Commission élargie : finances - affaires économiques - développement durable - affaires étrangères

Réunion du 27 octobre 2016 à 15h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • forêt
  • paiement
  • vétérinaire

La réunion

Source

commission élargie

(Application de l'article 120 du Règlement)

Jeudi 27 octobre 2016

Présidence de Véronique Louwagie, secrétaire de la commission des finances et de Mme Frédérique Massat, présidente de la commission des affaires économiques

La réunion de la commission élargie commence à quinze heures.

projet de loi de finances pour 2017

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

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Monsieur le ministre, je suis heureuse de vous accueillir avec Mme Frédérique Massat, présidente de la commission des affaires économiques.

Nous sommes réunis ici cet après-midi en commission élargie afin de vous entendre sur les crédits du projet de loi de finances pour 2017 consacré à la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

La Conférence des présidents ayant reconduit les modalités d'organisation de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances, je vous rappelle les règles de nos commissions élargies : nous donnerons d'abord la parole aux rapporteurs des commissions, qui interviendront pour une durée de cinq minutes ; après la réponse de M. le ministre, les porte-parole des groupes s'exprimeront pour cinq minutes chacun ; puis, pour une durée de deux minutes, ce sera le tour de tous les députés qui le souhaitent.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des affaires économiques s'est saisie pour avis de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et, plus particulièrement, d'une part, du budget de l'agriculture et de l'alimentation, le rapporteur étant notre collègue Jean-Pierre Le Roche, et, d'autre part, du budget de la forêt, le rapporteur étant le président Chassaigne.

Les budgets de l'agriculture et de la forêt sont attendus par le monde agricole et forestier, notamment par les exploitants agricoles qui, de l'élevage à l'arboriculture, ont connu ces dernières années des difficultés de production majeures. À ces difficultés s'ajoute une situation contractuelle déséquilibrée entre les différents maillons de la chaîne agroalimentaire.

Je rappelle que la commission des affaires économiques est fortement mobilisée sur ces questions.

Il y a quelques mois, la mission d'information sur l'avenir des filières d'élevage a rendu son rapport, rédigé par M. Thierry Benoit et Mme Annick Le Loch. Les préconisations de ce rapport ont été reprises en partie par le projet de loi Sapin 2, qui apporte d'importantes améliorations à la contractualisation, dans le sens d'un renforcement du pouvoir des producteurs face à celui des distributeurs.

Plus récemment, il y a quinze jours, le projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne reconnaît la spécificité de ces territoires dans la définition des politiques agricole et forestière, et encourage le développement des activités pastorales et forestières. Il inscrit d'ailleurs dans la loi le principe des indemnités de reconnaissance des handicaps naturels.

Le projet de budget de cette mission est en forte hausse : plus 14 % en crédits de paiement. Cette progression résulte largement du transfert, à cette mission, de la compensation de la baisse de 7 points de cotisations sociales patronales. Il n'empêche que l'accent est mis cette année sur les aides à la modernisation des exploitations, sur les indemnités compensatoires de handicap naturel, sur les mesures agroenvironnementales et climatiques, et sur la poursuite du plan Ambition bio.

Le Gouvernement a annoncé en 2015 un plan d'urgence en faveur de l'élevage, étendu cette année à d'autres productions. Ce soutien conjoncturel, mis en place à travers les cellules d'urgence, se double d'un soutien structurel à l'oeuvre depuis le début de la législature. C'est l'objet du bilan établi par M. Jean-Pierre Le Roch. Les allégements de charge représentent une baisse du coût du travail de 4,7 milliards d'euros annuels, qui permet de restaurer la trésorerie des exploitations et de soutenir le redressement de leur compétitivité.

Le projet de budget concentre également son action sur la filière forêt-bois, avec un triplement des crédits du Fonds stratégique forêt-bois qui permettra la mise en oeuvre du Programme national de la forêt et du bois. Le président André Chassaigne répond, quant à lui, dans son avis, à diverses préoccupations des professionnels.

Monsieur le ministre, j'ai quelques questions à vous poser.

La première concerne le Programme national de la forêt et du bois, actuellement en phase de consultation. Sera-t-il adopté avant la fin de l'année ?

La seconde concerne le volume des allégements de charges dans le secteur agricole, qui est historique. Avez-vous déjà des éléments sur leur effet sur la compétitivité de nos exploitations ?

La dernière concerne l'installation des jeunes agriculteurs. Ces derniers s'interrogent sur la volonté du Gouvernement de mener une politique d'installation. Pouvez-vous confirmer la volonté du Gouvernement en ce domaine, et l'attention que vous portez à nos jeunes agriculteurs ?

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Plutôt que de vous accabler de chiffres, je vous renvoie à la page 31 de mon rapport. En effet, et comme je l'avais déjà fait observer les années précédentes, il faut avoir une vision globale des fonds de toutes origines – européennes, nationales, etc. – qui vont vers l'agriculture.

Grosso modo, l'ensemble des moyens affectés à l'agriculture est à peu près stable : avec une hausse de 1 %, ils passent de 20,381 milliards à 20,607 milliards. Mais cette augmentation – et c'était déjà le cas l'année dernière – est due à des allégements de charges sociales et fiscales, sur lesquelles je reviendrai. À cet égard, vous noterez que les dépenses fiscales de l'agriculture sont plutôt en régression alors que globalement, elles s'accroissent.

Venons-en au petit quart que représente, dans ces 20 milliards, la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

L'augmentation de cette année, après six années de baisse, est largement due, en réalité, à la compensation par le budget de l'État, de la réduction de 7 points de la cotisation personnelle d'assurance maladie des chefs d'exploitation récemment décidée par le Gouvernement.

Les crédits communautaires, quant à eux, qui représentent tout de même plus de 40 % des moyens, diminuent très légèrement : une trentaine de millions sur 9 milliards, ce qui est peu de chose.

Par ailleurs, et cela va faire l'objet d'une de mes questions, les dernières mesures prises à la suite de la deuxième crise, qui concernent essentiellement les céréaliers, ne sont pas budgétées.

Monsieur le ministre, je vais aller directement aux cinq questions que je voulais vous poser.

Notre agriculture a connu une crise de grande ampleur en 2015 et 2016 dans deux des principaux secteurs de production : l'élevage et les céréales. Deux plans gouvernementaux ont été retenus : le premier en juillet 2015 pour l'élevage, le second dit de consolidation et de refinancement de l'agriculture, rendu public le 4 octobre dernier. Un nombre significatif de mesures qui ont été alors retenues ne figurent pas dans le projet de loi de finances initial. Elles devraient donc figurer dans la loi de finances rectificative à venir. Pourriez-vous nous dire où vous en êtes ? Quels ont été les arbitrages et quels montants figureront en loi de finances rectificative ?

Ma deuxième question, liée à la précédente, concerne le sort de l'agriculture en difficulté. Les moyens consacrés à certaines actions telles qu'Agridiff, le Fonds d'allégement des charges (FAC) ou encore l'aide à la reconversion professionnelle, sont particulièrement réduits, faisant l'objet d'une reconduction au plus bas. Cette évolution est-elle cohérente avec la situation de grande difficulté que connaissent nombre de nos agriculteurs ? Combien avez-vous obtenu lors des arbitrages portant sur la loi de finances rectificative ?

En troisième lieu, je voudrais vous interroger sur la situation du régime complémentaire obligatoire (RCO) des chefs d'exploitation, qui fait apparaître un besoin de financement croissant et très élevé, alors même que le Gouvernement s'est engagé à garantir une évolution correcte des retraites agricoles. Comme vous le savez, les dirigeants de la Mutualité sociale agricole (MSA) nous ont expliqué qu'ils étaient en cessation de paiement entre juillet et septembre. Quelles sont donc les mesures qui seront prises pour résoudre ce problème ?

Ma quatrième question vise un problème permanent posé à notre agriculture, et que nous connaissons tous : celui de la relation totalement inégale qui existe aujourd'hui entre la distribution alimentaire et les secteurs de la production et de la transformation agricoles. La « décartellisation » du secteur de la distribution ne serait-elle pas, en définitive, l'un des moyens décisifs pour rétablir un équilibre dans ce secteur ?

Enfin, en matière de compensation des exonérations de charges sociales, le budget de l'agriculture, fin 2015, devait 74 millions d'euros à la MSA, car les crédits ouverts étaient insuffisants. En 2016, les crédits ouverts atteignent 391 millions d'euros, mais sont également insuffisants – à hauteur de 93 millions d'euros, selon les derniers chiffres. Ainsi, l'insuffisance globale est de 167 millions, soit 42 % de la dotation inscrite au budget en 2016. Avez-vous obtenu l'ouverture de ces 167 millions en loi de finances rectificative 2016 ?

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La politique de sécurité alimentaire veille, avec les professionnels responsables au premier chef, à la qualité de l'alimentation des 66 millions de Français, sans compter le secteur stratégique des exportations de produits alimentaires.

Ses moyens d'action propres sont frugaux, puisque le programme 206 ne représente, avec 506 millions d'euros de crédits de paiement, que 0,1 % du total des dépenses des trente et une missions du projet de loi de finances pour 2017. De plus ce programme 206 a fait l'objet, ces dernières années, de fortes économies budgétaires, si bien que la baisse des crédits du programme 206 (hors titre 2) a atteint 32 % en six ans – de 2009 à 2015.Elle s'est répercutée sur les effectifs,alors même que le budget du ministère de l'agriculture a augmenté en exécution de 4,1 % entre 2012 et 2015. La priorité a donc été donnée à la production plutôt qu'au contrôle.

La mission « Sécurité alimentaire »bénéficie cette année d'un léger rebond budgétaire avec 506 millions d'euros, soit plus 4,2 %. De nombreux rapports de l'Office alimentaire et vétérinaire, qui est la structure européenne de contrôle, ou de la Cour des Comptes, ont tiré la sonnette d'alarme sur la baisse des effectifs des corps de contrôle vétérinaire dans les abattoirs, ou sur les risques que la baisse des effectifs fait peser sur la veille sanitaire.

Si les services du ministère ont endigué les différentes alertes sanitaires de l'année 2016 comme la bactérie Xylella fastidiosa en Corse et en PACA ou le virus influenza aviaire dans le Sud-Ouest, les alertes dans les abattoirs ont donné lieu à une Commission d'enquête parlementaire qui a rendu un rapport très argumenté le 20 septembre dernier.

La hausse de 4 % des crédits de paiement est bienvenue après six ans de baisse, mais qu'en est-il réellement des 60 emplois prévus dans le PLF pour 2017, alors que les créations prévues l'année dernière ont été effacées par le transfert de 74 équivalents temps plein travaillé (ETPT) vers d'autres missions, soit une perte totale de 14 équivalents temps plein ?

L'insuffisance de moyens humains apparaît maintenant au sein des services vétérinaires chargés d'inspecter les abattoirs. Elle est patente à l'ANSES, pour répondre aux missions confiées par la loi, comme pour répondre dans les délais voulus aux demandes des laboratoires.

Il est certain que le travail de l'ANSES s'effectue de façon tendue, alors que 35 ETPT seraient nécessaires pour faire face aux nouvelles missions. Le budget 2017 est de 138 millions d'euros avec une subvention de la mission « Sécurité alimentaire »en légère baisse, et des taxes affectées plafonnées. Or, compte tenu des missions accrues confiées par la loi d'avenir pour l'agriculture et de sa dépendance à l'égard de ses quatre ministères de tutelle – agriculture, environnement, santé et travail –, l'ANSES devrait renforcer ses moyens humains. Il semble donc indispensable de lever la pression sur le plafond d'emplois, afin de rendre à l'ANSES plus de flexibilité pour s'adapter à une charge de travail croissante.

Monsieur le ministre, j'ai cinq questions à vous poser.

En ce qui concerne le plan Ecophyto, la baisse des doses de pesticides est très lente. Et les résultats du plan EcoAntibio sont encore mitigés. Qu'en est-il de la baisse du recours aux antibiotiques critiques ? A contrario, le ministère a-t-il connaissance du risque létal auquel seraient exposés les animaux affectés de certaines pathologies, pour lesquels le temps nécessaire à la livraison de l'antibiogramme s'avérerait trop long ?

En ce qui concerne la surveillance dans les abattoirs, après les révélations et vidéos diffusées par l'association L214, les crédits attendus pour prévoir plus de vétérinaires sont absents. L'arrêté modifié du 12 décembre 1997 – page 7 du rapport – n'est pas respecté, ni dans sa lettre ni dans son esprit.

La commission d'enquête avait suggéré un certain nombre de mesures : généralisation des vidéos, comme c'est le cas au Royaume-Uni ; création d'une brigade bien-être animal rattachée à la Brigade nationale d'enquêtes vétérinaires et phytosanitaires (BNEVP) ; modernisation des abattoirs de plus de cinquante salariés et création d'un comité local avec les élus, l'exploitant, les associations, les éleveurs, les services vétérinaires. Lesquelles seront mises en oeuvre ? Nous attendons une réponse.

En ce qui concerne la maladie ESB, un seul cas a été décelé dans les Ardennes, et il s'en est suivi la perte de statut de la France comme « pays à risque négligeable » et le maintien d'une politique coûteuse pour l'État, de l'ordre de 10 millions d'euros, mais aussi pour les professionnels de la viande, soumis à de lourdes contraintes pour éliminer les carcasses, et à des coûts supplémentaires. Les règlementations européennes ne doivent-elles pas être revues ?

Où en est la surveillance des perturbateurs endocriniens qui pourraient être incriminés dans la recrudescence de certains cancers ?

Enfin, le statut d'établissement public administratif et le plafonnement des taxes affectées sont des freins à l'embauche de personnes qualifiées par l'ANSES alors que ses missions se multiplient, en lien avec la demande sociétale. Monsieur le ministre, comment pourriez-vous envisager de desserrer ces contraintes juridiques ?

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Monsieur le ministre, mes chers collègues, le plafond de crédits alloués à la mission budgétaire « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » pour 2017 s'élève à 3,39 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 3,36 milliards d'euros en crédits de paiement. À périmètre constant, entre 2012 et 2017, les crédits du ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sont en hausse de 1,7 % en autorisations d'engagement et de 0,6 % en crédits de paiement.

Ce budget va augmenter de 700 millions pour l'année 2017. Il intègre notamment le financement des 7 points du taux de la cotisation personnelle maladie des exploitants agricoles, soit 480 millions d'euros, pour continuer à assurer le budget de la Mutualité sociale agricole.

Le nouveau programme 149 recouvre des actions très larges sous un nouvel intitulé « Economie et développement durable des entreprises agricoles, agroalimentaires et forestières ». Il vise à intervenir, y compris avec les fonds communautaires, pour favoriser la compétitivité des exploitations et des entreprises.

Le périmètre du programme 206 « Sécurité et qualité sanitaire de l'alimentation » est inchangé. Pour 2017, l'accent est mis sur le renforcement des dispositifs de prévention et de surveillance des risques sanitaires, notamment les risques pour les maladies animales et phytosanitaires liés aux organismes nuisibles aux végétaux.

Si le programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » voit ses crédits baisser, cela traduit les mesures d'économies et d'optimisation sur le fonctionnement courant mises en oeuvre par les services du ministère, en particulier dans les services déconcentrés au sein des directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF) et des directions départementales des territoires (DDT).

Le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » (CASDAR) bénéficie du même plafond de dépense qu'en 2015 et en 2016, soit 147, 50 millions d'euros. Ce compte est abondé par la totalité de la taxe sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles.

La dotation en faveur de l'enseignement et de la recherche agricoles augmente à nouveau par rapport à 2016, afin de poursuivre l'objectif affiché, dès 2012, de créer 1 000 emplois dans l'enseignement agricole.

J'ai la conviction que la compétitivité, aussi bien à court qu'à plus long terme, est un atout qui ne s'atteint que si toutes les parties prenantes avancent ensemble dans la même direction. À ce titre, il faut signaler qu'en 2017, il y aura 4,7 milliards d'allégements de charges pour le secteur agricole et agroalimentaire, représentant une hausse de 2,8 milliards d'allégements supplémentaires par rapport à 2012.

Néanmoins, monsieur le ministre, je souhaiterais vous demander s'il existe selon vous des marges de progression permettant d'accentuer encore davantage cette baisse de charges pour les acteurs du monde agricole. Et si oui, lesquelles ? Il me semble en effet indispensable que les agriculteurs puissent disposer des meilleures solutions durables pour être à même d'affronter les crises auxquelles ils risquent d'avoir à faire face.

En outre, la succession des crises de ces derniers mois doit conduire à une approche commune renforcée car il n'est pas envisageable de se contenter de ne gérer que les effets de crise. La politique agricole commune (PAC) doit être dans l'anticipation, pour que les agriculteurs soient dans les meilleures dispositions afin de faire face à ces crises. Or la négociation et la préparation de la prochaine PAC vont débuter dès l'an prochain. Et compte tenu du Brexit et de l'importance moindre, à court terme, de la Grande-Bretagne, je souhaiterais connaître votre vision sur la future PAC à mettre en place dès 2020, et sur la possibilité éventuelle d'un retour d'outils de régulation à l'échelle européenne.

Enfin, les crédits nationaux consacrés au développement des mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC) et au soutien à l'agriculture biologique augmentent de 15 millions d'euros pour atteindre la somme totale de 85 millions d'euros. Malgré cela, nous faisons toujours face à un retard considérable s'agissant notamment du développement de nos énergies renouvelables d'origine agricole. Dès lors, quelles sont, selon vous, les pistes à explorer pour atténuer ce retard vis-à-vis de nos voisins européens ?

Avant de terminer et à l'occasion de ce dernier projet de loi finances du quinquennat, j'aimerais saluer M. Le Foll qui aura su devenir, avec courage et détermination, le ministre de l'agriculture étant resté le plus longtemps en place depuis 1836 – année de création d'un ministère dédié à l'agriculture.

Mes chers collègues, je vous propose de soutenir l'action du Gouvernement et du ministre de l'agriculture, en donnant un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes présentés.

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économiques, pour la forêt.Monsieur le ministre, mesdames les présidentes, messieurs les rapporteurs, chers collègues, je suis chargé une nouvelle fois, cette année, de rapporter sur les crédits consacrés à la forêt au sein de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

Permettez-moi d'abord de regretter que la forêt ne dispose plus, dans la maquette budgétaire, de l'exclusivité d'un programme. En effet, ses crédits sont fusionnés avec les actions très larges de la nouvelle mission 149 « Economie et développement durable des entreprises agricoles, agroalimentaires et forestières ». L'action 26 « Gestion durable de la forêt et développement de la filière bois » ne représente ainsi que 12,2 % du budget de ce nouveau programme. Je considère que la lisibilité des crédits s'en trouve légèrement atteinte.

À proprement parler, ces crédits s'élèvent, en 2017, à 273,4 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 281,5 millions d'euros en crédits de paiement soit une diminution de respectivement 0,98 % et 2,7 %. Cette légère contraction budgétaire est la norme depuis plusieurs années : ce budget n'échappe pas à la trajectoire de réduction des déficits publics, ce que je regrette. Mais je note que la baisse est contenue.

Je salue ainsi le triplement des crédits du Fonds stratégique forêt-bois pour la mise en oeuvre du Programme national de la forêt et du bois : 28,2 millions d'euros d'investissements forestiers sont prévus. C'est un pas important qui est franchi, d'autant que s'y ajouteront les aides du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), les recettes de l'indemnité de défrichement et les centimes forestiers. L'objectif du ministre, s'agissant du Fonds stratégique forêt-bois, est de 100 millions d'euros, toutes recettes confondues. Mais comme disait Pierre Dac, « les prévisions sont difficiles, surtout lorsqu'elles concernent l'avenir » !

L'Office national des forêts (ONF) voit sa situation financière s'assainir : la subvention d'équilibre de l'État est en diminution – 12,5 millions d'euros – tandis qu'augmentent les recettes propres de l'Office – 324 millions d'euros – grâce, notamment, aux bonnes ventes de bois – en prix, mais peut-être aussi en volumes.

Le sujet m'amène à parler du fameux olivier, sous lequel Platon enseignait la philosophie à ses disciples, au IVe siècle avant Jésus-Christ. En 1975, un accident de la circulation avait eu raison de l'arbre millénaire, mais il subsistait encore un tronc et des rejetons. Durant l'hiver 2012, particulièrement rigoureux, les gens du coin, paupérisés – nous sommes à Athènes – ont découpé l'arbuste pour se chauffer. Si même l'arbre de Platon ne peut survivre à cette crise, que restera-t-il des arbres et de nos forêts quand elle sera finie ?

J'ai par ailleurs souhaité, dans ce rapport, me faire le relais des interrogations des professionnels de la filière forêt-bois, et j'en profite, monsieur le ministre, pour vous interroger.

Les demandes d'agrément des entrepreneurs de travaux forestiers cherchant à s'installer se heurtent parfois à la rigueur de l'instruction des dossiers. Avez-vous eu des remontées à ce sujet ?

Les exportations de grumes de bois en direction de la Chine se sont longtemps développées au détriment de l'approvisionnement de l'industrie nationale du bois. J'espère que le Programme national de la forêt et du bois saura inverser la tendance. Mais sans doute l'espérez-vous aussi…

Il existe encore des forêts publiques qui ne sont pas soumises au régime forestier. Le recensement en cours devrait permettre d'appliquer la loi sur ces parcelles. Il me semble que l'enjeu est important.

Enfin, les forestiers constituent une population très exposée à la maladie de Lyme. Un plan d'action national, annoncé en septembre 2016, devrait améliorer la prévention, le dépistage et la prise en charge des malades. Je sais que vous êtes sensible à cette question, notamment au sein de l'ONF. Où en est-on ?

Mes chers collègues, cette année, en ces temps de crise, je ferai un effort et donnerai un avis favorable à l'adoption des crédits de la forêt. Cela peut vous surprendre, mais comme disait André Gide, « il est extrêmement rare que la montagne soit abrupte de tous côtés ».

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, les agriculteurs, et donc le ministère de l'agriculture, ont fait face à des crises majeures : crises économiques liées à des déséquilibres de marchés, crises climatiques comme celle de ce printemps, ou crises sanitaires. À chaque fois, l'État, le budget, les régions et l'Europe ont été mobilisés. En même temps, nous avons essayé de définir une stratégie de moyen et de long terme sur l'agroécologie, conformément à la discussion de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, et une stratégie visant à développer notre compétitivité, au bon sens du terme, c'est- à-dire faire en sorte que ce qui est produit en France puisse être vendu en France voire à l'étranger.

Cela dépend de plusieurs paramètres : coûts de production, facteurs de qualité, d'organisation, de structuration, etc. Les débats ne peuvent pas se limiter à un seul sujet. Je ne peux donc pas laisser penser ou croire, comme certains le font, qu'une seule mesure, en particulier la baisse des charges, réglerai tous les problèmes : ce n'est pas vrai, même s'il faut agir en ce sens.

Ce budget, de 5,12 milliards en crédits de paiement, augmente de 15 % par rapport à la loi de finances initiale de 2016. Il intègre les incidences de plusieurs décisions, notamment la baisse de cotisations sociales décidée dans le cadre du plan de soutien à l'élevage : 480 millions sont prévus pour compenser les pertes de recettes de la MSA.

La baisse du coût du travail constitue un facteur parmi d'autres de la compétitivité. Ceux qui prétendent qu'elle est le seul élément à y contribuer trompent tout le monde, à commencer par eux-mêmes. Je veux bien écouter toutes les critiques, mais pas celles qui ont un fondement faux. Au moment de la crise laitière en 2008-2009, jamais vous ne m'auriez entendu dire que j'étais favorable au prix de 411 euros la tonne que certains revendiquaient. Je me suis bien gardé d'affirmer des choses que je ne pensais pas justes. Et à la veille de grandes échéances électorales, j'aimerais que tout le monde soit capable de poser sur la table de vrais arguments.

Les baisses de cotisations s'élèveront à plus de 4 milliards d'euros pour l'agriculture et le secteur agroalimentaire, ce qui est sans précédent. Je sais que certains vont relancer les discussions sur la question de savoir à qui elles bénéficient, exploitants agricoles indépendants ou salariés. Pour moi, la question importante est la prise en compte de la globalité des coûts. Si vous vous focalisez sur les charges, vous vous contenterez de faire de la politique pour la politique et vous ne réglerez pas le problème de l'agriculture. C'est l'ensemble des charges opérationnelles qu'il faut considérer. Prenons les coûts du remboursement des emprunts à moyen et long terme : jusqu'en 2014, ils ont augmenté beaucoup plus rapidement que les coûts liés aux charges sociales que nous avons contribué à stabiliser grâce au pacte de responsabilité.

N'oublions pas que les charges comprennent des cotisations qui financent un système d'assurance sociale et de retraite. Ce qui me frappe, c'est que ceux-là mêmes qui appellent à baisser les cotisations et les dépenses publiques réclament le relèvement des retraites ou la création de nouveaux postes de vétérinaires. La Cour des comptes elle-même préconise la baisse des dépenses publiques et dans le même temps des créations de postes. J'y reviendrai lorsque je répondrai à M. Alauzet sur les emplois de vétérinaires.

Je suis tout à fait prêt à débattre, encore faut-il que l'on m'oppose des arguments fondés. Monsieur de Courson, pourquoi, par exemple, dans votre intervention avoir dérivé alors que vous étiez parti sur une base objective en évoquant l'ensemble des moyens affectés à l'agriculture ? Pour ma part, je garde la même ligne : perspectives de moyen et long terme, agroécologie, baisse des charges opérationnelles.

J'en viens aux questions plus précises qui ont été posées.

Dans le cadre de l'élaboration du programme national de la forêt et du bois, une concertation est engagée depuis dix-huit mois. Un rapport sera déposé dans quelques jours et le programme final devra être publié d'ici à la fin de l'année, conformément aux objectifs fixés dans la loi d'avenir.

Je ne sais pas qui a posé la question de savoir si le ministre avait encore une politique d'installation.

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Ce sont les responsables du syndicat des Jeunes Agriculteurs.

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Eh bien, je leur répondrai par courrier. Depuis mon arrivée au ministère, je ne vois pas ce qui a pu changer : j'ai toujours soutenu la politique d'installation, j'ai même pour la première fois mis en place un top-up sur les premiers hectares. Considèrent-ils que basculer l'enveloppe de 20 millions allouée aux prêts bonifiés – dont seuls à 6 à 7 millions étaient consommés – vers la dotation aux jeunes agriculteurs pour l'augmenter ne constitue pas une politique d'aide à l'installation ? Considèrent-ils que consacrer 100 millions d'euros à l'installation des jeunes agriculteurs ne constitue pas une politique d'aide à l'installation ? Cette politique d'aide à l'installation que je mène, on peut la critiquer, mais on ne peut pas mettre en doute ma volonté de la mettre en oeuvre au vu de toutes mes actions et décisions en ce domaine : assises nationales de l'installation, mesures en lien avec la politique agricole commune, augmentation du budget alloué à l'installation, restructurations, remplacement du critère de surface minimale d'installation par celui d'activité minimale d'assujettissement pour l'attribution de la DJA.

Le pacte de consolidation et de refinancement des exploitations permettra de garantir 1,5 milliard d'euros de nouveaux prêts. Quelles seront les conséquences pour le budget de l'État ? Cela dépendra du taux de sinistralité : sachant que les banques assument 50 % du risque et Bpifrance les 50 % restants, si le taux de sinistralité est de 15 %, l'État viendra apporter les sommes correspondant à 15 % de ces 50 %. Les crédits correspondants ont été validés et seront inscrits dans le projet de loi de finances rectificative.

S'agissant de la MSA, monsieur de Courson, je suppose que c'est son président qui vous a dit qu'elle était en situation de cessation de paiement. S'il me l'avait lui-même dit lorsque je l'ai rencontré il y a une semaine, je lui aurais répondu qu'il n'en sera rien. J'ai toujours défendu la MSA, même lorsqu'elle était attaquée par les agriculteurs eux-mêmes, qui peuvent être contents, en cas de problème de santé ou venu l'âge de la retraite, d'avoir un système de répartition qui assure le versement d'indemnités et de pensions. Le manque à gagner subi par la MSA du fait de la baisse des cotisations sera compensé, je le répète : 480 millions ont été prévus à cette fin dans le présent budget. Quant aux retraites, il faudra réajuster le plan de financement que nous avions mis au point, compte tenu de la réduction d'assiette entraînée par l'optimisation sociale que nous avions pourtant tenté d'éviter.

Monsieur Alauzet, je ne comprends pas comment vous êtes parvenu à ce calcul concernant les effectifs de vétérinaires. Comment prétendre que le transfert de soixante-dix emplois de gestion informatique, opéré dans le cadre d'une mutualisation avec Matignon, aboutit à une baisse de quatorze emplois dans les services vétérinaires ? Cette année, comme les deux précédentes, ce sont bel et bien soixante emplois qui seront créés. Pourquoi aussi nous reprocher d'affecter plus d'effectifs à la production qu'au contrôle ? Cela me paraît logique. J'en suis au dernier budget de la législature, je suis en fonction depuis assez longtemps pour atteindre des records de longévité, je vais vous parler franchement : j'assume totalement ce choix. En 2012, les services vétérinaires avaient perdu 400 emplois ; en 2017, ils en auront gagné 180, et j'en suis fier.

Dans le cadre du plan EcoAntibio, nous avions fixé l'objectif d'une baisse de 25 % du recours aux antibiotiques sur cinq ans. Pour l'ensemble des antibiotiques utilisés, cet objectif a déjà été atteint deux ans après le lancement du plan. Le secrétaire général des Nations unies a fait de l'antibioresistance un enjeu mondial et je veux que la France soit exemplaire dans cette lutte. Nous devons nous engager de manière résolue pour réduire le recours aux antibiotiques critiques. Nous ferons un point précis à ce sujet d'ici au 15 décembre.

Cette année, la France a connu un cas d'encéphalopathie spongiforme bovine, ce qui a remis en cause notre statut de pays indemne. Nous travaillons à le récupérer et nous visons un assouplissement des règles.

Nous sommes toujours à la merci de problèmes sanitaires – et votre serviteur a été servi en la matière. Après avoir eu connaissance des premiers cas d'influenza aviaire, nous avons réussi en six mois à effectuer un vide sanitaire, ce qui est sans précédent en Europe et même dans le monde : aujourd'hui, la filière aviaire repart dans le Sud-Ouest.

S'agissant de la Xylella fastidiosa, il a fallu que l'on tape du poing sur la table pour faire valoir notre point de vue dans les instances européennes alors que cela faisait dix ans que cette bactérie sévissait dans les Pouilles.

Quant aux procédures concernant la fièvre catarrhale ovine, elles devront être en partie revues car elles sont trop lourdes par rapport aux enjeux sanitaires concrets.

Pour financer le fonds stratégique pour la forêt et le bois, j'ai fixé un objectif de 100 millions d'euros avec quatre contributeurs à parts égales. L'État est allé au-delà des 25 millions qu'il devait allouer puisqu'il a apporté 28 millions. Pour la contribution du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), il n'y aura pas de problème. Reste les deux autres financements : le financement privé et le financement innovant. Une conférence aura lieu le 7 novembre pour essayer de compléter le dispositif. Notre but est d'être à la hauteur des exigences du renouvellement de la forêt française.

L'Office national des forêts, après avoir perdu beaucoup d'emplois, a connu une phase de stabilisation. Cette année, cinquante emplois seront créés. Le contrat d'objectifs et de performance équilibre les recettes et le fonctionnement, ce qui est rassurant pour l'ensemble des salariés de l'Office après les efforts qui lui ont été demandés. Cela est de nature à conforter le rôle de l'ONF que j'ai pu voir à l'oeuvre lors de ma récente visite de la magnifique forêt de Bercé.

En matière d'exportations de grumes, nous avons essayé d'apporter des correctifs. Tout d'abord, nous pouvons compter sur l'action du Fonds stratégique pour replanter. Ensuite, nous voulons favoriser une organisation de la filière différente de celle qui prévalait à mon arrivé. Il faut mettre un terme aux achats sur pied, sans lien entre la première transformation et la production. La vocation de la France est d'exporter non pas des billes de bois mais plutôt des produits transformés. Notre pays doit encourager une utilisation plus importante du bois. L'Association pour le développement des immeubles à vivre en bois (ADIVbois) a salué l'appel à projets lancé dans le cadre du projet « Bâtiment bois – grande hauteur » : trente villes de France se sont engagées à construire des bâtiments de bois de grande hauteur, ce qui offrira un débouché supplémentaire à la filière bois française.

Nous avons créé également le certificat « Union européenne » afin de préserver une partie de la ressource pour la transformation en France. Il s'agit de trouver le bon équilibre car certains producteurs forestiers considèrent qu'on les empêche de vendre à l'exportation.

La forêt française doit être productive et créatrice d'emplois tout en étant durable. Vous avez évoqué la disparition de l'olivier de Platon, monsieur Chassaigne. La forêt française, elle, ne risque pas de disparaître : elle couvre une surface plus importante qu'à l'époque des Gaulois, pour reprendre des références chères à certains candidats des primaires de la droite. Pour autant, il ne faut pas considérer qu'il suffit de piocher dedans. Nous devons préserver la multifonctionnalité de ses rôles, qu'il s'agisse de l'économie, de la préservation des sols, du stockage de carbone, de l'environnement mais aussi des loisirs.

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L'une de mes cinq questions portait très précisément sur les reports de charges liés à la compensation des exonérations de charges. À la fin de l'année 2016, il manquerait 167 millions. Les crédits correspondants seront-ils ou non inscrits dans le budget ?

Par ailleurs, ma troisième question portait non pas sur la mutualité sociale agricole mais sur le régime complémentaire obligatoire. Le malheureux article 9 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a entraîné de très fortes pertes de recettes. Il visait à intégrer dans l'assiette des cotisations sociales les dividendes perçus par les associés non exploitants dans certains types de sociétés agricoles. Et qu'ont-ils fait ? Ils ont vendu et ils sont partis. Rappelons les chiffres : vous prévoyiez 165 millions de recettes supplémentaires ; nous en sommes à 50 millions et la chute continue. Il y a plus de 110 millions d'écart avec vos objectifs. Pourriez-vous nous en dire plus ?

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

S'agissant de la compensation des pertes de la MSA liés aux allégements du pacte de consolidation, les crédits seront inscrits dans le projet de loi de finances rectificative. C'est ainsi que nous procédons chaque année dès lors que nous avons à ajuster des dépenses pour financer les allégements de cotisations sociales auxquels nous procédons dans le cadre de divers plans, de l'application des paiements pour services environnementaux ou encore des opérations liées au Fonds d'allégement des charges (FAC). Soyez rassuré : les arbitrages sont en cours et dans une quinzaine de jours, les chiffres seront connus.

Sur la question du régime complémentaire obligatoire, nous devons être très précis. Nous avions un plan dont le financement s'appuyait sur le fonds de roulement de la MSA, les recettes supplémentaires de 160 millions d'euros liées à l'extinction de certaines niches sociales et une augmentation des cotisations d'1,3 point qui devait nous permettre de parvenir en trois ans à un rééquilibrage afin de revaloriser les retraites agricoles à 75 % du SMIC. Depuis la revalorisation intervenue en 1999 à la suite du rapport de Germinal Peiro, rien n'avait été fait, faut-il le rappeler ?

La conférence sur les retraites agricoles nous permettra de discuter avec l'ensemble des professionnels de l'agriculture de l'augmentation des cotisations du RCO dans le but de revaloriser les retraites agricoles d'ici à 2017.

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Elle serait de deux points sur trois ans.

L'article 9 de la LFSS pour 2014 prévoyait d'intégrer dans l'assiette des cotisations la part des dividendes excédant 10 % du capital social. Des conseillers financiers ont manoeuvré pour modifier le capital social afin que ce seuil ne soit pas atteint et nous n'avons pas pu profiter de l'ensemble de l'assiette que nous visions. Personne n'est parti, monsieur de Courson, mais l'optimisation sociale a joué à plein. Notre objectif était d'obtenir 160 millions d'euros de recettes supplémentaires : la première année, nous avons perçu 50 millions, la deuxième 35 millions et, l'année prochaine, nous ne percevrons sans doute que 20 millions. Cette perte de recettes devra être compensée.

Nous essaierons de recaler notre dispositif à l'occasion de la conférence sur les retraites agricoles. À la revalorisation souhaitée par les agriculteurs, j'ajouterai la proposition de prendre les vingt-cinq meilleures années, à l'instar de ce qui appliqué pour les indépendants. Bien sûr, cela supposera d'avancer sur les financements.

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Nous allons engager la discussion en commençant par les porte-parole des groupes.

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Au nom du groupe Socialiste, écologiste et républicain, je voudrais vous dire combien ce dernier budget de la législature nous satisfait. Il permet de mettre en oeuvre les grandes orientations voulues par Stéphane Le Foll, qui aura été le ministre de l'agriculture qui sera resté le plus longtemps dans ses fonctions depuis 1836. Ces orientations, quelles sont-elles ? Le renforcement de la compétitivité des entreprises agricoles, agroalimentaires et forestières ; la préparation de l'agriculture aux défis de demain, notamment la transition agro-écologique ; le soutien aux priorités du Gouvernement que sont l'enseignement et la sécurité sanitaire.

Jean-Pierre Le Roch a déjà établi une comparaison avec 2012. Le budget de l'agriculture aura connu en cinq ans une augmentation de 1,5 % en autorisations d'engagement et de 0,6 % en crédits de paiement dans une période difficile pour les finances publiques.

J'insisterai sur quelques actions, à commencer par celles en direction de l'élevage.

L'élevage a connu une crise extrêmement grave, qui n'est pas achevée. Les indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) ont fait l'objet d'une forte revalorisation, grâce à une augmentation de 30 %, soit 300 millions d'euros supplémentaires. Toutefois, un problème se pose avec la définition des zones défavorisées. Les critères retenus à l'échelle des territoires excluent certains éleveurs du bénéfice de l'ICHN car des activités autres que l'élevage sont prises en compte. Le 15 novembre prochain, je rencontrerai vos services pour discuter de ce sujet.

Je veux également souligner que le soutien à la modernisation des exploitations a été largement maintenu, de même que l'effort en direction des filières d'outre-mer, celui destiné au défi agroenvironnemental et celui en faveur de l'enseignement – pour la période 2012-2017, 1 095 postes d'enseignants sont venus renforcer l'enseignement agricole.

Enfin, je salue la politique extrêmement forte en matière de sécurité sanitaire et alimentaire.

Le budget pour 2017 reflète tous ces efforts. Puisque c'est votre dernier budget, monsieur le ministre – du moins pour cette mandature –, je tiens aussi à rappeler que vous avez été en pointe sur la position française consistant à maintenir le budget de la PAC et à répartir plus justement les aides qu'elle prévoit. S'il y a aujourd'hui une surprime pour les 52 premiers hectares, c'est à vous qu'on le doit.

Vous avez également été en pointe lorsqu'il s'est agi de proposer à l'agriculture française une transition vers l'agroécologie. Pour avoir fait cela, vous avez été moqué et brocardé par les syndicats agricoles les plus conservateurs, mais vous avez tenu bon et aujourd'hui tout le monde reconnaît le bien-fondé de cette démarche, qui rencontre une adhésion croissante. Antoine Herth et moi-même, qui avons été chargés de rédiger un rapport d'évaluation sur la LAAF, avons reçu hier les représentants du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) sur cette matière, qui nous ont fait part de l'adhésion générale à l'agroécologie des enseignants dans l'ensemble des établissements d'enseignement agricole – notre collègue ne manquera pas de vous le confirmer. L'agroécologie, c'est l'avenir ! On ne peut pas continuer comme on l'a fait pendant des années contre l'avis des agriculteurs, c'est-à-dire en polluant l'environnement, en créant des problèmes de santé publique, mais aussi en se privant des économies d'échelle qui peuvent être réalisées sur les exploitations. Aller vers plus d'autonomie des exploitations, c'est aussi renforcer leur compétitivité.

Je me félicite des mesures de soutien à l'élevage, ainsi que de l'extraordinaire baisse des charges et des contributions.

Pour ce qui est des retraites agricoles, qui constituent un sujet extrêmement important, je veux souligner que François Hollande, qui avait été le seul candidat de la dernière élection présidentielle à s'engager par écrit à prendre des mesures de relèvement des retraites agricoles, a tenu parole : les six mesures qu'il avait proposées ont été votées et sont entrées en vigueur. Les deux principales sont, d'une part, l'extension du régime complémentaire obligatoire aux conjoints et aux aides familiaux – après la loi Peiro de 2002 qui prévoyait cette mesure pour les chefs d'exploitation –, d'autre part, un dispositif permettant aux exploitants agricoles justifiant d'une carrière complète de chef d'exploitation de percevoir une pension de retraite globale équivalente à 75 % du SMIC net. Alors que la création de la retraite complémentaire obligatoire (RCO) en 2002 avait permis aux chefs d'exploitation de percevoir 75 % du SMIC net, les deux mandatures de la droite ont ramené ce taux à 70,4 % : une nouvelle fois, la gauche vient remonter les retraites agricoles en rétablissant le taux de 75 %.

Pour toutes ces mesures, monsieur le ministre, je vous adresse mes chaleureux remerciements au nom du groupe Socialiste, écologiste et républicain.

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Une ambiance étrange règne au cours des débats de cette commission élargie : on a parfois l'impression d'entendre votre éloge funèbre, monsieur le ministre ! En tout cas, j'ai bien compris que ce n'est pas dans la loi de finances initiale pour 2017 qu'il faudra chercher les mesures que vous annoncez pour remédier à la crise agricole, mais dans la prochaine loi de finances rectificative pour 2016.

Le budget de l'agriculture qui nous est présenté s'élève à 5,12 milliards d'euros pour 2017, contre 4,5 milliards d'euros en 2016. Certes, il s'agit là d'une hausse appréciable, mais celle-ci est essentiellement absorbée par action 25 du programme 149 pour la prise en charges des exonérations de cotisations sociales. Cela me conduit à une première question : êtes-vous en mesure de nous confirmer l'annonce faite cette semaine par le Premier ministre lors des questions d'actualités à l'Assemblée, selon laquelle les coopératives seraient éligibles au CICE ?

J'en reviens à l'analyse du budget de l'agriculture, en commençant par le programme 149, « Économie et développement durable des entreprises agricoles agroalimentaires et forestières ». Pour ce qui est de l'action 21, « Adaptation des filières à l'évolution des marchés », nous notons avec satisfaction une hausse de 21 % des crédits destinés à la promotion internationale : bravo, monsieur le ministre, vous avez enfin compris qu'une partie de la solution à la crise agricole française passait par l'ouverture des marchés exports pour nos produits ! Malheureusement, nous sommes encore loin du montant de 14 millions d'euros de 2012 : cette année, nous atteignons à peine les 8 millions d'euros.

À l'action 22, « Gestion des crises et des aléas de la production », la seule nouveauté est la création d'une ligne « Prêt de crise » pour un montant de 526 000 euros : pour ce qui est du Fonds d'allégement des charges (FAC) et des crédits d'aides aux exploitations agricoles en difficulté (AGRIDIFF), ils sont en stricte reconduction. En revanche, il convient de s'interroger sur les assurances climatiques : étant précisé qu'en la matière, les crédits européens seront probablement insuffisants, pouvez-vous garantir un taux de subvention de 65 %, et le cas échéant vous engager à abonder sur des crédits nationaux ?

Pour ce qui est de l'action 23, « Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles », constatant que le budget destiné à soutenir l'installation des jeunes agriculteurs semble s'inscrire dans un désengagement progressif du soutien à l'installation après la suppression du Fonds d'incitation et de communication pour l'installation en agriculture (FICIA) pour 11,5 millions d'euros et la réduction de 5 millions d'euros à 1,25 million d'euros des crédits pour les stages, je vous demande, comme l'a fait Mme la présidente, si vous avez toujours l'objectif d'installer 6 000 jeunes agriculteurs en 2017.

Nous retrouvons dans l'action 24, « Gestion équilibrée et durable des territoires », les crédits pour les indemnités compensatoires de handicap naturel (ICHN) et les mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC) que vous revalorisez. On aurait presque envie d'applaudir, si la fête n'était gâchée par les informations qui remontent du terrain. Quand Germinal Peiro indique que les ICHN ont été augmentées de 300 millions d'euros sur la durée du mandat, il oublie de préciser que cette somme correspond exactement à ce qui reste à payer pour 2015 et que, si l'on additionne les MAEC, les aides à la conversion au bio, les assurances récolte, et j'en passe, on parvient à un total de 499,692 millions d'euros que l'État doit encore aux agriculteurs sur les programmes 2015 ! Monsieur le ministre, quand allez-vous payer leur dû aux agriculteurs ?

J'en viens au programme 206, « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », qui m'inspire deux questions. Premièrement, de nouveaux cas de grippe aviaire ont été détectés dans les élevages de palmipèdes alors que des mesures de désinfection et de vide sanitaire avaient été prises. Quel impact cela aura-t-il sur les prévisions budgétaires ?

Deuxièmement, afin de faire face à ses multiples missions, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) emploie actuellement 1 272 équivalents temps plein (ETP) sous plafond et 70 ETP hors plafond. Or, le surcroît d'activité lié aux autorisations de mise sur le marché (AMM) de produits phytosanitaires et aux multiples expertises que lui demande le Gouvernement fait que les files d'attentes ne se résorbent pas, contrairement à ce qui avait été annoncé lors de l'examen de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt de 2014. Étant précisé que les ressources de l'ANSES permettent de les autofinancer, allez-vous l'autoriser à engager des personnels supplémentaires, afin de mettre fin au blocage actuel des dossiers ?

Enfin, à la demande de Germinal Peiro, je confirme avoir constaté une large adhésion à l'agroécologie. Cela dit, ce concept n'a pas été inventé par M. Le Foll, qui s'est contenté d'en faire un slogan politique – c'est bien ce que nous lui reprochons.

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D'une violence inédite, la crise qui frappe aujourd'hui l'ensemble des filières agricoles nécessite des mesures d'envergure, une vision de long terme allant au-delà de l'accumulation de plans d'urgence sans doute nécessaires, mais centrés sur l'immédiateté et le court terme.

Après deux années consécutives de baisse, le budget de la mission « Agriculture » avait touché le fond l'année dernière, avec environ 2,7 milliards d'euros, contre 3,47 milliards dans la loi de finances pour 2012. Cette année, le budget en discussion s'élevant à 3,36 milliards d'euros envoie un signal positif

Nous regrettons surtout le manque de stabilité et ces atermoiements qui empêchent les agriculteurs de pouvoir se projeter sereinement dans l'avenir. J'en veux pour preuve l'évolution du budget du Fonds d'allégement des charges qui était de 8 millions d'euros en 2012, avant de chuter à son plus bas niveau en 2015 et 2016 avec seulement 1,5 million d'euros. Cette année, le budget n'est toujours pas abondé.

Enfin, je tiens à rappeler que près de 80 % de la hausse du budget de la mission « Agriculture » est absorbée par la réduction de sept points du taux de la cotisation personnelle des exploitations agricoles, mise en oeuvre en 2016 et portée à partir de 2017 par le budget du ministère.

Les points positifs de ce budget ne doivent cependant pas être passés sous silence. La hausse des crédits – 13 millions d'euros, ce qui représente une hausse de 33 % par rapport à 2016 – dédiés au bloc « mesures agroenvironnementales et climatiques » et « agriculture biologique » est évidemment positive. Je rappelle au passage que nous avons adhéré au concept d'agroécologie dès que celui-ci a été présenté, car il nous apparaissait comme le prolongement de ce que les agriculteurs appelaient « l'agriculture écologiquement intensive ». Aujourd'hui, inscrire l'agriculture dans cette trajectoire nous paraît non seulement opportun, mais nécessaire.

Au nom du groupe UDI, je me félicite surtout de la hausse de crédits prévue de 21 %, à 8,3 millions d'euros, pour la promotion à l'international de nos produits agroalimentaires. Cela montre la volonté du Gouvernement d'agir en ce sens. Cette inversion de tendance était attendue, dans la mesure où la filière agroalimentaire française doit trouver à l'étranger des relais de croissance pour surmonter la crise, alimentée notamment par l'embargo de la Russie.

Pour autant, j'ai bien peur que ce projet de budget reste encore insuffisant face à l'ampleur de la crise. À sa lecture, le constat implacable qui est fait est celui d'un décalage entre les annonces du pacte de consolidation du 4 octobre dernier et la réalité des crédits budgétés. Ainsi, le budget ne prévoit pas d'abondement supplémentaire du Fonds d'allégement des charges, en dépit des annonces du Gouvernement. Il est déjà acté que le FAC devra être abondé en loi de finances rectificative 2016, puis 2017, avec plus de 100 millions d'euros nécessaires dès 2017. Là encore, il aurait été préférable d'anticiper.

Deuxième exemple : l'aide en faveur du redressement des exploitations en difficulté (AGRIDIFF) est stable par rapport à l'année précédente, à 1,85 million d'euros, alors que la crise n'a fait que s'accentuer. Ce gel entre en contradiction avec la réalité des difficultés constatées sur le terrain.

Monsieur le ministre, je tiens également à appeler votre attention sur un sujet grave, qui va nécessiter que vous interveniez au plus haut niveau : les retards de paiement des aides PAC, les aides dues au titre du plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles (PCAE) et des mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC). Je suis préoccupé au plus haut point par la situation catastrophique dans laquelle se trouvent les agriculteurs qui attendent ces aides en vain. Vous avez pris la mesure de la gravité de la situation en annonçant des plans d'urgence. Au sein des comices agricoles, des salons d'élevage – à Cournon-d'Auvergne, au SPACE de Rennes –, tout le monde s'accorde à considérer qu'il faut trouver d'urgence des réponses aux problèmes de trésorerie auxquels sont confrontés les agriculteurs. Des outils existent, qu'il faut mettre en oeuvre, et c'est à juste titre que les agriculteurs attendent le versement des aides qui leur reviennent. Pour certaines exploitations, les retards de paiement s'élèvent à 20 000 euros, 30 000 euros, parfois davantage !

Dans ce domaine, les régions ont la qualité d'autorité de gestion, et les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) sont chargées d'instruire les dossiers. Les deux dernières années de gestion de la PAC par l'Agence de services et de paiement (ASP) ont été calamiteuses et ont occasionné des retards considérables dans l'instruction des dossiers. Si les difficultés rencontrées proviennent en partie de problèmes de logiciels, il est inacceptable que nous ne disposions d'aucune solution en 2016 pour apporter des réponses immédiates à nos agriculteurs. Pour leur venir en aide, pourquoi ne pas débloquer des crédits d'État ou intervenir auprès des régions ? Je suis moi-même intervenu auprès de M. Le Drian, président de ma région, la Bretagne, en espérant que son statut de ministre permettrait de débloquer la situation : hélas, il n'en a rien été. Monsieur le ministre, il est grand temps d'agir sur cette question cruciale !

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Si le groupe GDR partage les grandes orientations de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », comme celles des programmes 149, 206 et 215, qui composent le budget de l'agriculture pour 2017, il émet cependant des réserves majeures sur ce budget.

Le ministère disposera d'un peu plus de 5 milliards d'euros en crédits de paiement pour mettre en oeuvre sa politique. Cela représente une hausse de 700 millions d'euros par rapport au précédent budget, mais dont l'essentiel provient des mesures déjà arrêtées en matière de compensation des exonérations de cotisations sociales prévues par l'action 25 du programme 149, et de la montée en charge du cofinancement sur les indemnités compensatrices de handicap naturel (ICHN).

L'ensemble de ces mesures, intégrées au budget 2017, sont cependant de nature à orienter les exploitations, organismes et entreprises vers une logique de maintien de l'activité économique, qui soit aussi environnementale et sociale, tout en respectant nos engagements internationaux. C'était un exercice difficile, mais vous l'avez résolu, monsieur le ministre – dont acte.

La diversité et la liberté de vote qui existent au sein du groupe GDR font qu'il se partagera entre l'abstention et le vote favorable – pour ma part, j'approuverai ce budget, en souhaitant simplement donner un coup de projecteur sur l'agriculture outre-mer. J'aimerais connaître le montant exact de l'engagement financier, très conséquent, de votre ministère pour l'agriculture d'outre-mer en 2016, et dans ce budget.

Je sais que les aides à la filière canne à sucre sont d'un montant de plus de 110 millions d'euros, mais je souhaiterais avoir des informations sur la façon dont votre ministère aborde la libéralisation du marché du sucre et la suppression des quotas sucriers au 1er octobre 2017. Comment allez-vous aider ces entreprises, fortement pourvoyeuses d'emplois à la Réunion, en Martinique et en Guadeloupe ?

L'Office de développement de l´économie agricole des départements d'outre-mer (ODEADOM) effectue outre-mer un travail indispensable au développement des filières, et se voit doter d'un poste supplémentaire cette année. C'est une bonne chose, mais il en aurait fallu beaucoup plus, car c'est le seul organisme en mesure de proposer une expertise globale de l'agriculture outre-mer. En outre, sans parler des fonds européens, il va dégager 71 millions pour les filières agroalimentaires en 2017 ! Son rôle, notamment pour moderniser et structurer des filières comme l'élevage et la diversification, est essentiel : il doit donc avoir les moyens de cette politique.

Les crédits du Comité interministériel de l'outre-mer (CIOM) sont abondés à hauteur de 40 millions d'euros pour permettre la diversification agricole, mais je crains le saupoudrage et je milite, vous le savez, pour un regroupement soutenu par des incitations publiques des opérateurs professionnels. Je souhaite que ces crédits soient utilisés très activement par l'ODEADOM pour accentuer les transferts de technologie et l'innovation au profit de la production locale. Là encore, je crois qu'en outre-mer, et en Martinique en particulier, nous devons engager des « plans verts » qui soient de véritables ferments de développement rural, agricole et agro-industriel, créateurs de formations, d'innovations et d'emplois pour nos jeunes.

Nous devons également nous développer en réconciliant notre histoire agricole et notre géographie naturelle, et en utilisant les énergies renouvelables.

Je conclurai mon intervention par deux questions particulières.

Premièrement, une certaine émotion sociale est née en Martinique à la suite de la mutation administrative un peu trop radicale du proviseur du lycée agricole de Croix-Rivail. Des parlementaires vous ont saisi de cette mutation forcée, décidée alors que la période stagiaire de ce proviseur n'est pas terminée. Pouvez-vous nous apporter des éléments d'apaisement en confirmant le maintien de cet agent jusqu'au terme de son affectation ?

Deuxièmement, monsieur le ministre, le Sénat vient de produire un rapport concluant à la nécessité d'une adaptation dans les régions ultrapériphériques (RUP) européennes tropicales « des normes européennes réglementant l'agriculture et l'élevage aux contraintes propres des RUP en tenant compte des spécificités des productions en milieu tropical ». Qu'en pensez-vous, et êtes-vous favorable à une révision du règlement sur les pesticides de 2009, ou à des mesures dérogatoires ?

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Monsieur le ministre, certains de nos collègues ont évoqué la hausse des crédits, dont nous ne pouvons que nous réjouir. En revanche, nous ne saurions ignorer les problèmes auxquels sont confrontés les agriculteurs. Quand nous voulons les aider, toute la difficulté consiste à faire en sorte que les mesures prises à Paris aient un réel impact sur le terrain. Aujourd'hui, en dépit de votre ton persuasif, les agriculteurs s'épuisent et commencent à baisser les bras, gagnés par la résignation.

Selon les chiffres de la Mutualité sociale agricole (MSA), 30 % des exploitants agricoles, soit 131 450 d'entre eux, ont déclaré des revenus professionnels inférieurs à 4 248 euros en 2015 – ce pourcentage était de 18 % en 2014. Cette situation s'explique par de multiples raisons conjoncturelles – notamment la crise climatique et la volatilité des prix, qui entraînent des problèmes de trésorerie.

Il est un autre point qui inquiète beaucoup les agriculteurs actuellement, à savoir la réécriture de l'arrêté du 12 septembre 2006 encadrant l'utilisation des produits phytosanitaires, qui a été suspendu pour des raisons de forme. On parle de la rédaction d'un nouvel arrêté, qui introduirait notamment des modifications relatives à la distance minimale d'application des pesticides par rapport aux habitations. J'aimerais savoir s'il est envisageable que l'arrêté de 2006 soit réécrit en l'état, et que les adaptations susceptibles d'être apportées au texte ne soient étudiées qu'ultérieurement.

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Votre ministère aura été marqué par le versement tardif des primes PAC, qui a constitué le principal sujet de préoccupation pour nombre d'agriculteurs. Alors que, naguère, chaque ministre s'efforçait de veiller à ce que le versement de ces primes soit effectué d'octobre à décembre, on constate qu'elles sont désormais payées au cours des mois suivants, ce qui est à l'origine de grandes difficultés pour nombre d'agriculteurs, notamment ceux qui avaient changé de statut social en adoptant le statut de GAEC, par exemple – souvent sur votre incitation – et ceux qui avaient augmenté leur surface d'exploitation.

La surprime allouée aux 52 premiers hectares dans le cadre de la PAC n'a pas été versée cette année. Comme nombre d'exploitants agricoles, j'aimerais savoir ce que va devenir cette surprime – c'est une question qui a fait beaucoup de bruit, surtout dans l'ouest de la France. Par ailleurs, pouvez-vous nous dire quand seront versées les primes PAC au titre de l'année 2016, et si l'on peut espérer une prochaine accélération du calendrier ?

J'en viens à une deuxième série de questions. Premièrement, la grande affaire économique de ce quinquennat aura été le CICE, dont les travailleurs indépendants, en particulier les agriculteurs, ont été les seuls à ne pas bénéficier. Si vous tentez aujourd'hui de rattraper cette injustice en réduisant les charges, vous devez convenir que le CICE est appliqué depuis trois ans, alors que la baisse des charges ne va s'appliquer qu'à partir de maintenant.

Deuxièmement, le CICE s'applique aux entreprises capitalistes – surtout aux plus capitalistes d'entre elles : la première à en bénéficier est le groupe Carrefour –, mais pas aux coopératives agricoles, qui subissent de ce fait une perte en équivalent de masse salariale de 7 %, puisque le CICE va passer à ce taux en 2017. Qu'avez-vous à nous dire sur ces deux points ?

Troisièmement, enfin, je veux vous alerter au sujet des vétérinaires sanitaires indépendants, qui ont exercé un mandat au nom de l'État. Si l'État les a rémunérés tant qu'ils étaient en exercice, il s'est longtemps abstenu de régler les cotisations sociales qui leur auraient donné droit à une retraite. À la suite d'une décision du Conseil d'État de 2011, l'État a mis en place une procédure de traitement des demandes d'indemnisation des vétérinaires, mais les administrations rechignent à régler rapidement tous les dossiers, obligeant les personnes concernées à prouver le montant de l'ensemble des crédits dont ils ont pu bénéficier au titre de mandats sanitaires – ce qui est très difficile pour la plupart d'entre eux. Monsieur le ministre, vous engagez-vous à ce que votre administration change d'attitude et reconnaisse le travail effectué par ces vétérinaires, qui ont largement contribué, durant de longues années, à ce que notre agriculture soit épargnée par les grandes épidémies ?

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Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur l'avenir de la filière canne à sucre, en particulier à la Réunion. Afin de compenser la fin des quotas sucriers à partir de 2017, le Président de la République s'était engagé à débloquer 38 millions d'euros pour soutenir la filière, et c'est avec une grande satisfaction que nous avons constaté l'inscription dans votre mission budgétaire d'une première tranche de 28 millions d'euros. Je sais que les planteurs ont été sensibles au fait que cet engagement soit tenu et je veux aussi vous en remercier personnellement, car nous vous avons interpellé à plusieurs reprises à ce sujet.

J'ai cependant deux questions portant sur le versement de cette première tranche. Premièrement, a-t-on évalué le risque que l'Union européenne s'oppose, in fine, à cette aide ? Deuxièmement, avez-vous arrêté les modalités précises de versement de ces aides, étant précisé que les planteurs ont émis le souhait que les crédits correspondants ne soient pas intégralement délégués via les usiniers ?

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Monsieur le ministre, les agriculteurs sont en colère car ils n'arrivent plus à vivre dignement de leur travail. Leur situation est difficile au quotidien et les perspectives lorsqu'ils prennent leur retraite sont également des plus sombres. En effet, les pensions de retraite des agriculteurs figurent parmi les plus faibles. Elles sont en moyenne inférieures de 38 % à celles du régime général. Selon les chiffres de la MSA, un agriculteur ne touche en moyenne que 736 euros de retraite par mois.

Bien sûr, des mesures permettant d'améliorer leur situation ont été mises en place, mais ce n'est pas suffisant : les 468 000 agriculteurs concernés vont toucher 82 centimes supplémentaires par jour ! Si la loi du 21 août 2003 octroie une retraite minimale de 85 % du SMIC pour un salarié agricole ayant une carrière de cotisations complète, le taux prévu de retraite pour les non-salariés agricoles ne s'élève, lui, qu'à 73 % du SMIC en 2015 pour atteindre in fine 75 % du SMIC en 2017.

Un exploitant agricole retraité ne touchait que 803,01 euros en 2015, alors que l'allocation de solidarité aux personnes âgées est de 900 euros – soit moins que le minimum vieillesse, et à condition d'avoir effectué une carrière pleine ! Notre pays compte environ 1,5 million de retraités agricoles, et 41 000 retraités exploitants agricoles bénéficient du minimum vieillesse. Selon la Cour des comptes, 10 % des agriculteurs à la retraite disposent d'une pension globale de retraite inférieure à 600 euros par mois.

Enfin, la retraite d'un agriculteur est calculée sur les quarante dernières années, contre les vingt-cinq meilleures pour un salarié du privé.

Malheureusement, cette situation ne risque pas de s'améliorer : le régime de retraite complémentaire obligatoire des exploitants, créé en 2002, est déficitaire et ne dispose plus que de quelques mois de réserves.

Monsieur le ministre, afin de mettre en oeuvre, conformément aux engagements du Président de la République, une véritable revalorisation des petites retraites agricoles permettant d'atteindre l'objectif d'une retraite minimale à 85 % du SMIC pour tous les assurés sociaux agricoles, mais également pour le financement des mesures de revalorisation, l'organisation d'une conférence sur les retraites agricoles, que vous avez évoquée, s'impose effectivement de toute urgence.

J'aimerais connaître vos intentions en la matière : avez-vous programmé cette conférence sur les retraites agricoles et, le cas échéant, quelles orientations envisagez-vous d'y faire figurer, aussi bien sur l'objectif que sur les moyens ?

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Monsieur le ministre, je voudrais soulever devant vous une question à laquelle je n'ai réussi à obtenir de réponse ni par la voie administrative ni par la voie parlementaire ordinaire, un amendement déposé sur ce sujet ayant été déclaré irrecevable. Elle porte sur les exploitants qui perçoivent des indemnités compensatoires de handicap naturel (ICHN).

La loi de finances rectificative pour 2015 a supprimé le régime fiscal du forfait réservé aux petites exploitations pour lui substituer un régime du micro bénéfice agricole dit régime du « micro-BA ». Applicable dès l'imposition des revenus de l'année 2016, ce nouveau régime fiscal suscite de sérieuses inquiétudes auprès des agriculteurs situés dans les zones agricoles défavorisées, notamment les zones de montagne.

En effet, les ICHN ont été mises en place afin de compenser les difficultés structurelles auxquelles les exploitants sont confrontés et donc de contribuer au maintien d'une activité agricole viable dans des zones soumises à de fortes contraintes. Toutefois, au plan fiscal, ces aides sont assimilées à des recettes d'exploitation. À ce titre, elles sont à retenir dans l'assiette imposable au micro-BA.

Pourriez-vous me confirmer si tel est bien le cas ? Ne serait-il pas logique de les en exclure, puisqu'il s'agit d'une indemnité visant à compenser un handicap naturel ? Il paraît illogique qu'elles viennent grossir les revenus des agriculteurs concernés, et donc in fine les pénaliser.

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Après plusieurs années d'hémorragie, les crédits alloués à la Guyane connaissent une accalmie : ils accusent un léger recul de 0,6 %, imputable à la baisse continue des crédits du programme 215 « Conduite de pilotage des politiques de l'agriculture », que peine à compenser l'augmentation des crédits destinés à favoriser l'installation des jeunes agriculteurs.

J'aimerais, monsieur le ministre, vous interroger sur l'Institut karibéen et amazonien de l'élevage (IKARE), dont la situation est critique – ce qui ne laisse rien présager de bon pour les filières d'élevage antillo-guyanaises. En effet, cet institut, qui vient pallier les carences institutionnelles en matière d'appui technique à la filière élevage en Guyane mais aussi aux Antilles, est aujourd'hui en cessation de paiement.

D'une manière générale, les retards de paiement des fonds européens finiront par affamer l'ensemble des techniciens agricoles de Guyane.

Dans un élan destiné à sauvegarder cette cheville ouvrière de la structuration des filières locales, une enveloppe de 1,2 million d'euros a finalement été débloquée par le comité de programmation des fonds européens de la collectivité territoriale de Guyane.

Cependant, afin de mettre en place une solution de préfinancement, l'accord de l'Agence française du développement (AFD) et de l'Agence de services et de paiement (ASP), et donc l'autorisation de votre ministère, sont nécessaires. Or c'est là que cela coince !

Monsieur le ministre, l'agriculture est à un moment charnière de son développement. La situation d'Ikare fait naître l'incompréhension, voire le malaise, chez les producteurs locaux ; les questions sur sa survie se font de plus en plus pressantes.

Quel sort sera réservé à la demande de l'ASP ?

Je remarque d'autre part, monsieur le ministre, que vous avez tout à l'heure fait allusion à l'augmentation de la superficie de la forêt française depuis l'époque des Gaulois. Vous avez tout à fait raison, car depuis, les 8,3 millions d'hectares de forêt du territoire guyanais sont rentrés dans le patrimoine forestier national !

Je regrette enfin que les territoires d'outre-mer ne figurent pas dans le document de présentation des allégements structurels de charges sociales et fiscales que vous nous avez remis aujourd'hui. Je doute que ces territoires n'en aient pas bénéficié : cet oubli crée une grande frustration.

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Permettez-moi, monsieur le ministre, de vous interroger, comme j'interroge chaque année les ministres de l'agriculture depuis 2010, sur les moyens alloués à la lutte et à la recherche contre les maladies de la vigne et du bois qui touchent tous nos vignobles. J'associe à cette question notre collègue Jean-Marie Sermier.

Ainsi que l'ont rappelé nos collègues Jean-Marie Sermier et Catherine Quéré dans leur rapport d'information de juillet 2015, notre filière viticole est aujourd'hui directement et gravement menacée, comme l'est la place de la France comme premier producteur mondial, en raison d'un manque à gagner pesant principalement sur les exportations, de l'ordre d'un milliard d'euros. N'oublions pas que notre filière viticole représente 550 000 emplois directs permanents, le plus souvent ruraux.

L'essentiel des pertes d'exploitation est dû à la propagation de l'esca depuis l'arrêt en 2001 du traitement à l'arsénite de sodium, en raison des dangers présentés par la manipulation de ce produit.

La recherche viticole est, de façon inévitable, lente ; la progression des maladies est au contraire rapide. Ces rythmes différents doivent nous empêcher de relâcher notre attention dans un domaine comme dans l'autre.

Dans leur excellent rapport, Jean-Marie Sermier et Catherine Quéré proposent de faciliter l'arrachage des vignes abandonnées, qui favorisent aujourd'hui la propagation des maladies, de permettre à tout exploitant de demander au pépiniériste d'effectuer des tests avant livraison des plants et de renforcer le rôle des Groupements de défense contre les organismes nuisibles (GDON). Ils proposent également d'encourager la recherche, notamment par un aménagement du crédit d'impôt recherche, et de réorganiser l'Observatoire national des maladies du bois de la vigne pour le rendre plus efficace.

Monsieur le ministre, quelles suites le Gouvernement entend-il donner aux propositions de nos collègues Sermier et Quéré ? Quelles mesures compte-t-il notamment prendre pour améliorer la fiscalité, la coordination et la promotion de la lutte et de la recherche contre les maladies du bois et de la vigne ?

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Monsieur le ministre, je souhaite revenir sur deux des questions que je vous ai posées tout à l'heure.

S'agissant des abattoirs, je veux bien admettre que notre appréciation sur l'évolution des effectifs est à revoir ; vous avez rappelé les efforts consentis depuis trois ans, et que j'avais d'ailleurs moi-même salué l'an dernier.

Toutefois, à la suite du rapport de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale, pouvez-vous nous indiquer les mesures que vous entendez prendre, notamment en ce qui concerne les effectifs des vétérinaires, afin d'améliorer le contrôle des chaînes d'abattage et plus largement le bien-être animal ? Les contrôles, je le sais bien, n'ont pas bonne presse : ce seraient des complications, dit-on souvent. Mais nous en avons besoin !

S'agissant d'autre part des antibiotiques critiques, c'est une question dont je note qu'elle ne concerne pas seulement la santé animale mais aussi la santé humaine : nous sommes d'ailleurs parfois moins exigeants avec les médecins qu'avec les agriculteurs. Mais, ce que je soulignais dans ma question, c'est que certains paysans risquent de voir des animaux mourir parce qu'il faut attendre quarante-huit heures pour prescrire ces antibiotiques : chez les bovins par exemple, tout peut se jouer en quelques heures. Or de telles situations peuvent empêcher l'adhésion de tous au louable projet de réduire l'usage de ces antibiotiques critiques.

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Je commence par ce dernier point.

Lorsque nous avons passé ce contrat avec les vétérinaires pour faire diminuer l'utilisation des antibiotiques critiques, certains souhaitaient un découplage, c'est-à-dire que les vétérinaires cessent de prescrire et de vendre en même temps ; ils espéraient ainsi faire diminuer les ventes et donc l'antibiorésistance. Le débat a été très virulent. Nous avons conservé le couplage, parce que nous voulons garder des vétos.

J'en profite pour vous indiquer que nous luttons contre la désertification vétérinaire. Nous avons dégagé un financement de 900 000 euros, dont 300 000 sont déjà engagés, pour mettre en place un tutorat vétérinaire. Je me suis rendu à l'école de Toulouse pour rencontrer les premiers élèves en tutorat dans le monde rural : ils sont au nombre de vingt-cinq, et cela fonctionne très bien. C'est une politique qui doit permettre d'anticiper les départs à la retraite et de maintenir une pyramide des âges correcte.

J'en reviens aux antibiotiques. Nous avons maintenant un vétérinaire référent sur les choix de prescription des antibiotiques : son avis doit servir à éviter l'utilisation d'antibiotiques de manière préventive, pratique intéressante à court terme mais qui favorisait l'antibiorésistance. Nous pouvons peut-être regarder ensemble s'il ne faudrait pas améliorer les temps de réponse du vétérinaire référent. Mais je souligne qu'en cas d'urgence, le texte permet au vétérinaire de prendre la responsabilité d'utiliser un antibiotique sans attendre l'avis.

Nous ferons ensemble, si vous le souhaitez, un point sur l'antibiorésistance, sujet majeur à l'échelle mondiale.

Monsieur Peiro, vous m'interrogez sur la révision des ZDS, qui doit être menée à la suite de la décision européenne de 2009. Les critères retenus sont essentiellement biophysiques ; s'y ajoute un critère économique, la production brut standard. Or, dans une zone d'élevage où il y a de la vigne qui se porte bien, la PBS augmente, et la classification en ZDS est remise en question.

Nous avançons avec méthode. Nous avons dessiné une carte en appliquant de manière stricte les critères européens, sachant que nous pouvons aussi classer 10 % du territoire comme zones où des critères objectifs justifient un classement en ZDS, et où l'on peut donc percevoir l'ICHN. Bien sûr, notre carte a immédiatement suscité un débat, puisque chacun a vérifié s'il sortait des ZDS… Et ceux qui sortent ont protesté ; je précise que cela ne concerne que 5 % de la surface précédente. Avec la marge de 10 % que je citais, on doit pouvoir travailler !

Certaines communes perdront le classement en ZDS, c'est vrai. Mais il faut établir des critères objectifs. Ce ne sera pas une négociation facile ; nous devons néanmoins la mener. Vous avez, je crois, rendez-vous au ministère ; une longue série de rencontre va d'ailleurs se dérouler.

Vous avez raison de rappeler notre action en faveur de l'enseignement agricole : nous avons créé 1 015 postes supplémentaires, dont 840 d'enseignants. Nous avons doublé le nombre d'élèves handicapés aujourd'hui accueillis dans l'enseignement agricole. Par ailleurs, nous avons créé 80 postes dans la recherche. Cela favorisera le développement de stratégies d'avenir, comme la formation et donc l'installation des jeunes agriculteurs.

S'agissant de l'assurance crédit, nous avons reçu 120 millions d'euros de l'Union européenne et l'État va garantir un taux de subvention de 65 % des primes d'assurance. Nous avons mis en place un « contrat-socle » destiné à mieux lutter contre les aléas climatiques, sanitaires et économiques. Les dispositifs actuels ne sont pas à la hauteur des problèmes rencontrés, même si on pourrait aller bien au-delà de 30 % d'exploitants agricoles assurés : le coût à l'hectare n'est pas très élevé – il y a un problème d'acceptation.

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Nous l'avons craint, avec la crise, mais ce n'est pas ce qui s'est passé.

La volatilité est bien plus grande aujourd'hui qu'hier, et les assurances doivent en tenir compte. Ainsi, les sécheresses deviennent si fréquentes que les moyennes de pertes fourragères sont fausses.

Un rapport du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) reviendra sur ce sujet avant la fin de l'année. Vous savez qu'en prévision de la PAC post-2020, nous avons fait des propositions, en particulier sur l'épargne de précaution. Cela nous permettrait de dégager des financements pour amorcer le système à l'échelle française, de façon plus efficace qu'aujourd'hui.

Monsieur Le Fur, le problème des coopératives, c'est qu'elles ne payent pas l'impôt sur les sociétés… Or le CICE est un crédit d'impôt. Elles touchent le CICE lorsque leurs filiales payent l'IS, ce qui arrive souvent.

Je souligne toutefois que nous avons anticipé l'exonération de contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) des coopératives, élément d'autant plus important que nous avons renoncé à la suppression complète de cette contribution. Nous avons également baissé certaines charges, dans le cadre du pacte de responsabilité.

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Les entreprises que je rencontre, monsieur de Courson, ne me disent pas toutes cela : elles craignent aussi que les baisses de charges ne finissent par disparaître, alors que le crédit d'impôt est très bien identifié par n'importe quel comptable de n'importe quelle PME. Dès que la masse salariale, le CICE augmente parallèlement.

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Le Premier ministre avait pourtant évoqué l'hypothèse d'une transformation du CICE en baisse de charges !

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Le Président de la République lui-même a évoqué l'hypothèse d'une transformation complète du CICE en baisses de charges. Demandez-vous pourquoi cela n'a pas été mis en oeuvre !

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Oui, c'est inévitable. Toutes les entreprises ne sont pas d'accord… C'est un arbitrage. Mais je vous le dis : celui qui supprimera le crédit d'impôt constatera bien vite que ce n'est pas si facile ! Mais ce n'est pas nous qui le ferons.

S'agissant de l'ANSES, nous avons ajusté les plafonds d'emploi pour permettre à cet organisme de s'adapter. Jusque-là, tout se passe bien : j'ai inauguré iCube, un équipement destiné à lutter contre la fièvre aphteuse. L'ANSES, me semble-t-il, a aujourd'hui les moyens de remplir les missions qui lui sont confiées. Nous devons rester vigilants, car le rôle de l'ANSES dans l'attribution des AMM est aujourd'hui très important.

Quant à l'agroécologie, ce n'est pas un terme que j'ai inventé ! Combien de fois les agriculteurs se plaignent-ils d'être systématiquement accusés de polluer ? Ils ont raison. Ce terme d'agro-écologie, c'est une façon de s'adresser à tous les citoyens : des actions sont menées, des progrès sont faits. La performance économique et environnementale, ce n'est pas une fable ! Elle se développe, et elle est cruciale pour notre avenir.

S'agissant du FAC, monsieur Benoit, nous devrons y revenir dans le collectif budgétaire de fin d'année, comme c'est toujours le cas – les décisions sont prises au mois de septembre, quand le PLF est déjà bouclé. Vous ne le voyez pas encore, mais nous avons versé 145 millions au FAC l'an dernier, et ce sera pareil cette année.

Nous avons présenté un plan de consolidation des exploitations. Il comprend d'abord un volet bancaire : un fonds de garantie public permettra d'octroyer 1,5 milliard d'euros de prêts, et le dispositif de l'année blanche bancaire sera prolongé. Il comprend également un volet fiscal, avec des dégrèvements d'office de taxe sur le foncier non bâti (TFNB) et un volet social. Nous allons réactiver les cellules d'urgence destinées à aider les exploitations qui rencontrent les plus grandes difficultés, et pour lesquelles ces mesures générales ne suffiraient pas : pour les éleveurs, en particulier, nous avons obtenu de l'Europe une enveloppe de 50 millions d'euros, que nous avons complétée pour atteindre 100 millions. Des mesures seront prises dans le domaine social, si certaines exploitations n'arrivaient malheureusement pas à rebondir.

Bien sûr, nous devrons rajouter des financements ; ce sera fait lors du projet de loi de finances rectificative de fin d'année.

S'agissant des versements des soldes de la PAC 2015, je regrette évidemment les retards de paiement. Mais je note aussi que, lorsque le système sera au point, en 2017, les avances de trésorerie européennes, ce sera 50 % en octobre – on ne peut pas dépasser ce chiffre. Or, nous les faisons à 90 % : j'ai en effet demandé que nous allions aussi loin que possible.

Je ne reviens pas sur les causes des retards de paiement, ni sur le fait qu'il a fallu refaire l'ensemble du registre parcellaire graphique. Nous avons fait le sale boulot, mais toutes les photos seront faites, à l'hectare près : mon successeur au ministère sera tranquille pour au moins cinq ou six ans ! Le calendrier des versements des soldes pour 2015 est maintenant clair, sachant que les aides de 2015 ont été calculées sur la base de celles versées en 2014 : il a donc fallu faire des ajustements, ce qui n'a pas toujours été simple.

Les aides couplées animales pour la PAC 2015 ont été versées en décembre 2015 en ce qui concerne les ovins et les caprins, et en mai 2016 en ce qui concerne les bovins. Les aides découplées ont été versées entre le 8 septembre et le 15 octobre, et les aides couplées végétales entre le 1er et le 15 octobre. Le solde des ICHN sera versé à la mi-novembre, comme l'assurance récolte, et les aides BIO et MAEC – pour lesquelles nous avons versé des avances en mai et juin – à partir du mois de décembre.

Concernant l'apport de trésorerie remboursable (ATR) 2016, il représentera 90 % des aides découplées 2015, des aides couplées bovines et ICHN 2015. Pour le moment, il a été versé les 17 et 21 octobre à 230 000 agriculteurs, pour un total de 5,2 milliards d'euros. Restent à verser les aides des agriculteurs pour lesquels nous ne disposions d'aucune référence de 2015, notamment les jeunes agriculteurs, que j'ai rencontrés. Ce sera fait à la fin du mois de novembre.

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Y compris ceux qui ont changé de structure juridique ?

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

J'y viens.

Les agriculteurs en procédure collective, vous le savez, ne peuvent normalement pas recevoir d'avance : nous allons néanmoins verser les aides 2016, au début du mois de novembre. Le 15 novembre, nous passerons aux agriculteurs ayant fait des subrogations.

Pour l'ICHN, enfin, ce sera mi-novembre.

Au début de l'année 2017, nous verserons les soldes 2016. En octobre 2017, enfin, le processus deviendra normal : les avances, de 50 %, seront versées en octobre, et le solde en décembre.

Vous m'interrogez également sur l'aide majorée pour les cinquante-deux premiers hectares. Elle était de 5 % en 2015, 10 % en 2016. Compte tenu des difficultés rencontrées par de nombreuses exploitations céréalières, et de la demande de la profession agricole, nous avons décidé de la maintenir à ce niveau en 2017 : le prélèvement redistributif ne passera donc pas, comme c'était prévu, à 15 % puis à 20 %.

Vous avez compris qu'un débat aura lieu en 2017. Chacun pourra alors évoquer la manière dont il envisage la suite. Pour le moment, il est prévu de passer de 10 à 15 % en octobre et décembre 2018, et de 15 à 20 % en octobre et décembre 2019, à la veille de la nouvelle PAC. Mais l'augmentation du paiement redistributif est stoppée pour 2017 : les versements des mois d'octobre et de novembre 2017 seront maintenus à 10 %. M. de Courson est plutôt d'accord pour stopper, voire baisser les paiements redistributifs. Quant aux Bretons et aux grand Ouest, je connais leur position. Le débat sera ouvert.

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Écoutez les gens de l'Ouest, monsieur de Courson !

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

J'en viens au CICE. Les indépendants bénéficient bien de ce crédit d'impôt.

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Pour leurs salariés, mais pas pour eux-mêmes.

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Ils en bénéficient pour leurs salariés, et pour eux-mêmes cela représente une baisse de dix points de leurs cotisations personnelles qui vient s'ajouter au pacte de responsabilité. Ce sont des mesures spécifiques qui ont été prises dans le cadre du plan présenté par le Premier ministre.

Vous m'avez interrogé sur la retraite des vétérinaires. Nous allons régler ce dossier qui est, lui aussi, un héritage du passé – merci pour le cadeau ! Cette question a fait l'objet d'une décision du Conseil d'État en 2011 et d'une circulaire du ministère de l'agriculture au mois d'avril 2012. Nous mettons en oeuvre la procédure arrêtée en 2012 avec pour objectif d'achever la régularisation de tous les dossiers en 2017.

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Vous n'acceptez de le faire que dans la limite de quatre ans alors que certains ont commencé depuis bien plus longtemps. Ensuite, vous exigez des vétérinaires la présentation des titres, ce qui peut être très compliqué pour certains. Certes, il leur appartenait peut-être de conserver tous leurs papiers, mais comme ils ne pensaient pas bénéficier d'une pension ils ne l'ont pas fait. La perspective d'une retraite existe depuis 2011. Ce dossier doit être quasiment réglé au cas par cas, et exige un minimum de bonne volonté.

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Monsieur Le Fur, le Conseil d'État a considéré qu'il y avait une prescription quadriennale. On ne peut pas faire autrement.

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Cela exige une évolution législative.

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Ce n'est pas le sujet qui nous intéresse aujourd'hui. Pour ma part, j'applique la décision du Conseil d'État. C'est un problème qui m'est tombé dessus – un de plus ! – et que nous allons essayer de traiter au mieux d'ici à 2017. Pour l'heure, 1 273 dossiers ont été jugés recevables, 1 067 font l'objet d'un complément d'instruction et 467 protocoles ont été signés. Cela ne satisfera peut-être pas tout le monde, mais la question sera réglée et on aura respecté la décision du Conseil d'État. Mon successeur n'aura pas ce dossier sur les bras.

J'en viens à l'arrêté « phyto », qui a suscité un débat qui a enflammé beaucoup de monde. Le Conseil d'État, qui avait été saisi par une association, a décidé l'abrogation d'un arrêté au motif qu'il n'avait pas été précédé de la notification du projet à la Commission européenne. Il convient donc de régler le problème en respectant les nouvelles règles européennes en vigueur depuis début 2016 s'agissant des limites d'utilisation et de pulvérisation de produits. Nous allons essayer de faire au mieux pour protéger une partie de la biodiversité. Nous sommes sur le point d'aboutir à un accord avec les professionnels sur les cours d'eau. Pour les haies, c'est déjà fait. Il reste un point délicat : les zones à proximité des habitations. La loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt a mis en place des procédures sur les habitats sensibles qui semblent satisfaisantes. Les retours sont plutôt bons là où les décrets préfectoraux ont été publiés. En l'absence de mesures de protection, on applique des distances de protection. Jusqu'à présent, cela se passe bien dans toutes les zones viticoles. Mais le dispositif doit être finalisé, et nous le ferons sans aucune transposition européenne. Le Premier ministre devrait s'exprimer rapidement sur le sujet et rassurer ceux qui peuvent être inquiets.

Plusieurs questions ont été posées à propos de l'outre-mer. La fin des quotas sucriers a été reportée de 2015 à 2017. Lors de son déplacement à la Réunion, le Président de la République avait indiqué qu'il allait conforter les aides. Ainsi, 38 millions supplémentaires ont été notifiés à la Commission européenne afin de compenser la suppression des quotas. C'est la Réunion qui en bénéficiera en premier, puis la Martinique et la Guadeloupe. Vous avez raison, monsieur Azerot, ces aides doivent aller aux producteurs, parce que leurs coûts ne changent pas brutalement. Nous allons vérifier les modalités d'application de ces règles nouvelles. Je l'ai dit, des discussions ont enfin été engagées au sein de l'interprofession sucrière entre les producteurs, les grandes coopératives et un grand groupe privé dans le domaine du sucre. À elle de travailler maintenant, en particulier sur les sucres liés aux productions de canne dans l'outre-mer, pour élaborer des stratégies qualitatives de spécificité, de différentiation afin de réussir cette mutation. À la Réunion, j'avais ainsi eu une discussion avec de nombreux producteurs et industriels sur les sucres spéciaux, le sucre bio qui peuvent se développer et permettre une meilleure valorisation de la production. Tous ces sujets doivent être mis sur la table, mais je n'ai pas trop d'inquiétudes en la matière. Avec la fin des quotas, on a quelques justifications à faire valoir au niveau européen.

Le CIOM augmente de 5 millions en autorisations d'engagement pour retrouver son niveau de 40 millions d'euros, ce qui aura des impacts avec le complément des aides POSEI communautaires qui permettent de soutenir la diversification. À côté de la canne et de la banane qui sont des productions structurantes, il faut développer la diversification, c'est-à-dire rechercher et conquérir des marchés en outre-mer. C'est un enjeu très important. Si les sommes ne sont peut-être pas toujours à la hauteur, nous sommes dans une dynamique qui doit nous permettre de favoriser la diversification, d'autant que les moyens d'intervention de l'ODEADOM sont stabilisés à hauteur de 6 millions d'euros. Nous avons donc des dispositions de nature à engager l'amélioration que vous souhaitez pour les outre-mer.

S'agissant de la Guyane, vous m'avez interrogé sur la situation d'IKARE. Nous ferons en sorte que cet institut puisse continuer de fonctionner. Dans ce département aussi, il faut mettre en oeuvre une stratégie de développement avec de la diversification au niveau de la grande bordure maritime. Nous avons commencé un travail de valorisation. Il faut également engager une politique forestière spécifique afin de protéger cette belle forêt qui est devenue l'une des plus riches en termes de biodiversité, tout en développant des activités économiques et agricoles.

En ce qui concerne le directeur du lycée agricole de la Martinique, je vais vous répondre très clairement. Une inspection a eu lieu. Mais il n'y aura pas de sanctions. Il sera maintenu à son poste jusqu'au terme de son affectation, sa mutation ayant suscité suffisamment d'émoi. Le nombre d'inscriptions dans ce lycée a augmenté, ce qui est plutôt positif. En même temps, nous avons fixé des enjeux et des objectifs à l'ensemble des établissements d'enseignement agricole, en particulier en matière d'agroécologie, et nous avons défini des référentiels nouveaux. Tout cela doit être mis en oeuvre. Nous devons tous soutenir ce que nous avons décidé collectivement, et qui a été voté au Parlement : tel est le message que je veux faire passer.

Une grande conférence sur les retraites agricoles aura lieu au mois de novembre – nous sommes en train de fixer la date. L'objectif est de parvenir à une retraite équivalente à 75 % du SMIC. Le problème, c'est qu'une partie de la recette que nous avions anticipée sur la lutte contre l'optimisation sociale nous a échappée. En effet, 170 millions d'euros avaient été prévus, alors que l'on se retrouve avec 25 ou 30 millions d'euros ! Il faut maintenant prendre des décisions. J'en vois deux, qui avaient d'ailleurs été proposées dans une première mouture : d'une part, prévoir une légère augmentation des cotisations RCO qui nous permettrait d'ajuster notre dispositif ; d'autre part, engager une réflexion pour prendre en compte les meilleures années. Les agriculteurs se demandent à juste titre pourquoi ils sont les seuls à devoir prendre en compte toutes les années pour le calcul de leurs retraites, et non les vingt-cinq meilleures. Ces deux points seront donc abordés lors de la conférence. Mais les mesures qui seront prises devront être financées, sinon M. de Courson me dira qu'il y a un loup derrière la cage… Comme l'a dit Germinal Peiro, nous avons commencé dès le début à mettre en place les engagements pris par le Président de la République. Il nous reste à régler le financement en raison de ce petit problème sur l'optimisation des cotisations sociales.

Le système forfaitaire fiscal qui existait depuis quarante ans a laissé la place au régime du micro BA. Bercy a tout de suite été favorable à ce nouveau système qui rapportait moins que ce qu'il lui coûtait en frais de fonctionnement – 7 millions d'euros. Nous avons d'ailleurs récupéré une partie de cette somme pour lisser la mise en place du nouveau régime. Au terme d'une discussion qui a duré un an, nous sommes donc parvenus à un système calculé à partir des revenus et de l'ensemble des aides sur lesquels on applique un abattement de 87 %. Et voilà que maintenant il faudrait exclure l'ICHN ! Dans ces conditions, l'abattement ne pourrait plus être de 87 %. Je comprends que chacun ici puisse relayer ce qu'on lui demande, mais encore faut-il que cela soit cohérent. Il a fallu un an de discussions pour caler un dispositif soutenu par la FNSEA, les JA, la Confédération paysanne, la Coordination rurale et le MODEF. Il faut dire à ceux qui ont lancé cette idée « géniale » de sortir les ICHN, qu'ils vont ainsi remettre en cause l'accord qui a été signé.

Monsieur Viala, si l'on ne prend pas en compte l'ICHN, pourquoi ne pas enlever également les aides MAEC, les aides à l'agriculture biologique, etc. ?

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Le problème vient de la discrimination entre des aides qui sont spécifiques à une filière ou un mode de production et cette indemnité qui compense un handicap naturel que, par définition, les exploitants ne choisissent pas.

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

L'enveloppe ICHN a été revalorisée de près de 300 millions d'euros. On ne peut pas tout avoir ! Alors que vous passez votre temps à nous critiquer de manière virulente et à demander moins de dépenses publiques, vous me reprochez ici de ne pas en faire assez ! C'est moi qui ai augmenté l'ICHN. Si elle atteint aujourd'hui 1,56 milliard, c'est parce que j'en ai ainsi décidé, conformément à l'objectif fixé par le Président de la République à Cournon. Et maintenant, vous voudriez la dégager du calcul des revenus ! Qu'est-ce que je vais dire aux outre-mer qui ne bénéficient pas forcément de l'ICHN ?

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Je ne critique pas de manière virulente, mais je suis souvent le porte-parole de territoires…

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Je connais bien l'Aveyron !

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…qui subissent malheureusement des handicaps. Lors de l'examen du projet de loi sur la montagne, nous avons pu identifier les contraintes qui s'imposent à certains territoires et pas à d'autres.

L'accord qui a été conclu incluait, semble-t-il, la sortie de l'ICHN.

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Non. Vous mettez en cause ma parole. Pourquoi la parole d'un ministre ne vaudrait-elle pas plus que celle de celui qui vous a parlé ?

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

J'entends suffisamment mes oreilles siffler quand certains interviennent devant les députés ou les sénateurs pour que, de temps en temps, je sois ferme et clair. Je vous le répète, j'ai négocié et signé un accord. Or vous me dites qu'il n'y en a pas. Si vous voulez sortir l'ICHN du calcul, allez dire à ceux qui vous demandent une telle mesure qu'il faudra aussi revoir l'abattement.

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Non, monsieur le député. Ma réponse est très claire.

J'en viens enfin au bois et à la vigne. Lorsque j'ai pris mes fonctions, cela faisait déjà quelques années que l'utilisation de l'arsénite de sodium était interdite. Là aussi, un accord a été conclu avec la profession viticole. J'ai accepté les cépages résistants. Reste qu'il convient de mieux financer la recherche sur la maladie du bois. À la suite d'un rapport de Catherine Quéré et Jean-Marie Sermier, j'ai promis qu'une partie de l'augmentation du CASDAR sera consacrée à cette question. Cette décision est importante car elle engagera mes successeurs.

Nous avons également mis en place un plan de lutte contre le dépérissement. Ainsi, 1,5 million d'euros a été mobilisé grâce à une cotisation volontaire obligatoire (CVO) auquel j'ajoute la contribution de l'État à hauteur de 1,5 million d'euros. Ces 3 millions qui permettront d'accélérer les réponses. J'ai entendu que l'INRA avait obtenu un premier résultat plutôt encourageant. C'est une question difficile puisqu'elle porte sur la recherche.

D'autres hypothèses avaient été évoquées par certains viticulteurs, notamment la certification d'entreprises spécifiques qui pourraient utiliser l'arsénite de sodium au moyen de scaphandres. Les viticulteurs avec lesquels j'en ai discuté ne veulent pas de cette solution, et ils ont raison.

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La recherche est-elle coordonnée au niveau européen ?

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

En partie. Je sais que les Allemands et les Italiens sont sensibles à cette préoccupation. Les Espagnols le sont moins, peut-être parce qu'ils sont moins touchés.

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Si chacun fait quelque chose de son côté, on n'aboutira pas rapidement à une solution. Or il y a urgence.

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Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Les chercheurs vont trouver, j'en suis convaincu.

La réunion de la commission élargie s'achève à dix-sept heures vingt.

Le Directeur du service des comptes rendus des commissions,

Nicolas VÉRON© Assemblée nationale