Commission des affaires sociales

Réunion du 26 juin 2013 à 9h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 26 juin 2013

La séance est ouverte à neuf heures.

(Présidence de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)

La Commission examine le rapport d'information de M. Gérard Bapt, préalable au débat d'orientation des finances publiques.

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Mes chers collègues, nous examinons le rapport d'information préalable au débat d'orientation des finances publiques que présente M. Gérard Bapt en sa qualité de rapporteur pour les recettes et de l'équilibre général du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.

Je rappelle que ce débat d'orientation aura lieu en séance publique à l'issue de l'examen du projet de loi de règlement de 2012.

Je regrette que la version définitive du rapport préparatoire établi par le Gouvernement ne nous ait été transmis qu'hier dans l'après-midi.

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Le nécessaire redressement de nos comptes publics et le respect de nos engagements européens supposent une approche globale des finances publiques, consacrée par la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

Le Gouvernement doit présenter en application de la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, au cours du dernier trimestre de la session ordinaire, un rapport sur les orientations des finances sociales qui peut donner lieu à un débat à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Le débat d'orientation des finances sociales a toujours été concomitant au débat d'orientation des finances publiques, et se fonde sur un rapport commun à celui sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques mentionné à l'article 48 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

Par ailleurs, le débat d'orientation des finances publiques intervient peu de temps après la réunion de printemps de la Commission des comptes de la sécurité sociale, qui a eu lieu le 6 juin dernier. Mon rapport peut donc s'appuyer sur les résultats de l'année 2012 et les prévisions actualisées par la commission pour 2013.

La présentation de la Commission des comptes de la sécurité sociale a montré que les mesures votées en 2012 ont permis un redressement important des finances sociales en 2012, mais que l'augmentation du chômage en 2013 contrarie cette trajectoire en diminuant les recettes de la sécurité sociale.

Le débat d'orientation des finances publiques pour 2014 doit donc permettre d'examiner comment ramener nos comptes sociaux à l'équilibre sans compromettre la reprise économique espérée l'an prochain. La recherche d'une trajectoire de retour à l'équilibre est en effet un impératif moral vis-à-vis des générations futures. C'est aussi une question de souveraineté : le niveau très élevé de la dette publique et le poids de la charge de la dette dans les comptes publics nous rendent extrêmement vulnérables à une hausse éventuelle des taux d'intérêts pratiqués par nos créanciers.

Enfin, il s'agit de respecter nos engagements vis-à-vis de nos partenaires de la zone euro.

À cet égard, le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) au sein de l'Union économique et monétaire, signé le 2 mars 2012 à Bruxelles, a renforcé la discipline budgétaire et la coordination des politiques économiques. Nous sommes donc en continuité des engagements anciens de l'État français. Le traité prescrit aux États signataires de se fixer un objectif de solde structurel ne pouvant être inférieur à - 0,5 % du PIB pour les États dont l'endettement public brut dépasse 60 % du produit intérieur brut (PIB), ce qui est notre cas.

Aussi la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques met en oeuvre ce traité en le transposant dans notre droit interne. Elle prévoit que des lois de programmation des finances publiques traceront le chemin du retour à l'équilibre structurel, sous la surveillance d'un Haut Conseil des finances publiques qui pourra donner l'alerte en cas de déviation de la trajectoire. La loi du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 fixe, pour l'ensemble des dépenses publiques, l'objectif d'un solde structurel supérieur ou égal à - 0,5 % du PIB en 2015, et l'objectif d'un équilibre structurel à partir de 2016. L'objectif pour fin 2013 est de - 1,6 % du PIB.

Le rapport préparatoire transmis par le Gouvernement révise l'objectif pour fin 2013 à - 2 %, compte tenu de la conjoncture économique, dans la ligne du programme de stabilité. Cela reste un niveau de déficit structurel jamais atteint depuis 2000.

Pour 2014, le Gouvernement prévoit la poursuite de l'effort structurel, à un rythme moins rapide de un point de PIB, porté à 70 % par des économies en dépenses. L'effort se poursuivra sur la période 2015-2017 pour permettre à la France de revenir à l'équilibre structurel en fin de période, conformément à la loi de programmation. Les administrations de sécurité sociale doivent participer à cet effort structurel à hauteur de 5 milliards d'euros en 2014.

Venons-en aux comptes sociaux proprement dits.

Le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) est passé de 20,9 milliards d'euros en 2011 à 17,5 milliards d'euros en 2012 et ce solde sera maintenu en 2013.

D'importants efforts structurels en recettes et en dépenses ont donc sensiblement redressé les comptes sociaux en 2012. En 2013, les dépenses sont toujours bien maîtrisées mais les recettes pâtissent du ralentissement de la croissance de la masse salariale, si bien que la trajectoire de redressement des comptes devrait connaître un palier. La poursuite des réformes structurelles en 2014 devrait permettre de poursuivre l'amélioration du solde structurel sans compromettre la reprise économique.

L'exécution des comptes 2012 a finalement été conforme aux objectifs de la loi de financement grâce aux mesures de la loi de finances rectificative du 16 août 2012 qui a prévu la hausse du forfait social, l'augmentation des prélèvements sociaux sur le capital et la hausse des impositions sur les stock-options. Les produits du régime général ont augmenté de 4,4 % en 2012. Le supplément de recettes correspondant aux nouvelles mesures de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 et de la loi de finances rectificative est estimé à 7 milliards d'euros en 2012.

Les dépenses de santé ont été bien maîtrisées en 2012, avec une sous-exécution de l'Objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) de 860 millions d'euros de moins que l'objectif fixé en loi de financement, écart presque intégralement imputable aux soins de ville. On observe également que les comptes des hôpitaux se sont globalement améliorés.

En 2013, la faible progression de la masse salariale freine le redressement des comptes. Selon les prévisions économiques, le produit intérieur brut ne croît que de 0,1 % en 2013 et la croissance de la masse salariale qui sera de 1,3 % est en retrait de un point par rapport aux prévisions initiales. En revanche, l'inflation escomptée à 1,75 % ne sera que de 1,2 %.

Les recettes sont inférieures de 3,4 milliards d'euros aux prévisions initiales, avec 4 milliards d'euros de moindres recettes fiscales et sociales, en partie compensés par une augmentation des transferts du FSV de 600 millions d'euros au titre de la prise en charge des cotisations chômage.

Ce sont, au total, 6 milliards d'euros de recettes supplémentaires pour le régime général et le FSV qui sont liées aux mesures de la loi de financement pour 2013 et du collectif budgétaire de l'été 2012.

Ainsi, les cotisations nettes devraient augmenter de 3,2 % en 2013. En revanche, les recettes de CSG ne progresseraient que de 0,8 % (après + 3,9 % en 2012) en raison de l'atonie des revenus d'activité et d'une répartition de la CSG défavorable à la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAMTS).

En définitive, l'évolution des soldes des différentes branches de la sécurité sociale entre 2012 et 2013 est contrastée. Le déficit de la branche maladie augmente de 2 milliards d'euros en 2013, atteignant 7,9 milliards d'euros au lieu de 5,2 milliards d'euros prévus en loi de financement. Le déficit de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), après une stabilisation en 2011 et 2012 autour de 2,5 milliards d'euros, s'accroîtrait de 700 millions d'euros en 2013, du fait du freinage marqué de la croissance des recettes de cotisations et de CSG qui constituent 83 % des recettes de la branche famille. En revanche, l'amélioration du solde de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) se poursuit en 2013.

Les incertitudes de l'année 2014 se traduisent par une baisse limitée des déficits des dépenses publiques, qui passent de - 4,8 % du PIB en 2012 à - 3,7 % en 2013 pour l'ensemble des administrations publiques. Pour la sécurité sociale, il reste stable à - 0,6 % du PIB puis diminuerait progressivement et l'équilibre serait atteint en 2016.

Vous savez les polémiques qui opposent au Gouvernement, sur ce sujet, le Président de la commission des finances de l'Assemblée. Elles devraient être résolues par l'audition prochaine de la Cour des comptes.

Ces projections reposent sur l'hypothèse d'un taux de croissance de 1,2 % en 2014 et de 2 % par an à partir de 2015, soit un chiffre légèrement supérieur à la croissance potentielle évaluée à 1,5 % en moyenne.

L'objectif de retour à - 3 % de déficit public effectif en 2013, fixé par la loi de programmation des finances publiques, a été repoussé à 2014 par le programme de stabilité. La Commission européenne a néanmoins accepté d'accorder un délai supplémentaire d'un an à la France. En revanche, ce délai n'autorise aucun relâchement de l'effort structurel de réduction du déficit.

Des mesures structurelles doivent donc être prises afin de corriger la trajectoire des finances sociales. En dépenses comme en recettes, elles doivent permettre de ramener les comptes sociaux à l'équilibre tout en préservant notre modèle social.

Concernant les dépenses d'assurance maladie, la croissance de l'ONDAM devrait être ramenée à 2,6 % en 2014 (contre + 2,7 % en 2013) puis 2,5 % les années suivantes. Ralentir la progression de l'ONDAM de 0,1 point représente un effort d'environ 175 millions d'euros par rapport à 2013 – mais aux alentours de 3 milliards d'euros par rapport à l'évolution tendancielle des dépenses de santé.

La sous-exécution de l'ONDAM en 2012, et vraisemblablement aussi en 2013, montre que cette maîtrise des dépenses de santé est réaliste. On peut s'interroger sur la pertinence du maintien de taux de progression équivalents entre dépenses de soins de ville et dépenses hospitalières alors que les dépenses de soins de ville sont mieux maîtrisées, comme en témoigne leur sous-consommation en 2012. Je suggère que les sous-consommations soient partiellement réinvesties dans l'amélioration de l'offre de soins dans les zones de faible densité, dans le développement de la télémédecine, dans la rémunération à la performance des médecins ruraux, etc.

En ce qui concerne l'hôpital, la stratégie nationale de santé vise à structurer le système de santé autour de la notion de parcours de soins, en donnant sa juste place à l'hôpital. Cela suppose de décloisonner les secteurs des soins de ville, des soins hospitaliers et le secteur médico-social. Les améliorations en ce sens renforcent l'efficience de la gestion, à l'image du logiciel « Trajectoire » qui est un outil d'aide à l'orientation pour mieux transférer des patients en court séjour à l'hôpital vers les soins de suite et de réadaptation. Lancé en 2008 à Lyon, il s'est étendu à la quasi-totalité des régions. Ce type d'amélioration de l'efficience peut englober également l'hospitalisation à domicile et le secteur médico-social.

L'amélioration de la gestion des lits passe aussi par une rationalisation et une harmonisation des systèmes d'information hospitaliers. Il faudrait mettre en oeuvre des règles d'homologation et d'interopérabilité des systèmes. Certaines formules coopératives existent déjà dans quelques villes : il faut que ce genre de méthodes se généralise au niveau régional, dans la mesure où elle favorise l'efficience.

Je vous propose également que le Fonds d'intervention régionale (FIR) soit conforté, afin de permettre aux agences régionales de santé de mener une politique régionale d'organisation des soins.

Le débat doit s'ouvrir sur les dépenses de médicaments : vous avez eu connaissance de propositions diverse, parfois peu crédibles… Je propose des pistes de réflexion et souhaite rappeler que le développement des approches thérapeutiques personnalisées, basées sur les progrès réalisés en matière de génomique et de biomarqueurs, impose un nouveau modèle médico-économique pour contenir l'envolée du coût des médicaments innovants.

La gestion des dépenses de retraites a occupé nos travaux récemment. En ce qui concerne l'ensemble des régimes de retraite obligatoires de base et complémentaires, les projections du Conseil d'orientation des retraites (COR) publiées en décembre 2012 montrent que le besoin de financement total atteindra de l'ordre de 20 milliards d'euros en 2020, malgré la réforme de 2010 dont l'objectif était l'équilibre à cet horizon.

Pour la branche famille, l'économie nette des mesures présentées par le Gouvernement doit être d'environ un milliard d'euros, ce dont le programme de stabilité présenté en avril tient déjà compte.

Des propositions supplémentaires pourraient être faites pour moduler le montant d'un certain nombre d'autres allocations, en fonction des revenus, dans un esprit de redistribution et de justice sociale : je pense au complément de mode de garde par exemple.

Enfin, le recours à des appels d'offre ouverts et impartiaux concernant les systèmes d'information devrait permettre à la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) de réaliser de substantielles économies de fonctionnement. J'ai noté que nos deux coprésidents de la Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) s'en étaient souciés à l'occasion d'une récente audition.

Il convient en outre de renforcer et de simplifier les recettes de la protection sociale : il faut accroître la lisibilité des prélèvements et des recettes affectées car un prélèvement simple jouit d'une plus forte acceptabilité. Ce doit être le cas en particulier pour la branche famille.

Des mesures supplémentaires de réduction des niches fiscales et sociales pourraient compenser en partie le moindre rendement des mesures de recettes mises en oeuvre en 2013.

En matière de niches, je souhaite que soit revue la situation des travailleurs frontaliers, lorsque la mission conjointe de l'Inspection générale des affaires sociales et de l'Inspection des finances rendra ses conclusions au cours de l'été.

En matière de taxes comportementales, l'action sur l'alcool et le tabac doit être poursuivie. Le rapport d'étape de juin 2013 du Haut Conseil pour le financement de la protection sociale fait le point sur la complexité de ce type de recettes. La prochaine loi de financement devra permettre d'opérer les clarifications nécessaires.

Enfin, sur la question de la dette de la sécurité sociale, les déficits de la branche vieillesse sont repris chaque année jusqu'en 2018 par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) en vertu de la loi de financement pour 2011, dans le cadre de la réforme des retraites de 2010.

En revanche, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) accumule les déficits des autres branches. La loi de financement pour 2012 avait fixé son plafond de trésorerie à 22 milliards d'euros. Cette limite a été respectée, avec un point bas de trésorerie qui s'est établi à - 18,4 milliards d'euros. Je rappelle l'importance de ce non-dépassement du plafond : l'ACOSS a en effet initialement bénéficié de l'ouverture de lignes de crédits privilégiées de la part de la Caisse des dépôts et consignations.

En juin 2013, la CADES devrait reprendre 7,7 milliards d'euros à la CNAV et au FSV. Toutefois, la trésorerie de l'ACOSS devrait atteindre un point bas à - 27,8 milliards d'euros, sans dépasser le plafond de trésorerie fixé à 29,5 milliards pour 2013.

L'accumulation de ces déficits pose inévitablement la question de leur reprise par la CADES, ou, pourquoi pas, par le budget de l'État, comme c'était le cas avant 1996.

Dans le cadre des dispositions organiques en vigueur, les transferts de dette à la CADES doivent s'accompagner d'un relèvement de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS). Une autre solution consiste à repousser l'échéance de remboursement de la dette, comme ce fut le cas lors du report de quatre ans de cette échéance. Cette mesure n'a pourtant d'autre effet que de reporter sur les générations futures le paiement des dépenses d'aujourd'hui.

Le Gouvernement doit donc apporter une réponse à la question de la dette qui s'accumule sur le compte de l'ACOSS.

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Comme je vous l'ai indiqué plus tôt, je regrette, au nom de tous les membres de la commission, la réception tardive du rapport préparatoire au débat d'orientation des finances publiques que je n'ai pu vous faire parvenir qu'hier dans l'après-midi. J'adresserai un courrier en ce sens au ministre de l'économie et des finances.

Je pense que l'exposé qui vient de nous être fait devrait dissuader certains de nos collègues de la commission des finances qui seraient tentés par une fusion de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale. À l'évidence, les recettes et les dépenses de la sécurité sociale présentent une spécificité qui justifie un examen distinct de celles du budget de l'État, ne serait-ce que dans un souci de clarté.

Je vous rappelle, par ailleurs, que nous entendrons prochainement Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, sur la stratégie nationale de santé. Nous auditionnerons également, dans le courant du mois de juillet, le professeur Michel Reynaud, addictologue, qui a rendu un rapport à la demande de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) dans lequel il souligne l'efficacité des taxes comportementales pour lutter contre les addictions qui constituent une menace pour notre société.

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Ce débat est un moment important pour la commission des affaires sociales : nous en arrivons à « l'heure de vérité » sur nos choix politiques. Le groupe SRC est, sans surprise, globalement satisfait des choix du Gouvernement qui reprennent les orientations déjà définies l'an dernier. L'objectif est celui d'une gestion rigoureuse de l'argent public, mais sans rigueur. Il est indispensable, compte tenu de la situation économique, que chaque euro soit bien dépensé, sans pour autant « casser » la croissance qui doit, tout au contraire, être soutenue.

S'agissant du passé, il convient de dépasser les polémiques stériles. Nous devons nous retrouver, droite et gauche confondues, pour redresser notre pays. Je note que nous obtenons des recettes supplémentaires et, contrairement aux années passées, une nette diminution du déficit structurel, sans précédent – de - 1,2 % – grâce à des économies dans les dépenses qui diminuent de 300 millions d'euros en 2012. Un effort est donc consenti pour agir sur les deux leviers.

Les économies réalisées dans les dépenses de santé illustrent la volonté d'être rigoureux. Des réductions importantes sont obtenues en matière de médicaments ou de dépenses en faveur des laboratoires pharmaceutiques. Cela va dans le bon sens.

Pour l'avenir, il me semble qu'en tant que parlementaires, nous devons émettre un avis sur le scénario économique qui nous est proposé, à savoir une croissance proche de zéro en 2013 puis un retour à une croissance tendancielle plus dynamique. Je pense que notre pays a les moyens d'atteindre un taux de croissance de 2 %, notamment par un effet de rattrapage, après une période de moindre dynamisme. C'est sans doute un scénario pour lequel il faudra se battre, mais il n'est ni pessimiste, ni exagérément optimiste. Il repose sur une politique offensive, notamment en matière d'investissements publics et privés, et réaliste.

Concernant la future stratégie, un retour à l'équilibre des comptes est prévu pour 2016 s'agissant du solde structurel, et, pour les comptes de la sécurité sociale, un excédent structurel est attendu pour 2017. Je me réjouis d'ailleurs du choix d'un objectif de solde structurel, rendu possible par la signature du traité de l'été dernier : il devrait nous éviter un scénario « à la grecque » dans lequel à force de vouloir combler des déficits conjoncturels, on en vient à les aggraver.

J'en viens à la méthode retenue, qui me paraît pertinente. Elle repose sur la modernisation de l'action publique et des économies réalisées au cas par cas, et non pas « à la hache » comme cela était le cas avec la révision générale des politiques publiques (RGPP). Les économies seront réalisées dans la justice, avec la recherche permanente du progrès. Dans le domaine de la santé, le grand enjeu pour les années à venir sera le vieillissement de la population ; en matière de politique familiale, ce sera le mode de garde des enfants ; ce sera la pénibilité du travail et l'égalité entre femmes et hommes pour ce qui concerne les retraites.

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En préalable, je tiens à vous assurer de notre soutien, Madame la Présidente, dans vos démarches auprès du ministère de l'économie et des finances. Il est inadmissible d'avoir dû examiner, dans la nuit, les documents qui nous ont été transmis si tardivement. Je félicite d'ailleurs le rapporteur pour son travail de rédaction nocturne…

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Je vous rappelle que nous avons eu, nous aussi, à connaître des situations similaires sous la précédente législature.

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Peut-être, mais je croyais que « le changement, c'était maintenant ! ».

J'en viens au fond. Jusqu'en 2008, on a enregistré une nette diminution des déficits. Ceux-ci ont recommencé à se creuser en 2009 et 2010 pour ce qui concerne l'assurance maladie, pour passer de 10 milliards d'euros en 2008 à 20 milliards d'euros en 2010, en raison de la crise. Cette situation nous a conduits à adopter en 2011, à l'initiative de M. François Fillon, une loi de financement de la sécurité sociale rectificative, grâce à laquelle les déficits ont reflué, passant de 2011 de 12 milliards à 8 milliards d'euros pour la branche maladie, puis à 5,9 milliards d'euros en 2012.

J'appelle donc l'actuelle majorité à un peu plus de modestie et de prudence. On constate aujourd'hui, avec la Commission des comptes de la sécurité sociale, une nette reprise de la dégradation des comptes sociaux, avec un déficit de 14,3 milliards d'euros dont 2 milliards de plus pour la seule branche maladie.

Vous avez voulu, au mois d'octobre dernier, rester « droits dans vos bottes » : je me souviens des réflexions de M. Jérôme Cahuzac, alors ministre du budget, et de Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, lorsque nous attirions leur attention sur le caractère totalement irresponsable des prévisions qui étaient faites, à savoir un taux de croissance économique de 0,8 %, un taux de croissance de la masse salariale de 2,4 % et une progression de l'Objectif national des dépenses d'assurance-maladie (ONDAM) de 2,7 %.

Nous constatons aujourd'hui que nous avions alors raison dans notre analyse, confirmée, d'ailleurs, par la Commission des comptes de la sécurité sociale.

Maintenant, que faire ? Les déficits pourraient devenir abyssaux, surtout si vous continuez sur la même ligne. Certains points sont positifs : l'ONDAM est respecté, ce qui est tout à l'honneur de la médecine de ville dont il faut saluer l'esprit de responsabilité. Les dépenses hospitalières se sont stabilisées. Il est vrai, aussi, que nous n'avons pas eu à connaître de grande épidémie – il n'est pas sûr qu'il en soit toujours ainsi.

L'adoption d'une loi de financement de la sécurité sociale rectificative me paraît désormais indispensable, alors que telle ne semble pas être votre intention. On nous dit, monsieur le rapporteur, que toute évolution des prélèvements obligatoires est entourée d'un certain nombre de risques : lesquels ? Allez-vous être contraints d'augmenter ces prélèvements ? Avec une prévision de croissance délicate pour 2013 et 2014, qui sera défavorable pour les régimes de retraites et les recettes fiscales, serez-vous dans l'obligation d'augmenter la CSG, les cotisations de sécurité sociale et les impôts comme l'an dernier, alors qu'on voit bien, aujourd'hui, que ces mesures ont été inefficaces pour résorber les déficits ?

La solution, à mes yeux, consiste à réviser l'ONDAM pour en fixer le taux de croissance à 1,8 % ou 2 %, et donc à adopter une loi de financement de la sécurité sociale rectificative.

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Je vous rappelle, monsieur Door, que nous avons connu, cette année, une épidémie de grippe importante. Cela démontre que les professionnels de santé peuvent maîtriser les comptes sociaux et que tous les malades ne sont pas des fraudeurs...

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Nous atteignons aujourd'hui les limites de l'exercice, compte tenu des délais dont nous avons disposé pour étudier le rapport qui nous a été remis.

J'émettrai une remarque d'ordre général. Je ne pense pas que l'on puisse se contenter d'une approche strictement comptable en faisant l'impasse sur les besoins de santé de nos concitoyens et sur la politique de santé publique. Dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, nous nous sommes engagés à améliorer les soins et à lutter contre les déserts médicaux. Quel est le bilan dans ces domaines ? Le rapporteur a évoqué la politique de prévention, qui repose, notamment, sur des taxes comportementales. Cette approche doit être généralisée.

Il convient aussi de mener un travail d'évaluation concernant les « maladies de civilisation », telles que les qualifie l'Organisation mondiale de la santé (cancers, allergies par exemple), et qui contribuent au « trou » de la sécurité sociale. L'espérance de vie en bonne santé régresse. Il nous faut répondre à cet enjeu sanitaire, grâce à une politique de prévention ambitieuse. On nous promet une grande loi de santé publique, mais son examen a été reporté à 2014. Que fait-on, en attendant, pour l'éducation à la santé, la lutte contre la malnutrition et la « malbouffe », ou la lutte contre les risques chimiques ? Nous ne disposons pas d'évaluation en la matière. On ne peut, en tout état de cause, se contenter d'une approche strictement comptable.

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La question des finances publiques est un enjeu majeur pour l'avenir de notre pays et chaque acteur de la dépense – l'État, les collectivités territoriales et les administrations de sécurité sociale – doivent contribuer significativement à la réduction des déficits publics.

Depuis plus de trente ans, les finances publiques ont été en déficit de manière permanente. Il faut remonter à 1974 pour trouver la trace d'un excédent des administrations publiques. Conséquence directe de ces déficits récurrents, la dette publique a explosé.

Le Fonds monétaire international (FMI), s'il adresse un satisfecit aux gouvernements sur leurs finances publiques, « épingle » la France. À l'issue de sa mission d'évaluation annuelle, il estime que la récession sera de 0,2 % cette année dans notre pays, contre 0,1 % dans ses précédentes prévisions publiées mi-avril, et que la croissance ne redémarrera que très mollement en 2014.

Les critiques ne viennent pas que du FMI, mais de nombre d'institutions : Haut Conseil des finances publiques, Cour des comptes, Commission européenne, etc.

Et pour cause : les déficits publics pourraient atteindre au moins 4 % du produit intérieur brut (PIB) en 2013 au lieu des 3,7 % prévus par le Gouvernement. La dette publique devrait dépasser 93 % du PIB en 2013. Les recettes fiscales seront inférieures d'au moins 15 milliards d'euros aux prévisions gouvernementales. Les dépenses, essentiellement celles de la sécurité sociale, pourraient déraper d'environ 5 milliards d'euros par rapport à ces mêmes prévisions. Enfin, le manque de réformes d'ampleur fait que le chômage continuera à augmenter, avec les conséquences que l'on connaît sur nos finances publiques. Sur six mois, l'augmentation du taux de chômage a atteint 0,6 point et la tendance n'est pas prête de s'inverser. L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) estime que le taux de chômage continuera à augmenter jusqu'à fin 2014 malgré l'expansion des emplois aidés et une plus grande flexibilité rendue possible par l'accord sur le marché du travail. Le taux de chômage devrait atteindre 11 % fin 2013 et continuer à progresser en 2014 pour atteindre 11,2 % de la population active à la fin de l'année prochaine. Vous promettiez pourtant un rapide changement…

Je conclurai en conseillant à notre rapporteur Gérard Bapt, qui évoquait la réforme des retraites de 2010, de lire les rapports de la Caisse nationale d'assurance vieillesse qui montrent qu'elle permet de retrouver un équilibre pour le régime général.

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Je centrerai mon intervention sur la branche famille. Nous avons pour volonté d'assurer sa pérennité et de rendre la politique familiale plus juste par une meilleure redistribution des aides aux familles, en les ciblant davantage en direction de celles qui connaissent le plus de difficultés, les familles monoparentales et celles qui se situent en dessous du seuil de pauvreté.

Je note également la volonté du Gouvernement d'augmenter les moyens du Fonds national d'action sociale, qui progresseront d'environ 40 % dans les années à venir, pour atteindre 6,5 milliards d'euros en 2017, soit une augmentation de 2 milliards par rapport à aujourd'hui.

Une meilleure distribution des prestations familiales a été présentée aux acteurs concernés il y a quelques semaines. La convention entre la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) et l'État est en cours de signature : c'est un moment important qui permettra de fixer les règles pour l'avenir.

Je rappelle enfin que nous disposons du Haut Conseil de la famille, structure très dynamique et qui produit de nombreux travaux, comme l'a souligné le rapporteur. Actuellement, le Haut Conseil travaille, à la demande du Gouvernement, sur les barèmes des prestations familiales, dans un souci constant non pas d'économies mais de justice renforcée. Il me semble nécessaire d'attendre ses conclusions afin d'être totalement éclairés sur les évolutions que nous pourrions apporter à la branche famille, au-delà des propositions déjà présentées le 3 juin dernier par le Premier ministre.

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Je prends acte de la volonté du Gouvernement de rétablir l'équilibre des comptes publics d'ici la fin de la législature : je m'inquiète néanmoins lorsque je vois que notre déficit devrait atteindre 4 % du PIB, que les chiffres du chômage et la dette continuent d'augmenter et lorsque j'entends que le ministre de l'éducation nationale annonce la création de 10 000 postes supplémentaires en plus des 60 000 postes déjà programmés pour la prochaine rentrée scolaire dans les collèges et les lycées.

Il a été évoqué une loi sur la dépendance qui est très attendue. Il est vrai que le vieillissement de la population est une problématique lourde. Or, les services à domicile et les places d'hébergement pèsent lourdement sur les départements et nous savons que ceux-ci sont dans une situation difficile. Qu'en est-il de cette loi tant annoncée ?

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S'agissant du bilan relatif à l'exercice 2012, le rapport préparatoire au débat d'orientation sur les finances publiques montre bien que les dépenses d'assurance maladie ont ralenti : on a assisté à une moindre consommation de soins, les honoraires sont restés stables, de même que la consommation de médicaments. De ce point de vue, donc, 2012 n'est pas une mauvaise année. Je souscris entièrement aux préconisations du rapporteur pour 2014 : il faut retrouver des économies et de la performance sur les systèmes d'information en santé, s'inscrire à plein dans la stratégie nationale de santé, notamment par la mise en place d'un équilibre entre l'hôpital et les soins de ville, l'application des bonnes pratiques édictées par la Haute Autorité de santé ou encore une action sur les prix des princeps lorsqu'il existe des médicaments génériques. Enfin, il faut une médecine plus spécialisée.

Enfin, il est nécessaire d'améliorer la qualité de nos indicateurs de santé : on ne peut avoir une approche strictement mathématique du problème.

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Je tiens à souligner votre grand optimisme, voire votre irréalisme, concernant le retour de la croissance dès l'année prochaine, alors même qu'elle est aujourd'hui de 0 %. Poser une hypothèse de croissance de 1,2 % pour 2014 puis de 2 % de 2015 à 2017 me semble utopiste. S'agissant du retour à l'équilibre des comptes, la décentralisation ne modifiera en rien la dynamique des dépenses et des recettes. Avec 4,5 milliards d'euros en moins de dotations, en revanche, nul doute que cela aura un effet sur leur capacité d'investissement. Vous parlez d'identifier les niches les plus efficientes, mais je m'interroge sur la capacité à définir ces niches. Enfin, il faut insister sur la nécessité de lutter contre la fraude, et en particulier, contre le travail dissimulé, qui constitue un réel problème, en particulier depuis la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires. S'agissant de la maîtrise des dépenses enfin, je m'inquiète de ce que l'éducation soit dans notre pays un guichet ouvert, ou encore de l'importance sans cesse soulignée de la police et de la gendarmerie, mais jamais de la santé publique, qui n'apparaît pas comme étant prioritaire pour ce Gouvernement.

Olivier Véran. Il faut poursuivre le processus de réforme de notre modèle social qui a été initié : nous le faisons sur la famille, nous le ferons sur les retraites. Je tiens néanmoins à appeler l'attention sur un point particulier : lorsque le rapporteur évoque la nécessité de contenir l'envolée du coût des médicaments et des dispositifs innovants, il me semble important de rappeler que l'investissement dans l'innovation est un moteur de la croissance française. Ainsi, il est par exemple très difficile aujourd'hui pour le parc hospitalier français de renouveler ses technologies, et je m'interroge sur l'éventualité de trouver d'autres sources de financements pour de tels investissements dans nos hôpitaux.

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Vous me paraissez excessivement optimiste. Il est nécessaire de rétablir l'équilibre des comptes : nous ne pouvons pas continuer à financer nos comptes sociaux par du déficit. Il convient de prendre des mesures structurelles pour corriger la trajectoire des finances sociales. Il s'agit d'un point qui a été souligné par le rapporteur, et il convient donc d'en faire peser le poids sur l'État et ses opérateurs, les administrations de sécurité sociale, mais aussi sur les collectivités locales. Concernant ces dernières, à la lecture du rapport du Gouvernement on est en droit de s'inquiéter. Que lit-on : sur la période 2015-2017, il est prévu une hausse du taux d'impôts directs ; entre 2013-2015, on parle d'une baisse de 3 milliards d'euros des dotations aux collectivités, et enfin, il est précisé que sur la période, l'investissement local poursuivra sa baisse. S'il faut trouver des solutions pour rétablir les comptes, ces mesures pèseront sur les territoires, et cela est inacceptable.

Enfin, j'aurais souhaité avoir davantage d'éléments sur l'amélioration des comptes des hôpitaux que le rapporteur a évoquée tout à l'heure.

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L'opposition a adopté un plan de relance en 2008-2009 intégrant des dépenses supplémentaires : je suis donc surpris par sa réaction aujourd'hui. Je m'étonne donc de voir le Président de la commission des Finances dire aujourd'hui que les trois quarts de l'augmentation de la dépense sont imputables aux dépenses sociales. Dans un contexte comme le nôtre, les prestations sociales jouent un rôle important d'amortisseur de la crise ; elles sont indispensables aux plus défavorisés d'entre nos compatriotes. Il n'est donc pas question de revenir sur le niveau des prestations sociales aujourd'hui, qui sont plus que jamais cruciales. Je préfère donc entendre le Gouvernement annoncer un effort sur les dépenses des ministères et sur le budget de l'État que sur ces dépenses sociales qui bénéficient aux plus défavorisés.

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Vous nous reprochiez il y a quelques années une approche comptable de la sécurité sociale, monsieur le rapporteur : votre introduction est pourtant strictement comptable. Vous montrez d'ailleurs bien dans cette introduction que ce n'est pas M. Barroso qui asphyxie la France, mais que notre pays est tenu par les traités qu'il a signés. Je m'associe également au souhait formulé par nos collègues de la commission des Finances, qui demandent un examen conjoint des comptes de la sécurité sociale et du budget de l'État, car quand on voit que pour inverser la courbe du chômage, le Président de la République s'est engagé à financer des contrats aidés supplémentaires à hauteur d'un milliard d'euros pour 2014, ou encore que 10 000 postes supplémentaires doivent être financés à la rentrée prochaine dans l'Éducation nationale, on peut en effet souhaiter un tel examen conjoint, pour être en mesure d'évaluer l'impact réel que ces mesures auront sur l'équilibre global des comptes.

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Je souscris aux propos du rapporteur, lorsqu'il évoque le problème de la non diminution du prix des princeps, alors même que des génériques existent : il conviendrait d'être plus efficient sur ce sujet. J'aimerais également évoquer une question très précise : celle des fonds dévolus aux victimes de l'amiante au sein de la branche accidents du travail – maladies professionnelles (AT-MP). Le Gouvernement avait accepté à l'automne dernier un amendement que j'avais déposé pour permettre d'ouvrir une seconde voie d'indemnisation à des personnes qui aujourd'hui sont victimes de l'amiante mais ne parviennent pas à obtenir d'indemnisation : je pense aux intérimaires, aux sous-traitants ou encore à des artisans isolés. Il me semble possible de reconnaître leur qualité de victime de l'amiante et de leur ouvrir la possibilité d'être indemnisés sans obérer les comptes de la sécurité sociale.

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S'il est vrai que les comptes de la sécurité sociale constituent un budget important et difficile, je me réjouis que les dépenses concernant les soins de ville et l'hôpital se situent en dessous de l'ONDAM, en particulier grâce aux efforts fournis par les professionnels. Je dénonce cependant un mal français, qui consiste à demander l'année suivante davantage d'efforts à un secteur qui en a déjà accomplis de conséquents l'année précédente et qui a respecté ses objectifs, en considérant que des économies encore plus importantes peuvent être réalisées. C'est une sorte de « double peine ».

La nouvelle gouvernance hospitalière instaurée par la précédente majorité porte désormais ses fruits. Vous indiquez que vous réfléchissez à des évolutions en la matière, je crois qu'il faut rester prudent dans ce domaine. Lorsque l'on cherche des économies en matière de soins de ville, on pointe toujours le secteur du médicament. Certes le médicament coûte cher et les Français en consomment trop, mais nous devons évaluer l'équilibre entre les recettes et les dépenses générées par ce secteur. En effet, le médicament constitue une source d'innovation, d'emploi et de développement industriel, et permet d'améliorer les soins apportés à nos concitoyens. Il ne faut pas toujours stigmatiser ce secteur. Enfin, selon moi, penser que si les recettes baissent, les dépenses diminueront de manière automatique, revient à oublier que nous avons un devoir de solidarité nationale vis-à-vis des Français et de leur santé.

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Je ne reprendrai pas les propos très pertinents de l'orateur de mon groupe Jean-Pierre Door, et me limiterai à une seule observation pour constater la nécessité ardente de dégager des économies plus substantielles que celles envisagées, au vu de la fragilité du dynamisme des recettes. Je remercie le rapporteur d'avoir salué les recommandations relatives au secteur sanitaire et social de la Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS), que j'ai l'honneur de coprésider avec mon collègue Jean-Marc Germain, qu'il serait judicieux de diffuser davantage et d'appliquer. Votre rapport évoque la nécessité de recourir à des appels d'offre ouverts et impartiaux pour les systèmes d'information : bénéficierons-nous de procédures satisfaisantes en la matière ? Il me semble, d'ailleurs, qu'au regard des marges de manoeuvre existantes, de telles procédures pourraient être étendues à l'ensemble du champ sanitaire et social.

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Je constate que le déficit de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) en 2012 s'élève à 2,5 milliards d'euros et que le montant des prestations indûment versées, suite à des erreurs de calcul de la caisse, en excluant les fraudes, atteint 2,13 milliards d'euros. Nous avions reçu l'année dernière le Premier président de la Cour des comptes, qui avait critiqué la grande opacité des mesures de lutte contre ce problème prises par la Caisse nationale. Disposons-nous d'informations sur ces mesures et leurs effets ?

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La prévision de croissance du PIB pour 2013 a été réduite à 0,1 %, alors que le Gouvernement avait retenu une prévision de croissance de 0,8 %. Les perspectives économiques sont sombres : la masse salariale privée devrait diminuer de 1 point et la réduction des déficits, amorcée en 2011, devrait donc connaître un coût d'arrêt, au vu de l'augmentation probable des prestations de sécurité sociale. Alors que le Gouvernement prévoyait un déficit de 11,7 milliards d'euros, il se situera probablement entre 14 et 15 milliards d'euros. Les prestations du seul régime général devraient augmenter de 3,4 %, contre les 3,1 % annoncés.

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Nous tenons ce matin le débat d'orientation budgétaire sur les finances sociales. Or les interventions de certains collègues ont porté sur des domaines ne relevant pas de ce champ, comme la décentralisation ou l'éducation nationale.

Je tiens à rappeler à Bernard Perrut et à Véronique Louwagie et Isabelle Le Callennec que si le Gouvernement a prévu de diminuer la dotation aux collectivités territoriales de 1,5 milliard d'euros par an, le programme présidentiel de l'UMP proposait une réduction de 2 milliards d'euros par an.

Comme l'a souligné Élie Aboud, le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale prévoit une stabilisation du déficit en 2013. En 2012, les objectifs avaient été tenus, grâce à la loi de finances rectificative qui avait créé 1,5 milliard d'euros de recettes supplémentaires. En revanche, en 2013, le ralentissement de l'économie et la baisse des cotisations sociales liées à la masse salariale produiront une réduction des recettes d'environ 3 milliards d'euros. Si le déficit de la branche famille progresse de 700 millions d'euros, c'est avant tout en raison de la réduction des recettes.

Pour autant, il apparaît essentiel d'afficher des objectifs volontaristes, comme l'a fait M. Pierre Moscovici cette année et M. François Fillon avant lui, afin d'entretenir le moral des Français, ce à quoi ne contribuent pas les déclarations de Gilles Carrez. Je ne crois pas que le déficit dépassera 4 % en 2013, comme l'a affirmé Valérie Pécresse. Les prévisions de croissance restent un exercice difficile : je me souviens que la dissolution de l'Assemblée nationale en 1997 avait été notamment motivée par des prévisions pessimistes de croissance, alors que celle-ci est repartie à la hausse quelques mois plus tard. Nous devons travailler ensemble, majorité et opposition, au redressement des finances de notre pays et au redémarrage de la croissance.

S'agissant des prélèvements obligatoires, le Gouvernement fera porter son effort à 70 % sur les dépenses, et à 30 % sur de nouvelles recettes.

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Les nouvelles recettes seront issues d'un travail sur les niches sociales, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, et sur les taxes comportementales, sur les tabacs et l'alcool par exemple, comme l'a évoqué la présidente de notre commission.

Pour répondre à Jean-Louis Roumégas, nous ne faisons pas l'impasse sur les réformes structurelles et mon rapport s'écarte, d'ailleurs, de la stricte présentation comptable. Reconnaissez que, de manière générale, l'ONDAM augmente plus vite que les recettes, malgré la réduction de la prévision de croissance à 0,1 % pour 2013.

À cet égard, comme l'a souligné Olivier Véran, il faut préserver des marges de manoeuvre pour l'innovation, y compris en restructurant certaines filières comme les biotechnologies, pour l'équipement des hôpitaux et pour l'organisation régionale des soins. Concernant la prévention, n'oublions pas qu'il est difficile de chiffrer les retombées de politiques pluriannuelles qui doivent porter leurs effets jusqu'en 2017. Par exemple, dans le cas du bisphénol A, l'interdiction n'entrera en vigueur que le 1er janvier 2015 et l'on ne pourra en mesurer les bénéfices que dans plusieurs années. Une bonne politique de prévention repose aussi sur l'amélioration de l'organisation de l'accès aux soins, grâce au parcours de santé. S'agissant du débat sur les 15 milliards d'euros, suite aux déclarations de Gilles Carrez, qui a été évoqué par Arnaud Robinet, il aura lieu demain en commission des finances à l'occasion de l'audition du Premier président de la Cour des comptes.

Dans son dernier rapport, le Conseil d'orientation des retraites (COR) affirme que le déficit de l'ensemble des régimes de retraite s'élèvera à 20 milliards d'euros pour 2020. Le besoin de financement était déjà prévisible lors du vote de la réforme des retraites de 2010. Il s'agit de prévisions objectives.

Je tiens à saluer l'excellent travail accompli par la MECSS, coprésidée par Jean-Marc Germain et Pierre Morange. Il m'apparaît, en effet, anormal que les recommandations de la Cour des Comptes sur les économies à réaliser en matière de systèmes d'information et d'appels d'offres dans le secteur public et les branches de sécurité sociale, n'aient pas été respectées, alors même qu'il s'agit d'engagements pris dans le cadre de conventions d'objectifs et de gestion. Les appels d'offres doivent être impartiaux et ouverts et des inquiétudes persistent à ce sujet.

Pour répondre à Gilles Lurton sur les prestations familiales indûment versées, la CNAF en récupère une majorité, mais pas l'ensemble car ce n'est pas toujours possible. Je ne connais, toutefois, pas le montant exact des prestations recouvrées dans ce cadre. Nous interrogerons la direction de la caisse à ce sujet.

Isabelle Le Callennec a évoqué le problème de la fraude liée au travail clandestin, le Gouvernement est très attentif à cette question et compte que la lutte contre ces phénomènes participe au redressement des comptes publics.

Enfin, les comptes de la branche AT-MP ont été présentés à l'équilibre, ce qui explique que, peut-être, je n'ai pas accordé l'attention certainement méritée à cette branche dans mon propos liminaire, au vu des délais très courts d'examen qui nous ont été impartis. Mais, comme l'a souligné Christian Hutin, il faut veiller à préserver ses capacités de financement des actions de prévention.

Pour conclure, je souhaite rappeler que notre commission doit travailler sur la stratégie nationale de santé et les réformes structurelles d'organisation des soins à la ville et à l'hôpital.

La Commission examine ensuite, sur le rapport de M. Richard Ferrand, la proposition de résolution européenne sur la proposition de directive relative à l'exécution de la directive sur le détachement de travailleurs (n° 1088).

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Nous examinons aujourd'hui la proposition de résolution européenne sur la proposition de directive relative à l'exécution de la directive sur le détachement de travailleurs.

Elle a été adoptée le 29 mai dernier par la commission des affaires européennes et je salue la présence, parmi nous, de deux de ses rapporteurs, Gilles Savary et Chantal Guittet, qui interviendront après notre rapporteur.

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Avant d'évoquer en détail le fond du sujet, je rappelle qu'en vertu des articles 151-2 et suivants de notre Règlement, les propositions de résolution européenne sont d'abord examinées par la commission des affaires européennes, puis renvoyées devant la commission permanente compétente au fond. C'est cette étape qui nous réunit aujourd'hui. L'inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée de la proposition de résolution peut ensuite être demandée dans un délai de quinze jours et je crois savoir que nos collègues souhaitent bien voir ce texte discuté dans l'hémicycle.

La question du détachement des travailleurs à l'intérieur du marché communautaire est cruciale.

D'abord, le phénomène est important : il y aurait chaque année environ 1,5 million de travailleurs détachés par leur employeur dans un autre État membre de l'Union. La France en a accueilli près de 145 000 en 2011, un nombre multiplié par quatre depuis 2006. Encore s'agit-il là des chiffres « officiels », puisque le détachement fait normalement l'objet d'une déclaration préalable auprès de l'administration.

En réalité, les flux sont, hélas, très difficiles à évaluer tant la pratique s'éloigne des principes qui l'encadrent. Ce qui est en cause, – et la proposition de résolution insiste bien sur ce point –, c'est la directive communautaire de 1996 sur le détachement de travailleurs : adoptée avant l'adhésion des nouveaux États membres de l'ancien bloc soviétique, où le coût de la main-d'oeuvre reste très faible, elle s'avère aujourd'hui totalement inadaptée, quand elle n'est pas purement et simplement contournée.

D'une part, les règles qu'elle fixe apparaissent insuffisantes. Si la directive définit un socle minimal de règles obligatoirement applicables dans l'État membre d'accueil aux salariés détachés, socle qui couvre notamment le salaire minimum, ces règles ne s'appliquent pas aux détachements de courte durée, de moins d'un mois. Cette exception conduit, dans les faits, à la multiplication des détachements successifs de très courte durée. En outre, la directive n'exige aucune preuve d'activité substantielle dans le pays d'origine de l'entreprise qui procède au détachement, ce qui occasionne un véritable « business » d'entreprises, « s'installant » dans un pays d'Europe de l'Est, uniquement pour se spécialiser dans le détachement de salariés « low cost ».

D'autre part, la directive de 1996 n'est pas assortie de mécanismes de contrôle suffisants : tout juste prévoit-elle la mise en place de bureaux de liaison dans chaque État membre, pour permettre l'échange d'informations. Le contrôle en lui-même est donc entièrement laissé à l'initiative des États membres. L'inspection du travail en France est outillée pour lutter contre le travail illégal, mais elle ne dispose malheureusement pas des éléments suffisants, faute d'informations venues de l'État membre d'origine des salariés détachés, pour exercer un contrôle digne de ce nom.

En tout état de cause, le dispositif communautaire se révèle aujourd'hui très insuffisant – et c'est un euphémisme. C'est le bilan que dresse la proposition de résolution qui nous est aujourd'hui soumise, et que partage d'une certaine façon la Commission européenne puisqu'elle a présenté un projet de directive d'application pour remédier aux insuffisances de la directive initiale de 1996.

La nouvelle directive, en cours de négociation, propose d'encadrer la définition même du travailleur détaché afin de se prémunir contre la multiplication des détachements successifs ou contre l'existence d'entreprises qui n'exercent pas d'activité substantielle dans le pays depuis lequel elles envoient des salariés en détachement vers d'autres États membres. La nouvelle directive prévoit également de renforcer la coopération administrative entre États membres, notamment en fixant des délais de réponse aux demandes qui leur sont adressées. Elle pose aussi un cadre au contrôle effectué par les États membres sur les détachements. Elle souhaite enfin renforcer la défense des droits des salariés détachés et instaurer une responsabilité conjointe et solidaire des cocontractants en la matière.

J'en viens au contenu de la proposition de résolution, destinée à inciter l'Union à adopter des mesures plus fortes que celles prévues par le projet de directive d'application.

En premier lieu, elle préconise, comme la Commission, de mieux définir le détachement, par une série de critères qui permettront aux États membres de s'assurer à la fois de la réalité du détachement et de sa conformité aux règles communautaires.

Elle propose également un net renforcement des capacités et des moyens de contrôle des États membres, par exemple, par la mise en place d'une carte électronique du travailleur européen et d'une agence européenne du travail mobile, ou encore par l'instauration d'une « liste noire » des entreprises qui ne respecteraient pas les règles applicables au détachement, à l'instar de ce qui a été fait pour l'aviation civile. La proposition de résolution souhaite en outre que soit étendue la responsabilité conjointe et solidaire du donneur d'ordre, prévue par la proposition de directive d'application, à l'ensemble de la chaîne des sous-traitants et des secteurs d'activité, alors que le projet de directive la cantonne au secteur de la construction. En particulier, elle souhaiterait qu'une déclaration de sous-traitance soit obligatoirement effectuée par tout donneur d'ordre qui recourt à des salariés détachés.

Enfin, s'agissant de la défense des droits des salariés détachés, le projet de directive prévoit d'autoriser les syndicats à ester en justice en leur nom. La proposition de résolution suggère d'aller plus loin, en leur permettant d'agir sans l'accord du salarié, en raison de sa position particulièrement précaire.

L'ensemble de ces préconisations me semblent bienvenues dans le contexte actuel de détournement quasi systématique des règles communautaires, et l'on ne peut qu'y souscrire résolument.

Deux points spécifiques me semblent toutefois appeler des modifications.

Il s'agit, en premier lieu, du point 15 de la proposition de résolution, qui propose la mise en place d'un recours contre tout donneur d'ordre qui ferait appel à une prestation de service facturée en dessous des prix « français ». Si l'on en comprend l'intention, cette préconisation me semble inapplicable. Comment en effet déterminer le niveau des prix « français » ? Comment ensuite différencier une offre de services compétitive et une offre de services qui reposerait sur une facturation du coût de la main-d'oeuvre en deçà des minima de salaires français ? Je vous invite donc à supprimer l'alinéa 19 de la présente proposition de résolution.

En second lieu, le dernier point de la proposition de résolution engage l'Union européenne à définir un salaire minimum de référence, professionnel ou interprofessionnel, et cela, afin de garantir les conditions d'une concurrence libre et non faussée. Je souscris pleinement à cette ambition. Simplement, je vous proposerai une nouvelle rédaction de cet alinéa, qui tienne compte des disparités très fortes qui continuent d'exister entre les anciens et les nouveaux États membres, mais prenne le parti d'une telle harmonisation à terme, puisqu'elle ne peut, pour des raisons évidentes, être exigée hic et nunc.

Sous réserve de ces deux modifications substantielles et d'une série d'amendements strictement rédactionnels, je souhaiterais que la Commission adopte cette proposition de résolution, qui a le mérite de proposer de réelles solutions pour mieux encadrer la pratique du détachement intracommunautaire.

Les négociations en cours sur la proposition de directive d'application ont achoppé le 20 juin dernier, lors du dernier conseil des ministres de l'emploi, sur le contrôle du détachement confié aux États membres et sur la responsabilité conjointe et solidaire de la chaîne contractuelle. En l'état des positions en présence, – avec notamment l'existence d'une minorité de blocage du Royaume-Uni et des nouveaux États membres contre le renforcement des règles pour lutter contre la fraude au détachement –, il est essentiel que le Parlement français montre sa détermination à aller de l'avant.

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C'est une proposition qui arrive à point nommé pour répondre aux eurosceptiques qui reprochent à l'Europe de ne pas les protéger.

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De façon très classique, nous avons engagé nos travaux à l'occasion de la procédure de révision de la directive « détachement ». Au gré de nos auditions – des acteurs de terrain surtout –, nous avons pris conscience que le phénomène dépassait très largement le cadre fixé initialement, celui de la simple révision d'une directive.

Le problème doit être envisagé avec beaucoup de discernement car les principaux pays qui détachent ne sont pas forcément à l'Est de l'Europe. La France se classe troisième, derrière l'Allemagne et la Pologne. Il faut donc faire preuve de prudence même si les flux sont socialement asymétriques – nous détachons plutôt des commerciaux et des ingénieurs tandis que nous accueillons surtout des ouvriers – car le détachement a toujours été conçu pour offrir une respiration aux acteurs économiques. La directive « détachement » a correspondu à une époque à une rationalisation bienvenue, favorable à l'essor de l'échange marchand international.

Ce qui doit aujourd'hui nous alarmer, c'est la mise en place de stratégie d'optimisation sociale systématique, comme jadis en matière fiscale. Les flux de détachements deviennent autonomes et tendent à se disjoindre de l'échange matériel. Le détachement fait l'objet d'un « business » et aller chercher le travailleur « low cost » devient un but en soi. Modifiée ou non, la directive « détachement », restera un outil largement insuffisant pour canaliser de tels comportements. Si on ne réagit pas, le phénomène prospérera comme l'optimisation fiscale que l'on a trop tardé à prendre au sérieux. Nous sommes donc au début d'une histoire qui pourrait se révéler dévastatrice pour l'emploi et contribuer à l'exacerbation des sentiments xénophobes ou europhobes.

Si l'optimisation sociale tendait à devenir massive, ce que les dernières tendances laissent augurer, les comptes sociaux seraient directement affectés puisque les détachés n'acquittent pas leur sécurité sociale dans le pays qui les accueille. Ils bénéficient déjà d'emblée d'un « discount » sur le coût du travail.

Le phénomène doit donc impérativement être encadré et c'est la raison pour laquelle nous avons débordé le cadre du simple commentaire de la directive en cours de révision pour faire des propositions plus audacieuses. La France serait fondée à les porter à Bruxelles assez vite, dans le contexte, ou non, de la révision de la directive. Elle y trouverait sans doute des alliés.

Les contournements des règles de détachement sont massifs. À côté des comportements illicites, on trouve des procédés licites, quand les détachements sont inférieurs à un mois ou que des entreprises françaises créent des sociétés « boîte aux lettres », qui n'ont d'autre but que de recruter localement du personnel à bas coût pour l'envoyer en France. On voit ainsi se développer un trading de main-d'oeuvre qui ressemble beaucoup à ce que la crise de la viande de cheval a révélé : nous avons ainsi découvert que des sociétés chypriotes envoyaient des travailleurs de l'Est dans les pays de l'Ouest.

On a également observé des non-détachements internes. Des entreprises implantées dans les pays de l'Est envoient du personnel local chez nous, en France, mais « oublient » de suivre les procédures déclaratives, alors que le détachement est pourtant parfaitement licite.

On trouve ensuite toutes sortes de contournement : défaut de déclaration – deux cas sur trois, selon les estimations –, et détachement effectif sans déclaration d'aucune sorte. Il s'agit alors d'une fraude puisque, dans ce cas, non seulement les cotisations sociales sont au niveau de celles du pays d'origine, mais le salaire aussi, avec des effets dévastateurs.

Enfin, le contrôle est extrêmement difficile. C'est pourquoi nous avons proposé des sanctions très lourdes, comme la « liste noire », car nous avons la conviction que les contrôles ne seront jamais faciles, surtout si l'on en reste à des bureaux de liaison interadministratifs. Quand on embauche, pour une campagne de vendanges de huit jours, cent personnes de cinq ou six nationalités différentes, le temps de vérifier les identités, de téléphoner aux bureaux de liaison des pays d'origine, elles se sont égayées dans la nature et on n'a plus aucune chance de les rattraper. Les inspecteurs du travail expliquent que, pour obtenir un résultat, ils auraient besoin d'au moins un mois, au détriment de leurs autres tâches. Il faut donc des mesures beaucoup plus fortes. Tel est le sens de notre proposition.

L'alinéa 15 que Richard Ferrand propose de supprimer à cause de l'expression « les prix français » nous a été inspiré par le patronat qui se trouve, sur ce thème, en phase avec les syndicats. La formulation est malheureuse et j'accueille volontiers son amendement, mais il s'agissait de permettre aux branches professionnelles d'attaquer un donneur d'ordre qui a manifestement choisi un maître d'oeuvre à bas coût, même si ce choix est licite. Cette affaire a trouvé un début de régularisation juridique parce que le Gouvernement vient d'obtenir que, dans la directive « marchés publics », elle-même en cours de révision, un soumissionnaire puisse être récusé dès lors que ses prix seraient anormalement bas, du fait de conditions salariales anormalement basses. Déjà des recours sont formés devant les tribunaux français à ce sujet. La Fédération du bâtiment et des travaux publics des Pyrénées-Atlantiques a ainsi attaqué la Chambre des métiers de Bayonne qui a employé une entreprise « low cost » !

Pour conclure, le point 21 propose un salaire minimum de référence, dont j'ai toujours été un militant, mais, ayant passé dix ans au Parlement européen, je sais combien la route sera longue. L'idée est d'enclencher une procédure plus rapide pour les branches déstabilisées par l'absence de salaire minimum – je pense bien sûr au secteur de l'abattage dans lequel l'Allemagne emploie des travailleurs bulgares ou roumains à 2, 3 ou 4 euros de l'heure – où des mesures unilatérales de rétorsion pourraient être prises si les prix tombaient en deçà d'un plancher à définir.

Notre travail se poursuit au sein de la Commission des affaires européennes.

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Le détachement présente des atouts, mais il ne doit pas se faire au détriment des droits fondamentaux des salariés. C'est pourtant ce qui arrive et nous nous battons contre une forme d'esclavage moderne. Cette résolution est destinée à affirmer notre position de parlementaire français, quitte à ce que la France applique ses propres solutions pour encadrer le détachement des travailleurs qui fragilise des pans entiers de notre industrie. À cause des détournements de la directive, l'agriculture elle-même n'est plus à l'abri des délocalisations puisque l'abattage est désormais moins cher en Allemagne qu'en France.

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En tant que représentante du groupe socialiste, je félicite Gilles Savary, Chantal Guittet et Michel Piron, de s'être saisis d'un problème qui a des répercussions catastrophiques sur l'emploi et met en difficulté notre système de protection sociale. Et je remercie également notre rapporteur de son excellent plaidoyer pour que la France soit le moteur d'une prise en charge de cette question par la Commission européenne. Celle-ci demeure en effet trop timide, et ses propositions sont très en deçà des besoins réels.

La libre circulation des travailleurs inscrite dans les traités implique l'abolition de toute discrimination entre les travailleurs des États membres en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail. Toutefois, le droit communautaire ne prévoit pas d'harmonisation des droits des travailleurs mobiles et n'envisage qu'une coordination des régimes juridiques internes, ce que nous déplorons.

Selon la définition, rappelée par notre rapporteur, du travailleur détaché, celui-ci travaille dans un État membre différent du sien parce qu'il y a été affecté provisoirement par son employeur, dans le cadre d'une mission. Mais, comme le droit européen n'oblige pas les États membres à fixer un salaire minimum, ni les entreprises à exercer une activité substantielle dans leur pays d'origine, ni ne limite les détachements dans le temps, on trouve donc des entreprises « boîtes aux lettres » dans les pays où le droit social est a minima. La directive de 1996 prévoit que le droit du travail applicable au travailleur détaché est celui du pays d'accueil, sauf pour les missions de courte durée, le système de sécurité sociale restant toujours celui du pays d'origine. De plus, la Cour de justice de l'Union européenne fait une application très stricte de la directive en considérant que tout ce qui va au-delà des exceptions prévues par la directive est une entrave au principe de libres prestations de services et de libre circulation des travailleurs.

Pourtant, on constate une concurrence déloyale dans les secteurs de la construction, du bâtiment et des travaux publics, de l'agriculture et de l'agroalimentaire. L'arrivée massive de travailleurs « low cost » déstabilise des filières productives entières. La directive, qui avait pour objectif de protéger les travailleurs et les marchés du travail des États membres, a eu l'effet inverse dans un marché européen obéissant à un grand libéralisme, et tend à provoquer un alignement vers le bas du droit social. La conséquence de l'exploitation abusive de cette réglementation a entraîné chez nous deux fléaux, économique et social : la désindustrialisation, qui frappe notamment l'agroalimentaire en Bretagne, et le chômage.

Il doit être mis fin à ces pratiques de dumping social destructrices d'emplois et d'activités. La France n'est pas la seule dans cette bataille, les Belges notamment dénoncent ce système par lequel par exemple, l'industrie de la viande allemande se développe sur la base d'un coût moyen du travail de 6 euros de l'heure sans salaire minimum et sans convention collective, alors que ce coût est d'environ 20 euros de l'heure chez nous.

La proposition de directive d'application de la Commission européenne est très en deçà des besoins. L'article 3 vise à apprécier le caractère substantiel de l'activité dans le pays où elle est affiliée. L'article 9 donne une liste limitative de mesures nationales de contrôle des entreprises étrangères par les États membres. L'article 12 institue un mécanisme de responsabilité solidaire du donneur d'ordre. Ces propositions insuffisantes ne peuvent faire l'objet d'un vote favorable de la France – je cite les rapporteurs de la Commission des affaires européennes –, « au regard du principe de mesures de sauvegarde d'intérêts nationaux essentiels, notamment la sauvegarde de l'emploi dans les filières économiques importantes pour notre pays, mais aussi des standards sociaux nationaux imprescriptibles, et surtout du financement de notre système de sécurité sociale, dont la subsidiarité au regard des traités justifie des mesures de protection nationales s'il est mis en danger ». Des mesures nationales unilatérales doivent donc être autorisées par la législation européenne.

Au nom du groupe SRC, j'approuve les propositions des auteurs du rapport d'information et les amendements de notre rapporteur Richard Ferrand, notamment la création d'une agence de contrôle du travail mobile en Europe et d'une carte électronique de travailleur européen ; la mise en place d'une liste noire d'entreprises et de prestataires de services indélicats ; le renforcement de la responsabilité conjointe et solidaire du donneur d'ordre et du prestataire ; l'amélioration de l'arsenal législatif de contrôle national ; l'extension de la possibilité de recours juridique par les organisations syndicales nationales sans l'accord des salariés détachés ainsi que la demande d'un moratoire sur la libéralisation du cabotage routier.

Par ailleurs, pour donner encore plus de poids à la proposition de résolution, l'article 151-7 du Règlement prévoit que, dans les quinze jours suivant la mise en ligne du texte adopté par la commission saisie au fond, la Conférence des présidents, saisie par le président de groupe ou d'une commission permanente peut proposer de l'inscrire à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Madame la présidente de la commission des affaires sociales, vous serait-il possible d'engager cette démarche ?

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Il est évident depuis longtemps que, en matière de détachement des travailleurs au sein de l'Union, la fraude est massive et favorise le dumping social, néfaste à notre économie et aux travailleurs eux-mêmes. L'Union européenne veut lutter contre le phénomène et cette proposition de résolution contribue à améliorer la directive, qui reste insuffisante et doit être renforcée.

L'Union européenne doit se doter de moyens supplémentaires. Une agence européenne de contrôle du travail mobile, une carte de travailleur européen et une liste noire des entreprises constitueraient à cet égard des outils majeurs.

Cela ne doit pas empêcher la France d'adapter son propre arsenal juridique pour pouvoir procéder à des contrôles plus stricts et lutter de façon opérationnelle contre la fraude.

Je relève aussi la naïveté de l'expression « prix français » mais les entreprises françaises qui sont soumises à des taxes et à des règles sociales strictes doivent pouvoir réagir quand les prix pratiqués sont anormalement bas. Le principe doit donc être maintenu même si la formulation doit être modifiée.

Le groupe UMP est lui aussi favorable à un salaire minimum de référence. Sans pour autant vouloir un pacte social unique immédiat, force est de constater que des travailleurs venus de l'Est travaillent en Allemagne pour des salaires dérisoires, ce qui crée des disparités entre pays de l'Union.

Le groupe UMP est donc favorable à cette résolution, et remercie ses auteurs pour leur travail remarquable. Nous sommes pour une Europe qui protège, et, au-delà de cette résolution, pour une Europe de la réciprocité qui protège également des pays qui ne respectent pas les mêmes règles que celles de l'Union. À cet égard, j'attire l'attention sur l'entrée probable et prochaine dans l'espace Schengen de la Bulgarie et de la Roumanie, que nous avons toujours repoussée à cause des risques de déstabilisation du marché du travail et aussi de fraude massive de la part de ces pays, en proie à la corruption.

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Je souligne à mon tour la qualité du travail accompli par les rapporteurs de la commission des affaires européennes. Le sujet qu'ils ont traité est très grave et on aurait tort de faire preuve d'une trop grande pudeur. Les termes diplomatiques de dumping social recouvrent plutôt une traite d'êtres humains, presque des trafics mafieux, Gilles Savary l'a dit à demi-mot. Quand des sociétés se livrent au trading de main-d'oeuvre, les directives qui organisent la libre circulation des travailleurs sont conçues pour un monde de dessin animé.

C'est donc une bonne chose que la classe politique française dans son ensemble considère que la directive « détachement » mérite d'être revue. Mais ne soyons pas trop naïfs quant à la façon dont, aux quatre coins de l'Europe, certains acteurs économiques exploitent, tels des négriers, des personnes fragilisées. Le groupe UDI souhaite aussi, madame la présidente, que vous demandiez dans les quinze jours l'inscription de cette proposition de résolution à l'ordre du jour de l'Assemblée.

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Cette résolution vient en effet à point nommé pour envoyer un signal aux États membres qui vont prendre le relais au Conseil européen où un recul est toujours à craindre par rapport aux propositions des parlementaires européens. Nous entendons donc renforcer la position de la France en faveur d'une directive beaucoup plus contraignante.

Arnaud Richard a raison de parler de « traite d'êtres humains ». On a vu des ouvriers portugais payés 2,86 euros de l'heure à Clermont-Ferrand, et des Bulgares et des Roumains 3 euros en Allemagne. Sur le chantier de la centrale EPR à Flamanville, travaillent des ouvriers polonais dont les accidents du travail ne sont même pas déclarés. Ce qui se passe est extrêmement grave et il faut des mesures fortes. Cette résolution est donc nécessaire et le groupe Écologiste espère qu'elle pourra conforter la position du Gouvernement au Conseil européen.

Certes, la notion de « prix français » est floue, mais faut-il pour autant renoncer à tout recours contre les donneurs d'ordre ? Un recours spécifique contre le donneur d'ordre, et pas seulement dans le nucléaire, au-delà de la responsabilité conjointe avec le prestataire est une bonne chose. N'y avait-il pas moyen de le conserver ?

À cette restriction près, le groupe Écologiste votera cette proposition de résolution et nous remercions ses auteurs.

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Arnaud Richard a raison d'appeler un chat un chat, et de parler de nouvelles formes d'esclavage. Ce n'est pas en laissant cette gangrène envahir l'Europe que nous redonnerons à nos concitoyens confiance en elle.

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Selon la directive de 1996, les règles du pays d'accueil sur les conditions de travail, de salaire notamment, s'appliquent aux salariés détachés mais ils continuent à payer leurs cotisations sociales dans leur pays d'origine. En France, compte tenu du poids des charges sociales, cela peut représenter un différentiel de coût de l'ordre de 30 %. Les détachements connaissent aujourd'hui un boom qui concerne 1,5 million de salariés en Europe, dont 300 000 en France.

Si la libre circulation des travailleurs peut être un atout pour nos économies, elle a entraîné de nombreuses dérives. Nous sommes d'accord sur la nécessité de renforcer la directive actuellement en vigueur.

Toutefois, les pistes avancées par la proposition de résolution suscitent quelques questions.

La création d'une nouvelle agence est en contradiction avec la position du Parlement plus soucieux d'améliorer l'existant que de créer de nouvelles structures onéreuses, complexifiant encore la machine européenne.

Par ailleurs, la carte de travailleur européen ne se justifie pas, le principe de libre circulation étant inscrit dans les traités. En outre, elle soulève la question de la protection des données.

Enfin, qui tiendra la liste noire ? Selon quels critères sera-t-elle établie ? Quel recours auront les entreprises qui y figureront ? Et qu'en sera-t-il du droit à l'oubli ?

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Le droit européen fait l'objet de détournements massifs puisque pour 145 000 détachés déclarés, on compterait, selon le ministère du travail, entre 220 000 et 300 000 détachés non déclarés. Et pourquoi, dans certains cas, ne pas envisager de qualifier le détachement comme un prêt illicite de main-d'oeuvre à titre onéreux – un délit en droit français –, ce qui n'impose pas de changer la législation et n'implique pas d'attendre la directive d'application ? Monsieur le rapporteur, s'il y a entreprise de détachement, c'est-à-dire pas d'activité substantielle de l'entreprise dans le pays d'origine, et s'il s'agit d'un prêt de main-d'oeuvre, qu'est-ce qui empêche d'appliquer la législation française ?

Je suis d'accord avec l'essentiel des propositions, en particulier la création d'une agence européenne et d'une carte de travailleur européen. La proposition sur le salaire minimum est essentielle, mais il faudrait en priorité voir ce qui peut d'ores et déjà être fait. De quels moyens l'inspection du travail et les administrations en charge du problème disposent-elles ?

Plutôt que de supprimer le point 15 de la résolution, comme votre amendement le propose, monsieur le rapporteur, ne pourrait-on pas modifier la rédaction car la responsabilité du donneur d'ordre est un point fondamental ?

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Cette proposition de résolution pour lutter contre le dumping social va dans le bon sens mais elle n'est qu'un premier pas. Le nombre de détachés, officiellement de 145 000 dans notre pays, a augmenté de 17 % et le chiffre réel doit être du double. La Bretagne est particulièrement touchée.

Concernant la création d'une agence européenne, je suis d'accord avec mon collègue : la priorité doit aller d'abord à l'application de la loi. Mais les DIRECCTE manquent souvent de moyens pour effectuer des contrôles. Qu'est-il prévu en cette matière ?

Qu'entraînera pour une entreprise son inscription sur la liste noire ? Ne pourra-t-elle plus répondre aux appels d'offre dans le cadre des marchés publics ?

Enfin, quel est le calendrier parlementaire ? Et, si cette résolution était adoptée, combien de temps faudrait-il pour qu'elle soit effective et apporte une réponse aux entreprises qui nous sollicitent ?

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Conçue à l'origine pour préserver les marchés du travail des pays à coûts salariaux élevés de la concurrence déloyale et de l'optimisation sociale, comment la directive est-elle parvenue au résultat inverse ? La fraude est-elle seule en cause ou bien faut-il y voir le symptôme du dogme néolibéral en vogue dans les institutions européennes ?

Pourquoi M. Barroso, qui donne des leçons à la France de manière fort peu élégante, n'a-t-il pas respecté sa promesse, faite au moment de son investiture en 2009, de proposer une nouvelle directive « détachement » ? Et pourquoi la Commission s'est-elle contentée de « mesurettes » ?

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Je félicite les rapporteurs pour leur initiative et leurs propositions car le détachement des travailleurs en Europe prend des proportions inadmissibles, attisé par la liberté de circulation des biens et des personnes. Presque tous les métiers et les régions sont désormais concernés – le bâtiment, l'agriculture et le transport. Nul n'est épargné. Le secteur du transport doit être traité à part car le service rendu n'est pas lié à un ancrage local.

S'agissant du point 16, la déclaration de sous-traitance par le donneur d'ordre est une bonne mesure car une simple vérification ne suffira pas, mais il faudra veiller à ne pas imposer de contraintes trop pesantes aux entreprises.

Ensuite, pourquoi spécialiser les inspecteurs du travail au lieu de les former tous à lutter contre l'ensemble des fraudes, puisque tout le territoire est concerné ?

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La Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) a fait un travail courageux, même s'il a été parfois injustement décrié, sur la fraude sociale, et en particulier sur le travail au noir. Ses conclusions ont fait l'unanimité, s'agissant notamment de la faiblesse de notre législation et surtout de la mauvaise coordination des pouvoirs publics français.

Je félicite nos trois collègues pour leur rapport équilibré, sans qu'il dissimule la réalité des choses : « Au vu des lacunes de la proposition de directive, [l'Assemblée nationale] estime indispensable que la France modifie sa législation et son organisation administrative pour améliorer l'efficacité de la lutte contre ses fraudes » et « invite l'administration à une coordination de l'ensemble des corps concernés (inspection du travail, gendarmerie, préfectorale, URSSAF, MSA) pour effectuer des opérations de contrôle “coup-de-poing” ». À l'évidence, les pouvoirs publics n'ont pas pris la mesure du problème, qui est d'ordre politique, économique et juridique. Avec entre 220 000 et 300 000 travailleurs détachés sans avoir fait l'objet d'une déclaration préalable, nous avons un réel souci d'organisation administrative.

La carte électronique de travailleur européen, que la MECSS avait évoquée, nous semble indispensable. Mais il faudrait qu'elle soit sécurisée, sinon biométrique, puisque, dans la plupart des cas, l'identité déclinée est fausse.

Ensuite, s'agissant de la liste noire, nous réclamons depuis trois ans une liste nationale des personnes qui sont interdites de gérer, accessible à tout le monde. Commençons par motiver les administrations françaises !

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Oui, cette résolution arrive à point nommé car le problème est connu et reconnu. Nous avons tous des exemples en tête, dans le bâtiment, la logistique, le transport routier, qui déclenchent l'animosité, parfois très violente, des entreprises, des artisans et des commerçants, ainsi que des salariés et nous ne savons quoi leur répondre.

Cette résolution fait preuve de beaucoup d'optimisme. Espérons que nous passerons des écrits aux actes, pour mieux harmoniser l'environnement social et économique. Ce serait une bonne chose d'avoir les moyens de déceler l'origine des fraudes.

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Nous voterons cette résolution sans réserve.

Les maires que nous sommes savent que ce sont aujourd'hui les entreprises étrangères qui remportent les appels d'offre, à cause du niveau des charges sociales. Et nous constatons un turnover de la main-d'oeuvre, qui reste moins d'un mois, ce qui rend tout contrôle quasi impossible.

Le plus grave et le plus inadmissible est la contamination progressive de nos entreprises, qui sont poussées, pour répondre aux appels d'offre, à installer leur siège social à l'étranger et à embaucher des travailleurs étrangers.

Notre rapporteur souscrit à la proposition de créer une agence européenne de contrôle du travail mobile, « afin de pallier l'incapacité des États membres à assurer des contrôles à leur niveau au vu de l'ampleur du phénomène et du fait qu'ils demeurent trop largement dépendants du degré de coopération des autres États membres. » Partageant ce diagnostic, je me demande néanmoins si le remède changera quoi que ce soit et même si, faute de coordination, les choses ne risquent pas d'empirer.

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Je trouve au moins une satisfaction dans notre unanimité autour de l'enjeu. Personne ici ne supporte plus que la condamnation du trafic d'êtres humains, qui nuit à notre protection sociale et à nos entreprises, soit considérée comme une entrave à la liberté d'entreprendre. Récemment, Marianne a publié un dossier complet sur cette forme d'esclavage autorisé par la Cour de justice de l'Union européenne.

Je salue moi aussi l'initiative de nos collègues Gilles Savary, Chantal Guittet et Michel Piron car on ne peut pas demander à des gens qui, tels les salariés de nos abattoirs, sont mis au chômage à cause de ce type d'esclavage autorisé par l'Europe d'aimer celle-ci ! Or les mesures que préconisent nos collègues seraient précisément de nature à rendre l'Europe plus protectrice, donc plus aimable.

Elles sont sans doute insuffisantes, monsieur Leonetti, mais elles constituent un pas dans la bonne direction. Je souscris au vocabulaire utilisé par Arnaud Richard, car il s'agit bien d'esclavage.

Monsieur Roumegas, le point 15 que je vous propose de supprimer est un peu redondant avec le point 11, qui généralise la responsabilité conjointe et solidaire à l'ensemble des sous-traitants et des secteurs d'activité.

Gilles Lurton soutient la proposition de résolution tout en contestant la création d'une agence européenne, d'une carte de travailleur et de la liste noire. Il est donc impossible de passer des écrits aux actes ! Il s'agit, avec cette agence de régler un problème européen qui n'a de solution qu'européenne. Aucun des États membres, Élie Aboud l'a bien vu, ne pouvant agir isolément, il faut bien une agence, une carte de travailleur et une liste noire européennes.

Une entreprise qui figurerait sur cette liste noire se verrait interdire de répondre aux appels d'offre, de sous-traiter et d'effectuer une prestation quelconque pendant une période donnée.

Denys Robiliard a suggéré de se servir de nos propres outils juridiques, mais ils se heurtent au problème de la preuve : il faut lutter contre les séjours de courte durée de travailleurs soumis à un turnover très rapide, et de plusieurs nationalités. Ils ont déjà disparu quand l'inspection du travail a pu procéder aux contrôles. Le système est très bien organisé par de véritables trafiquants de main-d'oeuvre.

La résolution entend permettre à l'agence européenne de coordonner la coopération active entre les services et de gérer la liste noire.

Les cellules spécialisées au sein de l'inspection du travail, madame Louwagie, pourraient permettre de mener des opérations « coup-de-poing » pour dissuader les employeurs de recourir à cette main-d'oeuvre « low cost ».

Le point 20 concerne spécifiquement le cabotage routier qui doit en effet être traité à part.

Monsieur Door, nous sommes optimistes. Le pessimisme serait de ne rien tenter ! Nous avons seulement la volonté de porter le problème au niveau européen, pour que de nouvelles directives permettent d'endiguer le phénomène.

L'agence européenne du travail mobile, monsieur Aboud, aurait vocation à mettre un terme à la contamination que vous dénoncez et à pallier l'impuissance des États membres à agir contre des flux par essence éphémères. La liste noire pourrait s'étendre à ceux qui, dans nos pays, vont créer ailleurs des sociétés « boîtes aux lettres », jusqu'à présent tout à fait légalement.

Je me réjouis que tous les groupes politiques se rallient à l'esprit de cette résolution qui ouvre la voie à un travail plus approfondi. Elle n'est pas optimiste, elle est résolument audacieuse.

Les propositions qu'elle comporte ont vocation à devenir celles de la France, et elles ne sont formulées nulle part ailleurs. La France doit aussi rationaliser ses contrôles car les mesures proposées ont peu de chances d'être adoptées très rapidement, même pas dans la directive d'application en cours d'élaboration. Elles constituent un corpus nouveau de propositions françaises au niveau européen. Plutôt que l'alignement de l'Europe sur nos règles sociales, nous réclamons des outils concrets.

L'agence européenne, d'abord, en vertu du principe de subsidiarité, puisque le travail mobile, difficile à saisir dans chaque pays, ne peut être que du ressort européen. L'Europe doit se doter d'un corps minimal d'investigation pour pallier la carence des bureaux de liaison. Tout le monde n'a pas une administration aussi structurée que celle de la France et tout le monde n'a pas envie de collaborer avec ses voisins. Dans d'autres domaines, l'Europe ne respecte pas la subsidiarité et ses agences s'immiscent dans les affaires nationales ; dans celui du travail mobile, elle doit être pleinement responsable.

Avec la liste noire, il s'agit de référencer les entreprises qui sont très nombreuses à échapper aux sanctions, et de faire en sorte, en publiant leur nom, qu'on ne les revoit plus en France pendant un certain temps. La liste noire des compagnies aériennes a été terriblement efficace.

Quant à la carte de travailleur, elle existe en France et nous nous sommes inspirés du secteur du bâtiment et des travaux publics, français qui a une caisse de congés pour des personnels qui changent régulièrement de chantier et d'entreprise. Il ne s'agit pas d'en faire une carte d'identité bis, en contradiction avec les principes fondamentaux du droit européen, mais il faut pouvoir s'assurer que le travailleur est affilié social. Aujourd'hui, un grand nombre des salariés détachés chez nous ne sont pas couverts, même contre les accidents du travail. S'ils en sont victimes, ils sont rapatriés chez eux et sombrent dans la misère.

Dernière précision sur la responsabilité conjointe et solidaire du donneur d'ordre et du prestataire. J'ai proposé d'exclure l'agriculture parce que les agriculteurs ne sont pas armés pour mener des investigations. Ils sont d'autant plus inquiets que le personnel auquel ils font appel reste très peu de temps, parfois juste le temps d'une campagne.

Notre collègue Huillier a parlé, au niveau européen, de dogme, de la liberté totale, à n'importe quel prix. Pas toujours. C'est pourquoi mon ton est resté mesuré et je suis surpris que l'on n'ait pas parlé des secteurs qui souffrent chez nous de pénurie de main-d'oeuvre. Il faut faire preuve à la fois de fermeté et de discernement.

La Commission en vient à l'examen des amendements à l'article unique de la proposition de résolution.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels, AS 1 et AS 2, du rapporteur.

Puis elle examine l'amendement AS 3 du rapporteur.

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Pour être efficace, la carte doit être électronique et sécurisée, puisqu'il s'agit de lutter contre de la fraude organisée. Le procédé n'est pas liberticide puisqu'il est utilisé en Afrique du Sud pour verser les retraites, et en Inde.

La Commission adopte l'amendement AS 3 ainsi rectifié.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS 4 à AS 9 du rapporteur.

Elle adopte l'amendement AS 10 du rapporteur, corrigeant une erreur matérielle.

Elle est saisie de l'amendement AS 15 du rapporteur.

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La commission des affaires européennes prévoit un recours contre le donneur d'ordre dès lors qu'il aurait bénéficié d'une prestation facturée en dessous des prix « français ». Mais comme la notion est très difficile à cerner, et que le meilleur moyen de lutter contre les connivences entre sous-traitants et donneurs d'ordre reste la mise en cause de leur responsabilité conjointe et solidaire étendue par le point 11, je vous propose de supprimer l'alinéa 19, correspondant au point 15 de la proposition de résolution.

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Je remercie le rapporteur de son amendement.

La Commission adopte l'amendement AS 15. En conséquence, le point 15 est supprimé.

Elle adopte ensuite les amendements rédactionnels AS 11 à AS 13 du rapporteur.

Puis elle adopte l'amendement de cohérence, AS 14, du rapporteur.

La Commission en vient à l'amendement AS 16 du rapporteur.

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Le point 21 propose la mise en place d'un SMIC européen, mais les disparités qui existent toujours entre les économies des États membres plaident pour une rédaction à la fois plus précise et plus souple. Puisqu'il ne s'agit pas d'un objectif à court terme, il vaut mieux, sans y renoncer, poser les jalons d'une harmonisation sociale en matière de détachement en exigeant que la Commission européenne s'engage à définir un calendrier.

La Commission adopte l'amendement AS 16.

Puis elle adopte à l'unanimité l'article unique, modifié, valant adoption de la proposition de résolution, modifiée.

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Conformément au souhait de l'ensemble des groupes – l'UMP est d'accord aussi –, je demanderai, dans un délai de quinze jours, à la conférence des présidents l'inscription à l'ordre du jour d'un débat sur cette proposition de résolution. Il appartiendra ensuite à la conférence des présidents et au Gouvernement d'en fixer la date. Ce ne sera pas pendant la session extraordinaire de juillet puisque le décret de convocation est paru. Je ferai donc les démarches pour que la discussion ait lieu pendant la session extraordinaire de septembre, en tout cas, le plus rapidement possible, d'autant plus que la résolution fait l'unanimité.

La séance est levée à onze heures quarante-cinq.