commission élargie
(Application de l'article 120 du Règlement)
Mercredi 4 novembre 2015
Présidence de M. Gilles Carrez, président de la Commission des finances, et de M. Jean-Jacques Urvoas, président de la Commission des lois
La réunion de la commission élargie commence à vingt et une heures.
Projet de loi de finances pour 2016
Relations avec les collectivités territoriales
Madame et monsieur les ministres, Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois, et moi-même sommes heureux de vous accueillir pour la réunion de cette commission élargie qui va vous entendre au sujet des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
Selon les règles de nos commissions élargies, je donnerai d'abord la parole, pour cinq minutes chacun, à nos rapporteurs. Après que vous leur ayez répondu, les représentants des groupes s'exprimeront, pour cinq minutes également, puis ceux de nos collègues qui le souhaitent disposeront de deux minutes pour vous interroger.
Cette mission connaît un grand succès, et bat le record du nombre d'amendements déposés, puisque j'en compte plus de deux cents. En conséquence, je propose que la commission des finances – contrairement à celle des lois, qui en a reçu bien moins – reporte à demain matin l'examen de ces amendements.
Les articles rattachés à la mission « Relations avec les collectivités territoriales » revêtent cette année une importance particulière, puisqu'il s'agit notamment de créer un fonds d'aide à l'investissement local, de modifier substantiellement le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) et de réformer – initiative attendue par beaucoup, redoutée par d'autres – la dotation globale de fonctionnement (DGF) du bloc communal.
La mission « Relations avec les collectivités territoriales » représente 3,8 % des transferts financiers de l'État en faveur des collectivités territoriales, en nette hausse par rapport à l'exercice précédent. Ses 3,828 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) sur un total de 99,7 milliards, et ses 2,795 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) sur un total de 50,93 milliards d'euros, ne retracent donc qu'une partie minime de l'effort consenti par l'État.
Cette augmentation est principalement imputable à la hausse des crédits du programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales » et à leurs groupements, dont l'action n° 1 « Soutien aux projets des communes et groupements de communes » connaît une forte augmentation. Il s'agit tout d'abord de la majoration de 200 millions d'euros des AE de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), prévue par la loi de finances pour 2015 et reconduite dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2016. Cette majoration s'inscrit dans le cadre de la création d'un fonds de soutien à l'investissement des communes et de leurs groupements, doté d'un milliard d'euros.
Cette mesure, que je salue, relancera l'investissement des communes. Celui-ci a fortement décru en 2014, en raison du rythme électoral et d'inquiétudes liées à la contribution au redressement des finances publiques, mais aussi à cause de l'incertitude créée par les perspectives de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe).
J'en viens à l'actualité : la réforme de la DGF du bloc communal, prévue par l'article 58 du projet de loi de finances.
Il y a un an, lors de l'examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » en commission élargie, vous aviez, madame la ministre, annoncé la réforme à venir de la DGF ainsi que la création d'une mission parlementaire à cet effet. Depuis, un travail important a été fourni, tant par la mission que j'ai eu l'honneur de conduire avec le regretté Jean Germain que par le Comité des finances locales (CFL) et la direction générale des collectivités locales (DGCL).
Cette réforme, dont l'architecture est fidèle aux propositions de notre rapport, est avant tout une oeuvre de justice, destinée à répartir plus équitablement la dotation entre les collectivités, et à passer d'une logique de garanties souvent obsolètes à la prise en compte des charges et des ressources réelles de nos communes et intercommunalités.
Le Premier ministre a annoncé hier au Sénat le report au 1er janvier 2017 de l'entrée en vigueur du nouveau dispositif, ce qui nous laissera plusieurs mois pour tenir compte des nouveaux schémas intercommunaux qui seront arrêtés au 31 mars prochain. Les partisans de l'immobilisme, les frileux du changement, les angoissés de la réforme se réjouiront de cette décision. À titre personnel, je la déplore. Cette procrastination retarde l'application d'une mesure de justice et d'égalité entre les territoires, aussi ne puis-je l'approuver car j'ai été élu pour un mandat clair : le changement maintenant, pour plus de justice.
La mise en oeuvre de la nouvelle DGF dès 2016 aurait permis d'amortir le choc de la ponction au titre de l'effort en faveur du redressement des finances publiques. C'est vrai pour les villes, de banlieue en particulier, éligibles à la dotation de solidarité urbaine (DSU), vrai pour les communes rurales éligibles à la dotation de solidarité rurale (DSR) « cible » ; vrai pour les communes d'outre-mer, vrai pour toutes les communes sous-dotées depuis plus de vingt ans.
Le comble serait que ces collectivités maltraitées depuis des années paient la contribution des nombreuses communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) qui ne recevront pas de DGF en 2016 parce qu'elles comptent parmi les plus riches. Dès lors, il convient d'envisager une ponction sur leurs recettes fiscales, comme en 2015.
De même, il est essentiel de modifier le montant du FPIC figurant au présent PLF et de revenir à ce que prévoit la loi aujourd'hui : 2 % des recettes réelles de fonctionnement, soit 1,150 milliard d'euros. En effet, le Gouvernement vient de produire un rapport dont il ressort que le FPIC constitue un puissant instrument de rééquilibrage des ressources entre collectivités et que sa trajectoire est soutenable pour les territoires contributeurs. Dans ces conditions, rien ne justifie la fin de la progression du FPIC.
Ce même rapport indique au passage que 42 % des territoires détiennent 90 % du potentiel fiscal agrégé (PFIA). Je suggère, la réforme étant différée, qu'en 2016 la contribution au redressement des finances publiques soit, pour 90 % de son montant, supportée par ces 42 % de territoires les plus riches. C'est ainsi que nous réduirons les écarts entre territoires et que les communes les plus fragiles parviendront à maintenir la qualité de service public qu'attendent nos concitoyens.
Madame la ministre, ma question est simple : nous avons une DGF en 2015 ; nous avons une DGF pour 2017 ; quelle DGF nous proposez-vous pour 2016 ?
Hugues Fourage, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Je vous prie de bien vouloir excuser notre collègue Hugues Fourage, empêché, et qui m'a demandé de le suppléer. Je défendrai ses amendements au cours de la réunion de la commission des lois qui aura lieu immédiatement après la présente réunion.
Le PLF pour 2016 respecte le cadre de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 votée par le législateur.
L'effort demandé l'année prochaine aux collectivités territoriales au titre de la contribution au redressement des finances publiques sera de 3,7 milliards d'euros. Il sera financé par une réduction de la DGF versée par l'État aux collectivités territoriales, en fonction de leur poids respectif dans la dépense publique. À périmètre constant, l'enveloppe normée des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales s'élèvera en 2016 à 50,779 milliards d'euros, soit une baisse de 5,3 % par rapport à 2015.
Cependant, alors que les baisses de dotations intervenues en 2014 et 2015 ont été partiellement compensées par le dégagement de marges de manoeuvre notamment fiscales, le présent PLF ne contient que peu de mesures permettant aux collectivités d'espérer des recettes supplémentaires sans augmenter le taux de leurs prélèvements fiscaux.
En s'inspirant des conclusions du rapport remis en juillet dernier au Premier ministre par notre collègue Christine Pires Beaune et le regretté sénateur Jean Germain, le Gouvernement propose la refonte globale de la DGF des communes et des EPCI ; de fait, le dispositif était devenu opaque, illisible et inéquitable.
Cette réforme courageuse suppose que soient adoptés des critères de distribution à même de garantir une répartition juste et équitable de la participation du contribuable national aux charges locales. Aussi le législateur doit-il fixer jeter les bases de la réforme tout en prenant le temps d'observer ses effets et, le cas échéant, d'en ajuster les dispositions avant sa mise en oeuvre. Le dispositif figurant à l'article 58 aboutirait à redistribuer la première année de la réforme 300 millions d'euros, sur un montant total de DGF de 20 milliards d'euros.
Afin de limiter l'effort demandé aux territoires les plus fragiles, il vous est proposé une double progression de la péréquation : au sein du bloc communal lui-même, en limitant l'impact des dotations de péréquation verticale au profit des territoires qui en ont le plus besoin ; en faisant progresser, par ailleurs, la péréquation horizontale assurée par le FPIC, qui atteindrait le milliard d'euros en 2016.
Le Gouvernement pourrait-il détailler la méthode qu'il entend suivre et le calendrier de mise en oeuvre qu'il envisage ?
Votre rapporteur pour avis a plus particulièrement étudié les conséquences de ces mesures sur l'investissement local. La baisse de 7,8 % de l'investissement des collectivités territoriales en 2014, qui ne peut s'expliquer que partiellement par le cycle électoral, risque de se prolonger en 2015 et 2016, ce qui serait contraire à la stratégie de soutien de l'activité qui est celle du Gouvernement.
Aussi doit-on se féliciter de la création d'un fonds dédié doté de 800 millions d'euros, venant soutenir les projets d'investissement du bloc local, et complété par la majoration de 200 millions d'euros de la DETR. Cependant, ne conviendrait-il pas de stimuler davantage les capacités d'investissement des collectivités en encourageant un meilleur pilotage ainsi qu'un effort accru de maîtrise des dépenses de fonctionnement ?
Quelles autres mesures de soutien à l'investissement local pourraient être mises en oeuvre dans le cadre du présent projet de budget ? Les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP) pourraient-ils être fléchés vers l'investissement ?
Sur le plan fiscal, revalorisation des bases d'imposition est envisagée par le Gouvernement ?
S'agissant de l'aide aux départements en difficulté, madame la ministre, vous avez annoncé qu'une dizaine de départements pourraient bénéficier d'une aide d'urgence. Sur quels critères sera-t-elle accordée ? À plus long terme, ne faudrait-il pas que l'État reprenne le financement des allocations individuelles de solidarité ?
La création au 1er janvier 2016 des métropoles d'Aix-Marseille-Provence et du Grand Paris aura un effet sur la péréquation entre les communes concernées, mais aura aussi pour conséquence de réduire la solidarité avec les autres territoires. Selon certaines simulations, le calcul des contributions à l'échelle de la métropole du Grand Paris (MGP) risque de limiter la contribution du territoire le plus riche de France à la solidarité nationale. Il rendrait également contributeur au FPIC celles des communes les moins aisées qui ne bénéficient pas de la DSU « cible ». Enfin, il reporterait sur la métropole l'ensemble des contributions dues par les communes éligibles aujourd'hui à la DSU « cible ». Afin de maintenir le niveau de solidarité assuré par le FPIC, le Gouvernement serait-il favorable à ce que le barème du FPIC soit calculé au niveau des établissements publics territoriaux (EPT) de la MGP ?
En 2015, la contribution au redressement des comptes publics a conduit attribuer à 59 communes et à 258 EPCI, en bonne situation financière, une DGF nulle ou négative. Le PLF prévoyait de leur attribuer une DGF réduite de moitié, ce qui pouvait paraitre inéquitable. Quel dispositif le Gouvernement proposera-t-il en 2016 pour que ces collectivités participent en 2016 à l'effort demandé à tous ?
En ce qui concerne le financement du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), le Gouvernement a renoncé à ramener le taux prélèvement de 1 % à 0,8 % et proposerait une voie médiane : 0,9 %. Les auditions que j'ai conduites montrent que cela ne représenterait pas une réelle économie pour les collectivités territoriales. Au contraire, les régions ne prenant pas en charge les frais de formation des apprentis, le CNFPT propose d'utiliser cette ressource pour développer l'apprentissage dans la fonction publique territoriale (FPT). Le Gouvernement pourrait-il garantir le maintien du taux de 1 % en échange de l'engagement, dans le cadre d'un contrat d'objectifs et de moyens (COM), du financement par le CNFPT de 9 000 places d'apprentis dans les collectivités territoriales ?
Je vous remercie de vos réponses qui pourront éclairer notre débat en commission élargie ; à l'issue de celui-ci, j'inviterai mes collègues de la commission des lois à émettre un vote favorable à l'adoption des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
Les nombreux travaux conduits depuis un an ont confirmé la nécessité d'une réforme de la DGF du bloc communal. Le constat est partagé par tous : la répartition actuelle de ces 21 milliards d'euros n'est ni juste ni équilibrée. L'inscription de la réforme dans l'article 58 du PLF a permis que le débat ait lieu.
Cependant, comme vous le savez, un nouvel argument est apparu : le fait que la carte des EPCI soit appelée à évoluer au cours de l'année 2016 rend nécessaire un ajustement important, puisque l'on attend – et c'est en soi une bonne nouvelle – la constitution d'au moins 700 nouveaux EPCI, quelque 900 propositions ayant été déposées. La dotation de centralité prévue dans la réforme étant calculée en fonction de la population totale de chaque EPCI, il faudra fournir, au moment de la décision définitive au sujet des schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI), une double simulation, sur la base du barème actuel de la DGF, d'une part, et sur celle du nouveau système, d'autre part.
Le Premier ministre ayant entendu cet argument, la date d'application sera reportée par voie d'amendement au 1er janvier 2017 – demande que vous aviez d'ailleurs vous-même formulée, monsieur le président Carrez.
Reste évidemment à proposer un dispositif pour 2016, ce que, dans la mesure où nous n'avons disposé que de très peu de temps, nous ne sommes pas en mesure de faire aujourd'hui. En revanche, il n'est pas difficile d'établir des projections, puisqu'il suffira d'appliquer exactement les critères de l'année 2015 à l'année 2016. L'amendement du Gouvernement à cet effet, qui reprendra exactement le texte de l'an passé mais avec des chiffres rectifiés, sera déposé après-demain. Nous vous présentons nos excuses pour cette erreur de méthode que nous assumons – il est vrai que l'Association des maires de France est intervenue tardivement, mais elle a eu finalement gain de cause.
Nous aurions bien aimé aussi être en mesure de vous le présenter, mais pour pouvoir répondre aux demandes diverses et variées qui nous sont adressées, il nous faudrait créer des postes de fonctionnaires ! Nous avons préféré prendre le temps nécessaire à la préparation d'un texte convenablement rédigé.
Mme Pires Beaune m'a interrogée sur la méthode ; la carte intercommunale sera achevée le 31 mars prochain, ce qui nous permettra de disposer de projections relatives à la dotation de centralité ; la réforme nécessaire à la préparation du PLF pour 2017 pourra alors être parachevée. Toutefois, nous devrons à nouveau nous concerter avec le CFL et l'ensemble des associations d'élus. L'amendement sera rédigé dans le respect des règles de répartition de la DGF des communes et des EPCI en vigueur en 2015, sous réserve de quelques dispositions de coordination, un certain nombre d'indices ayant évolué.
La progression de la péréquation sera également maintenue à son niveau de 2015 : 180 millions d'euros pour la DSU et 117 millions pour la DSR.
Une question m'a été posée au sujet des DGF négatives ; une expertise juridique est en cours sur la compatibilité avec le principe constitutionnel d'autonomie des collectivités territoriales de la ponction des recettes fiscales d'une collectivité territoriale prévues pour 2016, en l'absence de DGF pour cause de « richesse » de la collectivité concernée. La réponse que nous avons reçue est, a priori, négative ; nous souhaitons malgré tout poursuivre notre réflexion sur cette question de constitutionnalité, car les collectivités ayant, grâce à des bases très élevées, des recettes de fonctionnement importantes accompagnées d'une faible pression fiscale, ne pourraient plus, dans le cadre de l'épure actuelle de la DGF, participer à la solidarité nationale en 2015.
J'espère régler ce problème avec la réforme afin que, d'ici le débat en séance publique, nous disposions de la réponse puisque Mme Chapdelaine a posé la même question.
Je confirme la dotation d'un milliard d'euros pour les investissements, avec des crédits de paiement suffisants pour répondre à des projets susceptibles d'être lancés après le 1er janvier.
Dans la mesure où nous avions proposé, dans le cadre de la réforme, l'abandon de la DSU « cible » et de la DSR « cible » en raison d'effets de seuil importants, il nous faudra, les modifications envisagées étant reportées, maintenir ces dispositifs en l'état pour l'année 2016. De même, le report de la réforme nous conduit à ne pas modifier le périmètre du FPIC, mais la question reste posée.
Quant au fait que 90 % du potentiel financier agrégé (PGIA) se concentre dans 42 % des collectivités, je viens d'indiquer que nous poursuivions notre réflexion relative à la compatibilité avec la Constitution de la ponction des communes les plus riches comme nous souhaitons pouvoir le faire.
Il n'est pas prévu de modifier le Fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP) en 2016. L'an passé, le débat avait été vif ; le rapport de Mme Pires Beaune et de Jean Germain montre que les FDPTP ont des partenaires dans chaque département, qui présentent le défaut d'être très inégalement répartis d'un département à l'autre, les critères d'attribution n'étant pas toujours objectifs. En ce qui concerne la revalorisation forfaitaire des bases pour 2016, la commission des finances a adopté un amendement prévoyant un taux de 1 %, et, comme à l'accoutumée, le Gouvernement s'en remettra à la sagesse de l'Assemblée nationale.
Le prélèvement sur la masse salariale des collectivités territoriales fait l'objet d'un débat. Après consultation du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), nous avons constaté que son excédent s'élevait à 55 millions d'euros à la fin de l'année 2014, et approchera les 65 millions d'euros à la fin de 2015. Au regard du contexte actuel de fortes restrictions budgétaires et de baisse des dotations, il nous a paru peu judicieux de conserver des excédents inutiles. Le maintien du taux de cotisation à 1 %, même en tenant compte de la prise en charge des apprentis à la fin du premier semestre, causerait, chaque année, une augmentation de l'excédent de l'ordre de 10 millions d'euros, qui viendrait s'ajouter à l'existant.
Nous avions proposé un taux de 0,8 %. En acceptant la proposition du CNFPT relative aux apprentis, il suffirait de fixer le taux de cotisation à 0,9 % pour réduire les excédents. Nous avons eu le même débat avec le président des centres de gestion : la consolidation des crédits de l'ensemble des centres fait apparaître un fonds de roulement considérable. Une proposition de loi a été déposée qui permettrait de garantir aux centres de gestion le nombre de leurs contributeurs, ce qui leur permettrait de réduire leur taux actuel de prélèvement ; nous attendons de connaître le sort de ce texte.
C'est la loi de finances rectificative (LFR) qui attribuera aux dix départements évoqués par Mme Chapdelaine un soutien leur permettant de faire face à leur reste à charge et d'éviter que leur capacité d'autofinancement soit négative. Une quarantaine de départements, dont les dix en question, rencontrent quelques difficultés ; le Premier ministre, à notre demande et à celle de l'Association des départements de France (ADF), a ouvert un cycle de réunions qui doit durer jusqu'au 30 mars prochain. À cette occasion, sera ouvert le débat sur le retour de la prise en charge nationale et non plus départementale du RSA ; cette concertation sera naturellement ouverte aux parlementaires.
Avant d'entendre les représentants des groupes, je voudrais faire un point sur les amendements. La commission des finances, je l'ai dit, se réunira demain matin pour examiner les quelque deux cents qu'elle a reçus. Un nombre important d'entre eux portant sur une réforme qui n'entrera en vigueur qu'à partir de 2017, nous nous poserons la question de savoir si leur examen se justifie.
Le Gouvernement fait valoir à juste titre que, dès lors qu'il a été décidé hier de surseoir à l'application de la réforme, les paramètres de calcul de la DGF pour 2016 doivent être revus. Pour prendre un exemple invoqué par Mme la ministre, le dispositif de péréquation prévoyait 180 millions d'euros au titre de la DSU et 117 millions au titre de la DSR. Par ailleurs, la population augmente, de nouveaux EPCI se créent – et non des moindres, puisqu'en font partie la métropole d'Aix-Marseille-Provence et celle du Grand Paris. Afin de prendre en compte tous ces mouvements, des montants d'écrêtement sur la dotation forfaitaire, sur la compensation « part salaires » (CPS) et sur les variables d'ajustement vont devoir être défini pour les financer au sein de l'enveloppe de 5 milliards d'euros. Un tel calcul ne peut pas être réalisé en quelques heures ; je pense que, malheureusement, nous n'aurons pas demain matin les éléments pour en débattre. Cela signifie que nous serons conduits à programmer une nouvelle réunion lorsque nous disposerons de l'amendement du Gouvernement ; je demanderai alors aux ministres de venir le présenter devant la commission. Peut-être faudra probablement demander le report de l'examen en séance plénière mais, en tout état de cause, nous ne pouvons pas avoir de réponse ce soir.
A quoi sert-il que la commission des finances examine demain matin les amendements, puisque celui que déposera le Gouvernement a vocation à les faire tomber tous en réécrivant l'article 58 ?
Une partie des amendements déposés ne concernent pas la DGF. La commission des finances décidera justement demain matin quel sort réserver à ceux qui ont trait à cette dernière.
Je souhaite pour ma part que nous respections l'ordre du jour prévu ce soir, c'est-à-dire que les groupes et ceux de nos collègues qui le souhaitent puissent s'exprimer, puis que la commission des lois étudie, dans la foulée de la présente réunion, la soixantaine d'amendements dont elle est saisie. De fait, elle peut valablement délibérer de la réforme de la DGF puisqu'elle a reçu, parmi ces amendements, un amendement du Gouvernement – qui ne traite, il est vrai, que du report de son entrée en vigueur.
Comme les années précédentes, les crédits pour 2016 de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne représentent qu'une petite partie des transferts financiers de l'État vers les collectivités territoriales, soit moins de 4 % en 2016. Les quatre dotations qu'elle comprend restent néanmoins significatives – environ 3,8 milliards d'euros – tandis que l'architecture d'une partie des dotations et concours est sur le point d'être revue.
La réforme de la DGF redéfinit la dotation forfaitaire sur la base de la ruralité et de la centralité des communes. Par ailleurs, elle modifie la péréquation entre collectivités par la réallocation des crédits de la dotation nationale de péréquation (DNP), affine le ciblage des collectivités bénéficiaires et supprime les fractions « cibles » de la DSU et de la DSR.
À cet égard, je tiens à rendre hommage aux travaux conduits par Christine Pires Beaune et le regretté Jean Germain, qui ont largement inspiré cette réforme.
L'article 58, qui contient la réforme de la DGF, a fait l'objet de nombreux amendements dans sa version initiale. C'est parce qu'il a su entendre les représentants de collectivités territoriales et les parlementaires que le Premier ministre a fait part de sa décision de reporter mise en oeuvre de la réforme au 1er janvier 2017 ; la nouvelle rédaction de cet article n'en sera que plus équilibrée.
Au demeurant, notre attention n'a pas porté sur le seul article 58 : l'article 59, relatif au fonds d'investissement en faveur des communes et intercommunalités, ainsi que les articles 60 et 61, ont aussi retenu toute notre attention.
L'évolution de la DGF doit garantir aux collectivités qui ne seraient pas « gagnantes » une évolution limitée de leur dotation afin de maintenir l'équilibre nécessaire entre les différentes ressources. L'attribution des dotations budgétaires doit prendre en compte les possibilités d'effort fiscal des collectivités territoriales, en fonction des ressources propres de chacune d'elles. Celles qui ne mobilisent pas leurs propres ressources ne sauraient bénéficier d'une aubaine alors que les « perdantes » ont rarement d'autres ressources que la fiscalité locale. Le Gouvernement entend-il agir dans ce sens ?
L'amélioration de la péréquation entre collectivités communales et ensembles intercommunaux doit être poursuivie. Devant notre Assemblée et le comité des finances locales, le gouvernement a pris l'engagement d'améliorer le mécanisme du FPIC ; à ce sujet, plusieurs amendements ont été déposés par nos collègues dont le rapporteur pour avis Hugues Fourage.
Aussi soutenons-nous l'action réformatrice du Gouvernement tout en restant vigilant au respect des impératifs de solidarité comme de justice.
Je suis plus que circonspect au sujet de l'organisation de nos travaux. J'ai entendu le président de la commission des finances nous expliquer que, sur le plan technique, la procédure parlementaire permettrait de régler au mieux – ou au moins mal – le désagrément subi par la commission élargie du fait du Gouvernement. Je comprends votre position, monsieur le président, car je suppose qu'il n'y en a pas d'autre possible.
En supprimant la TVA sociale, le Gouvernement s'est condamné d'entrée de jeu à considérer les collectivités locales comme une variable d'ajustement budgétaire ; je fais référence aux propos tenus à ce sujet par le Président de la République lui-même il y a quelques semaines. C'est d'autant plus regrettable que, désormais, quoi que vous puissiez dire, personne ne croira que les dotations de l'État en faveur des communes s'améliorent.
J'en veux pour preuve la manifestation des maires, qui n'était pourtant pas partisane, et vous adressait exactement ce message. Dans ces conditions, il n'est pas besoin d'être devin pour prévoir que la réforme de la réforme de la DGF que le Premier ministre a retirée hier est vouée à l'échec.
Je ne peux pas comprendre que vous expliquiez ce soir au Parlement que vous avez manqué de temps pour régler un problème dont les données vous sont connues de longue date. Vous ne pourrez pas faire croire à votre propre commission, monsieur le président, que vous avez découvert il y a quelques jours seulement que les territoires des ensembles intercommunaux seront modifiés au mois de mars prochain. Tout cela n'est pas sérieux.
Je regrette infiniment que l'attitude du Gouvernement n'ait fait l'objet d'aucune protestation, fut-elle arrondie, monsieur le président de la commission des lois, pour des raisons bretonnes : pas même un étonnement, un froncement de sourcil ou un élargissement de narine ! (Sourires.) Que n'avions-nous pourtant entendu, sous la législature précédente, au sujet des conditions de travail imposées aux commissions et du calendrier parlementaire ! Je pense que l'on se moque du Parlement et je suis trop attaché à cette institution pour accepter un tel traitement.
La commission des lois examinera naturellement avec sérieux et dans le calme qui sied à ses travaux la soixantaine d'amendements dont elle est saisie, mais cela ne réglera rien. Le report d'un an de la réforme annoncée par le Premier ministre ne change rien au fait que les ressources des collectivités locales baissent. Madame la ministre, nous ne croyons pas à ce que vous nous présentez comme étant les bénéfices de cette réforme. Nous pensons que, depuis trois ans, vous vous réfugiez derrière des artifices techniques pour faire accepter l'inacceptable aux collectivités territoriales. Aujourd'hui, les communes n'ont plus d'autres choix que de rogner sur les services, d'augmenter les impôts de manière insupportable, ou de renoncer aux investissements – quand elles ne sont pas obligées de faire les trois à la fois…
Si telles sont la politique budgétaire du Gouvernement et sa conception du soutien aux collectivités, vous comprendrez que nous ne pourrons pas accepter les budgets qui nous sont présentés.
Au-delà du problème de forme qui pose une question politique, le problème de fond est bien plus grave. Sans avoir à forcer le trait, je dirais que je ne peux pas m'empêcher de penser que, parfois, vous vous contentez cyniquement des effets électoraux qu'ont vos politiques sur les territoires ruraux.
Les collectivités territoriales sont une richesse pour notre pays. Alors qu'elles sont les premiers investisseurs de France, porteurs de croissance, ce budget menace clairement leur capacité d'investissement.
Je m'honore d'avoir préconisé, à l'époque où j'appartenais à la majorité, une baisse lente et continue de 1 % à 2 % par an de la DGF. Je m'étais fait agonir, au-delà de l'opposition, par mes propres amis politiques. Je ne suis donc pas de ceux qui disent aujourd'hui que la majorité a tort de réduire la DGF ; je constate seulement que le rythme de cette baisse est insoutenable. Ne vous étonnez pas de l'effondrement des investissements publics qui en découle ! Ils ont reculé de 10 % en 2014, ils auront reculé à nouveau de 10 % en 2015. Ils n'augmenteront pas de 2 % en 2016, contrairement aux estimations du Gouvernement : ils continueront de chuter. Environ une quarantaine de départements sont aujourd'hui en faillite ou disons, car le terme « faillite » est excessif, qu'ils sont en déficit de fonctionnement. Pour ma part, j'espère que mon conseil général refusera d'augmenter les impôts : une commission spéciale nous montrera comment l'État gère mieux que nous nos collectivités.
J'en reviens aux questions de procédure. Elles montrent bien que le Gouvernement ne sait plus où il va. On ne décide pas au dernier moment, en plein débat budgétaire, de différer une réforme que l'on s'apprêtait à voter. Vous n'avez même pas de texte pour remplacer ce qui était prévu, et comme vous n'êtes pas prêts, vous déposerez un amendement ultérieurement. Mais à quoi servons-nous ? Ce n'est plus ce que j'appelle un fonctionnement normal du Parlement. À gauche, à droite ou au centre, je ne suis pas le seul à le penser ; tout le monde partage cette opinion.
Venons-en à l'article 58 auquel le Gouvernement entend renoncer. Le groupe Union des démocrates et indépendants a toujours défendu le principe d'une participation des collectivités territoriales à l'effort de redressement de nos comptes publics. Nous étions ouverts aux propositions de Mme Pires Beaune et de notre défunt collège du Sénat, Jean Germain. Nous partagions leurs constats, et nous considérons, comme l'indique l'exposé des motifs du projet de loi de finances, que « les montants par habitant de DGF sont très hétérogènes et issus de dotations historiques stratifiées, sans que ces différences ne soient toujours justifiées par des écarts de richesse ou de charges ». Rappelons que la DGF est née sous la forme d'une compensation de la suppression de l'ancienne taxe locale sur le chiffre d'affaires. Il ne faut donc pas s'étonner que son montant n'ait rien à voir avec la richesse d'une commune : il suffisait d'avoir de nombreux commerces pour avoir une grosse DGF. Pendant trente ans, elle a ensuite été tripatouillée dans tous les sens au point qu'aujourd'hui l'on n'y comprend plus grand-chose : deux collectivités dans des situations identiques peuvent bénéficier de dotations par habitant totalement différentes sans qu'il soit possible d'expliquer ces écarts.
Pour autant, si la refonte de la DGF est nécessaire, une réforme de qualité exige des bases de travail solides et des simulations fines et exhaustives alors que vous faites preuve d'un certain amateurisme dans la mise en oeuvre de cette réforme.
Le Comité des finances locales (CFL) s'est prononcé à l'unanimité, moins l'abstention de Mme Pires Beaune, pour avertir le Gouvernement qu'il courait à la catastrophe, et lui suggérer de prendre le temps de l'année 2016 pour préparer un texte spécifique. Vous ne nous avez pas écoutés et, aujourd'hui, vous vous êtes plantés, comme disent les jeunes. Après tout, on peut se tromper ; l'essentiel, c'est de le reconnaître.
Nous avons déjà voté en première partie du projet de loi de finances la contribution des communes au redressement des finances publiques pour 1,45 milliard d'euros, et celle des EPCI pour 621 millions d'euros. Nous voulions appeler votre attention sur l'article 58, car nous nous demandons si les villes petites et moyennes ne vont pas être les grandes perdantes de la réforme. Vous avez en effet retenu une puissance cinq appliquée aux critères de population pour protéger les grandes intercommunalités, ce que j'appelle la haute aristocratie, autrement dit les communautés urbaines devenues, pour la plupart d'entre elles, des communautés d'agglomération. Cette grande aristocratie d'Ancien Régime a des privilèges et elle dispose d'une DGF de 150 ou 180 euros par habitant contrairement aux modestes membres du tiers état auquel j'appartiens (Sourires) – je rappelle que je préside une communauté de commune à fiscalité additionnelle.
Il n'est de l'intérêt de personne de continuer ainsi, en tout cas pas de celui des collectivités locales et du peuple français. Le groupe Union des démocrates et indépendants vous invite en conséquence à revenir à la solution que nous préconisions au CFL : retirez vos propositions et travaillons sur le sujet !
L'article 60 du projet de loi de finances, qui passionne moins les foules, ce soir, que l'article 58, propose opportunément de fusionner le fonds d'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles et celui dédié aux victimes de calamités publiques dans une nouvelle dotation unique, dite « de solidarité en faveur de l'équipement des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des événements climatiques ou géologiques ».
Il y a deux ans, lors du débat sur le PLF pour 2014, j'avais déjà alerté le Gouvernement sur le fait que les crédits de paiement consacrés à cette action devaient être sauvegardés. Ils l'ont été puisqu'ils s'élevaient à 21,9 millions d'euros et qu'en 2015 les subventions exceptionnelles pour la réparation des dégâts causés par les calamités publiques sont de 24 millions d'euros. Cependant, pour les prochaines années, ce fonds semble subir une baisse sensible et inquiétante. Certes, on observe une quasi-stabilité pour 2016 – 23,2 millions d'euros –, mais la baisse qui suit est beaucoup plus importante. L'estimation des subventions exceptionnelles pour calamités publiques est de 13,9 millions d'euros en 2017, et de 7,1 millions en 2018. Certes, ces montants sont susceptibles d'évoluer en fonction de l'avancée des projets conduits par les collectivités territoriales ou des indemnisations consécutives à un événement naturel exceptionnel, mais il y a dans cette trajectoire une hypothèque et une incertitude, alors que les catastrophes climatiques s'accentuent et se multiplient et que, parallèlement, les assureurs augmentent le montant des primes. Cette baisse programmée est incompréhensible.
J'aimerais connaître précisément le fonctionnement de ce nouveau fond issu de la fusion des deux anciens fonds et en savoir plus sur les modalités d'application qui seront publiées par décret pour être informé plus précisément des conditions, de la nature des biens pris en compte et des montants éligibles pour les collectivités.
Si la baisse de 11 milliards d'euros de DGF sur trois ans est dure et brutale pour les collectivités nous devons aussi avoir tous conscience des efforts consentis par ailleurs pour atténuer ses effets. Je pense au milliard d'euros du fonds d'aide à l'investissement, aux 140 millions d'euros qui viennent abonder le Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), aux mesures prises l'an dernier en loi de finances, au soutien accordé aux départements l'année précédente. On peut considérer que 1,5 milliard d'euros sont consacrés à atténuer la brutalité de la baisse pour le bloc communal.
La réforme de la DGF est ajournée. Elle reste pourtant indispensable en raison de la sédimentation des critères d'attribution au cours de l'histoire, qui la rend totalement illisible et injuste. Pourtant, c'est une véritable gageure d'amplifier la péréquation horizontale alors que la baisse de 11 milliards d'euros des dotations aux collectivités est drastique. J'ajoute que nous n'avons disposé de simulations que tardivement et que de nombreux points restent à préciser. Avouons que tout cela ne nous sécurise guère au moment où nous devrions prendre une décision !
Pour certains, la baisse de 11 milliards d'euros est la raison précise pour laquelle il faut engager la réforme immédiatement afin de « sauver » les collectivités les plus fragiles. Pour d'autres, c'est au contraire le plus mauvais moment car cette mesure ajouterait « une baisse à la baisse » – pour le tiers des collectivités qui pâtissent de la réforme – au détriment des investissements que nous cherchons pourtant tous à les consolider. Sachant que la diminution des dépenses de fonctionnement prend quelques années, c'est inévitablement l'investissement qui trinquera ! Madame la ministre, vous nous annoncez que deux tiers des collectivités bénéficieront de la réforme ; cela signifie qu'un tiers d'entre elles seront mises à contribution. Même si ce sont les plus riches, cela s'ajoutera à la perte de 11 milliards d'euros : cela fait beaucoup !
Si l'on suit le nouveau calendrier, l'articulation et les critères de calcul des trois composantes de la DGF – une dotation de base, une dotation de centralité et une dotation de ruralité – feront l'objet d'un travail en 2016 pour 2017. Je m'interroge notamment sur cette « DGF locale », distincte de celle des communes, qui serait calculée à l'échelle du territoire intercommunal. Son versement continuerait d'être effectué par l'État aux communes et aux EPCI, et la répartition au sein du territoire serait effectuée en fonction de critères communs prévus par la loi, reste à déterminer lesquels ! Nous avions entendu parler de possibilités de dérogation en matière de répartition de l'enveloppe entre communes et EPCI par un vote à la majorité renforcée au sein de l'EPCI ; qu'en sera-t-il réellement ?
Le rapport de pouvoir entre les maires et les EPCI constitue un vrai sujet, et je crains que le flou dans lequel nous nous trouvons aujourd'hui contribue malheureusement à exacerber demain les tensions et les craintes au sein des collectivités territoriales. Il faudra très rapidement remettre l'ouvrage sur le métier afin de trouver un point d'équilibre pour 2017.
Je suis friand du surréalisme, en particulier du surréalisme belge parce qu'il est à la fois ludique et structuré. (Sourires.) Je crains toutefois que nous n'ayons affaire aujourd'hui à un surréalisme peu ou pas structuré, et qui ne prête guère à s'amuser.
Dans un contexte difficile, alors que les collectivités voient les prélèvements sur recettes à leur profit baisser de 3,67 milliards d'euros, il me semblait nécessaire de mettre en place une réforme qui introduise de l'équité dans le système. Mme Pires Beaune était venue présenter ses propositions devant le groupe politique auquel j'appartiens. Nous avions contesté certaines d'entre elles, mais l'essentiel était de pouvoir débattre. J'estime que les élus des territoires que nous sommes tous ne doivent pas se priver d'un débat en commission pour apporter leur éclairage sur un rapport honnête intellectuellement et pour trouver des pistes de réforme pour la DGF.
Puisque j'évoque mon groupe, permettez-moi de préciser que ce dernier, bien que membre de la majorité, n'a jamais été consulté par le Gouvernement sur la réforme. Je le regrette infiniment et, compte tenu de ces circonstances, nous réservons nos votes.
J'en viens au problème des communes nouvelles. La plupart des collectivités qui désirent fusionner n'ont pas connaissance des prospectives des services de l'État en la matière, ce qui leur est pourtant nécessaire pour pouvoir délibérer avant l'échéance du 31 décembre 2015. Si nous voulons en finir avec l'émiettement de nos communes, qui ne favorise pas les politiques d'investissement sur les territoires et constitue une exception en Europe, nous devons réussir la réforme des communes nouvelles. Nous avons besoin d'un délai de trois à six mois sans lequel les communes qui veulent fusionner ne pourront pas agir. Nous défendrons un amendement en ce sens.
J'appelle aussi votre attention sur le fait que, lorsqu'une commune souhaite fusionner avec une commune nouvelle, cette dernière perd le bénéficie du dispositif spécifique de majoration de DGF auquel elle avait droit. Cela ne résulte pas de la volonté du législateur, mais d'un effet mécanique de l'application des textes. Je comprends que ceux qui veulent rejoindre une commune nouvelle ne bénéficient pas d'une garantie de DGF, mais il est absurde de supprimer la mesure pour la commune nouvelle déjà créée. Le Gouvernement peut-il nous dire comment il compte régler ce problème ?
Je veux aussi évoquer la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) dont les crédits ont été majorés de 200 millions d'euros l'année dernière pour atteindre 815,69 millions, grâce à la mobilisation des députés de la majorité et à leurs amendements. Dans le PLF pour 2016, les autorisations d'engagement de DETR au sein du programme 119 sont équivalentes à celles de 2015, mais les crédits de paiement ne s'élèvent qu'à 666,58 millions, ce qui équivaut à une baisse de 149 millions de la DETR pour les communes et regroupements soit un recul de 18 % de la dotation. L'argument du décalage entre autorisations d'engagement et crédits de paiement n'étant pas valide puisque nous présentons des projets tranchés, nous défendrons en séance un amendement visant à proroger le niveau de DETR de 2015.
Les problèmes liés à la réforme de la DGF pourraient se résoudre par voie d'amendement. Je pense notamment au problème des communes de grande superficie. La moitié des communes de montagne sont par exemple défavorisées par la réforme parce que certaines s'étendent sur plusieurs dizaines de kilomètres carrés. C'est également le cas des communes dont la DGF est assise pour partie sur l'existence d'un parc national en zone centrale. Je ne vois pas comment on pourrait revenir sur l'engagement pris à leur profit dans la loi de 2006. Nous avions travaillé avec Mme Pires Beaune sur un amendement visant à résoudre le problème des communes dont la DGF baissait fortement ; c'est bien la preuve qu'un travail d'amélioration est possible sur la base de son rapport.
Il faut aussi faire attention à certains calculs. La dotation pour charges de centralité est un instrument intelligent, mais encore faut-il qu'elle touche sa cible. Dans ma circonscription, si elle était évaluée à partir de la DGF globale des communes, DGF touristique comprise, elle concernerait des stations de ski de cent habitants permanents, sans commerce, sans équipement, sans service, au détriment des véritables bourgs-centres. Nous vous aurions proposé un amendement sur le sujet.
Ce débat ne fait que renforcer ma conviction que l'absence d'étude d'impact sur les conséquences réelles de la baisse des dotations aux collectivités locales est extrêmement préjudiciable. Il y aurait eu d'autres choix que cette coupe de 12,5 milliards d'euros sur quatre ans. Je rappelle que nous allons consacrer 20 milliards d'euros au crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) qui bénéficiera à des secteurs qui n'en ont pas besoin. Cette non-sélectivité du CICE est une catastrophe, puisqu'elle oblige à baisser les dotations aux collectivités, alors qu'il vaut tout de même mieux donner un euro à une collectivité qu'à une banque ou à une société d'assurance en crédit d'impôt.
Sans étude d'impact, nous ne savons pas où nous allons. Nous avons obtenu, en juin dernier, la création d'une commission d'enquête visant à évaluer les conséquences sur l'investissement public et les services publics de proximité de la baisse des dotations de l'État aux communes et aux EPCI. Il est apparu que 11 milliards d'euros de baisse de dotation en trois ans représentent 5,5 milliards d'euros de perte de recettes pour l'État, qui ne gagne donc dans cette affaire que 5,5 milliards. On est donc en droit de parler de gabegie. Toutes les personnes que nous avons entendues nous disent que les contraintes budgétaires qui pèsent sur les collectivités territoriales ont aujourd'hui des implications considérables. Toutes les projections montrent, quel que soit le niveau de collectivité, un effondrement de la capacité d'autofinancement nette, c'est-à-dire des investissements. Une telle évolution a des conséquences sur l'emploi, par exemple dans le bâtiment et les travaux publics (BTP), sur la préservation du patrimoine qui appartient à tous les Français, sur l'imposition des ménages, et sur certains services de proximité. Les villes moyennes se trouvent aujourd'hui en grande difficulté, nous l'avons constaté sur le terrain à Saumur ou à Auxerre. Une réforme de la DGF non stabilisée était-elle soutenable dans un tel cadre ?
Je rappelle que nous ne disposions pas de simulation au-delà de l'année 2016. Il est tout de même étonnant que j'ai dû attendre la sortie d'un journal du soir pour connaître les évolutions de DGF des communes du département dont je suis l'élu. Parmi les villes du Cher de plus de 10 000 habitants, trois villes auraient été perdantes dans la réforme et il se trouve que ce sont les trois communes les plus pauvres. La seule ville qui y aurait gagné est celle qui a le moins de charges de centralité puisqu'elle se situe dans l'agglomération de Bourges.
Il convient de corriger ces biais qui touchent de plein fouet les villes de 5 000 à 50 000 voire 100 000 habitants. Je parle bien de « correction » car notre groupe reconnaît la nécessité d'une réforme de la DGF afin de la rendre plus juste et plus équitable. Elle ne peut toutefois s'engager sans deux préalables. La réforme ne peut pas être entreprise dans un contexte de baisse aussi brutale des dotations que celui que nous vivons. Je vous suggère de surseoir à la baisse de 2017 pour la faire passer. Elle mérite par ailleurs d'être traitée dans un projet de loi spécifique, distinct de la discussion budgétaire. Cela permettrait d'échapper au poids de Bercy et d'élaborer des critères pertinents au-delà de la prise en compte de la nouvelle architecture territoriale. Nous considérons que le critère de la superficie qui a été oublié est particulièrement pertinent pour certaines collectivités.
Il me paraît sage de reporter la réforme prévue. Je soutiens néanmoins la demande de notre rapporteure spéciale en faveur d'une péréquation améliorée notamment par le biais du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) qui pourrait atteindre 1,15 milliard d'euros comme cela était prévu. Quant au fonds d'investissement et à l'élargissement du FCTVA, si nous ne pouvons que les saluer, il ne faut pas croire qu'ils permettront de compenser la baisse de l'autofinancement, toutes les associations d'élus le disent, d'autant que le tour de passe-passe entre autorisations d'engagement et crédits de paiement devrait être affiché.
Le contexte impose que les députés du groupe Gauche démocrate et républicaine s'opposent à ce budget.
Je tiens d'abord à souligner que, dans ce PLF, le Gouvernement fait un effort notable pour soutenir l'investissement des collectivités qui, tout le monde reconnaît, a connu une baisse d'environ 14 % l'an dernier, liée à la contribution au redressement des finances publiques que l'État demande aux collectivités.
En termes d'effort, je pense notamment à la création d'un fonds de soutien à l'investissement doté d'un milliard d'euros, dont une large part pour les villes-centres et les centres-bourgs, à la reconduction des crédits de la DETR à la même hauteur qu'en 2015, autrement dit à la pérennisation de l'augmentation de 30 % par rapport à 2014, et enfin à l'élargissement de l'éligibilité au FCTVA des dépenses d'entretien des bâtiments mais aussi, grâce à un amendement de Christine Pires Beaune, des dépenses d'entretien de voirie.
Ce sont de bonnes mesures, mais nous devons garder à l'esprit le fait que les meilleurs dispositifs de soutien à l'investissement ne seront utiles que si les collectivités maîtres d'ouvrage peuvent les actionner. Pour cela, il faut préserver leur capacité à dégager de l'épargne en section de fonctionnement. Aussi, je souhaite connaître la position du Gouvernement sur deux pistes de travail.
La première consisterait à ce que l'État ouvre un débat sur la possibilité d'abandonner aux communes et aux EPCI, comme il l'a fait au profit des régions et des départements, tout ou partie des frais de gestion qu'il perçoit sur la fiscalité locale. Ces frais, qui représentent plus d'un milliard d'euros pour le bloc communal, sont de moins en moins justifiés du fait, d'une part, de la dématérialisation croissante que la loi NOTRe va encore accélérer, et, d'autre part, de la fin des missions assurées par l'État au titre de l'assistance technique de l'État pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire (ATESAT).
La seconde piste de travail nous est fournie par l'article 106 de la loi NOTRe, qui permet à une commune ou un EPCI de choisir ou non d'adopter les règles budgétaires des métropoles, afin notamment de pouvoir inscrire en section d'investissement les subventions d'équipements qui relèvent dans leurs nomenclatures actuelles de la section de fonctionnement. Pouvez-vous nous dire quand sera publié le décret d'application offrant cette possibilité ?
Par ailleurs, le Gouvernement propose d'exonérer de FPIC les communes appartenant à un EPCI contributeur et percevant la DSU « cible » ? Pourrions-nous élargir le champ de cette exonération à toutes les communes concernées et percevant la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU), ou au moins à celles percevant la DSU et ayant un potentiel financier inférieur à la moyenne de leur strate ?
En quatre ans, depuis l'adoption de la loi du 16 décembre 2010, une vingtaine de communes nouvelles se sont créées. Depuis la mise en oeuvre de la loi du 16 mars 2015, qui résulte de l'adoption de propositions de loi déposées par Mme Christine Pires Beaune et moi-même, cent cinquante communes ont déjà délibéré, et ce mouvement se poursuivra jusqu'au 1er janvier 2016.
Le délai fixé à la fin de cette année ne pourrait-il être prorogé ? Le temps est un peu court, en effet, pour la maturation des projets et le passage aux actes. La création de communes nouvelles constitue une rationalisation intéressante et une nécessité pour les communes elles-mêmes comme pour l'État auquel elle permet par exemple de faire des économies de fonctionnement.
Ne pourrions-nous, d'autre part, mettre en place un plafond ? Aujourd'hui de grosses communes nouvelles regroupent un petit nombre de villes qui « siphonnent » en quelque sorte l'enveloppe normée. Nos propositions de loi visaient à permettre le regroupement de petites communes, avec une démarche de centralité confortée, dans des zones rurales à faible densité de population, et non la création de communes nouvelles en zone très urbaine dense. J'ai donc déposé un amendement fixant un seuil de 50 000 habitants.
Enfin, nous devons relever le plafonnement du bénéfice de la majoration de DGF de 10 000 à 20 000 habitants. Il arrive que des communes nouvelles de secteur se créent au sein d'une intercommunalité et que la ville-centre reste seule parce qu'elle dépasse le seuil des 10 000 habitants : elle n'est pas, si j'ose dire, une « fiancée » attractive en termes financiers. Il faut remédier à cela.
L'évolution du Fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) inquiète de très nombreuses communes d'Île-de-France, dont l'intégration à la métropole du Grand Paris devrait s'accompagner dès 2016 d'une hausse massive de leur contribution à ce mécanisme de redistribution par l'effet de l'augmentation de la moyenne de certains indices servant à ce calcul.
Les simulations tout récemment transmises par le syndicat mixte d'études Paris Métropole n'ont pas permis de lever, tant s'en faut, les fortes préoccupations émises depuis plusieurs mois sur le sujet. Les sommes dues au titre de ce fonds pour l'année prochaine atteindraient en effet pour certaines communes, en l'état du dispositif, des niveaux très importants qui semblent difficilement absorbables à une si courte échéance. Je rappelle, en outre, que des communes considérées comme pauvres à l'échelle régionale, qui bénéficient à ce titre de la DSU et du Fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France (FSRIF), sont appelées à contribuer au FPIC dans des proportions très significatives. Cette situation ubuesque, que je dénonce depuis la création de ce fonds de péréquation durant la précédente législature, affaiblit grandement la cohérence des systèmes de péréquation horizontale et verticale que le Gouvernement s'est pourtant attaché à renforcer depuis 2012.
Madame la ministre, pourriez-vous nous éclairer, dans ce contexte, sur les correctifs que vous envisagez de mettre en place, s'agissant de la répartition de ce fonds afin de préserver la vocation et la finalité premières de ce dispositif en termes de lutte contre les inégalités territoriales ?
Madame la ministre, je souhaite que vous profitiez de votre présence parmi nous pour clarifier le traitement financier que vous comptez infliger à métropole du Grand Paris. À cette occasion, je vous proposerai quelques pistes sur le sujet.
Hier, en recevant une délégation d'élus de la future métropole appartenant au groupe finances, vous avez évoqué l'application par anticipation de la réforme de la DGF au Grand Paris. Cette solution est-elle bien constitutionnelle ?
Elle ne l'est pas !
Voilà une réponse claire à cette première question.
Lors de la même réunion, vous avez présenté une note contenant un montant de DGF très inférieur à celui des simulations qui avaient servi de base aux projections relatives au financement de la métropole du Grand Paris. Avez-vous prévu de recommencer ces simulations à partir de ce nouveau montant de DGF ? Si l'on utilise les chiffres que vous avez présentés hier, la métropole du Grand Paris n'aura pas un budget de 70 millions d'euros, mais un budget réduit à pas grand-chose. Je sens que votre réponse sur ce sujet sera moins claire que sur la question précédente.
Nous avons appris que certains députés souhaitaient revenir à une marche de 370 millions d'euros pour le FPIC. Nous confirmez-vous qu'il ne s'agit pas de votre projet ? Pour ma part, je vous propose une marche zéro. Vous pourriez étendre au FPIC la mesure que vous concédez pour la DGF. Vous pouvez l'appeler à votre convenance gel, moratoire, report. Pour les communes, je pense que cela serait en tout cas un répit. La métropole du Grand Paris a besoin d'un gel à la fois pour ce qui concerne le niveau global mais aussi pour la répartition des flux entre ses communes.
La France territoriale est en pleine mutation, sous l'effet de nos réformes dans leurs différents aspects, des communes nouvelles aux régions en passant par les cartes intercommunales, mais aussi en raison de la nécessité de redresser les finances publiques. Parties prenantes de ce mouvement administratif, de nombreux agents et employeurs territoriaux expriment des inquiétudes sur le volet « ressources humaines ».
Comme pour la fonction publique d'État, à propos de laquelle j'ai eu l'occasion d'interroger M. le ministre de l'intérieur la semaine dernière, il m'apparaît essentiel que les conditions d'un accompagnement fort et structuré soient mises en place le temps que les réformes se déploient et prennent leur rythme de croisière.
Quel signal est envoyé par l'État aux collectivités de ce point de vue alors que, pendant qu'il prévoit pour ses propres agents cet accompagnement, par exemple à travers le plan « préfectures nouvelle génération » qui est doté d'un volet ressources humaines (RH) important, le budget du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) va être diminué via la baisse du taux de cotisation obligatoire de 1 % à 0,9 % ? Je salue la décision du Gouvernement de remonter ce taux qui devait initialement être de 0,8 %, et je l'encourage très vivement à aller au bout de cette logique en maintenant le taux à 1 %.
La phase dans laquelle nous entrons va nécessiter un accompagnement RH renforcé et un effort pour la formation des agents territoriaux, particulièrement pour ceux appelés à changer de poste, voire de métier. Il s'agit d'une question d'investissement pour l'avenir de la qualité de nos services publics locaux. Je pense aussi aux nouveaux besoins qui découleront de la future loi relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires. Je pense enfin à la nécessité d'encourager, comme nous le faisons pour la fonction publique d'État, l'apprentissage dans la fonction publique territoriale.
Le Gouvernement a par ailleurs reconnu ce besoin pour plus de formation en prévoyant, par un décret du 31 octobre dernier, l'allongement de la durée de la formation d'intégration des agents des catégories A et B de cinq à dix jours. Rien que pour le CNFPT, cette nouvelle mesure représenterait un coût supplémentaire de 3,8 millions d'euros.
La baisse des ressources du CNFPT risque enfin d'entraîner une réduction de son offre de formation, que les collectivités et établissements devront in fine assumer eux-mêmes, ce qui reviendra à alourdir leurs dépenses, à rebours des intentions du Gouvernement.
Pour revenir sur les propos tenus par Mme la ministre il y a un instant, permettez-moi de citer quelques chiffres : l'excédent budgétaire du CNFPT pour 2014 s'élève à 3,8 millions d'euros pour un budget de 450 millions. Le solde des excédents cumulés qui se résorbent s'élève à 44,5 millions, soit une trésorerie de six semaines de fonctionnement, que le CNFPT a prévu de ramener à 30 millions en 2016 afin de financer des mesures nouvelles, puis à 20 millions en 2017. Contrairement aux collectivités, le CNFPT ne perçoit pas de douzièmes : il est son propre percepteur. Ses recettes mensuelles, inégales et imprévisibles, dépendent des versements volontaires des collectivités. La baisse du taux à 0,9 % se traduit par une consommation totale de l'excédent en un an et par la disparition de la trésorerie. Vous annoncez un futur radieux de la formation, madame la ministre, mais, même si vous défendez la formation des agents, je crains que l'avenir nous réserve des lendemains moins lumineux.
Madame la ministre, vous sembliez dire que vous aviez été alertée tardivement sur la question de la DGF. Pourtant, le Comité des finances locales, l'Association des maires de France (AMF), Villes de France, l'Assemblée des communautés de France (ADCF), l'Association des maires de grandes villes de France (AMGVF) vous ont fait part de leurs inquiétudes concernant la dotation forfaitaire depuis assez longtemps. Elles provenaient surtout du fait que nous n'obtenions pas de simulations pour 2017, 2018 et jusqu'à 2025, compte tenu des mécanismes de stabilisation.
La réforme est repoussée d'un an, mais sa partie relative à la péréquation, c'est-à-dire à la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU), à la dotation de solidarité rurale (DSR), et à la dotation nationale de péréquation (DNP), a été débattue largement et elle a fait l'objet de simulations. Alors qu'elle donne globalement satisfaction, pourquoi n'est-elle pas envisageable dès cette année ?
L'article 58 amorce la réforme de la DGF pour le bloc communal. Je voudrais à cet égard rappeler les spécificités concernant les communes de Mayotte.
Les ressources de ces communes ainsi que du département-région de Mayotte ont été bouleversées, dans le cadre de la départementalisation du territoire par une réforme instaurant notamment la fiscalité locale directe au 1er janvier 2014 par une ordonnance du 29 septembre 2013. Par l'effet de ses dispositions, la logique des ressources des communes de Mayotte est dérogatoire au droit commun.
L'année 2014 devait être une année de transition, permettant de mettre en place le dispositif. Il était prévu de l'ajuster dans les années suivantes au vu du bilan tiré des résultats de cette première année. Ce bilan n'est toujours pas prêt ; la Cour des comptes y travaille. Nous attendons ses conclusions et ses recommandations avec impatience. D'ici là, les mesures transitoires instaurées en 2014, reconduites en 2015 sont en passe d'être à nouveau mises en oeuvre en 2016, sans que le Parlement ne soit pleinement informé de la situation ainsi créée.
Cette situation a pour conséquence de maintenir certaines collectivités, notamment les communes de Mayotte, en marge des réformes en cours. En raison de l'application d'anciennes modalités de calcul, les collectivités en question sont également maintenues dans un état de sous-évaluation de leur DGF de 50 % par rapport aux autres collectivités d'outre-mer équivalentes selon les chiffres disponibles dans divers rapports, ce qui est encore plus gênant.
Cette situation, outre son caractère discriminant, met les collectivités du territoire dans une incertitude grave sur leurs ressources pour les années à venir à un moment où les enjeux du territoire sont cruciaux, notamment en matière d'investissement avec l'émargement aux fonds européens.
Ma question est donc simple : à quel moment disposerons-nous des éléments d'analyse des réformes fiscales en cours dans ce département, au niveau communal et départemental, afin d'être en mesure de rectifier, comme cela était prévu, les dispositions de l'ordonnance du 29 septembre 2013, rectification qui revêt un caractère indispensable et urgent ?
Nous avons adopté l'année dernière l'un de mes amendements au projet de loi de finances pour 2015, qui est devenu son article 112 : « Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er octobre 2015, un rapport sur le fonctionnement et l'évolution du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales. Ce rapport évalue notamment la question de la soutenabilité des prélèvements pour les communes contributrices aux différents dispositifs de péréquation ».
J'apprends ce soir par Mme Pires Beaune que ce rapport vient de sortir, mais nous n'en avons pas eu connaissance. Nous aurions espéré pouvoir en disposer dans les délais légaux, mais, surtout, suffisamment tôt pour pouvoir l'analyser avant notre réunion de ce soir.
Les déclarations de certains de nos collègues justifient les inquiétudes qui m'ont poussée à demander ce rapport. Nous avons entendu qu'il fallait augmenter le nombre de communes exonérées, mais n'oublions pas qu'en péréquation horizontale, l'exonération de certains ne peut que peser sur les autres ! Nous avons aussi entendu qu'il fallait augmenter le montant de la péréquation alors même que le Gouvernement, sensible aux craintes que nous avons exprimées, avait accepté de réduire le prélèvement cette année. Mme Pires Beaune proclame enfin, pour conclure son rapport, que le FPIC constitue un très bon outil de redistribution sans qu'il soit apporté de réponse à la question de sa soutenabilité.
Le FPIC pose manifestement plusieurs problèmes même si les évolutions en la matière sont très attendues. Les collectivités les moins riches, par exemple en zones frontalières, rencontrent de très grandes difficultés budgétaires.
La réforme de la DGF est au coeur de nos discussions. Les préoccupations que j'avais exprimées en étant auditionné, au nom de mon groupe parlementaire, par Christine Pires Beaune et le regretté Jean Germain se retrouvent bien dans le rapport de notre rapporteure spéciale. C'est pourquoi je soutenais dans ses grandes lignes la réforme proposée dans ce projet de loi de finances, même si je comprends les inquiétudes de certains élus quant à sa concomitance avec la baisse des dotations de fonctionnement et à l'absence de simulations fiables de long terme. Cette absence peut sans doute être partiellement imputable au fait que le Gouvernement a décidé de ne plus diffuser, au-delà du cercle des associations d'élus, le CD-ROM contenant l'ensemble des informations relatives au calcul de la DGF. C'est d'ailleurs l'objet d'une question écrite que j'ai posée au Gouvernement.
Sur le fond, la réforme me convient bien puisque la dotation de base allait notamment être définie en fonction d'un montant unitaire par habitant – 75,72 euros –, le même pour toutes les communes : rurales, péri-urbaines ou urbaines. C'est un gage d'une plus grande égalité ; les premiers gagnants de cette réforme sont d'ailleurs les communes rurales.
Le mécanisme de la DGF des régions devrait également être revu, mais je comprends qu'il faut d'abord laisser s'installer la fusion des régions. On pourra profiter du report de la DGF communale à 2017 pour y réfléchir pour la même année. J'avais déposé trois amendements en ce sens, qui ont été retoqués en séance.
Je défendrai tout à l'heure deux amendements. Le premier consiste à décaler au 1er janvier 2017, soit d'une année supplémentaire, la date limite pour créer des communes nouvelles en bénéficiant des dispositions financières incitatives. En effet, de nombreux projets sont en cours d'élaboration, et ne seront pas prêts dans les courts délais qui leurs ont été imposés.
Mon deuxième amendement vise à revenir sur la fin de l'exonération de taxe de séjour pour les personnes en situation de handicap, votée en même temps que la fin des exonérations pour les personnes bénéficiaires d'allocations sociales, lors du projet de loi de finances de l'année dernière.
J'espère que le rapport paru hier soir – dont je ne dispose pas encore – évoque l'impact de la création de la métropole du Grand Paris sur le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC). En effet, la méthode ne peut manquer de surprendre : aucune étude d'impact n'a été menée, les simulations ont été tardives et le rapport nous parvient le soir même de la discussion. Je suis favorable à la péréquation, mais les communes ne peuvent pas accepter que celle-ci devienne une punition ! Avant d'ouvrir la discussion sur le FPIC, pourrons-nous débattre de ce rapport ?
Quels que soient les correctifs que vous pourrez apporter, pour le FPIC comme pour la DGF, la meilleure solution serait de reporter la réforme d'un an. Il faut geler le FPIC pour 2016 au niveau de 2015, de façon à avoir le temps dans l'année qui vient de traiter sérieusement, dans le fond, le système de péréquation pour éviter l'injustice à l'égard des communes qui ne reçoivent plus rien ou qui paient beaucoup plus qu'elles ne peuvent donner. Vous avez pris la sage décision de reporter la réforme de la DGF ; faites preuve de la même sagesse en gelant le FPIC, afin de tout réformer en même temps, pour 2017.
Pour permettre aux communes nouvelles de se constituer, il faut leur accorder un peu de temps et les laisser bénéficier de l'avantage fiscal qui leur est consenti. Jamais auparavant les communes ne s'étaient regroupées sur la base de l'unanimité ; il s'agit donc d'une belle réussite. Mais les effets pervers sont nombreux. Le seuil de 10 000 habitants, en particulier, apparaît trop bas : en milieu rural, des villes centres de 11 000 ou 12 000 habitants – qui voient s'organiser autour des communes plus riches qui pourtant ne portent pas les charges de centralité – ne peuvent pas se constituer en commune nouvelle.
Par ailleurs, compte tenu de la réussite du dispositif, il faut se poser la question de sa soutenabilité financière. Les sommes qui ne seront pas payées par certaines communes seront immanquablement reportées sur d'autres ; a-t-on réalisé des simulations sur ces questions ? Sans remettre en cause le beau texte porté par Jacques Pélissard et Christine Pires Beaune, il faut examiner les choses de très près.
Madame et monsieur les ministres, vous étiez présents, tout comme plusieurs parlementaires, au Conseil national de la montagne (CNM) qui s'est réuni à Chamonix le 25 septembre dernier sous la présidence du Premier ministre. Ce dernier a alors reconnu, au nom du Gouvernement, que le logiciel du FPIC avait probablement déraillé. Comment pourrait-il en être autrement quand, en Savoie comme en Haute-Savoie, 100 % des communes sont contributrices au Fonds ? Le Premier ministre a estimé qu'il fallait adoucir ce prélèvement dès le projet de loi de finances 2016, notamment pour les zones de montagne.
Avec Annie Genevard, nous n'avons eu de cesse d'attirer l'attention sur la prise en compte du revenu dans le FPIC, notamment dans les zones à la fois frontalières et de montagne, et sur la situation de la région parisienne. Quel ne fut pas notre étonnement de recevoir en guise de réponse la réforme de la DGF, conduite sans simulation et malgré les protestations de François Baroin et d'André Laignel, respectivement président et vice-président de l'Association des maires de France (AMF), ou encore de Laurent Wauquiez, président de l'Association nationale des élus de la montagne (ANEM) ou de Marie-Noëlle Battistel, secrétaire générale de l'ANEM ! La suppression de la dotation touristique porte un coup de canif au contrat entre l'État et les communes touristiques, en vigueur depuis une vingtaine d'années ; celle de la dotation de centralité est également dramatique. Aujourd'hui, nous avons besoin d'y voir clair dans le FPIC car nous ne savons plus quoi dire, ni quoi faire ; les collègues élus locaux se demandent notamment comment préparer les plans pluriannuels d'investissement.
Monsieur le ministre, où en sont les simulations financières sur la mutualisation intercommunale des offices de tourisme, qui n'est pas sans poser problème dans les zones balnéaires et les zones touristiques ?
S'il a beaucoup été question de la métropole du Grand Paris, je voudrais pour ma part évoquer un problème qui se pose dans des territoires ruraux, notamment dans le département de l'Yonne, mais aussi dans celui des Vosges. La mise en oeuvre de la loi du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique a amené les conseils départementaux à s'engager dans des programmes d'investissement en équipement très importants, censés faciliter la desserte généralisée de ces territoires en haut ou très haut débit et compléter les initiatives des opérateurs en matière de montée en débit et de déploiement de la fibre Fiber to the home (FTTH).
Pourquoi évoquer cette question dans le cadre du projet de loi de finances ? Parce que la loi de finances pour 2015 a supprimé l'éligibilité des dépenses de montée en débit au fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) ; les directions départementales des finances publiques (DDFIP) ont également fait planer des incertitudes quant à la possibilité de récupérer la TVA sur ce type d'opérations qui représentent des montants financiers considérables pour les conseils départementaux, que l'augmentation des dépenses sociales soumet par ailleurs à une forte pression. Pouvez-vous préciser ce qu'il en est en matière de FCTVA et de possibilités de récupération de la TVA ? Seriez-vous prêts à amender le projet de loi de finances pour corriger ce point ? Les conseils départementaux ruraux vous attendent !
Il serait judicieux de laisser aux communes nouvelles créées après le 1er janvier 2016 la possibilité de bénéficier des avantages financiers initialement prévus, qui représentent incontestablement un élément moteur permettant d'accélérer le processus de création de ces collectivités.
En matière de révision des valeurs locatives cadastrales, une expérimentation est actuellement en cours. Avez-vous déjà obtenu des résultats ? Quand cette réforme indispensable doit-elle entrer en vigueur ?
Enfin, la réforme de la DGF appelle de la part des élus que nous sommes de multiples réserves, chacun réagissant en fonction des incidences financières supposées sur la collectivité qui le concerne. Nous manquons donc d'objectivité et de sérénité, le prisme égoïste l'emportant sur l'intérêt général. J'en appelle ardemment à une prise de conscience collective : la réforme de la DGF est indispensable tant le système actuel est injuste, illisible et suranné. Nous devons tous conduire une auto-analyse pour permettre à la législation d'évoluer.
Nous vivons ce soir un bien triste moment de la vie parlementaire, un de ces moments qui abaissent le Parlement et amènent de l'eau au moulin des populistes de tous bords qui n'ont pas de mots assez durs pour stigmatiser le travail des élus. À huit jours à peine du congrès des maires, voilà que le Premier ministre annonce que l'on ne peut pas adopter la réforme de la DGF, qu'il convient d'en différer les effets au 1er janvier 2017, mais que nous devons quand même la voter. Aucune étude d'impact, aucune véritable concertation, aucune simulation ne nous sont proposées ; les élus sont contraints de se fier au site d'un grand quotidien du soir pour trouver quelques chiffres. Dans ma circonscription, plus de la moitié des communes – de toutes petites communes rurales – voient à nouveau leur dotation baisser.
Vous nous demandez de voter le principe de la réforme ; mais ce ne sont pas des principes que l'on doit voter, c'est un texte de loi – et ce dans le brouillard, sans aucune visibilité ! Qui accepterait de conduire, les yeux bandés ? Certes, la DGF est devenue illisible et incompréhensible ; mais ne gâchons pas cette occasion de la réformer alors que 36 658 maires et plus de 2 000 intercommunalités nous attendent. Allons-nous leur livrer un texte bâclé au terme d'un débat au Parlement tronqué ? Allons-nous donner aux populistes des arguments supplémentaires pour nous stigmatiser ? Je suis convaincu que vous ne le souhaitez pas, et vous vous grandiriez en retirant l'article 58, non pour enterrer cette réforme, mais pour mieux la conduire. Ce n'est pas la réforme qui nous angoisse, mais la façon dont celle-ci est engagée. Plutôt qu'envisager une clause de revoyure l'année prochaine, consacrons un texte spécifique à la réforme de la DGF ! De plus, l'absence de simulation et de toute étude d'impact sérieuse fragilise ce texte devant les nombreux recours qui seront immanquablement formés devant le Conseil constitutionnel. Nous en appelons à la sagesse du Gouvernement.
Réformer la DGF, assurer la péréquation horizontale sur l'ensemble du territoire et revoir l'ensemble des modes de financement des collectivités représentent une nécessité impérieuse ; nous sommes donc en train de rater un rendez-vous important. Ce n'est pas la convergence de ces trois initiatives, à cet instant, qui marque l'échec, mais notre incapacité à dépasser notre horizon actuel, marqué par nos diverses responsabilités, pour assumer notre responsabilité à l'égard des générations futures, tant dans l'analyse de la situation que dans la recherche des solutions qui permettraient aux collectivités comme à l'État de continuer à fonctionner selon le modèle français. Je le constate avec amertume : les associations qui représentent l'ensemble des élus semblent avoir oublié la nécessité de participer à l'intérêt général et à la cohérence de la politique de la Nation !
Madame et monsieur les ministres, nous avons travaillé pendant plusieurs semaines pour tenter de faire aboutir le projet de la métropole du Grand Paris. Celle-ci existera au 1er janvier prochain ; quelle sera, demain, la situation des communes et des territoires qui en feront partie ?
À ceux qui en appellent à une prise de conscience collective, je rappelle qu'en 2010 – en pleine crise, au moment de grandes difficultés budgétaires –, l'annonce du gel des dotations avait créé une vraie panique dans les rangs de l'opposition de l'époque, qui a crié au scandale. Avez-vous perdu la mémoire ? N'avez-vous pas conscience de ce qui s'est passé à l'époque ni de ce qui se passe aujourd'hui ?
La DGF des départements représente une large part des transferts de l'État au profit des collectivités ; elle constitue également 25 % des budgets des départements. Aujourd'hui, ces derniers connaissent une phase d'endettement prononcée, conséquence directe de l'érosion des capacités d'autofinancement. La première baisse de la DGF de 1,5 milliards d'euros, en 2014, a représenté 7 % de l'épargne brute de 2013 des départements, qui a fondu comme neige au soleil. Je vous laisse imaginer ce que représente la baisse de 3,7 milliards en 2015 et celle qui arrive en 2016, alors que les capacités d'autofinancement des départements sont d'ores et déjà négatives.
La progression des dépenses sociales, imputable notamment à la dynamique du revenu social d'activité (RSA), est à l'origine de 87 % de la progression des charges de fonctionnement des départements en 2014. Cette progression est liée à l'accroissement de 5,76 % du nombre de foyers bénéficiaires du RSA et à la revalorisation du montant de l'allocation. L'ensemble des équilibres budgétaires des départements sont aujourd'hui déstabilisés ; entre 2015 et 2017, la Cour des comptes prévoit ainsi une augmentation de 3,6 milliards d'euros de dépenses sociales, qui, conjuguée à la baisse des dotations, met les départements dans une situation de grand désarroi.
Si, entre 2002 et 2012, l'on avait maîtrisé la dépense publique – d'État comme locale – et la dette publique, nous n'aurions pas à réaliser des réformes de cette ampleur aujourd'hui. Et vous nous reprochez encore de ne pas agir assez vite ! Si la réforme de la DGF avait été faite entre 2002 et 2012 – ce qui aurait permis de partager l'effort plus justement –, nous n'aurions pas à la conduire aujourd'hui. Enfin, à ceux qui regrettent le calendrier de la réforme, je réponds qu'une bonne réforme est une réforme comprise à défaut d'être acceptée par ceux qui y perdent, lisible pour nos concitoyens et applicable, donc votée. Je préfère une réforme qui se fait dans la durée, s'étalant sur deux lois de finances, à une réforme qui ne se fait pas du tout !
Nous sommes d'accord, toutes tendances confondues, sur la nécessité de la réforme et sur le diagnostic établi par Christine Pires Beaune et Jean Germain, et nous devons légiférer le plus rapidement possible. Nous semblons également d'accord – en tout cas de notre côté de la salle – sur l'architecture du nouveau dispositif. Nous pouvons enfin presque nous accorder sur les critères permettant les ajustements. Certains d'entre eux reposant sur la nouvelle carte des EPCI, nous pourrons y réfléchir plus précisément au printemps prochain. En attendant, nous devons acter le principe de la réforme et en voter l'architecture tout en en reportant l'application au lendemain de la carte des EPCI – une forme de clause de rendez-vous. Nous devons enfin voter la DGF 2016. Je me joins toutefois à l'interrogation de Michel Heinrich, qui mérite une réponse précise ; en effet, il faut pouvoir aider, dès l'année prochaine, les communes qui souffrent le plus.
Ancien maire d'une ville qui gagnerait beaucoup à cette réforme, président d'un EPCI qui y perdrait, j'estime qu'un des enjeux de compréhension et d'acceptation de la mesure est celui de sa lisibilité dans la durée. Nous l'abordons en fin d'année, alors que les constructions de budget 2016, intégrant la baisse des dotations, sont en cours. Mais la perspective est pluriannuelle ; existe-t-il des difficultés techniques empêchant les prévisions sur plusieurs années, notamment à l'horizon 2020 ?
J'adhère à la prise d'effet différée décidée par le Gouvernement, qui permettra d'étudier tous les paramètres. Pourtant, les premières simulations me donnaient gagnant ; nous ne sommes donc pas guidés uniquement par l'égoïsme !
Les études devraient prendre en compte les charges induites par la précarité, la pauvreté, le chômage et la démographie des collectivités, notamment le poids des jeunes dans les quartiers. En effet, bien que la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) ait augmenté très sensiblement au cours des dernières années, elle ne couvre pas toutes les charges. À ce propos, madame la ministre, je suis satisfait de l'annonce du maintien de la DSU « cible » pour 2016, conformément à la promesse du Premier ministre lors de la présentation du programme de stabilité. Je reste toutefois inquiet pour les dotations de compensation des exonérations de taxe foncière sur les logements sociaux ; cette variable d'ajustement, qui a tendance à s'effriter chaque année, risque encore de pâtir de l'arrivée des communes nouvelles dans lesquelles l'on maintiendra la DGF. On parle beaucoup d'équité et de solidarité ; ce sont pourtant les communes ayant beaucoup de logements sociaux qui perdent le plus. Il serait bon d'en tenir compte.
Je tiens à souligner le soutien à l'investissement dans le budget 2016, notamment au travers de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) qui affecte un milliard d'euros aux projets d'investissement structurants.
Je regrette que la mise en place de la DGF 2016 soit reportée d'un an ; j'espère que ce délai sera mis à profit pour affiner les choses, et que la DGF pourra se mettre en place dans de bonnes conditions à compter du 1er janvier 2017. Je tiens à saluer l'excellent travail consigné dans le rapport de Christine Pires Beaune et à soutenir les deux ministres qui ont porté ce projet. Dans le cadre des nombreuses auditions de la Commission sur l'incidence de la diminution des dotations au bloc communal, notamment en Maine-et-Loire et à Marseille, j'ai entendu que la contrainte pouvait avoir du bon, en forçant à analyser les routines et à vérifier l'adéquation des services publics aux besoins. Se poser des questions sur les investissements à faire pouvait également s'avérer bénéfique.
Ce soir, j'ai entendu certains se plaindre et crier au loup parce qu'on leur diminuait leurs dotations. Vous refusez, mes chers collègues, d'accompagner les changements nécessaires et de travailler d'une manière posée. Souvenez-vous que les familles françaises voient elles aussi leur revenu diminuer, et que les entreprises sont chahutées par la concurrence et les difficultés économiques. Mais elles ne se plaignent pas de la baisse des dotations de l'État car leurs revenus, elles doivent les gagner !
Je souhaite que les communes nouvelles puissent continuer à se constituer. En Maine-et-Loire, des élus ont beaucoup travaillé à l'élaboration de cette formule qui verra le nombre des communes diminuer de quelque 25 %. Je souhaite également que le Gouvernement soutienne les communes urbaines situées en banlieue, en grande difficulté. On ne peut qu'opposer leur cas à celui des collectivités gâtées qui, pourtant gavée de ressources, n'ont pas voulu accompagner la réforme de la DGF.
Il serait opportun de reporter l'application, y compris financière, de la réforme au 1er juillet 2016 ou au 1er janvier 2017, car si nous voulons faire des communes nouvelles de projet – et non d'opportunité –, il faut leur laisser du temps. Je soutiendrai donc cette disposition.
Permettez-moi quelques considérations générales sur le renoncement à la réforme, que j'ai exposées dans une lettre ouverte au Président de la République. Chaque année, le rapport sur les collectivités territoriales déchaîne les passions, sans doute parce que c'est le seul moment important de la vie parlementaire où beaucoup d'entre nous se comportent plus comme des élus locaux que comme des législateurs porteurs d'une vision nationale. Mais la DGF redistribuée n'est pas désincarnée ; c'est le contribuable national qui la verse au contribuable local, et le contribuable national ne serait pas d'accord pour faire perdurer les injustices. Or dans certains secteurs ouvriers, il paie largement pour des communes sinon riches, en tout cas dotées de davantage de moyens que les autres. Je regrette que l'on ait décidé sciemment de faire perdurer les injustices un peu plus longtemps.
Pour terminer sur une note plus positive, je tiens à souligner que le Gouvernement n'ignore pas la situation des collectivités territoriales. Il a fortement soutenu l'investissement, y accordant un milliard d'euros dans le cadre de la DETR, mais aussi – et ce n'est pas négligeable pour les collectivités – via l'accompagnement sur le FCTVA voirie et bâtiment. Je souhaite toutefois que l'article 58 soit voté et, si possible, que l'on revienne sur une décision prise hâtivement.
C'est souvent lorsqu'elle est conjuguée à la baisse de la DGF que la montée en puissance du FPIC est douloureuse pour les communes dans leurs dépenses d'investissement et donc pour les citoyens. J'ai d'ailleurs déposé un amendement – qui sera examiné demain – visant à geler le montant du FPIC pour 2016. Le fonds de péréquation intercommunal a été créé par la loi de finances pour 2012, mais lors de sa mise en place progressive, les communes ne s'attendaient pas à voir leurs dotations baisser massivement et rapidement. Je rappelle que la droite avait, tout au plus, gelé la DGF.
Comme le montre le « bleu » budgétaire, les bons élèves sont pénalisés par la péréquation, tant horizontale que verticale. Cette dernière – qui va du national vers le local – semble élevée, mais vous utilisez de bien étranges indicateurs : pour la péréquation horizontale, vous mesurez un pourcentage de la totalité des potentiels financiers d'une collectivité, alors que pour la verticale, vous prenez le pourcentage de la somme de la DGF reçue, elle-même en baisse. Les chiffres ne sont donc pas vraiment révélateurs. Certes, la péréquation verticale progresse par rapport à 2015, mais que comptez-vous faire pour la faire monter en puissance ? En effet, cette péréquation verticale doit, à mon sens, être privilégiée par rapport à la péréquation horizontale.
Madame Karamanli, vous avez évoqué la nécessité d'établir un lien entre les dotations de l'État et l'effort fiscal des collectivités, ainsi que la possibilité de créer une forme d'indice de pauvreté. Nous avons simulé cette solution, suggérée par un des membres du Comité des finances locales (CFL), mais elle ne répond malheureusement pas à la réalité du terrain. Les indices synthétiques – qui servent au calcul de la DSU et de la DSR – incluent déjà les logements sociaux et des critères de pauvreté ; faut-il prendre ces paramètres en compte deux fois ? Les logements sociaux et le dégrèvement du foncier bâti représentent un vrai sujet et pourraient donner lieu à un autre type de mesure, qui ne s'appuierait pas sur un indice, mais sur une réalité : celle de la compensation du foncier bâti des logements sociaux. J'ajoute enfin que la compensation des dégrèvements de la taxe d'habitation au-delà de 3,44 % des revenus imposables est gérée correctement, même si l'on nous reproche des retards. Prendre en compte les mêmes critères plusieurs fois m'apparaît difficile ; mieux vaut agir par le biais du foncier bâti – ce qu'on ne peut pas encore faire cette année.
Monsieur Poisson, vous nous reprochez les problèmes de terrain qui provoquent la colère des maires en milieu rural. Mais une des associations, bien connue, est favorable à la réforme qui crée une dotation unique par habitant – la même pour toutes les communes, de l'ordre de 70 ou 75 euros – et une dotation de ruralité. En effet, nous avons besoin de terrains agricoles, d'espaces naturels, de sites « Natura 2000 » et d'espaces de protection des captages d'eau, et l'indice tenant compte du nombre d'habitants et de la superficie répondait précisément à la nécessité de garder des espaces non construits. En dehors du nombre d'habitants, la DGF ne comporte qu'un indice de ressources, le bâti ; or il faut arrêter de bâtir sur les terres agricoles. L'indice répond donc à ce double objectif, et j'espère qu'il sera adopté car il en va de notre indépendance alimentaire en 2030, 2040 ou 2050. Aujourd'hui, il n'est plus acceptable de perdre un département tous les dix ans. La dotation de ruralité convenait donc à certains maires ruraux, d'autant qu'on garantissait une aide minimum par habitant.
Je ne reviens pas sur la TVA dite « sociale » ; vous reprendrez sans doute ce débat en séance.
La masse des crédits consacrés aux dotations aux collectivités territoriales est supérieure au montant global de l'impôt sur le revenu payé par les Français, même s'il s'agit de grandeurs comparables. Or ce sont les mêmes foyers qui paient l'impôt local et l'impôt national. Par ailleurs, si l'on veut baisser la dépense publique et diminuer notre déficit sans augmenter la pression fiscale, où trouver les 150 milliards d'euros que d'aucuns réclament très rapidement ?
Monsieur de Courson, vous avez attiré notre attention sur les conseils départementaux. Beaucoup ont oeuvré pour qu'on les maintienne, mais je reste persuadée que la prise en charge des routes par ces instances pose problème. En effet, moins il y a d'habitants, et plus le kilomètre de route par habitant est difficile à financer. On aurait pu imaginer une péréquation à l'échelle régionale, mais nous n'avons pas, collectivement, fait ce choix ; les départements ayant le moins d'habitants se retrouvent donc avec le plus de charges, notamment en matière de voirie.
Pour ce qui est du RSA, nous sommes tout à fait d'accord avec l'analyse du reste à charge ; nous sommes d'ailleurs le premier gouvernement à avoir dit publiquement que le reste à charge des départements était trop important par rapport aux engagements. Le transfert du RSA n'est pas de notre fait, mais nous l'assumons au nom de la continuité de l'État. Aujourd'hui s'ouvre le débat national sur cette allocation, et nous disposons de quatre mois pour le conclure. J'espère que les citoyens vont se l'approprier, car aujourd'hui le Gouvernement, les départements et les parlementaires se renvoient des arguments techniques, tandis que le citoyen ignore que le RSA est en grande partie financé par l'impôt local et les droits de mutation à titre onéreux (DMTO). La vraie question est de savoir qui doit assumer la solidarité : la personne, au travers d'un ticket modérateur ? Sa famille ? Le département – auquel cas il s'agit d'une assiette locale ? L'échelon national, via l'impôt sur le revenu ou la contribution sociale généralisée (CSG) ? J'espère que ce débat ne sera pas reporté, comme d'autres réformes.
Monsieur Alauzet, en fusionnant les fonds de solidarité relatifs aux catastrophes naturelles et aux calamités publiques, nous avons répondu à tous ceux qui avaient besoin de crédits. Il n'y a pas de problèmes de paiement ; les seuls problèmes concernent la procédure et sont traités par le ministère de l'intérieur. Certes, il faut aller plus vite en matière de crédits de paiement, mais c'est plutôt une bonne nouvelle pour les communes touchées. Vous demandez comment les choses doivent se dérouler lorsque des événements de ce type provoquent une atteinte aux biens des collectivités territoriales. Si le montant des dégâts est supérieur à 150 000 euros hors taxes, l'État peut intervenir au titre de la solidarité nationale ; mais lorsqu'il s'agit de dégâts supérieurs à 6 millions d'euros hors taxes, le nouveau fonds pourra être mobilisé immédiatement. Le PLF 2016 doit procéder à la création d'une dotation budgétaire, issue de la fusion des deux fonds, qui s'appellera « dotation d'équipement des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des événements climatiques ou géologiques ». Cette dotation doit simplifier et améliorer les procédures d'indemnisation. Aux termes de notre engagement, les crédits inscrits doivent répondre à la projection de l'année qui vient de s'achever dans des conditions difficiles, même si nous espérons ne pas avoir à faire face, l'année prochaine, à autant de catastrophes. Le ministère de l'intérieur vous fera parvenir une note spécifique sur ce sujet, avec des chiffres plus précis.
Je regrette, monsieur Giraud, que vous n'ayez pas été associé aux débats sur la réforme qui ont eu lieu en commission, mais le fonctionnement des groupes politiques – y compris le vôtre – est ce qu'il est, et le Gouvernement ne saurait se charger de désigner leurs représentants.
La question de la DETR est essentielle. Le montant des autorisations d'engagement s'élève à près de 816 millions d'euros, celui des crédits de paiement à environ 666 millions. Avec l'apport de la réserve de crédits de paiement, tous les besoins ont pu être satisfaits à l'euro près. La DETR ne pose donc aucun problème, et tout montant qui ne serait pas versé cette année pourra l'être l'an prochain. Cette dotation a d'ailleurs permis à de nombreuses collectivités de résoudre les difficultés qu'elles rencontraient en raison de la baisse globale des dotations – que je ne nie pas.
S'agissant des communes de montagne et des parcs naturels, il nous est plus facile d'envisager la réalité des collectivités que de raisonner par logarithmes. Un mot tout d'abord sur le calendrier : si la mission parlementaire a perdu du temps, monsieur Poisson, c'est parce que nous souhaitions qu'elle se compose d'un parlementaire de la majorité et d'un autre de l'opposition – en l'occurrence, de la nouvelle majorité sénatoriale. Or, après avoir longuement tergiversé, cette dernière nous a finalement indiqué qu'elle ne participerait pas à la mission pour ne pas se retrouver « pieds et poings liés » – comme si cela pouvait se produire dans le cadre d'une mission parlementaire transpartisane. En clair, nous avons perdu du temps et l'équilibre politique n'a pas été respecté. Cela étant, nous avons travaillé tout l'été, dès la remise du rapport de mission, pour résoudre la difficulté des communes-centre situées au coeur de grands espaces. En nous fondant sur la réalité de leur situation, nous avons donc modifié les paramètres des logarithmes pour veiller à ce que les charges de centralité de ces communes soient mieux couvertes qu'auparavant.
Peut-être aurions-nous pu ne pas mettre en oeuvre le CICE, monsieur Sansu, mais il me semble que personne n'est opposé à la compétitivité de nos entreprises. N'ayant pas mandat pour répondre plus en détail à votre question, je me contenterai de vous indiquer que je soutiens l'ensemble des décisions prises par le Gouvernement.
J'approuve les propos de M. Dussopt concernant le soutien à l'épargne et les capacités d'investissement. Compte tenu du report de l'entrée en vigueur de la réforme, c'est en 2017 que nous réviserons la gestion de la DSU ; je pense qu'il faudra alors étendre l'exonération de contribution au FPIC au-delà des seules communes relevant de la DSU « cible », même si nous devrons hélas apporter à votre proposition la même réponse que l'an dernier. Actuellement, 180 des 280 communes éligibles à la DSU cible sont totalement exonérées de contribution au FPIC, et les 100 autres le sont partiellement, à quoi s'ajoute le premier quart des communes éligibles à la DSR « cible », soit 2 500 communes. Cet état de fait est sans doute l'un des motifs ayant suscité la réforme : aller au-delà reviendrait en effet à mettre le FPIC en difficulté. Il faudra donc trouver d'autres règles, ce que vous pourrez faire en améliorant l'article 58.
Quant aux frais de gestion de la fiscalité locale – sur lesquels, monsieur Dussopt, je vous ferai une réponse plus détaillée par écrit –, je rappelle qu'ils servent à couvrir les dégrèvements. Or, si l'État transfère le produit de ces frais de gestion aux collectivités locales, je vous le dis en toute franchise : il lui faudra trouver ailleurs le financement des dégrèvements – qui est déjà problématique dans certains cas. En clair, ce transfert n'aura pas lieu – en tout cas pas cette année.
J'en viens à la métropole du Grand Paris (MGP). Le ministère a conduit une concertation spécifique sur l'application du FPIC à la MGP, et la présentation générale des travaux s'est achevée le 3 novembre en présence de l'ensemble des représentants qui le souhaitaient et qui ont travaillé à l'ordonnance financière et fiscale. Je précise à M. Ollier que je ne décide pas de la composition des délégations ; je ne fais que les inviter. L'objectif du Gouvernement est d'éviter que la création de la MGP bouleverse le FPIC, car c'est la question centrale qui se pose à chacun. Le consensus obtenu prévoit donc d'appliquer les versements et les prélèvements du FPIC aux établissements publics territoriaux (EPT), c'est-à-dire aux nouveaux territoires du Grand Paris – et non à la MGP elle-même, ce qui aurait été très défavorable sur tous les plans – pendant une période transitoire permettant de bâtir la solidarité métropolitaine, qui dépendra du lissage des taux de cotisation foncière des entreprises (CFE) à l'échelle locale, tout d'abord, puis à celle de la métropole. Cette période transitoire sera assez longue.
En attendant, c'est le choix du niveau des EPT qui produit les résultats les plus cohérents : le solde du FPIC évolue certes négativement pour les territoires les plus riches que sont Paris, La Défense et la communauté d'agglomération de Grand Paris Seine-Ouest, mais dans des proportions soutenables. Il évolue positivement pour toutes les autres. D'un solde négatif de 2 millions d'euros, le territoire des aéroports passera ainsi à un solde positif de 4 millions ; idem pour l'EPT de Grand Paris Est, dont le solde négatif de 8,5 millions se transformera en solde positif de 600 000 euros, et celui d'Est-Ensemble, qui passera de 6 à 7 millions en solde positif. Tous ces chiffres vous seront précisément communiqués avant l'examen du texte en séance publique – y compris par commune – mais, en tout état de cause, les cas les plus difficiles ont été traités dans de bonnes conditions et chacun s'est satisfait des résultats obtenus.
Les résultats de ces travaux, qui durent depuis plusieurs mois, auraient pu être affectés par la réforme de la DGF. Nous avons donc envisagé, comme le rappelait Mme Kosciusko-Morizet, d'appliquer la réforme à l'échelle de la MGP mais, en dépit du statut particulier de la métropole, la porosité des fonds entre structures pose un problème d'ordre constitutionnel. Le mécanisme ne pourra pas être mis en place dès 2016. Une difficulté demeure en outre concernant les communes dont les attributions de compensation sont, pour une raison ou pour une autre, supérieures au montant de la fiscalité économique transférée à leurs EPCI. Sans doute faudra-t-il prévoir, comme le faisait la loi NOTRe – qui n'est donc pas entièrement mauvaise, monsieur Ollier… – de réduire progressivement ces attributions de compensation pour aboutir progressivement à une situation de neutralité. En somme, monsieur Popelin, nous proposerons un amendement au projet de loi de finances afin de garantir la continuité du dispositif tout au long de la période transitoire. Ainsi, la MGP ne subira pas un passif éternel, y compris lorsqu'elle aura dans quelques années récupéré le produit de la fiscalité économique. Le résultat final, toutefois, est le suivant : il y a peu de moyens. Nous le savions et l'avions prédit bien en amont. C'est pourtant le choix – insatisfaisant – qu'ont fait 94 % des élus du Grand Paris. Nous vous fournirons naturellement toutes les simulations budgétaires dont nous disposons.
À Mayotte, monsieur Aboubacar, nous sommes nombreux à avoir constaté l'extrême difficulté d'appliquer certaines règles fiscales. Ainsi, comment asseoir la fiscalité sur les propriétés, comme c'est le cas dans toutes les communes de France, lorsqu'il n'existe pas de cadastre ? C'est pour répondre à ces difficultés que les communes mahoraises ont bénéficié de mesures favorables concernant la DGF et les fonds de péréquation, et qu'elles sont exonérées de contribution au redressement des finances publiques de 2014 à 2017. On ne saurait faire autrement que de renforcer au sein de la DGF la péréquation en faveur des communes de Mayotte. De même, la création d'EPCI y permettra le versement dès 2016 d'une dotation d'intercommunalité qui se traduira par une meilleure gestion des collectivités – dont je rappelle qu'elles sont naturellement des bénéficiaires nets du FPIC. Enfin, je précise que la réforme de la DGF prévue à l'article 58 est favorable à toutes les communes d'outre-mer, dont celles de Mayotte.
Permettez-moi de commencer non par relativiser la baisse des dotations, mais par la resituer dans son contexte. Le Gouvernement prévoit un plan d'économies de 50 milliards d'euros ; un parti d'opposition propose quant à lui d'aller jusqu'à 100 à 150 milliards, parmi lesquels, tout porte à le croire, 25 milliards seraient imputés aux collectivités locales. Au contraire, notre plan ne porte leur contribution qu'à 11 milliards d'euros – contre 18 milliards pour l'État et 21 milliards pour le bloc social –, ce qui correspond à 20 % de l'effort global d'économie, proportion identique à celle du poids de la dépense locale dans la dépense publique globale.
M. de Courson se fait l'avocat du tiers état face à la noblesse, des petites communes rurales contre l'aristocratie des grandes communes. Qu'il sache qu'en 2015 l'effort moyen consenti par les communes de moins de 500 habitants est de 8 euros par habitant, contre 55 euros pour les communes de plus de 200 000 habitants. De même, l'effort moyen des communes de moins de 10 000 habitants s'élève à 12 euros par habitant, celui des communes de plus de 10 000 habitants à 27 euros.
S'agissant de l'aide à l'investissement, tout a été dit ; j'y ajouterai seulement l'aide aux maires bâtisseurs, les mesures étendant l'éligibilité au FCTVA aux travaux d'entretien des bâtiments publics et peut-être, par amendement parlementaire, de la voirie, ainsi que le prêt à taux zéro de la Caisse des dépôts et consignations (CDC).
Pour la première fois, l'assiette du FCTVA englobera des dépenses de fonctionnement. La fraction correspondante du FCTVA pourra-t-elle dès lors être inscrite au titre des recettes de fonctionnement ? En effet, nous nous heurtons aujourd'hui à la difficulté majeure que constitue l'épargne nette. Sans épargne nette, pas d'investissement ! J'ajoute que de la même manière, plusieurs amendements très judicieux visent à affecter une partie du produit de la taxe d'aménagement en section de fonctionnement.
Le ministère des finances est saisi de cette question mais n'a pas encore rendu sa décision.
Loin de moi l'intention de minorer les difficultés financières que rencontrent certaines communes, mais il faut aussi tenir compte du contexte d'ensemble. En 2013, 1 854 communes étaient inscrites dans le réseau d'alerte ; elles n'étaient plus que 1 837 en 2014, et 1 800 seulement cette année. Hors collectivités d'outre-mer, le nombre de saisines des chambres régionales des comptes par les préfets demeure stable lui aussi : 138 saisines pour budget en déséquilibre ont eu lieu en 2015, soit le même nombre que l'année précédente, et 46 saisines pour compte administratif en déséquilibre ont été constatées cette année, contre 71 l'an passé. Enfin, 25 demandes de subvention exceptionnelle ont été déposées en 2015 par des communes en grande difficulté, soit seulement deux de plus que l'année précédente.
Une réforme de la DGF en deux temps, monsieur Heinrich, se déroulerait ainsi : la réforme de la DGF – soit la dotation forfaitaire et les dotations de centralité et de ruralité – serait reportée à 2017, et la péréquation serait réformée dès 2016. La DNP serait donc supprimée, tandis que le nombre de bénéficiaires de la DSU serait comme prévu ramené de 742 à 659 communes et celui des bénéficiaires de la DSR de 34 615 à 23 087 communes. Les montants ainsi libérés alimenteraient l'évolution de la DSU et de la DSR à hauteur de 297 millions d'euros. Les résultats d'ensemble d'une réforme en deux temps seraient les suivants : seules 26 % des communes – représentant 54 % de la population – seraient gagnantes. En effet, les communes de moins de 500 habitants perdraient presque toutes leur éligibilité à la DSR, cet inconvénient étant compensé dans la réforme complète par la stabilisation de la dotation forfaitaire par habitant.
Le rapport du FPIC, madame Genevard, n'est paru qu'avant-hier et vous sera transmis d'ici demain. Il démontre deux choses : l'importance des montants redistribués, tout d'abord, et le fait que la montée en charge progressive a permis d'atténuer les effets de la contribution au redressement des finances publiques dans les territoires les plus pauvres – c'était précisément l'objectif du dispositif. Le FPIC a ainsi réduit de 6 % les inégalités entre territoires en 2014 et de 8,5 % en 2015.
Plusieurs orateurs ont évoqué le succès de la loi sur les communes nouvelles adoptée à l'initiative de Mme Pires Beaune et de M. Pélissard. Le Gouvernement est ouvert à tous les amendements qui seront déposés sur ce sujet, par exemple afin de prolonger le délai pendant lequel les communes peuvent bénéficier du bonus financier. Celui-ci pourrait également être limité à la seule non-contribution au redressement des finances publiques, et l'on pourrait supprimer le bonus de 5 % pendant trois ans. Il va de soi, en effet, que le bonus financier est prélevé sur une enveloppe fermée : la DGF. On peut aussi envisager de plafonner la mesure aux communes de moins de 10 000 ou 20 000 habitants – le débat est ouvert.
L'élargissement des communes nouvelles est en effet problématique, monsieur Giraud – comme j'ai pu le vérifier dans mon propre canton. Sur ce sujet aussi, nous serons ouverts aux amendements parlementaires.
S'agissant des offices du tourisme, monsieur Saddier, la concertation dont m'a chargé le Premier ministre est en cours et une troisième réunion aura lieu dès demain à mon cabinet avec les représentants des offices, y compris ceux des stations de montagne.
Je précise à M. Larrivé que, lors de l'examen de la première partie du PLF, le secrétaire d'État au budget a pris l'engagement de trouver d'ici la fin de la navette parlementaire une solution allant dans le sens que vous souhaitez à la question de la TVA sur les investissements que réalisent les départements dans les infrastructures de haut et très haut débit.
Enfin, monsieur Molac, toutes les données relatives à la DGF sont accessibles en ligne depuis le mois de septembre.
Un mot encore sur les simulations pluriannuelles de la réforme : le propre de cette réforme est de prévoir que le pilotage de la répartition des dotations aux collectivités locales relève du Parlement. Vous nous demandez des projections pluriannuelles, mais ce sont les parlementaires eux-mêmes qui piloteront l'évolution de la DGF. En conséquence, toute projection pluriannuelle – j'en mets ma main au feu – sera forcément fausse, d'autant que les propositions de pilotage sont innombrables, comme le révèle déjà cette séance… Que ces propositions finissent par être acceptées ou non par le Gouvernement et le Parlement, les projections pluriannuelles doivent être très prudentes et leur réalisme ne peut qu'être extrêmement fragile : je n'imagine pas un instant, en effet, que la réforme suive son propre cours puisque, je le répète, l'un des principaux traits de sa simplicité et de sa lisibilité consiste à ce qu'elle puisse enfin être pilotée en dehors du seul FPIC.
Le vote de l'amendement visant à reporter l'entrée en vigueur de la réforme de la DGF est-il bien conforme aux principes budgétaires, et en particulier à celui de l'annuité ?
D'autre part, l'article 58, s'il était modifié comme il nous est proposé, ne serait plus un article relevant de la deuxième partie du PLF consacrée aux dépenses. De ce point de vue, son emplacement serait-il conforme aux dispositions de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) ?
Il s'agit de répartir une dotation. La loi de finances ne devrait-elle porter que sur l'enveloppe des dotations ? Au contraire, il me semble que leur répartition relève du projet de loi de finances – sous réserve de l'avis du président de la commission des finances, qui n'a pas soulevé cette question. En l'espèce, l'article 58 vise à préciser les principes qui régiront la répartition de la dotation à partir du 1er janvier 2017.
Les dispositions contenues dans la seconde partie du projet de loi de finances se caractérisent par le fait qu'elles n'ont aucune incidence sur l'équilibre budgétaire tel qu'il est établi par le vote de la première partie. Il s'agit en l'occurrence de fixer des règles qui, ne s'appliquant qu'à partir de 2017, n'affecteront évidemment pas la première partie. Elles ont donc toute leur place dans la seconde partie du PLF. J'ajoute que nous avons voté en première partie le montant du prélèvement qui, à ma connaissance, n'est pas modifié dans la deuxième partie. L'amendement du Gouvernement à l'article 58 ne modifiera que sa répartition.
Madame et monsieur les ministres, nous vous remercions.
La réunion de la commission élargie s'achève à vingt-trois heures cinquante.
Le Directeur du service des comptes rendus des commissions,
Nicolas VÉRON© Assemblée nationale