Commission élargie : finances - affaires économiques - développement durable - affaires étrangères

Réunion du 2 novembre 2016 à 17h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • collège
  • prioritaire

La réunion

Source

Permalien
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Commission des affaires culturelles et de l'éducation

(Application de l'article 120 du Règlement)

Mercredi 2 novembre 2016

Enseignement scolaire

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, avec le président Patrick Bloche, nous sommes heureux de vous accueillir dans cette commission élargie réunie pour examiner les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Selon une procédure maintenant bien rodée, je donnerai d'abord la parole aux deux rapporteurs pour cinq minutes chacun. Après que vous leur aurez répondu, ce sont les porte-parole des groupes qui s'exprimeront, pendant cinq minutes également, puis tous les députés qui le souhaitent pourront intervenir, disposant pour ce faire de deux minutes.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je me réjouis de cet échange sur le budget de l'enseignement scolaire pour l'année 2017, qui est redevenu le premier budget de la nation depuis maintenant deux ans.

Avec une hausse de ses crédits de 2 milliards d'euros, hors pensions et à périmètre constant, ce budget parachève les engagements pris par le Gouvernement et notre majorité dans le cadre de la loi du 9 juillet 2013 pour la refondation de l'école de la République. Il donne les moyens nécessaires au renforcement des effectifs – près de 12 000 créations de poste en 2017 – et à la revalorisation des rémunérations, ainsi qu'à la poursuite des réformes engagées les années précédentes, comme l'amélioration de l'accompagnement des élèves en situation de handicap ou encore le plan en faveur du numérique. Je n'oublie pas, madame la ministre, votre récent plan sur le remplacement des enseignants, qui était attendu et qui comporte des mesures particulièrement novatrices. Ainsi, ce budget nous permet d'être au rendez-vous pour rendre l'école de la République à la fois plus juste et plus à même de favoriser la réussite de tous les élèves.

Cette année, la commission des affaires culturelles et de l'éducation a nommé Pascal Demarthe comme rapporteur pour avis pour l'enseignement scolaire. Notre collègue a choisi de porter son attention sur la revalorisation des carrières et des rémunérations des enseignants. Son rapport nous a permis d'avoir, au sein de notre commission, un échange nourri et fort intéressant. Je le remercie d'avoir réalisé en peu de temps un véritable bilan précis et détaillé de la politique conduite durant la législature sur cet aspect essentiel de la refondation de l'école de la République.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis fier de présenter devant vous, pour cette dernière année de mandat, les crédits pour 2017 de la mission interministérielle « Enseignement scolaire », et de faire un début de bilan de notre action durant cinq ans.

Pour la cinquième année consécutive, le budget de l'enseignement scolaire est le premier de la nation. Les crédits de la mission connaissent une progression sensible par rapport à 2016, de 4,6 % pour les autorisations d'engagement, à 68,62 milliards d'euros, et de 4,5 % pour les crédits de paiement, à 68,63 milliards d'euros. Cela représente une augmentation de 9 milliards d'euros sur les cinq dernières années.

La mission « Enseignement scolaire » était la priorité de ce quinquennat : promesse tenue sur le plan budgétaire et humain, après des années de mise à mal de notre modèle éducatif. L'éducation nationale redevient la clé de voûte de la République et ses enseignants sont maintenant des hussards du numérique.

Notre bilan sur l'éducation nationale est très positif et aura des incidences constructives pour l'avenir du pays.

Avec la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République du 8 juillet 2013, nous avons redonné durablement à l'école les moyens de remplir sa mission. J'en veux pour preuve le nombre de jeunes quittant le système éducatif sans qualification : longtemps bloqué à 150 000, il est descendu aujourd'hui à 110 000, ce qui situe la France en bonne place parmi ses partenaires européens.

Après avoir rencontré de nombreux intervenants de ce secteur vital, dans lequel se joue l'avenir de notre pays, j'estime que les engagements, basés sur une ambition novatrice, qui avaient été pris par le Président de la République François Hollande ont été tenus.

Tout d'abord, 11 622 postes sont créés pour l'année 2017, venant compléter les 60 000 postes de personnels éducatifs promis sur la durée du quinquennat, et répartis à raison de 54 000 pour l'éducation nationale, 1 000 pour l'enseignement technique agricole, et les 5 000 restants dans l'enseignement supérieur.

Afin d'assurer une qualité d'enseignement, nous avons dû reconstruire la formation des enseignants supprimée par l'ancienne majorité, avec la création des écoles du professorat et de l'éducation (ESPE). Conscients qu'il fallait à nouveau attirer vers cette profession qui avait été malmenée, nous avons décidé de revaloriser le métier d'enseignant, notamment celui du premier degré, après l'avoir fait pour les enseignants du second degré. Cela s'est traduit par la revalorisation de l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves (ISAE).

Je veux rendre hommage à la constance et à la cohérence de l'action du Gouvernement à travers la rénovation des programmes, la réforme de la politique d'éducation prioritaire, la réforme des rythmes scolaires dans le premier degré, et le socle commun de connaissances, de compétences et de culture. C'est de l'avenir de nos enfants, de la France qu'il s'agit.

J'aborderai plusieurs questions précises.

Nous avons tous vécu douloureusement les attentats successifs de 2015 et de 2016. L'école est le creuset de la nation. Comment peut-elle faire progresser encore notre idéal démocratique du vivre-ensemble, du respect, de la citoyenneté, de l'engagement ?

Les objectifs de recrutement de personnels éducatifs ont été tenus sur l'ensemble du quinquennat, ce qui contraste avec l'évolution que notre pays a connue entre 2007 et 2012. Qu'en est-il de la situation dans les différents départements ?

Le Président de la République a su donner d'emblée la priorité à l'enseignement primaire où se posent les bases de l'avenir de nos enfants. Quel bilan tirer des deux programmes innovants que sont la scolarisation des enfants de moins de trois ans et le dispositif « Plus de maîtres que de classes » ?

La réforme du collège intervenue à la rentrée 2016 a suscité de nombreux débats. Avec la réforme des programmes, elle forme un ensemble emblématique de votre action. Pouvez-vous en faire un point de situation ?

La création d'un service public du numérique éducatif a constitué, elle aussi, un grand progrès. Comment s'est-elle concrétisée au cours des dernières années et qu'est-il prévu pour 2017 ?

L'aménagement des rythmes scolaires dans l'enseignement du premier degré avait beaucoup retenu notre attention au début du quinquennat. Cette réforme semble aujourd'hui bien entrée dans les moeurs. Existe-t-il encore des points de blocage sur le territoire ?

Quels progrès ont été apportés dans les domaines, eux aussi essentiels, que sont l'éducation prioritaire, la valorisation de l'enseignement professionnel, la prise en compte des enfants à besoins particuliers ?

Je conclus en me disant particulièrement heureux d'être le rapporteur d'un budget dont les moyens continuent d'augmenter et qui défend une école profondément soucieuse de réduire les inégalités, d'être inclusive, de renforcer toujours la citoyenneté.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'ai choisi de consacrer la partie thématique de l'avis budgétaire sur l'enseignement scolaire à la vaste revalorisation des carrières enseignantes, sur laquelle le Gouvernement et les organisations syndicales représentant 70 % des personnels se sont entendus l'été dernier.

Dans un esprit de méthode et de responsabilité, la priorité absolue donnée par la majorité à l'éducation, avec un budget en hausse de 12,5 % sur le quinquennat, s'est concrétisée en trois étapes cohérentes. La première a été de forger tous les outils innovantsnécessaires pour donner à l'école les moyens de faire face aux défis qu'elle doit relever, au premier rang desquels figure, bien sûr, l'égalité. C'est ainsi que la loi de refondation de 2013 a donné la priorité au primaire et créé des dispositifs innovants. La deuxième grande étape était celle des moyens. Là encore, les engagements ont été tenus, avec 60 000 nouveaux postes sur le terrain, dont 94 % d'enseignants, pour un effort budgétaire annuel de 1,6 milliard d'euros. La troisième étape, cohérente et responsable, s'inscrit dans le prolongement des deux premières. Elle fait l'objet de mon rapport thématique.

J'ai dressé, dans ce rapport, un bilan transparent de l'évolution du pouvoir d'achat des professeurs. Il fait apparaître que les carrières des enseignants sont très inégales. À la différence des autres fonctionnaires, l'avancement est toujours dépendant d'une évaluation qui dépend de la fréquence des visites des inspecteurs. Ce système de rémunération rigide est, dans les faits, bloqué depuis une quinzaine d'années. Au regard des salaires, il place les enseignants français dans une situation bien peu enviable par rapport à celle des enseignants des autres pays comparables. Selon l'OCDE, leur pouvoir d'achat a baissé de presque 10 % entre 2003 et 2014. Dans ce contexte, la revalorisation du traitement des enseignants apparaît comme un impératif.

Depuis 2012, de nombreux efforts ont été consentis pour revaloriser la condition enseignante à travers, d'abord, des mesures d'égalité. Le relèvement et l'alignement progressif du taux d'accès à la hors classe des professeurs des écoles et des primes sur ceux des certifiés est une mesure évidente de justice. De même, un effort de lisibilité et de justice a inspiré la refonte des primes afin de valoriser le « travail gris » des enseignants, toutes ces activités en dehors du face-à-face pédagogique.

Le protocole PPCR (Parcours professionnels, carrières et rémunérations) va cependant beaucoup plus loin. Pour la première fois depuis un quart de siècle, il organise une amélioration massive et globale des carrières de tous les enseignants. Le premier principe est de rendre plus prévisible et, au final plus juste, le déroulé de la carrière en créant une évolution linéaire dans des grilles fortement revalorisées. Surtout, est posée la règle équitable que tous les enseignants ont vocation à accéder au deuxième grade, la hors classe, automatiquement après vingt-six années de carrière s'ils n'ont pas bénéficié d'accélérations liées à leur mérite. Enfin, toutes les étapes de la carrière sont revalorisées, avec des gains maximaux concentrés sur les milieux de parcours, négligés depuis longtemps.

Tous les indices augmentent dès le 1er janvier prochain d'environ 10 points, puis ils progresseront d'un montant comparable en 2019. Sur une carrière, avec les autres revalorisations mises en oeuvre depuis 2012, c'est en moyenne une hausse de 7,5 % à l'horizon 2020.

Pour autant, tracer des carrières équitables n'implique pas de renoncer à valoriser les enseignants les plus méritants. C'est ici le deuxième grand principe du protocole : de vrais rendez-vous sont définis pour accélérer les parcours de ceux qui consentent des investissements exceptionnels dans leur métier. Tous les sept ans, les enseignants ont la garantie d'être inspectés à un moment clairement déterminé et donc attendu. Surtout, pour maintenir cette dynamique vertueuse tout au long de l'exercice du métier, le Gouvernement crée une nouvelle classe, exceptionnelle, qui a vocation à récompenser les meilleurs 10 % d'enseignants.

Troisième et dernier grand principe, l'évaluation fait l'objet de ce que j'ose nommer une refondation. Chacun connaît les faiblesses du système actuel. L'inspection apparaît souvent trop administrative, et son caractère aléatoire introduit des discriminations dans le déroulé des carrières que rien ne justifie. L'évaluation ainsi repensée doit permettre une véritable collaboration entre enseignants, inspecteurs et personnels de direction, pour une approche qualitative dans l'évolution du métier.

La revalorisation des carrières et la refondation de l'évaluation sont autant d'avancées significatives pour les personnels de l'éducation nationale, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017. Grâce à cette nouvelle étape désormais franchie, cet effort sans précédent trouve le relais légitime, après la relance de la formation initiale et continue, de la valorisation et de la refondation des carrières des enseignants. Aussi, madame la ministre, je souhaiterais vous interroger sur deux points particuliers.

Quelles sont les étapes du déploiement des moyens supplémentaires annoncés pour une mise en oeuvre efficace et progressive de cette revalorisation des carrières d'enseignants ? Où en est le chantier, inévitablement concomitant, de la revalorisation des carrières des corps d'inspection et de direction ?

Comment ces nouvelles règles vont-elles concrètement changer le quotidien de nos enseignants ? Je pense en particulier à la refondation si importante de l'évaluation et à ses conséquences, que j'espère massives, sur la formation continue.

Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

Il y a deux ans, lors de la mission élargie sur l'enseignement scolaire, nous nous réjouissions ensemble que le budget de l'éducation nationale soit redevenu, après des années, le premier budget de la nation. Je suis heureuse de vous confirmer, non seulement que c'est toujours le cas, mais que ce budget est encore en augmentation : à 68,4 milliards d'euros, il est en hausse de 2,1 milliards d'euros par rapport à l'année dernière. Cette somme conséquente, nous l'engageons pour l'école moins comme une dépense que comme un investissement pour notre jeunesse, pour notre avenir et, au fond, pour notre présent.

Derrière les chiffres impressionnants, il y a des réalités : des changements concrets pour les élèves, pour les enseignants et pour l'ensemble des personnels de l'éducation nationale.

Monsieur le rapporteur spécial Alain Fauré, la mobilisation de l'école pour les valeurs de la République, qui avait fait l'objet d'un plan au lendemain des attentats de janvier 2015, se poursuit dans le PLF 2017, à travers une dotation de 33 millions d'euros diversement répartie. Une enveloppe de 2 millions d'euros est destinée aux fonds de vie lycéenne, dans le cadre du renforcement des instances de la démocratie scolaire. Une autre, de 1 million d'euros, est affectée au dispositif « ouvrir l'école aux parents pour la réussite des enfants », destiné à aider les parents allophones à comprendre les codes de la réussite scolaire de leurs enfants. Un montant de 3 millions d'euros est consacré aux actions de prévention du décrochage scolaire, car laisser un jeune sortir de notre système scolaire sans qualification n'est rien d'autre que de la non-assistance à jeunesse en danger.

L'école peut et doit beaucoup, mais elle doit pouvoir s'appuyer sur des partenaires. C'est pourquoi cette dotation de 33 millions comprend également les subventions attribuées aux associations, augmentées de 3 millions supplémentaires par rapport à la LFI 2015. Il s'agit de leur permettre de renforcer leurs actions de responsabilisation à travers l'apprentissage des droits et des devoirs, et leurs actions éducatives et pédagogiques sur les problématiques du vivre-ensemble, de la lutte contre les préjugés sexistes, le racisme, l'antisémitisme.

Ces valeurs, nous les transmettons, nous les enseignons, mais nous les appliquons aussi, pour donner à voir aux élèves ce qu'on entend par liberté, égalité, fraternité, et non se contenter d'être incantatoire. C'est la raison pour laquelle 24 millions d'euros sur les 33 millions viendront abonder les fonds sociaux, qui connaîtront ainsi une augmentation de 20 % par rapport à la dotation prévue en LFI 2016. Ces fonds sont donc portés à 65 millions d'euros, ce qui nous permettra de faire face à l'accroissement du nombre de familles touchées par des difficultés économiques, par exemple en facilitant l'accès à la restauration scolaire des élèves de familles défavorisées.

Dans notre volonté de lutter contre les inégalités et de garantir à chaque élève l'acquisition de fondamentaux solides, nous avons également relancé la scolarisation des enfants de moins de trois ans et mis en place le dispositif « Plus de maîtres que de classes ». La scolarisation des enfants de moins de trois ans a bénéficié, entre 2012 et 2015, de l'ouverture de 1 100 classes et d'une offre de 25 000 places. À la rentrée 2016, 231 équivalents temps plein (ETP) ont été affectés à des classes spécifiquement dédiées, pour atteindre un taux de scolarisation des enfants de moins de trois ans de 20,6 % en éducation prioritaire. Nous comptons bien atteindre l'objectif de 30 % des enfants de moins de trois ans, scolarisés dans les zones défavorisées, et même 50 % dans les réseaux d'éducation prioritaire renforcés. Le dispositif « Plus de maîtres que de classes » permet d'avoir un maître supplémentaire dans une école pour prévenir les difficultés scolaires. Depuis le début du quinquennat, 3 195 emplois ont été implantés dans les écoles.

S'agissant de la réforme du collège, la rentrée est passée et je n'ai pas vu la catastrophe qui avait été prédite tout au long de l'année dernière – preuve qu'il faut relativiser les débats qui nous occupent très longuement. La réforme se met en place, et dans de bonnes conditions.

J'entendais dire que les moyens diminueraient, qu'il s'agissait d'une réforme d'austérité : nous avons créé 2 000 postes à la rentrée – avec 2 000 autres à la prochaine rentrée scolaire, nous atteindrons bien les 4 000 postes que j'avais annoncés –, pour permettre la mise en place des petits groupes propices à un meilleur accompagnement des élèves et à éviter que ne se creusent les difficultés scolaires.

Un plan de formation d'une ampleur inédite a été développé tout au long de l'année scolaire 2015-2016 pour accompagner cette réforme du collège et préparer les enseignants à une nouvelle organisation pédagogique et aux nouveaux programmes. L'ensemble des équipes exerçant au collège a été concerné, et près de 700 000 journées de formation ont été dispensées.

J'entendais aussi que le latin, le grec ou encore l'allemand disparaîtraient : il n'en est rien. Vous aurez d'ailleurs remarqué, outre l'embellie remarquable des inscriptions au concours d'enseignant, avec 5 % de candidats supplémentaires sur l'année qui vient, que les lettres classiques ont la part belle avec une hausse de 14,5 % de candidats. J'ai toujours dit que le nombre d'élèves qui bénéficient du latin, du grec ou de l'allemand est en augmentation. Du reste, il fallait s'y attendre dès lors que l'apprentissage de la deuxième langue vivante était avancé d'un an, dès la classe de cinquième.

S'agissant des langues vivantes, j'entendais aussi qu'on opposait Paris et la province. On nous reprochait d'avoir davantage développé la possibilité de pratiquer l'allemand à Paris. Encore une fois, il n'en est rien : en 2016, dans l'académie d'Amiens, par exemple, 201 nouvelles écoles proposeront en LV1 une autre langue vivante que l'anglais, contre 102 à Paris ; dans l'académie de Strasbourg, 936 écoles proposeront l'allemand, contre 131 écoles à Paris. Ce procès-là ne tient pas non plus.

Désormais, la réforme s'applique. Elle apporte un véritable progrès dont vont bénéficier tous les collégiens : accompagnement personnalisé plus important ; introduction d'une part d'interdisciplinarité – vers laquelle se sont tournés tous les pays soucieux de réagir au choc des classements PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) – sans pour autant réduire les horaires disciplinaires.

J'en viens au déploiement du plan numérique.

D'abord, je veux ici saluer l'investissement exceptionnel des collectivités territoriales et de l'État dans le plan numérique pour l'éducation. Pour cette rentrée, un quart de l'ensemble des collèges – 28 % dans le seul public – et 1 800 écoles primaires entrent dans le plan, et avec eux environ 200 000 élèves.Les investissements engagés sur l'équipement, la formation des enseignants et les nouvelles ressources numériques vont, j'en suis certaine, convaincre bien d'autres départements à s'engager dans les années à venir.

Le déploiement du plan numérique prendra, nous le savons, du temps. Il s'appuie sur des projets territoriaux. Au titre de l'année 2017, les crédits qui lui sont dédiés s'élèvent à 191 millions d'euros : 18 millions inscrits au budget du ministère, auxquels s'ajoutent 173 millions du programme d'investissements d'avenir (PIA) ainsi que deux enveloppes spécifiquement dédiées à l'aide à la connexion en zone rurale par la mise en place des infrastructures nécessaires avant l'installation des équipements – 50 millions iront aux écoles et 25 millions aux collèges. Enfin, à partir de 2018, une enveloppe de près de 500 millions de crédits PIA3 permettra d'assurer le financement de la poursuite de la transformation numérique de l'éducation nationale.

Quant à la réforme des rythmes scolaires, elle entre dans sa troisième année de mise en oeuvre dans toutes les communes de notre pays. Cette réforme a désormais trouvé son rythme. Sans dire que tout est parfait partout, je constate qu'il est désormais très difficile de remettre en question cette réforme, tout simplement parce qu'elle vise à redonner un meilleur temps d'apprentissage aux élèves, avec une matinée retrouvée, mais aussi à démultiplier les activités périscolaires.

L'État n'a pas laissé les communes gérer les activités périscolaires seules : le fonds de soutien au développement des activités périscolaires a été pérennisé. Au total, près de 828 millions d'euros auront été versés lors des campagnes 2013-2014, 2014-2015 et 2015-2016 pour accompagner les communes. Dans le PLF 2017, les moyens prévus s'élèvent à 372,9 millions d'euros.

J'ai, par ailleurs, souhaité répondre aux demandes des élus d'un cadre souple et adaptable aux situations locales dans la mise en place des activités périscolaires. J'ai, en particulier, répondu favorablement à toutes les demandes des communes qui n'avaient pas réussi à établir leur projet éducatif territorial (PEDT) en 2015. J'ai aussi décidé, l'an dernier, pour les communes les plus fragiles, de neutraliser les effets d'une sortie de la liste des communes classées en DSU-cible ou en DSR-cible. Au lieu de passer à 40 euros par élève et par an, leur aide sera maintenue à 90 euros pendant toute la durée de leur PEDT. Enfin, avec mon collègue ministre de la jeunesse, j'ai pérennisé les souplesses permises en matière d'organisation des temps scolaires et de taux d'encadrement des activités. Bref, tous les engagements que j'avais pris auprès des associations d'élus ont été tenus.

Une réponse à l'enjeu d'égalité entre les territoires a été apportée par le biais de la refondation de l'éducation prioritaire (REP) à la rentrée de 2015. Que n'a-t-on entendu au sujet de cette réforme de l'éducation prioritaire, très souvent présentée à tort comme étant purement cartographique ! Il était très important de réactualiser la carte pour prendre en compte les évolutions des territoires, mais cette réforme était aussi pédagogique.

À la rentrée de 2016, 1 095 collèges et 6 739 écoles forment le nouveau réseau de l'éducation prioritaire, couvrant 20 % des élèves scolarisés dans les écoles et les collèges. Quelque 7 600 postes supplémentaires auront été créés dans ce cadre, ce qui représente un coût de 222 millions d'euros. À quoi servent ces postes ? Ils permettent trois choses : le renforcement de la scolarisation des enfants de moins de trois ans ; le déploiement du dispositif « Plus de maîtres que de classes » ; le développement de l'accompagnement continu en classe de sixième grâce auquel aucune heure n'est perdue dans l'agenda des élèves, car le tutorat représente une aide au travail personnel et à l'acquisition de méthodes efficaces pour apprendre.

Toujours dans le cadre de cette réforme de l'éducation prioritaire, une enveloppe de 100 millions d'euros aura permis de revaloriser les indemnités des 110 500 personnels concernés. À ceux qui croient que nous avons attendu la fin du quinquennat pour revaloriser le travail des enseignants, je dirai qu'ils n'ont pas dû suivre avec beaucoup d'attention ce que nous faisons depuis 2012. Les indemnités des enseignants intervenant en REP+ ont augmenté de 100 %, c'est-à-dire qu'elles ont doublé ; celles des enseignants intervenant en REP ont augmenté de 50 %.

Pour aider ces élèves qui peuvent rencontrer des difficultés particulières, une enveloppe de 5 millions d'euros a été prévue pour financer les « parcours d'excellence » qui ont été créés à la rentrée. Ils seront déployés dans les REP+ pour permettre à des élèves volontaires de classe de troisième d'être accompagnés, pendant leur parcours scolaire jusqu'en classe de terminale, par des tuteurs qui auront pour mission de lever l'autocensure, d'élargir les horizons et d'aider à s'informer. Il s'agit d'élever le niveau d'ambition de ces élèves dans la poursuite d'études supérieures. Enfin, une enveloppe de 11 millions d'euros est prévue pour financer le renforcement du dispositif « école ouverte », qui permet d'accueillir les élèves pendant les périodes de vacances scolaires afin de les aider à rattraper leur retard ou à prendre de l'avance.

S'agissant de l'enseignement professionnel, je veux commencer par rappeler que notre gouvernement, depuis 2012, a pris des mesures structurantes. Citons la mise en place des campus des métiers et des qualifications, qui sont de véritables pôles d'excellence en matière de formation, spécialisés par secteur économique dans chaque région. Citons aussi le « parcours avenir », qui permet à chaque collégien de découvrir le monde professionnel dès la classe de sixième, sans avoir à attendre le fameux stage de troisième, afin de s'en faire une meilleure idée et aussi de préparer son orientation. Citons encore la création d'un enseignement pratique interdisciplinaire (EPI) dans le cadre de la réforme du collège. Cet EPI a suscité peu de commentaires alors que tous ceux qui sont attachés à l'ouverture de l'école sur le monde professionnel auraient dû s'y intéresser puisqu'il est consacré à la découverte du monde professionnel en tant que tel. Citons enfin, un sujet auquel je vous sais tous attachés : la recherche de stages par les lycéens de l'enseignement professionnel au cours de leur scolarité. Jusqu'à présent, ils étaient bien seuls et livrés à eux-mêmes. Nous avons créé 350 pôles de stages sur tout le territoire, dans tous les bassins d'emplois, ayant pour mission d'aider les établissements dans la recherche de stages pour les élèves qui n'ont pas de réseau familial ou amical.

En cette rentrée 2016, de nouvelles mesures viennent d'entrer en vigueur pour aider les jeunes à réussir leur arrivée en lycée professionnel où se posent des difficultés spécifiques, même si cet enseignement fait moins couler d'encre que le reste. Une nouveauté de la rentrée était destinée aux nombreux élèves qui ont le sentiment d'avoir subi leur orientation. En classe de seconde professionnelle, les élèves ont eu la possibilité de changer d'orientation jusqu'aux vacances de la Toussaint. Cela consacre en quelque sorte une orientation réversible, plus progressive, car on sait bien que le sentiment d'orientation subie est fréquent pour les élèves formés en lycée professionnel. Un peu plus d'un millier de jeunes inscrits en classe de seconde ont demandé à changer d'orientation et ont pu le faire.

D'autres évolutions sont intervenues à la rentrée de 2016, notamment le principe du jumelage entre les collèges, d'une part, et les lycées professionnels et les centres de formation d'apprentis (CFA), d'autre part, afin que les enseignants et les élèves de collège connaissent mieux les opportunités offertes par l'alternance. Vous êtes tous sensibles à cette formation en alternance dont nos collégiens entendront désormais parler bien avant de choisir ou de se voir imposer une orientation à l'issue de la classe de troisième.

Nous avons poussé à la généralisation des journées d'accueil et d'intégration en début de lycée professionnel afin que l'arrivée des jeunes soit réussie. Pour que les jeunes maîtrisent mieux les codes du monde du travail et les règles de santé et de sécurité lorsqu'ils arrivent chez un employeur, nous avons également mis en place une semaine de préparation à l'arrivée en entreprise, avant le premier stage.

Pour un autre chantier concernant les pratiques pédagogiques, nous avons réussi à mobiliser un financement dans le cadre du PIA3. Nous travaillons sur des expérimentations portant sur les pratiques innovantes mobilisant les technologies du numérique au service des métiers qui sont appris dans l'enseignement professionnel. Tous ces métiers auront à intégrer la dimension numérique et l'idée est d'y préparer nos jeunes le plus tôt possible.

Toutes ces évolutions vont contribuer à renforcer l'enseignement professionnel auquel nous faisons confiance. Pour la rentrée prochaine, nous avons décidé de créer 500 nouvelles formations en lycée professionnel, ciblées sur les métiers pour lesquels nous savons qu'il va y avoir de forts besoins en emploi dans les années à venir, ce qui correspond à 1 000 postes d'enseignants.

J'en viens maintenant à vos questions, monsieur le rapporteur Demarthe.Vous avez raison, les chiffres témoignent du fait que le Gouvernement a fait le choix clair d'avoir des personnels plus nombreux et mieux rémunérés, et d'améliorer véritablement la condition enseignante. Les personnels seront plus nombreux grâce à la création des 54 000 postes dans l'éducation nationale. Ils seront mieux rémunérés grâce à l'alignement de l'ISAE sur l'ISOE (indemnité de suivi et d'orientation des élèves), qui met un terme à l'inégalité entre les enseignants du primaire et ceux du secondaire, et aussi à la mise en oeuvre dès cette année du protocole Parcours professionnels, carrière et rémunérations.

En 2017, nous consacrons 500 millions d'euros à la revalorisation des parcours, et 500 millions d'euros supplémentaires d'ici à 2020, dans un souci de cohérence et de continuité. À cet effort s'ajoute la revalorisation du point d'indice décidée par le Gouvernement : une augmentation de 1,2 %, à raison de 0,6 % en juillet 2016 et 0,6 % en février 2017, qui représente un effort supplémentaire de près de 500 millions d'euros, dont 350 millions d'euros en 2017.

Vous m'interrogez sur l'impact du PPCR sur l'attractivité du métier d'enseignant. En la matière, il n'y pas de secret : c'est en valorisant les carrières et les rémunérations, en augmentant le nombre de personnels, bref en montrant notre considération aux enseignants, que nous rendrons le métier plus attractif. Les derniers chiffres des inscriptions aux concours le montrent bien.

S'agissant du PPCR lui-même, il prévoit de revaloriser progressivement les entrées en carrière des stagiaires. À terme, en 2019, ils percevront une rémunération de base annuelle augmentée de plus de 1 400 euros. Par ailleurs, au-delà de l'année de stage, le début de leur carrière sera plus favorable que celui des autres fonctionnaires de catégorie A.

Venons-en à la situation des personnels des corps d'inspection et de direction. Dans le PLF pour 2017, le montant des indemnités allouées aux chefs d'établissement s'élève à 74,4 millions d'euros pour des tâches mieux définies et mieux accompagnées. Comme les enseignants, les personnels des corps d'inspection et de direction bénéficieront du PPCR. Les discussions vont très prochainement démarrer avec leurs organisations syndicales et nous voulons aboutir à un accord d'ici à la fin de cette année.

Quant aux directeurs d'école, ils ont vu leur indemnité spécifique augmenter de 100 euros à 400 euros par mois depuis la rentrée scolaire 2014. Ils bénéficient également de la revalorisation de l'ISAE, d'une amélioration de leur régime de décharge, d'un accès facilité à la hors classe et bientôt du PPCR. Des protocoles de simplification ont été discutés et sont mis en place, car de nombreuses tâches administratives, notamment la multiplication des enquêtes, viennent alourdir le travail des directeurs d'école et peuvent les détourner de leur mission première d'animation pédagogique et d'organisation de l'école. C'est pourquoi, pour simplifier le travail administratif et renforcer l'aide à la direction, 15 000 contrats aidés les accompagnent dans leurs tâches administratives quotidiennes. Cet accompagnement leur permettra de se recentrer sur leur corps de missions et le suivi des professeurs, en lien avec les corps d'inspection.

Les inspecteurs voient, eux aussi, leur travail reconnu dans ce PLF : la création d'un échelon spécial permet aux inspecteurs de l'éducation nationale (IEN) d'accéder à la hors échelle B et aux inspecteurs d'académie-inspecteurs pédagogiques régionaux (IA-IPR) d'accéder à la hors échelle B bis, ce qui constitue une reconnaissance inédite de leur fonction d'encadrement supérieur. Cette reconnaissance est fort bienvenue dans le cadre d'un PPCR destiné à faire en sorte que l'engagement des enseignants soit mieux accompagné et reconnu, et que la notion même d'inspection soit repensée vers davantage de conseil, d'inspection formative et pas seulement sommative.

En conclusion, ce budget exprime une ambition : garantir à tous nos élèves une formation qui leur donne les connaissances nécessaires et fondamentales, et qui leur permette de se construire un avenir. Nous ne pouvons mener à bien un tel travail que si nous donnons à tous ceux qui contribuent à faire vivre l'école au quotidien des conditions et des rémunérations à la hauteur de la tâche qu'ils accomplissent.

Nous avons en France une chance immense qui s'appelle l'école de la République. Ceux qui la font vivre méritent toute notre reconnaissance et toute notre gratitude. Voilà pourquoi je veux dire que je suis heureuse, sincèrement, d'appartenir à un gouvernement qui aura fait le choix clair, net et résolu de doter l'éducation nationale des moyens nécessaires à l'accomplissement de sa mission.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Depuis 2012, la mobilisation de l'État pour l'éducation est totale. C'était un engagement fort de la majorité de gauche, une priorité absolue, car il fallait à la fois rattraper des années de casse de l'éducation nationale, suite aux 80 000 suppressions de postes, et en même temps refonder notre école de la République. Pour cela, le budget de l'enseignement scolaire est en augmentation permanente : il a progressé de près de 8 milliards d'euros sur les cinq dernières années et, depuis 2015, il est même redevenu le premier budget de l'État. Le budget pour 2017, en progression de 3 milliards d'euros, illustre parfaitement la volonté du Gouvernement de poursuivre cette mobilisation indispensable pour favoriser la réussite de tous les élèves et créer de meilleures conditions de travail pour les enseignants.

Tout d'abord, ce budget confirme notre volonté d'augmenter le nombre de personnels dans l'éducation nationale : 11 662 postes supplémentaires sont créés, dont 9 711 postes d'enseignant, 1 351 postes d'accompagnants d'élèves en situation de handicap et 600 postes d'agents de santé, sociaux et administratifs. Oui, notre engagement de créer 60 000 postes est tenu. Nous nous inscrivons ainsi en rupture totale avec la droite qui a orchestré des suppressions massives de postes lorsqu'elle était au pouvoir et qui, à lire les différents programmes actuellement en circulation, prévoit de renouer avec ce mouvement.

Ensuite, ce budget manifeste notre volonté d'avoir des personnels mieux formés. Pour assurer la réussite de nos élèves, il faut doter les enseignants d'une formation initiale et continue de qualité. C'est pourquoi, en 2013, nous avons recréé la formation des enseignants, qui avait été supprimée par l'ancienne majorité. C'est pourquoi aussi nous voulons poursuivre l'amélioration de la formation continue : 100 millions d'euros sont prévus à cet effet au budget pour 2017.

Enfin, ce budget traduit notre souci d'avoir des personnels mieux rémunérés. Même si nous savons que ce n'est jamais suffisant, il concrétise la première étape du PPCR. Ce sont, madame la ministre, des mesures indispensables, car le métier d'enseignant souffre depuis plusieurs années d'une dévalorisation qui s'est traduite, sur certains territoires, par un nombre de places ouvertes au concours supérieur au nombre de candidats, ce qui a eu des conséquences sur les remplacements des enseignants absents. À cet égard, je tiens à saluer le plan que vous avez présenté pour pallier ces difficultés, et à remercier notre collègue Pascal Demarthe qui, dans son rapport, a détaillé toutes les mesures prises par votre ministère pour valoriser ce beau métier. Nous pouvons nous réjouir que les efforts entrepris pour redonner envie de devenir enseignant portent leurs fruits puisque le nombre d'inscrits au concours a fortement augmenté dès cette année.

L'effort budgétaire porte aussi sur le numérique, qui bénéficie d'une enveloppe supplémentaire de 281 millions d'euros. Quelque 338 millions d'euros sont accordés aux REP et REP+, 373 millions d'euros sont octroyés aux communes pour les aider à financer des activités périscolaires, 16 millions d'euros vont à l'apprentissage et 68,5 millions d'euros à la lutte contre le décrochage scolaire.

Ce budget pour 2017 est également placé sous le signe de la lutte contre la pauvreté : en 2017, 12 millions d'euros vont aux fonds sociaux, ce qui correspond à une augmentation de 85 % de la dotation de ces fonds depuis 2012, la droite l'ayant diminuée de 50 % entre 2005 et 2012. C'est un axe fort de ce budget, qui prend en compte les élèves les plus fragiles pour créer une école plus juste : aide à la recherche d'un premier emploi, augmentation des bourses des lycéens, mise en place d'une prime de reprise d'études. Pourriez-vous, madame la ministre, nous donner plus de précisions sur ce sujet ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je supplée, au pied levé, Xavier Breton qui a eu quelques soucis de transport.

Madame la ministre, la Cour des comptes rappelle qu'en raison de leur nombre, les enseignants représentent à eux seuls près de la moitié des agents publics employés par l'État, soit 17 % du budget général. Le Gouvernement s'est entêté, au détriment d'autres ministères, dans l'application d'une augmentation des effectifs des enseignants alors même qu'on la sait inopérante. Cela n'a pas amélioré la performance de notre système scolaire, qui se situe au dix-huitième rang sur trente-quatre dans le classement des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Cette augmentation s'est faite au détriment des enseignants eux-mêmes puisque, comme indiqué dans le rapport de la Cour des comptes, ces derniers ont un salaire inférieur de 15 % à 20 % à celui de leurs homologues de l'Union européenne. Il aurait fallu dégager des marges de manoeuvre pour y remédier. Enfin, c'est ce que nous pensions. Nous nous trompions puisque plus 7,7 milliards d'euros ont été dépensés de manière inefficiente durant ce quinquennat, et cela ne va pas s'arrêter étant donné que ces dépenses engagent l'État pour des dizaines d'années. Vous avez décidé de laisser une énorme facture à vos successeurs. Dans un contexte de finances publiques gravement déficitaires, alors que nous laissons 2 000 milliards d'euros de dettes publiques à nos enfants, nous sommes plus que sceptiques sur l'efficience de votre méthode : toujours du quantitatif au détriment du qualitatif.

En commission, la semaine dernière, notre rapporteur a expliqué que vous aviez attendu le redressement des comptes – qui ne nous apparaît pas évident du tout – pour agir maintenant sur ce qui aurait dû vous préoccuper dès le départ, à savoir une revalorisation du métier d'enseignant après la suppression des heures supplémentaires défiscalisées. Vous nous annoncez donc que vous allez revaloriser les salaires des enseignants, ce qui est juste, mais sur plusieurs années, en commençant timidement en 2017 et en poursuivant la tendance jusqu'en 2020. Vous laissez, une fois de plus, la facture à vos successeurs.

Si je suis favorable à la revalorisation du métier d'enseignant, je trouve aussi qu'il faudrait absolument mettre dans la balance une formation continue obligatoire. D'ailleurs, la mission d'information sur la formation des enseignants, que j'ai eu l'honneur de présider, a démontré que la formation continue était le parent pauvre de l'éducation nationale. Ce n'est pas le rapporteur Michel Ménard qui me contredira.

Vous proposez une revalorisation et une évaluation d'un nouveau type. Vous annoncez la fin des notes chiffrées sans nous donner plus de précisions. Est-ce un nouvel égalitarisme qui ne dit pas son nom, dissimulé derrière une méritocratie dont on ne connaît pas les règles ? Madame la ministre, votre majorité a souhaité consolider le socle – et c'est tant mieux – mais il faut avouer que l'on se perd dans des indicateurs qui changent trop souvent. La disparition de l'évaluation en fin de CM2 rend certains tableaux du « bleu » budgétaire incompréhensibles. On aurait aimé trouver davantage de visibilité.

Je relève les efforts qui sont faits en faveur des élèves handicapés, mais je suis un peu inquiet concernant le taux de couverture et d'affectation dans les unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS), qui baisse d'un point par rapport aux notifications, à la fois à l'école et au collège. C'est un domaine dans lequel nous ne devons pas relâcher nos efforts.

Xavier Breton avait été, avec Yves Durand, l'auteur d'un excellent rapport sur la réforme des rythmes scolaires. Mon collègue Breton n'est toujours pas convaincu des bienfaits de cette réforme dont les magistrats de la rue Cambon ont eu du mal à évaluer le coût réel. Cette réforme, effectuée à marche forcée, ne s'applique pas de la même manière sur tout le territoire. C'est surtout l'intérêt pédagogique des organisations proposées sur le terrain qui laisse plus d'un observateur de l'école songeur. Tout ça pour ça !

De manière plus générale, il y aurait beaucoup à dire sur la rentrée de 2016 et mes collègues ne manqueront pas de vous interroger sur le sujet. Permettez-moi d'exprimer nos inquiétudes sur la réforme du collègue, guidée par une idéologie égalitariste qui va engendrer bien plus d'inégalités réelles que l'élitisme qu'elle prétend combattre. Vous y voyez du progrès mais, pour notre part, nous constatons que tous les symboles de l'excellence et du goût de l'effort à l'école sont remis en cause. Nous ne partageons pas vos analyses sur l'enseignement des langues anciennes ou les filières bilangues. La mise en place des enseignements pratiques interdisciplinaires, au détriment des matières fondamentales, ressemble à une véritable usine à gaz. Ces EPI répondent à l'objectif de « désennuyer » les élèves comme si l'école devait avant tout divertir. En fait, ils risquent d'accentuer les carences de notre système éducatif et, comme toujours, de desservir les élèves les plus en difficulté. Le vivre-ensemble a pris le pas sur la transmission des savoirs.

Enfin, sur la forme, cette réforme traduit un mépris pour les enseignants, auxquels cette réforme a été imposée sans concertation et qui ont été obligés de l'appliquer dans des délais extrêmement courts.

Pour terminer, je vous soumets deux questions. Que reste-t-il aujourd'hui de la grande mobilisation de l'école pour les valeurs de la République ? Si certains enfants n'accèdent plus aux études supérieures, n'est-ce pas parce que, dès l'école primaire, on n'exige plus rien d'eux ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'école est au coeur de la plupart des polémiques contemporaines, qu'il s'agisse de l'égalité des chances, de la laïcité ou bien de l'idéal démocratique. À travers l'institution scolaire, ce sont notre héritage, nos valeurs, notre avenir que nous construisons et transmettons.Elle se doit d'offrir des perspectives d'avenirà chacun des enfants de la nation. Or les chiffres sontparticulièrement accablants : 150 000 jeunes quittent l'école chaque année sans diplôme ; 20 % des élèves qui entrent en classe de sixième ne maîtrisent pas les savoirs fondamentaux ; environ 7 % de la population française souffre d'illettrisme.

Lors de sa campagne, le candidat Hollande avait annoncé la création de 60 000 postes supplémentaires et il aura fallu une astuce comptable pour arriver finalement à ce chiffre à la fin du quinquennat. Le PLF 2017 prévoit la création de 12 842 postes qui s'ajoutent aux 47 158 postes créés depuis 2012. Pour autant, près de la moitié des créations de postes prévues dans l'enseignement scolaire concernent la réforme de la formation, avec 1 000 ETP créés pour la formation et 26 000 enseignants-stagiaires.

Il ne suffit pas d'inscrire ces nouveaux postes dans le budget pour que tous soient effectivement pourvus par des enseignants formés et opérationnels. Certains postes sont souvent occupés par des contractuels quand les concours d'enseignants n'ont pas tous été pourvus dans des zones peu attractives ou des matières en déficit de candidats, comme les mathématiques et l'anglais. En 2013, ce sont ainsi 43 % des postes qui n'ont pas été pourvus. Sur le terrain, beaucoup d'instituteurs ne voient pas les changements espérés ni l'arrivée de nouveaux collègues.

Malgré une légère revalorisation des salaires, le métier a perdu de son attractivité. En 2014, 74,3 % des dépenses d'éducation ont été consacrées aux salaires, charges et pensions, mais les professeurs français sont moins bien rémunérés qu'ailleurs : le salaire moyen des professeurs des écoles est inférieur de 17 % à la moyenne des pays de l'OCDE et l'écart est de 30 % pour les professeurs du secondaire. De plus, la perspective pour les jeunes professeurs de commencer leur carrière dans des quartiers réputés difficiles freine le recrutement.

La formation continue des enseignants est également critiquée de manière récurrente. Un récent rapport de nos collègues Reiss et Ménard, présenté devant notre commission au début du mois d'octobre, a dressé un constat alarmant sur l'état de la formation continue des enseignants. Ceux-ci bénéficient en moyenne de quatre jours de formation par an, contre huit dans la moyenne des pays de l'OCDE. Renforcer les moyens de la formation continue au sein de l'éducation nationale est donc une impérieuse nécessité. Or les crédits alloués cette année ne sont pas à la hauteur des enjeux ; ceux de la formation des personnels de l'enseignement public du premier degré baissent même de 2,33 % sur un an.

Mes chers collègues, depuis plusieurs années, les rapports alarmants sur la situation de l'éducation nationale s'accumulent mais les préconisations mises en oeuvre restent trop timides, quand elles ne sont pas dévoyées. Dans son dernier rapport, le Conseil national d'évaluation du système scolaire (CNESCO) a ainsi très justement souligné la reproduction des inégalités à travers les zones d'éducation prioritaires (ZEP). Notre école est donc toujours plus inégalitaire.

Depuis 2012, le système éducatif n'aura ainsi connu que des réformes au mieux inutiles au pire néfastes : l'abandon de la petite enfance, le bouleversement des rythmes scolaires et la décomposition des apprentissages au collège. Il est grand temps d'engager une réforme autour des savoirs fondamentaux et de l'apprentissage des langues, conduite par des professeurs rémunérés à leur juste valeur.

Madame la ministre, j'ai écouté votre litanie de sujets d'autosatisfaction, ainsi que celle de Mme Sommaruga, la porte-parole du groupe socialiste. Avec autant de succès, comment François Hollande peut-il culminer à 4 % d'opinions favorables ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En 2013, au début de ce quinquennat, l'enquête PISA de l'OCDE mettait en évidence les difficultés de notre école, consacrant le mauvais bilan de la politique de l'ancienne majorité, de 2002 à 2012. La loi du 8 juillet 2013, dite de la refondation de l'école, affirmait un engagement nouveau en faveur de l'éducation. Aussi, depuis le premier exercice de ce quinquennat, le budget consacré à la mission « Enseignement scolaire » n'a cessé d'augmenter. Entre 2012 et 2017, il a progressé de près de 8 milliards d'euros, c'est-à-dire de plus de 10 %. En 2017, les crédits s'élèvent à près de 70 milliards d'euros, marquant une augmentation par rapport à 2016. Depuis deux ans, le budget de l'éducation est devenu le premier budget de l'État.

Sur les bancs de l'opposition, on tente de dénigrer, espérant qu'il en restera toujours quelque chose. Dans le florilège de ces dénigrements, on dit que la quantité ne fait pas la qualité, que le nombre d'élèves par classe ne fait pas une politique, et bien d'autres arguties qui cachent mal une volonté d'imposer dans l'éducation, comme dans d'autres domaines, une véritable cure d'austérité. Les discours des candidats aux élections primaires de la droite sont d'ailleurs très éclairants : tous proposent de réduire le nombre de fonctionnaires, certains n'hésitant pas à stigmatiser les enseignants en affirmant faussement qu'ils ne travaillent que six mois dans l'année.

Pour sa part, le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste se réjouit de voir notre majorité mener une politique bien différente et bien meilleure pour l'école que la précédente. Nous avons créé 60 000 postes supplémentaires ; nous avons rétabli la formation des enseignants que l'ancienne majorité avait supprimée ; nous revalorisons le métier d'enseignant en augmentant les salaires mais aussi en facilitant la promotion des personnels qui s'engagent dans l'éducation prioritaire ou dans des missions particulières.

En cinq ans, beaucoup aura été accompli, mais il est vrai que des améliorations doivent encore être apportées. Des inégalités persistent dans notre école, où la réussite est encore trop tributaire de l'origine sociale des élèves.

L'éducation prioritaire, même si elle doit encore être confortée, ne peut à elle seule faire face au problème des quartiers dits hyper défavorisés que notre société a bien du mal à désenclaver. Dans ces quartiers, il faut certes plus d'école, mais aussi plus d'action des pouvoirs publics en matière de logement, d'emploi, de sécurité et de transports. Madame la ministre sur ce sujet, j'aimerais connaître votre point de vue.

De manière plus générale, je pense que notre système scolaire doit abandonner sa structure trop pyramidale pour mieux se réformer. Il devrait davantage s'ouvrir aux innovations qui sont mises en place au niveau local.

L'une des prochaines réformes consistera certainement à accorder plus de confiance et plus d'autonomie à tous les acteurs de terrain qui ne ménagent pas leurs efforts pour la réussite de nos jeunes. Tout en veillant à l'égalité de traitement sur l'ensemble du territoire, l'État devrait octroyer plus d'autonomie aux établissements scolaires et travailler davantage en partenariat avec les collectivités territoriales. Il faut également donner aux parents une place plus importante dans le fonctionnement de notre école et aux enseignants des libertés pédagogiques accrues, grâce à une formation continue qui doit sans cesse s'améliorer. Ne serait-il pas souhaitable de rééquilibrer l'administration du ministère au profit d'une gestion de proximité plus apte à prendre en compte les réalités du terrain, à entendre les aspirations des enseignants et des parents, et surtout à répondre aux besoins des élèves ?

Le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste émet un avis favorable sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Attachée à l'école de la réussite pour tous et toutes, je ne peux que me féliciter de cette nouvelle progression du budget de l'enseignement scolaire. Vous l'avez dit, ces crédits ne constituent pas une dépense mais un investissement pour l'avenir. Des enfants qui réussissent à l'école, ce sont plus tard des adultes capables de comprendre le monde et les différentes cultures, de débattre, d'échanger des savoirs et de construire leur vie. Ce budget, qui devient le premier de la nation, symbolise avec force l'espoir placé dans l'intelligence des hommes et des femmes de notre pays face à toutes les dérives, tensions et barbaries.

L'augmentation du budget se traduit par des créations de postes après la casse de 80 000 postes sous la précédente législature. L'ancienne majorité dit privilégier la qualité et méprise la quantité. Or elle a supprimé des postes mais aussi la formation des enseignants. Nous avons choisi de travailler sur les deux fronts à la fois – les postes et la formation.

La reconnaissance que nous devons aux enseignants et aux personnels de l'éducation nationale restait à concrétiser. Le relèvement du point d'indice et la revalorisation des carrières apportent un tout début d'amélioration de la situation des agents, tout comme la réforme de la condition des stagiaires ou la transformation des contrats aidés en contrats de droit public pour une partie des personnels d'accompagnement des enfants.

Nous commençons à mettre en place la loi pour la refondation de l'école, avec l'ouverture des maternelles aux enfants de moins de trois ans et le dispositif « Plus de maîtres que de classes ». Est-on d'ores et déjà en mesure d'évaluer l'accueil des enfants de moins de trois ans ?

Madame la ministre, en dépit des créations de postes, les remplacements restent soumis à une grande tension. À l'approche de la période hivernale, serez-vous en mesure de garantir un maître devant chaque classe, notamment dans les zones les plus touchées par la crise ? Quels sont vos objectifs s'agissant des effectifs par classe dans le secondaire, où près de 41 % des classes comptent aujourd'hui, dans les lycées, entre trente-cinq et trente-neuf élèves ?

Je me félicite, comme vous, de la hausse de 5 % des inscriptions aux concours de recrutement des enseignants. L'excellent rapport de nos collègues Reiss et Ménard sur la formation de ces derniers demandait des moyens pour les accompagner, y compris financièrement, dans les périodes de formation. Quel est votre avis sur les propositions contenues dans ce rapport ?

Un autre rapport, celui du CNESCO, portant sur les inégalités sociales sur la période antérieure à 2013, pose des questions intéressantes sur l'éducation prioritaire : n'est-elle pas trop à la marge du travail ordinaire de l'enseignant ? La baisse des effectifs par classe est-elle suffisamment significative ? Les moyens ne sont-ils pas trop dilués ? Le travail sur la mixité sociale est-il suffisant, sachant qu'à elle seule, l'école ne peut pas tout résoudre dans les quartiers ?

Pouvez-vous préciser le rôle des volontaires du service civique auprès des équipes éducatives ainsi que la formation qui leur est proposée ?

Enfin, compte tenu des événements récents, pouvez-vous nous indiquer les mesures que vous comptez prendre en matière de sécurité dans les lycées ?

Les députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine donneront un avis favorable sur ce budget.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Chacun le sait, il n'y a pas de service d'éducation de qualité sans enseignants à la fois nombreux et bien formés. Nous avons rétabli la formation avec les écoles supérieures du professorat et de l'éducation et créé 60 000 postes. Faut-il encore que ces postes soient pourvus, avec des candidats de bon niveau. Telle est notre conception du respect que nous devons aux enseignants.

Les résultats des récents concours montrent que les candidats sont nombreux à revenir vers le métier d'enseignant. Ils témoignent d'un regain d'attractivité encourageant, notamment pour les disciplines déficitaires – mathématiques, lettres et langues –, même si elles le restent un peu. Quelles sont, selon vous, les raisons qui expliquent cette attractivité nouvelle du métier d'enseignant ? Que faire pour la pérenniser et conserver un vivier d'enseignants nombreux et de grande qualité ?

Chers collègues de l'opposition, bien sûr, tout n'a pas pu être fait en cinq ans, mais le socle de la refondation de l'école est solidement établi. Nous devons poursuivre dans cette voie et non pas revenir à une politique qui, sans esprit de polémique, a démontré tous ses méfaits.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En matière de rémunération, vous avez décidé d'aligner l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves pour les enseignants du primaire sur celle du secondaire. Cette mesure n'est pas illégitime, mais il faut la ramener à sa juste proportion : cette prime représente 57 euros supplémentaires par mois, soit une augmentation de 3 % du salaire médian. Ce n'est pas cela qui redonnera une attractivité au métier d'enseignant, dont l'amélioration timide est surtout à mettre en relation avec le taux de chômage des jeunes.

Comment ne pas voir dans cette décision, qui s'appliquera quatre mois avant l'élection présidentielle, une tentative pour ramener vers vous l'électorat enseignant, tout en laissant à vos successeurs le soin de la financer ? La ficelle est un peu grosse. Vous espérez ainsi endormir la colère et les déceptions des enseignants, qui sont bien réelles, quoi que vous en disiez.

Nous avions choisi une approche différente, avec la défiscalisation des heures supplémentaires et la prime de 500 euros, qui permettaient de gagner bien davantage pour un service accru délivré par des enseignants expérimentés alors qu'aujourd'hui, pour satisfaire votre promesse de création de 60 000 postes, vous laissez faire des recrutements dans des conditions indignes dans certaines académies déficitaires. Plus que jamais, vous auriez été bien inspirés de suivre les préconisations du rapport de la Cour des comptes, pour qui la question des moyens – votre unique obsession – doit être corrélée à leur bonne utilisation. Vous auriez pu vous attaquer à l'un des maux de notre système éducatif, sa centralisation excessive. Pourquoi avoir supprimé, dès votre arrivée au pouvoir, la prime de 500 euros et la défiscalisation des heures supplémentaires, qui valorisaient substantiellement la rémunération des enseignants du secondaire ?

L'évaluation des enseignants, pudiquement appelée « rendez-vous de carrière », tous les sept ans, pose également question. Que se passe-t-il en cas de défaillance de l'enseignant entre deux rendez-vous ? On peut également s'interroger sur votre conception du coeur de la mission de l'enseignant quand le savoir disciplinaire n'est qu'un des onze critères retenus pour cette évaluation.

Enfin, j'ai en mémoire le rapport de nos collègues Yves Durand et Rudy Salles sur l'évaluation des politiques publiques en faveur de la mixité sociale dans l'éducation nationale, qui démontrait la faiblesse des trois dispositifs que vous considérez comme emblématiques de votre action : les ESPE, le dispositif « Plus de maîtres que de classes », et la scolarisation des enfants de moins de trois ans.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Tout d'abord, je regrette le ton inutilement polémique de nos collègues de l'opposition. L'école a besoin de consensus, elle mérite mieux que ces polémiques, sans doute liées aux primaires et autres campagnes électorales à venir.

Je salue le montant du budget consacré à l'enseignement scolaire. Celui-ci est redevenu, depuis 2015, le premier budget de l'État, et nous nous en étions longuement félicités l'année dernière.

La loi pour la refondation de l'école de 2013 a pour principaux objectifs de corriger les inégalités au sein du système éducatif et de lutter contre les déterminismes sociaux. Plusieurs priorités ont été définies : l'école primaire, la révision des programmes, la réforme de l'éducation prioritaire ainsi que la formation des enseignants et les créations de postes. Les postes ne sont pas créés par plaisir ou principe ; ils permettent de mettre en oeuvre la politique que nous souhaitons mener. Peut-être faudrait-il aller encore plus loin dans la réforme de l'éducation prioritaire, en allouant davantage de moyens aux territoires qui en ont le plus besoin, les quartiers de politique de la ville ou certains territoires ruraux.

Beaucoup a été fait pour l'inclusion dans notre école. En particulier, le taux d'élèves handicapés scolarisés a progressé de 24 % en cinq ans. Pour les familles concernées, cependant, ce n'est évidemment jamais suffisant ni jamais assez rapide. Où en est le recrutement des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) ? Ces derniers sont-ils concernés par les mesures de revalorisation salariale ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je n'ai rien contre la recherche du consensus, encore faut-il se débarrasser d'une vision manichéenne tendant à considérer que la lumière serait arrivée en 2012 et que tout ce qui a été fait entre 2002 et 2012 n'était pas bon.

Alors que les indicateurs qui figurent dans le projet annuel de performance visent à faciliter le pilotage des politiques en matière d'éducation et leur évaluation, on s'aperçoit, malgré les sommes considérables qui sont en jeu, qu'ils sont très peu utilisés. Je note ainsi que l'indicateur sur le socle commun de connaissances a disparu, tout comme celui sur le taux d'insertion professionnelle. Cela rend difficile toute appréciation.

Par ailleurs, plusieurs indicateurs contredisent les discours d'autosatisfaction qu'on peut entendre. En matière d'inégalités territoriales, l'écart de taux d'encadrement à l'école primaire entre éducation prioritaire et hors éducation prioritaire a tendance à se réduire, tandis que l'écart de taux de réussite au diplôme national du brevet a tendance à s'accroître. Les efforts en faveur de la résorption des inégalités ne produisent donc pas les résultats escomptés.

D'autres indicateurs sont particulièrement alarmants. Il en est ainsi du taux d'absentéisme des élèves qui passe, entre 2014 et 2015, de 5,4 % à 5,9 % au lycée d'enseignement général et technologique, et de 12,9 % à 14,2 % au lycée professionnel. De même, la proportion d'élèves ayant bénéficié d'un bilan de santé dans leur sixième année a baissé de 75,8 % à 71,7 % ; pour les élèves en REP+, la chute est encore plus brutale, de 87,6 % à 78,8 %.

Ces chiffres inquiétants démentent votre discours d'autosatisfaction.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Lors de la réforme du collège, je vous avais alertée, madame la ministre, sur le devenir des classes bilingues. Certes, toutes les classes n'ont pas disparu, certaines ayant été maintenues selon les académies dans un but de continuité pédagogique.

Je vous avais interpellée en particulier sur les difficultés de l'enseignement de la langue allemande, considérant que la réforme risquait d'affaiblir un peu plus cette discipline déjà en régression, malgré les efforts importants des professeurs. Pouvez-vous faire le point sur l'enseignement de l'allemand ? Combien de postes ont été ouverts et pourvus au CAPES d'allemand ?

Qu'en est-il de l'enseignement d'une seconde langue vivante en classe de cinquième ? Comment se répartissent les langues choisies par les élèves ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La scolarisation des enfants autistes constitue l'une des priorités du Gouvernement et de la majorité.

L'engagement pour une école inclusive se traduit par de nouvelles mesures fortes dans le budget 2017. La pérennisation des assistants d'éducation, qui exercent la mission d'auxiliaire de vie scolaire, répond ainsi à une demande très forte et ancienne. Si l'amélioration de l'accueil de ces enfants est particulièrement sensible dans le second degré, nous agissons également dès leur plus jeune âge, avec la création de 110 unités d'enseignement pour enfants autistes à la maternelle depuis la rentrée 2014. À l'horizon 2017, l'objectif est de parvenir à l'installation d'une unité d'enseignement par département, pour un total de 700 places. Accueillant au maximum sept enfants, ces unités associent des enseignants et des professionnels médicosociaux qui travaillent dans le cadre d'un emploi du temps adapté dans le but d'amener ces enfants à suivre un cursus classique sans auxiliaire de vie scolaire au terme des trois années d'école maternelle. L'accompagnement précoce, recommandé par la Haute Autorité de santé en 2012, permet de mobiliser, dès le plus jeune âge, la capacité d'inclusion et d'apprentissage des enfants afin de faciliter au maximum leur bien-être et leur réussite à l'école.

S'il reste beaucoup à faire, il s'agit d'une première réponse en faveur de l'inclusion de tous les élèves. Nous pouvons nous réjouir qu'enfin l'école, notamment maternelle, s'ouvre aux enfants avec des besoins particuliers. Je suis particulièrement fier que ma circonscription accueille une de ces unités depuis la dernière rentrée scolaire, au sein de l'école maternelle Suzanne Herbinière Lebert, à Villers-lès-nancy.

Quels sont les crédits consacrés dans cette mission à l'accompagnement des enfants autistes ? Comment le Gouvernement entend-il continuer à soutenir ce beau projet qu'est l'école inclusive dans les années à venir ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Chaque année, au lycée, vingt-neuf heures de cours – soit une semaine sur les trente-six que compte l'année scolaire – ne sont pas remplacées. Pour un élève de primaire, ce sont deux jours et demi qui manquent, quatre dans certaines académies. Le projet de loi de finances prévoit 4,3 % d'heures non remplacées pour 2017. Il affiche un taux de remplacement pour les absences de longue durée de 97 % et, dans les annexes, sont évoqués les effets attendus d'une meilleure anticipation des absences pour formation.

Le 18 octobre, vous avez présenté sept mesures visant à améliorer le remplacement des enseignants absents, avec trois impératifs : une meilleure information, un renforcement du potentiel existant et une amélioration de la gestion du remplacement. Les moyens prévus seront-ils à la hauteur de l'enjeu ?

L'amélioration de la gestion suppose que la charge qu'elle représente soit prise en compte. L'expérimentation dans l'académie de Créteil a montré l'importance, et en l'occurrence l'insuffisance, du nombre d'agents gestionnaires.

Le vivier unique de remplaçants par département dans le premier degré va poser nécessairement d'autres problèmes. Le ministère indique que tous les enseignants de ce vivier auront vocation à effectuer des remplacements au vu des besoins à l'échelle du département. Comment un enseignant de Saint-Pierre-de-Chandieu, dans le Rhône, va-t-il pouvoir effectuer un remplacement à Thizy, nécessitant 100 kilomètres et une heure trente de trajet ? Le financement des surcoûts kilométriques est-il budgété ? L'allongement du temps de trajet ne risque-t-il pas finalement de susciter un plus grand absentéisme ?

Les indicateurs du projet annuel de performance de 2015 montrent une disparité importante entre établissements publics et privés. Les raisons en ont-elles été analysées ? Est-ce lié à la plus grande autonomie du chef d'établissement ?

Enfin, au collège et au lycée, il sera fait appel aux enseignants de l'établissement pour assurer les heures de cours des collègues absents. Ce dispositif suppose de trouver des volontaires et d'accorder des heures supplémentaires aux établissements

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Permettez-moi de saluer ce budget.

Dans le programme 230 « Vie de l'élève », il est question de la sensibilisation des élèves à un certain nombre de problématiques de santé. Afin de donner des repères indispensables aux élèves comme aux adultes, le ministère diffuse largement des outils informatifs ou méthodologiques, par exemple sur l'éducation à la responsabilité face aux risques, à l'alimentation, à la sexualité ainsi qu'à la prévention des comportements sexistes et des conduites addictives.

En travaillant sur les cancers de l'enfant, leucémies et autres maladies rares, nous avons constaté que la France souffre d'un grand déficit en dons de vie – dons de moelle, de sang, de plaquettes, de plasma. Ce déficit constitue un obstacle à la guérison de nombreux malades, en particulier des enfants. À titre d'exemple, 240 000 personnes sont inscrites sur le fichier des donneurs de moelle osseuse en France, contre 5 millions en Allemagne. À l'instar du travail remarquable d'associations telles Laurette Fugain ou Cassandra contre la leucémie, pourrions-nous envisager que le ministère généralise l'information auprès du jeune public sur ce sujet ? Le ministère pourrait-il diffuser des outils informatifs et méthodologiques, élaborés, le cas échéant, en partenariat avec d'autres institutions publiques ou associatives, afin que ces dons deviennent pour les jeunes devenus adultes une démarche citoyenne naturelle ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les parents d'élèves sont confrontés de manière régulière au non-remplacement de l'enseignant de leur enfant à tous les niveaux de la scolarité. Les accidents ou les longues maladies des enseignants, mais aussi les absences de courte durée – le principal fléau – sont autant d'heures perdues irrémédiablement pour les élèves, de pans entiers des programmes non abordés et de difficultés probables dans les classes supérieures. Le phénomène, amplifié à la saison hivernale, revient chaque année, et les associations de parents d'élèves s'en font régulièrement l'écho. Ainsi, dans le lycée Lavoisier à Mayenne, il n'y a pas de professeur d'espagnol depuis la rentrée et aucun remplacement n'est prévu avant la rentrée de janvier 2017 – si encore les maladies hivernales ne viennent pas remettre en cause cette perspective. Au collège de Pré-en-Pail, les élèves sont sans professeur de physique-chimie depuis septembre, et un professeur de français a été absent toute l'année scolaire dernière.

À la pénurie des remplaçants s'ajoute une interrogation sur la qualité du remplacement dans les disciplines frappées de pénurie, comme en mathématiques ou en sciences. Dans ces disciplines, l'éducation nationale a recours à des personnes en recherche d'emploi, souvent qualifiées mais qui, n'étant pas des professionnels de l'éducation, ne maîtrisent ni la pédagogie ni la gestion des classes. Dans le secondaire, en cas d'absence de moins de quinze jours, vous souhaitez faire appel à la bonne volonté des enseignants pour faire cours à la place de leurs collègues absents, moyennant le paiement d'heures supplémentaires. Or cette solution existe depuis 2005 mais ne fonctionne pas. Si l'on peut comprendre aisément la difficulté pour les académies de remplacer au pied levé un enseignant dont on apprend l'absence le jour même, ce problème récurrent nuit immanquablement aux apprentissages des élèves, surtout les plus faibles, et pèse indéniablement sur les relations entre les parents et l'établissement scolaire. Où sont donc passés les 5 000 postes dédiés aux remplacements ?

Cette situation accroît les conséquences des inégalités sociales sur les résultats scolaires, certaines familles étant dans l'incapacité de financer, comme d'autres le font, des cours particuliers pour pallier les carences de l'éducation nationale.

Au-delà des mesures annoncées récemment, quelles dispositions comptez-vous prendre pour assurer le rattrapage des heures de cours perdues et pour endiguer de façon pérenne ce phénomène inadmissible au regard des moyens, supérieurs à ceux de la moyenne de l'OCDE, dévolus à l'éducation nationale ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le Gouvernement présente un budget en hausse de 3 milliards d'euros pour l'éducation nationale, l'enseignement supérieur et la recherche, dont une part importante a été réservée pour les écoles, les collèges et les lycées. L'un des objectifs de la réforme des collèges est de renforcer l'acquisition des savoirs fondamentaux des collégiens grâce aux enseignements complémentaires, qui prétendent modifier la façon d'apprendre. Je vous cite : « Il s'agit d'améliorer la façon de transmettre pour les professeurs, et d'apprendre pour les élèves, en donnant aux équipes une marge de manoeuvre de 20 % du temps d'enseignement dans le respect des horaires disciplinaires. Dans ce cadre, les établissements reçoivent des moyens supplémentaires pour donner davantage d'autonomie aux équipes pédagogiques, constituer des groupes à effectif réduit, et mener des interventions conjointes de professeurs. »

Au-delà de la valeur incontestable des grands principes affichés du développement de l'esprit d'équipe et de projet ou de la connexion entre les matières et les apprentissages, d'importants problèmes de mise en oeuvre se posent. Il s'agit notamment de la réduction du volume horaire consacré à l'apprentissage des disciplines, de la modification des programmes ainsi que la répartition sur les classes de cinquième et de troisième. Quid des enfants qui déménagent ? Quid des manuels scolaires, par années ou par cycles ?

Afin de rassurer les enseignants et les parents, je souhaite vous demander comment utiliser au mieux les crédits alloués au budget 2017 de l'enseignement scolaire. Comment donner aux enseignants, qui sont très dubitatifs, les moyens de mener à bien leur tâche de former dans les meilleures conditions tous les enfants à l'excellence ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je veux, à mon tour, me féliciter du niveau atteint par le budget de l'éducation nationale, qui demeure le premier de la nation, et de ce que l'engagement pris de recruter 55 000 postes supplémentaires sera tenu dans la présente mandature. Ces deux aspects témoignent de l'importance que nous donnons à l'école de la République, qui est le lieu où les jeunes peuvent se construire avant de prendre leur place de citoyens, forts des connaissances et de l'esprit critique qu'ils y auront acquis. Cela est essentiel pour le républicain que je suis.

Pour l'année scolaire en cours et les suivantes, quelles dispositions comptez-vous prendre pour que les remplacements soient pleinement assurés dans les départements qui, comme celui du Val-de-Marne, ont encore connu des difficultés importantes l'année dernière et dont le contexte social et le nombre d'établissements en REP appellent de la part du ministère une vigilance toute particulière ?

S'agissant des nouveaux rythmes scolaires, avec l'appui de nombreux députés, vous avez pérennisé le fonds de soutien aux communes. Quel bilan tirez-vous du dispositif, en distinguant les communes ayant conclu un projet éducatif territorial et les autres ? Ne conviendrait-il pas de moduler l'aide en fonction de l'existence d'un PEDT et de la gratuité des activités ? Le contenu du PEDT peut être très variable, confinant parfois à la garderie dépourvue de toute activité pédagogique mais que pour autant les parents doivent payer.

Enfin, la clause de rendez-vous du dispositif REP va bientôt s'appliquer. La nouvelle carte des réseaux d'éducation prioritaire sera-t-elle dessinée au terme d'une concertation fondée sur un bilan ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaite me faire l'écho de l'exaspération d'élus ruraux devant le sort réservé aux écoles présentes dans leurs territoires. Une présence scolaire en zones rurales doit être garantie afin d'offrir un service de proximité et de socialisation, et d'épargner aux enfants une fatigue excessive due à des transports scolaires trop longs. Il convient aussi de garantir partout un accès égal à la qualité de l'école. Or l'État a tendance à se décharger sur les communes des missions lui revenant, comme ce fut le cas dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires.

Dans ces conditions, plusieurs impératifs se font jour : la révision des principes de répartition du financement de l'école ; l'équipement numérique des écoles rurales afin de faire bénéficier les écoliers de cet apport indispensable ; la révision des décharges des directeurs d'école. Par ailleurs, l'offre scolaire doit tenir compte des réalités et particularités de chaque territoire ; la concertation avec les élus locaux constitue, à cet égard, une nécessité.

De surcroît, dans le contexte de guerre créé par la menace terroriste, vous avez imposé des contraintes de sécurité supplémentaires, avec les plans particuliers de mise en sûreté (PPMS). Ces mesures sont certes justifiées, mais elles doivent être mises en oeuvre avec discernement, en fonction de la taille de la commune et de celle de l'école, ce qui est particulièrement vrai en milieu rural.

Voilà, madame la ministre, quelques éléments indispensables à prendre en compte si nous voulons une école de qualité, égale pour tous, formant les futurs citoyens de notre République. Dans le milieu rural, une école de qualité est d'autant plus nécessaire qu'elle participe au renforcement de l'attractivité de ces territoires, afin d'y faire venir les entreprises et les personnels de santé, et d'y fixer les familles.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je partage l'appréciation que Marie-George Buffet a portée sur ce budget.

Il y a un an, un partenariat a été conclu avec la société Microsoft, qui me semble heurter les valeurs de neutralité et d'interopérabilité dans l'utilisation des logiciels que devrait promouvoir l'éducation nationale. Concéder à Microsoft le monopole du marché français de l'éducation me paraît d'autant plus incohérent que cela est contradictoire avec les débats que nous avons eus sur la loi pour une République numérique, et notre lutte pour l'autonomie informationnelle.

« Quand c'est gratuit, c'est que vous êtes le produit », dit-on. Gratuit, ce partenariat, qui offre des logiciels, l'utilisation du cloud et de la formation aux enseignants de l'éducation nationale, l'est effectivement. Or, pour Microsoft, c'est le moyen d'entrer dans la bergerie ! On donne aux enfants et aux enseignants l'habitude d'utiliser un logiciel, ignorant tout ce que les entreprises françaises peuvent produire dans le domaine des logiciels libres. Le collectif EduNathon a été débouté de son recours il y a deux mois, mais j'aimerais quand même comprendre ce qui vous a semblé positif dans ce partenariat.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre, lorsque je vous ai interrogée au sujet des fermetures de collèges de l'éducation prioritaire, les 24 mai et 8 juin 2016, vous vous étiez engagée à maintenir les moyens nécessaires à la réussite des élèves issus du réseau d'éducation prioritaire.

Il se trouve que certaines collectivités locales, en général les conseils départementaux, sont conduites, au prétexte d'un manque de mixité sociale, à fermer des collèges de REP lorsque les effectifs sont insuffisants et qu'il ne paraît pas envisageable de maintenir tous les collèges ouverts. Pour ma part, je considère que ce problème de mixité sociale ou, pour reprendre vos propres propos que je trouve un peu durs, « de ségrégation sociale extrêmement important » reste à démontrer. Quel gâchis au regard des immenses progrès accomplis et des importants efforts d'adaptation fournis par les équipes pédagogiques, les élèves et leurs familles. Quel gâchis quand les résultats sont là !

Dans la présentation de la programmation pluriannuelle de votre mission, vous rappelez à juste titre que la refondation de la politique d'éducation prioritaire a pour finalité de corriger l'impact des inégalités sociales et économiques sur la réussite scolaire. Vous ajoutez qu'à l'échelon national, le nouveau modèle d'allocation des moyens d'enseignement du premier degré permet de les attribuer selon le principe fort de solidarité, vis-à-vis des écoles et collèges de l'éducation prioritaire mais aussi des territoires ruraux, comme le prévoit la loi de refondation de l'école de la République.

Vous rappelez aussi que la réussite scolaire n'est possible qu'avec l'implication des élèves et des familles, ce qui est encore plus vrai dans les écoles concernées. Vous attribuez en conséquence des moyens aux REP, et vous le revendiquez au nom de principes que je partage avec vous. Aussi, je souhaiterais savoir de quels moyens vous disposez pour permettre à des enfants issus de familles en grande difficulté de bénéficier d'un enseignement adapté, notamment en cas de fermeture de collèges situés en zone d'éducation prioritaire. Comment procédez-vous lorsque les enfants sont répartis entre plusieurs établissements, privés ou publics ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je reconnais, madame la ministre, que le sujet des remplacements est particulièrement difficile, et vous allez sans doute nous apporter quelques réponses à caractère financier. Ne pensez-vous pas, cependant, que la question est aussi d'ordre organisationnel, voire systémique ? Ne touchons-nous pas là les limites d'une gestion centralisée ? En d'autres termes, que pensez-vous d'autres pistes qui permettraient beaucoup plus de réactivité, en assumant enfin un minimum de décentralisation ? Je pense tout particulièrement à l'école primaire, dont, bien avant vous et moi, Charles Péguy disait déjà que s'y jouaient 80 % des chances.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le 14 septembre dernier, journée nationale du sport scolaire, avec mon collègue Pascal Deguilhem, nous vous avons remis, madame la ministre, un rapport intitulé La pratique physique et sportive pour tous et tout au long de la vie : des enjeux partagés dans et hors de l'école. Nous y établissons un constat qui rejoint une alerte forte de la fédération française de cardiologie : aujourd'hui, moins de 50 % des enfants de neuf à seize ans pratiquent les soixante minutes d'activité physique et sportive quotidiennes préconisées par les autorités sanitaires. Par ailleurs, en quarante ans, nos collégiens ont perdu 25 % de leurs capacités physiques, c'est-à-dire qu'ils courent moins vite et moins longtemps.

Nous avons la ferme conviction qu'une activité physique et sportive pratiquée dès le plus jeune âge constitue la meilleure garantie que cette bonne habitude sera poursuivie tout au long de la vie, au grand bénéfice de la santé publique. Vous connaissez les chiffres publiés cette semaine par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) au sujet de l'obésité et du surpoids dans notre population.

Nous avons formulé cinquante-quatre recommandations, aussi ne vous poserais-je que quelques questions.

Comment mieux faire respecter les horaires obligatoires d'éducation physique et sportive (EPS) dans le premier degré, qui, après les mathématiques et le français, occupe le plus de temps dans les programmes, soit 108 heures par an ?

Comment faire en sorte que le savoir-nager, qui, tout comme lire, écrire, compter, et cliquer est fondamental, soit maîtrisé par l'ensemble d'une classe d'âge à la fin du cycle 3 ?

Comment mieux valoriser les parcours sportifs ainsi que l'engagement associatif, notamment celui des élèves à l'Union sportive de l'enseignement du premier degré (USEP) ou à l'Union nationale du sport scolaire (UNSS), au sein du parcours et du livret citoyens ?

Comment faire en sorte que les nouvelles activités périscolaires organisées dans le cadre des PEDT constituent réellement des temps complémentaires de l'EPS obligatoire, du sport scolaire et des temps extrascolaires au sein des clubs sportifs ?

Comment améliorer la formation initiale et continue des enseignants ? À cette occasion, je veux rendre hommage aux 30 000 enseignants d'EPS qui accomplissent un travail remarquable.

Enfin, nous venons d'adopter un amendement prévoyant la création d'un fonds « Héritage sportif et territorial », doté de 25 millions d'euros par an jusqu'en 2024, dans le cadre de la candidature de Paris aux Jeux olympiques et paralympiques. Seriez-vous favorable à ce que ce fonds puisse servir à créer plusieurs milliers d'équipements légers de proximité dans ou aux abords des écoles – je pense en particulier à l'aménagement des cours de récréation –, ce qui favoriserait l'activité physique ?

En résumé, quelles suites concrètes comptez-vous donner à notre rapport sur le sport à l'école ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les classes bilingues permettaient aux élèves de commencer une seconde langue dès leur entrée en sixième et de bénéficier ainsi de deux heures supplémentaires afin d'approfondir la langue étrangère choisie. Ces classes ont connu un franc succès, avec plus de 275 000 inscrits en 2010 ; elles constituent un véritable atout ainsi qu'un outil important de promotion de l'excellence ouverte aux élèves issus de tous les milieux sociaux.

Pourtant, au nom du dogme du « pareil pour tous », le Gouvernement a supprimé un grand nombre de ces classes bilingues, et la surprise a été de taille au début de l'année 2016, lorsque vous avez présenté la carte de ces classes. La règle retenue de maintenir ces classes uniquement en cas de prolongement d'un enseignement dans le primaire, au titre de la continuité du parcours, n'a pas été respectée partout. Si 100 % des classes étaient maintenues à Paris, 95 % étaient supprimées dans l'Académie de Caen. Dans l'Orne, où aucune classe bilingue ne devait être maintenue, un arbitrage rendu après maintes interventions a permis la réouverture de quatre de ces classes, dont une au collège Françoise Dolto, à l'Aigle. Toutefois, en l'absence de moyens supplémentaires particuliers et octroi d'horaires, les collèges ont éprouvé de réelles difficultés à organiser et gérer les emplois du temps.

Madame la ministre, quelles sont vos intentions concernant le maintien ou le développement de ces classes bilingues ? Il y va de la justice du point de vue tant moral que juridique, car nous devons combattre les ruptures d'égalité entre les villes et les campagnes.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le décrochage scolaire est l'un des principaux problèmes auxquels sont confrontés les systèmes éducatifs de nombreux pays. En France, ce phénomène est un véritable drame national puisqu'il conduit plus de 150 000 élèves à sortir chaque année de l'école primaire sans maîtriser la lecture, l'écriture ou le calcul. Il est une des causes essentielles d'échec dans les études secondaires et, plus tard, de non-intégration sociale.

Je continue de déplorer que, dans les contraintes budgétaires actuelles, les sommes dépensées pour les temps d'activités périscolaires (TAP) n'aient pas été prioritairement affectées à la lutte contre le décrochage scolaire. Je crois qu'il s'agit d'une erreur stratégique majeure de notre politique éducative actuelle.

Pour lutter contre ce décrochage et pour donner à nos écoles rurales les moyens de la réussite pour tous, j'ai, en mobilisant 140 000 euros de ma réserve parlementaire ces dernières années, équipé plus de quarante classes en tableaux numériques interactifs. Ces outils permettent de nouvelles pédagogies, une certaine individualisation de la démarche, une attractivité nouvelle pour les élèves les moins motivés par le travail scolaire, le partage et le travail collaboratif entre enseignants et élèves, une intégration plus facile des élèves en situation de handicap, un enseignement à distance pour les élèves absents et, d'une manière plus générale, l'éducation à la maîtrise du numérique.

Depuis deux ans, avec la directrice académique des services de l'éducation nationale en Loir-et-Cher, j'ai approfondi cette action en équipant deux écoles en valises de tablettes ou de micro-ordinateurs. Cette mobilité et cette modularité permettent de couvrir toutes les classes de ces écoles et de mieux individualiser la pédagogie, l'objectif étant de toucher les élèves sédentaires comme les élèves nomades, nombreux dans la vallée du Cher.

Je crois que les actions préventives du décrochage produisent toujours plus d'effets que les actions réparatrices. Je crois aussi que le décrochage est d'autant plus faible que le système scolaire est plus intégrateur, à la fois par le caractère commun de la scolarité et par la prise en compte des particularités individuelles des élèves. Le numérique est un outil sans pareil pour satisfaire ces deux objectifs apparemment contradictoires, en fournissant des ressources supplémentaires aux élèves en difficulté tout en leur permettant de rester dans un cursus ordinaire. Comment et avec quels moyens, au plan national, le numérique est-il mis au service de cette lutte contre le décrochage scolaire ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis profondément convaincue que la réforme des rythmes scolaires était nécessaire, mais son application locale pose question. C'est pourquoi l'évaluation de ce dispositif est très importante. Lorsqu'une commune regroupe les TAP le vendredi après-midi, où est la réforme des rythmes scolaires ? Où est le bien-être des enfants ? Il ne s'agit plus aujourd'hui d'être pour ou contre la réforme ; il s'agit de trouver comment améliorer son application. Il le faut pour le bien-être des enfants et l'efficacité des pédagogies.

Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

Beaucoup de questions ont porté sur les mêmes sujets, aussi, contrairement à mon habitude, je ne m'adresserai pas à chacun des intervenants, mais répondrai par thèmes.

Puisque cette commission élargie est la dernière à laquelle je participerai pour ce quinquennat, je voudrais l'aborder comme un lieu de dialogue et revenir sur ce qui a été dit d'un certain côté de la salle. Très franchement, croyez-vous sérieusement que c'est avec moins d'enseignants que l'on peut relever le défi éducatif ? Peut-être défendez-vous un projet de société différent qui vous permettrait de me démontrer comment obtenir une meilleure performance éducative avec moins d'enseignants. Car ce n'est pas comme si cela n'avait pas déjà été tenté : entre 2007 et 2012, 80 000 postes de personnels enseignants et non enseignants ont disparu, alors que nous accueillions dans nos écoles 160 000 élèves supplémentaires. Et tous les résultats insupportables qui nous tombent dessus – le décrochage que vous avez tous évoqués ou la faible acquisition des fondamentaux qui vous tiennent tant à coeur –, sont les résultats de cette politique. Il faut l'admettre une fois pour toutes, et reconnaître que des erreurs ont été commises !

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les fondamentaux n'ont rien à voir avec le nombre de professeurs !

Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

Je ne cherche pas à polémiquer, simplement je m'étonne que vous resserviez les mêmes recettes qui ont démontré à quel point elles aggravaient le mal au lieu de résoudre quoi que ce soit !

Depuis le début de ce quinquennat, nous reconstruisons patiemment, pas-à-pas. Je vous repose la question : estimez-vous que c'est en réduisant le nombre d'adultes pour encadrer les enfants que nous obtiendrons qu'ils respectent mieux l'autorité ou acquièrent davantage les fondamentaux ?

Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

Pensez-vous que la qualité de l'enseignement s'obtient en supprimant la formation des enseignants ? Là encore, reconnaissez qu'une erreur a été commise, et ensuite nous pourrons nous mettre autour d'une table pour travailler ensemble à l'amélioration de la formation continue, comme vous y invitez tous. L'éducation est un sujet suffisamment sérieux pour que nous prenions le temps d'en discuter. Moi-même, je vais reconnaître que parfois nous ne sommes pas allés assez loin sur tel ou tel sujet ou que la réforme des rythmes scolaires mérite d'être améliorée. On peut toujours faire mieux, mais commençons par reconnaître les erreurs qui ont pu être commises de chaque côté.

Autre exemple, vous êtes nombreux à être revenus sur le rapport du CNESCO relatif à l'éducation prioritaire. Mais ce qu'a relevé le Conseil, c'est précisément que rien n'avait été fait dans ce domaine pendant trente ans, et que les moyens suffisants n'y avaient pas été consacrés. Ce n'est pas le principe de l'éducation prioritaire qui est remis en question, c'est le saupoudrage des moyens sur un nombre trop élevé de territoires, ce qui ne permet pas d'accompagner suffisamment ni de rendre attractifs les postes d'enseignants. Ce fut précisément l'objet de la réforme de 2015, dont nous allons obtenir les résultats – mais l'éducation nationale exige un temps long

On ne sait pas de quoi demain sera fait ; j'espère que si les responsabilités devaient changer de mains, vous ne remettriez pas en cause des choses aussi évidentes que cette nécessité d'avoir un taux d'encadrement plus élevé afin de permettre aux élèves, notamment en éducation prioritaire, d'apprendre dans de meilleures conditions.

S'agissant de la réforme du collège, j'ai entendu tout et n'importe quoi. Ce n'est pas possible !

Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

Les professeurs ne prétendent pas qu'il a été mis fin aux classes bilangues. Soyez sérieux et faites au moins la différence entre classes bilangues et classes ou écoles bilingues !

Sur la question de l'apprentissage des langues vivantes étrangères, partant du constat que nos petits français sont mauvais en langues étrangères, la réforme du collège a toujours consisté à leur dispenser un enseignement plus précoce, avec des pratiques pédagogiques différentes.

Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

Sachant que tout métier demain requerra la maîtrise de langues vivantes étrangères, c'est dans chacun de nos élèves qu'il faut investir, pas uniquement dans quelques-uns. Cette réforme du collège est évidemment bienvenue pour préparer tous les enfants.

De surcroît, il a toujours été dit – et je vous invite à reprendre le moindre de mes propos depuis le mois de mars 2015 – que les classes bilangues de continuité perdureraient, et que nous les développerions pour que les élèves ayant commencé une autre langue à l'école primaire puissent accéder à l'anglais dès la classe de sixième, car l'anglais est une « langue monde » dont le statut est particulier. En revanche, nous avions annoncé que nous mettrions fin aux classes bilangues dites de contournement, celles qui permettaient uniquement d'offrir un sort différent à un petit pourcentage d'élèves qui bénéficiaient sans raison particulière d'une deuxième langue vivante dès la classe de sixième, en se désintéressant des autres enfants. Cette phrase est certes trop longue pour être perçue rapidement, mais depuis un an et demi que nous discutons de ce sujet, vous auriez pu prendre le temps de lire ce que je dis !

Comme annoncé, donc, les classes bilangues de continuité ont été maintenues et même développées. Elles sont nombreuses dans l'académie de Strasbourg, car beaucoup d'écoles primaires souhaitent enseigner l'allemand en première langue vivante. Elles ont aussi été développées de façon proactive à Amiens, car une telle plus-value est bienvenue dans les territoires populaires. Dans le même temps, les classes dites de contournement ont disparu au profit d'une deuxième langue vivante avancée pour tous les élèves de la classe de cinquième.

J'entends certains candidats aux prochaines échéances électorales annoncer que s'ils sont demain aux responsabilités, ils abrogeront ce qui a été fait sur les classes bilangues et le latin. Cela ne signifie rien d'autre que le rétablissement de la LV2 en quatrième et le bilanguisme à nouveau réservé à quelques élèves dès la classe de sixième. Comprenez que l'objectif des pouvoirs publics en matière éducative doit être le progrès, la démocratisation du savoir et des connaissances, et non de ne s'intéresser qu'à 10 % d'une classe d'âge pour créer une élite ! De quelle élite peut-il s'agir si l'on ne s'assure pas d'avoir, à la base, un vivier suffisamment large et divers pour y puiser les meilleurs ? Il est insupportable d'entendre encore et toujours les mêmes procès parce que rien de ce qui a été fait depuis un an et demi n'a été compris.

Les questions touchant à la justice ont été nombreuses, et je remercie Julie Sommaruga d'avoir souligné l'augmentation des fonds sociaux. Ce que nous ont appris les classements PISA sur la grande défaillance de notre système scolaire, ce n'est pas son incapacité à identifier une élite – avec laquelle on nous berce en permanence dans tous les débats autour de l'école –, c'est de ne pas réussir à contrer les déterminismes sociaux, à tirer vers le haut des élèves qui partent avec un handicap social, économique, familial. Oui, c'est à cela que nous nous sommes attelés depuis 2012. Le changement de politique transparaît clairement dans les fonds sociaux, qui ont augmenté de 85 % alors qu'ils avaient été réduits de 50 % entre 2005 et 2012, et qui vont permettre à 300 000 collégiens et lycéens de participer aux sorties scolaires, de s'équiper, de bénéficier de la restauration scolaire. Évidemment, cela fait rarement l'objet de commentaires.

Le projet de budget pour 2017 prévoit aussi de consacrer 320 millions d'euros à une revalorisation des bourses de 10 %. J'espère que personne ne songera à revenir sur ces moyens supplémentaires qui ont été dégagés pour que des familles puissent voir leurs enfants éduqués dans les meilleures conditions.

L'aide à la recherche du premier emploi (ARPE) est une nouvelle mesure qui s'adresse à des diplômés tant de l'enseignement supérieur que de l'enseignement professionnel. L'enveloppe est de 40 millions d'euros pour 50 000 bénéficiaires. Elle est très importante pour d'anciens élèves boursiers qui, une fois leur diplôme en poche, entrent dans une période de recherche d'emploi, ce qui ne dure pas seulement quinze jours, sans plus rien percevoir ni de leur famille ni de l'État. L'ARPE corrigera cette situation en constituant une sorte de prolongement de leur bourse pendant quatre mois.

S'agissant de l'éducation prioritaire, heureusement que nous avons conduit la réforme de 2015 ! Elle était attendue depuis fort longtemps. Nous n'avons pas atteint le Graal pour autant. Je le répète, l'éducation est un temps long qui nécessite d'avancer progressivement. Nous avons déjà engagé 350 millions d'euros supplémentaires pour la réforme de l'éducation prioritaire. Elle devra être poursuivie durant le prochain quinquennat, en s'intéressant notamment à la réduction des effectifs par classes et aux lycées, dont les enseignants réclament, à juste titre, de bénéficier des mêmes moyens et accompagnements que leurs collègues des collèges.

Durant ce quinquennat, nous avons essayé de poser comme base qu'il ne suffit pas de mettre le paquet sur les territoires prioritaires périphériques qui vont particulièrement mal pour considérer que le problème est réglé. Certains établissements hors éducation prioritaire connaissent aussi des difficultés sociales. Pour répondre à cette situation, nous avons créé l'allocation progressive des moyens – mesure inédite qui a rarement été commentée mais que je considère pourtant comme l'une des plus importantes que j'ai prises en tant que ministre de l'éducation nationale. Désormais, l'allocation est modulée en fonction des difficultés sociales rencontrées par les élèves, et non plus simplement de l'effectif démographique. Il conviendra d'aller encore plus loin dans cette allocation pour mieux reconnaître le handicap de départ dont peuvent souffrir certains établissements et certains élèves.

Dans ces territoires se pose aussi la question de la mixité sociale, notamment dans les collèges. Sur ce point, notre démarche est moins télévisuelle et se fait à bas bruit, mais elle n'en est pas moins essentielle. Nous savons qu'on ne peut pas améliorer la mixité sociale dans les collèges en l'imposant d'en haut, c'est-à-dire en supprimant toute carte scolaire ou en la rigidifiant. Ces expériences ont déjà été tentées, tant par la droite que par la gauche ; elles ne marchent pas. Nous allons plutôt partir du terrain et travailler avec les collectivités locales pour mieux connaître la situation des établissements scolaires avant de prendre des décisions, dont certaines seront difficiles : fermer un collège trop marqué par les ségrégations et en ouvrir un ailleurs, jouer sur la carte scolaire pour suivre, dans un territoire très urbain, le tracé des transports et permettre une plus grande mixité, créer des secteurs multi-collèges. Tout cela est en train d'être construit aujourd'hui très concrètement avec vingt-cinq territoires pilotes. Certes, ce n'est pas encore assez et la France entière n'est pas couverte, mais nous tenons là de vraies solutions, dont la moitié a vu le jour dès cette rentrée. Vous verrez bientôt qu'elles produisent des résultats pour mieux mélanger des enfants de catégories socioprofessionnelles différentes. Il faut demander à chacun de prendre ses responsabilités pour que ce type de politique fasse l'objet d'une continuité.

Au-delà de l'éducation prioritaire, il faut s'assurer que la notion d'égalité d'accès à la réussite soit vraiment présente, ce qui implique de revoir le fonctionnement du système scolaire dans son ensemble. Nous l'avons fait avec la réforme des rythmes scolaires grâce à laquelle 75 % d'enfants en plus ont pu accéder pour la première fois à des activités périscolaires. De même, la réforme des collèges a permis d'offrir à tous les enfants des choses réputées bonnes pour les apprentissages. C'est une latiniste qui vous parle, le latin est merveilleux, essentiel pour les apprentissages ; il ouvre l'esprit. Qu'on m'explique, dès lors, pourquoi il faudrait le réserver à une minorité d'enfants !

Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

Vous savez fort bien comment cela se passe dans les établissements scolaires – ou alors vous parlez d'un temps qui n'est plus le nôtre. En tout cas, à une époque pas si lointaine, le choix de ces options était un code que n'avaient pas toutes les familles ; tout le monde ne savait pas que la meilleure façon de réussir, c'était d'opter pour classe bilangue ou section européenne. Il était donc de la responsabilité du système scolaire et des pouvoirs publics d'éclairer les enfants pour leur donner toutes les chances de réussir. C'est ce que fait la réforme du collège. C'est en cela qu'elle contribue à remettre de l'égalité au sein du système dans son ensemble, pas seulement en périphérie en donnant des moyens supplémentaires à l'éducation prioritaire.

La préscolarisation des enfants de moins de trois ans va dans le sens d'une plus grande égalité de réussite puisque l'on sait bien qu'il existe des écarts de langage très importants entre les enfants en fonction des catégories sociales. Dans mon propos introductif, j'ai évoqué le chiffre de 20,6 % d'enfants préscolarisés avant l'âge de trois ans en éducation prioritaire. Dans douze académies sur trente, nous en sommes déjà à 30 %. Nous pouvons donc être optimistes quant à notre capacité à atteindre l'objectif de 30 % d'enfants préscolarisés en REP et 50 % en REP+.

Pour ce qui est du bilan de santé, il est vrai que 72 % des élèves en ont bénéficié dans leur sixième année, chiffre que nous estimons insatisfaisant. C'est l'un des points qu'il nous faut améliorer. Pour ce faire, le projet de budget prévoit la création de vingt postes de médecins et quatre-vingts postes d'infirmiers, notamment en REP, et la systématisation du bilan de santé. Mais, vous le savez, le recrutement des médecins scolaires est un problème très compliqué. Nos efforts de revalorisation des rémunérations n'ont pas suffi à le régler, et nous devons encore travailler, notamment sur le statut de ces médecins scolaires, afin de rendre ces postes plus attractifs.

Comme l'a indiqué Valérie Corre, le nombre d'enfants en situation de handicap accueillis à l'école a augmenté de 24 % depuis 2012. Aujourd'hui 279 000 enfants sont scolarisés, contre 225 600 en 2012. Parallèlement, le nombre d'élèves bénéficiant d'un accompagnement humain, c'est-à-dire d'une notification MDPH (maison départementale des personnes handicapées), a augmenté de dix points. Si l'on prend en compte les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) et les auxiliaires de vie scolaire (AVS), ce sont au total plus de 50 000 équivalents temps plein qui sont consacrés à l'accompagnement humain des enfants en situation de handicap dans l'éducation nationale, soit une augmentation de 70 % depuis 2012.

Nous cherchons à améliorer le statut de ces accompagnants. À la suite de l'annonce du Président de la République, nous avons décidé de transformer progressivement tous les contrats aidés des AVS en AESH, c'est-à-dire en contrats pérennes, mieux reconnus, mieux formés et valorisés. Ce sont 56 000 contrats aidés qui seraient ainsi transformés en AESH. Plus de 6 000 d'entre eux l'ont été depuis cette rentrée scolaire, et nous allons poursuivre ce mouvement progressivement.

Les élèves en situation de handicap ont également besoin d'un accompagnement pédagogique auquel les moyens numériques peuvent grandement participer. Lorsque nous avons travaillé à la construction des ressources numériques, discipline par discipline, j'ai demandé aux éditeurs de prendre en compte le maximum de handicaps possibles, notamment les « dys », pour permettre aux élèves d'accéder le mieux possible aux cours et aux ressources. Ces ressources numériques sont disponibles sur le site du ministère de l'éducation nationale. Je vous invite à aller les visiter pour voir comment se configure cette adaptation aux différents types de handicap. Les élèves en question ont aussi besoin de matériels pédagogiques adaptés ; 11 millions d'euros supplémentaires sont inscrits au budget pour 2017 à cet effet. Ils ont également besoin d'enseignants sensibilisés et formés à leur situation ; dix-sept ESPE proposent des masters spécialisés liés à la prise en charge du handicap.

Depuis 2012, le taux des enfants autistes accueillis à l'école a augmenté de 30 %, soit au total 30 000 élèves. Les plus jeunes d'entre eux bénéficient des unités d'enseignement maternelle (UEM) qui leur permettent, dès le début de leur scolarité, de se familiariser avec un environnement social. Les UEM sont des dispositifs formidables. Il s'agit de tout petits groupes, généralement de sept élèves, installés au sein de l'école maternelle avec du personnel spécialisé. Soixante UEM existent déjà, et cinquante autres verront le jour cette année. Bien sûr, il faudra poursuivre cet effort.

Beaucoup d'entre vous ont abordé la condition enseignante, essentiellement pour nous reprocher de nous y être pris trop tard pour revaloriser les salaires. C'est là une lecture biaisée de ce que nous avons fait depuis 2012, puisque la réforme de l'éducation prioritaire s'est accompagnée de l'augmentation des indemnités des enseignants concernés. L'augmentation de l'ISAE est entièrement financée dès cette rentrée, et le protocole PPCR, qui coûte 1 milliard d'euros pour l'ensemble de nos personnels, est pris en charge pour moitié, soit 500 millions, dans ce PLF 2017. Quant à savoir si, d'ici à 2020, le prochain gouvernement inscrira bien les 500 millions restants, c'est cela la responsabilité politique. Puisque vous dites, depuis tout à l'heure, que les enseignants en France ne sont pas suffisamment bien payés, notamment en comparaison de l'Allemagne, la moindre des choses serait que vous preniez l'engagement de poursuivre ce PPCR.

Du reste, madame Genevard, le montant de l'ISAE versée aux enseignants du premier degré est de 100 euros par mois, et non de 57 euros comme vous l'avez indiqué. Je ne sais pas où vous avez trouvé ce chiffre.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je parlais des enseignants du secondaire !

Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

En outre, s'agissant de l'erreur que nous aurions commise, en arrivant aux responsabilités, de revenir sur la défiscalisation des heures supplémentaires, je vous rappelle que, contrairement aux enseignants du second degré, ceux du premier degré ne peuvent pas effectuer d'heures supplémentaires. Encore une fois, vos calculs n'en tiennent pas compte.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mais les heures supplémentaires sont fiscalisées !

Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

Vous avez été nombreux à évoquer la formation des enseignants, j'en déduis donc qu'elle est jugée indispensable sur tous les bancs, et je m'en réjouis. Depuis mon arrivé à la tête de ce ministère, il y a deux ans, nous avons augmenté le budget consacré à la formation continue de 40 %, pour atteindre aujourd'hui 100 millions par an en 2016 et en 2017. J'espère que cet effort sera poursuivi. Le lien entre les écoles supérieures du professorat et de l'éducation et la formation continue des enseignants doit encore être amélioré pour faire intervenir davantage ces écoles.

On pourrait déduire de la hausse de 5 % des inscriptions aux concours de l'enseignement que le métier d'enseignant a gagné en attractivité et que la politique que nous conduisons depuis 2012 doit aller vaguement dans le bon sens. Or on me dit que ce chiffre témoigne surtout du fait que les jeunes se tournent vers les métiers de l'enseignement parce qu'ils sont au chômage. N'y avait-il pas de chômage des jeunes en 2012 ?

Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

La vérité, c'est que le métier est redevenu attractif. La vérité c'est qu'on allait moins facilement passer un concours hier en sachant qu'il n'y avait pas de formation initiale et que l'on serait jeté, comme le disait Vincent Peillon, comme des frites dans de l'huile bouillante devant une classe, sans jamais avoir appris la pédagogie, alors qu'aujourd'hui on bénéficie de deux ans de formation initiale, on est accompagné, on a le temps de découvrir le fonctionnement et la gestion d'une classe. C'est ce principe très simple et très basique qui explique pourquoi ce métier est redevenu plus attractif.

Puisque nous parlions tout à l'heure du latin, je savoure ce chiffre et je ne résiste pas au plaisir de vous le répéter : le nombre de candidats inscrits au concours de lettres classiques a augmenté de 14,2 % par rapport à l'année dernière. Je croyais pourtant que le latin avait disparu… Que viennent donc faire tous ces candidats au concours de lettres classiques ? Le nombre d'inscrits en mathématiques a augmenté de 4,5 % et de 9 % en lettres modernes. Bref, ce sont de bons chiffres qu'il faut absolument conforter.

J'entends aussi parler, chez les candidats à la prochaine échéance électorale, de la suppression de 300 000 fonctionnaires, ce qui signifie, au bas mot, 100 000 dans l'éducation nationale compte tenu de son poids. Sachant que, chaque année, ce ministère voit 20 000 personnes partir à la retraite, cela veut dire qu'il n'y aura plus aucun remplacement de départs à la retraite pendant cinq ans, autrement dit que l'on n'ouvre plus aucun concours d'enseignant. À un moment, il faut être sérieux : on ne peut pas commenter le fait que l'on n'arrive pas à pourvoir l'ensemble des postes ouverts – alors que le taux est tout de même de 93 % – et s'apprêter à mettre allégrement fin au concours d'enseignant parce que l'on a décidé de supprimer 100 000 postes dans l'éducation nationale en cinq ans. Il me semble pourtant que des membres de l'opposition m'ont posé plusieurs questions sur le remplacement. Pardon de m'en émouvoir, mais les décisions que vous avez prises ont eu un impact : en supprimant 1 576 postes du vivier de remplacement dans l'éducation nationale, vous l'avez asséché, ce qui explique que nous ayons tant de mal à remplacer les enseignants absents. Depuis 2012, nous n'avons eu de cesse de reconstituer ce vivier, en créant, sur l'ensemble du quinquennat, 5 000 postes supplémentaires. Et vous venez nous donner des leçons sur la façon de remplacer ? C'est une plaisanterie !

Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

La question du remplacement se résout à la fois quantitativement, par le nombre de postes créés – sur lequel j'espère que vous ne reviendrez pas –, et qualitativement, par notre capacité à être plus fluides et plus réactifs dans notre façon de remplacer. C'est l'objet des mesures que j'ai annoncées la semaine dernière.

Peut-être tomberons-nous d'accord sur une mesure que nous avons décidée. Cette année, pour la première fois, sera publié l'indicateur du nombre de jours d'absences non remplacés pour l'ensemble des élèves de France. Cet indicateur national sera désormais annuel, c'est-à-dire que chaque année, nous pourrons savoir combien de jours d'absence n'auront pas été remplacés dans notre système scolaire, ce qui est étroitement lié au nombre de postes que l'on crée ou non pour remplacer.

Avec d'autres, Jean-Noël Carpentier a évoqué la gestion des ressources humaines. Sur ce point aussi, il est clair que l'on peut faire mieux. Pour autant, le ministère est bien plus déconcentré qu'on ne le croit, beaucoup se fait déjà au niveau local, notamment la gestion financière et la gestion des ressources humaines. Je suis néanmoins d'accord, on doit pouvoir améliorer encore et affiner notre capacité à nous adapter aux réalités et aux contraintes de nos personnels, mais plus encore, mieux reconnaître l'innovation sur le terrain et l'engagement, ce que prévoit, du reste, le PPCR. C'est un sujet sur lequel il faudra effectivement continuer à travailler.

Un mot sur le décrochage scolaire, qui est une situation lourde. Ce n'est pas par plaisir que les jeunes décrochent, c'est le corollaire d'une vie qui n'est pas enviable. Nous avons tous intérêt à faire le maximum pour réduire le nombre de jeunes qui sortent du système scolaire sans qualification et ramener vers la qualification ceux qui en sont déjà sortis. C'est ce que nous faisons depuis le début du quinquennat. De fait, selon les chiffres qui ont été rendus publics à l'automne dernier, on était passé de 140 000 décrocheurs par an à 110 000. D'où mon étonnement d'entendre encore parler de 140 000 ou 150 000 décrocheurs aujourd'hui. Ne prenez pas pour de l'autocongratulation que je vous reprenne, car vous envoyez un message de fatalité alors qu'une action publique a été conduite et que des résultats ont été obtenus. Je donnerai dans quelques jours les nouveaux chiffres, après une nouvelle année passée : vous verrez que cette dynamique à la baisse du décrochage continue et donne de bons résultats. C'est bien la preuve que l'on peut faire quelque chose quand on veut s'en donner les moyens.

S'agissant des valeurs de la République et de la notion d'engagement pour les élèves, beaucoup d'actions avaient été engagées dès le début du quinquennat, qui ont connu un regain de mobilisation après les attentats du mois de janvier 2015. Avant que nous ne dressions un bilan plus précis, je veux d'ores et déjà insister sur ce que nous avons fait, en matière de formation initiale et continue des personnels, sur les questions de laïcité et d'enseignement laïc du fait religieux, sujets délicats et épineux que les personnels ne savaient pas comment gérer jusqu'à présent. Comme nous nous y étions engagés, plusieurs centaines de milliers d'enseignants ont bénéficié d'une formation à la sensibilisation sur ces questions.

Un enseignement moral et civique, qui a vu le jour depuis 2015, permet d'aborder des sujets, tels que la laïcité ou le harcèlement scolaire, jusqu'à présent ignorés et que l'un d'entre vous a considérés comme participant du vivre-ensemble plutôt que de la réussite scolaire. On sait pourtant indispensable de bien les traiter pour que les résultats scolaires soient à la clé, ce que permet cet enseignement moral et civique qui, du CP à la terminale, représente 300 heures de la scolarité totale d'un élève.

Nous avons également mis en place une pédagogie de la laïcité, dont le support est un livret laïcité auquel les personnels de terrain peuvent se référer pour savoir quelles règles faire respecter. Dans tous les rectorats, des correspondants laïcité, qui sont des professionnels aguerris, sont mis au service des établissements qui éprouvent parfois des difficultés sur ce sujet.

D'autres dispositifs ont été développés, comme la réserve citoyenne, qui permet de faire intervenir davantage d'adultes dans les établissements scolaires auprès des élèves, et le service civique. Pour répondre à Marie-George Buffet à ce sujet, l'année dernière, alors qu'il s'agissait d'un nouveau dispositif, 5 000 jeunes ont effectué leur service civique dans les établissements scolaires et 10 000 sont en cours de recrutement cette année. Les retours du terrain sont très bons, à la fois de la part des jeunes qui effectuent ce service civique, et de celle des équipes pédagogiques, qui sont ravies d'avoir des jeunes qui accompagnent des projets pédagogiques. Des fiches ont été établies par missions – éducation artistique et culturelle, citoyenneté et autres. Beaucoup de ces jeunes ont trouvé là une vocation et vont venir alimenter le vivier dans lequel on pourra recruter de nouveaux enseignants.

S'agissant du don d'organes, je renvoie au parcours éducatif de santé. C'est dans ce cadre que de tels engagements peuvent être valorisés, en tout cas évoqués auprès des élèves.

Monsieur Juanico, vous avez raison, dans le premier degré en particulier, les trois heures hebdomadaires d'EPS doivent être mieux respectées qu'elles ne le sont aujourd'hui. Sur la base de votre rapport, un rappel a été fait auprès des recteurs et inspecteurs d'académie directeurs des services départementaux de l'éducation nationale (IA-DSDEN), au mois d'août dernier, sur la nécessité de mettre en place un accompagnement des enseignants dans la construction de leurs emplois du temps pour les aider à faire ces trois heures d'EPS.

Un mot sur les rythmes scolaires et sur la gratuité ou non des activités. Celle-ci relève de la compétence des collectivités. On ne peut pas intervenir sur ce point, car il est difficile d'aller à l'encontre de la libre administration des collectivités territoriales. Quant à moduler l'aide versée aux communes en fonction de l'existence ou de la qualité du PEDT, depuis 2015, l'État n'octroie une aide qu'aux collectivités qui s'engagent dans un PEDT. La question est de savoir où placer le curseur pour s'assurer de la qualité du projet éducatif. Nous avons fait le pari que le fait même pour les mairies et les services de l'État de travailler ensemble autour d'un PEDT, en mutualisant leurs moyens et leurs idées, allait relever la qualité. Souvent, des comités de suivi de la réforme des rythmes scolaires ont été mis en place, dans lesquels des collectifs de parents pèsent pour améliorer la qualité des activités périscolaires. C'est ce qui se fait, par exemple, à Marseille. Le pari est donc que ce travail en commun s'avérera vertueux, chacun faisant, d'une certaine façon, pression sur l'autre.

Enfin, certaines communes qui ont été tentées, dans un premier temps, par la possibilité d'organiser les activités le vendredi après-midi, sont revenues sur leur décision. Dire que la réforme des rythmes scolaires trouve maintenant son rythme ne signifie pas que tout est parfait partout, mais comme les parents peuvent aisément comparer ce qui se fait dans la commune d'à côté, ils font pression sur leur propre commune pour tendre vers mieux que la concentration des activités sur le vendredi après-midi. De ce point de vue, les choses s'améliorent.

Mesdames, messieurs les députés, je vous prie de m'excuser d'avoir été trop longue et d'avoir adopté un ton qui a pu paraître agaçant.

La réunion de la commission élargie s'achève à dix-neuf heures quarante.

Le Directeur du service des comptes rendus des commissions,

Nicolas VÉRON© Assemblée nationale