Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a entendu M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur le projet de loi portant diverses dispositions en matière d'infrastructures et de services de transports (n° 728).
L'audition de M. le ministre, prévue initialement le 13 mars dernier, a été reportée du fait des intempéries. Nous procéderons donc, après l'avoir entendu, à l'examen du projet de loi portant diverses dispositions en matière d'infrastructures et de services sur lequel le Gouvernement a décidé d'engager la procédure accélérée.
Le projet de loi comporte 25 articles, souvent d'apparence technique mais au service d'une ambition politique : d'une part, renforcer la prise en compte du développement durable, des risques écologiques et de la protection des salariés dans le secteur des transports, d'autre part, introduire diverses mesures s'appliquant aux différents modes de transport.
Adopté à l'unanimité par le Sénat le 12 février dernier, le texte a été amélioré et clarifié, levant certaines interrogations formulées par les professionnels. Sa principale disposition, à l'article 7, porte sur la mise en oeuvre de l'écotaxe sur les poids lourds. Conçue comme un élément de fiscalité écologiquement responsable, elle doit être aussi économiquement supportable à travers un dispositif technique à la fois réaliste et stable.
La taxe résulte, dans son principe, d'une loi de finances antérieure. Le dispositif présenté maintenant permet aux entreprises de transport routier de majorer le prix de leurs prestations afin d'intégrer celle-ci et de la répercuter sur leurs clients. Il en avait été d'abord discuté dans le cadre du Grenelle de l'environnement, adopté par le Parlement en 2009, également à l'unanimité. Elle devait être mise en place en 2011 avant que son application se trouve différée.
La taxe porte sur les poids lourds de plus de 3,5 tonnes empruntant un réseau routier non payant. Son barème prend en compte à la fois la taille des camions et leurs performances environnementales. Afin de respecter le principe écologique à la base de sa création, le Gouvernement fait d'emblée savoir qu'il émettra un avis défavorable à tous les amendements visant à exonérer telle ou telle catégorie de transporteurs.
Aujourd'hui, les transporteurs routiers ne couvrent pas tous les coûts d'usage de la route. Nous entendons qu'ils contribuent au financement des infrastructures, actuellement à la charge des collectivités territoriales et de l'État. Le dispositif projeté cherche donc d'abord à optimiser le transport routier, notamment à travers le choix des itinéraires, l'organisation des tournées et la complémentarité des modes de transport, entre lesquels l'écotaxe doit également servir à corriger les distorsions de concurrence.
Son mécanisme poursuit trois objectifs : envoyer, particulièrement aux chargeurs, un signal-prix afin de les sensibiliser à la réalité du coût du transport routier ; rationaliser le transport, notamment sur moyennes distances ; enfin faciliter le financement des infrastructures nécessaires à la politique de développement intermodal et à sa prise en charge par l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) alimentée par le produit de l'écotaxe. Cette dernière n'est pertinente qu'à la condition d'être équilibrée et de ne pas mettre en difficulté un secteur déjà économiquement très éprouvé. Elle ne doit pas, non plus, se fondre dans le budget général de l'État : elle est affectée au financement des formules alternatives de transport.
Lors des nombreuses discussions avec les professionnels, il est apparu que l'écotaxe devait être répercutée sur les clients des transporteurs et qu'il convenait de revoir entièrement le décret du 4 mai 2012. L'application du texte devra s'accompagner de mesures relatives à la sous-traitance, probablement dans le cadre de négociations de branche, ainsi qu'à certains contrôles qu'il conviendra de renforcer. Nous voulons mettre en place un dispositif simple, compréhensible, économiquement responsable et efficace. La commission que préside votre collègue M. Philippe Duron, chargée de hiérarchiser les projets inscrits au Schéma national des infrastructures de transport (SNIT), devrait bientôt rendre son rapport.
Le projet de loi prévoit donc une majoration du prix des prestations de transport routier par application d'un taux établi au niveau régional, incluant les frais de gestion supportés par les entreprises. Aucun système n'est évidemment parfait et quelques difficultés pourront subsister. Nous les évoquerons lors de la discussion des amendements.
Je souhaite aussi que l'on assure une surveillance de l'application du nouveau dispositif durant sa première année et qu'on y associe le Parlement. Nous pourrons ensuite améliorer son efficacité et sa pertinence.
Sa mise en oeuvre devait intervenir le 20 juillet 2013. Nous avons choisi de la différer au 1er octobre, compte tenu des incertitudes pesant sur la société Écomouv'. Nous disposerons ainsi profiter d'une période de rodage.
Les rapports sont aujourd'hui très déséquilibrés, sur le plan commercial, entre les différentes composantes du secteur des transports. Nous entendons renforcer la sécurité juridique afin de préserver les intérêts de chacun. La taxe sur les poids lourds ne doit pas représenter une charge supplémentaire venant fragiliser les entreprises de transport et leurs salariés en les exposant à un surcroît de concurrence étrangère.
Nous introduisons par ce texte la première fiscalité environnementale dans notre ordre juridique, ce qui implique un effort soutenu d'explication et de pédagogie.
Les autres dispositions du projet de loi concernent le transport fluvial, notamment pour réduire les risques environnementaux et améliorer la sécurité de la navigation : l'article 12 prévoit, par exemple, des procédures de déplacement d'office des bateaux. Elles touchent aussi à la sécurité maritime, conformément aux dispositions internationales, avec la transcription en droit interne, à l'article 16, du régime général de responsabilité du propriétaire du navire défini par la convention de Londres de 1992 en cas de marée noire. L'article 20 prévoit plusieurs dispositions relatives à l'inspection à bord des navires.
Le texte se veut aussi socialement protecteur aux termes d'une de ses dispositions majeures qui, à l'article 23, prévoit comment, dans certaines conditions et dans le respect des prescriptions de l'Union européenne, les armateurs et les compagnies nationales peuvent exercer leur métier selon des modalités concurrentielles analogues à celles des compagnies étrangères, notamment pour le cabotage et les liaisons de continuité territoriale. Cela concerne la notion même de navire et les conditions offertes par les pays d'accueil au regard des droits des salariés et de leur protection sociale, ainsi que les sanctions pénales auxquelles s'exposent les armateurs en cas de violation de leurs obligations. Cela permettra d'éviter que des navires battant pavillon étranger opèrent sur nos lignes nationales selon des modalités socialement inacceptables et en provoquant des distorsions de concurrence.
Le projet de loi qui vient de nous être présenté embrasse une ambition très vaste en abordant tous les modes de transport : ferroviaire, routier, maritime, fluvial et aérien.
Les débats du Sénat se sont concentrés presque totalement sur les modalités de la taxe poids lourds, et nous allons abondamment en discuter à notre tour. Pour autant, il ne saurait être question de négliger les autres articles, dont certains revêtent une grande importance. Notre débat ne doit pas se résumer à une remise en cause de la taxe poids lourds, adoptée dans son principe de façon consensuelle.
Au premier abord, il s'agit d'un texte essentiellement technique mais qui poursuit comme objectif majeur le renforcement de la sécurité juridique. Celle-ci constitue une condition indispensable au bon fonctionnement de chaque mode de transport, exigence exprimée par tous les intervenants du secteur. Or elle peut faire défaut sur des points précis, que le projet de loi entend justement faire évoluer.
Le texte reflète la volonté du Gouvernement d'intégrer la dimension du développement durable dans notre législation, ce qui ne peut que rassembler les membres de notre commission. Il restera bien sûr à prendre d'autres mesures, notamment pour donner l'impulsion décisive à la transition écologique voulue par le Président de la République. Ce texte se présente donc comme une première étape, notamment pour permettre l'entrée en vigueur de la taxe poids lourds.
Le Titre Ier du projet de loi concerne le transport ferroviaire. Je salue l'introduction par le Sénat d'un article 3 bis visant à assurer la transparence des comptes des lignes TER envers les régions. L'article 4 renforce les moyens de protection du réseau ferré, auquel des dommages considérables sont infligés par malveillance, en procurant un fondement législatif aux interventions déjà pratiquées, sur une base contractuelle, par des agents de la SNCF travaillant pour le compte de RFF. Mais cet article apparaît, paradoxalement, à la fois superflu et insuffisant. Il est superflu, ou plutôt prématuré, puisqu'une telle disposition découlerait certainement de la réforme ferroviaire que vous nous présenterez prochainement. Il est insuffisant si l'outil juridique des contraventions de grande voirie, auquel il est fait référence, ne suffit pas à combattre efficacement les dégradations. Pouvez-vous nous apporter des précisions ?
Le Titre II, portant sur le transport routier, a été complété au Sénat par quatre articles additionnels relatifs au mécanisme, au champ d'application et aux modalités de la taxe poids lourds. Conformément au vote des sénateurs, la taxe alsacienne n'aurait plus lieu d'être. Pouvez-vous nous décrire plus précisément la phase d'expérimentation qui va s'y substituer, menée au plan national sans perception de la taxe, et avec quelles entreprises volontaires ?
Le consortium Écomouv' a remis, fin février, un rapport sur l'état d'avancement du dispositif technologique très innovant – présentant de ce fait des risques quant à sa fiabilité – des portiques routiers et des boîtiers. Où en est-on ?
Compte tenu des nombreuses sollicitations que nous avons reçues, visant à obtenir l'exemption du dispositif pour telle ou telle catégorie d'usage des poids lourds, nous confirmez-vous que le droit européen ne permet pas un traitement différencié des véhicules selon leur usage ? Je rappelle qu'il ne faut considérer les camions qu'en fonction, d'une part, de leur poids – donc de l'usure qu'ils infligent aux routes –, et, d'autre part, de leur qualité environnementale, c'est-à-dire des normes Euro 4, 5 et 6.
Enfin, je relève que les derniers titres du projet de loi, concernant les transports fluviaux, maritimes et aériens, n'ont guère suscité de contestations de la part des intéressés. Ceux-ci se sont même déclarés pleinement satisfaits du texte comme de la concertation qui avait précédé sa rédaction. Les dispositions sur les navires abandonnés, sur le droit pénal en mer, sur les ressources du port de Paris, semblent consensuelles. Il faut en féliciter le Gouvernement.
La commission des affaires économiques s'est saisie pour avis des dispositions relatives à l'écotaxe poids lourds, c'est-à-dire des articles 6 bis à 7 ter. Elle a émis un avis favorable à l'adoption de ces cinq articles ; elle a aussi adopté deux amendements et un sous-amendement.
Le premier amendement, adopté à l'unanimité, vise à enrichir le contenu du rapport que le Gouvernement remettra au Parlement en application du III de l'article 7. La proposition du Sénat d'évaluer la correspondance entre les montants obtenus par les transporteurs au moyen de la majoration du prix des transports routiers et les montants acquittés par eux au titre de l'écotaxe va dans le bon sens, mais il nous a paru nécessaire d'aller plus loin.
En effet, la quinzaine d'auditions réalisées montre que le dispositif prévu par l'article 7 est bien mieux accepté par les transporteurs routiers et les chargeurs que celui du décret du 4 mai 2012. La majoration forfaitaire du prix du transport n'est certes pas exempte de critiques, mais elle a le mérite de protéger un secteur important de notre économie sans induire pour autant d'effet inflationniste notable. Il conviendra toutefois de s'en assurer en dressant un bilan global de l'application du dispositif.
Compte tenu des interrogations, voire des inquiétudes qui se manifestent à l'égard de l'écotaxe et de la majoration, la commission des affaires économiques a souhaité que le rapport du Gouvernement évoque également les difficultés qu'elles peuvent entraîner pour les transporteurs et les donneurs d'ordre, leurs éventuels effets sur le prix du transport, les négociations tarifaires et les parts de marché des transporteurs routiers français en Europe, leurs possibles conséquences inflationnistes et leur impact sur le report modal. Enfin, le rapport devra présenter les systèmes d'écotaxe sur les poids lourds appliqués en Europe. La date de sa remise est, par ailleurs, repoussée au 31 décembre 2014, afin de disposer de suffisamment de recul pour analyser les éventuelles difficultés d'application de l'écotaxe et de proposer, le cas échéant, des mesures correctrices.
Par ailleurs, la commission a adopté un sous-amendement de M. Joël Giraud prévoyant la consultation des comités de massif dans le cadre de l'évaluation des reports de trafic.
Nous avons également eu une longue discussion sur le niveau de l'écotaxe et de la majoration en Bretagne et dans les régions dites périphériques, Aquitaine et Midi-Pyrénées. Nous connaissons les spécificités bretonnes : forte tradition d'élevage, exportations importantes vers le reste du pays empruntant presque exclusivement le réseau routier. Des efforts sont déjà consentis pour en tenir compte, puisque l'écotaxe fait l'objet d'un abattement de 40 % en Bretagne et de 25 % dans les deux autres régions. L'utilisation de la RN 164, qui traverse le centre de la Bretagne, est par ailleurs exonérée du paiement de la taxe.
Mais ces trois régions sont particulièrement affectées par l'application du taux interrégional dans le cas où l'itinéraire du poids lourd le conduit hors de sa région de chargement. La commission a donc adopté un amendement prévoyant, dans ce cas de figure, l'application successive du taux régional puis du taux interrégional unique, de façon à maintenir le régime de dégrèvement partiel des régions périphériques.
Pour le reste, la commission a repoussé un certain nombre de demandes d'exonérations ; elle a refusé de toucher au taux de la taxe, à la date de son entrée en vigueur et à l'affectation de son produit.
L'écotaxe sur les poids lourds, encadrée par la directive Eurovignette et prévue, dans un contexte consensuel, par le Grenelle de l'environnement en 2009, est au coeur de ce projet de loi. Cette première fiscalité environnementale présente d'abord l'avantage d'inciter au report modal. Elle favorisera le financement de nouvelles infrastructures, devant dégager environ 1,2 milliard d'euros en année pleine, dont 800 millions versés à l'AFITF que préside notre collègue M. Philippe Duron, et 200 millions à destination des collectivités locales gestionnaires des réseaux routiers départementaux et communaux.
Le projet de loi ne porte pas sur le principe même de l'écotaxe, admis par la nouvelle majorité parlementaire, mais sur ses modalités d'application, avec comme objectif d'en répercuter la charge sur les utilisateurs du transport routier, c'est-à-dire les chargeurs.
Rappelons-le : 82% des entreprises de transport routier sont aujourd'hui des PME comptant moins de 10 salariés, aux marges financières sont souvent très minces et largement exposées à la crise. Il s'agit donc d'instaurer une règle d'équité dans la répartition du poids de la taxe, à travers un mécanisme de majoration forfaitaire du prix facturé aux chargeurs sur la base d'un taux régional.
Le texte remet en cause le décret du 4 mai 2012, dont il a été fait état : celui-ci faisait l'unanimité contre lui en raison de sa complexité et de sa probable inapplicabilité. Il fait en outre l'objet d'un recours devant le Conseil d'État. Le dispositif retenu est donc simplifié. Il méritera une évaluation fine, qui donnera lieu à un rapport que nous avons souhaité avec M. Fabrice Verdier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, et qui débouchera sur d'éventuels correctifs à l'article 7.
Résistons à la tentation d'instaurer des régimes particuliers d'exonération en faveur de segments d'activité, qui dénatureraient le dispositif général et affaibliraient les moyens de l'AFITF. Il conviendra sans doute, à terme, de réfléchir à l'équipement en camions moins polluants, formule qui a déjà fait ses preuves en Allemagne dans le cadre de la LKW Maut – la taxe poids lourds d'outre-Rhin.
Je précise que l'article 23 fait considérablement avancer les droits sociaux des gens de mer en appliquant les règles du pays d'accueil aux pavillons étrangers, dans le prolongement du débat sur la directive Bolkestein, qui trouve ici son application en matière de cabotage. Je note aussi, à la suite d'un amendement adopté au Sénat, le souci du groupe SRC d'approfondir la connaissance des comptes de la SNCF.
Finalement, en dépit de son caractère éminemment technique, ce texte ne manque pas de portée politique puisqu'il se situe dans la ligne du premier Grenelle de l'environnement et que l'actuelle majorité s'est attachée à améliorer le caractère opérationnel de la taxe poids lourds. Je pense donc que nos collègues du groupe UMP rejoindront notre démarche, comme nous avions approuvé le principe de l'écotaxe au nom de l'intérêt général.
Vous l'avez rappelé, monsieur le ministre : nous ne discutons plus du principe de l'écotaxe, mais de ses modalités. À cet égard, le groupe UMP n'a aucun a priori à l'encontre de cette disposition. En revanche, sa mise en oeuvre suscite des interrogations, voire des inquiétudes.
Tout d'abord, entre le moment ou est née l'idée de cette taxe et aujourd'hui, le secteur du transport routier s'est enfoncé dans les difficultés économiques.
Ensuite, nous nous interrogeons sur le calendrier d'application, sur les recettes attendues et sur les coûts de gestion du système. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous donner des précisions à ce sujet ?
Laissez-moi vous citer cet extrait de l'article 11 de la loi relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement : « Cette taxe sera répercutée par les transporteurs sur les bénéficiaires de la circulation des marchandises. Par ailleurs, l'État étudiera des mesures à destination des transporteurs permettant d'accompagner la mise en oeuvre de la taxe et de prendre en compte son impact sur les entreprises. » On peut comprendre la volonté de la majorité et du Gouvernement de ne pas prévoir d'exonérations, mais on peut aussi retourner l'argument : il ne faut pas qu'une seule catégorie supporte le poids de la taxe. Car cela reviendrait à fragiliser le dispositif – et donc le financement de l'AFITF – en l'exposant à une censure du Conseil constitutionnel, soit avant sa promulgation, soit à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité. Je pense en particulier au problème posé par la répercussion du coût de la taxe sur le chargeur, selon qu'il s'agit d'un transporteur pour compte d'autrui, d'un transporteur pour compte propre ou d'un transporteur local d'intérêt général. Il ne faudrait pas que l'écotaxe, dont le principe est accepté par tous, ait un impact lourd sur le commerce local, les produits locaux et plus généralement le « made in France ».
Par ailleurs, un amendement adopté au Sénat – contre l'avis du Gouvernement, semble-t-il – a eu pour effet de supprimer l'expérimentation en cours, en Alsace, de la taxe poids lourds. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet ?
De même, un amendement sur les remontées mécaniques a été adopté malgré l'avis défavorable du Gouvernement. Celui-ci ne semble pourtant pas avoir prévu d'en demander la suppression. J'espère, en tout cas, que la disposition adoptée ne vise pas à remettre en cause les délégations de service public dans le secteur des remontées mécaniques.
L'objectif de l'écotaxe est de financer les nouvelles infrastructures nécessaires à la politique de développement intermodal des transports. Mais le mécanisme de majoration forfaitaire, s'il simplifie la répercussion de la taxe sur les clients dans le cas du transport pour autrui, est inadapté aux sociétés qui effectuent du transport pour compte propre. Or de nombreuses entreprises sont concernées, notamment les distributeurs grossistes et les coopératives agricoles agroalimentaires, qui vont utiliser le réseau taxé dans le cadre de leur tournée de livraison.
Prenons l'exemple d'une entreprise de transformation de viande de ma circonscription : elle transporte en amont des animaux vivants vers l'abattoir, et livre en aval la viande à sa clientèle de restaurateurs, de bouchers et de grandes surfaces. Le système de la tournée permet de couvrir un maximum de clients et constitue une solution plus vertueuse, en termes d'environnement, que la multiplication des livraisons directes, mais il rend incontournable le recours à des véhicules de plus de 3,5 tonnes. Cette entreprise doit pouvoir répercuter la taxe grâce à un mécanisme adapté lorsqu'elle effectue une prestation de transport pour compte propre.
De même, les coopératives agricoles et agroalimentaires, implantées en zone rurale et dont le rôle est vital pour l'activité agricole, n'ont pas d'autre choix que d'emprunter le réseau secondaire lors de leurs tournées, à une fréquence d'autant plus grande que les denrées sont périssables. Et les grandes enseignes les contraignent à livrer plus fréquemment des volumes réduits, ce qui ne fait qu'accroître le nombre de kilomètres parcourus.
Compte tenu du coût élevé du transport pour ces entreprises, la taxe risque d'entraîner une nouvelle dégradation de leur compétitivité, d'autant que la répercussion de son coût sur le client final – en l'occurrence, la grande distribution, puis le consommateur – paraît difficile dans un contexte de forte tension des négociations commerciales.
Les sociétés de travaux publics, qui assurent une prestation globale incluant le transport de matériel et de matériaux, s'interrogent également sur le moyen de répercuter la majoration du prix du transport sur leurs factures.
Toutes ces entreprises, à l'instar des transporteurs routiers, doivent pouvoir bénéficier d'un mécanisme légal sur lequel s'appuyer pour répercuter les charges liées à l'écotaxe, car contrairement à ces derniers, elles ne maîtrisent pas la part que représentent dans leurs coûts les frais liés à l'usage des infrastructures. Je défendrai des amendements dans ce sens. Entendez-vous, monsieur le ministre, mettre en place un mécanisme adapté ?
Contrairement à ce qu'affirment certains, le transport de marchandises n'est pas, en soi, un secteur économique : c'est un support, un service destiné à mettre en relation les acteurs économiques, les producteurs et les consommateurs, et dont l'importance, dans un monde fini aux ressources limitées, doit diminuer au bénéfice de l'économie en général.
Nous devons trouver un autre modèle de développement. Il est possible de vivre mieux avec une croissance nulle, mais cela implique d'opter pour un modèle d'économie circulaire plutôt que linéaire. À partir du moment où l'on préfère l'usage du service à la consommation du produit, où l'on développe l'écoconception pour réduire les besoins en ressources, où l'on réutilise les déchets, où l'on favorise les circuits courts, le transport de marchandises perd de sa nécessité. La croissance de ce type de transport ne saurait constituer l'avenir d'une société fondée sur le développement durable.
Plus qu'au transport de marchandises, il faut donner la prime à l'organisation logistique territoriale et à l'optimisation économique, environnementale et sociale des flux. C'est ce qu'a fait l'Allemagne en développant, en 2007, son Masterplan Güterverkehr und Logistik, dont la taxe sur les poids lourds n'est qu'un élément.
L'écotaxe en particulier, comme plus généralement la politique des transports, doit être appréhendée dans un cadre global, celui du développement d'un modèle de société moins soumis aux crises financières et économiques, moins dépendant des ressources naturelles. À cet égard, on ne peut qu'être exigeant sur sa mise en oeuvre, ce qui implique de refuser toute exonération, même en faveur des collectivités : celles-ci doivent faire partie des acteurs du changement.
De même, il est indispensable de rompre avec l'hégémonie du transport routier, et d'éviter que ce secteur, in fine, ne bénéficie de l'affectation du produit de l'écotaxe. Une partie des ressources collectées doit être confiée aux régions, ces collectivités ayant vocation à promouvoir les transports alternatifs – ferroviaire, fluvial et maritime. Le groupe écologiste a déposé des amendements en ce sens.
Le secteur routier français est fragilisé depuis la crise de 2008. Mais ce qu'il faut remettre en cause, c'est le choix, effectué depuis des décennies, de privilégier la route au détriment d'un véritable plan d'aménagement territorial, et de considérer le transport routier comme secteur économique plutôt que comme service. Il faut en réduire l'ampleur, quitte à faire disparaître des camions ou des emplois. Ces emplois, de toute façon, nous les retrouverons ailleurs, comme dans la performance logistique.
Je concentrerai mon propos sur les deux aspects du texte qui me semblent essentiels : la réforme sociale maritime et la mise en oeuvre de l'écotaxe.
Je partage votre ambition de renforcer les pouvoirs de contrôle et de sanction dans le transport maritime et d'améliorer la condition sociale de nos marins. Succédant à la ratification de la convention du travail maritime de l'Organisation internationale du travail (OIT), ce texte procède à d'heureuses modifications en matière sociale, répondant ainsi à une forte demande des gens de mer. L'article 23 va permettre d'imposer aux navires, quelle que soit leur nationalité, un certain nombre de règles relatives à l'équipage. Dans nos eaux territoriales, le droit du travail s'appliquera également aux navires étrangers, ce qui permettra, je l'espère, de lutter contre le dumping social.
S'agissant de l'écotaxe poids lourds, le Grenelle de l'environnement avait décidé que la charge de cette taxe ne devait pas peser sur les transporteurs routiers, mais que son application devait obéir au principe utilisateurpayeur. L'enjeu est important, non seulement pour les finances publiques, mais aussi pour le transport routier qui doit contribuer davantage à la transition écologique et à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. Tel est l'objet de l'article 7 du projet de loi.
La commission des affaires économiques a adopté à l'unanimité un sous-amendement de Joël Giraud visant à prendre en compte, dans le rapport du Gouvernement, l'analyse des reports de trafic sur les réseaux non soumis à la taxe ainsi que l'avis des comités de massif et des conseils généraux gestionnaires des réseaux concernés. Le groupe RRDP se réjouit de cette adoption qui permettra de procéder à des ajustements en cas de reports massifs de trafic.
La société Écomouv', constituée dans le cadre d'un partenariat public-privé, est chargée de recouvrer 1,2 milliard d'euros attendus en recettes, dont 160 millions iraient aux collectivités, 230 millions à Écomouv' et 800 millions à l'AFITF. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous confirmer ces chiffres ?
Par ailleurs, aucune mesure d'exonération n'est prévue dans ce texte. Or, lorsque la marchandise fait l'objet d'une opération de transport combinée ou est transportée au titre du pré- et post-acheminement par mode massifié, l'écotaxe risque de pénaliser le report modal. Sans aller jusqu'à une dispense, il conviendrait d'envisager un dispositif favorisant un mode de transport plus respectueux de l'environnement.
De même, une partie du produit de l'écotaxe ne pourrait-elle pas être affectée, comme en Allemagne, à la modernisation du parc roulant ? Le marché français du camion, qui connaît un temps difficile, aurait bien besoin d'une telle aide. Une autre piste envisageable pour aider les professionnels est la suppression de la taxe à l'essieu, mise en place il y a plus de quarante ans pour financer la réparation des dégâts occasionnés sur la voirie par les poids lourds. Son maintien risque de pénaliser les transporteurs, qui seront taxés deux fois pour une même utilisation de la route. En outre, leurs concurrents européens n'en sont pas redevables.
Enfin, les concessionnaires d'autoroutes vont bénéficier d'un report de trafic sur leurs infrastructures, occasionnant un surcroît de recettes de l'ordre de 250 à 450 millions d'euros. Seriez-vous, monsieur le ministre, enclin à négocier une augmentation de la redevance domaniale pour compenser cet effet d'aubaine ?
L'objectif de l'écotaxe est de favoriser le report modal, et son produit, destiné à l'AFITF et aux départements, doit financer les infrastructures de transport. Mais le report de quelques mois, décidé avec sagesse par le Gouvernement, aura des conséquences sur le budget de l'Agence. Alors que l'on attendait en 2013 un produit de 262 millions d'euros, dont 27 millions pour la rémunération du prestataire, soit une recette nette de 235 millions d'euros, le résultat final sera proche des 90 millions d'euros. Comment compenser ce manque à gagner ? Faut-il prévoir une modulation de la subvention d'équilibre ? M. Falorni propose de négocier une augmentation de la redevance domaniale, mais nous savons à quel point cela serait difficile. En tout état de cause, je mets en garde mes collègues contre la multiplication des exonérations ou la dispersion des aides, qui auraient pour effet d'affaiblir le financement des infrastructures de transport.
J'ai été choqué par la façon dont notre collègue écologiste a évoqué le secteur des transports. Le transport n'est pas seulement un service, c'est un pan de notre économie qui fait travailler, dans des conditions difficiles, des dizaines de milliers de personnes. Il ne pourra se développer que si nous renouons avec la croissance. Or je fais partie de ceux qui pensent que la décroissance n'est pas bonne pour notre pays.
L'écotaxe est souvent présentée comme une disposition de fiscalité écologique, mais je ne pense pas que ce soit le cas dans la mesure où elle ne s'applique pas de façon identique en tout point du territoire. En outre, le fait de payer n'empêche pas le camion de polluer. Évitons le double langage : la taxe a pour objectif de financer les infrastructures. Elle vise également à reporter sur les autoroutes une partie des poids lourds qui empruntent les routes nationales et départementales, dont l'usage est gratuit. Ce n'est pas qu'une question écologique : il y va aussi de la tranquillité des riverains, dans la mesure où il est de moins en moins possible, pour des raisons environnementales et financières, d'établir des itinéraires de contournement à l'écart des communes.
Mais il est complètement faux de penser que la mise en place d'une écotaxe va permettre de régler les problèmes d'environnement. Le problème de la répercussion du coût la taxe sur le client est, pour nous, un motif de préoccupation. Elle sera aisée pour une grosse entreprise, beaucoup moins pour une petite. Quant aux transporteurs pour compte propre, ils ne répercuteront rien du tout, mais ils subiront une diminution de leurs marges.
L'énergie est déjà très taxée. Ne peut-on, pour éviter d'alourdir la facture des particuliers, assimiler le transport effectué par certains poids lourds à un service d'intérêt général, et les exonérer de taxe, comme les véhicules agricoles ou militaires ? Je vous renvoie sur ce point aux dispositions du code des douanes. Les ambulances privées pourraient bénéficier de la même exonération, puisqu'elles rendent aussi, au sens large, un service d'intérêt général. (Sourires)
L'article 5 du projet de loi vise à étendre les possibilités de reclassement d'une route nationale ou section de route nationale déclassée dans la voirie départementale ou communale, si la communauté concernée a émis un avis défavorable : il opère un transfert vers les collectivités, qui ont déjà fort à faire pour aménager les routes. Sans m'attarder sur la situation de la RN 2 dans l'Aisne, dont je sais qu'elle vous préoccupe autant que moi, j'aimerais savoir comment sera calculée la compensation systématique prévue par un amendement du rapporteur du Sénat. Vous avez indiqué qu'elle concernerait potentiellement 251 kilomètres de voirie. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
Le ministre de l'agriculture a indiqué aujourd'hui que le coût de la collecte de lait augmenterait : si les laiteries ne peuvent pas facturer cette hausse au système de distribution, soit leur santé financière se dégradera, soit le prix payé au producteur diminuera, ce qui menacera des milliers d'emplois. Il n'y a pas de solution, pour les entreprises de collecte de lait, sinon la possibilité d'établir une refacturation en pied de facture, mesure qui pourrait s'appliquer à d'autres domaines.
Le système de la LKW Maut est-il compatible avec le nôtre ? Les premiers ports d'importation de marchandises de France ne sont pas français. Les camions qui sillonnent l'Europe pouvant passer en quelques heures d'Italie ou de Suisse en France, en Allemagne, ou en Belgique. Il suffirait d'adopter le même dispositif en France et en Allemagne pour imposer un système européen.
Que nos collègues de l'UMP cessent de se caricaturer : en s'interrogeant sur le transport routier de marchandises, François-Michel Lambert a évoqué des externalités comme le dérèglement climatique et l'épuisement des ressources pétrolières. En outre, le fait que le transport soit sous-payé en France a favorisé les délocalisations massives. Payer le transport à son juste prix est une manière de défendre le made in France, ce qui ne signifie pas que les transporteurs routiers sont des variables d'ajustement. Nous devons travailler avec leurs syndicats pour les reconvertir à d'autres formes de logistique, maritime ou ferroviaire, ou à une meilleure organisation du transport, dont la valeur ajoutée dépendrait moins de la distance parcourue que du service rendu. C'est cet état d'esprit qu'il faut adopter si nous voulons relocaliser les industries.
L'écotaxe est née quand la mise en place de la LKW Maut a reporté une part du transport autoroutier de l'Allemagne vers l'Alsace. Le dialogue s'est noué d'abord dans la région, puis entre l'État et les services des douanes, jusqu'à ce qu'un amendement de M. Yves Bur dans le cadre du Grenelle de l'environnement étende l'écotaxe au plan national. Cependant, les mesures actuelles ou à venir ne suffiront pas à résoudre les problèmes de trafic, si nous ne disposons pas d'infrastructures de qualité. Comment l'écotaxe et le projet de grand contournement ouest de Strasbourg pourrait-il se combiner pour restaurer le trafic fluide que notre région a perdu en 2004 ? Une amélioration diminuerait aussi la pollution de l'air, preuve qu'on ne peut cloisonner les débats.
Comme Jean-Marie Sermier et Yannick Favennec, je m'interroge sur le sort des transporteurs pour compte propre, et j'attends avec impatience la réponse du ministre.
Si nous ne pouvons qu'approuver le principe de l'écotaxe que nous avions introduite dans le Grenelle de l'environnement pour inciter les transporteurs à privilégier des moyens de transport comme le rail ou les canaux, son application semble peu pertinente aujourd'hui puisque, depuis dix mois, le Gouvernement a alourdi la fiscalité dans des proportions ahurissantes. (Murmures)
Mieux vaudrait en user avec prudence, d'autant que le dispositif contient des incohérences et des lacunes, notamment en ce qui concerne les grossistes distributeurs et les transporteurs de proximité d'intérêt général. Pour gouverner, il faut envisager toutes les conséquences des mesures par des études d'impact. Le Gouvernement devrait s'en souvenir et s'efforcer de réduire la dépense publique au lieu d'imposer une nouvelle taxe.
Permettez-moi de me faire l'interprète des chefs d'entreprise du transport routier. Dans notre pays, monsieur le ministre, il n'existe pas d'arbre à argent sous lequel on irait ramasser le matin des billets tombés pendant la nuit. Les entreprises ne vivent que de la valeur ajoutée qu'elles dégagent. Je conviens que l'idée d'écotaxe remonte au Grenelle de l'environnement, mais il est temps de faire une pause en matière de fiscalité. Pour les petites entreprises qui possèdent un ou deux camions, le montant de taxe annuelle se situera entre 7 200 et 15 000 euros. Voulez-vous créer encore plus de chômage alors que notre pays court un danger extrême ? (Murmures)
Si nous ne renions pas le principe de la taxe poids lourds que nous avions votée, elle s'avère difficile à mettre en oeuvre. Sans jeter la pierre au Gouvernement, puisque nous avons notre part de responsabilité dans cette affaire, j'appelle votre attention sur deux problèmes. Les entreprises qui font du transport pour leur propre compte ne pourront pas répercuter la taxe : elles seront soumises à une distorsion de concurrence. De plus, selon la rédaction actuelle, certains transporteurs, qui ne paieront pas la taxe si leurs poids lourds n'empruntent pas certaines routes, pourront néanmoins la répercuter. J'émets quelques doutes sur la solidité juridique de l'ensemble. Mais je ne doute pas que le ministre et les rapporteurs seront favorables à nos amendements déposés dans un esprit constructif.
Je reconnais que beaucoup des questions sont positives, à l'exception de certaines qui me semblent surtout commandées par le désir d'intervenir, et de voir ensuite son nom figurer sur le compte rendu, ce qui peut toujours être utile quand on revient sur le terrain.
C'est pourquoi, monsieur Yves Albarello, je ne me lancerai pas dans une polémique sur « l'arbre à argent ». Quand vous m'avez auditionné, lorsque vous prépariez votre rapport sur le Grand Paris, vous avez insisté sur la nécessité de procéder à des investissements publics de plusieurs milliards. Et voilà qu'il faudrait tout arrêter ? Quelle évolution rapide, alors même que nous examinons un texte voté à l'unanimité et dont le but est vertueux ! Il y a un temps pour les questions d'actualité, avec tout ce qu'elles représentent pour le dialogue démocratique, et un autre pour le travail, où les positions peuvent s'affronter et se compléter. Je m'en tiendrai donc à ce qui peut enrichir le texte et l'argumentation.
Laissez-moi poursuivre. Beaucoup d'entre vous, à commencer par la rapporteure, m'ont interrogé sur le transport ferroviaire. Malheureusement, il n'y aura pas de concomitance entre l'adoption du texte et la réforme ferroviaire, dont je souhaite qu'elle soit votée rapidement. Il n'y a pas si longtemps, les agents de la SNCF et de RFF intervenaient couramment les uns pour les autres. Il est indispensable que le système de contrôle fonctionne avant le vote de la réforme.
Concernant l'écotaxe, l'essai national montera en puissance de juillet à septembre. Certains véhicules équipés seront sous observation, ce qui permettra de mettre en place le dispositif à blanc, avec des factures spécimens. Nous proposerons à certaines entreprises d'entrer dans le dispositif.
Nous ne prévoyons aucune différenciation de taxation des véhicules en fonction de leur usage, système qui s'apparenterait à une discrimination. Ce principe explique mon opposition aux amendements d'exonération.
Le dispositif méritera d'être placé sous observation, mais sachez que le Gouvernement n'a pas décidé à lui seul d'appliquer une taxe supplémentaire. Il doit rattraper un retard réel en matière de fiscalité environnementale, afin de financer des reports d'un mode de transport vers un autre. Je partage néanmoins votre souci de rechercher un système d'évaluation qui permette des améliorations au bout de quelques mois d'exploitation. Un amendement vise d'ailleurs à élargir le contenu du rapport à venir, signe que la discussion enrichit le texte.
D'autres amendements tendent à améliorer la transparence des relations entre les régions et la SNCF, ce qui fait écho à une demande que j'ai formulée dès mon arrivée aux responsabilités. Les régions souhaitent plus de clarté dans les comptes qui leur sont transmis, et peut-être plus d'informations. Nous veillerons toutefois à ce que la publication ou la communication de celles-ci ne fausse pas la concurrence avec d'autres opérateurs européens.
Monsieur le rapporteur pour avis, j'ai entendu vos préoccupations concernant les régions périphériques, mais le texte ne remettra en cause ni la minoration de 40 % dont bénéficie la Bretagne ni celle de 25 % appliquée aux régions Midi-Pyrénées et Aquitaine. Il faut être prudent avant d'accéder à toute demande supplémentaire qui fragiliserait le principe d'égalité et risquerait de créer des contentieux. Notre devoir est de faire un usage raisonné et raisonnable des dérogations. Nous examinerons en détail le taux interrégional mais, si les régions périphériques sont spécifiques, c'est en raison de leur éloignement, ce qui signifie qu'il faut exclure toute demande portant sur le transport infrarégional ou local.
Monsieur Martial Saddier, je vous confirme qu'un amendement sénatorial portant sur les remontées mécaniques a trouvé sa place dans le texte, sans qu'il y ait de notre part la moindre arrière-pensée. Vous me direz ce qui vous préoccupe à ce sujet. En tant que moyens de transport, les remontées mécaniques peuvent poser problème, indépendamment de leurs conditions de gestion ou d'éventuels incidents ou accidents.
Je pourrai vous donner des précisions mais vous pourrez aussi amender le texte…
Je m'en remets à la sagesse des collectivités territoriales.
J'ai déjà eu l'occasion de m'expliquer sur le calendrier de l'expérimentation, qui se déroulera en juillet et en août, le dispositif entrant en vigueur au 1er octobre. Les recettes estimées s'élèvent à 1,2 milliard et les frais de gestion à 230 millions, qui comprennent l'équipement des portiques de contrôle, du système informatique et du réseau de distribution. Ce coût a fait débat au Sénat mais, dès lors que le système est acquis et qu'il fait l'objet d'un contrat avec la société Écomouv', c'est en termes de proposition ou de contribution, et non de remise en cause, que la discussion doit s'engager.
La constitutionnalité du dispositif n'est pas douteuse ; le texte a été validé par le Conseil d'État. La majoration proposée ne pourra intervenir que si elle est limitée et exceptionnelle, mais elle ne peut être contestée par le biais d'une question prioritaire de constitutionalité.
Monsieur Yannick Favennec, vous avez été interrogé par des chefs d'entreprise qui effectuent des transports pour leur compte propre. Mais l'écotaxe sur les poids lourds s'applique uniquement à ceux qui exercent la profession de transporteur. Certes, le transport intervient plus ou moins selon les services : il compte plus pour un déménagement que pour une livraison. Mais ceux qui s'inquiètent le plus de la taxe sont ceux qui la connaissent le moins. Seul 1 % du réseau routier est soumis à taxation; les itinéraires de proximité ne le sont pas. Sur ce point, nous nous en sommes remis à une décision nationale et aux conseils généraux.
Par ailleurs, dans ce type de distribution réalisée par les grossistes ou les entreprises agricoles, et où le transport représente au maximum de 20 % de la prestation, l'écotaxe poids lourds, qui ne porte que sur le transport, ne constitue qu'une partie infime du prix – quelques centimes –, notamment pour les personnes dont l'activité professionnelle n'est pas d'être transporteurs. Si, par hasard ou du fait d'une activité spécifique, il devait en être autrement, il serait possible de négocier le prix ou d'isoler la part du transport dans le prix et de la répercuter – ce qui implique certes une comptabilité compliquée. C'est précisément ce que nous nous sommes efforcés d'éviter, car le précédent décret soumettait tout type de transport à une répercussion au réel : pour chaque client, chaque itinéraire et chaque tonnage, la taxe devait être répercutée à due proportion, ce qui était intenable sur le plan comptable et administratif.
Il conviendra, en revanche, d'analyser les conséquences du dispositif sur le territoire, afin d'identifier les obstacles qui viennent en miner l'efficacité. Il est encore mal connu des professionnels – à qui l'on ne peut faire grief de ne pas avoir l'oeil rivé sur nos débats – mais, l'écotaxe poids lourds s'appliquant sur 1 % du réseau et le transport de proximité n'étant qu'une part de l'activité de la distribution et des grossistes, elle a des conséquences minimes.
Vous avez recommandé à juste titre, monsieur François-Michel Lambert, d'éviter la multiplication des dérogations et exonérations. Si M. Guillaume Chevrollier vient demander à M. Philippe Duron de financer de nouvelles infrastructures, sans doute ne se plaindra-t-il pas de la création de l'écotaxe poids lourds. Tenons-nous-en aux dispositifs existants, qui ont leur stabilité.
Monsieur Olivier Falorni, vous avez souligné, à juste titre, la forte demande exprimée par les gens de mer, notamment en matière de réforme sociale. Il nous faut affirmer que le droit du travail s'applique à l'ensemble des équipages et nous nous acheminons vers le dispositif le plus compatible qui soit avec le droit européen.
L'écotaxe poids lourds est affectée à l'AFITF et il conviendra de déterminer, avec l'État stratège, les politiques d'accompagnement à mettre en oeuvre, car cette affectation du produit de la taxe ne dispense pas d'élaborer des mesures d'aide au transport combiné, au dernier kilomètre ou à des transports vertueux d'un point de vue environnemental. Plutôt que de multiplier les dispositifs, ceux-ci doivent être fléchés vers l'AFITF. Ces dispositifs se mettront en place dans le temps, car nous avons déjà des actions à financer. Le report de l'écotaxe poids lourds nous permettra de dégager non pas 400 millions d'euro, mais seulement 80 millions, ce qui nous conduira à travailler à partir du fonds de roulement et à lisser les actions dans le temps. Ce sera provisoire et nous pourrons, je l'espère, procéder dans quelques années à un indispensable rattrapage du financement de l'AFITF.
Sur la redevance domaniale, les discussions sont encore en cours avec les sociétés d'autoroutes et nous souhaitons parvenir à un dispositif qui soit juridiquement solide. Le transport étant très sensible à l'activité économique, on assiste plutôt à une diminution du transport poids lourd sur les autoroutes. L'intérêt de la redevance domaniale est de ne pas se répercuter sur le prix à l'usager. Il nous faut travailler avec les concessionnaires d'autoroutes à un plan de relance comportant des investissements environnementaux, des équipements et des infrastructures. C'est une question pertinente et le Gouvernement procède actuellement à l'augmentation de la redevance.
La taxe à l'essieu, qui est au minimum, procède d'une logique différente. Je ne me sens pas lié par l'engagement de suppression de cette taxe. Son abolition serait, en outre, contraire à la directive européenne relative à l'eurovignette.
Monsieur Jean-Marie Sermier, les transporteurs pour compte propre ne sont pas des transporteurs routiers, mais des personnes utilisant le transport dans le cadre de leur travail. Les deux solutions, je le rappelle, consistent à isoler le prix du transport ou à le répercuter dans le prix de vente au client.
Monsieur Jean-Louis Bricout, la RN 2 n'est pas un délaissé routier même si elle peut parfois en avoir l'apparence. La liste des délaissés routiers, voies déclassées après consultation des collectivités locales, est très limitative ; elle a été remise à votre rapporteure. Il s'agit de purger des difficultés ponctuelles sur quelques kilomètres – moins d'une dizaine pour le plus long de ces tronçons – avec compensation ou dotation de l'État pour éviter toute difficulté.
Monsieur David Douillet, je n'ai pas connaissance d'ambulances privées de plus de 3,5 tonnes devant être classées comme véhicules de transport de marchandises. Quant à la notion d'activité d'intérêt général, ses limites ne sont pas forcément claires, mais il existe une liste des véhicules entrant dans cette catégorie. Un amendement a été déposé sur ce point et j'ai défendu au Sénat une position très restrictive, recommandant de ne pas ouvrir une boîte de Pandore qui provoquerait de difficiles déterminations en la matière, notamment pour ce qui concerne les véhicules des collectivités locales et de l'État, ainsi que les véhicules de travaux publics – même s'il est certain que, pour ces derniers, le prix du transport sera répercuté dans le prix des travaux. Évitons une liste à la Prévert des exonérations, sous peine de miner le principe même de la taxe. Il revient aux parlementaires d'amender le texte s'ils le souhaitent et je m'en remets pour cela à leur sagesse.
Peut-être évoquerons-nous plus tard le système allemand. Il faudrait, en tout cas, travailler avec l'Allemagne. Du reste, pour le ferroviaire comme pour l'ensemble des transports, la réglementation européenne devrait assurer la compatibilité des systèmes et il est regrettable que cette question ne jouisse pas de la priorité qu'elle mérite.
Le système est vertueux sur le plan environnemental pour ce qui est de l'affectation et de l'usage des sommes allouées, ainsi que pour ce qui concerne l'accompagnement de certains dispositifs et même pour les expériences menées sur la « route du futur », intelligente et moins consommatrice d'énergie. Ces thématiques ne sont pas encore mûres et je vous renvoie, à ce propos, au récent colloque sur les systèmes de mobilité intelligents de l'Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité (IDRRIM). De telles actions peuvent donner lieu à des cofinancements si nous avons de bons retours d'une application réelle et efficace de l'écotaxe poids lourds.
Enfin, il est vertueux que ce dispositif soit le seul mécanisme fiscal et financier qui distingue le transport issu d'autres pays, qui pratiquent souvent une concurrence déloyale.
La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a ensuite examiné, sur le rapport de Mme Catherine Beaubatie, le projet de loi portant diverses dispositions en matière d'infrastructures et de services de transports (n° 728).
Notre commission est saisie de 132 amendements, qui sont pour les deux tiers de nature rédactionnelle. À la suite de l'avis demandé à la commission des finances, quatre amendements ont été déclarés irrecevables au titre de l'article 40 de la Constitution : les amendements CD 32 de M. Alain Gest, CD 99 de M. Richard Ferrand, CD 112 de M. Martial Saddier et CD 136 de M. Xavier Breton. Les premiers signataires de chacun de ces amendements en ont été informés par courrier électronique.
TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX INFRASTRUCTURES ET AUX SERVICES DE TRANSPORT FERROVIAIRE OU GUIDÉ
Article 1er : Clarification du périmètre des missions obligatoirement subdéléguées à la Direction des circulations ferroviaires (DCF)
La commission adopte l'article 1er sans modification.
Article 2 : Application aux transports ferroviaires régionaux du régime de droit commun des Groupements européens de coopération transfrontalière (GECT)
La Commission est saisie de l'amendement CD 117 de M. Martial Saddier.
Cet amendement, comme le suivant, sont deux amendements d'appel visant à éviter que des relations directes entre les régions et la SNCF ne viennent parasiter les groupements européens de coopération territoriale, les GECT, dont la mise en place est très complexe, notamment avec ceux de nos voisins qui, telle la Confédération helvétique, n'appartiennent pas à l'Union européenne.
Avis défavorable à cet amendement : il ne me semble pas opportun de priver la SNCF de la possibilité d'organiser des services transfrontaliers avec le transporteur compétent d'un État voisin lorsque celui-ci est dépourvu d'autorité organisatrice de transport.
Également défavorable. Il faut que la SNCF garde la possibilité de passer de telles conventions bilatérales.
La Commission rejette cet amendement.
Elle est saisie de l'amendement CD 116 de M. Martial Saddier.
Défavorable : une région ne peut pas partager des compétences qu'elle n'a pas.
La Commission rejette cet amendement.
La Commission adopte alors l'amendement rédactionnel CD 4 de la rapporteure.
Elle adopte ensuite l'article 2 ainsi modifié.
Article 3 : Présentation de comptes séparés pour les activités « services » et les activités « gestion de l'infrastructure » des entreprises ferroviaires
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CD 128 de la rapporteure puis elle adopte l'article 3 ainsi modifié.
Article 3 bis : Transmission par la SNCF aux régions des comptes d'exploitation des lignes TER
La Commission examine l'amendement CD 104 rectifié de M. Florent Boudié.
Cet amendement vise à approfondir les dispositions introduites par le Sénat pour assurer la transparence des relations entre la SNCF et les autorités organisatrices de transport, les AOT, sur le modèle du régime de la délégation de service public.
Je suis favorable à cet amendement, qui traduit une demande forte et légitime des régions.
Je suis favorable à ce renforcement des obligations d'information.
La Commission adopte cet amendement.
L'article 3 bis est ainsi rédigé.
En conséquence, les amendements CD 6 et CD 8 tombent.
Après l'article 3 bis
La Commission est saisie de l'amendement CD 119 rectifié de M. Denis Baupin, portant article additionnel après l'article 3 bis.
Cet amendement, soutenu par le club des parlementaires sur le vélo, vise à favoriser l'intermodalité entre le vélo et le transport ferroviaire en prévoyant la généralisation des stationnements sécurisés pour les vélos à proximité des gares.
Je suis défavorable à cet amendement, d'abord parce qu'il vise à introduire une disposition prescriptive, précise et contraignante dans un article du code des transports de portée très générale, puisqu'il fixe les grandes orientations de la politique de transport. Par ailleurs, le caractère systématique et obligatoire de cette disposition pose problème s'agissant d'un domaine où il vaut mieux décider au cas par cas et en concertation avec les collectivités locales.
C'est un bon amendement, qui a le mérite de relancer la réflexion sur l'intermodalité entre le vélo et le train.
Je soutiens cet amendement, à la seule réserve du mot « systématique », d'autant qu'il renvoie à un décret.
Si la motivation de cet amendement est louable, je partage les réticences de la rapporteure, notamment quant au caractère impératif de la disposition. En outre, ce dispositif me semble plutôt relever du Plan vélo que je compte lancer dans les prochains mois.
L'amendement est retiré.
La Commission examine l'amendement CD 118 de M. Denis Baupin.
Cet amendement vise également à favoriser l'intermodalité entre le vélo et le train, en garantissant la possibilité de transporter les vélos non démontés à bord des trains de grande ligne. Il s'agit de sensibiliser la SNCF à la nécessité de développer cette intermodalité.
On ne voit pas très bien quelles sont les collectivités « concernées » dont l'accord préalable est imposé par votre amendement. S'agit-il de toutes les collectivités desservies ou seulement de celles qui se trouvent en bout de ligne ? Par ailleurs, beaucoup de trains ne sont pas conçus pour embarquer des vélos non démontés.
Là encore, l'intention est louable, mais, outre les réserves formulées par Mme la rapporteure, ce type de réforme se prépare très en amont : elle suppose notamment une nouvelle conception du matériel roulant. Il me semble par ailleurs que d'autres véhicules juridiques, tel le Plan vélo, seraient plus susceptibles de nous permettre d'aboutir : la loi doit rester l'ultime recours.
S'agissant d'un amendement destiné à sensibiliser le Gouvernement et la SNCF à cette question, il ne faudrait pas que son rejet aboutisse à l'effet inverse. C'est pourquoi je préfère le retirer.
L'amendement est retiré.
Article 4 : Constatation des vols et dégradations sur le domaine public ferroviaire
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CD 10 de la rapporteure.
Elle adopte ensuite l'article 4 ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 4 [Article 4 bis A (nouveau)] : Limitation de la co-maîtrise d'ouvrage entre le STIF et la RATP aux opérations portant sur les infrastructures dont celle-ci est le gestionnaire
La Commission est saisie de l'amendement CD 105 rectifié de M. Alexis Bachelay, portant article additionnel après l'article 4.
Cet amendement vise à préciser le champ d'application de l'article L. 1241-4 du code des transports, qui régit notamment les relations entre le syndicat des transports d'Île-de-France, le STIF, et la Régie autonome des transports parisiens. Cette proposition concrétise la pertinence du mécanisme de co-maîtrise d'ouvrage en le corrélant aux opérations d'aménagement, d'extension ou de prolongement pour lesquelles la RATP est gestionnaire d'infrastructure.
Avis également favorable.
La Commission adopte cet amendement.
Article additionnel après l'article 4 [Article 4 bis B (nouveau)] : Possibilité pour le STIF et les départements d'instituer des servitudes d'ancrage pour les lignes aériennes de contact nécessaires aux tramways
Elle examine ensuite l'amendement CD 106 de M. Alexis Bachelay portant article additionnel après l'article 4.
Cet amendement vise à ce que les dispositions du code de la voirie routière applicables à la Ville de Paris et étendues aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de voirie ou d'éclairage public ou de transport en commun soient également applicables au STIF et aux départements lorsqu'ils sont maîtres d'ouvrage de la réalisation de l'infrastructure des tramways. En un mot, il s'agit de faire le Grand Paris des lignes aériennes.
Favorable : le STIF doit avoir les mêmes prérogatives que la ville de Paris et les autres collectivités compétentes.
Même avis.
La Commission adopte cet amendement.
Après l'article 4
La Commission est saisie de l'amendement CD 108 de M. Alexis Bachelay.
Le Conseil Constitutionnel ayant, par sa décision n° 2012-226 QPC du 6 avril 2012, déclaré les dispositions des articles L. 15-1 et L. 15-2 du code de l'expropriation contraires à la Constitution, il est indispensable de remplacer ces dispositions par un nouveau dispositif afin de ne pas retarder la réalisation des projets d'infrastructures, notamment en matière de transport en commun, et de ne pas remettre en cause leur équilibre économique au regard des frais financiers qui seraient consécutifs aux arrêts de chantier durant une procédure d'appel. Le présent amendement rend à l'expropriant la possibilité de prendre possession, même dans le cas où l'exproprié ferait appel de l'ordonnance du juge fixant l'indemnité d'expropriation, à condition de payer ou, dans les cas limitativement énumérés d'obstacles à payement, de consigner la totalité du montant fixé par l'ordonnance, ce qui satisfait à l'obligation constitutionnelle de juste et préalable indemnité.
Les deux articles dont vous proposez une nouvelle rédaction seront abrogés le 1er juillet et la chancellerie en proposera une nouvelle version. C'est pourquoi je vous demande de retirer votre amendement.
Je vous fais la même demande, afin que nous puissions travailler sur le texte proposé par la chancellerie.
N'ayant pas la prétention de mieux rédiger les articles de loi que la chancellerie (Sourires), je retire cet amendement.
L'amendement est retiré.
Article 4 bis : Remontées mécaniques : indemnisation des biens de retour au terme d'un contrat de délégation de service public
La Commission adopte l'article 4 bis sans modification.
TITRE II -
DISPOSITIONS RELATIVES AUX INFRASTRUCTURES ET AUX SERVICES DE TRANSPORT ROUTIER
Avant l'article 5
La Commission est saisie des amendements identiques CD 14 de M. Guillaume Chevrollier, CD 90 de M. Bertrand Pancher et CD 133 de M. Xavier Breton, portant article additionnel avant l'article 5.
La décision du Gouvernement de fermer d'ici à 2016 toutes les installations auxiliaires de contrôle technique va avoir de graves conséquences pour les transporteurs routiers – allongement du temps de conduite des chauffeurs, augmentation des frais de carburant, risque de hausse du prix des contrôles techniques, engorgement des centres entraînant des délais d'attente pour les visites notamment. Par ailleurs, l'augmentation des déplacements des véhicules consécutive à la fermeture de ces installations contribuera à une augmentation du trafic, et donc des émissions polluantes, à l'encontre des objectifs du Grenelle de l'environnement. C'est pourquoi nous proposons par cet amendement d'annuler la suppression des installations auxiliaires de contrôle technique et d'étendre, pour la seule catégorie des véhicules lourds, à tous les acteurs, qu'ils soient réseaux de contrôles agréés ou centres de contrôle non-rattachés, la possibilité d'ouvrir des installations auxiliaires de contrôle technique.
J'ajoute que notre proposition a été favorablement accueillie par la quasi-totalité des acteurs de la filière.
Il est nécessaire d'annuler la suppression des installations auxiliaires de contrôle technique et d'étendre à tous les acteurs, réseaux de contrôle agréés ou centre de contrôle non rattachés, la possibilité d'ouvrir des installations auxiliaires de contrôle technique, pour la seule catégorie des véhicules lourds.
Ces installations assurent une véritable mission de service public, notamment dans les zones rurales, sans rien coûter à l'État ni aux collectivités.
Si le Gouvernement a décidé de supprimer cette dérogation, c'est parce qu'elle constituait une rupture d'égalité. En outre, cette décision ne prendra effet qu'en 2016. Enfin, les centres de contrôle semblent assurer une couverture suffisante du territoire. Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à ces amendements.
Défavorable pour les mêmes raisons, d'autant que la dérogation ne se justifie plus, compte tenu de la densité du maillage territorial assuré par les centres de contrôle technique.
La Commission rejette ces trois amendements.
La Commission examine les amendements identiques CD 96 de M. Olivier Marleix et CD 134 de M. Xavier Breton, portant article additionnel avant l'article 5.
La France se distingue des autres États membres de l'Union européenne en interdisant aux distributeurs et réparateurs de véhicules industriels d'obtenir un agrément pour effectuer les opérations d'installation et d'inspection des chronotachygraphes. Ce régime spécifique à la France interdit à nos professionnels de bénéficier des mêmes conditions d'exercice de leur activité que leurs homologues des autres États membres de l'Union européenne. Cet amendement vise à assouplir cette réglementation.
Il faut permettre aux distributeurs et aux réparateurs de véhicules industriels d'effectuer l'installation et l'inspection des chronotachygraphes, sous réserve qu'ils acquièrent l'équipement nécessaire et se soumettent à l'encadrement réglementaire requis pour cette activité.
L'avis est défavorable, le droit en vigueur assurant l'indépendance des sociétés spécialisées dans l'installation et le contrôle de ce matériel vis-à-vis des sociétés de vente et de réparation des poids lourds ainsi que des transporteurs routiers.
Je suis également défavorable, pour les raisons avancées par Mme la rapporteure. S'y ajoutent des considérations de préservation de l'emploi et d'aménagement du territoire.
La Commission rejette ces deux amendements.
Article 5 : Extension de la possibilité de reclassement d'office, dans la voirie locale, de routes nationales déclassées
La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD 3, CD 5 et CD 7 de la rapporteure.
Elle adopte ensuite l'article 5 ainsi modifié.
Après l'article 5
La Commission est saisie de l'amendement CD 120 de M. Denis Baupin portant article additionnel après l'article 5.
Cet amendement, comme le suivant, vise à sensibiliser aux risques que présentent les carrefours pour les déplacements des cyclistes. Il vise en effet à interdire, comme le font déjà de nombreux pays européens, le stationnement à proximité des sites dangereux pour les cyclistes.
La rédaction de votre amendement n'est pas satisfaisante, notamment parce qu'elle n'indique pas si cette interdiction vise les seuls aménagements futurs ou si elle s'applique également aux aménagements existants, ce qui serait très problématique. Par ailleurs, je pense qu'il vaut mieux attendre les propositions que le Gouvernement compte faire dans le cadre du futur Plan vélo.
Vous m'avez convaincu, monsieur le député, de la nécessité d'une politique favorable aux mobilités douces de transport, notamment au vélo et de l'insuffisance des politiques menées jusqu'ici dans ce domaine. Je ne suis cependant pas favorable à votre amendement pour les raisons évoquées par Mme la rapporteure. C'est la raison pour laquelle je propose que votre proposition soit soumise au groupe de travail qui sera mis en place dans le cadre du Plan vélo, mode de transport actif.
Monsieur le ministre, pourriez-vous nous donner une idée du calendrier de votre action en faveur du vélo ? Vos refus pourraient en effet envoyer un message négatif – vous notez néanmoins que les députés UMP ont essayé de vous aider à atténuer cette impression... (Murmures)
Le groupe de travail que vous prévoyez sera-t-il pluriel, à l'image du club des parlementaires pour le vélo ? Je vous rappelle que la commission chargée d'établir un nouveau schéma national des infrastructures de transport (SNIT) ne comprend aucun député UMP.
Le club des parlementaires est en effet tout à fait pluraliste, et nous nous en réjouissons.
Quant aux modes de transport « actifs », c'est une expression maintenant utilisée dans de nombreux pays pour désigner les modes de transports qui utilisent la force musculaire : la marche, le vélo…
Madame la rapporteure, il me semble que le texte, en utilisant le verbe « proposer », fait bien référence aux nouveaux équipements. Mais j'ai bien entendu les propos de M. le ministre, et je retiens sa proposition d'un groupe de travail. Je retire donc l'amendement.
Merci.
Monsieur Saddier, il y a dans la commission SNIT un sénateur UMP, M. Louis Nègre. Je regrette que vous en fassiez peu de cas, alors qu'il apporte beaucoup à cette commission ! Je veillerai à vous proposer une compensation : je vois qu'il faudra de subtils dosages entre parlementaires UMP pour permettre à tous ceux qui le voudront de participer à la mise en place d'une vraie politique du vélo – ce qui n'a pas été fait jusqu'à présent.
L'amendement CD 120 est retiré.
La Commission examine ensuite l'amendement CD 121 rectifié de M. Denis Baupin.
Le sas cycliste est un aménagement qui permet d'assurer la sécurité des cyclistes sur les grands carrefours. Il en existe à Paris comme dans d'autres grandes villes. Cet amendement vise à ce qu'ils soient mis en place le plus souvent possible.
Avis provisoirement défavorable.
L'amendement CD 121 rectifié est retiré.
Article 6 : Indexation des rémunérations des cocontractants de l'État, des collectivités territoriales, de leurs groupements et des établissements publics, dans le domaine des transports
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CD 11 de Mme la rapporteure. Puis elle adopte l'article 6 ainsi modifié.
Article 6 bis : Abrogation de la taxe poids lourds alsacienne
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CD 13 de Mme la rapporteure. Puis elle adopte l'article 6 bis modifié.
Article 6 ter : Exonération de la taxe poids lourds pour les véhicules d'entretien des routes lorsqu'ils appartiennent à l'État ou aux collectivités territoriales
La Commission examine l'amendement CD 122 de M. François-Michel Lambert.
Nous proposons de supprimer cet article. En effet, si l'on veut vraiment changer de politique sur les flux de marchandises, et faire surgir des alternatives à la route, les collectivités locales doivent être exemplaires, et non chercher à s'exonérer de leurs responsabilités. Il est donc primordial de conserver l'écotaxe pour les véhicules propriété de l'État ou d'une collectivité locale affectés à l'entretien et à l'exploitation des routes. C'est d'autant plus vrai qu'il existe des alternatives pour entretenir les routes : ce sont elles qu'il faut aider, car elles créent des emplois.
Je partage le souhait du Gouvernement d'éviter les exonérations ; de plus, cet article crée une discrimination entre les collectivités territoriales qui possèdent des véhicules et celles qui, par exemple, les louent. Avis favorable.
J'avais exprimé des réserves sur la pertinence de cet amendement au Sénat. Il a été adopté. Je m'en remets à la sagesse de la Commission.
La Commission adopte l'amendement CD 122.
En conséquence, l'amendement CD 2 rectifié tombe et l'article 6 ter est supprimé.
Après l'article 6 ter
La Commission examine d'abord l'amendement CD 135 rectifié de M. Xavier Breton portant article additionnel après l'article 6 ter.
En l'état actuel du texte, les réparateurs garagistes devront payer la taxe poids lourds, même s'ils ne roulent que pendant quelques kilomètres, et qu'ils n'ont aucune activité de transport. Nous proposons donc d'exclure les véhicules qui bénéficient de l'immatriculation provisoire « W Garage » du paiement de l'écotaxe.
L'écotaxe vise à faire payer l'usage de la route, quelle qu'en soit la raison. L'immatriculation « W Garage » est utilisée de nombreuses manières différentes, qu'on ne peut pas toutes exempter. Avis défavorable.
Même avis, pour les mêmes raisons : nous ne sommes pas favorables aux exonérations ; les cas seraient peu nombreux et les conséquences économiques sont de toute façon mineures.
Monsieur le ministre, trente-trois plans de protection de l'atmosphère (PPA) ont déjà été signés. Ils comportent déjà des mesures qui concernent les transports, et dans certains bassins de vie, les entreprises de ce secteur devront non seulement s'acquitter de l'écotaxe mais aussi subir les mesures de ces PPA ! Je ne détiens pas la solution à ce problème, qui touche tout notre territoire et des collectivités locales de tous bords politiques. Mais j'appelle votre attention sur la nécessité d'une concertation interministérielle sur ces sujets : il ne faut pas trop charger la barque.
La Commission rejette l'amendement CD 135 rectifié.
Elle examine ensuite l'amendement CD 100 deuxième rectification de M. Richard Ferrand.
Le développement du transport combiné – par route et par chemin de fer – est un levier important pour l'adaptation de notre système de transport : nous proposons de l'encourager, ce qui est conforme aux souhaits du Gouvernement, en exonérant de l'écotaxe la partie routière d'un transport combiné.
La plus grande part d'un transport combiné n'est pas routière : ce mode de transport est donc moins concerné par l'écotaxe. Selon que l'itinéraire emprunté comprend une plus ou moins grande part autoroutière, les effets de l'écotaxe sur ce mode de transport seront, au pire, neutres, et même potentiellement favorables par rapport à un transport entièrement routier. De plus, il existe déjà une aide significative au transport combiné, les « aides à la pince ».
Le dispositif que vous proposez serait d'ailleurs une source de grande complexité pour les entreprises, qui auraient a posteriori à établir qu'elles ont effectué une prestation dans le cadre d'un transport combiné.
Avis défavorable.
Avis défavorable également. Il existe en effet déjà des aides – environ 25 millions d'euros – pour le transport combiné, qui est évidemment quelque chose d'intéressant. Je vous signale d'ailleurs que ce système d'aide, tout à fait légitime, doit être notifié à la Commission européenne. Par nature, le transport combiné n'utilise la route que pour les quelques premiers ou derniers kilomètres : il est donc peu concerné par l'écotaxe.
La position constante du Gouvernement sur l'écotaxe poids lourds est que celle-ci est calculée en fonction du seul genre du véhicule, et non de son usage.
Les contrôles seraient enfin très difficiles à mener.
La Commission rejette l'amendement CD 100 deuxième rectification.
Puis elle est saisie de l'amendement CD 102 deuxième rectification de M. Jean-Pierre Le Roch.
Cet amendement a pour objet d'exonérer de l'écotaxe les véhicules utilisés pour la collecte du lait dans les fermes. La filière laitière rencontre aujourd'hui de grandes difficultés et il ne paraît pas raisonnable de lui faire payer cette écotaxe. La mise en oeuvre de celle-ci doit se faire dans le cadre de la directive « Eurovignette », qui permet l'exonération des véhicules dispensés de chronotachygraphes.
Une telle mesure serait certes compatible avec la directive, mais je souhaite, comme le Gouvernement, éviter les exonérations ; de plus, la collecte de lait utilise très peu le réseau routier taxable. Avis défavorable.
Avis défavorable, pour les mêmes motifs, et en raison d'une trop grande difficulté à assurer les contrôles.
Nous rentrons ici dans le vif du sujet. Le transport international qui traversera la France et qui utilisera exclusivement les autoroutes ne sera pas concerné : on manque donc largement l'objectif initial. En revanche, cet amendement souligne que l'écotaxe touche le made in France : il serait intéressant que M. Arnaud Montebourg vienne s'exprimer sur ce sujet devant notre commission ! Ce qui est touché, c'est le commerce local. Nous soutenons donc cet amendement.
Nous pourrions prévoir de nombreux régimes particuliers, mais cela dénaturerait le dispositif. De plus, vous parlez ici de dessertes locales, par définition peu concernées – j'ai fait le calcul : dans ma circonscription, il n'y a pas deux kilomètres de routes taxables.
Monsieur Martial Saddier, votre majorité a imaginé l'écotaxe ; vous avez choisi, il y a moins d'un an, un dispositif assez compliqué. Ne détruisez pas aujourd'hui votre propre travail !
Ne négligeons pas le fondement juridique de l'amendement : le règlement européen du 20 décembre 1985 prévoit que les véhicules de collecte de lait dans les fermes n'ont pas l'obligation de posséder un appareil de contrôle. Il serait donc cohérent de les dispenser d'écotaxe.
Il y a un autre problème : même sur de petites distances, il suffira d'un peu de malchance pour devoir passer cinq ou six fois par jour sur une portion, même très petite, du réseau taxé ! Dans ce cas, l'entreprise devra payer à chaque fois, et ne pourra pas récupérer ces sommes en les faisant payer à ses clients. Ce n'est pas ce dont nous avions convenu lorsque nous avons voulu l'écotaxe.
Les itinéraires ont été définis à partir de deux décrets. L'ensemble des collectivités territoriales concernées ont été sollicitées pour avis. Cette liste des routes taxables, vous l'avez assumée hier : assumez-la encore aujourd'hui.
Réfléchissons bien aux signes que nous envoyons ! Vous avez voulu, et nous vous avons accompagnés, une fiscalité écologique. Aujourd'hui, nous la mettons en place, ce qui est forcément difficile. Ensuite, il sera temps de l'évaluer et d'en corriger les défauts.
Je suis conseiller général du Jura, et notre conseil général a donné son accord pour que la RN 73 soit taxée. Mais nous pensions tous à de longs trajets ! Je crois que ce projet de loi ne respecte pas l'esprit du texte initial.
Certains ont le choix d'un itinéraire, et d'autres, notamment pour les circuits courts, ne l'ont pas : en s'appliquant de façon identique à des situations très différentes, la loi crée une inégalité. Le législateur devrait au contraire s'adapter : la pollution est quand même plutôt due aux longs trajets ; l'objectif n'est pas de tuer ce qui se fait au niveau local.
La Commission rejette l'amendement CD 102 deuxième rectification.
Puis elle examine l'amendement CD 115 deuxième rectification de M. Martial Saddier.
Nous sommes ici dans le même esprit que l'amendement précédent. Nous n'avons toutefois pas voulu énumérer une à une toutes les professions, comme vous l'avez fait naguère !
Pour débattre de façon constructive, nous avons donc pris un exemple : celui de la filière bois. Nous nous battons tous pour les énergies renouvelables et la proximité ; or voilà un combustible qui sera taxé. On n'est plus dans l'esprit de la loi Grenelle 1, dont l'article 11 dispose que « l'État étudiera des mesures à destination des transporteurs permettant d'accompagner la mise en oeuvre de la taxe et de prendre en compte son impact sur les entreprises. »
Vous risquez de créer une distorsion de concurrence entre les petites entreprises situées dans des zones où les routes ne sont pas taxées, et d'autres qui seront peut-être à quelques centaines de mètres du système qui permettra de faire payer les poids lourds, et qui l'utiliseront quinze, vingt fois par jour, et paieront autant de fois ! Non, on n'est plus dans l'esprit de la loi : un poids lourd qui partira de Pologne pour se rendre à Barcelone utilisera l'autoroute et ne paiera pas l'écotaxe, quand une petite PME paiera systématiquement pour un trajet de quelques kilomètres. J'appelle vraiment votre attention sur ce problème, monsieur le ministre.
Ce n'est pas tant un problème de catégorie professionnelle qu'un problème spatial : il faut prévoir des dérogations pour les petits trajets répétés des entreprises très proches d'une zone de péage.
Les entreprises, pour la plupart d'entre elles, étaient déjà installées dans les territoires lorsque les conseils généraux ont adopté le réseau taxable. Les services du conseil général du Jura avaient sans doute évalué l'impact économique de la mesure. J'ajoute que la révision des tronçons taxables est toujours possible : je vous invite à prendre vos responsabilités. Nous nous opposons à tout traitement différencié selon l'usage qui est fait d'un véhicule. Avis défavorable.
La carte du réseau taxable montre que seuls 1,3 % du réseau départemental – soit 5 000 kilomètres – et 0,5 % du réseau local sont concernés : les réseaux de proximité, en Haute-Savoie, dans la Mayenne comme dans le Jura, ne le sont pas.
Par ailleurs, ne créez pas d'ambiguïté entre les entreprises de transport et le transport de marchandises, entre la prestation et l'activité. Le coût peut être répercuté dans le prix final des produits.
Le dispositif que vous défendiez il y a quelques mois, chers députés de l'opposition, avait exactement les mêmes effets ; pourtant, je ne vous avais pas entendu, alors, en dénoncer d'éventuelles conséquences fâcheuses. Soyez logiques ! Les dispositions adoptées, auxquelles j'étais d'ailleurs favorable, ont fait l'objet de décrets de la part du Gouvernement que vous souteniez ; ces dispositions devront être expertisées lors du suivi de la mise en oeuvre de l'écotaxe. À moins qu'elles n'aient pour but d'alimenter les inquiétudes, vos remarques ne sont donc pas fondées.
Nous pouvons entendre vos arguments, monsieur le ministre. Mais, compte tenu de la progression naturelle de la fiscalité dans notre pays, on peut imaginer que d'autres majorités ou d'autres administrations étendront la taxe.
Son application pénalisera la filière bois par rapport à l'énergie nucléaire, qui deviendra proportionnellement moins chère ; or ceux qui défendent la taxe sont les mêmes qui combattent l'énergie nucléaire, en voulant lui substituer des énergies renouvelables.
L'augmentation du prix induite par l'application de la taxe sera marginale.
Le fait est que le prix augmentera. Afin de faire accepter une nouvelle taxe, on en fixe toujours une assiette très large et un taux très bas ; mais on ignore ce qu'il en sera à l'avenir.
Je rassure Julien Aubert : nous nous occuperons de l'électricité nucléaire afin d'en définir le vrai coût. (Sourires)
Les camions dont nous parlons transportent des sources d'énergie. Or la transition énergétique vise à diminuer très sensiblement la consommation finale. Pourquoi cibler une catégorie de produits ? La France est « surconsommatrice » d'énergie ; le but est donc de diminuer cette consommation, notamment dans le transport routier.
Des optimisations sont possibles dans la chaîne du bois, qui auraient sur les coûts des effets bien plus grand que celui, marginal, de la taxe. Il faut d'abord se poser la question des modalités de transport du produit. La livraison des bûches, par exemple, est généralement assurée par de vieux camions : il serait temps d'encourager des modes de transport plus modernes et plus performants, qui, comme j'ai pu le constater chez un opérateur des Vosges, permettent de dégager une marge intéressante tout en garantissant un prix bas.
Nous avons, monsieur le ministre, approuvé un principe qu'il est aujourd'hui temps d'appliquer : notre désaccord, qui porte sur les modalités pratiques, n'a rien de choquant, d'autant que notre inquiétude se fonde aussi sur une incertitude juridique qui hypothèque l'application locale de la mesure ; il est de notre devoir de le dire dans le cadre du débat parlementaire.
Vous appelez de vos voeux une continuité entre l'ancienne majorité et la nouvelle opposition, et je vous donne acte que votre ton, ce soir, est plus consensuel qu'il ne le fut lors de vos premières auditions par notre commission : le compte rendu en fera foi.
Je m'étonne que nos collègues de l'opposition doutent de ce qu'ils ont eux-mêmes créé. D'où vient leur subite angoisse ? Les modalités d'application seront simplifiées : celles que vous envisagiez ne prévoyaient aucune compensation supplémentaire, et n'étaient en rien plus équitables. La disposition dont nous parlons, je le rappelle, est directement issue de l'article 11 du Grenelle de l'environnement. Vos inquiétudes me semblent donc relever du jeu de rôle.
J'assume pleinement la paternité de l'écotaxe ; mais les décrets, eux, sont du ressort du Gouvernement.
J'appelle votre attention sur un « micro-problème ». Des petites entreprises peuvent utiliser un grand axe de liaison comme itinéraire de desserte. Dans ma circonscription, une coopérative agricole possède une cinquantaine de camions, qui sont tous les jours obligés d'emprunter la RN 73 sur une dizaine de kilomètres. À 20 centimes du kilomètre, la taxe coûtera 44 000 euros à cette entreprise à la fin de l'année.
Sans remettre en cause le principe, il me semble urgent de repenser le dispositif à partir de critères géographiques : on ne peut pénaliser les entreprises qui ont la malchance d'être situées sur le réseau taxable.
On peut être d'accord sur la guerre au Mali sans l'être sur la manière dont elle est menée : il en va de même avec la fiscalité écologique.
La formule de compensation ne figurait pas dans le projet de l'ancien Gouvernement ; au reste, elle me semble un peu fumeuse au regard de l'unité du budget de l'État puisque la taxe, sans être présentée comme telle, est d'abord perçue par les transporteurs sans correspondre exactement au coût induit pour eux, de sorte qu'ils acquittent ou perçoivent la différence – qui, dans ce dernier cas, représente un manque à gagner pour l'État. Il est normal que nous nous interrogions sur une usine à gaz dont les effets restent, de votre propre aveu, « marginaux », d'autant que les frais de recouvrement de cette taxe devraient atteindre 19 % – contre 6 à 7 % pour l'ISF, par exemple. Le diable est dans les détails : les exemples que l'on a cités montrent que la mesure telle qu'elle est conçue peut avoir des effets dramatiques sur le terrain.
À micro-exemple, monsieur Sermier, macro-réponse. L'emplacement des entreprises est un enjeu aussi ancien que l'économie elle-même : celles situées le long de la Nationale 7, par exemple, ont prospéré pendant la première moitié du XXe siècle, avant qu'une autoroute ne change la donne et ne les oblige à s'adapter, sous peine de disparaître. On ne peut légiférer en fonction de cas particuliers : l'application de l'écotaxe doit rester équitable.
Certains propos montrent que la pédagogie n'a pas produit tous ses effets, ou que d'aucuns préfèrent susciter l'inquiétude. En premier lieu, il ne s'agit pas de taxer les transporteurs. Pour un camion transportant plusieurs dizaines de tonnes de marchandises et empruntant le réseau taxable sur dix kilomètres, le montant de la taxe sera de 1,20 euro. Votre « verdissement grenellien », chers députés de l'opposition, semble avoir été éphémère. Pour des raisons qui sont sans doute d'opportunité politique, ce qui vous apparaissait vrai hier est devenu faux aujourd'hui.
C'est vous qui avez institué l'écotaxe poids lourds, dont j'ai hérité avec le décret publié le 6 mai – voilà de quoi alimenter l'interprétation partisane que vous faites prévaloir ! Ce décret, il a fallu le revoir car tous les professionnels de la route s'en plaignaient – ce qui vous place en porte-à-faux à leur égard aujourd'hui –, et c'est le seul document que j'ai trouvé sur mon bureau lors de ma prise de fonction. Bref, j'ai eu à assumer ce que je n'avais pas décidé.
Et la continuité de votre position politique, qu'en faites-vous ? L'écotaxe poids lourds était un engagement du Grenelle ; le décret dont elle a fait l'objet, inapplicable, méconnaissait la réalité des PME du secteur des transports : il tendait à répercuter le coût en fonction de critères aussi divers que les itinéraires, le nombre de kilomètres parcourus et la composition des cargaisons. Imaginez la complexité de la chose pour des groupements de marchandises !
Contrairement à ce que vous avez dit, le réseau de proximité n'est pas taxé : seuls les grands axes le sont. Les dispositions que vous nous reprochez aujourd'hui sont celles-là mêmes que vous aviez instaurées dans un décret impossible à appliquer. Je propose, en somme, de veiller à la bonne application de l'écotaxe.
S'agissant des itinéraires, qui peuvent en effet poser problème ponctuellement, nous serons attentifs au suivi de l'application de la mesure. Nous assumons la continuité des engagements pris quant à un transport responsable et respectueux de l'environnement. Nous avons voté le Grenelle comme l'écotaxe poids lourds ; aujourd'hui nous l'appliquons, assumant notre volontarisme en matière de transition énergétique. Malgré les beaux discours que vous avez tenus dans cette salle même, c'est bien la présente majorité qui, aujourd'hui, entend passer aux actes.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CD 98, deuxième rectification, de M. Richard Ferrand.
Cet amendement a pour objet de modifier les taux de minoration prévus au 2° de l'article 275 du code des douanes, afin de réduire l'impact de la mesure pour les régions périphériques et péninsulaires. Nous proposons de porter le taux de 40 % à 50 % et celui de 25 % à 30 %.
Le taux de minoration, fixé à 40 % pour la Bretagne, a pour effet de limiter les disparités quant à l'impact de la mesure sur les différents territoires. Le caractère péninsulaire de la région, la spécificité des marchandises transportées – principalement de nature agricole et agroalimentaire – et la dispersion des activités économiques justifient une telle modulation.
Or la modification du mécanisme de répercussion a pour effet de lisser cette disposition et d'en limiter l'impact ; c'est ce qui conduit les députés de l'Ouest, et plus généralement des territoires périphériques, à proposer cet amendement.
La situation particulière des régions périphériques est déjà prise en compte par une minoration significative de l'écotaxe poids lourds en leur faveur. Il n'est pas envisageable d'aller plus loin. Avis défavorable.
Le dispositif a déjà beaucoup évolué au profit des régions périphériques. En 2008, les estimations pour la Bretagne avaient conduit à proposer une minoration de 25 %, avant que ce taux ne soit porté à 40 % après de nouvelles expertises, et à 25 % pour les régions Midi-Pyrénées et Aquitaine.
L'effet moyen de la taxe sur le coût d'une tonne transportée en Bretagne – ou dans d'autres régions périphériques – est sensiblement inférieur à la moyenne nationale. Votre amendement poserait un problème d'équité par rapport à d'autres régions dans une situation similaire, comme le Limousin, la Basse-Normandie, la Haute-Savoie ou l'Alsace. Évitons de creuser encore les différentiels de taux : les dispositions spécifiques du précédent décret relativement aux régions périphériques ont été maintenues dans le présent texte.
Monsieur le ministre, je veux vous rappeler, sans esprit polémique, que le débat est le principe même du travail en commission. Mme Viviane Le Dissez, elle, semble avoir le droit de soulever la question de la collecte locale du lait : vous avez pris le temps de lui répondre sur le ton le plus calme, avançant des arguments auxquels nous pourrions par ailleurs souscrire. Reste que la différence avec le ton que vous utilisez à notre égard est frappante. Restons constructifs et gardons-nous des procès d'intention : nous en sommes, pour certains d'entre nous, à notre troisième mandat, et nous avons essuyé quelques ouragans. Si nous participons aux débats en commission un mercredi soir à vingt heures, ce n'est certes pas pour voir notre nom figurer au compte rendu…
La Commission rejette l'amendement.
La Commission examine l'amendement CD 94 deuxième rectification de M. Bertrand Pancher.
Cet amendement s'inscrit dans la lignée de ceux qui viennent d'être défendus par mes collègues du groupe UMP. Si j'ose dire, monsieur le ministre, vous avez d'ailleurs apporté de l'eau à son moulin en mettant en exergue le département de la Mayenne mais, surtout, en rappelant que seuls 5 000 kilomètres de réseau local seront soumis à l'écotaxe, ce qui représente 1,3 % du réseau départemental et 0,5 % du réseau local total. Il convient donc d'exonérer l'ensemble des véhicules immatriculés en France de s'équiper du système électronique embarqué dès lors qu'ils ne passeront jamais sur le réseau routier concerné.
Comment peut-on être assuré qu'un poids lourds n'empruntera jamais une route taxable ? Avec votre amendement, auquel je ne suis pas favorable, il ne serait pas possible de contrôler ce type de fraude.
Je ne prétends pas que vous vouliez inciter à la fraude mais la dérogation au dispositif que vous proposez la faciliterait. Comme l'a dit Mme la rapporteure, comment savoir qu'un véhicule a emprunté – même très peu – ou non le réseau taxé ?
Je rappelle que la caution du boîtier s'élève à cent euros sans abonnement et qu'avec abonnement, il est gratuit.
La Commission rejette l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CD 123 de M. Paul Molac.
Nous avons dit qu'il convenait de faire évoluer les transports de proximité. Or, la région constitue une structure adaptée pour apporter des réponses alternatives à la route puisque les infrastructures portuaires, par exemple, en relèvent. Les régions doivent donc pouvoir percevoir une partie du produit de la taxe afin de financer les infrastructures de ce type. De surcroît, elles pourraient mieux se saisir des enjeux liés aux déplacements, notamment en travaillant à des optimisations logistiques, à l'amélioration de l'état des véhicules ou au développement de l'éco-conduite.
Alors que nous souhaitons renforcer la prise en compte des territoires par les collectivités ad hoc, nous devons permettre à ces dernières de disposer de ressources suffisantes.
L'écotaxe est une taxation de l'usage des routes visant notamment à permettre aux collectivités territoriales de financer l'entretien de celles qui supportent le passage des poids lourds. Les communes et les départements utiliseront cette recette comme ils le souhaitent, mais c'est la logique du système, et en affecter une part aux régions se ferait à leur détriment.
De plus, l'amendement risque de priver l'AFITF de toute recette issue de la taxe poids lourds puisque toutes les routes taxables sont par définition situées sur le territoire de collectivités territoriales.
Je m'en remets à la brillante démonstration de votre éloquente rapporteure (Sourires).
La Commission rejette l'amendement.
Membres présents ou excusés
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Réunion du mercredi 27 mars 2013 à 16 h 30
Présents. - Mme Laurence Abeille, M. Yves Albarello, M. Julien Aubert, M. Alexis Bachelay, M. Serge Bardy, M. Denis Baupin, Mme Catherine Beaubatie, M. Philippe Bies, M. Florent Boudié, M. Christophe Bouillon, M. Jean-Louis Bricout, M. Alain Calmette, M. Yann Capet, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, M. Jean-Jacques Cottel, Mme Florence Delaunay, Mme Fanny Dombre Coste, M. David Douillet, Mme Françoise Dubois, M. Olivier Falorni, M. Yannick Favennec, M. Laurent Furst, Mme Geneviève Gaillard, M. Alain Gest, M. Charles-Ange Ginesy, M. Michel Heinrich, M. Jacques Kossowski, M. Jacques Krabal, M. François-Michel Lambert, M. Alain Leboeuf, Mme Viviane Le Dissez, M. Arnaud Leroy, M. Michel Lesage, M. Olivier Marleix, M. Philippe Martin, M. Jean-Luc Moudenc, M. Philippe Noguès, M. Rémi Pauvros, Mme Sophie Rohfritsch, M. Martial Saddier, M. Gilles Savary, M. Jean-Marie Sermier, Mme Suzanne Tallard, M. Jean-Pierre Vigier
Excusés. - Mme Chantal Berthelot, M. Patrice Carvalho, Mme Sophie Errante, M. Christian Jacob, M. Franck Marlin, M. Gabriel Serville, M. Patrick Vignal
Assistaient également à la réunion. - M. Pierre Aylagas, Mme Corinne Erhel, M. Richard Ferrand, M. Joël Giraud, Mme Annick Le Loch, Mme Annick Lepetit, M. Lionel Tardy, M. Fabrice Verdier