gouvernement. Comment redonner à tous ces territoires les meilleures chances de mettre en valeur leur potentiel au service du redressement de la nation, dans un cadre décentralisé, mais aussi dans le cadre de l'Europe et du monde actuel ? Comment échapper à une forme de répartition de la pénurie, qui fragilise cette promesse républicaine ? Voilà le défi qui nous est lancé et qui, au-delà des outils dont nous disposons déjà, exige de nous une réflexion prospective.

C'est la raison pour laquelle je souhaite que nous rencontrions régulièrement, tout au long de la législature, les administrations ici présentes. Sous l'impulsion de la DATAR qui doit renouer avec sa vocation d'imaginer l'avenir, et en liaison étroite avec les collectivités, il faut nous attacher à maintenir le tissu de nos services publics : en effet, quand il devient trop lâche ou fragile, c'est l'existence même des territoires qui est menacée et, avec elle, les chances de prospérité générale.

Le jardin de la France est petit. Nous n'avons pas le droit d'en abandonner tout ou partie au motif que nous n'aurions pas le temps ou les outils pour le cultiver.

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Monsieur le président, chaque ministère aurait mérité une table ronde à lui seul ! D'autre part, il est dommage que celle-ci n'ait pas fait sa place à la question des nouvelles technologies et de la fracture numérique. J'aurais également souhaité qu'en préalable, on nous fournisse une photographie de nos territoires et des indications sur leur évolution démographique ou sur les grandes tendances de notre société, en les comparant à la situation dans les autres pays européens de manière à identifier nos forces et nos faiblesses. Ainsi, pour m'en tenir à cela, j'aurais aimé savoir dans quels territoires les gens habitent et lesquels ils désertent, ou lesquels ils voudraient habiter.

Les députés du groupe UMP sont heureux de constater que l'effort de redressement des finances publiques – qui passe par une rationalisation de l'organisation des services publics, monsieur Caullet ! –, naguère condamné sans appel, trouve maintenant grâce aux yeux de la nouvelle majorité !

Quand on installe une prison à un bout d'un département et le pôle de l'instruction à l'autre bout, on ne facilite guère la tâche de la gendarmerie chargée du transfèrement des détenus. Sur des sujets concernant plusieurs ministères, les décisions sont-elles bien prises dans un esprit de transversalité ? Et a-t-on le souci d'internaliser les coûts environnementaux ?

Qu'en est-il de l'application des lois montagne et littoral ? Des zones transfrontalières ?

Enfin, étant bien entendu que le Parlement est un pouvoir indépendant du pouvoir exécutif, nos interlocuteurs auraient-ils à nous suggérer une mesure qui, dans le cadre de l'acte III de la décentralisation, serait de nature à améliorer la situation des services publics, au bénéfice de leurs agents comme de la population ?

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En ce qui concerne l'internalisation des coûts environnementaux, il faut bien admettre que la localisation des infrastructures ou des équipements résulte souvent de décisions à caractère politique…

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Suite aux prises de position très claires du Président de la République sur ce thème, il est question de créer un Commissariat général à l'égalité des territoires, qui aurait à veiller à la cohérence des politiques ministérielles et à leur bonne articulation avec les nouvelles responsabilités confiées aux collectivités locales. Le 5 septembre, une commission présidée par M. Thierry Wahl s'est vue chargée par Mme Duflot de remettre au Premier ministre, à la fin de l'année, des recommandations sur les missions à assigner à ce commissariat, un rapport intermédiaire devant intervenir dès octobre.

Monsieur le délégué interministériel, pouvez-vous nous éclairer sur l'état d'avancement de ce dossier ? Qu'en est-il du projet de réorganisation de la DATAR, outil majeur de la cohésion des territoires qui fêtera son cinquantième anniversaire en février 2013 ?

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Emmanuel Berthier, délégué interministériel à l'aménagement du territoire

Monsieur Caullet, le Premier ministre a demandé à Mme Yannick Moreau de réfléchir, en liaison avec les partenaires sociaux, à une éventuelle évolution du Centre d'analyses stratégiques. Si l'on en croit la presse, ce pourrait être l'occasion d'un rapprochement avec la DATAR, qui est elle aussi un service du Premier ministre. Quoi qu'il en soit, il est clair que toutes les formes de prospective confiées aux administrations centrales seront réorganisées. En matière de prospective territoriale, la DATAR bénéficie d'une longue tradition et, avec le concours de plus de 500 personnes dont un certain nombre de parlementaires, elle vient de produire un document intitulé « Territoires 2040 » que nous pourrions d'ailleurs présenter à votre Commission si vous le jugiez bon, monsieur le président. Nous pourrions d'ailleurs faire de même du rapport de l'Observatoire des territoires, composé de chercheurs et d'élus : vous disposeriez ainsi à la fois d'une analyse récente de l'évolution récente de nos territoires et d'éléments de prospective.

Mme Duflot a demandé à M. Thierry Wahl et à onze autres hauts fonctionnaires de réfléchir à l'évolution des missions confiées aux structures dépendant de son ministère ainsi qu'à d'autres, dont la DATAR. Les projets de réorganisation ne seront définis que lorsque cette réflexion aura abouti, comme le souhaite le cabinet du Premier ministre.

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La Guyane, d'où sont lancées les fusées Ariane, Vega et Soyouz, souffre depuis très longtemps d'un grave déficit d'aménagement et d'un très faible taux d'attractivité. Notre jeunesse – près de 55 % de la population a moins de vingt ans – aspire à être plus éduquée et mieux formée, mais l'enclavement géographique de notre territoire l'empêche de bénéficier pleinement de l'engagement pris en 2000 par l'Union européenne de devenir la première puissance mondiale de l'économie, du savoir et de la connaissance.

Cet enclavement est dû au prix exorbitant du billet d'avion entre Paris et Cayenne. Malgré les arguments avancés par le PDG d'Air France pour les justifier, nous considérons que ces tarifs constituent un frein à la formation des jeunes et à l'attractivité du territoire. En outre, le coût très élevé du fret aérien retentit sur le coût de la vie. C'est pourquoi M. Victorin Lurel vient de présenter un projet de loi destiné à lutter contre la vie chère outre-mer.

Aujourd'hui plus que jamais, en raison de l'enjeu géostratégique lié à notre proximité avec le géant brésilien, mais aussi en vertu de l'indivisibilité de la République, nous devons tout mettre en oeuvre afin de rapprocher physiquement la Guyane de la France en définissant une véritable stratégie de continuité territoriale, à laquelle Air France doit apporter sa contribution. Nous souhaitons donc la constitution rapide d'une commission interministérielle chargée de trouver une solution à ce problème crucial pour les Guyanais et pour le développement de leur territoire.

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J'apprends avec intérêt la création d'un Commissariat général à l'égalité des territoires. Notre population rurale a en effet un sentiment d'abandon, dont ont témoigné les résultats du Front national lors des dernières élections.

Alors que ces territoires sont déjà dévitalisés et appauvris, certains doivent faire face à l'arrivée de populations défavorisées, poussées hors des villes par la cherté des loyers. Or ils n'ont ni les moyens ni l'organisation nécessaire pour créer services et emplois, pour proposer des formations, un suivi scolaire, une offre culturelle et des structures de loisirs et d'accueil. Les services et la richesse restent à la ville, et la pauvreté arrive à la campagne.

Ce constat nous oblige à envisager une réorganisation complète du territoire. Les intercommunalités peuvent être l'outil qui permettra de répondre aux nouveaux besoins, mais elles sont souvent de trop petite taille et il conviendra donc de les porter à la taille des schémas de cohérence territoriaux (SCOT), de façon à ce qu'elles disposent des moyens, de la logistique et de la matière grise nécessaires.

Peut-on espérer de l'acte III de la décentralisation qu'il s'attaque à la fracture territoriale, ou va-t-on passer à côté d'une occasion qui ne se renouvellera peut-être pas ?

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Prendre en compte des enjeux de l'aménagement du territoire passe par une véritable concertation, qui permette d'ouvrir un débat sur l'opportunité de la décision, d'identifier la totalité des choix envisageables, de cerner les points d'accord et de désaccord entre les parties, puis de faire un choix éclairé en tenant compte, dans les modèles d'application, d'intérêts ou de suggestions qui ne remettent pas en cause l'essentiel. Comment vos administrations mettent-elles en oeuvre la concertation ainsi définie, notamment avec les élus locaux ?

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La « prise en compte des enjeux d'aménagement du territoire par les administrations publiques » s'est dégradée au cours des dernières années, comme en atteste la situation désastreuse des services publics en milieu rural, conséquence de la RGPP. Je me réjouis donc qu'une première rupture avec cette politique ait eu lieu à la rentrée, particulièrement du côté de l'éducation nationale.

La difficulté vient de ce que nous avons une vision verticale de l'aménagement du territoire, et que chaque ministère a toujours de bons arguments en faveur de sa politique particulière. Une vision transversale permettrait d'appréhender un territoire dans sa globalité, de façon à lui épargner le cumul de réformes dont l'effet d'ensemble est ravageur.

J'aimerais également que nous cessions de tout considérer sous le prisme de la compétitivité et de soumettre aux lois de la concurrence les territoires les plus fragiles.

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Notre société vit une révolution numérique. Que deviennent les schémas de cohérence régionale de l'aménagement numérique (SCORAN) et les schémas départementaux territoriaux d'aménagement numérique (SDTAN) ? Atteindrons-nous les débits annoncés pour 2020 et pour 2050 ? Arriverons-nous aux 100 mégabits par seconde annoncés ? Où en sommes-nous par rapport aux autres pays européens et aux objectifs de l'Union européenne ? Surtout, quels moyens l'État accorde-t-il aux territoires pour organiser ce développement ?

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Les administrations publiques que vous représentez, mesdames, messieurs, ont pour mission de renforcer l'attractivité de nos territoires tout en assurant un dialogue avec les collectivités et les populations. Le projet de nouvelle ligne à grande vitesse entre Montpellier et Perpignan entre pleinement dans ce cadre. Attendue de longue date dans la région, cette réalisation a été patiemment préparée depuis dix ans, notamment par des mobilisations du foncier, et l'on pouvait envisager son tracé sans concertation avec la population puisque, dès 2009, RFF avait mis en place tout un dispositif d'études, de débat public et de consultation des élus, des associations et des habitants. Cependant, aujourd'hui, le troisième tracé proposé mécontente les populations environnantes : proche des villes, il induirait des nuisances ; il traverserait des massifs protégés... Cet exemple souligne la difficulté pour l'État de concilier concertation et action, intérêt local et intérêt national.

En septembre 2011, la DATAR et RFF ont signé un protocole destiné à renforcer leur collaboration, notamment pour le développement de nouvelles lignes. Quelle est selon vous, monsieur Kovarik, la place de la démocratie locale dans les processus d'élaboration des plans d'aménagement du territoire, en particulier pour les lignes ferroviaires à grande vitesse ?

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Il est faux de dire que la ruralité a été oubliée, voire sacrifiée, depuis plusieurs années, et il est dangereux de prétendre qu'elle bénéficiera dans un avenir prochain de moyens significativement accrus. Mon département, le Jura, bénéficie aujourd'hui de davantage de services qu'il y a dix ou vingt ans : il y a plus de crèches, de cantines, de haltes-garderies, de médiathèques, de logements pour les personnes âgées, d'agences postales communales. Le malaise vient plus de la nécessité d'être perpétuellement en mutation, alors que les ruraux devraient bien plutôt mettre leur fierté à se montrer les plus réactifs au changement.

Cela étant, en matière de justice, il conviendrait de développer les auditions foraines et, en matière scolaire, par un effort de prospective, de rechercher avec les élus, les parents d'élèves et les enseignants les moyens de définir une carte scolaire valable pour trois ou cinq ans – ce qui éviterait de voir fermer une école à peine rénovée ! Enfin, il faut admettre que, dans la gendarmerie, les communautés de brigades doivent, pour être efficaces, compter au moins 20 ou 22 gendarmes.

La Poste a réussi sa mutation dans le Jura, en développant les agences postales communales. Méditons cet exemple et montrons plus de dynamisme ! Il faut cesser de considérer que, parce que nous sommes en zone rurale, nous n'aurions plus d'avenir.

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Monsieur Sermier, nous avons tout de même davantage entendu parler de zones franches urbaines, de politique des quartiers ou du Grand Paris que d'aménagement cohérent du territoire rural ! Je ne prétends pas qu'on n'ait rien fait mais le monde rural ne survit à peu près que parce qu'il est tenu à bout de bras par les conseils généraux, de façon d'ailleurs assez inégale.

Les fermetures de services dans les hôpitaux, la désertification médicale, l'abandon par la Poste de certaines prestations bancaires, l'obsolescence du réseau ferré local largement sacrifié aux lignes à grande vitesse, tout cela génère un profond sentiment d'abandon dans les populations rurales, comme en témoigne leur vote aux dernières élections. Nous avons besoin pour nos campagnes d'une nouvelle politique, qui partirait des besoins de chaque territoire au lieu de procéder de logiques de rationalisation sectorielles, indépendantes les unes des autres.

Dans cette perspective, que deviennent les contrats de projets et des contrats de plan ? Est-il envisagé d'y associer les départements et les communautés de communes ?

En matière d'infrastructures, parler de solidarité locale, c'est bien, mais lorsqu'un TGV traverse un territoire rural, celui-ci ne perçoit aucune contrepartie. Au contraire, il se vide encore davantage. Pourquoi les sociétés qui exploitent ces lignes, dont certaines sont privées, ne versent-elles pas de contribution territoriale aux collectivités qu'elles traversent, comme c'est le cas pour les pylônes et les autoroutes ?

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En milieu rural, un service public ne doit pas être rentable, mais social. Il faut donc préserver la solidarité nationale entre les territoires, ce qui implique une certaine souplesse.

Pour une toute petite commune comme la mienne, l'école, c'est la vie. Si elle disparaît, il n'y aura bientôt plus de commerces ni de services. Or nous sommes sous la menace de la fermeture d'une de nos trois classes : il suffirait que l'effectif tombe de 51 à 48 enfants, c'est-à-dire qu'une famille déménage ! Ne pourrait-on se donner plus de temps, apprécier les choses sur une plus longue durée, avant de prendre une telle décision, sur laquelle on reviendrait l'année suivante si arrivait une autre famille ? Il ne saurait en être des écoles rurales comme des écoles de ville.

Tout aussi dramatique est la désertification médicale. Dans ma circonscription, si rien n'est fait, nous n'aurons plus de généraliste dans deux ou trois ans. Il nous faut réfléchir très rapidement aux moyens de conserver des médecins en milieu rural. De même, dans la gendarmerie, il est des seuils d'effectif en dessous desquels on ne peut descendre sans dommage pour le maillage territorial.

Enfin, ma circonscription est traversée par une nationale, la RN 102, qui n'a pas fait l'objet du moindre aménagement depuis une quarantaine d'années. Or, dans un territoire rural, la route est indispensable au développement économique.

Pour toutes ces raisons, je souhaite que soient assouplies les règles d'aménagement du territoire en milieu rural.

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Quel rôle joueront les nouveaux commissaires au redressement productif, en particulier à l'égard des nouvelles dynamiques territoriales telles qu'elles se manifestent à travers la constitution de pôles de compétitivité ou de clusters ou à travers la création d'infrastructures permise par les investissements d'avenir ? Quelle sera leur position face aux stratégies régionales de l'innovation élaborées dans la plupart des régions françaises à la demande de l'Union européenne ? Une concertation est-elle prévue avec les collectivités locales, qui en sont très demandeuses ?

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En tant que député de la ruralité, je m'étonne que nos collègues de l'UMP se plaignent de l'organisation de la gendarmerie ou de l'enseignement alors qu'ils ont soutenu la RGPP pendant cinq ans !

Seul un partenariat entre collectivités et administrations garantira un aménagement du territoire cohérent : il en va de l'égalité souhaitée par le Président de la République. Les unes et les autres doivent être attentives à la spécificité des territoires, élaborer des schémas et définir des orientations claires en cessant de s'enfermer chacune dans son domaine. Les transports, la santé, la justice et la sécurité ne peuvent faire l'objet de politiques séparées. Cela passe peut-être par une réorganisation des administrations centrales, mais je compte en tout cas sur la DATAR pour faire prévaloir un point de vue global et pour proposer des pistes aux élus qui auront à arrêter les politiques publiques.

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Je regrette qu'aucun représentant du ministère de la réforme de l'État ne participe à cette table ronde, alors que Mme Lebranchu a annoncé hier que son projet de loi était prêt. On appréciera le haut degré de concertation qui entoure la préparation de ce texte ! J'espère du moins qu'avant de l'examiner, nous pourrons auditionner la ministre.

La question de l'égalité des territoires dépasse largement celle de l'organisation des services extérieurs des ministères. En effet, pour une grande part, la gestion de leurs crédits d'intervention est déconcentrée au niveau des contrats de projets. Les fonds européens, dont on connaît l'effet de levier sur l'investissement local, sont également gérés au niveau régional. Enfin, dans notre République décentralisée, l'État alloue des sommes importantes aux collectivités locales pour la réalisation de leurs projets d'investissements. On ne peut donc plus raisonner en en restant à la carte des services et des administrations du siècle dernier !

Est-il besoin de souligner la faiblesse de l'investissement en milieu rural, faiblesse qui explique un certain sentiment d'abandon ? J'ai entendu dire que les crédits des contrats de projets État-région (CPER) allaient pour les deux tiers aux départements « chefs-lieux » de région. La DATAR connaît-elle le montant, par habitant et département par département, des dépenses d'investissement de toutes les administrations publiques – État, collectivités locales, sécurité sociale, établissements publics ? Ce serait un indicateur précieux de l'égalité, ou de l'inégalité, entre territoires.

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Les services publics ou les services au public ne peuvent être présents sur tout le territoire, mais il ne faut pas non plus s'en remettre aux décisions d'en haut ni se résigner au cloisonnement. Aussi, dans les Côtes-d'Armor, après concertation exhaustive, les maires ont élaboré des schémas collectifs de services répondant à ce souci de décloisonnement et de transversalité. Cette réflexion collective est gage de cohérence et d'efficacité à long terme.

Pour assurer un développement équilibré et harmonieux, n'opposons pas territoires ruraux et territoires urbains ou périurbains et ne cédons pas à la tentation des métropoles. L'avenir est aussi aux territoires interstitiels, de taille moyenne, dont les atouts sont la qualité et le cadre de vie, pour combattre cette logique de compétition entre territoires.

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Il a beaucoup été question de métropolisation depuis cinq ans, mais on doit également être attentif aux problèmes spécifiques que rencontrent les territoires ruraux, notamment lorsqu'il s'agit d'attribuer les dotations ou de planifier les infrastructures de transport.

À présent que l'usine Doux et la base aérienne 103 ont fermé, le Pas-de-Calais se demande comment traiter leurs friches, l'une privée, l'autre appartenant à l'État. Cette dernière, au cas où la réalisation du canal Seine-Nord Europe serait lancée, pourrait offrir une base de repli aux entreprises qui viendraient y travailler et servir ensuite de base logistique. C'est à mon sens un élément qui plaide en faveur de ce projet de liaison.

Pour desservir les territoires peu denses, les conseils généraux, compétents pour le transport interurbain, privilégient les transports à prix réduit, ce qui contribue à accroître leur utilisation. Cependant, si la coordination entre les autorités de transport est certes nécessaire, le vrai problème est de savoir qui va payer. Ainsi les conseils généraux se demandent s'ils doivent continuer à financer le transport scolaire. S'ils y renonçaient, le fonctionnement des regroupements pédagogiques en serait compromis, au détriment des enfants des zones rurales.

Enfin, la création de communautés de brigades, chargées d'un vaste secteur, ne favorise pas une bonne couverture des besoins de sécurité, mais je regrette aussi que les gendarmes soient trop souvent mobilisés pour effectuer – souvent à deux, voire à quatre – le transfèrement des détenus. Ne pourrait-on confier cette tâche à d'autres ?

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Nous n'avons pas encore cité les agriculteurs dont je mesure, en tant qu'élue de l'Ardèche, tout ce qu'ils apportent à l'aménagement du territoire. Cela dit, je n'entends pas opposer les territoires ruraux et les territoires urbains, car l'égalité exclut toute idée de compétition.

Pour traiter la question des services publics, nous ne pourrons faire l'économie d'une réflexion sur les services à la personne – publics et privés –, car les uns ne vont pas sans les autres.

Les ruraux savent que l'on ne reviendra jamais sur la suppression de certains services publics, mais il en est d'autres qu'il importe de rétablir, car ils sont vitaux : la disparition de la gendarmerie prive les agriculteurs d'une sécurité sur laquelle ils comptaient, mais l'accès au généraliste non plus ne leur est plus garanti dans de nombreux cantons. La faible densité de la population ne peut être un argument dans ces matières !

L'État, enfin, a été défaillant s'agissant de combattre la fracture numérique. C'est sans lui, mais uniquement avec l'appui de la région Rhône-Alpes et de l'Europe qu'en Ardèche et dans la Drôme, nous avons pu constituer un syndicat mixte grâce auquel 95 % de ces deux départements sont aujourd'hui couverts par le haut débit.

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Un accord entre l'État et neuf opérateurs de services publics a été signé en 2010 afin de mieux répondre aux attentes et aux besoins des ruraux. Ce programme, intitulé « Plus de services au public », vise à favoriser la concertation entre opérateurs et la mutualisation des moyens, ainsi qu'à multiplier les points d'accès au service public. Coordonné par la DATAR, il a été expérimenté à partir de 2011 dans vingt-deux départements, dont le Morbihan. Pouvez-vous, monsieur Berthier, faire le bilan de ses succès et des difficultés qu'il rencontre ? Envisagez-vous d'élargir l'expérimentation à d'autres départements ?

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Un pays au bord de la faillite doit faire des arbitrages. Si, pour les territoires ruraux, il faut choisir entre le réseau routier et le réseau numérique à haut débit, le second me semble à privilégier, car il permettra de développer des activités à haute valeur ajoutée. Reste à savoir qui, de l'État, du département ou de la région, doit investir dans ce maillage et piloter l'opération. Quelle est votre position sur le sujet ?

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Contrairement à Jean-Marie Sermier, je n'ai pas constaté d'amélioration dans ma circonscription rurale, qui s'étend sur deux arrondissements. Dans l'un, qui compte 115 communes, quatre gendarmes seulement sont disponibles la nuit, au mieux ; nous avons perdu des bureaux de poste, des perceptions et un tribunal ; les transports sont rares. Ne parlons même pas du numérique : les téléphones portables ne fonctionnent pas partout ! Pôle emploi n'assure plus de permanence dans certains cantons… On éprouve une impression d'abandon. Dans ces conditions, il est difficile de parler d'égalité entre les territoires !

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Que pense le représentant de la DATAR des expériences d'euro-régions ? Où en sont-elles et quel bilan en tirer ? Même si l'initiative revient aux conseils régionaux, l'État ne peut-il pas intervenir pour la définition de stratégies ou pour le développement d'équipements tels que les ports, les aéroports, les installations d'incinération ou les infrastructures de transport ?

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Certains soutiennent que, dans le monde actuel, la stratégie d'aménagement du territoire doit reposer sur une logique, non d'égalité et de distribution, mais de concentration des moyens afin de relever les défis lancés par des territoires souvent lointains : en d'autres termes, ce n'est pas Paris ou Marseille qui peuvent faire contrepoids à Shanghai, mais la France tout entière. Dès lors, où placer le curseur entre concentration et dispersion des moyens ?

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Que l'on prône la défense des territoires ou la métropolisation, il faudra choisir une maille pour l'aménagement du territoire national. Mme Duflot, ministre de l'égalité des territoires, doit avancer sur ce point, car le risque existe sinon de voir un désert s'étendre autour du Grand Paris et d'une dizaine de métropoles.

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Emmanuel Berthier, délégué interministériel à l'aménagement du territoire

M. Saddier le comprendra : il ne m'appartient pas de définir le contenu à donner à l'acte III de la décentralisation. Un directeur d'administration centrale peut répondre aux questions des parlementaires mais, pour la préparation des futures lois, il doit une totale loyauté à ses ministres.

Égalité ou distribution, concentration ou diffusion : ces choix sont au coeur des débats de la commission Wahl, qui travaille sur plusieurs scénarios. Il n'est pas certain qu'elle conclue à la nécessité de créer un Commissariat général à l'égalité des territoires, qui se substituerait alors à la DATAR. Pour l'heure, nous définissons missions et moyens et nous nous préoccupons de l'articulation entre administrations publiques chargées de mettre les politiques en oeuvre. La difficulté d'assurer tant la compétition dans un cadre de plus en plus mondialisé que la cohésion micro-territoriale a nourri depuis longtemps de nombreux débats sur l'aménagement du territoire, qui ont débouché sur une succession de stratégies diverses.

Depuis la fin de 2010, l'expérimentation « Plus de services au public » concerne en effet une vingtaine de départements. Ses résultats, analysés de manière très fine en lien avec les neuf opérateurs et avec l'ensemble des administrations centrales, ont été transmis aux ministres de la réforme de l'État et de l'égalité des territoires, à qui il reviendra de décider si cette expérimentation doit être élargie, voire généralisée.

Placés auprès des préfets de région, les commissaires au redressement productif relèvent d'une gestion interministérielle. Dans les régions, ils ont des contacts quotidiens avec les entreprises, les salariés et les élus. La concertation fait en effet partie de leur feuille de route.

La DATAR, monsieur Marleix, n'est pas en mesure de dire à qui sont allés l'ensemble des crédits d'investissement de l'État. Elle dispose toutefois, concernant les contrats de projets État-région, d'une base de données qui intégrera les données pour 2013, 2014 et 2015 dès que nous aurons officiellement connaissance du contrat triennal. Pour l'heure, je ne peux pas confirmer que les départements chefs-lieux bénéficient d'une concentration de ces moyens.

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lieutenant-colonel Sylvain Renier, chef du bureau des études à la Direction des opérations et de l'emploi, Direction générale de la Gendarmerie nationale

L'INSEE prévoit que les zones gendarmerie, où vivent aujourd'hui 31 millions d'habitants, en compteront 700 000 de plus en 2015 et 1,3 million de plus en 2020.

Notre organisation est double. Pour des raisons historiques et juridiques, elle s'appuie sur le découpage administratif. La loi de 1851 a posé le principe d'une brigade par canton – mais ce n'est pas une règle. Viennent ensuite le niveau de l'arrondissement, qui est celui de la compagnie, le niveau départemental et le niveau régional, qui est celui de la coordination. Mais nous prenons aussi en compte, pour cette organisation, certaines évolutions sociodémographiques ainsi que la mobilité des personnes et de la délinquance.

Le numérique permet de faciliter l'accès à la gendarmerie. La pré-plainte en ligne, déjà opérationnelle dans plusieurs départements, sera généralisée dans les prochains mois. Chaque brigade dispose d'une boîte à lettres électronique, ce qui permet d'envoyer des messages aux unités. Il est également possible de signaler certains événements sur des sites Internet. Nous mettons donc à profit les nouvelles technologies, au rythme que nous autorise notre budget.

Pour établir les unités, nous retenons plusieurs critères : population, délinquance, besoins communs et besoins spécifiques, tels que le transfèrement. D'autre part, notre statut militaire nous impose d'assurer une présence vingt-quatre heures sur vingt-quatre dans les unités.

À chaque niveau administratif – région, département, arrondissement –, les élus locaux peuvent trouver un interlocuteur. Les brigades, quant à elles, sont représentées dans les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD). Depuis l'été 2011, nous avons un officier de liaison auprès de l'Association des maires de France. Nous souhaitons également créer un réseau de concertation et d'échanges à tous les niveaux et nous développons la coordination avec les polices municipales. J'ajoute que nous avons sollicité les élus, au même titre que l'autorité préfectorale, pour organiser les redéploiements de 2011 ainsi que ceux qui sont en préparation.

Je conviens qu'un effectif de quatorze gendarmes est insuffisant pour une brigade. Une vingtaine serait préférable mais, pour atteindre ce chiffre, il faudrait prendre des hommes ailleurs. Nous essayons donc de faire au mieux avec les moyens dont nous disposons. Le fait que l'administration pénitentiaire prenne progressivement en charge le transfèrement des détenus nous permet cependant de nous concentrer davantage sur notre coeur de métier : la surveillance des territoires et la protection des personnes.

En Ardèche, aucune brigade n'a été supprimée depuis 2009. Une trentaine d'hommes a même été installée à Annonay, où nous avons pris le relais du commissariat. Comme en Charente-Maritime, on compte dans ce département un gendarme pour 500 à 600 habitants alors que le ratio théorique, en zone rurale, est de un pour 1 000 habitants. La disparition des brigades est donc moins une réalité qu'une impression, liée à la réduction du contact avec la population, à l'augmentation du travail administratif et à l'utilisation de nouveaux moyens de fonctionnement.

Quinze gendarmes pour un arrondissement la nuit, c'est en effet trop peu. On peut concevoir toutefois qu'à un moment, il ne puisse y avoir que ce nombre en patrouille, mais le fonctionnement de la gendarmerie permet une rapide montée en puissance, en faisant appel aux unités alentour, aux réservistes, aux gendarmes mobiles et aux unités de recherche judiciaire ou de surveillance.

L'équilibre entre concentration et dispersion est difficile à trouver. Conçue pour tenir compte de la contraction de notre budget sans porter atteinte au maillage, la stratégie de dispersion qui a conduit à la création de communautés de brigades nous permet de maintenir notre présence sur tout le territoire, alors que la concentration conduirait à fermer des brigades.

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Comment la gendarmerie pourrait-elle être partie prenante aux maisons de services publics ?

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lieutenant-colonel Sylvain Renier, chef du bureau des études à la Direction des opérations et de l'emploi, Direction générale de la Gendarmerie nationale

La réflexion, ouverte l'an dernier, n'a pas été conclue. Compte tenu de la baisse de nos effectifs et de nos moyens, nous avons envisagé de fermer certaines brigades pour ouvrir des pôles de gendarmerie au sein de ces maisons. A priori, la solution ne nous satisfait pas totalement. Elle reste néanmoins à l'étude.

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L'idée, avancée par notre collègue Sermier, de stabiliser pour plusieurs années la carte scolaire des territoires ruraux est séduisante. Si les collectivités territoriales signaient un contrat en ce sens avec l'éducation nationale, elles ne craindraient plus d'avoir à fermer une classe pour la seule raison qu'une famille a déménagé.

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Guy Waiss, chef de service, adjoint au directeur général de l'enseignement scolaire, DGESCO du ministère de l'éducation nationale

La dépense que la nation consacre à l'éducation – 7 % du PIB, soit 135 milliards d'euros – est supportée à 60 % par l'État et à 25 % par les collectivités locales, dont la part n'a cessé d'augmenter depuis trente ans du fait de la décentralisation mais aussi de leur propre volonté. Le reste est couvert à peu près à égalité par les familles et par les entreprises, qui financent la formation continue des adultes.

Sans anticiper sur les projets ministériels mais en m'appuyant sur les travaux menés dans la perspective d'une refondation de l'école, je dirai que nous envisageons d'introduire de légères modifications institutionnelles dans les instances où se rencontrent l'État et les collectivités : au niveau central, le Conseil territorial de l'éducation nationale et, dans les académies et les départements, les conseils académiques et départementaux d'éducation nationale. La réflexion s'étend d'ailleurs aux conseils d'administration des établissements du second degré.

La problématique de la dispersion et de la concentration reçoit, de la part de l'éducation nationale, une réponse qu'on peut résumer ainsi : plus l'enfant est jeune, plus le réseau se caractérise par la dispersion ; plus l'élève grandit, plus le réseau est concentré.

Il existe 53 000 écoles : 48 000 publiques et 5 000 privées sous contrat. Depuis dix ans, il en disparaît chaque année 400 à 500, dont la moitié étaient à classe unique, mais ces pertes ont été compensées par 5 000 regroupements pédagogiques intercommunaux.

Paradoxalement, le premier degré a accueilli pendant cette période 100 000 élèves de plus, en raison d'un transfert de la population scolaire du nordnord-est vers le sudsud-ouest. La Champagne-Ardenne et la Lorraine perdent ainsi des milliers d'élèves, tandis que le Midi-Pyrénées et le Languedoc-Roussillon en gagnent dans la même proportion – mais la population scolaire augmente fortement aussi en Île-de-France.

Autre paradoxe : alors que le second degré a perdu 240 000 élèves depuis dix ans, le nombre des établissements y a crû de 37 unités, pour s'établir à 7 787.

Dans le premier degré, le ratio moyen national est de 5,24 professeurs pour cent élèves, l'amplitude allant de 4,96 dans les Hauts-de-Seine à plus de 8 en Lozère. En collège, le ratio est de 1,16 heureélève, hors territoires ruraux et zones d'éducation prioritaire (ZEP) où il est respectivement de 1,23 et de 1,33. Nous n'opposons pas territoires ruraux et ZEP : nous essayons de répondre aux deux défis.

Actuellement, 12 627 communes n'ont plus d'école. Dans les zones rurales, il reste 12 000 écoles, soit 24 % de leur nombre total, et 848 collèges, soit 16 % de leur nombre total. Enfin, on y trouve aussi 3 % des lycées et lycées professionnels.

Dans l'éducation prioritaire, le réseau Écoles, collèges et lycées pour l'ambition, l'innovation et la réussite (ECLAIR), correspondant aux zones de difficultés les plus fortes, regroupe 2 189 écoles et 339 établissements du second degré. Les réseaux de réussite scolaire (RRS), qui constituent le niveau 2 de l'éducation prioritaire, rassemblent 4 676 écoles et 784 collèges. Au total, l'éducation prioritaire concerne donc 6 865 écoles et 1 123 collèges, soit à peu près 20 % des établissements. Nous essayons de maintenir l'ensemble de ces dispositifs.

Conscients de l'effort à fournir sur le numérique, nous sommes en relations très suivies avec les associations des régions, des départements et des maires de France afin de mettre sur pied une e-éducation cohérente. Grâce à l'action conjointe de l'État et des collectivités, 6 700 écoles rurales ont été équipées d'ordinateurs portables, de tableaux blancs interactifs et de ressources numériques pédagogiques, dans le cadre d'un plan doté de 67 millions d'euros. Avec les régions et les départements, nous travaillons sur le réseau numérique éducatif pour proposer des ressources pédagogiques et développer des environnements numériques de travail (EMT). Plusieurs accords ont été passés à ce sujet entre les académies et les régions.

En matière de carte scolaire, nous rappelons périodiquement les consignes nationales aux recteurs et aux directeurs académiques des services de l'éducation nationale (DASEN). Conformément à la charte de 2006 sur les services publics et à la circulaire Montagne du 30 décembre 2011, les autorités déconcentrées doivent arrêter la carte scolaire au moins deux ans à l'avance en zone rurale et en zone de montagne. Nous répétons cette instruction chaque année, en novembre et décembre, à l'occasion des dialogues de gestion entre les rectorats et l'administration centrale. Disposant maintenant d'un cadre triennal 2013-2016, nous recommandons aux recteurs et aux DASEN d'éviter le stop and go, quitte à rechercher avec les élus locaux la meilleure solution : maintien du statu quo ou regroupement pédagogique, dispersé ou concentré. Il est essentiel en effet qu'à un moment où la ressource financière se raréfie, l'État et les collectivités territoriales unissent leurs forces pour maintenir un réseau aussi dense que possible.

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Pour stabiliser la carte scolaire, mieux vaudrait qu'un contrat soit signé entre l'éducation nationale et les collectivités territoriales, surtout là où les communes ont transféré la compétence scolaire à la communauté de communes. Les consignes transmises aux recteurs et aux inspecteurs d'académie, purement orales, peuvent rester des voeux pieux. Un engagement écrit rassurerait les élus.

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Guy Waiss, chef de service, adjoint au directeur général de l'enseignement scolaire, DGESCO du ministère de l'éducation nationale

Ce ne sera possible que si ces contrats font l'objet d'un consensus départemental car, la ressource étant finie, on ne peut figer les situations pendant deux ans en un endroit sans poser qu'ailleurs, on ne tiendra pas compte des augmentations éventuelles d'effectif. Si nous voulons maintenir la densité du réseau et soutenir l'éducation prioritaire, il est indispensable que les autres territoires acceptent des taux d'encadrement moins élevés.

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Daniel Lenoir, directeur général de l'Agence régionale de santé, ARS du Nord-Pas-de-Calais

Il y a dix ans, quand je dirigeais la Mutualité sociale agricole (MSA), j'avais déjà signalé le risque de désertification médicale en milieu rural, alors que le phénomène n'était pas encore visible. Il est désormais avéré. Et il ne touche pas que les zones rurales. Dans le Nord-Pas-de-Calais, le problème se posera avant cinq ans non seulement dans l'arrière-pays du littoral et dans le sud, mais aussi dans le sillon minier et sur le versant nord-est de la métropole, c'est-à-dire dans des zones urbaines sensibles.

Ce problème ne saurait non plus être réduit au manque de généralistes. La ministre a annoncé qu'elle voulait mettre en place des équipes de soin de proximité : en effet, quel que soit le débat entre incitation et coercition, on ne répondra aux besoins médicaux, qui portent de plus en plus sur le suivi des maladies chroniques, qu'en libérant du temps médical et en faisant coopérer avec les médecins traitants infirmiers et kinésithérapeutes, qui peuvent participer à une prise en charge de proximité. Dans ma région, il existe soixante projets de maisons et pôles de santé et j'ai agréé récemment un protocole de coopération entre un ophtalmologiste et des orthoptistes : les seconds assureront les mesures de la réfraction, de sorte que le premier pourra se consacrer aux actes plus complexes.

Encore trois précisions concernant l'accès aux soins.

Les ARS travaillent à concrétiser l'engagement pris par le Président de la République de garantir un accès aux services d'urgence en moins de trente minutes. Cela passe par des mesures différenciées selon les situations : installation d'une structure mobile d'urgence et de réanimation (SMUR), révision du dispositif de transports héliportés, recours à des médecins correspondants du SAMU...

Nous avons également signé un accord avec la Belgique pour permettre au SAMU le plus proche d'intervenir sans considération de frontière. La répartition des interventions ayant été équilibrée, nous ne constatons pas à cette heure de transfert de charges d'un pays vers l'autre.

Le développement des maladies chroniques crée un besoin de dispositifs d'accompagnement, en particulier d'accompagnement des personnes âgées. En lien avec les conseils généraux, nous favorisons la prise en charge à domicile, ce qui comprend des aspects autres que sanitaires comme l'intervention d'aides ménagères. Nous développons aussi des structures adaptées à la prise en charge de pathologies ou handicaps spécifiques, comme la maladie d'Alzheimer ou l'autisme.

La problématique concentration versus dispersion concerne aussi l'hôpital public. Dans ma région, relativement dense, chaque zone possède un hôpital général, mais une prise en charge de haut niveau, comme celle qu'effectue un centre hospitalier régional universitaire (CHRU), ne peut être réalisée partout. Garantir la qualité et la sécurité des soins dispensés sur les plateaux lourds passe par une concentration plus forte de ces équipements.

Il est toujours délicat de trouver le bon équilibre entre proximité et qualité des soins, mais il y a deux manières de rapprocher l'hôpital de la population. La première est de faciliter les déplacements : nous implantons donc les nouveaux hôpitaux dans des noeuds de communication permettant un accès rapide mais, dans d'autres cas, il peut être nécessaire d'améliorer les réseaux de transport, notamment publics. La seconde manière consiste à développer la télémédecine, grâce à la généralisation du haut débit. Le Nord-Pas-de-Calais a ainsi mis en place le système Télé-AVC qui permet à un neurologue et à un radiologue d'effectuer à distance, en moins d'une heure, un diagnostic aussitôt transmis à l'urgentiste ; celui-ci sera alors à même, le cas échéant, de pratiquer une thrombolyse dans le délai impératif de trois heures. Ce dispositif fonctionnera bientôt dans cinq hôpitaux du sud de la région.

Comme toutes les ARS, nous avons élaboré un projet régional de santé. Après un temps de concertation avec les conseils généraux et avec le conseil régional, nous sommes entrés dans une phase plus formelle de consultation : nous avons adressé le projet à leurs présidents et aux préfets, afin de recueillir leur avis. Nous développons à présent une contractualisation, notamment sur le médico-social et sur la prévention. S'agissant enfin des contrats locaux de santé, j'ai décidé de donner la priorité aux intercommunalités, notamment pour certains problèmes comme la chloration de l'eau qui ne peuvent être traités par les petites communes.

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Véronique Malbec, directrice générale des services judiciaires du ministère de la justice

Il n'est pas aisé de réduire le nombre des sites judiciaires pour rationaliser les moyens tout en garantissant aux citoyens un accès facile à la justice. Nous pouvons cependant nous appuyer sur les maisons de justice et du droit, dans lesquelles les victimes peuvent trouver conseil ou rencontrer un conciliateur ; y siègent également des délégués du procureur, qui peuvent effectuer un rappel à la loi. Les points d'accès au droit permettent de même d'obtenir une réponse de proximité à des questions juridiques. Enfin, les maisons de justice et du droit « nouvelle génération » proposent un contact direct avec la juridiction, puisqu'un greffier répond précisément aux justiciables.

D'autre part, le code de l'organisation judiciaire permet d'organiser des audiences foraines, en raison des nécessités locales et sur décision du premier président de la cour d'appel, après avis du procureur général. Douze des quinze cours d'appel touchées par la réforme de la carte judiciaire ont eu recours à ce dispositif, qui permet par exemple aux juges aux affaires familiales ou aux juges des enfants de se déplacer pour entendre des justiciables et leur apporter des réponses de proximité.

Le ministère de la justice met les nouvelles technologies à profit pour rapprocher magistrats ou fonctionnaires de leurs partenaires de proximité. C'est ainsi que nous recourons à la communication électronique pour correspondre avec les avocats ou avec les huissiers, ainsi qu'avec la gendarmerie et, bientôt, avec la police. Dans ces deux derniers cas, il s'agit de ce qu'on appelle les échanges inter-applicatifs, qui évitent d'avoir à ressaisir des données et permettent d'alimenter plus rapidement les fichiers des services enquêteurs. Pour ce qui est de la relation avec le justiciable, on se heurte à plus de difficultés. Certes, comme on l'a dit, il est désormais possible de porter plainte en ligne mais on se heurte au-delà à l'obligation de sécuriser les données et de vérifier l'identité de son correspondant. Nous travaillons donc à rendre totalement fiable la signature électronique.

L'extraction judiciaire a été transférée des services du ministère de l'intérieur, police et surtout gendarmerie, vers l'administration pénitentiaire, qui relève du ministère de la justice. Le 1er janvier 2013, quatorze cours d'appel sur trente-six devraient être entrées dans le dispositif. Reste que ces missions ne peuvent être assurées à effectifs constants. Une évaluation des transferts d'équivalents temps plein que cela implique est donc en cours : une mission commune à nos trois inspections générales et à celle des finances y travaille.

Pour les nouvelles réformes annoncées par le Président de la République et par la Garde des sceaux, en particulier en ce qui concerne le ressort des cours d'appel, aucun calendrier n'a encore été arrêté : nous n'en sommes qu'à la phase de la concertation.

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Jean-Bernard Kovarik, adjoint au directeur général des infrastructures, des transports et de la mer, DGITM, ministère des transports

La concertation en matière d'infrastructures de transport est très encadrée par le code de l'urbanisme et par la réglementation, qui obligent à des débats et enquêtes publics. Depuis quelque temps, on constate que la durée des procédures tend à s'allonger, soit qu'on ait du mal à faire accepter les projets par nos concitoyens, soit qu'on se heurte à des contraintes de financement. Faut-il se réjouir qu'une plus grande place soit réservée à l'expression des parties prenantes ou déplorer le retard mis à l'amélioration du service ? C'est au pouvoir politique de prendre position sur ce point.

Quels effets la réalisation de lignes à grande vitesse a-t-elle sur les territoires, à court, moyen ou long terme ? Mesurer cette incidence exigerait plus de recul que nous n'en avons, mais on peut avancer dès aujourd'hui que, par elle-même, la venue du TGV ne déclenche pas des effets économiques, spatiaux ou sociaux considérables. Pour favoriser l'implantation de nouvelles activités, il faut y ajouter des politiques d'accompagnement, renforçant l'attractivité des territoires, et organiser le rabattement sur les lignes locales de TER ou de transports en commun : autant de politiques publiques aux mains des collectivités.

Il serait légitime que l'utilisation de certains aménagements donne lieu au versement d'une contribution économique territoriale, mais notre système ferroviaire souffre d'un déficit de plus d'un milliard par an, comblé par le recours à l'emprunt ou par des dotations de l'État.

Le numérique constitue un formidable moyen de répondre aux nouvelles demandes de mobilité. Même s'il est complexe de connecter des systèmes qui n'ont pas toujours été conçus pour s'emboîter, l'usager attend un service fluide, continu, « sans coutures ». La mise en oeuvre d'une directive européenne de 2010 offrira une occasion de déployer sur le territoire des systèmes de transport intelligents. Elle permettra aussi de concentrer des moyens sur des territoires pilotes, en les dotant de « démonstrateurs d'excellence » car nous avons des entreprises fort bien placées dans la compétition technologique.

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Emmanuel Berthier, délégué interministériel à l'aménagement du territoire

Que la DATAR soit à la disposition de dix ministres ne l'empêche pas de travailler avec l'ensemble des administrations centrales. La circulaire « Écoles situées en zone de montagne » a ainsi été préparée en commun au sein du Conseil national de la montagne – sous le contrôle vigilant du président de sa commission permanente !

Les analyses de l'évolution de l'offre de soins conduites par la MSA – que la DATAR fait siennes depuis quinze ans – montrent l'importance de fonder les politiques publiques sur une analyse très fine des données géographiques. S'agissant de l'accès aux soins par exemple, c'est bien en effet l'ensemble de la France du nord qu'il faut considérer, zones rurales et zones urbaines confondues, même s'il faut ensuite les distinguer en ce qui concerne l'accès aux plateaux hospitaliers. Les politiques publiques doivent prendre en compte cette diversité, sachant que, pour développer leur économie de manière optimale, il faut mettre tous les territoires en capacité de profiter de leurs atouts.

Le 27 juillet, Mme Pellerin, ministre déléguée chargée de l'économie numérique, et Mme Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement, ont tenu une table ronde sur l'aménagement numérique, afin de poser des jalons pour le travail que le Gouvernement va conduire sur le sujet. Fin août, la première s'est exprimée devant RuraliTIC. Le programme, qui sera arrêté dans les prochaines semaines, traitera des infrastructures nécessaires pour déployer le très haut débit en dix ans, conformément à l'engagement du Président de la République.

La contractualisation avec les territoires est une piste que Mme Duflot a suggérée devant votre Commission en juillet. Vous recevrez sans doute des propositions de sa part dans les semaines à venir, étant entendu que beaucoup dépendra des décisions qui seront prises en matière de décentralisation.

La DATAR s'est toujours préoccupée des questions transfrontalières, qui concernent près de 20 % de la population française et constituent donc un enjeu de développement important. Nous soulignons également l'intérêt, pour certains territoires, d'une approche macro-régionale dans le cadre européen. Nous en avons de premières expériences nationales, pour la gestion de certains massifs ou de certains fleuves : ce sont elles qui ont inspiré la constitution des deux macro-régions existantes, l'une de part et d'autre du Danube, l'autre le long de la Baltique. Il s'agit maintenant pour nous de déterminer quels projets de ce type présenter dans le cadre de la programmation 2014-2020 – les débats avec les élus locaux et la discussion interministérielle ont commencé.

La programmation européenne, qui sera engagée dans les prochaines semaines, est au coeur d'une concertation avec les élus locaux. Le contrat de partenariat entre l'Union européenne et les États qui sera signé prochainement doit faire l'objet d'une concertation et d'une consultation locales et nationales. Fin novembre, nous pensons être en mesure de proposer au Gouvernement un dispositif permettant de les organiser entre janvier et septembre 2013.

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Soyez tous remerciés pour votre participation à cette table ronde.

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Monsieur le président, dans un esprit constructif, j'ai réservé cette intervention pour la fin de la séance.

Cette nuit, à une heure et demie du matin, la représentation nationale a voté un amendement qui abaisse de 3 500 à 1 500 habitants le seuil de population retenu pour l'application des obligations posées la loi SRU. Les conséquences de cet amendement d'origine parlementaire n'ont pu être analysées dans l'étude d'impact. La majorité n'a même pas su indiquer combien de communes touchait cette décision, ni, a fortiori, combien de logements devraient y être construits. Elle ne savait pas davantage quelles nouvelles aides à la pierre le Gouvernement mettrait à la disposition des communes concernées, vraisemblablement au détriment d'autres collectivités. Pour la sérénité de nos débats, il serait bon qu'à l'ouverture de la séance, nous ayons obtenu des réponses sur ces points. J'ai déjà déploré les conditions dans lesquelles nous travaillons mais nous serions prêts à participer à une nouvelle réunion de la Commission si vous estimiez bon de la convoquer avant quinze heures.

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 26 septembre 2012 à 9 h 30

Présents. - M. Christian Assaf, M. Serge Bardy, Mme Catherine Beaubatie, M. Philippe Bies, M. Florent Boudié, M. Christophe Bouillon, M. Jean-Louis Bricout, Mme Sabine Buis, M. Alain Calmette, M. Yann Capet, M. Patrice Carvalho, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, M. Jean-Jacques Cottel, Mme Florence Delaunay, Mme Sophie Errante, M. Olivier Falorni, M. Yannick Favennec, M. Laurent Furst, M. Claude de Ganay, M. Charles-Ange Ginesy, M. Michel Heinrich, M. Jacques Kossowski, Mme Valérie Lacroute, M. Alain Leboeuf, Mme Viviane Le Dissez, M. Arnaud Leroy, M. Michel Lesage, Mme Martine Lignières-Cassou, M. Olivier Marleix, M. Jean-Luc Moudenc, M. Philippe Noguès, M. Edouard Philippe, M. Philippe Plisson, M. Christophe Priou, Mme Catherine Quéré, Mme Marie-Line Reynaud, Mme Sophie Rohfritsch, M. Martial Saddier, M. Gilbert Sauvan, M. Gilles Savary, M. Jean-Marie Sermier, M. Gabriel Serville, Mme Suzanne Tallard, M. David Vergé, M. Jean-Pierre Vigier

Excusés. - M. Yves Albarello, M. Alexis Bachelay, M. Denis Baupin, Mme Chantal Berthelot, Mme Fanny Dombre Coste, M. Jean-Christophe Fromantin, Mme Geneviève Gaillard, M. Christian Jacob, M. Jacques Krabal, M. Philippe Martin, M. Bertrand Pancher, M. Rémi Pauvros

Assistait également à la réunion. - M. Philippe Cochet