COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L'ÉDUCATION
Mercredi 10 décembre 2014
La séance est ouverte à neuf heures quarante.
(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la Commission)
La commission examine, sur le rapport de M. Pascal Deguilhem, le projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, habilitant le Gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer dans le droit interne le respect des principes du code mondial antidopage (n° 2297).
Les habilitations du Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance en application de l'article 38 de la Constitution constituent un exercice contraint pour le Parlement puisque seul le Gouvernement peut en avoir l'initiative et en définir le champ, comme le Conseil constitutionnel l'a confirmé dans une décision du 20 janvier 2005. Par conséquent, nos possibilités d'amender le texte restent limitées. Notre rapporteur a toutefois mis à profit l'examen de ce projet de loi pour analyser dans le détail le dispositif actuel de lutte antidopage ainsi que les évolutions figurant dans le nouveau code mondial. Nous avons d'ailleurs eu le plaisir de nous entretenir à ce sujet le 14 novembre dernier avec Sir Craig Reedie, président de l'Agence mondiale antidopage. Nos collègues Marie-George Buffet, Valérie Fourneyron, Pascal Deguilhem et moi-même avons assisté à cet entretien.
En préambule, je souhaiterais rassurer les parlementaires ici présents puisque, à l'issue de l'examen de mon rapport par notre Commission, le Gouvernement nous laissera consulter son projet d'ordonnance.
La France a toujours été l'un des pays les plus volontaristes en matière de lutte contre le dopage. Plusieurs étapes législatives se sont succédé à cet égard. Dès 1965 fut adoptée la loi Herzog, du nom du ministre des sports de l'époque, qui réprimait l'usage des produits stimulants dans le cadre de compétitions sportives. Puis le ministre Bambuck, en faisant adopter la loi de 1989, a permis de franchir un pas décisif dans la politique antidopage. Enfin, en 1999, sous la responsabilité de notre collègue Marie-George Buffet, fut votée une grande loi, dans le prolongement d'une affaire qui avait profondément marqué le sport français : l'affaire Festina qui éclata lors du Tour de France de 1998. La loi de 1999 a permis la création du Conseil de prévention et de lutte contre le dopage qui se transformera plus tard en Agence française de lutte contre le dopage (AFLD). La ratification par la France, sous l'égide de l'Unesco, de la Convention internationale de lutte contre le dopage en janvier 2007 a traduit la nécessité de mener ce combat éthique de façon harmonisée au niveau international.
Aujourd'hui, notre pays, qui dispose de plusieurs représentants au sein de l'Agence mondiale antidopage (AMA) – parmi lesquels notre collègue Valérie Fourneyron, qui en préside le comité Santé, Médecine et Recherche –, doit saisir l'occasion que constitue l'adoption du nouveau code mondial antidopage pour faire évoluer sa politique de lutte contre le dopage. Ainsi que vient de le rappeler le président Bloche, nous avons auditionné à l'Assemblée nationale Sir Craig Reedie, le président de l'AMA, qui nous a rappelé la place de la France en la matière.
Bien sûr, le Gouvernement n'a pas attendu la révision du code mondial pour prendre des mesures importantes, puisqu'il a notamment instauré en 2012 le passeport biologique. Si l'application progressive de ce dispositif a posé des difficultés, et si l'on mesure encore mal aujourd'hui le nombre d'athlètes concernés, il n'en constitue pas moins un outil important pour suivre les variables biologiques des sportifs et repérer ceux d'entre eux qui pourraient éventuellement se doper.
Cela étant, le code mondial antidopage, qui a été récemment révisé, comporte des dispositions susceptibles de rendre la lutte contre le dopage – essentiellement fondée sur les contrôles sanguins et urinaires – plus intelligente et plus ciblée encore. Outre le fait que la France se soit engagée politiquement à l'égard des autres États à transposer ce texte en droit interne, et outre l'entrée en vigueur de ce nouveau code dès le 1er janvier 2015, c'est la pertinence de ses dispositions qui justifie leur transposition rapide, par voie d'ordonnance, dans le code du sport. Sans cela, nous mettrions en difficulté notre Agence française de lutte contre le dopage. Or la France ne saurait être en retrait sur la scène internationale en matière de lutte contre le dopage. Ce serait un mauvais signal envoyé à des pays moins avancés en ce domaine.
Le code mondial antidopage comporte plusieurs dispositions nouvelles tendant à renforcer l'efficacité de la prévention et de la répression du dopage.
Tout d'abord, les compétences des organisations nationales antidopage, telles que l'AFLD, se trouvent étendues : l'AFLD pourra désormais effectuer des contrôles au cours des manifestations sportives internationales, mais en dehors du site sur lequel elles se déroulent. Si une telle mesure peut prêter à discussion, elle semble néanmoins nécessaire tant il est difficile d'obtenir une harmonisation complète des règles applicables entre les différentes fédérations internationales, les fédérations nationales et notre agence. Une telle disposition permettra donc de remédier à la mauvaise volonté dont peuvent faire preuve certaines fédérations internationales lorsqu'il s'agit de laisser des organisations antidopage diligenter des contrôles supplémentaires dans le cadre des compétitions qu'elles organisent.
Ensuite, le nouveau code mondial antidopage met l'accent sur le renseignement, la réalisation d'enquêtes, le partage d'informations et la mise en réseau des différents acteurs de la lutte antidopage. Nous sommes aujourd'hui à un tournant dans la lutte contre le dopage : au contrôle direct, fondé sur des analyses biologiques – 11 000 environ ont été réalisées en 2013 – mettant en évidence la présence d'un produit dopant, va succéder un contrôle indirect, fondé sur des moyens de preuve différents, parmi lesquels le renseignement tient une place fondamentale. Du reste, l'AFLD vient de recruter un enquêteur issu de la police nationale.
Enfin, la répression du dopage évolue pour mieux protéger le sportif, dès son plus jeune âge, de lui-même et de son entourage. Une nouvelle infraction est créée, qui interdit au sportif de s'associer à des personnes ayant enfreint les règles antidopage. Les vrais tricheurs, ceux qui violent intentionnellement ces règles, se verront appliquer des sanctions disciplinaires plus lourdes. À l'inverse, les sportifs qui auront apporté une aide substantielle à la découverte d'une infraction pourront voir leurs sanctions réduites. Pour adapter la répression à la nature même du dopage, qui évolue sans cesse, mais aussi pour tenir compte du temps que peut prendre une enquête, le délai de prescription passe de huit à dix ans.
Le code mondial antidopage, qui a été élaboré avec l'aide d'un cabinet d'avocats américains, est commun à 177 pays. Il doit donc nécessairement être adapté à la diversité des droits des États. Aussi, dans le cadre de la transposition qui fait l'objet du présent projet de loi, nous avons, dans une certaine mesure, la faculté d'adapter ces dispositions à notre tradition juridique et à nos principes, notamment constitutionnels.
Un point particulier de la transcription fait d'ailleurs encore débat : la possibilité, prévue par ce nouveau code, d'effectuer des contrôles, c'est-à-dire des prélèvements sanguins et urinaires, « à tout moment et en tout lieu ». Au regard du droit en vigueur, l'adoption d'une telle disposition aurait pour effet de permettre aux autorités antidopage de diligenter des contrôles nocturnes, entre 21 heures et 6 heures du matin, au domicile d'un sportif. Une telle possibilité est contraire au principe constitutionnel d'inviolabilité du domicile. D'ailleurs, même en droit pénal, les perquisitions nocturnes ne sont possibles que pour des infractions particulièrement graves, telles que des actes de terrorisme ou relevant de la criminalité organisée. Cette disposition contrevient également au principe de respect de la vie privée et familiale, garanti par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme (CEDH), de sorte que la France, si elle appliquait une telle mesure, pourrait se voir condamnée par la Cour européenne de Strasbourg. C'est pourquoi le Conseil d'État, dans son avis du 26 juin 2014, a considéré que la transposition de cette disposition n'était possible que si le contrôle en cause s'effectuait avec le consentement du sportif concerné. D'après les informations dont je dispose, le Gouvernement souhaite conditionner ces contrôles nocturnes à l'accord du sportif mais aussi à l'existence d'une forte suspicion à son égard : il ne s'agirait donc pas de contrôler l'ensemble des sportifs de cette façon. Non seulement le dispositif envisagé semble proportionné mais en outre, il pallie l'une des lacunes du droit actuel, qui laisse les sportifs libres de prendre des produits dopants pendant la nuit, indétectables le lendemain matin. C'est notamment le cas de l'hormone de croissance ou de faibles doses d'EPO.
Globalement, la transposition du code mondial antidopage devrait contribuer à renforcer l'efficacité de la lutte contre le dopage, à condition toutefois que l'AFDL dispose de moyens financiers et humains suffisants pour être en mesure d'appliquer ces nouveaux dispositifs.
Les produits ou méthodes de dopage progressant chaque jour et conservant toujours une avance sur la recherche en matière de détection, nous ne pouvons nous permettre de prendre du retard en la matière. Toutes les personnes que nous avons auditionnées – qu'elles appartiennent au milieu sportif, au monde scientifique ou au champ universitaire – considèrent ce texte comme allant dans la bonne direction. Elles nous ont d'ailleurs adressé des propositions visant à consolider le projet d'ordonnance sur le plan juridique et à améliorer l'efficacité de la lutte contre le dopage.
Je vous remercie pour la clarté et la pédagogie de votre présentation, monsieur le rapporteur.
Ce texte d'ordre technique ne devrait pas poser de difficultés à notre commission puisqu'il a été adopté à l'unanimité au Sénat et fait l'objet d'un large consensus. Il permettra à la France de respecter les règles et principes du code mondial antidopage.
Si nous connaissons tous l'historique de la lutte mondiale contre le dopage, depuis la première convention internationale signée à Strasbourg en 1989 et la création de l'Agence mondiale antidopage en 1999, il s'agit à présent de poursuivre la rationalisation et l'harmonisation, à l'échelle mondiale, des règles de lutte contre toute forme de dopage. D'où la troisième modification apportée au code mondial antidopage depuis son élaboration en 2003, que devront respecter l'ensemble des fédérations sportives internationales et les agences de lutte contre le dopage des différents pays signataires.
La France, qui est membre de l'agence mondiale depuis l'origine, s'honore encore une fois à se montrer exemplaire en termes d'éthique et de déontologie en transposant ce nouveau code en droit interne. Dans un souci de célérité, le texte qui nous est présenté tend à habiliter le Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance, comme ce fut le cas pour la transposition de la deuxième modification de ce code. Les dispositions nouvelles de ce code mondial, très techniques, doivent en effet entrer en vigueur au 1er janvier 2015.
Plusieurs d'entre elles nécessitent une intervention législative. Sans les reprendre toutes ici, je tiens à souligner l'intérêt que présente cette nouvelle doctrine antidopage : celle-ci met l'accent sur les enquêtes et le recours au renseignement, prend en compte tout l'environnement du sportif, durcit les sanctions applicables et implique davantage les fédérations nationales dans cette lutte antidopage.
Je m'attarderai également sur les trois dispositions de ce texte qui sont susceptibles d'être contraires à nos principes constitutionnels – le Gouvernement semble cependant prêt à apporter une réponse satisfaisante.
La première d'entre elles, qui prévoit que le sportif doit être disponible pour subir des contrôles antidopage « à tout moment et en tout lieu », posait le problème des contrôles susceptibles d'être effectués entre 21 heures et 6 heures du matin. Ces contrôles ne devraient donc être possibles qu'avec l'autorisation du sportif, et se limiteraient à un prélèvement d'échantillon afin de garantir un juste équilibre entre le droit à l'intimité du sportif et la lutte antidopage. Il sera nécessaire de veiller au contenu de la future ordonnance, comme le préconise le Conseil d'État. Deuxième point, la compétence reconnue par le code mondial antidopage au tribunal arbitral du sport ne sera pas retranscrite dans l'ordonnance. Enfin, troisième et dernier point, les sanctions prévues par le code mondial devront s'entendre comme des sanctions maximales afin d'éviter toute contradiction avec le principe d'individualisation des peines.
Le Gouvernement s'est engagé au Sénat à présenter devant la représentation nationale le texte de l'ordonnance, dès qu'il sera connu, afin de la rassurer sur ces trois points. Au nom de l'Assemblée nationale, j'ai siégé au sein du comité de préfiguration du profil biologique de l'AFLD et ai ainsi assisté à l'élaboration du profil biologique que le rapporteur mentionne dans son rapport. J'ai ainsi pu mesurer à quel point l'instauration de tels dispositifs de lutte antidopage était complexe. Tout ce qui permet de conforter l'éthique dans le sport doit être fait. Les techniques de dopage s'affinent. Les trafics aussi. C'est donc pour nous un devoir que de nous conformer aux règles mondiales dans cette lutte. Les législations nationales sont certes nécessaires mais c'est désormais des échelons mondial et européen que relève la compétence en matière de lutte antidopage, dans le cadre des grands événements internationaux.
Au-delà du sport professionnel sans cesse pointé dans ces affaires, c'est désormais le sport amateur qui est menacé. Or le sport, présenté comme un facteur de bonne santé, ne doit pas devenir paradoxalement, à cause du fléau du dopage, un problème de santé publique.
C'est pourquoi le groupe SRC est favorable à l'adoption des mesures proposées.
Une fois n'est pas coutume, nous examinons un projet de loi qui ne soulève pas de difficultés particulières ni d'opposition manifeste de la part du groupe UMP. Certes, nous ne sommes généralement pas favorables à la procédure des ordonnances qui prive le Parlement de son rôle de législateur – même si nous pourrons sans doute lire l'ordonnance une fois sa rédaction achevée. Dans ce contexte précis, compte tenu de l'urgence des délais impartis – le code mondial antidopage entrant en vigueur à compter du 1er janvier 2015 – ainsi que de la technicité des mesures à prendre – le code mondial ayant fait l'objet de 2 269 modifications –, on peut comprendre que le Gouvernement souhaite légiférer par voie d'ordonnance pour transposer cette nouvelle version du code mondial antidopage qui fut adoptée lors de la quatrième conférence mondiale sur le dopage dans le sport à Johannesburg en novembre 2013.
Le dopage est un fléau majeur pour l'éthique du sport, pour l'équité des compétitions et pour la santé des sportifs – qu'ils soient amateurs ou professionnels, jeunes ou confirmés. La France a toujours mené une politique active de lutte contre le dopage et a joué en la matière un rôle précurseur lorsqu'elle a créé son agence de lutte contre le dopage. Celle-ci, qui bénéficie d'un certain nombre de pouvoirs, n'est cependant pas dotée de moyens suffisants pour mener à bien sa mission.
Cela étant, la lutte contre le dopage doit s'effectuer au niveau mondial. Il nous faut oeuvrer en harmonie et en coopération avec tous les autres pays et avec le mouvement sportif, tant au niveau national que mondial, qu'il s'agisse des organisations sportives, des fédérations sportives ou des agences de lutte contre le dopage. Il convient de favoriser les échanges d'informations et d'adapter sans cesse notre cadre juridique aux nouvelles pratiques de dopage. De ce point de vue, les mesures visant à allonger de huit à dix ans le délai de prescription des sanctions disciplinaires, à élargir l'échelle des sanctions – notamment pour l'entourage, parfois fautif, des sportifs – ou encore à favoriser la collecte d'informations vont dans le bon sens.
Il est un point à l'égard duquel il nous faut cependant rester vigilants : les sportifs bénéficient des droits et garanties qui sont accordés à toute personne humaine. Or la possibilité, prévue par le code mondial d'antidopage, d'effectuer des prélèvements nocturnes au domicile d'un sportif est contraire aux principes constitutionnels d'inviolabilité du domicile et de respect de la vie privée. Une application littérale de ce code mondial pourrait donc poser un problème de respect des garanties et droits dus à toute personne humaine, fût-elle un sportif.
Notre commission partage une vision commune en matière de lutte contre le dopage, véritable fléau pour la santé, pour l'éthique et pour le sport. Car enfin, quel plaisir peut-on bien trouver à une compétition internationale si, dès qu'un vainqueur est récompensé, on se demande s'il ne s'est pas dopé ? Fléau aussi parce que le dopage active les réseaux mafieux. Le groupe RRDP approuve donc les mesures proposées. Il souhaiterait néanmoins lui aussi avoir accès au texte du projet d'ordonnance que fournira le Gouvernement.
Le texte que nous examinons ce matin témoigne avant tout du chemin parcouru depuis la création de l'Agence mondiale antidopage. C'est en 1999 que quinze ministres des sports de l'Union européenne, à l'initiative de la France, se sont rendus au Comité international olympique à Lausanne pour lui demander de s'engager dans la lutte contre le dopage afin que soit reconnue la double responsabilité des États et du mouvement sportif dans cette lutte. Or, aujourd'hui, le combat est loin d'être gagné, comme l'illustrent les affaires qui agitent la Fédération russe et la Fédération internationale d'athlétisme. De même, des sportifs français ont fait l'objet de contrôles ayant donné lieu à des résultats positifs dans une période récente. Le code mondial antidopage est appliqué de manière très inégale selon les pays et il reste encore des progrès à réaliser en la matière. Il convient néanmoins de mesurer les avancées concrètes qui ont été accomplies ainsi que la prise de conscience internationale à laquelle nous assistons, plaçant au coeur de la pratique sportive le respect de l'intégrité physique et psychique des individus ainsi que le respect des règles.
Le calendrier de transposition de ce code mondial étant contraint, il nous est demandé d'habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance. Je le regrette sur un sujet aussi complexe, touchant aux droits et aux devoirs de la personne, qui aurait mérité un débat et la faculté pour les parlementaires d'amender, dans les limites permises par la nécessité de transposer un texte international. Les dispositions proposées sont positives pour la plupart. Sont notamment prévus l'allongement du délai de prescription, des actions disciplinaires, l'interdiction de s'associer à une personne faisant l'objet d'une sanction, l'incitation à une meilleure coopération entre les fédérations et les organisations nationales de lutte contre le dopage et l'extension du rôle de l'AFLD.
Permettez-moi néanmoins de m'arrêter sur deux mesures qui me posent problème. En l'état actuel, la loi française repose sur la prévention et sur le contrôle positif : le législateur a en effet considéré que la lutte contre le dopage revêtait un caractère spécifique et que le sportif était avant tout victime d'un système et qu'il ne devait donc pas faire l'objet de sanctions pénales mais bien de sanctions disciplinaires sportives, telles que la suspension ou l'interdiction de pratiquer son sport pendant une période donnée. Il est vrai que l'affaire Armstrong a montré les limites de ce système de contrôle – surtout lorsqu'il y a des complicités au plus haut niveau de certaines fédérations sportives. Et c'est parce que la méthode américaine a permis de confondre ce cycliste à partir d'enquêtes et de témoignages qu'une telle démarche a été retenue dans le code mondial antidopage. Ce n'était pourtant pas la démarche du législateur français. Convient-il de maintenir une discipline sportive ou plutôt de nous orienter vers des sanctions pénales ? Je reste pour ma part convaincue que le sportif est prisonnier d'un système et qu'il convient par conséquent d'en rester à la sanction sportive.
Ma deuxième observation porte sur les sursis. Nous nous trouvons face à une activité fondée sur la compétition. Il convient donc de bien encadrer le recours aux témoignages et aux dénonciations afin d'éviter toute dérive.
Une autre disposition qui m'interpelle est celle qui prévoit que tout sportif peut être tenu de fournir un échantillon à tout moment et en tout lieu, donc y compris entre 21 heures et 6 heures du matin. Comment allons-nous procéder pour faire évoluer le code du sport dans le respect du principe constitutionnel d'inviolabilité du domicile ? Le rapporteur a souligné que le pouvoir de contrôle de l'AFLD était très encadré. On a effectivement toujours cherché à respecter une certaine proportionnalité entre les enjeux de la lutte contre le dopage et la protection des droits fondamentaux. Or ce principe de proportionnalité n'est-il pas remis en cause en l'occurrence ? J'en entends certains objecter que les sportifs pourraient se doper la nuit. Mais un dealer peut aussi cacher de la drogue avant que la police n'arrive à six heures du matin à son domicile. La remise en cause du principe d'inviolabilité du domicile ne me paraît donc pas justifiée. Certes, le rapporteur nous indique que le Gouvernement entend encadrer très strictement cette entorse au principe en recueillant l'autorisation du sportif. Mais alors, quelle sera l'efficacité de ces visites nocturnes ?
Enfin, le combat contre le dopage vise à protéger les sportifs : il tend à éviter la triche mais aussi à les empêcher de nuire à leur propre santé. Est-il acceptable que le sportif ne soit pas considéré comme un citoyen à part entière et que l'on déroge en conséquence à des principes constitutionnels pour le contrôler alors que la France n'a plus à faire la preuve de sa volonté de mener ce combat ?
La lutte contre le dopage répond à un double impératif. Elle correspond tout d'abord à un objectif éthique, puisqu'il s'agit de préserver les valeurs du sport et le sens même de l'effort, sa vérité, comme celle de la performance sportive. Elle se justifie également par la poursuite d'un objectif de santé publique puisque le dopage peut mettre en danger la vie ou la santé de celles et ceux qui y recourent, avec ou sans leur consentement.
La lutte contre le dopage doit également répondre à une double exigence méthodologique. Elle ne peut s'inscrire que dans un cadre international et l'arsenal législatif et réglementaire doit sans cesse évoluer pour combattre le plus efficacement possible l'inventivité sans limites des tricheurs.
Face à la persistance du dopage, et aux nouvelles dimensions qu'il prend, le Gouvernement a déposé au Parlement un projet de loi visant à mettre notre droit en conformité avec la troisième version du code mondial antidopage, adoptée lors de la quatrième conférence mondiale sur le dopage dans le sport qui s'est tenue à Johannesburg en novembre 2013. Les modifications proposées visent à renforcer l'efficacité du contrôle et à élargir la gamme des sanctions, dans le respect du principe de proportionnalité.
Notre groupe salue ces modifications comme autant d'actions utiles et pertinentes pour lutter contre le dopage : la prise en compte des preuves indirectes est facilitée, le partage d'informations est développé, la coopération entre les fédérations sportives et les institutions intervenant dans la lutte contre le dopage est améliorée et un pouvoir d'enquête propre est conféré à l'Agence mondiale antidopage.
En outre, nous nous réjouissons que le délai de prescription des sanctions disciplinaires soit allongé et que les sanctions soient alourdies, que les pouvoirs de contrôle des organisations nationales antidopage soient renforcés tout comme la lutte contre les complicités ou les systèmes organisés de dopage.
En revanche, nous ne pouvons que regretter le recours aux ordonnances. Cette méthode prive malheureusement le Parlement d'un débat approfondi sur cette question essentielle, les mesures à prendre ayant des conséquences significatives en matière de libertés publiques.
Néanmoins, l'adoption sans modification et à l'unanimité du projet de loi par la nouvelle majorité sénatoriale démontre que le Gouvernement a su apporter les indications appropriées quant aux mesures qui figureraient dans l'ordonnance, ce qui nous semble rassurant.
Nous regrettons enfin que le dopage fasse l'objet d'un projet de loi spécifique, au lieu d'être traité dans le cadre d'une grande loi qui aurait porté sur toutes les dimensions du sport : la gouvernance, le financement et l'économie du sport, l'infrastructure et les équipements, l'emploi sportif, le sport professionnel et amateur, le rôle du sport comme vecteur d'instruction, d'éducation et de cohésion sociale, le développement de nouvelles pratiques sportives, le parcours des sportifs, leur formation et leur reconversion, et la lutte contre le dopage.
Pour autant, nous considérons que le code mondial antidopage, dans la nouvelle rédaction qu'il s'agit de traduire en droit interne, renouvelle et renforce les moyens de la lutte contre le dopage et permet aux pouvoirs publics de ne pas être en retrait face à cet enjeu sanitaire et sportif majeur. Aussi, nous approuverons ce projet de loi.
Je veux à mon tour souligner l'importance de la lutte contre le dopage et, surtout, la nécessité d'assurer, dans les clubs, une formation et une information des parents et des jeunes pratiquant un sport. La France est leader en matière de lutte contre le dopage. Aussi souhaiterais-je savoir si la transposition des principes du code mondial antidopage dans notre droit interne entraînera une évolution du niveau des sanctions. Peut-être pourriez-vous, monsieur le rapporteur, établir sur ce point une comparaison avec l'Allemagne, où une loi entièrement consacrée à la lutte contre le dopage devrait être prochainement adoptée, qui durcit la législation applicable en la matière en prévoyant la mise en cause pénale des sportifs ainsi que des peines de prison en cas de délit de possession de produits dopants.
La lutte contre le dopage nous rassemble, au-delà des clivages politiques, tant ses enjeux éthiques et de santé publique sont importants. Je souhaiterais savoir quel jugement notre rapporteur porte sur la nature des contrôles prévus dans le texte : seront-ils véritablement efficaces ? Certes, il faut respecter les libertés publiques et les principes constitutionnels, mais ce qu'attendent les sportifs, les amateurs de sport et les citoyens, ce sont des contrôles antidopage véritablement efficaces.
Les ministres allemands de la justice et de l'intérieur ont présenté, le mois dernier, un projet de loi sanctionnant d'une peine pouvant aller jusqu'à trois ans de prison les sportifs allemands de haut niveau coupables de s'être dopés. Jusqu'à présent, les sportifs concernés n'étaient passibles d'aucune sanction pénale ; ils n'encouraient qu'une suspension, prononcée par les tribunaux sportifs. Outre les peines d'emprisonnement, le texte prévoit des amendes ainsi que la confiscation des prix reçus au titre des performances accomplies grâce au dopage.
La France semble, quant à elle, accorder une plus grande attention à la dimension préventive de la lutte contre le dopage, et je m'en félicite. Des antennes médicales de prévention du dopage ont ainsi été mises en place à partir de 2006.
Monsieur le rapporteur, que pensez-vous de l'initiative allemande, qui témoigne d'un véritable durcissement de la législation antidopage outre-Rhin ? En aggravant ainsi les sanctions encourues par les sportifs, on risque d'en faire des boucs émissaires. Or, comme le dit la présidente de l'association des victimes de dopage, de nombreux intérêts sont en jeu dans le dopage. Nous avons donc besoin d'un dispositif qui permette de détruire les réseaux, de rendre les structures visibles et d'en punir les responsables. La création d'une nouvelle infraction de complicité de trafic de substances ou de méthodes dopantes visant l'entourage des sportifs permettra-t-elle, selon vous, d'identifier et de démanteler ces réseaux illégaux dont les sportifs sont les premières victimes ? D'autres dispositions du code mondial antidopage vont-elles également dans ce sens ?
La lutte contre le dopage ne suscite pas de débat : c'est un impératif éthique et sanitaire. Si elle nécessite que l'on y consacre des moyens appropriés, certains de ces moyens suscitent des interrogations au regard du droit français, qu'il s'agisse de l'automaticité des sanctions ou de la disponibilité des sportifs pour les contrôles. J'en viens à ma question. Une meilleure reconnaissance des autorisations d'usage à des fins thérapeutiques (AUT) ne risque-t-elle pas de faire des sportifs de haut niveau des grands malades ? Je pense, par exemple, aux asthmatiques du Tour de France... Par ailleurs, comment concilier cette mesure avec le secret médical ? Peut-on envisager la levée de ce secret pour les sportifs de haut niveau ?
Mon intervention concerne la prévention du dopage sous l'influence de l'entourage. Le code mondial antidopage précise bien que le personnel d'encadrement ne peut utiliser ou posséder une méthode ou un produit interdits. Se pose donc la question du dopage des jeunes sportifs, notamment des mineurs. C'est pourquoi j'insiste sur la nécessité de prévenir le dopage, non seulement dans les établissements scolaires, mais aussi dans les centres de formation.
La diffusion par la chaîne publique allemande ARD d'un documentaire sur l'athlétisme russe, intitulé « Dopage confidentiel. Comment la Russie fabrique ses vainqueurs », a incité le ministre de l'intérieur allemand à annoncer l'élaboration d'un projet de loi prévoyant jusqu'à trois ans de prison pour les sportifs de haut niveau allemands coupables de s'être dopés. En France, seule la détention, et non l'utilisation, de substances ou de méthodes interdites est passible d'une sanction pénale, en l'espèce une amende de 3 750 euros et une peine d'emprisonnement d'un an. Autant dire que ces peines ne sont jamais prononcées. Au demeurant, elles représentent bien peu au regard des enjeux de la carrière d'un sportif de haut niveau. Comment se situe la transposition française de cette convention internationale par rapport aux autres initiatives législatives nationales et va-t-elle suffisamment loin ?
Mes chers collègues, j'ai pris bonne note de vos remarques. Je vais donc écrire dès aujourd'hui à Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, pour lui exprimer notre souhait de l'accueillir ici même afin qu'il nous présente, le moment venu, l'ordonnance préparée par le Gouvernement.
Les préoccupations exprimées portent, pour l'essentiel, sur l'équilibre qu'il nous faut trouver entre sanction disciplinaire et sanction pénale. M. de Mazières vient de rappeler que nous disposons d'un outil pénal – même si celui-ci n'est jamais utilisé. Dès lors, on peut s'interroger sur l'opportunité de prévoir des sanctions du type de celles que l'Allemagne s'apprête à adopter. En effet, et je rejoins Mme Marie-George Buffet sur ce point, il faut prendre garde à ne pas faire du sportif le grand délinquant qu'il n'est pas. Hélas, les enjeux financiers de la performance sportive sont tels que le sportif de haut niveau se retrouve souvent entouré de personnes liées au trafic de produits ou de méthodes interdits. Des dispositions adaptées à la lutte contre ce phénomène doivent donc être prises par le législateur, et c'est précisément un des objets de la transposition dans notre droit du code mondial antidopage.
Cette transposition tente de parvenir à un juste équilibre. À cet égard, peut-être la sanction financière du sportif devrait-elle être davantage appliquée, comme nous l'ont indiqué plusieurs des personnes que nous avons auditionnées. Certes, nous allons renforcer la sanction sportive, puisque la durée de la suspension sera portée de deux à quatre ans. Mais une suspension de quatre ans signifie la fin de sa carrière pour le sportif concerné ; la sanction est donc suffisamment lourde. En revanche, il nous faut concentrer nos efforts, notamment les moyens d'enquête – et c'est l'objet de cette transposition – sur les membres de l'entourage qui ont conduit le sportif à se retrouver prisonnier d'un engrenage. Bien entendu, il ne s'agit pas d'abandonner le profilage biologique ni les contrôles sanguins et urinaires. On ne parle, la plupart du temps, que de la partie émergée de l'iceberg, des faits dont la presse se fait l'écho, en oubliant que l'organisation de contrôles dans certaines salles de sport permettrait de révéler un dopage et un trafic de produits dopants qui sont trop souvent ignorés aujourd'hui. Il en va pourtant de la santé publique.
Encore une fois, la transposition du code mondial antidopage dans notre droit interne respecte un juste équilibre. Il nous appartiendra, en tant que législateur français, d'aller éventuellement plus loin dans le cadre d'une loi sur le sport. Quoi qu'il en soit, il importe, dans le cadre de cette transposition, d'agir dans le respect de la vie privée du sportif, avec le souci qu'il soit traité comme n'importe quel autre citoyen, sauf en cas de très grande suspicion. À ce propos, je veux dire à Marie-George Buffet que je vois mal l'AFLD diligenter un contrôle nocturne. Elle pourra toutefois en faire la demande. Dans ce cas, un refus de la part du sportif ne fera que renforcer les soupçons qui auront conduit l'agence à formuler cette demande, laquelle, je le rappelle, ne pourra intervenir que si des enquêtes préalables ont mis en évidence la nécessité de procéder à un tel contrôle.
La question du tribunal arbitral du sport, qui a été soulevée par Brigitte Bourguignon, est réglée : cette disposition ne sera pas transposée en droit français.
Par ailleurs, nous avons été nombreux à déplorer que le Gouvernement engage la procédure accélérée sur ce texte, mais la transposition dans notre droit des dispositions du code mondial antidopage est aujourd'hui nécessaire.
Enfin, Dominique Nachury a évoqué les autorisations d'usage à des fins thérapeutiques. La proportion d'asthmatiques est trois fois plus élevée chez les sportifs que dans la population générale – je suis d'ailleurs de ceux qui développent un asthme d'effort dans le cadre de leur pratique sportive. C'est une donnée à prendre en compte. En tout état de cause, il s'agit ici de simplifier les démarches des sportifs de haut niveau. Je pense que la transposition du code mondial est de nature à faciliter les choses sous cet aspect, tout en prenant en compte la nécessaire évolution des méthodes de lutte contre le dopage et des sanctions qui doivent être prises à l'encontre de celles et ceux qui transgressent les règles communes.
Je n'ai pas répondu à l'ensemble des questions, mais je m'efforcerai de le faire lors de mon intervention en séance publique.
La Commission en vient à la discussion de l'article unique.
Article unique : Habilitation à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer le respect dans le droit interne des principes du nouveau code mondial antidopage
La Commission n'étant saisie d'aucun amendement, elle adopte l'article unique du projet de loi.
Je me suis abstenue, car je n'ai pas compris à quel moment nous pourrons prendre connaissance de l'ordonnance.
Elle nous sera bien entendu présentée avant sa signature. J'ajoute que j'ai insisté auprès du Gouvernement pour qu'elle traduise bien l'esprit qui nous anime et que les précautions nécessaires soient prises pour que sa rédaction ne recèle aucune ambiguïté.
La Commission adopte l'ensemble du projet de loi.
Je vous informe que ce projet de loi sera examiné en séance publique mercredi 17 décembre après-midi.
Puis la commission examine, sur le rapport de M. Michel Françaix, la proposition de loi portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse (n° 2224).
En ce qui concerne la gouvernance de l'Agence France-Presse, la proposition de loi s'inspire des préconisations du rapport sur l'avenir de l'Agence remis par notre collègue rapporteur Michel Françaix au Premier ministre au printemps 2014. Mais elle comporte également des dispositions destinées à moderniser l'organisation du système de distribution de la presse papier, définie en 1947 dans la loi Bichet et qui connaît aujourd'hui des difficultés persistantes, et à créer un nouveau statut juridique, celui d'entreprise citoyenne de presse d'information.
La presse est confrontée à une mutation économique et technologique sans précédent. La transition en cours de la presse imprimée vers la presse numérique ne fera pas disparaître le papier, mais le modèle économique de la presse papier est heurté de plein fouet par une crise structurelle dont les effets s'amplifient depuis quelques années : érosion et vieillissement continus du lectorat, effondrement des ventes et des autres recettes liées à la diffusion – publicité, annonces –, déstabilisation de la principale messagerie de presse, Presstalis, réduction régulière du nombre de points de vente. Parallèlement, la presse numérique, quoiqu'en pleine croissance, demeure une source de revenus mineure pour la plupart des éditeurs de presse.
Cette crise économique se double d'une crise de confiance, comme le montre le rapport 2014 de l'Observatoire de la déontologie de l'information. De manière générale, les études font état d'une aggravation de la perte de confiance du public dans les médias, comme le montre le baromètre annuel réalisé par TNS-Sofres pour La Croix, si bien que des doutes se font jour tant sur l'avenir économique que sur la mission démocratique de la presse.
Face à ce constat, les rapports qui se succèdent ne cessent d'interroger l'efficacité et la cohérence de la politique de soutien de l'État, mais aussi le comportement des acteurs du secteur face au changement. Depuis deux siècles, le secteur de la presse est marqué par une ambivalence fondamentale : l'information est pensée comme un bien public justifiant l'intervention de l'État, mais elle demeure produite comme une marchandise. Or le marché, à travers la course à l'audience, voire le racolage, tire la qualité vers le bas. Quant à l'État, il régule avec un zèle mollissant et subventionne sans faire preuve d'un discernement suffisant. On n'a pas sanctuarisé les moyens de son ambition.
Ce constat est particulièrement vrai s'agissant de la distribution de la presse papier. Le soutien à la distribution représente l'essentiel des aides publiques à la presse. Or ce soutien porte sur des canaux de distribution qui se concurrencent au lieu de se compléter et qui exigent un effort de rationalisation urgent dans un contexte d'effondrement de la diffusion papier, qu'il s'agisse du portage, du postage, des réseaux de distribution de la presse régionale ou du système coopératif de distribution, où coexistent depuis des années deux coopératives, Presstalis et les Messageries lyonnaises de presse.
C'est pourquoi les transformations doivent s'accélérer pour faire émerger un modèle plus solidaire et plus efficace au plan industriel, son double caractère, idéalement collectif et concrètement marchand, s'étant sédimenté sous la forme d'une tension entre le marché et l'État. Puissions-nous modestement remédier à cette situation !
Le titre Ier constitue un volet de cette nécessaire réforme. Il comporte en effet des aménagements destinés à renforcer la régulation du système coopératif de distribution de la presse vendue au numéro, dans le but d'accélérer la mise en oeuvre des réformes dont le système en crise a besoin pour garantir sa survie à court terme.
Le titre II tend à réformer la gouvernance de l'Agence France-Presse, pour que celle-ci soit mieux protégée et puisse s'inscrire dans la durée. Les dispositions proposées sont la traduction législative de préconisations formulées dans le rapport que j'ai remis au Premier ministre au printemps. D'autres modifications visent à mettre la loi de 1957 portant statut de l'AFP en conformité avec le droit de l'Union européenne.
Quant au titre III, il porte sur la création d'un statut d'entreprise citoyenne de presse d'information. Il s'agit – peut-être est-ce naïf de ma part – de créer les conditions de l'émergence de nouveaux modèles entrepreneuriaux pour les entreprises de presse.
Ni immobilisme, ni grand soir, donc. Il s'agit de faire preuve de pragmatisme pour accompagner la modernisation de la presse. Le statu quo n'est pas une option, et la modernisation n'est pas forcément l'ennemie.
Oui, il y a des anomalies dans le système actuel de distribution de la presse. Ainsi, on ignore pourquoi deux coopératives coexistent depuis des années. Comment les faire travailler ensemble ? Et, si l'on n'y parvient pas, ne faut-il pas songer à les rapprocher l'une de l'autre au point qu'elles ne fassent plus qu'une ? De même, on s'interroge parfois sur l'utilité de maintenir deux instances de régulation. Les dispositions de la partie du texte consacrée à ce sujet, assez technique, visent à permettre la coexistence de la solidarité, de la concurrence et du contrôle. La responsabilité des éditeurs est engagée en la matière. Il est trop facile de dire que la faute incombe à tel ou tel. Pendant des années, les éditeurs ont eu tendance à fixer des prix de distribution inférieurs au prix normal en espérant que les aides de l'État financent ces opérations.
Quant à l'AFP, nous sommes tous d'accord pour considérer qu'il s'agit d'une pépite qui contribue au rayonnement de la France ; elle est une exception culturelle, un vecteur de l'influence française dans le monde. Mais n'oublions pas de l'aider à se prémunir contre la précarité et la paupérisation qui la menacent. L'AFP est, certes, une entreprise unique, mais elle doit également être considérée, pour son développement, comme une entreprise comme les autres. D'un côté, l'entreprise principale doit conserver le statut qui fait son originalité, de l'autre, elle doit pouvoir préparer ses investissements futurs. Qu'en sera-t-il en effet de la vidéo, des nouveaux contenus et des nouveaux usages si ces activités ne peuvent pas être regroupées au sein d'une filiale ? Nous y reviendrons.
Enfin, nous voulons favoriser l'émergence de nouveaux acteurs et leur donner la possibilité de suivre une troisième voie, en s'émancipant du capital et de la recherche pleurnicharde des aides de l'État. Je pense que cette troisième voie peut tout particulièrement exister dans le numérique et dans la presse hebdomadaire régionale. Cependant, la création d'un statut particulier doit être complétée par un volet fiscal qui permette à ces entreprises de trouver des capitaux – même s'il s'agit de sommes modestes. En effet, beaucoup d'entreprises nouvelles ne passent pas le cap des trois années d'existence, faute d'avoir trouvé les capitaux nécessaires. Si nous pouvons les y aider, alors ce type de d'entreprises – qu'on les appelle citoyennes, participatives ou solidaires – auront un avenir.
En conclusion, accélérons la transition en évitant la rupture, et cessons de dire tous ensemble : « L'immobilisme est en marche et rien ne l'arrêtera. » Non, nous pouvons avancer à nouveau !
Nous avons bien compris, monsieur le rapporteur, que le changement, c'est maintenant ! (Sourires.) En tout cas, je vous remercie d'avoir pris l'initiative de cette proposition de loi.
Je souhaite tout d'abord féliciter, au nom du groupe SRC, notre rapporteur, Michel Françaix, pour ce travail, fruit de la mission dont il a été chargé auprès de la ministre de la culture et du rapport sur l'avenir de l'Agence France-Presse qu'il a rédigé dans ce cadre.
Cette proposition de loi est attendue par l'ensemble des professionnels, qu'il s'agisse des mesures relatives à la distribution de la presse, secteur qui connaît une crise importante, des dispositions concernant le statut de l'AFP – notre agence de presse, à laquelle nous sommes très attachés –, ou de la création du statut d'entreprise citoyenne, qui doit permettre de favoriser l'émergence de nouveaux modèles économiques dans le secteur de la presse.
Le dispositif financier des aides publiques à la presse, qui a débuté il y a près de 200 ans, participe de l'histoire de la presse écrite. Pluralisme et diversification sont les maîtres mots dans ce domaine. Il est aujourd'hui nécessaire d'engager un travail de fond pour améliorer le ciblage de ces aides à la presse et accompagner la restructuration de la filière.
S'agissant de la distribution, il s'agit de proposer des aménagements destinés à renforcer la régulation du système coopératif de distribution de la presse. Il est notoire que ce système connaît, à tous les niveaux, une crise de structure qui fragilise les messageries, les dépositaires et les diffuseurs, et met de ce fait en péril l'accessibilité de la totalité de la presse sur l'ensemble du territoire. Dans cette conjoncture où les intérêts fondamentaux de la filière ont été gravement menacés, de profondes réformes ont été entreprises. Leur conception et leur mise en oeuvre ont mobilisé les éditeurs et les acteurs de la distribution, avec le concours actif des pouvoirs publics. Les éditeurs ont accepté de consentir des efforts conséquents, en dépit de leur situation économique très difficile, pour assurer leur exécution. Une restructuration de la filière doit s'amorcer.
La présente proposition de loi aborde ainsi un sujet capital pour la pérennité de l'économie de la presse papier : le renforcement de la régulation de la distribution de la presse. Notre volonté est d'accélérer la transition de ce secteur, tout en évitant la rupture.
En ce qui concerne l'AFP, le texte non seulement assure le sauvetage de l'Agence, mais en fait une agence unique au monde. Pour prendre le virage du numérique, l'AFP, troisième agence de presse mondiale, se doit en effet de réaliser une nouvelle vague d'investissements de nature à lui permettre de proposer des produits diversifiés, innovants et répondant à l'exigence de qualité qui contribue à sa reconnaissance mondiale. Mais cette modernisation doit également se traduire dans ses instances de direction. Par son statut et son histoire, l'AFP est une entreprise d'intérêt national. C'est un fleuron français, doté d'un potentiel de développement international. Il faut donc changer la capacité à prendre les décisions économiques et permettre une gouvernance plus efficace. Trois éléments majeurs sont garantis : absence de licenciements, conservation du statut d'agence généraliste et valorisation de l'identité culturelle française.
Après quatre siècles d'existence, la presse doit se diversifier et se réinventer à travers de nouveaux modèles. Avec le souci permanent de son indépendance, de sa pluralité et de son avenir, le législateur doit favoriser un nouveau modèle entrepreneurial, celui de l'entreprise citoyenne de presse, inspiré des entreprises de l'économie sociale et solidaire. Dans un contexte difficile pour la presse écrite, de nouvelles sources d'information apparaissant sur de nouveaux supports en dehors des circuits classiques, il est indispensable de soutenir la vitalité de la presse d'information politique et générale, qui garantit un traitement professionnel de l'information par ses équipes de journalistes. Les entreprises citoyennes seront plus fortes parce qu'elles réinvestiront leurs bénéfices dans leur activité.
Pour ces différentes raisons, je vous invite, au nom du groupe SRC, à adopter cette proposition de loi qui accompagne avec pragmatisme la nécessaire modernisation de la presse française.
Je félicite, au nom du groupe UMP, Michel Françaix pour son initiative et la qualité de son rapport. Qu'il me permette cependant de lui dire amicalement que ce texte n'est guère révolutionnaire. Mais peut-être ne cherchait-il pas à faire la révolution…
La presse papier rencontre des difficultés dues à une véritable révolution structurelle dont les effets sont sans appel : érosion d'un lectorat vieillissant, effondrement de la vente au numéro, baisse des recettes publicitaires et disparition de nombreux points de vente. Les multiples rapports qui se sont succédé ces dernières années font tous le même constat d'une situation très préoccupante et de la nécessité de réformer en profondeur ce secteur.
Cette proposition de loi a trait tout d'abord à la régulation du système coopératif de distribution de la presse papier, où le besoin de réforme est le plus urgent. En effet, ce secteur est le premier à être fragilisé par le recul de la vente au numéro. De plus, l'avenir du schéma de diffusion de la presse écrite souffre de la difficile entente des différents acteurs et d'un manque de décisions. À ce propos, pouvez-vous nous dire, monsieur le rapporteur, si vous avez eu accès au rapport de M. Alexandre Jevakhoff – dont nous savons qu'il existe mais dont nous n'avons pu prendre connaissance – et, dans l'affirmative, si vous y avez puisé quelque inspiration ?
Il est proposé de renforcer le rôle et les missions du CSMP, tout en les articulant avec l'intervention de l'Autorité de la distribution de la presse (ARDP) qui, depuis sa création par la loi du 20 juillet 2011, a pleinement rempli ses missions et que vous proposez de transformer en autorité administrative indépendante. Espérons que cette sorte de gouvernance à deux têtes permettra de garantir les équilibres à respecter et ne créera pas de contraintes supplémentaires en termes de délais. Des amendements ont d'ailleurs été déposés pour réduire les délais d'homologation des barèmes. La proposition de loi prévoit en effet que le CSMP homologue les barèmes tarifaires des messageries, cette homologation devant ensuite être rendue exécutoire par l'ARDP. L'idée sous-jacente est de rapprocher les tarifs imposés aux éditeurs des coûts réellement supportés par les messageries, d'où l'intervention des acteurs extérieurs que sont le CSMP et I'ARDP.
C'est sur son efficacité que ce dispositif sera jugé, car, nous l'avons tous compris, la rapidité des décisions demeure un élément essentiel. La réforme du système coopératif de la distribution est attendue. La loi Bichet doit rester la véritable « constitution » de ce système, qui consacre bien la liberté de distribution des titres par leurs propres moyens tout en imposant, dans le cas contraire, la solidarité des éditeurs.
Les champs de compétence des instances régulatrices doivent rester les mêmes ; des amendements ont été déposés en ce sens aux articles 3 et 7.
Par ailleurs, le CSMP se voit doter d'une compétence qui lui permettra de rationaliser la distribution sur ce que l'on appelle « le dernier kilomètre », c'est-à-dire le point final de la distribution. Les expériences en cours démontrent qu'il est nécessaire d'utiliser les réseaux de la presse quotidienne régionale (PQR) dans les zones peu denses. De véritables synergies économiques entre les différents réseaux doivent être mises en place pour éviter qu'ils ne se superposent. Nous sommes tous d'accord sur ce point, mais peut-être faut-il en convaincre certains acteurs du secteur.
Enfin, l'accélération de la mise en commun des moyens des messageries est envisagée à l'article 7, puisqu'une société commune de moyens pourrait être créée si le bon fonctionnement de la distribution de la presse le justifie. Doit-on y voir un moyen de pression pour que Presstalis et les Messageries lyonnaises de presse s'entendent sur la mutualisation de leurs moyens ?
L'AFP, qui fait l'objet d'un chapitre de la proposition de loi, voit son mode de gouvernance modifié à travers des dispositions allant dans le bon sens : l'ajout de cinq personnalités qualifiées au sein du conseil d'administration, le respect de la parité et l'allongement du mandat du président de trois à cinq ans. On l'oublie trop souvent, la France jouit, avec l'AFP, d'un géant de l'information.
Une réflexion s'impose sur la création, envisagée au dernier article, d'un nouveau statut d'« entreprise citoyenne de presse d'information ». Il s'agit de reconnaître un statut spécifique aux entreprises de presse d'information politique et générale (IPG) qui affectent une part de leur bénéfice à une réserve statutaire afin d'assurer leur pérennité, ce qui a pu faire penser au système coopératif. Ce nouveau statut, destiné en réalité au secteur numérique, vise à faciliter le lancement et l'émergence de « pure players », tout en restant ouvert à de petites entreprises de presse papier comme les hebdomadaires régionaux. La qualification d'« entreprise citoyenne de presse d'information », séduisante pour l'affichage, ne semble guère appropriée. Le web est le lieu d'exercice d'une nouvelle forme de citoyenneté, mais cette dernière renvoie à un état d'esprit qui peut être partagé par l'ensemble des organes de presse. Nous devons faire preuve de créativité, car l'idée d'instaurer un nouveau statut pour anticiper un éventuel avantage fiscal paraît étrange ; pour le coup, c'est Bercy qui devra être créatif, car on voit mal comment affecter un avantage fiscal à la non-distribution de dividendes. La réserve du groupe UMP pourrait donc porter sur ce point, dont on est en droit de se demander s'il ne correspond pas uniquement à des objectifs de communication. La troisième voie est-elle vraiment utile ? M. Françaix semble lui-même s'interroger à ce sujet.
Quoi qu'il en soit, le groupe UMP ne s'opposera pas à ce texte qui semble donner satisfaction aux différents acteurs.
Nous avons eu, à plusieurs reprises, des discussions sur la nécessité de revoir en profondeur les aides à la presse en sortant d'une approche par type de support, qui n'a plus lieu d'être. Force est de constater qu'il faudra encore faire preuve d'un peu de patience pour cette grande remise à plat…
Je salue néanmoins les avancées de cette proposition de loi, à commencer par le nouveau statut d'entreprise citoyenne de presse d'information. Il permettra aux pure players de se développer en leur assurant une certaine stabilité de financement ; s'il avait vu le jour plus tôt, la regrettable fermeture du Télescope, à Amiens, aurait sans doute été évitée. Ce statut est donc de nature à soutenir le pluralisme en matière d'information, élément capital pour le fonctionnement d'une démocratie. L'émergence de nouveaux éditeurs de presse est trop rare ; j'espère donc que cette mesure apportera un changement.
Je salue aussi la volonté de s'inspirer du modèle de l'économie sociale et solidaire, notamment pour la répartition des bénéfices – vous connaissez l'engagement des Écologistes pour le développement de ce secteur d'avenir. Cela dit, pourquoi réserver ce statut aux seules entreprises de presse en ligne ? Une ouverture à d'autres entreprises de presse est-elle envisagée ? La facilitation d'une reprise par les salariés pourrait intéresser la presse quotidienne régionale ou nationale, qui connaît des difficultés.
Mon groupe souhaite aussi soulever la question de l'élargissement à l'ensemble des entreprises de presse de la procédure d'information aux salariés en cas de difficultés économiques ; d'où un amendement en ce sens.
Par ailleurs, la définition de la presse d'information générale et politique (IPG) reste floue et appelle donc des précisions ; il faudrait que les ministères et les acteurs concernés se mettent d'accord. Pourquoi, au demeurant, réserver le statut visé à la seule presse IPG ?
Enfin, la ministre de la culture s'est exprimée sur les incitations fiscales. Nous espérons que le dispositif prévu, comme d'autres, ne sera pas capté par les grands groupes aux dépens des autres entreprises.
Concernant les dispositions relatives à l'AFP, la proposition de loi va dans le bon sens. Revoir la gouvernance de l'Agence est nécessaire ; cela doit être l'occasion de lui donner plus d'indépendance. Une telle évolution doit aussi être une opportunité pour la moderniser : je pense par exemple au numérique. Aujourd'hui, l'application iPad de l'Agence n'existe qu'en anglais. Afin de permettre à l'AFP de combler son retard numérique et audiovisuel, pourquoi, par exemple, les personnalités qualifiées qui seront appelées à siéger au conseil d'administration ne seraient-elles pas nommées sur proposition du Conseil national du numérique (CNN) et du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) ?
De même, profitons de cette évolution pour rééquilibrer les rapports de force au sein du conseil d'administration (CA), en renforçant par exemple la présence des journalistes. Aujourd'hui le CA est majoritairement composé de représentants des éditeurs de presse papier, premiers clients de l'AFP. Nous défendrons donc des amendements sur la composition du CA, mais aussi du Conseil supérieur de l'AFP, pour les rendre paritaires, renforcer la présence des rédactions et des citoyens et faire nommer certains membres sur proposition du CSA et du CNN.
J'ai aussi des questions sur l'article 12. Sur la définition des missions d'intérêt général (MIG), le flou qui existe ne doit pas servir à détricoter l'Agence ; aussi aimerais-je avoir des garanties à ce propos. Les activités de l'AFP à l'étranger, par exemple à travers sa filiale allemande, ne feraient pas partie des MIG : en ce cas, le risque serait grand de voir les services en Espagne, au Portugal ou ailleurs exclus des MIG. C'est là un réel danger, car l'Agence doit être en mesure de donner une information objective et exhaustive aussi bien en France que dans le reste du monde, et il ne faudrait pas que ces nouvelles dispositions brident son développement à l'international.
Je souhaite aussi relayer les inquiétudes des personnels de l'Agence sur les risques liés à la création d'une filiale technique de moyens. Quelles en seraient les éventuelles conséquences pour le statut des personnels ? Le risque de perte de l'outil technique en cas de problèmes financiers a-t-il été bien mesuré ? Quelles garanties l'État, qui jusqu'à présent avait un rôle de garde-fou, pourra-t-il apporter ?
Enfin, s'agissant des messageries, le renforcement des principes de coopération et d'équilibre financier va dans le bon sens. Les difficultés financières du secteur, avec les conséquences sociales qu'elles engendrent, ne peuvent être occultées. C'est pourquoi il est utile de renforcer la mutualisation et la solidarité ; cela doit aussi contribuer à mieux responsabiliser l'ensemble des parties prenantes. Mais cette mutualisation ne doit évidemment pas se faire au détriment des citoyens ; j'espère donc qu'elle n'aura pas d'impact sur le coût de la presse.
C'est d'ailleurs pour cette raison que je vous proposerai d'ouvrir aussi l'Autorité de régulation de la distribution de la presse, l'ARDP, à un représentant d'une association de consommateurs représentative sur le plan national.
Sur le « dernier kilomètre », si nous accueillons favorablement l'idée d'expérimentations locales – et pourquoi pas « zéro carbone », – cela ne doit pas présager d'éventuelles velléités d'une sous-traitance qui nivellerait par le bas le service rendu.
Je remercie le rapporteur pour son travail de synthèse sur les enjeux du secteur : confrontées à une crise profonde et pénalisées par la faiblesse du réseau de distribution, les coûts d'impression et de diffusion ainsi que l'absence de stabilité et de visibilité financière, les entreprises de presse doivent aussi relever le défi du numérique, et elles sont fragilisées par l'émergence de nouveaux formats plus compétitifs.
La liberté de la presse, son indépendance, son pluralisme, sont intrinsèquement liés à la démocratie. La presse est en effet essentielle à l'équilibre des pouvoirs et à la vitalité du débat citoyen ; il est donc impératif de veiller à ce qu'elle continue d'exercer les missions fondamentales qui sont les siennes, en toute indépendance, tout en s'adaptant aux nouvelles habitudes de nos concitoyens ainsi qu'à un environnement économique, social et culturel bouleversé par de profondes mutations. Tel est l'objectif auquel concourt la proposition de loi, en accélérant la régulation du système de distribution de la presse papier, en adaptant la gouvernance de l'AFP afin de valoriser son savoir-faire à l'échelle mondiale, et en soutenant les acteurs de la nouvelle économie pour favoriser le pluralisme et l'indépendance éditoriale.
Nous aurions aimé, cela va sans dire, que la majorité privilégie une réflexion globale sur un modèle de développement économiquement viable et pérenne pour la presse, et adopte une approche cohérente qui lui permette de réussir son adaptation aux défis du XXIe siècle. Toutefois, si elle ne constitue pas la grande réforme attendue, cette proposition de loi nous semble équilibrée et pragmatique.
Le groupe UDI formulera des propositions constructives pour conforter le rôle singulier de la PQR, principal vecteur d'information du pays et relais le plus proche du citoyen. Nous défendrons en premier lieu un amendement précisant que le champ de compétences du Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP) et de l'Autorité de régulation de la distribution de la presse se limite bien au seul système coopératif. En effet, la loi Bichet de 1947, fondatrice de la distribution de la presse, consacre le libre choix des éditeurs en matière de distribution. Il s'agit de ne pas déroger à ce principe. Nous vous proposerons donc de conforter l'indépendance des réseaux extérieurs, notamment ceux de la PQR, vis-à-vis du CSMP. Dans la même perspective, il conviendra de préciser que les agents de la vente, dépositaires, porteurs de presse et vendeurs-colporteurs de la presse régionale et départementale ne sont pas liés au système coopératif, et ne peuvent de ce fait entrer dans le champ de compétences de la régulation du système coopératif, quel qu'en soit le motif.
Nous soutenons le principe de la création des entreprises citoyennes de presse, mais suggérons d'en modifier l'appellation, qui nous semble impropre et inopportune : la presse est citoyenne par essence, quel que soit son mode de gestion. Aussi proposerons-nous que l'appellation de ces entreprises soit caractérisée par l'investissement et la gestion participatifs, non par leur dimension citoyenne.
Enfin, nous estimons que l'inscription de la notion d'information politique et générale, au sens de l'article 39 bis A du code général des impôts, dans la loi du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse est inadaptée. En effet, cette notion relève soit du code général des impôts, soit du code des postes et télécommunications, et c'est à ce titre qu'elle peut ouvrir droit à des dispositifs dédiés. La création d'une nouvelle catégorie, en concurrence avec les deux périmètres existants, serait de nature à engendrer de la confusion.
Nous espérons que la commission fera preuve d'une attention bienveillante à l'égard de nos propositions, et soutiendrons le présent texte sous réserve que des amendements n'en bouleversent pas l'équilibre.
Je salue le travail du rapporteur, dont l'objectif n'est pas de révolutionner un secteur de la distribution en grande difficulté mais, passez-moi l'expression, de faire office de pompier. De fait, des mesures urgentes s'imposent, et je me limiterai à celles qui visent spécifiquement la presse papier.
Les difficultés rencontrées par celle-ci sont de plusieurs ordres, et les patrons de presse comme les syndicats ne les nient pas. La baisse de la diffusion a atteint 25 % en dix ans ; elle paraît de surcroît inexorable, tant les habitudes de nos concitoyens ont changé, notamment avec le développement des nouvelles technologies. Si le support papier subsistera, tout porte à croire que la baisse de sa diffusion se poursuivra : les professionnels en ont pris acte.
Si l'ensemble du secteur de la presse fait face à des évolutions technologiques, celui de la presse papier s'en trouve bouleversé. Cette situation justifie de nouvelles mesures, parmi lesquelles la réforme du système de distribution, sur laquelle se concentre la proposition de loi. Une meilleure régulation de ce système doit permettre la mutualisation des moyens : cela répondra à l'un des problèmes majeurs du secteur. Dans mon rapport pour avis sur les crédits de la presse dans le projet de loi de finances pour 2015, je suggérais d'ailleurs de conditionner les aides d'État à une meilleure mutualisation du système de distribution, en portant une attention toute particulière aux quotidiens à faibles recettes publicitaires et en accompagnant le secteur sur le plan social.
Enfin, si je partage l'essentiel de vos propositions, monsieur le rapporteur, je reste comme vous convaincu que la presse est indispensable à la vivacité de notre démocratie, et qu'à ce titre elle représente un secteur d'avenir. L'information, au sens large, est au coeur de nos sociétés ; la presse ne peut se réduire à la presse écrite, non plus que celle-ci à la presse papier. Le développement du numérique est donc une chance pour le secteur, mais aussi pour le pluralisme, avec l'arrivée de nouveaux titres et de nouveaux acteurs. Je me félicite, de ce point de vue, de la proposition de troisième voie, qui reste à définir.
Un nouveau modèle émerge, avec lequel les titres de presse existants doivent continuer à vivre afin d'alimenter le débat citoyen, tout en acceptant l'arrivée de nouveaux acteurs, eux aussi indispensables à l'analyse de nos sociétés.
Je salue à mon tour le travail et l'engagement passionné de M. Françaix, dont témoignaient déjà ses précédents rapports.
La crise de la presse est aussi celle de la démocratie : devons-nous jouer aux pompiers, comme cela a été suggéré ? Des mesures urgentes, absentes de la proposition de loi, me semblent en tout cas indispensables, à commencer par un nouveau ciblage des aides, sur le principe duquel nous sommes tous d'accord. Je défendrai donc un amendement à ce sujet.
La messagerie unique est aussi un objectif que nous devons poursuivre : pourquoi cette proposition de loi ne le concrétise-t-elle pas ? Vous observez d'ailleurs, monsieur le rapporteur, que de plus en plus d'organes de presse quittent Presstalis au profit des Messageries lyonnaises. L'aggravation de la situation financière de Presstalis est une menace à court terme pour la diffusion des quotidiens nationaux.
Je salue le renforcement du statut de l'autorité de régulation, qui pourra ainsi jouer son rôle en toute indépendance ; l'homologation des barèmes, qui constitue un véritable renforcement de la régulation de la distribution ; la création, enfin, d'un statut d'entreprise citoyenne de presse d'information, proposition innovante sur laquelle je défendrai aussi un amendement.
S'agissant de l'AFP, la proposition de loi est source d'inquiétudes. À l'appel de FO, de SUD, de la CGT et de la CFE-CGC, les personnels se sont mobilisés aujourd'hui – y compris, d'ailleurs, dans la distribution. Par ce mouvement ils entendent défendre les missions d'intérêt général définies par la loi de 1957 : la recherche d'une information complète et objective et sa mise à disposition – contre paiement – pour les citoyens. Je tiens à souligner la qualité du travail de l'AFP et sa capacité à se moderniser, sur la vidéo par exemple. Mais, suite à la plainte déposée par une agence allemande, la Commission européenne a contraint la France à adopter des « mesures utiles » en faveur de la libre concurrence. D'où la création d'une comptabilité séparée pour les missions d'intérêt général, qui relèveraient d'une agence nationale, les autres missions – en Allemagne et peut-être bientôt au Japon – étant exclues de ce périmètre. La direction de l'Agence nous assure que ces dernières ne représenteraient que 2 à 3 millions d'euros, soit 1 % du budget de l'Agence, mais peut-on imaginer que cette comptabilité séparée inclue à l'avenir de nouveaux champs de compétences, créant ainsi une seconde agence au côté de l'AFP ?
La création de la filiale doit être avalisée par le prochain conseil d'administration. Là encore, on invoque la modernisation de l'Agence et la nécessité d'attirer de nouveaux financements, de la Caisse des dépôts et de Bpifrance en particulier, mais, afin de rassurer Bruxelles, il faudrait aussi, nous dit-on, associer une banque privée. Comment, dans ces conditions, garantir que la filiale ne deviendra pas une nouvelle entreprise ? Vous avez vous-même parlé, monsieur le rapporteur, de plusieurs entreprises. Les personnels, comme la représentation nationale, attaché à l'AFP et à ses missions de service public, doivent avoir un minimum de visibilité.
L'article sur la faillite que l'on modifie au motif qu'il serait inconstitutionnel date pourtant de 1957 ! J'ai donc quelques doutes sur les motifs de la réforme proposée. Quoi qu'il en soit, si le texte était adopté en l'état, le Gouvernement n'aurait plus d'excuse pour ne pas abonder plus largement l'AFP en moyens publics, puisque les problèmes que cela pose au regard des règles communautaires seraient réglés : c'est là le seul élément positif du texte s'agissant de l'Agence.
Ce texte ne constitue pas une révolution, mais une évolution salutaire, notamment sur les messageries. Presstalis, Marie-George Buffet l'a souligné, pâtit de la concurrence avec les Messageries lyonnaises : tout ce qui concourt à assurer son avenir est donc salutaire.
La création de l'ARDP était déjà intéressante ; le statut que lui donne le texte et son pouvoir de réformation des décisions du CSMP ne le sont pas moins.
La discussion sur le « dernier kilomètre » incombera par ailleurs au CSMP ; mais l'une des questions fondamentales est celle du coût. Or la diffusion d'une centaine d'exemplaires d'un quotidien national dans un aéroport n'a évidemment pas le même coût que la distribution de journaux régionaux dans les boîtes aux lettres.
Je terminerai par un sujet que la proposition de loi n'aborde pas : les aides à la presse. Ainsi, Le Monde diplomatique et sa revue bi-mensuelle Manière de voir touchent des aides publiques inférieures à de nombreuses publications sans intérêt pour l'information. Il convient, à travers cet exemple, de s'interroger sur l'ensemble du dispositif.
Je salue moi aussi le travail du rapporteur sur ce texte qui, à défaut d'être révolutionnaire, constitue une évolution en faveur de la presse.
Je ne sais si le nouveau statut des entreprises citoyennes de presse d'information leur donnera de nouveaux moyens mais, en tout état de cause, il ne concerne que 300 titres, sur les 2 000 disponibles en kiosque. La définition même de l'IPG ne doit-elle pas être clarifiée ? La presse spécialisée ne sera-t-elle pas laissée pour compte ?
Si les questions ne sont jamais indiscrètes, il arrive que les réponses le soient… Le ministère de l'économie, semble-t-il, a consulté le CSA sur une possible révision des règles relatives à la concentration, notamment celle du « deux sur trois ». Quel est votre sentiment sur ce point, monsieur le rapporteur ?
Certains des points qui viennent d'être abordés ne figurent pas dans la proposition de loi, comme le projet de filiale de l'AFP, dont je suis au demeurant un fervent partisan.
Le texte ne serait pas une révolution mais une évolution, a-t-on observé ; mais, sur l'AFP, il me paraît être une évolution révolutionnaire… Les sept ou huit tentatives de modifier les statuts ou la composition du CA se sont toutes soldées, faut-il le rappeler, par le départ du président-directeur général dans les deux ans qui ont suivi. Le fait d'aborder ce débat dans un climat apaisé est en soi une nouveauté. La presse régionale était, jusqu'à présent, majoritaire au sein du CA, en assurant ainsi une gestion de fait, si bien que la principale préoccupation, d'ailleurs bien légitime, était d'empêcher toute augmentation du montant de l'abonnement à l'AFP. Le débat, en somme, se résumait à un face-à-face entre le président-directeur général et les syndicats, sans que le CA puisse jouer son rôle dans la définition d'une vision d'avenir, qu'il s'agisse du service aux clients, des archives ou des nouveaux usages et contenus – par exemple la vidéo, pour laquelle beaucoup de retard a été pris, faute de moyens. Ce débat est pourtant nécessaire car l'AFP, sans concurrencer les organes de presse, doit s'adapter aux nouveaux marchés.
Le verre est-il à moitié plein ou à moitié vide ? À moitié plein, serai-je tenté de répondre, puisque la justice a donné tort à l'agence allemande qui avait attaqué l'AFP. En sauvant la quasi-totalité de ses missions d'intérêt général, on lui a sans doute donné les moyens de rester pour ainsi dire unique en son genre. Ainsi, en Angleterre, les agences se spécialisent dans le domaine boursier ; aux États-Unis, ne subsistent que des agences « coup de poing », qui mobilisent des effectifs pour des événements ponctuels. L'AFP est d'ailleurs la seule agence qui ne licencie pas et c'est bien parce que la rentabilité n'est pas son objectif prioritaire qu'elle doit être protégée. Faut-il cependant nourrir des inquiétudes à son sujet ? Ma proposition de loi me semble protectrice ; sans elle, l'AFP deviendrait sans doute, à court terme, une agence comme les autres.
J'observe par ailleurs qu'en cinq ans, le discours sur les aides à la presse a changé du tout au tout : on plaidait naguère pour des aides ciblées ; aujourd'hui c'est l'inverse. En somme, on a dit tout et son contraire – moi le premier. La situation du Monde diplomatique au regard des aides est en effet un scandale, monsieur Rogemont ; du reste, cette revue a publié un excellent article sur le sujet. Le Point est sans doute une très bonne revue ; mais que dire de son supplément de 210 pages, toutes de publicité, qui fait concurrence aux magazines de fond ? Peut-être devrons-nous avoir un débat pour définir ce que nous attendons de ces aides dans les années à venir.
Pour mémoire, madame Buffet, Presstalis distribue tout de même gratuitement Le Figaro – entre autres, bien sûr – dans tous les aéroports… Cela mériterait à tout le moins une réflexion.
Le numérique est bien naturellement la voie d'avenir, pour peu que l'on évite l'ébriété technologique. Les journaux américains ayant supprimé le support papier au profit du tout numérique sont tous morts dans les trois mois qui ont suivi cette décision... Bref, le numérique est l'avenir, à condition de trouver le juste dosage entre le payant et le gratuit.
On peut émettre le souhait ardent que Presstalis et les Messageries lyonnaises fusionnent, madame Buffet, mais l'on ne peut les obliger à le faire ; d'où la solution intermédiaire qui consiste à les faire travailler ensemble.
Le texte contient également des avancées sur les barèmes, monsieur Kert, et l'ARDP verra son rôle renforcé. D'aucuns soulignent qu'avec la régulation, les décisions pourront prendre six mois, mais elles prenaient six ans auparavant. Accélérons, soit, – puisque vous êtes les révolutionnaires et que je suis le réformiste –, mais en trouvant le bon rythme, ce qui n'est pas toujours facile.
Enfin, est-il utopique de faire le pari d'une troisième voie pour l'édition de la presse ? Je ne sais plus qui disait que, sans utopies, nous vivrions encore dans les cavernes… Nous pouvons, tous ensemble, concrétiser cette utopie. Ce sera au départ, selon moi, une voie étroite, mais non réservée au numérique, et un peu plus large que l'information politique et générale (IPG).
Étant, depuis peu, président de la Commission professionnelle des kiosquiers, je ne voudrais pas que l'on oublie ceux qui sont au bout de la chaîne, qui vivent souvent dans une grande précarité et dont les conditions de travail se sont dégradées ces dernières années.
La Commission passe à la discussion des articles.
Titre Ier DISPOSITIONS RELATIVES À LA DISTRIBUTION DE LA PRESSE
Article 1er : Homologation des barèmes des messageries par le CSMP
La Commission examine l'amendement AC24 de M. Christian Kert.
L'article 1er réécrit l'article 12 de la loi Bichet relatif à la fixation des barèmes de tarifs des sociétés coopératives de messageries de presse. Le présent amendement a deux objets : il prévoit, d'une part, un délai moins long, de quinze jours, pour la simple transmission des barèmes au CSMP, et il encadre, d'autre part, la procédure d'homologation dans un délai d'un mois, afin que celle-ci ne s'étale pas trop dans le temps. Un tel dispositif permettrait de raccourcir les délais de prise de décision concernant les barèmes.
Je reviens d'un mot sur les kiosquiers : grâce à la régulation, ceux-ci seront, pour la première fois, augmentés, même si ce ne sera sûrement pas suffisant.
Sur le principe, je suis favorable à l'amendement, mais il n'est pas impossible que le CSMP m'explique, dans la semaine, que de tels délais ne sont pas praticables. Si j'ai vent de points techniques qui s'opposeraient à cette disposition, nous en reparlerons en séance.
La Commission adopte cet amendement.
Puis elle examine l'amendement AC60 du rapporteur.
Après avoir rencontré des patrons de presse quelque peu inquiets, je propose d'indiquer, en vue de les rassurer, que la procédure d'homologation se fait dans le respect du secret des affaires.
La Commission adopte cet amendement.
Elle adopte ensuite l'amendement de précision AC45 du rapporteur.
Puis elle en vient à l'amendement AC25 de M. Christian Kert.
Les décisions relatives à la fixation des nouveaux barèmes à la suite d'un refus d'homologation doivent également être prises dans des délais raisonnables. Nous proposons donc de prévoir, au lieu de trois mois, un délai de deux mois pour transmettre de nouveaux barèmes à compter du refus d'homologation.
Favorable. J'attendrai des remontées des acteurs pour m'assurer que cela ne pose pas de problèmes auxquels nous n'aurions pas songé.
La Commission adopte cet amendement.
Puis elle adopte l'amendement de précision AC46 du rapporteur.
La Commission adopte ensuite l'article 1er modifié.
Article 2 : Modification de l'intitulé du titre II de la loi Bichet
La Commission adopte l'article 2 sans modification.
Article 3 : Statut et missions du CSMP et de l'ARDP
La Commission examine l'amendement AC19 de M. Laurent Degallaix.
Il s'agit de rappeler que le champ de compétence du CSMP et de l'ARDP vise le seul système coopératif.
Je vois que la presse régionale est bien défendue, et elle le mérite. Un amendement de M. Travert, que nous verrons un peu plus tard, est dans le même esprit. J'invite donc M. Degallaix à retirer son amendement.
Cet amendement est retiré.
La Commission examine l'amendement AC17 de M. Christian Kert.
Cet amendement vise lui aussi à préciser que l'extension des compétences du CSMP et de l'ARDP s'effectue bien dans le cadre du seul système coopératif.
Cet amendement est également satisfait par l'amendement AC27 de M. Travert, qui sera présenté à l'article 7.
Cet amendement est retiré.
La Commission adopte l'amendement rédactionnel AC47 de M. le rapporteur.
Puis elle adopte l'article 3 modifié.
Article 4 : Composition de l'ARDP
La Commission examine l'amendement AC38 de Mme Barbara Pompili.
Cet amendement vise à répondre au risque d'augmentation des prix de la presse, qui est une des conséquences possible du nouveau système d'élaboration des barèmes. Il est nécessaire d'introduire dans le collège de l'ARDP une personne représentant une association de consommateurs, afin de veiller au respect des droits fondamentaux en termes d'accès à l'information. Cette personnalité serait chargée de défendre les droits des citoyens, notamment vis-à-vis du service public.
Défavorable. Il n'y a pas de représentant des associations de consommateurs à l'Autorité de la concurrence, ni à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP). Je souhaite que l'ARDP, exécutif décisionnel, ait un collège très réduit, de façon à ce qu'elle puisse être plus offensive sur les problèmes de régulation.
La Commission rejette cet amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AC26 de M. Stéphane Travert.
Il s'agit de compléter l'alinéa 4 de l'article afin que la personnalité qualifiée choisie à raison de sa compétence sur les questions économiques et industrielles soit désignée par l'Autorité de la concurrence. Cela renforcera l'indépendance de l'Autorité.
Favorable. Le fait que cette personnalité ne soit pas nommée par le ministère de la culture mais par une autorité indépendante est effectivement un gage de l'indépendance que nous recherchons pour l'ARDP.
La Commission adopte cet amendement.
Puis elle en vient à l'amendement AC61 de M. le rapporteur.
La Commission adopte cet amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AC74 de M. le rapporteur.
Dans la continuité du précédent, il s'agit de prévoir un renouvellement glissant du collège, de façon à ce que les membres de l'ARDP ne partent pas tous en même temps.
La Commission adopte cet amendement.
Puis elle adopte l'article 4 modifié.
Article 4 bis : Première nomination d'une personnalité qualifiée à l'ARDP
L'amendement AC39 de Mme Barbara Pompili est retiré.
La Commission adopte l'amendement de précision AC48 du rapporteur.
Puis elle adopte l'article 4 bis modifié.
Article 5 : Faculté pour l'ARDP d'auditionner le président du CSMP ou tout expert extérieur
La Commission adopte l'article 5 sans modification.
Article 6 : Régime financier de l'ARDP
La Commission adopte successivement les amendements de coordination AC49 et AC62 du rapporteur.
Puis elle adopte l'article 6 modifié.
Article 7 : Extension des pouvoirs du CSMP
La Commission examine, en discussion commune, les amendements AC18 de M. Christian Kert et AC20 de M. Laurent Degallaix.
Il s'agit de modifier l'alinéa 3 de l'article 7. Cet article prévoit les conditions dans lesquelles certaines entreprises de presse peuvent recourir à des réseaux de distribution dans les zones non couvertes par les messageries. Or la nature de ces entreprises n'est pas précisée. Selon toute logique, il s'agit pour les entreprises de presse du système coopératif, notamment pour la presse quotidienne nationale, de sortir localement de ce système pour recourir, sur le « dernier kilomètre », à des systèmes extérieurs développés au niveau local et ainsi accéder, à moindre frais, à davantage de points de vente. Il convient donc de le préciser.
Mon amendement précise que la distribution vise bien la seule vente au numéro dans les points de vente, et non les abonnements. Cela permettra de confirmer l'indépendance des réseaux extérieurs vis-à-vis du CSMP.
Favorable. Ce sont des précisions utiles. Ma préférence, puisqu'il faut choisir, va au premier des deux amendements.
L'amendement AC20 est retiré.
La Commission adopte l'amendement AC18.
Elle examine ensuite l'amendement AC27 de M. Stéphane Travert.
Il s'agit de supprimer l'alinéa 5 qui prévoit d'étendre les compétences du CSMP à des professions en dehors du système coopératif. Il est important de rappeler que les agents de la vente, dépositaires, porteurs de presse et vendeurs-colporteurs de presse de la PQR ne sont pas liés au système coopératif et ne peuvent, de fait, entrer dans le champ de compétence du CSMP. Cet amendement répond aux préoccupations de Mme Duby-Muller, de M. Kert et de M. Degallaix.
Favorable. Il ne semble pas souhaitable de donner au CSMP compétence sur les réseaux de la PQR. Nous nous retrouvons tous sur ce point.
La Commission adopte cet amendement.
En conséquence, les amendements AC2 de M. Christian Kert et AC21 de M. Laurent Degallaix tombent.
La Commission en vient à l'amendement AC6 de Mme Marie-George Buffet.
Nous avons déjà évoqué le sujet d'une société commune de messageries en discussion générale. L'amendement est défendu.
La proposition de loi progresse sur ce point. Par la régulation, les messageries vont bientôt créer un système d'information commun, qui permettra de réaliser des économies. Mme Buffet a un peu d'avance ; elle pense que nous pourrions aller plus vite. Je ne suis pas favorable à une fusion aujourd'hui – ce n'est pas d'actualité –, mais si les messageries n'apprennent pas à travailler ensemble et n'acceptent pas rapidement la régulation, nous serons peut-être conduits, avec le Gouvernement, à proposer d'autres solutions.
Cet amendement est retiré.
La Commission adopte l'article 7 modifié.
Article 8 : Faculté pour l'ARDP d'inscrire une question à l'ordre du jour du CSMP
La Commission adopte l'amendement de précision AC50 du rapporteur.
Puis elle adopte l'article 8 modifié.
Article 9 : Faculté pour l'ARDP de réformer les décisions du CSMP
La Commission adopte l'amendement rédactionnel AC75 du rapporteur.
Elle en vient ensuite à l'amendement AC76 du rapporteur.
L'ARDP m'a expliqué qu'un délai plus long était nécessaire pour la réformation des décisions du CSMP. Je suis incapable de porter un jugement technique sur ce point, mais elle a sans doute raison. Je vous propose donc d'ajouter les phrases suivantes : « L'Autorité peut, dans le même délai, réformer ces décisions. Elle peut, si elle l'estime utile, suspendre ce délai, dans la limite de deux mois, pour procéder à toute mesure complémentaire préalable à la réformation de ces décisions. »
La Commission adopte cet amendement.
Puis elle examine l'amendement AC70 du rapporteur.
Cet amendement précise les conditions dans lesquelles les acteurs peuvent demander un sursis à exécution d'une décision des instances régulatrices. L'objectif est de parvenir à un équilibre entre l'urgence pour le requérant et les impératifs de la régulation.
La Commission adopte cet amendement.
Elle adopte ensuite l'article 9 modifié.
Article 10 : Dispositions de toilettage
La Commission adopte l'article 10 sans modification.
TITRE II DISPOSITIONS RELATIVES À L'AGENCE FRANCE-PRESSE
Article 11 : Réforme de la gouvernance de l'AFP
La Commission examine l'amendement AC65 du rapporteur.
Il s'agit de prévoir la désignation de deux parlementaires, un député et un sénateur, au conseil supérieur de l'AFP, en remplacement des deux membres actuellement cooptés, un ancien préfet et un ancien ambassadeur. Cela permettra au Parlement de vérifier que l'AFP de demain sera bien celle que nous souhaitons.
Je précise que les deux membres cooptés sont actuellement une personnalité « ayant exercé outre-mer de hautes fonctions administratives » et une personnalité « ayant exercé à l'étranger une haute fonction représentative de la France ». Le rapporteur propose de privilégier les représentants de la nation.
Je précise qu'ils participeront à la désignation des cinq nouveaux membres du conseil d'administration de l'AFP qui remplaceront les représentants de la presse quotidienne.
La Commission adopte cet amendement.
Puis elle en vient à l'amendement AC29 de Mme Barbara Pompili.
J'ai souhaité moi aussi remplacer les deux membres cooptés, qui me paraissent un peu surannés, par deux autres personnalités, l'une nommée par le CSA et l'autre par le Conseil national du numérique, et ce afin de coller aux nouvelles priorités de l'AFP : les contenus numériques et audiovisuels. Je rappelle que le conseil supérieur de l'AFP est garant des « obligations fondamentales » de l'Agence, inscrites à l'article 2 de la loi du statut de l'AFP, qui s'appliquent également au média vidéo et aux réseaux numériques. Il serait bon que ces priorités soient représentées au sein du conseil supérieur.
Défavorable. J'espère que ces priorités seront bien représentées par les deux parlementaires que nous désignerons. Je ne vois pas bien ce que pourrait être l'apport du CSA en la matière ; on pourrait tout aussi bien dire que le CSA est fondé à regarder ce qui se passe dans un journal quand celui-ci diffuse une vidéo sur son site internet.
Je suis également étonné par cet amendement, d'autant plus qu'il est cosigné par Mme Attard. Demander au CSA de s'occuper, par le biais d'un représentant, des enjeux de la presse écrite, comme certains voudraient qu'il s'occupe des enjeux de l'internet au prétexte qu'on y trouve de la vidéo, a de quoi surprendre.
La Commission rejette cet amendement.
Puis elle examine l'amendement AC35 de Mme Barbara Pompili.
Nous souhaitons introduire dans la composition du conseil supérieur de l'AFP un représentant d'une association de consommateurs, afin de porter la parole des consommateurs et de défendre leurs droits vis-à-vis du service public.
L'AFP ne s'adresse jamais au consommateur final, mais aux professionnels des médias. Dès lors l'amendement a peu de poids. J'en demande le retrait.
Cet amendement est retiré.
La Commission en vient alors à l'amendement AC63 du rapporteur.
L'idée est que les membres du conseil supérieur de l'AFP siègent cinq ans et non trois ans.
Il est logique de porter les mandats de trois à cinq ans, afin de les caler sur la durée de la législature.
La Commission adopte cet amendement.
Puis elle examine l'amendement AC66 du rapporteur.
Le personnel de l'AFP a souhaité que le conseil supérieur joue un rôle de contrôle plus important. Je propose donc de prévoir au moins deux auditions annuelles du PDG, de façon à ce que la gouvernance soit suivie de plus près.
La Commission adopte cet amendement.
La Commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements AC30 et AC36 de Mme Barbara Pompili.
Il s'agit d'instaurer un peu de parité dans la composition du conseil supérieur de l'AFP. L'amendement AC36 prévoit cette parité ; l'autre est un amendement de repli qui se contente de demander que cette parité soit recherchée. Nous avons souvent du mal à établir la parité dans les autorités administratives supérieures, alors qu'il y a des femmes très compétentes dans ces domaines.
L'amendement AC30 est retiré.
La Commission adopte l'amendement AC36 à l'unanimité.
La Commission examine les amendements identiques AC31 de Mme Barbara Pompili et AC10 de Mme Marie-George Buffet.
Le nouveau conseil d'administration sera désormais composé de dix-sept membres, au lieu de quinze. La rédaction de l'AFP représentant 72 % des effectifs globaux, il est nécessaire, d'un point de vue démocratique, que la représentation des journalistes soit réévaluée. L'objet de cet amendement est de rétablir un certain équilibre de la représentation des personnels et de favoriser la participation de la rédaction à la prise de décision et à la bonne marche de l'entreprise.
Il conviendrait en effet que la rédaction soit bien représentée au conseil d'administration.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte ces amendements.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AC51 du rapporteur.
La Commission examine l'amendement AC32 de Mme Barbara Pompili.
Cet amendement propose que la nomination des nouvelles personnalités qualifiées du conseil d'administration soit effectuée sur proposition du CSA et du Conseil national du numérique. Dans la mesure où nous avons déjà eu le débat, je le retire. J'y reviendrai certainement en séance.
Cet amendement est retiré.
La Commission en vient à l'amendement AC64 du rapporteur.
Il s'agit de supprimer le droit de veto des commissions parlementaires sur la nomination des cinq personnalités qualifiées par le conseil supérieur.
La Commission adopte cet amendement.
La Commission examine ensuite l'amendement AC67 du rapporteur.
Cet amendement vise à faire passer le mandat des membres du conseil d'administration de l'AFP de trois à cinq ans.
La Commission adopte l'amendement.
La Commission adopte successivement l'amendement de précision AC52 du rapporteur et l'amendement AC53 rédactionnel, tous deux du rapporteur.
Elle est ensuite saisie des amendements AC37 de Mme Barbara Pompili, AC8 de Mme Marie-George Buffet et AC33 de Mme Barbara Pompili, faisant l'objet d'une présentation commune.
L'amendement AC37 propose d'instaurer une parité réelle au sein du conseil d'administration de l'AFP en prévoyant que l'écart entre, d'une part, le nombre des hommes désignés et, d'autre part, le nombre des femmes désignées, ne soit pas supérieur à un ; quant à l'amendement de repli AC33, il vise à ce que ce même conseil d'administration soit composé en recherchant une composition « paritaire ».
L'amendement AC8 vise également à ce que la parité soit respectée au sein du conseil d'administration de l'AFP.
La Commission adopte l'amendement AC37.
Les amendements AC8 et AC33 sont retirés.
La Commission adopte l'amendement de précision AC54 du rapporteur.
Elle examine ensuite l'amendement AC9 de Mme Marie-George Buffet.
L'amendement AC9 prévoit que l'élection du président-directeur général de l'AFP s'accompagne de la présentation d'un plan stratégique – c'est-à-dire exposant les priorités stratégiques de l'entreprise – évalué par le conseil d'administration.
Je suis favorable à cet amendement, sous réserve que l'on remplace le mot « plan » par celui de « projet ».
La Commission adopte l'amendement ainsi rectifié.
Puis elle adopte l'amendement de conséquence AC44 du rapporteur.
Elle en vient ensuite à l'examen de l'amendement AC69 du rapporteur.
La commission financière comprend deux membres de la Cour des comptes et un expert désigné par le ministre des finances. Or, le dernier expert désigné par le ministre de l'économie et des finances, retraité depuis 2000, n'est plus membre depuis 2006 et n'a jamais été remplacé. C'est pourquoi il est proposé de remplacer ce membre par un troisième membre de la Cour des comptes.
La Commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'amendement AC55 tombe.
La Commission examine ensuite l'amendement AC68 du rapporteur.
Il est ici proposé de fixer à cinq ans au lieu de trois la durée du mandat des membres de la commission financière de l'AFP.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AC56 et AC57 du rapporteur.
Elle adopte ensuite l'article 11 modifié.
Article 12 : Adaptations au droit de l'Union européenne
La Commission est saisie de l'amendement AC34 de Mme Barbara Pompili.
Si l'introduction statutaire d'une comptabilité séparée est nécessaire afin de distinguer, pour justifier du financement public, ce qui est du domaine des missions d'intérêt général et ce qui ne l'est pas, cette introduction ne doit pas se faire à l'article 1er de la loi portant statut de l'agence France-Presse, car cela constitue une incohérence juridique et risque de compliquer la lisibilité de la loi.
L'amendement AC34 propose simplement de déplacer cette disposition vers l'article 13, portant sur les ressources de l'AFP.
Si la mesure proposée va dans le bon sens, je préfère que l'introduction statutaire d'une comptabilité se fasse après l'alinéa 6 de l'article 13, comme le propose l'amendement AC28 de M. Travert, que nous allons examiner dans un instant.
L'amendement AC34 est retiré.
La Commission examine ensuite les amendements AC28 de M. Stéphane Travert et AC13 de Mme Marie-George Buffet, faisant l'objet d'une discussion commune.
L'article 12 prévoit de mettre l'Agence France-Presse en conformité avec le droit de l'Union européenne, en rendant obligatoire la séparation comptable des activités ne relevant pas des missions d'intérêt général.
Notre amendement a pour objectif de rendre plus lisible cette disposition en la plaçant, non plus à l'article 1er de la loi du 10 janvier 1957 portant statut de l'Agence France-Presse, mais à l'article 13 de cette même loi qui traite des ressources de l'AFP. Ainsi l'article 1er reste-t-il intégralement consacré aux missions d'intérêt général de l'Agence consistant à rechercher, en France et à l'étranger, des éléments d'une information complète et objective et à mettre contre payement cette information à la disposition des usagers.
Je me félicite du fait que les dispositions relatives à l'introduction statutaire d'une comptabilité sortent de l'article 1er, et suis disposée à retirer mes amendements AC13 et AC11 sous réserve de recevoir de la part de M. le rapporteur toutes les assurances nécessaires quant à l'utilisation qui sera faite de cette comptabilité séparée.
Comme vous le savez, le droit de l'Union européenne rend obligatoire la séparation comptable des activités ne relevant pas des missions d'intérêt général. Si la proposition de M. Travert me paraît conforme aux exigences européennes, je ne suis pas tout à fait certain qu'il en soit de même des autres amendements. Je suis donc favorable à l'amendement AC28, sous réserve d'une modification rédactionnelle consistant à remplacer les mots « des missions générales » par les mots « des missions d'intérêt général ».
Pour ce qui est de mes amendements AC13 et AC11, je souhaite que M. le rapporteur me précise, à partir du moment où la seconde comptabilité est créée, quel sera son champ. Lorsque j'interroge la direction de l'AFP sur ce point, je m'entends répondre qu'il s'agira par exemple des contrats de transport ou de routage, mais il est impossible d'obtenir une définition précise.
Je suis d'accord avec vous, et j'ai exprimé le souhait que le contrat d'objectifs et de moyens définisse clairement ce champ.
Les amendements AC13 et AC11 sont retirés.
La Commission adopte l'amendement AC28 ainsi rectifié.
Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel AC58 du rapporteur.
Puis elle examine l'amendement AC12 de Mme Marie-George Buffet.
L'AFP, qui se trouvait jusqu'à présent sous la protection de notre Parlement en cas de difficultés financières, entre désormais dans le droit commun qui, en principe, n'exclut pas la perspective d'une faillite – cette évolution se justifiant par un problème de constitutionnalité posé depuis plusieurs années. L'amendement AC12 vise à s'assurer que l'AFP ne puisse pas être mise en faillite.
Ne pouvant parler au nom de la Commission européenne, je ne suis pas en mesure de rassurer totalement Mme Buffet. Cela dit, les mesures prises dans le cadre de cette proposition de loi sont de nature à redonner la possibilité à l'AFP d'investir, donc d'avoir une vision d'avenir. Si je ne peux pas vous jurer que l'Agence ne sera pas en faillite dans quarante ans, je me félicite en tout cas que nous soyons en train d'éloigner, au moins pour un temps, cette hypothèse qui inquiète beaucoup les personnels.
L'amendement AC12 est retiré.
La Commission adopte l'article 12 modifié.
Article 13 : Dispositions de toilettage
La Commission adopte successivement l'amendement de coordination AC73, l'amendement AC72 visant à supprimer une disposition obsolète, et l'amendement rédactionnel AC59, tous du rapporteur.
Elle adopte ensuite l'article 13 modifié.
TITRE III AUTRES DISPOSITIONS RELATIVES AU SECTEUR DE LA PRESSE
Article 14 : Création d'un statut d'entreprise citoyenne de presse d'information
La Commission examine, en discussion commune, les amendements AC71 du rapporteur, AC41 de M. Kert et AC40 de M. Laurent Degallaix.
L'appellation initialement retenue d'entreprise « citoyenne » de presse d'information n'apparaît pas appropriée en ce qu'elle laisse entendre que les autres entreprises de presse ne seraient pas citoyennes – ce qui peut froisser certaines susceptibilités. C'est pourquoi il est proposé de retenir l'appellation d'« entreprise solidaire de presse d'information », qui semble convenir aux patrons de presse avec lesquels je me suis entretenu de cette question.
Pour notre part, nous proposons la formulation « entreprise participative de presse d'information », qui figurait déjà dans le rapport de Michel Françaix, à la page 42 – sans doute faut-il y voir une reconnaissance anticipée du bien-fondé de notre proposition !
En ce qui nous concerne, nous proposons de retenir la formule « entreprise à investissement et gestion participatifs », mais sommes ouverts à des solutions de compromis – « entreprise solidaire et participative », par exemple.
En l'état actuel, je persiste à penser que la rédaction que je propose, qui fait référence à l'économie sociale et solidaire, est la plus adaptée – mais je suis tout à fait disposé à ce qu'un débat s'engage sur ce point en séance publique.
Les amendements AC41 et AC40 sont retirés.
La Commission adopte l'amendement AC71.
Elle est ensuite saisie de l'amendement AC14 de Mme Marie-George Buffet.
Je note l'abandon de la notion d'entreprise « citoyenne » au profit de l'adoption de celle d'entreprise « solidaire » et donc d'un système proche des coopératives. Avec l'amendement AC14, nous proposons justement de préciser que l'entreprise « répond au statut de société coopérative » : il s'agit de prévoir qu'une part importante des bénéfices sera affectée à la réserve, qui alimente un fonds de développement visant à assurer la pérennité de la coopérative, mais aussi et surtout que les salariés de l'entreprise citoyenne de presse puissent en être sociétaires – comme c'est le cas pour le journal Nice-Matin.
La raison d'être de l'article 14 est d'inciter le Gouvernement à instaurer un volet fiscal suffisamment intéressant pour que le dispositif ne reste pas lettre morte. Le débat est ouvert au sujet des entreprises ayant vocation à bénéficier de ces dispositions. C'est pourquoi, à ce stade, je suis plutôt défavorable à l'amendement AC14, même si je comprends ce qui le motive.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite les amendements identiques AC1 de M. Christian Kert et AC23 de M. Laurent Degallaix.
La loi du 1er août 1986 est la loi de référence sur le statut juridique des entreprises de presse. L'article 14 de la proposition de loi vise à y inscrire les nouvelles entreprises citoyennes – ou solidaires, puisque leur appellation n'est pas définitivement fixée –, tandis que les sociétés anonymes et les sociétés coopératives et participatives (SCOP) continueraient de ne pas y figurer, ce qui constituerait une première anomalie. Par ailleurs, l'article 39 bis A du code général des impôts n'a vocation qu'à servir de base à un dispositif fiscal et, comme tel, n'a pas sa place dans une loi d'ordre général. En outre, l'inscription de la notion d'IPG dans la loi de 1986 viendrait perturber le débat actuellement en cours, au sein de la commission paritaire des publications et agences de presse, sur la définition de la notion d'entreprise de presse d'IPG. Le dispositif d'entreprise citoyenne ou solidaire doit être assorti d'un dispositif fiscal à venir, qui pourra effectivement retenir l'article 39 bis A du code général des impôts comme base de référence, mais il suffira de le préciser au moment de la création de ce dispositif fiscal. En l'état actuel, cette disposition paraît donc inutile.
La création d'une nouvelle catégorie d'éditeur de presse entrant en concurrence avec les modèles préexistants étant de nature à engendrer une certaine confusion, nous proposons également de supprimer, à l'article 5, les mots : « au sens de l'article 39 bis A du code général des impôts ».
J'ai tendance à penser qu'il est préférable de maintenir la référence à l'article 39 bis A du CGI, et suis donc défavorable aux amendements AC1 et AC23. En effet, nous allons devoir redéfinir, dans les mois à venir, quelles entreprises de presse méritent de recevoir des aides et lesquelles ne le méritent pas, et je ne voudrais que l'on dise dans trois mois le contraire de ce que l'on dit aujourd'hui – étant précisé que je serais personnellement favorable à une définition des IPG légèrement élargie, c'est-à-dire s'étendant à davantage de titres, sans aller jusqu'à Gala. Il me semble que nous sommes tous à peu près d'accord sur le fond, et que nous pourrions en débattre lors du débat en séance publique qui aura lieu la semaine prochaine.
Deux codes – le code des postes et le code général des impôts – sont effectivement concurrents sur cette question importante de la définition de l'IPG, qui mériterait un travail un peu plus approfondi en vue du débat en séance.
Les amendements AC1 et AC23 sont retirés.
La Commission est saisie de l'amendement AC43 de Mme Barbara Pompili.
Cet amendement propose de prendre en compte plusieurs épisodes récents liés aux difficultés que connaît le secteur de la presse. Il s'agit d'insérer dans la proposition de loi un outil inspiré de la loi sur l'économie sociale et solidaire, facilitant la reprise de l'entreprise par les salariés en cas de difficultés économiques. En effet, ce texte prévoit un dispositif d'information des salariés sur les possibilités de reprise pour les entreprises de moins de 250 salariés. Or, au vu des différents événements tels que la décision prise début novembre 2014 par le tribunal de commerce de Nice, validant la reprise du groupe Nice-Matin par ses salariés, il est nécessaire d'adapter la législation à la pratique. Puisque la proposition de loi tend à encourager, notamment au travers des mesures inspirées de l'ESS, un certain nombre d'initiatives, je vous propose par cet amendement d'aller un peu plus loin, en élargissant aux entreprises de presse le dispositif d'information des salariés sur les possibilités de reprise.
Je suis favorable à cette proposition, sous réserve qu'il soit précisé que le dispositif proposé est réservé aux seules entreprises de presse solidaires.
J'entends vos inquiétudes, mais je crains que cette précision ne réduise trop le champ d'application de notre proposition de bon sens. Je préfère donc maintenir notre amendement en sa rédaction actuelle, que j'envisagerai éventuellement de modifier s'il était rejeté par notre Commission.
La Commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 14 modifié.
Après l'article 14
La Commission est saisie de l'amendement AC42 rectifié de M. Patrick Mennucci.
Nous en venons à des propositions d'articles additionnels dont l'objet sort du cadre de la proposition de loi.
Je souhaite la bienvenue à M. Patrick Mennucci et lui donne la parole pour soutenir son amendement AC42 rectifié.
Je vous remercie, monsieur le président, et vous félicite pour la façon à la fois productive et courtoise que vous avez de mener les débats – ce dont d'autres commissions pourraient s'inspirer. L'amendement AC42 rectifié est cosigné par M. Urvoas, président de la commission des lois, Mme Dumont, M. Raimbourg, et l'ensemble des membres du groupe socialiste.
En 2012, 292 députés de tout bord avaient signé la pétition mise en circulation par l'association Les prisons du coeur, visant à ouvrir aux journalistes le droit d'accompagner les parlementaires qui le souhaitent dans les lieux de privation de liberté, à l'exception des lieux de garde à vue, et une promesse leur avait été faite en ce sens. Nous avons repris le travail accompli précédemment dans le cadre du texte relatif à la protection du secret des sources, en estimant que la présente proposition de loi pouvait constituer un vecteur plus favorable pour l'adoption de cette mesure qui nous paraît de nature à recueillir un large accord.
Cet amendement a vocation à traiter un problème précis, évidemment distinct des questions relatives à l'AFP et à la distribution de la presse, mais aussi de la protection du secret des sources des journalistes. Il n'en est pas moins en rapport avec la presse, ce qui justifie qu'il puisse être rattaché à la présente proposition de loi.
Je n'étais pas préparé à cet amendement, n'étant pas un grand spécialiste du problème qui est ici soulevé, mais je suis favorable sur le fond à la mesure proposée. Reste la question de l'opportunité d'une telle mesure – mais si on ne l'adopte pas maintenant, peut-être ne trouvera-t-on pas un moment plus adéquat par la suite. Je suis donc plutôt favorable à cet amendement, sous réserve qu'il ne dénature pas le texte de notre proposition de loi, mais constitue un « plus » de nature à donner satisfaction à un grand nombre de parlementaires. J'attends donc de prendre connaissance de la position des uns et des autres avant de me faire une opinion définitive.
À l'issue de la redéfinition de ma circonscription, il reste un centre de détention sur le territoire de celle-ci, à savoir l'établissement important qu'est la maison d'arrêt d'Aix-en-Provence. J'ai un peu anticipé le dispositif proposé par nos collègues en me faisant systématiquement accompagner d'un ou deux journalistes de la presse régionale – avec l'accord du directeur – quand je visite cet établissement. Je constate que les choses se passent bien, et que l'impact des articles rédigés à la suite de ces visites n'est pas négligeable : ainsi la presse nous a-t-elle aidés à dénoncer un certain nombre de dysfonctionnements, dont quelques-uns ont pu être réglés – ce que ma seule visite n'aurait sans doute pas permis. C'est pourquoi je considère qu'il s'agit là d'une mesure très positive, que nous devrions retenir.
Certes, la mesure proposée n'entre pas exactement dans le cadre de la proposition de loi dont nous débattons, mais quand pourrons-nous l'adopter si nous ne le faisons pas aujourd'hui ? Le fait que les conditions de mise en oeuvre de cette mesure soient précisées par décret peut toutefois avoir pour conséquence de la rendre très restrictive, aussi devrons-nous faire preuve d'une grande vigilance à l'égard de ce décret. Cela dit, il s'agit là d'une grande avancée que nous attendions depuis longtemps.
Je suis favorable à cet amendement, dont l'adoption constituerait cependant un appel à la responsabilité de la part des élus et des journalistes. Je me félicite du rôle positif qu'ont pu jouer certains articles de presse parus à la suite des expériences menées en certains points du territoire, mais il ne faudrait pas que la mise en oeuvre généralisée de la mesure donne lieu à des dérives – je pense notamment à la publication de photos volées – et je souhaite donc que le décret décrive de façon très précise les conditions d'accompagnement.
Cet amendement émane d'un article du projet de loi relatif à la protection du secret des sources, sur lequel nous avons beaucoup travaillé dans cette commission ainsi qu'en commission des lois. Je suis donc très satisfait que nous ayons à nouveau l'occasion d'en débattre aujourd'hui – même si je regrette un peu que nous ayons à examiner cette mesure importante sous la forme d'un amendement à la proposition de loi sur la modernisation de la presse, ce que nous aurions pu éviter si le texte sur le secret des sources avait été inscrit à l'ordre du jour de notre assemblée en temps et en heure. Le fait que nous adoptions aujourd'hui cette disposition ne remet évidemment pas en cause la nécessité d'examiner très prochainement ce projet de loi extrêmement important : nous devons y voir le marqueur de son inscription prochaine à l'ordre du jour.
Merci, monsieur le président, de bien vouloir nous accueillir dans votre commission.
Cet amendement fait logiquement suite au travail mené depuis longtemps par le Parlement. La loi du 15 juin 2000 avait autorisé les parlementaires français à visiter à tout moment certains lieux privatifs de liberté, et il m'est arrivé également de demander à l'administration pénitentiaire l'autorisation d'être accompagnée d'un journaliste. Le problème est que cette autorisation est accordée de façon discrétionnaire.
Depuis la fameuse commission d'enquête présidée par M. Louis Mermaz il y a une dizaine d'années, l'opinion publique avait en effet ouvert les yeux sur la condition pénitentiaire – cette honte pour la République. La création du Contrôleur général des lieux de privation de liberté, en 2008, a contribué ensuite à une information indépendante et objective. Il faut continuer en ce sens et nous avons besoin de la presse pour rendre conscients nos concitoyens des réalités de la prison. La société doit se rendre compte que cette institution de la République n'a pas toujours les moyens suffisants pour concrétiser son ambition, à savoir la réinsertion des détenus.
Si vous me le permettez, monsieur le président, j'interviendrai à la fois sur l'amendement AC42 rectifié de M. Mennucci, et sur l'amendement AC16 de Mme Buffet. Le premier vise à permettre aux journalistes d'accompagner les parlementaires dans leurs visites en prison. Le second concerne la définition de la protection du secret des sources des journalistes. Sur le fond, tout le monde est d'accord. Mais je ne voudrais pas, et c'est ma seule restriction, que leur adoption laisse penser que le problème du secret des sources est réglé et ne se pose plus. Ce serait dommage et nous irions à l'encontre de ce que nous recherchons.
Je rappelle que l'amendement AC42 rectifié ne concerne que la possibilité, pour les journalistes, d'accompagner les parlementaires lors de leurs visites en prison, et qu'il n'a donc aucun rapport avec la protection des sources des journalistes.
Un consensus semble s'être dégagé et vous nous avez confortés, monsieur le président, dans l'idée que cet amendement, bien défini, permettra une avancée et qu'il nous faut saisir cette occasion de le voter.
La Commission adopte l'amendement AC42 rectifié.
Elle est ensuite saisie de l'amendement AC16 de Mme Marie-George Buffet.
Il s'agit d'un amendement d'alerte. Chaque fois que nous discutons de la presse, je rappelle que nous avons travaillé sur un projet de loi de protection des sources des journalistes, que nous l'avons amendé et que nous aimerions le voir enfin inscrit à l'ordre du jour de notre assemblée et définitivement adopté. Je retire cet amendement à ce stade de notre discussion mais j'interviendrai à nouveau en ce sens dans l'hémicycle.
Je pense même qu'il pourrait y avoir plusieurs amendements d'alerte, dans l'esprit des dernières interventions de M. Yves Durand ou de M. Michel Pouzol, rapporteur pour avis de notre commission sur le projet de loi qui vise à renforcer la protection du secret des sources des journalistes.
Je tiens par ailleurs à insister moi aussi sur le fait que l'adoption de l'amendement AC42 rectifié, qui tend à autoriser les journalistes à accompagner les parlementaires dans leurs visites des prisons, ne saurait permettre de considérer que la question de la protection du secret des sources des journalistes est réglée. Je pense ainsi traduire, au-delà du courrier qui a été adressé aux plus hautes autorités de notre pays et que j'ai cosigné avec M. Michel Pouzol, le souhait général de voir le projet de loi relatif à la protection du secret des sources des journalistes inscrit à court terme à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.
L'amendement AC16 est retiré.
La Commission est alors saisie de l'amendement AC15 de Mme Marie-George Buffet.
Tout au long de la matinée, nous avons eu l'occasion d'évoquer le problème des aides à la presse. Je retire mon amendement en attendant une étude sérieuse sur ce point.
Je rappelle que toutes les aides directes qui seront versées à partir de 2015 seront ciblées sur la presse d'information politique et générale, ce qui est tout à fait conforme aux souhaits des uns et des autres.
L'amendement AC15 est retiré.
La Commission adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.
La séance est levée à treize heures dix.