La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
En votre nom à tous, je tiens à adresser les plus chaleureuses félicitations de la représentation nationale à notre compatriote Patrick Modiano, qui vient de recevoir le prix Nobel de littérature.
Applaudissements sur tous les bancs.
La parole est à M. Patrice Verchère, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
Monsieur le président, monsieur le le secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger, mes chers collègues, notre Assemblée est saisie d’une proposition de loi organique de M. Thierry Mariani, que je salue, visant à faciliter l’exercice du droit de vote de nos compatriotes résidant hors de France. Plus précisément, il s’agit de permettre aux Français établis à l’étranger de voter par voie électronique, c’est-à-dire par internet, aux élections présidentielles, aux élections européennes et lors des référendums nationaux.
Cette possibilité serait une extension de la faculté déjà ouverte à nos compatriotes expatriés de voter électroniquement aux élections législatives et aux élections consulaires. Je rappelle en effet qu’à la suite de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, onze députés ont été élus, pour la première fois en 2012, par les Français de l’étranger. Afin de tenir compte de la situation particulière de ces électeurs, le législateur de l’époque a autorisé le recours au vote électronique.
Plus récemment, le vote électronique a également été retenu dans la loi du 22 juillet 2013, qui a réformé les instances de représentation des Français établis hors de France. Désormais, des conseillers consulaires sont élus directement par les Français résidant à l’étranger, au moyen notamment du vote par internet. La première élection de ce type a eu lieu en mai dernier, en même temps que les élections européennes. Dans les deux cas – élections législatives et élections consulaires –, le vote électronique est une option qui s’ajoute au traditionnel vote à l’urne, dans les bureaux de vote ouverts dans les ambassades et les postes consulaires. C’est donc une possibilité supplémentaire offerte à l’électeur.
Compte tenu de ces précédents, nous disposons aujourd’hui d’un certain recul sur la procédure de vote électronique. Deux principaux enseignements peuvent être tirés. Premièrement, le vote électronique remporte un réel succès auprès des Français de l’étranger.
Certes, le vote électronique n’a apparemment pas entraîné, à lui seul, une augmentation globale de la participation électorale. Mais il est probable que le niveau de participation aux élections législatives et consulaires aurait été plus faible en l’absence de vote électronique, a fortiori s’agissant de deux élections d’un type nouveau.
Par ailleurs, le vote électronique a, en pratique, été largement utilisé par les électeurs. Il a ainsi été majoritairement utilisé aux élections législatives, à proportion de 57 % des votants. S’il ne l’a été qu’à hauteur de 43 % des votants lors des élections consulaires, cela s’explique sans doute par le fait qu’elles avaient lieu en même temps que les élections européennes, pour lesquelles seul le vote à l’urne, dans des bureaux de vote, était possible. Il est d’ailleurs assez singulier que, pour des élections se déroulant le même jour, les unes puissent donner lieu à un vote à distance par internet, tandis que les autres nécessitent un déplacement des électeurs. De fait, très peu se sont déplacés : 89 % des Français de l’étranger se sont abstenus aux élections européennes de mai 2014, à comparer aux 57,6 % des électeurs pour la France entière.
Le constat est donc clair. Seul le vote électronique permet de surmonter les multiples obstacles qui, en fonction des États de résidence de nos compatriotes, peuvent entraver l’exercice de leur droit de vote : éloignement des bureaux de vote, difficulté voire dangerosité des déplacements ou encore coût des transports.
Deuxième enseignement : le vote électronique a démontré sa fiabilité. Il y a certes eu quelques ratés techniques en 2012, mais ceux-ci étaient largement imputables au caractère inédit de l’opération. Surtout, aucune fraude n’a été constatée, aucune atteinte à la sincérité du scrutin n’a été établie. En tant que juge des élections législatives, le Conseil constitutionnel a rejeté tous les griefs qui portaient sur les conditions de vote par voie électronique.
Bien sûr, certains opposants à cette proposition de loi organique nous objecteront qu’avec le vote électronique, certaines fraudes peuvent ne pas être décelées, précisément parce qu’elles sont très efficaces. Mais alors, chers collègues, il faudrait être cohérent et en tirer toutes les conséquences : il ne faudrait pas se contenter de s’opposer à l’extension du vote électronique, mais il faudrait aussi supprimer les possibilités de vote électronique déjà existantes, sauf à mettre insidieusement en doute la légitimité de nos collègues députés des Français de l’étranger.
J’ajoute que le vote électronique n’a rien d’un procédé révolutionnaire. En effet, il est régulièrement utilisé lors d’élections de représentants du personnel, d’élections prud’homales, d’élections dans la fonction publique, dans les chambres de commerce et d’industrie, dans les assemblées générales d’actionnaires ou encore dans des associations.
C’est aussi une procédure électronique que le Parlement a retenue pour permettre à nos concitoyens de soutenir une proposition de loi, notamment dans le cadre du référendum d’initiative partagée qui entrera en vigueur le 1er janvier 2015. Si les dispositifs informatiques ne sont pas fiables pour procéder à des élections politiques, pourquoi dès lors avoir fait le choix, dans la loi organique du 6 décembre 2013 – elle est récente ! –, d’une procédure exclusivement électronique ?
Par ailleurs, quand bien même des irrégularités seraient signalées lors d’un vote électronique, cela n’entacherait pas nécessairement d’illégalité l’ensemble des opérations électorales concernées. Le juge électoral – le Conseil d’État pour les élections européennes, le Conseil constitutionnel pour les élections présidentielles – ferait application de sa jurisprudence traditionnelle, selon laquelle ces irrégularités n’entraînent l’annulation totale de l’élection que si, par leur ampleur, elles ont affecté la sincérité du scrutin. Cela n’est pas très différent des irrégularités qui peuvent aussi exister avec le vote à l’urne dans un bureau de vote.
Au total, mes chers collègues, rien ne me paraît donc sérieusement s’opposer à ce que le vote électronique soit étendu aux élections présidentielles et aux élections européennes, c’est-à-dire à l’ensemble des élections nationales au suffrage universel direct.
Je précise, pour terminer, que c’est la situation spécifique des électeurs établis hors de France qui justifierait cette extension du vote électronique. Une telle mesure n’imposerait en rien que la même possibilité soit offerte à l’ensemble des électeurs résidant en France. Le Conseil constitutionnel y verrait très probablement une banale application de sa jurisprudence classique sur le principe d’égalité, qui permet de traiter différemment des personnes placées dans des situations différentes.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, après vous avoir rappelé, en tant que rapporteur, que la commission des lois a rejeté cette proposition de loi organique, je vous invite, à titre personnel, à ne pas suivre notre commission et vous demande donc d’adopter ce texte qui permettra d’améliorer les conditions de l’expression démocratique de nos compatriotes résidant à l’étranger.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP, UDI et RRDP.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur de la commission des lois Patrice Verchère, monsieur le député Thierry Mariani, à l’origine de cette proposition de loi organique, mesdames et messieurs les députés, la proposition de loi organique qui est soumise aujourd’hui à nos débats traite d’un sujet très important : celui des modalités d’expression démocratique de nos concitoyens établis hors de France. Elle intervient dans un contexte de crise de confiance, de crise démocratique, qui caractérise la vie publique de notre pays depuis de longues années.
La situation électorale des Français de l’étranger comporte plusieurs particularités : dispersion dans le monde, éloignement des lieux de vote dans un même pays, déplacements difficiles dans certains pays ainsi que, souvent, un coût pour l’électeur. Ces contraintes justifient la mise en place de dérogations à notre droit électoral, en particulier un nombre plus élevé de procurations accordées à un mandataire ou encore l’organisation anticipée du vote pour les bureaux de vote situés sur le continent américain.
La principale adaptation consiste dans le maintien du vote par correspondance. Cette modalité a été supprimée en France pour les élections politiques en 1975, il y a bientôt quarante ans ; elle a en revanche été maintenue pour l’élection des instances représentatives des Français de l’étranger – l’Assemblée des Français de l’étranger ou les conseils consulaires installés en 2014.
Il a également été maintenu pour les élections législatives depuis 2012.
Le support de ce vote par correspondance a été progressivement modifié, passant du support papier à la voie électronique. Cette évolution normale correspond aux attentes de nos concitoyens et aux commodités qu’offrent les technologies numériques. Le recours au vote électronique est particulièrement justifié au regard des contraintes spécifiques que rencontrent les Français de l’étranger dans l’exercice de leur droit.
Vous l’avez autorisé à plusieurs reprises pour des scrutins spécifiques. Ainsi, l’ordonnance no 2009-936 du 29 juillet 2009, ratifiée par la loi du 14 avril 2011, relative à l’élection des députés par les Français établis hors de France, a ouvert la possibilité de recourir au vote électronique pour les élections législatives, uniquement dans les circonscriptions de l’étranger. À l’occasion des élections législatives de 2012, les Français établis hors de France ont ainsi pu voter par internet pour la première fois. Cette possibilité a par ailleurs été étendue à l’élection des conseillers consulaires par l’article 22 de la loi no 2013-659 du 22 juillet 2013 relative à la représentation des Français établis hors de France.
La proposition de loi organique de M. le député Thierry Mariani, que nous examinons aujourd’hui, propose d’élargir cette possibilité en permettant aux Français établis hors de France de recourir au vote électronique pour l’élection du Président de la République et l’élection des représentants au Parlement européen.
Le Gouvernement y est défavorable, mais pas pour des raisons de principe : j’ai moi-même, lorsque je siégeais sur ces bancs, beaucoup travaillé sur les questions de crise démocratique, de crise de confiance, de modernisation des modalités d’expression du vote, de modernisation des modalités d’inscription sur les listes électorales. Sur l’ensemble de ces sujets, il y a des modernisations à apporter et cela vaut aussi, bien sûr, pour la question du vote électronique.
J’ai d’ailleurs noté avec beaucoup d’intérêt que, le 17 septembre dernier, le bureau de la commission des lois a décidé la création d’une mission d’information sur les modalités d’inscription sur les listes électorales. Deux de ses membres en sont les rapporteurs : Mme Elisabeth Pochon et M. Jean-Luc Warsmann. Une très grande attention doit être portée à tous ces sujets, car il y a certainement des éléments de modernisation à apporter.
Néanmoins, quand on touche à la question de l’expression du suffrage, quand on touche à la question de l’expression démocratique du vote citoyen, il faut évidemment procéder de manière extrêmement précise. Le Gouvernement considère que, la proposition de loi organique telle qu’elle est soumise aujourd’hui comporte des difficultés techniques, des difficultés juridiques très importantes.
Contrairement à ce qui est affirmé dans l’exposé des motifs – même si ce n’est pas là le coeur des réserves du Gouvernement –, le vote électronique dans les élections qui sont citées n’a pas, à lui seul, favorisé la participation électorale, et aucun des faits constatés ne permet de l’établir. En réalité, le vote électronique a principalement eu pour effet de remplacer d’autres modalités et supports de vote.
Mais ce sont surtout des questions juridiques fondamentales qui sont soulevées par ce texte. C’est un point d’attention particulier pour le Gouvernement et, je n’en doute pas, pour votre assemblée, car ce qui est en cause, c’est un principe constitutionnel : celui de l’égalité devant le suffrage. Il y a en effet une différence entre les élections législatives et l’élection présidentielle.
La principale différence entre l’élection des députés des Français établis hors de France et les deux scrutins pour lesquels l’extension du vote électronique est proposée réside dans la délimitation des circonscriptions électorales. Les élections législatives se déroulent dans des circonscriptions comprenant uniquement des électeurs établis hors de France. En revanche, les élections présidentielle et européennes sont organisées sur la base de circonscriptions comprenant à la fois des électeurs établis en France et hors de France.
Une circonscription unique est en effet prévue pour l’élection présidentielle. Une circonscription comprenant l’Ile-de-France et les Français établis hors de France est prévue pour les élections européennes.
Si le Parlement devait adopter ce texte, le Conseil constitutionnel, saisi d’office puisqu’il s’agit d’une proposition de loi organique, pourrait considérer que ces dispositions sont inconstitutionnelles en raison de la rupture d’égalité qu’elles introduiraient entre les électeurs d’une même circonscription électorale.
Protestations sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Vous ne manqueriez pas d’ailleurs de nous reprocher cette censure du Conseil constitutionnel.
Les électeurs d’une même circonscription électorale seraient en effet soumis à des règles différentes : une partie des électeurs aurait le droit au vote électronique alors que l’autre serait privée de cette possibilité.
Je rappelle enfin que, dans le cadre de leur récente mission parlementaire sur le vote électronique, Alain Anziani, sénateur socialise de la Gironde et Antoine Lefèvre, sénateur UMP de l’Aisne, ont pointé plusieurs difficultés inhérentes au vote par internet et ont clairement écarté les propositions qui sont au coeur du présent texte.
Pour ces raisons juridiques et techniques, le Gouvernement émet un avis défavorable à cette proposition de loi. L’examen de l’article nous permettra de préciser encore notre position si vous le souhaitez.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, 1 642 953 de nos compatriotes sont inscrits au registre mondial des Français établis hors de France au 1er janvier 2014, nombre en augmentation de 2 % par rapport à l’année précédente. En réalité, cette population, difficilement quantifiable, compterait plus de 2,5 millions de Français présents sur tous les continents. En effet certains ne s’inscrivent pas auprès de nos consulats, ne gardant ainsi que peu de lien avec la France, ce qui est regrettable car ils représentent une force politique non négligeable.
Grâce au phénomène de mondialisation et à la circulation aisée des informations, des biens et des services, nos compatriotes établis à l’étranger jouent aujourd’hui dans notre vie politique un rôle plus important et plus actif que dans le passé.
Dans ce monde en mouvement constant, leur dynamisme, leurs talents et leur courage sont autant d’atouts pour la France.
La capacité d’un État à s’ouvrir au monde a toujours été un ressort fondamental de son rayonnement. Dans tous les domaines, économique, culturel, linguistique, associatif, l’expatriation est un facteur irremplaçable de la réussite de la France.
À cette époque incertaine pour l’avenir de notre pays, ces Français du monde ont un rôle essentiel à jouer. Ils sont une force, une richesse pour la France. Grâce à la présence de communautés françaises dans le monde, notre expertise, nos compétences et nos savoir-faire sont reconnus sur la scène internationale, la langue française est parlée et enseignée sur les cinq continents, et nos valeurs sont partagées. Ils reflètent parfaitement l’insertion de la France dans la mondialisation.
C’est parce que j’ai toujours été convaincu de leur importance que, depuis plus de treize ans, au sein du RPR puis de l’UMP, j’ai fait le choix de me consacrer à ces Français qui se sont établis hors de nos frontières. Je connais, tout comme les autres députés des Français de l’étranger ici présents, leurs préoccupations quotidiennes et leurs attentes.
Déjà en 2008, convaincu qu’ils sont non pas une partie mais une partie intégrante de notre nation, j’avais défendu la création des onze sièges de députés des Français de l’étranger afin qu’ils soient représentés à l’Assemblée nationale comme ils l’étaient au Sénat.
Ce projet avait d’ailleurs – j’en souris maintenant – été vigoureusement combattu par le groupe socialiste, qui avait, à l’époque, déposé un amendement visant à supprimer la création de ces députés jugeant cette représentativité « plus que douteuse », pour reprendre les termes qui avaient été alors utilisés. je me permets de vous rappeler que cet amendement avait été présenté par un certain Arnaud Montebourg et défendu par un député qui a fait du chemin depuis puisqu’il s’agissait de François Hollande...
Je me réjouis donc aujourd’hui que l’existence de députés représentant les Français établis hors de France fasse finalement consensus dans notre assemblée, chacun des quatre principaux groupes parlementaires en comptant en leur sein. J’espère d’ailleurs que cette représentativité ne sera pas remise en cause à l’avenir, monsieur le secrétaire d’État.
En effet, ils ne doivent plus être des Français à part mais des Français à part entière. Nous devons, aujourd’hui plus que jamais, leur montrer que la France tient à eux, afin qu’ils tiennent à nous.
La proposition de loi que j’ai déposée va dans ce sens. Je tiens, à cette occasion, à remercier particulièrement notre rapporteur Patrice Verchere, pour le travail remarquable qu’il a accompli pour la présenter.
Elle vise à permettre aux Français de l’étranger, compte tenu de leur situation particulière face à l’accès au vote, de voter par voie électronique à l’élection présidentielle et à l’élection des représentants au Parlement européen.
Force est de constater que les électeurs établis hors de France sont parfois contraints de parcourir plusieurs centaines de kilomètres pour aller voter, ce qui empêche pratiquement certains d’entre eux de prendre part au scrutin. Pour eux, aller voter représente une sérieuse contrainte de temps, sans parler du coût de déplacement, parfois important.
Je pense à certains Français établis en Australie. Ceux qui habitent en Tasmanie, par exemple, doivent se rendre en avion à Melbourne, à plus de 600 kilomètres de leur lieu de résidence, pour aller voter.
Je pense à certains de nos compatriotes établis en Chine ou en Russie. Un Français résidant à Vladivostok doit parcourir 6 000 kilomètres pour aller voter à Moscou.
Je pense également aux difficultés rencontrées par certains de nos compatriotes établis dans des pays dont la superficie est plus réduite, mais où le problème est le même en raison de leur particularisme géologique ou de leur caractère insulaire, comme l’Indonésie, la Thaïlande ou les Philippines. Un Français établi à Cebu et qui doit se rendre à Manille pour voter est soumis à des contraintes de transport similaires.
Aussi, la logique de cette proposition de loi, parfaitement défendue en commission par notre collègue Patrice Verchere, est de répondre à leur situation particulière en facilitant leurs démarches.
Depuis 2003, les Français établis à l’étranger peuvent utiliser le vote par voie électronique pour élire les instances chargées de les représenter. Je me félicite que, pour la première fois dans le cadre d’une élection nationale, les Français de l’étranger aient pu voter par voie électronique lors des législatives de juin 2012.
Cette modalité de vote a connu un grand succès puisque plus de la moitié des électeurs ayant voté ont choisi de l’utiliser de préférence aux trois autres possibilités d’expression du suffrage : le vote à l’urne, le vote par procuration et le vote par correspondance.
En effet le vote par internet a été choisi par 57 % des votants, au premier tour, et par 54 % d’entre eux au second tour, Ce succès s’est confirmé lors des élections législatives partielles de 2013, où 65 % des électeurs ont choisi ce mode de scrutin au premier tour et 70 % au second.
Même si certaines améliorations sont souhaitables – j’espère notamment que les services du ministère auront résolu les dysfonctionnements de Java d’ici les prochaines élections –, le vote par voie électronique a satisfait à toutes les exigences de sécurité, ce dispositif de vote ayant fait l’objet de contrôles rigoureux.
Pourtant cette nouvelle modalité de vote fait encore débat, et ce, alors qu’internet connaît une croissance exceptionnelle. Les entreprises, les administrations publiques, les citoyens dépendent tous, aujourd’hui, d’internet, qui fait partie de notre quotidien.
Internet a naturellement suscité de l’intérêt comme facteur d’accessibilité au processus électoral parce qu’il transforme les modes de prestation de services et crée des espaces participatifs.
Ainsi, force est de constater que ce vecteur de communication a d’ores et déjà une place importante dans le domaine électoral, permettant le recrutement de nouveaux militant, l’organisation des manifestations et des campagnes électorales, l’accès à l’information pour les médias et les citoyens, et il continuera sans doute à avoir un grand impact sur la nature de la démocratie dans le monde.
Aussi, compte tenu de la particularité de la situation des Français établis hors de France, il semble utile d’explorer davantage la capacité d’internet d’améliorer leur processus électoral.
Je tiens cependant à préciser que cette proposition de loi organique ne prétend pas pour autant lancer un débat de principe sur le vote par internet. Cette démarche est strictement destinée à nos compatriotes établis hors du territoire national. Sa logique est de répondre à leur situation particulière afin qu’ils puissent, dans les meilleures conditions, exercer pleinement leur droit de vote.
L’utilisation de la voie électronique lors de l’élection du Président de la République, de celle de nos représentants au Parlement européen et des référendums présenterait des avantages non négligeables : simplicité du vote, facilité d’accès au scrutin, augmentation de la participation et instantanéité de la prise en compte du suffrage.
Il paraît nécessaire de faciliter les droits des Français résidant à l’étranger afin d’encourager leur participation à ces élections. Cette nouvelle façon de voter est susceptible de simplifier le processus électoral et de le rendre plus accessible aux électeurs. Grâce au vote à distance par internet, on peut exercer son droit de vote à partir de n’importe quel ordinateur connecté à internet et offrir aux électeurs la possibilité de voter à toute heure.
Cette modalité de vote pourrait aussi favoriser la participation des électeurs considérés comme les plus difficiles à atteindre, surtout à l’étranger, particulièrement les jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans. Familiers de cette technologie, ils en sont les plus fréquents utilisateurs et sont sans doute ceux qui profiteraient le plus de la mise en place du vote à distance.
Autre avantage non négligeable, la mise en application de cette proposition permettrait de simplifier et de moderniser les modalités de vote. En effet, nombre de nos compatriotes ont parfois du mal à s’y retrouver d’une élection à l’autre. Peu lisible, la diversité des modalités d’expression du suffrage est souvent une source d’incompréhension.
J’ai ainsi été, comme mes collègues, maintes fois interpellé par des électeurs trouvant très étonnant de pouvoir voter par internet pour les élections consulaires mais pas pour les européennes, alors même que les élections se déroulaient le même jour.
Malgré tous ces avantages, qui ne font que confirmer la légitimité de la présente proposition, certains sceptiques brandissent encore le problème de la sécurité, alors même, comme je l’ai déjà souligné et comme notre rapporteur l’a rappelé, qu’aucun problème n’a été à déplorer lors des élections législatives ou consulaires.
Il est d’ailleurs paradoxal, si la question de la sécurité remet en question le principe même de cette modalité de vote, de l’autoriser pour d’autres consultations. Il y a une contradiction évidente entre les mesures prises récemment pour les élections consulaires et les arguments évoqués par ces détracteurs. Voilà un nouvel illogisme de la majorité actuelle.
Si des pays comme l’Estonie, précurseur en la matière, ont réussi à instaurer à l’échelle nationale cette modalité de vote en l’assortissant de toutes les mesures de sécurités nécessaires, nous devrions logiquement arriver à la mettre en place pour les Français de l’étranger.
Je demande donc à l’actuelle majorité de faire preuve du bon sens qui lui avait fait défaut au moment de la création de sièges de députés des Français de l’étranger, alors que cette réforme lui a finalement permis de gagner six postes de députés supplémentaires. Je l’appelle à dépasser les clivages partisans : faciliter l’exercice du droit de vote de nos compatriotes établis hors de France est avant tout une démarche citoyenne qui devrait nous réunir, quelles que soient nos sensibilités politiques.
Vous m’opposez, monsieur le secrétaire d’État, le fait que le vote électronique n’aurait pas permis d’élever le taux de participation aux élections. J’affirme à l’inverse que cette nouvelle modalité de vote a permis de stabiliser un taux de participation en baisse constante jusqu’alors.
Telles sont les raisons pour lesquelles, avec mes collègues de l’opposition, nous défendons cette proposition de loi que j’ai eu l’honneur de déposer.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
En effet, et je remercie le groupe écologiste de soutenir notre proposition.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, cette proposition de loi de notre collègue Thierry Mariani vise à permettre à nos compatriotes expatriés de voter par Internet, non seulement, comme c’est déjà le cas aujourd’hui, aux élections législatives et consulaires, mais aussi lors des élections présidentielle et européennes et des référendums.
J’avais moi-même demandé cette extension, et on m’avait déjà opposé un argument technique et une impossibilité constitutionnelle. Ces obstacles sont tout à fait surmontables, et nous sommes prêts à y travailler avec vous.
Comme notre rapporteur l’a souligné, nombre de nos compatriotes ont trouvé singulier que les modalités de vote aux élections consulaires et aux élections européennes ne soient pas identiques alors que ces élections étaient concomitantes.
Je suis un fervent partisan du vote électronique, pourvu que les conditions dans lesquelles ce dernier s’effectue soient de nature à répondre aux attentes de nos compatriotes.
Je voudrais évoquer ici les conditions dans lesquelles les services de l’État ont mis en oeuvre le système de vote électronique lors des dernières échéances législatives, qu’il s’agisse des élections de juin 2012 ou des deux partielles de juin 2013, ainsi qu’aux élections consulaires.
J’ai à cette époque relayé les observations de nombreux compatriotes, notamment sur le système Java.
Une réponse du 7 mai 2013 à une question de ma collègue Claudine Schmid, indiquait qu’une « mise à jour concernant la version 1.7 de Java avait cependant été effectuée ». Pourtant, on a revu les mêmes dysfonctionnements.
Cela ne doit pourtant pas servir d’argument pour ne pas étendre le vote électronique. Il faut régler ces problèmes : nous en avons le temps, de plus.
Je vais citer des requêtes très précises de nos compatriotes : « Bonjour. Je dispose du meilleur ordinateur Apple et il est à jour. Mais le système de vote pour les élections européennes bloque sur Java. » Voici la réponse que ce monsieur a reçue de vos services : « En réponse à votre demande enregistrée sous la référence X, nous vous informons que si vous avez le Java 55 installé, veuillez le désinstaller. Si Java n ’est pas installé dans votre ordinateur ou désinstallé, ou si vous utilisez un navigateur en version 32 bits (grande majorité) ou Internet Explorer en version 64 bits, créez un compte chez Oracle et installez Java en suivant les instructions indiquées. Sans retour de votre part dans les quarante-huit heures, nous considérerons que notre réponse vous aura donné satisfaction. »
Sourires.
Ça, c’est la cellule d’assistance !
Je pourrais vous citer d’autres exemples : « Je voudrais vous faire part de ma déception de ne pas pouvoir voter par internet pour l’élection des conseillers consulaires. J’habite trop loin de San Francisco et j’avais l’intention de voter par internet. » Ça, c’est la distance, nous en avons parlé les uns et les autres.
« J’ai passé plusieurs heures à essayer de voter. Finalement, on me dit que c’est impossible avec Windows Vista. Ce serait bien de le préciser à l’avance ! Bon, je trouve un autre ordinateur avec Windows 7. J’installe la dernière version de Java, j’enlève les autres versions et on me dit encore que ce n’est pas compatible. Donc, je ne pourrai pas voter. »
Autre mail d’un Français : « Monsieur Lefebvre, comme vous pouvez le constater, je trouve cela un vrai scandale que le ministère des affaires étrangères et du développement international demande aux Français vivant à l’étranger de voter par Internet les 5, 7, 12 et 15 mai en se servant d’une ancienne version 51 de Java, qui a été remplacée par une nouvelle version le 15 avril. Si le ministère tient vraiment à faire voter les électeurs, c’est aux techniciens employés par le ministère à se tenir bien au courant… Qui a l’intention de remplacer une nouvelle version de Java par une ancienne, pour ensuite la remplacer de nouveau par la nouvelle version – tout simplement pour pouvoir voter une seule fois à l’élection des conseillers consulaires ? »
Je terminerai par ces deux courriels que j’ai reçus après le vote aux dernières élections consulaires.
« Nous avons essayé, mon épouse et moi-même, de voter par Internet pour les dernières élections des représentants consulaires, sauf que le site ne le permettait jamais ! Notre fille à Halifax a connu la même impossibilité. La configuration de l’ordinateur effectuée avec succès, la fenêtre de vote restait inaccessible. »
« Cher Monsieur Lefebvre, je me permets d’ajouter que j’avais essayé de contacter l’aide technique directe, en dehors de la page en ligne ’’Foire aux questions’’, rempli le formulaire avec une bonne marge de temps, sans recevoir aucune réponse. »
Je pourrais vous lire encore de nombreux messages. Vos services ont-ils pris la mesure de ces dysfonctionnements, monsieur le secrétaire d’État ?
Quand vous invoquez des questions techniques, excusez-moi, mais après trois exercices de vote, elles doivent pouvoir être réglées et ne peuvent pas servir d’arguments pour ne pas étendre le dispositif.
Il doit être amélioré. Quant à la constitutionnalité, s’il y a une atteinte au principe d’égalité par rapport aux Français de France, qu’est-ce qui empêche d’envisager, dans certains cas particuliers, quand il y a par exemple un trop grand éloignement du bureau de vote, un dispositif similaire en France ?
Quand on ne veut pas, on ne peut pas. Quand on veut, on peut.
Je vous demande, au minimum, que si cette proposition que je soutiens n’était pas adoptée pour les motifs que vous soulevez, vous vous engagiez devant la représentation nationale, devant le rapporteur ici présent, devant mes collègues Thierry Mariani, Claudine Schmid, Meyer Habib, Sergio Coronado et tous les autres, à travailler avec nous pour que le vote électronique devienne possible.
Qu’est-ce qui nous en empêche ? Qu’est-ce qui vous en empêche ?
La balle est dans votre camp, monsieur le secrétaire d’État.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a élargi la représentation parlementaire des Français établis hors de France, avec la création de onze circonscriptions législatives. Nous siégeons en effet en représentation de nos compatriotes établis à l’étranger depuis le 20 juin 2012.
Auparavant, et depuis 1946, ces derniers étaient représentés uniquement au Sénat. C’est l’article 24 de la Constitution de 1958 qui est la base constitutionnelle de la représentation parlementaire de nos compatriotes établis à l’étranger, initiée par la IVe République et qui se prolonge par la possibilité offerte aux Français de l’étranger de participer, selon des formes particulière, à d’autres scrutins en France, notamment l’élection présidentielle.
Les Français de l’étranger constituent une fraction significative de la communauté nationale : Thierry Mariani l’a rappelé, ce sont environ 1,6 million de citoyens inscrits aux registres consulaires et, en réalité, 2,2 millions de ressortissants, dont une majorité de binationaux, soit à peu près autant que, par exemple, la population des Bouches-du-Rhône ou que celle additionnée des cinq départements d’outre-mer.
Le nombre de nos compatriotes s’établissant à l’étranger ne cesse de croître et ce depuis plus d’une dizaine d’année, provoquant dans un pays où l’émigration n’a jamais été nombreuse, à la différence de nombre de nos voisins européens, des débats polémiques, des joutes idéologiques qui tendent à ignorer la chance que des communautés françaises à l’étranger représentent pour la France, pour sa culture, sa langue, son enseignement mais aussi pour son économie.
Cette communauté française à l’étranger, majoritairement binationale je l’ai dit, représente un atout : elle est une passerelle, une ouverture au monde. Et elle souhaite, dans sa grande majorité, garder un lien fort avec la France, facilitée en grande partie aujourd’hui par l’existence des outils numériques. L’exercice de la citoyenneté, donc du droit de vote est essentielle. C’est même une exigence démocratique.
Il est paradoxal que l’ancienne majorité, lors de la réforme constitutionnelle de 2008, n’ait pas élargi à toutes les élections le vote électronique, alors qu’elle venait de l’autoriser aux élections législatives. Il eut été si simple que les modalités de vote de nos compatriotes établis à l’étranger soient homogénéisées pour l’ensemble des élections lors de cette réforme constitutionnelle.
Permettez-moi de vous rappeler, pour mémoire, ces modalités. Pour la présidentielle, les européennes et le référendum : vote à l’urne et procuration. Pour les législatives : vote à l’urne, procuration, vote électronique et vote par correspondance sous pli fermé. Enfin, pour les conseillers consulaires – à ce sujet, vous avez fait, monsieur le secrétaire d’État, une petite erreur – : vote à l’urne, procuration et vote électronique.
Franchement, chers collègues, ne pensez-vous pas qu’il faudrait rendre tout ceci cohérent, suivant ainsi une recommandation de la Cour des comptes qui avait souligné en 2013 que « ces différentes modalités de votes, peu lisibles, sont source d’incompréhension pour les Français de l’étranger » et qu’une « simplification visant à uniformiser les modalités de vote constituerait à cet égard un progrès raisonnable » ?
Il est tout aussi paradoxal que l’actuelle majorité, en tout cas le groupe socialiste, qui a conduit la réforme de la représentation des Français de l’étranger avec la mise en place des conseils consulaires et la réforme de l’Assemblée des Français de l’étranger, qui est le corps électoral des douze sénateurs des Français de l’étranger, n’ait pas soulevé les objections au vote électronique qu’elle semble découvrir aujourd’hui.
Nous avons en effet, avec le texte présenté à l’époque par Mme Conway-Mouret, supprimé le vote par correspondance qui existait pour l’élection des élus à l’Assemblée des Français de l’étranger et mis en place le vote électronique pour les conseillers consulaires et les délégués, sans que les objections que nous entendrons tout à l’heure chez M. Popelin aient été soulevées.
Il n’y a pas de débat manichéen pour ou contre le vote électronique, je voudrais le dire clairement.
Les oppositions au vote électronique sont sérieuses et légitimes. Je les partage en partie, je l’ai dit en commission. Il n’y a d’ailleurs pas de parti ou de groupe politique dans notre assemblée pour en proposer la généralisation. Et cette proposition n’en prévoit pas la généralisation sur le territoire national non plus. Nul ici ne conteste les considérables avantages du vote à l’urne : secret et indépendance du vote, transparence des opérations, garanties de contrôle.
Les critiques contre le vote électronique lors des élections législatives n’ont pas, paradoxalement, conduit le gouvernement à améliorer le système en vigueur. Elles n’ont pas conduit le législateur, lors de la dernière réforme, à s’interroger pour améliorer le dispositif.
Vous avez prétendu, monsieur le secrétaire d’État, que le vote électronique ne favorisait pas la participation, vous référant aux dernières législatives. Mais vous omettez de rappeler les mésaventures que nos compatriotes ont vécu avec le dispositif Pnyx, qui repose sur une application Java et qui était inaccessible à tous les internautes ayant téléchargé la dernière mise à jour du langage de programmation Java 1.7. Il fallait en effet désinstaller Java 1.7 pour installer la bonne version, Java 1.6, et pouvoir voter. C’est ce qui explique en grande partie que la mise en place du vote électronique pour les législatives de 2012 n’ait pas amélioré substantiellement le taux de participation, puisqu’il fallait un minimum de compétence technique pour voter.
La perception de l’importance de l’élection joue, bien sûr, mais pas plus ni pas moins que sur le territoire national, où la participation à l’élection présidentielle est traditionnellement plus élevée.
Voter depuis son ordinateur personnel est en effet un autre risque : l’ordinateur personnel offre en effet peu de garanties de sécurité et est facilement attaquable. Il est donc tout à fait possible que certains se voient dépossédés de leur vote ou que le secret du vote soit violé.
L’aspect technique du dispositif à l’oeuvre pour les opérations de vote des Français de l’étranger pose également un problème : en effet, le dispositif a été conçu par des prestataires privés. Il est donc inutile de demander que des techniciens du ministère des affaires étrangères interviennent : ils n’ont pas eu la main.
Certains logiciels ont été développés par des sous-traitants privés en-dehors de tout contrôle citoyen direct. La mise en place et l’administration du système de vote électronique sont en effet réalisées par une entreprise privée basée à Barcelone, qui n’a pas de bureau en France. Les serveurs web qui ont accueilli les électeurs sont eux-mêmes en Espagne. C’est donc la première fois qu’une élection est ainsi partiellement sous-traitée et même délocalisée. C’est un peu ennuyeux, d’autant qu’en 2010, la CNIL estimait « hautement souhaitable que les serveurs et les autres moyens informatiques centraux du système de vote électronique soient localisés sur le territoire national afin de permettre un contrôle effectif des opérations par les membres du bureau de vote ».
Et ce n’est pas tout, puisque le contrôle du résultat est aussi problématique. Sans tomber dans la théorie du complot, il faut rappeler que, dans un scrutin classique, des assesseurs, des représentants des partis politiques et même de simples citoyens vérifient que le vote se déroule selon les règles de la démocratie et qu’il n’y a aucune fraude. Or, le bon déroulement du vote électronique des citoyens français résidant à l’étranger n’offre pas les mêmes garanties de contrôle, contrairement à ce que j’ai pu entendre. En effet, un arrêté publié le 8 mai 2012 au Journal officiel prévoit que l’expertise indépendante, « destinée à vérifier le respect du secret du vote, de la sincérité du scrutin et de l’accessibilité du suffrage », sera conduite par « un informaticien spécialisé dans la sécurité » et « n’ayant pas d’intérêt financier dans la société qui a créé le dispositif de vote ». Une seule et unique personne pour contrôler la régularité de l’ensemble du scrutin !
Nombre de réclamations avaient été enregistrées par le ministère et les postes qui avaient en charge du déroulement des opérations de vote en 2012, et le système est resté le même pour les élections consulaires, sans que le ministère ni l’administration des affaires étrangères ne s’en émeuvent.
L’organisation d’un scrutin en ligne pour les élections législatives présente donc d’évidentes faiblesses, nous l’avons dit, faiblesses auxquelles il convient d’ajouter la fracture numérique. Le niveau et la qualité de connexion est très inégal et varie en fonction des territoires.
J’étais présent, mardi dernier, quand vous vous êtes adressé à l’Assemblée des Français de l’étranger, et vous avez annoncé, monsieur le secrétaire d’État, qu’un nouvel appel d’offres pour le vote électronique allait être lancé. J’espère que les remarques que je viens de formuler, qui ont été faites par d’autres ici même, seront prises en compte dans le cahier des charges, pour garantir le bon déroulement des scrutins à venir.
M. Popelin, au nom du groupe socialiste, a soulevé de nouvelles objections lors du passage du texte en commission. L’élection présidentielle a lieu dans le cadre d’une circonscription nationale unique, nous a-t-il précisé. Il est probable que l’ouverture de modalités de vote différentes soit considérée comme une rupture d’égalité devant le vote, une partie des Français ayant la faculté de voter par voie électronique quand la grande majorité du corps électoral ne l’aurait pas. Mais ne trouvez-vous pas, chers collègues, qu’il y a déjà rupture d’égalité lorsque, dans un pays comme le Brésil, on ne compte qu’une dizaine de bureaux de vote et qu’il faut à certains de nos compatriotes faire des milliers de kilomètres et débourser plusieurs centaines d’euros pour exercer leur droit de vote ?
Le dispositif pose également un problème de contrôle, je l’ai dit, en particulier lors des élections européennes où existe un risque de double vote. C’était l’autre argument soulevé par notre collègue Popelin. Nous sommes d’accord, sauf qu’il convient de préciser que ce risque n’est pas né avec le vote électronique, qu’il existe même avec le vote à l’urne.
Enfin, le président Urvoas a soulevé à juste titre la question de la recevabilité du texte au titre de l’article 40 de la Constitution. Le coût de l’extension de cette procédure – mise en oeuvre de logiciels, envoi d’identifiants, etc. – n’est pas neutre. Il est certes gagé à l’article 2, comme on a l’habitude de le faire lorsqu’on essaie de passer sous les fourches caudines de l’article 40. Nous débattons néanmoins de cette proposition aujourd’hui sans que la commission des finances se soit opposée au passage en séance du texte.
Je l’ai dit en commission : nous, les écologistes, sommes opposés à la généralisation du vote électronique ; nous préférerions, comme vous tous d’ailleurs, que tous nos concitoyens puissent voter a l’urne, dans un bureau de vote non loin de chez eux. Mais cela n’est pas la réalité chez nos compatriotes établis à l’étranger. Nous sommes alors devant un choix difficile, un dilemme : faire valoir toutes les objections soulevées contre le vote électronique, qui est déjà une modalité de vote chez nos compatriotes établis à l’étranger, pour nous opposer à une exigence d’égalité dans l’exercice de nos droits et de notre citoyenneté. Devant cette situation, nous avons fait le choix de permettre à nos concitoyens établis à l’étranger d’exercer leur droit de vote. Au nom de la démocratie, au nom de la citoyenneté, au nom de la République.
Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et UDI.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de remercier M. le président pour avoir salué le succès de Patrick Modiano, nouveau prix Nobel de littérature, car c’est également un succès pour la France.
En tant que président de l’association Culture Papier, j’ai également salué ce matin le quinzième Français – dont on dit qu’il est le nouveau Proust – à avoir obtenu ce prix.
Merci, monsieur le président, pour les mots que vous avez prononcés devant la représentation nationale.
Dans le cadre de sa niche parlementaire, l’Union pour un mouvement populaire nous présente aujourd’hui une proposition de loi visant à instaurer le vote par voie électronique des Français de l’étranger à l’élection présidentielle et à l’élection des représentants au Parlement européen.
La possibilité de participer au suffrage est garantie par notre législation. En ce sens, le quatrième alinéa de l’article 3 de la Constitution prévoit que « sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques ».
Ainsi, l’article 1er de la présente proposition de loi prévoit de reconnaître aux Français résidant à l’étranger la possibilité de participer à l’élection présidentielle et à l’élection des représentants au Parlement européen par voie électronique, ce mécanisme s’entendant d’un vote par internet à partir de tout terminal informatique via une connexion sécurisée à internet et non à partir d’un matériel informatique spécifiquement dédié au vote.
En effet, le mécanisme de vote électronique permet de pallier les différences existantes entre les circonscriptions des Français établis à l’étranger, celles-ci étant très disparates tant en raison du nombre d’électeurs qu’en raison de l’étendue territoriale des circonscriptions concernées, comme chacun l’a déjà rappelé.
Aussi, à partir du 1er mars 2012, le vote par voie électronique a été mis en place pour les élections législatives. Or, force est de constater que ce mécanisme a connu un franc succès, le vote par internet ayant été choisi lors du premier tour par 57% des électeurs et par 54% pour le second tour, cela a été dit.
Alors, j’entends autant les arguments pour que les argumente contre cette modalité de vote mais, au-delà, je pense que nous ne pouvons pas faire l’économie d’engager un réel débat. Je rejoins d’ailleurs la proposition qui a été faite tout à l’heure par M. Coronado concernant la cohérence, mais nous souhaiterions aller plus loin.
Il faut que nous ayons un vrai débat sur la citoyenneté et la démocratie dans notre pays. Oui, nous devons tout mettre en oeuvre – c’est ce que souhaite le groupe RRDP à partir du texte dont nous discutons – pour favoriser la participation aux élections.
Et je vous le dis sans ambiguïté, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous ne pouvons pas sacrifier la propagande électorale sur l’autel de la dématérialisation.
Comment peut-on vouloir lutter contre l’abstention et, dans le même temps, supprimer la propagande électorale papier par voie postale comme cela est prévu à l’article 46 du PLF 2015 ?
Et pour quelle économie ? Aucun chiffrage n’a été réalisé. Je sais bien que ce n’est pas le sujet mais, si nous parlons de citoyenneté et de démocratie, alors, allons jusqu’au bout !
Aucun chiffrage, donc, n’est proposé même si l’année dernière l’exécutif espérait mettre de côté 27,6 millions d’euros en appliquant cette mesure. Je vous rappelle, à titre de comparaison, que la réserve parlementaire s’élève à 90 millions d’euros rien que pour notre Assemblée et à 60 millions d’euros pour le Sénat. La participation de nos électeurs, qu’ils soient ici ou à l’étranger, n’a pas de prix car il y va de la survie de la démocratie. Je l’ai répété à plusieurs reprises ici, en séance publique, et en commission, notamment, au mois de novembre 2013 lors de la niche UDI pour la reconnaissance du vote blanc.
Nous ne pouvons pas laisser notre pays s’engouffrer dans une brèche qui fait le lit de l’obscurantisme, qui renforce le repli sur soi, la déresponsabilisation et la critique à l’endroit des élus. Nous devons être à l’offensive pour plus de démocratie et de citoyenneté.
Selon nous, cette proposition va dans le bon sens mais il faut aussi que l’on rende le vote obligatoire. Contrairement à ce que l’on dit, je ne pense pas que cela se traduirait automatiquement par un report massif des électeurs vers les extrêmes de l’échiquier politique, bien au contraire.
En revanche, je suis certain que cela donnerait une image précise du sentiment politique général et contraindrait davantage les partis politiques.
À l’ère de l’informatique et de l’internet, il me semble également incontournable d’automatiser l’inscription sur les listes électorales et de simplifier le vote par procuration.
Le droit de vote, c’est l’arme la plus sûre de la démocratie. Cessons d’en priver celles et ceux qui vivent parmi nous et que certains stigmatisent ! Le droit de vote pour toute personne vivant en France de façon légale depuis dix ans est devenu une nécessité. Nous avons le devoir de dire à celles et ceux qui partagent notre vie qu’ils sont des nôtres.
Un droit, c’est aussi un devoir. En s’érodant, le droit de vote devient une arme qui se retourne contre la démocratie et contre la liberté.
S’il faut une profonde réforme de la pratique politique, nous devons également tout faire pour que les citoyens s’intéressent à la vie sociale dans laquelle ils s’inscrivent afin qu’ils en redeviennent les acteurs. C’est là le préalable nécessaire pour rompre avec les valeurs individualistes et pour rétablir le vivre ensemble.
S’il est légitime de se demander ce que la société fait pour soi, il est tout aussi légitime de se poser la question de notre contribution citoyenne, comme le disait John Fitzgerald Kennedy.
Nous, les élus, nous devons nous appuyer sur le peuple et ne pas avoir peur de lui.
Je suis de ceux qui pensent que la démocratie représentative a montré ses limites et qu’il est impératif de promouvoir la démocratie participative.
Le civisme, la citoyenneté, ne sont pas que de simples mots : ils devraient être le ciment de notre unité nationale. Comment la France, pays des droits de l’homme et du citoyen, peut-elle se satisfaire de ce rejet de la démocratie qui est en route ?
Pour toutes ces raisons, vous l’aurez compris, le groupe RRDP votera cette proposition…
…au-delà des questions constitutionnelles qui ont été posées et que vous avez exprimées, monsieur le secrétaire d’État, car nous pensons que des solutions peuvent être trouvées.
Nous gardons toutefois à l’esprit que ce n’est là que le début d’un long parcours visant à revaloriser la citoyenneté.
Je vous invite à méditer cette morale de Jean de La Fontaine selon qui : « L’adversaire d’une vraie liberté est un désir excessif de sécurité ».
Je vous remercie.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et écologiste et sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la modernisation de nos pratiques démocratiques doit être au coeur des préoccupations et des aspirations de toutes les forces républicaines.
Elle doit l’être d’autant plus, cela a été dit, à l’heure où la défiance des Français à l’égard de leurs représentants et de leurs institutions continue son inexorable progression et s’exprime de manière brutale au travers, notamment, de la proportion toujours croissante d’absence de participation à la plupart des élections, qu’elles soient de dimension locale ou nationale.
Les dernières échéances nous en ont encore livré une triste démonstration dont personne ne peut se satisfaire.
Comme la très grande majorité des membres de cette Assemblée, je suis donc particulièrement sensible à ce que tous les moyens de nature à rétablir la confiance et à ramener nos concitoyens vers le chemin des urnes soient imaginés et discutés.
Cette législature a déjà été porteuse d’avancées dans ce domaine. Pour rester sur des éléments consensuels, je n’évoquerai ici que la prise en compte du vote blanc dans la présentation des résultats des élections, rendue possible par l’adoption d’une proposition de loi émanant du groupe UDI, soutenue par le Gouvernement et la majorité.
En dépit de quelques éléments de polémique – aujourd’hui dépassés – sur le calendrier de sa mise en oeuvre, ce mode de comptabilisation est désormais effectif et définitif depuis le dernier scrutin européen.
Aujourd’hui, la proposition de loi « ramassée » qui nous occupe semble vouloir s’inscrire dans cette perspective de facilitation de l’exercice du suffrage.
Je suis en effet convaincu que son auteur et ses soutiens sont animés par la seule ambition de vouloir, sincèrement, améliorer et faciliter l’organisation des conditions de vote de nos concitoyens qui résident à l’étranger.
Ces compatriotes, cela a été dit, se trouvent en effet dans une situation particulière : ils ne disposent pas toujours d’un bureau de vote à quelques rues de leur domicile ou au centre de leur village.
Nous le savons tous, pour certains expatriés, voter à l’urne, comme on dit, peut impliquer de devoir faire plusieurs centaines de kilomètres le jour du scrutin.
Ainsi, lorsque furent créées les onze circonscriptions servant de cadre à l’élection des députés représentant les Français établis hors de France, la faculté du vote électronique a été ouverte pour ces élections législatives, tout à la fois nouvelles et spécifiques.
C’est sans doute aussi pourquoi il nous est proposé aujourd’hui d’élargir la faculté de ce recours au vote électronique aux deux autres scrutins nationaux que sont l’élection présidentielle et les élections européennes.
Il y a là matière à débat. Et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle – avec la sagesse que nous lui connaissons – le président de la commission des lois a fait en sorte que ce texte puisse être examiné la semaine dernière en commission, selon les étapes classiques du processus législatif, en dépit des incertitudes réelles qui pesaient sur sa recevabilité financière au titre de l’article 40.
Même si celles-ci n’ont pas été véritablement levées, nous sommes en situation de poursuivre la discussion aujourd’hui en séance publique.
Si l’objectif de cette proposition de loi du groupe UMP est tout à fait respectable, les seules bonnes intentions ne font pas nécessairement les meilleures lois.
À première vue, l’élargissement de la faculté d’user du vote électronique pour les Français de l’étranger lors de l’élection présidentielle et de la désignation des membres du Parlement européen peut sembler une disposition de bon sens et simple d’application.
Elle soulève néanmoins, en y regardant de plus près, des difficultés juridiques et techniques qui ne peuvent être ignorées. Et de mon point de vue, monsieur le rapporteur, lors de nos travaux en commission de mercredi dernier, vous avez éludé un peu rapidement ces points de blocage.
Ceux-ci ne sont pourtant ni mineurs, ni anecdotiques. Ils le sont d’ailleurs tellement peu qu’ils n’ont pas manqué d’être soulevés de toute part lors du débat, y compris par des membres de votre famille politique.
Le premier d’entre eux est constitutionnel parce que l’élection présidentielle, à la différence des élections législatives, se déroule dans le cadre d’une circonscription nationale unique : le pays tout entier.
Comment, dès lors, admettre que nos concitoyens, appelés en même temps à choisir les mêmes candidats, ne disposent pas tous des mêmes possibilités d’exprimer leur choix ?
Si une petite partie des Français a le droit de voter d’un clic sur son ordinateur pour choisir le Président de la République quand l’immense majorité des autres est tenue de se déplacer personnellement dans un bureau de vote ou d’y faire s’y rendre son mandataire, il y a là matière à rompre le principe d’égalité devant le vote.
Et point n’est besoin d’attendre le verdict du Conseil constitutionnel sur le sujet. Notre rôle de législateur, mes chers collègues, n’est pas de nous en remettre systématiquement aux décisions du juge constitutionnel lorsqu’une question de cet ordre se pose.
Si nous avons la conviction qu’une disposition n’est pas conforme aux principes de notre Constitution, nous ne devons pas la voter. Dans le cas qui nous occupe, j’ai cette conviction.
La seconde difficulté majeure réside dans le doute sur l’inviolabilité de la sécurité des votes émis par voie électronique.
Chacun connaît le pouvoir de nuisance des cyberattaques. Dans l’état actuel de notre droit et sans faire injure à nos collègues représentant les Français établis hors de France, je ne suis pas certain que leur élection mobilise l’énergie d’éventuels terroristes informatiques.
Et, au pire, si un tel événement advenait, l’annulation du scrutin ainsi manipulé s’ajouterait à la liste des élections législatives partielles qui ne manquent jamais de suivre l’examen des contentieux électoraux habituels.
S’agissant en revanche de l’élection du Président de la République française, chef des armées d’un État membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies et disposant de la capacité d’engager le feu nucléaire, le risque de voir germer l’idée dans certains esprits malveillants de tenter de pirater le vote doit être de mon point de vue considéré comme nettement plus avéré.
Et gardons à l’esprit, mes chers collègues, que le corps électoral concerné, vous l’avez dit dès le début de votre intervention, cher collègue Mariani, dépasse le million de citoyens !
Peut-être, d’ici quelques années, les progrès des techniques informatiques seront tels que cette objection semblera obsolète aux historiens qui pourraient s’intéresser à nos modestes débats d’aujourd’hui. À ce jour, toutefois, il me semble raisonnable de ne pas exposer notre pays à ce risque.
Et puisqu’il a été fait référence à l’exemple de l’Estonie, qui fut le premier pays à réaliser le vote électronique dans un scrutin national, je signale qu’une étude de l’université du Michigan ayant fait l’objet d’une dépêche de l’AFP le 8 octobre – avant-hier, donc – a considéré que des pirates auraient pu attaquer les serveurs électoraux pour modifier sans difficulté les résultats.
D’autres difficultés techniques plaident en faveur de la prudence. Pour les élections de nos représentants au Parlement européen, par exemple, les Français établis dans un pays membre de l’Union européenne ont la faculté, comme tous les autres citoyens européens, de s’inscrire sur les listes électorales de leur pays de résidence. Il a été clairement indiqué lors des auditions que les possibilités actuelles de procéder à des recoupements, pour se prémunir d’éventuels doubles votes, n’étaient pas absolues. Voilà pourquoi je défendrai tout à l’heure, au nom du groupe SRC, un amendement de suppression de l’article 1er de cette proposition de loi organique.
J’ajoute que la question de l’élargissement du vote électronique ne me semble pas pouvoir être traitée ainsi à la dérobée, par un texte qui cantonnerait son extension et son accès aux seuls Français de l’étranger. D’autres seraient fondés à solliciter la même faculté, arguant de motifs tout aussi légitimes.
Nous en avons eu un exemple avec l’intervention en commission de notre collègue Daniel Gibbes, qui a évoqué la situation des départements et territoires ultramarins.
Je le répète : la question du vote électronique n’a pas vocation à être balayée d’un revers de main – nous sommes tous d’accord sur ce point. Toutefois, elle pose encore de nombreuses questions : au-delà de celle de son absolue fiabilité, au-delà de la disparition, si elle venait à être généralisée, d’un rituel républicain qui n’est pas dénué de sens, en ces temps où il n’est pas forcément judicieux de supprimer tous les repères, la question du secret du vote et celle de la garantie d’absence de pression sur l’électeur ne peuvent être négligées. Bien qu’il ait l’intention de voter cette proposition de loi, Sergio Coronado a énuméré d’autres difficultés, comme la fracture numérique. Et Frédéric Lefebvre, qui plaide lui aussi pour cette proposition de loi, nous a proposé un florilège digne de Courteline de toutes les difficultés techniques qui se posent encore.
Exclamations sur quelques bancs du groupe UMP.
Enfin, les bénéfices attendus de la mise en oeuvre de l’extension du vote électronique en termes de participation citoyenne aux élections demeurent pour le moins incertains et aléatoires. Pour m’en tenir au cas des Français de l’étranger, je rappelle que lors de la dernière élection présidentielle, le taux de participation de cet électorat avoisinait 40 % avec des modalités de vote classiques et qu’il ne fut que de 20 % environ lors des élections législatives qui suivirent, pour lesquelles le vote électronique était possible. L’appréciation que nos concitoyens se font, à tort ou à raison, de l’enjeu d’un scrutin, semble donc davantage déterminer leur participation.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le vote est un acte civique, un geste citoyen par lequel chaque Français participe à la vie démocratique de notre pays. Le fait de se rendre physiquement aux urnes pour donner sa voix revêt évidemment un caractère symbolique très fort – nous sommes tous d’accord là-dessus. Il est la concrétisation d’un moment important de notre démocratie.
Le vote aux urnes, dit traditionnel, doit donc évidemment demeurer la règle sur le territoire national, et la proposition de loi de mon collègue Thierry Mariani ne pose pas la question d’une généralisation du vote électronique pour l’ensemble des élections. En revanche, en raison du caractère spécifique du vote à l’étranger, l’instauration du vote électronique à l’élection présidentielle et à l’élection des représentants au Parlement européen semble se justifier à plusieurs titres.
Tout d’abord, nous ne pouvons que déplorer le fort taux d’abstention aux élections à l’étranger. Si l’on constate aussi ce phénomène sur le territoire national, il est toutefois beaucoup plus important à l’étranger. Rappelons que le taux de participation y avoisine traditionnellement les 20 % d’électeurs inscrits ! Le vote par internet connaît indéniablement un grand succès auprès des électeurs vivant à l’étranger : lors des dernières élections législatives, 57 % des votants au premier tour, puis 54 % au second tour, ont choisi ce mode de vote. Cette préférence a été encore plus flagrante lors des élections législatives partielles, puisque ce sont alors 65 à 70 % de nos compatriotes qui ont voté par internet. À ce rythme, j’imagine qu’aux prochaines élections législatives, nous gagnerons encore 10 ou 15 %.
Un rapport d’information du Sénat a certes souligné qu’une décennie de mise en oeuvre du vote électronique pour certaines élections n’a pas suffi à augmenter le taux de participation. Ce constat doit cependant être nuancé, puisqu’on ne peut évidemment pas comparer la participation à l’élection présidentielle avec la participation aux élections législatives, pour lesquelles le vote électronique est déjà possible. L’élection présidentielle, sur le territoire national comme ailleurs, demeure celle qui mobilise le plus d’électeurs ; c’est l’élection majeure chez nous. En outre, comme l’a indiqué le rapporteur, le vote électronique aux élections législatives n’a été expérimenté qu’une seule fois. Attendons d’en voir les effets sur le long terme.
Nous aurions tort de ne pas encourager, par cette réforme qui n’est évidemment ni de gauche, ni de droite, les électeurs de l’étranger à aller voter, en particulier lors des élections européennes, qui recueillent le plus fort taux d’abstention. Ce qui serait inacceptable, ce serait de ne pas donner à ceux qui souhaitent le faire, la possibilité de voter. Certains de nos concitoyens sont contraints – je le constate à chaque élection – de parcourir plusieurs centaines de kilomètres pour se rendre dans un bureau de vote, ce qui nécessite parfois un déplacement par avion ou par bateau. Dans de telles situations, le coût du trajet constitue encore un frein supplémentaire à l’exercice du droit de vote. Ce trajet peut même s’avérer dangereux dans certaines régions du monde.
Je vais être concret et prendre des exemples dans ma propre circonscription, la huitième. En Turquie, les Français résidant à Antalya se trouvent à 450 kilomètres du bureau de vote le plus proche, celui d’Izmir. Cette distance rend quasi impossible l’accomplissement de l’acte citoyen le plus essentiel, même si d’aucuns le font. En Israël, pays qui compte 70 000 inscrits au consulat, et 150 000 citoyens français, on ne compte que sept bureaux de vote, ce qui oblige nos compatriotes à faire plusieurs heures de trajet pour aller voter. C’est extraordinaire ! Ne pas voter cette loi, c’est interdire à des dizaines, voire des centaines, de milliers de personnes d’aller voter ! La distance et le nombre de bureaux de vote sont de puissants facteurs d’inégalité d’accès au vote.
Permettre le vote électronique est donc souhaitable d’un point de vue matériel, mais également dans un souci d’harmonisation. Étendre la faculté de vote électronique à l’élection présidentielle, aux référendums et aux élections européennes, constituerait un premier pas important vers une harmonisation des modalités de vote offertes aux Français établis à l’étranger. La portée symbolique de ce texte serait encore plus forte s’il était adopté conjointement par la droite et la gauche. C’est cela qu’attendent nos concitoyens, c’est cela qu’attendent nos électeurs.
Le rapporteur l’a très justement souligné : de nombreux électeurs ont trouvé singulier que, lors des élections consulaires et européennes qui se sont déroulées simultanément en mars 2014, les modalités de vote n’aient pas été identiques. C’est invraisemblable, mais c’est ainsi. Il serait donc logique de permettre le vote électronique pour l’ensemble des élections à l’étranger.
L’égalité des électeurs, sur le territoire national comme à l’étranger, a été invoquée par certains de nos collègues pour rejeter cette proposition de loi, mais en n’instaurant pas le vote électronique pour toutes les élections se déroulant à l’étranger, nous allons à rencontre du principe de l’égal accès des électeurs au vote. Bien évidemment, ce texte doit s’accompagner d’une réflexion sur les moyens de mieux encadrer le vote par internet, en assurant notamment l’information, la formation et l’assistance des électeurs, ou encore en renforçant les pouvoirs des membres du bureau de vote électronique.
Vous l’aurez compris, le groupe UDI, et le député des Français de l’étranger que je suis, soutient très fortement cette proposition de loi.
J’invite nos collègues de la majorité à changer d’avis, car il n’est pas trop tard. Si nous n’adoptons pas ce texte, ce sont nos électeurs, vos électeurs, qui nous le reprocheront aux prochaines élections.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je souhaite, à l’occasion de la discussion en séance publique de la proposition de loi organique de notre collègue Thierry Mariani, exprimer sur le fond mes réflexions sur le développement de l’utilisation du vote électronique.
Je veux bien sûr évoquer en premier lieu ceux qui sont établis à l’étranger, et qui sont parfois contraints de parcourir plusieurs centaines de kilomètres pour se rendre jusqu’à un bureau de vote. De tels déplacements peuvent demander du temps, être difficiles ou impossibles, et parfois même dangereux, dans certaines zones. C’est pour ces raisons que le vote électronique leur est d’ores et déjà accessible pour certaines élections, et il paraîtrait logique d’étendre cette possibilité pour toutes les élections.
Les chiffres de la participation aux élections législatives de 2012 sont intéressants, puisqu’on constate que 57 % des électeurs ont pris part au vote de cette manière.
La présente proposition de loi, qui vise à généraliser ces modalités de vote à toutes les élections, pourrait selon moi contribuer à faciliter l’accès de tous les Français, où qu’ils soient, aux différents scrutins et avoir de bons effets sur le taux de participation.
Mais quelques questions de fond et de forme demeurent. Outre les soucis de sécurisation de ces votes en ligne se pose tout d’abord le principe constitutionnel de l’égal accès des citoyens français à ce moyen de vote. Faut-il généraliser le vote électronique à l’ensemble des Français ? C’est bien cela, la question de fond que les membres de la commission des lois se sont posée. La réponse n’est pas évidente pour tous. Nombreux sont ceux qui restent attachés à un vote physique aux urnes, dit traditionnel, qui matérialise et encourage au devoir citoyen. Il contribue, comme le disait très justement l’un de mes collègues en commission des lois, à « vivifier » notre démocratie.
D’un point de vue plus pragmatique, le vote physique a d’abord le mérite de rassurer, puisqu’il permet de vérifier l’identité de l’électeur, de garantir qu’aucune pression ne s’exerce sur celui-ci et de réduire les risques de fraude. De tels risques, on l’a dit tout à l’heure, pourraient avoir des conséquences sans précédent pour certaines élections, notamment pour l’élection présidentielle.
Pour ma part, même si je considère que le principe du vote aux urnes, dit traditionnel doit être préservé, je pense que l’on ne doit pas écarter le vote électronique, d’abord parce qu’il est un moyen novateur de lutter contre l’abstention. Il permettra notamment d’inciter les jeunes générations à participer. C’est aussi un moyen d’aider ceux qui sont très éloignés de leur bureau de vote, les Français de l’étranger, au premier chef, mais cette disposition intéresse également les Ultramarins, qui y voient l’opportunité d’améliorer les niveaux de participation aux élections nationales et européennes, souvent très faibles. On constate en outre-mer une forme de désintérêt pour ces élections, du simple fait de l’éloignement.
Dans le même sens, le vote électronique serait un moyen pratique pour les ultramarins qui ne vivent pas en outre-mer, et qui sont eux aussi éloignés de leur bureau de vote. Nous devons faciliter la participation de ceux qui vivent très loin de leur résidence habituelle. En effet, certains ultramarins sont parfois en déplacement de longue durée en métropole, pour des raisons de longue maladie – ils vivent alors dans des conditions souvent difficiles, loin de leur famille –, mais aussi pour des raisons professionnelles, lorsqu’ils sont en formation continue, ou pour leurs études.
Actuellement, la seule possibilité de voter offerte à ces derniers est de réaliser une procuration écrite, ce qui constitue un vrai parcours du combattant : ils doivent se rendre dans un commissariat de police ou une brigade de gendarmerie, dont le personnel est bien souvent mal informé des scrutins locaux. Je peux vous l’assurer car en tant qu’élus, nous sommes très souvent sollicités pour faxer ou envoyer par courrier électronique des compléments d’information sur les dates et les délais de vote.
De plus, ces documents font ensuite l’objet d’un traitement administratif qui coûte de l’argent et occupe les fonctionnaires d’État. Puis il faut, dans les régions d’outre-mer, réceptionner ces procurations et effectuer un traitement administratif, qui a un coût.
Cette procédure reste complexe et décourageante du fait des délais d’attente, et parfois de l’éloignement des lieux de délivrance. Il va de soi qu’elle représente également un coût pour tout le monde.
Finalement, qu’il soit ultramarin ou de l’hexagone, chaque Français éloigné de son lieu de vote pour des raisons exceptionnelles dûment justifiées devrait pouvoir bénéficier du vote électronique. A minima, il devrait pouvoir transmettre sa procuration par voie électronique, comme c’est déjà le cas pour les Français de l’étranger.
Je déposerai prochainement une proposition de loi organique allant dans ce sens. Bien évidemment, ces dispositifs vont s’accompagner d’une réflexion sur les moyens d’encadrement et de sécurisation de ces votes.
Quoi qu’il en soit, si le groupe UDI réaffirme clairement que le vote dit traditionnel doit rester la règle, il soutiendra cette initiative ainsi que toutes celles qui permettront à l’ensemble de nos concitoyens de faire entendre leur voix et de participer pleinement à la vie démocratique.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, cette proposition de loi vise à étendre à tous les scrutins nationaux le vote électronique comme mode d’expression démocratique pour les Français établis hors de France. Intervenant en dernière dans cette discussion, je m’en tiendrais aux grandes lignes et je ne répéterai pas l’argumentation détaillée de mes collègues Thierry Mariani, Meyer Habib, Frédéric Lefebvre et Sergio Coronado.
Depuis 2006, les Français de l’étranger peuvent s’exprimer par voie électronique pour élire leurs représentants : les conseillers, les délégués consulaires, et leurs députés. Ce mode d’élection a fait ses preuves, il n’est pas contesté et a été jugé fiable par le Conseil constitutionnel.
La loi de juillet 2013, modifiant la représentation des Français de l’étranger, a également confirmé le vote électronique et lui a donné plus de poids en supprimant la possibilité de voter par correspondance postale.
Le vote électronique fait donc l’unanimité, dans toutes les travées de cette assemblée.
Il est maintenant temps de l’étendre, pour les Français de l’étranger, aux autres scrutins. À l’étranger, des distances considérables peuvent séparer les électeurs des bureaux de vote tandis qu’en France, les bureaux de vote sont tous atteignables à pied. Les déplacements peuvent être difficiles, voire, dans certaines zones, dangereux.
Quant au vote par procuration, il est tout aussi difficile puisque c’est au consulat que les procurations doivent être établies. À cela s’ajoute la difficulté de trouver un mandataire ainsi que tous les obstacles que vient de décrire notre collègue Maina Sage. Ces contraintes spécifiques aux Français établis hors de France sont des obstacles à l’exercice du droit de vote. Aussi, le dispositif législatif doit être étendu pour que ce droit puisse être pleinement exercé.
De plus, autoriser ce mode d’expression par voie électronique pour certains scrutins et pas pour d’autres est illisible. Rappelons-nous ce qui s’est passé le 25 mai dernier. Les électeurs ont été appelés à s’exprimer, le même jour, pour élire leurs conseillers et délégués consulaires d’une part, et pour élire les députés européens d’autre part, et ce avec des modes d’expression différents. Nous avons dû redoubler d’inventivité et de pédagogie, ainsi que nos autorités consulaires, pour justifier que ce qui était bon pour une élection ne l’était pas pour l’autre.
Lors des législatives de 2012, plus de la moitié des électeurs a favorisé ce mode d’expression, adapté à notre temps. Ce taux est excellent pour une première.
Cette proposition de loi, excellemment défendue par le rapporteur Patrice Verchère, va aussi dans le sens de l’article 46 du projet de loi de finances, dont nous allons débattre, qui met en avant le numérique. Je ne développerai pas plus ce point, notre collègue Jacques Krabal vient de le faire.
Pour conclure, monsieur le secrétaire d’État, je constate toutes les contorsions que vous avez dû faire pour nous expliquer que vous vous opposez à un texte sur le principe duquel vous êtes d’accord. Vous évoquez des questions fondamentales, juridiques et techniques, que soulèverait ce texte. Je suis surprise que vous n’ayez pas déposé d’amendements d’amélioration. Quant à votre argument sur une éventuelle censure par le Conseil constitutionnel, avec tout le respect que je vous dois, je vous ai déjà vu plus courageux.
Je m’étonne également qu’aucun député du groupe SRC représentant les Français de l’étranger ne soit présent aujourd’hui pour défendre ou s’opposer à cette proposition de loi organique.
Vous comprendrez, chers collègues, que je suis très favorable à ce que le vote électronique soit étendu à tous les scrutins auxquels nos compatriotes sont appelés à participer. Je ne doute pas que vous adopterez cette proposition de loi qui répond aux attentes des électeurs.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme nous l’a montré cette discussion générale, cette proposition n’est ni de droite, ni de gauche, elle vise simplement à faciliter l’expression démocratique de nos compatriotes expatriés.
Monsieur le secrétaire d’État, pas un seul parlementaire représentant les Français de l’étranger ne s’oppose à cette proposition de loi.
Monsieur le secrétaire d’État, c’est le premier texte sur lequel vous représentez le gouvernement devant cette assemblée – et c’est aussi mon premier texte en tant que rapporteur – et son principe fait presque l’unanimité, même si des divergences et des inquiétudes existent quant à son application. Vous pouvez y apporter des améliorations, comme vous l’a notamment demandé Frédéric Lefebvre, et faire ainsi en sorte de recueillir un vote unanime, alors qu’un tel vote à l’Assemblée nationale est rare. Et ceci dans le seul but de favoriser l’expression démocratique de nos compatriotes expatriés à l’étranger.
Aujourd’hui, notre rôle à tous est de tenir compte de la situation particulière de nos collègues expatriés et de faciliter leur expression démocratique, où qu’ils résident. Tous nos collègues qui représentent les Français de l’étranger – Thierry Mariani, Frédéric Lefebvre, Sergio Coronado, Meyer Habib ou Claudine Schmid – ont donné des exemples bien concrets des difficultés et des contraintes que subissent nos compatriotes résidant hors de France. Ils sont parfois contraints de parcourir plusieurs centaines de kilomètres pour se rendre jusqu’à un bureau de vote et ces déplacements sont dangereux dans certains pays. Certains États refusent l’organisation d’élections de non-nationaux sur leur sol.
Des interrogations ont été soulevées sur l’incidence du vote électronique sur la participation. Il est très difficile de savoir si cette participation a été favorisée, puisqu’il n’y a pas de possibilité de comparaison.
S’il n’y avait pas eu de vote électronique, peut-être la participation aurait-elle été moindre ? En fait, personne n’a autorité pour dire ce qu’il en aurait été.
Je ne reviendrai pas sur les chiffres de participation, ils ont déjà longuement été cités.
En ce qui concerne le problème constitutionnel, nous ne pouvons nous substituer au Conseil constitutionnel. Il se prononcerait s’il était saisi, et la situation des Français établis à l’étranger étant différente, peut-être ferait-il application de sa jurisprudence sur le principe d’égalité, qui permet de traiter différemment des personnes placées dans des situations différentes.
Sur ce sujet, le Conseil d’État a considéré en 2010 : « eu égard à l’extrême difficulté, voire à l’impossibilité pratique, auxquelles peuvent se heurter les Français établis hors de France non seulement pour se rendre dans les bureaux de vote, mais encore pour donner procuration à un compatriote de confiance, et compte tenu par ailleurs des carences pouvant affecter le courrier dans certains pays, (…) le vote par voie électronique pouvait apparaître, dans nombre de cas, comme le seul moyen pour les Français résidant hors de France d’exercer effectivement un droit qu’ils tiennent désormais de la Constitution ».
Ce raisonnement, qui a prévalu pour l’élection des députés et que votre majorité a étendu aux conseillers consulaires, mériterait aujourd’hui d’être transposé à l’élection du Président de la République et aux représentants de la France au Parlement européen.
Une telle mesure n’imposerait en rien que la même possibilité soit offerte à l’ensemble des électeurs résidant en France. Néanmoins, comme vient de le rappeler notre collègue de Polynésie française et comme le disait Daniel Gibbes en commission des lois, il existe des situations dans les DOM-TOM qui pourraient amener à développer ce vote électronique. Commencer par cette extension, par cette expérience complémentaire, permettrait de répondre demain à des exigences qu’ont rappelées nos collègues de l’outre-mer.
S’agissant de la sécurité du vote, il est vrai qu’il peut y avoir des questionnements légitimes. Il y a eu quelques dysfonctionnements, comme l’a rappelé Frédéric Lefebvre, mais en aucun cas le Conseil constitutionnel, qui a été saisi à l’occasion des élections législatives, n’a relevé d’irrégularité. Et aucune des élections législatives des Français de l’étranger n’a été remise en cause du fait du vote électronique.
À entendre les uns et les autres, j’ai l’impression que nous avons peur d’une attaque électronique contre les opérations de vote, notamment lors de l’élection présidentielle. Il nous appartient de pouvoir y répondre techniquement. Nous donnons l’impression de ne pas souhaiter, par facilité, explorer de nouvelles voies pour améliorer cette technique de vote. J’aimerai que l’on puisse améliorer la situation, faire des propositions. Il y a peut-être des risques, mais nous pouvons y travailler. Les élections législatives et présidentielles ne sont pas prévues tout de suite – les législatives peuvent intervenir plus tôt que prévu, mais probablement pas les présidentielles… – nous avons donc du temps pour nous préparer. J’aimerais, monsieur le secrétaire d’État, que vous puissiez nous rassurer en déclarant que vos services travaillent sur ces questions, et que vous mettez les moyens pour régler les difficultés techniques, parce que c’est une facilité qui est offerte à nos compatriotes.
Si vraiment il existe des risques sur le vote, il va falloir accepter de déposer un projet de loi supprimant les autres possibilités de vote électronique. Nos collègues députés des Français de l’étranger souhaitent qu’il n’y ait aucun doute sur leur légitimité. Insidieusement, refuser l’extension de ce vote pour des motifs de sécurité instillerait le doute sur leurs conditions d’élection : peut-être doivent-ils leur élection à l’intrusion, via internet, de personnes qui ont manipulé le scrutin ? Il faut être prudent en maniant ces arguments.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous le répète, vous avez une belle occasion, alors que c’est le premier texte dont vous débattez dans cet hémicycle, d’obtenir un vote unanime. Ce serait une belle performance, et dans le contexte actuel, cela ferait du bien à l’Assemblée nationale que nous nous retrouvions ensemble à voter ce texte.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI et écologiste.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je remercie monsieur le rapporteur de sa sollicitude à mon égard, j’y suis très sensible.
En réponse aux différentes questions qui ont été soulevées, je note qu’il existe un consensus sur la gravité de la crise démocratique que nous traversons, sur la nécessité d’y répondre et, pour cela, de ne pas se priver de solutions innovantes. Sur ce point, il existe un accord entre les différents orateurs qui se sont exprimés.
Mais un certain nombre de questions, techniques et de fond, ont été soulevées au cours des débats.
La première question porte sur la sécurité. Je ne l’ai pas évoquée en début de séance, mais elle a été soulevée par un grand nombre d’entre vous, parfois de manière forte. MM. Coronado, Popelin et Lefebvre, ainsi que Mme Sage, ont constaté des dysfonctionnements. Les remarques des électeurs ont été entendues : elles seront prises en compte dans le cadre de la renégociation de l’appel d’offres pour les prochaines échéances électorales. Le logiciel en cause avait été externalisé. Effectivement, un certain nombre de dysfonctionnements inacceptables se sont produits et ont été signalés : je le répète, ils seront pris en compte dans l’appel d’offres qui sera lancé. Je veux saluer les services, qui travaillent dans des conditions souvent difficiles pour garantir la fiabilité, la sécurité et la sincérité du scrutin.
Une autre question a été soulevée dans la discussion générale et confirme la réserve du Gouvernement quant à la constitutionnalité du dispositif proposé : c’est celle de l’égalité. La situation de l’outre-mer a été longuement évoquée : il a été demandé que de telles modalités de vote puissent y être appliquées. Je le comprends, car l’outre-mer présente des spécificités. Mais le fait même que cette question soit évoquée dans le débat confirme que le respect du principe d’égalité est susceptible de poser des problèmes constitutionnels. On ne peut pas mettre en place un dispositif pour les seuls Français de l’étranger alors que d’autres situations peuvent être tout à fait similaires en termes d’éloignement et de difficulté d’accès aux bureaux de vote.
C’est la preuve même que la réserve de fond soulevée par le Gouvernement est tout à fait légitime et qu’elle doit être prise au sérieux. Je rappelle que le Conseil constitutionnel serait saisi d’office de ce texte, puisqu’il s’agit d’une proposition de loi organique.
D’autres orateurs ont évoqué la nécessité de généraliser ce dispositif. M. Lefebvre a déclaré qu’il faudrait l’envisager pour l’ensemble du pays. Évidemment, il s’agit là d’une piste de réflexion importante, mais on voit bien que le ciblage du dispositif sur certaines circonscriptions pose un problème de fond, alors même que l’élection présidentielle est organisée dans le cadre d’une circonscription unique.
Personne ne nie les problèmes ou les difficultés qui peuvent exister. Nous continuerons de travailler sur ce sujet et nous serons ouverts aux propositions innovantes à condition qu’elles soient sécurisées juridiquement.
J’appelle maintenant la proposition de loi organique dans le texte dont l’Assemblée a été saisie initialement, puisque la commission n’a pas adopté de texte.
En application de l’article 89, alinéa 4, du règlement, l’article 2 de la proposition de loi organique a été déclaré contraire à l’article 40 de la Constitution par le président de la commission des finances.
Nous examinons donc uniquement l’article 1er.
La parole est à M. Pascal Popelin, pour soutenir l’amendement no 1 , tendant à la suppression de cet article.
Je ne veux pas allonger inutilement nos débats, puisque la discussion générale a permis aux uns et aux autres de faire valoir leurs arguments. Pour l’ensemble de ceux que j’ai développés tout à l’heure et qui rejoignent ceux que M. le secrétaire d’État vient d’exposer, sans qu’il soit nécessaire d’imaginer que nous serions a priori défavorables au vote électronique, nous proposons la suppression de l’article 1er.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Ce matin, la commission a donné un avis favorable à cet amendement, mais à titre personnel, j’émets un avis défavorable. Je ne veux pas non plus allonger les débats, puisque j’ai déjà apporté quelques explications en présentant le texte et en répondant aux orateurs de la discussion générale. Je note simplement qu’il existe une convergence entre les membres du groupe SRC et le secrétaire d’État, tandis que mes arguments rejoignent l’opinion des parlementaires représentant les Français de l’étranger, qui sont ceux qui connaissent le mieux le problème dont nous débattons. Je pense qu’ils interviendront pour le confirmer.
Y compris les parlementaires de gauche représentant les Français de l’étranger !
En effet : je parle de l’ensemble des parlementaires, y compris de gauche.
C’est faux ! Si Arnaud Leroy n’était pas en rendez-vous avec Laurent Fabius, il vous prouverait le contraire !
Notre assemblée compte six députés de gauche représentant les Français de l’étranger. Ont-ils tous rendez-vous avec M. Fabius ?
Il n’y a pas de députés représentant les Français de l’étranger, il n’y a que des députés de la République !
Un peu de calme, mes chers collègues ! Vous aurez la parole dans un instant.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Pour toutes les raisons techniques et juridiques que j’ai exposées tout à l’heure, le Gouvernement est favorable à cet amendement de suppression.
Sur l’amendement no 1 , je suis saisi par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Puisque le groupe SRC est majoritaire dans cet hémicycle, notre assemblée va probablement voter dans quelques minutes la suppression de l’article 1er, donc le rejet de la proposition de loi organique.
Pour la troisième fois, mesdames et messieurs les députés du groupe SRC, vous n’êtes pas au rendez-vous. Vous n’étiez déjà pas au rendez-vous lorsque nous avons créé les députés représentant les Français de l’étranger : je le rappelais tout à l’heure, un certain Arnaud Montebourg défendait un amendement cosigné par un certain François Hollande en expliquant que les députés des Français de l’étranger étaient inutiles. Or je constate qu’aujourd’hui, sur ces onze députés, six sont à gauche.
Finalement, vous en êtes très satisfaits.
Vous n’étiez pas non plus au rendez-vous lorsque vous avez expliqué, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, qu’il était totalement inutile qu’un membre du Gouvernement soit spécifiquement chargé des expatriés. Finalement, vous avez changé d’avis, puisque M. Fekl est le quatrième secrétaire d’État en charge des expatriés en deux ans et demi.
Je l’en félicite, et je me félicite qu’une fois de plus, le Gouvernement ait changé d’avis.
Enfin, vous n’êtes pas au rendez-vous de cette proposition de loi organique. C’est votre droit, mais je suis persuadé que là encore, dans quelques années, vous nous donnerez raison.
Je ne veux pas faire d’amalgame, mais je constate que dans cet hémicycle, quatre partis sont favorables à ce texte, tandis que deux partis y sont défavorables : le parti socialiste et le Front national. C’est un pur hasard.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Et vous, cela ne vous est jamais arrivé de voter avec les députés du Front national ?
Quand l’UMP vote la même chose que le Front national, vous faites des amalgames. Je ne commets pas cette faute, je fais juste un constat. Je dis simplement qu’aujourd’hui, dans cet hémicycle, deux partis ne veulent pas que les expatriés puissent s’exprimer par internet. Je ne dénonce pas de connivences, c’est un constat, même s’il vous gêne. J’aimerais simplement que sur d’autres questions, vous ne fassiez pas des amalgames que je ne fais pas.
Ainsi, le Front national et le parti socialiste sont contre. Quatre mouvements sont pour : les radicaux, les écologistes, l’UDI et l’UMP. C’est un fait.
Je constate aussi que parmi les parlementaires socialistes représentant les expatriés, un seul est présent aujourd’hui. C’est très bien.
Monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi de vous exposer brièvement deux derniers arguments. M. Valls rappelait que la France était la sixième puissance du monde. Ne sommes-nous pas capables de créer un système informatique sûr, comme le fait l’Estonie ?
Ma dernière question est très précise. Dans le cadre du redéploiement de nos postes diplomatiques, de nombreux consulats sont supprimés.
Dans quarante-huit heures, je serai à Brunei, un État où le consulat français est en cours de suppression : les activités consulaires seront transférées à Singapour. Les électeurs français résidant à Brunei, déjà distants de plusieurs centaines de kilomètres, devront donc se rendre dans un autre État. Outre Brunei, cette situation concerne aussi, dans ma circonscription, le Tadjikistan, le Kirghizistan et la Papouasie-Nouvelle-Guinée.
Toutes ces raisons justifient cette proposition de loi organique, à laquelle vous vous opposez aujourd’hui.
Monsieur Popelin, je veux revenir sur un argument que vous avez utilisé pour justifier la suppression de l’article 1er. Dans votre intervention en discussion générale, vous avez parlé du risque de voir pirater des élections, par exemple celle du Président de la République. Pourriez-vous nous préciser si vous fermez ainsi définitivement la porte au vote électronique pour l’ensemble des Français résidant en France ?
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez déclaré que nos observations sur les difficultés techniques allaient être prises en compte dans le cadre des négociations avec le prestataire pour la mise en place d’un nouveau logiciel. Je m’en réjouis. Je constate qu’il n’y a donc plus d’entrave technique.
On verra ! Ce n’est pas moi qui décide !
Vous avez dit que vous alliez prendre en compte, dans le cadre des discussions avec le prochain prestataire, toutes les observations qui ont été formulées. Je ne vois donc plus sur quoi peut reposer votre objection à la mise en place du vote électronique.
Monsieur le secrétaire d’État, nos compatriotes résidant à l’étranger sont des Français à part entière, mais ils sont un peu des Français à part. J’ai l’impression qu’aujourd’hui, le parti socialiste n’a pas vraiment rendez-vous avec l’histoire. Ce parti, qui se veut de progrès – je ne dirai pas progressiste –, est en train de rater un rendez-vous.
Au fond, c’est de 2017 qu’il s’agit ici. Quelle sera alors la situation ? Nous saurons faire fonctionner les moyens électroniques, même si nous aurons connu quelques ratés auparavant – j’en veux pour preuve ce qu’a pu nous dire, à plusieurs reprises, le directeur des Français à l’étranger et de l’administration consulaire.
Nos compatriotes, que nous allons empêcher de voter, font tous les jours des achats par internet dans le pays où ils résident. Va-t-on leur dire qu’ils peuvent acheter une voiture en ligne, mais qu’on ne sait pas les faire voter par internet pour élire le Président de la République ou des députés européens ? Mes chers collègues, dans quel monde allons-nous vivre en 2017 ? Vous n’êtes pas des gens de progrès.
Thierry Mariani a eu l’occasion de vous expliquer les difficultés que vous allez susciter aujourd’hui en rejetant cette proposition de loi organique. Je prendrai un autre exemple. Je suis le député des Français résidant en Irak, en Syrie, en Centrafrique et dans quelques autres pays un peu compliqués comme le Nigéria. Vous allez priver mes compatriotes du droit de voter : ils résident dans des pays en guerre, en révolution, et ils ne peuvent souvent pas prendre la route pour des motifs de sécurité. Compte tenu de la situation de notre monde merveilleux, la liste des pays concernés va peut-être s’allonger. Vous allez priver ces gens-là de leur droit de vote ou vous allez les obliger à prendre la route – à Madagascar, par exemple, deux jours de route sont parfois nécessaires pour aller voter –, tout simplement parce que vous pensez qu’ils ne pourront pas utiliser internet. Vous commettez une grande faute devant l’histoire à l’encontre de nos compatriotes vivant à l’étranger.
Cela n’étonnera personne, je veux faire part de mon étonnement devant le vote que va exprimer, comme un seul homme, le groupe socialiste.
Chers collègues, vous allez vous prononcer contre l’article 1er de cette proposition de loi organique en invoquant les objections contre le vote électronique exprimées à la tribune par Pascal Popelin.
Certains d’entre vous ont participé au débat sur le projet de loi relatif à la représentation des Français établis hors de France, présenté par Hélène Conway-Mouret, qui a permis la mise en place des conseils consulaires et a réformé l’Assemblée des Français de l’étranger. Aucune intervention du groupe SRC n’a porté sur les modalités de vote que vous avez élargies, à l’époque, sans poser aucune question relative à la sécurité, au contrôle ou aux conditions d’exercice du vote électronique. Ne me faites donc pas croire que ce sujet vous gêne profondément !
J’ai évoqué ces objections, qui sont réelles et légitimes. Elles peuvent conduire à une véritable réflexion, mais elles ne vous ont pas mobilisés depuis que vous avez pris la responsabilité des affaires publiques en 2012. D’ailleurs, je l’ai dit tout à l’heure à M. le secrétaire d’État, vous n’avez pas considéré comme un problème le fait que les opérations de vote pour les élections consulaires aient été sous-traitées à une entreprise étrangère aux capitaux privés,…
…que le logiciel utilisé ne soit pas public, que les opérateurs soient situés en Espagne et que la seule personne en capacité de contrôler les opérations de vote électronique soit un ingénieur et non un fonctionnaire public.
Par ailleurs, je suis très étonné de constater, à la lecture du budget 2015, que vous proposez de supprimer l’envoi de matériel électoral physique. Un problème se pose : d’un côté, vous plaidez en faveur du tout-digital, du tout-électronique ; de l’autre côté, dès qu’il s’agit de réfléchir de manière pragmatique à l’élargissement du vote électronique pour nos compatriotes se trouvant en difficulté pour exercer leur droit de vote aux élections présidentielles et européennes, il n’y a plus de possibilité de débat.
Comme un seul homme, vous avez voté la réforme de la représentation des Français de l’étranger prévoyant la mise en oeuvre d’un vote électronique aux élections de mai dernier. En revanche, comme un seul homme, vous allez voter contre l’élargissement de ces modalités de vote aux élections présidentielles et européennes. Comprenne qui pourra !
Monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi de vous dire ce que je pense au plus profond de moi-même. Vous n’êtes pas convaincant, et surtout, vous n’êtes pas convaincu vous-même. C’est mon intime conviction.
Vous parlez de sécurité, notamment dans le cadre de l’élection la plus importante. Notre assemblée compte aujourd’hui onze députés représentant les Français de l’étranger.
Cela voudrait dire qu’à chaque fois qu’une loi est votée à l’Assemblée nationale avec un écart de moins de onze voix, celle-ci ne serait pas valable ? On pourrait instiller le doute dans la tête de nos concitoyens ? C’est ce que vous êtes ni plus ni moins en train de dire, chers collègues.
L’argument sur la sécurité n’a strictement aucun sens, chers collègues.
En fait, le problème, c’est que ce texte est proposé par mon collègue Thierry Mariani qui est un député de l’opposition. C’est exactement ce qui s’est passé lors de l’examen du texte relatif à la lutte contre le terrorisme où aucun amendement de l’opposition n’a été adopté, je l’ai du reste dit au ministre de l’intérieur en commission des affaires étrangères. En l’espèce, il ne s’agit ici ni de droite ni de gauche.
J’ai en tête le discours du Président de la République lors de la conférence des ambassadeurs le 27 août de l’année dernière. Il y faisait l’éloge des Français de l’étranger rappelant que ceux-ci représentaient un plus pour la France. Ils sont aujourd’hui près de 2,5 millions et peut-être demain 3 voire 3,5 millions. Et ce ne sont pas que des exilés fiscaux. Aujourd’hui, on est dans un monde où les gens bougent, mes chers collègues.
Il n’est pas encore trop tard. Vous pouvez revenir sur votre décision qui consiste à interdire à des millions de Français d’aller voter.
C’est important pour eux, pour la France, pour nous. Vos arguments ne tiennent pas la route. Encore une fois, il n’est pas trop tard pour changer d’avis. Pourquoi aucun député des Français de l’étranger socialiste n’est venu défendre cette proposition de loi ?
Quoi qu’il en soit, je sais qu’ils sont tous pour cette proposition de loi. C’est en tout cas ce qu’ils disent en off.
Je vais essayer de mettre fin à la légende selon laquelle nous serions tous favorables à cette proposition de loi. Pour ma part, je suis, comme vous, sensible à la question de la citoyenneté des Français à l’étranger ainsi qu’à la réalité des faits et à la proposition de M. Mariani.
Mais qu’êtes-vous en train de faire ? Jouer un coup politique.
Exclamations sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Comparer l’élection consulaire à celle du Président de la République n’est pas sérieux. En tant que conseiller consulaire, vous n’avez pas, madame Schmid, la responsabilité d’engager une attaque nucléaire ! C’est de cela dont on parle. Il faut avoir à l’esprit les prérogatives du personnage dont il est question.
Second point sur la construction européenne. Il y a une différence entre Arnaud Leroy qui vous parle actuellement, député des Français de l’étranger, d’une circonscription européenne et vos positions respectives.
Je suis quelque peu choqué de la possibilité pour les Français installés à l’étranger, notamment dans l’Union européenne, de pouvoir voter aux élections européennes. C’est un sacré coup de canif dans la citoyenneté européenne que l’on essaie de construire. Il faut y faire attention.
Il y a une distinction que l’on doit prendre en compte entre les Français établis hors de France dans l’Union européenne – 50 % – et ceux qui sont dans les pays évoqués par M. Marsaud qui, après son show, est déjà parti.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Sourires.
Constater que quelqu’un se livre à un show n’est pas une insulte, chers collègues.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Je vous en prie mes chers collègues et j’invite, monsieur Marsaud, à regagner sa place.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
En l’état, je suis contre la proposition de loi car elle fait partie des nombreuses propositions émanant de l’UMP qui ne sont pas budgétisées et n’ont pas fait l’objet d’études d’impact. Il est tout de même important de connaître leur coût, monsieur Mariani. Comment financer une telle opération ? Vous parlez d’une élection présidentielle, d’une circonscription unique qui concerne 65 millions de métropolitains auxquels il faut ajouter 2,5 millions de personnes installées à l’étranger. Il faut pouvoir en parler d’un point de vue budgétaire.
C’est pour cette raison que les députés socialistes voteront pour cet amendement et contre cette proposition de loi.
La parole est à M. Jacques Myard. Je vous demanderai d’être bref, car chacun a pu largement s’exprimer.
Pour ma part, je savais que nos amis et collègues socialistes étaient conservateurs, mais je ne savais pas qu’ils représentaient Jurassic Park.
Ne pas passer aujourd’hui au vote électronique est pour le moins étonnant aujourd’hui. Au moment où Bercy nous demande de payer nos impôts par voie électronique, et Dieu sait si cela pose aussi un problème de sécurité, on nous refuse ce moyen pour un simple vote.
En fait, le fond de l’affaire, c’est que vous avez tellement peur des Français que vous avez chassés à l’étranger, du fait des mauvaises conditions de travail dans l’Hexagone, que vous craignez un retour de bâton. Telle est la réalité !
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 28 Nombre de suffrages exprimés: 28 Majorité absolue: 15 Pour l’adoption: 19 contre: 9 (L’amendement no 1 est adopté et l’article 1er est supprimé.)
Mes chers collègues, nous avons achevé la discussion de la proposition de loi organique. L’Assemblée ayant supprimé l’article 1er, il n’y aura pas lieu de procéder au vote solennel décidé par la Conférence des présidents.
Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte.
La séance est levée.
La séance est levée à seize heures cinquante.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly