Séance en hémicycle du 29 mai 2013 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Marie-Louise Fort, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Des mots pour cacher les maux, vous en êtes réduit, avec le Président de la République et votre gouvernement, au ministère de la parole

Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

parler pour vous convaincre vous-même car vous ne pouvez convaincre les Français ; parler pour masquer vos échecs et vous enflammer parfois, y compris contre l'opposition. Le tout sans pour autant apporter de réponses aux vrais problèmes de notre société.

Prenons le chômage des jeunes, auquel, j'imagine, nul ne peut se résoudre sur les bancs de cet hémicycle : alors qu'un chômeur sur quatre a moins de vingt-cinq ans, MM. Sapin et Moscovici en sont réduits à faire une tribune dans un grand quotidien du soir, appelant, en amoureux de la langue française, à un new deal !

François Hollande lui-même s'est raccroché in extremis hier à l'initiative européenne lancée par Angela Merkel, mais personne n'est dupe : il n'est pas à la manoeuvre.

Et pour cause : alors que l'Allemagne est une référence en matière d'insertion des jeunes par l'alternance et l'apprentissage, vous, qu'avez-vous fait ? Vous avez supprimé dans la loi sur l'école la possibilité de commencer l'apprentissage de façon anticipée, en quatrième ou en troisième ! Vous avez rayé d'un trait de plume la loi Cherpion, pourtant ambitieuse et efficace en matière d'apprentissage !

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous voulez tirer gloire de vos emplois d'avenir alors que ce ne sont que des rustines. La « boîte à outils » chère au Président, c'est bien beau, mais un pays comme la France mérite mieux qu'un bricoleur du dimanche pour faire face aux défis à relever !

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le Premier ministre, quand allez-vous enfin renoncer à votre posture idéologique et relancer une véritable politique d'apprentissage ?

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.

Debut de section - Permalien
Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances

Un ton caustique et déplaisant

Exclamations sur les bancs du groupe UMP

Debut de section - Permalien
Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances

, une intervention peu constructive et dépourvue de véritable question, des imprécisions et des mises en cause qui n'ont aucun sens : je retrouve bien là ce dont vous semblez maintenant avoir fait votre marque de fabrique, madame la députée.

Le Président de la République travaille avec la chancelière Angela Merkel, nous travaillons avec le gouvernement allemand, parce que nous sommes tout simplement confrontés à des défis communs. Et le premier de ces défis est, en effet, le chômage des jeunes. En Europe, le chômage touche plus de 25 % des jeunes : il atteint ce taux dans notre pays, va jusqu'à 50 % en Espagne et en Grèce et augmente même aujourd'hui en Allemagne.

C'est la raison pour laquelle nous avons pris cette initiative commune. N'essayez pas de faire croire qu'il y aurait les uns devant et les autres derrière : il se trouve que nous travaillons ensemble. Hier, il y a eu une rencontre – fait inédit – entre les deux ministres du travail allemand et français, Mme von der Leyen et Michel Sapin, et les deux ministres des finances, Wolfgang Schäuble et moi-même. Nous nous sommes même retrouvés avec le ministre italien dans le bureau du Président de la République pour envisager les manières de lutter contre le chômage des jeunes à l'échelle de l'Europe. Ce sera le coeur d'une initiative que nous prendrons lors du Conseil européen du 28 juin.

Parmi les sujets que nous évoquerons, il y aura, je vous le confirme, la question de l'apprentissage et de la formation en alternance. Nous souhaitons en la matière développer ensemble un véritable Erasmus.

Voyez-vous, lorsqu'on est constructif, on avance. C'est ce que nous faisons avec les Allemands. Et ce ne serait pas une mauvaise chose si, de temps en temps, nous avions le renfort de l'opposition.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Christophe Castaner, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre de l'économie et des finances, l'Europe vit une crise profonde, doute d'elle-même et nos concitoyens s'en éloignent.

Aujourd'hui, l'essentiel, c'est le retour de la croissance, de la confiance et, comme le disait hier le Président de la République, de l'espérance.

Pour cela, nous devons agir vite : comment retrouver l'espérance quand 6 millions de jeunes sont au chômage en Europe – pire, quand ils sont 14 millions sans travail, sans étude et sans apprentissage ?

Nous ne pouvons pas laisser cette génération sans perspective, laisser se développer cette colère, cet abandon.

C'est l'idée même de l'Europe qui est en cause.

Le Président de la République, après avoir négocié le pacte de croissance européen de 120 milliards, vient, en lien avec la chancelière allemande, de lancer l'offensive pour l'emploi des jeunes.

Sans attendre, le Gouvernement a mis en place des armes contre le chômage, avec les emplois d'avenir et les contrats de génération. Il se mobilise chaque jour pour en amplifier l'indispensable mise en oeuvre.

Je pense aussi au pacte de compétitivité, et en particulier à la mobilisation en faveur des PME et des PMI, qui créent le plus d'emplois pour les jeunes, ainsi qu'à la loi de sécurisation de l'emploi, qui facilite l'embauche des jeunes en CDI en exonérant les employeurs de cotisations patronales.

La France prend ses responsabilités, mais il faut aller plus loin et agir à l'échelle de l'Europe. En paraphrasant le Président de la République, l'Europe n'est pas le problème : l'Europe est la solution.

Six milliards d'euros seront disponibles pour l'emploi des jeunes dans le projet de budget européen. Les fonds existent, il ne tient qu'à nous de les mobiliser. Ce new deal européen engage une mobilisation de tous les acteurs publics et privés contre le chômage des jeunes.

Monsieur le ministre, nous avons un ennemi : le temps ! Comment comptez-vous agir dans l'attente de la mobilisation de ces 6 milliards ? Car il y a urgence : l'urgence contre le chômage des jeunes !

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.

Debut de section - Permalien
Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances

Monsieur le député Castaner, je vous réponds à nouveau en mon nom et au nom de Michel Sapin, qui ne peut pas être parmi nous aujourd'hui.

Vous avez noté que, contrairement à ce que disait Mme Fort, la lutte contre le chômage des jeunes est un axe essentiel, structurant, et constitue même la priorité du Président de la République et de l'action du gouvernement de Jean-Marc Ayrault.

Vous avez rappelé les dispositifs que nous avons mis en place à cet égard. Le pacte de compétitivité est fait pour muscler l'économie française au service de la lutte contre le chômage, et notamment contre le chômage des jeunes. Les emplois d'avenir, qui démarrent bien, sont là pour offrir une réponse à des jeunes sans qualification, de la même façon que les contrats de génération sont là pour établir une solidarité entre les générations.

Il se trouve en effet que nous voulons amplifier ce mouvement à l'échelle européenne. Nous le devons. Tel est le sens de l'initiative européenne dont nous avons commencé à poser les bases hier, avec la mise en place la plus rapide de la garantie jeunesse – tout jeune sortant du système éducatif doit se voir offrir dans un délai de quatre mois une proposition : soit un emploi, soit une formation – avec le développement de l'alternance et d'un Erasmus européen en la matière, avec l'amélioration des financements des prêts aux petites et moyennes entreprises – nous avons clairement demandé à la Banque européenne d'investissement d'être plus rapide et plus disponible en ce sens – et enfin avec l'amélioration de la mobilité en Europe.

Tout cela passe, comme vous l'avez suggéré, par la mobilisation très rapide des 6 milliards d'euros qui ont été votés dans le budget européen mais pas encore adoptés par le Parlement européen. Le Président de la République et la chancelière allemande vont demander que l'on puisse engager ces crédits par anticipation.

Vous voyez que notre mobilisation est extrêmement forte : nous n'acceptons pas qu'une génération soit sacrifiée. C'est pourquoi le Président de la République sera, avec le Gouvernement, au coeur du combat européen contre le chômage des jeunes.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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La parole est à M. Christophe Cavard, pour le groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre de l'intérieur, j'ai eu l'honneur de présider durant cinq mois la commission d'enquête parlementaire sur le fonctionnement des services de renseignement français dans le suivi et la surveillance des mouvements radicaux armés – et, notamment, des filières djihadistes.

Cette commission d'enquête, voulue par le groupe écologiste, répondait à une attente de vérité de la part des familles des victimes et des citoyens, notamment pour ce qui concernait l'affaire Merah.

Au lendemain de sa mise en place, vous aviez vous-même, monsieur le ministre, évoqué des fautes, des failles et des erreurs de la direction centrale du renseignement intérieur dans cette affaire.

La commission a terminé ses travaux et rendra public son rapport demain.

La qualité de ces travaux parlementaires permettra, je le souhaite, d'apporter des réponses concrètes pour améliorer le fonctionnement des services du renseignement. Je tiens ici à saluer le professionnalisme et le dévouement de leurs membres, qui opèrent dans des conditions jugées parfois artisanales.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nos travaux ont permis, à travers l'audition de nombreux spécialistes, de mettre en lumière l'évolution de la menace terroriste issue de profondes mutations sociétales. Ces mutations appellent une refondation de notre approche en matière de prévention des actes terroristes.

Il est nécessaire de bâtir une culture européenne du renseignement, en capacité de protéger nos démocraties. Cette culture devra mêler les différentes approches, et en particulier les approches française et anglo-saxonne. Cette culture commune que nous devons faire progresser appelle des moyens nouveaux et une coordination technique et politique des différents services européens.

En outre, l'évolution des profils et des raisons des actes terroristes qui sont, hélas, d'une actualité brûlante, remet en question les dispositifs territoriaux de prévention.

Non, la multiplication des actes isolés sur le territoire français n'est pas le fait de « loups solitaires ».

Monsieur le ministre, de l'Europe aux différents territoires régionaux et au maillage territorial, comment répondre aux nouveaux besoins dans la lutte contre le terrorisme ?

Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

Monsieur le député, en tant que président de la commission d'enquête sur le fonctionnement des services de renseignement, vous connaissez toute la complexité du sujet. J'attends évidemment avec intérêt les conclusions de vos travaux.

Je tiens également à saluer le rapport tout à fait exceptionnel commis par l'Assemblée nationale sous la présidence de Jean-Jacques Urvoas, qui sera utile aux réformes que nous allons mener dans ce domaine.

Les services de renseignements, qu'ils agissent à l'intérieur ou à l'extérieur, sont intimement liés au domaine régalien et à celui de la souveraineté. Tout, de leur activité, ne peut bien évidemment pas être partagé. Pour autant, la coopération, l'échange de renseignements et d'informations, le travail entre pays partageant les mêmes objectifs se pratiquent depuis longtemps et doivent être renforcés.

Il est vrai que, faisant face à de nouvelles formes de terrorisme, et notamment à celle que vous avez évoquée, qui touche nos pays depuis plusieurs années et encore plus ces derniers mois, nous devons renforcer cette coopération, tant pour lutter contre le terrorisme que pour voir de quelle manière nous pouvons le prévenir.

Nous y travaillons au niveau de la Commission européenne et avec Gilles de Kerchove, coordinateur de l'Union européenne pour la lutte contre le terrorisme.

Dans quelques jours, je rencontrerai mes collègues ministres de l'intérieur pour voir comment nous pouvons, en lien avec les ministres des affaires étrangères, prévenir ces filières qui amènent aujourd'hui des centaines d'Européens en Syrie – phénomène que d'autres pays dans le monde connaissent ; comment nous pouvons échanger les informations ; comment nous pouvons, en dépit d'ordres juridiques différents mais avec les mêmes moyens et les mêmes analyses, nous montrer plus efficaces.

Le combat contre le terrorisme est un combat de valeurs. Il est donc celui de l'Union européenne.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Thierry Benoit, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ma question concerne les retraites. Le Gouvernement doit poursuivre le travail engagé par ses prédécesseurs sur la question du financement de notre système de retraite par répartition. Il va devoir poursuivre, accélérer et amplifier les dispositions décidées en 2010. Le sujet est très difficile. Cependant, chaque Français a bien compris qu'il travaillera plus et plus longtemps car l'espérance de vie augmente.

Les Français accepteront une nouvelle réforme des retraites moyennant quelques préalables, que l'UDI soutient.

Nous soutenons la mise en extinction de tous les régimes spéciaux de retraite, pour parvenir à leur suppression ; nous soutenons la convergence public-privé en matière de taux de cotisation retraite et de notion de référencement – six mois pour le public et vingt-cinq années pour le secteur privé ; nous soutenons l'instauration d'un régime unique, universel, de retraite par points.

Ma question est simple : le Gouvernement est-il prêt à soutenir ces propositions dans le cadre du dialogue qu'il doit nouer avec les partenaires sociaux ?

Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le député, la réforme des retraites est une nécessité

« Ah ! » et applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

parce que vous nous avez laissé un déficit du régime des retraites qui avoisinera les 20 milliards d'euros en 2020.

La réforme des retraites est une nécessité

Mêmes mouvements

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

parce que vous nous avez laissé un système de retraite injuste qui pénalise celles et ceux qui ont commencé à travailler jeunes.

La réforme des retraites est une nécessité

Mêmes mouvements

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

parce que la réforme que vous avez menée n'est pas allée au terme de ce qui était nécessaire pour les Français.

La réforme des retraites est une nécessité

Mêmes mouvements

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

parce que le régime de retraite par répartition n'a pas été consolidé.

Mesdames et messieurs les députés de l'opposition, je suis heureuse de voir que vous constatez, comme moi et comme le Gouvernement, que les réformes que vous avez menées ont conduit nos régimes de retraite dans le mur

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste – Exclamations sur les bancs du groupe UMP

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

, qu'elles ont créé plus d'injustice entre les Français, qu'elles ont placé celles et ceux qui ont commencé à travailler jeunes dans des situations de précarité renforcée.

Le brouhaha persiste.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Le Gouvernement va engager une concertation sur l'avenir des retraites qui nous permettra d'aboutir à une réforme financée et juste parce que, contrairement à la vôtre, notre réforme n'est pas écrite à l'avance : elle tiendra compte de ce que demandent les Français. Pour nous, il n'y a pas de réforme courageuse si elle n'est pas profondément juste.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mes chers collègues, on se comprenait mieux quand il y avait un peu plus de silence !

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La parole est à M. Olivier Carré, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le Premier ministre, cela fait maintenant un an que vous passez votre temps à nous donner des leçons sur la situation passée et la gestion des fonds publics qui avait été faite par vos prédécesseurs.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Hier, devant la commission des finances, le premier président de la Cour des comptes a remis les pendules à l'heure. En insistant sur le fait que « quasiment aucune réforme structurelle n'a réellement été mise en oeuvre par le Gouvernement », il a malheureusement fait le constat que, malgré vos promesses, les dépenses continuaient d'augmenter et que la fiscalité n'était pas une solution durable pour résorber le déficit, que la dette continuait de progresser, et enfin que les embauches prévues par le Gouvernement pour 2013 risquaient de compromettre la stabilité de la masse salariale pourtant assurée jusqu'en 2012.

Toutes ces remarques font écho aux dérives de l'exécution du budget 2013 qui conduisent aujourd'hui même la Commission européenne à consentir des délais supplémentaires pour réduire nos déficits et engager enfin les réformes qui lui paraissent absolument nécessaires.

Je voudrais souligner ici que 2013 sera la première année depuis quatre ans où la France n'aura pas respecté sa parole vis-à-vis de ses partenaires européens.

Cette première étape doit se faire dans la clarté. Or, monsieur le Premier ministre, vos comptes ne sont pas clairs.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Alors que nous avons voté ici pour 2013 un budget en déficit de 67 milliards, vous-même reconnaissez que nous avoisinerons bientôt les 80 milliards.

Dans une situation équivalente, d'ordinaire, nous votons une loi de finances dite rectificative afin de corriger l'exécution des comptes en fonction des situations conjoncturelles.

Aussi, monsieur le Premier ministre, quand ce projet de loi de finances rectificative pour 2013 nous sera-t-il soumis ?

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Monsieur le député, je voudrais vous rappeler un certain nombre d'éléments que vous avez sans doute à l'esprit mais que vous avez omis de souligner.

En ce qui concerne la confiance entre les institutions de l'Union européenne et le gouvernement français, il n'a pas échappé à votre sagacité qu'un ancien Premier ministre, François Fillon, présent aujourd'hui parmi nous…

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

…a expliqué, au début du quinquennat précédent, que notre pays était en faillite et que, dans le même temps, le Président de la République le rappelant à l'ordre a engagé des dépenses fiscales massives en faveur des plus favorisés

« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

et s'est précipité à Bruxelles pour expliquer qu'il ne respecterait pas les engagements pris par la France devant l'Union. Voilà la vérité, voilà quelle a été votre politique !

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

C'est à partir de ce moment-là que la confiance entre Bruxelles et Paris s'est profondément dégradée.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Et comme vous parlez des dépenses publiques, permettez-moi de vous rappeler qu'entre 2007 et 2012 elles ont augmenté en France de 170 milliards d'euros, avec un taux de progression de plus de 2 %, alors qu'en 2012 elles n'augmentent que de 0,7 % et que nous les ramèneront à 0,5 % dans les années à venir.

Puisque vous voulez que je vous parle de la situation actuelle, je le fais bien volontiers. En 2012, le déficit structurel de la France a été réduit de 1,2 %. Il le sera de 1,8 % en 2013 et de 1 % en 2014.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Pouvez-vous me donner une année, pendant les dix où vous avez gouverné, au cours de laquelle vous ayez obtenu ce type de résultat ? Jamais !

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Pouvez-vous me citer une année au cours de laquelle vous ayez diminué les dépenses de l'État ? Jamais ! Nous les diminuons en 2012 de 300 millions et nous les réduirons en 2014 de 1,5 milliard. Pouvez-vous me donner un exemple de diminution de la fiscalité pendant la période où vous avez été au pouvoir ? Jamais ! Elle a augmenté massivement alors que Nicolas Sarkozy avait proposé de la diminuer de 4 %. Votre bilan est accablant, vous devriez vous montrer plus modeste.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Patrick Vignal, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le ministre de l'intérieur, je tiens à saluer ici votre action, celle du Gouvernement et celle des forces de police et de gendarmerie. Dans ma circonscription de l'Hérault, une zone de sécurité prioritaire a été mise en place, la ZSP de Lunel-Mauguio. Elle a permis de faire reculer la délinquance et les cambriolages ont chuté de 44 %.

La sécurité, c'est le quotidien des Français.

« Allô ? » sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous êtes, monsieur le ministre, dans l'action concrète. La sécurité n'est pas de droite, tout simplement parce que la droite a échoué.

Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Claude Guéant s'occupait de peinture, nous, nous voulons assurer la sécurité des Français.

Monsieur le ministre, deux arrestations importantes témoignent de votre engagement et de votre obstination : celles du braqueur Redoine Faïd, arrêté cette nuit en Seine-et-Marne, et de l'agresseur du militaire affecté à La Défense Cédric Cordier ce matin. J'y ajoute le coup de filet antiterroriste conduit dans l'affaire Merah.

La détermination du Gouvernement à assurer la sécurité des Français est totale, que ce soit dans la lutte contre le grand banditisme, dans la lutte contre le terrorisme ou dans la lutte contre la délinquance.

De manière évidente, la création de 64 ZSP, le renforcement de l'indépendance de la justice, votre excellente collaboration avec la garde des sceaux Christiane Taubira nous permettent de disposer de nouvelles ressources pour améliorer les services et faire face aux nouvelles menaces.

La droite se targuait de donner des leçons de sécurité à la terre entière. La gauche au pouvoir fait preuve de méthode, avec le triptyque éducation, prévention, répression.

Pouvez-vous nous dire quel bilan sera tiré de ces arrestations ?

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

Monsieur le député, vous avez tenu à saluer l'action déterminée des forces de l'ordre qui a conduit cette nuit et ce matin à deux interpellations importantes : celle de Redoine Faïd et celle d'un suspect dans l'enquête sur l'agression d'un soldat à La Défense. Ce n'est pas le ministre de l'intérieur qu'il faut saluer, mais les forces de l'ordre au service de la sécurité de nos concitoyens.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP, écologiste, sur plusieurs bancs du groupe UDI et sur quelques bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

Je veux, en votre nom à tous, les saluer et les féliciter.

L'interpellation de Redoine Faïd résulte aussi d'une très étroite collaboration entre les services de police et de gendarmerie, sous l'autorité de la justice. J'ai une pensée particulière – je l'ai dit à sa famille, ainsi qu'à Jacques-Alain Bénisti qui a organisé il y a quelques jours un hommage à sa mémoire – pour Aurélie Fouquet, la jeune policière municipale de Villiers-sur-Marne qui avait été tuée le 20 mai 2010 lors d'une fusillade.

Monsieur Vignal, vous l'avez dit : la sécurité est une priorité. À travers l'expérience des zones de sécurité prioritaires, nous obtenons des résultats parce que nous nous attaquons aux racines de la délinquance et parce que, avec le parquet, la police et la gendarmerie travaillent de manière très étroite.

J'en profite une nouvelle fois pour dire que le même rassemblement qui existe quand il s'agit de célébrer les succès de la police doit exister, d'une manière générale, quand il s'agit de s'attaquer à la délinquance, qui mine le moral des Français au quotidien.

Interruptions sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

La sécurité est une priorité, elle mérite plus que des débats absurdes et des polémiques qui n'ont pas lieu d'être. C'est ainsi que nous agirons au service de nos compatriotes.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.

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La parole est à Mme Annie Genevard, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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En préambule, je voudrais dire à M. le ministre du budget que les invectives ne sauraient masquer son refus de répondre à la question d'Olivier Carré.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Monsieur le Premier ministre, les services des douanes ont opéré récemment une saisie de plusieurs millions de paquets de cigarettes de contrefaçon, fabriqués en Chine puis écoulés dans certains quartiers de Paris. À trois euros le paquet, soit la moitié du prix légal, les acheteurs se laissent facilement tenter.

Cette situation est la conséquence directe de l'augmentation trop brutale du prix du tabac et emporte son lot d'effets pervers sur les consommateurs.

Depuis que vous êtes arrivé au pouvoir, on manifeste beaucoup pour protester contre votre politique. La semaine dernière, des centaines de buralistes, venus de toute la France, se sont rassemblés à Strasbourg pour dire tout à la fois leur colère et leur inquiétude.

En effet, la France s'apprête à lever les limitations d'achat de tabac étranger, alors que vous allez procéder à deux hausses du prix du tabac dans les semaines et mois à venir.

Depuis un rapport produit en 2011, on connaît les conséquences néfastes d'une fiscalité trop forte :…

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…achat de tabac à l'étranger, notamment dans les zones frontalières, encouragement du trafic illicite, consommation dangereuse pour la santé de produits contrefaits, perte de recettes pour l'État, à hauteur de deux milliards par an – ce n'est pas du lobbying, ça ! – fragilisation de la filière tabac, qui représente 120 000 emplois, fermeture d'un quart des bureaux de tabac en dix ans, soit six mille buralistes…

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Certes, la lutte contre le tabagisme est nécessaire

« Ah ! sur les bancs du groupe SRC

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mais elle ne peut se faire contre les entreprises, qui n'ont pas à endosser seules le coût des politiques sanitaires.

Monsieur le Premier ministre, dans un tel contexte, accepterez-vous, dans une approche interministérielle, d'organiser la concertation ?

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Comme vous le savez, madame la députée, il a été décidé à l'occasion de la loi de financement de la sécurité sociale et dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2013 une augmentation de la fiscalité sur le tabac. Elle sera bien entendu mise en oeuvre et permettra d'augmenter les recettes de l'État de 125 millions d'euros, mais elle a surtout vocation à dissuader un certain nombre de jeunes de consommer des produits dont on sait qu'ils peuvent avoir un impact sur leur santé.

Il y a avant tout dans cette mesure qui a été prise par ce gouvernement comme l'avaient fait d'autres dans le passé la volonté de faire en sorte que l'impact sur la santé de la consommation du tabac soit limité. D'ailleurs, cette augmentation de la fiscalité s'appliquera plus spécialement au tabac à rouler, dont on sait qu'il concerne tout particulièrement les jeunes populations.

La question est de savoir dans quelles conditions cette augmentation de la fiscalité sera répercutée par les industriels, puisqu'ils ont la possibilité de la répercuter ou non sur les prix. Vous savez que le ministre du budget établit son arrêté après la décision prise par les industriels. Ils ne sont pas obligés de répercuter cette hausse et peuvent décider de la date à laquelle ils la répercuteront.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Ce que je peux vous dire, c'est que nous sommes bien entendu très soucieux de la qualité de la relation avec les buralistes – je les ai personnellement reçus. Je les ai reçus, aussi, parce que le monopole dont ils bénéficient est la garantie que les conditions d'acheminement des produits vers les plus jeunes seront maîtrisées. J'attends donc la décision des industriels. D'autre part, en ce qui concerne les trafics en zone frontalière, je veux vous indiquer que des instructions très strictes ont été données aux douanes.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

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Madame la ministre chargée de l'égalité des territoires et du logement, ma question concerne le quartier d'affaire de la Défense. L'établissement public chargé de son aménagement, l'EPADESA, est dans une situation financière préoccupante puisqu'à la fin 2016 son déficit devrait se situer entre 188 et 364 millions d'euros. La création, en 2007, d'un établissement public, Defacto, chargé de l'entretien du quartier d'affaires et le transfert à cet établissement d'une partie des biens de l'EPADESA et de 120 millions d'euros pour leur remise en état, n'a fait qu'aggraver ce déficit.

Le projet de loi de modernisation de l'action publique et d'affirmation des métropoles, actuellement en débat au Sénat, prétend résoudre ces difficultés en annulant le versement des 120 millions d'euros et le transfert de propriété des biens de l'EPADESA à Defacto. Mais il ne règle pas la question du financement de la rénovation de ces biens. Surtout, il ne règle pas la question du devenir de l'EPADESA et de son modèle d'aménagement obsolète, véritable fuite en avant qui consiste à ajouter sans cesse des tours aux tours et à construire des milliers de mètres carrés de bureaux pour combler le déficit, sans jamais se soucier des conditions de vie et de transport des 150 000 salariés qui y travaillent déjà.

Alors que le quartier de la Défense a besoin de diversification avec des logements, des équipements publics et privés, des lieux de vie et d'animation, ainsi que d'un haut niveau d'exigence environnementale, ne pensez-vous pas, madame la ministre, que le temps est venu de donner un souffle nouveau à ce quartier en remettant en cause le modèle d'aménagement qui a prévalu jusqu'ici, en mettant fin au mandat d'un établissement public parvenu au terme de sa mission, en confiant l'entretien et les aménagements qui restent aux communes qui, depuis cinquante ans, en perçoivent les recettes fiscales ?

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.

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La parole est à Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'état, de la décentralisation et de la fonction publique

Madame la députée, je regrette que Mme Duflot ne soit pas là car elle vous aurait apporté plus de précisions. À travers le projet de loi de modernisation de l'action publique, nous proposons de revoir le statut de cet établissement public puisque, depuis longtemps, des contentieux sont apparus à propos, vous l'avez rappelé, de sa dette, de ses objectifs, de son portage… Nous avons donc proposé, d'abord au Sénat avant que le texte ne soit transmis à l'Assemblée, une évolution du statut de l'établissement. Il s'agit de la première étape pour sécuriser l'établissement chargé du quartier phare de cette grande région, qui se trouve toutefois en grande difficulté.

Après avoir sécurisé l'aspect juridique du statut, il s'agit de répondre à l'implication des communes. Faut-il, autour de la zone dense de Paris, à partir de vos réflexions comme à partir des contrats de développement du territoire, ou encore de la situation très particulière de l'établissement public de l'aménagement de la défense, réorganiser les intercommunalités pour porter des dossiers de ce type ? Sans doute. Faut-il essayer de promouvoir une meilleure solidarité entre ceux qui ont le plus de ressources et ceux qui en ont le moins ? Je le crois. Faut-il qu'ensemble nous imposions une réécriture collective bien pensée de l'intercommunalité que vous appelez de vos voeux ? J'en suis persuadée. Mais c'est au Parlement – d'abord au Sénat puis à l'Assemblée – d'y répondre.

En revanche, à propos de l'urgence de la réforme du statut de cet établissement public, nous sommes déterminés, avec Mme Duflot, à faire en sorte que les communes qui le supportent, au sens physique du terme, ne le supportent pas au sens financier.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.

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La parole est à M. Dino Cinieri, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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J'associe à ma question nos collègues de la Loire. Monsieur le Premier ministre, souvenez-vous : le 24 février 2012, le tour de France de la démagogie du candidat Hollande s'arrêtait à Florange. Là, juché sur une camionnette, il avait harangué les syndicalistes présents. Aujourd'hui, les paroles se sont envolées et reste une stèle : « ci-gisent les promesses de François Hollande. » Le 14 octobre 2011, le même candidat s'arrêtait à Amiens chez Goodyear. Là encore il eut des paroles qui sonnaient bien aux oreilles de ses interlocuteurs, assurant, l'air martial, qu'en matière industrielle on allait voir ce qu'on allait voir. Aujourd'hui, les 1 100 ouvriers du site Goodyear d'Amiens viennent d'apprendre la fermeture de leur site. Ici non plus, ni fleurs ni couronnes ; la campagne présidentielle et ses promesses sont loin. Je souhaiterais que le Premier ministre réponde sur ce point.

Malheureusement, la liste est longue : Pétroplus, Arkema, Technicolor, Lafarge et, dans ma circonscription – à Firminy et à Unieux –, deux entreprises sont également menacées, Apéram et Aubert & Duval.

Votre politique industrielle a fait long feu et, pire, vos décisions économiques et fiscales vont accroître la désindustrialisation du pays. Parfois, c'est l'État lui-même qui, sous le diktat de vos alliés écologistes, décide l'arrêt de sites comme Fessenheim, portant un coup à la crédibilité de notre filière nucléaire. Et, en fin de compte, chaque jour, mille personnes supplémentaires se retrouvent au chômage.

Alors, monsieur le Premier ministre, pas besoin d'être sorti de Polytechnique pour comprendre que ce qui crée de la richesse, de l'emploi, de la croissance, ce sont les entreprises. Quand allez-vous cesser d'augmenter, chaque jour, leurs impôts, leurs charges et leurs contraintes ?

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe UDI.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique.

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique

Monsieur le député, vous venez d'évoquer vous-même l'accroissement de la désindustrialisation du pays. Il est vrai qu'en termes de bilan, je vous le rappelle, ce sont un million d'emplois qui ont été détruits dans l'industrie à l'époque où vous étiez aux affaires (Protestations sur les bancs du groupe UMP) ; c'est aussi un déficit du commerce extérieur de 75 milliards d'euros. Il semble donc qu'en matière de bilan, vous n'avez pas de leçons à nous donner.

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Parlez-nous de l'avenir plutôt que du bilan !

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique

Précisément, ce Gouvernement fait exactement le contraire de ce que vous avez fait pendant les dix dernières années.

Exclamations continues sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique

Il mène une politique toute entière tournée vers la compétitivité de notre économie avec, dois-je vous le rappeler, un pacte pour la compétitivité, la croissance et l'emploi qui s'attaque à la compétitivité-prix des entreprises, puisqu'il réduit de 20 milliards d'euros le coût du travail, ainsi qu'à la compétitivité hors prix, à savoir l'innovation. Il s'agit de créer un environnement plus favorable aux entreprises que celui que vous avez créé lorsque vous étiez au pouvoir.

Qu'avons-nous fait avec l'accord national interprofessionnel, si ce n'est donner aux entreprises un cadre plus flexible pour s'adapter à l'environnement économique et aux cycles économiques ?

Même mouvement.

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique

Qu'avons-nous fait avec les assises de l'entreprenariat, si ce n'est réformer le régime de la taxation des plus-values de cessions, pour rendre le contexte plus favorable à l'investissement et à l'entreprenariat ? Qu'avons-nous fait en encourageant l'investissement dans les PME innovantes ? Autant de choses que vous n'avez pas su faire pendant que vous étiez aux affaires.

Cessez donc d'affirmer que le Gouvernement n'est pas favorable à l'entreprenariat. Au contraire, toute sa stratégie est de promouvoir la croissance pour les investissements et les emplois de demain.

Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique

Et les mesures annoncées par le Président de la République vont dans la direction que vous n'avez pas su emprunter.

Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.

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La parole est à M. Gérard Terrier, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le ministre de la défense, nous débattrons tout à l'heure du quatrième livre blanc sur la défense, afin d'éclairer nos choix stratégiques de défense et de sécurité nationale…

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…dans un contexte géopolitique en constante évolution, marqué par les menaces de plus en plus tangibles que constituent le terrorisme, la cyber-menace, la prolifération nucléaire et les pandémies.

À ce contexte extérieur s'ajoute le poids de l'héritage financier laissé par vos prédécesseurs

Exclamations sur les bancs du groupe UMP

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, qui limite nos moyens et rend inatteignables les objectifs fixés par le livre blanc de 2008. Le défi est donc de taille.

Au regard des expériences passées et des stigmates qu'elles ont laissés sur nos territoires, des craintes se sont manifestées. C'est le cas en Lorraine : cette terre déchirée par plusieurs conflits et malmenée par les mutations industrielles a été saignée à blanc par le livre blanc de 2008, qui y a supprimé sept mille postes. Les mesures compensatoires décidées à l'époque n'ont pas été à la hauteur, ni dans leurs ambitions, ni dans leurs réalisations, pour cette région dépourvue d'industries de défense, et déstabilisée par les restructurations industrielles, notamment dans la sidérurgie.

Aujourd'hui, à la lecture de ce nouveau livre blanc, je constate d'abord une différence de méthode : vous ne tranchez pas dans le vif et avancez pas à pas

Exclamations sur les bancs du groupe UMP

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, dans le dialogue avec l'ensemble des élus. Je constate également qu'un cap est donné, celui de préserver notre industrie de défense, et j'y suis particulièrement sensible.

Monsieur le ministre, comment entendez-vous mettre en oeuvre ces orientations, et selon quels critères ? Pouvez-vous nous assurer de la bonne articulation, tant au niveau national que local, de la stratégie et de l'emploi ?

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Gérard Terrier, comme vous l'avez rappelé, le Premier ministre présentera tout à l'heure le livre blanc sur la défense et la sécurité nationale pour la période 2013-2025. Vous pourrez constater que les décisions qui ont été prises à l'occasion de l'adoption du nouveau livre blanc sont clairement inspirées par le souci de préserver nos capacités industrielles.

L'industrie de défense et le potentiel technologique qu'elle représente sont un atout essentiel pour notre redressement industriel et productif, puisqu'ils représentent 165 000 emplois, dans 4 000 entreprises. C'est un enjeu pour la croissance et pour l'emploi, et c'est pourquoi un volume significatif des crédits du budget de la défense sera préservé pour permettre à notre industrie d'assurer de façon continue, dans les années à venir, les capacités inscrites dans la future loi de programmation. C'est aussi la raison pour laquelle le Président de la République et le Premier ministre ont décidé de maintenir au niveau actuel, c'est-à-dire au même niveau qu'hier, les crédits affectés à l'outil de défense.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Pour ma part, je veux qu'un effort particulier soit fait pour la compétitivité de notre industrie de défense : c'est la raison pour laquelle les crédits concernant la recherche et l'innovation seront particulièrement préservés.

Enfin, s'agissant des restructurations potentielles liées aux effectifs militaires, je sais que la région Lorraine a déjà beaucoup souffert dans le passé. Croyez bien qu'en cas de restructuration, nous mobiliserons tous les moyens de l'État pour éviter qu'elle ait des conséquences douloureuses et que nous agirons avec discernement et précaution.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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La parole est à M. Olivier Falorni, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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Ma question s'adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé et porte sur les dysfonctionnements du régime social des indépendants.

La création du régime social des indépendants en 2005 et celle de l'interlocuteur social unique en 2008 visaient à simplifier la gestion de la protection sociale des artisans, des commerçants et des professions libérales. Or l'instauration de ce dispositif a immédiatement mis en difficulté les 2 700 000 cotisants, comme l'a confirmé la Cour des comptes dans son rapport publié en septembre dernier.

Rappels de cotisations hasardeux, non-remboursement de soins, risques de pertes de droits, standards téléphoniques surchargés, appels surtaxés, acomptes provisionnels calculés sur l'exercice précédent : tout concourt à plonger des dizaines de milliers de petits entrepreneurs dans de grandes difficultés. Ils sont victimes de la double peine : frappés par les conséquences de la crise économique, ils doivent également subir les dysfonctionnements du RSI.

Je sais, madame la ministre, que vous vous employez à améliorer ce dispositif, qui a été mis en place de façon précipitée et mal maîtrisée. Je sais aussi que vous avez demandé un audit pour trouver rapidement des solutions.

Ma question est simple : quelles mesures concrètes pouvez-vous proposer à tous ces artisans, à tous ces petits commerçants et à ces professions libérales qui sont, ne l'oublions jamais, mes chers collègues, le premier employeur de notre pays ?

Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et UDI et sur de nombreux bancs du groupe UMP.

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Olivier Falorni, le gouvernement qui était en place en 2005 a fait le choix de confier la protection sociale des indépendants au RSI, pour ce qui relève des prestations, et aux URSSAF pour ce qui concerne le recouvrement des cotisations.

On a observé, depuis 2008, un nombre important de dysfonctionnements, que vous avez énumérés. Je ne reviens pas sur ce que vous avez dit, et qui est parfaitement exact. Le rapport de la Cour des comptes évalue à environ 6 % le nombre de travailleurs indépendants confrontés à des situations difficiles ou à des erreurs de calcul.

Il est absolument essentiel que les indépendants puissent compter sur un système de prélèvements et de versements qui soit à la fois sûr, simple et lisible, même s'il est évident que personne ne saurait remettre en question l'utilité des cotisations sociales qui sont versées, puisqu'elles permettent de financer notre protection sociale.

De ce point de vue, trois grandes orientations peuvent être mises en avant. D'abord, les URSSAF et le RSI se sont fortement mobilisés et deux cent soixante-dix équivalents temps plein ont déjà été mis en place depuis l'année dernière : ces effectifs supplémentaires devraient permettre au système de mieux fonctionner. Le RSI a ainsi pu mettre en oeuvre un suivi individualisé des réclamations, qui est tout à fait utile.

Le deuxième axe de travail est celui de la simplification, qui doit notamment permettre un étalement des paiements et des remboursements, lorsque c'est nécessaire. Depuis le début de cette année, les indépendants peuvent adapter le montant de leurs versements lorsque leurs revenus ont baissé.

Je veux vous dire, enfin, qu'un audit des systèmes d'information est prévu, qui nous permettra d'aller plus loin.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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La parole est à M. Guénhaël Huet, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Madame la ministre des sports, ma question porte sur le financement du football professionnel français.

Nos championnats de Ligue 1 et de Ligue 2 viennent de s'achever et, au cours de la saison, le sujet du financement et des difficultés de certains clubs est régulièrement venu sur le devant de la scène. Selon l'hebdomadaire France Football, dont les chiffres ne sont pas contestés par les instances du football, le déficit cumulé des clubs de Ligue 1 et de Ligue 2 atteint aujourd'hui la somme de 250 millions d'euros, même si la France fait plutôt figure de bon élève grâce au contrôle exercé par la direction nationale de contrôle de gestion.

Les difficultés financières des grands clubs européens sont en effet encore plus importantes, puisqu'elles s'élèveraient à 1,7 milliard d'euros, contre « seulement » 700 millions d'euros en 2007. L'Union européenne des associations de football, présidée par Michel Platini, a donc décidé de mettre en oeuvre une procédure de régulation des budgets des clubs que l'on appelle « fair-play financier ».

Avec mes collègues Thierry Braillard, Pascal Deguilhem et Marie-George Buffet, nous menons une mission relative à l'application du fair-play financier au football professionnel français.

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L'enjeu est important. Nous devons en effet atteindre deux objectifs contradictoires : la restauration de la santé financière de nos clubs, et le maintien de leur compétitivité au niveau international.

Enfin, étroitement lié au financement des clubs se pose le problème des droits attachés aux retransmissions télévisuelles, qui assurent près de 60 % des recettes des clubs de Ligue 1. Ces droits sont aujourd'hui le plus souvent obtenus par des chaînes payantes, ce qui pose des difficultés d'accès pour les publics non-abonnés.

Madame la ministre, je vous remercie de nous indiquer les mesures que le Gouvernement compte prendre.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Monsieur le député, veuillez excuser Valérie Fourneyron qui est actuellement à Berlin pour la conférence des ministres des sports.

Vous avez posé deux questions, je vais d'abord répondre à la seconde, qui porte sur le financement du sport professionnel et l'accès de tous les publics à l'ensemble des manifestations.

Vous savez qu'aujourd'hui un débat s'est ouvert à propos de la retransmission de Roland Garros, et notamment de la mise aux enchères de ces droits télévisés. Cela pose un problème. Notre législation date d'un décret de 2004 qui réserve un certain nombre de manifestations. Mme la ministre s'est exprimée sur cette question en indiquant que si, les négociations n'aboutissaient pas au terme de cette période de conciliation, le Gouvernement se réservait éventuellement la possibilité d'étendre le champ de ce décret, tant il nous paraît essentiel que les téléspectateurs puissent avoir accès gratuitement à l'ensemble des grandes manifestations sportives auxquelles ils sont attachés, et qu'il n'y ait pas de ce point de vue une exclusion par l'argent.

Votre autre question était plus spécifique et portait sur le financement du football professionnel. Je dois dire que sur ce sujet, le spécialiste du rugby que je suis est plus démuni pour vous apporter une réponse

Sourires

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Mais je peux vous assurer que naturellement, la ministre vous répondra directement.

Cette question-là est aussi liée à une autre, essentielle sur le plan politique, et qui me paraît partagée sur tous les bancs : va-t-on sauver notre modèle de solidarité entre le sport professionnel et le sport pour tous ?

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

C'est cette solidarité financière qui nous permet aujourd'hui d'avoir un modèle de sport républicain.

Mêmes mouvements.

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La parole est à Mme Annick Le Loch, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation, le rapport d'information rédigé par Catherine Vautrin et Jean Gaubert dressait à mi-parcours un bilan mitigé de l'application de la loi de modernisation de l'économie de 2008.

Bien qu'une maîtrise des prix à la consommation ait été constatée, il souligne que les relations commerciales entre les entreprises se sont dégradées et s'inscrivent dans un climat de défiance et de tension croissantes où la loi n'est pas respectée.

En effet, la négociabilité des prix instaurée par la LME a exacerbé le rapport de force totalement déséquilibré entre les distributeurs et les fournisseurs. Cette situation fragilise particulièrement nos 10 000 PME qui n'ont évidemment pas le même pouvoir de négociation que les grands groupes. Elles se retrouvent ainsi dans une situation toujours plus difficile, avec la dégradation de leurs comptes, des marges écrasées, un investissement réduit. Leur viabilité même est parfois menacée.

Les producteurs agricoles, particulièrement les filières d'élevage, subissent également de plein fouet cette course aux prix bas, alors que leurs coûts de production flambent. Certains distributeurs en sont bien conscients lorsqu'ils déclarent : « Nous détruisons de la valeur ». Cette guerre des prix bas que se livrent les sept centrales d'achat n'est-elle pas, monsieur le ministre, en train de mettre à mal l'emploi dans notre pays ?

La préservation du pouvoir d'achat des consommateurs est un enjeu essentiel, mais elle ne doit pas servir de prétexte au délitement de notre appareil productif. Préserver le pouvoir d'achat, oui, mais pas au prix de l'emploi et de la qualité de nos produits de consommation !

Monsieur le ministre, ma question est simple : pourriez-vous préciser comment le projet de loi consommation va permettre de garantir des relations commerciales apaisées, transparentes et équitables au profit de nos fournisseurs, de nos producteurs et bien sûr du consommateur ?

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe écologiste.

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La parole est à M. le ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation

Madame la députée Annick Le Loch, le projet de loi consommation comportera trois grandes catégories de mesures.

La première catégorie regroupe des mesures de protection des droits des consommateurs telles que l'action de groupe, la lutte contre les clauses abusives et la création d'un registre national du crédit aux particuliers, ou l'encadrement de la vente en ligne.

La deuxième catégorie de mesures concerne le soutien au pouvoir d'achat des ménages ; je pense à toutes les dispositions qui seront prises dans le domaine des assurances, de leur résiliation ou de la lutte contre la multiplication des assurances affinitaires.

Enfin, le projet de loi comportera des mesures d'ordre public économique, parmi lesquelles figurera le rééquilibrage du rapport de forces dans les négociations commerciales entre les distributeurs et les fournisseurs.

La LME a atteint un équilibre qu'il ne faut pas bouleverser, mais aménager, de sorte que le nouvel équilibre proposé par le projet de loi sur la consommation, qui sera discuté à partir du 24 juin dans cet hémicycle, ne s'établisse pas au détriment du pouvoir d'achat des Français.

Nous proposons de protéger les PME des abus qui persistent. Certaines PME estiment qu'elles sont prises en tenaille entre une augmentation du coût des intrants, liée à la volatilité du prix des matières premières, et une forme de guerre des prix pratiquée par certaines enseignes de la grande distribution.

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Et les charges sociales qui pèsent sur elles !

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation

C'est pourquoi nous introduirons une clause obligatoire de renégociation des contrats portant sur certains produits alimentaires dès lors qu'il y a volatilité du prix des matières premières.

Nous réaffirmerons de surcroît que les conditions générales de vente sont le socle de négociation commerciale, et en contrepartie de la négociabilité des prix, nous inscrirons la transparence comme une obligation, de façon à ce que la DGCCRF puisse contrôler le respect des engagements réciproques et, le cas échéant, assigner une partie pour déséquilibre significatif.

Enfin nous proposerons une réforme des délais de paiement pour que nos PME soient payées dans les délais légaux. Nous créerons donc un régime de sanction administrative qui permettra à l'État, par l'intermédiaire de la DGCCRF, de garantir le respect de la loi dans ce domaine.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.

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La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Monsieur le Premier ministre, pour la première fois de son histoire, le budget de l'Union européenne prévoit une baisse significative de l'enveloppe allouée à plusieurs politiques essentielles, dont le programme européen d'aide aux plus démunis, le PEAD. Ce programme représente à ce jour en France 32 % de l'aide alimentaire distribuée aux plus nécessiteux.

Pour la période 2014-2020, la Commission européenne propose une réduction de près de 40 % de l'aide alimentaire, dont l'enveloppe passerait de 500 à 357 millions d'euros par an.

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La position des États opposés au PEAD n'a pas changé : selon eux, ces politiques sociales relèvent des compétences nationales. Les bénévoles des associations, qui donnent leur temps au service des plus démunis, sont inquiets, et nous les comprenons.

La semaine dernière, la commission de l'emploi et des affaires sociales du Parlement européen a désapprouvé la diminution du fonds européen d'aide aux plus démunis – comme il est désormais dénommé – et a voté son maintien à 500 millions d'euros par an. La pérennisation de l'aide sera débattue par l'ensemble des députés européens en session plénière le 11 juin.

Monsieur le Premier ministre, les plus fragiles de nos concitoyens ne peuvent être la variable d'ajustement des prochaines négociations. Comment envisagez-vous de défendre la position de la France en faveur du maintien de ce dispositif essentiel ?

Par ailleurs, en février dernier, votre ministre délégué à l'agroalimentaire a déclaré que la France compenserait ce programme au niveau national à l'euro près si la diminution des aides était confirmée. Certaines associations caritatives craignent un effet d'annonce. Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous donc clarifier devant la représentation nationale la position officielle du Gouvernement sur l'aide alimentaire européenne ?

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Monsieur le député Decool, vous le savez : le Gouvernement est entièrement mobilisé pour le maintien de l'aide alimentaire aux plus démunis au niveau de l'Union européenne.

Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Le ministre chargé des affaires européennes, Thierry Repentin, pose cette question à tous les niveaux de négociation et à tous les partenaires qu'il rencontre.

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

D'ailleurs, les quatre associations d'aide alimentaire en France ne s'y trompent pas. Hier encore, Thierry Repentin et moi-même participions à une réunion de travail avec elles pour faire un état des lieux et préparer l'avenir.

La commission des affaires sociales du Parlement européen nous aide également : elle vient de rédiger un rapport qui sera voté lors de la prochaine session plénière du Parlement européen. Selon ce rapport, le plafond du fonds européen d'aide aux plus démunis pourrait être porté à 3,5 milliards d'euros dans le cadre du budget pluriannuel ; ce rapport souligne également la nécessité d'une année de transition de façon à assurer la pérennisation des finances, et préconise de conforter le caractère obligatoire de l'aide. Si vous voulez nous aider, mobilisez vos amis au sein du groupe PPE du Parlement européen !

Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

On a compris : pour vous, c'est toujours la faute des autres !

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

En France, nous travaillons également avec la plus grande assiduité, sans perdre de temps, à la mise en place d'une nouvelle procédure. En effet, la base juridique de cette aide a changé : elle ne dépendra plus de la PAC mais du FSE. Nous proposons la mise en place d'une procédure la plus simple possible, dont nous discutons avec l'ensemble des associations, pour faciliter le travail de ces dernières. Nous devons établir un programme opérationnel qui sera présenté à la Commission européenne lorsque le dispositif sera voté : nous sommes en train d'y travailler.

Monsieur le député, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a la conviction que l'Union européenne ne doit laisser personne sur le côté de la route, et certainement pas les plus pauvres et les plus démunis. C'est pourquoi nous nous battons. Nous n'avons pas gagné. Les associations d'aide alimentaire veulent que vous nous souteniez au moins sur ce point !

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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La parole est à M. Christian Franqueville, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre chargé des transports.

Monsieur le ministre, lors de la campagne, le Président de la République avait annoncé une réforme du système ferroviaire qui devait être à même de répondre aux enjeux de mobilité du XXIe siècle.

L'organisation actuelle du système, qui sépare la gestion de l'infrastructure entre RFF et la SNCF, se traduit par des dysfonctionnements qui dégradent la qualité de service des trains et ont une forte incidence sur le quotidien des usagers. Pendant dix ans, l'ancienne majorité s'est contentée d'organiser des assises et de faire des annonces avant les élections, tout en laissant la dette de RFF dériver pour atteindre 31 milliards d'euros.

Une réforme ambitieuse doit passer par un désendettement important et l'unification du secteur à travers la création d'une grande entreprise publique.

Dans ce contexte, le financement et la pérennisation de l'offre des trains express régionaux doivent être pris en compte. Ce service public de transport, reconstruit par les régions depuis quinze ans, est en effet un outil essentiel pour répondre aux besoins de déplacements des usagers dans nos territoires. Il est toutefois menacé par un manque de financement à long terme dans de nombreux territoires comme l'Ouest vosgien où la ligne 14 – pour ne citer que cet exemple – nécessite des investissements à hauteur de 50 millions d'euros. Ainsi, il sera impératif d'innover en matière de financement pour assurer la continuité d'un système essentiel pour l'équilibre de nos territoires.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous préciser les grands axes de la réforme à venir et les mesures qui seront prises pour satisfaire les besoins des usagers tout en maintenant un service public de qualité dans l'ensemble de nos territoires ?

Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Monsieur le député Christian Franqueville, vous l'avez souligné : la France est une puissance ferroviaire importante. Elle est forte de la mobilisation de ses 150 000 cheminots auxquels je rends hommage.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous ne parlez pas de leur régime de retraite !

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Elle est forte de ses 30 000 kilomètres de voies ferrées et de ses 2 000 kilomètres de lignes à grande vitesse, qui représentent un quart des lignes à grande vitesse d'Europe. Elle est forte de ses 15 000 trains en circulation chaque jour.

Mais notre pays connaît aussi des faiblesses, que vous avez soulignées, liées à la situation dont nous héritons.

Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Notre système ferroviaire est lesté par plus de 40 milliards d'euros de dette, dont 32 milliards pour le seul secteur de l'infrastructure.

Lors de la campagne électorale, le Président de la République s'est d'abord engagé à une amélioration de la qualité du service public ferroviaire. Il s'agit de répondre aux attentes des usagers, de permettre d'assurer l'égalité des territoires par le ferroviaire, de fortifier notre vocation industrielle, et de consolider la filière ferroviaire qui constitue l'une des vitrines de la France et contribue à la puissance de notre pays.

Sous l'autorité du Premier ministre, j'ai annoncé ce matin en conseil des ministres les grandes lignes de la prochaine réforme ferroviaire qui vous sera soumise. Nous voulons regrouper les deux entités actuelles au sein d'un groupe public ferroviaire intégré. En effet, la gestion de l'infrastructure était jusqu'à présent morcelée, éclatée, séparée de l'opérateur. Nous souhaitons reconstituer un groupe public puissant qui permettre à la fois d'intégrer ces deux entités, de répondre aux enjeux de la stabilisation de la dette et de réaliser l'unité sociale voulue par la famille des cheminots. Nous devons enfin donner aux collectivités locales, autorités organisatrices de transport, et à l'État les moyens de renouveler le matériel roulant. Il s'agit d'un enjeu majeur, pour lequel 3 milliards d'euros seront mobilisés, notamment pour la modernisation des trains. Nous aborderons ensemble ce grand chantier !

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

Réforme ferroviaire

La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement relative au Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution.

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Monsieur le président, monsieur le ministre de la défense, madame la présidente de la commission de la défense nationale et des forces armées, mesdames et messieurs les députés, je l'ai déjà dit à cette tribune, au Mali aujourd'hui comme hier sur d'autres théâtres, notre armée est l'honneur de la France. La valeur de ses officiers et de ses sous-officiers, et la qualité de ses soldats assurent la défense de notre pays et lui valent d'être respectée partout dans le monde. C'est un héritage, c'est une garantie pour l'avenir, et c'est notre responsabilité. Cet avenir doit se bâtir de manière lucide et responsable.

Le nouveau Livre blanc de la défense et de la sécurité nationale fait oeuvre de vérité et d'ambition. Il faut d'abord tenir compte de l'évolution du paysage stratégique depuis le Livre blanc précédent, celui de 2008 : la crise économique et financière, les révolutions arabes, l'évolution de la posture des États-Unis, les difficultés que traverse l'Europe, pour ne citer que l'essentiel. Mais il faut également rétablir une véritable cohérence, dans la durée, entre l'analyse des défis posés à notre sécurité et les moyens dont notre pays se dote pour y faire face.

Le modèle dessiné par le précédent Livre blanc était, à l'évidence, dans l'impasse. Les plus hauts responsables militaires de notre pays avertissaient, dès 2011, que certains des contrats opérationnels qu'il définissait étaient, en pratique, inaccessibles. Sur le plan budgétaire, la Cour des comptes relevait en juillet 2012 un écart d'au moins 3 milliards d'euros entre les prévisions et les réalisations. Et elle soulignait que cet écart ne pouvait que s'accroître de façon vertigineuse si de nouvelles orientations n'étaient pas prises.

Mesdames, messieurs les députés, parce que notre responsabilité est que la France conserve la maîtrise de son destin, notre devoir impérieux était de définir ces nouvelles orientations. Tel est l'objet du nouveau Livre blanc. Il dessine une véritable ambition pour la défense et la sécurité nationale, tout en intégrant pleinement – et c'est aussi notre responsabilité – la nécessité du redressement de nos comptes publics. Mais ce redressement, mesdames et messieurs les députés, c'est aussi une composante essentielle de notre souveraineté.

Notre projet s'appuie sur une analyse sans complaisance des risques et des menaces auxquels la France est confrontée. Ce sont d'abord les menaces de la force, qu'il s'agisse de conflits entre États, dont beaucoup affectent la sécurité de l'Europe, de la prolifération des armes de destruction massive, ou encore du développement par certaines puissances de capacités informatiques offensives.

Mais ce sont aussi les risques de la faiblesse, c'est-à-dire les conséquences de la défaillance de certains États à exercer les responsabilités de base de la souveraineté. C'est l'essor des trafics, de la piraterie, du terrorisme, voire du chaos de la guerre civile : dans bien des cas, c'est la sécurité de l'Europe, et donc de la France, qui est mise en cause.

C'est, enfin, l'amplification de certaines menaces. La mondialisation facilite l'action des réseaux terroristes ou la prolifération. Elle aggrave aussi la vulnérabilité des systèmes d'information, et démultiplie les risques naturels, sanitaires ou technologiques susceptibles de désorganiser profondément nos sociétés.

La vérité, c'est que les menaces qui pèsent sur la France et sur l'Europe sont loin d'avoir diminué depuis 2008. À ce constat, nous apportons une réponse qui est conforme aux exigences de défense et de sécurité de la France, mais aussi à la mesure de nos engagements et de notre place dans le monde. Nous le faisons en partant d'une définition claire et hiérarchisée de nos priorités.

Outre la protection de notre territoire, de nos ressortissants, et la continuité des fonctions essentielles de la nation, elles portent d'abord sur l'environnement de l'Europe : l'Afrique, le golfe arabo-persique et jusque dans l'océan Indien. Sur tous ces théâtres, la France doit être en mesure, seule ou en coalition, de s'engager de manière déterminante, tout en gardant la capacité de contribuer à la paix et à la sécurité internationales partout ailleurs dans le monde.

Le nouveau modèle d'armée que définit le Livre blanc et les missions qu'il permet de remplir répondent en tous points à ces priorités.

Il s'agit, tout d'abord, de garantir la protection permanente du territoire national et de la population française, avec des moyens de surveillance aérienne et maritime appropriés, et des capacités d'intervention sur le territoire. Par exemple, en cas de crise majeure, les forces terrestres seront en mesure de fournir jusqu'à 10 000 hommes en renfort des forces de sécurité intérieure et de sécurité civile.

Il s'agit, ensuite, d'assurer la permanence de la mission de dissuasion. C'est la garantie ultime contre les menaces d'agression qui cibleraient nos intérêts vitaux. Elle nous prémunit de tout chantage qui paralyserait notre liberté de décision et d'action. Ses deux composantes, océanique et aéroportée, confortées par le programme de simulation, seront maintenues, dans le respect du principe de stricte suffisance. À ceux qui en critiquent la pertinence ou le coût, le Gouvernement répond, comme l'a fait le Président de la République dans son discours à l'Institut des hautes études de défense nationale, vendredi dernier, que cette garantie est plus que jamais indispensable dans le contexte stratégique d'aujourd'hui, et qu'il n'est pas excessif d'y consacrer un peu plus de 10 % du budget de la défense nationale. Il faut rappeler ce chiffre eu égard aux chiffres fantaisistes qui sont si souvent avancés. Et c'est bien l'objet d'un débat comme celui-ci que de le rappeler.

Il s'agit, enfin, de conforter nos capacités d'intervention extérieure. Outre une force de réaction immédiate de 2 300 hommes, nos armées pourront être engagées dans des opérations de gestion de crise internationale sur trois théâtres distincts, à hauteur de 7 000 hommes. C'est plus que ce que nous avons mobilisé pour le Mali. Nos armées pourront aussi être engagées dans une opération de guerre, contre des adversaires dotés de capacités étatiques, à hauteur de 15 000 hommes des forces terrestres, avec les composantes maritimes et aériennes appropriées. Nos forces restent dotées d'une capacité d'entrée en premier dans tous les milieux, et d'une capacité à planifier et à conduire ces opérations seules ou en coalition.

Le modèle d'armée défini par le Livre blanc est cohérent avec la nature et la diversité de ces missions. Il répond d'abord à un principe d'autonomie stratégique. La France doit disposer à tout moment de sa liberté d'appréciation, de décision et d'action, pour prendre l'initiative d'opérations qu'elle estimerait nécessaires, comme elle l'a fait en réponse à l'appel à l'aide du Mali.

Elle doit aussi pouvoir assumer son rôle en toute souveraineté, au sein d'une alliance ou d'une coalition. Ce modèle d'armée repose par ailleurs sur le choix de différencier l'équipement des forces en fonction des exigences propres à chaque type de mission, et celui de pousser plus loin la mutualisation de capacités polyvalentes et rares.

Le format de nos armées permet de remplir entièrement les missions que j'évoquais à l'instant. En tout cas, ce qui est sûr, c'est que ce format porte haut les ambitions de la France dans le monde. Nos alliés ne s'y sont d'ailleurs pas trompés, en saluant le projet que dessine ce nouveau Livre blanc. Après avoir salué notre engagement au Mali, ils y voient la cohérence et la continuité de notre action.

Je ne méconnais pas pour autant l'ampleur de l'ajustement qu'imposera ce nouveau modèle à l'ensemble du ministère de la défense. Il entraîne une réduction de 24 000 postes par rapport au modèle défini en 2008, mais qu'il faut mettre en perspective avec les 54 000 suppressions décidées à l'époque. Cette réduction devra préserver au mieux les unités opérationnelles, ce qui exigera une évolution de l'organisation des forces, mais aussi du ministère lui-même. Je fais toute confiance à Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, pour conduire avec détermination et discernement cette nouvelle étape de la réforme, en cohérence avec le Livre blanc.

Nous nous attacherons à limiter autant que possible les conséquences de ces évolutions pour les territoires. La plus grande attention sera portée, j'y veillerai personnellement, à la situation concrète de chacun d'entre eux, au dialogue préalable, indispensable, avec les élus et à l'accompagnement des évolutions nécessaires.

Nous prenons ainsi toute la mesure des efforts qui sont exigés des personnels de la défense. La précipitation qui a marqué les années passées a provoqué des désordres inacceptables. Ne voyez dans mes propos aucune volonté de polémique, c'est simplement une réalité. Je prends l'exemple du système de paie Louvois, mal ressenti par les militaires. Dès son entrée en fonction, Jean-Yves Le Drian, a perçu qu'il y avait là un problème et s'est appliqué résolument à trouver la solution, avec la mobilisation de tous. Je l'en remercie parce que c'est essentiel pour ceux qui sont pénalisés chaque mois. Lorsqu'ils reçoivent leur solde, il manque un peu d'argent. Il faut donc résoudre le problème et faire en sorte qu'il ne s'étende pas à d'autres administrations.

Les évolutions mises en oeuvre seront assorties des mesures incitatives indispensables à leur réussite, dans le cadre d'une politique de ressources humaines favorisant une gestion active des carrières. Ces évolutions doivent s'appuyer sur un dialogue social enrichi et une rénovation du dispositif de concertation au sein des armées. Nos soldats, nos sous-officiers et nos officiers doivent se sentir soutenus et pleinement respectés : c'est aussi là, dans leur vie quotidienne, que doit s'exprimer en permanence la reconnaissance de la nation.

De même, la réflexion fructueuse qui a associé défense et justice pour prévenir une judiciarisation excessive de l'action militaire se traduira dès la future loi de programmation.

J'ai pleine confiance dans l'engagement des hommes et des femmes de la défense pour faire vivre et réussir ce nouveau modèle. Les opérations récentes soulignent la qualité de cet engagement. Elles nous en rappellent l'exigence et la valeur. Je profite de cette occasion pour leur renouveler ici l'hommage de la nation tout entière, et je remercie l'ensemble des groupes de l'Assemblée nationale de l'avoir manifesté à l'occasion de notre engagement au Mali. Il est important de le proclamer mais il est aussi important de le traduire en actes et en décisions. Tel est justement l'objet de ce Livre blanc.

Nos soldats doivent bénéficier d'un entraînement conforme aux exigences de leurs missions. Ils l'attendent, avec raison, et cela fera l'objet de toute notre vigilance.

Ils doivent pouvoir mettre en oeuvre, avec une disponibilité suffisante, des équipements performants. Leur renouvellement se poursuivra selon les priorités retenues en faveur des capacités de dissuasion, de renseignement et de projection. Aux lacunes relevées lors des dernières interventions répond l'effort engagé dans le domaine du transport aérien, du ravitaillement en vol et des moyens de renseignement.

Ce modèle d'armée consolide une démarche de modernisation raisonnée, sans sacrifier les effectifs nécessaires à l'action, et en veillant aux conditions d'activité. Il nous permet de maintenir l'excellence de notre outil de défense. Il prépare et préserve l'avenir.

Telle était aussi notre préoccupation, vous l'imaginez bien, dans le domaine de l'industrie de défense. Sa vitalité est d'abord une condition de la souveraineté et de l'autonomie stratégique de la France. Il faut toujours y veiller, y compris dans les négociations commerciales. Elle est aussi, avec plus de 4 000 entreprises de très haute valeur ajoutée et fortement exportatrices, et environ 165 000 emplois, un atout majeur pour le dynamisme de notre économie. On sait que l'industrie de défense en tant que telle crée des emplois, apporte de la plus-value, mais essaime aussi dans d'autres industries et permet d'autres avancées technologiques. Elle profite donc à toute notre industrie, à toute notre économie.

Les choix que nous avons faits préservent l'essentiel. Le rythme du renouvellement des équipements sera ajusté, mais nous avons veillé à éviter toute rupture et à garantir ainsi le maintien de l'excellence et du potentiel de notre industrie de défense. De même, les efforts de recherche seront maintenus au niveau atteint en 2013.

Enfin, nous apporterons, dans le strict respect de nos engagements européens et internationaux, et avec un souci de transparence accru envers le Parlement, un soutien actif aux exportations de défense.

Ce projet conforte aussi la démarche que nous menons pour tirer le meilleur parti de la construction européenne et de notre place dans l'OTAN.

Il nous permettra de poursuivre la mobilisation pour construire l'Europe de la défense. Nous connaissons ses limites, mais nous en mesurons aussi tout le potentiel, dans un contexte où les contraintes financières suggèrent davantage de synergies. La France doit être moteur dans la recherche de ces synergies. Pour répondre à des menaces largement communes, nous avons tout à gagner à des interdépendances librement consenties, et nos partenaires comprennent bien que, dans certaines circonstances exceptionnelles, la France ne peut pas, même si elle assumera toujours ses responsabilités, porter seule la réponse à ces menaces.

Nous allons donc progresser avec pragmatisme, en favorisant des opérations communes, en développant ensemble des capacités propices à la mutualisation, comme le transport aérien – nous avons déjà commencé à le faire, mais il faut prolonger l'effort –, le ravitaillement en vol, ce qui est essentiel, les drones ou les satellites d'observation, et en favorisant des programmes en coopération, en relançant le rapprochement de nos industries de défense, dont l'intégration dans la filière des missiles offre un exemple réussi. Nous devons construire de vrais champions européens de l'industrie de défense et leur permettre de mieux accéder à certains marchés internationaux. Notre démarche s'appuiera sur des partenariats d'excellence. Celui que nous avons noué avec le Royaume-Uni doit en inspirer d'autres. Elle doit affirmer aussi une dynamique à l'échelle de l'Union tout entière. Celle-ci s'est d'ailleurs donné rendez-vous sur le sujet au Conseil européen de la fin de l'année.

Cet engagement européen résolu va de pair avec une participation pleine et entière à l'OTAN. Comme l'a encore rappelé le Président de la République vendredi dernier, la France doit y conserver son identité et son autonomie. Elle doit y intensifier son influence, en veillant à ce que les initiatives qui y sont développées confortent la dynamique européenne. Le rapport commandé à Hubert Védrine avait d'ailleurs fait en ce sens un certain nombre de recommandations particulièrement pertinentes au Président de la République.

Cette dynamique européenne est également présente dans les autres dimensions de la sécurité nationale, de l'analyse des risques jusqu'aux actions civilo-militaires de prévention, de stabilisation ou de gestion de crise.

Au plan national, un contrat général interministériel fixera et préservera les capacités civiles nécessaires à ces missions, en complément des moyens militaires mobilisables en cas de crise grave. Une attention particulière sera portée aux outre-mer et à la combinaison des capacités militaires et civiles nécessaires à la protection de chaque territoire.

Le Livre blanc entérine un effort prioritaire et indispensable en faveur du renseignement. C'est l'une des clés de notre autonomie stratégique. C'est essentiel pour notre sécurité, notamment dans la lutte contre le terrorisme. Le renforcement des moyens humains et techniques des services devra s'accompagner d'une extension des prérogatives du Parlement. Le ministre de l'intérieur, en liaison avec le ministre de la défense, y travaille déjà, dans le dialogue avec les présidentes des commissions compétentes, afin que le Parlement puisse pleinement exercer son contrôle de la politique gouvernementale, dans ce domaine comme dans les autres.

Enfin, le Livre blanc définit une stratégie ambitieuse de cyber-défense. Elle permettra de renforcer le niveau de sécurité des systèmes d'information vitaux, question essentielle, et le Parlement sera saisi de mesures en ce sens. Elle développera nos capacités à identifier les attaques et, le cas échéant, à riposter de manière adéquate.

Mesdames, messieurs les députés, ces choix reflètent une double exigence : le maintien d'un effort de défense volontariste et le retour à l'équilibre de nos comptes publics en 2017. En euros constants, la nation consacrera à la défense nationale 364 milliards d'euros entre 2014 et 2025, dont 179,2 milliards sur la période de la future loi de programmation militaire.

Les premières années de cette programmation, nous maintiendrons un effort financier annuel de 31,4 milliards d'euros, soit le montant auquel nous l'avons stabilisé en 2012 et en 2013. Le retour à l'équilibre des comptes publics nous permettra ensuite d'accentuer cet effort. Il conjuguera crédits budgétaires et ressources exceptionnelles, qui sont identifiées et seront intégralement affectées à la mission « Défense ». Ce sont donc des choix clairs, fermes et, je dois le dire, courageux. Le projet de loi de programmation militaire qui sera transmis au Parlement cet été en témoignera.

Le Président de la République le rappelait dans son discours sur la défense à l'Institut des hautes études de défense nationale, « la France a besoin d'une défense forte pour rester ce qu'elle est : une grande nation, un allié fiable, une puissance qui porte à l'échelle mondiale des responsabilités éminentes ».

Je sais que vous êtes nombreux à partager cette ambition. Je souhaite même que le Parlement soit capable de se rassembler sur ces questions essentielles, qui concernent à la fois l'intérêt national, la sécurité de notre territoire et celle des Français, l'influence de la France dans le monde. Les réflexions que vous avez conduites, madame la présidente de la commission de la défense, avec les membres de votre commission et d'autres commissions témoignent de cet intérêt, ainsi que l'implication de vos représentants dans les travaux de la commission du Livre blanc, dont je salue la qualité, qui nous ont aidés à conclure lors de la réunion du conseil de défense, sous l'autorité du Président de la République. Nous avons arrêté des choix. Le Président de la République a fixé les orientations. Ce Livre blanc dessine un modèle renouvelé, mais qui est fidèle à l'ambition que nous avons pour la France et, surtout, je le répète, qui est porteur d'avenir.

Notre défense restera au premier rang en Europe. La France demeurera l'une des seules puissances au monde à disposer à la fois d'une dissuasion nucléaire autonome, d'une capacité d'intervention extérieure éprouvée et modernisée et d'une industrie de défense performante. C'est un atout pour notre pays. Cette défense, c'est une défense forte, à la mesure de notre statut de membre permanent du Conseil de sécurité, à la mesure aussi de l'ambition que la France porte pour elle-même et pour ses partenaires, en Europe et au service de la paix dans le monde.

Je souhaite que le débat qui commence, avec la contribution des ministres de la défense et de l'intérieur, permette de renouveler l'adhésion des représentants de la nation à cette ambition et à ce projet. Je vous remercie à l'avance de l'appui que vous y apporterez.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Christophe Guilloteau, pour le groupe UMP.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre de l'intérieur, monsieur le ministre de la défense, madame la présidente de la commission de la défense, mes chers collègues, on pouvait avoir des inquiétudes, suite au rang qui a été donné, il y a un an, au ministre de la défense.

Nous avons pris acte de la décision du Président de la République d'établir un nouveau Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale. Par son histoire, sa culture, ses idées, la France a toujours occupé une place de premier plan sur la scène internationale. Le contexte géopolitique actuel rend encore plus présente la nécessité de défendre les valeurs de liberté et de démocratie qui sont les nôtres. La stratégie de défense que nous choisirons aujourd'hui dessinera la France dans laquelle nous vivrons demain.

« La France a besoin d'une défense forte pour rester ce qu'elle est, un pays indépendant. » Souhaitons donc que ces mots prononcés par le Président de la République lors de la présentation du Livre blanc, vendredi 24 mai, devant les auditeurs et responsables de l'Institut des hautes études de défense nationale, ne se limitent pas à de nobles intentions. J'en profite pour saluer les auditeurs de cet institut, présents dans les tribunes, et plus particulièrement le comité 4, ainsi que son président, M. Nour-Eddine Zanouda.

Membre de la commission du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, j'ai pris toute ma part à ce travail de collaboration avec mes collègues parlementaires, les représentants de l'État, les militaires, ainsi que des experts indépendants, afin de définir la stratégie de défense française pour les années à venir. Cette entreprise commune aura été riche d'échanges et de débats de qualité avec les principaux acteurs de la défense française et européenne. Je regretterai cependant le manque de coordination finale et les difficultés d'agenda du maître d'oeuvre qui auront retardé la publication de nos travaux. Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour remercier ceux qui ont dû finaliser ce document de travail.

L'objectif premier de notre politique de défense est de préserver la souveraineté de notre pays et d'assurer la sécurité de nos concitoyens à l'intérieur et à l'extérieur de nos frontières. Je l'évoquais précédemment, les évolutions économiques et géostratégiques survenues au cours des cinq dernières années – crise financière, printemps arabes, terrorisme – nécessitent une adaptation de notre stratégie de défense au regard de ces nouveaux enjeux.

Néanmoins, force est de constater que la ligne directrice de ce nouveau Livre blanc maintient et renforce les préconisations déjà établies par le précédent.

C'est le cas, en premier lieu, de la notion de sécurité nationale, apparue pour la première fois en 2008, et qui revêt aujourd'hui un caractère particulièrement important puisqu'elle prend en compte la diversification des risques et des menaces pesant sur notre pays, notamment les risques imputables aux acteurs non étatiques.

Ensuite, nous constatons que les cinq grandes fonctions stratégiques identifiées en 2008 et développées dans le chapitre VI du Livre blanc, à partir de la page 69, restent pleinement valables. Les missions classiques de dissuasion et d'intervention sont évidemment essentielles, mais je souhaiterais insister tout particulièrement sur les fonctions de connaissance et d'anticipation, et par là même de prévention des conflits, qui nécessiteront de mettre à disposition de nos armées de nouveaux moyens de défense.

Le développement de nouvelles formes de risques et de menaces auxquels nous sommes confrontés – terrorisme, cyber-menaces, crime organisé, prolifération nucléaire – nous amène à repenser globalement notre stratégie de défense, qui doit s'inscrire aujourd'hui dans le cadre de l'alliance atlantique et de notre engagement dans l'Union européenne. Nous y prendrons toute notre part, sans perte d'indépendance. C'est le chapitre V.

Je me réjouis du retour de la France dans le commandement militaire intégré de l'OTAN, qui ne suscite plus de craintes de la part de nos collègues socialistes. Je me rappelle de certains propos de M. Fabius à cette tribune le 17 mars 2009, qui considérait que cette réintégration était « contraire aux intérêts de la France ». Non, la voix de la France ne s'est pas « banalisée » au sein de cette organisation.

J'ajouterai que c'est conjointement avec nos partenaires européens que cette organisation doit travailler à des solutions adaptées aux multiples risques et menaces auxquels nous sommes aujourd'hui confrontés. Avec mon collègue Philippe Nauche, j'étais présent ce matin à Bruxelles, dans le cadre de la mission d'information de cette assemblée sur l'opération Serval. Les responsables de la politique de défense européenne nous ont fait savoir qu'ils attendaient beaucoup du Conseil européen du mois de décembre.

Compte tenu de ses capacités, la France devra d'ailleurs jouer un rôle moteur dans la poursuite du développement de la défense européenne. À ce titre, on peut citer le conflit malien, dans lequel la coopération européenne aurait pu être encore améliorée. Car, si nos partenaires ont été au rendez-vous dans l'organisation logistique du conflit, nous aurions pu trouver là l'occasion de mutualiser nos unités de combat.

Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale consacre une large part à l'exposé de la situation géopolitique internationale et il a le mérite de dégager des zones d'interventions prioritaires : l'Europe, la Méditerranée, l'Afrique du Nord et l'Afrique subsahélienne.

Face à ce constat, et après avoir défini une stratégie de défense au service des objectifs que nous nous sommes fixés, la question essentielle qui se pose aujourd'hui à nous reste celle des moyens que nous souhaitons mettre en oeuvre pour servir nos ambitions et conserver l'autonomie de nos armées. Autrement dit : vers quel format d'armée voulons-nous nous diriger ?

Dans un contexte budgétaire contraint, et devant la nécessaire obligation de rétablir l'équilibre de nos comptes, le Livre blanc fixe le budget de la défense à 364 milliards d'euros sur la période 2014-2025, et à 179 milliards d'euros pour les années 2014 à 2019, période couverte par la prochaine loi de programmation militaire. Soit une stabilisation du budget annuel actuel.

Or, si nous voulons conserver notre autonomie stratégique, nous devons adapter notre outil de défense aux contraintes des conflits modernes, c'est-à-dire investir dans les nouvelles technologies nécessaires aux activités de renseignement et de lutte contre les cyber-attaques, mais aussi moderniser et accroître la capacité de nos matériels existants.

Comme l'a annoncé le Président François Hollande à l'IHEDN, on s'achemine vers l'achat de drones de surveillance et de combat, d'avions de transport A400M et de ravitaillement en vol MRTT, de missiles anti-navires ou encore de frégates multi-rôles FREMM et de véhicules blindés VBMR, sans stopper les programmes déjà lancés de Rafales, d'hélicoptères de combat Tigre et d'hélicoptères de transport. Espérons que ces engagements seront tenus, monsieur le ministre de la défense.

Pour cela, et dans un contexte de forte concurrence internationale, le soutien de notre industrie de défense doit rester un axe prioritaire pour notre pays, parce que notre industrie de défense est l'une des meilleures au monde, parce qu'elle est source d'innovation en matière de recherche et de hautes technologies, parce que son poids dans notre économie est considérable. Elle représente en effet 15 milliards d'euros de chiffre d'affaires, dont un tiers à l'exportation, et 165 000 emplois directs et indirects.

Pour conclure, j'évoquerai les femmes et les hommes qui ont choisi de mettre leurs vies au service de la France et dont je tiens à saluer le courage et le dévouement. Malheureusement, dans le cadre budgétaire énoncé, l'une des variables d'ajustement reste les effectifs humains. Sur la période 2014-2019, c'est la suppression de 34 000 postes qui est prévue. Dans un tel contexte, le groupe UMP restera particulièrement attentif et vigilant quant aux mesures à prendre afin de favoriser l'accompagnement social, humain et économique de ces personnels civils et militaires.

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Mais pour nous, législateurs, la vraie réalité de la défense, c'est la loi de programmation militaire, que nous attendons avec impatience et pour laquelle nous serons des partenaires loyaux mais, s'il le faut, sans concessions.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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La parole est à M. Philippe Folliot, pour le groupe UDI.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre de la défense, madame la présidente de la commission de la défense, mes chers collègues, voilà bientôt cinq mois que la France est engagée au Mali. Les députés du groupe UDI ont soutenu l'opération Serval dès son lancement, et nous nous félicitons des actions, exemplaires et admirées, menées par nos militaires dans des conditions souvent très difficiles. Cet engagement de nos troupes, c'est avant tout l'engagement de la France pour la défense de l'intégrité territoriale d'un État allié, pour la démocratie, la liberté et la lutte contre le terrorisme et le fondamentalisme.

La question qui se pose est la suivante : demain, une telle intervention sera-t-elle possible ? La France sera-t-elle en mesure de continuer à défendre ses valeurs fondamentales ? Force est en effet de constater que ce Livre blanc confirme les craintes de nombreux militaires et spécialistes, et consacre l'abandon d'une réelle ambition pour la défense française.

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Je tiens tout d'abord à exprimer un regret, celui que ce Livre blanc soit le fruit d'un cénacle d'experts plutôt que d'un travail consensuel réunissant toutes les parties concernées. Non seulement ce document n'a pas été débattu devant le Parlement avant sa diffusion, mais en outre la plupart des groupes parlementaires n'ont pas été associés à sa rédaction.

Au-delà de ce problème de forme, on demande à nos armées, une fois encore, de continuer à faire mieux mais avec moins. Il est vrai que des avancées singulières sont perceptibles dans les domaines de la cyber-défense, de la cyber-sécurité et du renseignement. Toutefois, nous constatons qu'aucun choix réel et marquant n'a été fait sur des sujets clés tels que la dissuasion, notamment la deuxième composante aéroportée, la prévention, le modèle, l'OTAN, l'Europe de la défense, ou encore les sociétés militaires privées. De plus, l'importance stratégique de l'océan Indien et du Pacifique, qui regroupent 90 % de notre zone économique exclusive, n'est pas mentionnée.

Nous sommes tous ici conscients des contraintes budgétaires très fortes qui pèsent sur le budget de la défense, dans un contexte difficile de redressement des finances publiques. Un effort très important a d'ailleurs déjà été consenti par la défense dès le budget 2013, et notre armée contribue largement, et plus qu'à proportion, depuis plusieurs années, à l'effort de réduction des déficits ; elle a de surcroît dû supporter en même temps le scandale Louvois et la difficile mise en oeuvre de la réforme des bases de défense.

Mais les nouvelles mesures annoncées nous paraissent déraisonnables, excessives et terriblement menaçantes : l'incohérence entre ambitions stratégiques et contraintes budgétaires est flagrante. En effet, la baisse programmée du budget sur cinq ans, avec de surcroît près de 6 milliards d'euros de recettes exceptionnelles particulièrement aléatoires, touchera inéluctablement les unités opérationnelles. Au-delà des 45 000 suppressions de postes déjà effectuées, sur les 55 000 prévues, les 24 000 supplémentaires confirmées par le chef de l'État vendredi dernier ne feront qu'aggraver le problème.

La baisse des objectifs opérationnels, certes désormais plus réalistes, et des niveaux de livraison de matériel aura de lourdes conséquences économiques et sociales. Il y a un hiatus évident entre la puissance proposée et la puissance assumée. Ce Livre blanc marque l'affaiblissement de notre défense, et donc la vision d'une France étriquée, reléguée au rôle de puissance continentale et européenne, avec quelques visées méditerranéo-sahéliennes.

Membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, la France devrait au contraire demeurer, compte tenu, qui plus est, de sa dimension ultramarine, une puissance globale et mondialisée. Les députés du groupe UDI considèrent que, sur ce sujet crucial pour la France, il eût été nécessaire de parvenir à un consensus national. Nous attendions du chef de l'État qu'il définisse une véritable ambition nationale et européenne. Une stratégie cohérente doit être mise en place pour notre défense, de manière stable, avec une visibilité sur le moyen et le long termes, alors que ce Livre blanc ne se projette réellement que sur cinq ans.

La première considération de ce document semble bel et bien ne résider que dans une dimension budgétaire, faisant fi des conséquences sociales des restrictions sur notre industrie de défense, si importante pour notre balance commerciale.

De plus, nous devons impérativement garder à l'esprit le rôle fondamental d'ascenseur social de la défense, premier recruteur de jeunes non diplômés. Une baisse des effectifs ne pourra que détériorer ce lien social, de la même façon que l'indigence relative aux réserves ne favorisera ni l'efficacité opérationnelle ni le lien armée-nation.

Nous savons les efforts personnels que vous avez déployés, monsieur le ministre de la défense, pour sauver ce qui pouvait l'être. Les députés du groupe UDI ne voient malheureusement pas la stratégie d'avenir de la France pour sa défense, et appellent le Gouvernement à faire de la défense la priorité régalienne qu'elle devrait être et qu'elle n'est effectivement pas. Il y va de la sécurité de notre pays et de tous les Français, mais aussi de la grandeur, du rayonnement et de l'honneur de la France.

Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.

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La parole est à M. François de Rugy, pour le groupe écologiste.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre de la défense, madame la présidente de la commission de la défense, mes chers collègues, cinq minutes, c'est court, pour évoquer les choix stratégiques de notre politique de défense pour les cinq années à venir. D'autant plus que les différents groupes politiques n'ont pas été sollicités par la commission du Livre blanc, ce que je regrette. Les écologistes sont aujourd'hui présents, par ma voix, dans ce débat, et ils continueront à l'être. Nous sommes d'autant plus volontaires que nous sommes favorables à des choix stratégiques plus affirmés. Selon nous, la recherche d'un éventuel consensus ne doit pas conduire à une forme de statu quo. Nous considérons que la politique de la défense, comme d'autres politiques, peut être débattue, car dans ce domaine comme dans d'autres, plusieurs choix sont possibles.

Ce Livre blanc repose sur trois piliers : la protection, la dissuasion et l'intervention. Ce sont les trois piliers du Livre blanc de 2008, la prévention et l'anticipation en moins. Pour notre part, au groupe écologiste, nous pensons que la politique de la défense ne saurait faire l'économie du changement. Le Livre blanc était l'occasion d'adapter notre doctrine aux nouvelles menaces, en l'articulant, disons-le clairement, avec nos priorités budgétaires. Nous voulons ouvrir le débat notamment sur trois points.

Premier point : la dissuasion nucléaire. Pour légitimer le maintien des crédits qui lui sont alloués, on invoque en général de grands principes comme l'influence de la nation, la souveraineté et la liberté de notre peuple sur notre territoire. Mais, dans ce domaine comme dans d'autres, nous ne sommes plus dans les années 1960 : le monde a changé et aujourd'hui ni le statut de la France dans le concert des nations, ni la sécurité de son territoire ne sont subordonnés à son arsenal nucléaire – et heureusement. Le Gouvernement estime le coût de cet arsenal à environ 11 % du budget de la défense. Mais ce chiffre ne tient compte ni des essais simulés, ni des mises à niveau d'équipement, ni de l'entretien des sites de contrôle et de communication ainsi que des infrastructures d'alerte. Aussi, selon d'autres évaluations, le coût annuel serait plus proche de 5 milliards d'euros que de 3 milliards.

Au-delà de l'enjeu budgétaire, c'est la pertinence stratégique de ce pilier de notre défense qui se trouve aujourd'hui questionnée – j'y reviendrai d'ailleurs dans les questions. On résume souvent la doctrine américaine du Président Obama par une formule : « La perte de sécurité engendrée par la prolifération nucléaire est aujourd'hui supérieure au gain de sécurité garanti par la dissuasion. » Nous ne sommes pas les seuls à le dire, puisque d'anciens ministres de la défense, de tous bords politiques, comme Paul Quilès ou Hervé Morin, abondent également dans ce sens et soulignent la nécessité d'un questionnement sur le maintien de la composante aérienne dans la dissuasion nucléaire. Nous pensons que s'adapter aux défis de demain, c'est d'abord sortir des cadres de pensée et de réflexion stratégiques du passé.

Deuxième point : le format des armées. Sans même parler du taux très élevé d'encadrement par les officiers supérieurs, une question mérite d'être posée. La volonté de disposer d'une armée d'une puissance globale – sur terre, sur mer et dans les airs – ne relève-t-elle pas, d'ores et déjà, d'un mythe ? Or ce mythe est coûteux. Pour être entretenu, il suppose des investissements coûteux dans quelques armements de prestige – programme Rafale, programme du char Leclerc. Ce mythe cache de plus en plus mal une forme de saupoudrage, qui nous prive d'une réelle capacité d'intervention, ce qui, in fine, affaiblit notre crédibilité stratégique.

L'intervention au Mali, que nous avons soutenue dès le départ et qui est un succès, a révélé nos difficultés en terme de renseignement et de ravitaillement, ainsi que notre dépendance de fait vis-à-vis des Américains notamment. La question des drones l'a encore récemment montré : c'est un comble, puisque c'est souvent pour ses succès industriels que l'on met en avant l'engagement budgétaire de notre pays en faveur de la défense. Nous proposons donc de mieux centrer nos moyens sur nos forces de projection. Il faut en tirer les conséquences, ce qui m'amène au troisième point : les investissements dans les équipements.

Car c'est là aussi un choix qui s'articule entre la contrainte budgétaire et une analyse stratégique des menaces d'aujourd'hui. Non, la priorité n'est plus à l'engagement dans un conflit conventionnel, ni global, ni même sur le territoire européen. Si nous voulons participer au niveau international à la prévention des menaces d'aujourd'hui – terrorisme ou conflits de territoires déclenchés par les conséquences des déplacements de population liés notamment aux changements climatiques –, il faut avoir une plus grande concentration de nos moyens. Les débats sur la loi de programmation militaire constitueront une nouvelle occasion d'aborder ensemble la question de ces nécessaires choix stratégiques pour faire évoluer plus nettement notre outil de défense, en cohérence avec une évaluation des menaces et de la stratégie pour y répondre.

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La parole est à M. Jacques Moignard, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre de la défense, madame la présidente de la commission de la défense, mes chers collègues, face aux bouleversements mondiaux géostratégiques, comme les révolutions arabes et l'évolution de la politique étrangère des États-Unis, face aux bouleversements économiques – avec notamment la crise financière –, face au développement du terrorisme international, le Président de la République s'est engagé dans le cadre du Livre blanc à réviser la stratégie de défense du pays pour la décennie à venir.

Ayons présent à l'esprit que l'utilité d'un Livre blanc réside dans sa capacité à recueillir nombre d'informations destinées à prendre des décisions relatives à un sujet particulier, en l'occurrence la défense. Les priorités stratégiques que contient ce Livre, rédigé cinq années après la parution du précédent, sont justifiées. La protection du territoire national et la préservation de la souveraineté nationale, dans l'Hexagone comme dans les outre-mer, demeurent fondamentales.

Le choix du Président de la République de préserver l'ensemble des secteurs industriels critiques fait de notre base industrielle et technologique un instrument indéniable d'autonomie stratégique et de souveraineté. Il en résulte une priorité continue en faveur des dépenses de recherche et de développement, et un effort d'équipement de nos forces à l'horizon 2025. Cet effort permettra leur modernisation, à un rythme certes plus lent que ce qui était prévu par la programmation précédente, mais en assurant le renouvellement de toutes les capacités critiques indispensables à nos armées et en respectant les priorités clairement établies en faveur des capacités de dissuasion et de renseignement.

L'industrie de défense, comme cela a été rappelé tout à l'heure, constitue une composante essentielle de l'autonomie stratégique de la France. Il est utile de rappeler une nouvelle fois qu'avec 4 000 entreprises, près de 15 milliards d'euros de chiffre d'affaires, environ 165 000 emplois directs et indirects en France et l'exportation de 25 % et 40 % de sa production, l'industrie de défense est l'un des moteurs de la compétitivité de l'économie française, donc de l'emploi. Ce Livre blanc en augure la préservation.

J'évoquais la protection du territoire national et la préservation de la souveraineté française, mais la priorité se traduit également dans le niveau de financement accordé aux études et aux recherches, qui conditionnent l'avenir : il sera maintenu au niveau actuel tout au long de la période 2014-2025.

Cette politique volontariste sera accompagnée d'un soutien résolu de l'État aux entreprises – y compris les PME – dans le domaine des exportations, dans le respect de nos engagements en matière de contrôle.

Assurément confronté à des actes terroristes, le Livre blanc donne une portée nouvelle à la priorité accordée au renseignement. Celui-ci voit son rôle central réaffirmé. Aussi un effort d'investissement global majeur sera-t-il mené, portant en particulier sur : les composantes spatiales et aériennes de l'imagerie et des écoutes électromagnétiques ; la diversification des capteurs, avec notamment les drones ; les avions légers d'observation et les charges embarquées sur plateformes aériennes, navales ou terrestres ; les moyens techniques d'interception adaptés à la rapidité du développement du numérique.

La gouvernance du renseignement sera améliorée de trois manières : en confortant le rôle du coordonnateur national du renseignement placé auprès du Président de la République ; en renforçant les moyens du Parlement à travers la capacité de la délégation parlementaire d'exercer le contrôle de la politique du Gouvernement dans ce domaine ; enfin, en rendant publique une stratégie nationale du renseignement.

Par ailleurs, le Livre blanc de 2013 marque une étape nouvelle et déterminante dans la prise en compte de la menace informatique et dans le développement des capacités de cyber-défense. Nous sommes sans cesse exposés à des attaques de plus en plus dangereuses : tentatives de pénétration de réseaux à des fins d'espionnage ; prises de contrôle à distance ; paralysie ou destruction d'infrastructures de capacités militaires stratégiques. La France se donnera ainsi les moyens : d'être autonome dans la production de systèmes de sécurité ; de renforcer les ressources humaines consacrées à la cyber-défense ; et d'améliorer la fiabilité des systèmes d'information de l'État et des grands opérateurs.

Dans le domaine de la défense, une chaîne de commandement unifiée sera développée et confortée pour faire face à la recrudescence des menaces.

La contribution de la France à la sécurité internationale préfigure, comme l'actualité nous le prouve – je pense notamment au Mali –, sa capacité à répondre aux appels de la communauté internationale pour servir la sécurité et la paix. Cette contribution ne pourra se mettre en place sans une dynamique européenne affirmée qui nous permette de tirer le meilleur parti de nos alliances. À ce titre, le Livre blanc entérine la volonté de la France de relancer pragmatiquement l'Europe de la défense, porteuse de conditions optimales pour la sécurité commune. Le rôle moteur que veut jouer la France au sein de l'Alliance atlantique est affirmé dans ce Livre blanc : cette affirmation conforte une implication française au service d'une défense et d'opérations militaires plus efficientes afin que l'Organisation atlantique continue à se transformer.

Il faut rappeler à cette tribune que, dans le contexte qui nous enserre, la France demeure le deuxième budget militaire de l'Union européenne. Malgré les fortes contraintes budgétaires nécessaires, la France continuera à consacrer à sa défense un effort financier majeur.

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La prochaine loi de programmation militaire 2014-2019 de cet automne devra démontrer toute la pertinence de ces priorités stratégiques, notamment en termes d'effectifs.

Dans l'indispensable restauration de l'équilibre des comptes publics, il est nécessaire, pour préserver notre souveraineté et notre autonomie, de bâtir un modèle d'armée qui réponde aux besoins de nos stratégies et s'adapter aux exigences de la défense et de la sécurité nationale.

Fort de ces engagements, le groupe RRDP partage et soutient les recommandations du Livre blanc.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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La parole est à Jean-Jacques Candelier, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre de la défense, madame la présidente de la commission de la défense, mes chers collègues, pour la première fois siégeaient au sein de la commission de rédaction du Livre blanc un Allemand et un Britannique. Par contre, nous attendons toujours l'ouverture de cette commission à tous les Français et à leurs représentants. Seuls des parlementaires des groupes UMP et socialiste étaient conviés à cette commission. Il n'y a eu aucune concertation populaire, quand en 2008 quarante auditions s'étaient tenues et qu'elles avaient été retransmises par les chaînes parlementaires. Un site internet avait été dédié à la question, avec des forums.

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Évitez-moi les commentaires !

Cette fois, les partis politiques n'ont même pas été auditionnés : une première depuis 1972 ! Aujourd'hui, nous disposons de cinq minutes pour nous exprimer a posteriori sur les choix qui ont été arrêtés. Drôle de démocratie ! Ce Livre blanc mériterait un débat approfondi, car il est peu lisible…

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…et sa stratégie même est difficile à comprendre. On devine, mais ce n'est pas explicite, ce que peut vouloir dire une « stratégie défensive excluant une attaque préventive basée sur l'anticipation des crises, sur une capacité de réaction sur toutes les zones d'intérêt de la France et de nos partenaires, liés par accords de défense ». Nos remarques sur le fond sont nombreuses.

Tout d'abord, nous ne pensons pas que l'armée doive être concernée par le maintien de l'ordre. « En cas de crise majeure », nos forces de sécurité intérieure seraient renforcées par 10 000 soldats, ainsi que par des moyens navals et aériens. Voyez ce que cela donne en Syrie !

Ensuite, il est écrit que « notre stratégie de défense et de sécurité nationale ne se conçoit pas en dehors du cadre de l'Alliance atlantique et de notre engagement dans l'Union européenne ». S'agissant de la défense européenne, rechercher le « partage et la mutualisation » ne revient-il pas à mettre la charrue avant les boeufs, alors que la défense européenne est inexistante ?

Peut-on se réjouir que la France ait « repris toute sa place » dans le fonctionnement de l'OTAN ? N'est-ce pas Jean-Marc Ayrault, alors président du groupe socialiste, qui avait déposé en 2008 une motion de censure à l'occasion du retour dans le commandement intégré ? Nous continuons de penser que l'OTAN est une organisation du passé, qui ne connaît que la logique de force et n'est pas réformable. Il y a une contradiction entre la volonté affichée d'autonomie et de réactivité de nos forces et l'inscription de notre stratégie au sein de l'Alliance atlantique et de l'Union européenne.

S'agissant de notre industrie de défense, nous n'acceptons pas que notre base industrielle soit jetée en pâture sur l'autel de la concurrence libre et non faussée.

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Nous rejetons toute cession de participations dans les industries de défense : il faut faire le contraire, sous l'égide de la DGA, en nationalisant toutes les industries de défense. Le Gouvernement compte-t-il au moins donner suite aux recommandations de la Cour des comptes, selon lesquelles l'APE et la DGA devraient piloter conjointement les participations publiques dans les entreprises de défense ?

Ce Livre blanc met l'accent sur les cyber-attaques. Nous verrons si ce nouveau champ stratégique vaudra concession de quelques moyens supplémentaires à l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information, mais nous avons des doutes à cet égard.

Nous contestons la rigueur budgétaire. La MAP a remplacé la RGGP, mais les conséquences sont exactement les mêmes : 34 000 postes seront supprimés durant la période 2014-2019.

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Il s'agit d'une véritable bombe à retardement, nos armées étant arrivées à un plancher en ce qui concerne les moyens de fonctionnement. En outre, elles devront faire face, avec moins, aux nouvelles missions, telle la sécurité du territoire en outre-mer, qui leur sont dorénavant assignées.

Nous redoutons par ailleurs que les mesures d'externalisation et de réorganisation continuent alors qu'elles ne font qu'aggraver la facture !

Nous verrons si l'extension du rôle de la délégation parlementaire aux renseignements ira jusqu'à la présence en son sein de tous les groupes, alors que seuls les groupes UMP et SRC sont à ce jour représentés.

Je dois déjà conclure : pour nous, l'essentiel du contexte géostratégique, c'est la crise du capitalisme. Cette crise n'est pas une donnée qui s'impose, elle est un facteur de déstabilisation à résoudre pour une sécurité collective durable. L'ennemi, c'est la finance ! Il faut rompre avec les logiques libérales et technocratiques qui éloignent nos concitoyens de leur armée, ce qui implique de rompre avec l'armée professionnelle d'intervention extérieure intégrée à l'OTAN.

Partant des difficultés pour constituer une force de réserve, pourquoi ne pas développer le service militaire volontaire de douze mois, ce qui permettrait de susciter des vocations et d'offrir des perspectives à des jeunes ?

En outre, il faut repenser nos armements – j'y reviendrai lors des questions.

Par ailleurs, les droits d'expression, d'association et de représentation des militaires doivent être améliorés. Il est temps de reconnaître qu'« ils sont des citoyens à part entière », disait François Hollande en mars 2012.

La France doit mener une politique extérieure visant à la résolution des conflits dans le respect des droits humains et du droit de chaque peuple à disposer de lui-même et de ses ressources, tout en prônant le désarmement multilatéral et la paix. Nous en sommes loin !

En matière de défense aussi, nous déplorons que le changement se fasse dans la continuité.

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La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le groupe socialiste, radical et citoyen.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission de la défense, chers collègues, le monde n'est pas plus sûr aujourd'hui qu'il ne l'était hier : l'équilibre de régions entières est mis en cause par la prolifération des armes de destruction massive ; le terrorisme frappe ; les trafics d'armes ou de drogue, le blanchiment d'argent, affaiblissent les États et mettent en cause nos sociétés. Le Président de la République l'a dit le 24 mai à l'IHEDN : « Face à ces menaces, la France doit se donner un objectif, un seul : à tout moment assurer sa sécurité, répondre aux attentes de ses partenaires comme de ses alliés et préserver la paix dans le monde. »

C'est à ce défi que répond le quatrième Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale. Ce Livre blanc dessine les contours d'un outil de défense et de sécurité nationale adapté aux contraintes budgétaires, et j'y reviendrai, mais aussi à l'évolution de l'environnement stratégique mondial. Il était bon de mettre celui-ci en débat dans la période que nous connaissons, monsieur le ministre de la défense. Cet équilibre nous permettra d'être à la hauteur des responsabilités qui sont celles de la France, pays fondateur de l'Union européenne, membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, membre fondateur de l'OTAN, puissance nucléaire, deuxième puissance maritime mondiale.

C'est la première fois que nous sommes amenés à débattre d'une déclaration du Gouvernement relative au Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale. J'y vois, une nouvelle fois, la traduction de la volonté exprimée par le Président de la République que le Parlement soit pleinement respecté, notamment en matière d'information et de délibération sur les opérations dans lesquelles nos forces sont engagées. Je souhaite d'ailleurs vous remercier, monsieur le ministre, pour la disponibilité dont vous faites preuve – dépassant les seules contraintes normales fixées par nos institutions – à l'égard de la représentation nationale.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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Ce dialogue est indispensable parce qu'il permet par notre intermédiaire, vous le savez, monsieur le Premier ministre, de renforcer les liens entre l'armée et la nation. Ce doit toujours être un de nos objectifs permanents.

Mes chers collègues, ce nouveau Livre blanc sera traduit dans une loi de programmation dès cette année. Elle devra donner à nos armées les moyens indispensables à notre protection, mais aussi à la projection de nos forces et à la dissuasion, qui constituent le coeur de notre doctrine. Elle devra aussi permettre de respecter, j'y ai fait allusion, les engagements pris en matière de gestion des finances publiques. Nous, nous ne ferons pas comme si les contraintes n'existaient pas. Nous ne voterons pas une loi de programmation si manifestement éloignée de la réalité des moyens à notre disposition qu'elle en perdrait tout son sens, laissant à d'autres la charge de gérer les arbitrages dus aux écarts entre loi de programmation et réalité, ce qui s'est malheureusement passé ces dernières années.

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C'était cela la méthode avant nous : jamais avare d'engagements, la droite n'a jamais été capable de les mettre en oeuvre. À la fin de 2013, il y aura un écart de plus de 4 milliards d'euros entre la réalité et l'affichage.

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Cet écart a été dommageable pour nos armées, parce que la réduction des crédits s'est faite indépendamment de toute analyse sur leurs besoins capacitaires. Les objectifs maximums des contrats opérationnels énoncés lors de la précédente loi de programmation militaire étaient hors d'atteinte : 73 000 soldats de l'armée de terre sont aujourd'hui projetables, et non 88 000 comme cela avait été annoncé ! En 2012, l'écart entre les ressources disponibles et les besoins d'entretien programmés des matériels de l'armée de l'air a atteint les 300 millions d'euros, et pour la marine, la prévision de réalisation des heures de mer est de 12 % en dessous de l'objectif.

Mais le temps des écarts entre la réalité et les engagements est révolu en matière militaire comme dans les autres domaines. Au travers de ce Livre blanc, nous voulons permettre à la France de conserver une triple souveraineté : la souveraineté stratégique, la souveraineté financière et la souveraineté industrielle. Voilà pourquoi la décision du Président de la République de maintenir à son niveau actuel notre effort de défense est un point d'équilibre juste, pertinent, crédible et ambitieux.

La France va demeurer la première armée d'Europe, avec 250 000 personnels civils et militaires

Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP

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, dont je tiens ici à saluer une nouvelle fois l'engagement exemplaire sur tous les théâtres d'opération, qui fait honneur à notre pays.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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Les réductions de postes devront se faire de manière méticuleuse, en bonne intelligence avec les états-majors, afin que ne soient pas répétées les erreurs des précédentes réformes. Nous avons besoin de rassembler les énergies pour construire le modèle d'armée décrit dans le nouveau Livre blanc et salué par nos alliés, à commencer par les Américains et les Britanniques.

J'insiste particulièrement sur la nécessité pour notre pays de préserver, et même de renforcer, notre industrie de défense. C'est évidemment un impératif de souveraineté, mais c'est aussi un enjeu central pour le redressement productif : l'industrie de défense est une industrie de pointe, une industrie de haute valeur ajoutée, une industrie d'innovation, qui développe de fortes capacités de transfert entre recherche fondamentale et recherche appliquée. En mettant l'accent sur cette question, le Gouvernement fait la démonstration qu'il est à la hauteur des défis qui se posent à notre pays.

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Ce sont des mots ! En termes de moyens, il n'y a rien derrière !

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Au vu des retards que la France a pris en matière de drones, je réponds à ceux qui, dans cet hémicycle, se prétendent des spécialistes, que quand on voit la façon dont ils ont conduit les décisions et ce qu'ils nous obligent à faire aujourd'hui, je peux me targuer, monsieur Lellouche, de ne pas être aussi spécialiste que vous mais d'essayer au moins de prendre demain les bonnes décisions pour notre pays, ce que vous n'avez jamais su faire au moment où vous étiez aux responsabilités !

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Protestations sur les bancs du groupe UMP.

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Exprimez-vous à la tribune à la tribune plutôt que de vociférer alors que je viens de saluer la présence de nos forces sur les terrains où elles combattent aujourd'hui ! Vous seriez ainsi à la hauteur de vos responsabilités !

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Souvenez-vous de Jospin ! C'est à vous de prendre vos responsabilités !

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Ce qui est consternant, c'est ce que votre majorité a fait, monsieur Grouard.

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Monsieur le Premier ministre, vous avez rappelé qu'en matière industrielle, il y a bien entendu tous ces contrats qu'il faut mener à bien, mais je tiens à souligner devant vous l'importance et l'excellence de nos bureaux d'études. Car certes, il faut que les programmes qui ont été conduits trouvent des débouchés pour nos armées et à l'exportation, mais j'appelle l'attention du Gouvernement sur la mise en tension permanente de nos bureaux d'études pour que nous ne perdions pas dans ces domaines d'excellence les capacités qui sont les nôtres. Je sais que cette réflexion est présente dans les choix que vous allez faire.

De même, le nouveau Livre blanc s'intéresse pour la première fois à une dimension d'avant-garde qui nécessite toute notre attention : il s'agit bien évidemment de la cyber-défense.

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Les technologies de l'information et de la communication créent de nouvelles opportunités et facilitent nos manières de produire, de consommer, d'apprendre et d'échanger, mais elles nous rendent aussi plus vulnérables. Nous savons bien qu'une cyber-attaque massive pourrait avoir des conséquences désastreuses pour notre pays, le paralysant en quelques heures. Il faut nous y préparer et nous donner les moyens de lutter contre ce type de menaces. Je pense que sur ce sujet peut-être encore plus que sur tout autre, il y a nécessité d'une réflexion non pas seulement à partir des dimensions militaires de la sécurité, mais prenant en compte toutes les administrations, tous les services de l'État. Une telle réflexion devrait prévaloir, tant il est important de parer les cyber-attaques et de mettre en place des pare-feu, mais aussi de maîtriser toutes nos communications. À cet égard, la question du réseau et de la façon dont notre État s'organise en ce domaine, ce qui ne dépend pas seulement du ministère de la défense mais qui pourrait demain représenter un investissement pour toutes nos administrations, est aujourd'hui posée. C'est un investissement lourd, mais producteur d'efficacité et de sécurité demain si nous ne maîtrisons pas seulement les pare-feu mais aussi les tubes dans lesquels l'État assure ses propres communications.

Mes chers collègues, nous sommes la France. Ce n'est pas n'importe quel pays que le nôtre. Être la France nous confère, c'est vrai, une responsabilité et un devoir. Je l'ai dit dans mon intervention lors du débat sur l'intervention au Mali : être la France entraîne des responsabilités et un effort spécifiques. Cet effort, c'est une garantie d'indépendance nationale ; cet effort, c'est une continuité qui permet à notre nation de respecter son histoire et de prendre ses responsabilités vis-à-vis du monde. Nous remplissons ce devoir sans rechigner, mais nous sommes aussi en droit d'attendre de nos partenaires européens qu'ils prennent en compte cette réalité : ils ne sauraient oublier l'effort que nous faisons pour garantir notre sécurité et celle de notre continent, notamment quand ils commentent nos choix en matière de dépense publique.

Monsieur le Premier ministre, vous avez fait le choix de regarder la réalité en face, d'évaluer les menaces et les contraintes, de définir les enjeux et de fixer un cadre opérationnel pour développer une nouvelle ambition de défense. Comme vos prédécesseurs, vous auriez pu être dans le faux-semblant, dans l'affichage artificiel, dans la déclamation sans lendemain. Vous auriez pu faire, comme ils l'ont fait, de notre défense une variable d'ajustement budgétaire.

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Mais tel n'a pas été le choix opéré par le Président de la République, qui a voulu conserver une défense aussi forte que notre nation est grande. Le groupe socialiste s'en félicite et vous en félicite, monsieur le Premier ministre.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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La parole est à Mme Patricia Adam, présidente de la commission de la défense nationale et des forces armées.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires étrangères, chers collègues, pour avoir participé aux travaux du Livre blanc durant de nombreux mois, je tiens d'emblée à rappeler que ceux-ci ont concerné certes la défense, mais aussi tous les autres ministères puisqu'il s'agit de la sécurité nationale et que tous sont concernés par les questions du cyber comme du renseignement, sous l'autorité du Premier ministre.

Je salue le travail long et difficile qui a été réalisé par Jean-Marie Guéhennot ainsi que par tous ceux qui l'entouraient au sein de la commission du Livre blanc. La France était particulièrement attendue sur ce Livre blanc, regardée par nos amis européens et bien au-delà – je pense aux États-Unis mais également à l'Asie. Je rappelle que c'est dans un contexte difficile, celui du budget et de ses enjeux stratégiques, que nous l'avons réalisé. Nous sommes le seul pays en Europe à l'avoir fait, je tiens à le rappeler ici.

Les débats au sein de la commission ont été loyaux mais sans complaisance, mes deux collègues Eduardo Rihan Cypel et Christophe Guilloteau peuvent en témoigner. Chacun des membres de cette commission, qu'il soit militaire, haut fonctionnaire de la défense ou de la sécurité nationale, expert, parlementaire, sans oublier, je tiens à le souligner, nos amis britannique et allemand, dont la présence a été précieuse, a su apporter sa propre vision de ces enjeux stratégiques et aussi montrer à nos partenaires européens que la France a la volonté de construire l'Europe de la défense. Chacun l'a fait dans un esprit de responsabilité, car chacun sait que le contexte budgétaire constitue un enjeu stratégique pour la souveraineté de notre pays.

Nous en avons particulièrement conscience au sein de la commission de la défense. Nous savons en effet que les précédentes lois de programmation militaire n'ont jamais été respectées – c'est un constat – et que la fameuse bosse budgétaire s'est accentuée au fil des années. Ces raisons d'ordre budgétaire, entre autres, ont limité nos ambitions, même si nous avons su, dans ce Livre blanc, conserver l'ensemble des missions grâce au concept de différenciation des forces, que nous développerons, bien évidemment, dans la loi de programmation militaire.

C'est aussi la raison pour laquelle il nous fallait présenter au Président de la République un Livre blanc sincère et réaliste, en ce qui concerne tant la définition des menaces que les choix capacitaires. À certains de mes collègues, je réponds qu'il est certes facile de critiquer notre budget dans l'Union européenne et même au-delà – je pense aux États-Unis – mais que nous le maintenons, comme l'ont souligné Jean-Yves Le Drian et M. le Premier ministre. N'oublions pas que seule la France maintient un budget à l'égal, ce qui est particulièrement courageux dans le contexte actuel et certains de nos collègues européens nous le disent.

D'aucuns ont accusé ce Livre blanc de ne pas choisir. Il est facile d'affirmer que telle menace n'existe plus ou que tel système d'armes est devenu inutile, mais abandonner une capacité, c'est risquer que la nation ne soit pas en état de se défendre ou de tenir son rang le moment venu. S'il est un enseignement à tirer des événements des dernières années, c'est bien que les surprises stratégiques sont une réalité. Il est toujours aisé de supprimer telle ou telle capacité, mais beaucoup plus difficile de la reconstituer. Face à cette incertitude profonde, aux menaces et aux risques analysés par le Livre blanc, c'est bien la prudence et l'esprit de responsabilité qui devaient prévaloir. Tel a été ce choix.

C'est tout sauf un choix facile, car la contrainte du redressement des comptes publics implique des arbitrages particulièrement douloureux, portant sur des réductions tant en matériels qu'en effectifs. C'est d'autant plus douloureux que nos armées ont déjà fourni un effort considérable : rappelons les 54 000 emplois supprimés dans la précédente loi de programmation militaire.

Dans cette réduction du format, nos armées ont fait preuve d'un esprit de discipline et de responsabilité qui mérite d'être salué, je le redis ici une nouvelle fois. Il conviendra de peser au trébuchet les prochaines réductions d'effectifs, afin de ne pas reproduire les erreurs précédentes des économies forfaitisées et relevant d'un certain parti pris idéologique, celui de la révision générale des politiques publiques.

Si les unités opérationnelles doivent à l'évidence être préservées, ainsi que M. le ministre de la défense nous l'a rappelé à plusieurs reprises, il convient que le soutien fonctionne aussi correctement car l'on voit bien les conséquences funestes de décisions précipitées. Je pense notamment aux dysfonctionnements proprement scandaleux du système Louvois, qui ont déjà été soulignés par M. le Premier ministre. La commission de la défense poursuivait d'ailleurs, ce matin même, l'audition de responsables de ce dossier.

Le choix a aussi été fait de compenser certaines lacunes criantes dont la correction est urgente, qu'il s'agisse des moyens de renseignement – les drones entre autres – affectés à la défense ou à la sécurité intérieure, des forces spéciales, du ravitaillement en vol et de la cyber-sécurité, autant d'éléments qui se sont exprimés grandement au cours de l'opération Serval.

Là encore, ce sont des choix qui supposent de dégager des marges de manoeuvre budgétaires ailleurs. Je ne reviendrai pas ici sur la description des matériels dont doivent être dotées nos armées car nous aurons ce débat de manière approfondie à l'automne, lors de l'examen du projet de loi de programmation militaire. Mais il convient dès à présent de bien identifier les conditions nécessaires à la stricte application – et j'insiste sur ce mot – de ce Livre blanc.

La première condition est que les ressources financières nécessaires soient au rendez-vous sur toute la durée de la loi de programmation…

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…mais aussi dès le début de cette dernière, afin de ne pas enregistrer de retards pénalisants et difficilement rattrapables par la suite. Nous en avons fait l'expérience au cours des cinq dernières années…

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Cela fait trente ans que c'est comme ça, pas cinq ans !

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…et nous serons vigilants sur ce point. Nous savons tous ici ce qu'il en est de l'exécution de la précédente loi de programmation, tout particulièrement s'agissant des recettes exceptionnelles.

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C'était la même chose dans l'exécution des précédentes lois de programmation !

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La commission que j'ai l'honneur de présider sera donc – et à vos côtés, monsieur le ministre de la défense – particulièrement attentive et vigilante sur ces points.

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Je relève et salue l'engagement politique du Président de la République, chef des armées, sur ces aspects financiers. Cet engagement, particulièrement fort lors des arbitrages rendus sur le Livre blanc et réaffirmé lors de son discours devant l'Institut des hautes études de défense nationale, vient d'être confirmé devant nous par le Premier ministre.

La seconde condition de la réussite consiste, à mon sens, à appliquer le principe de différenciation des forces de manière pragmatique et conforme à son objectif. Ce dernier consiste à préparer et équiper les forces en fonction de la mission qu'elles ont à remplir, ce qui est pertinent et efficace. Toutefois, l'un des enseignements que l'on peut tirer du succès de l'opération Serval est que l'entraînement des personnels est un facteur clé de la qualité de nos forces. Il conviendra donc de veiller avec la plus grande attention à ce que nos armées conservent un degré de préparation au niveau nécessaire et adéquat, permettant notamment de maintenir l'interopérabilité avec nos partenaires de l'Union européenne. C'est la garantie de la réussite de toute opération.

Enfin, et c'est sans doute le point le plus difficile, il nous faut progresser vers plus d'Europe de la défense. Tout, pourtant, devrait être plus facile : la crise économique, la réduction des dépenses de défense et la persistance voire l'accroissement des menaces sont des facteurs puissants d'incitation. L'efficacité de la dépense en est une autre, car la comparaison entre la totalité des crédits et effectifs consacrés à la défense, d'une part, et la somme des capacités opérationnelles réelles de l'Europe, d'autre part, est particulièrement cruelle. La démilitarisation de l'Europe constituerait un véritable suicide stratégique, au moment où le pivotement américain ne lui garantit plus systématiquement sa sécurité.

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Une certaine prise de conscience se manifeste d'ailleurs chez nos partenaires. Ils sont nombreux à venir nous rencontrer au sein du Parlement, et M. le ministre de la défense est très présent auprès de ses collègues. Le chemin à parcourir reste long mais il se présente bien. En conservant un budget à l'égal, en ne baissant pas la garde, la France envoie un message de responsabilité à ses partenaires européens, un message fort.

Monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre de la défense, le Parlement partage votre volonté et vous accompagnera dans cette démarche. La commission, que j'ai l'honneur de présider, travaille à nouer des liens étroits avec ses homologues européens, notamment britanniques, allemands, polonais et tous ceux qui le souhaiteront.

Nous attendons tous que le Conseil européen consacré à la défense, prévu en décembre prochain, soit l'occasion de propositions concrètes – vous y travaillez – et donne le départ d'une nouvelle phase de la coopération de défense au sein de l'Union. Davantage que des constructions trop ambitieuses et souvent, hélas, vouées à l'échec, il est sans doute nécessaire de profiter de toutes les opportunités de coopération et de mutualisation, dans un esprit ouvert et pragmatique, comme nous le faisons par exemple actuellement avec nos amis britanniques. Cela passera également par l'acceptation de certains partages de souveraineté, voire de capacités industrielles, ceux-ci devant naturellement être équilibrés et réciproques.

Les solutions seront donc probablement à géométrie variable, mais il faut abandonner l'esprit de système pour privilégier l'efficacité et la mutualisation. Quoi qu'il en soit, ce chantier de longue haleine ne peut être le prétexte à un renoncement à nos responsabilités.

De ce point de vue, l'un des apports du Livre blanc est d'approfondir l'approche globale de la question de la sécurité nationale. Le débat ne peut pas se cantonner à des aspects strictement militaires, car une bonne partie des nouvelles menaces et des risques émergents ne peuvent être traités au travers du seul prisme militaire, qu'il s'agisse des catastrophes naturelles, des risques technologiques, du terrorisme ou de la cyber-défense.

En effet, si on la replace dans la durée, la réduction de la taille de nos armées est un phénomène constant depuis la suppression de la conscription. Elle pose la question de la capacité à agir pour faire face à des événements massifs. Elle pose également celle de la dilution du fait militaire dans notre société, qui conduit à des déserts militaires préoccupants sur notre territoire mais aussi à un affaiblissement potentiel du lien entre l'armée et la nation.

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Ce lien, vaste programme, ne peut et ne doit pas se résumer à une politique de commémorations. Face à cette tendance, force est de constater que l'organisation actuelle des systèmes de réserves est loin de fournir des réponses à la hauteur des besoins potentiels.

C'est là un champ d'action qu'il va falloir réinvestir à moyen et à long terme, non pas en ayant à l'esprit de prélever des ressources rares au détriment de nos forces professionnalisées, mais bien en complément de celles-ci. Là encore, cela imposera de penser différemment, de façon moins massifiée et plus pragmatique, afin de pouvoir utiliser les compétences de façon souple et ponctuelle. Vous avez déjà annoncé un effort de ce type dans le cadre de la cyber-défense. À mon sens, il faudra également le faire dans d'autres domaines. C'est à cette condition que l'on pourra vraiment améliorer la résilience de la nation.

La Constitution du 24 juin 1793 déclarait : « Tous les Français sont des soldats ». Nous n'en sommes plus là, et c'est évidemment heureux, mais tous les Français doivent être acteurs de leur sécurité et partie prenante de leur défense. Car l'Europe n'est pas une île de paix coupée du monde et nos armées ne peuvent devenir une île coupée du pays.

À mon tour, je remercie Jean-Yves Le Drian de sa présence continue, depuis plusieurs mois, pratiquement toutes les semaines devant la commission de la défense. À ceux qui estiment que ce Livre blanc n'a pas été suffisamment discuté par les groupes politiques, je rappelle qu'il a déjà donné lieu à deux débats avec Jean-Yves Le Drian au sein de la commission de la défense. Le ministre a répondu aux interrogations des uns et des autres et il s'est engagé à revenir devant la commission de la défense.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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La parole est à Mme Élisabeth Guigou, présidente de la commission des affaires étrangères.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission de la défense, mes chers collègues, je veux d'abord commencer, moi aussi, par remercier le ministre de la défense qui, en dehors de sa présence quasi hebdomadaire devant la commission de la défense, vient régulièrement devant celle des affaires étrangères pour que nous l'entendions sur notre politique de défense en même temps que sur notre politique étrangère.

Comme plusieurs orateurs l'ont souligné avant moi, il était indispensable d'élaborer un nouveau document stratégique au regard des profonds bouleversements géopolitiques intervenus depuis la publication du précédent Livre blanc, en 2008.

Parmi ces changements, il y a bien sûr la crise économique et financière qui pèse lourdement sur les budgets militaires, notamment en Europe, où la plupart des États ont réduit leur effort de défense.

De leur côté, les États-Unis sont entrés dans une nouvelle séquence qui les conduit à réorienter une partie de leurs efforts vers l'Asie et le Pacifique.

Et pendant ce temps, notre environnement n'est pas devenu plus paisible, bien au contraire. La menace liée à la résurgence de conflits interétatiques ne peut être exclue. L'Europe, bien qu'en paix, peut être touchée par le biais de la prolifération nucléaire, balistique ou chimique, ou du développement de capacités informatiques offensives par certaines puissances étrangères.

De l'autre côté du spectre, l'incapacité de certains États à exercer les fonctions de base de la souveraineté constitue une menace sérieuse, d'autant plus que bon nombre de ces États, en faillite ou en quasi-faillite, se trouvent aux portes de l'Europe. Le défi est bien sûr immense. La présence d'un État déliquescent dans notre voisinage soulève des enjeux politiques et humanitaires. L'histoire récente nous montre aussi qu'un État qui ne contrôle plus ses frontières et son territoire, qui ne sait plus administrer les services publics essentiels à sa population, peut rapidement se muer en sanctuaire pour des groupes criminels hostiles.

Il n'est donc pas concevable que nous assistions, impuissants, au développement, dans notre environnement proche, de bastions terroristes ou de zones de non-droit.

De ce point de vue, la rupture intervenue en Afrique du Nord et au Moyen-Orient avec les révolutions arabes suscite à la fois espoirs et inquiétudes. En Libye, en particulier, la situation intérieure devient chaque jour plus préoccupante et pourrait constituer, à terme, une menace significative pour la sécurité de toute la région euroméditerranéenne. L'autorité du gouvernement y est plus que limitée, voire nulle, dans bon nombre de domaines. Le Livre blanc rappelle fort justement que les risques liés à la faiblesse des États sont bien plus insidieux et inquiétants que les menaces liées à leur force, et que ces risques doivent être identifiés le plus vite possible.

Je ne vais pas revenir sur les principales orientations prises par le Livre blanc, que le Premier ministre a très clairement et précisément exposées. Ces orientations ont été saluées par nos alliés et nos partenaires.

Comme l'a indiqué le Président de la République la semaine dernière, notre pays entend maintenir dans le temps, en dépit des contraintes budgétaires, l'effort qu'il consacre à sa défense.

Nous conserverons un modèle d'armée efficient permettant de continuer à protéger la France et les Français. Ainsi, nous maintiendrons une force de dissuasion crédible et nous demeurerons capables d'intervenir sur un théâtre extérieur, comme nous l'avons fait, remarquablement, au Mali.

Notre industrie de défense pourra rester l'une des premières mondiales. Elle continuera de contribuer au renouvellement et au développement des capacités indispensables de nos armées.

Enfin, et j'insisterai plutôt sur ce point, l'Europe de la défense devra s'engager dans une nouvelle étape. Nous le savons, un Conseil européen sera consacré à ce sujet à la fin de cette année, et la France a évidemment la responsabilité de jouer un rôle moteur dans ce domaine. Car nous sommes aujourd'hui à un tournant, où il appartient à la France de faire que l'Europe de la défense ne soit plus une utopie.

Je dis bien « Europe de la défense » et non « défense européenne ». Car l'idée de défense européenne suppose la construction d'une architecture globale qui serait acceptée par l'ensemble de nos partenaires et pourrait conduire, à terme, au développement d'une armée européenne. Aujourd'hui, pour nombre de nos alliés, la « défense européenne », c'est d'abord l'OTAN, une alliance dans laquelle, dans la lignée du rapport d'Hubert Védrine, la France entend continuer de garder toute sa place, tout en intensifiant son influence en son sein.

Mais ce rôle majeur accordé à l'OTAN ne signifie pas qu'il n'y ait pas de place pour l'Europe de la défense, dont le Livre blanc souligne clairement l'intérêt, et je dois dire, monsieur le ministre, que vous vous êtes clairement engagé dans les travaux qui vont mener au Conseil européen de la fin de l'année. La contrainte budgétaire, le pivot américain vers l'Asie mais aussi les menaces proches sur notre continent, qui pèsent autant sur nos voisins que sur nous, sont autant d'arguments en faveur d'une telle évolution.

La guerre au Mali, dans cette perspective, nous a beaucoup appris. Elle a d'ailleurs fait évoluer les mentalités chez bon nombre de nos partenaires européens, si j'en juge d'après les contacts que je peux avoir, que nous pouvons avoir, par exemple, avec la commission des affaires étrangères du Bundestag ou encore, comme ce matin, avec des représentants de la Diète polonaise. La guerre au Mali a confirmé les lacunes capacitaires des Européens mais aussi leurs difficultés à définir ensemble leurs priorités stratégiques et à agir de concert rapidement face à une menace qui, je l'ai dit, ne visait pas seulement la France. Mais l'opération Serval nous a aussi appris que l'Europe de la défense pouvait réellement apporter quelque chose sur le terrain, comme nous l'a montré la mutualisation de fait des capacités de transport opérée par nos amis allemands, britanniques belges, danois ou espagnols, à notre profit ou à celui de la MISMA.

Plusieurs orientations sont envisageables.

Il conviendrait, d'abord, de se mettre d'accord sur l'analyse des risques et des dangers. Nous savons que bon nombre de nos partenaires n'ont admis que tardivement le fait que la situation au Mali constituait une menace pour l'Europe tout entière. Certains ont pu suggérer la rédaction d'un Livre blanc européen. Notre Livre blanc évoque d'ailleurs cette idée en soulignant qu'un tel document permettrait d'exprimer une vision partagée. Mais nous n'en sommes pas là.

Dans un premier temps, il serait assurément souhaitable d'actualiser la stratégie européenne de sécurité, élaborée en 2003 et inchangée depuis 2008 alors même qu'entre-temps, on l'a vu, notre monde a tellement changé. Mais l'actualisation de ce document, je le souligne, ne doit pas être un prétexte pour éviter de mener des actions concrètes, qu'elles soient opérationnelles ou industrielles. Il n'est pas question d'accepter que le prochain Conseil européen et les travaux suivants se perdent dans l'actualisation d'un document sans aboutir à des décisions concrètes.

Des initiatives ont déjà été prises. Elles montrent qu'avec une volonté affirmée il est possible de vaincre les préjugés et de parvenir à des progrès importants. Des coopérations bilatérales ou multilatérales ont déjà permis de développer d'intéressantes capacités intégrées. La coopération que nous menons avec le Royaume-Uni est exemplaire et devrait conduire à la mise en place d'une force d'intervention conjointe d'ici à 2016. Avec l'Allemagne et les pays du Benelux, nous avons réussi à créer l'EATC, le commandement européen du transport aérien, qui, basé à Eindhoven, gère les avions mis à disposition, dans un pot commun, par les États participants. Pourquoi ne pas aller plus loin avec les drones, ou les avions ravitailleurs ? Plusieurs États, dont la France, s'apprêtent à renouveler leur flotte. Je crois que nous avons là, avec les drones et les avions ravitailleurs, des perspectives intéressantes de mutualisation ; peut-être, monsieur le ministre, nous donnerez-vous des éléments en ce sens.

Le Livre blanc souligne expressément que ces coopérations sont utiles et que la France entend les promouvoir ardemment. Notre pays n'a pas adopté de position fermée et se montre ouvert à tous les partenariats, avec l'ensemble de nos partenaires, y compris ceux qui, comme l'a dit vendredi dernier le Président de la République, étaient hier de l'autre côté. Le Groupe de Weimar, le Groupe de Visegrád, auxquels vous consacrez beaucoup de temps, sont autant de cercles dans lesquels la France doit poursuivre une réflexion et mener des initiatives, avec toujours à l'esprit l'idée que nous ne progresserons que si nous sommes réalistes.

Dans ce contexte, le Conseil européen du mois de décembre prochain doit nous mobiliser tous. Le Président de la République a annoncé que la France fera des propositions concrètes en vue de ce Conseil qui doit être un rendez-vous réussi. Sinon, l'échéance sera repoussée à un terme indéterminé. Nous devons aboutir à des décisions dans le domaine des opérations, dans celui des capacités ou dans le domaine industriel. Il faut qu'à deux, à dix ou à vingt-huit, nous puissions déterminer ce que nous voulons et pouvons faire ensemble, en laissant la possibilité à ceux qui le voudraient de venir nous rejoindre, comme le permet la coopération structurée permanente créée par le traité de Lisbonne.

Monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre de la défense, l'Europe de la défense, après le succès de l'opération au Mali, recèle de formidables potentialités. À nous de les exploiter. Monsieur le ministre, à vous de jouer. La commission des affaires étrangères vous apportera tout son soutien.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

M. Marc Le Fur remplace M. Claude Bartolone au fauteuil de la présidence.

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Nous en venons aux questions.

Selon nos usages, nous allons essayer d'alterner les différents groupes politiques de notre assemblée. Nous commencerons par trois questions du groupe UMP.

La parole est à M. Alain Marty.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre de la défense, madame la présidente de la commission de la défense, madame la présidente de la commission des affaires étrangères, mes chers collègues, la situation internationale…

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Voilà, l'opposition a la parole, et le Premier ministre s'en va !

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…est plus dangereuse aujourd'hui qu'en 2008. Nous l'avons dit tout à l'heure, dans les interventions.

Il y a une certaine continuité dans l'analyse des deux Livres blancs. Les objectifs stratégiques, leur inflexion et la volonté de combler notre retard capacitaire dans plusieurs secteurs sont certes ambitieux. La question est bien de savoir si les moyens sont à la hauteur de cette ambition.

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Le Livre blanc prépare néanmoins une nouvelle déflation de nos forces et des réductions d'équipements.

Ainsi, par rapport à l'année 2008, la marine perd trois frégates et un bâtiment de projection et de commandement.

L'aviation connaît de fortes réductions, le nombre d'avions de combat passant de 300 à 225.

L'armée de terre connaît une nouvelle déflation : elle perd une brigade sur la période 2014-2019. L'effectif opérationnel passe de 72 000 à 66 000 hommes. Le nombre de véhicules – chars lourds, chars médians, véhicules blindés – est réduit de 40 % à 50 %. Retenez bien ce chiffre : l'armée de terre aura un militaire opérationnel pour 1 000 Français.

Le général Ract-Madoux le disait : « Descendre sous le seuil actuel, c'est accepter de sacrifier des missions de sécurité réalisées au profit des Français. » Dans un monde où la menace est bien réelle, nous ne pouvons pas baisser notre garde, nous ne pouvons pas assurer moins bien la sécurité des Français. Notre responsabilité collective est grande.

Nous pouvons, comme le souhaitait le Premier ministre, nous rassembler pour faire de la défense une priorité. Cela suppose de ne pas réduire le format de nos armées et d'inscrire dans la loi de programmation militaire les moyens financiers d'une véritable ambition. Nous le devons à notre pays, aux Français, pour assurer leur sécurité ; nous le devons également aux militaires, aux femmes et aux hommes qui servent sous nos couleurs.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur le député, il ne faut pas entrer dans la polémique – je ne dis pas que vous le faites, et je ne le ferai pas non plus – et comparer, d'une part, le Livre blanc et la loi de programmation de 2008 et, d'autre part, le Livre blanc dont nous parlons maintenant et le projet de loi de programmation militaire qui vous sera proposé à l'automne. Pourquoi ? Parce que, comme je l'ai déjà dit à plusieurs reprises devant les commissions, y compris celle de la défense, le Livre blanc de 2008 et la loi de programmation militaire ont été élaborés avant la crise. Et, comme toutes les lois de programmation militaire, celle de 2008 avait tendance à optimiser la fin du processus, et retenait donc des projections optimistes.

J'ai siégé à la commission de la défense de 1978 à 2007, avec une petite interruption au milieu. J'ai donc vu beaucoup de lois de programmation militaire, et je n'en ai vu aucune qui se soit terminée convenablement, et de manière conforme aux prévisions.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Ce fut encore moins le cas de celle de 2008, parce qu'elle a été débattue et votée juste avant que la crise ne commence. Il y a des raisons qui permettent de comprendre pourquoi les objectifs n'ont pas été atteints ; je respecte cela, et je n'en fais pas une polémique.

Cependant, vous évoquez, monsieur Marty, le format de l'armée de terre. La trajectoire prévue par le Livre blanc de 2008 envisageait la possibilité d'une force d'intervention de 30 000 hommes, mais, très rapidement, on s'est aperçu que c'étaient 30 000 hommes en papier. Il vaut mieux être dans la réalité et, en l'occurrence, afficher aujourd'hui 22 000 hommes pour l'armée de terre, cela correspond à la réalité.

Je souhaite que dans les débats à venir nous soyons, comme l'a dit tout à l'heure le Premier ministre, à la fois dans l'ambition et dans la vérité, mais je compléterai mon propos au fil des questions : le président Le Fur me rappelle à l'ordre – silencieusement –, et, comme c'est un Breton, je vais devoir m'exécuter.

Sourires.

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Je voudrais doublement vous remercier, monsieur le ministre. D'abord, pour être resté avec nous dans l'hémicycle, ce qui est fort aimable et courtois de votre part. Je regrette que le Premier ministre ne soit plus parmi nous, car le sujet méritait qu'il reste. Je salue ensuite, l'esprit non polémique dans lequel vous intervenez. Je pense que vous pourriez, tant vous-même que Mme la présidente de la commission de la défense, donner quelques éléments de langage au président du groupe socialiste. Cela lui permettrait sans doute d'être plus au fait des questions de défense et de sécurité et d'éviter effectivement ces petites polémiques qui n'élèvent pas le débat.

Maintenant, ce qui est en jeu, au fond, dans ce Livre blanc, c'est ce que j'appelle le déclassement stratégique de la France. Pourquoi ? Parce que vous proposez une double réduction : réduction des effectifs de nos armées et réduction, en fait, du rythme d'acquisition des matériels, M. le Premier ministre l'a dit presque explicitement dans son discours introductif. Je dis qu'il s'agit d'un déclassement stratégique, parce que, effectivement, nos armées ont fait des efforts en la matière depuis vingt-cinq ans. On se souvient des fameux « dividendes de la paix » à la suite de l'implosion de l'Union soviétique. Tous les gouvernements – je dis bien tous – se sont inscrits dans cette logique, mais, aujourd'hui, on atteint une limite, en termes de fonctionnement, en termes de capacités, dès lors que l'on souhaite que la France reste en première division mondiale.

Mon propos n'est pas polémique. Je dis que vous prévoyez une réduction de 24 000 postes, qui sont en fait 34 000, et qui viennent s'ajouter, effectivement, à la réduction de 44 000 postes déjà réalisée ces dernières années, c'est-à-dire qu'au total nous aurons réduit les effectifs de nos armées d'environ 80 000 personnes en une dizaine d'années. Ce n'est pas supportable, ce n'est pas réaliste et, malheureusement, si ce choix est fait, si on le met en oeuvre, la France ne jouera plus en première division et, en tant que gaulliste, je ne peux pas l'accepter.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Je ne partage pas du tout le point de vue de M. Grouard. Je lui conseille d'ailleurs de prendre connaissance de la déclaration faite par mon homologue américain, M. Chuck Hagel, quand je suis allé le rencontrer aux États-Unis il y a quelques jours. Il a cru bon, dans un communiqué, de reconnaître que la France maintient son effort de défense et conserve ses capacités.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Je sais bien qu'en tant que gaulliste, cette référence ne vous convient pas. Mais on peut estimer que M. Chuck Hagel est un expert en matière de défense. Son diagnostic peut donc être considéré comme valable.

Pour ce qui concerne les options fondamentales, nous poursuivons les engagements du Livre blanc de 2008. Nous maintenons la protection de notre territoire, la dissuasion, et notre capacité d'intervention. D'autres intervenants l'ont rappelé, comme M. Guilloteau, ainsi que plusieurs orateurs au Sénat hier. Nous conservons ainsi la capacité d'intervenir en premier sur un théâtre d'opérations, celle d'intervenir dans des théâtres de crise, celle d'intervenir en même temps dans trois théâtres différents et celle de participer à des forces de coercition à hauteur de 15 000 hommes. Bref, la France garde l'ensemble de ses capacités et consent toujours un effort budgétaire très significatif en matière de défense. Vous savez l'ampleur de cet effort : on avait annoncé que la défense serait la variable d'ajustement du budget de l'État, mais c'est le contraire qui se produit. Je voudrais que vous le constatiez.

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Monsieur le ministre, je m'occupe comme vous de ces questions depuis fort longtemps. Je vous poserai donc plusieurs questions sans la moindre intention polémique, car le moment est sérieux – et même grave – pour notre pays.

Permettez-moi d'abord de noter que ce Livre blanc, dont la réalisation a été un peu chaotique, et dont la publication a été reportée plusieurs fois, ne change pas fondamentalement les orientations du précédent Livre blanc. On reste dans la même logique : l'environnement stratégique est dans l'ensemble perçu de la même manière, et les objectifs sont inchangés. Naturellement, je m'en félicite : la politique de défense de la France ne change pas avec les changements de gouvernement !

En la matière, la mère des batailles est en réalité celle de l'argent, vous le savez bien. Les guerres ne se gagnent pas avec des déclarations et des Livres blancs, mais avec des effectifs et des équipements. Le vrai débat, c'est donc celui de la loi de programmation militaire, et celui du prochain budget de la défense. Vous nous dites que les objectifs seront conservés : malheureusement, nous voyons que le budget de la défense français rejoint la moyenne européenne. Jusqu'à présent, seules la Grande-Bretagne et la France se maintenaient légèrement au-dessus de cette moyenne. Le rapport entre le budget de la défense et le PIB de la France va désormais tomber aux alentours de 1,15 %. Nous allons ainsi rejoindre le peloton des pays qui ne consacrent à leur défense que 1 % de leur PIB, dans une Europe globalement dénucléarisée et en voie de désarmement budgétaire unilatéral. Alors que nous sommes dans un océan de menaces et de tempêtes, la France, malheureusement, rejoint ce groupe.

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MM. Marty et Grouard ont décrit les composantes de la défense française affectées par ces baisses, que je n'ai pas le temps de rappeler. Il s'agit, quoi que vous en disiez, d'une diminution d'au moins 24 000 hommes, et de 30 000 emplois perdus dans l'industrie de la défense dans les prochaines années. Je vous donne rendez-vous au moment de l'exécution du prochain budget de la défense, qui dépend en effet des revenus tirés des bijoux de famille que vous êtes censé vendre. Mais nous verrons.

En partant de ce constat, je vous poserai plusieurs questions – très brièvement, car je ne dispose malheureusement que de très peu de temps.

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Vous avez déjà épuisé votre temps de parole !

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En consacrant 1,15 % ou 1,20 % du PIB à la défense, comment faites-vous, monsieur le ministre, pour maintenir en état de marche la dissuasion nucléaire, et pour conserver des forces de projection sérieuses ? Il faut pouvoir envoyer ces forces dans des conflits de grande intensité, ou de durée prolongée, comme on le voit en Afrique aujourd'hui. Permettez-moi de douter !

Comme vous le savez, la grande différence entre la situation de notre défense et celle du Royaume-Uni tient au fait que le dispositif nucléaire britannique est peu coûteux, ou en tout cas beaucoup moins que le nôtre. L'Allemagne, elle, n'a pas de dispositif nucléaire du tout : c'est donc paradoxalement l'armée allemande qui deviendra la première armée d'Europe !

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Nous essayons de respecter une durée de deux minutes pour chaque intervention : veuillez terminer rapidement, mon cher collègue.

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Au Mali, que comptez-vous faire pour remédier aux lacunes criantes que nous avons constatées en matière de ravitaillement, de transport, de logistique et de renseignement ?

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Que comptez-vous faire pour relever les défis nouveaux que constituent la guerre spatiale, la cyber-défense, et la défense anti-missile ?

Enfin, quelles sont les conséquences sur la défense européenne d'un désarmement budgétaire de la France ?

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Nous comprenons bien que toutes ces questions sont extrêmement pertinentes, mais elles demandent du temps. Efforçons-nous plutôt à la concision !

La parole est à M. le ministre.

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Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Il est très difficile d'être concis sur des questions aussi larges que celles de M. Lellouche. Sans être pervers, monsieur le député, je vais vous faire une suggestion. Peut-être pourriez-vous rester jusqu'à la fin du débat : je reviendrai sur certains des points que vous avez évoqués, à l'occasion des autres questions qui me seront posées.

Je ne répondrai donc à présent qu'à deux de vos questions. Tout d'abord, les comparaisons internationales doivent être faites selon un référentiel unique. Pour ma part, j'emploie les normes définies par l'OTAN, qui sont reconnues par tous. Nous faisons partie de l'Alliance atlantique et de son commandement intégré ; au regard des normes OTAN, nous consacrons aujourd'hui 1,76 % de notre PIB à la défense. Nous entendons rester à ce niveau-là pendant la durée de la loi de programmation militaire.

Beaucoup de pays européens n'accordent pas une grande importance budgétaire à la défense, s'en désintéressent. C'est vrai : je suis d'accord avec vous sur ce point. Il ne s'agit d'ailleurs pas uniquement des pays auxquels on pense habituellement. Je me suis récemment rendu à Londres : j'ai pu constater que la France y est considérée comme une référence parce qu'elle a décidé de maintenir son niveau d'engagement. Le ministre de la défense britannique se sert de cet exemple pour justifier auprès du Parlement et de son ministre du budget la nécessité de maintenir l'effort de défense britannique. Vous voyez donc qu'en fin de compte, le « déclassement stratégique » de la France n'est une réalité que dans l'esprit des quelques individus qui le proclament. Nos collègues d'autres pays considèrent que la France réalise un effort nécessaire, qui lui permet d'assurer les trois missions essentielles que j'ai évoquées tout à l'heure. Je vous conseille à cet égard de prendre connaissance du Livre blanc dans son ensemble.

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La parole est à M. François de Rugy, pour une première question du groupe écologiste.

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Monsieur le ministre, le traité de non-prolifération nucléaire, révisé en 2010, engage la France à entreprendre – entre autres – des mesures de désarmement. Les puissances nucléaires sont invitées à rédiger un rapport pour préparer la révision du TNP en 2015. Quelle sera la position de la France au sujet de son propre arsenal, alors qu'il semble que toutes les composantes de l'arme nucléaire et les crédits afférents soient sanctuarisés ?

Alors que des voix se font entendre dans le monde politique, mais aussi parmi les militaires, pour remettre en cause la composante aérienne de l'arsenal nucléaire français, le Gouvernement a-t-il évalué précisément le coût de celle-ci ?

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Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur de Rugy, j'ai écouté votre intervention tout à l'heure : je constate que nous avons un désaccord sur le fond. Nous considérons que la dissuasion est la garantie ultime contre les agressions ou les menaces d'origine étatique. Le Premier ministre parlait à cet égard des « menaces de la force ». Nous considérons aussi que la dissuasion permet d'éviter tout chantage qui paralyserait notre liberté de décision et d'action – le Premier ministre l'a également dit tout à l'heure. Nous considérons, enfin, que la dissuasion dans son ensemble – et plus particulièrement sa deuxième composante – nous permet d'éviter toute surprise stratégique. C'est pourquoi nous considérons que la dissuasion est un tout.

Contrairement à ce que vous disiez tout à l'heure, son coût représente, tout compris, un peu plus de 10 % du budget de la défense, soit 3,5 milliards d'euros par an. Ce coût peut varier selon les années : il y a des phases de renforcement et de modernisation des capacités, et des phases de stabilité. Nous sommes actuellement dans le deuxième cas de figure.

La réduction de notre capacité nucléaire n'est pas d'actualité. Nous n'avons pas, à cet égard, de leçons à recevoir d'autres pays : nous avons démantelé nos sites d'essai et de production de matière fissile. Nous avons réduit notre capacité à 300 têtes nucléaires maximum : nous respectons le principe de stricte suffisance. Nous souhaitons que l'ensemble des nations qui disposent de l'armement nucléaire engagent des procédures de réduction de leur arsenal. Quand elles seront arrivées au niveau où nous sommes, nous serons tout à fait prêts à en parler !

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La parole est à M. François de Rugy, pour la seconde question du groupe écologiste.

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Monsieur le ministre, comme vous l'avez compris, pour le groupe écologiste – que je représente – il ne doit pas y avoir de tabou en matière de politique de défense, que ce soit à propos de la dissuasion nucléaire, du format des armées, ou encore du coût de cette politique, a fortiori en cette période de choix budgétaires drastiques. Comme M. le ministre du budget l'a rappelé tout à l'heure, au cours de la séance de questions d'actualité au Gouvernement, le Président de la République, le Gouvernement et la majorité ont engagé notre pays dans une baisse nette des dépenses de l'État.

À cette occasion, je voudrais dire que je trouve un peu étonnant – pour ne pas dire indécent – d'entendre des représentants de l'UMP demander à longueur de débat budgétaire des baisses de dépenses publiques, mais critiquer une prétendue baisse des dépenses militaires – dont, pour notre part, nous contestons la réalité.

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Ce qui est indécent, c'est la bêtise de M. de Rugy !

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Nous pouvons certes être en désaccord sur la politique de défense, mais reconnaissons au moins que le choix du Président de la République, dont ce Livre blanc se fait l'écho, et que le Premier ministre et le ministre de la défense ont rappelé au cours de ce débat, est celui de la stabilité des dépenses ! Il ne s'agit pas d'une baisse : vous pouvez toujours essayer de dire le contraire, mais ce n'est pas vrai, messieurs les députés de l'opposition. Quant à votre cohérence en matière budgétaire, vous vous en expliquerez !

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Il est vrai qu'en matière de cohérence, les écologistes sont des experts !

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Nous avons bien compris que certains choix seront faits au moment de l'examen de la loi de programmation militaire. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous en dire un peu plus sur les choix d'équipements, d'investissements – car il faudra en faire – qui seront effectués à cette occasion ? Restons-nous dans une logique d'équipements lourds et coûteux, mais peu nombreux, ou équiperons-nous nos armées – notamment l'armée de terre – d'un certain nombre d'équipements nécessaires à son fonctionnement et à des opérations comme celle, par exemple, qui a été menée au Mali ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur le député, le Livre blanc prévoit, en matière de capacités, quelques inflexions. Ces inflexions portent sur la cyber-défense – cela a déjà été dit – et sur la politique d'acquisition de drones. Nous serons amenés à en reparler plus tard au cours de ce débat. D'autres inflexions, qui sont attendues, concernent le ravitaillement en vol, le transport et la logistique. Ces évolutions visent à combler des manques qui ont été constatés antérieurement et dont on voit aujourd'hui qu'il est nécessaire d'y remédier activement. Cette première remarque est importante : il s'agit d'une inflexion importante par rapport à la précédente loi de programmation militaire. La cadence des acquisitions sera précisée par la prochaine loi de programmation.

Deuxième observation d'ordre général : je suis très attaché au principe de différenciation. Il s'agit d'affecter les capacités aux forces en fonction des missions. Il n'est pas nécessaire de disposer d'outils hautement sophistiqués pour réaliser des missions plutôt rustiques, et inversement. Nous allons nous y atteler : il faut donner les bons moyens d'interventions, au bon moment, à des militaires bien formés. Voilà le principe de base : c'est pourquoi nous avons développé les concepts de différenciation et de mutualisation, dont vous avez pu prendre connaissance en lisant le Livre blanc.

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La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour la première question du groupe RRDP.

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Monsieur le ministre, la France assume presque seule l'essentiel de l'effort militaire au Mali, pour défendre des intérêts largement européens. Certes, un consensus s'est dégagé en Europe autour de cette intervention : la France a su mobiliser ses partenaires. Plusieurs États membres lui ont apporté leur soutien dans un cadre bilatéral.

Mais l'opération Serval confirme la difficulté de la mise en oeuvre de la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union européenne. La mécanique européenne a montré trop d'inertie pour organiser, dans les temps, une opération militaire combinée. L'intervention d'une force européenne de terrain aurait permis à l'Union européenne de poser sa marque dans le domaine diplomatique et militaire. Au lieu de cela, les États-Unis sont devenus notre principal partenaire en termes financiers et opérationnels.

Le Livre blanc fait de la construction européenne en matière de défense et de sécurité un axe fort de la stratégie de la France conforme à la volonté exprimée récemment par le Président de la République d'ouvrir une nouvelle étape de l'Europe de la défense. Cette relance est indispensable, dans un contexte partagé de nécessaire redressement de nos finances publiques et des évolutions de la politique américaine davantage tournée vers l'Asie. Elle est possible parce que de nombreux États européens en ont exprimé le souhait – sans toutefois joindre les actes à la parole.

Dès lors, pourriez-vous nous préciser, monsieur le ministre, quelles formes concrètes peuvent prendre la mutualisation des capacités et la coopération entre États membres mises en avant dans le Livre blanc et si elles feront partie des priorités de la France, lors du Conseil européen dédié aux questions de défense, en décembre prochain ?

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Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur le député, j'ai eu l'occasion de souligner à de nombreuses reprises que j'étais favorable à une Europe de la défense et non au concept de défense européenne. Cette différenciation sémantique n'est pas uniquement une coquetterie, car elle repose sur une tout autre approche. La défense européenne, c'est ce que nous avons essayé de faire dans le passé en tentant de bâtir une architecture, un concept, une définition stratégiques, puis d'en expliquer la signification. Cela n'a pas réussi. Dans l'esprit de ce qu'a dit, tout à l'heure, Mme Guigou, présidente de la commission des affaires étrangères, je considère pour ma part qu'il faut initier l'Europe de la défense avec pragmatisme, et prendre, dans les domaines opérationnel, capacitaire et industriel, les initiatives nécessaires pour avancer à deux, trois, quatre, voire vingt-sept si c'est possible. Le Conseil européen va se tenir à la fin du mois de décembre. Ce sera la première fois, depuis 2008, que les chefs d'État et de gouvernement aborderont la question de la défense en Europe et réfléchiront à la construction de l'Europe de la défense, car cela devient désormais une nécessité. Comme vous y avez fait allusion, celle-ci peut se mettre en oeuvre au niveau capacitaire, en particulier grâce à une action en commun dans le domaine de la mutualisation des capacités logistiques et de ravitaillement. Cette première étape pourrait être franchie pour le prochain conseil européen – c'est en tout cas ce que la France suggère –, et ce grâce à la volonté des uns et des autres. Ce premier pas vers la mutualisation capacitaire pourrait être suivi d'autres actions. Cette même logique se développera pour les trois axes et aboutira, je l'espère, à une construction plus crédible, mais obligatoire, de l'Europe de la défense.

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La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour poser sa deuxième question.

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Monsieur le ministre, le renseignement occupe une place centrale dans notre stratégie de défense et de sécurité nationale, qu'il s'agisse du renseignement humain ou technique, apportant un concours indispensable à nos capacités de protection, de dissuasion et d'intervention.

À cet égard, la communauté du renseignement, qui regroupe les six services de renseignement, et l'académie du renseignement ont véritablement contribué à l'émergence d'une culture partagée au sein de la communauté française du renseignement et conduit incontestablement à améliorer son efficacité. Cependant, le contrôle parlementaire dans ce domaine reste limité. Seule la récente délégation parlementaire au renseignement « a pour mission de suivre l'activité générale et les moyens des services spécialisés », lesquels relèvent des ministères de la défense, de l'intérieur et des finances. Encore n'est-elle informée que des éléments relatifs « au budget, à l'activité générale et à l'organisation des services », autrement dit de missions et informations plutôt circonscrites.

Le Livre blanc, qui donne une portée nouvelle à la priorité accordée au renseignement, prévoit notamment d'étendre le rôle de la délégation parlementaire au renseignement. C'est un objectif important, car il participerait au renforcement des moyens de contrôle du Parlement en matière de politique de renseignement. Dès lors, monsieur le ministre, pourriez-nous indiquer si la délégation parlementaire au renseignement possédera des compétences nouvelles qui la feront évoluer d'un statut d'information parlementaire vers un statut de contrôle parlementaire ?

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Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur le député, ma réponse sera brève : M. Manuel Valls et moi avons pris connaissance du rapport Urvoas et de la délégation parlementaire au renseignement. Un groupe de travail spécifique chargé des travaux préparatoires à la commission du Livre blanc a été amené à faire des propositions, incluses dans ce document. Les décisions ne sont pas encore prises. Toutefois, le Conseil national du renseignement va se réunir dans les jours qui viennent pour prendre des initiatives allant dans le sens d'un renforcement du contrôle parlementaire, comme vous le souhaitez. Je ne dispose évidemment pas encore des conclusions de cette instance.

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Nous en venons aux questions du groupe GDR.

La parole est à M. Jean-Jacques Candelier.

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Monsieur le ministre, dans la mesure où le nucléaire confère à la France une place de choix au Conseil de sécurité de l'ONU, il peut avoir un intérêt, mais ce serait justifier un ordre international injuste, fondé sur la loi du plus fort. Et pour ce qui est de garantir notre sécurité, la chose est beaucoup plus contestable. La réalité des nouveaux conflits ne rend-elle pas grandement caduque la force de frappe nucléaire ? Ce n'est pas elle qui défendra nos soldats envoyés à l'étranger ! À aucun moment, l'arme nucléaire n'a évité les attentats. Par ailleurs, est-on sûr que la dissuasion joue face à un État fanatisé ? Il convient de se pencher sur le dogme du nucléaire, comme l'a fait Paul Quilès. Les communistes réaffirment leur objectif d'un désarmement nucléaire multilatéral et général. La lutte contre la prolifération nucléaire ne peut être menée avec des moyens de coercition militaire. L'histoire l'a montré, il n'existe pas de prolifération nucléaire en général, mais des proliférations particulières, liées à des conflits précis : Iran, Corée du Nord et Israël.

Après avoir mis fin à notre composante terrestre, nous pourrions démanteler notre composante aérienne. En effet, elle porte le germe d'une utilisation sur le champ de bataille ou dans le cadre de « frappe préventive contre des états voyous », comme le disait Nicolas Sarkozy. La composante aérienne contribue faiblement à la sanctuarisation du territoire, ainsi que l'a montré la levée de l'alerte nucléaire aérienne permanente des Mirage 2000N pendant la guerre de Libye. De plus, en cas de tension internationale, elle peut devenir un facteur très dangereux d'escalade : du fait de son extrême polyvalence, un Rafale porteur d'un « pod » de reconnaissance envoyé en territoire hostile pourrait être confondu avec un Rafale armé d'un missile air-sol moyenne portée. En revanche, tenant compte de la réalité du monde, nous maintiendrions à court terme la force nucléaire stratégique, avec une patrouille permanente d'un sous-marin lanceur d'engin stratégique.

Je vous laisse le soin, monsieur le ministre, d'essayer de me convaincre !

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur Candelier, j'ai déjà essayé, en commission et j'avoue mon échec !

Sourires.

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Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Comme je l'ai déjà exprimé précédemment avec beaucoup de force, les choix sont clairs s'agissant du maintien de la dissuasion et de la composante aérienne. La composante aérienne est un signe visible de notre détermination politique. Tout comme la composante océanique, c'est une arme de non-emploi. Contrairement à une arme d'un champ de bataille, elle garantit la sécurité et l'inviolabilité de notre territoire, tout en permettant une flexibilité. Il est essentiel d'ajouter, ici, qu'elle dispose d'un missile de croisière qui restera totalement invulnérable à la défense antimissile balistique, ce qui complète l'ensemble de notre dispositif de dissuasion. Cela ne signifie pas que nous soyons opposés au désarmement nucléaire : j'ai tout à l'heure expliqué à M. de Rugy l'ampleur de nos efforts et des signes donnés par des gouvernements de gauche comme de droite pour montrer que nous étions tout à fait favorables à la dénucléarisation de tous les pays du monde. Nous devons toutefois garder la stricte suffisance avant que les autres ne consentent les efforts nécessaires.

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La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour poser sa deuxième question.

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Monsieur le ministre, la droite peut toujours pousser des cris d'orfraie sur la baisse du contrat opérationnel des armées, nous constatons que nous n'avons jamais dépassé 7 000 hommes sur la totalité des engagements opérationnels depuis 1998. Le problème n'est pas dans le nombre d'hommes, mais dans la capacité d'action. Mieux vaut 7 000 hommes bien équipés que 15 000 avec du matériel dépassé, voire sans matériel du tout ! De ce point de vue, nous voyons d'un bon oeil les efforts sur la cyber-défense, les drones, le ravitaillement en vol et le transport logistique. Dans tous ces domaines, il faut tout mettre en oeuvre pour assurer notre indépendance maximale, c'est-à-dire la fabrication industrielle nationale des matériels dont nous avons besoin. Les drones sont essentiels pour ce qui a été, depuis la nuit des temps, la pierre angulaire de la tactique et la stratégie militaire : l'obtention de renseignements. En 2003, la possession par la France de ses propres moyens de reconnaissance et de renseignement lui a permis de déjouer les mensonges sur les prétendues armes de destruction massive en Irak. Nous ne pouvons dépendre des Américains. Nous nous prononçons contre l'achat de drones étrangers, notamment en provenance d'Israël, État qui doit être boycotté, alors qu'EADS et Dassault possèdent la technologie. L'État doit imposer qu'un projet mettant les potentiels des deux groupes soit rapidement engagé. Pour les avions ravitailleurs, Airbus doit pouvoir répondre aux besoins.

Monsieur le ministre, comment pouvez-vous nous garantir que les bonnes intentions en matière capacitaire profiteront avant tout à notre industrie ?

Par ailleurs, alors qu'à enveloppe constante, il faut profiter de la baisse des personnels pour mieux équiper les forces, quel effort sur l'armement conventionnel préconisez-vous, si les économies sur la masse salariale étaient cette fois au rendez-vous ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur le député, j'ai expliqué tout à l'heure les inflexions qui seraient apportées à la loi de programmation de 2008. Dans le projet de loi de programmation militaire, qui sera soumis à votre délibération à l'automne, vous pourrez constater le cadencement capacitaire et financier des différents outils de défense dont nous voulons nous doter. Je vous confirme notre volonté d'inscrire dans la loi de programmation les avions ravitailleurs, l'acquisition des drones et le transport logistique nécessaire à notre défense. Ces capacités nous ont manqué au Mali, mais également lors d'opérations antérieures.

Je reprends par ailleurs le concept de différenciation. Vous avez jugé préférable d'avoir moins d'hommes, mais bien équipés. Nous partageons ce point de vue : j'avais précédemment souligné qu'afficher 30 000 hommes en 2008 était une vue de l'esprit. Dans la réalité, et comme l'a lui-même constaté le chef d'état-major des armées dans une déclaration de 2011, ils n'étaient pas au rendez-vous, pour les raisons que j'ai expliquées. Je préfère quant à moi la vérité concrète : c'est le gage d'une véritable opérabilité de nos forces.

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Nous en venons aux questions du groupe SRC.

La parole est à Mme Marie Récalde.

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Monsieur le ministre, tirant les leçons des opérations conduites en Libye, en Afghanistan ou au Mali, le Livre blanc prône un modèle d'armée adapté aux nouvelles menaces et, bien sûr, aux besoins qui en découlent notamment en termes de connaissance et d'anticipation.

Cette analyse réaliste, qui fait ressortir certaines lacunes capacitaires en matière de renseignement, affirme que la France doit se doter d'une capacité pérenne en matière de drones de moyenne altitude longue endurance et de drones tactiques. Vous l'avez dit, monsieur le ministre, et tout le monde en convient désormais, la France a raté le rendez-vous des drones, dès le début des années quatre-vingt-dix. L'acquisition sur étagère de deux drones de surveillance à moyenne altitude répond à une nécessité immédiate. Mais notre autonomie stratégique et notre efficacité opérationnelle reposeront, à moyen et long terme, sur notre capacité de production. Telle doit être notre ambition à l'horizon 2025.

Nous le savons, les contraintes budgétaires actuelles ne permettent à aucun État européen de porter, seul, des investissements de cette envergure. Comme l'a récemment rappelé le président de la République, « la souveraineté, ce n'est pas l'isolement, c'est aussi la capacité d'agir avec les autres ». Dans ce cadre, les entreprises européennes ont les capacités, les compétences et les sites de production nécessaires au développement d'un tel projet. Le besoin existe, le marché est prometteur dans ses applications militaires comme civiles.

Le salut de cette « solution pérenne » voulue par le Livre blanc repose, sans doute, sur une mutualisation au niveau européen. Notre expérience et nos succès industriels civils – je pense bien évidemment à Airbus – sont une piste de travail pour conduire à une alliance d'industriels capables de développer un ambitieux projet. Tout comme nous, vous les y encouragez, parce que nous savons que l'Europe de la défense est à portée de main sur le plan industriel.

Vous avez récemment déclaré, monsieur le ministre, vouloir proposer à nos partenaires européens la mutualisation de notre capacité à déployer et exploiter des drones de surveillance. Quel type de coopération – dans un cadre bilatéral ou dans le cadre de la politique de sécurité et de défense commune – envisagez-vous ? Ce sujet fera-t-il partie de l'ordre du jour du Conseil de décembre ou les États membres sont-ils déjà en phase active de discussion ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Madame la députée, nous sommes un peu loin des perspectives que vous venez d'évoquer, même si cette évolution est souhaitable.

Votre question me permet de préciser quelques points concernant les drones. Il fallait procéder à une remise à plat de l'ensemble du dispositif, ce qui m'a conduit à prendre trois décisions.

Premièrement, je me suis engagé à mettre en place une coopération très amont avec les Britanniques impliquant les groupes industriels Dassault et BAE Systems autour de ce que pourrait être demain le drone de combat afin d'éviter de nous retrouver en 2030 avec deux types de drones de combat en compétition sur le marché européen comme il y a aujourd'hui deux types d'avions de chasse concurrents.

Deuxièmement, j'ai veillé à ce que nous puissions mettre en place le dispositif d'acquisition des drones tactiques destinés à remplacer ceux qui sont aujourd'hui en fonctionnement, en particulier dans l'armé de terre. Le grand débat porte sur le drone de moyenne altitude et de longue endurance, dit MALE. Comme vous le savez, j'ai pris récemment la décision d'acheter sur étagère un drone qui n'existait pas du tout en magasin, si je puis dire, au niveau national.

Cette décision en appelle une autre. Il s'agit de faire en sorte que la fabrication du drone MALE que je souhaite voir succéder de manière pérenne au drone américain Predator puisse être engagée dès à présent par des industriels européens. Nous espérons que les Britanniques partageront ce point de vue car ils ont des idées proches des nôtres. Cette offre d'action en commun s'applique du reste à d'autres types de drones qui ont aujourd'hui la capacité du Predator ou du Reaper. Ils pourraient faire l'objet d'un effort européen qui permette l'émergence d'un drone appelé à remplacer les drones aujourd'hui en service, de type Predator ou Reaper selon les pays.

M. Candelier a indiqué qu'il ne voulait pas du drone américain. Mais il faut savoir qu'aujourd'hui, au Mali, nous en dépendons en partie. Je préfère donc acheter des drones américains dont la nation aura la propriété plutôt que de dépendre des drones américains aujourd'hui déployés sur le théâtre malien.

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Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, comme nous le savons tous, l'industrie de défense est une composante majeure de notre autonomie stratégique et de notre souveraineté.

Avec ses 4 000 entreprises, elle constitue une part importante de notre économie et contribue à notre compétitivité. Elle représente en effet 150 000 emplois, près de 15 milliards d'euros de chiffres d'affaires et exporte un tiers de sa production. Sa richesse et son excellence la placent au premier rang sur les marchés mondiaux : richesse de ses domaines d'activité, du nucléaire à l'aéronautique en passant par le spatial ; richesse de ses savoir-faire et excellence grâce aux 20 000 femmes et hommes qui occupent des emplois hautement qualifiés ; excellence de ses capacités d'innovation technologique.

En écho au Livre blanc, le Président de la République a souligné la nécessaire prise en compte de l'impératif industriel. En effet, malgré ses atouts, l'industrie de la défense doit faire face au contexte que nous connaissons : conséquences de la crise économique qui dictent la raison budgétaire de nos politiques publiques, concurrence internationale des États-Unis, des pays de l'Union, de la Russie ou des pays émergents, grandissante en matière d'armement, exigence toujours plus forte de qualité et d'excellence en matière de recherche et de développement. Et sur ce dernier point, une réponse précieuse est apportée avec le maintien des 750 millions d'euros alloués à la recherche et au développement.

En outre, le Livre blanc met en avant la nécessaire prise en compte de l'intégration croissante des intérêts stratégiques européens, de l'industrie de défense européenne, des perspectives de coopération ou de partage des activités de développement et de production.

Aussi, monsieur le ministre, aimerais-je avoir des précisions sur la manière dont la France et son industrie de défense vont relever le défi posé par cette concurrence exacerbée, cette exigence de plus en plus grande de qualité et d'excellence de la recherche et développement, avec l'enjeu de la coopération européenne dans ce domaine.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Madame la députée, je crois avoir déjà eu l'occasion de répondre à cette question aujourd'hui même, lors des questions au Gouvernement : nous sommes tout à fait déterminés à garantir la place de l'industrie de défense et la base technologique de la défense française, qui est l'une des premières du monde. Les orientations majeures du Livre blanc vont dans ce sens. Vous avez rappelé les chiffres.

En cette période difficile, contrainte au niveau financier, cela passe prioritairement par la garantie d'un effort de recherche et d'innovation maintenu au niveau que vous avez indiqué, tout au long de la loi de programmation militaire qui vous sera proposée.

J'ai pleinement confiance dans la capacité de nos industriels à relever les défis. Il faudra sans doute revoir avec eux les contrats passés, car ils ont été conclus à un moment où les perspectives financières étaient nettement meilleures, en 2008 : mais nous n'avons aucunement l'intention d'entamer quelque rupture que ce soit dans le domaine capacitaire ou dans le domaine des compétences.

Nos industries de défense doivent aussi être beaucoup plus fortes à l'exportation. Les industriels se mobilisent face aux multiples enjeux de ce secteur. Le ministère de la défense apporte son soutien politique préalable, dans la phase d'exploration, pour que nos entreprises puissent être performantes sur différents marchés mondiaux et elles le sont. À cet égard, je rappellerai que je rends compte chaque année de nos bilans d'exportation devant la commission de la défense et la commission des affaires étrangères.

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Monsieur le ministre, ma question porte également sur l'industrie de défense. Nous sommes nombreux dans cet hémicycle à souhaiter que notre pays conserve un outil militaire performant, moderne et efficace pour assurer la sécurité de nos concitoyens et notre place dans le monde.

Le Livre blanc, vous l'avez souligné, reconnaît l'industrie de défense comme une composante essentielle de l'autonomie stratégique de la France. Ce tissu industriel regroupe 4 000 entreprises, notamment beaucoup de petites et moyennes entreprises. Ce sont ainsi 165 000 hommes et femmes qui consacrent chaque jour leur énergie à offrir au pays des outils performants et adaptés à nos missions.

En affirmant le rôle moteur de l'industrie de défense pour la compétitivité de l'économie française et l'emploi industriel, vous permettez à ces investisseurs de poursuivre leur développement.

Enfin, en plaçant l'industrie de défense au rang d'instrument majeur sur la scène internationale, le Gouvernement montre sa volonté de devenir un partenaire des entreprises souhaitant se développer à l'international.

Vous avez ainsi tenu les engagements que vous aviez énoncés lors de votre arrivée au ministère – et je tiens à vous remercier pour votre action.

Le 27 novembre dernier, vous avez présenté le pacte Défense-PME lors du forum innovation de la direction générale de l'armement. Celui-ci poursuit des objectifs de croissance, d'innovation et de compétitivité et répond également à une responsabilité affichée de votre ministère, en tant que premier acheteur public de l'État, de soutenir la base industrielle et technologique de défense française.

Monsieur le ministre, comment comptez-vous conforter le tissu industriel sachant qu'il y aura des glissements à prévoir dans les commandes du ministère – le Premier ministre et vous-même les avez évoquées ? Comment comptez-vous décliner ce pacte Défense- PME dans la prochaine loi de programmation militaire afin de consolider les entreprises qui constituent notre tissu économique et industriel ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur le député, j'ai déjà répondu en partie à cette question.

J'attache beaucoup d'importance à la mise en oeuvre du pacte Défense-PME comme aux engagements pris conjointement par la DGA et les régions qui ont compétence dans le domaine économique. J'ai déjà, à ce titre, signé trois accords de coopération.

En outre, ce pacte est un instrument indispensable pour fertiliser les PME par l'innovation venant des grands groupes ou venant directement de la DGA.

Cette mission sera maintenue, même si les contrats que nous avons passés avec les industriels feront l'objet de rediscussions et connaîtront certaines inflexions. Mais comme il n'y aura de rupture ni des capacités ni des compétences, cela nécessite un renforcement de ces relations.

Puisque le cadre européen a été évoqué à plusieurs reprises dans les questions, je me permets de vous dire que se prépare au niveau européen une communication sur l'industrie de défense. Notre contribution portera sur deux points : d'une part, la mise en oeuvre au niveau européen d'un Small Business Act pour la défense afin que les petites et moyennes entreprises du secteur de la défense puissent bénéficier d'un soutien significatif ; d'autre part, l'action que nous menons auprès de la Commission afin qu'elle admette que le financement de la recherche et de l'innovation au niveau européen puisse également être attribué aux industries de défense dès lors que les concepts et les projets concernés reposent sur la dualité technologique.

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Je vous prie de m'excuser, monsieur le ministre, mais compte tenu du peu de temps imparti aux non-inscrits, je vais me contenter d'une réflexion très générale.

Je dois accorder au Gouvernement le mérite de la cohérence : à la suite de l'UMP, vous avez décidé de brader la souveraineté de la France dans tous les domaines, économique, monétaire, budgétaire. Et maintenant vient le tour des armées.

Coûte que coûte, vous voulez faire de la France un pays sous influence et sans influence, au destin lié.

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Après les 54 000 suppressions de postes voulues par Nicolas Sarkozy, vous prévoyez 24 000 suppressions supplémentaires, transformant le Livre blanc en un grand plan social.

Exclamations sur les bancs du groupe SRC.

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Voici sonné le glas de la suprématie française en Europe.

C'est en outre un choix inquiétant pour la filière militaro-industrielle française et ses milliers d'emplois induits.

Irak, Afghanistan, Mali, conflits au Moyen-Orient sont autant de piqûres de rappel qui doivent toujours nous inciter à la prudence et à la clairvoyance.

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Cette politique inconsciente de la France et de l'Union européenne va à l'encontre de tous les choix faits par de grands pays comme la Chine, l'Inde, la Russie ou le Japon qui, eux, ont augmenté leurs dépenses militaires.

Ces décisions sont d'autant plus graves qu'elles ne permettront plus de retour en arrière. Le savoir-faire séculaire de nos armées ne se reconstituera pas aussi facilement qu'un zéro en plus dans le budget.

Notre influence au sein de l'Union européenne va également être mise à mal. Comme les Britanniques, notre armée nous donnait encore la capacité de taper un peu du poing sur la table. Désormais, compte tenu de notre situation économique et bientôt militaire, notre voix ne portera bientôt pas plus que celle de l'Espagne.

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Entre terre et mer, la position historique de la France est celle du respect des grands équilibres, de la non-ingérence. C'est ainsi que sa voix portait, et non grâce à l'alignement systématique derrière les États-Unis tel qu'a pu le pratiquer M. Sarkozy.

Compte tenu des divergences au sein de l'Union Européenne – l'Irak n'est pas si loin et il y aurait beaucoup de choses à dire sur le Mali – et compte tenu de notre influence discutable au sein de l'OTAN, est-il souhaitable que la défense française ne dépende plus que d'un commandement intégré au risque de renier la politique d'indépendance construite il y a quarante ans par le général de Gaulle ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Vous essayez d'accréditer l'hypothèse du déclassement stratégique, déjà avancée tout à l'heure. Je crois avoir répondu sur ce point.

Il ne faudrait pas vous aventurer dans des comparaisons un peu osées entre le potentiel militaire de la France et celui de l'Espagne, malgré toute la considération que nous pouvons avoir pour nos amis espagnols. Je vous précise que le budget de la défense espagnol a été diminué de 25 %.

L'ensemble de nos partenaires reconnaît l'importance du maintien de notre effort de défense. Nous préservons l'ensemble de nos capacités d'action pour effectuer nos missions, qu'il s'agisse de la protection, de la dissuasion ou de l'intervention.

La France reste en capacité de répondre à tous ses besoins de sécurité, même si les temps sont plus difficiles qu'auparavant, car la crise est là et le redressement des comptes publics indispensable. En tout état de cause, la défense de la France sera totalement assurée par ce gouvernement.

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Monsieur le ministre, ce Livre blanc sur la défense est à l'image de toutes les politiques de M. Hollande : les moyens ne sont pas du tout à la hauteur des ambitions affichées.

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Ils sont à la hauteur des dettes que vous avez laissées !

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S'agissant des ambitions, vous prétendez tout à la fois préserver la dissuasion nucléaire, maintenir nos capacités d'intervention extérieures, accroître nos moyens de renseignement, de transport aérien et de ravitaillement en volume, et enfin développer la cyber-défense.

Tout cela est très bien ; mais où sont les moyens correspondants ?

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Ils seront à la baisse, quoi que vous en disiez ! Faute d'avoir su définir des priorités, le Livre blanc annonce d'importantes réductions des équipements et des effectifs : moins de chars, moins d'avions de combat, moins de crédits d'entraînement, mais surtout 24 000 suppressions d'emplois supplémentaires qui toucheront principalement l'armée de terre.

Mes questions sont donc simples, monsieur le ministre : la réduction du format des armées – 24 000 suppressions de postes supplémentaires, je le rappelle – se traduira-t-elle par la disparition de régiments et la fermeture de bases ?

Si malheureusement tel était le cas, quand rendrez-vous publiques vos décisions ? Pour de nombreuses villes et régions, le départ des unités serait catastrophique. Les équipes municipales devront en être averties avant les élections de 2014 afin de pouvoir adapter leurs programmes.

À ces questions précises, j'espère obtenir, monsieur le ministre, des réponses précises ; je vous en remercie d'avance.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur le député, étant membre de la commission de la défense, vous m'avez déjà entendu puisque je viens chaque semaine vous expliquer nos choix. Mais puisque vous voulez faire un brin de polémique, je vous répète donc que nous faisons les choix qui n'ont pas été faits avant !

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

J'ai un peu de réserves et de munitions dans mes soutes, si vous me cherchez sur ce point ! Ce n'est pas mon style, mais si vraiment vous me cherchez, vous allez me trouver !

Où étaient les drones quand nous sommes arrivés ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Où étaient les avions ravitailleurs quand nous sommes arrivés ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Où étaient les transports logistiques quand nous sommes arrivés ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Bref, en remédiant à vos manques, nous faisons les choix que vous n'avez pas faits !

Je ferme ici la parenthèse polémique dans laquelle vous m'aviez entraîné – et cela servira d'avertissement à l'adresse de ceux qui seraient eux aussi tentés de venir sur ce terrain.

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Ne commencez pas à menacer, cela ne sert à rien, monsieur le ministre !

Plusieurs députés du groupe SRC. Si !

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Je n'ai jamais fait preuve d'agressivité !

Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Ne vous énervez pas non plus ! Je voulais simplement vous dire que, si d'aventure, on voulait aller sur ce terrain-là,…

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Mais moi non plus, monsieur le président, je ne m'énerve pas du tout !

Pour ce qui est de l'éventualité d'une restructuration et d'une fermeture de bases ou de régiments, la question se posera en effet. Je ferai en sorte que la réduction des effectifs soit prioritairement imputée sur l'état-major et sur le soutien central, afin d'éviter au maximum de toucher aux unités opérationnelles – même s'il faudra sans doute le faire un peu.

Je prendrai les décisions de manière concertée, avec beaucoup de précautions et, je l'espère, beaucoup de discernement, en prenant en compte toute une série de paramètres, dont celui de l'aménagement du territoire.

J'ai répondu tout à l'heure à l'un de vos collègues, lors des questions d'actualité, que nous mènerions un travail approfondi avec les élus et les collectivités locales. J'ai connu moi aussi des restructurations ; je sais que cela est difficile à vivre. Je sais qu'il faut des mesures d'accompagnement : nous prendrons les mesures d'accompagnement nécessaires.

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Monsieur le ministre, au risque de vous déplaire, je vais à nouveau vous poser la question que je vous avais posée à l'occasion d'un débat sur le Mali, concernant nos moyens de projection aérienne et de ravitaillement en vol.

Ce dossier est fondamental, vous en conviendrez. Nous ne faisons pas de polémique : nous sommes là pour échanger. Cela nécessite des réponses à la hauteur des ambitions de la France.

Monsieur le ministre, vous nous avez dit que le nombre d'avions de transport et d'avions ravitailleurs serait arrêté dans le cadre de la loi de programmation militaire.

J'observe néanmoins que le nouveau Livre blanc préconise une réduction de ces moyens, qu'il s'agisse des avions ravitailleurs multi role tanker transport, dits MRTT, ou des avions de transport. La cible des MRTT passe ainsi de quatorze à douze, et celle des avions de transport de soixante-dix à cinquante.

Or, monsieur le ministre, l'opération Serval nous a permis de constater que nous avions un besoin impérieux de capacités de projection aérienne, faute de quoi nos troupes n'auraient pas pu être suffisamment efficaces.

Je me souviens d'une séance de questions d'actualité pendant laquelle le Premier ministre avait été à la peine en énumérant les difficultés qu'il avait rencontrées pour solliciter des avions auprès de nos « partenaires » européens.

Je souhaite également appeler votre attention sur les hélicoptères de manoeuvre, dont la cible passe de 130 à 115. Or les besoins en la matière ont rarement été aussi importants, monsieur le ministre, d'autant plus que ces appareils peuvent également être employés directement au bénéfice des populations en cas de crise grave de type catastrophe naturelle.

Quant aux hélicoptères NH90, la notification de la commande de trente-quatre exemplaires, destinée à poursuivre le renouvellement de cette flotte composée majoritairement de Puma, n'a toujours pas eu lieu.

Ma question est donc double, monsieur le ministre, et sera précise : dans la perspective de nos prochains débats, pouvez-vous nous dire combien nous aurons d'avions de transport, d'avions ravitailleurs, mais également d'hélicoptères de manoeuvre dans le projet de loi de programmation militaire ?

De plus, dans la perspective impérieuse de maintenir nos capacités, devons-nous nous attendre à la notification de la seconde tranche de la commande d'hélicoptères NH90, à laquelle je viens de faire référence ou, à défaut, à une nouvelle commande de Caracal ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

La deuxième tranche de commande de NH90 sera diligentée très rapidement ; je respecte donc les engagements que j'ai pris.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

En outre, le Livre blanc témoigne de la cohérence de l'effort de la nation pour son armée de l'air, et en précise les chiffres : cinquante avions de transport tactique et douze avions ravitailleurs MRTT.

Cet ensemble, qui sera complété par des hélicoptères de manoeuvre dont la commande sera confirmée, garantit à l'armée de l'air une cohérence pour l'ensemble de ses opérations.

Le sujet principal était l'accélération de la commande MRTT, à laquelle je vous sais très attaché ; et nous l'avons réalisée.

Les MRTT sont un dispositif très important : sans eux, l'aviation de chasse est très handicapée. Par ailleurs, les MRTT servent aussi à notre dissuasion, ce qui est tout à fait fondamental. Il était donc temps de remplacer nos vieux KC-135 qui commençaient à avoir besoin de béquilles.

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Je soutiens l'ambition affichée par le Livre blanc – même si, comme tous mes collègues, je considère que nous ne pourrons en mesurer la portée réelle qu'à l'examen des textes à venir.

La France envoie ainsi un double signal, et tout d'abord. à nos forces Je salue à cette occasion nos troupes qui se battent actuellement au Mali. J'ai eu le grand privilège de les rencontrer : en se battant ainsi, elles rendent un honneur particulier à la France et à l'Europe.

Cela envoie également un signal à nos alliés européens : à un moment où la crise économique et les contraintes budgétaires risquent d'entraîner un déclin stratégique, la France donne à nos alliés un signal positif.

Ma question porte sur la mutualisation, que vous avez évoquée tout à l'heure. La mutualisation au niveau européen est tout à fait essentielle : comment pensez-vous éviter toute contradiction entre le pulling and sharing européen et la smart defense, concept qui se développe dans le cadre de l'alliance atlantique ? Le risque existe en effet de voir ces deux logiques très semblables ne pas être parfaitement adéquates dans leur mise en oeuvre.

Par ailleurs, je souhaite revenir sur vos propos concernant le pragmatisme. Vous avez dit : « je choisis le pragmatisme pour l'Europe ». Or le pragmatisme ne suffit pas : il faut aussi, me semble-t-il, avoir une démarche politique.

Le Livre blanc européen, évoqué plus tôt par Mme Guigou, serait peut-être une réponse, même si j'en mesure parfaitement la difficulté. Mais comment peut-on progresser en Europe sans initiative politique majeure, avec de nouveaux partenaires et une nouvelle impulsion ? Le Conseil européen de décembre doit donc être l'occasion absolument historique de donner cette impulsion nouvelle.

Enfin, j'ai été assez déçue que le Livre blanc n'ait pas suffisamment expliqué, ni même évoqué, le lien de plus en plus moderne et nécessaire entre défense et développement. La complexité des défis stratégiques actuels et des crises appelle une vision globale renouvelée, intégrant des politiques de développement mieux à même d'assurer la prévention des conflits aux côtés des réactions militaires. J'aimerais donc savoir si telle est également votre philosophie.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Vous posez de bonnes questions, madame la députée, qui sont tout à fait d'actualité mais qui sont encore en gestation, notamment en ce qui concerne le pulling and sharing et la smart defense.

Lorsqu'on élabore les sujets de coopération dans le pulling and sharing, on fait en sorte qu'ils soient cohérents et conformes aux engagements que peuvent avoir les différents pays dans le cadre de la smart defense, ou les positionnements qu'ils ont pu prendre sur les chantiers dans le cadre de la smart defense. Nous sommes encore dans le domaine de la smart defense en termes d'inventaire des chantiers, puisque cela n'a été véritablement engagé que lors du dernier sommet de l'OTAN en mai 2012 à Chicago.

Nous sommes particulièrement actifs dans le domaine du pulling and sharing. Nous évoquions tout à l'heure la question du transport logistique et du ravitaillement en volume. L'EATC – european air transport command, ou commandement du transport aérien européen –, auquel Mme Guigou faisait allusion dans son propos, existe déjà et permet une première forme de mutualisation du transport logistique entre le Benelux, l'Allemagne et la France. Il peut devenir le creuset d'un vrai pulling and sharing, tant sur le ravitaillement en vol que sur le transport logistique.

Si nous affirmons notre volonté dans ce domaine et si la France parvient à être pilote et à inciter d'autres partenaires à nous rejoindre, nous pourrons aboutir. Ainsi, la Pologne, l'Italie et même la Grande-Bretagne sont intéressées par un axe qui constituerait une base de mutualisation capacitaire. Celle-ci est indispensable parce qu'elle revient moins cher et qu'elle est très efficace. Au Mali, l'EATC a ainsi servi pour la participation allemande.

Vous m'avez posé une autre question sur l'approche globale : c'est un concept très européen. En présentant le Livre blanc il y a quelques jours à Bruxelles et au Parlement européen, j'ai indiqué que nous étions très favorables à l'approche globale, à condition de ne pas oublier l'aspect militaire. La tentation existe au niveau européen de privilégier, dans l'approche globale, le développement et l'humanitaire – certes essentiels – en oubliant parfois que les situations peuvent avoir un aspect militaire. Nous restons donc vigilants sur ce point.

J'aimerais par ailleurs que nous avancions au niveau européen sur la Libye. Il y a une volonté d'agir pour aider le gouvernement libyen à assurer la protection de ses frontières. Voilà un exemple d'intervention qui n'est pas directement militaire, mais qui est très sécuritaire, et qu'il conviendrait de pousser rapidement au niveau européen ; j'espère que ce sera le cas.

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Nous revenons aux questions du groupe SRC.

La parole est à M. Joaquim Pueyo.

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Monsieur le député, ma question portera elle aussi sur l'Europe de la défense.

Le Conseil européen a appelé, les 13 et 14 décembre derniers, l'Union européenne à assumer des responsabilités accrues en matière de maintien de la paix et de sécurité internationale.

Dans cette perspective, la commission des affaires européennes et la commission de la défense de l'Assemblée nationale ont adopté une proposition de résolution européenne pragmatique, portant sur la relance de l'Europe de la défense.

Cette proposition de résolution poursuit trois objectifs : augmenter l'efficacité, la visibilité et l'impact de la politique de sécurité et de défense commune, renforcer le développement des capacités en matière de défense, et soutenir l'industrie européenne de défense.

Le Livre blanc de la défense et de la sécurité nationale s'inscrit résolument dans le prolongement de cette résolution et des conclusions du Conseil européen, et nous pouvons en être satisfaits. Il fait de la construction européenne en matière de défense et de sécurité un axe fort de la stratégie de la France au cours des prochaines années.

Une relance pragmatique et volontariste de la PSDC s'impose en effet dans un contexte marqué par la situation financière critique que connaissent plusieurs pays de l'Union et par les évolutions de la politique étrangère américaine, davantage tournée vers l'Asie.

Après une première décennie de progrès importants en matière d'intégration militaire, l'Union européenne peine à tirer parti des moyens dont elle dispose pour peser de façon plus décisive sur la résolution des conflits. Je pense notamment à des outils tels que l'Eurocorps, la brigade franco-allemande ou les groupements tactiques théoriquement à la disposition de l'Union, mais insuffisamment exploités. Or la France, compte tenu de la place particulière qu'elle occupe parmi les puissances militaires européennes et de son constant engagement en faveur d'une véritable Europe de la défense, figure parmi les États membres susceptibles de jouer un rôle moteur dans le développement de la défense européenne. Nous nous sommes déplacés à plusieurs reprises, notamment à Varsovie, à Londres et à Berlin, et j'ai compris que les Polonais attendent beaucoup de nous sur la question de l'Europe de la défense.

Monsieur le ministre, compte tenu des objectifs volontaristes et pragmatiques fixés par le nouveau Livre blanc, pouvez-vous nous indiquer sur quel levier compte s'appuyer la France pour renforcer la coopération multinationale de défense ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur le député, je vous remercie pour vos propos et votre détermination.

Effectivement, l'Eurocorps, la brigade franco-allemande ou encore les groupements tactiques étaient des concepts intelligents ; mais s'ils sont opératoires, ils n'ont jamais été activés. C'est donc réellement une forme d'échec. Je sais que votre projet de résolution fait référence à la coopération structurée permanente : ce concept, innovation du traité de Lisbonne, figure aux articles 42 et 46 du traité sur l'Union européenne. Il est facile à mettre en oeuvre puisqu'une décision à l'unanimité n'est pas nécessaire. Il permet aux États qui décident d'agir ensemble et qui se donnent eux-mêmes un certain nombre de contraintes sur les plans budgétaire, opérationnel, capacitaire et industriel d'avancer de concert. Je souhaite que ce concept redevienne d'actualité. Si d'aventure des partenaires européens en prenaient l'initiative, la France y apporterait son soutien.

Je crois comprendre, après la visite du président polonais à Paris il y a quelques jours, que la Pologne envisage de prendre cette initiative. J'ai indiqué à mon homologue de la défense que nous la soutiendrions parce qu'elle correspond exactement à ce qu'appelait tout à l'heure de ses voeux la présidente de la commission de la défense : le pragmatisme de l'action et de l'Europe de la défense.

C'est dans cet esprit que nous agissons. Au fur et à mesure que nous développons nos arguments, je constate qu'ils recueillent un réel soutien, et j'espère voir un aboutissement rapide sur un certain nombre de sujets.

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Monsieur le ministre, chacun sait que le Livre blanc intervient dans un contexte économique particulièrement difficile. Si le Président de la République nous a présenté une stratégie de défense adaptée aux contraintes budgétaires, elle maintient la France à la hauteur de ses responsabilités internationales.

Le nouveau Livre blanc envisage pour la prochaine loi de programmation militaire la suppression de 24 000 postes principalement au sein des administrations et dans les fonctions de soutien. Or la réforme du ministère de la défense engagée par la précédente majorité a montré que des suppressions de postes avaient été menées de façon aveugle et non ciblée, ce qui a conduit à la création de groupements de soutien de bases de défense sous-dotés en moyens humains et financiers, mais également à des dysfonctionnements majeurs tel le « désastre Louvois », pour reprendre l'expression que vous avez employée devant nous, lundi dernier, à Nancy, qui a plongé les familles de militaires dans le désarroi.

Pour pallier les insuffisances de ce système Louvois, vous n'avez eu d'autre choix que d'engager une centaine de personnes pour reprendre la gestion de la solde des militaires.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner des informations et des garanties sur la méthode qui pourrait être utilisée afin de cibler au plus juste les postes qui pourraient être supprimés et remédier ainsi aux erreurs survenues sous la précédente loi de programmation militaire ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Madame la députée, comme vous l'avez indiqué, je me trouvais lundi dernier à Nancy, dans le centre qui gère les soldes d'une partie de nos forces. J'ai dit alors, et je le répète devant la représentation nationale, que le système Louvois a été un vrai désastre, dû essentiellement à de la précipitation et peut-être aussi à un peu d'incompétence. Je n'ai pas souhaité ouvrir sur ce sujet une quelconque polémique : cela ne servirait à rien. J'ai essayé de mobiliser tous les moyens nécessaires pour sortir de cette ornière – et elle est profonde. J'espère que nous connaîtrons bientôt des jours meilleurs ; en tout cas j'ai veillé à ce qu'avant la fin de l'année dernière chaque soldat puisse toucher sa solde à la fin du mois, ce qui est un principe de base, quitte à ne pas utiliser les moyens nouveaux mis en place autour de Louvois.

Cela montre qu'il faut envisager les déflations ou les regroupements avec précaution, discernement, en sachant prendre le temps : voilà l'état d'esprit qui nous animera.

À mon sens, le processus qui a abouti à la concession des bases de défense a été trop accéléré. Un rapport de vos collègues sénateurs a montré ces failles, de manière d'ailleurs bipartisane. L'important, c'est de ne pas renouveler ce type d'erreur. Je ne remets pas en cause le dispositif des bases de défense, car c'est un concept intéressant, mais la manière dont il a été mis en oeuvre. Nous veillerons à ce que les déflations d'effectifs ne soient pas appliquées de manière brutale, comme cela a pu être le cas auparavant.

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Monsieur le ministre, je tiens tout d'abord à vous remercier pour cette occasion qui nous est donnée de débattre.

Je ferai deux constats de nature strictement budgétaire, partant du principe que le nerf de la guerre, au sens propre du terme, réside bel et bien dans les moyens accordés, dans la durée, aux hommes et aux femmes qui servent au sein de nos forces.

Premier constat : dans un contexte de réduction nécessaire et impérieuse des dépenses de l'État, notre pays maintient en valeur les crédits consacrés à sa défense qui s'élèvent à 31,4 milliards. Cette volonté politique mérite d'être saluée car tout nous y conduit : la persistance des risques et menaces bien sûr, mais aussi la réorientation stratégique des États-Unis ou encore la place et la responsabilité particulières de la France en Europe.

Le maintien de l'effort budgétaire de défense voulu par le Président de la République est une réponse de juste équilibre entre l'exigence de souveraineté budgétaire et l'exigence de souveraineté tout court.

Second constat : nous avons, en matière de défense, comme dans tous les domaines d'ailleurs, un devoir de sincérité budgétaire. Rien n'est plus démobilisateur, démotivant et, disons-le, source de discrédit pour nos forces comme pour l'ensemble de nos concitoyens, que des ambitions déclamées à grands coups de menton – cela s'est vu – et qui se trouvent contredites au fil des ans par l'exécution budgétaire – cela s'est vu également.

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Cela implique, en premier lieu, de définir des priorités claires. C'est ce que fait le Livre blanc en ciblant les moyens nouveaux devant être alloués à la cyber-défense, au renseignement ou encore aux forces spéciales.

Cela implique, en second lieu, de rechercher encore et toujours la meilleure adaptation de nos dispositifs et donc de nos moyens humains, matériels et financiers, aux différents types de conflits possibles. On retrouve ici le principe de différenciation qui permettra d'orienter avec sincérité nos efforts d'équipement. C'est le « dépenser juste », revendiqué par le Président Hollande, qui nous invite également à développer sur le plan capacitaire les mutualisations avec nos partenaires européens.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer, à ce stade de vos réflexions, dans la perspective de la loi de programmation militaire et de la loi de finances 2014, comment vous entendez renforcer la mise en oeuvre de ce principe de sincérité budgétaire, gage de responsabilité et de crédibilité pour nos soldats et plus largement pour l'ensemble de nos compatriotes ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur le député, ambition et vérité sont les deux termes employés par le Premier ministre en introduction de son propos et c'est ce que nous souhaitons.

J'ai un petit désir secret que je vous livre à cette heure un peu avancée et qui va devenir public : pour avoir connu bien des lois de programmation militaire, je sais qu'aucune n'a rempli ses engagements. Si je pouvais être le premier ministre de la défense à faire en sorte que la loi de programmation militaire que je vous proposerai à l'automne soit respectée financièrement et soit d'une totale sincérité budgétaire, je serais assez content de moi.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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Nous en venons aux questions du groupe UDI.

La parole est à M. Francis Hillmeyer, pour une première question.

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Monsieur le ministre, permettez-moi, à mon tour, de saluer l'action exemplaire menée par nos soldats engagés au Mali dans le cadre de l'opération Serval, en rendant un hommage à nos hommes qui y ont laissé leur vie.

À l'heure où nous évoquons le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, nos armées doivent être au centre de nos préoccupations qui ne doivent pas être fondées uniquement sur des considérations budgétaires.

Je veux d'abord aborder la stratégie du Gouvernement en matière de cyber-sécurité et de cyber-défense. Nous sommes tous conscients de la menace grandissante que constituent depuis quelques années les cyber-attaques dans des domaines et sous des formes très variées et du retard que nous avons pris face aux pays du nord de l'Europe, comme la Norvège, la Suède, la Finlande ou encore l'Estonie.

En effet, si les attaques bancaires et financières sont relativement connues et doivent être combattues, les cyber-attaques peuvent également avoir pour cible les intérêts stratégiques des États et mettre le coeur de notre pays en péril.

Cette menace sur nos systèmes d'information doit être prise en compte de manière urgente et globale. On sait aussi qu'à l'heure des armes pilotées à distance, leur prise en main par l'ennemi est possible en pénétrant ces systèmes informatiques. Il reste un important travail à faire pour créer une intégration numérique fonctionnelle et la structuration d'identités numériques. Le Livre blanc affirme que la cyber-défense est une nouvelle priorité du Gouvernement.

Monsieur le ministre, quels moyens comptez-vous mettre en oeuvre pour atteindre ces objectifs ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Merci de me poser cette excellente question, monsieur Hillmeyer !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Vous avez raison de rappeler cet enjeu. Le Livre blanc le met bien en exergue : il est tout à fait essentiel pour notre sécurité.

Il se décompose en cinq priorités. Premièrement, considérer la cyber-sécurité comme une véritable capacité militaire, au même titre que le commandement ou le renseignement. Deuxièmement, consolider une chaîne de commandement opérationnel placée au sein du CPCO – j'ai déjà eu l'occasion de le dire devant la commission de la défense. Troisièmement, créer une doctrine nationale de réponse aux attaques cybernétiques. Quatrièmement, consolider une base industrielle de bon niveau dans le domaine de la cyber-défense où nous avons des handicaps même si nous avons des capacités. Cinquièmement, faire en sorte que les ressources humaines nécessaires soient associées à la cyber-défense, tant en recrutement au sein en particulier de la DGA que dans la réserve. J'anticipe un peu sur une question que vous allez me poser sur la réserve en disant qu'une partie de nos efforts pour le renouvellement de la réserve portera sur la réserve citoyenne, la réserve experte, en particulier dans ce domaine.

Cette question de la cyber-défense est essentielle et constituera l'un des axes d'action dans la future loi de programmation militaire. Je serai particulièrement attentif aux cinq engagements que je prends ici devant vous.

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La parole est à M. Francis Hillmeyer, pour poser sa deuxième question.

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Le Livre blanc prévoit dans nos armées la suppression de 24 000 postes d'ici à 2019, après les 55 000 suppressions de poste déjà effectuées. Ces chiffres ont été confirmés par le chef de l'État vendredi dernier. Toutefois, nous sommes particulièrement surpris, au groupe UDI, que la question d'une véritable stratégie pour la réserve militaire demeure absente de ce Livre blanc. Des quelques lignes qui lui sont consacrées, nous pouvons simplement déduire que la réserve est maintenue à l'état de contingent supplétif. Certes, avec des objectifs en hausse concernant le nombre de réservistes et le nombre de jours travaillés, mais avec des moyens considérablement rétrécis.

Ce contexte a d'ailleurs conduit récemment le contre-amiral Antoine de Roquefeuille, secrétaire général du Conseil supérieur de la Réserve militaire, à envisager d'employer les réservistes à titre bénévole. Il estime en effet que, pour atteindre l'objectif fixé par le Livre blanc, il faudrait 150 millions d'euros, soit le double de son budget actuel.

Une réserve militaire intégrée est nécessaire au lien armée-nation, afin d'associer davantage les civils à la défense de leur pays et de diversifier les compétences de l'armée. Vous avez évoqué, monsieur le ministre, le secteur de la cyber-défense, dans lequel de nombreux civils travaillent déjà. Une réforme de fond doit être engagée. Monsieur le ministre, quelle est votre stratégie pour la réserve militaire ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

La question de la réserve, monsieur le député, mérite plus qu'une attention ; c'est aussi un enjeu du Livre blanc. Vous estimez qu'il n'est pas suffisamment mis en avant. Je constate qu'un certain nombre d'engagements sont pris, dont un recours accru et structuré au soutien de réservistes opérationnels et citoyens dans les domaines déficitaires et je pense en particulier à la cyber-défense, mais il y a d'autres domaines très sensibles dans lesquels nous devons mobiliser et les réservistes opérationnels, et les réservistes citoyens.

Nous insistons dans le Livre blanc sur la nécessité d'élargir les recrutements en favorisant l'adhésion de réservistes issus de la société civile, dans la réserve opérationnelle comme dans la réserve citoyenne ; nous insistons également sur le renforcement de la réserve citoyenne, vecteur à nos yeux essentiel pour diffuser l'esprit de défense au sein de notre pays, y compris dans certains quartiers prioritaires de la politique de la ville. Nous allons agir beaucoup dans ce domaine-là.

Enfin, nous voulons optimiser les capacités de réserve opérationnelle en rendant plus cohérents les ESR – les engagements à servir dans la réserve – qui sont aujourd'hui trop faibles et trop courts. Il est indispensable de donner à cette partie de la réserve une plus grande cohérence. C'est un chantier important, que je ne mets pas en fin de parcours. Il est essentiel, au plan opérationnel et pour le maintien de l'esprit de défense.

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Nous revenons aux questions du groupe UMP ;

La parole est à M. Philippe Meunier.

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Pour ce qui est de Louvois, monsieur le ministre, je suis d'accord avec vous : mieux vaut ne pas polémiquer sur le système et rechercher des solutions pour que nos militaires puissent percevoir leur solde comme il se doit.

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Monsieur le ministre, le Livre blanc préconise, pour la défense de notre pays, le maintien de l'autonomie de nos forces armées. Il s'agit ainsi de préserver notre capacité d'agir seuls, car la décision d'aller au combat reste toujours une décision nationale qui nécessite, pour sa mise en oeuvre, une complète autonomie. Notre intervention au Mali en est la démonstration.

Le renseignement étant un élément essentiel à cette autonomie d'intervention, l'acquisition de drones pour nos forces armées participe notablement de la mise en oeuvre de ce Livre blanc. Les entreprises françaises maîtrisent l'ensemble des technologies nécessaires au développement et à la production de ces drones : véhicules aériens, moyens de lancement, ensembles optroniques gyrostabilisés jour-nuit, préparation de mission, navigation inertielle et contrôle en vol, transmission de données et d'images. C'est un atout majeur pour notre pays.

Or nous avons appris dans la presse votre décision d'acheter deux drones américains. Si cet achat est confirmé, il ne sera pas sans conséquences sur notre filière industrielle et sur notre capacité à agir seuls. Après l'achat à l'étranger de ces drones sur étagère, non seulement vous aurez la plus grande difficulté financière à entreprendre la construction d'un drone national ou franco-européen, mais vous placerez notre défense sous tutelle du pays fournisseur, qui aura les moyens d'empêcher ou de limiter nos missions, compte tenu du fait qu'il sera le seul à maîtriser les codes sources, et vous le savez très bien.

Monsieur le ministre, je ne sombrerai pas dans la polémique, comme l'a fait le président du groupe SRC, car le sujet mérite beaucoup mieux. J'espère que votre réponse sera aussi précise que ma question. Pour respecter les préconisations du Livre blanc, mais aussi pour préserver l'avenir de notre filière industrielle et ses très nombreux emplois, chers à tous, quand allez-vous prendre la décision de lancer ce programme national, voire franco-européen, de drones MALE ?

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Monsieur Meunier, je vais vous dire quelque chose de très concret : il y a un vrai besoin capacitaire de drones aujourd'hui. Un besoin immédiat. Je n'y peux rien : il n'y en a sur étagère qu'en Israël et aux États-Unis. Je le constate. Que dois-je faire, en tant que ministre de la défense ? Renoncer aux drones pour sept à huit ans, au motif que l'on n'en produit pas en France ou en Europe ? J'agis, je réagis, parce qu'il y a un besoin immédiat, dont je me suis aperçu : je ne polémique pas à ce sujet, il y a des tas de raisons qui font que nous en sommes là ; quoi qu'il en soit, c'est le constat que je dresse aujourd'hui.

Je suis donc obligé, c'est mon devoir, de faire en sorte que nous ayons les moyens d'observation nécessaires par l'acquisition de drones MALE que nous sommes en train de nous procurer sur étagère auprès des États-Unis. Nous allons les franciser, en discutant avec les Américains, pour garantir notre autonomie stratégique.

Je le disais tout à l'heure, mais vous n'étiez pas là : aujourd'hui, ce sont les drones américains présents à Niamey qui nous donnent des informations. Peut-on continuer ainsi ? Où est l'autonomie stratégique ? Si les Américains ne veulent pas nous donner l'information, ils ne nous la donnent pas !

Ensuite, oui, il faut une nouvelle génération de drones qui, je l'espère, sera européenne et réalisée par des industriels européens. Je le leur ai dit, tout le monde le sait : il reste six à sept ans pour mettre en oeuvre le dispositif et il y a les compétences pour le faire.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Non, dans la loi de programmation militaire, il y en a douze. Deux immédiatement, puis dix.

Interruptions sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Ensuite, nous aurons besoin d'une autre génération. Je ne veux pas que mon successeur se trouve dans la même situation que moi aujourd'hui.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Je ne vais pas entrer dans le détail publiquement aujourd'hui, puisque les discussions n'ont pas encore abouti.

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Le Livre blanc est un ouvrage politique qui répond à des choix politiques. La question posée à la nation est la suivante : est-il plus utile de dépenser de l'argent en fonctionnement, de financer des emplois aidés pour maintenir en servitude notre jeunesse, de proposer le recrutement de soixante mille professeurs supplémentaires ou bien de mettre l'argent dans notre défense, chez nos militaires, dans de vrais emplois, avec de hautes qualifications et un véritable statut ?

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Parce que les professeurs, ce ne sont pas de vrais emplois ?

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Monsieur le ministre, le Livre blanc est destiné à offrir à la France une vision géostratégique. Je vous l'ai déjà dit : absence de vision de partenariat avec la fédération de Russie, absence de réflexion sur la guerre civile entre monde chiite et monde sunnite, absence de réflexion sur la zone Pacifique Sud, sur la Nouvelle-Calédonie, sur le canal du Mozambique, sur l'îlot de Tromelin et autres.

Monsieur le ministre, les sociétés occidentales sont extrêmement fragiles. Nous parlons de cyber-défense, mais faut-il rappeler ici qu'il y a vingt ans déjà, les colonels chinois avaient déjà théorisé la guerre sans limite après les affaires Soros, vécues par la Chine comme une attaque de l'Occident sur son économie. En cyber-défense, il vaudrait mieux parler de « cyber-attaque », car souvent, celui qui pare le coup a déjà perdu cette guerre.

Nos sociétés occidentales sont fragiles aussi en ce qu'elles dépendent de flux de communication et de ravitaillement en matières premières. Or il faut attendre la cent vingt-neuvième page sur cent soixante pour qu'enfin on se préoccupe du ravitaillement du pays, qui passe majoritairement par voie maritime pour ces matières premières : minerais, métaux, hydrocarbures, mais aussi ces fameuses terres rares, la plupart sous contrôle chinois.

Monsieur le ministre, je m'étonne de cette absence de réflexion sur cette fragilité de nos sociétés occidentales et particulièrement de la société française qui ne possède aucune réserve de matières premières, si ce n'est au fond des océans. Alors, n'y a-t-il pas une contradiction à limiter notre flotte à quinze frégates, dont seulement huit seront à terme des frégates modernes ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Pardonner-moi, monsieur Dhuicq, mais je n'ai pas bien saisi le sens de la question principale que vous vouliez me poser…

Plusieurs députés du groupe SRC. Nous non plus !

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

J'espère ne pas avoir compris que, de votre point de vue, notre stratégie devait se développer à partir de l'îlot de Tromelin et de Clipperton : ce serait une vision un peu courte, même si vous avez essayé de faire des effets de manche au sujet de ces deux îlots, pour lesquels j'ai beaucoup de considération !

Si c'est le problème de la sécurisation du trafic maritime que vous voulez évoquer, je suis d'accord pour l'examiner avec vous. Mais l'une des inflexions du Livre blanc de 2013 par rapport à celui de 2008, c'est précisément la sécurité maritime. J'y ai été, pour de nombreuses raisons, particulièrement attentif. Je suis prêt à faire avec vous l'exercice de comparaison entre les deux livres blancs.

Il y a une raison à cela : depuis 2008, la piraterie s'est développée, pas uniquement dans la Corne de l'Afrique, mais aussi dans le golfe de Guinée et dans d'autres lieux. Il importe que nous agissions pour sécuriser nos moyens d'approvisionnement. Ce que je peux vous dire, monsieur le député, c'est que les moyens de la marine seront suffisants pour assurer cette sécurisation, mais celle-ci ne doit pas uniquement se faire avec les moyens de la marine nationale française : elle doit se faire aussi en coopération au sein de l'Union européenne – c'est ce que nous faisons avec l'opération Atalante –, mais aussi avec la Russie.

La dernière fois que nous nous sommes parlés, je partais en Russie. J'en suis revenu, en bon état. C'est une des questions que nous avons évoquées avec nos partenaires russes, qui ont la même préoccupation de sécuriser leurs voies maritimes. Ils sont présents dans le golfe d'Aden.

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Les enjeux en matière de défense devraient nous permettre de transcender nos clivages politiques et d'atteindre une certaine forme de consensus. Malheureusement, il faut se rendre à l'évidence : les faits sont têtus et, malgré tout le talent avec lequel vous présentez ce Livre blanc, la réalité est qu'il y a moins d'argent et moins de militaires in fine.

J'ai peur des conséquences, il faut les rappeler : s'il y a moins de militaires, moins d'argent, il faut s'attendre à un affaiblissement de la place et du rôle de la France dans le monde, à des suppressions de bases et de régiments sur notre territoire, à bien sûr des difficultés dans l'industrie de défense, ce qui pourra entraîner des disparitions d'emplois alors même que nous sommes déjà plongés dans un grand marasme économique ; il faut s'attendre enfin à du retard dans la participation à l'Europe de la défense.

Pour entrer dans le détail et vous poser une question précise, il est précisé que nos armées seront dotées de 225 avions de combat, air et marine confondus : moins 25 % par rapport au précédent Livre blanc. Il y a quelques semaines, vous annonciez ou des sources ministérielles annonçaient une commande de 320 Rafale, puis de 294, puis de 286. Finalement, le Livre blanc ne parle plus que de 225 avions.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous préciser si ce seront des Rafale ou aussi des Mirage 2000D modernisés ? Envisagez-vous à terme une flotte mixte ? Ou bien les Mirage 2000D modernisés ont-ils vocation à attendre la livraison des futurs Rafale ?

Actuellement, il y a une commande de 180 Rafale. Prévoyez-vous une nouvelle commande pour atteindre les 225 avions de combat et seront-ils des Rafale ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Je vous remercie, monsieur le député, de l'intérêt que vous portez aux forces aériennes. Entendons-nous bien : la baisse de 25 % du nombre d'avions de combat à laquelle vous faites allusion s'entend par rapport aux prévisions de 2008. Au début de mon propos, j'ai rappelé que le Livre blanc et la loi de programmation de 2008 avaient été réalisés avant la crise. Je n'ai pas voulu polémiquer sur ce point, mais force est de constater qu'à la suite de la crise il a fallu réviser à la baisse notre capacité à réaliser la loi de programmation.

Le chiffre de 225 avions de combat sera bien réalisé. Étant pragmatique, je vous informe que le Royaume Uni dispose de 213 avions de chasse – nous resterons par conséquent mieux dotés que l'autre grande puissance militaire en Europe – et l'Allemagne, exemple cité à plusieurs reprises au cours du débat, 185.

Nous disposerons donc d'une force d'intervention aérienne nous permettant de remplir nos missions à la fois par le moyen de Rafale et de Mirage 2000D modernisés – ces derniers étant par définition plus anciens, ils devront inévitablement avoir des successeurs.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

C'est la loi de programmation militaire qui prévoira le cadencement de cet ensemble pour parvenir au chiffre de 225 avions.

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Nous en revenons aux questions du groupe SRC.

La parole est à M. Gilbert Le Bris.

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La France fait face au défi de la mondialisation avec de réels atouts, qu'il s'agisse de son rayonnement culturel avec la francophonie, de son poste de membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, de la réelle capacité de ses entrepreneurs dans différents secteurs, agroalimentaire, environnement, énergie ou produits manufacturés de qualité, et, surtout, de l'atout présent et à venir que constituent ses 11 millions de kilomètres carrés de zone maritime – la seconde au niveau mondial.

La plupart des pays développés ont compris la nécessité de développer une marine importante pour défendre leurs intérêts. Les ressources terrestres arrivent quelque peu à bout alors que les ressources maritimes restent très fortes puisqu'elles représentent 84 % des minéraux et des terres rares évoquées tout à l'heure, 90 % des ressources en hydrocarbures, sans parler des stocks halieutiques, de la biochimie, des capacités illimitées d'énergies renouvelables. Bref, les océans renferment de véritables richesses.

Que devons-nous faire, nous Français, dans ce contexte ? D'abord, nous devons éviter de dilapider ou de partager notre souveraineté sur l'île Tromelin, sur l'île de Clipperton ou ailleurs.

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Ensuite, nous devons protéger les zones terrestres et maritimes outre mer. Enfin, nous devons nous montrer capables d'exercer cette souveraineté dans les domaines maritime, aérien et terrestre.

Il est certain que nous avons en la matière, à l'heure actuelle, ce qu'on pourrait appeler un « trou capacitaire » et il est plus que temps que soient appliqués les programmes B2M, BSAH, BATSIMAR, et mises en oeuvre la surveillance maritime et la surveillance aérienne.

Le Livre blanc prévoit l'élaboration dès cette année d'une programmation quinquennale d'équipements partagés, pour ainsi dire, avec les autres ministères, à savoir d'équipements mutualisés. Pouvez-vous nous en dire plus, monsieur le ministre, notamment sur les procédures, les moyens et les objectifs ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Nous n'aurons jamais autant parlé qu'aujourd'hui, dans cet hémicycle, de l'île Tromelin.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

C'est en effet un vrai sujet, et un bon roman également. Reste que sur le fond, monsieur Le Bris, je partage complètement vos préoccupations. L'enjeu de la maritimisation – j'ai déjà répondu sur ce point, aussi serai-je bref – suppose que nous ayons les moyens de lutter contre les trafics illégaux, la piraterie et d'assurer la sécurité de nos approvisionnements ; il suppose également que nous fassions respecter le droit à travers l'affirmation de notre souveraineté. Je me suis rendu à deux reprises, depuis ma nomination, en outre-mer, en Guyane et en Martinique, pour montrer que la défense concernait également ces territoires : la France, c'est en effet l'hexagone et l'outre-mer, sans distinction entre ces deux entités.

Cela suppose des moyens partagés et, sur ce point, nous allons élaborer, avant la fin de l'année, un contrat général interministériel qui permettra un plan quinquennal d'équipement, c'est-à-dire un ensemble programmatique impliquant plusieurs ministères, celui de la défense, comme ceux de l'intérieur, des douanes et des transports. Cet engagement sera soumis au Parlement et la commission de la défense sera évidemment informée de l'aboutissement de ce plan. Le ministère de la défense ne sera donc pas le seul à contribuer, ce qui est la moindre des choses.

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Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, chers collègues, le présent débat revêt une importance capitale en ce qu'il ouvre à la préparation de la loi de programmation militaire pour 2014-2019 que l'Assemblée examinera cet automne. La mise en oeuvre des conclusions du Livre blanc 2013 sur la défense et la sécurité nationale conditionne en effet les moyens qui permettront demain à la France de défendre ses intérêts et ses valeurs sur la scène internationale dans un contexte où l'état du monde appelle à de nouvelles évolutions stratégiques et alors que nos contraintes budgétaires sont fortes.

Permettez-moi par conséquent de saluer ici l'engagement du chef de l'État de porter l'effort financier de la France pour ses armées à 179 milliards d'euros constants pour la période 2014-2019. Cette décision d'autorité garantit la préservation de l'indépendance et de la souveraineté de la France.

Le nouveau modèle d'armée prôné par le Livre blanc 2013 suppose néanmoins une adaptation de nos forces dont les conséquences socio-économiques ne peuvent pas être ignorées. Elle s'ajoutera à la baisse de 54 900 postes décidée par le Gouvernement de M. Fillon pour la période 2009-2015. Alors que l'armée de terre supportera une part prépondérante de cette nouvelle contraction des effectifs militaires, ce sont des choix stratégiques mais aussi douloureux auxquels notre pays va donc devoir faire face.

Les habitants de ma circonscription en savent quelque chose, puisque les décisions du gouvernement Fillon se sont traduites par la disparition du centre d'entraînement commando de Givet, réduisant ainsi au seul régiment du génie de Charleville-Mézières la présence historique de nos armées dans le département des Ardennes marqué dramatiquement – dois-je le rappeler – par les trois conflits armés de 1870, 1914-1918 et 1939-1945.

Même si l'armée n'est pas, a priori, un outil d'aménagement des territoires, le principe de réalité doit impérativement nous conduire, collectivement, à tenir compte du fait qu'elle est composée d'hommes et de femmes qui font vivre au quotidien le lien armée-nation et à intégrer dans les arbitrages à venir les spécificités territoriales des départements déjà durement touchés par la crise, de telle sorte qu'ils ne le soient pas encore davantage.

Je vous remercie, monsieur le ministre, de bien vouloir nous préciser vos intentions méthodologiques en la matière.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

J'ai déjà dit à plusieurs reprises cet après-midi, monsieur le député, que nous allons essayer de faire en sorte que la contraction d'effectifs porte davantage sur les états-majors et le soutien central que sur les unités opérationnelles, cela dans un rapport qui sera à peu près de un tiers pour ces dernières et deux tiers pour les organismes centraux. C'est du moins l'objectif que je me suis donné. Ce travail est en cours.

Ensuite, nous ferons en sorte que les choix de restructuration se fassent avec discernement, précaution, concertation en intégrant évidemment les concepts d'aménagement du territoire. Je sais que la région Champagne-Ardenne a été particulièrement touchée par les restructurations antérieures.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Nous serons très vigilants à cet égard, même si, à l'heure actuelle, je ne peux pas vous donner l'ensemble des informations que vous souhaiteriez avoir : elles ne sont pas encore en ma possession et je n'ai pas commencé à arbitrer quoi que ce soit en la matière, puisque le Livre blanc vient tout juste d'être publié.

Je préciserai, puisque vous l'avez évoquée, que l'armée de terre, sera touchée par la réduction des effectifs puisqu'elle passera de huit brigades à sept. On comptera donc une brigade de moins par rapport à l'objectif de la loi de programmation et du Livre blanc de 2008. Cela représente une réduction d'autant de militaires au sein de l'armée de terre, mais cette dernière ne sera pas la seule à contribuer à la contraction d'effectifs évoquée. Il y sera procédé comme je vous l'ai indiqué : avec beaucoup de précaution et d'anticipation.

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La parole est à M. Jean Launay, ultime orateur inscrit.

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Monsieur le président, monsieur le ministre, dans son discours de vendredi devant les auditeurs de l'IHEDN, dont je suis, le Président de la République a placé le Livre blanc et la loi de programmation militaire à venir sous le signe de l'ambition responsable et de la réalité assumée.

En effet, l'écart entre les engagements pris dans le cadre de la précédente loi de programmation militaire en 2008 et la réalité n'a cessé de s'accroître. Le précédent Livre blanc, celui qui a présidé à la construction de la loi de programmation militaire pour la période 2009-2014, prévoyait que les ressources de la mission « Défense » seraient d'abord stabilisées, puis progresseraient chaque année de 1 % au-delà de l'inflation à compter de 2012.

Cette trajectoire n'était plus soutenable et elle n'était d'ailleurs pas tenue. En juillet 2012, la Cour des comptes a en effet montré que la différence entre prévisions et réalisations portait déjà sur 3 milliards d'euros au moins et que cet écart ne pouvait que s'accroître. Le modèle de 2008 était donc inatteignable sur le plan financier et, hier encore, devant la commission des finances, le premier président de la cour des comptes a réaffirmé le caractère non soutenable des objectifs de la loi de programmation militaire pour 2009-2014.

Le Livre blanc 2013 devra donc nous permettre de décliner une loi de programmation militaire et des projets de loi de finances successifs avec réalisme, de répondre durablement à des problèmes récurrents, j'évoque ici la sous-budgétisation chronique des OPEX, les dysfonctionnements dans la gestion de la masse salariale – ce que vous savez bien, vous qui avez dû faire face, avec lucidité et volontarisme, au système Louvois et aux soucis qu'il a provoqués chez nombre de nos militaires.

En tant que rapporteur spécial du budget opérationnel de la défense – je tiens à remercier, au passage, mes collègues de la commission de la défense de m'avoir permis de poser une question –, je soulignerai que le ministère de la défense doit encore trouver 5,5 milliards d'euros de ressources exceptionnelles d'ici à 2019. Or l'on sait que les recettes exceptionnelles ne constituent pas toujours un apport aussi fiable qu'on pourrait le souhaiter. Sur la période 2009-2014, 980 millions d'euros seulement, sur les 3,47 milliards d'euros prévus au titre des recettes exceptionnelles, ont été disponibles pour les armées en temps et en heure.

Aussi, monsieur le ministre, comment allez-vous suivre cette question délicate des ressources exceptionnelles dont le suivi conditionne bel et bien la réalité de l'équilibre que vous poursuivez et sur lequel nous nous engageons avec vous ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

Puisque je réponds au dernier orateur inscrit, je profite de cette occasion pour remercier l'ensemble des intervenants pour la qualité de leurs interventions et pour la pertinence de leurs questions. Je souhaite en outre, comme l'ensemble des députés présents, que le débat sur la défense se poursuive dans le même état d'esprit, que je retrouve au sein de la commission de la défense et de la commission des affaires étrangères.

Je remercie également la présidente de la commission, Patricia Adam, Eduardo Rihan Cypel et Christophe Guilloteau de leur participation à la commission du Livre blanc : ils auront consacré à son élaboration beaucoup de temps…

Debut de section - Permalien
Jean-Yves le Drian, ministre de la défense

…et de nombreuses réunions. Je regrette comme euxn'aient pas eu les indications chiffrées qu'ils réclamaient au moment voulu, ce qui a provoqué un petit temps de latence, si vous me permettez l'expression. Mais il était impossible de faire autrement. Et ils savaient bien que pendant les travaux d'élaboration du Livre blanc, les discussions se poursuivaient par ailleurs, et c'est heureux, ce qui nous a permis d'aboutir au résultat d'aujourd'hui.

Et cela me permet de faire une transition avec la question que vient de me poser M. le député Jean Launay. Évidemment, et je le dis à l'ensemble des députés présents, tout cela ne marchera qu'avec les ressources exceptionnelles. Sans elles, les discours que j'ai faits cet après-midi en réponse à vos questions ne tiennent pas. Ces ressources exceptionnelles représentent 5,9 des 179,2 milliards, dont 1,9 milliard au budget de 2014.

J'ai entendu, comme vous, le Premier ministre apporter tout à l'heure des garanties à ce sujet, et le Président de la République s'exprimer vendredi dernier sur cette question. Et des précédents montrent que cela peut marcher : cette année, en 2013, les ressources exceptionnelles se seront élevées à 1,3 milliard d'euros.

La vigilance s'impose si nous voulons que les résultats soient au rendez-vous : je suis sûr de la vôtre, soyez sûrs de la mienne. Ces ressources exceptionnelles, où les trouver ? Elles viendront à la fois des recettes immobilières, des recettes de fréquence et des cessions d'actifs, et pas uniquement des cessions d'actifs défense. Des discussions sont en cours sur ce sujet, auxquelles je consacre moi aussi beaucoup de temps, monsieur Guilloteau. Nous pouvons être optimistes quant aux résultats, puisque le Président de la République s'est engagé à ce que le niveau budgétaire de 31,4 milliards en 2014 soit maintenu en 2015 et 2016, avec des ressources exceptionnelles à peu près au même niveau.

C'est en tout cas sur ces bases-là que nous travaillons en ce moment, et nous sommes très confiants, du fait des engagements pris par le Président de la République et par le Premier ministre, qui les a confirmés tout à l'heure.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Projet de loi relatif aux attributions du garde des sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et d'action publique.

La séance est levée.

La séance est levée à dix-neuf heures quarante-cinq.

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Nicolas Véron