Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a examiné, sur le rapport de Mme Pascale Got, la proposition de loi portant adaptation des territoires littoraux au changement climatique (n° 3959).
Nous examinons la proposition de loi portant adaptation des territoires littoraux au changement climatique. Le 9 novembre dernier, la Commission a désigné rapporteure Mme Pascale Got.
À l'issue du délai de dépôt, vendredi 18 novembre, le secrétariat de la Commission a enregistré quatre-vingt-six amendements. Aucun n'a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40. Compte tenu de ceux qui ont été retirés, il en reste quatre-vingt-deux à examiner.
Permettez-moi, pour commencer, de replacer la proposition de loi que nous examinons dans son contexte. En 2009 s'est déroulé le « Grenelle de la mer ». Entre le 27 et le 28 février 2010, ce fut la tempête Xynthia. Le 2 avril 2011, le député Alain Cousin a remis à la ministre de l'écologie et du développement durable son rapport intitulé Propositions pour une stratégie nationale de gestion du trait de côte, du recul stratégique et de la défense contre la mer, partagée entre l'État et les collectivités territoriales. De son côté, l'ordonnance du 4 mai 2012 portant extension et adaptation de la stratégie nationale pour la mer et le littoral dans les collectivités d'outre-mer, repose sur quatre axes : observation et repérage des territoires à risque, élaboration de stratégies, recomposition spatiale, modalités de financement. Au cours des années 2012 à 2015, une certaine latence est observée. En 2013 et 2014, de fortes tempêtes rappelant l'épisode Xynthia se sont produites. Le 22 janvier 2015, le comité national de suivi pour la mise en oeuvre de la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte, dit « comité stratégique », que j'ai le plaisir de présider avec Chantal Berthelot, a été installé. Enfin, du 30 novembre au 12 décembre de la même année, la COP21 s'est déroulée à Paris. Elle a mis l'accent sur le changement climatique et la nécessité d'agir. Pour la première fois, une partie de ses travaux a été consacrée aux littoraux.
Depuis, le comité stratégique a travaillé avec des élus, des scientifiques et des associations. Le 18 octobre 2015, il a remis son rapport à la ministre chargée du développement durable et de l'énergie. Ce document comportait deux parties : la première, revenant à Chantal Berthelot, portait sur les connaissances ; la seconde sur la stratégie territoriale. Dans sa première partie, le rapport fait diverses propositions : l'une d'entre elles a abouti à la première cartographie nationale de l'érosion – une seconde carte, enrichie de données plus récentes, sera bientôt publiée. Un réseau des observatoires du recul de trait de côte est en train d'être mis en place, qui affinera la connaissance des données relatives à l'aléa. Par ailleurs, une série d'évaluations des enjeux est en cours, qui constituera le socle des stratégies territoriales.
Dans ce dernier domaine, nos travaux ont porté sur le recensement des bonnes pratiques et sur les difficultés que rencontrent les territoires sensibilisés à la question. Nous avons procédé à l'analyse des expérimentations conduites en matière de relocalisation. Nous avons aussi pu identifier les obstacles s'opposant à la mise en oeuvre du repli stratégique par ou pour les communes. Parallèlement à ces travaux, nous avons commencé à fournir aux communes des informations au sujet de la gestion du recul du trait de côte.
Les principaux objectifs poursuivis par cette proposition de loi consistent en premier lieu à lever les obstacles qui s'opposent à la prise en considération du recul du trait de côte, à étudier la temporalité propre au phénomène, ainsi que les risques et conséquences qu'il présente pour l'aménagement du territoire ; en second lieu, à donner les premières orientations législatives afin de déterminer un cadre opérationnel à l'intention des collectivités locales. Il s'agit de premiers outils qui devront être complétés par la suite.
Je ne nie pas que ce texte soit assez technique, mais son caractère politique ne doit pas être négligé. À cet égard, qu'il me soit permis de citer Alain Cousin, qui considérait en 2011 que : « ce sujet, qui met en relation des problématiques d'urbanisme, d'aménagement du territoire, de gestion des écosystèmes côtiers, de prévention des risques, de politiques foncières ou de gestion du domaine public maritime est au contraire un sujet éminemment politique, car il engage, par les aménagements que nous réalisons aujourd'hui sur le littoral, les générations futures ». C'est là ce qui constitue l'essence de cette proposition de loi.
Le chapitre Ier, composé d'un article unique, concerne les politiques d'anticipation. Il fixe un cadre juridique à la reconnaissance de l'érosion au regard de l'inondation. Il reconnaît les stratégies nationales, régionales et locales, et favorise leur meilleure articulation.
Le chapitre II, qui comprend les articles 2 à 8, définit le trait de côte et permet de mieux déterminer les risques dans les plans de prévention des risques naturels (PPRN). La possibilité d'aménagement d'une zone intermédiaire, dite zone d'autorisation d'activité résiliente et temporaire (ZAART) est ouverte. Aujourd'hui, les PPRN comportent une zone rouge, à l'intérieur de laquelle aucune construction n'est possible, et une zone bleue, où toutes les opérations peuvent être réalisées, au risque de ne pas être toujours adaptées. Ce zonage intermédiaire reconnaît le recul du trait de côte, prend en compte sa temporalité, susceptible de s'étendre de vingt à cent ans, permet la prise en compte les spécificités de l'érosion côtière et du risque induit, ainsi que la réalisation de l'aléa à court, moyen ou long terme. La ZAART favorise la valorisation des stratégies locales, en encourageant les collectivités concernées à les définir. La ZAART s'inscrira obligatoirement dans un PPRN, et, sous le contrôle du préfet, obéira à un règlement spécifique. Elle permettra enfin à la puissance publique d'acquérir plus facilement des biens.
Par ailleurs, sont également définies les zones de mobilité du trait de côte (ZMTC). Actuellement, les zones rouges ne concernent que l'interdiction des constructions, sans prendre en considération la vulnérabilité naturelle des écosystèmes. Le rôle de la ZMTC consiste à définir un périmètre de protection des écosystèmes, par exemple en interdisant à des propriétaires privés de bâtir des ouvrages de défense contre la mer, susceptibles de nuire au trait de côte avant ou après leur propriété. Toutefois, ces ouvrages de protection sont nécessaires en certains endroits : c'est la ZMTC ; elle permet aux entités compétentes en matière de gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (GEMAPI) de décider de leur réalisation. Je précise que, le mois dernier, une réponse du ministère de l'écologie a confirmé cette nouvelle compétence en matière d'érosion.
Il est encore prévu d'apporter une meilleure information sur les risques dans les documents d'urbanisme.
Le chapitre III, composé des articles 9 à 14, encourage le développement durable des côtes. De nouveaux outils sont mis à la disposition des acteurs, dont le bail réel immobilier littoral (BRILi). Aujourd'hui, le PPRN permet la création d'une ZAART afin de faciliter les acquisitions ainsi que la prise en compte du trait de côte. Par ailleurs, une zone de mobilité confère aux entités chargées de la GEMAPI une compétence leur permettant de mieux protéger les écosystèmes et de se prononcer sur la construction d'ouvrages. Il faut arriver à la gestion globale de cette zone, et c'est pourquoi il est proposé de créer ce BRILi.
L'acquisition de biens par la puissance publique, dont la commune est le bailleur, est donc facilitée. Afin d'éviter les friches ou la désertification de ces zones, la commune pourra céder la propriété temporaire d'un bien à un preneur, lui concédant ainsi un droit réel portant à la fois sur le terrain et sur la construction, grâce à ce droit, le preneur aura le loisir de vivre sur le terrain, de l'exploiter, comme il le ferait s'il en était propriétaire, en le louant avec un bail d'habitation ou en l'exploitant par un bail commercial. Il a également la possibilité de l'hypothéquer, de céder son droit et de le transmettre. En contrepartie, il paie un loyer à la collectivité, et s'acquitte des impôts et taxes comme un propriétaire.
En raison de la particularité du risque, l'article 12 prévoit toutes les conditions dans lesquelles le BRILi peut s'exercer : qui est propriétaire des constructions, qui peut en prévoir de nouvelles, qui doit maintenir en état – ce sera souvent le preneur –, les mentions à prévoir selon que le preneur conclut un bail d'habitation ou un bail commercial, et qui détruit en cas de survenue du risque.
Le chapitre III aborde également la question de la décote pour risque, ainsi que l'encouragement financier du développement durable sur l'ensemble du littoral.
Les amendements que j'ai déposés tendent principalement à garantir la cohérence entre les différentes stratégies et les divers documents d'urbanisme ainsi qu'à conférer une place particulière au schéma régional d'aménagement et de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET). Ils visent encore à mettre en place des établissements publics fonciers, et introduiront un certain nombre d'exonérations fiscales.
Cette proposition de loi représente la concrétisation des quarante mesures proposées par le comité de suivi de la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte, mis en place en 2015 et dont les propositions visent à adapter les territoires littoraux au changement climatique. Je souhaite donc tout d'abord saluer le travail accompli depuis un an par le comité de suivi.
Nos 11 millions de kilomètres carrés de littoral constituent un véritable atout pour la France. Notre devoir est de les préserver au mieux des risques qui les menacent. En ce sens, si elle est souvent décriée compte tenu de son manque de souplesse, la loi du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite loi Littoral, a quand même permis de protéger notre littoral de façon exemplaire.
Élu du littoral, je constate régulièrement que le recul de côte devient un véritable risque naturel, qui doit faire l'objet d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles. Mais je suis très réservé sur ces textes quelque peu parisiens, qui appliquent les mêmes mesures à l'ensemble du littoral, alors que chacune de nos côtes est différente. Les plans de prévention contre les risques de submersions marines imposés de façon identique à l'ensemble du littoral français à la suite de la tempête Xynthia de février 2010 ont des effets désastreux, économiquement parlant, pour des littoraux qui sont bien différents de celui qui a été frappé en Vendée. Dans la circonscription de Saint-Malo et de la baie du Mont-Saint-Michel, où la mer ne cesse de reculer, nous sommes extrêmement contraints par des mesures de protection, alors que nous savons très bien que, en raison de l'avancée du trait de côte, les risques évoqués ne se produiront vraisemblablement jamais. Vous comprendrez dès lors mes réserves sur un nouveau texte qui viendrait aggraver ces contraintes, même si je suis parfaitement conscient qu'aujourd'hui des risques existent en de nombreux endroits.
En outre, l'application de certaines des mesures proposées suscite quelques interrogations. L'article 3 prévoit ainsi que les plans de prévention introduisant les ZAART et les ZMTC seront identifiés par le préfet. Il pourra, dans les ZAART, imposer des contraintes de construction temporaire ou des garanties financières de démolition au cas où le risque de recul de côte se réaliserait. Les ZMTC lui donnent la possibilité d'interdire tout ouvrage de défense contre la mer, dès lors établi en dehors de l'exercice de la compétence de la GEMAPI.
Or, la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations sont des compétences confiées aux intercommunalités par les lois de décentralisation du 27 janvier 2014 et du 7 août 2015, à compter du 1er janvier 2018, avec possibilité d'anticiper dès maintenant. Un certain nombre d'intercommunalités, comme celle à laquelle j'appartiens, ont d'ailleurs déjà pris la compétence GEMAPI, se substituant ainsi aux actions préexistantes des collectivités territoriales et de leurs groupements, actions qui étaient jusqu'alors facultatives et non uniformément présentes sur les territoires exposés au risque d'inondation ou de submersion marine. Je souhaiterais que la rapporteure précise le caractère facultatif ou obligatoire, les compétences et les pouvoirs réels du préfet par rapport aux intercommunalités dans la détermination de ces deux zonages ainsi que l'exercice des prérogatives y afférentes.
Une autre problématique réside dans le financement de la prévention et de l'indemnisation des dommages. L'article 13 prévoit le maintien temporaire du fonds de prévention des risques majeurs pour les appropriations de biens liées aux mouvements de terrain côtiers. Il prévoit également, dans le cadre d'un bail immobilier littoral, le financement des pertes relatives à un recul de côte ou le financement de la part d'acquisition de biens exposés à un risque inférieur à dix ans. Or, au plus tard au 1er janvier 2022, le fonds de prévention ne prendra plus en charge l'appropriation des biens soumis au risque du recul de trait de côte.
Tout cela nous semble complexe, sujet à interprétation et à des risques de contentieux. Je souhaiterais donc obtenir des précisions sur cet article.
La proposition de loi portant adaptation des territoires littoraux au changement climatique a pour objet de répondre au besoin de préservation des espaces et de sécurisation des populations, tout en tâchant d'organiser les conditions du maintien du dynamisme et du développement durable des côtes, ce qui, compte tenu des menaces, est très louable : personne n'a oublié les images catastrophiques de la tempête Xynthia, à La Faute-sur-Mer et dans d'autres communes, en 2010. Il est de notre devoir de prévenir, autant que faire se peut, de tels phénomènes.
La limite entre la terre et la mer, appelée « trait de côte », évolue chaque année, et de nombreuses côtes reculent du fait de l'érosion. Il convient d'apporter des réponses à ce phénomène. Celles qui nous sont proposées aujourd'hui viennent après de nombreux travaux sur le sujet, qu'il convient de saluer. Toutefois, je perçois deux défauts dans les dispositifs proposés. Le premier réside dans la préférence réservée aux préfets au détriment des élus. Ce sont les préfets, en effet, qui devront déterminer les contraintes et conditions de la constructibilité des zones menacées. Le second a trait au financement. C'est malheureusement là une faille souvent observée dans les projets et propositions de loi de cette majorité. Il ne semble pas qu'une étude d'impact ait été menée, et l'on ne connaît donc pas l'ampleur des charges imputées au Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM).
Pour ces deux raisons, je m'abstiendrai sur l'adoption de ce texte.
Je suis élu du Vaucluse, département qui n'est pas côtier, mais appartient toutefois à une région qui a été frappée par les conséquences du changement climatique, comme l'inondation du littoral. Ces phénomènes posent la question des activités humaines sur le bord de mer.
Je salue le travail qui nous est soumis, car il fait preuve de la volonté d'établir une cohérence entre les dispositifs, au lieu de se borner à un saupoudrage de petites mesures isolées. Le souci de prendre en compte le problème de l'adaptation des territoires littoraux au changement climatique est donc bien réel.
Toutefois, s'il est vrai que certains littoraux sont exposés, certaines statistiques estimant entre un quart et 45 % la part du littoral français concerné, quelque 10 % de nos côtes « engraissent ». Ainsi la Méditerranée est-elle assez stable entre l'Espagne et l'Aude. Ensuite, à partir de l'Aude et en allant vers l'est, le phénomène d'érosion varie en fonction de la nature des sols et de la situation géographique. Je m'interroge donc sur l'opportunité qu'il peut y avoir à proposer un outil de portée générale, alors que le problème ne concerne pas tous les territoires côtiers.
Au-delà de cette proposition de loi, j'observe que la France est friande des zonages, plans et stratégies. Dans la région de Provence-Alpes-Côte d'Azur, nous nous débattons déjà, de réunion en réunion, avec divers schémas instaurés par la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe). Ces schémas ne sont d'ailleurs pas toujours efficaces : ils sont très beaux lorsqu'on les adopte, mais leur mise en oeuvre se heurte parfois à des problèmes d'appropriation et de réalisation concrète.
Par ailleurs, en un siècle, le niveau des mers va augmenter de 26 à 55 centimètres, selon les estimations. Nous savons également que, si les banquises venaient à fondre, le niveau des mers pourrait augmenter de 7 mètres. L'outil qui nous est proposé est-il de long terme, au regard de la nature des problèmes à venir ? Ne faudrait-il pas adopter des mesures plus radicales ? Si nous devons être confrontés à une énorme élévation du niveau des mers, vos propositions ne paraîtront pas suffisamment ambitieuses. Les dispositions que vous proposez sont-elles susceptibles d'évoluer ? Dans la mesure où nous ignorons quelle sera effectivement l'élévation du niveau de la mer, avez-vous pris en compte la divergence des scénarios ? Est-il bien raisonnable d'adopter une loi susceptible d'être dépassée dans dix ou quinze ans par une accélération du changement climatique ?
Je souhaite saluer Mme la rapporteure, qui est une personne modérée, ce qui est une bonne chose, car ce texte est très important. Il nous est soumis peu de temps après l'adoption de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) et celle de la loi pour l'économie bleue. Il aura des conséquences importantes pour certains territoires, mais elles ne seront pas analogues pour tous nos littoraux, qui sont très divers.
Tout le monde partage cette volonté d'anticiper les conséquences du changement climatique. Après les épreuves que nous avons connues, nul ne pourra prétendre qu'il ne savait pas. Aussi nous revient-il de légiférer afin de rendre la réglementation de notre urbanisme plus contraignante lorsque cela s'avère nécessaire.
Cependant, trois points me semblent insuffisamment développés dans la proposition de loi. Le premier est la répartition des compétences. L'État conserve-t-il toute sa responsabilité ? Les communes ont-elles encore un rôle à jouer ou tout revient-il aux communautés de communes, voire aux régions pour des espaces naturels sensibles relevant à la fois des communes et des départements, ou même des régions ?
S'agissant de la protection, il ne faut pas sous-estimer le fait que l'homme peut l'améliorer et réhabiliter ce qui a été dégradé. Cet aspect me paraît insuffisamment développé.
Enfin, il faut conserver à l'esprit que nos prescriptions sont susceptibles d'avoir une incidence forte sur l'économie. Aussi quelques études d'impact ne seraient-elles pas inutiles. Ma circonscription comprend Carnac, Belle-Île-en-Mer et Quiberon, zones très diverses sur lesquelles le moindre PPRN a des conséquences économiques très fortes.
Il serait malvenu de ne pas prendre en compte la réalité de l'érosion et du recul du trait de côte. Jusqu'à présent, on a beaucoup parlé d'inondations et de submersion, mais on a toujours fait l'impasse sur ce phénomène. Or, tous les territoires sont touchés à des degrés divers par le recul du trait de côte, qui est scientifiquement analysé et modélisé. Une première carte nationale, prenant en compte l'ensemble du phénomène, a déterminé un critère d'érosion, mais les données utilisées à l'époque commencent à dater et le document sera actualisé au début du mois de janvier prochain. Je vous invite à consulter cette carte : vous constaterez que le recul du trait de côte est important sur tout le territoire national, et assez avancé sur certains de nos littoraux.
Jusqu'à présent, notre pratique de la protection consistait à agir dans l'urgence. C'était fort coûteux pour les collectivités et la puissance publique, mais aussi coûteux en vies humaines. De façon plutôt passive, nous nous bornions à croiser les doigts devant l'aléa. Il me semble que l'épisode Xynthia et les tempêtes de 2013 puis 2014 doivent nous inciter à en finir avec l'immobilisme. C'est pourquoi, de façon très professionnelle et scientifique, le comité stratégique a mis en évidence ce phénomène à fort risque, et qui, dans beaucoup de territoires, s'accentue plus vite que nous ne l'avions prévu. Aussi cette proposition de loi s'attache-t-elle aujourd'hui à organiser la prévention – qui n'exclue pas la prévention – afin, notamment, de moins solliciter les finances publiques, plutôt que d'attendre systématiquement la catastrophe, l'état d'urgence et la réplique, sans adopter les mesures de structuration nécessaires à moyen et long terme.
Certains d'entre vous ont par ailleurs évoqué la prédominance du préfet sur les collectivités. Je considère qu'il s'agit plutôt de l'inverse, et des amendements viendront préciser le rôle des collectivités locales. L'objet de ce texte est précisément d'encourager les stratégies locales et régionales, qui sont dans la main des collectivités. En toute connaissance de cause, et au regard de la spécificité de leur territoire, elles pourront définir les zones dans lesquelles elles souhaiteront intervenir, ainsi que la façon dont elles le feront.
Nous ne pourrons pas nous affranchir du contexte créé par le risque et sa prévention. L'article L. 562-1 du code de l'environnement définit le rôle des préfets dans le cadre des plans de prévention des risques naturels. Ainsi, devant un tel aléa, nous ne pouvons qu'agir dans le cadre d'un PPRN. C'est pourquoi le préfet sera à vos côtés afin de faire concorder les stratégies déterminées par le PPRN avec les stratégies locales ou régionales. En tout état de cause, le plan d'action qui en résultera procédera bien de la vision des responsables locaux et des particularités des territoires.
Je concède qu'une première génération de PPRN ne correspond plus réellement à la réalité constatée dans nos territoires et que, de ce fait, la tendance est plutôt à les éviter qu'à les solliciter. Aujourd'hui, ces plans n'offrent pas assez d'outils propres à permettre aux collectivités de réaliser leur protection ou leur aménagement en fonction de la perception qu'elles ont de leurs territoires.
Cette proposition de loi apporte une nouvelle génération de PPRN, avec des outils qui, à ce jour, n'étaient pas à notre portée. C'est pourquoi ce zonage intermédiaire ne laisse plus les collectivités bloquées en zone rouge, et les aidera à aménager leur territoire en tenant compte du critère de l'érosion. Ce dispositif ne constitue pas un élément supplémentaire posé au sommet de la pile des mesures déjà existantes : il doit être regardé comme une zone bleue destinée à vous permettre d'agir dans le secteur que vous aurez choisi, en prenant en compte l'évolution du trait de côte, ainsi que la temporalité caractéristique de l'érosion. Il ne s'agit pas de tout geler, de faire des friches et de faire fuir la population ou les activités commerciales ou touristiques, mais d'avoir conscience du risque et du temps nécessaire pour s'y préparer. Ce temps doit donc être mis à profit afin d'anticiper le risque et de préserver la vie dans nos territoires.
Tous les pronostics montrent que 4 millions de personnes supplémentaires sont attendues dans les départements littoraux d'ici à 2040. L'attractivité des littoraux est indéniable. Ce texte ne vise pas à décourager la population d'aller vers les littoraux, pas plus qu'il n'introduit de contraintes supplémentaires : il met en place des outils dont vous ne disposez pas actuellement.
Il serait dommage de définir une stratégie nationale et des stratégies locales, d'un côté, mais de laisser la chaise vide pour coordonner ces différentes stratégies, de l'autre. Des communes sont acculées, mais n'ont pas les outils pour agir : aidons-les à franchir le pas. Je pense aux communes de Soulac, avec l'immeuble « Le Signal », et de Lacanau en Gironde, ainsi qu'à des communes des Landes… Cette proposition de loi continuera à se construire au fil des véhicules législatifs.
D'après les estimations, notamment celles réalisées dans le cadre du rapport d'information sur Xynthia réalisé au Sénat ou celles établies plus récemment dans le cadre d'un groupe de travail que j'ai animé, 10 000 logements seront concernés d'ici à 100 ans si nous ne faisons rien. Cela laisse aux élus une marge de manoeuvre pour définir des zones prioritaires.
Encore une fois, n'y voyez aucune contrainte : cette proposition de loi n'introduit pas d'obligation, elle vise à éviter que l'activité économique ne soit fragilisée. Dès lors qu'on parle de risque, il faut un cadre minimal : c'est le code de l'environnement et les PPRN.
Enfin, contrairement à ce que vous pensez, les ZAART permettront plus de souplesse en donnant aux collectivités la possibilité de passer des baux, de percevoir des loyers et d'aménager leur territoire grâce à un préfinancement.
La Commission en vient à l'examen des articles de la proposition de loi.
Chapitre Ier
Élaborer des politiques d'anticipation du changement climatique sur le littoral
Article 1er (articles L. 321-13 A, L. 321-13-15 et L. 321-13-16 [nouveaux] et L. 321-14 du code de l'environnement) : Stratégie nationale et stratégies locales de gestion intégrée du trait de côte
La Commission est saisie de l'amendement CD1 de la rapporteure.
Il s'agit de supprimer les alinéas 2 et 3, devenus inutiles depuis l'adoption de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte successivement l'amendement rédactionnel CD59, l'amendement de correction de références CD2 et l'amendement de cohérence rédactionnelle CD3 de la rapporteure.
Puis elle est saisie de l'amendement CD61 rectifié de la rapporteure.
Il s'agit de renforcer la cohérence entre la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte et la stratégie nationale de gestion des risques d'inondations.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte successivement l'amendement de précision CD51 et l'amendement rédactionnel CD4 de la rapporteure.
Elle passe ensuite à l'amendement CD60 de la rapporteure.
Cet amendement vise à aligner le délai de révision de la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte sur la durée de révision de la stratégie nationale de la mer et du littoral.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement CD62 de la rapporteure.
Cet amendement vise à remettre en forme la section 7 du chapitre Ier du titre II du livre III du code de l'environnement.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte successivement les amendements de coordination CD5 et CD7 de la rapporteure.
Puis la Commission est saisie de l'amendement CD63 de la rapporteure.
Cet amendement vise à rendre compatibles les stratégies locales de gestion intégrée du trait de côte avec les objectifs de moyen et de long termes en matière de gestion du trait de côte prévus à l'article L. 321-14 du code de l'environnement.
La Commission adopte l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CD64 de la rapporteure.
Cet amendement crée un lien entre les dispositions de l'article 1er sur les stratégies locales et l'article 3 sur la délimitation possible par les plans de prévention des risques naturels de zones spécifiques dites ZART. Il est nécessaire de faire précéder toute décision de plans de prévention, décidés par le préfet, d'une délibération de la collectivité territoriale.
La Commission adopte l'amendement.
Elle en vient à l'amendement CD52 de la rapporteure.
Cet amendement vise à renforcer la cohérence entre les documents élaborés par les régions et la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 1er ainsi modifié.
Chapitre II
Identifier le risque de recul du trait de côte
Article 2 (section 1 du chapitre VII du titre VI du livre V et article L. 567-1 [nouveaux] du code de l'environnement) : Définition du recul du trait de côte
La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD6 et CD8 de la rapporteure.
Puis elle est saisie de l'amendement CD57 de la rapporteure.
Cet amendement vise à supprimer l'alinéa 8 : la détermination du risque de recul du trait de côte relèvera des plans de prévention.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 2 ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 2. Article 2 bis : Indemnisation des interdictions définitives d'habitation ou d'utilisation des lieux résultant d'un risque de recul du trait de côte.
La Commission étudie l'amendement CD85 de la rapporteure.
En janvier 2014, l'immeuble « Le Signal », menacé par l'océan, a été évacué sur la base d'un arrêté de péril. L'indemnisation proposée aux copropriétaires était peu significative par rapport à la valeur de leur bien. Il faut mettre fin à cette situation délicate : les héritages sont bloqués lorsque les personnes décèdent, les copropriétaires vieillissants ne peuvent plus intégrer leur logement et sont obligés de payer des maisons de retraite.
Cet amendement vise donc à insérer, après le deuxième alinéa de l'article L. 561-1 du code de l'environnement, un alinéa ainsi rédigé : « Ces dispositions s'appliquent également aux cas dans lesquels le risque du recul du trait de côte est la cause d'une interdiction définitive d'habiter ou d'utiliser les lieux. Ces cas donnent alors lieu à une indemnisation dans les conditions mentionnées à l'article L. 561-3 même en l'absence d'expropriation. »
Ainsi, lorsque la puissance publique décidera de prendre un arrêté de péril et d'exproprier les habitants, les propriétaires pourront être indemnisés comme il se doit.
La Commission adopte l'amendement.
Article 3 (article L. 562-1 du code de l'environnement) : Création de zones d'activité résiliente et temporaire en cas de risque de recul du trait de côte
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CD53 de la rapporteure.
Puis elle examine l'amendement CD74 de la rapporteure.
Cet amendement renvoie aux plans de prévention le soin de fixer le risque de recul du trait de côte et précise que les cultures marines peuvent rester implantées dans les zones de mobilité du trait de côte. Ainsi, la préoccupation économique est prise en compte.
L'exposé sommaire fait référence aux « aménagements conchylicoles », mais pas l'amendement lui-même. Il y a-t-il un problème d'interprétation ?
L'amendement mentionne la culture marine, qui comprend l'ensemble des activités de conchyliculture et d'aquaculture.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 3 ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 3. Article 3 bis [nouveau] (article L. 562-4-1 du code de l'environnement) : Révision d'un PPRN en cas d'élaboration d'une stratégie locale de gestion de trait de côte
La Commission examine l'amendement CD73 de la rapporteure.
Cet amendement vise à ce que l'élaboration d'une stratégie locale de gestion intégrée du trait de côte, dès lors qu'elle prévoit la création ou la modification d'une ZART, soit prise en compte par le préfet afin que le plan de prévention des risques naturels prévisibles préexistant soit révisé.
Les auditions que j'ai menées m'ont convaincue de la nécessité de prévoir un dispositif analogue lorsque n'existe pas de plan de prévention des risques ou lorsque celui-ci est en cours d'élaboration. C'est la raison pour laquelle je préparerai un amendement en ce sens pour la séance publique.
La Commission adopte l'amendement.
Article 4 (article L. 563-2 du code de l'environnement) : Prise en compte des risques spécifiques au littoral dans les documents d'urbanisme
La Commission est saisie de l'amendement CD75 de la rapporteure.
Cet amendement prévoit que, en l'absence d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles, les documents d'urbanisme tiennent compte de l'indicateur de recul du trait de côte.
La Commission adopte l'amendement.
L'article 4 est ainsirédigé.
Article 5 (article L. 132-2 du code de l'urbanisme) : Informations sur les risques naturels prévisibles
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CD76 de la rapporteure.
L'article 5 est ainsi rédigé.
Article additionnel après l'article 5. Article 5 bis [nouveau] (article L. 125-5 du code de l'environnement) : Information du preneur d'un bien sur la date de survenance du risque de recul du trait de côte
La Commission étudie l'amendement CD80 de la rapporteure.
En cas de risque de retrait du trait de côte, l'information du bailleur ou de l'acquéreur d'un bien situé dans une zone d'activité résiliente et temporaire sera ainsi complétée par la date de survenance du risque de recul du trait de côte.
La Commission adopte l'amendement.
Article 6 (article L. 152-7 du code de l'urbanisme) : Opposabilité des plans de prévention des risques naturels aux plans locaux d'urbanisme et aux servitudes d'utilité publique
La Commission adopte l'article 6 sans modification.
Article 7 (article L. 131-1 du code de l'urbanisme) : Compatibilité des schémas de cohérence territoriale avec les objectifs de gestion du trait de côte
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CD77 de la rapporteure.
L'article 7 est ainsi rédigé.
Article 8 (article L. 131-4 du code de l'urbanisme) : Compatibilité des plans locaux d'urbanisme et des documents en tenant lieu avec les objectifs de gestion du trait de côte
La Commission adopte l'amendement de cohérence rédactionnelle CD58 de la rapporteure.
Puis elle adopte l'article 8 ainsi modifié.
Après l'article 8
La Commission examine l'amendement CE71 de M. Gilles Lurton.
Cet amendement est issu des préconisations du rapport sur la loi Littoral de nos collègues sénateurs Jean Bizet, du groupe Les Républicains, et Odette Herviaux, du groupe Socialiste et républicain. Il propose de permettre une urbanisation par comblement des dents creuses des hameaux situés dans les communes littorales. Il permettra ainsi d'assouplir la loi Littoral en veillant à ce que cette possibilité ne soit pas ouverte aux hameaux situés dans les espaces proches du rivage et que le comblement des dents creuses n'ouvre pas droit ultérieurement à une extension de l'urbanisation.
J'entends bien les remarques des élus ou encore la volonté d'une certaine forme de régionalisation de la loi Littoral… Néanmoins, cette disposition n'a pas sa place dans cette proposition de loi qui, face à un risque identifié, vise à mettre en place des outils nouveaux afin de préserver des aléas les biens et les personnes.
Ce n'est pas qu'une question régionale, même si la Normandie, la Bretagne et la Vendée comportent de nombreux hameaux, espaces urbanisés qui ne sont pas forcément proches du littoral. Après la loi ALUR, la loi agricole, la loi pour l'économie bleue, il faut bien trouver un texte pour accrocher cette disposition, unanimement soutenue par les parlementaires, sachant que plus personne ne souhaite modifier la loi Littoral. J'ai moi-même déposé une proposition de loi sur les dents creuses, cosignée par de nombreux députés et que le Sénat va reprendre.
Un travail est actuellement mené en Bretagne par les services de l'État et les élus sur les caractéristiques des hameaux et la typologie des villages bretons. Cette concertation vous donnera sans doute satisfaction.
La loi Littoral permet l'extension des villages, mais pas l'extension par densification des hameaux. Ma proposition permet la densification pour urbaniser l'intérieur des hameaux, quelquefois situés à 15 kilomètres du rivage, sans consommation d'espace.
L'amendement n'est pas totalement étranger à la proposition de loi, qui traite tant du littoral que des constructions. Nous avons connu des textes où il y avait à boire et à manger, « du charbon, de l'acier, des pommes et des poires », sans que cela ne choque personne !
La loi Littoral présente un défaut puisque, en application de la jurisprudence, ce qui est autorisé pour les villages ne l'est pas pour les hameaux. Loin de fragiliser la loi Littoral, notre proposition vient corriger ce défaut. Elle n'encourage pas l'urbanisation de nouveaux espaces qui pourraient être menacés par le recul du trait de côte, mais permet de densifier des hameaux. Elle règle donc, de manière pragmatique, un problème, certes très localisé, mais qui se pose depuis des années. Or, il existe un consensus politique sur cet objectif d'intérêt général qui renvoie à des espaces connexes, voire superposés. Il serait donc dommage de ne pas voter cet amendement, quitte à ce que, éventuellement, le Conseil constitutionnel le retoque ensuite, s'il juge qu'il s'agit d'un cavalier,
La philosophie de la proposition de loi est l'organisation de l'existant, et non le rajout d'un risque au risque par la densification. En l'occurrence, la ZART apporte la souplesse nécessaire.
Cet amendement ne rajoute pas un risque au risque. Il permet d'urbaniser des zones pour la plupart éloignées du trait de côte, et donc d'améliorer la sécurité des populations actuelles et des générations futures.
Certes, la demande de revisiter la loi Littoral est très ancienne, mais cet amendement n'a rien à voir avec la proposition de loi. Au surplus, il introduirait de la confusion dans un texte complexe en créant des procédures qu'il faudra s'approprier.
Il faut laisser à cette proposition de loi sa vocation, à savoir l'adaptation au changement climatique, notamment à l'érosion de nos côtes.
Une récente circulaire du ministère demande aux présidents de schémas de cohérence territoriale (SCoT) de s'appuyer sur la loi Littoral pour l'emplacement des hameaux. Le problème est que, dans certains secteurs, des terrains de seulement 1 000 mètres carrés, voire de 500 mètres carrés, pourraient représenter une densification. En outre, certains hameaux sont à plus de 100 mètres de la côte, et certaines communes ont un rétro-littoral très important. Enfin, de nouvelles communes sont créées par des collectivités, et certaines de ces communes ne sont pas toujours littorales.
Vouloir améliorer la loi Littoral « à la sauce régionale » ne serait pas très bon, car cela poserait des difficultés au regard de la loi ALUR, sans compter l'absence de cohérence entre territoires. Il vaut donc mieux l'adapter, mais avec parcimonie, car c'est elle qui nous a permis d'avoir des côtes protégées et d'en faire un atout économique.
La Commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CD72 de M. Philippe Le Ray.
L'agriculture est concernée par la loi Littoral, mais une dérogation pour l'élevage permet la discontinuité de l'urbanisation. Cet amendement propose de permettre les autorisations de construction pour ce qui ne concerne pas l'élevage, c'est-à-dire pour les serristes, les pépiniéristes, les producteurs de légumes, etc., en dehors de la bande littorale des 100 mètres. En effet, d'un côté, les textes veulent favoriser la consommation de proximité, mais, de l'autre, des règles d'urbanisme ne le permettent pas. Ainsi, vous autorisez le maraîchage, sauf sous serre. Or, les serres permettent d'éviter d'employer certains intrants, favorisent la biodiversité et la production écologique. C'est ainsi que, sur le littoral breton, vendéen et normand, les maraîchers ne peuvent pas travailler dans de bonnes conditions ni construire des hangars de stockage pour les produits agricoles, si bien qu'ils sont obligés de s'installer soit dans des zones d'activité économique, soit dans l'agglomération.
Je comprends l'objectif que vous poursuivez, monsieur Le Ray. Le texte répond à vos préoccupations s'agissant de la culture marine. Dans le domaine agricole, l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme auquel vous faites référence porte sur l'extension de l'urbanisation, mais n'évoque pas spécifiquement les constructions et les installations agricoles ; de nouvelles constructions seront autorisées dans des zones à risque, mais votre amendement ne garantit pas leur nature agricole.
Vous avez en partie raison, madame la rapporteure, mais vous méconnaissez une partie de la réalité de certains littoraux. Des maraîchers travaillent à proximité du rivage et ne peuvent pas produire dans de bonnes conditions à cause des limites fixées par le droit de l'urbanisme. La plupart d'entre eux doivent stocker leurs produits dans des endroits éloignés de leurs serres. Ainsi, un producteur de sel de ma région doit entreposer son sel à deux kilomètres de l'endroit où il l'élabore. Personne ne délivre de permis pour ces producteurs-là ! Mon amendement est simple et vise à autoriser des constructions.
Je comprends sa simplicité, mais l'article L. 121-8 s'avère trop généraliste et ne cible pas les constructions agricoles ; en outre, si la profession agricole était si gênée par le texte, elle aurait pu répondre à notre invitation d'audition.
En l'état actuel, on ne peut pas accepter votre amendement, qui n'entre pas dans la philosophie du texte.
Les représentants agricoles n'ont pas souhaité être auditionnés, mais ce n'est pas une raison pour les punir ! Les représentants de la Nation peuvent déposer des amendements issus de leur expérience. Celui-ci est justifié, et on peut faire confiance à notre collègue Philippe Le Ray lorsqu'il fait état de la situation d'un producteur de sel.
Vous avez présenté le texte comme éminemment pragmatique et consensuel, madame la rapporteure, mais vos réponses donnent l'impression de vouloir évacuer l'activité humaine en zone littorale. Il convient certes de prendre en compte le risque et la modification du trait de côte liés au changement climatique, mais cette offensive environnementale ne doit pas aboutir à une glaciation du littoral provoquée par des contraintes de plus en plus lourdes chassant les constructions et les activités humaines ; il ne faut pas le transformer en grande zone de protection biologique ! Lorsque vous invoquez la philosophie du texte, vos propos sont ambigus, car ils ne servent pas le consensus politique. L'amendement de M. Philippe Le Ray est pragmatique et colle à l'esprit de la proposition de loi.
Monsieur Julien Aubert, relisez la proposition de loi et vous verrez qu'elle est porteuse de souplesse. La ZART et le BRILi permettront aux activités et aux commerces de rester implantés longtemps, dans un cadre où le risque sera pris en compte et où des garanties seront apportées. Cette proposition de loi assure une bonne gestion de l'existant, mais ferme la porte à de nouvelles constructions ; il est déjà difficile de surveiller ce qui existe, ne permettons pas de nouvelles installations !
La Commission rejette l'amendement.
Article additionnel après l'article 8. Article 8 bis [nouveau] : Information par les agents et intermédiaires immobiliers du preneur d'un bien sur le risque de recul du trait de côte
La Commission est saisie de l'amendement CD82 de la rapporteure.
Cet amendement vise à renforcer l'information des personnes acquérant ou louant un bien situé dans une zone à risque, en signalant explicitement l'existence du risque du retrait du trait de côte portant sur le bien de la transaction envisagée, dès lors que celui-ci se trouve dans une ZART. Il est impératif de ne pas tromper les futurs acquéreurs, qui doivent être mis au courant de cette menace avant la signature de l'acte notarié. C'est aux agences immobilières de transmettre cette information.
La Commission adopte l'amendement.
Chapitre III
Encourager le développement durable des territoires littoraux
Article 9 (article L. 122-1 du code de l'environnement) : Intégration des risques naturels prévisibles dans les documents d'étude d'impact
La Commission adopte l'article 9 sans modification.
Article 10 (article L. 3211-16-1 [nouveau] du code général de la propriété des personnes publiques) : Interdiction d'aliéner les immeubles du domaine privé des personnes publiques dans les zones d'activité résiliente et temporaire
La Commission étudie l'amendement CD78 de la rapporteure.
Au fil des auditions, il nous est apparu important de préciser la nature des groupements. Ainsi, nous proposons d'insérer les établissements publics fonciers et les sociétés d'économie mixte à l'alinéa 2 de l'article 10, afin de permettre à ces structures de signer des BRILi. Les établissements fonciers aident les communes, et il convient de leur faire une place dans le dispositif.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement de conséquence CD79 de la rapporteure.
Elle adopte enfin l'article 10 ainsi modifié.
Article 11 (articles L. 567-2 et L.567-3 nouveaux du code de l'environnement) : Conditions d'exercice du droit de préemption en cas de risque de recul du trait de côte
La Commission examine les amendements CD50, CD83 et CD54 de la rapporteure, qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
L'article 11 fixe les conditions de préemption dans les ZAART. Nous souhaitons que, dans le cas d'un bail réel immobilier littoral, les actes de vente indiquent l'existence éventuelle d'une préférence accordée au vendeur et les conditions de fixation de la décote ; il importe également de préciser qu'il n'existe pas de décote pour les biens affectés à un usage agricole.
La Commission adopte successivement les trois amendements.
Puis elle adopte l'article 11 ainsi modifié.
Article 12 (articles L. 567-4 à L. 567-28 [nouveaux] du code de l'environnement) : Bail réel immobilier littoral
La Commission aborde l'amendement CD10 de la rapporteure.
L'article 12 instaure le BRILi, et cet amendement définit la liste des personnes publiques qui pourront y recourir pour des biens de leur domaine privé. Les établissements chargés de mission en matière foncière, d'aménagement et de construction entrent dans cette liste.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement CD11 de la rapporteure.
Cet amendement lève une ambiguïté dans la rédaction de l'alinéa 6 de l'article 12 : c'est l'immeuble concerné et non le domaine privé de la collectivité bailleresse qui doit se retrouver dans une ZART.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements de coordination CD65 et rédactionnel CD12 de la rapporteure.
La Commission étudie l'amendement CD67 de la rapporteure.
Cet amendement précise le mode de fixation, par les parties du contrat, de la durée du bail, celle-ci devant se situer entre cinq et quatre-vingt-dix-neuf ans.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement CD14 de la rapporteure.
Il s'agit d'appliquer à la prolongation éventuelle du bail la même limite de durée que celle du bail initial.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD15 à CD19 de la rapporteure.
Elle examine ensuite l'amendement CD20 de la rapporteure.
Cet amendement vise à rendre obligatoire l'existence d'une clause de garantie financière dans les baux réels immobiliers.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD21 à CD23, CD68 et CD24 à CD27 de la rapporteure.
Elle étudie ensuite l'amendement CD70 de la rapporteure.
Cet amendement vise à obliger le preneur d'un bail immobilier à informer le bailleur de sa volonté de céder son droit à bail à un tiers.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD28 et CD69 de la rapporteure.
Elle en vient à l'amendement CD29 de la rapporteure.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD30 à CD44, CD46 et CD45 de la rapporteure.
Elle aborde ensuite l'amendement CD66 de la rapporteure.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CD48 de la rapporteure.
Elle étudie ensuite l'amendement CD49 de la rapporteure.
Cet amendement prévoit qu'un décret en Conseil d'État précisera les modalités d'application des dispositions créées par les nouveaux articles L. 567-1 à L. 567-28, introduits dans le code de l'environnement par les articles 2, 11 et 12 de la proposition de loi.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 12 ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 12. Article 12 bis [nouveau] : Régime fiscal applicable aux implantations d'entreprises signataires d'un bail réel immobilier littoral
La Commission examine l'amendement CD84 de la rapporteure.
Cet article étend l'exonération fiscale dans les ZART aux créations d'entreprises, dès lors que la structure exerce dans le cadre d'un bail réel immobilier. Nous souhaitons stimuler la signature de ces baux en apportant des garanties aux activités économiques présentes et futures.
La Commission adopte l'amendement.
Article 13 (articles L. 561-1 et L. 563-1 du code de l'environnement) : Éligibilité de l'indemnisation du recul du trait de côte au titre du « fonds Barnier »
La Commission est saisie de l'amendement CD86 de la rapporteure.
Le fonds Barnier est alimenté par des cotisations d'assurance et repose donc sur la solidarité ; il détient plus de 123 millions d'euros et doit être mobilisé pour aider les collectivités à acquérir des biens situés dans des zones où des risques sont avérés. Ce fonds doit, dans le même temps, stimuler le développement des BRILi et des ZART, si bien que nous proposons de ne plus le rendre éligible après 2022, date à laquelle le système prévu dans les ZART et dans le BRILi se déploiera pleinement. L'indemnisation prévue par le fonds Barnier ne s'appliquera aux mouvements côtiers qu'en l'absence de plan de prévention prescrit et non pas approuvé – le plan de prévention des risques naturels.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement CD88 de la rapporteure.
Afin de limiter les effets d'aubaine qui consisteraient, pour les collectivités, à attendre que les biens soient menacés dans un délai de dix ans pour réaliser des opérations d'aménagement, le présent amendement limite les possibilités d'indemnisation par l'adjonction d'une condition supplémentaire.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 13 ainsi modifié.
Après l'article 13
La Commission aborde l'amendement CD81 de la rapporteure.
L'amendement est retiré.
Article 14 : Gages
La Commission examine l'amendement CD87 de la rapporteure.
La Commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 14 est supprimé.
La Commission adopte l'ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée.
Information relative à la Commission
La commission a nommé Daniel Gibbes, rapporteur de la proposition de loi relative à l'immatriculation des navires au territoire de Saint Martin (n° 4168).
Membres présents ou excusés
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Réunion du mardi 22 novembre 2016 à 21 h 45
Présents. - M. Julien Aubert, Mme Chantal Berthelot, M. Jean-Louis Bricout, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, M. Jean-Jacques Cottel, Mme Françoise Dubois, Mme Pascale Got, Mme Viviane Le Dissez, M. Jean-Marie Sermier, Mme Suzanne Tallard
Excusés. - Mme Florence Delaunay, M. Yannick Favennec, M. Christian Jacob, M. Patrick Lebreton, M. Bertrand Pancher, M. Philippe Plisson, M. Napole Polutélé, M. Martial Saddier, M. Gilbert Sauvan, M. Gilles Savary, M. Gabriel Serville, M. Patrick Weiten
Assistaient également à la réunion. - Mme Corinne Erhel, M. Philippe Le Ray, M. Gilles Lurton