La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente-cinq.
Nous abordons l’examen des crédits relatifs à la santé et aux Avances aux organismes de sécurité sociale (n°1428, annexe 42 ; avis n°1432, tome II).
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l’autonomie.
Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, la mission « Santé » regroupe deux programmes qui portent sur les politiques de santé du Gouvernement, aux côtés des moyens votés par ailleurs en loi de financement de la Sécurité sociale.
Je tiens d’abord à souligner que les crédits prévus pour la mission en 2014 augmentent par rapport à 2013 de près de 1 % – 0,78 %. C’est environ 1,3 milliard qui sera donc consacré à la mission en 2014. Cette évolution constitue un signe positif par rapport à la baisse de plus de 6 % de l’année précédente.
Les crédits prévus au programme 204 traduisent la stratégie poursuivie en 2014 sur la prévention, la sécurité sanitaire et l’offre de soins. Elle repose sur quatre grands axes : le pilotage du réseau des agences sanitaires et l’animation des agences régionales de santé ; le déploiement des stratégies et des politiques de santé publique fondées sur les connaissances scientifiques disponibles ; la réduction au minimum de la vulnérabilité de la population face à des événements sanitaires graves menaçant la collectivité ; enfin, la garantie du bon niveau de formation des professionnels de santé au service de la qualité de l’offre de soins.
Les agences sanitaires financées sur le programme 204 constituent un rouage essentiel de notre système de santé. Leurs moyens sont préservés en 2014 même si, comme les autres opérateurs de santé, elles participent à l’effort de modération budgétaire par de nouvelles économies sur leurs dépenses de fonctionnement.
Nous avons toutefois particulièrement veillé à ce que ces efforts soient équitablement répartis entre les agences pour qu’elles puissent assurer leurs missions sans difficulté particulière. Les agences sanitaires seront des acteurs clés pour atteindre les objectifs structurants de la politique de santé tels qu’ils seront définis dans la loi relative à la stratégie nationale de santé qui sera présentée au Parlement en 2014. La prévention et l’organisation du parcours de santé autour de la personne seront au coeur de cette stratégie.
Une réorganisation de notre dispositif de veille et de sécurité sanitaires prendra place dans la future loi de santé de 2014. Elle doit être envisagée avec une plus forte implication des citoyens mais aussi dans le cadre d’un dispositif régional de recueil des signaux et d’alerte performant et d’un pilotage global de l’évaluation des risques proactive et indépendante, ainsi que d’une gouvernance efficace de la gestion de ces derniers.
Le programme 183 « Protection maladie » porte un dispositif important pour notre système de santé : l’aide médicale d’État ou AME. Les crédits prévus pour la financer augmentent entre 2013 et 2014 de 2,9 %. Cette hausse résulte d’un constat simple : le nombre de bénéficiaires augmente constamment. Nous tirons les conséquences de ce fait incontournable de façon transparente.
La ministre des affaires sociales et de la santé a choisi en 2012 de supprimer les barrières à l’accès aux soins que le Gouvernement précédent s’était proposé d’opposer à des populations vulnérables et souvent en mauvaise santé du fait de leurs conditions de vie précaires. La nécessité de prendre en charge les soins de ces populations est d’ailleurs approuvée à l’unanimité des experts en santé publique mais, aussi, des responsables politiques. Elle contribue à nos objectifs de santé publique en limitant la diffusion de pathologies infectieuses non traitées.
D’ailleurs, un rapport parlementaire de 2011, signé de députés de gauche et de droite, indiquait, je le cite : « S’agissant d’un sujet comme celui de l’AME, parvenir à un constat commun était important. Les rapporteurs souhaitent donc souligner à ce stade que le principe même de l’AME doit être préservé. »
Les rapporteurs soulignaient également que « des considérations humanitaires comme des impératifs de politique de santé publique imposent le maintien de l’accès aux soins à ces personnes et que les coûts correspondants, bien qu’en hausse, ne suffisent pas à motiver une suppression dont les conséquences sanitaires et financières pourraient être contre-productives. »
La position du ministère des affaires sociales et de la santé est par ailleurs compatible avec la recherche d’une meilleure efficience du dispositif. Nous avons pour cela conduit une réforme de tarification de l’AME qui aligne progressivement le tarif versé aux hôpitaux pour la prise en charge des bénéficiaires avec celui versé pour les assurés sociaux. Il s’agit là d’un choix de responsabilité, sans dégradation de l’accès aux soins pour les personnes présentes sur le territoire national.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
J’ai laissé quelques secondes supplémentaires à Mme la ministre déléguée, mais je me montrerai dorénavant assez draconienne sur le respect du temps de parole, compte tenu de l’ordre du jour que nous avons à examiner ce soir.
La parole est à M. Claude Goasguen, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire pour la santé et les avances aux organismes de Sécurité sociale.
Vous avez cinq minutes, monsieur le rapporteur.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, un examen rapide des crédits de la mission « Santé » dont nous débattons aujourd’hui pourrait laisser penser que ce budget augmente, et c’est ce que Mme la ministre déléguée vient de dire.
Pourtant, cette hausse n’est qu’apparente et cache en réalité une diminution des crédits du programme 204 relatifs à la prévention et à la politique sanitaire.
Partant de ce constat, j’ai interrogé Mme Marisol Touraine en commission élargie sur les moyens que le Gouvernement entend consacrer à la prévention en matière de santé. Loin des engagements du mois de septembre dernier, elle a souligné qu’il n’est pas possible de transformer en un an notre système de soins pour le faire passer d’une logique curative à une logique préventive.
Mais quels seront effectivement les crédits que vous engagerez en 2014 à ce sujet ? Faudra-t-il encore attendre et, si oui, jusqu’à quand ?
À ce sujet, je dois également dire que j’étais très déçu de votre réponse sur l’avenir du dossier médical personnel. J’ai bien compris que vous souhaitiez réduire son champ et sa portée, c’est-à-dire, en pratique, renoncer à son utilisation. Vous fermez ainsi notre pays à la voie de la dématérialisation et de l’avenir dans laquelle il y aurait pourtant intérêt à s’engager en termes de contrôle et d’économies.
Sur la réorganisation des agences, je note une fois encore que vous reportez votre décision, arguant du fait que les rapports nécessaires ne vous ont été remis qu’au mois de juillet dernier.
J’en viens à l’aide médicale d’État, car les questions précises que j’ai soulevées en commission élargie n’ont toujours pas trouvé de réponse.
Vous nous avez indiqué que la dépense pour l’État devrait atteindre 700 millions d’euros cette année, soit un dérapage de 20 % par rapport à la prévision initiale. Je considère pour ma part que cette somme sera plus importante, surtout si l’on intègre les restes de dettes envers la Sécurité sociale qui sont à la charge de l’État – à hauteur de 40 millions d’euros –et les crédits d’urgence, inscrits à 40 millions d’euros dans la loi de finances, mais pour lesquels le besoin dépasse déjà, de toute évidence, 120 millions d’euros. Nous nous dirigeons donc allègrement vers une somme qui, à la fin de l’année, atteindra 1 milliard d’euros. Dans tous les cas, comment comptez-vous financer cette hausse ?
Vous avez considéré que tous les éléments m’avaient été transmis en temps et en heure : c’est en tout cas la réponse qu’a faite la ministre de la santé. C’est tout simplement faux, puisque, avant mon contrôle sur place et sur pièce du 23 octobre, je ne disposais d’aucune donnée sur l’exécution 2013, alors même que le délai de réponse à mon questionnaire budgétaire avait expiré. En réalité, l’absence de contrôle du système AME montre que celui-ci est à bout de souffle. Les faits éclatent en pleine lumière : l’État se contente de rembourser la Sécurité sociale, sans que nous soyons certains que de vrais contrôles sont effectués. Les chiffres avancés par la Caisse nationale d’assurance-maladie sont dérisoires et prêtent à sourire. Nous sommes bel et bien dans une économie de guichet.
Je vous ai interrogé sur les conséquences du déploiement à venir de l’AME à Mayotte. Elle ne s’y applique pas encore, mais sa mise en oeuvre interviendra tôt au tard, et il me paraît absolument nécessaire d’avoir une vision comptable en perspective. Vous avez refusé de me répondre et utilisé pour cela un artifice de procédure, en indiquant que mes questions excédaient mon domaine de compétences. Pourtant, la ministre de la santé n’a pas hésité à répondre sur des sujets hors compétence en commission élargie. En tant que législateur appelé à voter la loi de finances, je vous demande s’il est normal que l’Assemblée nationale ne connaisse pas les déficits de l’hôpital de Mayotte, qui est le premier hôpital public de France pour la maternité. Ces chiffres ne sont ni dans le PLF, ni dans le PLFSS, où je les ai cherchés. Est-ce parce que la situation est à ce point catastrophique ?
De même, pourquoi ne pas répondre sur la Guyane, qui est, quant à elle, dans le champ de cet examen ? La sous-évaluation évidente des chiffres de l’AME en Guyane est contredite par le rapport de la cour régionale des comptes des Antilles d’octobre 2011 qui évalue à 75 000 le nombre de ressortissants du bassin de vie du Suriname, sur les rives du fleuve Maroni, bénéficiant du dispositif. On ne trouve rien sur ces sujets, ni dans le PLF, ni dans le PLFSS.
Nous ne sortirons pas de ce débat stérile sur l’AME, tant que vous refuserez de communiquer librement sur les chiffres, et tant que vous n’admettrez pas que contrôler cette dépense n’est ni insultant, ni contraire aux principes humanistes. Cela consiste, au contraire, à voir la réalité en face pour assumer, en toute connaissance de cause, ses responsabilités.
L’AME est hors contrôle, hors du contrôle de la Sécurité sociale et de l’État.
Vous contribuez ainsi à charger ce débat de symboles et à le rendre obscur, ce qui n’est pas sain pour notre démocratie. Il serait peut-être temps de substituer à ces pratiques malsaines une vraie transparence fondée sur la réalité…
…loin des allégations du type : « Laissez courir, il n’y a rien à voir », ou : « Il faut tout supprimer ». Cette stratégie conflictuelle et malsaine vous agrée ; la transparence et le contrôle comptable semblent en revanche vous faire peur. Il serait peut-être temps de sortir de ce débat.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, pour la santé.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de budget de la santé pour 2014 s’élève à près de 1,3 milliard d’euros. Après les efforts consentis en 2013, son montant est donc stabilisé, ce que je salue. Comme les autres missions du budget de l’État, la mission « Santé » contribue de manière équilibrée au redressement des comptes publics engagé par le Gouvernement avec le soutien de sa majorité. Le projet de budget qui nous est soumis me semble placé sous le signe de la responsabilité. Il constitue un socle solide pour la nouvelle stratégie nationale de santé qui sera mise en oeuvre en 2014. Les moyens des opérateurs sont pérennisés, même si l’on exige d’eux des efforts raisonnables en matière de dépenses de fonctionnement. Dans le même temps, leur indépendance est confortée, par l’attribution de subventions qui se substituent à des taxes affectées –je pense ici à la Haute autorité de santé.
La priorité donnée aux vigilances est réaffirmée et le pilotage de la politique de santé publique est renforcé –je rappelle que ses crédits progressent de 1 %. Le travail d’optimisation des dépenses de prévention est poursuivi, afin de gagner en efficience, sans que cela traduise un quelconque désengagement en la matière, bien au contraire. Mme la ministre nous a bien indiqué, en commission élargie, que la politique de prévention est une priorité pour le Gouvernement. Il l’a d’ailleurs clairement identifiée dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, en faisant du Fonds d’intervention régional un sous-objectif de l’ONDAM.
Le soutien à la formation médicale progresse également de manière notable – les moyens de l’action no 19 augmentent de 11,6 % – afin que nous disposions d’une offre clinique diversifiée et adaptée, reposant sur le rôle central du médecin généraliste. Enfin, le Gouvernement assume ses responsabilités en prévoyant, pour l’aide médicale de l’État, des crédits adaptés aux besoins, compte tenu des dépenses attendues. Ce faisant, il agit autant dans l’intérêt de la santé publique, que dans celui de nos finances publiques, car on sait bien que toute mesure qui conduit des populations particulièrement fragiles à reporter des soins se traduit, à terme, par un coût sanitaire et financier aggravé. C’est aussi cela, la responsabilité. Nos débats en commission élargie ont en outre permis de constater la vigilance du Gouvernement en matière de maîtrise de la dépense au titre de l’AME, comme de la dépense médicale en général. Les mesures d’harmonisation de la tarification des soins hospitaliers en témoignent.
J’en viens maintenant au thème de la veille sanitaire, que j’ai plus particulièrement étudié dans mon rapport. L’année 2014 verra la mise en oeuvre de la nouvelle stratégie nationale de santé ; dans le cadre de cette nouvelle donne pour la politique de santé publique, la réforme à venir de notre dispositif de veille et de sécurité sanitaires sera essentielle.
J’ai pu constater que le système français et son opérateur, l’Institut de veille sanitaire, ont su, au fil des alertes, s’adapter pour gagner en efficience. Je pense ainsi au retour d’expérience consécutif à l’épisode de grippe A (H1N1), qui a conduit l’InVS à revoir son organisation, ou aux enseignements tirés de l’épisode de canicule de 2003, qui se sont traduits par la mise en place d’un système de veille syndromique innovant. Nous sommes désormais dotés d’un dispositif globalement performant, si on le compare à ceux de nos voisins européens, mais ce système, construit par strates au fil des alertes, est également complexe, lourd et, dans certains domaines, hétérogène.
Mme la ministre de la santé nous a fait part de sa volonté de donner suite au rapport que M. Jean-Yves Grall, le précédent directeur général de la santé, lui a remis au mois de juillet. On ne peut que s’en réjouir, car la réorganisation qu’il propose est de nature à améliorer les choses dans bien des domaines. Il convient en premier lieu de rationaliser l’expertise à l’échelon national. Donner à l’InVS un rôle d’agence « vigie » irait dans le bon sens, en articulant mieux ses compétences avec celles du Haut conseil de la santé publique et de l’ANSES, car des chevauchements existent. Mais c’est surtout à l’échelon régional que l’on doit agir, car l’expertise y est dispersée et les moyens hétérogènes. Il convient sans doute de procéder à des regroupements, notamment fonctionnels, mais quelle que soit la réforme envisagée, il nous faudra préserver la séparation, qui est essentielle, de l’expertise et de la décision. Il faudra donc s’assurer que le pilotage scientifique des structures chargées de la veille sanitaire en région soit assuré par l’InVS, qui est le référent dans ce domaine.
Il me semble, enfin, qu’investir dans la veille sanitaire, c’est faire des économies pour l’avenir : par une détection précoce des signaux, on évite la diffusion de pathologies, et donc des coûts qui peuvent être importants. De ce point de vue, le projet de budget que nous examinons présente toutes les garanties nécessaires. Il conviendra de poursuivre dans la même voie au cours des années à venir, pour permettre à l’InVS de maintenir la qualité de ses travaux.
En conclusion, je voudrais saluer la position équilibrée du Gouvernement, qui a su conjuguer l’exigence de maîtrise des dépenses publiques avec l’affirmation de priorités de santé publique clairement identifiées. L’optimisation de notre système de veille sanitaire en fait partie, ce dont je me réjouis. Cette appréciation positive a été partagée par la commission des affaires sociales qui a, comme je le proposais, émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la santé. Je vous invite à faire de même.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Nous en venons aux interventions des porte-parole des groupes.
La parole est à Mme Ségolène Neuville, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la ministre déléguée, je voudrais tout d’abord, avec mes collègues du groupe SRC, saluer votre constance concernant la mission « Santé », dont les moyens ont été maintenus, avec un montant de près de 1,3 milliard d’euros.
Ces crédits progressent, mais l’objectif de mieux rationaliser les dépenses des différentes agences, en améliorant leur efficience, est respecté. Certains crédits sont en augmentation, comme ceux destinés à l’aide médicale de l’État, au financement de la formation médicale initiale, ou encore à la Haute autorité de Santé, dont il s’agit de mieux garantir l’indépendance. Avec mes collègues du groupe SRC, nous soutenons les choix que vous avez faits.
Il a été dit beaucoup de choses concernant l’aide médicale d’État. Je voudrais, pour ma part, apporter un éclairage moins idéologique que celui de certains de mes collègues de l’UMP, un éclairage plus scientifique. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Nous parlons de santé publique, c’est-à-dire de l’état de santé de la population dans notre pays. L’Organisation mondiale de la santé définit la santé publique comme la science et l’art de prévenir les maladies, de prolonger la vie et d’améliorer la santé physique et mentale à un niveau individuel et collectif. Or, si l’on veut prévenir les maladies à un niveau collectif, on ne peut pas fermer les yeux sur l’état de santé des personnes les plus précaires,…
…en l’occurrence les étrangers qui sont sur le territoire français en situation irrégulière et sans revenus.
J’ai bien compris qu’un certain nombre d’entre vous souhaiteraient que les soignants sélectionnent les patients en fonction de leurs papiers d’identité. Mais c’est oublier un fait essentiel : les microbes, eux, ne font pas la différence entre un être humain en situation régulière et un être humain en situation irrégulière.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Les microbes, qu’il s’agisse de virus, comme le VIH ou les virus des hépatites, ou de bactéries, comme le bacille de la tuberculose ou les bactéries multirésistantes aux antibiotiques, ne font pas le tri ; ils se transmettent, circulent d’un individu à un autre, et finissent par mettre en danger la population dans son ensemble.
L’aide médicale d’État sert à dépister ces pathologies transmissibles, à prendre en charge les patients qui en sont porteurs, et à limiter ainsi leur diffusion. C’est pourquoi nous défendons avec conviction cette mesure d’accès aux soins pour les étrangers sans papiers : l’aide médicale d’État protège la santé de tous.
C’est le cas !
Je souhaiterais maintenant revenir sur le programme 204, intitulé « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins ». Je veux saluer votre volonté, madame la ministre, de clarifier les rôles respectifs des différentes agences dans le domaine sanitaire. Ces neuf agences représentent un budget de 461 millions d’euros ; elles ont en charge des domaines variés de service public, comme la veille sanitaire, la réponse aux urgences, la prévention et l’éducation pour la santé, la sécurité sanitaire –dont la sécurité du médicament –, les systèmes d’information à l’hôpital et la lutte contre le cancer. Il est important que le rôle de ces agences soit mieux connu du grand public et des professionnels de santé car, pour être sincère, il est facile de s’y perdre. Ceci doit être fait dans un esprit de simplification et de transparence, mais aussi pour améliorer l’efficience de ces agences, car la coopération des professionnels de santé travaillant au contact des patients est essentielle, les informations devant circuler dans les deux sens : de haut en bas, pour communiquer les statistiques et diffuser des recommandations, mais aussi de bas en haut pour alerter, pour déclarer des maladies ou les effets secondaires de certains médicaments.
Je veux également revenir sur la formation des professionnels de santé, à laquelle vous accordez une importance toute particulière dans le programme 204. Cette formation est essentielle pour notre système de soins, et donc pour la santé de chacune et chacun d’entre nous ; essentielle pour sensibiliser les futurs médecins aux problèmes de santé publique, mais aussi aux problèmes de société. À l’approche du 25 novembre, journée mondiale contre les violences faites aux femmes, je voudrais souligner, madame la ministre, qu’il est indispensable d’intégrer à la formation des médecins, mais aussi de tous les professionnels de santé, une sensibilisation à la détection des violences faites aux femmes, que ce soient les violences conjugales, la prostitution, ou les viols.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Les professionnels de santé sont souvent les premiers à accueillir les femmes victimes de violence, mais ils sont malheureusement très peu formés sur ces questions.
Je sais que vous avez engagé un travail interministériel sur cette question avec la ministre de l’enseignement supérieur, Mme Fioraso. Permettez-moi de vous féliciter, car c’est un bon exemple d’intégration de la notion de genre de façon transversale dans les politiques publiques.
Pour conclure, je souhaite vous assurer du soutien du groupe SRC. Nous voterons le budget de la mission « Santé » que vous nous présentez, car nous jugeons que c’est un budget responsable, qui respecte les priorités de santé publique que vous avez fixées.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Dominique Tian, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Madame la présidente, madame la ministre déléguée, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous ne pouvons que constater une baisse des crédits de la mission, ce qui n’est pas la meilleure solution pour résoudre les problèmes de santé dans notre pays.
Certains crédits du programme sont plus affectés que d’autres par cette baisse. J’en citerai deux : prévention des risques infectieux, en diminution de 4,2 % ; et réponse aux alertes et gestion des urgences, en baisse de 10,4 %.
Un secteur manque singulièrement de moyens, celui de la prévention dans le domaine scolaire. Un rapport assez récent de l’Assemblée avait pourtant souligné les carences de la prévention sanitaire autour de l’enfant. C’est particulièrement préoccupant quand on connaît le nombre de suicides chez les jeunes, malheureusement très élevé dans notre pays.
Comme je vous l’avais signalé en commission élargie, le Conseil d’État a mis à mal une mesure emblématique de votre Gouvernement, l’ouverture des salles de shoot, rendant une partie des dispositions de l’action no 14 obsolète.
Le Conseil d’État a rappelé une évidence : l’ouverture de ces salles de consommation de drogues n’est en effet pas juridiquement conforme à la loi de 1970 sur les stupéfiants. En organisant ces salles d’injection, on permettrait une désobéissance à la loi, puisque les drogues illicites, c’est-à-dire interdites, y seraient administrées dans des structures officiellement organisées, gérées et financées par les pouvoirs publics, supervisées par des médecins et des infirmières appointés sur des deniers publics, en des zones de non droit.
Le ministère de la santé créerait ainsi une sorte de squats de la santé,…
…où ne s’appliqueraient plus les lois de la République. Heureusement, la justice y a mis bon ordre.
J’en viens maintenant à l’AME. Le laxisme dont vous avez fait preuve en supprimant toutes les mesures adoptées sous le gouvernement Sarkozy entraîne l’explosion des chiffres. Je m’appuie sur le rapport de Claude Goasguen, qui fait état de 26 % d’augmentation par rapport à la fin 2011, soit 50 000 bénéficiaires supplémentaires pour un total de 264 000 bénéficiaires de l’AME sur notre territoire.
Le budget pour 2013 avait été estimé à 588 millions d’euros. Vous avez annoncé que le Parlement allait devoir voter une rallonge de 156 millions d’euros, ce qui portera ce budget pour 2013 à 744 millions, et peut-être beaucoup plus, comme l’a dit M. Goasguen. Qui peut croire que le budget prévu pour 2014 sera tenu ? Madame la ministre, quand on ne veut pas reconnaître que l’on a de la fièvre, on casse le thermomètre. C’est ce que vous venez de faire en supprimant deux indicateurs de performance, dont vous connaissez la forte valeur, puisque c’est l’Assemblée qui y travaille.
Vous avez donc supprimé l’indicateur de performance de l’AME. Je vous rappelle le rapport annuel de performances présenté au Parlement, sur la mission 183, indicateur 2.2, relatif au contrôle de l’aide médicale d’État en 2009 : Au cours de contrôles effectués auprès de cent six caisses primaires d’assurance maladie sur 5 % de dossiers de bénéficiaires de l’AME, le taux d’erreur est de 49,86 %, c’est-à-dire un dossier sur deux était faux, et les caisses d’assurance maladie assistaient passivement à ces fausses déclarations de ressources.
Vous avez supprimé également le taux d’indicateur de performance de la CMU complémentaire qui concerne 4 millions de personnes. Je vous rappelle que lorsque cet indicateur existait, le taux de fraude était évalué de 5 à 3,7 %.
Madame la ministre déléguée, vous évoquez avec une certaine constance le rapport de l’IGAS-IGF pour affirmer qu’il n’y a ni explosion des chiffres ni fraude des ayants droit, cela a encore été le cas cet après-midi lors des questions au Gouvernement. Mais à y regarder de plus près, même ce rapport – que vous citez pourtant abondamment – permet de déterminer que les fraudes sont en augmentation importante. Ainsi, à la caisse primaire d’assurance maladie de Paris qui regroupe environ 40 % des titulaires de l’AME en France, si les personnes bénéficiaires de l’AME ne représentent que 4,1 % des personnes gérées, on constate que 12,4 % des fraudeurs détectés sont des titulaires de l’AME.
À Paris, en 2008, les plaintes pour fraudes commises par les titulaires de l’AME représentaient à peu près 3 % de l’ensemble des plaintes déposées par la CPAM ; en 2009 ce taux a grimpé à 9,8 %. Et 16,2 % des plaintes pour trafic de substitut à l’héroïne concernent des fraudeurs à l’AME.
Comme l’a indiqué le rapporteur spécial, le système n’est pas contrôlé. Madame la ministre, tous les pays européens ont restreint ou supprimé ce dispositif trop généreux. Il est temps que la France s’inspire de ses voisins, et il est nécessaire d’établir la régulation et le contrôle de l’AME.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
On peut mentir effrontément, il suffit de ne pas retenir les indicateurs pertinents !
La parole est à M. Arnaud Richard, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Madame la présidente, madame la ministre déléguée, monsieur le rapporteur spécial, madame la rapporteure pour avis, mes chers collègues, le groupe UDI le répétera jusqu’à ce que sa parole soit entendue : la santé, droit fondamental pour l’ensemble de nos concitoyens, doit rester une priorité majeure. S’il est une mission qui n’aurait pas dû être victime de la recherche d’économies budgétaires, c’est bien celle-là.
La France s’est longtemps caractérisée par l’excellence de ses soins, par la qualité de ses infrastructures et par la renommée de ses praticiens. Non, il ne serait pas exagéré de considérer que, dans ce domaine au moins, le monde entier nous a envié. Nous disposons de médecins parmi les meilleurs du monde, nos services de soins sont encore reconnus et cités en exemple par tous, du moins encore assez souvent pour que nous puissions en être fiers. Nous pouvons dire que les Français, jusqu’à des temps très récents, étaient parmi les plus chanceux de la planète quant aux prestations qui leur étaient servies.
La mission « Santé » est bien, pour nous tous, une priorité. C’est d’ailleurs ce que le Gouvernement nous a affirmé. Malheureusement, il y a toujours une sorte de hiatus entre vos mots et vos chiffres, madame la ministre déléguée. Depuis l’année dernière, la courbe s’inverse, et pas dans le bon sens, avec une baisse de 6 % dans la présente loi de finances. Je comprends que cette mission participe à l’effort de maîtrise des dépenses publiques prévues dans la loi de programmation budgétaire. Ainsi, dans le cadre du budget triennal, sa dotation diminue entre 2012 et 2013, puis se stabilise à 1,3 milliard d’euros pour 2014 et 2015.
C’est important !
Cette préoccupation toute relative d’économie budgétaire, nous pouvons en saluer le principe dès lors qu’elle permet d’alléger le poids de la dette pesant sur nos enfants. Cela a été dit et répété : le périmètre de la mission « Santé » demeure limité, puisque l’essentiel de la problématique de santé relève des lois de financement de la Sécurité sociale.
Toutefois, cette mission pilotée par l’ensemble des ministères des affaires sociales constitue un outil essentiel à la disposition du Gouvernement pour mener une politique basée sur une approche globalisée de la santé, qui doit viser à promouvoir la prévention, à assurer l’accès égal aux soins et à garantir la protection contre les risques sanitaires.
Sur ce sujet, le plus fondamental qui soit, et dont le retentissement – y compris politique – est grand, quels sont les choix stratégiques de ce Gouvernement ?
On nous objectera que ce débat a eu lieu lors de la discussion du PLFSS, mais ce n’est pas le cas. C’est maintenant que les perspectives les plus claires devraient se dessiner. Alors, madame la ministre déléguée, cherchons vos fondamentaux. Ceux qui sous-tendent ce budget et que vous présentiez en septembre dernier comme la stratégie nationale de santé. Le Premier ministre allait jusqu’à rebâtir – ce sont ses termes – le système de santé. Pardon, madame la ministre, mais le compte n’y est pas, et nous vous attendons toujours, comme Beckett faisait attendre Godot. Cela ne viendra pas.
Nous vous attendons sur la stratégie relative à l’accès aux soins, contrarié par les restes à charge de plus en plus lourds. Nous vous attendons sur la lutte contre le développement des déserts médicaux et les dépassements d’honoraires pratiqués par certains professionnels de santé. Nous vous attendons pour adapter le système de santé aux grands enjeux que sont le vieillissement de la population et le développement des maladies chroniques.
À part un inventaire à la Prévert, tentant sans doute – louable intention – de nous rassurer sur la façon dont le système de santé sera modernisé et pérennisé, votre stratégie nationale de santé est toujours dans les limbes, ce dont cette mission offre malheureusement le témoignage.
À force de ne rien faire, vous reproduisez des réflexes idiosyncratiques qui vous font identifier des boucs émissaires d’un côté, et des victimes de l’autre. Et vous voilà finalement engagée dans la ligne droite de votre projet de réforme des retraites qui, au nom de la défense contre la prétendue privatisation rampante, prévoit ni plus ni moins qu’une étatisation totale de notre système de soins et de retraite.
Nous ne voyons pas d’ambition forte dans cette mission, et en conséquence, le groupe UDI ne votera pas ces crédits.
Madame la présidente, madame la ministre déléguée, mesdames et messieurs les rapporteurs, chers collègues, nous arrivons au terme d’une longue séquence qui nous a permis de mesurer l’engagement de l’État pour maintenir un système de protection sociale de qualité, dans un contexte difficile de redressement des comptes publics qui s’étaient dégradés sous la précédente majorité, tandis qu’apparaît l’impérieuse nécessité de construire une politique de santé qui repose sur un nouveau modèle.
Vous connaissez notre position : afin de ne pas gaspiller l’argent public dans un puits sans fond, nous devons passer d’une logique aujourd’hui principalement curative à une logique de prévention. Si nous continuons à considérer la crise de la Sécurité sociale comme une simple crise budgétaire, nous ne résoudrons pas les problèmes. Nous sommes face à une crise sanitaire.
Songez que le déficit de l’assurance-maladie est équivalent à l’augmentation du budget de la prise en charge, ces quinze dernières années, des maladies chroniques. La montée des maladies chroniques est un phénomène majeur dans notre pays, mais aussi dans tous les pays développés. Les cancers sont devenus la première cause de mortalité, les maladies cardiovasculaires sont en augmentation constante, l’obésité et le diabète se développent, comme les allergies, les maladies respiratoires et les affections du système nerveux.
Pour faire face à cette épidémie, nous soutenons une politique de prévention fondée sur deux piliers : l’éducation à la santé et la mise en place d’une véritable politique de santé environnementale. À cet égard, les crédits du programme no 204 baissent à nouveau cette année et passent de 701 millions en 2013 à 693 millions en 2014, après une autre baisse par rapport au budget de 2012.
Les réponses du Gouvernement en commission ne nous sont pas apparues suffisantes.
La politique de santé que nous souhaitons doit reposer avant tout sur la prévention primaire, c’est-à-dire avant l’apparition de la maladie, et pas seulement sur le dépistage, comme cela nous a été répondu.
Par ailleurs, le Gouvernement a évoqué la contribution du PLFSS au financement de la prévention via le FIR, et celle du présent budget via l’INPES. Mais cela ne répond pas à la nécessité de réorganiser la politique d’éducation pour la santé dans les territoires, au plus près des populations.
Face à l’émiettement des structures de santé, qu’a rappelé la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, et dont le financement manque de cohérence, nous appelons de nos voeux la mise en place d’une structure de référence sous la forme d’un pôle régional d’éducation pour la santé, regroupant les instances régionales d’éducation pour la santé, les IREPS, la protection maternelle et infantile, la PMI, et la santé scolaire.
Un mot également sur la santé environnementale, qui a été évacuée de la Conférence environnementale de cette année. Le Gouvernement tarde à prendre la mesure de cette urgence et à se donner les moyens d’une réelle politique de santé environnementale chargée de développer la recherche sur les pollutions et ses effets, et de l’intervention sur le terrain pour limiter l’exposition des citoyens aux pollutions de l’air, de l’eau et des aliments. La mise en place d’une telle politique passerait par la création d’un Institut national de santé environnementale, en lien avec la Fédération nationale des observatoires régionaux de santé.
Nous attendons également les décrets d’application de la loi sur l’expertise indépendante votée en avril, qui mobilisera les agences sur le recueil des alertes.
Enfin, le programme 183 « Protection maladie » consacre 605 millions d’euros à l’AME, ce que nous saluons, tout en réitérant l’idée d’une fusion avec la CMU, comme l’a préconisé notre collègue sénatrice Aline Archimbaud, auteur du rapport sur l’accès au soin des plus démunis.
De façon générale, nous soutenons l’idée qu’en investissant dans l’accès au soin, notamment pour les plus démunis, on répond non seulement à un devoir de solidarité, mais on soigne aussi les comptes publics.
Si l’on se réfère à l’étude du Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique, le SGMAP, évaluant les gisements d’économies dits « moins de maladie », il apparaît qu’en diminuant le taux de renoncements aux soins, l’État augmente certes les dépenses de consultations médicales, mais diminue également fortement les coûts liés aux hospitalisations d’urgence et aux traitements lourds de certaines pathologies, qui nous coûtent des sommes colossales.
Madame la ministre, les bons choix d’aujourd’hui seront les économies de demain.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Il nous revient aujourd’hui, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, de nous prononcer sur les crédits concernant les avances aux organismes de Sécurité sociale.
Tout d’abord, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste constate, en ce qui concerne le programme 204, que les crédits consacrés par le ministère de la santé à la prévention, à la sécurité sanitaire et au pilotage des stratégies et des politiques de santé publique sont en légère baisse, passant de 700 millions d’euros à 693 millions d’euros.
La plus forte baisse concerne les projets régionaux de santé, dont les crédits passeront de 149,1 millions d’euros en 2013 à 130,9 millions d’euros en 2014, ce qui équivaut à une baisse de plus de 12,2 % des crédits, alors que la plus forte hausse des crédits concerne la modernisation de l’offre de soins. Cette dernière passe de 170,6 millions d’euros à 190,3 millions d’euros, soit une hausse de 11,6 % en 2014 par rapport à 2013.
Nous saluons cette augmentation des crédits relatifs à la modernisation de l’offre de soins, qui nous paraît essentielle et importante. Je citerai l’exemple des fonds d’intervention régionaux qui permettent aux responsables des agences régionales de santé de tenir compte des spécificités locales.
Je souhaite ajouter un mot sur l’avenir des plans de santé, qui devrait être une priorité. Je constate dans le rapport que le Plan « maladies rares » n’est pas à l’ordre du jour, alors qu’il concerne, en France, environ 4 millions de malades, et représente environ 7 000 maladies. C’est donc, à mon avis, une priorité de santé publique et un enjeu de solidarité nationale.
Le compte de concours financiers « Avances aux organismes de Sécurité sociale » a été créé par la première loi de finances rectificative pour 2012, à l’occasion du projet de l’instauration de la « TVA sociale ». Puis, l’article 53 de la loi de finances initiale pour 2013 a recréé un compte de concours financiers intitulé « Avances aux organismes de Sécurité sociale », qui recouvre les versements à l’agence centrale des organismes de Sécurité sociale, l’ACOSS, et les remboursements des avances sur le montant des recettes affectées aux caisses et régimes de Sécurité sociale.
Le groupe RRDP estime que l’ACOSS a une tâche très compliquée à accomplir, puisqu’elle coordonne plus de 46 Urssaf, parmi lesquelles 16 Urssaf régionales depuis le 1er janvier 2013, et est également en charge des prélèvements pour le compte de plus de 800 organismes tiers : organismes de Sécurité sociale, collectivités locales et, depuis 2011, l’Unédic et Pôle emploi.
Le support que constitue l’ACOSS permettra donc d’assurer un suivi budgétaire de la fraction de TVA affectée aux organismes de Sécurité sociale. Ce compte permettra également d’assurer une plus grande prévisibilité sur les montants et les dates de versement de la recette affectée.
L’article 39 du projet de loi de finances pour 2014 prévoit d’augmenter le versement de l’État à la Sécurité sociale afin de compenser les dépenses et les pertes de recettes générées notamment par la révision du quotient familial.
Cet article relève donc les deux taux existants de TVA nette.
Pour 2014, les crédits de paiement sont donc évalués à un peu plus de 0,2 milliard d’euros pour la fraction de la TVA affectée aux organismes de Sécurité sociale en compensation de l’exonération de cotisations sociales sur les services à la personne ; 0,5 milliard d’euros pour la fraction de TVA affectée aux mêmes organismes en compensation des exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires ; et plus de 11 milliards d’euros pour la fraction de TVA prévue au 3° de l’article L. 241-2 du code de la Sécurité sociale.
Le groupe RRDP note donc que les crédits concernant « l’Avance aux organismes de Sécurité sociale » totalisent plus de 12,2 milliards d’euros, permettant ainsi à l’ACOSS de s’organiser administrativement et logistiquement.
La santé, et plus largement l’accès au système de soin, constituent bien une priorité pour ce Gouvernement. Je tiens à saluer le budget de la mission « Santé » qui, dans un contexte très difficile, préserve des moyens d’action à la hauteur des besoins de nos concitoyens.
Le groupe RRDP apportera donc son soutien à ce budget.
La parole est à M. Bruno Nestor Azerot, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Comme la plupart des missions, la mission « Santé » est marquée par l’austérité budgétaire. L’année dernière, nous avions dénoncé la baisse de plus de 6 % des crédits de cette mission, et leur stabilisation jusqu’en 2015.
La mission « Santé » pour 2014 est fidèle à cet objectif. Nous ne pouvons que réitérer nos critiques et réaffirmer notre inquiétude de voir des budgets aussi importants que celui de la santé et de la Sécurité sociale faire les frais de votre politique d’austérité, menée tambour battant et contre toute logique, si ce n’est comptable, au mépris des conséquences qu’emporte une telle réduction des moyens d’intervention de l’État sur la santé publique et sur celle de nos concitoyens.
Pour l’année 2014, c’est le programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » qui assurera l’objectif de stabilisation, notamment par l’optimisation des dotations de l’État aux opérateurs rattachés à la mission.
Ainsi l’agence de biomédecine, l’établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, l’institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’institut de veille sanitaire et l’agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail voient leurs moyens de fonctionnement diminuer.
Cinq minutes ne suffisant pas à balayer l’ensemble des insuffisances de cette mission, j’aimerais m’attarder sur les problèmes que rencontrent les départements d’outre-mer en général, et la Martinique en particulier.
Inutile d’être médecin pour prendre le pouls des hôpitaux et réaliser qu’ils souffrent partout en France, et dans des proportions démesurées en Martinique. Si, le 13 décembre 2012, vous annonciez un « pacte territoire santé » dans lequel vous prenez douze engagements, il n’en demeure pas moins qu’aucune progression n’est notable au sein des urgences à ce jour !
Comment expliquez-vous que le service des urgences de l’hôpital de Mangot Vulcin, unique plateau technique où les normes parasismiques sont respectées, soit contraint de fermer ses portes ? D’ailleurs, le CHU de Fort-de-France s’était vu attribuer un « A » pour le bon fonctionnement de son service d’urgence, désengorgé par celui de Mangot Vulcin. C’est quand même paradoxal d’avoir décidé la fermeture de la seule voie d’issue possible !
Depuis, la mission de service public est mal assurée et les soins rendus aux patients sont défectueux, à cause d’un manque considérable d’effectifs, mis en exergue par l’Union européenne, et d’une insuffisance de matériel. Croyez-vous que les conditions de travail sont optimales, lorsqu’un médecin est contraint de choisir le patient le plus urgent des urgents, par manque d’équipement ? Inévitablement, le temps d’attente au CHU de Fort-de-France s’est allongé de huit heures à dix heures : c’est inadmissible !
De fait, ces mauvaises conditions génèrent un problème de démographie médicale, et l’exode de nos médecins urgentistes anesthésie l’attractivité de nos hôpitaux. En effet, la rémunération des médecins urgentistes présents actuellement s’élève à environ 600 euros par jour ; à l’heure où les hôpitaux manquent de moyens financiers, c’est un gaspillage. Et la cohésion des équipes est mauvaise, car elles ne s’inscrivent pas dans une perspective pérenne.
Il est donc souhaitable, au-delà d’un plan d’urgence relatif aux équipements médicaux, que le Gouvernement agisse par des mesures concrètes, qui rendent nos hôpitaux plus attractifs, fidélisent les médecins déjà en place, et suscitent chez nos jeunes l’envie de revenir travailler dans leur département d’origine.
Ainsi, les services d’urgence en Martinique sont devenus des patients de l’État. J’espère, madame la ministre, que vous agirez rapidement pour remédier à cette situation insoutenable pour la population et les professionnels de santé. Il en va de la vie de toute une population !
Au vu de tous ces éléments, le groupe GDR et les députés d’outre-mer qui lui sont associés, tout en respectant la démocratie interne à ce groupe, a décidé globalement de voter contre le budget proposé par votre ministère.
Nous en arrivons aux questions. Je vous rappelle que la durée des questions et des réponses est fixée à deux minutes. La parole est à Mme Joëlle Huillier, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Engagée il y a près de trente ans, la politique de lutte contre le sida a permis des avancées redonnant espoir aux malades. Mais la bataille n’est pas encore gagnée. Chaque année, deux millions de personnes se découvrent infectées dans le monde. Elles sont plus de 7 000 en France.
Face à ce constat, la responsabilité des pouvoirs publics est d’assurer deux devoirs : un devoir de solidarité avec tous les malades, y compris les plus éloignés du système de santé et des traitements, et un devoir de prévention pour enrayer la propagation de la maladie.
Le devoir de solidarité a été rappelé récemment par le Président de la République, qui a annoncé le maintien de la contribution de la France au Fonds mondial de lutte contre le sida et les maladies infectieuses, engagement assuré grâce à des financements innovants comme la taxe sur les transactions financières ou sur les billets d’avion.
Avec 360 millions d’euros par an, la France est le deuxième donateur du Fonds mondial. Le Gouvernement assume son devoir de prévention en consacrant 6,1 millions d’euros au financement du plan national de lutte contre le sida et les infections sexuellement transmissibles, et 1 million d’euros aux actions de lutte contre les hépatites B et C.
Le cinquième plan, portant sur la période 2010-2014, va s’achever. Par le soutien aux associations qui accomplissent un travail formidable sur le terrain, il a permis de développer des actions de prévention ciblées sur les populations des territoires les plus exposés.
Il a aussi permis de renforcer le dépistage qui est indispensable, quand on estime à 30 000 le nombre de personnes porteuses du VIH sans le savoir.
Un rapport d’évaluation commandé par le Gouvernement en janvier dernier sera rendu début 2014, avant d’impulser une nouvelle stratégie.
D’ores et déjà, madame la ministre, pouvez-vous nous en dire plus sur l’impact des mesures engagées actuellement et sur les orientations du futur plan de lutte contre le sida et les hépatites virales ?
Avant de vous répondre, madame la députée, je souhaite répondre à trois points évoqués par les intervenants précédents. Tout d’abord, MM. Goasguen et Richard nous ont reproché un retard dans notre politique de prévention. Dois-je rappeler que la précédente loi de santé publique date de 2004 et qu’elle aurait dû être renouvelée tous les cinq ans ? Or, nous avons attendu en vain son renouvellement sous le Gouvernement que vous souteniez.
Deuxièmement, monsieur Goasguen, il est contradictoire de dire que nous sommes trop lents à agir à Mayotte…
quand, au contraire, un député de votre majorité…
Permettez-moi de parler sans être interrompue ! Un député avait proposé l’extraterritorialité des maternités de Mayotte.
Vous regarderez les documents ! Faut-il, monsieur, que vous proposiez l’extraterritorialité de Mayotte ?
Pourquoi cette impatience uniquement sur ce point, alors que vous critiquez l’augmentation du nombre de bénéficiaires de l’AME ?
Enfin, monsieur Tian, je regrette grandement l’expression de « squats de santé » que vous avez utilisée pour qualifier ce que vous appelez les salles de shoot, qui sont en réalité des salles de consommation protégée.
Je vous rappelle que toutes les études scientifiques ont montré qu’il s’agissait du meilleur moyen pour éviter les risques,…
… en particulier les maladies infectieuses et les infections liées aux injections. De plus, elles facilitent l’accès aux soins.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Permettez-moi, madame Huillier, de donner les précisions que vous avez très légitimement demandées. Vous le savez, des progrès considérables ont été accomplis s’agissant du sida et de l’infection par le VIH. Nous devons toutefois rester extrêmement vigilants puisque, chaque année, 6 000 nouvelles infections sont recensées dans notre pays. J’ajouterai que 30 000 personnes sont porteuses du virus et 150 000 personnes sont séropositives. Vous réclamez des chiffres à droite de cet hémicycle (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)…
Il se trouve, messieurs, que je réponds à la question de Mme Huillier.
Je vous invite à écouter cette réponse. En 2011, 5,2 millions de sérologies VIH ont été réalisées en France, soit une augmentation de 4 %. De plus, et c’est essentiel, des dépistages ultrarapides ont été effectués.
Une soixantaine d’associations ont ainsi été habilitées et subventionnées, ce qui a permis de développer 36 000 TROD – tests rapides d’orientation diagnostique – dans vingt-quatre régions.
Il est regrettable que mon temps soit limité.
Je vous rappelle, madame la ministre, et j’en suis désolée, que le temps de parole est limité à deux minutes pour la question et à deux minutes pour la réponse.
Je croyais que le règlement de l’Assemblée me permettait de répondre aux porte-parole des groupes.
Malheureusement non, madame la ministre, puisque le débat a déjà eu lieu en commission élargie. Dans la procédure, il n’est prévu aucune réponse de la part du Gouvernement aux porte-parole des groupes.
C’est la raison pour laquelle je ne vous ai pas donné la parole lorsque vous me l’avez alors demandée.
Nous en venons au groupe RRDP.
La parole est à Mme Dominique Orliac.
Ma question porte sur la prévention de la consommation de tabac chez les jeunes. Dans le cadre du PLFSS, des mesures très pertinentes ont été proposées concernant l’aide au sevrage tabagique des jeunes âgés de vingt à vingt-cinq ans. Néanmoins, il serait intéressant de prendre en compte cette problématique plus en amont, c’est-à-dire à un âge plus précoce. Nous savons que certains jeunes commencent, malheureusement, à fumer bien avant leurs vingt ans.
Dans le rapport d’information sur l’évaluation des politiques publiques de lutte contre le tabagisme paru en février 2013, Jean-Louis Touraine et Denis Jacquat ont mis en exergue le fait que 94 % des fumeurs commencent à fumer avant vingt-cinq ans et qu’en France les dernières données disponibles font état d’une remontée de la consommation chez les jeunes ; elle semble également plus élevée à l’âge de seize ans que dans d’autres pays européens.
Outre l’aide au sevrage, la priorité serait donc bien de dissuader les jeunes d’allumer leur première cigarette. Nous savons que la précocité de l’initiation au tabac a des conséquences très graves, car elle installe durablement une habitude et crée une dépendance plus difficile à combattre. Il est donc essentiel, dans le cadre des politiques publiques de lutte contre le tabagisme, de mettre l’accent aussi bien sur la prévention que sur le soutien à l’arrêt. En complément des aides au sevrage, ne serait-il pas pertinent de développer un plan de prévention comprenant des mesures éducatives chez les plus jeunes ?
Madame la députée, vous avez tout à fait raison. Nous ne saurions accepter sans réagir que 73 000 personnes meurent à cause du tabac et qu’il y ait une explosion –et j’insiste sur ce point –de l’addiction des jeunes et, en particulier, des jeunes filles. C’est pourquoi Mme la ministre des affaires sociales a mis en place des mesures importantes à leur destination. L’aide au sevrage tabagique pour les jeunes âgés de vingt à vingt-cinq ans est inscrite dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014. De plus, la promotion des lieux ouverts sans tabac basée sur le volontariat des villes évitera, par exemple, que l’on ne fume dans les parcs réservés aux enfants.
Enfin, une nouvelle campagne de communication de l’INPES spécifiquement à destination des jeunes a été lancée en septembre. Je n’oublie pas, et vous la connaissez, la politique de prix volontariste, la hausse des prix étant particulièrement dissuasive notamment chez les jeunes.
Le coût de l’aide médicale d’État pour le budget est passé de 75 millions d’euros en 2000 à 605 millions aujourd’hui. L’économie proposée ici se rattache à l’action no 2. Il existe, je l’ai rappelé lors de la séance des questions au Gouvernement, une inégalité entre les bénéficiaires de l’AME pris en charge à 100 % et les assurés aux revenus modestes du régime qui ne sont plus remboursés qu’à 70 %.
Face au fort dynamisme, donc à la grande progression des dépenses d’AME depuis quelques années et à l’effort demandé à l’ensemble de nos concitoyens pour assurer la pérennité de notre protection sociale, il est évident que la légitimité de l’AME implique sa régulation. Claude Goasguen l’a de nouveau indiqué tout à l’heure. Ainsi, le groupe UMP considère qu’il convient de faire participer les étrangers en situation illégale qui bénéficient gratuitement d’une couverture santé à 100 % au redressement des comptes publics.
Le présent amendement a pour objet de ramener les dépenses de l’AME au niveau de 2002.
Nous voudrions que l’on arrête de faire de l’idéologie s’agissant de l’AME et que l’on parle quelque peu équité ! Qu’en est-il des chiffres ? Nous ne savons plus trop où nous en sommes ! Vous parlez, madame la ministre, de 600 millions tandis que M. Goasguen cite le chiffre de 1 milliard. La différence est importante et nous devrons un jour obtenir la vérité en la matière ! Vous ne faites en tout cas rien pour que nous la connaissions !
Je tiens à vous parler, ici, de la situation des Français de l’étranger qui vivent mal. Aujourd’hui, 498 000 euros sont consacrés à nos compatriotes de l’étranger qui se trouvent dans la plus grande précarité médicale, alors que 600 millions, voire 1 milliard, sont réservés aux étrangers en situation irrégulière. Ce n’est pas admissible. C’est la raison pour laquelle je propose tout simplement de réduire le budget de l’AME de 200 millions afin d’en consacrer une partie à nos compatriotes vivant à l’étranger.
Vous destinez finalement aux étrangers en situation irrégulière vivant en France mille fois plus d’argent qu’à nos compatriotes français vivant à l’étranger et qui connaissent une très grande précarité médicale !
Ces deux amendements n’ont pas été examinés par la commission. Je me permettrais tout de même de dire, madame la ministre déléguée, que, lorsqu’un système n’est pas contrôlé, il dérape. La vraie question posée par l’AME n’est pas celle de l’immigration clandestine. À partir du moment où l’on entre dans le domaine du non-contrôle, les tentations sont évidemment grandes, c’est ce qui pose problème. En effet, le non-contrôle initial a donné naissance à un certain nombre d’abus, ce que ce gouvernement et les précédents n’ont pas voulu constater.
Tant que ne sera pas faite la transparence en la matière, tant que le problème ne sera pas posé à l’Assemblée nationale, laquelle vote la loi de finances, l’AME sera source de conflits symboliques et désagréables ; les uns prétendant qu’il faut tout supprimer et les autres considérant qu’il faut laisser passer, qu’il n’y a rien à voir et que ce ne sont que des problèmes de microbes ! Je considère, pour ma part, que ces amendements proposent de consentir un effort louable. C’est la raison pour laquelle, à titre personnel, je les soutiendrai.
Les amendements proposés ne permettent pas de réduire le coût de l’AME…
…et ne répondent pas à votre intervention de l’instant, monsieur Goasguen. L’objectif poursuivi par l’AME n’est pas l’immigration, comme vous l’avez très justement précisé, il est un objectif sanitaire et humanitaire, deux demandes très proches.
Il convient, premièrement, de protéger les personnes concernées et de veiller à ce qu’elles ne développent pas de maladies infectieuses susceptibles de contaminer les personnes alentours.
Elles sont, vous avez raison, prises en charge à 100 %. C’est aussi, contrairement à ce que vous avez précédemment soutenu, le cas pour tous les Français qui souffriraient d’une tuberculose. Deuxièmement, l’AME évite que ne s’aggravent des maladies graves – je pense particulièrement au cancer – et permet de les dépister suffisamment tôt pour que leur coût ne devienne pas excessif.
La remise en cause de l’AME conduirait à une dégradation de l’état de santé des bénéficiaires et à un retard de la prise en charge des malades. Les amendements présentés ne permettent pas de maîtriser la dépense.
La contrôler ne permet pas de la maîtriser ! Vous en êtes d’accord !
Le Gouvernement est, par conséquent, défavorable à ces amendements.
Je voudrais que l’on dispose d’éléments factuels afin que l’on ne s’envoie pas à la figure des chiffres qui peuvent être contestés, que ce soit ceux de M. Goasguen ou d’autres. Le rapport très important de MM. Cordier et Salas de 2010 a posé un diagnostic assez objectif et a donné des pistes sur l’hôpital et la facturation, notamment. Des actions ont commencé à être menées.
Permettez-moi de poursuivre, monsieur Goasguen ! Ce rapport ne proposait pas le droit de timbre que vous avez installé et que nous avons évidemment annulé l’année dernière. Sachez que, toujours selon le rapport, cela ne représentait qu’environ 5 millions d’euros. Nous nous opposons ici des symboles qui, je le crois, ne sont pas justifiés au regard de la situation sanitaire dans laquelle peuvent se trouver des populations précarisées. L’année dernière, M. Estrosi, alors rapporteur spécial, nous avait affirmé que l’AME était la priorité donnée aux étrangers en situation irrégulière au détriment des Français malades. Avec des phrases de ce genre, on nourrit essentiellement une ambiance délétère, pour ne pas dire nauséabonde et qui nous envahit, notamment ces jours-ci.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Cela ne cesse, je l’imagine, d’inquiéter chacun d’entre nous quand on parle de la santé !
Protestations sur les bancs du groupe UMP.
M. Goasguen, lui, a été beaucoup plus mesuré dans ses paroles parce qu’il connaît probablement le sujet, ayant été co-rapporteur avec Christophe Sirugue sur l’évaluation de l’AME.
Je veux simplement préciser à M. Tian que l’on ne peut pas manipuler les pourcentages comme il l’a fait. Selon la CPAM de Paris, il y a eu, en 2009, 133 plaintes dont treize concernant l’AME. Telle est la réalité. Arrêtez de raconter des sornettes.
Respectez les chiffres et les rapports ! Cessez de nous invectiver avec l’AME !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Je voudrais dire à mon collègue que, si l’on ne veut pas que la situation se détériore, il convient peut-être d’éviter les amalgames entre des situations qui n’ont rien à voir.
Ce n’est pas scandaleux. M. Sebaoun vient de nous expliquer que le climat était délétère du fait du racisme et il a établi un lien avec l’AME !
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
J’en viens au véritable sujet qui nous intéresse. La notion d’égalité est au coeur de la politique et du programme que vous proposez à la France. Si le combat sur l’AME est aussi symbolique, c’est parce que les Français ne comprennent pas pourquoi ils devraient cotiser, eux qui sont accablés d’impôts et à qui l’on demande sans cesse des sacrifices financiers pour participer au redressement de ce pays, alors que des personnes en situation irrégulière et que la France soigne avec générosité ne participent pas a minima.
Selon la théorie du Gouvernement et de sa majorité, il peut exister une gratuité en France et l’on doit admettre qu’une partie de la population ne participe pas à la solidarité nationale.
C’est un point philosophique sur lequel je me suis opposé fermement à vous. Même pour l’impôt sur le revenu, il serait bon que tout le monde participe. Quant à l’AME, pour prendre conscience des coûts, pour prendre conscience que c’est un système fragile reposant sur la solidarité, il faut que chacun y contribue. Visiblement, le fait qu’on ait sextuplé les dépenses en dix ans ne vous embête pas. À partir de quel montant de dépenses déciderez-vous enfin de la contrôler ou de la maîtriser ?
Madame la présidente, à la suite des propos qui viennent d’être tenus, je demande une suspension de séance au nom du groupe SRC.
La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante-cinq, est reprise à vingt-deux heures cinquante-cinq.
Il a été tenu dans cet hémicycle avant la suspension de séance des propos extrêmement malheureux, qui ont choqué toute une partie des députés présents. De tels propos ne devraient pas être tenus non seulement dans cet hémicycle mais aussi dans la République. Il y a des amalgames à éviter et il ne faut jamais, notamment, porter atteinte à nos ministres, qui représentent la démocratie et la République.
Je demande donc au groupe UMP, en toute simplicité, de retirer ses propos concernant la garde des sceaux, Mme Taubira.
Nous discutons d’un sujet sur lequel, c’est une certitude, nous avons des positions très opposées. Il arrive alors qu’il y ait dans cet hémicycle des moments de passion, M. Sebaoun a parlé du climat ambiant en pensant vraisemblablement à la séance des questions de cet après-midi.
La condamnation du racisme et de tous les excès est unanime dans cet hémicycle. Simplement, certains se livrent davantage à une certaine forme de théâtralisation, nous n’y sommes pas favorables.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Sur un sujet aussi sensible que celui dont nous débattons, acceptons tous de calmer le jeu et de rester sur le fond.
Nous sommes en total désaccord et nous allons nous opposer, chacun avec ses arguments. Je souhaite que l’on en reste au fond. Acceptez d’entendre nos arguments.
Ce n’est pas parce que vous êtes majoritaires que vous détenez la vérité, ce n’est pas un argument suffisant. Nous avons des arguments à faire valoir. Que chacun essaie de faire valoir les siens dans un climat de sérénité et de sang-froid et que l’on poursuive tranquillement nos travaux.
Chacun comprendra évidemment que notre groupe ne souhaite pas céder aux provocations qui se multiplient dans cet hémicycle depuis plusieurs jours. Il y en a eu cet après-midi, vous l’avez dit, monsieur Jacob, et encore à l’instant. Ces provocations sont en effet insupportables. Nous pensions, monsieur Jacob, qu’après les paroles malheureuses de l’un de vos collègues, qui, à nos yeux, outrepasse les règles républicaines élémentaires,
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
il était de votre responsabilité de président de groupe de lui demander de les retirer et de vous excuser.
Puisque vous ne le faites pas, notre groupe saisira la conférence des présidents de cet incident inqualifiable.
La conférence des présidents sera saisie.
La séance n’est pas terminée et je vous demande de poursuivre dans le respect des uns et des autres.
La parole est à M. Dominique Tian.
Vous avez l’air de dire, madame la ministre, que l’UMP est pour la disparition de l’AME. Ce n’est pas le cas : nous ne l’avons pas supprimée, nous avons simplement créé un droit de timbre de 30 euros.
Vous nous reprochez également de vouloir un retour des grandes épidémies du Moyen Âge. Par l’action négative de l’UMP, la population française serait en effet bientôt victime de ces épidémies. Or nous soulignons seulement le fait que l’AME s’étend à 50 000 personnes de plus cette année, que nous en sommes à 264 000 personnes. C’est un glissement progressif qui coûte très cher : 1 700 euros de plus par bénéficiaire. Il existe donc un problème économique.
Vous nous demandez de voter 150 millions de plus rien que cette année, pour faire face à cette arrivée massive de personnes dans le système. Il n’y a pas de jugement de valeur de notre part. Je déplore les propos de M. Sebaoun, selon lesquels nous contribuerions à un certain climat actuel. Non, nous disons seulement qu’il se produit un glissement économique qui n’est plus, comme l’a indiqué M. Goasguen, supportable. Nos finances publiques ne peuvent plus assumer ce type de dépenses. Les propos de notre collègue sont donc très exagérés.
Il y a un problème économique, autour d’une allocation qui est largement volée, que l’on ne peut plus assumer budgétairement. Arrêtez de penser que nous voulons le mal de la population du monde entier ou que nous souhaitons la propagation d’épidémies. Il faut modérer ses propos. Reconnaissez, madame la ministre, qu’il existe un vrai problème économique. Mme Touraine, ministre de la santé, a admis qu’il fallait dépenser 150 millions de plus. Nous demandons : peut-on continuer comme cela ?
Je voudrais, madame la ministre, revenir sur deux points. Vous avez développé un argument autour du risque de nature infectieuse, que nous pouvons parfaitement entendre. Mme Neuville a commis un article dans un quotidien du soir, dans lequel elle insiste sur plusieurs points en ce sens. Nous n’avons pas de chiffres précis sur ce que cela représente, mais nous pouvons imaginer que ce n’est pas l’intégralité de la dépense de l’AME.
Ensuite, puisque vous parlez de justice sociale, je reçois très fréquemment dans ma permanence des retraités qui me disent : « Nous avons cotisé toute notre vie et nous avons de très petites retraites. Or on nous impose systématiquement un forfait : 50 euros multipliés par trois catégories, soit 150 euros, soit pour deux personnes, 300 euros au total. » Ne serait-il pas normal, alors qu’ils contribuent et qu’ils ont cotisé toute leur vie, qu’existe à l’autre bout de la chaîne, pour le financement de l’assurance maladie, un forfait annuel ? Nous sommes hostiles à la gratuité intégrale car elle pose d’autres types de problèmes, et nous pensons que ce n’est pas la justice sociale. La vraie justice, c’est un forfait annuel.
Madame la ministre, vous allez dire que je me répète mais j’aimerais savoir ce que vous comptez faire pour les 3 000 demandes d’aide à la Caisse des Français de l’étranger, de la part de compatriotes qui n’y ont pas accès et dont la demande a été rejetée, peut-être au motif qu’ils sont trop pauvres, alors que vous donnez priorité aux 262 000 étrangers en situation irrégulière sur le territoire. C’est la vérité : vous oubliez cette catégorie de Français parce qu’ils sont loin. Ils ne vous intéressent pas, ils ne votent pas pour vous !
M. Jacob a eu l’honnêteté de reconnaître qu’il s’agit d’un sujet clivant. Je suis député depuis un an et demi, et c’est la quatrième fois que nous avons à débattre longuement de l’AME dans l’hémicycle, à chaque fois à l’initiative du groupe UMP,…
…dans une sorte d’obsession quasi pathologique qui consisterait à considérer qu’il s’agit du sujet central du débat politique.
Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Ce n’est pas une obsession mais une lubie, si vous préférez.
Je n’oublie pas, monsieur Tian, que la première proposition de loi déposée dans une niche parlementaire par l’UMP portait sur l’aide médicale d’État.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Pour l’UMP, le principal sujet d’opposition et de clivage avec la majorité porte sur ce sujet.
Souffrez que nous considérions qu’il y a là quelque chose de nature à plomber en partie le débat. Tous les arguments figurant dans le rapport de M. Goasguen et M. Sirugue, ainsi que dans ceux de l’IGAS plusieurs fois mentionnés, arguments dont vous devez bien reconnaître la solidité, vous éclairent sur le caractère incongru et inopérant de vos propositions destinées à modérer la dépense budgétaire, alors même que l’objectif d’un financement par la solidarité nationale, dans une logique prophylactique de santé publique, est au coeur de notre système.
Pourquoi ne présentez-vous pas des propositions similaires pour réserver le bénéfice des services de la protection maternelle et infantile, qui sont également ouverts, dans une logique de prévention, à tous et à toutes ? Pourquoi ne demandez-vous pas de les rendre discriminants ?
M. Goasguen, dans son argumentaire, pose un certain nombre de questions, mais allez-vous revenir à chaque occasion sur l’AME…
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
…alors que les professionnels de santé, les décideurs locaux, les gestionnaires d’hôpitaux, qui en connaissent les conséquences sur les finances hospitalières, vous disent que vos propositions sont inopérantes ?
Je rappelle que la première mesure que vous avez votée, quand vous avez eu la majorité, concernait justement l’AME : la lubie n’est donc pas du côté que vous dites !
C’est vous qui, immédiatement, avez voulu contrôler cette aide.
Soyons clairs et que chacun prenne ses responsabilités. Vous souhaitez une AME d’un certain type, nous en souhaitons une d’un autre type. Mais ce qui est incontournable, c’est que l’aide médicale d’État doit figurer dans la loi de finances. Je n’admets pas, et vous ne devriez pas admettre non plus, que des sommes que nous votons en loi de finances ne soient pas contrôlées.
L’AME est un système de guichet dans la mesure où l’État rembourse à la Sécurité sociale des sommes qui lui sont demandées, sans contrôle de la part de celui-ci. J’ai conduit une mission de la part de l’État sur le sujet. Lorsque nous aurons les chiffres du contrôle, chacun prendra ses responsabilités et nous pourrons avoir un débat éclairé, mais rien n’est pire que ces débats théologiques qui ne s’appuient sur aucune connaissance des chiffres.
C’est la raison de mon rapport, lequel se place sur le strict plan financier et n’est pas une attaque morale ni politique. Il s’agit seulement d’affirmer que n’importe quel service que nous votons en loi de finances doit être transparent. Le moins que l’on puisse dire de l’AME, c’est que ce budget n’est pas transparent. Parce qu’il ne l’est pas, il suscite des polémiques. Faisons d’abord la transparence, nous discuterons après.
Les crédits de la mission « Santé » sont adoptés.
Comme l’an passé, je propose la suppression pure et simple du système de l’AME, en prévoyant néanmoins le maintien de la prise en charge des soins d’urgence. Permettez-moi de m’étonner d’être la seule à proposer cette suppression, après les déclarations tonitruantes de certains responsables UMP. Comme quoi, les lubies dont notre collègue a parlé évoluent selon que l’on est devant les caméras ou aux heures tardives de la nuit dans cet hémicycle. Mais passons.
Il ne faut pas se contenter de revenir au système antérieur. Même avec une franchise, il n’a pas empêché les dérapages budgétaires que l’on a connus, ni les abus, comme la mise en place de filières d’immigration sanitaire illégales, qui sont une réalité, que l’on veuille la voir ou non.
Cette suppression est une nécessité budgétaire mais aussi psychologique, parce que, par les temps de révolte qui courent, et que vous entretenez, il est important d’envoyer un signal de justice sociale. Il n’est pas supportable de continuer à payer la prise en charge des soins de clandestins quand on sait que deux tiers des Français se privent de soins pour des raisons financières.
J’entends l’argument de la nécessité de limiter les risques sanitaires mais, dans ce cas, traitez les causes plutôt que les effets : donnez-vous les moyens de lutter contre l’immigration clandestine. Je ne crois pas que ce soit en augmentant le nombre de régularisations ou en maintenant des systèmes comme l’AME que vous y parviendrez.
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l’amendement no 637 .
Je souhaite dire à Mme Maréchal-Le Pen que sa position ne me convient pas. Que le système de l’AME soit à bout de souffle, qu’il ait besoin d’être contrôlé, c’est une évidence. Qu’il faille en changer l’appellation, c’est une évidence également. Mais le caractère extrêmement drastique de l’amendement et de sa présentation suscite la manière tout aussi drastique, en sens inverse, que j’entends de l’autre côté de l’hémicycle.
Nous n’avons jamais envisagé, pour des raisons sanitaires, de supprimer les services d’urgence aux immigrés clandestins.
Vous en avez parlé, mais nous y ajoutons la prophylaxie, ainsi que les grossesses, et c’est la raison pour laquelle nous avons proposé et établi un système beaucoup plus crédible, permettant d’éviter les surenchères à droite comme à gauche. Ce système, l’actuelle majorité l’a cassé, lors de sa première réunion à l’Assemblée nationale, sans le savoir. Je crois qu’il est temps de remettre l’AME en chantier. C’est pourquoi je suggère, dans cet amendement, de revenir au système équilibré que nous avions proposé, qui commençait à régler le problème de l’AME.
Par cet amendement, nous proposons de rétablir la procédure d’agrément préalable pour les soins hospitaliers les plus coûteux, programmés, procédure supprimée par la loi de finances rectificative pour 2012. Le droit annuel forfaitaire, dont le montant est fixé par décret et qui est lié à cette reprise d’agrément, représentera l’équivalent de la prise en charge moyenne d’une mutuelle par un salarié au SMIC. Cette réintroduction permettrait également de mieux contrôler l’AME, sur laquelle il existe, je tiens à le souligner, une divergence entre le Front national et l’UMP.
Nous ne sommes pas, à l’UMP, hostiles au fait de venir en aide à des personnes en situation de détresse au motif qu’elles seraient irrégulièrement sur notre territoire. La tradition de la France est de venir en aide aux personnes, ne serait-ce que par solidarité humaine. Ce que nous voulons éviter, c’est un mauvais contrôle de la dépense. Si quelqu’un a un accident de voiture, même en situation irrégulière, le devoir humain est de se porter à son secours et de financer les soins. Entre le zéro et le cent, il existe toute une gradation que l’UMP essaie d’introduire. Nous souhaitons introduire de la subtilité dans un système très rigide, entre tout donner et ne rien donner.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements soumis à discussion commune ?
Le premier, l’amendement no 95 , n’a pas été présenté à la commission. Les trois autres ont été refusés.
Le retour d’un droit de timbre ne constitue pas une mesure efficace de maîtrise et accroît les risques sanitaires. Ce droit constitue un frein à l’accès aux soins pour une population très précaire. Cette mesure complexifie la procédure d’accès à l’AME ainsi que la gestion administrative du dossier. D’autre part, cela engendrerait des retards dans la prise en charge médicale des patients, sans créer de véritables économies. Quant à l’agrément préalable, il complexifie également la gestion administrative, sans lutter efficacement contre la fraude. De plus, il est trop complexe à mettre en oeuvre, aussi bien pour les hôpitaux que pour les caisses d’assurance maladie, et il représente une charge de gestion importante. Enfin, la centralisation des dépôts de demandes d’AME auprès des CPAM constitue un obstacle à l’accès aux droits pour une population qui n’est pas à l’aise dans les démarches administratives. Je dispose, par ailleurs, monsieur Goasguen, du relevé des mesures de contrôle de l’AME, quand vous me dites qu’il n’y en a pas.
S’agissant du contrôle des droits, 160 équivalents temps plein y sont dédiés. Les 250 000 bénéficiaires doivent présenter quatre documents : un justificatif de ressources, un justificatif d’identité, un autre visant à prouver la stabilité de résidence de plus de trois mois, pour éviter le tourisme de santé, et enfin un justificatif d’adresse. Il existe, en sus, des contrôles a posteriori. En 2012, le contrôle des bénéficiaires a permis de détecter quarante et une fraudes, pour un montant s’élevant à 120 000 euros.
Monsieur Goasguen, je vous ai souvent entendu dénoncer avec votre groupe la petite fraude sociale, alors que vous restiez muets devant de lourdes fraudes que nous avons, nous, dénoncées.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Le Gouvernement demande donc le retrait de ces amendements, sans quoi il leur donnera un avis défavorable.
Je suis prêt à entendre n’importe quoi, mais il y a quand même des limites à la duperie dans le domaine des chiffres. Madame le ministre, savez-vous que vous avez déclaré dans la loi de finances 40 millions d’euros pour les urgences et que vos propres services m’ont dit qu’en réalité les frais d’hospitalisation donnés pour l’AME sont en train d’atteindre 120 millions d’euros ? Savez-vous également qu’il est impossible de disposer du budget exact dépensé par la chambre régionale des comptes de Guyane ? Savez-vous que ni dans le PLFSS, ni dans la loi de finances, nous n’avons été en mesure de savoir quel est le déficit public de l’hôpital de Saint-Laurent-du-Maroni ni celui de l’hôpital de Mayotte, qui ne figurent pas dans le PLFSS ? Je ne parle pas de fraude, mais de clarification. À l’occasion de l’examen du budget, nous devons savoir quel est le montant que les Français vont devoir débourser pour payer leurs impôts. Vous ne sortirez pas du débat sur l’AME sans apporter des clarifications financières, car tel est le rôle de la commission des finances et celui de l’Assemblée nationale.
« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Je ne veux pas arbitrer le différend que j’ai cru percevoir entre le Front national et l’UMP, ni me lancer dans une bataille de chiffres. Je voulais répondre à M. Hetzel, mais il est parti. Il s’interrogeait sur le type de patients qui bénéficiaient de soins grâce à l’AME. Je vous renvoie au rapport Cordier, qui cite une enquête de la DRESS menée en 2007 : elle dresse un état des lieux précis des pathologies rencontrées. Les bénéficiaires de l’AME sont surtout des hommes jeunes, entre vingt-cinq et trente ans. Dans une population habituelle, les hommes de cet âge sont rarement malades. Or ce rapport montre que ces bénéficiaires de l’AME ont dans 23 % des cas des pathologies respiratoires et dans 9 % des cas des maladies infectieuses graves : 32 % d’une population a priori saine souffre d’une pathologie respiratoire ou d’une infection grave. Je vous laisse méditer cela, car c’est la réalité de ce que vous disait tout à l’heure la ministre, celle des pathologies qui peuvent toucher des gens très précarisés.
Cette démonstration est absurde ! C’est comme si vous disiez que 100 % des gens entrés à l’hôpital avaient besoin de soins ou que 100 % des gens qui ont consulté un médecin avaient une bonne raison d’obtenir un arrêt de travail. Le problème est différent. Nous sommes bien d’accord sur le fait que les gens qui bénéficient de l’AME ont besoin de soins. Mais le nombre de gens qui ont besoin de soins sur la planète dépasse largement les 258 000 : il doit même atteindre sans trop de difficultés le milliard. Le plus simple, monsieur Sebaoun, puisque vous êtes un homme généreux et que pour vous les chiffres ont peu d’importance, est d’aller au bout de votre raisonnement : voter une nouvelle loi qui transforme l’AME en une aide médicale mondiale d’urgence accordée par la France.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
En ce cas, on changerait de budget pour un budget humanitaire. Évidemment qu’il y a des gens qui ont besoin de soins ! Mais lorsque nous vous disons qu’il y en a qui viennent pour des procréations médicalement assistées, ceux-ci éprouvent assurément un besoin irrésistible d’avoir un enfant,…
…mais sont-ils pour autant obligés d’avoir recours, dans notre pays, à une PMA qui coûte 6 000 euros ? Sans doute pas. Michel Rocard disait que l’on ne pouvait pas accueillir toute la misère du monde et nous en sommes bien conscients. Arrêtez de nous donner des leçons et de nous prendre pour des débiles légers.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Il va sans dire que les bénéficiaires de l’AME ont besoin de soins, et qu’ils coûtent un peu plus cher que le Français moyen. Nous essayons simplement de vous dire que nous n’avons plus les moyens de les aider.
Eh bien, on n’a qu’à les noyer dans l’Atlantique ! Ce n’est pas possible de parler ainsi de la santé publique !
L’amendement no 95 n’est pas adopté.
L’amendement no 637 n’est pas adopté.
L’amendement no 174 n’est pas adopté.
L’amendement no 638 n’est pas adopté.
La parole est à M. Claude Goasguen, rapporteur spécial, pour soutenir l’amendement no 634 .
Cet amendement, sur la gestion des comptes AME, est un peu différent des autres et je souhaiterais qu’il puisse recevoir un accord relativement unanime. Si la pratique du rapport est constante dans cet hémicycle, il me semble qu’elle serait particulièrement utile dans ce cas. Un rapport sur la gestion de l’AME, qui préciserait les catégories de dépenses et les territoires concernés, mériterait d’être publié, car il éclairerait le débat. Je n’ai aucune ambition de dire aux uns et aux autres ce qu’ils doivent faire. Chacun doit prendre ses responsabilités. J’ai une certaine vision de l’AME, quand sur les bancs de la majorité vous en avez une autre, mais nous devons nous retrouver sur un point : il n’est pas possible de continuer à évoluer dans l’obscurité des chiffres si nous voulons réellement débattre.
Il est défavorable.
Le groupe SRC votera contre cet amendement. Toutefois, s’il est un sujet sur lequel nous pouvons nous retrouver, c’est sur celui de l’objectivité et de la vérité des faits. J’ai trop de respect pour cet hémicycle, monsieur Tian, pour vous laisser prononcer dans son enceinte, en toute connaissance de cause, une contre-vérité manifeste. En commission élargie, M. Sebaoun vous a rappelé que la procréation médicalement assistée est expressément exclue du panier de soins de l’AME.
Cela procède d’un décret d’octobre 2011 signé par Xavier Bertrand. Aussi, quand vous vous obstinez à asséner des contre-vérités dans l’hémicycle, au service de votre argumentaire, participez-vous à cette ambiance pourrie
Protestations sur les bancs du groupe UMP
qui consiste à vouloir absolument jeter le bébé avec l’eau du bain, en nous expliquant que l’AME produit un appel d’air pour l’immigration clandestine, quand on sait pertinemment que la plus grande majorité des bénéficiaires de l’AME sont des étrangers en situation régulière, qui ont eu des titres de séjour qu’ils ont perdus. Ce sont eux qui, dans l’attente d’une régularisation, d’une prolongation de leur titre ou d’une reconduite à la frontière, bénéficient de l’AME. Arrêtez donc d’avoir recours à des arguments faux et à des contre-vérités pour défendre vos positions ! Assumez-en la brutalité, qui n’est pas si lointaine d’une autre, plus à votre droite.
Madame la ministre déléguée, je ne comprends pas votre attitude. Pour quelle raison refusez-vous la transparence ? Claude Goasguen demande simplement un rapport qui établisse clairement les chiffres de l’AME par départements ou par pathologies, afin de pouvoir mener un débat serein. Les bras me tombent de voir le Gouvernement s’opposer à la transparence ! Êtes-vous capable, madame la ministre déléguée, de donner des arguments qui puissent justifier votre refus de faire la transparence sur les chiffres de l’AME ?
Sur l’amendement no 634 , je suis saisie par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Depuis quatre ans, je ne me lasse pas d’expliquer ce que sont un lot sécurisé et un lot dégradé pour les professionnels de santé. Aujourd’hui, les bénéficiaires de l’AME n’ont pas de carte Vitale ; partant, les professionnels de santé envoient aux CPAM des feuilles de soins dans des enveloppes qui sont ouvertes les unes après les autres.
Monsieur Goasguen, vous balayez cela d’un revers de la manche, mais je vous explique la réalité du terrain et vous savez très bien que c’est vrai.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
La Sécurité sociale ouvre chaque enveloppe de l’AME, chaque feuille de soins est contrôlée…
…en termes de prescription, de médicaments et de soins. Vous ne pouvez donc pas dire que ces gens-là ne sont pas contrôlés, alors qu’ils le sont plus que ceux qui possèdent la carte Vitale, par définition, parce qu’il s’agit de lots dégradés. J’en ai assez de devoir le rappeler chaque année !
J’ai interrogé Mme la ministre et j’aurais aimé qu’elle me réponde, madame la présidente. Mme Lemorton n’est pas là pour intervenir au nom de l’exécutif.
Protestations sur les bancs du groupe SRC.
Quel est l’intérêt de la Sécurité sociale dans cette affaire ? Pourquoi devrait-elle faire des contrôles pointus ? Si elle fait des contrôles effectifs en cas d’arrêts maladie, c’est parce qu’elle paye les journées d’absence. Mais sur l’AME, pour ma part, je mets formellement en doute la qualité de ses contrôles. Je le dis devant vous tous : tant qu’il n’y aura pas de transparence, il n’y aura pas de débat serein sur l’AME. Les contrôles sont une nécessité financière. Prenez vos responsabilités, nous prendrons les nôtres : il faut un contrôle de ce budget !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Pour confirmer complètement ce que vient de dire Claude Goasguen : il est évident que la Sécurité sociale a intérêt à ce que l’AME soit la plus forte possible, et le Gouvernement a d’ailleurs pris des mesures correctives. Je rappelle un chiffre pour nos collègues qui ne suivent pas les débats sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale : il y a huit millions de cartes vitales en trop,…
…d’après un rapport de la Cour des comptes. Dès lors, madame la ministre, ne nous parlez surtout pas de système sécurisé pour la Sécurité sociale.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
J’ai tenté tout à l’heure de donner le détail des mesures de contrôle, monsieur Goasguen, mais pour vous et votre groupe, tout ce qui n’est pas dit par vous-mêmes, c’est de la rigolade.
Ce n’est pas ainsi qu’on participe à un débat démocratique. Vous demandez des rapports, mais je peux décrire encore plus en détail les mesures de contrôle, et je vous rappelle que plusieurs rapports ont déjà été faits sur cette question, en particulier par l’IGF et par l’IGAS en 2010.
Ils ont démontré qu’il n’existait qu’un nombre limité de situations frauduleuses. Vous concluiez vous-même en juin 2011, dans le rapport que vous aviez coécrit avec Christophe Sirugue, que la fraude ne saurait expliquer le dynamisme de la dépense.
Mais c’est le cas, monsieur Jacob. Nous, la gauche, avons accepté le principe de soigner tous les gens malades.
Ceux qui demandent à être soignés le sont. Où est le problème de transparence ? Je ne vois pas à quel besoin répondrait le rapport que vous demandez.
Monsieur le député Jacob que la transparence n’a pas été et n’est toujours pas un de vos points forts.
Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Pourquoi refusez-vous la transparence, madame la ministre ? En avez-vous peur ?
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 86 Nombre de suffrages exprimés: 86 Majorité absolue: 44 Pour l’adoption: 22 contre: 64 (L’amendement no 634 n’est pas adopté.)
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l’amendement no 635 .
J’ai tout à l’heure évoqué la question de la Guyane, cet amendement me fournit l’occasion de donner plus de détails. Madame la ministre, la Guyane fait partie intégrante du budget de l’AME. Vous nous avez déclaré que 11 000 personnes y étaient concernées. Un rapport de la chambre régionale des comptes indique, lui, que l’hôpital de Saint-Laurent-du-Maroni jouxte un bassin de vie au Suriname rassemblant 75 000 personnes. C’est d’ailleurs pourquoi la France a été obligée de construire un établissement de trente-six lits de l’autre côté, payé par l’agence française de développement.
Prêt ou pas, c’est tout de même l’AFD qui finance. On sait très bien que ce nouvel hôpital est très insuffisant pour le bassin de vie. En plus, je n’ai pas obtenu les chiffres pour l’hôpital public de Saint-Laurent-du-Maroni. Je les ai cherchés dans le PLFSS, mais figurez-vous, mes chers collègues, qu’il n’y a pas d’individualisation des crédits par établissement. J’ai des doutes sur les chiffres annoncés dans le PLF et pas de résultats dans le PLFSS. Il faut absolument des éclaircissements sur la situation en Guyane, d’où mon amendement. Ce serait l’intérêt de tout le monde, et même en Guyane la question est posée car l’argent part un peu partout, notamment vers le Suriname. Là encore, il y a un problème de transparence et de crédibilité que vous n’avez pas su assumer, madame la ministre déléguée, et je le regrette. Nous sommes ici pour faire de la transparence et pour asseoir la crédibilité d’un dispositif avant de demander au contribuable de le payer par ses impôts.
La rédaction d’un rapport supplémentaire ne nous paraît pas nécessaire car toutes les données vous ont été transmises, monsieur le rapporteur spécial.
Vous-même avez écrit dans votre rapport que près de 90 % des questions ont fait l’objet d’une réponse. Les auditions que vous avez menées ainsi que celle de la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales vous ont fourni toutes les informations disponibles.
Les chiffres transmis par le ministère de la santé, qui sont bien évidemment sincères, traduisent la croissance des dépenses d’AME en Guyane. Les effectifs des bénéficiaires s’élèvent à 17 497 à la fin du deuxième trimestre 2013 contre 8 870 à la fin du deuxième trimestre 2012. Cette augmentation est en grande partie le contrecoup de l’instauration du droit de timbre en 2012.
Les difficultés de mise en place du droit de timbre ont provoqué une baisse de l’AME de droit commun et un report vers les urgences. La suppression du droit de timbre a conduit à retrouver le niveau des bénéficiaires des années précédentes. L’avis est donc défavorable.
Je vais compléter l’information de Mme la ministre, qui est vraiment incomplète. Elle a reconnu que le nombre de bénéficiaires de l’AME en Guyane avait baissé avec le droit de timbre, que nous avions instauré. Mais il a remonté immédiatement dès la suppression de ce droit. Au passage, l’exemple de la Guyane prouve que le droit de timbre, qu’elle traite avec dérision, n’était pas inutile.
Et si je comprends bien, madame la ministre, un rapport de la Cour des comptes n’a pour vous aucun intérêt, ce que conclut une de ses chambres régionales est fallacieux. Quand j’évoque un bassin de vie de 75 000 personnes au Suriname, à proximité de Saint-Laurent-du-Maroni, vous dites que les conseillers à la Cour des comptes se sont vraisemblablement trompés – il y en quelques-uns ici, ils apprécieront. Mais en ce cas, essayons par un rapport d’avoir une explication de la différence entre l’appréciation de la Cour des comptes et la vôtre sur l’évaluation budgétaire du dispositif. Je demande simplement la vérité des chiffres, rien de plus. Mais je n’arrive pas à l’obtenir.
Je veux que la vérité de mes propos soit respectée, monsieur Goasguen, et ce que vous avez exprimé ne correspond pas à ce que j’ai dit à ce micro.
L’amendement no 635 n’est pas adopté.
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l’amendement no 636 .
Qu’on m’ait répondu en commission que Mayotte était hors budget AME, je le savais déjà, mais qu’on ait nié le problème au motif de l’extraterritorialité alors que cela n’a rien à voir avec le budget, c’est le bouquet ! Mayotte est un département français depuis maintenant plusieurs années, mais toujours géré dans le cadre d’un système artisanal, avec une petite saveur exotique, j’en ai parlé dans mon rapport. Par conséquent, nous ne savons en réalité rien sur ce qui s’y passe. Or tôt ou tard, madame la ministre, Mayotte entrera dans le régime de droit commun de la République, ce que nous souhaitons tous, y compris donc par rapport à l’AME. Sinon ce n’était pas la peine d’en faire un département. J’aurais aimé que le ministère nous donne quelques renseignements sur la manière dont il voyait l’évolution des choses, plutôt que de s’en tenir au système très curieux qui règne à Mayotte. J’ai demandé naïvement des informations sur la situation financière de l’hôpital public de Mayotte, dont je sais – Cour des comptes oblige – qu’il est le premier établissement public de France en ce qui concerne les maternités ; j’ai cherché, là encore, dans le PLFSS et rien, pas d’individualisation des crédits sur les hôpitaux publics, on les présente globalement. Il va falloir être sérieux un jour. Mayotte posera un problème considérable en termes d’immigration et d’AME.
Et on nous dit : « Laissez filer, il n’y a rien à voir, continuons le système. » Ce n’est pas digne d’une assemblée parlementaire de ne pas obtenir d’informations sur l’avenir d’un département français qui va pleinement entrer dans la République, ni digne d’un gouvernement de ne pas répondre à des questions précises.
Avis défavorable. Je tiens à rappeler ce que j’ai dit tout à l’heure sur l’extraterritorialité…
Mais bien sûr que si. Vous avez dit que nous devrions faire accéder Mayotte à l’aide médicale d’État, en contradiction avec vos propos précédents, quand vous vouliez au contraire la réduire.
Vous lirez le compte rendu intégral. Je comprends moi aussi assez vite,…
…et je vous ai expliqué pourquoi j’évoquais l’extraterritorialité des maternités proposée par un de vos collègues du groupe UMP. Il craignait en effet un afflux d’immigrés.
Mais le principe d’extraterritorialité n’est pas en l’espèce celui que nous défendons. Il avait d’ailleurs été condamné sur l’ensemble des bancs.
La rédaction d’un rapport sur les dépenses de santé pour les étrangers en situation irrégulière sur l’île de Mayotte ne nous paraît pas nécessaire parce que lors des auditions de la rapporteure pour avis, tous les éléments ont été transmis.
Deuxièmement, la ministre des affaires sociales vous a précédemment répondu en commission élargie sur ce point précis.
Troisièmement, il n’est pas envisagé d’appliquer l’aide médicale d’État à Mayotte. Le fait que l’île soit devenue, le 31 mars 2011, le cent-unième département français n’implique pas une application intégrale du droit commun. Est-ce clair ?
Un mot pour rétablir une vérité historique : ce n’est pas Claude Goasguen qui avait lancé l’idée de l’extraterritorialité de Saint-Laurent-du-Maroni et de la maternité de Mayotte, mais des députés de la droite populaire dont je faisais partie. Cela dit, c’était loin d’être idiot puisque nous avons là les deux plus grosses maternités de France alors que la population locale n’a évidemment aucun rapport avec cet état de fait : il y a des personnes qui traversent le Maroni en pirogue et viennent accoucher en France car leurs enfants acquièrent alors automatiquement la nationalité française.
Cela nous posait un problème parce que nous pensions qu’il y avait un dévoiement de la loi. Cela n’a rien de choquant, c’est une question que l’on peut se poser mais, en l’occurrence, ce n’est pas Claude Goasguen qui l’a posée, en tout cas pas ce soir, madame la ministre.
Je n’ai pas dit que c’était Claude Goasguen, mais votre majorité !
Une fois de plus, ce type de débat est mené par des gens de l’UMP qui manifestent une tendance à la stigmatisation, ce dont je suis désolée. Vous avez gouverné pendant dix ans et vous n’avez pas réclamé la transparence sur les chiffres.
En tout cas vous ne l’avez pas pratiquée puisque vous la demandez aujourd’hui…
…et que le rapport de la Cour des comptes ne porte pas sur l’exercice 2012-2013 mais qu’il est antérieur et reflète la politique du gouvernement précédent.
Quant à l’extraterritorialité, un sujet qui date, elle n’a pas été mise en place par le gouvernement de droite car, comme vous le savez très bien, ce n’est pas possible en droit international.
Une fois pour toutes, je voudrais rappeler qu’accoucher n’est pas un acte badin. Messieurs, lorsque des femmes, parfois au péril de leur vie, viennent accoucher à la dernière minute à Saint-Laurent-du-Maroni, ce n’est pas toujours pour que s’applique le droit du sol, contrairement à ce que vous affirmez. Ne fondez pas votre raisonnement sur cet argument car accoucher n’est un acte banal pour aucune femme
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Il faut donc arrêter d’employer des arguments de ce type.
En Guyane, l’hôpital de Saint-Laurent n’est pas déficitaire.
Cela fait quinze ans que la Guyane attend un hôpital digne de la population de Saint-Laurent-du-Maroni. C’est le Gouvernement actuel qui, au mois de décembre, dans le cadre du comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins hospitaliers, va compléter le financement de l’hôpital de Saint-Laurent pour améliorer la situation de la Guyane.
M. Xavier Bertrand, ancien ministre de la santé, est venu à Saint-Laurent-du-Maroni à la veille des élections municipales…
…annoncer ce financement qui n’est jamais arrivé. C’est grâce à ce Gouvernement que nous aurons les moyens d’avoir un hôpital digne de ce nom en Guyane !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Alors, mesdames et messieurs de l’UMP, ne faites pas la morale à ce Gouvernement à ce sujet.
L’amendement no 636 n’est pas adopté.
J’appelle les crédits du compte de concours financiers « Avances aux organismes de sécurité sociale », inscrits à l’état D.
Les crédits du compte de concours financiers « Avances aux organismes de sécurité sociale » sont adoptés.
Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs à la santé et aux avances aux organismes de sécurité sociale.
La séance, suspendue à vingt-trois heures cinquante, est reprise à vingt-trois heures cinquante-cinq.
Nous abordons l’examen des crédits relatifs à l’agriculture, à l’alimentation, à la forêt et aux affaires rurales (no 1428, annexes III et IV, avis no 1430, tome I et II.)
La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt.
Nous abordons la discussion du budget de l’agriculture à une heure tout à fait respectable.
Je ne sais pas, cela va dépendre de vous !
Ce budget s’inscrit dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune qui a été négociée cet été et qui a permis de dégager des marges, à l’échelle européenne, sur le premier pilier et surtout sur le deuxième pilier.
Ces marges nous permettent de garantir des objectifs d’aide et de soutien à l’agriculture dans les différents domaines, en particulier ceux qui sont liés au deuxième pilier, tout en ayant le souci de faire en sorte que ce budget participe comme les autres à l’effort de réduction du déficit de notre pays.
Ce budget, de 4,9 milliards d’euros en crédits de paiement et de 4,7 milliards d’euros en autorisations d’engagement, dessine plusieurs grands axes que je vais rappeler.
Premièrement, les dispositifs en faveur de la compétitivité dans l’agriculture et l’agroalimentaire, dont nous avions longuement débattu l’an dernier, vont représenter près de 1,3 milliard d’euros : exonérations pour les saisonniers, les travailleurs occasionnels demandeurs d’emploi ; crédit d’impôts pour la compétitivité et l’emploi. Cet effort significatif montre l’intérêt que je porte à cette question de la compétitivité.
Notons aussi le renforcement du compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural » et des moyens dédiés à l’élevage, ainsi que la stabilisation des interventions au service des filières en métropole et en outre mer, en particulier en ce qui concerne le budget de France Agrimer. Dans ce domaine, je compte beaucoup sur les plans stratégiques en cours de négociation pour donner des perspectives à l’agriculture française, filière par filière.
Ce budget mise aussi sur l’agroécologie : augmentation de 15 millions d’euros des mesures agro-environnementales ; revalorisation de 45 % du fonds « avenir Bio » ; maintien des crédits de l’Agence Bio ; poursuite du plan que j’avais présenté sur l’apiculture.
Deuxième axe : l’installation des jeunes qui va faire l’objet d’un soutien global de 300 millions d’euros, comme l’an dernier. Les objectifs, dont nous aurons l’occasion de reparler sont ambitieux et se situent dans la ligne adoptée l’an dernier, l’installation des agriculteurs faisant partie des engagements que j’avais pris devant vous.
S’agissant de la forêt, sujet qui intéresse particulièrement André Chassaigne, un effort spécifique de 30 millions d’euros a été consenti en faveur de l’Office national des forêts qui connaissait des difficultés importantes lorsque je suis arrivé et qui aborde maintenant une phase de transition, cherchant à équilibrer son budget par les ventes de bois. Cet effort spécifique marque notre attachement collectif à l’ONF.
Nous allons aussi poursuivre les engagements du plan chablis, consécutif à la tempête Klaus, et mettre en place la première étape de la création d’un fonds stratégique pour la forêt et le bois, discutée dans le cadre de la loi d’avenir et qui se traduit par une augmentation des moyens de l’ordre de 30 %.
En matière de sécurité sanitaire de l’alimentation, nous poursuivons les engagements pris l’an dernier en maintenant les effectifs dédiés au contrôle.
Enfin, le budget de l’enseignement agricole augmente de près de 1,5 % et permet de créer 200 postes d’enseignants ou d’auxiliaires de vie scolaire individuels et 20 postes supplémentaires dans la recherche.
C’est donc un budget qui s’inscrit dans le prolongement de celui de l’an dernier et qui précède le débat sur la loi d’avenir et surtout la mise en oeuvre de la nouvelle politique agricole commune.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Charles de Courson, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour les politiques de l’agriculture et le développement agricole et rural.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission du développement durable,mes chers collègues, je suis chargé de vous présenter la position adoptée par la commission des finances sur l’évolution des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » pour 2014.
Je dois dire d’emblée, après M. le ministre, que les moyens financiers alloués à cette importante mission, y compris l’enseignement agricole, soit 4,9 milliards d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, diminuent sur la quasi-totalité des actions.
Afin de participer au redressement de nos finances publiques, le budget de l’agriculture pour 2014 diminue, hors charges de pension et à périmètre constant, de 3,2 % en crédits de paiement, soit un montant d’environ 150 millions d’euros. Le ministère et ses opérateurs réduisent globalement leurs effectifs de 269 emplois nets en 2014.
J’insiste sur un point, mes chers collègues : la baisse observée du budget national de l’agriculture est compensée par l’augmentation – d’un montant qui lui est légèrement supérieur, je vous donnerai les chiffres – des crédits alloués à la France par la politique agricole commune, dans la période 2014-2020. Pour être précis, sur les lignes « Prime nationale supplémentaire à la vache allaitante », « Prêt à l’installation et dotation jeune agriculteur », « Modernisation », « Indemnité compensatoire de handicaps naturels » et « Prime herbagère agro-environnementale », les crédits nationaux passeront de 606 millions d’euros en 2013 à 307 millions d’euros en 2014, soit une baisse de 299 millions d’euros. Cependant, sur ces mêmes lignes, les fonds communautaires passeront, eux, de 588 millions d’euros en 2013 à 970 millions d’euros en 2014, soit 390 millions d’euros de plus. Au total, la somme des fonds européens et des fonds nationaux est en augmentation de 75 millions d’euros, alors que les apparences montraient une baisse de 299 millions d’euros des crédits nationaux.
Comme pour les exercices précédents, trois programmes sont retenus dans le projet de loi de finances : le programme 154 « Économie et développement durable de l’agriculture », qui retrace les moyens consacrés à une agriculture compétitive, prenant en compte les exigences environnementales et de qualité ; le programme 149 « Forêt » ; le programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture », qui correspond en fait aux crédits de fonctionnement du ministère.
J’analyse, dans mon rapport écrit, les évolutions de ces différents crédits. J’indique brièvement que les moyens du programme 154 diminuent de 18 % en autorisations d’engagement et de 9,08 % en crédits de paiement. Les crédits consacrés à la gestion des crises diminuent de 18 %, mais, une fois encore, ce sont les crédits nationaux. Les moyens consacrés à l’installation des jeunes restent stables ; leur montant global est de 300 millions d’euros. Ceux de la dotation aux jeunes agriculteurs sont maintenus à leur niveau de 2013, du fait de la progression du taux de cofinancement communautaire qui passe de 50 à 80 % en 2014. Il en va de même, pour les indemnités compensatoires de handicaps naturels maintenues à leur niveau antérieur, soit 550 millions d’euros, le taux de cofinancement communautaire, là aussi, étant relevé de 55 à 67, 5 %. Sur le programme 149 « Forêt », un montant global de 30 millions d’euros est accordé par l’État à l’ONF, pour tenir compte des difficultés financières de l’Office. Enfin, les crédits du programme 215 relatifs aux moyens du ministère diminuent eux aussi, de 7,12 % pour les autorisations d’engagement et de 6,37 % pour les crédits de paiement, contribuant ainsi à l’effort de maîtrise des comptes publics et de rationalisation des dépenses.
Je veux revenir sur une analyse que j’ai présentée lors des débats en commission élargie et insister ainsi sur le fait que la place de la politique agricole commune, celle qui a été définie, en cette année 2013, pour les années qui viennent, est plus que jamais décisive par rapport au poids du budget national lui-même. Nous devons en particulier nous poser une question relative aux nouveaux mécanismes mis en place : la technique du paiement redistributif qui consiste, pour la France en une surprime aux cinquante-deux premiers hectares, ne risque-t-elle pas de conduire au développement de ce qu’on appelle le travail à façon, loin des logiques agricoles classiques auxquelles nous sommes tous attachés ?
Autre question, monsieur le ministre, le projet de loi de finances pour 2014 prévoit la mise en place d’un nouvel outil pour la politique forestière, le fonds stratégique forêt-bois. Il est prévu que ce fonds bénéficiera notamment à hauteur de 18 millions d’euros du produit de l’indemnité de défrichement. Cette perspective est-elle réaliste, quand on voit que le produit de cette recette est aujourd’hui plutôt voisin de 10 millions d’euros ?
J’ai exprimé mon scepticisme sur plusieurs actions, sur les incertitudes touchant à la mise en oeuvre de la nouvelle PAC et au financement du nouveau fonds pour la forêt. La commission des finances a adopté, elle, les crédits de la mission pour 2014.
La parole est à M. Éric Alauzet, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour la sécurité alimentaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au sein de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », la sécurité alimentaire, objet du programme 206, est un élément essentiel de notre santé publique, tant qu’elle peut assurer sa mission de prévention. Comme je l’ai déclaré en commission élargie, cette politique résonne avec les inquiétudes et les interrogations croissantes de nos concitoyens. Les questions sur l’impact de notre alimentation sur la santé se nourrissent d’interrogations multiples qui portent sur les fraudes, la mondialisation, la traçabilité et l’étiquetage, l’usage de la chimie de synthèse. Sur ce plan, comme sur d’autres, une question taraude l’opinion publique : les responsables politiques disposent-ils des informations nécessaires, ont-ils réellement la volonté et les moyens d’agir ?
Nous avons le devoir et la responsabilité d’apporter des réponses. Le dispositif est organisé autour de deux structures majeures. D’une part, l’évaluateur du risque est l’Ansés, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. D’autre part, le gestionnaire du risque est la DGAL, la direction générale de l’alimentation du ministère de l’agriculture. Une fois de plus, il faut saluer la performance réalisée dans le cadre de cette mission, le dispositif étant très efficace pour un coût du programme faible : la sécurité alimentaire de notre pays est assurée pour à peine plus de 500 millions d’euros, soit 0,13 % du budget de l’État.
Si, pour l’année 2014, les crédits du programme diminuent une nouvelle fois, certes seulement de 1,26 %, je dois cependant me féliciter de l’arrêt des réductions d’effectifs. Vous nous avez en effet déclaré en commission élargie, monsieur le ministre, que, après avoir, l’an dernier, divisé par deux les objectifs de réduction des effectifs des agents chargés du contrôle sanitaire et vétérinaire fixés auparavant, cette année, compte tenu des enjeux, vous mettiez purement et simplement un terme à cette réduction. Il était temps : chaque baisse d’effectifs obligeait en effet la DGAL à prévoir d’espacer davantage ses contrôles en fonction de l’analyse du risque que présentait chaque situation.
Vous nous avez aussi déclaré que vous espériez parvenir à maintenir ces effectifs stables l’an prochain. Pour moi, ce maintien ne doit pas être seulement un espoir : c’est un impératif a minima.
La crise dite de la viande de cheval, mais aussi les difficultés de gestion des autorisations individuelles de mise sur le marché des produits phytosanitaires, ont montré que la limite inférieure de l’effectif avait été non pas atteinte mais sans doute dépassée. La crise de la viande de cheval a notamment mis en évidence le sous-effectif criant de la brigade nationale des enquêtes vétérinaires et phytosanitaires, la BNEVP. Le projet de doublement en trois ans de l’effectif de celle-ci est-il confirmé ?
Cette crise a aussi prouvé qu’il était vain d’attendre des gains de productivité d’une fusion entre la DGAL et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Si la culture de la sécurité et celle de la fraude sont complémentaires, c’est bien que leur nature est différente. Si des synergies doivent être systématiquement mises en place, d’une manière générale, les réorganisations ne devraient survenir que lorsque la preuve de leur efficience est incontestable. Autrement, elles participent à l’entropie générale dans laquelle trop d’énergie se dissipe.
Au passage, cette crise a aussi révélé au consommateur la réalité des produits cuisinés à la viande, même lorsqu’ils étaient conformes aux normes. Les plats frauduleux à la viande de cheval pouvaient même être de moins mauvaise qualité que les plats conformes ! De ce fait, cette crise a aussi mis en évidence, jusqu’au coeur de la fraude, la solidité de la dimension sanitaire. Pour le coup, il faut s’en féliciter.
Vous nous avez dit aussi que, dans la perspective du transfert de la délivrance des autorisations individuelles de mise sur le marché des produits phytosanitaires de la DGAL vers l’Ansés, vous souhaitez clarifier les relations qu’entretiennent celle-ci et le ministère pour éviter tout risque de porosité entre le travail de l’évaluateur et la décision, qui, selon vous, doit rester au politique. Je serai attentif à ce point lors de la discussion du projet de loi sur l’avenir de l’agriculture.
Enfin, j’ai bien noté que, quoique vous considériez que, compte tenu des vérifications épidémiologiques et des tests réalisés à l’abattoir, l’ESB ne constituait plus un problème de santé publique, vous ne prendriez de décision d’abandon des tests ESB qu’après en avoir parfaitement mesuré toutes les conséquences et pris toutes les précautions nécessaires. Je rappelle que l’abandon de ces tests a été avalisé par l’Agence européenne de sécurité des aliments et mis en oeuvre par dix-sept États membres, mais que l’avis rendu par l’Ansés était partagé.
Monsieur le ministre, sur mon avis favorable, la commission des finances a adopté les crédits de la sécurité alimentaire.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.
La parole est à Mme Marie-Lou Marcel, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, pour l’agriculture et l’alimentation.
Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, la politique menée par le Gouvernement en matière d’agriculture porte l’ambition d’une agriculture plus innovante, plus performante, plus soucieuse de l’environnement et plus respectueuse de ses diversités. Les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » du PLF pour l’année 2014 traduisent cette ambition.
Si le ministère de l’agriculture participe au nécessaire redressement des comptes publics, je tiens tout particulièrement à souligner l’évolution des cofinancements négociés dans le cadre de la PAC, qui pallie ces baisses de crédits. La PAC réformée, grâce à vous, monsieur le ministre, préserve les intérêts de nos agricultures. Ce sont ainsi 9,1 milliards d’euros d’aides directes que la France percevra pour la période 2014-2020, soit un montant sensiblement équivalent à celui perçu sur la période précédente. Le taux de cofinancement communautaire de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels est passé de 55 à 67,5 % et va entraîner une économie de 69 millions d’euros pour le budget national.
La part nationale de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes sera, elle, transférée dès 2014 sur le budget communautaire. Je me réjouis de la préservation des crédits dédiés à ce secteur, très fragilisé, de l’élevage avec la consolidation de ces ICHN et le maintien de la prime nationale supplémentaire à la vache allaitante. À ce sujet, je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, de votre confirmation, en commission élargie, du fait que ne serait pas remise en cause la majoration de l’ICHN pour les ovins ne pratiquant pas l’estive.
Je tiens également à souligner l’évolution très positive, vous l’avez dit tout à l’heure, de deux programmes interministériels dont les crédits ne dépendent pas de votre ministère mais qui relèvent de votre autorité. Il s’agit du programme « Enseignement supérieur et recherche agricole » dont les crédits augmentent de 1,29% et du programme « Enseignement agricole » dont les crédits augmentent, eux, de 1,5%. Ils témoignent de la reconnaissance de l’excellence de cet enseignement et de la politique menée en faveur de la formation des jeunes. Concrètement, ce seront le recrutement de 150 nouveaux enseignants, l’ouverture de trente postes d’auxiliaires de vie scolaire, celle de vingt postes dans l’enseignement supérieur et la revalorisation des bourses attribuées sur critères sociaux.
Ce budget marque aussi un pas important pour la compétitivité de notre agriculture avec le maintien du dispositif d’exonération des charges sociales en faveur des travailleurs occasionnels, prorogé en 2014, et la montée en puissance du CICE qui allège le coût du travail. Cela représentera 1,3 milliard d’euros d’économie pour les filières agricoles, agroalimentaires et forestières.
Je veux saluer également la priorité donnée aux mesures agro-environnementales avec des crédits en hausse de 15 millions d’euros, la prolongation des contrats de prime herbagère, et la revalorisation de 45 % du fonds Avenir bio. Ce budget conforte également les dispositifs pour l’installation des jeunes agriculteurs. Il fait écho aux mesures annoncées à Cournon par le Président de la République, relatives à un plan pour l’adaptation des exploitations, qui concernera prioritairement les bâtiments d’élevage et sera doté d’un fonds de modernisation pouvant atteindre 200 millions d’euros. Pouvez-vous me dire, monsieur le ministre, si ce fonds est exclusivement dédié au plan de modernisation des bâtiments d’élevage ou s’il englobe d’autres dispositifs ?
Je salue également le maintien des mesures de maîtrise des risques en matière de sécurité alimentaire dans la lignée des dispositions du PLF pour l’année 2013.
Enfin, je tiens à souligner l’engagement du Gouvernement en faveur de l’Office national des forêts qui a tant souffert précédemment. Celui-ci se voit doté de 30 millions d’euros supplémentaires.
Anticipant sur le projet de loi d’avenir de l’agriculture, vous avez également répondu, monsieur le ministre, à l’inquiétude des éleveurs et des vétérinaires en revenant sur le découplage prescription-ordonnance. En effet, la délivrance de médicaments par le vétérinaire est la suite logique des soins à donner. Cette délivrance par le praticien reste la meilleure garantie du suivi thérapeutique.
Monsieur le ministre, le budget que vous présentez est un budget offensif qui prépare notre agriculture pour demain et qui renforce les dispositifs en faveur des agriculteurs situés en zones défavorisées. Je connais bien leur situation, leur souffrance et aussi leurs attentes. Ce budget témoigne de votre engagement à leurs côtés pour une agriculture résolument tournée vers l’avenir. C’est pourquoi j’émets, au nom de la commission des affaires économiques, un avis favorable pour les crédits des programmes 154, 206 et 215 et j’invite l’ensemble de mes collègues à les voter.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.
La parole est à M. André Chassaigne, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour la forêt.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la forêt française est la troisième d’Europe par sa superficie. De plus, elle présente une variété d’essences et une qualité d’entretien remarquables.
Ses fonctions sont multiples. À sa fonction patrimoniale traditionnelle s’est ajoutée la prévention du réchauffement climatique. Sa fonction de préservation de la biodiversité est aussi reconnue. La forêt est de plus en plus un fournisseur essentiel de biomasse, dont les usages iront croissant dans les prochaines années. Par ailleurs, la forêt assure une fonction économique cruciale pour l’emploi et la croissance, ainsi que pour la vie de nos territoires. De l’entretien de la forêt et de son exploitation dépend une filière industrielle entière.
Malgré cette richesse aux multiples facettes, la filière bois connaît aujourd’hui une situation particulièrement difficile. D’autres facteurs expliquent cela. La dispersion des parcelles et l’insuffisance des investissements dans l’industrie de transformation ont pour résultat une faible mobilisation de nos ressources en bois et un déficit croissant du solde extérieur de la filière. Le bois est aujourd’hui le deuxième poste le plus déficitaire de notre commerce extérieur. Cette situation est préoccupante, et difficilement acceptable au vu de la très grande qualité de notre patrimoine forestier.
Il faut donc saluer l’effort significatif dont témoigne le projet de budget qui nous est proposé. Malgré la force des contraintes financières, le Gouvernement propose de renforcer les crédits affectés au programme « Forêt ». J’y vois un signe positif, le signe d’une prise de conscience. Le rôle fondamental que jouent nos forêts tant sur le plan écologique qu’en matière économique sera plus reconnu.
Dans le rapport que je vous ai soumis, j’ai souligné plus particulièrement deux éléments de ce programme, qui témoignent de cet engagement renforcé.
Tout d’abord, la dotation de l’Office national des forêts augmente de 30 millions d’euros. Cette augmentation s’imposait, dans une conjoncture difficile marquée depuis plusieurs années par des suppressions de postes et une situation sociale tendue.
Le deuxième élément important de ce budget est la création d’un levier financier nouveau en faveur de l’exploitation notre forêt, le Fonds stratégique de la forêt et du bois. Depuis la disparition du Fonds forestier national en 2000, cette filière ne disposait plus d’un véhicule unique pour canaliser le soutien public à l’exploitation forestière. De plus, ce nouveau fonds pour la forêt et le bois s’inscrit dans une démarche globale visant à favoriser à la fois l’exploitation raisonnée et durable de la forêt et sa valorisation économique.
Ce projet de budget représente une avancée. J’invite donc mes collègues à l’adopter.
Certes, des questions restent posées, comme le volume des exportations de matières premières liées à la filière bois, dans un contexte où le déficit de notre commerce extérieur atteint des proportions préoccupantes. La filière bois est, à cet égard, dans une position étonnante. Nous disposons là d’une matière première remarquable, que nous peinons à valoriser sur notre territoire. En conséquence, nous l’exportons en quantités croissantes. C’est un paradoxe, car la filière bois pourrait au contraire apporter une contribution décisive à la résorption de notre déficit commercial.
Aussi faut-il se féliciter que le Gouvernement et les acteurs de la filière aient entrepris de prendre ce problème à bras-le-corps. Ils ont lancé une politique ambitieuse pour notre forêt et notre industrie du bois. Cette volonté nouvelle, relayée par des initiatives concrètes, exige bien évidemment d’être suivie attentivement par notre assemblée. Une autre interrogation porte sur la création du Fonds stratégique de la forêt et du bois. Son financement paraît en effet bien limité au regard des enjeux actuels. Certes, comme dans bien d’autres domaines, c’est le résultat des contraintes imposées aux finances publiques. La réduction non négligeable du budget de fonctionnement de votre ministère en témoigne également, monsieur le ministre.
La création du Fonds a donc conduit à réaliser des arbitrages au sein du programme « Forêt ». Une partie de ses recettes provient ainsi du redéploiement des crédits consacrés aux plans pluriannuels régionaux de développement forestier, les PPRDF. Je rappelle que ces plans pluriannuels, instaurés en 2010, sont pour la plupart opérationnels depuis 2012, pour une durée de cinq ans. Ils ont pour objectif d’analyser, dans chaque région, les raisons de l’insuffisance de l’exploitation de certains massifs, et de définir des actions pour y remédier. De nombreux plans pluriannuels ont été engagés dans les massifs identifiés comme prioritaires, et aboutissent à des résultats tangibles. Comment les actions en cours pourront-elles se poursuivre ? Les inquiétudes sont vives dans nos massifs forestiers. Comment pourrons-nous pérenniser les PPRDF, pour ne pas stopper la dynamique actuelle de mobilisation supplémentaire des massifs forestiers ?
Je termine, madame la présidente, en posant une dernière question relative à l’indemnité de défrichement, dont le produit alimentera désormais le Fonds stratégique de la forêt et du bois. II est probable que le financement de ce fonds sera à terme insuffisant pour faire face aux défis de la filière. Ne peut-on craindre que la nécessité de l’alimenter constitue une incitation paradoxale au défrichement ? En effet, s’il importe de renforcer la mobilisation de notre bois, celle-ci ne doit pas se faire au détriment de la ressource forestière elle-même.
La commission a adopté les crédits du programme « Forêt », auxquels j’ai donné un avis favorable, comme il se devait.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.
Nous en venons aux porte-parole des groupes.
La parole est à M. Antoine Herth, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame et messieurs les rapporteurs, chers collègues, ce secteur ministériel – la mission « Agriculture, alimentation » – contribue plus que d’autres à l’effort de réduction du déficit public. Elle représentait 3,47 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2012 et 3,10 milliards d’euros en 2013 ; 3 milliards d’euros lui sont consacrés dans ce budget pour 2014, et la perspective pour 2015 est de 2,92 milliards d’euros.
En deux ans, votre budget s’est érodé de 13.5 %. Vous êtes donc le bon élève de la rigueur budgétaire, mais cela n’émeut visiblement personne. Les agriculteurs français sont bien patients, alors que bon nombre de nos concitoyens n’accepteraient même pas l’idée d’un début de commencement de baisse d’un budget de l’État qui les concernerait. Mais il est vrai que les paysans sont plus préoccupés par l’écotaxe poids lourds, par l’effondrement de pans entier du secteur agroalimentaire, par la persistance d’écarts importants de compétitivité au sein même de l’Union européenne et par l’absence de réel choc de simplification que par le fonctionnement de leur ministère de tutelle.
Là où je salue la performance technique, monsieur le ministre, c’est dans le fait que vous promettez de trouver des marges de manoeuvre grâce à l’allocation de crédits européens : comme le souligne le rapporteur spécial, Charles de Courson, l’essentiel de votre budget se trouve en dehors ! Il s’agit donc d’une performance technique, mais les parlementaires ici réunis ne peuvent que ressentir un certain malaise. En effet, le budget que vous défendez ce soir est probablement sincère mais absolument incomplet. Rien dans le bleu budgétaire ne précise la future architecture financière – comprenant des crédits nationaux et des crédits européens – que vous évoquez verbalement. Jusqu’à quel point devons-nous croire vos propos alors que les modalités d’allocations sont encore en négociation, que ce soit à Bruxelles, avec les régions, ou avec les organisations professionnelles agricoles.
Tout se passe comme si le débat avait surtout lieu en dehors de ces murs, comme si la représentation nationale n’était pas maîtresse des choix budgétaires. Ce n’est pas, à mon sens, de la bonne gouvernance. Les anciens parlementaires connaissaient le budget annexe des prestations sociales agricoles, ou BAPSA ; tout semble indiquer que nous sommes en face d’une sorte de budget annexe de la politique agricole commune.
Monsieur le ministre, je ne vous demanderai pas, comme je l’ai fait en commission, de commenter les indicateurs de performance, qui n’ont finalement qu’une importance limitée. Non, je vous demande de nous fournir enfin des documents de travail fiables, qui permettent aux parlementaires de se prononcer en connaissance de cause. Par exemple, comment comptez-vous financer une future assurance climatique ? À ce stade, nous devons nous contenter de déclarations de principe. C’est insuffisant.
Enfin, certaines mesures budgétaires anticipent sur la loi d’avenir pour l’agriculture qui a été présentée aujourd’hui en Conseil des ministres. Là encore, vous demandez un blanc-seing à l’Assemblée nationale, alors qu’elle a le pouvoir d’amender votre texte, voire même de ne pas le voter.
Vous comprendrez donc que face à cette opacité budgétaire – dont vous portez la responsabilité « par action ou par omission » comme on disait autrefois – le groupe UMP ne pourra pas soutenir les crédits de l’agriculture pour 2014.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. Yannick Favennec, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, l’ampleur des difficultés qui touchent nos exploitations agricoles et la disparité des revenus de nos agriculteurs nécessitent une mobilisation sans faille du Gouvernement, tant sur le plan national qu’au niveau européen. Cette mobilisation prend un sens particulier en cette année charnière pour l’avenir de notre agriculture, avec la déclinaison de la PAC sur la période 2014-2020 et le projet de loi d’avenir pour l’agriculture qui doit redonner des perspectives à notre agriculture et à nos agriculteurs.
Malheureusement, monsieur le ministre, le budget que nous examinons aujourd’hui ne correspond pas à cette ambition affichée. Le groupe UDI soutient l’indispensable effort de réduction de nos dépenses publiques, mais il déplore la baisse des crédits de l’État destinés à la mission « Agriculture ». Hors contribution de l’État au compte d’affectation spéciale « Pensions », les crédits de cette mission reculent de 10,2 % en autorisations d’engagement et de 5,1 % en crédits de paiement. Vous justifiez ces réductions par l’effet de la PAC sur le budget de l’État et notamment par l’évolution du taux de cofinancement du développement rural, mais nous ne pouvons pas croire qu’une telle baisse des financements publics, notamment en matière de développement rural, n’aura pas de conséquences sur le quotidien de nos exploitations agricoles.
Cette baisse des crédits d’intervention traduit notamment le choix opéré par le Gouvernement de distinguer les ministères prioritaires et les ministères non prioritaires. Votre ministère ne fait malheureusement pas partie de la première catégorie, monsieur le ministre : nous ne pouvons que le déplorer.
À l’heure où les questions liées à l’attractivité des métiers agricoles et à la modernisation des exploitations se posent avec force, la priorité de cette mission devrait être de favoriser l’installation des jeunes et le renouvellement indispensable de nos exploitations. Il y va de l’avenir de notre agriculture, puisque c’est de sa pérennité qu’il s’agit.
Ce budget traduit un effort en faveur du maintien de l’emploi et de l’activité agricole sur l’ensemble des territoires. Nous nous en félicitons, mais cela reste insuffisant. Nous souhaiterions que cette ambition soit réaffirmée à l’occasion de l’examen de la loi d’avenir pour l’agriculture, que nous examinerons prochainement et que vous avez présentée en conseil des ministres ce matin.
Monsieur le ministre, j’évoquerai également l’avenir de l’élevage et des éleveurs, qui peinent à vivre décemment de leur activité. J’en sais quelque chose, moi qui suis l’élu d’un département d’élevage que vous connaissez : la Mayenne. Nos éleveurs ne vous demandent pas d’être mis sous perfusion. Ils veulent simplement que vous preniez en compte leurs difficultés. Dans ce domaine, l’ambition affichée par le Président de la République à Cournon doit être prolongée par votre action.
En ce sens, l’augmentation de 15 % de l’indemnité compensatoire de handicap naturel constitue un signal positif, mais elle doit s’accompagner de mesures fortes en faveur de la compétitivité de nos exploitations. Au groupe UDI, nous sommes convaincus que cette compétitivité constitue l’enjeu essentiel pour permettre à nos exploitants de lutter à armes égales avec nos principaux concurrents dans la compétition internationale. Cela passe par une baisse immédiate des charges qui pèsent lourdement sur leur activité, à l’image de la baisse du coût de travail que nous avions obtenu sur les bas salaires des travailleurs permanents. Nous regrettons que cette mesure n’ait jamais été mise en oeuvre.
Il nous apparaît au minimum indispensable que les coopératives puissent bénéficier du crédit d’impôt compétitivité emploi. Le groupe UDI compte sur votre mobilisation, aux côtés de votre collègue ministre de l’économie, auprès de la Commission européenne. Nous souhaitons connaître votre plan B en cas d’échec des négociations.
Je vous demande également d’être vigilant au sujet de la profusion de normes – de l’hystérie normative, allais-je dire. Ces normes, notamment environnementales, sont aujourd’hui perçues comme autant de freins à l’activité.
Elles découragent nos exploitants, qui ont déjà fourni d’immenses efforts dans ce domaine, comme vous le savez.
Il nous apparaît opportun et urgent d’engager une concertation étroite entre les services du ministère de l’écologie, ceux du ministère de l’agriculture, et l’ensemble des professionnels du secteur. De cette manière, un dialogue apaisé pourrait avoir lieu afin d’aboutir à une réglementation conciliant l’agriculture de production et le respect de l’environnement.
Enfin, monsieur le ministre, le groupe UDI appelle votre attention sur le niveau des retraites agricoles. Un effort supplémentaire doit être accompli pour instaurer un socle minimal, à hauteur du montant actuel du minimum vieillesse, soit 787 euros par mois. L’objectif de 85 % du SMIC doit être atteint d’ici la fin de cette législature.
En conclusion, ce budget est globalement décevant. Après dix-huit mois très difficiles pour l’agriculture, qui n’ont vu aucune mesure ambitieuse émaner du Gouvernement, nous attendions un budget plus volontaire, à travers un renforcement de la compétitivité des exploitations par une baisse directe des charges, une politique forte de soutien à l’installation et au renouvellement des exploitations, et une politique de solidarité à l’égard des agriculteurs en difficulté.
Pour ces différentes raisons, le groupe UDI votera contre les crédits de la mission « Agriculture, agroalimentaire, forêt et affaires rurales ».
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires économiques, madame et messieurs les rapporteurs, nous nous apprêtons à adopter le nouveau budget pour l’agriculture, l’alimentation, la forêt et les affaires rurales. On peut dire que c’est un budget dans la continuité, ou encore un budget qui n’est pas dans la rupture.
Pour l’agriculture, 2014 sera une année charnière. Outre la mise en oeuvre de la politique agricole commune, le projet de loi d’avenir pour l’agriculture présenté ce matin en conseil des ministres sera discuté au Parlement. De nombreux plans ont déjà été adoptés : plans de filières, plan « Ambition bio », plan méthanisation, plan abeilles… Pourtant, on peine à voir un réel changement dans la répartition du budget, en faveur d’une autre agriculture. En témoigne le rejet total par notre assemblée, en première partie du projet de loi de finances, des propositions des écologistes en matière de fiscalité environnementale sur l’agriculture. Nous proposions des mesures de bon sens comme l’introduction des engrais minéraux dans la taxe sur les pollutions diffuses, ou encore l’augmentation de la taxe applicable à la vente de terrains agricoles devenus constructibles, propositions qui étaient en adéquation avec les préconisations du Conseil d’État et du Commissariat général à la prospective.
De nombreuses niches fiscales polluantes persistent et sont importantes compte tenu du poids de notre budget. On s’entête à verser 205 millions d’euros pour les agrocarburants et 2 milliards d’euros pour le taux réduit de la taxe intérieure de consommation sur le gazole. Ces 2,205 milliards d’euros auraient été plus utiles si nous les avions consacrés à la diffusion de méthodes économes en intrants ou au soutien à l’installation d’agriculteurs biologiques sur des bassins de captage d’eau, comme l’a préconisé le Président de la République lors de la clôture de la conférence environnementale. Si le budget doit s’inscrire dans un temps long, il est aussi un puissant levier pour soutenir les initiatives gouvernementales et devrait être le reflet de la politique du Gouvernement.
Je souhaite évoquer brièvement trois points notables concernant le budget présenté ce soir. Les deux premiers sont positifs, le troisième l’est un peu moins.
Ma première remarque concerne les mesures de soutien à l’agriculture biologique. Je note avec satisfaction l’augmentation des crédits consacrés au Fonds Avenir Bio, passant de 2,7 millions à 4 millions d’euros pour 2014. Ces crédits supplémentaires permettront de donner un coup de pouce à la structuration des filières et d’offrir des débouchés aux agriculteurs bio. Il est urgent de redonner envie aux porteurs de projets de se convertir au bio. En effet, ces derniers mois, les conversions à l’agriculture biologique ont très sensiblement ralenti.
Le deuxième point que je veux aborder et qui me semble essentiel, puisqu’il est l’objet de l’unique amendement du groupe écologiste, est celui de la répartition du compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural », le CASDAR, que nous étudions également. Je veux aussi évoquer plus spécifiquement le faible soutien aux actions de développement des organisations agricoles et paysannes qui promeuvent notamment l’agro-écologie.
Les organismes nationaux à vocation agricole et rurale, ou ONVAR, interviennent, depuis plus de trente ans pour certains, en accompagnement des agriculteurs sur des domaines aussi variés que l’installation – je rappelle qu’une installation sur deux a lieu en dehors du cadre de la dotation d’installation aux jeunes agriculteurs –, l’évolution des pratiques, la conversion au bio, le soutien au montage de dossiers financiers, la constitution de filières, ou encore les échanges de bonnes pratiques. Leur expertise en la matière n’est plus à démontrer : elle doit maintenant être reconnue comme telle et soutenue par les pouvoirs publics.
Les réseaux dont je vous parle sont asphyxiés financièrement ; ils disposent pourtant de plus de 700 salariés sur le terrain, présents dans toutes les régions, et réalisent un travail de service public même s’ils n’en ont pas la mission comme les chambres d’agriculture. Ces dernières emploient 7 000 salariés et devront adapter leurs modèles d’accompagnement. Chers collègues, sachez que dans le CASDAR que nous aurons à voter, 40 millions d’euros reviennent aux chambres d’agriculture, et seulement 1 million à tous ces autres réseaux. Comment assurer la diversité des agricultures si l’on n’assure pas la diversité des organisations qui les construisent ni une juste répartition des financements ?
Enfin, le programme « Sécurité et qualité sanitaire de l’alimentation », dont mon collègue écologiste Éric Alauzet est rapporteur pour avis, est surveillé de près par tous ceux qui ont suivi l’affaire de la viande de cheval ou ont observé les défaillances dans les évaluations de produits phytosanitaires par la direction générale de l’alimentation et l’ANSES. Je constate que les crédits affectés à ce programme ne diminuent pas, ce qui est salutaire.
Pour ces raisons, et confiant dans les choix certes très progressifs mais courageux que fera le Gouvernement à l’avenir, notamment dans le cadre du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, le groupe écologiste votera en faveur de ce budget.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires économiques, madame et messieurs les rapporteurs, chers collègues, d’un point de vue général, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste note que le contexte budgétaire ne sera pas sans conséquence, en 2014, sur les capacités d’intervention de l’État et des collectivités territoriales en faveur de l’agriculture.
L’ensemble des crédits alloués à l’agriculture dans ce PLF – y compris ceux de l’enseignement agricole – s’élèvent à 4,9 milliards d’euros. Hors charge des retraites et à périmètre constant, le budget du ministère connaît donc une baisse de 3,2 % en crédits de paiement par rapport à 2013.
Ce budget ne traduit pas pleinement l’ambition pourtant affichée par le Président de la République lors du sommet de l’élevage le 2 octobre dernier. Nombre d’agriculteurs que j’ai pu rencontrer déplorent cet état de fait et le transfert de financements via le budget communautaire. En réalité, dans le budget de la PAC sur la période 2014-2020, les retours vers la France seront en baisse : la France percevra en moyenne 9,1 milliards d’euros par an sur la période 2014-2020 au lieu de 9,3 milliards d’euros sur la période 2007-2013, soit une diminution de 2 %.
S’agissant plus particulièrement des crédits relatifs au développement agricole et rural, le groupe RRDP ne peut que saluer l’augmentation significative des crédits en 2014, que ce soit pour le programme 775 « Développement et transfert en agriculture » ou pour le programme 776 « Recherche appliquée et innovation en agriculture ».
Nous notons, monsieur le ministre, votre politique volontariste visant à assurer la diffusion auprès des agriculteurs des progrès techniques et des innovations, en vous appuyant sur les structures de conseil et notamment les chambres d’agriculture. À ce sujet, il est important que ces structures se voient allouer les moyens nécessaires à leurs missions.
Évoquant la question des moyens, permettez-moi une digression. Ce PLF pour 2014 prévoit la stabilité de la taxe additionnelle à la taxe sur le foncier non bâti. Plusieurs missions de service public, dont celle, capitale, de l’installation-transmission en agriculture, ont été transférées par l’État aux chambres d’agriculture. À l’approche de la mise en oeuvre de la nouvelle PAC, j’appelle votre attention, monsieur le ministre, sur le fait que la stabilité de la taxe risque d’accroître les difficultés rencontrées par ces établissements consulaires pour conduire leurs missions.
Les crédits des programmes 775 et 776 permettront de conforter le développement et la diffusion de systèmes de production innovants et performants, d’un point de vue économique, environnemental et sanitaire, s’inscrivant ainsi parfaitement dans le cadre de votre projet agro-écologique pour la France. Cette ambition, nous la partageons et nous la saluons. Chacun ici mesure combien la prise en compte des enjeux liés au développement durable est essentielle à la viabilité économique à moyen et long termes des exploitations agricoles, donc à la vitalité de nos territoires.
Évoquant la question de l’écologie, permettez-moi une nouvelle digression au sujet de l’écotaxe. Le bien-fondé de cette mesure est incontestable. Toutefois, nous savons combien les agriculteurs ont toutes les difficultés à répercuter la hausse de leurs charges vers l’aval ; aussi, il est à craindre que ce soit le premier stade des filières, et donc les producteurs, qui supportent cette taxe. Un tel dispositif doit prévoir, dans sa mise en oeuvre, d’éviter d’ajouter une distorsion de concurrence supplémentaire par rapport aux produits importés. Aussi, nous souhaiterions que ces paramètres puissent être pris en considération.
Je tiens à saluer l’ambition du programme « Recherche appliquée et innovation en agriculture », qui entend favoriser la mise en oeuvre d’actions de recherche appliquée, d’études et d’expérimentations. Ce programme est un soutien d’importance à l’innovation et à sa diffusion, à travers notamment les appels à projets et les programmes pluriannuels mis en oeuvre par les instituts techniques agricoles.
Ceci m’amène à évoquer les programmes pluriannuels régionaux de développement forestier, les PPRDF, qui rapprochent les acteurs forestiers et permettent de coordonner l’ensemble des actions de développement de ce secteur. Les chambres d’agriculture sont impliquées dans leur mise en oeuvre. Le projet de loi d’avenir pour l’agriculture et le PLF pour 2014 modifient le fonctionnement actuel de ces PPRDF, en créant notamment un Fonds stratégique pour la forêt et le bois dont le champ d’application serait largement remanié. Les chambres d’agriculture n’étant pas citées expressément comme bénéficiaires potentiels de ce futur fonds, la poursuite des actions engagées avec le PPRDF – y compris les embauches réalisées à cette occasion – serait donc remise en cause : j’en appelle à votre vigilance sur ce point.
Voici donc, monsieur le ministre, les quelques remarques que je souhaitais formuler dans cet hémicycle : j’espère qu’elles seront étudiées avec toute la bienveillance que notre secteur agricole mérite. Dans ces conditions, le groupe RRDP ne pourra qu’apporter son soutien à ce budget.
Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et écologiste.
La parole est à M. Bruno Nestor Azerot, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame et messieurs les rapporteurs, chers collègues, les arbitrages européens sur la future PAC 2014-2020 sont désormais connus. Les principaux choix politiques nationaux découlant de cet accord européen ont été présentés par le Président de la République. Le projet de loi d’avenir pour l’agriculture sera également présenté très prochainement devant le Parlement. L’examen de cette mission budgétaire se situe donc à un moment charnière pour l’agriculture de notre pays, mais plus globalement pour l’agriculture européenne.
Si l’on peut regretter que les crédits de cette mission n’échappent pas aux figures imposées aux dépenses publiques, avec une baisse globale de 151 millions d’euros en crédits de paiement – soit près de 4,5 % – et de plus de 300 millions d’euros en autorisations d’engagement, certains arbitrages budgétaires dénotent une volonté de réorientation salutaire des priorités de cette mission.
Vous l’avez par ailleurs répété, monsieur le ministre, lors de l’examen des crédits de cette mission en commission élargie : cette baisse des crédits sur le papier s’opère en contrepartie d’un retour non négligeable de crédits de la politique agricole commune, garantissant selon vous un maintien du volume d’aides versées aux agriculteurs. Pour notre part, nous n’irons pas jusqu’à affirmer, comme vous le faites, que ce transfert s’effectue sans toucher aux soutiens que reçoivent les acteurs de ce secteur, puisque les moyens humains du ministère sont en revanche bien touchés et que le service rendu aux agriculteurs ne peut faire abstraction de ce contact essentiel sur le terrain.
Nous notons avec satisfaction la hausse substantielle des crédits de paiement de plusieurs actions des programmes 154 et 206. Il s’agit notamment des moyens consacrés à l’amélioration de la politique d’aide à l’installation. Alors que la France a perdu 25 % de ses exploitations agricoles en seulement dix ans, c’est effectivement une priorité pour tous nos territoires.
Dans le même sens, nous notons avec satisfaction la très légère progression des crédits de paiement des actions 3 « Prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires » et 6 « Mise en oeuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation » du programme 206.
Enfin, nous partageons l’avis du rapporteur pour avis concernant le programme 149 consacré à la forêt.
Sourires.
Les 23 millions d’euros supplémentaires en crédits de paiement constituent également un signal positif, après des années de disette pour la forêt – n’est-ce pas, monsieur le président Chassaigne ?
Ce soutien nouveau coïncide d’ailleurs avec une prise de conscience de la contribution que peut apporter la filière bois au redressement productif et à la balance commerciale de notre pays. La création d’un Fonds stratégique pour la forêt et le bois – innovation de ce budget – et l’élaboration d’un plan national d’action pour l’avenir des industries de transformation du bois doivent marquer un engagement durable de l’État dans ce secteur trop longtemps laissé sur la touche.
Nous espérons que ce fonds s’appliquera également outre-mer.
Enfin, monsieur le ministre, et vous comprendrez qu’en tant que parlementaire d’outre-mer, je focalise sur ce sujet, le volet outre-mer du projet de loi d’avenir de l’agriculture nous inquiète au plus haut point. Nous vous avions demandé de prendre l’initiative d’une table ronde avec les représentants des filières traditionnelles et les autres sur la diversification. Nous avons craint qu’on déshabille Paul pour habiller Jacques et que finalement les deux soient tout nus.
Vous n’avez pas répondu à la représentation nationale. Et finalement c’est ce qui risque malheureusement de se passer, notamment si vous persévérez à vouloir ponctionner des filières traditionnelles qui ont déjà du mal à exister et sont les piliers de notre agriculture, si vous persistez aussi à rendre inopérant le POSEI, dont la gestion doit rester au niveau de l’ODEADOM pour être efficace. Vous ne nous avez pas vraiment écoutés, mais le rapport Berthelot-Gaymard, lui, nous donne justement raison sur ce point.
Dans un souci constructif, nous voudrions vous proposer, monsieur le ministre, de réétudier sérieusement notamment l’article 34 qui est mortifère pour nous, en s’inspirant des recommandations du rapport Berthelot.
Mais c’est vrai que tout est dans la nuance ! La territorialisation du pilotage de l’agriculture est peut-être légitime, mais la gestion des crédits, la structuration des filières doivent se situer à un niveau de responsabilité globale comme l’est celui de l’ODEADOM où les structures régionales, les professionnels, sont aussi présents d’ailleurs ! En effet, le risque est grand de tomber dans un retour au clientélisme et à l’impossibilité structurelle de moderniser notre agriculture.
Monsieur le ministre, comprenez que ce qui est bon pour la France hexagonale peut ne pas l’être pour l’outre-mer. Bref, si nous voulons soutenir votre démarche, nous restons très inquiets pour le volet outre-mer où, visiblement, la mesure fine des réalités n’a pas été perçue.
Cela dit, monsieur le ministre, notre appréciation générale des crédits de la mission « Agriculture » tiendra compte de la perspective budgétaire globale de cette mission, qui traduit des ambitions nouvelles sur des actions clés. C’est pourquoi nous donnerons un avis favorable pour ce budget.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.
La parole est à M. Christian Franqueville, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » du projet de loi de finances pour 2014. En tant que porte-parole du groupe SRC, je tiens d’abord à saluer le courage et le sérieux du Gouvernement qui, avec la réduction des dépenses de 15 milliards d’euros, place pour la première fois la France sur la voie du redressement des comptes publics.
C’est dans ce contexte de diminution de la dépense publique, et malgré le coût exorbitant du remboursement de la dette accumulée par nos prédécesseurs, que le Gouvernement exprime clairement l’importance qu’il attache à la compétitivité économique de l’agriculture française et des filières agroalimentaires et forestières.
Le constat est lourd : en dix ans, sous la précédente majorité, la France est passée de la première à la troisième place des pays européens en termes d’exportations agricoles et agroalimentaires. Le secteur de l’élevage – bovin, caprin, ovin et avicole – souvent par manque d’anticipation, comme c’est le cas dans la branche volaille, est confronté à de graves difficultés, à l’instar aussi de la filière laitière, qui a perdu 37 % de ses exploitants entre 2000 et 2012. La baisse du prix du lait, additionnée aux lourdes contraintes pesant sur la production laitière, nous fait courir le risque d’une remise en cause de notre modèle agricole.
Dans le secteur agroalimentaire, on assiste à la disparition des petits commerces face aux grandes et moyennes surfaces qui, non contentes de s’ériger en monopole dans les circuits de vente, organisent en parallèle une véritable mise sous tutelle des entreprises de transformation en leur imposant leurs prix.
Dès sa mise en place, le Gouvernement a fait le choix d’une agriculture forte et le ministre Stéphane Le Foll a réussi à préserver nos intérêts au terme d’une longue et fructueuse négociation dans le cadre de la réforme de la PAC.
Avec un total de près de 5 milliards d’euros, le budget du ministère connaît une baisse d’à peine 3,2 %, largement compensée par l’évolution des taux de cofinancement accordés – arrachés en fait par le ministre de l’agriculture – par l’Union européenne.
Les orientations de ce budget visent donc à redonner de la compétitivité aux entreprises agricoles et agroalimentaires, avec pour seul but la création de richesses et d’emplois.
Cette compétitivité, nous la savons indispensable, mais elle ne peut pour autant se faire au détriment de nos ressources naturelles, et c’est dans ce sens que le budget prévoit une augmentation de près de 15 millions d’euros des crédits consacrés aux mesures agro-environnementales. De la même manière, notre sécurité alimentaire fait l’objet d’une attention particulière puisque les effectifs des agents de contrôle de la sécurité sanitaire sont maintenus.
Pour garantir l’avenir de notre modèle agricole, il est indispensable d’envoyer un message fort en direction de la jeunesse rurale, et c’est en ce sens qu’en amont des filières, l’enseignement technique et supérieur sera davantage soutenu, avec la création de postes supplémentaires.
En dix ans, le nombre d’exploitations agricoles a diminué de 25 %, et c’est pour répondre à l’enjeu majeur du renouvellement des générations que ce PLF prévoit de soutenir des dispositifs favorisant l’installation et la transmission, tels que la dotation aux jeunes agriculteurs, les prêts à taux réduits ou encore le plan de modernisation des bâtiments d’élevage.
Enfin, il convient de relever les efforts menés en direction de la forêt. Il est en effet urgent d’inverser la tendance observée qui voit les bois de nos forêts partir pour revenir sous forme de produits manufacturés. Rapatrier la valeur ajoutée se fera par la mise en oeuvre d’une véritable politique en faveur de la forêt-bois visant à moderniser nos entreprises de transformation, notamment au moyen du CICE et du soutien aux investissements.
Pour conclure, je voudrais rappeler l’effort consenti à hauteur de 30 millions d’euros supplémentaires en direction de l’ONF, afin de le conforter dans son rôle primordial de préservation et de valorisation de nos forêts publiques. C’est pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, que le groupe SRC soutiendra ce projet de budget.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Nous en arrivons aux questions. Je rappelle que la durée des questions et des réponses est fixée à deux minutes.
La parole est à M. Martial Saddier, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre, je souhaite connaître votre position sur la majoration de la valeur locative des terrains, votée à l’issue du PLF 2013, qui est inacceptable sur le plan fiscal pour les propriétaires fonciers.
Cette majoration est très pénalisante. On oublie que parmi les propriétaires fonciers, il y a les agriculteurs et que ces terrains, certes constructibles, avaient, pour certains, vocation à rester terrain agricole pendant plusieurs décennies. La mesure est particulièrement catastrophique pour les zones de montagne et les zones où la loi littorale s’applique. Pouvons-nous compter sur votre soutien pour revenir au dispositif précédent ?
Puisque nous sommes sortis de la négociation de la PAC pour mettre en place la boîte à outils au niveau national, je voudrais dire quelques mots sur l’agriculture de montagne et sur la distribution du deuxième pilier. Les agriculteurs de montagne sont favorables au plafonnement des aides, mais ils sont très inquiets sur la pondération proposée, qui les pénaliserait à travers la prise en charge des zones pastorales. Je souhaite vous interroger sur le maintien de l’aide couplée pour la production laitière. L’enveloppe de 45 millions en plus de l’aide nouvelle sera-t-elle maintenue ? André Chassaigne l’a très bien dit, les PPRDF sont une véritable avancée pour la forêt. Ils ont été mis en place il y a deux ans. Des inquiétudes se font jour, notamment du côté des chambres d’agriculture, sur la pérennité des financements de ces dispositifs. Pouvez-vous nous rassurer ?
S’agissant de la taxe sur le foncier non bâti, ou TNFB, ma position est très claire : je suis contre cette sur-fiscalisation. Un amendement du Gouvernement proposera une exonération. Nous pouvons donc être d’accord.
S’agissant des indemnités compensatoires de handicaps naturels ou du pastoralisme, les revalorisations des ICHN ainsi que les engagements sur le pastoralisme – notamment la prime couplée pour le lait de montagne – seront maintenus. Notre objectif est de renforcer l’agriculture dans les zones à handicaps naturels.
Quant aux PPRDF – je répondrai là à plusieurs intervenants – ce sont les forestiers qui, lors du débat sur la question forestière, ont souhaité la création d’un fonds et avoir la maîtrise des objectifs. Il n’est pas question de pénaliser ou de montrer du doigt les chambres d’agriculture. Suite à une phase de transition prévue en 2014, l’objectif est de créer un plan national pour la forêt qui se déclinera en plans régionaux qui prendront la suite des PPRDF.
Le débat, je le répète, nous l’avons eu avec des professionnels de la forêt. Et c’est à leur demande que les centimes forestiers sont reversés par les chambres d’agriculture. De même, c’est dans le cadre de la discussion que nous avons engagée avec eux que 3,7 millions d’euros issus de l’abaissement du plafond de la taxe additionnelle à la TFNB permettront, dans le cadre du fonds que nous avons créé, de mettre en oeuvre le plan national décliné au niveau régional. Il n’y a aucun problème avec les chambres d’agriculture et la discussion a eu lieu avec les professionnels forestiers, aussi bien d’ailleurs dans le domaine public que dans le domaine privé.
La parole est à Mme Nicole Ameline, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Nous l’avons tous compris, la transition ouverte par la réforme de la PAC avec la fin des quotas laitiers, le redéploiement des aides est l’occasion de mettre en place un modèle durable et soutenable pour l’agriculture. Je voudrais appeler votre attention particulièrement sur l’élevage. Les agriculteurs laitiers sont les plus vulnérables, car ils sont confrontés à toutes les contraintes, à la volatilité des prix, aux flux erratiques des coûts des matières premières. Nous devons leur apporter une sécurité économique beaucoup plus fiable.
Merci, cher collègue. Personne ne peut contester que c’est l’un des secteurs clés de notre souveraineté nationale comme de notre indépendance énergétique, si je puis dire, en termes d’alimentation.
S’agissant des agriculteurs qui sont dans les zones de handicaps naturels, tel le Pays d’Auge, vous indiquez qu’il y a une revalorisation de l’indemnité. Mais je souhaite vous interroger sur sa pérennité. Vous avez annoncé que les zonages seraient revus pour 2018. Il est donc très important de connaître aujourd’hui votre démarche sur ce sujet. Il me semble que vous n’avez pas mobilisé toutes les marges de manoeuvre européennes, notamment l’aide complémentaire, de l’ordre de 5 %, autorisée par Bruxelles. Or l’élevage laitier nécessite aujourd’hui la mobilisation globale des efforts du Gouvernement.
Vous vous êtes dit à l’instant prêt à mobiliser vos efforts. Comment allez-vous procéder pour apporter une réponse pérenne à nos agriculteurs ?
S’agissant de la production laitière, la négociation européenne a porté en particulier sur la question des aides couplées. Elles représentent aujourd’hui 10 % des aides du premier pilier de la PAC et nous avons obtenu, dans la négociation que nous avons conduite en deux étapes, de porter ce taux à 12 % puis 13 %, avec 2 % en plus au titre des aides aux protéines végétales fourragères.
Sur ces 13 %, les aides couplées existantes – aide laitière de montagne, prime nationale supplémentaire à la vache allaitante, prime ovine entre autres – représentent 12 %. Il reste donc 1 % du couplage qui peut être distribué.
Rappelons que, dans le cadre européen, les aides couplées doivent être destinées à la défense et au maintien de filières en difficulté. Il ne peut donc s’agir d’aides généralisées au lait. Des discussions sont engagées au niveau du ministère pour savoir si la part restante du couplage peut être ciblée vers les exploitations laitières.
Vous avez posé une question complémentaire sur la possibilité d’un transfert du premier vers le deuxième pilier. Dès que vous transférez, en l’occurrence vers le deuxième pilier, il y a des effets de redistribution. Nous sommes donc obligés de tenir compte des contraintes d’ensemble du premier pilier.
Vous avez posé une question globale sur la filière laitière. Dans le futur projet de loi d’avenir, des éléments ont été mis en place autour de la médiation car la question du prix est un sujet important. La loi confirmera ce que nous avons fait cette année. Ce sera une manière d’assurer un meilleur dialogue, de meilleures négociations et surtout de meilleurs prix pour les éleveurs.
Monsieur le ministre, tout comme vous, j’établirai un lien entre le projet de loi d’avenir – ou de refonte – pour l’agriculture et la déclinaison de la PAC. Vous avez beaucoup de talent pour nous présenter les choses, et je dois vous reconnaître de bonnes intentions s’agissant de l’installation voire de mesures agro-environnementales. Cependant, je pense que vous ne prenez toujours pas la mesure de la crise agricole.
N’y a-t-il pas quelque incohérence à vanter le CICE – 1,3 milliard – en laissant filer dans le même moment l’écotaxe et la taxe carbone dont on parle peu aujourd’hui ?
N’estimez-vous qu’il y a un manque d’ambition dans votre projet s’agissant de la modernisation des élevages agricoles ? Vous annoncez un montant de 30 millions d’euros. Si mes calculs sont bons, cela représente 300 000 euros par département et 200 euros par exploitation agricole.
Pour la gestion de risques et des aléas, c’est à peu près la même chose : on annonce un montant de 30 millions d’euros, ce qui représente entre 50 et 100 euros par agriculteur.
Il me semble donc qu’il vous faut faire preuve de beaucoup plus de modestie dans votre présentation. Si vous voulez faciliter l’installation des jeunes, il faudra, pour restaurer la confiance, d’abord apporter des réponses sur ces trois points vitaux.
Sur la question de l’installation, nous avons mis en place au niveau budgétaire des moyens équivalents à ceux du budget précédent avec un objectif tournant autour de 6 000 installations. Le changement qui va intervenir avec la loi d’avenir va consister à élargir l’installation aidée aux installations faites hors du cadre familial et hors du cadre réglementaire actuel.
Les Assises de l’installation ont permis de dégager le critère de l’activité minimale d’assujettissement, qui prendra en compte pour l’installation, non une surface minimale nécessaire, comme c’est le cas aujourd’hui, mais une activité minimum, c’est-à-dire la capacité qu’a un jeune à dégager des revenus.
Cette politique d’installation monte ainsi en puissance. Par ailleurs, elle est renforcée au niveau européen avec une partie du financement qui proviendra du premier pilier de la PAC, auquel s’ajoutera le financement du deuxième pilier.
Vous avez évoqué la question de la protection globale contre les risques qui vaut pour les jeunes qui s’installent comme pour l’ensemble des agriculteurs.
Le travail engagé aujourd’hui consiste très clairement à développer deux niveaux de maîtrise des risques : le Fonds des calamités, qui organise la solidarité au niveau national ; la mutualisation, qui a vocation à être étendue. Autour de 25 % des agriculteurs sont assurés. Pour renforcer la protection globale, il faudrait élargir la base des assurés. Nous nous sommes fixé comme objectif de garantir une véritable mutualisation des risques à l’échelle de la France. Une partie du budget du premier pilier de la PAC sera mobilisée pour financer cette assurance.
Monsieur le ministre, pour une fois, je ne vais pas vous parler d’argent. Au-delà des questions qui concernent le revenu agricole et les charges, il est un sujet qui préoccupe les agriculteurs au plus haut point, c’est la simplification.
Le Président de la République a évoqué il y a quelques mois un choc de simplification. Je veux vous interpeller, monsieur le ministre, à la veille d’un grand rendez-vous, pour évoquer le contenu du pacte d’avenir pour la Bretagne. Je souhaite connaître de manière précise les propositions du ministre de l’agriculture en matière de simplification et d’harmonisation s’agissant des installations classées pour la protection de l’environnement, des zones d’excédents structurels, des dépôts de permis de construire, des plans d’épandage et de manière générale de tout ce qui touche les questions environnementales.
Enfin, monsieur le ministre, je voudrais vous faire une proposition. Les agriculteurs, qui font l’objet de lourdes pressions depuis des années – qui ne sont pas liées au changement de majorité gouvernementale –, subissent des contrôles. Serait-il possible qu’ils soient considérés comme des professionnels et qu’en conséquence ils soient prévenus par courrier, quinze jours avant le contrôle, qu’il s’agisse de contrôles sanitaires, de contrôles environnementaux ou de contrôles liés aux mises aux normes ? Aujourd’hui, on débarque chez eux sans prévenir car un climat de suspicion règne.
Si l’on veut soutenir notre agriculture et nos agriculteurs, il faut retisser un lien de confiance. C’est une expérimentation que nous pourrions tenter en Bretagne. Elle ne coûte pas un centime à l’État. Je suis certain que vous allez vous montrer sensible à cette proposition, monsieur le ministre.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Monsieur le député, nous avons mené un travail sur la simplification, en particulier sur toutes les procédures relatives aux établissements classés. Une procédure d’enregistrement prendra désormais place entre la procédure de déclaration et la procédure d’autorisation. J’ai passé toute la journée de vendredi à discuter de tous ces sujets. Nous corrigerons les éléments qui ont fait l’objet de remontées dans un souci de simplification tout en gardant nos objectifs relatifs à la protection de l’environnement.
Le principal objectif de la simplification est de réduire les délais qui aujourd’hui sont extrêmement longs – et je ne parle pas même pas de la méthanisation : je sais qu’en Allemagne, vous pouvez mettre en route un projet en six mois quand en France il faut deux ans et demi à trois ans. C’est un vrai poids dans la vie des agriculteurs, je suis d’accord avec vous.
Sur la question environnementale, nous sommes aujourd’hui pris dans des logiques de normes qui s’ajoutent les unes aux autres. J’en suis parfaitement conscient. Il n’est qu’à voir que la mise en oeuvre des mesures agro-environnementales, les MAE, doit être justifiée par des coûts supplémentaires comme si l’environnement était toujours synonyme de coût. C’est cela qu’il faut changer. Nous vous ferons part de tous les travaux en cours sur les nouvelles MAE systèmes qui vont consister à donner aux agriculteurs, sur des espaces pertinents qu’ils choisiront au travers des groupements économiques environnementaux, des dispositifs pour créer leur dynamique. C’est ainsi que l’on sortira de la norme pour aller vers des objectifs économiques et environnementaux.
Quant à la proposition que vous faites en matière de contrôle, les aides étant européennes, les contrôles sont aussi européens. Nous faisons l’objet nous-mêmes de suffisamment de contrôles de la part de la commission de contrôle budgétaire européenne – je me souviens de mon expérience de député européen – pour ne pas pouvoir mettre en place, même à titre expérimental, même en Bretagne, le système que vous suggérez.
J’aimerais à mon tour souligner la dimension européenne du débat que nous avons ce soir. La réforme de la politique agricole commune devrait être finalisée le 20 novembre prochain, lors d’un vote en session plénière du Parlement européen, sans surprise, je suppose.
Cette réforme a suscité beaucoup d’attentes positives, qu’il s’agisse du soutien aux petites fermes – la surprime aux 52 premiers hectares –, du maintien et du développement de l’emploi dans les territoires ruraux ou encore de la conditionnalité des aides liées aux pratiques respectueuses de la nature et de la santé de nos concitoyens.
Comme souvent en matière européenne, elle aboutit à un compromis que d’aucuns jugent peu satisfaisants. Des renoncements ont en effet limité la réorientation des pratiques agricoles vers la préservation de l’environnement et la lutte contre le réchauffement climatique. De plus, les aides risquent de ne pas être redistribuées avec l’équité que nous appelions de nos voeux. Pouvez-vous nous rassurer à ce sujet, monsieur le ministre ?
La déclinaison de cette nouvelle PAC sera pour partie laissée à la discrétion des États. En tant qu’Européenne convaincue, je regrette cette « renationalisation » partielle de cette politique communautaire fondatrice. Mais je me félicite que la France puisse ainsi bénéficier d’une réelle marge de manoeuvre pour soutenir l’agriculture locale, paysanne, biologique, créatrice d’emplois, garante de la souveraineté alimentaire, synonyme de qualité, respectueuse du bien-être animal et des éco-systèmes.
Monsieur le ministre, vous, vous êtes volontariste dans ce domaine mais qu’en est-il des forces économiques à l’oeuvre ?
La situation actuelle, en Bretagne ou ailleurs, le prouve, il est nécessaire de lancer une réelle transition du modèle agricole et agroalimentaire français dominant. Et ce n’est certes pas l’illusoire retour aux aides à l’export qui le permettra !
La France pourrait plutôt s’appuyer sur les marges de manoeuvre du deuxième pilier pour encourager des mesures agro-environnementales fortes, soutenir l’emploi et le développement rural, irriguant ainsi tous les territoires.
Dans ce contexte, monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer comment cette nouvelle PAC pourra s’articuler avec le budget que la France consacre à l’agriculture, dans la perspective également du financement de la future loi d’avenir ?
Le lien entre l’Europe est le budget national est évident. Les encours pour l’agriculture prennent à la fois en compte ce qui est lié au budget national et ce qui provient du budget européen, lui-même constitué – et c’est peut-être un problème dont on pourrait discuter – des contributions de chacun des États.
Un encours de 9,1 milliards est aujourd’hui à la disposition de la France, avec davantage de budget lié au deuxième pilier puisque la négociation menée par le Président de la République a augmenté ce deuxième pilier. Cela nous permet d’avoir des choix budgétaires au niveau national qui anticipent ces retours et qui ajustent les aides aux agriculteurs en fonction des sommes qui relèvent du budget national et du budget européen. C’est ce qu’a expliqué en commission M. de Courson.
Quand vous augmentez la part cofinancée par l’Europe, vous pouvez baisser la part financée par le budget national.
Quand, pour le financement de la prime nationale à la vache allaitante, on passe au budget européen, on sécurise cette prime et on ne recourt plus au budget national.
Telle est donc l’approche générale et globale du lien entre budget national et budget européen.
Deuxième élément, concernant les grandes orientations : elles sont fixées à l’échelle européenne sur la question de l’environnement, avec ce que l’on appelle le verdissement de la politique agricole commune sur le premier pilier. Elles sont également engagées sur le deuxième pilier, avec les moyens supplémentaires que nous mettons en oeuvre, avec le projet global d’agro-écologie et de mesures agro-environnementales, dites MAE systèmes, qui se mettront en place.
C’est tout l’enjeu de la transition de l’agriculture, qui doit assurer à celle-ci tant sa diversité que sa capacité à valoriser tous ses potentiels. Tel est l’engagement sous-jacent à cette discussion budgétaire, ici et à l’échelle européenne au niveau de la PAC : nous devons donner tous les moyens et tous les soutiens nécessaires aux agriculteurs pour permettre une agriculture sur tout le territoire, diversifiée et prenant le virage de l’agro-écologie, c’est-à-dire de la double performance, économique et écologique.
La parole est à M. Jacques Krabal, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le ministre, selon les syndicats agricoles de mon département, des évolutions liées à la nouvelle PAC pourraient entraîner des pertes financières pour les exploitants du sud de l’Aisne, toutes productions confondues. Ainsi, si le prix du blé se maintenait à 70 euros la tonne, la rémunération des agriculteurs viendrait à baisser en moyenne de 33 % : cela ne serait pas sans conséquence sur l’emploi et sur les aspects économiques, vous vous en doutez. Quelle est votre analyse sur cette perspective ?
Par ailleurs, veiller à la préservation des zones de handicap naturel est important. Mais quelles sont les garanties que cela ne fragilise pas les zones intermédiaires rurales à dominante agricole et agroalimentaire ?
Comment la loi de finances, à travers la loi d’avenir, donne-t-elle les moyens financiers aux exploitations de polyculture et d’élevage situées en zones intermédiaires ? Vous affirmez votre volonté de renforcer la compétitivité économique de nos agriculteurs avec le développement de l’agro-écologie : comment les producteurs laitiers et les éleveurs pourront-ils effectuer cette évolution alors que ces entreprises agricoles connaissent des baisses de revenus importantes ?
Vous avez soutenu l’enseignement agricole, cela a été rappelé tout à l’heure, en créant de nouveaux postes d’enseignants, ce que nous saluons. Pour autant, il manque des agents administratifs : tel est le cas au lycée agricole de Crézancy, dans ma circonscription. Les postes administratifs pourront-ils être pourvus ?
Je terminerai enfin non par une question, mais par des remerciements, en cette journée de la bonne humeur : en effet, depuis le 23 octobre, l’État a autorisé les apports d’azote sur vignes en pente, grâce notamment à la concertation. Cela a été tout un combat ; merci, monsieur le ministre, d’avoir écouté les revendications de nos viticulteurs, dont les vignerons de Champagne, particulièrement actifs sur ce dossier.
Je vais d’abord répondre à votre conclusion – c’est en effet la journée de la bonne humeur, surtout avec un verre de champagne ! Il est vrai que nous avons tenu compte de cette idée simple consistant, là où existent des zones enherbées, à accepter l’épandage d’azote. Cette demande avait été exprimée de manière très claire par les viticulteurs…
Notamment champenois, mais d’autres également. C’est donc un élément important pour répondre à une demande qui ne l’était pas moins.
Cela étant dit, nous sommes toujours en discussion sur les questions environnementales, sur la directive « nitrates » à l’échelle européenne. Je peux vous assurer que ces discussions, source de contentieux avec l’Europe, sont extrêmement difficiles. Il existe en effet une suspicion à l’échelle européenne que nous cherchons à lever afin de nous consacrer avant tout aux objectifs et aux résultats. Il y a eu des améliorations en France, dont nous devons tenir compte ; mais en même temps, ces contraintes existent et nous devons nous mettre en conformité.
Concernant les zones intermédiaires, en particulier la zone Picardie et le sud de l’Aisne, deux débats coexistent : l’un sur les aides, l’autre sur les prix. Les prix, c’est vrai, sont aujourd’hui plus bas que par le passé – ils étaient élevés l’an dernier –, ce qui pose la question de leur volatilité ; nous n’aborderons pas ce débat ce soir, mais c’est un sujet en soi, en particulier pour ce qui concerne les céréales.
Ensuite, il y a les aides. Sur les deux critères les plus importants pour les aides à l’hectare et les fameux droits à paiement de base – les DPB – de demain, par rapport aux droits à paiement unique – les DPU – d’aujourd’hui, nous avons fait le choix d’une convergence des aides non pas à 100 %, mais à 70 %, afin d’éviter les effets trop importants de baisse. En même temps, nous avons également choisi de remonter sur les 52 premiers hectares, soit 20 % du potentiel du premier pilier, pour renforcer ces premiers hectares qui partout, quelles que soient les exploitations mais en particulier pour l’élevage, constituent des choix importants.
J’ajoute pour la Picardie – nous répondrons également à toutes les questions qui seront posées pour les autres régions – que le Fonds européen agricole pour le développement rural, le FEADER, sera doublé, permettant ainsi des actions ciblées de soutien aux agriculteurs, en particulier dans les zones que vous avez évoquées.
Monsieur le ministre, ma question porte sur le plan de modernisation des bâtiments d’élevage, cofinancé par le FEADER et des collectivités territoriales, qui constitue depuis 2005 un levier important de la mise aux normes et de la modernisation des exploitations d’élevage.
Bien qu’il s’applique à tout le territoire pour les exploitations de production bovine, ovine et caprine, il s’agit d’un levier supplémentaire essentiel pour l’installation des jeunes agriculteurs, notamment pour la pérennité de leurs structures en zones de handicap ou de montagne.
Vous l’avez rappelé lors de la commission élargie consacrée à l’examen des crédits de cette mission, le Président de la République a annoncé la création d’un fonds de modernisation des bâtiments d’élevage doté de 200 millions d’euros.
Il est en cours de négociation avec les organisations professionnelles sur la base d’un transfert d’une partie des moyens du premier pilier au deuxième pilier de la PAC. Vous l’avez dit en commission élargie, vous l’avez répété ici.
Les éleveurs et les jeunes exploitants agricoles du Puy-de-Dôme que j’ai reçus récemment sont naturellement très attentifs aux contours de cette future programmation tout à fait essentielle pour l’avenir de l’installation dans la région, et ce d’autant plus qu’ils m’ont fait part d’une certaine difficulté à voir financer des projets pour plusieurs jeunes inscrits au deuxième trimestre 2013 sur le plan de modernisation des bâtiments d’élevage, le PMBE, et dont les travaux doivent s’achever fin 2015. La plus grande incertitude concerne la réalité des crédits à disposition pour le début de l’année 2014 ainsi que pour l’ensemble de la programmation 2014-2020, en rapport avec les choix de la PAC.
En lien avec les futures orientations du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, il nous appartient, je le crois, de garantir la continuité et l’efficacité de ce programme dans le cadre d’une politique d’installation rénovée.
Ma question est donc simple, monsieur le ministre : alors que vous nous dites que des négociations sont toujours en cours, pouvez-vous d’ores et déjà nous apporter des éléments de garantie sur le financement des projets pour le début de l’année 2014 ? Pouvez-vous également nous préciser l’évolution des enveloppes réelles prévues pour la période 2014-2020, et surtout les critères d’éligibilité aux aides que vous comptez retenir ?
Monsieur le député, vous avez évoqué la modernisation des bâtiments d’élevage. C’est un enjeu économique et environnemental majeur. Économique tout d’abord, parce que mieux sont les bâtiments, moins importante est la consommation énergétique et, par conséquent, la consommation d’aliments pour le même nombre de kilos de viande produits. Les bâtiments d’élevage représentent donc un enjeu économique. Ils sont également un enjeu de bien-être pour ceux qui y travaillent, et également pour les animaux qui s’y trouvent.
Il s’agit là d’un enjeu de modernisation et de compétitivité. Nous avons donc deux objectifs : le maintien en 2014 du niveau des aides au PMBE, au plan de performance énergétique – le PPE – et au plan végétal pour l’environnement – le PVE – de 70 millions d’euros : 30 millions pour le budget national et 40 millions pour le budget européen. Pour 2015, la négociation est en cours et avance dans le bon sens. Elle consistera à faire passer une partie des aides du premier pilier sur le deuxième pilier pour financer un grand plan de modernisation des bâtiments, portant sur tous les bâtiments d’élevage et sur les serres.
Ce plan est à hauteur de 200 millions d’euros, conformément à la proposition faite par le Président de la République. Il s’agit donc là d’une étape d’investissement massif dans la modernisation de nos bâtiments. Je le dis et le répète : c’est un élément de compétitivité, mais aussi un élément environnemental. Pour ces deux raisons, je pense que nous devons en faire une priorité, ainsi que le Président de la République l’a souhaité. Nous sommes donc en train de mettre en oeuvre le choix qui avait été proposé à Cournon.
Pour les éleveurs, qu’ils soient en élevage bovin, en élevage ovin, en élevage porcin, ou encore en volaille – je pense notamment à la Bretagne et aux élus bretons –, cela est très important.
Vous savez qu’en Bretagne aussi, il y a des montagnes, qui s’appellent les Monts d’Arrée et les Montagnes Noires !
Pour résumer, monsieur le député, il y aura 70 millions en 2014 pour poursuivre les investissements engagés, et un grand plan de 200 millions pour 2015.
La parole est à Mme Pascale Got, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Concernant le budget de la forêt, monsieur le ministre, nous pouvons saluer votre volonté de passer d’une logique patrimoniale à une logique économique, voire industrielle. Je confirme que vous avez travaillé et partagé un programme ambitieux pour la forêt avec la profession – je citerai ainsi le syndicat des sylviculteurs du Sud-Ouest : il s’agit du plan national d’action pour les industries de transformation du bois, avec la création d’un comité stratégique de filière et la mise en place de diverses dispositions avec les régions.
Jusqu’à présent, le potentiel de création de richesses et d’emplois de ce secteur était, il est vrai, peu mobilisé, avec toutefois un paradoxe de taille : une production importante de bois français de bonne qualité, mais une importation également importante de ces mêmes bois transformés à l’étranger.
Pour pallier cette insuffisance du secteur de la transformation et la faible mobilisation des bois, des financements seront-ils débloqués par la BPI en faveur de la forêt ? Sur quoi porteront ces financements ? Envisagez-vous également un fléchage des quotas carbone sur cette filière, et selon quelles règles de répartition ?
Votre question recèle beaucoup de questions ! Concernant la filière bois, nous sommes tous d’accord pour considérer qu’il existe un problème structurel, avec d’une part la production de billes et d’autre part l’importation de produits transformés ; la construction en bois dans l’habitat avec des bois qui sont parfois importés, alors que les matériaux en bois sont tout à fait disponibles. Il faut donc remédier à tout cela.
Par conséquent, nous mettons sur la table le Fonds stratégique pour le bois, qui vise à replanter pour permettre à notre forêt d’évoluer et de modifier ses espèces pour tenir compte du réchauffement climatique. Autre élément : il faut mobiliser ce bois. Les dispositifs que nous examinerons en loi de finances, tels que le compte d’investissement forestier et d’assurance, le CIFA, ou le dispositif d’encouragement fiscal à l’investissement, le DEFI, permettront de mobiliser et d’organiser les propriétés et les propriétaires afin que l’offre de bois soit plus facile et plus massive, permettant ensuite à des industriels de le transformer.
Ce point est également très important : j’ai en effet rencontré des scieurs qui m’ont dit passer plus de temps à chercher du bois qu’à le scier ! Quand on en est là, la situation ne peut plus évoluer. Il faut donc regrouper l’offre, l’organiser et la normaliser.
Deuxième question : la BPI va-t-elle s’engager ? Oui, elle va s’engager, nous l’avons demandé. Du côté de la Caisse des dépôts, qui du reste est le premier propriétaire en termes de surface de bois en France, l’engagement est également pris d’aider à la modernisation et à l’investissement dans les scieries. C’est un élément important : lorsque vous sciez votre bois en France, vous obtenez des coproduits qui permettent ensuite de faire de la cogénération et de l’énergie. Mais quand vous le sciez ailleurs, non seulement vous perdez la valeur ajoutée liée au sciage, mais vous perdez aussi tout le bénéfice des coproduits du sciage : c’est du perdant-perdant. Pour revenir au gagnant-gagnant, nous devons donc faire à nouveau travailler et scier notre bois en France.
Un débat existe en ce moment sur l’alignement des scieries sur les tarifs préférentiels pour la cogénération à hauteur non pas de 1 mégawatt, mais de 0,5 mégawatt pour favoriser la cogénération dans les petites scieries et « booster » leur développement.
J’en termine avec le dernier point que vous avez évoqué concernant le quota carbone. Ce débat concerne aussi l’Assemblée nationale. La tonne de carbone est aujourd’hui à 4 euros, ce qui est très bas. Nous devons anticiper le fait qu’elle reviendra à un niveau plus élevé : une partie des fonds devra être mobilisée, et le Fonds stratégique pour le bois est là pour cela, afin de bénéficier au bois. En effet, nous le savons tous, le bois, c’est un puits de carbone !
Pour les députés non inscrits, la parole est à Mme Marion Maréchal-Le Pen.
Monsieur le ministre, je reviendrai sur la question de l’avenir de la filière bois en France, mais sous un axe un peu différent, qui me paraît essentiel. Au fil des rapports parlementaires qui s’accumulent sur la question depuis 2008 revient le même constat : celui d’un grand gâchis. Nous bénéficions de la troisième forêt d’Europe en surface, riche d’une grande variété d’espèces, ainsi que de savoir-faire et de potentiels immenses.
Pour autant, la filière bois représente le deuxième poste le plus déficitaire de notre balance commerciale, avec près de 7 milliards d’euros l’an dernier. En dix ans, avec la fermeture de plusieurs centaines de menuiseries et scieries en France, le secteur a perdu plus de 50 000 emplois. Nous produisons avec une surface 1,5 fois plus étendue moitié moins que nos voisins Allemands.
Comment passe-t-on de tels atouts à ce marasme ? Certaines causes sont connues, comme le morcellement des parcelles ou le manque d’investissement dans l’industrie de transformation. Mais la vraie raison tient plus à la compétitivité-coût de la filière dans un contexte de mondialisation mal maîtrisée. Nous exportons, en effet, vers des pays à bas coût, notamment la Chine, la matière première brute pour la réimporter ensuite une fois transformée en meuble, en pâte à papier ou en menuiserie mais à un prix bien évidemment supérieur. Ainsi, la France vend le mètre cube de chêne brut, bois le plus recherché, environ 80 euros. Une fois séché et scié, il est réimporté à 500, voire à plus de 2 000 euros lorsqu’il est transformé en meuble. 80 % des chênes que nous exportons sont ainsi vendus à la Chine, et en trois ans nos exportations vers ce pays ont été multipliées par cinq.
Une nouvelle fois, la France subit de plein fouet la mondialisation et son corollaire, le dumping social en faveur de pays à bas niveau de salaire et de protection sociale. Alors que beaucoup de pays ont contingenté leurs exportations vers la Chine, nous n’avons rien fait en ce sens, pieds et poings liés que nous sommes par le carcan libre-échangiste de Bruxelles.
Ma question est donc en dehors de la seule évolution des crédits alloués au programme « Forêt ». Quelle est votre stratégie pour rétablir la compétitivité de la filière bois et y maintenir des emplois ? J’aimerais notamment savoir comment elle pourra retrouver l’équilibre financier sans une remise en cause des règles de libre-échangisme.
Madame la députée, la situation, structurelle, que vous évoquez ne date pas d’aujourd’hui, sachant toutefois que certains ont trouvé dans l’exportation de billes de bois vers la Chine un intérêt : quand le marché du bois a été déprimé en France, beaucoup ont trouvé ainsi un débouché – que personne n’a cherché à remettre en cause ! Pour inverser ce processus, il faut revoir la question de la compétitivité – ce qui, par rapport à la Chine, est complexe –, se pencher sur celle du CICE et, surtout, réfléchir à celle de notre offre de bois : alors qu’il faut développer notre industrie en la matière, notre offre n’est pas bien organisée, les réponses aux grands appels d’offre, par exemple, se faisant de manière aléatoire. Il faut donc structurer cette offre.
C’est tout l’enjeu du regroupement, de l’organisation de la production du bois seule à même de permettre de trouver des débouchés. Le secteur industriel a en effet besoin, s’il veut être rentable, d’approvisionnements réguliers en quantité et en qualité. J’ai ainsi visité une scierie en plein développement dans l’est de la France qui exporte sa production de planchers en chêne jusqu’en Indonésie. Son problème, c’est celui de la gestion de l’offre qui, je le répète, est mal maîtrisée en France.
À cet égard, tout un dispositif vous sera proposé avec le projet de loi d’avenir pour l’agriculture. Déjà, le présent projet de loi de finances prévoit une revalorisation des dotations des groupements d’intérêt économique, écologique et forestier en cas de regroupement.
Une fois que l’on aura réorganisé l’offre, on pourra, j’en suis persuadé, développer les industries qui vont avec en permettant de créer de la valeur ajoutée sur notre territoire plutôt que de la perte en exportant des billes de bois.
J’appelle les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », inscrits à l’état B.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 851 .
Pour la création du fonds stratégique de la forêt et du bois, 3,7 millions d’euros sont mobilisés qui viennent des fameux centimes forestiers reversés par les chambres d’agriculture. Suite aux demandes de ces dernières, nous proposons en effet de corriger l’écriture budgétaire relative à la mobilisation des fonds des chambres d’agriculture – André Chassaigne a évoqué à cet égard la fameuse taxe sur le défrichement. En revenant sur l’abaissement à hauteur de 3,7 millions d’euros du plafond de la taxe additionnelle à la taxe sur le foncier non bâti affectée, l’amendement permet ainsi aux chambres d’agriculture d’abonder le fonds stratégique, pour lequel 20 millions d’euros ont été prévus en loi de finances.
Cet amendement ne change rien, ni pour le fonds, ni en ce qui concerne la mobilisation des moyens. Il s’agit seulement de tirer les conséquences d’un dialogue avec les chambres d’agriculture.
Cet amendement n’a pas été examiné en commission, mais j’émets un avis favorable. Il s’agit d’un amendement de coordination avec un amendement qui avait été voté lors de l’examen de la première partie de la loi de finances.
Monsieur le ministre, vous avez dit tout à l’heure qu’il fallait écouter la profession. Bien sûr, le ministre et la représentation nationale se doivent de le faire, mais ils doivent aussi veiller à l’intérêt général et à ne pas changer de politique tous les deux ans pour ne pas briser l’élan.
S’agissant du fonds national, je tiens à appeler l’attention de Mme Massat, de M. Brottes et de M. Chassaigne. J’ai en effet deux inquiétudes. Alors que les gens se sont mobilisés en matière de PPRDF, on n’a pas le droit de casser la machine. Aussi, monsieur le ministre, je vous remercie de nous avoir rassurés à cet égard. Par ailleurs, qu’en est-il, avec ce fonds, de la solidarité et de la péréquation entre les territoires ? Les PPRDF assurent aujourd’hui une partie du retour de la richesse de la forêt vers celles qui ont un handicap, en particulier les forêts de montagne. Or avec ce fonds, je crains, en l’absence de tout encadrement par une charte, qu’il n’y ait aucun retour en faveur des forêts avec handicaps. Cette inquiétude est partagée par une partie de la profession, en particulier par les chambres d’agriculture.
Pour répondre à la crainte de M. Saddier, je rappelle que ce sont les professionnels de la forêt eux-mêmes qui réclamaient le reversement des centimes forestiers, considérant qu’il appartenait aux forestiers de conduire la politique forestière. L’accord qui a été trouvé avec les chambres d’agriculture ne remet pas en cause les perspectives pluriannuelles des PPRDF, lesquels seront pris en compte dans les plans régionaux une fois que l’on aura défini les objectifs du plan national.
Par ailleurs, il y aura bien une péréquation – la redistribution se fera à travers un fonds national. Du fait de l’existence de plans régionaux, chacun aura à financer des objectifs en termes financiers, et je peux assurer que, sur ce sujet-là, l’équilibre sera garanti comme il l’a été jusqu’à présent au travers des chambres d’agriculture.
L’amendement no 851 est adopté.
Cet amendement concerne le programme « Ambition Bio 2017 » qui a notamment pour objectif de doubler les surfaces bio et de passer à 20 % la part des produits bio dans les restaurants administratifs. La question de l’animation sur le terrain, c’est-à-dire de l’accompagnement des professionnels dans la production et l’organisation des filières, est essentielle, d’où les crédits affectés à l’animation en agriculture biologique, l’Animbio. A côté des crédits ministériels, l’Animbio peut également, en cas de non-utilisation de certaines enveloppes, bénéficier de crédits complémentaires sur le terrain. Cependant, cette fongibilité est remise en cause par le ministère du budget. Aussi, pour sécuriser les crédits d’Animbio, je propose à l’Assemblée de déplacer 9,3 millions d’euros.
Il s’agit d’un amendement de coordination avec un amendement qui avait été voté lors de l’examen de la première partie de la loi de finances. Avis favorable.
L’agriculture bio est importante et, dès le départ, j’ai dit qu’il fallait que cette filière soit organisée. En effet, si on augmente les surfaces pour, au final, y perdre en termes de prix, c’est toute la filière bio qui se trouvera déstabilisée. On le voit déjà, et je l’ai dit en commission, sur le lait et le vin. Le fait que l’offre en bio ait beaucoup augmenté fait qu’aujourd’hui les prix du bio sont pratiquement équivalents à ceux de l’agriculture conventionnelle, mettant ainsi tout la filière en difficulté.
L’Agence Bio, ou Agence française pour le développement et la promotion de l’agriculture biologique, a vu son budget augmenter de près de 30 %. L’objectif de structuration de cette filière est parfaitement prise en compte dans le programme Ambition Bio.
Je rappelle, s’agissant du FEADER, que si auparavant 100 millions d’euros environ étaient mobilisés en faveur de l’agriculture biologique avec l’objectif de doubler les surfaces bio, ce sont aujourd’hui 160 millions d’euros, soit 60 millions d’euros supplémentaires, qui sont consacrés à ce secteur. Bien sûr, si un besoin se faisait sentir, nous pourrions procéder à un ajustement. Mais les moyens consacrés au plan Ambition Bio nous permettent d’assurer le développement de cette agriculture qui a toute sa place dans la diversité des agricultures que j’évoquais au niveau français.
Avis défavorable donc.
L’amendement no 548 n’est pas adopté.
Il s’agit ici non d’un amendement d’appel mais de rappel puisqu’il concerne l’assurance récolte. Les demandes de subventions nationales pour 2013 sont supérieures aux crédits qui sont inscrits pour 2014. Aussi, nous proposons de déplacer 1,7 million d’euros du programme « Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture » vers le programme « Économie et développement durable de l’agriculture et des territoires ».
Par ailleurs, monsieur le ministre, je n’ai toujours pas compris comment vous alliez faire fonctionner le futur système avec les crédits européens s’agissant de l’assurance récolte. Mais j’ai cru comprendre que les curseurs n’étaient pas encore arrêtés, ce qui explique ma position de tout à l’heure.
La commission n’a pas d’avis puisqu’elle n’a pas examiné l’amendement. À titre personnel, je crois que le problème soulevé par notre collègue Herth est réel : c’est vrai que l’assurance récolte n’est pas diffusée dans les secteurs qui en ont forcément le plus besoin. Se pose en particulier le problème de l’assurabilité des fruits et légumes, qui sont pratiquement inassurables.
C’est un amendement d’appel, qu’il faut le considérer comme tel, monsieur le ministre. Pour autant, pourriez-vous nous indiquer quels sont les objectifs de taux de couverture ? Comme l’indique l’exposé des motifs de M. Herth, il y a une diminution du taux de prise en charge qui freine beaucoup la diffusion, laquelle est très variable selon les filières. Pour donner un ordre de grandeur à nos collègues, dans la filière des céréales, le taux de diffusion est d’environ 35 %.
À titre personnel, je le répète, je trouve cet amendement intéressant. Avis favorable.
Nous avons déjà discuté de cette question de l’assurance récolte. Nous parlons d’une baisse du budget national d’environ 6 millions d’euros. On sait que les dépenses actuelles sont voisines de 84 millions d’euros. On sait aussi que dans certains secteurs, on observe un taux d’assurance plus élevé que dans d’autres. Pour ajuster le dispositif, nous allons donc faire en sorte de soutenir surtout les secteurs où il importe d’augmenter le nombre d’assurés ; et nous baisserons le niveau de soutien là où l’assiette est suffisante, comme c’est le cas pour les céréales.
Pour l’avenir, il s’agit de structurer un système de solidarité, lié au fameux Fonds des calamités, pour parvenir à une mutualisation. Il faut élargir beaucoup plus le nombre d’assurés pour que le système puisse fonctionner économiquement.
Aujourd’hui, un groupe a particulièrement en charge cette question de l’assurance : nous allons chercher à organiser la mutualisation avec les établissements s’agissant des produits financiers qui peuvent être mis à la disposition des agriculteurs. Une partie de ce qui est aujourd’hui dans le premier pilier de la politique agricole commune passera dans le deuxième pilier, pour financer à hauteur de 100 millions cette assurance au niveau global.
L’objectif est clairement défini, et nous avons sur ce sujet un rapport technique qui vous sera transmis et qui permettra de vous rassurer sur les objectifs du Gouvernement. Nous allons bien vers une consolidation de ce système et une mutualisation. Je suis sensible à votre appel, monsieur le député, je partage votre objectif et, en même temps, je ne peux être favorable à votre amendement.
L’amendement no 547 n’est pas adopté.
Les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » sont adoptés.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 850 rectifié .
Cet amendement porte sur la situation spécifique de la chambre d’agriculture de Guyane, qui depuis un certain temps n’est pas à l’équilibre. Il faut donc retrouver un équilibre financier pour pouvoir redresser cette chambre d’agriculture. Un accord a été négocié par le préfet pour que les recettes prélevées sur les agriculteurs en Guyane puissent être augmentées de 20 %, en vue d’aboutir au rééquilibrage budgétaire de cette chambre.
Comme il s’agit d’un taux dérogatoire à la règle générale, le Gouvernement a déposé un amendement.
La commission n’a pas examiné cet amendement, il n’y a donc pas de position de la commission des finances, mais, monsieur le ministre, il y a quand même un petit problème d’après l’exposé des motifs que je découvre. Un établissement public, comme l’est une chambre d’agriculture, qui a 880 000 euros de dépenses et 540 000 euros de recettes… Comme dirait Coluche : « Y a un problème ! »
Sourires.
En effet, 340 000 euros de déficit, c’est énorme.
Or vous en rajoutez, monsieur le ministre, puisque vous indiquez dans votre exposé des motifs que cette chambre d’agriculture a 1 million de dettes envers des personnes publiques et 400 000 euros de dettes envers des personnes privées.
Je n’arrive pas à comprendre comment vous comptez faire, même en augmentant de 20 % les recettes de la taxe sur le foncier non bâti, qui sont de 485 000 euros : 20 % de 485 000 euros, cela fait un peu moins de 100 000 euros. Comment en quatre ans, puisque l’amendement est limité à cette durée, allez-vous avec 400 000 euros rembourser 1,4 million de dettes ?
En outre, ne vous heurtez-vous pas à un problème de constitutionnalité, du fait d’une rupture d’égalité entre les différentes chambres d’agriculture ? Le Gouvernement a-t-il pris toutes les précautions en a matière ?
Mon avis est donc très mitigé, monsieur le ministre, à titre personnel bien entendu.
Mitigé, cela veut dire pas favorable. Cet amendement n’est pas à la hauteur du problème et je crains qu’il pose des problèmes de constitutionnalité.
Je soutiens l’amendement du Gouvernement, pour deux raisons.
Premièrement, si le déficit de la chambre d’agriculture date de plusieurs années, la chambre d’agriculture a validé en session plénière, en septembre 2013, un plan de redressement – je pense que le ministre en parlera – comportant un emprunt sur vingt ans auprès de l’AFD afin de pouvoir répondre aux besoins des agriculteurs.
Deuxièmement, je tiens à rappeler, comme je l’ai fait dans le débat sur l’Outre-mer, que la Guyane a un défi à relever qui est sa démographie. De plus en plus, la population augmente et le taux de couverture agricole diminue. Sans un moteur, la chambre d’agriculture, on n’aura pas les moyens d’y remédier.
S’agissant de la taxe additionnelle sur le foncier non bâti, le premier propriétaire foncier en Guyane reste l’État. Je suggère que l’on songe, après avoir accru le taux, à augmenter la base de la taxation. Il faut ouvrir le foncier pour avoir plus de propriétaires et atteindre ainsi une dotation structurelle suffisante pour donner à la chambre d’agriculture les moyens de remplir sa mission de service public en Guyane.
J’adhère totalement à cet amendement. Je crois nécessaire de doter la Guyane d’un outil capable d’asseoir son développement agricole.
Sur le plan juridique, monsieur le rapporteur spécial, le code rural prévoit la possibilité d’une augmentation différenciée. Par ailleurs, il est sûr que ce n’est pas seulement la taxe qui va résoudre les problèmes de déficit. Les collectivités locales seront aussi mobilisées. Le plan négocié par le préfet vise à rétablir l’équilibre dans une situation qui, je suis obligé de faire ce constat, est extrêmement dégradée.
Si nous faisons des efforts, les collectivités aussi en feront, mais il fallait aussi que des efforts soient consentis par les propriétaires et les agriculteurs. À partir de là, il faut que nous nous donnions la possibilité de redresser cette chambre d’agriculture.
Tout à l’heure, des questions ont été posées sur l’agriculture d’outre-mer. Il est vrai que dans certains départements, on observe une baisse du taux de couverture – le rapport entre la production locale et le marché local. À La Réunion, il est à hauteur de 50 % aujourd’hui, et il faut développer l’agriculture à la Martinique, à la Guadeloupe et en Guyane par la diversification des productions. La banane et la canne à sucre sont des éléments essentiels – et c’est tout le débat que nous avons sur les aides européennes et les accords POSEI –, mais il faut aussi que nous puissions soutenir la diversification des productions agricoles pour favoriser une reconquête du marché local.
Dans ce contexte, j’ai parfaitement entendu l’avis « mitigé » du rapporteur spécial. Nous sommes devant une situation difficile que j’essaie de résoudre. Je fais confiance à la négociation conduite par le préfet.
Vous avez fait un parallèle intéressant, monsieur le ministre, avec les communes. Mais quand une commune se trouve en situation d’avoir 880 000 euros de dépenses et 540 000 euros de recettes, vous savez ce qui se passe, monsieur le ministre.
Absolument : on saisit la chambre régionale des comptes et c’est elle qui prescrit, qui impose, voire nomme une commission spéciale pour remplacer les élus. Il n’y a pas que Marseille entre les deux guerres qui a connu une commission spéciale ! C’est le cas de quelques communes, dont une dans ma circonscription. Le ministre de l’intérieur dispose d’un chapitre qui permet de doter ces communes, peu nombreuses : il y en a généralement quatre ou cinq. On les dote, puis on fait un plan de redressement : on réduit les dépenses, on augmente les recettes.
Monsieur le ministre, sur les chambres d’agriculture, disposez-vous du même pouvoir que votre collègue le ministre de l’intérieur à l’égard des communes en difficulté, comme on les appelle pudiquement ?
À mon avis, non : le préfet n’a pas les mêmes pouvoirs s’agissant d’une collectivité locale et s’agissant d’une chambre consulaire.
Il y a eu en la matière un contrôle de la Cour des comptes. L’audit a conclu clairement à une « difficulté majeure ». Le préfet s’est saisi de ce sujet après avoir alerté le ministère des Outre-mers et nous-mêmes. Il a mené cette négociation pour retrouver un équilibre financier. Je le dis, la situation est extrêmement difficile et nous ne pouvons la laisser se dégrader continuellement. La proposition qui est faite est construite sur la base de la négociation conduite par le préfet, qui a mobilisé tous les acteurs locaux et qui a fait un choix de responsabilité en estimant, et je lui ai fait confiance, qu’il fallait prendre des décisions rapides. C’est pourquoi j’ai présenté cet amendement.
L’amendement no 850 est adopté.
J’appelle les crédits du compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural », inscrits à l’état D.
La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement no 807 .
Cet amendement propose de rééquilibrer le budget de la mission « Développement rural » en faveur des réseaux de développement de l’agro-écologie appelés organismes nationaux à vocation agricole et rurale, les ONVAR.
Ces derniers disposent de plus de 700 salariés sur le terrain et sont présents dans toutes les régions qui font un travail de développement agricole et rural dans l’esprit d’une dynamique territoriale et en faveur de la relocalisation de l’agriculture pour la consommation.
Sur les 56 millions prévus pour l’action 1 du programme 775 « Développement et transferts en agriculture », 40 millions sont affectés aux chambres d’agriculture et un million seulement aux ONVAR. Beaucoup sont menacés de disparaître faute de crédits alors que leur savoir-faire sera essentiel pour le développement de l’agro-écologie puisqu’ils en sont les précurseurs.
Je vous demande donc de voter cet amendement visant à modifier les autorisations d’engagement et les crédits de paiement.
Cet amendement n’a pas été examiné par la commission des finances et elle n’a donc pas émis un avis, mais je souhaite faire à titre personnel les réflexions suivantes.
Notre collègue propose de prélever trois millions sur les crédits dédiés à la recherche et à l’innovation, lesquels s’élèvent à 56 millions. Elle suggère donc de les faire baisser de 5 %, ce qui ne me semble pas être un bon gage.
En outre, faire bondir de un à quatre millions les crédits concernant les ONVAR me paraît tout à fait excessif.
Je ne peux donc qu’émettre à titre personnel un avis défavorable.
J’ai parfaitement compris l’enjeu et le sens de votre amendement, madame la députée. Je suis moi-même en train de mener au niveau du conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux – le CGAAER –, sur le plan ministériel, une réflexion sur la question du développement dans le domaine agricole car il est nécessaire de penser la manière dont on organise le développement des projets d’agro-écologie.
Les chambres d’agriculture sont des établissements publics qui jouent un rôle important, les ONVAR étant quant à eux des têtes de réseaux qui ont développé bien des innovations dans nombre de domaines. Ils pourront être candidats au compte d’affectation spéciale de développement agricole et rural, le CASDAR, puisque ce dernier est orienté vers l’agro-écologie.
Avant de revoir l’ensemble des questions liées au développement en agriculture sur la base du rapport qui sera fourni par le CGAAER, je préfère suivre l’avis du rapporteur et émettre donc un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.
L’amendement no 807 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Les crédits du compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural » sont adoptés.
Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs à l’agriculture, à l’alimentation, à la forêt et aux affaires rurales.
Prochaine séance, demain, à dix heures : suite de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2014 : Conseil et contrôle de l’État ; Pouvoirs publics ; Direction de l’action du Gouvernement ; articles non rattachés.
La séance est levée.
La séance est levée, le jeudi 14 novembre à deux heures cinq.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Nicolas Véron