La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2017 (nos 4061, 4125, 4126 à 4132).
Nous en venons à la discussion générale. La parole est à M. Paul Giacobbi, premier orateur inscrit.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, Rabindranath Tagore, auteur bengali qui a obtenu, en 1913, le prix Nobel de littérature, a écrit, entre autres ouvrages, La Maison et le Monde. Je m’en inspirerai modestement ce soir, même si c’est de manière nettement moins poétique, pour vous dire quelques mots du « monde », c’est-à-dire de la conjoncture internationale qui s’impose à nous tous, et de la « maison », et plus particulièrement et très égoïstement de la mienne, c’est-à-dire la Corse, qui n’en est pas encore à prendre feu mais dans laquelle il vaudrait mieux éviter chaque année de faire craquer des allumettes fiscales destinées à incendier sauvagement des pans entiers d’une législation finalement peu coûteuse et tout à fait justifiée. Je m’empresse de dire que les incendiaires ne se trouvent pas sur le banc du Gouvernement. Je dirais plutôt qu’en la circonstance, le Gouvernement est dans le rôle du pompier, même s’il a bien d’autres feux à éteindre par ailleurs.
La conjoncture internationale, chacun le sait, n’évolue pas bien. À la suite de la crise de 2007, en particulier depuis 2009, les institutions internationales, les commentateurs nous ont dit que cela irait mieux. Cela n’a pas été le cas, car ce genre de crises met beaucoup de temps à se régler. Aujourd’hui, même le FMI semble avoir compris que le monde occidental est condamné à une croissance inférieure à 2 %.
Le plus grave n’est pas cette quasi-stagnation mais la remontée des taux d’intérêt, pour l’heure modeste, il est vrai : en substance, on nous dit qu’aux États-Unis d’Amérique, sitôt l’élection passée, on connaîtra une augmentation des taux d’intérêt, certes très inférieure à un point mais tout de même non négligeable. À ce stade, monsieur le secrétaire d’État, on peut difficilement reprocher à votre budget de ne pas prendre en compte ce phénomène. Vous avez en effet prévu, si j’ai bien lu, une hausse des taux d’intérêt de 1 point sur l’année 2017, ce qui est, en tout cas à ce stade, tout à fait raisonnable.
D’aucuns se lancent dans la comparaison des prévisions de taux de croissance. Ce qui m’étonne, c’est qu’on insiste sur le fait que le Gouvernement, représenté ce soir par Christian Eckert, aboutit à une prévision de 1,5 %, et l’INSEE à 1,3 %. Je ne vais pas me lancer dans une comparaison des transparences respectives de la boule de cristal de l’INSEE et de celle du secrétaire d’État au budget et, plus généralement, de Bercy. Elles sont d’ailleurs du même tonneau, puisque l’un et l’autre utilisent à peu près les mêmes raisonnements…
Mais admettons que l’INSEE ait raison, et que la croissance se situe au niveau bas, 1,3 % : cela ne ferait jamais que 0,2 point de différence avec le chiffre de Bercy ! Alors comment, avec une différence de 0,2 point de PIB, pourrait-on arriver à un écart extravagant, de l’ordre de près de 1 point, en termes de déficit rapporté au PIB ? C’est idiot ! Faites le calcul de toutes les manières que vous voudrez, vous obtiendrez péniblement un creusement du déficit de 0,1 point. Autrement dit, si l’INSEE ex post a raison – de toute façon, on ne le saura que dans quatre ans – le déficit ne sera pas de 2,7 %, comme le prévoit le Gouvernement, mais de 2,8 %… Très franchement, tout le monde se moque éperdument de savoir si le déficit atteindra 2,7 % ou 2,8 % du PIB ! Ce n’est pas, en économie, une grandeur significative : c’est une différence très difficile à prévoir, et même à mesurer. Ce n’est que ex post que l’on pourra donner les chiffres définitifs.
Pour ce qui est des taux d’intérêt, on peut supposer qu’ils vont remonter au cours de l’année 2017, mettons de 1 point. C’est peu de chose, et cela a été intégré, à ce stade, dans la prévision du Gouvernement. Mais admettons qu’ils se maintiennent à ce point de plus pendant plusieurs années – je ne parle pas d’une augmentation de 1 point chaque année ! Sachant que, chaque année, nous recourons à l’endettement dans une proportion bien supérieure au déficit de l’année, puisque nous sommes contraints non seulement d’emprunter pour couvrir le déficit de l’État, mais également de renouveler les emprunts antérieurs… Combien empruntons-nous, monsieur le secrétaire d’État, 200 ou 220 milliards par an ? Un peu moins, me dites-vous ? Toujours est-il que c’est largement plus que le montant du déficit de l’année. Donc, si le taux d’emprunt devient supérieur à ce qu’il était il y a sept ou huit ans, ce qui, pour l’heure, est loin d’être le cas, cela pourrait, à terme, constituer un problème. Mais, je le répète, tel n’est pas le cas pour le moment à terme prévisible.
Je sais bien qu’il est arrivé que des économistes distingués et des présidents de banques centrales imposent des taux d’intérêt réels monstrueux. J’aime à citer le cas de Paul Volcker, qui avait imposé il n’y a pas si longtemps – il est d’ailleurs toujours en vie – des taux d’intérêt réels, aux États-Unis d’Amérique, de 17 %. C’était au début des années quatre-vingt. Aujourd’hui, le taux de base des banques centrales est proche de zéro, quand il n’est pas négatif. Nous sommes donc loin de cette époque, même si, en faisant de la politique-fiction, on peut imaginer y revenir un jour. En tout état de cause, quand bien même on serait persuadé que cela arrivera, le Gouvernement peut difficilement en tenir compte dans le budget 2017, puisque cela ne serait susceptible de survenir qu’à une échéance plus lointaine.
Il y a autre chose dont le Gouvernement ne peut tenir compte, et l’on ne saurait davantage lui faire ce grief, parce que cela ne se produira que plus tard : je veux parler de l’explosion de bulles spéculatives. Car nous nous trouvons dans une situation extravagante. Il s’est formé en Chine une bulle immobilière – à Shanghai, les prix des terrains sont trois fois plus élevés qu’à Manhattan ! – et aussi une bulle financière, et plus exactement une bulle des créances bancaires. On note, partout, un retour à des bulles immobilières et à une surévaluation, désormais chronique, des marchés financiers. C’est lié à une liquidité de l’économie historiquement sans précédent, en augmentation plus que significative par rapport au niveau qu’elle avait atteint peu avant la crise, entre 2006 et début 2007.
Aujourd’hui, on nous raconte, dans la vulgate publique – pas celle de la République française, celle du monde de l’économie – que l’économie recèlerait moins de risque, même à niveau de bulle équivalent, qu’en 2007 parce que nous aurions été capable de mieux contrôler les banques, grâce à une réglementation appropriée et devenue soudain étrangement efficace. Il se trouve que cette prétendue évidence est absolument fausse. Je me réfère de manière très précise à une lecture académique et qui fait, je crois, autorité : « Have big banks gotten safer ? » – les grandes banques sont-elles devenues plus sûres ? – publiée en septembre 2016 par Natasha Sarin et Lawrence Summers, de l’université de Harvard. Cette étude démontre au contraire que le risque est plus grand qu’il n’était avant la crise, en dépit d’une réglementation envahissante et très sophistiquée – et peut-être, à certains égards, à cause de cette réglementation. Je signale que Lawrence Summers fut un conseiller économique du président Obama.
J’en viens à présent, sans aucunement vouloir vous contrarier, monsieur le secrétaire d’État, à la « maison Corse ». Ce que l’on doit attendre, pour la maison Corse, en matière fiscale, ce n’est certainement pas une forme de tolérance excessive ou l’admission de situations dépourvues de justification. Ce que l’on peut attendre, en revanche, c’est l’apaisement, l’apurement et l’encouragement. En tout cas, on ne peut accepter que certaines institutions, et, parfois, certaines personnes, voire certains collègues, affirment de manière récurrente, pour ne pas dire obsessionnelle, que la Corse bénéficie d’avantages indus et veuillent faire de notre île, dans un pays qui compte en général plus d’exceptions qu’il n’y a de règles et plus de niches fiscales qu’il n’y a de catégories de contribuables, une sorte de symbole de la dérogation.
Il y a bien des recoins sombres dans le maquis fiscal national, mais ils ne se trouvent pas essentiellement en Corse, qui est pourtant l’île du maquis. Ce que je nomme l’apurement n’est pas la normalisation, au sens d’un alignement sur la norme nationale : cela consiste d’abord à améliorer régulièrement le recouvrement des impositions de toute nature en Corse. Or c’est ce qui se passe sur la durée : à titre d’exemple, le taux de recouvrement des impôts des particuliers, qui atteint près de 97 %, s’est considérablement amélioré, même s’il reste encore inférieur à celui observé sur le continent, qui n’atteint pas non plus la perfection puisqu’il est de 98,7 %. La perfection n’est pas de ce monde mais on s’en approche…
L’apurement pourrait aussi prendre la forme d’une clarification. Certains impôts ne sont pas perçus en Corse, par application de décisions ministérielles très anciennes et toujours renouvelées, ou parfois sur le fondement de textes de valeur législative, eux, mais vieux de deux siècles et qui mériteraient d’être modernisés. La clarification consisterait à conférer à ces situations une base à la fois légale dans la forme et récente dans l’expression. De fait, lorsqu’une exception repose sur un texte ou une pratique vieille de deux cents ans, cela pose problème…
Prenons l’exemple des ventes de vins produits et consommés en Corse : elles ne sont pas assujetties à la TVA, situation qui découle d’une application constante par la direction générale des finances publiques de travaux parlementaires tenus dans cette même assemblée et qui remontent au 17 octobre 1967. La réponse ministérielle était à cet égard très claire. Mais même s’il est possible et légitime que le Gouvernement, même en matière fiscale, applique la loi en appuyant son interprétation sur des travaux parlementaires, il serait préférable qu’une disposition légale nouvelle et explicite conforte cette application du droit fiscal. Quant au fond, il n’est pas du tout scandaleux que la filière viticole en Corse continue de bénéficier de cet avantage. De fait, il est beaucoup plus coûteux et plus difficile de produire du vin en Corse, compte tenu, notamment, du surcoût sur l’ensemble des intrants de 12 à 15 % : il faut en effet faire venir du continent le matériel de vinification, les emballages, les bouchons et les bouteilles.
Au passage, la Cour des comptes fait un calcul que je n’arrive pas à comprendre. Selon elle, il résulterait de cette règle un coût annuel de 50 millions d’euros pour l’État. Mais comment pourrait-on réaliser 50 millions d’euros d’économies sur une taxe de 20 % appliquée à un chiffre d’affaires global de 160 millions ? De surcroît, la règle critiquée ne porte en réalité que sur un montant de chiffre d’affaires bien inférieur, puisqu’il ne concerne que ce qui est produit et consommé en Corse. En réalité, le coût de cette mesure pour le budget de la République est de l’ordre de 12 millions d’euros par an, ce qui peut paraître beaucoup mais est en réalité très faible, et probablement inférieur au surcoût que fait peser sur la filière le simple phénomène d’insularité.
L’apaisement et la clarification pour la Corse, monsieur le secrétaire d’État, ce serait aussi de sortir enfin de la fameuse affaire des arrêtés Miot, dans des conditions raisonnables et acceptables, sur la base de ce que les parlementaires corses vous ont proposé. Cela consiste d’ailleurs en un alignement à terme sur le droit commun, alignement qui deviendra total le jour où la situation de notre foncier sera réellement comparable, en matière de titrage et d’indivision, à la situation qui prévaut ailleurs dans la République et notamment sur le continent. Je sais que vous êtes très attentif à cette situation. Je signale au passage que ce qui sera inscrit dans la loi s’appliquera non seulement à la Corse, mais aussi à toutes les situations où l’on retrouve une difficulté quant au titrage et à l’indivision.
Je voudrais aussi rappeler que l’équité, l’égalité ne consistent pas à appliquer la même règle à des situations différentes : c’est appliquer des règles identiques lorsque les situations sont les mêmes, mais des règles différenciées lorsque la différence de situation le justifie. Il y a dans le droit fiscal français toute une série de différences rationnelles selon les territoires. Pour le démontrer, les députés de la Corse pourraient, parce qu’ils sont aussi ceux de la nation tout entière, s’attaquer à des dispositions dérogatoires dont bénéficient d’autres parties du territoire national.
Enfin, l’encouragement, dans la fiscalité de la Corse, serait d’admettre qu’il faut peut-être parfois aller un peu plus loin pour ce territoire ou pour d’autres qui peuvent lui ressembler, aux caractères insulaires, montagneux ou très ruraux. C’est ce que modestement je proposerai en matière de fiscalité de la recherche et du développement, au titre du crédit d’impôt recherche et du crédit d’impôt innovation pour ne citer que ces deux exemples.
Oui, madame la présidente.
Monsieur le secrétaire d’État, les parlementaires de la Corse sont unanimes à souhaiter des débats sereins sur tous ces points. Ils se réjouissent de votre écoute et de votre compréhension, même s’ils savent bien entendu que vous avez des impératifs, que vous devez assurer une égalité de traitement globale dans l’ensemble de la République. C’est la raison pour laquelle vous nous trouverez certainement actifs, mais en même temps compréhensifs, comme nous savons l’être.
J’ajouterai enfin que notre groupe, en particulier son président, Roger-Gérard Schwartzenberg, n’a pas toujours été enthousiaste sur un certain nombre de dispositifs, par exemple le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE. Notre président a longtemps plaidé pour un suivi et une évaluation du CICE. Il a eu raison, car les résultats analysés aujourd’hui ne sont pas ébouriffants en termes d’emploi et d’investissement. C’est un sujet sur lequel nous reviendrons.
Tout cela ayant été dit, sur la maison et sur le monde, vous savez monsieur le secrétaire d’État que vous pouvez compter sur la loyauté de notre groupe, même si, vous le savez aussi, la parole y demeure libre.
Nous abordons ce soir le dernier budget de la législature, lequel, pour l’heure, ressemble plus à une sorte d’épitaphe des occasions manquées qu’à un étendard de la réussite.
Avec 600 000 chômeurs de plus, avec une industrie fragilisée, avec trop de nos jeunes projetés hors de l’emploi et des apprentissages, avec des retraités et des salariés qui ont vu leur pouvoir d’achat au mieux stagner, au pire reculer, notre pays s’est malheureusement fracturé, abîmé et divisé. C’est le résultat du choix d’une politique d’austérité qui partout en Europe a fait tant de mal ces dernières années – on a oublié que notre pays aurait pu choisir un autre chemin.
Les atouts de la France ne manquent pourtant pas : de merveilleuses capacités d’innovation et de formation, une façade maritime unique, un patrimoine culturel et historique qui résonne partout sur la planète. Alors pourquoi cet échec ? Nous, députés du Front de gauche, estimons qu’il découle de l’alignement inconsidéré sur les exigences du capital financier mondialisé porté par les traités européens. La France, notre belle France, est terne quand elle laisse l’expertise comptable s’imposer face à la pensée politique.
Regardons la réalité : à mesure que l’empire de la haute finance s’étend, les inégalités se creusent, les crises économiques et financières s’enchaînent et les fraudes géantes s’accumulent. Notre monde est devenu complètement dingue. Les 61 personnes les plus riches de la planète possèdent autant que les 3,5 milliards d’êtres humains les plus pauvres. Qui peut raisonnablement penser que ce modèle a un quelconque avenir ?
Faut-il dès lors s’étonner que les conflits, notamment militaires, se généralisent ? Selon le Institute for Economics and Peace, un think tank mondial, seuls 11 pays sur les 162 suivis n’étaient pas en guerre en 2014, ce qui marque une très forte dégradation par rapport à 2007.
L’ennemi, c’est toujours la finance, monsieur le secrétaire d’État, cette finance qui s’est accélérée, qui se joue des règles territoriales, qui pèse sur les peuples avec trop souvent la complicité d’élites politico-administratives, et qui a comme conséquence la montée des haines et des divisions. Près de 1 150 000 milliards de dollars transitent entre les places financières, alors que seulement 40 000 milliards de dollars sont utiles à l’économie réelle, soit vingt-huit fois moins. Sans cesse, le capital financier exige que les travailleurs fassent des concessions salariales et les États des concessions fiscales. C’est la course à qui fera pire.
Le pire, ce sont des dérégulations dans tous les domaines, qu’il s’agisse des traités transatlantiques, le TAFTA et le CETA, ou, pour notre pays, des diktats sur le marché du travail imposés par les lois Macron ou El Khomri. C’est à tout ce système que la France doit s’attaquer. Certes, le combat n’est pas simple, mais au terme de ce quinquennat, voyons si les politiques publiques menées, concrétisées par les politiques budgétaires, auront permis d’avancer.
L’absence d’une véritable taxe sur les transactions financières incluant les mouvements spéculatifs intrajournaliers, l’absence d’une véritable séparation entre banques d’affaires et banques de dépôts, le refus de toucher au verrou de Bercy ou la frilosité à l’égard des dispositifs d’évasion fiscale mis en oeuvre par les grandes entreprises auront été autant de rendez-vous manqués. Le cas d’Apple et des 13 milliards dont les États européens ont été littéralement spoliés est exemplaire.
Quant à la politique fiscale menée depuis 2012, l’Observatoire français des conjonctures économiques – OFCE – vient d’en faire le pré-bilan. Et la sentence est claire : un renversement inédit de la fiscalité des entreprises vers les ménages s’est opéré au cours de ces cinq dernières années. Alors qu’en 2012 les entreprises contribuaient à hauteur de 19,8 points de PIB, ce ne serait plus que de 18,9 points en 2017, soit 20 milliards d’euros de moins. Pour les ménages, c’est exactement l’inverse : leur contribution passe de 24,2 à 25,7 points de PIB, ce qui correspond à une hausse 31 milliards d’euros. En outre, l’architecture fiscale reste toujours aussi injuste avec un impôt progressif, l’impôt sur le revenu, qui ne représente que 3,5 points de PIB alors que la TVA a fortement augmenté. Et il ne faut pas oublier la diète imposée par l’État aux collectivités locales, qui a entraîné un accroissement des impôts sur les ménages et accentué le déséquilibre territorial.
Au total, trop de nos concitoyens auront subi une pression fiscale injuste, à commencer par les pauvres, ainsi que les retraités et les classes moyennes, du fait surtout de la TVA. À y regarder de plus près, seuls les plus aisés y ont gagné, profitant des mécanismes d’optimisation. Le patrimoine des 500 Français les plus riches aura progressé de près de 25 % en cinq ans. C’est indécent !
Dans ce contexte, la cure d’austérité promise par une droite qui rêve de parachever la contre-révolution libérale à l’oeuvre depuis les années quatre-vingt est une surprime à l’indécence. Pourtant, bien des institutions, des livres et des recommandations appellent à cesser les politiques restrictives et à encourager l’investissement. C’est le cas du FMI – Fonds monétaire international. Toujours selon l’OFCE, en six ans l’investissement public est passé de 4,5 points de PIB en 2010, soit 86 milliards, à 3,2 points de PIB, soit 67 milliards d’euros. Ces orientations, terribles pour les territoires, obèrent l’avenir.
Surtout, le basculement de la fiscalité vers les ménages n’a pas produit les effets escomptés. Comme on pouvait s’y attendre ! Selon les études réalisées, chaque emploi sauvé ou créé par le CICE a coûté entre 287 000 et 574 000 euros : quel gâchis ! Vous souhaitez d’ailleurs l’aggraver en faisant passer le taux de ce crédit d’impôt de 6 à 7 %.
De ce fait, l’impôt sur les sociétés, que le MEDEF nous présente toujours comme le grand Satan, a quasiment disparu, mité par une assiette à gros trous. Il représentera 25 milliards à l’horizon 2018, soit 1,2 point de PIB, un rendement deux fois moins élevé que la moyenne de la zone euro. C’est pourquoi, plutôt qu’une baisse uniforme des taux d’impôt sur les sociétés, les députés du Front de gauche défendent l’idée d’une modulation de la fiscalité des entreprises en fonction de l’utilisation des bénéfices. Une entreprise qui crée de l’emploi, favorise la formation, augmente les salaires, investit dans la production doit être avantagée par rapport à une entreprise qui verse des dividendes. Et, nous le savons, ce ne sont pas les PME ou les TPE qui alimentent la chaudière de la spéculation, elles qui créent de l’emploi et des richesses sur tout le territoire.
Aujourd’hui, l’architecture fiscale, confirmée par ce projet de loi de finances pour 2017, n’est pas suffisamment juste et les niches se multiplient, formant un véritable chenil. Le prélèvement à la source qu’il est prévu d’instaurer fera l’objet d’un débat spécifique. Il pose un problème de confidentialité, car c’est l’entreprise qui viendra collecter l’impôt. Il n’a pas été conçu pour améliorer le taux de recouvrement, lequel s’élève déjà à 99 % : il a surtout vocation à préparer la fusion entre l’impôt sur le revenu et la CSG, qui consacrera le financement de la protection sociale non pas par la cotisation sur les richesses créées mais par l’impôt.
Ce nouvel impôt à la source pourrait être un moyen d’améliorer la progressivité des prélèvements, mais aussi le cheval de Troie de cette flat tax si injuste à laquelle rêve la droite. Pour notre part, nous estimons que cette législature aurait dû être celle de la progressivité fiscale, en basculant des impôts injustes tels que la TVA vers l’impôt progressif, qui compterait davantage de tranches. C’est ce que nous proposerons.
Dans le même temps, l’impôt de solidarité sur la fortune – ISF – aurait dû faire l’objet d’une revalorisation, d’un élargissement de l’assiette et d’un déplafonnement. Exonérer Mme Bettencourt de 61 millions d’euros d’impôts, soit plus que le budget annuel de la commune de Vierzon, c’est tout simplement injuste et inefficace.
Mes chers collègues, c’est aussi d’une autre utilisation de l’argent que nous avons besoin, une gestion portée par un véritable pôle bancaire public, et d’une vraie guerre contre l’évasion, la fraude ainsi que l’optimisation fiscales. Chaque année, ce sont plus de 1 000 milliards d’euros en Europe qui sont soustraits aux budgets des pouvoirs publics, dont 60 à 80 milliards rien que pour la France. Comment peut-on encore accepter cela, alors que l’on demande à chacun, à juste titre, d’aller payer son impôt sur le revenu ou sa taxe d’habitation à son centre des impôts ?
Sans doute faut-il se rappeler que le président de la Commission européenne a dirigé l’État où a éclaté le scandale du LuxLeaks, ou que certains anciens commissaires européens fraudent ou se vendent aux établissements bancaires qui jouent avec les paradis fiscaux. Ces liaisons dangereuses d’une oligarchie financière délétère portent d’ailleurs une grande responsabilité dans la défiance des peuples et les divisions et les haines qui en résultent. Avec 1 000 milliards d’euros en Europe, nous disposerions d’une manne pour lancer réellement le plan de transition écologique, porteur d’emplois et de formations, pour une nouvelle ère de solidarité et de paix et pour des services publics de qualité.
Au lieu d’avoir l’oeil rivé sur les 3 % de déficit public, au lieu de se soumettre à la domination de la dette établie par les marchés financiers, nous aurions là une espérance pour faire converger les peuples. Comme le dit le Prix Nobel Joseph Stiglitz, il faut rompre avec le « pacte de suicide collectif » préconisé en Europe.
Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il peut être tentant de s’en tenir à la discussion du déficit structurel ou conjoncturel. Il peut être sympathique d’ergoter sur un taux de croissance à 1,3 ou 1,5 % – la différence, c’est 4 milliards d’euros, c’est-à-dire moins du dixième des dividendes versés par les entreprises du CAC 40 en 2015. Il peut être satisfaisant intellectuellement de débattre sur toutes les dispositions du projet de loi de finances, sachant qu’en réalité, le débat parlementaire n’agit en fin de compte que sur 0,5 à 1 % du budget. C’est malheureusement le temps de l’économisme, de l’expertise-comptable, et non du destin collectif.
Pour nous, députés du Front de gauche, le grand enjeu de 2017 sera de remettre l’humain au coeur des politiques publiques, avant de satisfaire les « banksters » qui ont pris le pouvoir, les « too big to fail » – trop gros pour faire faillite – et « too big to jail » – trop gros pour aller en prison – qui nous assassinent. Et si nous ne pouvons que nous féliciter des tentatives pour réparer l’injustice faite aux retraités très modestes, comme nous saluons l’engagement de redonner des moyens humains pour assurer la sécurité, la justice, l’éducation, nous estimons que ce budget est dans la droite ligne d’une politique exclusive de l’offre, inefficace et injuste.
Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, madame la rapporteure générale, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, nous commençons aujourd’hui l’examen du cinquième et dernier projet de loi de finances de cette législature. Le groupe socialiste, écologiste et républicain l’aborde avec la même détermination que les quatre précédents, et même une détermination plus marquée encore. Car je l’affirme ici sans détour : ce budget pour 2017 est un bon budget, un budget en cohérence avec la politique économique et budgétaire conduite depuis 2012 pour le redressement du pays, un bon budget pour la France.
J’irai donc à l’essentiel. Depuis le début du quinquennat, notre majorité a été guidée par trois combats, des combats indissociables sur lesquels nous nous sommes engagés avec le Président de la République devant les Françaises et les Français en 2012. Oui, trois combats que nous avons menés de front avec détermination et constance depuis quatre ans : celui des réformes pour la croissance et l’emploi, celui de l’assainissement des comptes publics et celui du renforcement de la justice fiscale et sociale.
Sur le front de la croissance et de l’emploi, nous avons répondu présent. Les premiers résultats sont là et ils doivent être confortés. Le CICE voté en 2012 et le pacte de responsabilité et de solidarité adopté en 2014 ont permis de restaurer la compétitivité de nos entreprises et de renouer avec la création d’emplois. Le taux de marge des entreprises, qui n’avait cessé de baisser sous les deux précédents quinquennats, a retrouvé son niveau d’avant-crise et on en constate les effets en 2016 sur l’investissement des entreprises et sur les créations d’emploi. Cet effort d’une ampleur jusqu’alors inconnue en faveur de nos entreprises porte ses fruits. Il doit donc être conduit à son terme, monsieur le secrétaire d’État, conformément aux engagements pris en 2014. Nos entreprises ont en effet besoin de stabilité, de visibilité et de prévisibilité – et c’est ce que permet ce projet de loi de finances.
Je vous l’assure donc, monsieur le secrétaire d’État, le groupe socialiste soutiendra sans réserve la réorientation des mesures du pacte de responsabilité, d’abord en direction des TPE et PME, mais aussi de façon à nous permettre de gagner la bataille de l’attractivité.
Oui, nous soutiendrons l’augmentation du taux du CICE, dispositif que les entreprises se sont aujourd’hui pleinement approprié, qui passera donc de 6 % à 7 % de la masse salariale jusqu’à 2,5 SMIC. Il s’agit d’une mesure favorable à l’investissement, à l’emploi, au pouvoir d’achat et d’abord aux PME qui, je le rappelle, en bénéficient pour plus de la moitié d’entre elles.
Oui, nous soutiendrons également la réduction progressive du taux de l’impôt sur les sociétés à 28 % pour toutes les entreprises à l’horizon 2020 et dès 2017 pour les PME. Avec cette mesure, nous relèverons pleinement le défi de l’attractivité à un moment où, avec le Brexit, les choix d’investissement des entreprises vont se réorienter.
La France n’est pas une île en Europe et cet objectif que nous voterons, ce taux à 28 % à l’horizon 2020, est une bonne nouvelle pour toutes les entreprises, notamment les plus grandes, qui ont besoin d’une visibilité dans la durée, et donc aussi une bonne nouvelle pour l’investissement et conséquemment, à terme, pour l’emploi.
Mesdames et messieurs de l’opposition, vous le savez, et vous vous en délectez parfois, notre majorité aime le débat. Elle a beaucoup débattu de ces mesures, que d’aucuns ont contestées à gauche et contestent encore pour certaines et certains d’entre eux. À défaut d’avoir soutenu et voté ces mesures, ce que vous n’avez pas fait depuis 2012, vous devriez au moins avoir l’honnêteté politique et intellectuelle de reconnaître cet effort sans précédent en faveur de la compétitivité de nos entreprises, effort que vous n’aviez pas fait et que nous, nous faisons.
La réalité, c’est que votre bilan en matière de compétitivité n’est pas à la hauteur de vos indignations du moment. Ce ne sont pas les surenchères sur ce sujet dans le cadre de vos primaires qui y changeront quoi que ce soit. J’ai d’ailleurs observé que les chefs d’entreprise eux-mêmes, à juste raison, n’y croient pas, comme nous l’avons vu cet été lors de l’université du MEDEF.
La réalité, c’est que la compétitivité des entreprises, dont vous parlez souvent, et même tout le temps, surtout pour justifier une remise en cause du droit social dans notre pays… La réalité, donc, c’est que la compétitivité de nos entreprises, c’est vous qui en parlez et nous qui la restaurons.
Sur le front des finances publiques, là encore, nous avons répondu présent : les résultats sont là et ils doivent être également confortés. Sur ce plan, nous avions là encore un chantier de taille devant nous. Pour les amnésiques, et ils sont nombreux à la droite de cet hémicycle – le président de la commission des finances oublie lui-même trop souvent qu’il a été pendant dix ans rapporteur général du budget – je rappelle que la situation des comptes publics au printemps 2012 était insoutenable. Le déficit public dépassait les 5 % du PIB, le poids de la dette s’était accru de 25 points de PIB entre 2007 et 2012 et de 1 000 milliards entre 2002 et 2012. Nous avons ramené le déficit public à 3,3 % en 2016 et nous le ramènerons sous les 3 % en 2017 – à 2,7 % exactement. Quant à la dette, nous en avons limité la progression à 6 points entre 2012 et 2017 et elle est aujourd’hui stabilisée.
Notre majorité est donc bien celle qui a permis de mettre un terme à la spirale de l’endettement public. Notre politique budgétaire est crédible, comme en atteste le niveau extrêmement bas des taux auxquels se finance notre pays. L’emprunt à dix ans s’effectue à 0,1 %, contre 4 % il y a cinq ans. Notre réussite est là et de tels taux, comme dit le ministre Sapin, ne tombent pas du ciel.
J’ai bien compris que pour vous, mesdames et messieurs de l’opposition, cette réalité-là, une réalité toujours confirmée à chaque alternance, est insupportable. Oui, comme je l’ai dit tout à l’heure en réponse à votre motion de renvoi en commission, madame Dalloz, chaque fois qu’elle est appelée aux responsabilités, la gauche redresse les comptes publics.
Et oui, chaque fois que la droite gouverne, les déficits se creusent et la dépense publique s’envole.
Vous qui demandez que la commission des finances en reste aux chiffres et aux faits, regardez la séquence des vingt dernières années et vous verrez que c’est exactement ce qui se passe !
Amnésiques au dernier degré quant à vos échecs passés, vous entonnez l’air de l’insincérité de ce budget et des déficits cachés, pour mieux justifier vos errements futurs. Car le débat des primaires de la droite est un festival d’annonces de déficits futurs, à raison de baisses d’impôts aussi massives qu’injustes sur le plan social et inefficaces sur le plan économique, et qui sont surtout non financées, ou plutôt financées par des coupes tellement drastiques dans les dépenses publiques que vous n’osez même pas les énoncer dans le détail et dont on sait déjà qu’elles n’ont aucune chance de se réaliser intégralement.
Sourires.
Depuis jeudi dernier, nous connaissons d’ailleurs un peu les contours de ce qui constituerait une thérapie de choc à la fois injuste et inefficace, comme l’opinion commence à le percevoir, ainsi que j’ai pu le constater ce week-end sur les marchés de ma circonscription.
Réforme des prestations de santé et de solidarité, report de l’âge légal de départ à la retraite, dégressivité des allocations chômage, reprise acharnée de la réduction du nombre de fonctionnaires, recentralisation assumée… Bref, vous ajoutez à vos inconséquences du passé votre irresponsabilité pour l’avenir. Qu’adviendrait-il, mes chers collègues, si demain une nouvelle majorité décidait de creuser brutalement, abruptement, aveuglément les déficits, dilapidant ainsi les efforts réalisés par les Français depuis cinq ans ? Pour nos créanciers, qui sont aux deux tiers non-nationaux, quelle serait la garantie de la soutenabilité d’une stratégie budgétaire hasardeuse ? Les Français, notamment les plus modestes, paieraient le prix fort de cette politique !
Le résultat, là encore, c’est que vous oubliez le sérieux budgétaire alors que nous, nous l’appliquons. Nous avons réussi là où vous avez si souvent reculé : la part des dépenses publiques a baissé de manière continue pendant cette législature quand, avec vous, elle augmentait de 3,6 % par an. Avec nous, elle a augmenté de 1,3 % seulement, dans le respect de nos priorités politiques que sont l’éducation, l’emploi, la culture, la sécurité, je le dis à nos camarades communistes.
Le procès en insincérité budgétaire que nous fait la droite, qu’il s’agisse des prévisions macroéconomiques ou de la trajectoire des dépenses et des recettes, notamment en 2018 et au-delà, est à la fois totalement injustifié et, évidemment, infondé. Il faut les excuser, mes chers collègues, car c’est dans leur culture, presque dans leurs gènes ! C’est ce qu’ils ont fait continûment entre 2002 et 2012. Pour avoir écrit nombre de rapports de la Cour des comptes sur les finances publiques, nous avons pu comparer chaque année les hypothèses macroéconomiques de la loi de finances et les réalisations : hors deux années, sur les deux quinquennats, ces réalisations ont été évidemment inférieures aux prévisions…
C’est bien d’ailleurs pour cela que nous avons trouvé une situation si difficile en 2012, monsieur le président de la commission des finances devrait s’en souvenir : en matière d’hypothèses macroéconomiques foireuses et d’impasses sur les dépenses, comme l’a montré un audit de la Cour des comptes que nous avons peut-être eu tort politiquement de ne pas exploiter assez, le PLF 2012 fut un modèle du genre !
Donc, monsieur le secrétaire d’État, en 2017 comme pour les quatre années précédentes, nous poursuivrons le travail de redressement de nos comptes publics. Je tiens à vous assurer que le groupe socialiste veillera à ce que l’équilibre budgétaire du projet de loi de finances soit préservé, équilibre dont il est comme vous comptable devant les Françaises et les Français.
Sur le front de la justice fiscale et sociale enfin, oui nous avons aussi répondu présent, oui les résultats sont là et doivent être confortés.
Oui, nous assumons d’avoir dû au début de cette législature appeler nos concitoyens comme nos entreprises à un effort, un effort que nous avons voulu justement réparti et dont nous voulons aujourd’hui que nos concitoyens bénéficient des premiers résultats. Je dois faire un aveu, que d’autres pourraient partager : il est vrai qu’à ce moment-là, nous n’avions pas perçu à quel point les mesures d’augmentation d’impôts que vous aviez décidées en 2011 – uniquement des augmentations, aucune économie – avaient d’ores et déjà étouffé l’économie et entamé le pouvoir d’achat des Français.
Oui, nous avons choisi d’appeler tous les Français à faire des efforts, en faisant bien évidemment davantage contribuer ceux qui en avaient le plus les moyens – ce qui n’avait manifestement pas été le souci de nos prédécesseurs.
Le rapport économique, social et financier annexé au PLF pour 2017 est très instructif à cet égard. Il a certes le « défaut » de déboulonner la rhétorique de l’opposition, mais le constat est clair et sans appel : entre 2012 et 2013, les prélèvements obligatoires ont certes augmenté de 26 milliards, mais les deux tiers de cette somme résultaient de décisions que vous aviez votées. Le niveau de vie des Français, après avoir marqué le pas entre 2012 et 2014, a retrouvé dès la fin de l’année 2014 son niveau de 2012.
Oui, en 2016, et pour la première fois depuis quinze ans, nous baissons simultanément les prélèvements obligatoires, la dépense publique et les déficits. En dix ans, lorsque vous étiez aux affaires, vous ne l’avez pas fait une seule fois ! Oui, et cela n’est pas rien, le niveau de vie des Français du premier décile, les plus fragiles, a progressé depuis 2012 de 5 %, du fait de la politique de l’actuel gouvernement et de la majorité. Oui, mes chers collègues, les mesures de hausses d’impôts ont été compensées pour les huit premiers déciles.
Notre priorité a donc bien été de restaurer la situation des contribuables aux revenus les plus modestes qui étaient entrés dans l’imposition en raison des mesures accumulées depuis 2011. Je ne referai pas la liste des mesures que nous avons prises…
…mais elles représentent 6 milliards depuis 2014 et touchent plus de 12 millions des 17 millions des foyers fiscaux imposés.
En 2017, nous transformons l’essai avec une quatrième baisse consécutive d’impôt sur le revenu pour les ménages. Je n’ose repenser aux termes avec lesquels Mme Dalloz a qualifié cette baisse de 20 % de l’imposition pour 5 millions de foyers fiscaux… Elle a parlé d’aumône ! C’est cela que vous avez dit !
Outre cette baisse, nous voterons en seconde partie du PLF une mesure très attendue de nos concitoyens, et notamment des retraités – vous en avez parlé, monsieur le secrétaire d’État : la transformation en crédit d’impôt de la réduction d’impôt pour dépenses de service à domicile, la réduction d’impôt ne bénéficiant qu’aux retraités imposables, c’est-à-dire à ceux d’entre eux qui disposent de revenus suffisants pour payer l’impôt. Il n’y a pas que les gens qui paient l’impôt qui, la retraite arrivée, ont besoin d’aides à domicile ! Cette généralisation permettra donc d’étendre à l’ensemble des retraités la possibilité d’y avoir accès – et nous irons probablement encore plus loin au cours des débats, en particulier dans la discussion du PLFSS.
Il existe une différence de taille entre nous et la droite sur ces baisses d’impôt, je tiens à le souligner. Avec la droite, c’est plus de déficits, plus de dettes et, à terme, plus d’impôts, comme cela fut le cas avec, en son temps, la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite loi TEPA. Avec la gauche, ces baisses d’impôts sont financées.
La justice fiscale et sociale, c’est aussi la modernisation de notre fiscalité, que nous aborderons en seconde partie avec l’instauration en 2018 du prélèvement à la source. La rapporteure générale, le ministre et le secrétaire d’État en ont parlé. Je réserve mes interventions à ce sujet mais je note d’ores et déjà que cela fait partie des orientations préconisées par le rapport que m’avait demandé Jean-Marc Ayrault. Il s’agit d’une bonne et juste mesure de modernisation de notre impôt, qui facilitera la vie de près de 90 % de nos concitoyens. Nous devons donc la voter parce qu’il n’est pas besoin d’être docteur en droit fiscal, madame Dalloz…
Sourires.
…pour comprendre que le prélèvement à la source permettra tout simplement de supprimer le décalage d’un an entre la perception d’un revenu et le paiement de l’impôt correspondant, et donc facilitera la vie de tous ceux dont le revenu diminue d’une année sur l’autre – près de 30 % de nos concitoyens contribuables sont dans ce cas.
La justice fiscale et sociale, je le dis pour mémoire car, à ce stade, le PLF ne contient pas vraiment de mesures qui y soient relatives, consiste entre autres à renforcer les actions de lutte contre la fraude fiscale. Nous voyons d’ailleurs les résultats de cette action, avec des recettes nouvelles et constantes depuis 2014. Une telle lutte constitue une exigence morale, politique, sociale et économique.
Je salue, monsieur le secrétaire d’État, le rôle du Gouvernement et votre rôle personnel, comme celui de Michel Sapin, dans l’avancée des négociations internationales et européennes contre l’érosion des bases fiscales. Je le dis notamment à la gauche de l’hémicycle – et parfois à certains camarades socialistes qui pensent que nous n’allons pas assez loin : je les invite à regarder ce qui a été fait en la matière depuis trente ans et les pas qui ont été accomplis pendant ce quinquennat.
L’ensemble de ces éléments, pour conclure, conduit à une appréciation sans appel : le PLF pour 2017 est un bon budget. C’est un texte qui préserve notre souveraineté budgétaire et qui prépare l’avenir – car pour nous tous, membres de la majorité, c’est l’essentiel : il finance nos priorités politiques les plus fortes.
L’école et l’enseignement supérieur bénéficieront ainsi de 3 milliards de moyens nouveaux en 2017, et 11 712 postes supplémentaires seront créés au ministère de l’éducation nationale, 950 dans les universités. L’engagement de créer 60 000 postes dans l’enseignement pendant le quinquennat sera ainsi tenu. Qui viendra nous expliquer que c’est inutile ? À part la droite, je ne vois pas !
Les crédits supplémentaires en faveur de la sécurité s’élèvent à près de 2 milliards. Pour la première fois depuis 2009, une loi de programmation militaire est non seulement tenue mais également dotée de moyens nouveaux. Qui viendra nous reprocher d’en faire trop sur ce point, à part la droite ? Je ne vois pas. Mais le président de la commission des finances a dénoncé ce que l’on a appelé la dérive des dépenses publiques – qui n’ont augmenté que de 1,6 % contre 3,5 % en moyenne lorsqu’il les pilotait…
La mobilisation en faveur de l’emploi réaffirmée par le Président de la République à l’occasion de l’annonce du plan d’urgence en faveur de l’emploi en janvier 2016 et amplifiée cet été par la prolongation jusqu’au 31 décembre 2017 de la prime à l’embauche dans les PME se traduit par des moyens nouveaux très importants, de près de 2 milliards. Qui viendra nous dire que c’est beaucoup trop ? À part la droite, dans ce pays, je ne vois pas.
Mes chers collègues, c’est donc avec fierté,…
Sourires
…avec le sentiment du devoir accompli et la volonté de poursuivre l’oeuvre de redressement du pays dans la justice…
…que le groupe socialiste, écologiste et républicain au nom duquel je m’exprime s’engage dans ce débat parlementaire sur le projet de loi de finances pour 2017, un projet qui approfondit et renforce les changements commencés il y a cinq ans par le Gouvernement et sa majorité, un projet de loi de finances pour 2017 que nous soutiendrons et, monsieur le secrétaire d’État, que nous voterons.
L’ultime projet de loi de finances du quinquennat est devant nous. Il est dramatiquement classique, et classiquement dramatique. Soyons clairs : aucune réforme d’ampleur n’aura lieu dans ce projet de loi de finances. Même le prélèvement à la source, qui figure dans les articles additionnels et sur lequel il y aurait beaucoup à dire, ne peut pas être considéré comme une réforme d’ampleur.
Il n’y aura pas eu de « grand soir fiscal ». Abandonnée, la tentative d’introduire plus de progressivité dans la CSG ! Enterrée, l’ambitieuse fusion avec l’impôt sur le revenu ! Liquidée, la taxe à 75 % sur les très hauts revenus ! En revanche, le ras-le-bol fiscal aura émaillé le quinquennat. Le Président de la République s’étant mué en cigale un certain temps, il a chanté tout l’été des dépenses supplémentaires dans la perspective de mai 2017 !
Les hausses d’impôt du début de mandat, principalement ciblées sur les 10 % les plus aisés, suivies de baisses concentrées sur les classes moyennes, ont nettement accru la progressivité de l’impôt sur le revenu. La création de la prime d’activité a ciblé les aides sur les très bas revenus. Les baisses de charges dans le cadre du pacte de responsabilité ont abouti indirectement à un transfert de fiscalité des entreprises vers les ménages. L’autre évolution majeure porte sur la mise au barème des revenus du capital, qui a contribué à accroître la fiscalité sur le patrimoine de 50 % en dix ans.
Sous cette législature, la courbe de l’impôt sur le revenu n’aura jamais cessé de suivre une pente ascendante : il a progressé de près de 14 milliards d’euros entre 2012 et 2017 ! Si chacun s’accorde certes à dire que la réduction de la pression fiscale est un impératif pour redresser le pays, il ne faut pas battre en brèche le principe de justice fiscale : l’effort doit être réparti et ne saurait peser constamment sur les mêmes. Or, depuis 2012, les classes moyennes ont subi un véritable matraquage fiscal, au profit d’une politique tournée uniquement vers les ménages modestes.
J’en viens à la forme et aux orientations de ce projet de loi de finances. S’agissant du prélèvement à la source, M. le ministre de l’économie et des finances nous a indiqué tout à l’heure que ce mode de paiement de l’impôt avait été envisagé, dans le passé, par des gouvernements de gauche comme de droite, que les Français le souhaitaient et qu’il s’agissait là d’une promesse. Sur le principe, beaucoup d’entre nous auraient pu vous rejoindre : nous aurions pu tenter de définir ensemble un nouveau dispositif… mais à condition de l’associer à une simplification de l’impôt sur le revenu, ce qui n’est malheureusement pas le cas.
En effet, la réforme que vous proposez est complexe, à l’heure où tout le monde souhaite davantage de simplification. Les entreprises devront gérer cette complexité, se faire le collecteur de l’impôt, sans aucune valeur ajoutée pour elle et au risque d’une dégradation des relations en leur sein. Le dispositif pose en outre un problème de confidentialité, qui a déjà été soulevé. Par ailleurs, le mécanisme proposé sur certains revenus, comme les revenus fonciers ou ceux des travailleurs non salariés, s’apparente davantage à un mécanisme d’acompte et de solde d’impôt qu’à une retenue à la source.
S’agissant des entreprises, vous avez jugé cohérent de présenter des perspectives d’évolution de l’impôt sur les sociétés pour quatre années. Nous pouvons vous rejoindre sur ce point, car les entreprises réclament davantage de lisibilité, de crédibilité et de visibilité. Mais pourquoi le faire à l’occasion de ce dernier budget du quinquennat, de ce premier budget de l’après-Hollande ? Pourquoi ne pas l’avoir fait dès votre premier projet de loi de finances ?
Si vous défendez la stabilité fiscale, ce qui est une bonne chose pour les entreprises, en définissant, à l’article 6, une trajectoire de l’évolution de l’impôt sur les sociétés jusqu’en 2020, le dispositif de taxation des actions gratuites, quant à lui, ne présente pas la même cohérence. En effet, un peu plus d’un an après avoir été voté, le dispositif prévu par la loi Macron fait déjà l’objet d’une révision ! Sans porter de jugement sur le fond, je veux réagir sur la forme : remettre en cause un dispositif voté en 2015 avant toute évaluation, c’est introduire une instabilité fiscale, mais c’est surtout la preuve de votre inconstance fiscale et, pire, de votre incohérence.
Au bout du compte, ce projet de loi de finances ne sera pas révolutionnaire, et surtout pas réformateur. Quel paradoxe, quand on sait, depuis une étude récente, que plus d’un Français sur deux adhère au discours affirmant l’urgence d’engager des réformes trop longtemps différées ! Vous préférez laisser la prochaine majorité gérer et réparer vos errements fiscaux.
En conséquence, tous ces éléments constituent un obstacle dirimant à l’adoption de votre projet de loi de finances pour 2017 qui, en l’état, est difficilement acceptable, au même titre que les précédents.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
La discussion de ce projet de loi de finances, le dernier du quinquennat, est l’occasion de faire le bilan de la politique menée depuis cinq ans en matière de finances publiques, et de répondre à quatre questions. Première question : le poids des prélèvements obligatoires a-t-il été réduit ? Deuxième question : les dépenses publiques ont-elles été tenues ? Troisième question : les objectifs de réduction des déficits publics ont-ils été atteints ? Dernière question : le poids de la dette publique continue-t-il à s’aggraver ?
Première question donc, sur le poids des prélèvements obligatoires. Tout d’abord, il convient de rappeler que les hypothèses macroéconomiques de croissance du produit intérieur brut permettant de calculer les recettes ont été manifestement surévaluées pour 2016 et 2017. En effet, à la différence de ce qu’il avait fait lors des budgets pour 2014 et 2015, le Gouvernement n’a pas retenu le taux de croissance résultant du consensus des économistes. Or celui-ci est plutôt de 1,3 ou 1,4 % pour 2016, et de 1,2 ou 1,3 % pour 2017.
Il était de 1,7 % avant l’été !
Ainsi, la surévaluation des recettes est de l’ordre de 4 à 6 milliards.
M. le secrétaire d’État éclate de rire.
Monsieur le secrétaire d’État, 0,3 % de PIB représentent 6 milliards d’euros, et le taux de prélèvement est de 45 % : il n’est pas nécessaire de sortir de Polytechnique pour faire le calcul !
Mais non !
Une différence de 0,3 à 0,5 point de PIB, pour 2016 et 2017 ? Si !
Le constat, c’est que les prélèvements obligatoires n’ont cessé d’augmenter depuis 2012, et qu’ils continueront à progresser en 2017.
C’est autre chose.
En effet, le taux de prélèvements obligatoires est passé de 43,8 % en 2012 à 44,5 % en 2016, et il restera à 44,5 % en 2017. Cela représente une hausse de 0,7 point de produit intérieur brut en cinq ans : il n’y a donc, contrairement à ce que l’on entend, aucune baisse des prélèvements obligatoires. Mais, d’après les informations fournies par madame la rapporteure générale, ce sont les prélèvements obligatoires sur les ménages qui ont connu une hausse continue, et très forte, de 1,5 point de produit intérieur brut, passant de 24,2 % du PIB en 2012 à 25,7 % en 2017, alors que le taux de prélèvements obligatoires sur les entreprises, après avoir quelque peu augmenté de 2012 à 2013, en passant de 19,6 à 20 %, se réduit lentement, pour atteindre 18,8 % du PIB en 2017, soit une baisse de 0,8 point en cinq ans.
Sur la durée du quinquennat, les prélèvements obligatoires auront augmenté de près de 105 milliards, que cela vous plaise ou non, monsieur le secrétaire d’État, puisqu’ils sont passés de 913 milliards en 2012 à 1 018 milliards en 2017, d’après vos propres prévisions. Pendant la même période, le produit intérieur brut s’est accru de 200 milliards, passant de 2 087 milliards en 2012 à 2 287 milliards en 2017. Ainsi, ce sont 52 % de la richesse supplémentaire créée qui ont été prélevés au cours de ces cinq années par le système public. Et l’on s’étonne d’entendre parler sans cesse de ras-le-bol fiscal ! Bref, les déclarations du ministre des finances selon lesquelles, depuis le printemps 2014, le Gouvernement s’est efforcé de ne plus proposer au vote du Parlement de nouvelles hausses d’impôt ou de charges, sont démenties par les faits.
Prenons l’exemple de l’impôt sur le revenu. Vous avez déclaré, monsieur le ministre des finances et des comptes publics, que l’ensemble des mesures prises depuis 2012 n’aura pas conduit à augmenter les recettes de l’impôt sur le revenu, et qu’elles les auront même réduites. On rêve ! Il s’agit là d’une contre-vérité, monsieur le ministre. En effet, l’impôt sur le revenu, loin d’avoir baissé, a augmenté de 14 milliards d’euros depuis que François Hollande est au pouvoir. Il est passé, selon vos propres chiffres, de 59 milliards en 2012 à 73,4 milliards en 2017. Pour le seul exercice 2017, la hausse du produit de l’impôt sur le revenu est de 1,9 milliard, après une mesure de réduction de 1 milliard. Ainsi, sans cette baisse, le produit de l’impôt sur le revenu se serait accru de 4 %. Vous ne baissez pas les impôts : vous ne faites que freiner leur hausse, ce qui est tout à fait différent.
À l’égard des entreprises, vous avez mené une politique de gribouille. Après les avoir accablées d’impôts et de cotisations sociales entre 2012 et 2013, vous avez enfin procédé à des allégements. Mais là encore, ces mesures n’ont permis de réduire que de 0,8 point de richesse nationale la pression fiscale sur les entreprises, à hauteur de 17 milliards.
La réponse à ma première question est donc claire : non seulement le poids des prélèvements obligatoires n’a pas été réduit, mais il a constamment augmenté, essentiellement pour les ménages.
J’en viens à ma deuxième question : les dépenses publiques ont-elles été tenues ? Elles sont passées, en tenant compte des crédits d’impôt, de 1 186 milliards, en 2012, à 1 280 milliards en 2017, soit une augmentation de 94 milliards, correspondant à une hausse de 8 % en cinq ans, soit 1,6 % par an. Mais, si l’on a connu une décélération régulière de la dépense publique entre 2012 et 2015, l’on assiste à une remontée ces deux dernières années : 1,3 % en 2015 et 2016, et 1,6 % pour 2017.
En outre, les objectifs que vous affichez tiennent compte de certaines économies que vous ne précisez pas ou qui sont totalement irréalistes. Je prendrai quelques exemples. Ainsi, vous escomptez 1,6 milliard d’euros d’économies des négociations sur la convention UNEDIC. Mais, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, comment pouvez-vous anticiper des économies résultant de négociations entre les partenaires sociaux qui n’ont pas encore commencé…
…et alors même que le président du MEDEF a repoussé la reprise des négociations sur une nouvelle convention d’assurance-chômage après l’élection présidentielle, c’est-à-dire à la mi-2017 ?
Ce n’est pas parce que l’un des acteurs est irresponsable qu’ils le sont tous !
Il n’empêche que c’est la position du patronat, et que le système est paritaire.
Il n’est pas le seul du côté du patronat !
Le Haut conseil des finances publiques lui-même a jugé ces économies complètement irréalistes. Même à supposer que les négociations soient menées tambour battant et qu’elles aboutissent avant l’été, comment voulez-vous faire 1,6 milliard d’économies en quelques mois ? C’est totalement impossible !
Concernant l’objectif national des dépenses d’assurance maladie – ONDAM – vous dites porter les économies à 4,1 milliards en 2017, alors que vous n’avez pu en réaliser, avec de grandes difficultés, que 3,2 milliards en 2016. Il est donc malheureusement très probable qu’une bonne partie de ces économies, de l’ordre de 900 millions d’euros, ne sera pas réalisée, et que cela se traduira, de surcroît, par une hausse du déficit de fonctionnement des hôpitaux publics, largement passée sous silence.
Vous vous basez en effet sur un tendanciel vieux de quinze ans, selon lequel la croissance tendancielle des dépenses d’assurance maladie serait de 3,6 %. Mais cela fait longtemps que ce n’est plus le cas ! Depuis 2002, elle n’a fait que ralentir, les gouvernements successifs ayant pris quelques mesures pour freiner la hausse de la dépense. Il serait plus sérieux de calculer les économies par rapport à la situation de l’année précédente, c’est-à-dire 2016, et non par rapport à un tendanciel qui ne correspond plus à rien.
Enfin, les sommes promises pour recapitaliser Areva, 5 milliards d’euros, ne pourront pas être entièrement considérées comme des dotations en capital. Elles seront très probablement requalifiées, pour la plus grande partie, en comptabilité nationale, voire, par l’Union européenne, en subventions. En effet, quel investisseur avisé investirait 5 milliards dans Areva ? Quant aux traditionnelles sous-budgétisations, notamment sur les opérations extérieures – OPEX – ou l’aide médicale d’État – AME–, on peut espérer que votre réserve de 9 milliards permettra d’y faire face.
Rappelons que, pour l’année 2015, la Cour des comptes a jugé que l’effort d’économies réalisé s’est élevé à 12 milliards d’euros, ce qui, à mon sens, est encore une surestimation.
Vous contestez la Cour des comptes ?
Si cet effort est réel, il reste sensiblement inférieur à celui affiché dans le programme de stabilité, à hauteur de 18,1 milliards. Pour 2016, la Cour des comptes souligne que les risques qui pèsent sur la réalisation de la trajectoire de dépenses et de solde sont très importants, alors même que cette trajectoire ne suffirait pas à restaurer la situation des finances publiques à l’horizon 2020. Il nous paraît donc inimaginable, alors que le Gouvernement n’a jamais tenu ses objectifs d’économies depuis 2015, qu’il puisse soudainement y parvenir en 2017.
Troisième question : les objectifs de réduction des déficits publics ont-ils été tenus ? Je rappellerai jusqu’à la fin de cette législature, à temps et à contretemps, l’engagement no 9 du candidat Hollande : « Le déficit sera ramené à 3 % en 2013 et l’équilibre sera atteint en 2017 ».
L’objectif de 3 %, loin d’avoir été atteint en 2013, ne le sera toujours pas en 2017. Le Haut conseil des finances publiques estime improbables les prévisions de réduction des déficits du projet de loi de finances pour 2017, à savoir un passage de 3,3 % de déficit en 2016 à 2,7 % en 2017. Il considère également comme incertain le retour en 2017 du déficit nominal sous le seuil de 3 % du PIB.
En effet, si nous tenions compte des 3 à 5 milliards de pertes de recettes liées à des hypothèses de croissance surestimées, de l’anticipation dès 2017 de 1,3 milliard d’euros de recettes de 2018, de l’augmentation du taux du CICE de 6 à 7 %, dont l’impact budgétaire de 3,2 milliards d’euros est reporté de 2017 à 2018, et du nouveau crédit d’impôt pour l’emploi à domicile en faveur des retraités, dont le coût de 1 milliard est reporté en 2018, nous perdrions environ 11 milliards de recettes par rapport à vos prévisions. Si l’on y ajoute les 6,5 milliards d’économies qui ne seront pas réalisées, on arrive à un total de l’ordre de 18 milliards, soit un écart de 0,8 % de PIB, ce qui signifie que le déficit pour 2017 se situerait entre 3,1 et 3,5 %.
Quatrième question : le poids de la dette publique continue-t-il à s’aggraver ? Je rappelle que François Hollande avait promis que la dette serait ramenée de 88,7 % du PIB en 2012 à 80,2 % en 2017. En fait, sur cette période, elle est passée de 89,6 % en 2012 à 96 % en 2017, augmentant de 6,4 points de produit intérieur brut au lieu de baisser de 8,5 points. Cela ne fait jamais que 15 points d’écart entre les promesses du candidat Hollande et la réalité, soit 330 milliards d’euros !
Et qui était responsable des 25 points d’augmentation de la dette avant notre arrivée au pouvoir ?
C’est ridicule.
Vous êtes un complotiste, monsieur de Courson !
Sourires.
Au reste, mes chers collègues, cette somme est sous-évaluée. Vous mettez en avant une légère baisse, apparente, du poids de la dette publique : de 96,2 % du PIB en 2015, elle doit passer à 96,1 % en 2016 et à 96 % en 2017. Mais ceux d’entre vous qui ont un peu de bon sens doivent se demander comment il est possible de parvenir à une telle baisse alors que la dette devrait logiquement continuer à augmenter à hauteur du montant du déficit ! Que se passe-t-il ? Quel est cet écart entre le montant du déficit et le montant effectif de la dette ?
Le Gouvernement a tout simplement trouvé la pierre philosophale, celle qui permet de faire croire que la dette n’augmente plus : la prime d’émission ! D’ailleurs, vous devriez aller plus loin : il suffirait d’émettre des bons du trésor à 6, 7 ou 8 % pour vous permettre d’afficher une baisse de la dette publique en valeur absolue…
Oui, mais à hauteur de 2 à 3 milliards d’euros par an !
Les chiffres sont très intéressants : le montant cumulé des primes d’émission de 2012 à 2015 a atteint 45,3 milliards, et avec une augmentation sensible puisqu’elles étaient de près de 23 milliards l’année dernière. En 2016 et 2017, elles continueront de dépasser les 20 milliards. Sur la durée de la législature, les primes d’émission atteindront selon mes calculs un montant cumulé de 95 milliards d’euros – je me suis peut-être trompé de 4 ou 5 milliards, mais cela ne change pas grand-chose.
Cela représente un peu plus de 4 points de PIB. Autrement dit, la dette publique atteint 100 % ! J’avais promis de décerner une médaille au ministre lorsque la barre des 100 % serait franchie, ce qui devait se produire selon moi en 2017. Eh bien, mes chers collègues, c’est le cas ! La dette atteint non pas 96 %, mais 100 % du PIB.
Ce n’est pas un complot ! Je décris simplement le mécanisme des primes d’émissions, qui consiste à faire baisser la dette au sens maastrichtien et à plomber en contrepartie les charges financières des exercices futurs. C’est tout simple !
Voici donc la réponse à ma quatrième question : non, la dette publique ne baisse pas, même par rapport au PIB. Elle continue à augmenter et atteint maintenant les 100 %.
Mes chers collègues, pour conclure, il est à présent évident, à travers ce projet de loi de finances pour 2017, que le Gouvernement a échoué. Il a échoué à faire baisser structurellement la dépense publique, même si, n’étant pas un homme excessif, je reconnais qu’il a fait des efforts – mais tout à fait insuffisants. Surtout, il n’a pas fait de réformes structurelles, pourtant nécessaires pour réduire la dépense publique. Vous aurez profité des réformes structurelles sur les retraites que nous avons faites – et je n’aurai pas la cruauté de relire les déclarations de vos collègues à l’époque ! L’impact de ces réformes en 2017 est de l’ordre de 20 milliards. L’excédent de 2 milliards du régime général de retraite est donc lié aux réformes votées par l’actuelle opposition.
Vous avez également échoué à réduire la dette publique, et surtout échoué à redonner confiance à nos concitoyens, puisque François Hollande n’a fait que semer des illusions depuis 2012.
En conclusion, ce projet de loi de finances pour 2017 est la triste illustration des illusions perdues du Président de la République : loin d’améliorer la situation de notre pays, François Hollande cherche à tout prix à dissimuler l’ampleur de son échec en multipliant les artifices et les tours de passe-passe budgétaires, et en léguant à la prochaine majorité des bombes budgétaires dont l’ordre de grandeur est de 10 milliards d’euros. C’est pourquoi le groupe UDI votera contre ce projet de budget.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
J’aborderai dans mon intervention l’envers du décor de la politique budgétaire menée sous ce quinquennat. Mais, en préalable, j’aimerais faire un peu de pédagogie – cela me rappellera des souvenirs – sur ce qui en constitue le symbole, le pacte de responsabilité et de solidarité, en donnant quelques éléments de compréhension à nos concitoyens.
Qu’est-ce que le pacte de responsabilité et de solidarité ? Il s’agit d’une vaste opération budgétaire qui consiste à aider inconditionnellement et indistinctement les entreprises en leur accordant des crédits d’impôts et des baisses de cotisations sociales, financés par des réductions dans les budgets de l’État, des collectivités territoriales et de la sécurité sociale. Par exemple, pour financer les 20 milliards d’euros annuels de crédit d’impôt que coûte le CICE, octroyé sans condition ni ciblage, il a été prévu de faire des économies. Ainsi, sur trois ans, en plus des mesures qui affecteront le budget général de l’État, 11 milliards d’euros d’économie seront réalisés sur la sécurité sociale et les hôpitaux, et 10 milliards sur le budget des collectivités territoriales – sur lequel je reviendrai dans un instant.
Derrière ces chiffres et cette politique qui manque cruellement d’originalité, d’efficacité et de justice, il y a des femmes, des hommes ; il y a le quotidien vécu par nos concitoyens, celles et ceux qui utilisent le service public et le font vivre. Derrière l’artifice comptable d’un trou de la Sécurité sociale qui serait désormais comblé, nos hôpitaux saignent. La situation y est explosive. Les coupes budgétaires qui les affectent tout autant que l’ensemble du système de soin entraînent une réduction drastique de moyens, ainsi que des suppressions de poste. La chasse au lit, avec le virage ambulatoire, y concourt également. Tout cela met sous tension les personnels hospitaliers, pourtant si courageux face à la charge de travail et aux baisses de moyens. Les conséquences sur l’accueil des personnes hospitalisées sont réelles. Pire, de nombreux établissements n’ont même plus accès au crédit pour mettre à niveau leurs plateaux techniques.
La Cour des comptes rappelait récemment que les dépassements d’honoraires et les remboursements insuffisants des consultations, de l’optique et des soins dentaires rendaient plus difficile l’accès aux soins des personnes à bas revenus. Selon une étude du Collectif interassociatif sur la santé, 36 % des Français, dont la moitié des 25-34 ans, ont renoncé ou différé des soins en raison de leur coût. Est-ce là le prix acceptable de l’équilibre de la Sécurité sociale ?
Les seules solutions préconisées restent malheureusement ancrées dans les logiques comptables de réduction des dépenses, alors que d’autres voies devraient être approfondies pour doter la Sécurité sociale, ce bien commun, de nouveaux financements. L’exemple de l’hôpital public est malheureusement transposable à l’ensemble du service public : dans toutes nos circonscriptions, nous devons faire face à des fermetures de caisses d’allocations familiales, d’accueils de caisses primaires d’assurance maladie, de gares et de bureaux de poste, à la réduction des horaires d’ouverture des sous-préfectures, ou à la disparition de brigades de douaniers.
Les collectivités territoriales sont également en souffrance et paient, elles aussi, le prix de cette politique démesurée de l’offre. Depuis la loi de finances pour 2015, après le coup porté à l’autonomie financière des collectivités par la suppression de la taxe professionnelle décidée dès 2009, les concours de l’État sont en diminution drastique : 3,5 milliards en 2015, 3,4 milliards en 2016 et encore 2,63 milliards prévus dans cette loi de finances. Ce n’est pas la réduction de moitié de la baisse pour le bloc communal, présentée comme une avancée, qui va permettre aux collectivités de faire face aux immenses défis auxquels elles sont confrontées, et notamment de remplir leur rôle d’amortissement des effets de l’accroissement des inégalités et de la pauvreté.
C’est le service public local qui s’en trouve affecté, tout autant que l’investissement. Nicolas Sansu a démontré, dans une commission d’enquête dont le rapport a été censuré, combien les conséquences des baisses de dotations de l’État ont affaibli les communes et les EPCI, et diminué leurs capacités d’investissement. Entre 2013, première année pleine du quinquennat, et 2017, l’investissement du bloc communal sera passé de près de 38 à seulement 26 milliards d’euros.
Mais cela ne semble pas suffire à la Cour des comptes, qui préconise encore plus d’économies, moins d’agents du service public, donc plus de chômage et moins de services publics locaux. Les députés du Front de gauche proposeront, dans cette lecture de la loi de finances, d’inverser cette logique destructrice et de rendre aux collectivités territoriales leur autonomie financière avec, dès 2017, le retour de la dotation globale de fonctionnement au niveau de 2014. Ils proposeront également d’instaurer une véritable péréquation verticale, car la péréquation horizontale divise les collectivités entre elles et arrive au bout de son histoire. Il n’est jamais trop tard pour prendre de bonnes décisions.
Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Nous vivons un moment un peu singulier, où nous pouvons comparer deux budgets : celui qui nous est présenté par le Gouvernement et celui que l’opposition entend adopter dès le mois de juin prochain. En effet, nous connaissons maintenant les grandes lignes de ce dernier à la faveur de la campagne des primaires du parti Les Républicains, et l’opposition parlementaire ne peut plus se dérober et se satisfaire de critiques sans en assumer les conséquences.
Par exemple, l’opposition a largement critiqué la refiscalisation des heures supplémentaires, budget après budget, sous-entendant par là même qu’elle la restaurerait. Qu’en sera-t-il en réalité ? L’opposition parlementaire proposera-t-elle de défiscaliser à nouveau les heures supplémentaires, si d’aventure elle revenait aux responsabilités ? On peut conseiller aux Françaises et aux Français d’y regarder à deux fois pour le savoir, et de scruter attentivement les propositions avancées par les candidats à la primaire des Républicains. Quand certains d’entre eux oublient cette possibilité, les choses sont relativement claires et leurs critiques récurrentes de ces dernières années perdent instantanément toute leur crédibilité. Et quand les autres proposent de rétablir la défiscalisation, ils se gardent bien d’indiquer qu’elle n’aura plus lieu d’être puisqu’ils proposent par ailleurs un allongement du temps de travail ! La mystification est totale.
Par ailleurs, la droite reviendra-t-elle sur la suppression de la demi-part supplémentaire des veuves, mesure qu’elle a décidée, mais dont l’application a été laissée à la charge de ceux qui allaient lui succéder ? Reviendra-t-elle sur la défiscalisation du supplément de retraite pour familles nombreuses, sur la fiscalisation de la part patronale de la mutuelle ? Rien de tout cela, et pour cause : la plupart des candidats, voire tous, préfèrent porter l’effort sur la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, alors que la grande injustice sociale et fiscale contemporaine est bien celle de l’accaparement du patrimoine par une minorité, à la faveur de la mondialisation ultralibérale.
Contrairement à son histoire, cette droite se présente aujourd’hui d’un bloc en faveur du néolibéralisme et de la dérégulation, ce qui fait craindre le pire pour la justice fiscale et sociale et, finalement, pour l’action publique. Sa proposition de réduire massivement le nombre de fonctionnaires est à la fois dangereuse et démagogique : 300 000 salariés de la fonction publique en moins, quand ce n’est pas 500 000… C’est de la folie ! Pourtant, la droite traîne comme un boulet les conséquences de la révision générale des politiques publiques et la diminution déjà importante du nombre des policiers, des gendarmes ou encore des agents du ministère de la justice entre 2007 et 2012. Aujourd’hui, elle promet d’augmenter les effectifs, mais en attendant, c’est la gauche qui l’a fait !
Donc, la droite maintiendra a minima les 633 000 personnels de la sécurité et de la justice. On imagine mal qu’elle réduise les 1 115 000 personnels hospitaliers ou encore le million de personnels de l’éducation nationale. Là, c’est 50 % des effectifs qui seront sanctuarisés, voire augmentés. Or, des 2,3 millions d’agents publics restants, 80 % travaillent dans les collectivités locales. Pour atteindre l’objectif de suppression de 300 000 emplois, il faudrait donc baisser les effectifs des collectivités locales de 16 %… Chers collègues, à ce stade, vous avez le choix entre la démagogie ou le sabordage de la fonction publique territoriale et de la proximité avec la population.
J’ajoute que le dogme sur lequel repose cette aberration est totalement faux, si l’on veut bien considérer objectivement que, dans les pays souvent cités en référence, de nombreuses tâches qui ne sont pas réalisées par des fonctionnaires sont en réalité sous-traitées à d’autres organismes – c’est notamment le cas de la sécurité sociale en Allemagne – ce qui, finalement, coûte aussi cher à l’usager-contribuable.
Absolument !
La droite est donc sur le point de tromper totalement les Françaises et les Français et de leur préparer une terrible désillusion. Il faudrait encore signaler les propositions des candidats LR visant à revenir sur les mesures de justice fiscale adoptées au début du quinquennat – alignement de la fiscalisation des revenus financiers sur celle des revenus du travail, progressivité de l’ISF et augmentation, au profit des ménages très aisés, du quotient familial de 1 500 à 2 500 euros – alors que ce projet de loi de finances vient, à l’inverse, soulager l’impôt de la classe moyenne basse et moyenne, pour compléter les baisses déjà engagées entre 2014 et 2016 après les augmentations survenues entre 2010 et 2014.
Pour en finir avec la triste perspective que nous propose la droite en campagne, j’ajoute que je ne donne pas cher du processus de rattrapage de la taxation du carburant diesel sur l’essence ou de la trajectoire de la taxe carbone favorisant la transition écologique et énergétique de notre modèle économique…
…alors même que la taxe carbone atteindra en 2017, quatrième année du processus débuté en 2014, le montant de 30 euros la tonne de carbone, niveau à partir duquel le signal donné aux agents économiques devient significatif pour engager la transition.
Je souhaite que nous puissions continuer d’avancer avec le Gouvernement lors de l’examen de ce projet de loi de finances sur les questions de la fiscalité écologique au profit de l’économie circulaire ou collaborative et des circuits courts, à même de contourner la mondialisation en attendant de la réguler.
…ce qui est assez curieux. Mais il est vrai que nous sommes au centre de la vie politique ! Nos propositions font débat et bientôt, avec un peu d’efforts, vous les approuverez. Je me garde bien toutefois de vous demander de voter à notre primaire… Bref, monsieur Alauzet, monsieur Lefebvre, vous avez beaucoup évoqué les propositions de la droite et c’est tant mieux.
Ce budget, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, est un budget de façade. Il est factice, puisqu’il a pour objectif essentiel de nous amener jusqu’à l’élection présidentielle. Vous êtes suffisamment sérieux pour le savoir – vous l’avez même construit en ce sens. Le vrai budget 2017 sera le projet de loi de finances rectificative qui sera examiné en juillet 2017 : que vous soyez ou que nous soyons élus, tout nouveau gouvernement remettra en cause le budget d’attente qu’est celui que vous vous apprêtez à faire voter.
Vous avez pleinement utilisé une boîte à outils de type bricolage. Tout d’abord, les hypothèses macroéconomiques sont pour le moins optimistes. Ce n’est pas la droite qui le dit, c’est le Haut conseil des finances publiques – tout le monde l’a remarqué. Votre hypothèse de croissance est trop élevée par rapport à la réalité. Vous avez également cherché à maximiser artificiellement les recettes en vous fondant sur une augmentation de la masse salariale elle aussi peu en rapport avec la réalité. Vous prévoyez enfin des recettes de TVA fondées sur une augmentation probablement trop forte de la consommation des ménages. Toutes ces hypothèses ont un impact très important sur le projet de budget.
Quant à l’objectif de réduction du déficit public à 2,7 %, vous savez fort bien qu’il est inatteignable. La baisse des déficits depuis le début du quinquennat de François Hollande est faible, puisqu’elle est de 2 points en quatre ou cinq ans. C’est la vitesse de la tortue... D’autres pays sont allés beaucoup plus vite dès que la crise a disparu. Ce budget entraînera surtout d’énormes dérapages du déficit. En 2017, nous serons très proches des 3,5 %, voire des 4 % de déficit : telle est la réalité.
Vous nous avez laissé 6 % !
Nous verrons si nous avons raison ou tort de le craindre. C’est toutefois ce que nous pensons, et nous avons généralement raison.
Quant à la dette publique, les chiffres sont tout aussi alarmants : rien d’étonnant, puisque les dépenses augmentent. Vous me répondrez qu’une hausse de 1,6 %, c’est modeste : peut-être, mais c’est plus que dans la plupart des autres pays, et elle se traduit surtout par de nouvelles augmentations de crédits et d’effectifs. Ce projet est un florilège de nouvelles dépenses : où est le sérieux budgétaire dont vous nous parlez depuis plusieurs années ?
S’agissant des recettes, vous utilisez aussi des artifices. Vous avancez ainsi le dernier acompte de l’impôt sur les sociétés, ce qui vous permet d’augmenter les recettes. Vous utilisez toutes les ficelles pour essayer de les maximiser. Il en est ainsi de la COFACE, que Gilles Carrez a évoquée, et dont les recettes sont exceptionnelles.
Elle n’a aucun impact !
Quant aux dépenses, le constat est le même puisque vous les repoussez en 2018 – le Gouvernement en place aura alors bien du mal à y faire face – par exemple en augmentant le pacte de responsabilité, au travers de la fausse suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés – C3S. Vous oubliez également de prendre en compte la recapitalisation à venir d’EDF ou d’Areva. Bref, c’est à un lourd héritage budgétaire que nous devrons faire face – le chiffre tournera probablement autour de 10 milliards d’euros, une somme considérable – ce qui rendra plus compliqué encore le redressement du pays que nous devrons entamer. La trajectoire budgétaire, qui est incertaine, est indexée sur une trajectoire électorale tout aussi incertaine.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, ce rendez-vous est en réalité un rendez-vous manqué. Il ne servira même pas la croissance, ce que nous pouvons regretter. Vous avez eu à un moment donné de bonnes intentions en matière de finances publiques : elles se sont évanouies devant la réalité de la situation politique. Vous auriez pu plutôt procéder à une baisse massive de la fiscalité, mettre en place une programmation de la dépense publique ou relancer une réforme ambitieuse du code du travail. Tout cela a disparu, et je le regrette.
Au final, vous aggravez la situation budgétaire et, sans aucun doute, économique de la France, pour une élection. Je ne suis pas certain que cela en vaille la peine.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Avant d’évoquer en propre ce budget et la question des finances locales, j’aimerais porter un regard rétrospectif sur l’action conduite par notre majorité depuis cinq ans.
En 2012, nous avons défini un cap : celui de l’assainissement de nos comptes publics dans la justice sociale. En cinq ans, nous avons réduit le déficit pour tenir nos engagements européens. Et cela n’était pas rien ! Nous avons également dessiné les contours d’une fiscalité progressive, avec la création de la tranche à 45 % au-delà de 150 000 euros, le rétablissement du barème de l’ISF et le plafonnement des niches fiscales.
Mieux encore, la reprise a accru la dynamique redistributive : le pouvoir d’achat des 20 % des ménages les plus modestes a crû tandis que les 10 % les plus aisés ont été sollicités à hauteur de 4 milliards. Ces transferts de revenus et le succès de la prime d’activité ont permis de réduire de 360 000 le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté. Ce sont des mesures significatives, très différentes de celles qui avaient été mises en oeuvre auparavant.
Le présent projet de budget s’inscrit dans la continuité des précédents, puisqu’il met de nouveau l’accent sur une plus grande justice sociale avec une baisse d’impôt de 1 milliard d’euros, sans toutefois réduire le nombre des foyers imposables. Ceux qui en bénéficieront verront leur pouvoir d’achat augmenter. Par ailleurs, l’instauration d’un crédit d’impôt pour l’emploi à domicile dont bénéficieront les retraités stimulera l’emploi dans les territoires les plus fragilisés. J’y suis particulièrement sensible. Quant à la généralisation progressive de l’impôt sur les sociétés ramené à 28 %, elle permettra aux entreprises, et surtout aux PME, qui sont très importantes dans nos territoires, de dégager des capacités d’investissement.
Ensuite, ce budget pose les jalons d’une réforme importante : le prélèvement à la source. J’ai toujours considéré qu’il s’agit d’une bonne mesure, je n’ai pas changé d’avis. Le travail préparatoire a été important. Il serait dommage que cela n’aboutisse pas.
S’agissant des finances locales, ce budget améliore les dispositifs de péréquation dans un contexte de diminution des dotations aux collectivités territoriales. Il matérialise le principal engagement pris par le Président de la République au Congrès des maires, à savoir la diminution par deux de la baisse des dotations au bloc communal, l’amélioration des dispositifs de péréquation et la pérennisation des dispositifs de soutien à l’investissement.
Vous le savez, j’ai lutté avec force auprès d’un gouvernement que je soutiens pour un étalement plus long, voire une annulation de cet effort. Je constate avec satisfaction la progression des enveloppes de péréquation verticale consacrées à la DSU – dotation de solidarité urbaine – et à la DSR – dotation de solidarité rurale – dont la réforme permettra une meilleure répartition et un lissage des effets de seuil. Le FSIL – fonds de soutien à l’investissement public local – et la DETR – dotation d’équipement des territoires ruraux –, qui s’élèvent respectivement à l,2 et 1 milliard d’euros, permettront également de financer des projets structurants pour les territoires. Avec les dotations « bourg-centre » et les contrats de ruralité, il n’a jamais été autant fait pour l’investissement.
Je tiens toutefois à souligner devant vous un problème, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État – du reste, mes propos ne vous surprendront pas : il s’agit des grandes disparités qui existent entre les collectivités territoriales. Pour bénéficier de ces investissements qui sont à leur portée, il leur faut pouvoir compter sur de l’autofinancement. Or, trop souvent, celui-ci s’est progressivement et totalement asséché, comme c’est le cas dans ma collectivité. Je comptais sur la réforme de la DGF, des rapports très satisfaisants ont même été rendus sur le sujet, mais elle est reportée à 2018, ou plus tard. J’ignore quand elle se fera, si jamais elle se fait. Or, à mon sens, l’équilibre entre les collectivités qui ont plus et celles qui ont moins constitue le seul vrai levier de dotations équilibrées et efficaces.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, si ce budget réalise de vraies avancées dans le combat pour la justice sociale entre les territoires, il présente encore des lacunes pour certaines collectivités. Que l’intérêt général doive, bien sûr, prévaloir ne m’interdit pas de souligner, sans amertume mais avec regret, que l’on a encore bien du mal à affronter des situations privilégiées et pourtant bien connues.
« Budget 2017 : les apparences du sérieux. » S’agit-il des propos d’un député du groupe Les Républicains ? D’un communiqué de presse de notre mouvement ? Pas du tout ! C’est le titre d’un article d’un journal qu’on ne peut pas suspecter d’être proche des Républicains, Le Monde, dans son édition du 29 septembre 2016.
On ne peut pas non plus le suspecter d’être proche de nous !
Cet article du Monde s’appuie sur l’avis du Haut conseil des finances publiques, d’une sévérité inédite, jugeant improbables les réductions des déficits publics prévues dans le budget 2017, étrillant ainsi vos hypothèses de travail. Je cite : « Le scénario de croissance retenu par le Gouvernement […] tend à s’écarter du principe de prudence qui permet d’assurer au mieux le respect des objectifs et des engagements pris en matière de finances publiques. »
Un budget insincère, donc, mais aussi déloyal. Là encore, ce sont les journalistes qui en parlent le mieux : « Budget 2017 : le dernier tour de passe-passe de François Hollande ». Pourquoi un tour de passe-passe ? Tout simplement parce que bon nombre de mesures que vous annoncez maintenant pour essayer de vous attirer les bonnes grâces des électeurs, s’il vous en reste quelques-uns, et de sauver ce qui peut encore l’être, pèseront surtout sur le budget 2018 et non sur le budget 2017. Vous laissez à votre successeur une bombe à retardement de plus de 10 milliards d’euros.
Insincère et déloyal, ce budget 2017 restera surtout celui des occasions ratées.
Occasion ratée de redonner du pouvoir d’achat aux familles, que vous avez matraquées, et aux salariés, au profit desquels vous auriez pu, par exemple, rétablir la défiscalisation des heures supplémentaires.
Occasion ratée pour les entreprises, à qui vous aviez pourtant annoncé l’effacement de l’ensemble des hausses d’impôts et de charges mises en oeuvre depuis 2011. Or on sait qu’il n’en est rien, puisqu’il a été démontré que 16 milliards d’impôts supplémentaires pèseront encore l’année prochaine sur la compétitivité française.
Occasion ratée, aussi, de réduire la dette de la France, qui atteint désormais des sommets et se rapproche dangereusement des 100 % du PIB, alors que nos voisins ont réussi depuis quelques années à faire reculer leur niveau d’endettement, au prix de réformes ambitieuses et courageuses.
Occasion ratée, également, de simplifier la vie des Français et des acteurs économiques, dont vous compliquez encore plus l’existence par la mise en oeuvre du prélèvement à la source, unanimement critiquée tant par les entreprises, dont vous augmenterez la charge de travail, que par les particuliers, qui s’apercevront avec le temps qu’il s’agit d’une mesure absolument catastrophique.
Occasion ratée, enfin, de réagir au référendum britannique. Alors que vous lanciez en juin dernier un « Welcome in Paris » qui laissait présager une action positive pour attirer à Paris les sièges des entreprises et une partie des activités de la City, force est de constater que, face au Brexit dur de Theresa May, vous n’avez su, une fois de plus, apporter qu’une réponse molle.
Vous êtes incroyable !
Je vous avais interrogé, monsieur le ministre, dans le cadre des questions au Gouvernement. Je n’ai absolument pas été satisfait par votre réponse. Vous seriez d’ailleurs bien en peine de nous présenter une mesure forte qui serait aujourd’hui susceptible d’attirer en France des entreprises qui préféreront malheureusement déménager en Allemagne, au Luxembourg ou dans d’autres pays européens. Ce n’est pas la baisse de l’impôt sur les sociétés que vous annoncez qui changera quoi que ce soit, puisque les Britanniques ont annoncé un impôt sur les sociétés de 15 %.
Ils ne l’ont pas encore fait !
Vous êtes donc très loin du compte. Vous ne prenez aucune mesure forte, alors que nos voisins se mobilisent comme jamais ! Une fois de plus, malheureusement, ce sont eux qui vont récupérer la mise.
En conclusion, ce budget est à l’image de ce quinquennat : clientéliste, sans ambition, incapable de redresser le pays. Il est urgent qu’une nouvelle majorité courageuse et ambitieuse engage les réformes de fond qui ont été engagées avec succès ailleurs mais que vous avez malheureusement été incapables de mettre en oeuvre depuis que vous êtes au pouvoir. Notre pays en a absolument besoin.
Ce budget 2017 était l’occasion de reconnaître vos erreurs, de prendre enfin des bonnes décisions, de mettre la France sur le bon chemin. Vous avez malheureusement manqué cette dernière occasion. Jusqu’à la fin, ce quinquennat aura été raté pour notre pays !
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Je consacrerai les cinq minutes de mon intervention à une réforme majeure : le prélèvement à la source. C’est l’Arlésienne de notre débat fiscal depuis cinquante ans, un peu comme l’avait été la question de la progressivité de l’impôt, à la charnière du XIXe et du XXe siècle, avant d’aboutir heureusement à la veille de la Première Guerre mondiale.
Le prélèvement à la source a fait l’objet d’un nombre de rapports tout à fait considérable. À trois reprises, on a déjà tenté de le mettre en place. En 1967, Jacques Chirac, alors secrétaire d’État à l’économie et aux finances, réunit une commission pour l’instaurer, avant d’abandonner son projet en 1968. En 1973, Valéry Giscard d’Estaing, ministre de l’économie et des finances, va plus loin : il fait voter un amendement instaurant le prélèvement à la source en première lecture à l’Assemblée nationale, mais cette mesure est abandonnée par la suite. Enfin, en 2006, Thierry Breton déclare qu’« il n’y aura plus qu’à appuyer sur le bouton » pour que le prélèvement à la source soit mis en oeuvre.
Et il n’a pas trouvé le bouton !
Cette réforme a été consensuelle, portée tant par la gauche que par la droite. Aujourd’hui, c’est la gauche qui la propose, mais on entend dire, notamment à droite, qu’elle serait moins indispensable. Il est vrai que des gains de productivité, objectif qui a effectivement justifié dans le passé des tentatives de mise en place du prélèvement à la source, ont été réalisés. Mais ce n’est pas essentiellement pour les gains de productivité que cette réforme est importante. Le taux de recouvrement de l’impôt, qui a aussi été un argument en faveur de cette mesure, n’est pas non plus une raison valable : aujourd’hui, ce taux est élevé, que l’impôt soit prélevé à la source, comme la CSG, ou par rôle, comme l’impôt sur le revenu.
Demeure un argument fondamental, essentiel : faire en sorte que l’impôt soit ajusté aux revenus présents ! Quand on se retrouve à la retraite ou au chômage, quand on subit une baisse de revenus, on doit souvent payer un impôt considérable qui ne correspond plus à la réalité de ses revenus. Le formidable travail effectué par l’administration fiscale, que je veux saluer, comporte d’ailleurs de beaux exemples pour illustrer mon propos. Ainsi, un individu qui se retrouve au chômage pendant dix-huit mois peut être dans une situation tout à fait caricaturale : dans un premier temps, il continue de payer des impôts sur des revenus élevés qu’il ne perçoit plus, puis il devient non-imposable au moment où il retrouve un emploi !
Oui, cette réforme est essentielle. Nous en avons besoin. Contrairement à ce que j’entends, il est vraiment opportun de la mener aujourd’hui – elle aurait pu être engagée il y a deux ans, mais j’y reviendrai. En effet, la déclaration sociale nominative – DSN – permettra à terme d’ajuster le taux de l’impôt à la réalité du revenu perçu. Pour l’instant, comme dans la plupart des pays, le taux appliqué est celui des années précédentes. Or la DSN permettra un véritable ajustement instantané : non seulement l’assiette d’imposition sera la bonne, puisqu’il s’agira du revenu mensuel présent, mais le taux sera aussi très proche de celui qui devrait s’appliquer à ce revenu. Cette raison justifie amplement la mise en oeuvre d’un prélèvement à la source contemporain.
Je souhaite ajouter quelques mots sur l’individualisation du prélèvement, un point qui fait débat. Certains de nos collègues de la délégation aux droits des femmes soulignent que le quotient familial est un peu injuste, puisqu’il subventionne en quelque sorte l’inégalité au sein du couple, généralement au détriment des femmes. Or, sans toucher au quotient familial, en gardant l’impôt tel qu’il est, il sera possible d’en individualiser le prélèvement pour l’adapter à la situation de chacun. Je souhaite que le Gouvernement fasse un effort de communication sur ce sujet.
Permettez-moi de vous donner un excellent exemple. Un ménage de deux personnes percevant respectivement un revenu mensuel de 2 000 euros et de 10 000 euros est soumis à un taux moyen d’imposition de 19 %. On n’appliquera évidemment pas un taux de prélèvement de 19 % à celui qui gagne 2 000 euros ! En individualisant le prélèvement, comme le propose le Gouvernement, on appliquera au revenu le plus faible le taux correspondant à celui d’un célibataire corrigé par le quotient familial, soit environ 6 %. Le revenu le plus élevé sera alors soumis à un taux de 21 %, qui reste inférieur à celui que subirait un célibataire sans appliquer de quotient familial.
Ce mode d’individualisation a un petit défaut, inévitable quand on applique le taux des années précédentes : il ne reporte les effets du quotient conjugal que sur le revenu le plus élevé. Pour autant, il s’agit d’une avancée considérable, qui permet d’ajuster l’impôt au revenu réel.
Un seul petit regret : ce débat aurait été plus opportun il y a deux ans, en 2014, lorsque cette mesure était proposée par Jean-Marc Ayrault. La réforme aurait alors pu être totalement mise en oeuvre au cours du quinquennat, ce qui aurait été la meilleure façon de la rendre irréversible.
Je termine en m’adressant à nos collègues de l’opposition. Vous avez essayé par trois fois d’instaurer le prélèvement à la source. J’entends vos discours, mais il serait vraiment dommage, au sujet d’une mesure consensuelle appliquée dans le monde entier, que la droite refuse de le soutenir parce que c’est la gauche qui le propose.
Le problème n’est pas que cette mesure est proposée par la gauche, mais qu’elle n’est pas fonctionnelle !
Madame Dalloz, vous êtes Mme Pavlov, la femme de M. Pavlov !
J’espère que cette réforme sera menée à son terme quelle que soit la majorité qui sera élue en 2017, car les principaux gagnants seront nos concitoyens.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
À l’issue de ce quinquennat, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, vous affichez une vitrine de votre bilan. Vos indicateurs globaux apparaissent pour le moins comme très ambitieux et optimistes, au service de vos seuls choix politiques ou plutôt programmatiques dont le but est d’asseoir votre pouvoir politique. Pourtant, les sources de préoccupation demeurent multiples et confirment les facteurs baissiers qui se sont concrétisés ces derniers mois. Sans nul doute, votre budget s’éloigne de façon délibérée du principe de prudence qui devrait pourtant primer dans la situation économique et sociale dégradée qui est la nôtre aujourd’hui.
Sur ce projet de loi de finances, vous avez communiqué autour de trois thématiques que je vais reprendre partiellement. La première, c’est la croissance et l’emploi.
Tout d’abord, nous nous devons de constater que les chiffres du chômage sont toujours aussi préoccupants et que les mesures entreprises et appelées à se poursuivre ne seront pas à même d’inverser la courbe du chômage. J’en veux pour preuve les pertes d’emplois du deuxième trimestre 2016, dont l’impact sur la croissance est évalué à 0,4 point. Ceci ne présage rien de bon.
Le chômage des jeunes reste alarmant. Les dispositifs mis en place ont un coût exorbitant pour un résultat des plus décevants. En somme, ils ne sont pas vraiment efficaces pour l’insertion définitive des jeunes concernés. La multiplicité des dispositifs ne change rien à la donne et correspond très mal aux besoins véritables des bassins d’emplois.
Les entreprises créatrices de richesses, donc de croissance et d’emplois, bénéficient certes des mesures favorables introduites au cours de ce quinquennat, qui leur ont permis de restaurer leurs marges et donc de relancer leurs projets. Toutefois, le mouvement reste timide et ces mesures sont loin de compenser les fermetures d’usines de ces dernières années. Parmi les usines encore ouvertes, beaucoup demeurent en sous-régime.
La méthode reste largement perfectible pour bénéficier au plus grand nombre. Ainsi, une véritable baisse des charges empêcherait les employés aux revenus modestes de tomber, entre autres, dans la trappe à bas salaires.
Je salue la baisse de l’impôt sur les sociétés pour les PME, mais pourquoi prévoir encore et toujours des seuils et des étapes successives difficilement compréhensibles par les premiers intéressés ?
De surcroît, quel est l’intérêt, si ce n’est une astuce budgétaire, d’avancer en 2017 la perception de plusieurs millions d’euros de recettes sur le dos des entreprises ? La trésorerie a un coût, et les fonds de roulement vont être obérés au détriment du respect des calendriers d’investissement. Sans parler du nouveau coup de canif dans la stabilité fiscale… Vous gonflez des recettes, mais le mouvement s’annulera l’année suivante : curieuse façon de crédibiliser un budget !
Dans la même veine, pourquoi revenir sur la suppression de l’avantage fiscal des actions gratuites alors que ce dispositif visait à valoriser l’embauche de forts potentiels dans les start-up, leviers de notre économie de demain ?
Deuxième thème : les finances publiques. Le budget est selon vous « sérieux et cohérent », des qualificatifs rapidement contredits par le Haut conseil des finances publiques qui l’a jugé « improbable et incertain » au regard, et des recettes, plus ou moins aléatoires, et de l’ensemble des dépenses nouvelles qui relèvent davantage de l’affichage que d’une gestion rigoureuse de la dépense.
Que penser des dépenses inscrites dans les projets des programmes d’investissement d’avenir successifs – PIA – et qui empiètent intégralement sur des missions normalement prévues dans le budget de l’État ? Quid des incertitudes conjoncturelles absentes de vos prévisions, à savoir : l’atonie du commerce extérieur, le Brexit, le climat politique tendu dans l’Union européenne ainsi que le climat géopolitique pour le moins particulier ?
Et quid encore de la crédibilité des annonces sur la baisse des dépenses publiques, lesquelles sont en hausse par rapport à 2016 et toujours très éloignées des taux moyens européens ? De plus, celles-ci continuent de se nourrir de cadeaux électoraux.
Troisième et dernier thème : la justice sociale. Les gestes fiscaux en matière d’impôt sur le revenu sont une faible réponse au matraquage fiscal pratiqué ces dernières années. Certes, c’est une bonne nouvelle pour certains contribuables ; pour autant, il faut rappeler que les prélèvements obligatoires sur les familles ont augmenté de 32 milliards d’euros après 2012.
Ces gestes suffiront-ils à pousser la consommation et surtout à privilégier le made in France qui ne représente que 28 % de celle-ci ? Il est fort à parier que ce petit plus profitera aux importations « bas prix » ou encore, vu le climat anxiogène, à une épargne de précaution. Là encore, n’eût-il pas été préférable de réinjecter des sommes plus importantes dans les circuits financiers par le biais d’une baisse d’impôts généralisée au plus grand nombre au lieu de privilégier une théâtralisation de votre idéologie ?
Plus généralement et pour conclure, l’élan progressiste dont vous vous revendiquez reste à démontrer, d’autant plus que nombre de vos dépenses supplémentaires auront de lourds impacts différés et seront à inscrire au passif des prochaines années. Malheureusement, les retards structurels demeurent.
Force est de constater que ce budget, qui relève d’un exercice d’équilibriste, nous éloigne une nouvelle fois de cette confiance qui devrait pourtant irriguer notre économie et notre tissu social afin de faire de notre pays un véritable moteur du changement et non plus seulement le témoin de notre déclin.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, nous sommes entrés dans la discussion de la dernière loi de finances de la législature. La première et la dernière loi de finances d’une législature sont finalement les plus intéressantes. La première, parce qu’elle traduit les choix de la majorité nouvellement élue. La cinquième parce qu’elle permet à la fois d’évaluer le chemin parcouru et qu’elle intervient dans un moment où il devient enfin possible de mettre en regard le projet présenté comme alternatif par l’opposition.
Côté entrée en matière, chacun se remémorera que, en 2007, le premier acte fiscal de la précédente majorité fut la création d’un bouclier destiné à protéger les contribuables les moins modestes, mais les mieux représentés dans la soirée inaugurale du Fouquet’s.
En 2012, à l’inverse, on vota le rétablissement de l’ISF dans sa plénitude, l’alignement de la fiscalité du capital sur la fiscalité du travail, la création d’un nouveau taux marginal de l’impôt sur le revenu, le plafonnement des niches fiscales, l’annulation de la hausse massive de TVA prévue.
Mais revenons à cette cinquième loi de finances, dernier point d’une trajectoire constante, dans la continuité de nos engagements sur l’assainissement des comptes publics. Le déficit continue en effet de se réduire. Il représentera en 2017, 2,7 % du PIB contre 4,8 % en 2012.
C’est ici que le débat devient intéressant. L’opposition conteste cette trajectoire. Pourquoi ? Est-ce parce qu’elle entend se draper dans une vertu budgétaire qu’on ne lui connaît pas ? Même pas ! Les sept candidats aux primaires de la droite n’entendent pas eux-mêmes revenir à moins de 3 % de déficit avant 2022 !
Non, au-delà d’un culot certain que je vous reconnais, cette contestation a des racines plus anciennes. Si l’opposition n’a pas eu le temps de réfléchir à un nouveau projet – ce n’est pas moi qui le dis, mais M. Poisson qui a rappelé opportunément lors du premier débat des primaires…
…que le programme commun de la droite, c’est la réédition du programme RPR-UDF de 1986 – cela ne nous rajeunit pas – elle a en revanche pris soin d’observer avec attention le retour de la gauche aux affaires en 2012.
En juillet 2012, la Cour des comptes avait rendu un rapport d’audit sur la situation des finances publiques de la nation. Ce rapport rendait intenable toute volonté de tenir l’objectif de 3 % de déficit en 2013 puisque cela aurait supposé un effort de 33 milliards d’euros dans l’hypothèse d’une croissance de 1 % – je cite la Cour elle-même. Pour 2012, la Cour relevait des moins-values de recettes de 6 à 10 milliards d’euros. En bref, elle dénonçait – comme vient de le faire Éric Woerth il y a un instant s’agissant du présent budget ! – un budget de façade dont certains experts sont, à l’évidence, toujours présents dans nos débats.
Et c’est ce que ce Gouvernement n’a pas voulu exploiter, certainement à tort. Soucieux de ne pas donner le sentiment de rejouer l’éternel refrain de « l’héritage », il a considéré que la nouvelle majorité n’avait pas été élue pour déplacer les problèmes, mais pour les traiter. Choix courageux, mais coûteux, car toutes les décisions douloureuses demandées aux Français dépendaient en réalité de cette situation inaugurale. Réalité des déficits, réalité aussi des hausses d’impôts décidées en 2011 mais applicables en 2012, et donc imputables dans l’esprit des Français à la nouvelle majorité.
La droite a pris note de cette erreur de communication, et elle innove. Devançant le débat potentiel sur l’héritage, elle attaque d’ores et déjà sur le thème de l’insincérité de ce projet de budget pour mieux couvrir l’absence de maîtrise des comptes publics de son propre projet présidentiel.
La vérité est que la droite est entrée dans une impasse budgétaire liée à la surenchère entre ses candidats aux primaires. Alors de beaux esprits pourraient expliquer que la droite qui s’affranchit de toute rectitude budgétaire, c’est une bonne nouvelle. Mais que veut-elle en faire ? Redistribuer du pouvoir d’achat aux salariés, aux retraités, aux chômeurs ? Mieux faire fonctionner les services publics ?
Pas du tout ! Baisser l’impôt sur le revenu des plus aisés, supprimer l’ISF, alléger la fiscalité du capital, baisser les droits sur les grosses successions, supprimer les taxes versées par les entreprises comme le versement transport qui finance les transports publics !
Et quand certains évoquent le rétablissement de la défiscalisation des heures supplémentaires, c’est au prix d’une formidable mystification puisque la durée du travail serait rallongée !
Inversement, cette trajectoire voulue depuis 2012, ce n’était pas le désir de respecter un dogme, mais celui de retrouver notre souveraineté financière. En 2007, 2,6 % de la richesse produite en France s’envolait dans les remboursements de nos intérêts d’emprunt. Ce n’était plus que 2,2 % sur l’exercice passé, soit une économie de 12 milliards.
Des milliards pour financer la solidarité. Des milliards pour financer nos priorités : l’éducation, l’emploi, la sécurité. Des milliards pour financer une nouvelle baisse de la fiscalité des Français. Des milliards pour financer un nouveau crédit d’impôt pour les personnes âgées modestes leur permettant de financer 50 % de l’aide à domicile dont elles ont besoin.
Ces cinq années auront permis d’établir cette simple démonstration : le sérieux peut être juste.
L’absence de maîtrise peut cumuler l’inefficacité à l’injustice. Ce débat ne s’arrêtera pas ce soir.
Il sera celui des prochains mois. Le débat politique jusqu’ici très général, trop général va progressivement entrer dans le détail et permettre des comparaisons. Je ne doute pas qu’il donnera un éclairage nouveau sur l’échéance présidentielle. Alors, mes chers collègues, nous aurons l’occasion de reparler d’alternance, mais pour ma part, je pense qu’elle n’aura pas lieu.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, dernier budget du quinquennat, le projet de loi de finances pour 2017 a été conçu sur la base de chiffres pour le moins optimistes qui tentent de masquer une réalité moins idyllique. En effet, sur la base d’une hypothèse de croissance de 1,5 %, le déficit public annuel serait réduit à 2,7 % du produit intérieur brut en 2017 tandis que la dette publique se stabiliserait à 96 % de celui-ci.
Pourtant, alors que l’INSEE prévoit une croissance de 1,3 % en 2016 à la suite de la croissance nulle observée au deuxième trimestre 2016, le Haut conseil des finances publiques fait le constat que les prévisions de croissance du Gouvernement sont surévaluées.
À l’appui de son argumentaire, le Haut conseil mentionne une prise en compte insuffisante du contexte économique international. L’atonie du commerce international, les incertitudes liées au Brexit, les conséquences des attentats sont autant de facteurs influents qui ne semblent pas avoir été estimés à leur juste valeur dans le projet de loi de finances pour 2017.
Enfin, le Haut conseil considère que le retour en 2017 du déficit nominal sous le seuil de 3 points de PIB est très incertain, pour ne pas dire impossible. Ce constat étant fait, je souhaite m’attarder tout particulièrement aujourd’hui sur les conséquences du projet de loi de finances pour les collectivités et tout particulièrement pour les collectivités rurales.
En 2017, les collectivités territoriales devront absorber une troisième tranche consécutive de réduction des concours financiers de l’État, lesquels ont diminué de 11 milliards d’euros en quatre ans. On peut toutefois se réjouir que celle-ci soit moins importante qu’en 2015 et 2016 : 2,63 milliards d’euros au lieu de 3,67 milliards, dont 1,03 milliard pour le bloc communal. L’effort demandé au bloc communal sera en effet réduit de moitié et assorti d’un nouveau fonds de soutien à l’investissement.
Toutefois, alors que la loi de finances pour 2016 avait initié une réforme de la dotation globale de fonctionnement, pour une entrée en application au 1er janvier 2017, le projet de loi de finances pour 2017 reporte l’entrée en vigueur de cette réforme. Ce report avait, certes, été souhaité par une partie des élus locaux craignant une impréparation de la réforme. Mais en argumentant que la carte intercommunale va être largement modifiée au 1er janvier 2017 avec les nouveaux schémas départementaux de coopération intercommunale, et que la réforme de la DGF fera l’objet d’un texte spécifique élaboré en vue d’une application en 2018, le Gouvernement a déçu les élus locaux.
En effet, ce report est très mal vécu par les maires des zones rurales.
Ils craignent que la majoration de la dotation par habitant pour les agglomérations à hauteur de 70 millions euros ne se fasse sur le dos du milieu rural dans la mesure où cette majoration sera financée sur les dotations globales.
Cela accroîtra encore les écarts et les fractures territoriales entre villes et campagnes. En outre, le fonds de soutien à l’investissement local – FSIL – créé par la loi de finances pour 2016 est pérennisé et abondé de 200 millions d’euros pour atteindre 1,2 milliard d’euros en 2017.
Sur cette somme, 600 millions seront fléchés sur les grandes priorités d’investissement que sont la transition énergétique, l’accessibilité et le logement et 600 millions bénéficieront aux territoires ruraux par le biais des contrats de ruralité et une augmentation de la dotation d’équipement des territoires ruraux – DETR. Par ailleurs, en matière de péréquation, le fonds de péréquation intercommunale et communale – FPIC – est maintenu à son niveau de 2016, à savoir 1 milliard d’euros.
Ces dispositifs de péréquation ne donnent pas satisfaction aux maires des communes rurales pour au moins deux raisons : le fonds de soutien à l’investissement local est certes en hausse, mais il exclut de fait les communes de moins de 2 000 habitants. Le fonds de péréquation intercommunal, qui fonctionne sur la base d’une échelle logarithmique, est pénalisant pour les campagnes. En outre, les dotations aux intercommunalités sont d’autant plus élevées que le statut de celles-ci est plus urbain. L’État verse en effet 20 euros par habitant aux communautés de communes et 60 euros par habitant aux communautés urbaines. Alors, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous nous apporter un complément d’information sur ces différents sujets, et le cas échéant, nous rassurer ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, un mot pour remercier l’ensemble des ministres qui ont occupé des fonctions à Bercy. Moi qui suis un vieux parlementaire, j’entends que la droite veut plus de dépenses – on vient encore d’en avoir la preuve à l’instant – et moins de rigueur budgétaire.
Que s’est-il passé durant ces cinq ans ? Nous avions trouvé une situation extrêmement compliquée. On parle de points de PIB, Mme la rapporteure générale l’a fait dans sa présentation. Il faut avoir conscience que derrière chaque point de PIB, il y a des milliards d’euros, qu’il faut aller chercher, comme vous le savez, sur les marchés financiers – très souvent, on sollicite des fonds souverains.
Dès lors qu’une partie de la droite considère, dans son projet, qu’on peut laisser filer les déficits…
…plus de cinq points de PIB de déficit et, derrière chaque point, il y a 20 milliards d’euros. Nous avons trouvé une situation qui faisait dire à M. Fillon lui-même, en 2007, que la France était en faillite. La réalité, c’est que M. Chirac et M. Sarkozy – lequel, certes, s’est appuyé sur une crise – ont laissé filer les déficits. Si notre gouvernement n’avait pas pris, à l’époque, des dispositions douloureuses et difficiles, il ne se serait rien passé et la souveraineté de notre pays serait mise à mal. Voilà la réalité.
Des quatre principaux budgets que nous allons examiner dans les jours qui viennent, le premier est celui de la dette. Chaque fois que les candidats à la primaire de la droite expliquent que le déficit pourrait atteindre trois, quatre ou cinq points de PIB, les agences de notation nous disqualifient et cette disqualification se traduit par des taux d’intérêt plus élevés. Voilà la réalité. Or, ces taux d’intérêt ont un effet sur la dépense publique : c’est d’autant moins que vous pourrez consacrer à l’éducation, à la sécurité ou aux collectivités territoriales.
Mes chers collègues, je ne pense pas qu’en arrivant au pouvoir l’année prochaine, …
…vous toucherez à la sécurité des Français. Je ne le souhaite pas pour la France. Il ne le faut pas. Ce serait une catastrophe. J’essaie seulement d’expliquer devant vous et devant les Français ce qui se passerait.
J’observe attentivement ce que vous voulez faire. L’un de vos collègues vient ainsi d’évoquer les collectivités territoriales, qui représentent le quatrième budget de l’État. Si vous nous dites l’année prochaine que vous réduirez de 100 à 130 milliards d’euros les dépenses publiques sur cinq ans, cela signifie concrètement, pour les collectivités locales – au doigt mouillé, par application d’une règle de trois –, 4 à 5 milliards d’euros en moins par an. Et vous nous critiquez pour un milliard d’euros en moins !
Arrêtez ! Ce n’est pas un milliard ! Vous leur enlevez 3,7 milliards par an !
Quelle figure ferez-vous l’année prochaine, alors que vous nous critiquiez pour un milliard d’euros en moins…
…et que vous allez supprimer 4 à 5 milliards ? Je m’efforce de vous expliquer la situation.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, vous avez eu raison, et ce n’était pas facile. Nous avons essayé de redresser les comptes publics. D’autres l’ont fait en Europe – je pense notamment à Gerhard Schröder, qui a fait ce travail voilà une quinzaine d’années en Allemagne, pendant qu’en France on laissait filer les déficits.
Comparer Hollande à Schröder ! Schröder, c’était tout de même autre chose !
Il fallait bien que quelqu’un le fasse. Nous l’avons fait. Peut-être n’en serons-nous pas autant remerciés que nous l’aurions souhaité. Quand on fait de la politique, on vit aussi un peu pour la postérité. Je vous le dis donc franchement : le travail qui a été fait par vous-mêmes, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, et par vos services, par votre administration, est remarquable, car il a été fait pour l’avenir du pays.
Tout n’est cependant pas parfait et ce budget soulève tout de même quelques interrogations. J’évoquerai rapidement deux ou trois sujets, très anecdotiques au regard de ce qui a déjà été dit.
Ainsi l’amendement déposé par Karine Berger, moi-même et quelques autres sur les sociétés pour le financement de l’industrie cinématographique et audiovisuelle – SOFICA – est important. Il faut en effet aller plus loin dans l’application de ce dispositif d’exonération en faveur de la création cinématographique, en y incluant notamment le secteur de la télévision, où la création se développe de plus en plus. Peut-être faut-il aussi ouvrir les SOFICA à d’autres formes de création.
Pour ce qui est des collectivités territoriales – je m’exprime en effet au nom de Mme Pires Beaune –, il faudra trouver dans ce budget une solution à propos du Fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle. Ce dispositif touche en effet essentiellement les départements : pour en avoir présidé un, je puis témoigner des conséquences du double effet consistant à leur enlever une part de leurs ressources – ce qui est du reste bien normal, puisqu’il faut faire des économies – et à enlever en outre à certains d’entre eux le Fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle. Pour un département comme l’Ardèche, cela représente près de 10 millions d’euros d’efforts. C’est tout simplement impossible !
Ce n’est pas acceptable. Il faudrait pouvoir activer le fonds de solidarité.
Je conclus. Le crédit d’impôt injecté notamment dans le secteur médico-social, auquel je sais que Monsieur Eckert est très attentif, est un choix judicieux et un dispositif nécessaire, que je souhaite voir pris en compte dans le cadre de ce budget.
Sur l’audiovisuel, je vous soutiendrai, car vous avez raison. Je ne fais pas partie de ceux qui demandent qu’on revienne sur le dispositif de la redevance audiovisuelle. L’audiovisuel public signifie tout de même quelque chose, surtout dans des périodes troubles comme celle que nous traversons ! On a besoin de journalistes, notamment dans nos radios locales, et d’une chaîne publique forte, de France 3, qui fait un travail remarquable. Je ne fais donc pas partie de ceux qui disent non à l’audiovisuel public.
Enfin, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, j’évoquerai les plates-formes numériques, même si cela ne concerne pas directement votre ministère. Je suis en effet l’auteur d’un rapport qui a été apprécié de tous et, quand je vois qu’on veut, notamment dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, toucher à la fiscalité de ces plates-formes et de tout le secteur de l’économie collaborative, avec ses start-up, j’ai l’impression qu’on ne comprend vraiment rien à la nouvelle économie. On fait erreur chaque fois qu’on veut abîmer les start-up et cette nouvelle économie collaborative dans laquelle nous savons que nous pouvons être les champions de la création de richesse.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, ce dernier budget de la législature est manifestement insincère et nous éloigne encore un peu plus du retour à l’équilibre budgétaire en 2017, pourtant promis par le candidat Hollande. Votre hypothèse de croissance est, une fois de plus, très optimiste : 1,5 %, alors que les circonstances et l’environnement international ont fortement évolué et que l’INSEE vient de revoir à la baisse ses prévisions de croissance pour 2016, avec un chiffre de l,3 %.
Le Haut Conseil des finances publiques estime lui aussi que le risque de dérapage des dépenses en 2017 est important, d’autant plus qu’elles sont déjà en nette hausse par rapport à la moyenne du quinquennat. Il s’inquiète d’une évolution qui « tend à s’écarter du principe de prudence qui permet d’assurer au mieux le respect des objectifs et des engagements pris en matière de finances publiques ».
Votre budget est insincère, car nous savons tous que, dès son élection, le prochain président devra proposer un projet de loi de finances rectificative et qu’il lui faudra alors rattraper les cadeaux fiscaux que vous accordez maintenant. Ce projet de budget pour 2017 prévoit en effet une hausse de la dépense publique de 1,6 %, alors que la croissance est molle, que la courbe du chômage n’est toujours pas inversée et que le moral de nos concitoyens est au plus bas.
Insincère, car de nombreuses mesures sont clairement électoralistes : vous saupoudrez quelques réductions pour tout le monde – retraités, entreprises ou fonctionnaires.
La réduction de la pression fiscale est un impératif pour redresser le pays. Toutefois l’effort ne doit pas reposer toujours sur les mêmes. Or, depuis 2012, vous matraquez les classes moyennes.
Les entreprises saluent la timide baisse du taux d’impôt sur les sociétés – IS –, mais elles regrettent la complexité du dispositif. Le choc de simplification n’est toujours pas pour 2016 ! Par ailleurs, en ciblant une partie seulement des PME, vous introduisez de nouveaux seuils – et nous savons combien, à chaque fois, ces seuils sont contestés –, ainsi que de nouvelles distinctions peu lisibles entre entreprises, avec trois taux différents, le nouveau taux de 28 % s’ajoutant aux deux taux existants de 15 % et 33 %. Accepterez-vous, monsieur le secrétaire d’État, notre amendement prévoyant une baisse du taux de l’IS pour toutes les entreprises dès 2017 ? Une telle mesure aurait un impact bien plus fort en termes d’attractivité.
En contrepartie, afin de financer la cascade d’annonces nouvelles et de tenter de respecter les objectifs de déficit public, vous accroissez le cinquième acompte d’IS pour les grandes entreprises, vous instaurez un acompte sur la majoration de taxe sur les surfaces commerciales et vous étendez le champ d’application de l’acompte de prélèvement forfaitaire sur les revenus de capitaux mobiliers. Ce n’est pas comme cela que l’on relancera l’activité économique dans notre pays et que l’on enrayera le fléau du chômage, lequel est reparti à la hausse depuis le mois de juillet partout en France, notamment dans mon département de la Loire, avec un net recul de l’emploi marchand dans l’industrie et la construction, qui sont, comme vous le savez, deux baromètres importants de notre économie.
Vous supprimez de petites niches que vous estimez inefficaces, mais vous oubliez une fois de plus les classes moyennes, pour qui la réduction des droits de succession ou de donation à proportion du nombre d’enfants du donataire ou de l’héritier n’est pas négligeable. Oui, monsieur le secrétaire d’État, pour les familles nombreuses, 300 ou 600 euros, ce n’est pas rien !
Un mot enfin sur les inquiétudes légitimes des communes rurales, pour qui l’abandon de la réforme de la DGF est une erreur historique. Les maires ruraux, réunis en congrès le week-end dernier dans mon département de la Loire, dénoncent le cynisme ambiant qui se traduit par un renoncement à cette réforme, pourtant votée dans la loi de finances pour 2016, et par une dotation par habitant majorée pour les agglomérations, à hauteur de plus de 70 millions d’euros, qui sera financée sur les dotations globales, et donc par les ruraux.
De plus, si le Fonds de soutien à l’investissement local est en hausse, il exclut de fait les communes de moins de 2 000 habitants. Pour y avoir droit, il faut trouver des solutions permettant de présenter de gros projets regroupant une centaine de communes, ce qui est très difficile, voire impossible, en zone de montagne.
Par ailleurs, le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales devrait être réduit pour favoriser les communes riches, selon l’Association des maires ruraux de France – AMRF. Ainsi, les communes riches vont moins payer et les communes pauvres moins recevoir. Cherchez l’erreur !
Vous l’aurez compris, monsieur le secrétaire d’État, ce budget que même votre ami Didier Migaud qualifie gentiment d’« optimiste » ne sous satisfait pas et nous espérons que les travaux en séance permettront de le rendre sincère.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, chers collègues, nous entamons ce soir l’examen du dernier projet de loi de finances de la mandature, dans un contexte particulier de menace terroriste toujours présente sur notre sol et au-delà, qui contraint l’État à accroître très sensiblement l’effort budgétaire pour la sécurité et les missions extérieures.
Les hypothèses sur lesquelles se fonde le budget sont toujours contestées. Il est vrai que, par définition, les prévisions ne sont pas une science exacte…
…mais, jusqu’ici, et donc depuis quatre ans, les prévisions budgétaires ont été tenues. Pourquoi ne le seraient-elles pas une nouvelle fois ?
L’objectif d’un déficit de 2,7 % et la prévision de croissance à 1,65 % sont crédibles et sérieux – deux adjectifs qu’il conviendrait d’appliquer à la trajectoire de guérison de la France engagée depuis l’arrivée de Jean-Marc Ayrault à la tête du Gouvernement,…
…avec votre concours, monsieur le secrétaire d’État.
Un regret cependant : pour moi, le PIB n’est pas l’alpha et l’oméga. J’aurais ainsi aimé qu’à l’appui de la présentation de ce budget, nous puissions également discuter et proposer de nouveaux indicateurs de richesse mesurant le bien-être ou le mal-être des Français.
Ce budget, qui intervient dans un contexte d’amélioration des finances publiques, est pourtant une bonne nouvelle pour nous et pour les Français, auxquels tant d’efforts ont été demandés depuis quatre ans.
Des mesures d’importance y figurent : baisse de l’impôt sur le revenu ciblée sur les classes moyennes, mesures en faveur des PME avec la baisse de l’impôt sur les sociétés et crédit d’impôt en faveur des personnes âgées non imposables faisant appel à un service. Je n’oublie évidemment pas la retenue à la source, si bien décrite par M. Pierre-Alain Muet. Les Français ne doivent pas la craindre, ni écouter la droite qui leur fait peur. Le changement n’est pas significatif de malheur. La retenue à la source est une mesure juste et une mesure de simplification.
Dans la droite ligne de la retenue à la source applicable à chaque citoyen imposable, l’article 5 prévoit de supprimer le dispositif spécifique de retenue à la source dont bénéficient les élus locaux. Cette mesure de justice s’inscrit dans l’objectif de transparence que notre majorité poursuit depuis quatre ans. Pour le cas où on l’aurait oublié, je tiens à rappeler que, depuis quatre ans, nous avons mis en place une déclaration de patrimoine, baissé les indemnités du Président de la République et des ministres, officialisé la réserve parlementaire et tant d’autres choses ! Si l’on veut parler d’impôt juste, il ne peut y avoir de régime dérogatoire pour les élus locaux. Cela a d’ailleurs donné à ma collègue Christine Pires Beaune et à moi-même, ainsi qu’à quelques autres députés, des idées qui vont également dans le sens d’une plus grande justice fiscale. Nous en reparlerons lors de l’examen de la deuxième partie du projet de loi de finances.
Je relisais tout à l’heure avec plaisir, à la bibliothèque, les Entretiens du père Gérard, député bas-breton en 1789, auteur de ce qu’il a appelé le « catéchisme de la Constitution », où il préconise de ne jamais parler d’« impôt ». Selon lui, l’impôt induit l’idée de contrainte. Il lui préfère le mot « contribution », qui convient mieux à un homme libre. La contribution est volontaire puisque la nation l’a votée de son plein gré pour assurer les charges publiques. Au fond, je nous souhaite de mettre nos pas dans ceux de nos prédécesseurs illustres ou, comme celui-ci, obscurs, animés de la foi républicaine, et de voter – joyeusement ! – le budget que le Gouvernement nous propose pour l’année 2017.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, il est certain que ce n’est pas avec ce projet de budget que vous inverserez la courbe du chômage – ni d’ailleurs la courbe d’insatisfaction des Français à votre égard !
Comme d’habitude dans ces débats budgétaires, nous examinons un budget insincère dans ses hypothèses de croissance, dans l’estimation des recettes et, bien sûr, dans les objectifs insoutenables de déficit public. Mais cette année, en plus de l’habituelle insincérité, nous découvrons une nouveauté. Il s’agit de ce que mon collègue Charles de Courson a appelé, à juste titre, les « bombes à retardement budgétaires » – autrement dit, les cadeaux empoisonnés. Estimés entre 8 et 10 milliards d’euros, ils se composent de tous les reports de charges ou de dépenses sur 2018 – « Après moi, le déluge ! », monsieur le secrétaire d’État !
C’est vrai pour le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE –, avec 3,3 milliards d’euros d’efforts sur 2018 ; c’est vrai pour la non-budgétisation de l’opération Areva ; c’est vrai pour les mesures d’anticipation des recettes, sans commune mesure ; c’est vrai également pour les reports relatifs au programme d’investissements d’avenir.
Ce budget est non seulement celui des bombes à retardement budgétaires, mais aussi celui des engagements non tenus en matière de déficit public, en matière de dépense publique – elle augmente encore de 1,6 % en 2017 – et en matière d’impôts. Vous avez beau brandir la baisse de 1 milliard d’euros de l’impôt sur le revenu, force est de constater que le taux de prélèvements obligatoires est identique d’une année sur l’autre, à 44,5 %,…
…et que la valeur absolue du produit de l’impôt sur le revenu augmente entre 2016 et 2017.
Ainsi, après le détricotage fiscal du début de mandat avec la fin de la défiscalisation des heures supplémentaires, après le matraquage fiscal avec 50 milliards d’euros d’impôts supplémentaires depuis 2012, vous nous inventez aujourd’hui l’illusionnisme fiscal : vous nous faites croire que l’impôt diminue alors même qu’il augmente pour les ménages et qu’il se concentre toujours sur les classes moyennes. Nous avons besoin, dans ces conditions, d’une véritable alternance politique, ayant le courage de réduire les déficits tout en maîtrisant la pression fiscale.
Au groupe Les Républicains, nous pensons que le premier principe est celui de la justice fiscale.
La justice fiscale consiste à s’attaquer aux impôts. Pour cette raison, comme Bruno Le Maire, nous pensons qu’il faut baisser la cotisation de CSG.
Deuxième principe important : la compétitivité des entreprises, qui passe par la baisse des charges sociales, l’évolution de la durée du travail et la simplification du code du travail.
Troisième principe : la liberté économique, qui suppose la liberté d’embaucher, la dégressivité des allocations chômage et la suppression de l’impôt sur la fortune. Pour inverser la courbe du chômage, il faudra briser les tabous dans ce pays.
À l’image du psychodrame qu’a été la loi El Khomri, votre politique économique est un contresens historique total. Je souhaite mettre l’accent sur un point : la baisse des dotations aux collectivités locales, en particulier aux départements. Étant moi-même président du département de l’Ain, je peux vous dire que ce que vous faites dans le projet de loi de finances pour 2017 est un scandale absolu.
C’est d’abord un non-sens budgétaire. Comment peut-on, d’un côté, promettre un fonds d’urgence de 200 millions d’euros en faveur des départements en difficulté et, de l’autre, prendre à ces mêmes départements 400 millions d’euros supplémentaires avec l’élargissement du périmètre des variables d’ajustement de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, ou encore de la dotation pour transfert de compensations d’exonérations de fiscalité directe locale ? Si l’on ajoute à cela la baisse de la dotation de fonctionnement, cela représente près de 6 milliards d’euros de pertes pour les départements. Peut-être est-ce pour cela, d’ailleurs, que ni le Président de la République, ni le Premier ministre n’ont jugé bon de venir au congrès de l’Association des départements de France à Poitiers !
Il s’agit également d’un non-sens économique. La Cour des Comptes vous a rappelé l’an dernier dans son rapport que les investissements publics dépendent d’abord des collectivités territoriales : réduire les dotations revient donc à casser les investissements de ces collectivités.
Il s’agit en outre d’un non-sens social car vous cassez la politique sociale de proximité, qui concerne les personnes âgées, les personnes handicapées, l’insertion ou encore les solidarités. Permettez-moi de vous dire, monsieur le secrétaire d’État, que les départements sont ainsi victimes d’un effet de ciseau avec la montée en charge toujours plus forte des dépenses sociales. Je vous demande donc de suivre la position de la commission des finances, qui s’est prononcée sur ce sujet, en nous permettant d’adopter la même position en séance publique.
Soit vous portez atteinte à la libre administration des collectivités territoriales, soit vous considérez que le département n’est plus une collectivité territoriale à part entière ; mais dans ce cas, il faut nous le dire, monsieur le secrétaire d’État ! Où est donc passée la gauche décentralisatrice ? Nous sommes passés d’une gauche décentralisatrice à une gauche moralisatrice et castratrice pour les collectivités territoriales.
Il s’agit, pour conclure, d’un mauvais budget : mauvais dans les chiffres, mauvais dans la politique économique et mauvais dans la vision de la société. La seule bonne nouvelle pour nous, c’est qu’il s’agit du dernier budget de votre législature : il est grand temps d’en venir à une véritable alternance, celle d’une droite qui assume ses convictions et incarne l’espoir d’un renouveau pour toute la vie politique française !
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, ce projet de loi de finances pour 2017 s’inscrit dans la cohérence de ce quinquennat et respecte les engagements du Président de la République de ramener le déficit à 2,7 % du PIB.
Ce budget est sérieux ; il est bon pour la croissance et l’emploi ; il est également favorable au pouvoir d’achat des ménages et au renforcement de la justice sociale. Il permet de rendre aux Français les plus modestes une partie des efforts consentis pour la remise en ordre de nos finances publiques.
Le Gouvernement a décidé, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017, d’inscrire pour une quatrième année consécutive une baisse de l’impôt sur le revenu pour un montant supplémentaire d’1 milliard d’euros. Au total, la baisse atteint 6 milliards depuis 2014.
Par ailleurs, conformément aux engagements pris dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité, les allègements sur les entreprises représenteront plus de 40 milliards d’euros en 2017, au travers d’un renforcement du CICE, de la reconduction des dispositifs d’exonérations fiscales en faveur des jeunes entreprises innovantes et de la baisse du taux d’impôt sur les sociétés.
L’article 6 de ce projet de loi de finances pour 2017 vise à ramener le taux français de l’impôt sur les sociétés à 28 % pour tous les bénéfices des entreprises d’ici à 2020, ce taux s’appliquant aux PME dès 2017. Il s’agit là d’offrir aux entreprises la prévisibilité nécessaire, avec 500 millions d’euros en 2017et 1,5 milliard d’euros en 2018. En combinant l’impact du CICE et la baisse annoncée des taux, le poids de l’impôt sur les sociétés aura été divisé par deux en dix ans, pour tomber à 1,3 % du PIB en 2017.
D’aucuns, dans cet hémicycle, pourraient se reprocher d’avoir manqué de courage pour entreprendre les réformes nécessaires à la modernisation de notre économie et au soutien de la productivité : ce n’est pas notre cas !
Sur la prévision de croissance, je veux bien entendre les craintes mais, pour vous rassurer, nous avons tenu nos engagements pendant quatre budgets : c’est à porter à notre crédit.
Près de 7 milliards d’euros de moyens supplémentaires seront alloués aux secteurs prioritaires en 2017 : l’école et l’enseignement supérieur, en premier lieu, bénéficieront de 3 milliards d’euros de moyens nouveaux. La création de 11 712 postes supplémentaires dans l’éducation nationale, dont 140 pour l’enseignement agricole et 950 dans les universités, permet de respecter l’engagement de créer 60 000 postes dans l’enseignement sur le quinquennat. C’est une politique de gauche, tout comme la majoration des bourses des lycéens, augmentées de 10 %, et la majoration des salaires des enseignants du premier degré, augmentés de 1 200 euros par enseignant. De même, les crédits supplémentaires en faveur de la sécurité s’élèveront à près de 2 milliards d’euros pour garantir la sécurité et plus de justice pour les Français.
En outre, la mobilisation en faveur de l’emploi, réaffirmée par le Président de la République à l’occasion de l’annonce du plan d’urgence en faveur de l’emploi en janvier 2016 et amplifiée cet été par la prolongation jusqu’au 31 décembre 2017 de la prime à l’embauche dans les petites et moyennes entreprises, se traduit par des moyens nouveaux très importants, de près de 2 milliards d’euros.
S’agissant de la sécurité sociale, l’on ne peut que saluer le travail des services et de la ministre Marisol Touraine. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 sera celui du rétablissement de l’équilibre : la meilleure politique de gauche consiste à garantir l’accès aux soins pour tous !
S’agissant des collectivités locales, le rythme de baisse de leurs dotations a été adapté. L’objectif de dépenses locales est fixé à 2 %, conformément à la loi de programmation des finances publiques. Enfin, le recouvrement de l’impôt fera l’objet d’une modernisation sans précédent, avec l’instauration du prélèvement à la source pour plus de justice et plus d’égalité au fil du temps.
Gouverner, c’est choisir : nous avons fait le choix d’investir pour l’avenir du pays en consacrant un effort sans précédent à l’éducation nationale, en affirmant notre solidarité à l’égard des plus faibles, en redéfinissant une politique industrielle et en renforçant notre tissu économique pour créer de l’emploi, tout en maîtrisant les dépenses et en jugulant la dette.
Nous pouvons être fiers de notre bilan et de ce dernier budget de la législature.
Monsieur le secrétaire d’État, je soutiendrai ce budget et je vous appelle, mes chers collègues, à le voter.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, « Depuis son arrivée au pouvoir en 2012, la politique économique et budgétaire de la majorité a été guidée par trois combats menés de front : celui des réformes pour la croissance et l’emploi, celui de l’assainissement des comptes publics et celui du renforcement de la justice sociale. » Ainsi commence le dossier de presse du projet de loi de finances pour 2017. J’aurai, pour ma part, monsieur le secrétaire d’État, tendance à vous appeler à un peu plus d’humilité !
Les Français retiendront surtout du quinquennat de François Hollande une augmentation brutale des impôts, au nom de ce que Jean-Marc Ayrault appelait le « redressement dans la justice ».
Du reste, c’est vous-même, monsieur le secrétaire d’État, qui démontrez le mieux toute l’ambiguïté de ce projet de loi de finances. Une lecture attentive nous conduit en effet à faire plusieurs observations.
Les prélèvements obligatoires restent stables entre 2016 et 2017 – du moins, en volume. En revanche, en valeur, ils progressent de 24,5 milliards d’euros. Il est donc faux de parler d’une baisse globale des prélèvements obligatoires.
D’après l’Observatoire français des conjonctures économiques, les prélèvements obligatoires ont augmenté au total, entre 2012 et 2017, de près de 47 milliards d’euros : c’est énorme ! Que signifie une réduction des impôts d’1 milliard d’euros quand ils ont augmenté cinquante fois plus au cours des années précédentes ? Et ce sont les classes moyennes qui ont trinqué, à tel point qu’aujourd’hui, seuls 17 millions de foyers fiscaux sur 37 paient l’impôt sur le revenu ! Où est la justice sociale dans ce bilan des cinq dernières années ?
Face à de telles augmentations, l’envie est grande de comparer ce choc fiscal à l’évolution de l’emploi sur la même période. Alors qu’en 2010 et 2011, l’économie française renoue avec les créations d’emplois, vos coups de massue sur les marges des entreprises ont cassé durablement cette dynamique. En trois ans, l’économie française a supprimé près de 200 000 emplois.
Il en va de même quand nous comparons ce choc fiscal aux chiffres de la croissance. Vous produisez, en page 8 du projet de loi de finances, dans la partie « Orientations générales et équilibre budgétaire », une démonstration du retour de la croissance et de la reprise économique en France incomplète et trompeuse. Il aurait fallu en comparaison y faire figurer les chiffres de 2010 et 2011 : pendant ces deux années, la croissance fut respectivement de 2 % et de 2,1 %. Dès votre arrivée, vous avez torpillé la croissance pour trois ans en l’abaissant à 0,2 %, puis à 0,6 % en 2013 et 2014.
Finalement, même si vous prévoyez aujourd’hui une croissance de 1,5 %, nous sommes revenus au même niveau qu’il y a cinq ans. Et encore car, à mon avis, ce chiffre sera difficile à atteindre si j’en crois les prévisions de l’INSEE. Que de temps perdu pour notre pays !
La dette de la France poursuit aussi sa course folle. En vingt ans elle est passée de 700 milliards à 2 170 milliards d’euros. Je ne crois pas non plus à votre prévision d’une dette à 96,5 % du PIB à la fin de l’année 2017. L’INSEE prévoit qu’elle sera autour de 98,4 % au deuxième trimestre 2016, bien au-dessus de votre prévision. Où est l’assainissement des comptes publics ?
Le montant abyssal de la dette publique continue de nous inquiéter tous, d’autant que beaucoup d’autres pays européens sont parvenus à maîtriser la leur. Nous ne pouvons pas reporter éternellement ses remboursements et faire peser sur l’avenir et les générations futures l’obligation de la rembourser par des recettes fiscales. C’est dès aujourd’hui notre obligation. C’est une obligation morale.
Même si cette dette est aujourd’hui dissimulée par des taux d’intérêt très bas, ceux-ci finiront par remonter. Cela est inévitable. La seule solution reste, en conséquence, la diminution de nos dépenses publiques. Or elles ne cessent d’augmenter ! Entre 2016 et 2017, leur hausse est de 1,6 %, ce qui porte leur part à 54,6 % du PIB. Elles progressent en valeur de 21,1 milliards d’euros.
C’est la raison aussi de l’augmentation des prélèvements obligatoires. Ce n’est pas moi qui le dis, mais le Haut conseil des finances publiques, lequel s’inquiète d’une telle situation. Je le cite : « Les risques pesant sur les dépenses sont plus importants en 2017 que les années précédentes. »
Autre point sur lequel je souhaiterais insister : l’économie de 46 milliards vantée par le Président de la République. Mais où sont-ils passés ? 2,8 milliards sont dégagés sur les collectivités territoriales, 7,7 milliards sur la Sécurité sociale. Sur les dépenses de l’État, combien envisagez-vous de dégager ? 0,5 milliard, ce qui ne devrait procurer aucune économie hors charge de la dette. J’en conclus, monsieur le ministre, que votre projet de loi de finances n’est ni sérieux, ni cohérent.
Ce budget est un budget de court terme. Il n’y a aucune vision de long terme. Il n’y a rien pour prévenir ses conséquences sur notre économie et les générations futures pour lesquelles la politique menée tout au long du quinquennat aura de lourdes incidences.
Cinq ans durant vous avez lutté contre la réussite. Cinq ans durant vous avez multiplié les mesures toujours plus confiscatoires, en bridant l’initiative, en taxant nos entreprises et les Français. C’est là votre principal échec à travers une politique budgétaire que vous ne maîtrisez pas.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, la boucle est bouclée ! Ce dernier budget de la mandature s’inscrit dans la continuité de l’action du Gouvernement et de la majorité depuis 2012. Il traduit une stratégie de remise en ordre des comptes publics.
Ce quinquennat aura marqué une véritable rupture dans la gestion des dépenses et des comptes publics, que nous avons remis sur une trajectoire soutenable. Le déficit de l’État a été réduit de moitié en cinq ans. En 2010 il s’élevait à 148 milliards d’euros ; nous l’avons ramené à 70 milliards d’euros en 2015. Au total, nous aurons réalisé 46 milliards d’économies entre 2015 et 2017, grâce à l’implication de l’ensemble des administrations et au bas niveau de la charge de la dette.
Après dix ans de hausse continue, la dette publique s’est enfin stabilisée. Elle a augmenté de six points entre 2012 et 2017, contre vingt-cinq entre 2007 et 2012. Je mets toutefois en garde nos successeurs : cet effort de gestion sérieuse des finances publiques devra se poursuivre parce que c’est la condition de la crédibilité de la France et la garantie de notre souveraineté. Ceux qui se présentent à l’élection présidentielle en promettant des baisses d’impôts immédiates et en reportant la maîtrise des dépenses publiques à demain sont soit des fabulateurs soit des irresponsables.
L’objectif est bien de ramener le déficit public à 2,7 % l’an prochain, à la condition bien sûr que la prochaine majorité ne l’aggrave pas. Pour atteindre cet objectif, plusieurs mesures seront mises en oeuvre : citons notamment la mise en place à l’article 8 d’un acompte de la TaSCom – taxe sur les surfaces commerciales -, et à l’article 9 d’un régime d’acompte généralisé sur les prélèvements forfaitaires obligatoires perçus sur les produits d’épargne. Ces deux mécanismes contribueront à atteindre l’objectif d’un déficit public limité à 2,7 % du PIB.
Certains parmi nos collègues jugent cet objectif improbable. Pourtant, quoi qu’en dise le Haut conseil des finances publiques, nos résultats précédents nous confortent. En 2015 par exemple, notre objectif d’une réduction à 4,3 % du déficit fut considéré comme risquant de ne pas être atteint ; nous l’avons finalement ramené à 3,5 %, soit quasiment un point de moins. Ce qui est improbable sera avéré demain, à la condition que chacun fasse preuve du même sérieux budgétaire.
Je rappelle que lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités en 2012 nous avons trouvé une situation économique, financière et budgétaire extrêmement dégradée. Notre quinquennat aura permis de ramener le déficit public sous le seuil des 3 % en 2017 et de mettre un terme à la hausse de l’endettement public, en restant à bonne distance du seuil symbolique de 100 % du PIB. Ce budget confirme la sincérité et l’esprit responsable dont nous avons fait preuve dès le début de mandat dans la maîtrise des dépenses publiques sur la durée permettant des baisses d’impôt au gré de celles du déficit.
Par ailleurs, il convient de souligner que c’est grâce à cette majorité que le « trou » de la Sécurité sociale sera comblé l’an prochain. Alors que le déficit du régime général était de 23,9 milliards d’euros en 2010, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017 prévoit un excédent. Du jamais vu depuis 2001 !
Deux milliards d’euros de crédits supplémentaires seront alloués à la sécurité. Il est important de noter que pour la première fois depuis 2009, non seulement les engagements d’une loi de programmation militaire sont tenus mais des moyens nouveaux sont octroyés.
Enfin, nous avons conduit notre action dans le souci permanent de la justice sociale et avons tout fait pour préserver les plus démunis et la classe ouvrière, en demandant davantage d’efforts aux plus hauts revenus. Au total, l’ensemble des mesures prises par cette majorité aura préservé le niveau de vie des six premiers déciles et sensiblement augmenté celui des 10 % les plus modestes.
Dans ce contexte, et sous l’effet de la montée en charge de la fiscalité écologique et de la poursuite de nos efforts de lutte contre la fraude, le taux des prélèvements obligatoires se stabilisera à 44,5 % du PIB en 2017, en recul après le point haut de 44,8 % en 2014.
Nous concrétisons un double objectif : faire baisser le déficit de l’État tout en finançant des baisses de prélèvements au profit des plus démunis. Qui a fait mieux jusqu’ici ?
Ne comptez pas sur nous, sous prétexte que nous sommes à la veille d’une élection présidentielle, pour nous écarter du principe de responsabilité que nous nous sommes fixés depuis quatre ans. S’il y a un point sur lequel il ne peut être permis de douter, c’est bien de notre capacité à maîtriser les dépenses alors que le Gouvernement a ramené l’ONDAM – objectif national des dépenses d’assurance maladie – à 1,75 % en 2016, son plus bas niveau depuis vingt ans. Nous laisserons un environnement économique et budgétaire assaini à nos successeurs, quelle que soit leur allégeance politique. Espérons qu’ils sauront être attachés autant que nous le sommes à la notion de budget responsable.
C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à voter ce projet de loi de finances pour 2017.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, le projet de loi de finances qui nous réunit ce jour est à l’image de ce quinquennat : une occasion ratée. Depuis 2012, jamais notre pays n’aura réussi à entrer dans le cadre fixé par l’Union européenne et nous savons tous que les chiffres que l’on nous annonce seront largement dépassés.
Pas une fois, depuis 2012, le Gouvernement n’aura été capable de contenir notre déficit en deçà des 3 %. Les conditions étaient pourtant optimales, entre des taux d’intérêt très bas et un prix du pétrole favorable. Pour 2017, vous nous annoncez un déficit de 2,7 %, monsieur le ministre, mais vous savez bien que ce chiffre ne sera pas atteint, loin de là. Vous utilisez tous les artifices possibles : une hypothèse de croissance intenable, des reports de dépenses, des anticipations de recettes, des artifices budgétaires.
Après cinq ans de gouvernement socialiste, le bilan est triste. La dette a continué à s’aggraver, les déficits à s’accumuler. Les chiffres sont astronomiques : la dette publique atteint 2 170 milliards d’euros et plus de 98,4 % du PIB. Les économies promises, les fameux 50 milliards d’euros ne sont pas au rendez-vous, loin s’en faut ! Vous n’avez fait que raboter divers secteurs mais cela ne constitue pas une politique économique.
Vous avez augmenté, et continuez à le faire, le nombre de fonctionnaires. Est-ce raisonnable alors que la masse salariale de l’État a atteint 278 milliards d’euros en 2014, soit près de 23 % de la dépense publique ? Est-ce raisonnable alors que vous n’êtes revenus ni sur le statut de la fonction publique ni sur le système de retraite des fonctionnaires ?
Nos entreprises souffrent et votre gouvernement n’a pas su les accompagner dans la crise qu’elles traversaient. Il a mené une politique fiscale déplorable, qui les a anéanties tout comme les particuliers en créant un ras-le-bol fiscal généralisé ainsi qu’un problème grave, à savoir l’absence de consentement à l’impôt.
Si cet effort s’était accompagné de réformes diminuant la dépense publique, qui reste au niveau très élevé de 54,6 % du PIB, peut-être aurait-il eu un sens mais ce ne fut même pas le cas ! Les réformes structurelles sont les grandes absentes de ce quinquennat. Le mille-feuille territorial s’est épaissi, la loi Macron a accouché d’une souris et la loi travail a été dénaturée.
De plus, ce quinquennat aura été marqué par l’improvisation, des allers et retours permanents, créant une instabilité législative, fiscale et normative qui a causé un grave préjudice à notre économie tout entière. Ce budget en est une douloureuse illustration. Prenons l’exemple du taux de l’impôt sur les sociétés. Qui sait aujourd’hui quels seront les taux dans quelques semaines ? Y aura-t-il deux taux, trois taux et pour quels types d’entreprises, de quelle taille ? Nul ne le sait encore.
Un autre exemple en est le régime des actions gratuites. Un avantage fiscal et social leur a été accordé par la loi Macron du 6 août 2015 et voici qu’aujourd’hui il est question de revenir sur ce régime. Comment voulez-vous que les entrepreneurs s’y retrouvent et fassent confiance ? Car c’est une crise de confiance que notre pays traverse.
Le dispositif envisagé prévoit de placer toutes les entreprises au même niveau de fiscalité. Comment voulez-vous que les start-up ou les PME rivalisent avec les entreprises du CAC 40 pour attirer des collaborateurs à fort potentiel et pour les fidéliser ?
Le prélèvement de l’impôt à la source, que vous voulez imposer aux forceps, est aussi un gros sujet d’inquiétude pour les entreprises, notamment pour nos TPE et PME. Il va leur créer des charges et des contraintes supplémentaires alors qu’elles réclament l’inverse. Est-ce leur rôle de collecter l’impôt, même si elles collectent déjà la TVA ? Sont-elles responsables des taux d’imposition trop élevés de notre pays qui auront pour effet de diminuer le montant sur la dernière ligne des bulletins de salaire ? Avez-vous réellement mesuré les conséquences de cette mesure qui n’apportera aucunement la simplification attendue ?
Les promesses du candidat Hollande ont été vite oubliées. La grande réforme fiscale a disparu. Au contraire l’impôt sur le revenu a considérablement augmenté – de 8,7 milliards d’euros entre 2012 et 2014. Devant le choc et le mécontentement que cela a provoqué, vous avez essayé d’adoucir la facture mais pas pour tout le monde, loin de là. Vous avez créé une France à deux vitesses, ceux qui contribuent à l’effort et les autres. Est-il normal que moins d’un ménage sur deux acquitte cet impôt ? Votre gouvernement n’a eu de cesse de frapper les classes moyennes, en particulier les familles. Vous vous êtes livrés à un travail de sape continu, et encore aujourd’hui en rabotant les avantages accordés aux familles pour les frais liés aux donations et successions.
C’est donc, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues de la majorité, une France exsangue que vous allez laisser en 2017. Nous pourrions dire à M. Hollande : « Merci pour ce bilan » !
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, nous sommes nombreux à avoir évoqué à cette tribune la cohérence qui est celle du Gouvernement et de la majorité dans la conduite de la politique budgétaire de notre pays.
Ce projet de loi de finances pour 2017, le dernier de la législature, s’inscrit dans cette cohérence qui vise à restaurer notre souveraineté budgétaire par la réduction des déficits, à optimiser la dépense publique, à dégager les ressources nécessaires au financement des priorités sur lesquelles nous nous sommes engagés devant les Français et à protéger notre modèle social.
Les comptes publics, dont l’état déplorable à l’aube de cette législature ne peut de bonne foi être contesté, se redressent année après année, malgré un contexte macroéconomique encore fragile. Ce redressement permet d’ailleurs enfin de voir le poids de la dette publique par rapport au PIB se stabiliser.
Le régime général de la Sécurité sociale est en passe de revenir à l’équilibre. C’est un fait majeur qui marque la volonté de la gauche de permettre à notre système de protection et de redistribution de se projeter dans l’avenir. Cette volonté tranche évidemment avec celle des libéraux qui, à chaque fois qu’ils ont gouverné dans les dernières décennies, ont laissé se creuser le « trou de la Sécu », tout en diminuant les prestations, pour pouvoir arguer de la nécessité d’en finir avec l’héritage du Conseil national de la Résistance.
Tous les efforts entrepris, qui, disons-le, ont mis à contribution les Français, l’ont été sans que ne soit administrée au pays la purge austéritaire qui a eu cours dans d’autres États et dont nous avons pu mesurer les funestes effets. Pourtant, il y a, de loi de finances en loi de finances, des pourfendeurs zélés qui feignent ici de la constater. Et d’ailleurs, affairés qu’ils sont à dénoncer une austérité qui ne correspond pas à la réalité, ils en oublient presque de dénoncer que, sur certains bancs de cet hémicycle, on trépigne d’impatience de nous l’infliger.
Sur ces bancs, MM. Abad et Chevrollier nous en ont fait une belle démonstration, on se jauge sur le nombre – 200 000, 300 000 – de postes de fonctionnaires à supprimer ; on se défie sur le pourcentage d’augmentation de la TVA ; on se vante de posséder la formule de la potion libérale la plus amère et on se rejoint parfois sur l’idée qu’il est inutile de perdre du temps devant le Parlement et que le traitement de choc pourra être injecté par ordonnances, de préférence prises entre le 14 juillet et le 15 août.
A contrario, dans la majorité, nous finançons, en tenant les équilibres globaux, les créations de postes indispensables pour assurer la sécurité des Français et la formation des jeunes générations. Nous permettons aussi au tissu économique, par une fiscalité réformée, de retrouver des marges de manoeuvre pour favoriser l’emploi et l’investissement. À rebours des projets de l’opposition, nous poursuivons, cette année encore, les baisses d’impôts à destination des foyers modestes et des classes moyennes. Nos débats permettront d’ailleurs sans doute de dégager de nouvelles marges, par le recentrage du dispositif sur la distribution d’actions gratuites.
Enfin, un autre fil rouge a guidé non seulement notre politique budgétaire et fiscale mais aussi l’action internationale de la France, et vous avez joué un rôle majeur dans ce domaine, monsieur le secrétaire d’État, depuis le début de ce quinquennat : celui de la lutte contre la fraude fiscale et l’érosion des bases. Ce fléau, qui s’est longtemps nourri de l’inaction politique, est devenu au fil des ans aussi néfaste pour nos finances publiques que pour la confiance de nos citoyens dans leurs institutions et leur consentement à l’impôt.
En s’écartant des règles élémentaires qui président à nos destinées communes, les personnes morales ou physiques concernées par l’évasion fiscale, l’abus de droit ou la complaisance de certaines juridictions fiscales peu scrupuleuses, minent délibérément notre contrat social. C’est pourquoi, depuis quatre ans, la gauche, et elle peut en être fière, a fait le choix de combattre frontalement une plaie qui ronge nos bases fiscales à hauteur de plusieurs dizaines de milliards par an. L’accord signé en 2013 par Pierre Moscovici et son homologue américain dans le cadre de la loi FATCA – Foreign account tax compliance Act – a jeté les bases du reporting entre administrations fiscales. La loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière a créé un parquet financier à compétence nationale doté de moyens spécifiques. L’adoption prochaine du projet de loi dit Sapin 2 enrichira considérablement la palette des outils mis à disposition de l’administration et de la vigilance citoyenne en matière de lutte contre la délinquance fiscale et la finance dévoyée.
Le projet de loi de finances pour 2017 ne déroge pas à cette ligne directrice. J’en veux pour preuve l’article 4 qui tend à s’attaquer aux cash boxes, ces holdings patrimoniales qui n’ont d’autre utilité que d’optimiser le plafonnement de l’ISF en diminuant les revenus imposables de leurs détenteurs. Mesure édictée dans le projetBEPS de l’OCDE, dont la France est l’un des acteurs de premier plan, l’introduction de cette clause anti-abus s’inscrira aussi dans un corpus de dispositions qui nous donnent les moyens de faire appliquer dans toute sa rigueur la règle commune. Il s’agit là d’une réponse à une légitime exigence de justice et d’égalité de traitement entre tous les contribuables, quel que soit le niveau, modeste ou très élevé, de leurs revenus.
Mes chers collègues, je ne doute pas que les discussions qui vont suivre nous permettent d’aller encore plus loin dans l’expression concrète de cet impératif républicain et également, à l’heure du bilan, de démontrer la cohérence des choix réalisés depuis 2012, choix parfois difficiles, mais toujours exigeants, au service de nos concitoyens, de notre pays et de son avenir.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Madame le président, monsieur le secrétaire d’État, madame le rapporteur général, alors que nous examinons le dernier budget de la législature, je vous avoue que je m’attendais à un sursaut de réalisme, à un électrochoc, à un baroud d’honneur.
Las, force est de reconnaître qu’on en est loin, et que tout nous renvoie au début du quinquennat. Comme l’écrit Maurice Druon dans Les Rois maudits, à propos d’Édouard II d’Angleterre, votre gouvernement est puni « par là où il a péché ». N’est-ce pas vous qui avez imaginé en 2012 la création du Haut Conseil des finances publiques, chargé d’apprécier le réalisme des prévisions macroéconomiques du Gouvernement et de vérifier la cohérence de la trajectoire de retour à l’équilibre des finances publiques avec les engagements européens de la France ?
Et voilà qu’en 2017, cet organisme indépendant du Gouvernement et du Parlement, placé auprès de la Cour des comptes et présidé par son Premier Président, vous a délivré un carton rouge sans ambiguïté en avertissant que votre prévision de 1,5 % de croissance s’écartait du principe de prudence. C’est un euphémisme pour dire que vous êtes entre 0,2 et 0,3 point au-dessus du consensus des économistes, ce qui fait que mécaniquement, les recettes fiscales calculées par rapport à cette hypothèse volontariste, seront bien moindres que prévues.
N’importe quoi !
Comme le disait le président du Haut Conseil : « En soi, il n’y a rien de choquant dans les hypothèses du projet de loi de finances prises une à une. Le problème vient du cumul d’hypothèses économiques systématiquement toutes favorables. »
La velléité d’indépendance du Haut Conseil a provoqué un pilonnage en règle de nos collègues socialistes en commission des finances, qui ont reproché au Haut Conseil d’avoir outrepassé ses prérogatives en jugeant « incertain » le retour sous la barre des 3 % de déficit inscrit dans les règles budgétaires européennes et même « improbable » la cible de 2,7 % que le Gouvernement s’est lui-même fixée. Étrange argumentation : il s’appelle « Haut Conseil des finances publiques » et on ne voudrait pas qu’il s’exprime sur les finances publiques ! Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage.
D’autant que votre bilan, franchement, ne plaide pas en votre faveur. Si vous aviez un peu plus écouté la rue Cambon, peut-être n’auriez-vous pas perdu deux ans à étrangler les Français.
En 2012, vous aviez prévu en loi de finances rectificative un point de croissance en volume : elle a été au final quasi-nulle. Bon, vous veniez d’arriver, vous n’aviez plus gouverné depuis longtemps, soyons bienveillants.
Sourires sur les bancs du groupe Les Républicains.
En 2013, patatras : vous vous trompez du simple au double sur les recettes fiscales nettes, du fait d’une évolution spontanée bien moins forte qu’anticipée. Heureusement, les impôts nouveaux vous permettent de limiter les dégâts. La Cour des comptes écrit alors : « L’écart entre prévision et exécution sur l’évolution spontanée des recettes fiscales souligne le manque de prudence de la loi de finances initiale et peut soulever une interrogation au regard de la sincérité de cette dernière. »
En 2014, c’est encore un écart de 10 milliards d’euros qui se creuse entre la loi de finances initiale et le solde constaté en matière de recettes fiscales. Le constat d’une évolution spontanée en exécution inférieure à la prévision retenue en loi de finances initiale pour 2014 n’avait surpris personne, sauf vous. La Cour l’avait souligné dans son analyse du rapport public annuel : « Compte tenu de la croissance économique supposée dans la loi de finances initiale pour 2014, il aurait été plus prudent de retenir une hypothèse d’élasticité inférieure à sa moyenne de long terme, c’est-à-dire inférieure à 1. »
En 2015 enfin, la situation s’améliore : vos prévisions sont conformes à l’exécution et les recettes spontanées repartent. Rien d’étonnant à cela. Comprenant au bout de trois années pourquoi vos recettes spontanées ne croissaient pas les années précédentes, vous recueillez enfin les fruits de votre conversion à l’allégement fiscal, après deux années de matraquage. Rappelons que l’OFCE – qui n’est pourtant pas spécialement proche des Républicains – a évalué la pointe de 2012-2013 à plus de 50 milliards d’euros et que le maximum historique de 44,8 % du PIB de prélèvements obligatoires a été atteint en 2013.
De plus, vous aviez été récompensés de votre réalisme. La Cour des comptes l’écrivait ainsi : « Le taux de croissance économique proche de la prévision a contribué à l’absence de révision de l’évolution spontanée des recettes fiscales. »
Malheureusement, en 2016, nouvelle rechute : vous nous avez présenté un scénario raisonnablement optimiste, avec 1,5 % de croissance contre 1,2 % pour le consensus des économistes. Cela semble optimiste, vu le petit 1,1 % de 2015. Et malheureusement, la croissance nulle au second trimestre 2016 ne vous a pas aidés. Dans ces conditions, votre hypothèse pour 2017 paraît extrêmement optimiste.
Votre budget multiplie ensuite les rustines pour paraître présentable. Je ne vous les reprocherai pas trop, car malheureusement, l’inventivité de Bercy a servi sous la plupart des gouvernements qui ont précédé le vôtre : par exemple à travers l’obtention de recettes exceptionnelles, cette fois-ci en siphonnant la Coface.
En revanche, je tiens à vous dire qu’au-delà des contingences annuelles, il faut faire attention à la question de la stabilité des prévisions. Prévoir des recettes est, on le sait, un exercice compliqué, surtout lorsque pour des raisons d’affichage, on gonfle les hypothèses. Mais ce sera à mon avis un exercice tout à fait vain après que vos différentes réformes de l’impôt sur les sociétés et de l’impôt sur le revenu seront entrées en vigueur. En effet, depuis la réforme Borloo, l’impôt sur les sociétés est de plus en plus corrélé à l’activité de l’année en cours, phénomène que vous accentuez cette année avec l’augmentation du cinquième acompte versé par les grandes entreprises pour l’année 2016.
Or, voici que dans le même temps, vous comptez instaurer le prélèvement à la source, ce qui fait que l’impôt sur le revenu, calculé jusqu’ici sur les revenus de l’année précédente, sera directement corrélé à l’activité de l’année en cours, comme la TVA et, à 90 %, l’impôt sur les sociétés. Bref, les trois grands impôts qui alimentent le budget de l’État réagiront de la même manière en cas de retournement de cycle.
Faites un peu d’archéologie : regardez ce qui est arrivé en 2008, lors du dernier retournement de cycle. L’impôt sur le revenu avait continué à progresser, malgré le début de la crise, ce qui a sauvé l’année budgétaire 2008. Mais en 2009, quand les trois impôts ont fonctionné de manière cyclique, ce sont 50 milliards d’euros qui ont manqué. Couplez cela à une éventuelle remontée des taux et vous verrez que nous avons là tous les germes d’un risque systémique.
En conclusion, je regrette qu’à l’heure où les économistes peuvent commencer à poser un regard critique sur les cinq années écoulées, vous quittiez la scène en reproduisant exactement les mêmes erreurs qu’en 2012 : hypothèses faussées, cavalerie budgétaire et mauvaise foi à l’égard des organismes qui vous alertent. Au lieu de regarder les primaires de la droite à la télévision, consultez un manuel de pilotage des finances publiques et, pourquoi pas, relisez les rapports de la Cour des comptes des cinq dernières années, riches d’enseignements sur cette législature.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
M. Aubert ne peut quand même pas dire du mal de la main qui le nourrit !
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, nous commençons aujourd’hui la discussion en séance publique du dernier budget de la législature, budget dont on sait d’ores et déjà que, quels que soient le résultat des urnes et le choix des citoyens au printemps prochain, il sera largement amendé au cours de l’année 2017.
Qu’avons-nous fait de ces cinq ans ? Comme député du Mouvement républicain et citoyen, je veux le dire clairement : la stratégie de redressement des finances publiques a échoué.
Le résultat obtenu, le passage sous les 3 % en 2017, a été atteint au prix d’un écrasement de la croissance et d’une montée du chômage. En plus de son coût global, social et humain, cette stratégie perdante a maintenu la France sur la liste des suspects, nous conduisant à quémander année après année la clémence de nos juges, et en particulier celle d’un récent locataire de Bercy, je veux parler de Pierre Moscovici, en prenant des engagements aussi inopportuns que, par exemple, la loi travail.
Si ces cinq années ont pu décevoir, elles ne manquent pas de cohérence. Loin de là.
Le choix politique d’abandonner l’engagement d’une renégociation du traité européen sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, à l’été 2012, fut à mes yeux le péché originel du quinquennat. J’avais voté contre, comme j’avais voté contre la règle d’or et la programmation pluriannuelle des finances publiques ; et dans quelques heures, je vous proposerai de supprimer l’article liminaire qui met en oeuvre la loi de programmation des finances publiques, votée le 10 et promulguée le 17 décembre 2012, pour les années 2014-2019.
Je veux noter en passant que nos collègues de droite et leurs différents champions qui s’opposent dans la primaire de l’ex-UMP ont, en apparence, moins d’égards pour les règles européennes, mais ce pragmatisme est largement compensé et même gâché par des obsessions idéologiques : celle d’amputer la dépense publique, qui de 85 milliards, qui de 100 milliards, celle de supprimer l’ISF, celle de baisser les droits de succession. De ce côté-là, ces cinq années dans l’opposition n’ont pas été mises à profit par la droite pour renouveler le programme. Fin de la parenthèse.
Le collectif budgétaire de l’automne 2013, amplifiant les décisions prises par la droite en 2011, a mené la France aux portes de la récession. Cette stratégie budgétaire a plombé l’ensemble du quinquennat et nous a condamnés collectivement à des mesures tactiques plus ou moins inspirées. On nous vantait en 2012 le choix moins récessif de l’augmentation des recettes, nous aurons eu en fin de compte l’alourdissement des recettes et la baisse des dépenses. En détruisant la croissance, en alimentant le chômage, notre politique s’est autodétruite et s’est privée de toute chance.
J’aborderai deux autres sujets. Le prélèvement à la source est une mesure importante de modernisation de notre système fiscal. Il intervient assez tardivement et il est seul, isolé, privé des mesures qui lui donneraient toute sa portée comme la création d’un impôt citoyen issu de la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG. Au lieu de quoi, nous bricolons pour la troisième année les tranches basses du barème pour financer des mesures de pouvoir d’achat qui sont utiles à court terme mais endommagent un peu plus le jeune centenaire qu’est notre impôt sur le revenu.
J’évoquerai enfin les dépenses de sécurité, car ces cinq années ont aussi été celles de l’horreur. On peut parfois avoir le sentiment, ici, de débats schizophréniques : d’un côté les discussions macroéconomiques et les règles européennes, de l’autre les dépenses indispensables à la sécurité des Français. Le Président de la République avait évoqué après les attentats du 13 novembre dernier un pacte de sécurité. C’était une excellente idée mais je n’ai pas le sentiment qu’elle ait beaucoup infusé dans ce projet de loi de finances pour 2017. Nous y reviendrons lors de l’examen des dépenses de ce dernier budget de la législature afin que cette loi de finances soit utile et serve pleinement, oui pleinement, l’intérêt général.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, ce projet de loi de finances est le dernier du quinquennat. Il a donc de très grandes chances de ne pas s’appliquer complètement car on imagine bien que le gouvernement issu des élections présidentielle et législatives, quel qu’il soit, aura à coeur de traduire ses orientations dans un projet de loi de finances rectificatif. Quoi qu’il en soit, il arrive en discussion à l’Assemblée nationale comme l’an dernier, exactement en même temps que le PLFSS, ce qui prive les députés de la possibilité de participer aux discussions de ces deux textes pourtant absolument fondamentaux dans une année parlementaire.
J’évoquerai d’abord à mon tour les prévisions macroéconomiques sur lesquelles vous fondez vos orientations budgétaires pour l’année 2017, en particulier un déficit ramené à 2,7 % et une prévision de croissance de 1,5 %. On peut qualifier ces deux seuls indicateurs de largement optimistes. En effet, l’INSEE affiche des prévisions de croissance bien plus basses et le début de la discussion du PLFSS, il n’y a pas plus d’une heure en commission des affaires sociales, a montré que le Gouvernement était incapable de tenir son objectif de diminution des dépenses publiques, dont certaines ne sont pas correctement évaluées.
Pour votre information, monsieur le secrétaire d’État, Mme la rapporteure générale du budget elle-même a fait voter à la commission des affaires sociales des amendements relatifs aux allégements des charges pesant sur les retraites, que nous soutenons naturellement, tout en précisant qu’ils ne sont pas financés à ce stade de la discussion, et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. J’ai donc très peur que les fondements de ce projet de budget ne soient malheureusement biaisés et destinés, à n’en pas douter, à poursuivre dans la voie que suit votre majorité depuis la rentrée parlementaire, celle de la démagogie préélectorale.
Cependant, certains axes ne trompent pas, dès la première partie de ce PLF. J’en détaillerai ici quelques-uns qui me semblent particulièrement révélateurs du double langage que vous tenez en présentant ce texte dont la portée politique est bien plus importante que vous ne tentez de le faire croire. En matière d’imposition tout d’abord, quelques petits arbustes consistant en de menues diminutions pour certaines catégories de contribuables cachent mal votre forêt de l’année 2017, le prélèvement de l’impôt sur le revenu à la source, dont vous inscrivez noir sur blanc le principe fondateur dans ce PLF sans tenir compte des nombreux avis opposés formulés tous azimuts.
Outre le fait que la mise en oeuvre de cette mesure semble complètement inenvisageable dans les délais que vous prévoyez, les dommages collatéraux seront d’une gravité inégalée. Pour les contribuables tout d’abord, qui devront revoir complètement leur rapport à l’administration fiscale et la gestion de leur trésorerie personnelle car ils paieront dorénavant leur impôt sur le revenu avant de percevoir les revenus sur lesquels il sera calculé. Pour les entreprises ensuite qui deviendront de fait des organismes collecteurs d’impôt sur le revenu alors qu’elles n’ont rien demandé et que cette charge constitue pour l’immense majorité d’entre elles un travail administratif colossal qui engendrera des problèmes de main-d’oeuvre que la plupart de nos PME et TPE qualifient d’insurmontables. Pour les personnes ensuite, qui devront faire part à leurs employeurs, sans filtre, de tous les aspects de leur situation personnelle et financière, et pour notre nation enfin, qui vit selon une tradition et une culture de responsabilité vis-à-vis de l’impôt sur le revenu, que l’on déclare soi-même. Comme mes collègues qui ont abordé ce sujet, je suis foncièrement opposé à cette mesure qui contrevient à notre culture et à notre tradition et n’apporte rien de positif.
Je souhaite également dire un mot des dispositions relatives aux collectivités locales, derrière lesquelles se cache toute une vision de l’aménagement de notre territoire national. Après une séquence folle de sévère pénurie infligée à nos territoires par les baisses de dotations des dernières années – je me permets de rappeler ici que sur les 50 milliards d’euros de baisse de la dépense publique annoncée, vous n’en réaliserez en réalité qu’à peine 30…
C’est faux !
… et qu’en revanche les 10 milliards placés à la charge des collectivités territoriales le seront, eux, ce qui souligne si besoin était la puissance de l’attaque que vous avez menée contre ces institutions qui ont à leur charge beaucoup d’équipements et de services de première nécessité – vous décidez cette année d’atténuer un peu le rythme mais la baisse continue et asphyxie en passant toute l’économie locale par la diminution dramatique de la commande publique que vos fonds de soutien à l’investissement ne parviennent pas à contrecarrer, précisément parce que les collectivités territoriales ne peuvent plus investir dans l’immense majorité des cas.
Enfin, en matière d’économie, qui nous préoccupe tous, vous vous en prenez une nouvelle fois aux chambres de commerce et d’industrie dès les premiers articles de ce PLF en réduisant encore le plafond de leur taxe affectée après une baisse l’an dernier et deux années consécutives de prélèvement sur leur fonds de roulement. Ce faisant, c’est l’économie des territoires que vous affaiblissez mais aussi leur appareil de formation professionnelle et donc la vitalité de notre tissu de PME et TPE.
En conclusion, ce projet de budget d’apparence ambitieux masque une bien sombre réalité. Je le soutiendrai d’autant moins que sa deuxième partie renferme encore des articles dont la portée négative est inquiétante, des lacunes du budget dédié à l’équipement de nos forces armées aux nouvelles mesures de fiscalisation de certaines indemnités de nos agriculteurs, sans oublier l’insuffisance des moyens alloués à la desserte numérique du pays. Il est grand temps de repenser les enjeux de la France par une vraie réflexion politique et de donner à ses forces vives les moyens de déployer une vraie énergie et une vraie ambition pour notre pays et les générations futures.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, chers collègues, beaucoup de choses ont été dites sur le projet de loi de finances pour 2017 à l’occasion de cette discussion générale. Qu’il me soit permis, tandis qu’elle s’achève, de revenir sur deux points qui me semblent essentiels. Le premier, c’est notre niveau de déficit. Comme l’a dit à juste titre notre rapporteure générale, grâce à la diminution attendue du déficit à 62 milliards d’euros, soit 2,7 % du PIB, après celle constatée depuis 2012 – je rappelle qu’il était de 100 milliards d’euros en 2012, soit près de 5 % du PIB – la France retrouve peu à peu des marges de manoeuvre budgétaires sans lesquelles il n’y a pas de réelle souveraineté. Sur ce point, n’en déplaise à Mme Dalloz – qui n’est plus parmi nous –, nos discussions doivent éclairer le débat public.
Il faut que les Français sachent que le programme de la droite, ou plutôt ses conséquences s’il devait être mis en oeuvre, et ce quel que soit le candidat qui sortira de la primaire, consiste à rompre avec cette trajectoire vertueuse et creuser à nouveau le déficit de l’État pour financer en particulier les baisses d’impôts à destination des plus aisés, le tout en prenant le risque inconsidéré de voir bondir nos charges d’intérêt si nos créanciers venaient à douter de la capacité de notre pays à rembourser. Cela ne manque pas de piquant si on se souvient que ce sont les mêmes qui, depuis l’été 2012, trouvaient que la baisse des déficits n’allait pas assez loin, pas assez vite et pas assez fort. Tous les ans, on nous prédisait que les objectifs macrobudgétaires ne seraient pas tenus.
Les résultats, pourtant, sont là. La dette publique s’est stabilisée après dix ans de hausse : six points de PIB entre 2012 et 2017 contre vingt-cinq entre 2007 et 2012. Depuis 2012, la dépense publique a progressé chaque année en moyenne presque trois fois moins vite que sur la période 2002-2012. La protection sociale retrouve la voie de l’équilibre quand certains veulent encore faire croire qu’il faut réduire les prestations et faire cotiser plus longtemps.
J’en viens à mon deuxième point. Cette gestion résolument rigoureuse – et ce n’est pas un gros mot dans ma bouche – n’affecte en rien les priorités politiques poursuivies elles aussi avec constance depuis le début du quinquennat. L’éducation, la sécurité et l’emploi sont une nouvelle fois les postes qui verront leurs moyens augmenter, de près de 7 milliards d’euros. Le rapporteur spécial du budget de l’enseignement supérieur que je suis se réjouit particulièrement de l’effort significatif que consent la nation depuis 2012 pour ce secteur déterminant pour notre avenir. Au terme du quinquennat, 5 000 postes y auront été créés, accompagnant ainsi le fort accroissement du nombre de jeunes poursuivant des études supérieures – 45 000 étudiants supplémentaires pour la seule année 2016.
De même, je me réjouis, en tant qu’ancien rapporteur de la commission de la défense sur l’exécution budgétaire cette fois, de voir – et c’est une première depuis très longtemps – que la loi de programmation militaire en vigueur a non seulement été respectée mais dotée de moyens nouveaux en cours de route pour tenir compte des défis sécuritaires auxquels la nation est confrontée. Moins de suppressions de postes, plus d’équipements et de moyens de maintenance, le renforcement des moyens de renseignement : voilà ce que permet encore la trajectoire rigoureuse de nos finances ! Nous pouvons en dire autant des efforts budgétaires consacrés au soutien de notre tissu économique, à hauteur de 40 milliards d’euros prévus en 2017, pour poursuivre la diminution du coût du facteur travail, encourager l’investissement dans les TPE et les PME et enfin soutenir le secteur agricole qui structure tant de nos territoires et contribue à nos succès à l’export.
Toutes ces mesures s’inscrivent dans des politiques au long cours. Les décisions d’investissement privé ou d’embauche supposent au préalable la reconstitution des trésoreries et la restauration des marges. C’est ce que permet le crédit d’impôt compétitivité emploi depuis sa montée en régime. À ce titre, je me félicite de l’annonce récente du Premier ministre visant à accorder aux associations employeurs l’équivalent du CICE : c’est reconnaître le rôle important du tiers-secteur dans la bataille pour l’emploi. Le projet de loi de finances pour 2017 est parfaitement fidèle à la feuille de route qui est la nôtre depuis 2012 : redresser le pays, ses comptes publics et son industrie dans la justice, sociale et fiscale. Ces deux termes sont indissociables si l’on veut retrouver durablement le chemin de la croissance. C’est le chemin constant et déterminé qui est le nôtre. C’est la raison pour laquelle je soutiens pleinement ce projet de loi de finances.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La discussion générale est close.
Je vous informe qu’à la demande du Gouvernement, nous examinerons par priorité demain après-midi, à l’issue du débat sur les opérations extérieures de la France et de l’examen des articles liminaire et 1er du projet de loi de finances, l’article 6 relatif à la diminution du taux de l’impôt sur les sociétés, les amendements portant article additionnel après l’article 4 relatifs aux actions gratuites et les amendements portant article additionnel après l’article 11 relatifs à la taxe sur les transactions financières.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement sur des sujets européens ;
Déclaration du Gouvernement suivie d’un débat sur les opérations extérieures de la France ;
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2017.
La séance est levée.
La séance est levée, le mercredi 19 octobre 2016, à zéro heure quarante-cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly