La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Le président a reçu de M. Christian Estrosi, député la cinquième circonscription des Alpes-Maritimes, une lettre l’informant qu’il démissionnait de son mandat de député.
Acte est donné de cette démission, qui sera notifiée à M. le Premier ministre.
L’ordre du jour appelle les questions sur le bilan du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE.
Je vous rappelle que la conférence des présidents a fixé à deux minutes la durée maximale de chaque question et de chaque réponse.
Nous commençons par des questions du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.
Monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, lors de la conférence de presse du 14 janvier 2014, le chef de l’État avait annoncé la création d’un observatoire des contreparties, destiné à s’assurer que le CICE est bien utilisé principalement pour l’emploi et l’investissement, non pour d’autres objectifs, par les entreprises bénéficiaires.
Pour donner un caractère législatif à cette démarche, notre groupe a fait adopter un amendement à la loi de finances rectificative du 8 août 2014, ainsi rédigé : « Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er mars 2015, un rapport sur la création d’un observatoire des contreparties dont le rôle serait de suivre l’utilisation par les entreprises des allégements de charges [qui leur sont consentis] au moyen du CICE […] et d’évaluer précisément ce dispositif d’ensemble. »
Or, plus d’un an après le 1er mars 2015, ce rapport n’a toujours pas été remis.
On ne pourrait éluder la création de cet observatoire en objectant l’existence du Comité de suivi du CICE : en effet, dans son rapport de 2015, ce dernier a indiqué son choix d’externaliser les travaux d’évaluation du crédit d’impôt et de les confier à des équipes extérieures de chercheurs. En outre, ces travaux s’avèrent très succincts et sommaires.
Par ailleurs, depuis novembre 2014, ce comité a vu son champ d’action étendu aux autres aides publiques aux entreprises.
Or le CICE représente un tel coût – 41 milliards d’euros, à lui seul –, qu’il nécessite un organe d’évaluation spécifique. À l’inverse, un comité qui doit traiter de tous les sujets à la fois risque de le faire d’une manière superficielle. II importe donc que, sans tarder davantage, le Gouvernement remette au Parlement le rapport sur l’observatoire des contreparties prévu par la loi de finances rectificative précitée.
Je vous demande donc de bien vouloir m’indiquer à quelle date sera remis ce rapport attendu depuis maintenant treize mois.
Monsieur le député, je ne partage pas totalement votre analyse selon laquelle le Comité de suivi du CICE, dont la mission et l’intitulé ont aujourd’hui été modifiés en Comité de suivi des aides publiques aux entreprises et des engagements, ne répond pas à l’esprit, sinon à la lettre, de l’amendement que le Parlement avait adopté – à votre initiative, je m’en souviens parfaitement.
Animé par France Stratégie, ce comité comprend non seulement des partenaires sociaux, des représentants des administrations, des organismes publics mais aussi quatre parlementaires. Il s’est réuni à plusieurs reprises, notamment récemment. Le Premier ministre lui a demandé de poursuivre son travail, qui, à l’évidence, n’était pas abouti, en particulier afin d’établir, avant la fin de l’été, un bilan des effets des différentes mesures – CICE au premier chef – sur l’emploi et d’étudier le suivi des accords de branche. Le Premier ministre a en effet jugé assez sévèrement que les résultats de ces derniers n’étaient pas à la hauteur des engagements que certaines organisations, notamment patronales, avaient pris.
Ce comité, que l’on pourrait qualifier d’observatoire, devra donc travailler avant l’été sur cette question, analyser les effets des mesures sur l’emploi et suivre les accords de branche, mais aussi s’intéresser à d’autres sujets comme les conséquences d’une « bascule » du CICE et les difficultés qui en résulteraient pour les salaires proches du SMIC.
Le rapport que vous évoquez, monsieur le député, pourra donc être utilement fourni au Parlement à l’automne.
Les derniers chiffres du chômage ont été révélés par l’INSEE : après une baisse en janvier, le nombre de chômeurs de catégorie A est reparti à la hausse en février. Nous voilà donc passés à 3,591 millions de demandeurs d’emploi de première catégorie en métropole.
Pourtant, le CICE monte en puissance. Il a déjà rapporté 18,6 milliards d’euros aux entreprises à la fin de l’année 2015. Nous pourrons bientôt ajouter pour les grandes entreprises la suppression de la contribution exceptionnelle d’impôt sur les sociétés, puis la baisse du taux nominal, qui leur sera particulièrement favorable.
Le CICE crée des différences de situation pour le secteur médico-social, cher à ma collègue Jeanine Dubié. Il représente aussi un effet d’aubaine certain, par exemple pour nos grandes banques commerciales, dont les syndicats s’attellent en interne à retracer son utilisation, démontrant que ces entreprises empochent les fonds pour mieux rémunérer les actionnaires, au détriment de l’emploi et des salaires. La CFDT, premier syndicat du secteur, s’est ainsi interrogée sur la réalité d’un besoin de restauration de la compétitivité des banques. Même frustration pour le syndicat SNB-CGC, qui, étudiant les projets d’utilisation du CICE, a dénoncé un pur effet d’aubaine : « Ils encaissent tous le CICE et il n’y a strictement aucune contrepartie ».
Je peux aussi évoquer la grande distribution. Un cabinet d’expertise a réalisé pour la CGT Commerce, une étude sur les six groupes de grandes surfaces à dominante alimentaire. D’une main, ces acteurs continuent de reverser aux actionnaires les deux tiers de leurs milliards de profits sous forme de dividendes, tandis que, de l’autre, ils perçoivent des dizaines de millions d’euros d’aide publique.
Nos géants du CAC 40 ne sont pas en reste : la CGT a dénoncé la petite vingtaine de millions d’euros d’argent public qui aurait permis à Total de rénover le hall de sa tour à La Défense, alors que la société reste champion hors catégorie des bénéfices. Quant au groupe Sanofi, qui redistribue en dividendes 70 % de ses milliards de bénéfices, il bénéficie également du CICE, mais aussi – pour un montant dix fois plus élevé – du crédit d’impôt recherche – CIR. Tout cela est à replacer dans un contexte de disette budgétaire et d’efforts drastiques consentis par nos classes moyennes travailleuses. Et Pierre Gattaz, le mois dernier, de fustiger le Premier ministre et de l’accuser – c’est un comble ! – de saper la confiance des entreprises parce qu’il avait évoqué la question des contreparties.
Ma question est simple : quelle est la stratégie du Gouvernement pour obtenir la mise en place de telles contreparties, notamment à l’aune de la suppression de la contribution exceptionnelle à l’impôt sur les sociétés pour les grands groupes ?
Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le député, avant de vous répondre plus précisément sur ces points, je voudrais rappeler que, lorsque le CICE a été mis en place, de nombreuses voix ont dénoncé une usine à gaz et souligné sa complexité.
Or, par sa simplicité et, si j’ose dire, son universalité, ce dispositif a les défauts de ses qualités. Un dispositif simple, qui s’applique à tout le monde, entraîne immanquablement des questions comme celles que vous avez posées, qui sont toutes légitimes. D’autres porteront sur le secteur médico-social : j’y répondrai plus précisément tout à l’heure.
S’agissant de la grande distribution, souvenez-vous que le Parlement, sur proposition, me semble-t-il, du Gouvernement, a augmenté la taxe sur les surfaces commerciales – TASCOM – payée par les grandes surfaces de plus de 2 500 mètres carré. C’est une façon de corriger un effet que certains, dont vous êtes, monsieur le député, ont pu juger excessivement favorable pour le secteur.
Quant au cumul du CIR et du CICE, c’est une réelle difficulté, qui a été soulevée à plusieurs reprises. Reconnaissez avec moi que ces dispositifs ne s’adressent pas aux mêmes entreprises et ne concernent pas les mêmes assiettes. Ainsi, les salaires dans la recherche ne correspondent pas aux niveaux d’éligibilité du CICE. Le chevauchement apparaît donc faible, même si les deux dispositifs semblent se cumuler dans certaines entreprises.
Enfin, nous aurons l’occasion de revenir sur les chiffres du secteur bancaire, que vous évoquez. J’ai pu montrer lors de mon audition par la commission sénatoriale d’enquête sur la réalité du détournement du crédit d’impôt recherche de son objet que le secteur bancaire n’est pas aussi concerné qu’il n’y paraît. Là encore, les niveaux des salaires du secteur en fournissent l’explication.
Nous en venons aux questions du groupe écologiste.
La parole est à M. Éric Alauzet.
Monsieur le secrétaire d’État, dans la suite de l’interpellation de Joël Giraud, ma question porte sur l’utilisation du CICE dans le secteur bancaire.
Le CICE, voté à la suite du rapport Gallois, qui mettait en évidence l’effondrement des marges de manoeuvre des entreprises dans un contexte de sous-investissement, s’est voulu un dispositif simple et universel, évitant les distorsions de concurrence.
Aucune contrepartie n’a été prescrite, bien que l’article 66 de la loi de finances rectificative du 29 décembre 2012 indiquait : « Le crédit d’impôt ne peut ni financer une hausse de la part des bénéfices distribués, ni augmenter les rémunérations des personnes exerçant des fonctions de direction dans l’entreprise ». Une référence spéciale à la prévention de l’optimisation fiscale agressive n’a pas pu être ajoutée, en dépit de mes amendements répétés sur le sujet.
Pourtant, l’efficacité du CICE mérite d’être discutée au regard des 20 milliards d’euros qu’il mobilise. Si la création d’emplois ne peut être immédiate, les prévisions de surcroît de croissance qui devaient l’accompagner, soit 0,5 % supplémentaire en 2014, puis à nouveau en 2015, ne se sont pas réalisées.
C’est pourtant dans cette perspective que l’Union européenne avait accepté de repousser de 2015 à 2017 l’objectif des 3 % de déficit, considérant d’une certaine façon que le CICE s’autofinancerait. Une fois encore, le dogme libéral de la croissance se traduit par un échec.
L’efficacité du CICE est d’autant plus discutable que les grands groupes internationaux en captent une grande part alors que son effet reste très incertain sur la création d’emplois. Pire, en l’absence de la croissance attendue, ce crédit d’impôt pèse de plus en plus sur la dépense publique, dont la baisse a, elle, des effets immédiats en termes de pertes d’emploi.
Dès lors que le secteur de la grande distribution a vu la plus grande partie du bénéfice du CICE grignoté par d’autres prélèvements tels que le doublement de la TASCOM – vous venez de le rappeler, monsieur le secrétaire d’État –, la question de son application dans le secteur bancaire devient d’autant plus cruciale que les banques sont plus exposées que d’autres à l’optimisation fiscale agressive et au détournement du CICE.
Ma question porte donc sur le bilan du CICE en faveur des banques.
Monsieur le député, revenons d’abord sur la part des secteurs de la banque et de l’assurance dans le CICE. En 2013, ces activités ont représenté 595 millions d’euros, soit 5 % du montant total du crédit d’impôt, qui s’élevait à cette époque à 11 milliards d’euros. En 2014, elles ont représenté 900 millions d’euros sur une créance de 16 milliards d’euros, soit 5,6 %. Ces taux sont notoirement inférieurs au poids de ces secteurs dans l’activité économique globale.
L’explication en est simple : les niveaux moyens des salaires dans ces secteurs sont évidemment supérieurs à ceux relevés dans les plus petites de nos entreprises.
Vous évoquez, monsieur le député, une surutilisation voire un « détournement » du CICE au profit des banques. Comme vous le savez, exclure le secteur bancaire aurait posé un problème juridique majeur. Nous aurons certainement l’occasion de revenir sur ce point, lorsque nous traiterons du ciblage du CICE – une notion que certains privilégient à celle de contreparties –, ciblage qui pose un problème constitutionnel important d’égalité devant l’impôt, donc d’égalité devant le crédit d’impôt.
S’agissant du secteur bancaire, il a fait l’objet de mesures spécifiques depuis 2012 : ainsi, il a dû acquitter 100 millions d’euros supplémentaires pour la taxe de risque systémique sur les banques, 300 millions d’euros au titre du doublement de la taxe sur les transactions financières et 230 millions d’euros pour ce qui concerne la surtaxe de la taxe sur les salaires, s’appliquant en particulier aux traders. L’ensemble de ces dispositions, adoptées par le Parlement, représente un surcroît de recettes supérieur aux 595 millions d’euros dont bénéficie le secteur au titre du CICE.
L’équilibre est donc à peu près tenu, bien qu’il soit fragile. Nous devons donc rester vigilants sur ce point.
Cette question porte sur la transformation du CICE en baisse de charges – c’est un débat que nous avons régulièrement.
On sait bien pourquoi le CICE a été retenu : il fallait aller vite et donner rapidement un signal aux entreprises, alors que nous ne disposions pas des moyens financiers nécessaires, vu notamment la dette qui pesait sur notre pays.
Il y a les partisans de l’un et les partisans de l’autre : ils s’équilibrent à peu près. Toutefois, de récentes déclarations, notamment de la part du Président de la République, laissent à penser que le crédit d’impôt serait transformé en baisse de charges.
L’avantage du crédit d’impôt, c’est que cela permet le type de débat que nous venons d’avoir. Dans le cas d’une baisse de charges, on ne se pose plus la question de savoir si tel secteur peut en profiter ni comment il l’utilise : tout cela devient inutile – d’ailleurs, ce serait peut-être plus simple…
À l’inverse, le CICE a exclu certains acteurs économiques : on a beaucoup parlé des associations, mais il y a aussi les entreprises qui ont de nombreux salariés touchant plus de 2,5 fois le SMIC. D’ailleurs, les secteurs bancaire et assurantiel, que nous évoquions tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État, bénéficieraient peut-être davantage d’un allégement de charges. On voit combien les choses peuvent être compliquées !
J’aimerais donc savoir s’il est possible de préciser dès à présent qui seront les gagnants et les perdants d’une éventuelle transformation du crédit d’impôt en baisse de charges.
J’aimerais aussi savoir quelle serait, sur les quelque 20 milliards du CICE, la part qui serait transférée vers les gagnants et qui représenterait donc autant de recettes en moins pour celles et ceux qui en bénéficient aujourd’hui.
Je vous remercie pour votre question, monsieur le député, et de l’objectivité que vous y avez mise. Vous avez clairement souligné que la « bascule » – comme on a coutume de dire – du CICE en allégements de cotisations sociales ferait, comme la plupart des réformes, des gagnants et des perdants, notamment pour ce qui est des secteurs de l’économie. À cet égard, je considère que les procès faits au CICE concernant le ciblage du dispositif, que nous avons évoqués à plusieurs reprises, seraient à peu près les mêmes pour des baisses de cotisations sociales. Car vous l’avez dit : les cotisations sociales sont payées par tout le monde ; procéder à des allégements différents suivant les secteurs de l’économie serait tout aussi impossible que de faire de même en matière de crédits d’impôt.
Une telle bascule – sur laquelle je reconnais que nous travaillons, car je me dois de fournir des réponses précises à vos questions tout à fait légitimes – poserait un autre problème. Pardon de dire les choses de manière aussi triviale, mais sur un salaire correspondant au SMIC, les charges ne sont pas assez élevées pour que les allégements de cotisations sociales représentent l’équivalent du CICE. Cela est vrai en France métropolitaine, mais c’est encore plus vrai dans les départements d’outre-mer, où les charges sur les salaires correspondant au SMIC sont encore plus faibles. Pour les salaires proches du SMIC, on n’a donc pas la « place » – comme l’on dit dans notre jargon – pour transformer le crédit d’impôt en allégement de cotisations, à moins d’inventer un crédit d’impôt sur les cotisations sociales, ce qui, vous en conviendrez, serait plutôt… original.
Pour conclure – pardon si je dépasse mon temps de parole, monsieur le président –, le Gouvernement travaille sur un tel scénario. Nos administrations produiront un certain nombre de « préalables » concernant les effets macrobudgétaires ; se posent ainsi les questions de l’année simple et de l’année double, que je n’ai pas encore pu évoquer, de la possibilité que les allégements de cotisations sociales équivalent au CICE et des effets sur les différents secteurs économiques, car, comme vous l’avez évoqué, suivant les secteurs, le poids du CICE n’est pas le même que celui des allégements de charges.
Quoi qu’il en soit, et même s’il ne m’a pas échappé que le Président de la République en avait parlé, avant toute décision, nous nous efforcerons de fournir des réponses précises à vos légitimes questions, afin que le Parlement, ainsi que le Comité de suivi des aides aux entreprises, puissent se saisir de la question.
Nous en venons aux questions du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
La parole est à M. André Chassaigne.
Monsieur le secrétaire d’État, je ne ferai pas un procès au CICE ; je me limiterai à un réquisitoire.
Sourires.
Premier constat : le CICE est le pilier du bien mal nommé « pacte de responsabilité ». Deuxième constat : il grève nos finances publiques de quelque 20 milliards d’euros par an.
Vu qu’il a été mis en place en 2013, il serait temps de tirer des conclusions sur ses effets réels au regard des indicateurs qui devraient conduire l’action publique aujourd’hui – je pense en particulier à l’évolution du chômage. Les chiffres viennent de tomber : le nombre de demandeurs d’emploi est en hausse au mois de février ; on compte aujourd’hui près de 3,6 millions de chômeurs en catégorie A. Vous constaterez avec moi que le pacte de responsabilité n’est venu en rien enrayer la progression inexorable du chômage et qu’il est, plus généralement, inefficace en matière de création d’emplois !
Nous dénonçons cette politique du crédit d’impôt, sans ciblage et sans contrepartie – peu importent les mots utilisés. Nous estimons que l’on gaspille là nos ressources fiscales pour réduire un coût du travail prétendument trop élevé, comparé à nos voisins européens.
En réalité, le véritable frein à l’activité et à la création d’emplois, ce ne sont pas les marges des entreprises ni une quelconque rigidité du code du travail. L’enjeu, c’est de redonner de la confiance, d’offrir des perspectives et de remplir les carnets de commandes ! Ce sont d’ailleurs des propos que vous avez pu tenir par le passé ou que vous tiendrez demain, monsieur le secrétaire d’État…
À cet égard, les collectivités territoriales jouent un rôle considérable en matière d’investissement public local. La baisse des dotations aux collectivités a eu des conséquences dramatiques sur l’activité, comme le rapport de notre collègue Sansu – qui a été « sansuré »
Sourires
– a voulu le montrer.
D’après plusieurs sources, le Gouvernement envisagerait de revenir sur la nouvelle baisse des dotations de 3,7 milliards d’euros prévue pour 2017. Vous vous doutez bien qu’une telle décision, empreinte de sagesse et de lucidité, aurait notre assentiment : voilà qui nous permettrait de valoriser votre action !
Sourires.
Pourriez-vous nous éclairer sur les intentions du Gouvernement sur ce point ?
Monsieur le président Chassaigne, à votre réquisitoire, je répondrai par une plaidoirie !
Sourires.
Je ne pourrai cependant pas répondre à tous les chefs d’accusation, d’autant que vous avez étendu le procès à d’autres questions !
Pour commencer, essayons de nous rajeunir de quelques années. Souvenez-vous : fin 2012, M. Gallois remettait un rapport qui montrait qu’au cours des dix dernières années, notre industrie avait connu une perte de compétitivité massive. Il suggérait donc – et tout le monde avait trouvé ce rapport plus qu’intéressant – d’abaisser le coût du travail dans notre pays, de manière à provoquer un regain de compétitivité et une restauration des marges, tous éléments nécessaires à la reprise et à l’investissement. Or, mesdames et messieurs les députés, à l’époque, nous n’avions pas le sou : le déficit public de notre pays atteignait les 150 milliards d’euros ou presque. Cela a été rappelé ici même par le Premier ministre cet après-midi.
Disons-le clairement : le CICE a eu l’avantage de profiter aux entreprises dès l’année 2013, puisqu’elles pouvaient le rattacher à la comptabilité de cette année-là, alors qu’il n’affectait le budget de l’État qu’en 2014 : nous avons donc fait de la « cavalerie », et ce de manière parfaitement légale. C’est la principale raison qui m’a conduit à changer de position, monsieur le député – car j’étais au départ plutôt réservé.
Quant à la baisse des dotations, le Premier ministre a répondu tout à l’heure à cette question, ainsi que Jean-Michel Baylet. Nous sommes actuellement en discussion avec les différentes associations d’élus. Cet après-midi, l’Association des régions de France a signé avec l’État une plateforme d’engagements mutuels. Il y aura d’autres échéances, mais au stade actuel, la réduction de la trajectoire de nos déficits publics nécessite la poursuite de la baisse des dotations – c’est en tout cas ce qui sera indiqué dans le programme de stabilité. Pourra-t-il y avoir des inflexions ? Cela a été évoqué ici ou là. Quoi qu’il en soit, ce n’est pas au secrétaire d’État au budget de répondre à cette question ce soir, dans le cadre d’un débat sur le CICE.
Monsieur le secrétaire d’État, le Comité de suivi des aides publiques aux entreprises, présidé par le Premier ministre, s’est réuni le 15 février dernier, en présence de la ministre du travail et du ministre des finances. Pour rappel, l’une des missions de ce comité, mis en place fin 2014, est de faire l’évaluation du respect des engagements pris par les entreprises en matière d’emploi et de formation professionnelle dans le cadre de la mise en place du pacte de responsabilité, dont le coût total annuel est estimé, rappelons-le, à 41 milliards d’euros pour 2017, quand il aura atteint son point culminant : 41 milliards d’euros annuels de baisses d’impôt et de cotisations sociales pour les entreprises !
La mise en place du pacte de responsabilité devait s’accompagner d’accords en matière d’emploi au niveau des branches professionnelles. Or, à ce jour, sur les cinquante branches professionnelles suivies par le Comité, seules seize ont conclu un accord, prétendument dans le cadre du pacte, et seules trois – trois ! – ont pris des engagements en matière de créations nettes d’emplois.
Quelles conclusions tirez-vous de ces chiffres ? Quelles mesures comptez-vous prendre pour ajuster le tir et faire en sorte que l’argent public ainsi mobilisé ne soit plus gaspillé, mais qu’il se concrétise par des créations d’emplois ?
M. le Premier ministre a indiqué qu’une réorientation ou un ciblage de ces aides étaient possibles. Qu’en est-il réellement ? Quels engagements concrets le Gouvernement peut-il prendre devant la représentation nationale afin de contraindre le patronat à prendre enfin ses responsabilités ?
Enfin, nos inquiétudes sont réelles quant à un basculement définitif du CICE vers une baisse durable des cotisations sociales. Nous considérons qu’une étude d’impact doit être réalisée en amont, de manière à évaluer les conséquences qu’aurait un tel basculement.
Merci de votre question, monsieur le président Chassaigne ; vous disposez d’ailleurs déjà d’une partie de la réponse, puisque vous vous êtes montré attentif aux propos tenus par le Premier ministre le 15 février 2016.
Le Premier ministre a dit, en substance – je le cite : « La tranche 2017 du pacte de responsabilité et de solidarité pourra être amenée à évoluer ». Il a tiré les conclusions des chiffres que vous avez rappelés, à savoir que seules seize branches professionnelles sur cinquante avaient conclu un accord. Certes, ces branches représentent un tiers de l’emploi salarié privé, soit 5 à 6 millions de salariés, mais cela reste insuffisant. Le Premier ministre a dit que le bilan n’était pas satisfaisant et qu’il fallait accélérer.
S’agissant des échéances à venir, je rappelle qu’il a été demandé au Comité de suivi des aides publiques aux entreprises d’examiner quels seraient les effets d’une transformation du CICE en exonérations de cotisations sociales, notamment pour les salaires autour du SMIC. Je l’avais déjà évoqué tout à l’heure en réponse à une question de votre collègue Alauzet. Ces rendez-vous auront lieu avant l’été.
Vous soulignez la nécessité d’une étude d’impact avant d’engager une démarche de ce type, mais ce sera bien entendu le cas. Tel était d’ailleurs le sens de la conclusion de ma réponse à Éric Alauzet ; il faudra avoir tous les éléments en main : année simple, année double, coûts budgétaires, faisabilité pour les salaires au SMIC, enfin évaluation pour l’ensemble des secteurs des poids respectifs de ces deux dispositifs : allégements de charges ou CICE.
Nous en venons aux questions du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. Yves Blein.
Lorsque l’on administre un traitement à un grand malade, on ne peut évidemment espérer qu’il aille mieux du jour au lendemain – je n’aurai pas la cruauté de rappeler ici les 700 000 emplois industriels perdus en dix ans, entre 2002 et 2012, ni les 5,5 % de déficit du budget de la nation en 2012.
Mis en place en 2013 au regard de la situation catastrophique, depuis de nombreuses années, de la plupart des entreprises françaises, le CICE, avec d’autres mesures – réduction de la contribution sociale de solidarité des sociétés, dite « C3S », de l’impôt sur les sociétés et aides à l’emploi – commence incontestablement à porter ses fruits. La restauration du taux de marge des entreprises, parmi les objectifs essentiels visés par ce dispositif, montre à l’évidence qu’il produit progressivement son effet. Les entreprises françaises, souvent comparées aux entreprises allemandes, disposent désormais d’un taux de marge brute légèrement supérieur à ces dernières : cela les place logiquement dans une meilleure situation concurrentielle.
Monsieur le secrétaire d’État, chacun sait ici qu’il est encore tôt pour analyser les conséquences réelles du CICE. Néanmoins, peut-on considérer que celui-ci a un impact sur la balance commerciale française ? Si les entreprises françaises sont d’ores et déjà davantage exportatrices, peut-on y voir, nonobstant la baisse du coût du pétrole, une amélioration de leur compétitivité liée à des prix de vente rendus plus compétitifs grâce à l’allégement de leurs coûts de revient ? A-t-on, au regard de cette réalité, une explication au fait que les États-Unis soient devenus en 2015 le premier fournisseur de l’Allemagne, devant la France ?
Enfin, le CICE était également destiné à soutenir l’investissement des entreprises. On sait que la première année de sa mise en place, beaucoup l’ont utilisé pour détendre leur trésorerie puis restaurer un niveau acceptable de marge brute. Pensez-vous – et dispose-t-on d’éléments en la matière – que le CICE pourrait se voir préférentiellement affecté, en 2016, aux investissements nécessaires à la modernisation de nos entreprises ?
Vous avez beaucoup travaillé sur ces questions, monsieur le député, et y avez consacré plusieurs rapports, généraux mais aussi plus sectoriels – nous aurons, je crois, l’occasion d’y revenir.
Vous m’interrogez sur les résultats du CICE. En termes d’emplois, il est difficile de déterminer, non seulement la part imputable au CICE, mais aussi ce qui relève de l’emploi créé ou seulement non supprimé. On ne l’a pas évoqué tout à l’heure, mais certains parlementaires, dont je comprends les intentions, auraient volontiers lié l’octroi du crédit d’impôt à la création d’emplois – ce qui aurait d’ailleurs exclu du dispositif les entreprises en difficulté, qui, sans créer d’emplois, peuvent survivre et se redresser grâce au CICE notamment.
Le commerce extérieur, qui est l’un des indicateurs de la compétitivité des entreprises, accusait en 2011 un déficit de 75 milliards d’euros, contre 45 milliards en 2015 : bien qu’il ne soit pas encore excédentaire, certes, son déficit a donc été réduit d’environ un tiers, et le CICE y a sans doute largement contribué.
Chacun peut interpréter les chiffres de la croissance et des investissements à travers des comparaisons plus ou moins ubuesques – j’en ai vu quelques-unes dans une interview donnée ce matin, mais, fort heureusement, un grand journal du soir est en train de rétablir la vérité… Les données relatives à la compétitivité des entreprises et au coût du travail montrent, en tout cas, que les marges se sont très nettement redressées, de même que les intentions d’investir – les trois quarts des entreprises déclarent aujourd’hui que le dispositif est susceptible de les y inciter. Nous y voyons des signes encourageants, même si, vous l’avez dit, un grand malade a besoin d’un peu de temps avant de retrouver force et vigueur.
Il me faut saluer, comme beaucoup d’acteurs économiques, la mise en place du CICE et du pacte de responsabilité, mesures essentielles du Gouvernement qui permettent à notre économie de retrouver des marges de compétitivité.
Cependant, il est toujours nécessaire de préciser que les résultats demandent un certain temps, notamment dans le secteur de la production industrielle. Leur impact à court et moyen terme dépend également de la qualité du dialogue social et des accords signés au sein des différentes branches professionnelles.
Lors d’un précédent débat, je vous avais interpellé, monsieur le secrétaire d’État, sur la particularité des entreprises qui travaillent à partir de marchés et de contrats faisant l’objet d’actualisations de prix – à partir d’indicateurs préalablement intégrés à ces marchés et contrats –, afin d’assurer leur équilibre économique jusqu’à leur terme. Or, s’agissant des charges salariales, il se trouve que l’Institut national de la statistique et des études économiques – INSEE – a, de manière unilatérale, intégré le CICE dans l’indice du coût horaire du travail, comme une subvention, ce qui a pour conséquence de priver l’entreprise employeuse qui acquitte les charges correspondantes d’environ la moitié de ce crédit d’impôt.
Vous m’aviez répondu, à l’époque, que le donneur d’ordre en profitait. Même si c’est vrai, ce n’est pas forcément lui qui emploie ou développe l’emploi, et qui a besoin d’être plus compétitif. Pouvez-vous envisager des mesures pour corriger ce qui paraît être une anomalie ?
Par ailleurs, le CICE doit être transformé définitivement en baisse de charges. De quelle manière cette mutation sera-t-elle réalisée et dans quelles conditions ?
Enfin, ne faut-il pas réfléchir d’ores et déjà à une évolution encore plus forte, afin de transférer une plus grande partie des contributions et cotisations sociales, aujourd’hui exclusivement affectées à la masse salariale, sur d’autres bases ? En effet, dans un contexte de concurrence européenne et en l’absence d’une harmonisation fiscale et sociale suffisante, mais aussi dans le contexte de la mondialisation, ce sont les entreprises qui produisent, emploient et se développent en France, et qui contribuent en majeure partie au financement de notre modèle social et de solidarité.
Que pensez-vous de la possibilité de transférer une partie de ces contributions d’une base salariale à une base de chiffre d’affaires, mais diminuée du montant de la masse salariale et du montant de l’amortissement ? Cela permettrait de faire contribuer les entreprises moins impactées par les salaires et les investissements en obtenant une péréquation nécessaire au maintien du financement de notre modèle social.
Vous m’avez déjà posé cette question, monsieur Grellier, et je crois vous avoir répondu par écrit. Je veux donc rappeler un certain nombre de principes. L’INSEE, en premier lieu, est un organisme indépendant. C’est d’ailleurs à ce titre qu’il est le comptable national, reconnu par nos partenaires européens. Nous attendions, le 25 mars dernier, les chiffres du déficit public : l’INSEE y a travaillé pendant quelques semaines, et je puis témoigner que la cloison est restée complètement étanche par rapport à nos services, à mon cabinet et à moi-même. Je n’ai pris connaissance de ces chiffres que quelques minutes avant le grand public, pas plus.
S’agissant de ce dont vous parliez, des recours ont été formés contre l’INSEE, qui a malheureusement eu gain de cause : je veux dire par là que son interprétation a été validée, en tout cas en première instance, par la justice administrative – les données étant incluses dans les prix de revient et les dispositifs d’indexation des prix, les titulaires de marchés sont en effet un peu pénalisés.
Votre question soulève d’autres points qui méritent réponse : je pense notamment à la prise en compte d’une assiette qui ne serait pas celle des salaires, mais de ce que l’on pourrait appeler l’excédent net d’exploitation. Sans être un spécialiste de la comptabilité privée, je me souviens qu’un tel dispositif avait été proposé à l’été 2013 – avant l’examen du projet de loi de finances pour 2014 –, comme une innovation, par mon prédécesseur, Bernard Cazeneuve, aujourd’hui ministre de l’intérieur. Une telle solution, que je trouve personnellement intéressante, a été à l’évidence rejetée, non par le Parlement, mais par les partenaires de la vie économique. Si toutefois nous nous rassemblions, avec quelques autres, nous pourrions peut-être les convaincre de sa pertinence.
Nous en venons aux questions du groupe Les Républicains.
La parole est à Mme Véronique Louwagie.
Le CICE fait figure d’outil philosophiquement intéressant. Trois ans après sa mise en place en 2013, ce crédit d’impôt sur la masse salariale – de 4 % au titre de 2013 et de 6 % ensuite – a rapporté 18,6 milliards d’euros aux entreprises à la fin de 2015, comme l’a annoncé le ministre des finances, Michel Sapin, le 22 janvier dernier.
Toutefois, le déploiement de cette mesure peut légitimement poser question. En effet, des entreprises dans lesquelles l’État détient des participations en sont les principales bénéficiaires. Ainsi, La Poste a obtenu 297 millions d’euros en 2013, 352 millions en 2014 et 341 millions en 2015, soit un total de 1 milliard d’euros en trois ans, alors que, parallèlement, les tarifs du courrier ont augmenté de 7 % en 2015 et de 3,6 % en 2016.
En outre, une enquête a montré que le CICE contribue au versement de dividendes à l’État via certaines sociétés qui en bénéficient, alors que, en théorie, il est censé bénéficier aux entreprises privées.
À ce sujet, monsieur le secrétaire d’État, il serait intéressant – et c’est tout l’objectif de la présente séance – d’obtenir des données actualisées du comité de suivi du CICE, afin d’avoir des indications plus pertinentes sur l’utilisation que les entreprises en ont fait. Le rapport publié le 22 septembre 2015 n’a en effet dressé qu’un bilan provisoire du dispositif.
La transformation du CICE en baisse de charges sociales bénéficiera-t-elle à toutes les entreprises, y compris les entreprises non lucratives, au premier rang desquelles les associations, et aux coopératives ? Comment ce nouveau dispositif sera-t-il articulé avec ceux qui existent ?
Les sujets que vous avez évoqués appellent en effet une réponse.
On évoque souvent La Poste. Sans le CICE, cette entreprise – je le sais pour m’en être entretenu avec son président-directeur général – serait proche de l’agonie, pour ne pas dire plus. La chute du courrier – lequel recule de 3 à 5 % par an depuis plusieurs années – provoque en effet un effondrement de ses ressources. Certes, la Banque postale se porte bien, Mme Grosskost le sait.
Mais la Banque postale, pardonnez-moi de le dire aussi crûment, ne dégage pas de cash : ses profits sont étalés dans le temps. La Poste fait donc face à des difficultés considérables : il suffit d’avoir passé une heure et demie avec Philippe Wahl pour comprendre que le CICE ne contribue pas à renflouer les caisses de l’État, actionnaire de cette entreprise, mais à maintenir celle-ci dans un équilibre qui lui permet d’assurer des missions de service public.
Vous avez aussi évoqué la bascule dans le nouveau dispositif et ses effets sur différents secteurs. J’ai déjà répondu à cette question plusieurs fois. Oui, les informations doivent être plus précises encore ; c’est la raison pour laquelle l’organisme France stratégie, en remettant son rapport en septembre dernier, s’est déclaré incapable de se prononcer, à ce stade, sur l’affectation du CICE dans les entreprises : il lui faut plus de temps. Aussi attendons-nous le retour d’analyse au mois de septembre ; il constituera le socle de l’étude d’impact que le président Chassaigne appelait de ses voeux. Le Parlement – et avec lui le Gouvernement – sera ainsi en mesure de savoir à quel moment, et dans quelles conditions, le CICE pourra être transformé en allégement de cotisations sociales.
Le Président de la République s’est déjà clairement exprimé sur une autre partie de votre question, en précisant que le nouveau dispositif profitera à l’ensemble des secteurs, y compris celui de l’économie sociale et solidaire – puisque c’est lui que vous visiez en évoquant le secteur associatif.
Monsieur le secrétaire d’État, le CICE avait été conçu comme l’outil d’une politique de l’offre en faveur des entreprises exposées à la concurrence internationale.
Trois ans après son entrée en application, il a, logiquement, atteint sa vitesse de croisière. Or un premier constat s’impose : ce dispositif, qui équivaut une réduction des charges pesant sur les bas salaires, ancre une fois de plus – et c’est malheureux – notre système productif dans la production bas de gamme. En effet, une telle réduction touche peu les salariés qualifiés de l’industrie comme ceux des entreprises exportatrices. En outre, et comme cela a été indiqué tout à l’heure, le CICE bénéficie dans de larges proportions aux secteurs protégés de notre économie.
Je rappelle qu’il existe soixante et onze mesures dérogatoires d’exonération ou de réduction de cotisations sociales ayant pour assiette le salaire brut ! La Cour des comptes – entre autres – a relevé ce fait et estimé, à juste titre, souhaitable de simplifier et de rationaliser de tels allègements. Elle a d’ailleurs adressé au Premier ministre un référé lui suggérant d’intégrer l’ensemble de ces allègements, et notamment ceux liés au CICE, au barème des cotisations.
Outre que la complexité de ces mesures cumulatives – pas seulement de celles liées au CICE – décourage bien des entrepreneurs et leur fait, de surcroît, redouter les contrôles, on peut se demander s’il est pertinent de continuer à subventionner ainsi les bas salaires. Une telle politique n’est-elle pas un frein à la croissance qui doit nous permettre de construire les industries du futur ?
La question se pose dans la mesure où les indicateurs de notre compétitivité extérieure continuent de se dégrader : vous avez, certes, monsieur le secrétaire d’État, souligné l’amélioration de la balance commerciale, mais le commerce extérieur reste en déficit. Quant au cycle des affaires, sa reprise est décevante, en deçà des hypothèses retenues.
En réalité, de telles baisses de charges, financées par l’emprunt et s’appliquant aux secteurs protégés, alors même que notre pays est exsangue, relèvent d’une politique de la demande qui ne dit pas son nom.
N’est-il pas temps de changer de stratégie afin de privilégier une véritable politique de compétitivité axée sur le redressement des marges, l’investissement, l’innovation et l’augmentation des compétences dans les secteurs économiques en prise avec les marchés mondiaux ? Pour ce faire, il faut baisser les taux d’imposition globale – impôts et cotisations annuelles obligatoires – et, bien évidemment, réduire les contraintes réglementaires pesant sur le marché du travail. Privilégier le système productif exportateur permettrait de créer un véritable choc de compétitivité, et donc de croissance.
Madame la députée, je vous remercie de l’enthousiasme avec lequel vous avez analysé la situation économique de notre pays et souligné la compétitivité de nos entreprises !
Sourires.
Il faut, à tout le moins, reconnaître que l’amélioration des marges, de l’investissement et de la balance commerciale de notre pays constituent les signes très importants d’un regain de compétitivité.
Bien sûr, il est toujours possible d’affirmer que cette évolution n’est pas achevée, mais quelle oeuvre humaine l’est définitivement ?
Le différentiel de coût du travail, notamment avec l’Allemagne – que vous connaissez bien, madame la députée – est en train de se réduire et même, me semble-t-il, de s’inverser.
Rappelant que le CICE ne porte que sur les salaires inférieurs à 2,5 fois le SMIC, vous en avez tiré argument pour affirmer qu’il ne bénéficierait pas à l’industrie. C’est oublier que cette dernière est, elle aussi, tributaire du coût des achats qu’elle effectue auprès de ses fournisseurs.
Or, la plupart du temps, ces fournisseurs – est-ce un bien ou un mal, je ne le sais, mais le constat s’impose – pratiquent des salaires inférieurs à cette même limite. Certes, dans le secteur de l’aéronautique, les salaires sont souvent plus élevés, mais ils le sont dans une moindre ampleur quand il s’agit des fournisseurs.
Par conséquent, les grandes entreprises industrielles profitent également, quoique de façon indirecte, de la baisse du coût du travail sur les salaires inférieurs à 2,5 fois le SMIC.
Par ailleurs, il ne vous a pas échappé – l’Agence France-Presse y a fait allusion cet après-midi – que dans le cadre du Pacte de responsabilité, une baisse des cotisations salariales va s’appliquer à compter du 1er avril sur les salaires inférieurs à 3,5 fois le SMIC. Reconnaissez qu’à partir d’un tel seuil, il n’est plus possible de parler de « trappe à bas salaires » ou d’encouragement à réduire les rémunérations, quand bien même nous ne parlons pas encore de salaires très élevés.
Il est donc nécessaire de trouver un équilibre entre l’effet recherché sur l’emploi – souvenez-vous que le « E » du CICE a été ajouté dans un deuxième temps – et celui qui concerne la compétitivité. Le premier se manifeste peut-être de façon un peu tardive, mais, s’agissant du second, les premiers résultats sont là.
Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite revenir sur les effets indésirables provoqués par l’entrée en vigueur du CICE dans le secteur sanitaire, social et médico-social : il a en effet entraîné une inégalité de traitement entre les établissements du secteur privé à caractère commercial, éligibles au dispositif, et ceux du secteur privé non lucratif, qui en sont exclus.
Certes, le Gouvernement n’a jamais nié les difficultés propres à ce secteur : nous saluons, à cet égard, sa décision de porter de 6 000 à 20 000 euros l’abattement de la taxe sur les salaires. Cet effort, calibré pour les petites structures, qui représentent 2 % des emplois du secteur, demeure toutefois bien insuffisant pour les plus grandes d’entre elles, et ce en dépit des allègements de charges consentis depuis le 1er janvier 2015 dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité.
C’est pour cette raison que nos collègues radicaux de gauche au Sénat avaient souhaité inclure dans le projet de loi de finances pour 2016 la création d’un crédit d’impôt pour l’action solidaire – une disposition malheureusement supprimée le 11 décembre par notre assemblée.
Ce crédit d’impôt, dessiné sur les mêmes bases que le CICE, mais imputable sur la taxe sur les salaires, présenterait l’intérêt de résoudre plusieurs difficultés rencontrées par le secteur privé non lucratif. Il réglerait notamment, en premier lieu, celle née du différentiel constaté avec le secteur privé lucratif – éligible, lui, au CICE – en matière de charges sociales et fiscales.
La rapporteure générale du budget a évalué le coût d’une telle mesure à environ 400 millions d’euros bruts par an, ce qui, rapporté au 800 000 salariés du secteur, représente un investissement de 500 euros par an et par personne.
Or les estimations de France Stratégie ont révélé que l’effort moyen consenti par la collectivité au titre du CICE s’était élevé, en 2014, à environ 1 650 euros par équivalent temps plein pour les grandes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire, à 920 euros pour les PME et à 628 euros pour les micro-entreprises – tout cela sans la moindre certitude quant à la préservation ou à la création d’emplois.
Pourquoi le Gouvernement tarde-t-il donc à mettre en place le crédit d’impôt d’action solidaire, qui apporterait une solution aux effets indésirables du CICE dans le secteur médico-social ? Quelles mesures alternatives a-t-il prévu d’engager à court terme en faveur de ce secteur ?
Madame la députée, vous évoquez un sujet identifié et souvent évoqué dans cet hémicycle.
Il l’a été de façon pertinente et lucide. La possibilité de créer un crédit d’impôt assis sur la taxe sur les salaires a déjà été débattue. Vous évoquez un coût de 400 millions d’euros : mais tout dépend du niveau auquel on place le curseur.
En outre, il faut y ajouter les 300 millions d’euros que coûte le relèvement à 20 000 euros, pour les associations, de l’abattement de taxe sur les salaires, une mesure que vous avez rappelée et qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2014.
Nous avons également tenu à corriger un certain nombre d’effets pervers, en termes de concurrence, du CICE entre certains secteurs relevant soit du secteur privé soit du secteur associatif, notamment dans les domaines sanitaire et médico-social.
Dans la branche sanitaire, il nous vous aura pas échappé que les tarifs sont différents selon que l’on relève du secteur public – et de ce qui lui est assimilé, c’est-à-dire le secteur à but non lucratif – ou du secteur privé. Les réductions tarifaires qui ont été appliquées à ce dernier ont en effet été plus importantes que celles appliquées aux associations à but non lucratif. Évidemment, le secteur privé s’en est ému, mais Marisol Touraine et moi-même – puisque nous avons travaillé de concert – pensons avoir corrigé ainsi une partie, bien que sans doute pas la totalité, du différentiel que vous avez opportunément souligné. Il s’agit d’un point important, qui fait partie des éléments de réflexion relatifs à ce qu’il est désormais convenu d’appeler la « bascule » et devra donc être étudié au moment où les possibilités budgétaires le permettront.
En effet, ce n’est pas parce que les résultats enregistrés en 2015 ont été un peu meilleurs que prévus que nous devons considérer totalement achevée la marche vers la réduction des déficits.
Si d’autres questions m’en donnent l’occasion, je reviendrai plus tard sur les autres dispositions prises dans ce domaine.
Monsieur le secrétaire d’État, je veux à mon tour revenir sur le sujet que viens d’évoquer notre collègue Jeanine Dubié : l’application du crédit d’impôt compétitivité emploi au secteur privé non lucratif.
Un an après la mise en place du CICE, en décembre 2013, un rapport établi par plusieurs députés, dont Yves Blein, analysait déjà de façon approfondie l’impact de la mise en oeuvre du CICE sur la fiscalité de ce secteur et, après des conclusions extrêmement claires, formulait, sur ce sujet, vingt propositions.
Il est vrai que les mesures prises en faveur des associations en vue de compenser les effets du CICE – vous venez de les rappeler, monsieur le secrétaire d’État – sont loin d’être négligeables ; elles demeurent néanmoins insuffisantes. Certes, il a été mis fin à certains déséquilibres, mais cela ne suffit vraiment pas. Or les structures telles que les fondations ou les associations oeuvrant dans le domaine des services à la personne et de la santé emploient 2 millions de salariés ; ce sont eux qui subissent les conséquences de cette inégalité.
C’est pourquoi je souhaite vous interroger sur la mise en place du crédit d’impôt d’action solidaire, ou CIAS, qui avait été proposée par voie d’amendement avant d’être rejetée. Ma question est simple : trois ans après la publication du rapport parlementaire que j’ai cité, le Gouvernement est-il prêt, lors de l’examen de la prochaine loi de finances, à adopter ce dispositif ?
Madame la députée, j’ai assez largement répondu à cette question mais je comprends d’y revenir. En termes de gestion budgétaire et financière, nous avons des choix à faire et des règles à respecter.
J’ai déjà dit que le recours au crédit d’impôt présentait l’avantage, pour l’État, de décaler d’un an le coût d’une mesure qui, pour les entreprises, avait un effet immédiat, non en termes de liquidités – nous y reviendrons – mais en termes comptables.
Il nous serait en revanche difficile de supporter un coût budgétaire plus important. C’est donc par l’intermédiaire des tarifications, je l’ai indiqué, que nous avons cherché à corriger les inégalités induites par le CICE dans le secteur sanitaire.
Vous avez raison, madame la députée, car ce secteur relève des Agences régionales de santé, les ARS, et des conseils départementaux. Cela étant, rien n’empêche ces deux acteurs de fixer le prix des prestations et les prix de journée en tenant compte des disparités que vous avez relevées. Nous les avons d’ailleurs invités à agir dans ce sens.
J’ajoute que certaines associations qui se trouvent entièrement dans le champ concurrentiel et dont les activités sont totalement fiscalisées peuvent d’ores et déjà, lorsqu’elles emploient des salariés, bénéficier du CICE.
Soyons clairs : vous me demandez, madame la députée, si le Gouvernement est prêt à accepter, lors de l’examen du prochain projet de loi de finances, un amendement instituant le CIAS. Or vous le savez : le Gouvernement propose, et le Parlement dispose.
Le Gouvernement appellera l’attention des députés sur les conséquences financières d’une telle mesure dans le cadre d’une trajectoire d’évolution des finances publiques qui demeure contrainte. Ensuite, en fonction de la proximité ou non d’un mouvement de bascule du CICE vers des baisses de charges – qui lèverait tout problème de distorsion de concurrence –, le Parlement appréciera l’opportunité de l’adopter. Dans l’immédiat, et même s’il est sollicité en ce sens par de très nombreux courriers émanant – entre autres – de parlementaires, le Gouvernement, comme votre serviteur, n’est pas encore complètement prêt, pour des questions tenant à l’équilibre budgétaire, à la lui proposer.
Monsieur le secrétaire d’État, en juillet 2012, face au constat de l’affaiblissement de notre tissu industriel, mis à mal sous les deux précédents quinquennats, le Gouvernement a demandé à Louis Gallois d’établir un diagnostic approfondi, assorti de propositions à même de rétablir la compétitivité de nos entreprises et de recréer de l’emploi en France.
Dans son rapport remis en novembre 2012, Louis Gallois a proposé un « Pacte pour la compétitivité de l’industrie française », qui reposait notamment sur un allégement massif des charges pesant sur les entreprises. Compte tenu de la situation des finances publiques léguée par la précédente majorité,…
…le choix a été fait de mettre en place cet allégement de charges destiné à restaurer le taux de marge des entreprises, non pas par un allégement direct des charges sociales patronales mais par un crédit d’impôt sur les sociétés, le CICE.
Les derniers chiffres de l’INSEE le montrent de façon incontestable, le CICE a été pleinement approprié par les chefs d’entreprise et a permis de redresser de façon considérable les marges de nos entreprises.
Toutefois, la question reste posée de savoir s’il ne faudrait pas, à terme, transformer ce crédit d’impôt en baisse directe et à due concurrence des cotisations sociales. Cette question a été évoquée à plusieurs reprises, notamment au début de cette année 2016, à l’occasion du nouveau plan d’urgence pour l’emploi et la croissance.
Comme l’a justement souligné Yves Blein dans son rapport d’information publié à l’automne 2014, une transformation du CICE en allégement de cotisations sociales aurait plusieurs avantages : clarifier l’objectif initial de rétablissement de la compétitivité, créer un facteur de simplicité et stabilité pour les entreprises en pérennisant l’effort national en faveur de ces dernières, faire en sorte que le dispositif produise des effets sans décalage dans le temps, et enfin éviter certaines distorsions et rétablir ainsi l’égalité entre tous les employeurs.
Monsieur le ministre, où en est la réflexion du Gouvernement sur cette perspective ? Quels sont les questions à résoudre et selon quel calendrier et quelles modalités ce basculement pourrait-il être mis en oeuvre ?
Monsieur le député, vous revenez tout à fait légitimement sur cette question centrale. Pardonnez-moi de vous le dire ainsi, mais je suis pris entre deux feux, entre ceux qui disent que le CICE n’est pas assez ciblé et concerne aussi les secteurs qui n’en ont pas besoin, comme La Poste ou la banque, et ceux qui, à l’instar de Mme Dubié, estiment que le CICE doit toucher tous les secteurs, y compris celui de l’économie sociale et solidaire, aujourd’hui en décalage.
La même difficulté se poserait pour un allégement de charges. Quels sont les éléments de sélection ? La taille de l’entreprise peut en être un, mais pas le secteur d’activité, pour des raisons de constitutionnalité.
La question de l’année simple et de l’année double est une autre difficulté, à laquelle nous serions confrontés s’il fallait basculer dans un autre dispositif. Le crédit d’impôt étant comptabilisé pour les entreprises en année n et payé en année n + 1, soit les entreprises ne percevraient rien pendant une année, soit le budget aurait à payer deux fois la même année.
Si je vous réponds, je dépasserai le temps qui m’est imparti, monsieur Alauzet.
Sourires.
À cela s’ajoute la question des créances accumulées. Vous savez que pour les grandes entreprises, les créances sont payables sur les trois années suivantes. Il nous faut donc trouver un dispositif soutenable pour le budget de l’État et qui ne pénalise pas les entreprises. Telle est la cause, sinon de nos hésitations, du moins du travail préalable que nous devons réaliser avant d’envisager les modalités précises et le calendrier de cette fameuse bascule.
Nous en revenons aux questions du groupe Les Républicains. La parole est à Mme Valérie Lacroute.
Monsieur le secrétaire d’État, cette question ne vous étonnera pas, elle rejoint toutes celles qui viennent d’être posées ! Si le CICE semble désormais connu et à peu près compris des entreprises, il n’en reste pas moins considéré comme un facteur supplémentaire de complexité dans leur gestion administrative.
Dans ma circonscription, la plupart des chefs d’entreprise sont découragés par la complexité des dossiers à remplir et par les contrôles des services fiscaux ou de l’URSSAF qui s’ensuivent. L’un d’entre eux m’a confié que l’obtention du CICE lui avait valu un mois et demi de combat administratif ; un autre a dénoncé le surcoût que cela engendrait pour l’établissement de chaque bulletin de salaire ; un dernier m’a avoué y avoir renoncé pour éviter de perdre trop de temps et d’énergie.
Ces entrepreneurs font valoir qu’il serait plus efficace de remplacer le CICE par un allégement de cotisations sociales, d’un montant équivalent – soit 20 milliards d’euros. Cette baisse des charges simplifierait la vie des employeurs puisqu’ils n’auraient plus qu’un interlocuteur unique, les URSSAF. Cette baisse des charges devrait pouvoir se faire sur une base mensuelle ou trimestrielle, réduisant ainsi immédiatement le coût du travail. Enfin, elle bénéficierait également aux entreprises déficitaires, alors qu’aujourd’hui, faute de résultats bénéficiaires, celles-ci ne peuvent malheureusement pas avoir accès au crédit d’impôt.
Monsieur le secrétaire d’État, les chefs d’entreprise sont comme tous les Français : ils ne croient qu’à ce qu’ils ressentent concrètement. Aujourd’hui, ils ont l’impression qu’entre ce qui est donné d’un côté et ce qui est pris ou repris de l’autre, le compte n’y est pas. Ils sont en attente de simplification, et surtout de stabilité. Quand engagerez-vous une vraie réflexion sur la possibilité de substituer au CICE un allégement de cotisations sociales ?
Madame la députée, vous faites erreur : le propre d’un crédit d’impôt est d’être payable aux entreprises, même lorsqu’elles ne font pas de bénéfice et ne paient pas d’impôt !
C’est une erreur fondamentale que de le croire, madame la députée. Si c’est un entrepreneur qui vous a dit cela, alors conseillez-lui de changer d’expert-comptable !
Vous évoquez la complexité du dispositif. Voilà une énormité !
Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Je le sais, ce genre de discours a pu être tenu. Je suis allé dans les centres des impôts, j’ai rencontré les entreprises, j’ai regardé ce qu’était un dossier de CICE : il s’agit de cocher une case. Pour ne pas introduire de complexité, nous avons pris soin de choisir exactement la même assiette que pour les allégements de cotisations. Il convient de multiplier cette assiette par un taux. Remplir un dossier de préfinancement en ligne prend une dizaine de minutes. La BPI ne prélève aucun frais de dossier en deçà de 50 000 euros de créances. Le préfinancement fonctionne très bien, le traitement est très rapide et l’administration fiscale paie avec célérité.
Comme plusieurs l’ont dit, les entreprises se sont complètement approprié le CICE. J’en veux pour preuve que le taux de recours, aisé à calculer, avoisine les 100 %. Posez des questions écrites sur le sujet, madame la députée, vous serez pleinement rassurée par les réponses qui vous seront apportées.
Monsieur le secrétaire d’État, le CICE a été développé dans le prolongement du rapport Gallois, afin de redonner de la compétitivité aux entreprises et leur permettre, dans la foulée, de recréer des emplois.
Depuis le début, nous sommes un certain nombre sur ces bancs à avoir insisté sur le fait que le dispositif du CICE était très bureaucratique et qu’il serait bien plus simple de procéder à une mesure directe d’allégement des charges plutôt qu’à un crédit d’impôt a posteriori. Face à ces difficultés, et suite aux bilans désormais disponibles, le Gouvernement semble enfin accepter l’idée d’un basculement du CICE en exonérations.
Pouvez-vous nous indiquer comment vous comptez procéder pour rendre cette mesure opérationnelle, compte tenu de la structure actuelle des prélèvements sociaux selon le niveau de salaire – je pense à l’absence de cotisations employeurs au niveau du SMIC – et comment vous entendez gérer l’année de transition ?
Monsieur le député, lorsque l’on intervient en dernier, l’on se voit contraint de répéter les questions qui ont déjà été posées. Je ne reviendrai pas sur le caractère bureaucratique que vous prêtez au CICE, mais entre nous, un allégement de cotisations sociales demande tout autant de paperasse et de calculs ! Il n’était pas si simple pour une entreprise de savoir si elle était éligible aux allégements Fillon et à quel taux, et il lui fallait pour cela annualiser les cotisations.
Vous m’avez demandé comment nous comptons procéder avec les salaires proches du SMIC. Nous demanderons aux partenaires sociaux du comité de suivi de nous fournir pour l’été une étude et des pistes permettant de répondre à cette question.
Il ne vous a pas échappé que les partenaires sociaux sont gestionnaires d’organismes sociaux. Or de tels allégements poseront à terme des questions quant à la gestion paritaire. Lorsque toutes les cotisations sociales auront été allégées et que ce sera le budget qui versera les recettes des régimes, l’équilibre et le rôle des partenaires sociaux dans le dispositif s’en verront modifiés.
Quant à vos interrogations sur l’année de transition, j’ai fait part de nos difficultés et de la nécessité d’étaler les créances déjà acquises par les entreprises. L’État a toujours veillé à compenser strictement les allégements de cotisations à la Sécurité sociale, sauf choix contraire du Parlement. Un basculement trop rapide et non étalé sur quelques années ne pourrait être absorbé sans conséquence sur le budget de l’État.
Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :
Questions orales sans débat.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt-deux heures quarante-cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly