COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Mercredi 17 juillet 2013
La séance est ouverte à neuf heures.
(Présidence de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)
La Commission entend MM. Michel Régereau, président du Conseil et Frédéric Van Roekeghem, directeur général de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), sur les propositions de l'Assurance maladie sur les charges et les produits pour l'année 2014.
Nous recevons ce matin M. Michel Régereau, président du Conseil de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), et président du Conseil de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, laquelle regroupe les trois grands régimes : le régime des travailleurs salariés, la mutualité sociale agricole, et le régime social des indépendants.
Nous accueillons également M. Frédéric Van Roekeghem, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).
Notre commission a souhaité vous entendre afin que vous nous présentiez le rapport sur les charges et produits de l'assurance maladie pour 2014, qui s'inscrit dans le cadre de la préparation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 et plus particulièrement de la branche maladie.
Je tiens à préciser que nous n'avions pas eu l'occasion de vous écouter sous la précédente législature et nous avons pensé que cela pouvait être utile, étant donné que votre rapport est toujours une source d'inspiration concernant les mesures qui figureront dans la loi de financement de la sécurité sociale.
Ce rapport est établi chaque année au début du mois de juillet, et dresse le bilan des dépenses du régime général d'assurance maladie tout en formulant des propositions à l'attention des pouvoirs publics, en termes de gestion du risque, d'amélioration de la prise en charge et de la maîtrise des dépenses.
Nous avons pu lire dans la presse que ce rapport suggère au Gouvernement et au Parlement de réaliser 2,48 milliards d'euros d'économies, ceci afin de respecter, conformément aux annonces du Gouvernement, un objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) en progression de 2,4 % pour 2014.
En effet, sans mesures correctrices, la progression tendancielle de l'ONDAM serait de 3,8 % en 2014.
Par ailleurs, ce rapport inaugure une nouvelle approche dans l'analyse médicalisée de l'ONDAM, en établissant une cartographie des dépenses remboursées et remboursables sous la forme de quatorze grands segments de dépenses (pathologies, traitements et hospitalisations ponctuelles) et nous avons appris que cette innovation, que vous allez pouvoir nous présenter en détail, avait été saluée par le Conseil.
Messieurs, je vous donne la parole.
Nous avons le plaisir de vous présenter aujourd'hui les conclusions du rapport que le Conseil de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) a adopté le 11 juillet dernier.
Au total, ce sont 2,4 milliards d'économie qui sont proposées, dans le but de ralentir le rythme tendanciel d'évolution de la dépense et d'éviter un avis du comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance-maladie. J'insiste sur le fait que l'ONDAM que nous préconisons demeure, à 2,4 %, à un niveau élevé.
Les économies proposées comportent, pour 1,1 milliard d'euros, des baisses de tarifs dans des domaines où la collectivité est fondée à revendiquer le bénéfice de gains de productivité. Je citerai notamment le médicament, les dispositifs médicaux, les tarifs de certains professionnels de santé, des baisses de tarifs dans des domaines où les écarts de prix par rapport à d'autres pays sont, à contexte équivalent, difficilement explicables et des ajustements de financement par rapport au secteur médico-social en cohérence avec les financements de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.
Mais le plus important réside dans les prolongements opérationnels que l'assurance maladie peut donner à son analyse médicalisée des dépenses et de certains parcours de soins. Je pense ici à certaines dispositions qui ont figuré dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.
À ce titre, il est proposé cette année de réaliser environ 800 millions d'euros d'économie, qui s'ajoutent aux effets des mesures de l'année précédente, grâce à l'efficience des prescriptions, la pertinence des actes et interventions réalisés dans des parcours liés à certains soins et l'amélioration des parcours de sortie d'hospitalisation.
Au-delà, le rapport propose des pistes susceptibles de porter leurs fruits sur le long terme. Citons par exemple la lutte contre le tabagisme, l'information des patients sur la qualité des pratiques et la pertinence de leurs choix ou encore l'usage des médicaments bio-similaires. Le Conseil a souhaité que les pouvoirs publics exploitent ce type de pistes, même si elles n'auront d'effet qu'à moyen terme.
Il a également pour une grande majorité estimé que la question du financement de la branche devait être réglée, car en l'état actuel, la maîtrise des dépenses ne suffit pas à assurer l'équilibre des comptes. Pour autant aucune convergence ne s'exprime au sein du Conseil, les différents groupes développant chacun leurs options au sein du Haut conseil de financement de la protection sociale.
Enfin une majorité au sein du Conseil a réaffirmé son soutien à l'aménagement des règles d'ouverture des droits aux prestations en espèces pour les personnes ayant une activité réduite et n'atteignant pas deux cents heures d'activité dans le trimestre précédant l'arrêt de travail.
Aujourd'hui l'assurance maladie est la seule à pouvoir produire des analyses fines des parcours en fonction des grandes pathologies. Nous étions payeurs aveugles, maintenant nous savons, nous comprenons et donc nous pouvons agir.
Pour conduire cette approche, qui porte sur un champ de 175 milliards d'euros, et dans la perspective de la renégociation de la convention d'objectifs et de gestion qui lie l'État et la CNAMTS, il convient d'être prudent sur les choix en matière d'évolution des effectifs de la branche. La technologie nous a permis de générer depuis dix ans des gains de productivité significatifs qui ont permis de lisser la pression créée par la révision générale des politiques publiques. Il serait dangereux d'empêcher l'assurance maladie de conserver ces gains de productivité. Ce serait perdre de la réactivité sur l'efficience du système de soins. Il est utile de rappeler à cet effet que la promotion du contrat d'accès aux soins et la maîtrise des dépassements d'honoraire doit beaucoup à l'action des 900 délégués de l'assurance maladie.
Nous avons cette année établi la cartographie médicalisée des principales dépenses d'assurance maladie. La question est ici de savoir si ce que nous finançons est justifié en termes d'efficacité. Cette démarche pourrait s'avérer utile dans la mise en oeuvre de la Stratégie nationale de santé. Ce type de document pourrait en outre à terme être annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale.
L'analyse montre que le premier poste de dépenses n'est pas constitué par les pathologies lourdes, mais par les hospitalisations ponctuelles, pour près de 30 milliards d'euros. Ceci nous renvoie à l'organisation de notre système de soins et à l'effort constant qui doit être le nôtre pour soigner mieux à moindre coût. La santé mentale constitue le deuxième poste de dépenses, pour près de 20 milliards d'euros, plus spécifiquement les pathologies psychiatriques et l'usage des psychotropes, sujet qui nécessitera une étude approfondie dans les années à venir. Viennent ensuite les cancers à hauteur de près de 15 milliards d'euros, le diabète pour un montant équivalent, de même que les pathologies cardio-vasculaires, qui entraînent, on le sait, des hospitalisations parfois évitables, puis les soins courants à hauteur de 15 milliards d'euros, et les soins liés à la maternité.
Si l'on examine à présent la dynamique des dépenses, on constate que le poids financier des soins courants dans les dépenses d'assurance maladie est en baisse. Que faut-il en conclure ? Que le transfert de tout ou partie de ces soins à l'assurance complémentaire n'aurait aucun effet positif sur les comptes de la branche maladie, car ces dépenses figurent parmi les seules à diminuer, du fait notamment des baisses de prix sur le médicament. Les principales évolutions en montants, entre 2010 et 2011, concernent les hospitalisations ponctuelles dont l'augmentation est très dynamique (+ 560 millions d'euros), les pathologies cardiovasculaires (+ 430 millions d'euros) et les cancers (+ 360 millions d'euros).
Quel est à présent l'impact du vieillissement sur les dépenses de l'assurance maladie, plus particulièrement hospitalières ? La démographie explique l'augmentation du nombre de séjours à l'hôpital, mais il n'explique que partiellement l'augmentation des dépenses hospitalières. Un tiers de l'évolution des dépenses hospitalières est dû à une augmentation du nombre de séjours, les deux tiers à des effets de structure, c'est-à-dire de déformation de l'activité vers des séjours plus lourds et plus coûteux. Parmi ces effets de structure, l'effet prédominant est l'effet « sévérité », c'est-à-dire la diminution du nombre de séjours de niveau de faible sévérité au profit des niveaux qui correspondent à des patients plus sévères, pour lesquels les tarifs sont plus élevés, ce qui est probablement lié au fait que la polypathologie devient beaucoup plus fréquente dans les classes d'âges les plus élevées, mais aussi au codage des actes dans le cadre de la T2A.
Nous sommes donc capables de savoir qui sont les personnes soignées, quelles sont les pathologies et les processus de soins dans lesquels nous engageons la dépense, et si le coût par patient augmente ou diminue. Il s'agit de déterminer alors si l'alourdissement de ces charges est ou non motivé au regard de l'épidémiologie et des résultats de santé publique, et se traduit ou non par une amélioration de l'état de santé de la population.
La prise en charge des personnes âgées est particulièrement complexe et pas toujours adaptée. Nous avons attiré notamment l'attention du Gouvernement sur le développement important des nouveaux anticoagulants oraux. Les Canadiens, par exemple, considèrent que le bénéfice médical rendu de ces nouveaux médicaments n'est pas supérieur aux anciennes générations de traitements. De plus, ces médicaments posent deux problèmes : le premier est qu'il n'y a pas d'antidote et que si une opération doit être enclenchée rapidement, il faut attendre que le médicament cesse de faire effet pour éviter une hémorragie, le second est que nous manquons encore de recul sur leurs effets secondaires à moyen terme. Nous avons aussi attiré l'attention du Gouvernement sur les modalités de fixation des prix de ces médicaments qui se développent très rapidement – plus de 150 000 patients sont sous traitement soit une dépense de 150 millions d'euros – et qui sont très couteux pour l'assurance-maladie alors que l'amélioration du service médical rendu (ASMR), classée de niveau V, est très faible.
Nous avons aussi fait une analyse de l'hospitalisation évitable. Par exemple, nous avons constaté que 30 % des patients hospitalisés pour insuffisance cardiaque auraient pu être suivis à domicile. Nous mettons donc en place un programme inspiré de ce qui se passe en Allemagne. Nous n'avons pu éviter la ré-hospitalisation du premier patient entré dans ce programme mais cela a permis de lui sauver la vie…
Le rapport n'analyse pas les dépenses médico-sociales mais se penche sur les dépenses des établissements d'hébergement des personnes âgées dépendantes (EHPAD) prises en charge par l'assurance maladie. Il apparaît que le tarif pour les EHPAD à tarif global est probablement fixé à un niveau un peu élevé par rapport aux autres établissements. Les écarts de grilles « AGGIR » et de dépendance ne semblent pas expliquer cette différence entre établissements qui représente 150 à 200 millions d'euros. C'est pourquoi nous maintenons le gel de ces dotations. Trois quarts des dépenses sont liées au financement des EHPAD alors que paradoxalement les dépenses d'hospitalisation et de médecine de ville restent limitées. La piste du maintien des personnes âgées à domicile est donc à explorer pour une meilleure maîtrise des dépenses. Nous disposons pour la première fois de chiffres très significatifs sur ce sujet : chaque fois qu'une personne âgée rentre dans un EHPAD, cela représente une dépense de 10 000 à 15 000 euros pour l'assurance-maladie.
Le rapport a aussi analysé des dépenses liées à des interventions chirurgicales ponctuelles comme la pose d'une prothèse de hanche ou une opération de la cataracte. Ces opérations représentent 30 milliards d'euros de dépense globale, y compris les soins de suite. Deux exemples me paraissent significatifs. Le premier concerne la pose d'une prothèse de hanche, qui représente une dépense de 1,1 milliard d'euros pour l'assurance-maladie. Deux tiers des dépenses sont liées au séjour en clinique ou en hôpital et 28 % sont liées aux soins post-opératoires. Le rapport montre que nous sommes dans une situation moyenne par rapport aux autres pays, notre seule spécificité étant que les femmes sont autant concernées que les hommes, ce qui n'est pas le cas dans les autres pays. Nous avons pu aussi constater que le taux de reprise est d'autant plus élevé que les établissements sont moins spécialisés dans la pose de prothèses. Ainsi 160 établissements ont un taux de reprise supérieur à 2 % et 50 % d'entre eux ont un taux de reprise supérieur à 4 %. Cette analyse des taux de reprise devrait être transmise aux établissements de soin et aux professionnels de santé qui s'engageraient sans aucun doute dans un processus d'amélioration de la qualité des soins. Par ailleurs, alors que la chirurgie représente une dépense de 7 à 8 milliards d'euros, se pose la question de privilégier la qualité sur la proximité. Les sondages montrent que les Français sont prêts, pour une intervention chirurgicale programmée, à se rendre dans un établissement plus éloigné pour privilégier la qualité. Nous devons donc nous poser la question de la réorganisation des plateaux techniques chirurgicaux au regard de ces indicateurs de qualité et de la démographie médicale, du fait notamment de départs à la retraite de nombreux chirurgiens. De même les comparaisons avec d'autres pays européens doivent nous inviter à nous poser la question du coût des prothèses comme le Gouvernement l'a fait pour d'autres dispositifs médicaux.
Le second exemple est celui du syndrome du canal carpien. Sa prise en charge représente un coût de 195 millions d'euros dont 115 millions d'euros pour les arrêts de travail. La mise en place de fiches-repères a d'ores et déjà permis de faire baisser de 5 % la durée moyenne des arrêts de travail. Nous pensons que nous avons la possibilité de baisser de 10 à 15 % la durée des arrêts de travail que ce soit avant l'intervention ou après la consolidation.
Nous disposons donc désormais d'analyses qui nous permettent de mieux comprendre les processus de soins et de trouver des marges de manoeuvre pour mieux maîtriser la dépense et améliorer la qualité de soin.
Je pense que M. Hubert Allemand, médecin-conseil national, peut vous donner d'autres illustrations dans ce domaine.
On peut prendre quelques exemples pour montrer les gains d'efficience potentiels du système. Sur 40 000 thyroïdectomies réalisées chaque année, deux tiers des patients opérés n'ont pas bénéficié d'un suivi de qualité avant l'intervention : ainsi, 18 % d'entre eux n'ont pas bénéficié d'une échographie et 69 % n'ont pas fait l'objet d'une cytoponction. Quant aux dosages hormonaux, ils sont fréquents mais souvent inadaptés.
Par ailleurs, la fréquence des interventions varie du simple au double selon les départements, sans justification particulière. Or, cette chirurgie trop répandue n'est pas anodine, elle entraîne certains effets secondaires non négligeables, comme un traitement hormonal à vie.
Le cancer de la prostate fait l'objet d'un phénomène de « surdépistage », alors que ce dépistage n'est pas recommandé. Les trois quarts des hommes de plus de 75 ans subissent un dosage de PSA (antigène prostatique spécifique) tous les trois ans. La prostatectomie entraîne des effets indésirables importants sur la qualité de vie des hommes, alors que les cancers dépistés par dosage de PSA peuvent être indolents et peu évolutifs. Si l'on avait affaire à un médicament présentant un tel rapport bénéfice risque, jamais il n'obtiendrait d'autorisation de mise sur le marché. Il faudrait qu'une agence émette une recommandation indiquant qu'il n'est pas souhaitable de réaliser des dosages de PSA après 75 ans.
Ces deux exemples montrent bien qu'il est possible d'améliorer la qualité de la chirurgie en France.
J'en viens aux gains potentiels d'efficience dans certains segments d'offre de soins. Les écarts de consommation de médicaments en volume entre la France et les autres pays européens se sont réduits, mais la consommation en France reste en tête de la consommation européenne par habitant.
L'assurance maladie dépense 1,2 milliard d'euros par an en remboursement des statines, médicaments destinés à traiter l'excès de cholestérol dans le sang. Les prescriptions tendent à privilégier les médicaments les plus onéreux, même lorsque leur prix n'est pas justifié par le service médical rendu (SMR). Une étude de l'assurance maladie comparant l'efficacité d'une molécule génériquée (la simvastatine) et non génériquée (la rosuvastatine) sur 165 000 patients sur trois ans ne montre pas de différence significative sur la morbimortalité. Pourquoi, dans ce cas, le prix de la molécule non génériquée serait-il plus élevé ? L'explication est historique : lorsque le médicament a été introduit sur le marché, son prix a été fixé légèrement en dessous des autres statines ; par la suite, le prix de la molécule génériquée a baissé, conduisant à écart de coût avec la rosuvastatine de 150 millions d'euros cinq ans plus tard. Le coût journalier des traitements par statines est deux fois plus élevé en France que dans la moyenne des pays observés. Si la France avait la structure de consommation et les prix de l'Allemagne, les économies pour l'assurance maladie atteindraient 500 millions d'euros.
Les nouveaux anticoagulants oraux montent en charge très rapidement, remplaçant les anti-vitamine K. Or, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a souligné qu'il n'y a pas d'argument pour changer le traitement d'un patient stabilisé sous anti-vitamine K. En outre, les essais cliniques des anticoagulants ont été faits sur des patients jeunes, alors qu'ils sont prescrits la plupart du temps à des personnes âgées. Ils comportent des contre-indications graves, en particulier en cas d'insuffisance rénale, même légère. Or, les examens de la fonction rénale ne sont souvent pas réalisés. Sur trois médicaments, le plus prescrit est celui qui a le dosage le plus faible, probablement dans le but de limiter les risques. Mais dans ce cas, remplit-il sa fonction ?
De façon générale, notre analyse concerne des médicaments dont le prix par rapport au service médical rendu doit être questionné. En matière de traitement de la dégénérescence maculaire liée à l'âge, seul le Lucentis bénéficie d'une autorisation de mise sur le marché, mais certains ophtalmologues utilisent l'Avastin, beaucoup moins coûteux. Une étude confirme l'efficacité identique des deux molécules. Nous recommandons donc de revoir le prix du Lucentis.
En matière de dépenses de transports, on observe des variations géographiques importantes sur le recours aux transports sanitaires et sur leur coût. Par exemple, la part des patients hémodialysés transportés uniquement en ambulance varie de 0 en Lozère, à 33 % dans les Bouches-du-Rhône. Le remboursement devrait se faire sur la base du tarif assis si la position allongée n'est pas justifiée.
Il faut renforcer l'information du patient, qui est un facteur d'équilibre dans les décisions de soins.
J'en viens maintenant aux propositions contenues dans notre rapport.
Notre première proposition consiste à renforcer la lutte contre le tabagisme.
La proposition 2 suggère de développer l'information sur la qualité et le bon usage du système de soins et le médicament. Nous soutenons la décision ministérielle prise sur l'information sur le médicament, notamment grâce à Ameli-santé. Il nous semble important de développer les questionnaires auprès des patients sur la qualité et l'amélioration perçue sur leur état de santé. Ce qui a été mis en place par le Gouvernement à cet égard, dans les établissements de soins, devrait être généralisé et nous recommandons de le faire par le biais d'un marché national, plutôt que de laisser chaque hôpital payer le coût de l'enquête, ce qui serait pénalisant pour l'établissement de soins et ne permettrait pas les gains qu'autorise la massification des achats.
La proposition 3 vise à développer les outils d'aide à la décision pour les patients, sous le contrôle de la Haute Autorité de santé, en commençant par la chirurgie. Les documents remis aujourd'hui aux patients les informent en effet des risques de complications éventuelles de l'opération plutôt que de ses avantages et inconvénients, de son bilan bénéfices risques. Il convient également (proposition 4) d'élargir et de renforcer les programmes d'amélioration de la pertinence des soins dans un certain nombre de domaines analysés, en direction des offreurs, et en renforçant éventuellement les contrôles sur les établissements, publics ou privés, considérés comme atypiques par rapport à la moyenne constatée.
Deuxième grande catégorie de propositions : tout ce qui peut permettre d'améliorer la qualité des soins et d'optimiser les processus de soins. Il convient d'encourager la constitution d'équipes de soins de proximité organisées, constituant un véritable relais à la prise en charge hospitalière, notamment en sortie d'hospitalisation et de chirurgie. Je vous renvoie sur cette question aux commentaires développés dans le rapport sur la stratégie nationale de santé.
S'agissant des processus de soins, nous avions évoqué la chirurgie de la cataracte. Une comparaison des tarifs avec l'Allemagne montre qu'avec près de 1 300 euros, nous sommes trop chers. Nous recommandons de diminuer le remboursement de la chirurgie de la cataracte. Maintenant que nous avons bien progressé au niveau de la chirurgie ambulatoire, il convient d'agir sur ce facteur, et de replier la chirurgie complète sur la chirurgie ambulatoire : elle ne correspond encore qu'à 85 % des cas en France alors que ce taux est de 95 % dans les autres pays.
Sur les prothèses de hanches, nous avons évoqué le principe de généraliser l'information des établissements de soins sur le taux de reprise. La chirurgie orthopédique étant maintenant bien protocolisée, il devrait être possible de mettre en place, avec les établissements et les chirurgiens, un dispositif de contractualisation de la qualité.
La proposition 8 vise à optimiser la rééducation postopératoire. Nous expérimentons, dans une vingtaine de départements, le volet orthopédie de notre programme d'aide au retour à domicile des patients. Le coût d'une prise en charge en SSR (soins de suite et de réadaptation) est de l'ordre de 5 000 euros alors qu'il est de 1 000 euros à domicile. Pour 10 à 15 % des patients, il devrait être possible d'éviter les soins de suite et de réadaptation pour les réserver à ceux qui en ont le plus besoin, en coordination avec la médecine de ville : médecin traitant, infirmière, kinésithérapeute. La mise en place de référentiels, notamment de kinésithérapie, demandés à la Haute Autorité de santé, devrait y contribuer de manière à garantir la qualité de la prise en charge. De même les expérimentations PAERPA (personnes âgées en risque de perte d'autonomie) nous conduisent à examiner, avec le Gouvernement, la possibilité de prendre en charge le transport des patients ayant une prothèse de hanche et devant suivre une rééducation. En effet, ces patients ne sont pas remboursés de leurs dépenses de transport lorsqu'ils sont pris en charge à domicile, alors que la prise en charge est de 100 % lorsque ces patients sont dans un établissement.
Les propositions visant à améliorer la prise en charge des personnes âgées en sortie d'hospitalisation ont déjà été évoquées en matière d'insuffisance cardiaque ou de projets PAERPA. Nous avons voulu examiner les processus de soins des broncho-pneumopathies chroniques obstructives (BPCO) et notamment la question des escarres : leur prise en charge représente plus d'un milliard d'euros de soins en France. Dans ce domaine, il convient d'engager, au sein des établissements de santé, un programme tendant à diminuer les escarres en sortie d'hospitalisation, comme cela se fait également en Allemagne, en examinant les meilleures pratiques, en veillant à faire bouger les patients.
En effet, quand l'escarre, l'ulcère variqueux est là, la cicatrisation demande en moyenne 200 jours, la mise en place d'un dispositif d'accompagnement adapté permet un gain de 30 % sur cette durée moyenne. L'action est donc très performante.
Les propositions visant à mobiliser les marges de manoeuvre dans les différents secteurs d'offre de soins portent, notamment, sur les incitations tarifaires à la chirurgie ambulatoire. Il convient d'inverser la logique actuelle et d'ajuster à la baisse les tarifs d'hospitalisation complète avec un tarif unique construit sur les coûts de la chirurgie ambulatoire. Pour les 6 racines de groupes homogènes de malades (GHM) concernées, une baisse de 5 % du tarif commun à la chirurgie ambulatoire et à l'hospitalisation complète représenterait une économie de 50 millions d'euros. Rappelons que, pour certains actes, le taux d'ambulatoire est déjà supérieur ou égal à 85 %.
Il faut également définir réglementairement et mettre en place des seuils d'activité minimale en chirurgie, avec hospitalisation complète ou en ambulatoire, afin d'être à même de préciser où doivent porter les efforts, et de rationaliser l'utilisation des plateaux techniques.
Il convient aussi de prendre en compte la situation des revenus des professionnels de santé afin que leurs missions demeurent attractives.
Il faut également développer les initiatives créatrices de valeur. Or, la seule manière de le faire est de couper les rentes, là où il n'y a pas création de valeur et où les prix sont trop élevés.
Si nous n'avons pas la compétence technique pour le faire, une réflexion nous semble cependant devoir être menée autour des normes et notamment des normes hospitalières. Un certain nombre de pays ont commencé à s'interroger sur l'adaptation de la normalisation à la totalité des prises en charge hospitalières et sur une modulation de la norme avec la réalité du besoin. La même norme doit-elle continuer à être applicable à la fois à une opération de la cataracte qui, en France ne comprend plus d'anesthésie complète, et à l'endoscopie, dont le coût représente 1 milliard d'euros ? Au-delà de la question des normes, se pose également la question de l'amortissement des investissements : que ce soit les machines de radiologie, de tomographie à émission de positons, les scanners ou les imageries par résonance magnétique (IRM). Le plan cancer prévoit encore d'augmenter de 20 % le parc de machines, la question se pose cependant, aujourd'hui, de leur bonne utilisation.
Je reviens sur la question de la corrélation entre le prix payé pour un médicament qui n'améliore pas le service médical rendu, classé en ASMR (amélioration du service médical rendu) V, nous avons pris quelques exemples et nous avons beaucoup d'idées à vous proposer, après avis du Gouvernement, pour s'assurer que le prix payé corresponde à celui que paient les autres pays. Il conviendrait déjà de réfléchir à la révision des prix des médicaments à l'ASMR V « flottant », qui sont autorisés avant l'introduction du générique. Le prix de la rosuvastatine hors taxe pourrait ainsi baisser de 57 %, ce qui produirait entre 100 et 150 millions d'euros d'économies. Les Allemands ont mis en place des prix de classes de médicaments. Nous avions proposé cette solution il y a quelques années, les économies seraient de 250 millions d'euros si l'on s'aligne sur le prix moyen européen et de 400 millions d'euros sur les prix allemands. À défaut, on peut envisager une mise sous accord préalable des prescripteurs, comme c'est le cas en Autriche ou en Norvège. Comme le prévoient les propositions 15 et 16, on pourrait éviter que les hôpitaux ne prescrivent de la rosuvastatine, induisant ainsi un effet de levier, connu depuis longtemps. Une présentation, devant des élus, par le directeur de la santé des Pays-Bas, avec le plus gros assureur gérant le régime obligatoire d'assurance maladie a ainsi analysé l'impact des prescriptions hospitalières sur les prescriptions en ville. Une étude de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), intégrée au rapport, le montre également. Je suis donc d'accord avec l'introduction de M. Cordier dans son rapport sur la stratégie nationale de santé rendu au nom du comité des sages : il est temps d'agir. Nous proposons des actions concrètes : pourquoi ne pas désinscrire les produits dont le rapport qualité prix n'est pas bon de la liste des prescriptions inscrites pour les collectivités, ou ne pas introduire une « wyse list » préférentielle des médicaments utilisés à l'hôpital ? Nous avons aussi des propositions de rapprochement, progressif, du prix des génériques avec ceux des autres pays européens, cette homogénéisation des règles nous permettrait d'améliorer notre compétitivité.
La question du Lucentis a déjà été abordée, cependant il me semble important d'attirer votre attention sur les conséquences de l'article 48 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2012. Nous l'analysons comme le blanchiment de la possibilité, pour le Comité économique des produits de santé (CEPS), de fixer le niveau de l'amélioration du service médical rendu (ASMR) à un seuil différent de celui retenu par la Haute Autorité de santé. Il suffit d'une motivation, non publique, adressée à la Haute Autorité de santé pour procéder à ce contournement de l'ASMR V. On pourrait donner au conseil de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM) ou au collège des directeurs de l'UNCAM, un droit d'opposition à des décisions qui ne paraîtraient pas conformes aux textes. Nous avions regardé de très près la possibilité de recours sur la prescription des nouveaux anticoagulants oraux (NACO), mais il nous a semblé qu'il était rendu impossible par l'article 48 de la LFSS pour 2012…
La proposition 21 consiste à négocier avec les biologistes un accord pluriannuel portant sur les volumes et les prix, afin de permettre une quasi-stabilité de la dépense sur trois ans. Il est important, comme nous le disons depuis des années, que les offreurs de soins aient une visibilité, dans le temps, des décisions à venir. Le président de la CNAMTS a évoqué la convention d'objectifs et de gestion avec l'État. Or, en tant que gestionnaire, il est difficile de faire évoluer les organisations dans le temps si l'on n'a pas de certitude sur l'évolution des financements. Passer, dans le domaine de la santé, d'une certitude de croissance avec une visibilité complète dans le temps à une relative incertitude – un certain nombre d'offreurs voient leur chiffre d'affaires baisser, comme en biologie – ne paraît pas bon, tant en matière d'investissements que de recrutements ou d'emplois. Pour éviter tout blocage, il convient dès lors de donner de la visibilité, même si un effort est nécessaire, afin de ne pas contrecarrer la reprise de la croissance, par ailleurs souhaitée.
Certaines propositions concernent les indemnités journalières, évoquées par le Président, mais aussi la question des petites activités ou des parcours heurtés, des transports sanitaires, des sorties d'hospitalisation et des soins infirmiers.
Au total, le conseil a approuvé un certain nombre de propositions qui conduisent, comme l'a fait remarquer madame la Présidente, à un effort à peu près identique à celui de l'année dernière, le tendanciel de la dépense s'étant légèrement infléchi : 2,4 milliards d'euros l'année dernière et 2,5 milliards cette année. Il est donc atteignable, malgré le contexte d'un ONDAM bas depuis plusieurs années.
Un mot sur le financement, même si le débat n'a pas porté précisément sur ce point. Il me paraît, en effet, étonnant de constater que nous creusons cette année le déficit du régime général à hauteur de 14 milliards d'euros, auxquels s'ajoutent 3 milliards d'euros de déficit du FSV (fonds de solidarité vieillesse), alors que la dette de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) est amortie à hauteur de 12 milliards d'euros. La réaction de lassitude de nos concitoyens face aux efforts demandés se comprend quand on leur explique que le déficit n'en continue pas moins de croître. Mais si l'on intègre au régime général l'ensemble des établissements concernés par son financement, FSV et CADES, nous ne sommes pas dans une situation consolidée de déficit aussi lourde que la simple lecture faciale le laisserait paraître. Il serait utile, dans un souci pédagogique, que le Gouvernement et la Représentation nationale prennent en compte ce point. Il ne s'agit pas de tendre vers un laxisme financier mais de rendre des perspectives et une lisibilité de la situation des comptes. Chacun des corps de la sécurité sociale devrait être crédité de la situation réelle de son déficit. 17 (14 + 3) milliards de déficit au régime général cette année mais 12 milliards attribués à la CADES font un solde de moins 5 milliards d'euros… Ce n'est pas la vision habituelle, ni l'analyse de la Cour des comptes, qui additionne les déficits, s'élevant à 22 milliards d'euros en laissant la CADES de côté. Il ne me semble pas qu'une stratégie dans laquelle on augmenterait les prélèvements obligatoires ou on diminuerait très fortement les dépenses, au-delà de ce qui est nécessaire pour stabiliser la dette sociale, soit raisonnable du point de vue de la croissance économique de notre pays. Malgré le respect que je porte à la Cour des comptes, je regrette que la question n'ait pas été posée dans ces termes.
Le rapport Cordier sur la stratégie nationale de santé, dont vous avez visiblement eu connaissance, indiquerait qu'il est temps d'agir. Je souhaiterais simplement émettre quelques remarques. Tout d'abord, en effet, les professionnels de santé ont en France du mal à accepter d'être évalués sur leurs pratiques. Ensuite, je note deux points concernant les sources des dépenses : le premier qui concerne le renforcement des outils d'aide à la décision des médecins pour la prescription dans le répertoire en faisant évoluer le référentiel de certification de la Haute Autorité de santé pour les logiciels d'aide à la prescription (LAP), qui rejoint un sujet que nous avons abordé hier soir avec la Ministre, puisque la certification des LAP doit intervenir avant le 1er janvier 2015 : or, vous dites qu'il conviendrait encore de les faire évoluer, au moment même leur certification.
Second point, la piste de la négociation avec les médecins traitants d'une nouvelle option conventionnelle pour expérimenter un indicateur global sur les prescriptions, ajusté en fonction de la patientèle, me semble tout à fait intéressante.
Enfin, s'agissant du prix du médicament, la politique française de fixation des prix des médicaments reste très opaque, et c'est pour cette raison que je souhaite que la commission puisse auditionner le président du Comité économique des produits de santé (CEPS). Je suis très choquée quand j'entends le vice-président du CEPS dire qu'il ne souhaite pas la présence d'observateurs au sein de son institution, à l'heure où tout le monde appelle à une plus grande transparence.
Le document que vous présentez aujourd'hui est une mine d'informations. Vous proposez un objectif de 2,4 milliards d'euros d'économies, qui est aussi l'objectif retenu par la Cour des comptes. J'aimerais que vous reveniez sur le vote contrasté que vous avez évoqué au sein de votre conseil d'administration pour l'adoption de ces propositions : vous avez parlé d'un vote acquis à 18 voix contre 13, avec une opposition du patronat ou une abstention pour l'UPA, mais aussi de la CGT, et un vote favorable de la Mutualité.
S'agissant des médecins libéraux, nous constatons qu'une certaine impatience, voire une hostilité se manifeste avec des positions contrastées entre les différentes unions régionales des professions de santé. Les libéraux franciliens réclament en effet des aides au regroupement, tandis que les centres de santé se revendiquent d'une mission de service public et d'un projet médical d'accessibilité sociale.
Je retiens ensuite un élément saillant de ce rapport sur les charges et produits pour 2014 : il comporte le chiffre de 146 milliards d'euros de dépenses totales pour l'ensemble des régimes, dont 63 % de la dépense imputable aux maladies chroniques, avec une augmentation constante des affections de longue durée (ALD), et un nombre de patients atteints de maladies chroniques qui a crû de 600 000 entre 2009 et 2011.
Il évoque également la surconsommation médicamenteuse, particulièrement répandue chez les personnes âgées et son corollaire délétère, la iatrogénicité et son coût.
Figure également dans ce rapport l'importance des pathologies cardiovasculaires, qui représentent 10 % des pathologies lourdes, avec surtout une population masculine qui est touchée (à 70 %) à un âge moyen situé entre 70 et 72 ans.
Je m'arrête un instant sur les annexes du rapport, et notamment sur les mesures arrêtées en 2013 et qui sont en cours de déploiement, notamment l'expérimentation du Programme d'accompagnement du retour à domicile (PRADO) orthopédie ou du PRADO insuffisance cardiaque, ou encore celle du dispositif PAERPA (Personnes âgées en risque de perte d'autonomie). S'agissant du diabète, des avancées notables ont été effectuées, et concernant l'optimisation des dépenses de santé, on constate une baisse du prix des génériques dans une logique de convergence européenne, mais des marges existent encore.
S'agissant du deuxième volet de l'annexe au rapport, elle porte sur le bilan de la négociation entre l'UNCAM et les professionnels de santé, avec une convention qui est en cours de négociation. Concernant la rémunération sur objectifs de santé publique, et face aux indicateurs choisis (organisation du cabinet et qualité de service, suivi des pathologies chroniques, prévention, optimisation des prescriptionsefficience), je reste assez circonspect : ces mesures affichent un coût de 250 millions d'euros au titre de l'ONDAM pour cette rémunération ; je souhaitais connaître votre appréciation sur le sujet. Je note d'ailleurs que la rémunération sur objectifs des pharmaciens quant à la délivrance des génériques, qui concerne aujourd'hui la quasi-totalité des officines, connaît un grand succès, pour des raisons que je ne détaille pas.
Le rapport retrace 27 propositions, que je classe en plusieurs chapitres distincts : l'information notamment sur le médicament, les outils d'aide à la décision et les actions auprès des professionnels de santé ; les préconisations d'organisation et, en matière de prise en charge de proximité, les actions sur les personnes âgées, les soins infirmiers, le transport, l'organisation de la rééducation post-opératoires et des soins de suite et de réadaptation (SSR). Sur ce dernier point, on voit que nombre d'hôpitaux de proximité ont été transformés en SSR : ne risque-t-on pas de mettre en péril de ce fait un certain nombre d'organisations locales ?
Vous parlez d'une meilleure connaissance des coûts par grand type de pathologies : cela permet d'évaluer le coût en fonction des thérapeutiques disponibles, etc. N'assiste-t-on pas là aux prémices d'un futur panier de soins ? Quel est le rôle de la Haute Autorité de santé dans ce processus ?
Vous évoquez également les efforts d'économies sur le médicament : les baisses de prix, la montée en charge des génériques ont été mises en oeuvre, et vous émettez sept nouvelles propositions, dont il me semble qu'il conviendrait de les soumettre aux autorités scientifiques pour avoir leur avis.
Concernant l'ONDAM 2014, vous préconisez une fixation à +2,4 %, reposant notamment sur une série de baisses de prix de médicaments et de tarifs (biologie, radiologie, etc.), mais vous ne parlez que peu de l'hôpital, et je constate que les efforts demandés à l'hôpital restent mineurs par rapport au reste pour le calcul de l'ONDAM que vous faites. La commission Briet, au sein du comité de pilotage de l'ONDAM, avait à l'époque préconisé une progression comprise entre 2,1 et 2,2 % ; la Cour des comptes suggère quant à elle une fixation à 2,3 %. Vous êtes au-delà : votre objectif n'est-il pas excessivement optimiste au regard de recettes qui restent aujourd'hui encore insuffisantes ?
Vous ne parlez que très peu de la politique de lutte contre la fraude, pour laquelle les économies restent estimées à 75 millions d'euros. D'ailleurs, la fraude a augmenté de 20 % à la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) cette année.
Concernant l'hôpital, ne pensez-vous pas que l'abandon de la convergence public-privé est une mauvaise chose, ce dont je suis convaincu ?
S'agissant du transport sanitaire, nous sommes tous conscients qu'il reste en effet encore beaucoup de choses à faire, de même que sur le sujet des indemnités journalières versées pour les arrêts de travail : les médecins conseil disent faire des efforts, mais nul doute qu'ils ont encore beaucoup d'efforts à fournir, lorsque l'on voit que des personnes sont en arrêt maladie depuis deux, voire trois ans.
Concernant le financement, le Haut comité de financement de la protection sociale est en pleins travaux, mais le débat a trop tardé, et je rappelle qu'il faut également penser aux recettes que nous pouvons apporter pour ce financement.
Enfin, la Cour des comptes émet des réserves pour la certification des comptes de la branche maladie et refuse de certifier les comptes de la branche AT-MP : que pensez-vous de ce positionnement de la Cour ?
On a beaucoup parlé de maîtrise des dépenses et de gestion comptable, mais peu de la qualité des soins. Or, je rappelle que 15 % des Français renoncent aujourd'hui aux soins, et que si l'on vit de plus en plus longtemps, on vit aussi en moins bonne santé. Il faut donc repenser les modalités de financement de notre protection sociale, en le faisant moins peser sur le travail : le groupe centriste avait d'ailleurs toujours été favorable à la mise en place d'une TVA sociale.
On ne peut qu'adhérer, cela étant, à vos propositions, qu'elles concernent la coordination des soins, avec la mise en place de parcours de soins, la politique de remboursement des médicaments en fonction du service médical rendu, etc.
Mais comment traiter les causes de certaines dérives ? Vous évoquez notamment la question des hospitalisations ponctuelles, mais il faut s'interroger sur leur origine. Il me semble qu'elles sont à la fois liées aux déserts médicaux et au fait que dans les hôpitaux, aucune avance de frais n'est demandée contrairement aux consultations en libéral.
S'agissant de l'offre de soins hospitaliers, il conviendrait de sortir du dogme de l'opposition entre public et privé, et d'avoir une approche consolidée de modernisation du parc hospitalier. Je donne l'exemple de la maternité de Roubaix, pour laquelle nous n'avons toujours pas réussi à obtenir une modernisation, qui permettrait pourtant à l'établissement de réaliser de nombreuses économies et de rationaliser son fonctionnement.
Concernant la politique de prévention, on a récemment parlé des addictions, dont on sait qu'elles débouchent sur des maladies chroniques mais aussi psychiatriques. Je pense à l'alcool, mais aussi aux drogues.
Sur les arrêts de travail, la Cour des comptes avait bien souligné ce point, en indiquant que la CNAM ne procédait pas suffisamment à une analyse de ces arrêts maladie et qu'une telle réflexion méritait d'être menée.
Enfin, dernier point, je me permets de dire que je ne suis pas d'accord avec votre considération concernant le remboursement de 12 milliards d'euros à la CADES que vous préconisez de neutraliser pour avoir une vision plus objective du niveau de déficit du régime général : lorsque l'on est endetté, il faut rembourser son emprunt, et cela, n'importe quel ménage le sait. Il n'est donc pas logique de souhaiter neutraliser cette dimension.
Merci pour ces analyses qui trouveront leur prolongement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il faut à la fois de la maîtrise et du progrès et non pas seulement de la maîtrise. Je salue le sérieux de la démarche d'ensemble que vous menez. Nous savons que le dépassement de l'ONDAM n'est pas inévitable : il a, à tort, été annoncé par certains pour le premier trimestre 2013 et désormais pour l'année 2014. Une politique d'ensemble sérieuse et construite a bel et bien permis de l'éviter.
Les innovations dans la méthodologie que vous avez déployée permettront de servir la médecine de parcours que nous souhaitons et la mise en oeuvre de la stratégie nationale de santé.
Dans votre approche, quelles dépenses de l'assurance maladie pourraient être considérées comme des investissements ayant un effet de levier sur la maîtrise des dépenses de santé, par exemple en matière de prévention ? Il conviendrait de mieux distinguer les cas où l'investissement est un facteur de maîtrise de la dépense.
Quelle est votre appréciation de la qualité de l'articulation entre la Haute Autorité de santé et l'assurance maladie, notamment pour évaluer la pertinence des actes ?
Vous envisagez une mise en oeuvre de la rémunération du travail en équipe au cours de l'année 2014. Or nous l'avons voté dans la dernière loi de financement : pourquoi ne parvenons-nous pas à la mettre en oeuvre ?
Enfin, évitons une vision trop simple des restructurations hospitalières : la concentration n'est pas toujours un facteur de renforcement de la qualité.
Le vieillissement de la population pose à notre système de santé des défis à la fois pour la maîtrise des dépenses et pour la qualité des services apportés aux personnes les plus âgées. Leur prise en charge est complexe et accroît les risques de sur-traitements ou de non-pertinence de certains soins. Le risque d'iatrogénie médicamenteuse est bien connu. Comment mieux éviter ces dangers ?
Comment réduire le nombre des hospitalisations dites « évitables » qui touchent dans 43 % des cas des personnes âgées de plus de 75 ans ? Comment améliorer le parcours des personnes âgées et plus particulièrement le retour au domicile dans de bonnes conditions : on constate en effet des ré-hospitalisations fréquentes qui pourraient être évitées. Comment l'assurance maladie pourrait-elle faciliter la liaison entre l'hôpital et la ville par un travail de facilitation et de coordination des professionnels ?
Où en sont les expérimentations dans le cadre du parcours de santé des personnes âgées en risque de perte d'autonomie (PAERPA) ? Quels sont les résultats dans les territoires où les expérimentations sont menées : comment accentuer cet effort puisque vous prévoyez à l'horizon 2017 des gains de qualité de vie et des économies pour l'assurance maladie à hauteur de 320 millions d'euros… Ce chiffre vous semble-t-il atteignable ?
En 2012, les dépenses de transport ont atteint 3,8 milliards d'euros soit 2,1 % des dépenses d'assurance maladie concernant 62,8 millions de trajets pour 5,1 millions de patients. Depuis 2006 des mesures ont visé à contenir le flux des transports des malades et donc la progression de ce poste de dépenses.
Malgré ces efforts, il convient de s'interroger sur les coûts que l'assurance maladie est en droit de prendre en charge. Selon les textes actuellement en vigueur, le transport du malade dont les soins doivent être réalisés à l'extérieur est la seule solution que l'assurance maladie puisse prendre en charge : or dans les cas où le patient a besoin d'un traitement quotidien, hors cure, dans un lieu relativement éloigné de son domicile, il serait peut-être judicieux d'envisager des solutions d'hébergement sur le lieu où les soins sont prodigués. Ceci peut être moins onéreux et présente des atouts en termes environnementaux et des gains de confort pour les patients. Je pense à la situation d'un patient de ma circonscription qui doit suivre 26 séances de radiothérapie pour six semaines de traitement occasionnant un coût de transport de l'ordre de 10 000 euros. Or une solution d'hébergement à proximité du centre médical aurait représenté un coût de l'ordre de 2 000 euros pour la CPAM… donc une économie de près de 8 000 euros.
Vous avez traité le sujet des hospitalisations ponctuelles, dites « évitables » par tranches de pathologies mais il convient de souligner le problème spécifique des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). La chaîne est aujourd'hui incomplète : on constate un transfert de la charge, de l'angoisse et de la responsabilité vers les hôpitaux. Dès qu'un lit est disponible pour une personne âgée, on constate une hospitalisation, même avec sortie le lendemain…
Sur la transparence, l'hôpital est confronté aux visites médicales mais aussi aux avis d'experts médicaux influents sur le territoire : le choix du traitement d'un patient en affections de longue durée conduit souvent à la même prescription à vie. Comment dire aux pharmaciens hospitaliers qu'ils ne peuvent pas accepter certains médicaments qui leur sont proposés alors qu'ils croulent sous les sollicitations ?
Enfin, les fraudes ne sont pas anecdotiques. On constate des fraudes à l'exportation, notamment pour les affections de longue durée.
Vous avez présenté une analyse intéressante sur la nature de la causalité entre croissance démographique, vieillissement de la population et augmentation des dépenses d'assurance maladie.
Dans la perspective d'une véritable diminution de l'hospitalisation des personnes âgées, vous suggérez de s'appuyer sur l'expérimentation PAERPA. Dans quelle mesure le projet peut-il s'appliquer à d'autres populations, telles les personnes en situation de handicap ?
Concernant la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA), vous présentez les résultats de l'étude GEFAL qui considère les deux traitements existants aujourd'hui comme équivalents. Toutefois la méta-analyse montre que le risque d'événement indésirable grave est plus important avec un des deux traitements. Compte tenu du nombre croissant de personnes concernées par cette affection et du risque de dépendance, quelles conclusions tirez-vous de cette analyse ?
Il y a environ vingt ans, on préconisait une politique de numerus clausus considérant que la baisse du nombre de prescripteurs contiendrait la demande médicale. Ceci n'a abouti qu'à créer des déserts médicaux… Il semble désormais que les enjeux de la démographie médicale vont faciliter la réduction du nombre de plateaux chirurgicaux que vous appelez de vos voeux.
Concernant le secteur médico-social, vous préconisez une mesure d'économie de 170 millions d'euros : sur quoi repose ce chiffre ? S'agit-il de récupérer des crédits qui n'auraient pas été consommés sur le budget de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) ?
Concernant la contraception orale pour les mineures, la délivrance de la pilule contraceptive est désormais prise en charge à 100 %. Or la prise en charge ne saurait être anonyme et gratuite sans remboursement de la consultation par le prescripteur et des éventuels examens complémentaires : je souhaiterais savoir si l'on vous a demandé d'évaluer la dépense occasionnée.
Enfin concernant les personnes âgées, on sait qu'une maladie comme le zona représente un facteur d'entrée en dépendance important. Envisagez-vous une politique de vaccination en la matière ?
En matière de prévention et de lutte contre le tabagisme, vous vous appuyez sur les médecins généralistes afin de cibler les adolescents. Cela ne me semble pas le plus efficace. Ne peut-on pas faire mieux en matière de prévention, d'alimentation et d'hygiène de vie ? Une politique globale de prévention n'est-elle pas porteuse d'économies ?
Vous évoquez le rôle prometteur des équipes pluridisciplinaires de proximité des maisons de santé. Mais la loi « Hôpital, patients, santé et territoires » (HPST) a supprimé les hôpitaux de proximité, dont la particularité demeure pourtant, notamment pour la prise en charge des personnes âgées. Ne sommes-nous pas en train de réinventer ce qui existe déjà ?
Le recentrage sur des pôles de référence n'est-il pas de nature à accentuer les coûts de transport ? Il me semble que, une fois définis, les protocoles de chimiothérapie ou de dialyse pourraient être réalisés en proximité, ce qui éviterait les transports et les coûts en centres spécialisés.
Vous envisagez d'optimiser la rééducation post-opératoire notamment chez les personnes âgées. Quel est le risque de transfert de charge vers les familles ou les conseils généraux au titre de la perte d'autonomie ?
Enfin, quelle est votre position sur l'intérim médical qui coûte cher dans nos hôpitaux ?
Vous nous placez devant un choix politique de responsabilité où il va bien falloir que quelqu'un décide des moyens qui seront affectés à telle ou telle pathologie, donc aux différentes catégories de nos compatriotes qui en souffrent.
L'exemple de l'Avastin et du Lucentis illustre la prise de risque juridique que vous demandez désormais à la représentation nationale d'endosser. Il vous est aisé en effet de livrer au grand public une présentation des aléas entre les différents protocoles et d'ignorer la répartition géographique des pathologies. Mais il en découle une série de choix déchirants et peut-être de drames qui ne sauraient être dénués, au final, de conséquences judiciaires.
Quand ces données ont-elles été transmises aux agences ? Qu'en ont-elles fait ? Ont-elles eu le temps de les exploiter ?
Que pensez-vous des mesures actuellement prises à l'encontre de la convergence tarifaire ?
Que pensez-vous de l'abandon des initiatives d'appel d'offres en matière de transports ?
Avez-vous regardé la nationalité des diplômes des chirurgiens dont il faut reprendre les prothèses de hanche qui occasionnent des complications ?
Enfin, je regrette qu'une fois de plus les prescripteurs soient au centre de votre cible, alors qu'ils sont soumis à une pression de plus en plus forte.
Je salue vos efforts pour maintenir le taux de progression de l'ONDAM à 2,4 % mais, au vu du taux de croissance du produit intérieur brut, les dépenses de santé continuent de progresser dans les dépenses générales. Les évolutions tendancielles atteignent au demeurant le taux de 3,8 %.
Vous avez identifié des pistes d'économies importantes : les statines, les prothèses, les soins de la prostate par exemple. Vous avez cité de nombreux exemples d'économies fournies par les comparaisons européennes, mais cela ne suffira probablement pas.
Une des pistes résiderait dans un effort en matière de prévention qui pourrait constituer l'axe central de notre politique de santé publique.
L'économie de la santé semble être devenue une économie comme une autre ; la volonté de réduire les dépenses de santé ne semble pas partagée par les acteurs de ce secteur…
Parmi les sources d'économie évoquées ce matin, le médicament représente 22 milliards des 175 milliards des dépenses de l'ONDAM, soit 12,5 %. Sur les 2,4 milliards d'économies proposées, 750 millions proviennent du médicament, soit 30 % de l'effort. Le médicament constitue donc votre première cible.
Ceci se situe dans la continuité d'un mouvement de plusieurs années, marqué en 2012 par le recul historique des dépenses en matière de médicament de 0,8 % alors que l'on constate une progression de 3,4 % en Allemagne.
Cette logique ne rencontre-t-elle pas aujourd'hui sa limite ? Comment maintenir une régression en France alors que la dépense progresse en Europe ? Comment tenir compte de la progression de la durée de vie ou de l'apport des nouvelles molécules ?
Concernant le service médical rendu, il me semble que vous ne parlez pas assez des effets secondaires : pourtant les statines par exemple sont plus confortables pour le patient que les fénofibrates.
Concernant les nouvelles molécules, l'exemple des anticoagulants me semble parlant : d'après l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, sur 14 millions de boîtes d'anticoagulants de type AVK vendues, on compte seulement 160 000 boîtes de nouveaux anticoagulants et la courbe de progression n'est pas alarmante.
Vous parlez souvent des revenus des professionnels mais en matière de médicaments il s'agit de revenus d'entreprises dans l'industrie, les laboratoires ou chez les grossistes : aujourd'hui les marges de manoeuvre des entreprises du médicament sont atteintes et nous risquons de connaître de graves difficultés.
J'interviendrai sur les pistes d'économies proposées par votre rapport qui concernent les personnes âgées. Selon ce rapport, les plus de soixante-quinze ans représentent 43 % des hospitalisations dites évitables. C'est une proportion importante. Une des premières choses à faire serait d'éviter ces hospitalisations, en encourageant et en soutenant davantage l'hospitalisation à domicile (HAD). Il faudrait ensuite limiter la durée d'hospitalisation et accompagner la sortie des patients, ce qui leur permet de reprendre plus vite une vie normale et de retarder la perte d'autonomie. Cibler des politiques comme celles-ci permet de soigner mieux et de prévenir. Pour le dire de manière franche, le rapport fait peu de propositions en faveur de la prévention. Vous évoquez l'information du patient et la lutte contre une consommation de tabac qui représente, pour la société, un coût important, de l'ordre de 47 milliards d'euros de dépenses prises en charge pour 15 milliards d'euros de recettes. Ce sont des objectifs importants. Il y a cependant des actions tout aussi importantes à mener contre les carences en vitamines des personnes âgées qui ont été multipliées par trois et l'insuffisance de la nutrition qui a été multipliée par deux.
Vous avez évoqué le traitement du cancer de la prostate en rappelant que le dosage de l'antigène prostatique spécifique (PSA) des plus de soixante-quinze ans était inutile alors qu'il est néanmoins réalisé chez 76 % de ces personnes au prix d'effets secondaires importants. Je ne pas vu de propositions dans le rapport en regard de ce constat. Pourquoi n'en avez-vous pas faites ? La proposition n° 21 souhaite qu'un accord pluriannuel avec les biologistes permette de modérer les volumes et les prix des examens. Je comprends très bien qu'un accord sur les prix soit possible mais je ne vois pas comment obtenir un accord sur les volumes alors qu'ils ne sont que les exécutants des prescripteurs.
Les montants des indemnités journalières (IJ) sont intégrés dans les coûts de prise en charge des pathologies. Le tableau de la page 30 du rapport les répartit par groupes de pathologies en pourcentage mais non pas en montants des dépenses. Peut-on trouver ces montants ailleurs dans le rapport ? Vous évoquez un accroissement des droits à indemnisation journalière pour les personnes qui ont une faible activité en passant le forfait d'ouverture des droits de 910 à 1 015 SMIC. Qu'est-ce qui vous a conduit à retenir ce seuil de 1 015 SMIC ? Quel est le montant des dépenses supplémentaires qui résulteraient de la mise en oeuvre de cette proposition n° 23 ? Vous constatez que le montant de la dotation globale allouée aux établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) n'est pas entièrement consommé dans tous les établissements. Vous prévoyez que leur dotation soit gelée. Je regrette que le rapport n'aille pas au-delà en considérant qu'il s'agit d'une source d'économies. Pouvez-nous indiquer à quel moment nous en saurons plus sur ces montants de dotations non consommés ?
Je poserai trois brèves questions. Il y a peu de développement sur l'insuffisance rénale chronique. Elle ne touche qu'un faible nombre de patients mais elle représente 3,4 % du total des dépenses, beaucoup plus que celles qu'occasionne la dialyse et cinq fois plus que les dépenses de transplantation alors que celle-ci est moins coûteuse et présente une meilleure perspective de rétablissement pour les patients. Conduisez-vous une réflexion pour améliorer la collecte des organes qui limite aujourd'hui le nombre de ces transplantations ? Cela satisferait tout le monde et contribuerait à rétablir les comptes de l'assurance maladie.
Vous évoquez l'intérêt du sevrage des consommateurs de tabac. Cette consommation provoque 75 000 morts par an. C'est un enjeu important. Ne serait-il pas plus simple, en définitive, de prendre totalement en charge tous les moyens de sevrage pour la totalité de la population et non pas seulement pour les femmes enceintes ou les personnes précarisées ? Le coût estimé de cette prise en charge serait inférieur aux économies générées par la diminution des pathologies générées par le tabac. Les infarctus du myocarde comme d'autres maladies cardio-vasculaires seraient moins fréquents chez les personnes jeunes.
Les bénéfices sanitaire et économique de cette mesure seraient encore plus grands à long terme. La réflexion sur l'ouverture à la consultation publique des donnés de santé s'est-elle poursuivie ? Quelle est la solution envisagée ? Un partage plus large des données améliorerait notre système de santé et en particulier la pharmaco-surveillance en temps réel.
Le rapport déçoit si l'on considère les enjeux que pose le déficit de la branche maladie qui atteint 6 milliards d'euros et s'élèvera bientôt à 7 milliards, tandis que le déficit de l'ensemble des branches atteindra 14 à 15 milliards d'euros. On ne peut que regretter le manque d'ambition du rapport lorsque l'on se rappelle que les comptes de la branche maladie de la sécurité sociale sont équilibrés en Allemagne. Cela doit impressionner l'Assemblée nationale. M. Door a relevé que les comptes de plusieurs branches de la sécurité sociale n'avaient pas été certifiés par la Cour des Comptes. C'est préoccupant. Les raisons de cette absence de certification sont assez consternantes. On ne peut qu'être inquiet pour les comptes de la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles qui n'ont pas été certifiés par la Cour des comptes en raison de l'absence fréquente des pièces justificatives permettant d'attester la réalité des soins, de la maîtrise insuffisante des risques d'erreurs de calcul, du manque de fiabilité des données prises en compte et du désaccord sur certaines estimations. Le différend porte au minimum sur 324 millions d'euros pour cette seule branche. Ces soucis ont été relevés avec légèreté à la page 145 du rapport. La récupération des pièces justificatives a été un peu améliorée. 2 900 rapports ont été reçus sur les 70 000 contrevisites effectuées. Le rapport partage l'opinion de la Cour des Comptes selon laquelle cette situation n'est pas acceptable. C'est le moins qu'il puisse faire étant donné les chiffres. La presse fait souvent état d'un trafic de Subutex. 97 médecins auraient déjà été mis en cause et auraient reconnu devant la justice que l'absence de contrôle encourageait ce trafic.
Vous écrivez, dans votre rapport, que nous avons la responsabilité collective d'assurer le maintien d'un système de santé de haut niveau, accessible à l'ensemble de la population, dans un contexte économique difficile et que c'est un défi qui suppose un contrat collectif dans lequel chacun s'engage pour atteindre l'objectif commun. Vous rappelez que des efforts ont été consentis depuis de nombreuses années pour maîtriser les dépenses de santé et améliorer leur efficience. Pour autant, vous constatez que 23 % des adultes déclarent avoir renoncé à des soins médicaux pour des raisons financières. Les dépenses de santé sont souvent sacrifiées par les ménages en ces temps de crise. La part du coût des soins courants restant à leur charge est de l'ordre de 45 % parce que de nombreux ménages n'ont pas d'assurance complémentaire de santé. Vous reconnaissez qu'il est difficile d'obtenir un rendez-vous dans certaines spécialités, que les consultations ont un coût élevé et les cabinets de consultation souvent éloignés du lieu de résidence des patients. Ce sont autant de restrictions posées à l'accès aux soins. Il en résulte des inégalités d'accès aux soins qui pénalisent fortement les personnes en situation de précarité. Il est difficile de poursuivre simultanément les deux objectifs fixés par le rapport, l'un qualitatif, à savoir l'amélioration d'un système de soins accessible à tous et l'autre quantitatif, la maîtrise des dépenses de santé. Quelles sont, parmi vos propositions, les actions prioritaires à engager pour atteindre l'objectif qualitatif ?
Les propositions nos 12 et 13 citées à la page 43 du rapport concernent la chirurgie. Vous proposez la mise en place d'incitations tarifaires. Vous illustrez votre proposition par une carte de la prise en charge de la cataracte en chirurgie ambulatoire. Cette carte me laisse penser que les différences géographiques qui apparaissent dans les conditions de prise en charge de cette pathologie ont pour cause une disparité de l'offre de soins sur notre territoire. Avez-vous pu analyser cette cause ? Avez-vous évalué l'impact de vos propositions sur la part du coût des soins qui reste à la charge des patients ?
Les 27 propositions de votre rapport appellent, de ma part, une seule question : les avez-vous priorisées comme le font la plupart des instances et en particulier la Cour des Comptes, de manière à ce qu'elles soient plus ou moins attentivement suivies ? Lesquelles sont indispensables et ne peuvent être négociées ? Lesquelles peuvent être reportées dans le temps ? Il est important que nous puissions revenir devant nos concitoyens pour leur indiquer que nous avons mis en oeuvre ces propositions dans les délais prévus.
Mon propos concerne les soins prodigués aux personnes âgées. Votre rapport fait état d'une forte propension de personnes de soixante-quinze ans et plus à prendre des psychotropes alors qu'elles ne sont pas atteintes de pathologies psychiatriques. Un tiers d'entre elles aurait recours aux anxiolytiques, aux antidépresseurs et aux hypnotiques. Comment l'expliquer ? La Caisse nationale a mené des campagnes de sensibilisation des professionnels afin de réduire les prescriptions. Le nombre de personnes âgées sous benzodiazépine a diminué mais leur usage prolongé se développe alors qu'il est pourtant déconseillé par la Haute Autorité de santé et responsable de fréquents accidents iatrogènes dans cette catégorie de la population. La consommation de psychotropes est souvent présentée comme une spécialité française. L'interdiction ou le déremboursement de certaines molécules, le renforcement du contrôle des prescriptions, les campagnes d'information ciblées vers les publics âgés pourraient protéger nos aînés et réduire les dépenses de sécurité sociale. Quelles mesures préconisez-vous parmi celles-ci pour mieux encadrer leur utilisation ? Le rapport s'interroge sur la pertinence de certains actes ou d'interventions, tels que le dépistage du cancer de la prostate après soixante-quinze ans ou celui de la thyroïde, qui seraient « contre-productifs ». Quelle solution préconisez-vous ? Quand pourrez-vous fournir les résultats des études conduites sur les écarts de tarifs observés entre les EHPAD et sur la comparaison entre les coûts de prise en charge à domicile et celui d'un placement en EHPAD ?
Je reprends les propos tenus par M. Christian Paul sur le médicament. Le rapport de la CNAM enrichit notre réflexion et propose des voies d'action. Je témoigne cependant d'un sentiment d'exaspération devant l'opacité des décisions du comité économique des produits de santés (CEPS). Il fut un temps où des parlementaires étaient membres de ce comité. Je suis impatient que les recommandations de la Haute Autorité de santé soient suivies par les prescripteurs. Nous avons tous en mémoire l'épisode des contraceptifs oraux combinés. Le Lucentis posait un problème de prescription autant qu'un problème de prix. Administré en deux séries de trois injections, il est efficace les deux premières années. Je rencontre des patients qui ont subi dix injections. Les laboratoires adoptent des stratégies de contournement des recommandations de la Haute autorité en offrant parfois des médicaments princeps aux hôpitaux, ce qui soulage leurs budgets mais qui est sans incidence sur le coût des mêmes médicaments prescrits en ville. Est-ce que l'alignement du prix des médicaments sur le tarif correspondant au service médical rendu (SMR) ou bien sur celui du médicament le moins cher de leur classe thérapeutique ou bien encore la limitation du prix du médicament princeps par rapport à celui de son équivalent générique sont des dispositions de nature législative ? Pourra-t-on imposer au comité économique des produits de santé ces mesures qui sont de bon sens et particulièrement efficaces dans la lutte contre les rentes de situation, si le Gouvernement ne nous précède pas dans cette voie ?
J'espère pouvoir répondre à toutes les questions qui ont été posées. Le conseil de la CNAM a approuvé les comptes sur la base de leur certification, assortie de quelques réserves par la Cour des Comptes. La Cour des Comptes n'a pas refusé de certifier les comptes de la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles mais, et cette nuance est importante, s'est trouvée dans l'impossibilité de le faire compte tenu d'exigences supplémentaires qu'elle avait ajoutées à celles des années précédentes. La Cour est dans son rôle en se montrant de plus en plus rigoureuse. Les services s'adaptent chaque année. L'approbation du Conseil a été obtenue par 18 voix pour, 13 contre et 3 abstentions. Les représentants des organisations syndicales, de la mutualité, ce qui a été peu relevé, des associations de malades – le collectif interassociatif sur la santé (CISS), la fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (FNATH) ou l'union nationale des associations familiales (UNAF) – et les personnalités qualifiées, ont approuvé les comptes. S'ils l'ont fait c'est parce que les mesures proposées ne prévoient pas de baisses de remboursement mais engagent une restructuration du système de soins en baissant les tarifs quand ils nous ont semblé en décalage par rapport à ceux pratiqués dans d'autres pays ou à ceux correspondant à la mise en oeuvre de nouvelles technologies ou bien quand une augmentation en volumes aboutit à une hausse proportionnelle des marges qui nous permet de les négocier. Cette restructuration n'apportera de bénéfices qu'à moyen terme. Ceux qui se sont opposés à l'approbation des comptes ont tantôt considéré que l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) fixé par le rapport était insuffisant et qu'ils ne pouvaient pas l'approuver, tantôt que cet objectif de réduction n'allait pas assez loin tout en regrettant la pression excessive exercée sur les dépenses de médicaments.
La grande morosité des professionnels de santé provient sans doute de la remise en cause des principes fondamentaux du métier qu'ils ont appris, en particulier des principes de liberté d'installation et de prescription. La mise en place de référentiels par la Haute Autorité de santé, de procédures pluridisciplinaires de travail en groupe, de centres de santé, de modes de rémunération alternatifs ou complémentaires liés à la qualité des soins bousculent les anciennes pratiques médicales. Les professionnels s'interrogent. Je comprends leur attitude mais il faut néanmoins poursuivre dans la direction choisie. Les évolutions nécessaires doivent être négociées avec les professionnels de santé libéraux et avec les centres de santé, cette dernière négociation étant reportée dans l'attente d'un rapport demandé par le Gouvernement à l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS). Les négociations avancent en dépit des difficultés. L'ONDAM a été fixé à 2,4 %. On peut toujours contester cet objectif d'économies mais il nous a semblé que nous pouvions l'atteindre sans baisse de remboursements, sans risquer l'intervention du comité d'alerte tout en tenant compte de l'état de l'économie du pays, même si cet objectif accroît légèrement le déficit des finances publiques. Cet objectif aura-t-il des incidences sur les paniers de soins ?
S'agissant de ce dernier, nos réflexions sont les suivantes : est-il toujours remboursé ? Est-ce utile ? Nous constatons des écarts de pratiques : pourquoi ? Je fais ici le lien avec le rôle de la Haute Autorité de santé : il appartient, en effet, à l'assurance maladie d'observer ce qui se passe sur le terrain, d'analyser les écarts puis d'interpeller la Haute autorité pour lui indiquer quelles sont les bonnes méthodes et pratiques. Je ne peux pas cacher l'impatience que nous éprouvons face aux délais de réponse de la Haute autorité à nos questions, qui retardent la mise en oeuvre de mesures sur le terrain.
Le Conseil a pris soin de ne pas écrire qu'il fallait fermer les hôpitaux de proximité. Mais, comme l'indique le tableau situé à la page 82 du rapport, moins un service accomplit régulièrement certains actes médicaux, plus le taux de reprise observé est important. La population doit être informée de ces données, pour faire ses propres choix. En matière de chirurgie ambulatoire, les patients acceptent plus facilement, par exemple, de se déplacer. Il est de notre rôle d'informer la population, comme nous l'avons fait sur les tarifs des professionnels de santé.
Cette question nous ramène aux soins de premiers recours et au parcours de soin du patient, qui doit être accueilli dans une structure de proximité puis orienté vers la structure adéquate, qui puisse lui offrir la réponse la plus pertinente et efficiente possible. Nous trouvons, d'ailleurs, qu'on ne va pas assez loin ni assez fort sur la répartition des professionnels de santé sur le territoire.
Sur la prévention, il me faut rappeler que nous attendons une loi de santé publique. La précédente loi a clairement affirmé que la prévention primaire et l'éducation à la santé relevaient de l'État, par le biais de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) que l'assurance maladie finance d'ailleurs aux deux tiers. Nous nous sommes donc positionnés davantage sur la prévention secondaire, d'où nos propositions sur le dépistage, la vaccination, le programme Sofia d'accompagnement des patients diabétiques, et les modalités d'accompagnement des associations de patients. Nous sommes situés sur cet axe, je vous invite donc à réinterroger l'État sur l'organisation de la prévention primaire.
S'agissant de l'accès aux soins, nous avons noté les difficultés rencontrées par la population. Plusieurs réponses ont déjà été apportées : l'accord avec les professionnels de santé sur les dépassements d'honoraires, le contrat d'accès aux soins qui a, à ce jour, recueilli 6 005 signatures, l'absence de nouveaux déremboursements, l'accompagnement des personnes en difficulté par les caisses primaires et les associations, le travail autour de la hausse des seuils couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) et aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS) et autour des fonds d'action sanitaire et sociale pour aider les personnes à reprendre une couverture complémentaire.
En conclusion, je souhaite réaffirmer que si, à première lecture, cela n'apparaît pas dans le rapport, notre préoccupation demeure double : améliorer tant la qualité que la maîtrise des coûts. Si nous ne travaillons pas à la maîtrise des coûts, nous serons tôt ou tard confrontés à une alerte, qui se traduira par des déremboursements et des renoncements aux soins en conséquence. Nous souhaitons donc lier qualité et maîtrise des coûts, ce que démontrent nos propositions relatives aux mésusages, aux anticoagulants, à la chirurgie, aux hypnotiques, etc.
Sur la question de la connaissance des coûts, notre objectif n'est pas de définir un panier de soins. Pour équilibrer un système d'assurance maladie, il existe trois leviers : la dépense, le taux de prise en charge, et la recette. Nous ne devons pas céder à la facilité et regarder d'abord la dépense et le taux de prise en charge puis procéder à des déremboursements, auxquels le Conseil de la CNAM n'est pas favorable. Il faut d'abord s'interroger sur les finalités de la dépense de santé et des ressources déjà affectées, avant d'agir sur ces deux autres leviers.
S'agissant des recettes, les 45 milliards d'euros de l'État, représentent des frais financiers, nous ne proposons pas de supprimer le déficit de la CADES correspondant à ces frais. Nous constatons simplement que nous avons 12 milliards d'euros de prélèvements qui amortissent la dette de la CADES, tandis qu'on creuse une autre dette, celle du régime général. Cela a-t-il un sens ? Ne faudrait-il pas plutôt se donner un objectif atteignable, qui serait de stabiliser la dette sociale ? Il s'agit de constater que la situation consolidée du déficit général et des organismes qui participent à son financement n'est pas si dégradée, et qu'il faut distinguer l'Unédic et les régimes complémentaires de retraite gérés par les partenaires sociaux, de ce qui est géré par l'État. Il serait raisonnable que ce qui relève de la gestion de l'État se trouve à l'équilibre.
Ayant participé à la création de la CADES, je sais que celle-ci constitue un instrument qui dégage structurellement un excédent de financement. Ce système aurait un sens si le régime général était à l'équilibre, mais dans la situation actuelle, je m'interroge sur l'intérêt de creuser un déficit de 14 milliards chaque année, d'un côté, et de le rembourser à hauteur de 12 milliards de l'autre. Ce n'est pas très compréhensible pour nos concitoyens. Or l'un des principes fondamentaux du préambule de la Constitution réside dans un consentement éclairé à l'impôt. Toutefois, ce sujet nous dépasse. L'exercice que nous impose la loi est de réaliser un rapport sur les charges et les produits de l'assurance maladie. Certaines questions n'ont donc pas été traitées, par exemple celles qui relèvent de la politique de santé. Il appartient au Gouvernement d'apporter des réponses sur la prévention, la préparation des soins, ou l'utilisation des ressources.
Sur les ASMR V et la définition de classes, de nombreux éléments relèvent du pouvoir législatif. Le Gouvernement évaluera les propositions que nous formulons à cet égard, au regard de sa politique globale en matière de santé et de médicament. J'insiste, toutefois, sur le fait que l'ensemble de nos propositions a pour objectif de nous replacer dans une situation qui soit considérée comme raisonnable aux yeux de l'Europe et justifiée par rapport à la qualité de la prise en charge. Sachant notamment que pour la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA), après discussions avec le Gouvernement, nous avons renoncé à la mise en place d'une recommandation temporaire d'utilisation.
Par rapport aux travaux du Comité économique des produits de santé (CEPS), je ne voudrais pas donner le sentiment que nous nous en désolidarisons. Cette institution a été créée pour distinguer les orientations stratégiques des décisions tarifaires. Ces dernières doivent respecter la législation, qui prévoit qu'un médicament qui ne présente pas d'amélioration sur le service médical rendu doit se traduire par une économie. Aujourd'hui nous nous interrogeons sur les aménagements à apporter à ce principe pour certains produits de santé. À l'inverse, l'article 48 de la loi de financement pour 2012, qui a procédé à des modifications substantielles des équilibres, ne nous paraît pas suffisamment encadré. Il appartiendra au Gouvernement et au Parlement de se prononcer en la matière.
S'agissant de la consommation de benzodiazépine, nous avons réduit celle-ci pour les personnes âgées, mais la durée de prescription demeure encore trop importante par rapport aux préconisations. Il faut considérer, plus généralement, l'état des indicateurs sur la santé publique, mis en place en 2012, comme une photographie de la situation de la prescription médicale, de la prévention et de la prise en charge des maladies chroniques. Le défi de notre pays est de repérer les points d'amélioration et de savoir à quelle vitesse ils peuvent être mis en oeuvre. On comprend que les médecins éprouvent des difficultés s'agissant des patients soignés depuis de nombreuses années avec des benzodiazépines, car il existe une accoutumance à ces produits. Mais le bilan des nouvelles prescriptions ne nous semble pas satisfaisant. Dès lors nous nous demandons comment accélérer l'amélioration des indicateurs. De ce point de vue, reprendre les priorités d'une stratégie nationale de santé clairement énoncée nous semble, au-delà des outils et de la réflexion sur les offreurs, devoir être relayé par les pouvoirs publics.
Pour ce qui concerne la corrélation entre l'offre et la quantité de soins, nous avons déjà réalisé un certain nombre d'études, mais pas encore sur l'offre hospitalière. Si ce lien est démontré dans certains cas, il est très variable selon la nature de la prestation de soin. Ainsi, sur les soins de médecine générale, la corrélation apparaît moins forte. Ce sujet ne se limite pas à la nature de l'offre, mais s'étend à sa répartition sur le territoire. Une étude de la CNAM, disponible sur Internet, montre que les écarts de consommation de soins entre les régions s'expliquent en partie par la densité de l'offre. Mais ce n'est pas parce que la quantité de soin est plus élevée que les résultats en termes de santé sont meilleurs. D'autres facteurs interviennent.
Sur la question de la quantité et de la qualité, je rappelle encore une fois que nous nous trouvons dans un exercice imposé : nous devons formuler des propositions ayant un impact financier. La prévention comprend un impact de long terme. S'agissant du tabac, nous faisons des propositions, qui certes ne sont pas révolutionnaires en termes d'investissement, car nous avons souhaité rester mesurés sur les investissements de prévention. Il appartient au Gouvernement de décider s'il faut augmenter fortement ceux-ci ou non. Dans un contexte où l'ONDAM était globalement maîtrisé, nous avons tenté de faire des propositions ayant un impact réel sans requérir des investissements trop importants.
Nous avons procédé à des études sur la prise en charge des substituts nicotiniques, qui nous apparaît d'autant plus justifiée que les personnes ne peuvent pas les prendre elles-mêmes en charge, lorsqu'elles ont de faibles ressources. Cette question nous renvoie à l'équilibre du fonds national de prévention, dont les moyens ne sont pas illimités.
Sur la comparaison Allemagne – France, je rappelle que le premier facteur d'équilibre demeure la croissance. Or si l'on compare la croissance de nos deux pays, on observe ces dernières années près d'un point d'écart. Or un pour cent de la masse salariale représente, pour l'assurance maladie, près d'un milliard d'euros. Il existe, de plus, une règle d'équilibre dans la Constitution allemande. Lorsque la crise de 2009 est intervenue, l'État fédéral allemand a financé à hauteur de 15 milliards d'euros l'équilibre de ses fonds d'assurance maladie locaux, les AOK. Les mécanismes mis en place dans nos deux pays divergent donc. Nous pouvons réfléchir à leur convergence, mais cela supposerait de réformer les prélèvements obligatoires, pour se redonner des objectifs atteignables et leur conférer de la lisibilité pour les citoyens, ainsi que de renforcer leur pilotage. Il s'agit là, cependant, d'une réforme structurelle, plus large que le cadre de nos débats ce matin.
Sur la greffe, nous savons que l'insuffisance rénale chronique est un soin en développement : nous avons 4 à 5 % d'augmentation du nombre de patients traités. La stratégie est extrêmement simple et fait l'objet d'un consensus médical très clair : en premier lieu, prioriser la greffe, à la fois pour des raisons de santé et de coût. Cette réponse doit nous amener à nous interroger sur deux points : notre capacité à augmenter le nombre de greffes sur donneurs vivants et l'efficacité de notre dispositif de surveillance de l'accès à la greffe sur l'ensemble du territoire. En second lieu, en l'absence de greffe disponible immédiatement, il s'agit de donner le choix au patient entre différentes techniques de dialyse. Si la loi de 2002 était systématiquement appliquée, la dialyse péritonéale serait retenue dans 50 % des cas avec un taux de rétention de 25 %. C'est exactement ce qui se passe lorsque l'on offre le choix aux patients, en expliquant avantages et inconvénients des deux techniques, qui sont réversibles. En dernier lieu, il nous faut préparer l'avenir et soutenir les investissements d'avenir pour développer l'auto-dialyse à domicile. Dans cette perspective, il faut également déverrouiller les freins à ce développement, ce qui nécessite plusieurs leviers :
– tout d'abord, il conviendrait de rééquilibrer les honoraires de surveillance des patients perçus par les néphrologues selon qu'ils exercent cette surveillance en centres de dialyse ou au domicile des patients ;
– il conviendrait également de revoir les tarifs, qui sont trop élevés en centres ;
– il faudrait également modifier le code de la santé publique qui réserve aux seuls établissements de santé la possibilité de faire de la dialyse à domicile ;
– enfin, il faudrait arrêter de limiter administrativement le nombre de places en dialyse à domicile.
Nous avons clairement une demande du Gouvernement pour réformer le système de dialyse dans notre pays. Mais c'est un sujet compliqué. Depuis leur création, les agences régionales de santé se sont vues assigner un objectif d'augmentation du nombre de dialyses à domicile, mais ce n'est qu'ensuite qu'on s'est aperçu qu'il existait en fait des verrous administratifs.
Sur le dosage PSA (antigène prostatique spécifique), nous estimons que nous devrions être plus fermes sur certaines recommandations. Pour être schématique, il faudrait savoir dire maintenant qu'il y a des choses qu'il ne faut pas faire. Or, si, par exemple, sur les dépistages, nous savons dire « il faut faire cela », nous ne savons pas encore dire « sur certaines populations, il n'est pas raisonnable de faire cela ». Contrairement à d'autres pays, nous n'avons pas encore de recommandations de ce type-là.
Sur les arrêts de travail, nous n'avons pas proposé le déremboursement des arrêts de travail, comme le proposait la Cour des comptes, car il nous semble que, même si cela est efficace financièrement, il convient de donner la priorité à la lutte contre les abus. Si un arrêt de travail est justifié, c'est normal que la personne conserve des moyens de subsistance pour elle et sa famille ; on devrait plutôt se focaliser sur les arrêts de travail dont la durée n'est pas justifiée. Notre proposition est de soumettre systématiquement à entente préalable certains arrêts, une fois les fiches-repères élaborées. On peut trouver que le travail avec la Haute Autorité de Santé ne va pas assez vite, mais il ne faut pas oublier que les pays auxquels on se compare ont commencé ce travail il y a beaucoup plus longtemps. Les Anglais ont des fiches-repères sur les arrêts de travail depuis 2004. Le retard pris vient du choix de ne pas considérer jusqu'ici les arrêts de travail comme une prescription médicale : de ce fait, toutes les préconisations de durée n'ont pas été appliquées.
Concernant le médico-social, nous proposons un ajustement de l'ONDAM médico-social par rapport au tendanciel : il appartient au Gouvernement de décider si cet ajustement doit passer par des modifications tarifaires ou si l'on tient compte des marges de manoeuvre disponibles sur les autres postes de dépenses.
S'agissant de la négociation avec les professionnels de santé sur les équipements de soins de proximité, nous attendons que le Gouvernement ait établi la stratégie nationale de santé afin d'être sûrs que cette négociation s'intègre bien dans les priorités retenues. Nous devrions être fixés prochainement.
Pour ce qui est de l'accès aux données de santé et leur transmission aux agences régionales de santé, nous venons effectivement d'achever notre analyse sur la répartition des prises en charge au niveau national et nous pouvons décliner la méthode utilisée au niveau régional. Toutefois, il n'y a pas de corrélation directe entre les patients présents sur un territoire et les établissements de soins qui y sont implantés. Par exemple, l'AP-HP soigne des patients bien au-delà de l'Ile-de-France. Il convient donc d'adapter l'analyse, mais il serait sans doute utile de transmettre ce rapport aux agences régionales de santé. Sur l'accès aux données de santé, nous avons démontré au travers de plusieurs études que cela pouvait avoir une valeur ajoutée pour le pilotage du système de santé et pour l'analyse pharmaco-épidémiologique – nous avons d'ailleurs signé, dans l'attente de la création d'un groupement d'intérêt public dédié, une convention avec l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) en décembre dernier pour toutes les études rendues publiques, notamment sur la pilule. La question est donc celle du bon équilibre à trouver : un débat public et une intervention législative sont sans doute nécessaires, dans la mesure où il n'appartient pas à l'assurance maladie d'aller au-delà des textes applicables. Or, ces textes limitent l'accès aux données de santé anonymisées aux institutions à but non lucratif. Pour aller au-delà, il faudra modifier les textes. Il s'agit en outre d'un sujet sensible : l'assurance maladie dispose de millions de données anonymisées et non anonymisées sur la population : il est donc normal que les choses se fassent en toute transparence et qu'il y ait débat devant la représentation nationale.
Sur le rôle susceptible d'être joué par l'assurance maladie dans le décloisonnement villehôpital, nous avons mis en place des programmes PRADO (programme d'accompagnement du retour à domicile) au sein desquels un conseiller de l'assurance maladie intervient pour faire le lien et faciliter la prise en charge à domicile après une hospitalisation. L'expérimentation a commencé avec les sorties de maternité et il y a aujourd'hui environ 10 000 mamans par mois qui sont accompagnées dans ce cadre. Ce programme a été un peu plus médicalisé pour être étendu aux personnes âgées : 400 personnes dans dix départements ont ainsi été accompagnées à leur retour à domicile après une prothèse de hanche ou une prothèse de genou. Une expérimentation est également en cours dans cinq territoires pour les patients souffrant d'insuffisance cardiaque qui ont 77 ans en moyenne qui, en l'absence d'accompagnement à domicile, sont souvent réhospitalisées. Cette expérimentation pourra en outre être utilisée dans le cadre du dispositif PAERPA (personnes âgées en risque de perte d'autonomie) mis en place dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 et dont les premières expérimentations devraient être mises en oeuvre à l'automne. Cet accompagnement des personnes âgées devrait permettre un gain pour l'assurance maladie chiffré à 320 millions d'euros à moyen terme. La réalisation dans un premier temps, à l'horizon 2017, d'une économie de 100 millions d'euros est tout à fait réaliste si l'on s'organise bien, notamment pour éviter les 30 % de réhospitalisations constatées aujourd'hui pour les insuffisants cardiaques et pour, globalement, mieux accompagner les personnes souffrant de BPCO (broncho-pneumopathie chronique obstructive), de plaies chroniques ou nécessitant des soins d'orthopédie après prothèse de hanche. Tout cela suppose donc une meilleure structuration de la prise en charge en ville.
Sur l'expérimentation en sortie de maternité, la durée de séjour a baissé de 8 %, alors que la France a une durée de séjour en maternité décalée par rapport au reste des pays de l'OCDE, mais il nous semble qu'il vaut mieux éviter de subir une baisse de la durée de séjour sans accompagnement à domicile et plutôt accompagner intelligemment la baisse de la durée de séjour, sachant que la satisfaction est en fait très élevée. Le patient préfère en effet être accompagné à domicile que ne pas l'être. L'organisation de l'aval de l'hôpital n'est pas une idée nouvelle mais sa mise en oeuvre est nécessaire pour accompagner la réduction de la durée moyenne des séjours qui résulte elle-même de l'évolution des techniques mises en oeuvre par les établissements de santé. Il s'agit donc à la fois d'un facteur et d'un accélérateur d'économies. En revanche, nous devons attacher de l'importance à la façon dont ces économies sont réalisées en adaptant en parallèle l'offre de soins : c'est tout l'enjeu de la mise en place d'une politique de gestion active de l'offre de soins adaptée au patient, permettant de réduire ce qui doit l'être et d'investir là où c'est nécessaire. Cette gestion active doit reposer sur une vision pluriannuelle s'inscrivant dans une négociation dans le temps avec les professionnels de santé. Elle permettra ainsi d'enclencher un cercle vertueux d'optimisation du système de santé.
La séance est levée à douze heures quinze.