COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Mardi 19 mai 2015
La séance est ouverte à vingt et une heure trente.
(Présidence de M. Christian Hutin, vice-président de la Commission)
La Commission procède à l'examen, sur le rapport de M. Christophe Sirugue, du projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi (n° 2739).
Nous allons entamer l'examen des amendements déposés sur le projet de loi relatif au dialogue social et l'emploi, au nombre d'environ cinq cents.
Je salue M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, qui assistera à nos travaux et pourra ainsi présenter les amendements du Gouvernement.
Je tiens également à saluer la présence de M. Jean-Patrick Gille, rapporteur pour avis de la Commission des affaires culturelles et de l'éducation.
Mais, avant toute chose, je tiens à excuser notre présidente, Catherine Lemorton, qui ne peut être parmi nous en raison d'un examen de santé.
Il ne vous aura pas échappé que nous commençons l'examen des articles de ce texte en Commission à un horaire inhabituel. Vous avez reçu un courriel vous en expliquant les raisons. Ce début tardif est dû au fait que, pour éviter que le délai de dépôt des amendements tombe au milieu du week-end de l'Ascension – le délai réglementaire était le vendredi 15 à dix-sept heures –, Catherine Lemorton a décidé de le reporter au lundi 18 à douze heures. De ce fait, les délais inhérents au traitement des amendements – remise en forme, classement, constitution des dossiers, examen de la recevabilité financière – nous ont empêchés de commencer leur examen plus tôt. Et commencer ce soir est nécessaire car, afin de maintenir des délais de dépôt des amendements pour la séance publique raisonnables, il faut que le texte de la Commission puisse être mis en ligne le plus tôt possible.
Comme d'habitude, le président de la Commission des finances s'est prononcé sur les amendements dont la recevabilité financière paraissait douteuse. Sur les dix-sept amendements envoyés, seize ont été déclarés irrecevables au titre de l'article 40.
Ce texte sera examiné en séance publique à partir du mardi 26 mai. Le délai de dépôt des amendements a été fixé au vendredi 22 à vingt heures par la Conférence des présidents de ce matin. Sachant qu'il faut compter environ vingt-quatre heures entre la fin des travaux en Commission et la mise en ligne du texte, il est de l'intérêt de tous que nos discussions aillent suffisamment vite de façon que les groupes disposent d'un temps raisonnable pour amender le texte de la Commission.
Je rappelle la règle selon laquelle, pour chaque amendement, ne peuvent intervenir, pour deux minutes chacun, outre l'auteur ou l'un des auteurs, que le rapporteur et un orateur contre. Sur les sujets importants, j'appliquerai la règle avec discernement, en essayant de m'inspirer de la méthode adoptée par notre présidente sur le projet de loi « Santé », mais les interventions seront chronométrées.
Au nom du groupe UMP, j'adresse un message de soutien et d'amitié à notre présidente, qui n'est pas là ce soir pour des raisons de santé.
La Commission passe à l'examen des articles.
TITRE Ier AMÉLIORER L'EFFICACITÉ ET LA QUALITÉ DU DIALOGUE SOCIAL AU SEIN DE L'ENTREPRISE
Chapitre Ier Une représentation universelle des salariés des TPE
Avant l'article 1er
La Commission adopte l'amendement rédactionnel AS164 du rapporteur.
Article 1er : Généralisation des commissions paritaires régionales
La Commission examine les amendements identiques AS18 de M. Dominique Tian, AS32 de M. Lionel Tardy, AS50 de M. Gilles Lurton et AS293 de M. Bernard Perrut, tendant à supprimer l'article.
La création de commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI) ne se justifie pas, selon nous, et c'est aussi la position de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME). Les négociations entre les partenaires sociaux ayant échoué, le Gouvernement essaie de passer en force, sans unanimité du monde syndical.
Alors que le chômage bat des records dans notre pays, le texte n'aborde pas les vrais sujets du marché du travail : les seuils sociaux – le rapport Attali indique qu'une entreprise passant de quarante-neuf à cinquante salariés se voit imposer trente-huit nouvelles obligations, représentant un surcoût de masse salariale de 4 % –, la pénibilité, la complexité d'un code du travail devenu impossible à interpréter, les trente-cinq heures. Ce texte ne résout pas les vrais blocages de notre société ; il ne réglera aucunement les problèmes du dialogue social et de l'emploi.
Dans une entreprise d'une petite dizaine de salariés, le chef d'entreprise est en contact direct avec ses employés, du matin au soir. Il n'est nul besoin d'ajouter du formalisme.
Deux tiers des entreprises de moins de onze salariés ont même moins de cinq salariés. Avec de si petits effectifs, les employés ne vous ont pas attendus pour discuter chaque jour avec leur employeur : ce n'est pas parce que le dialogue n'est pas formalisé qu'il n'existe pas. Ces commissions éloigneront le dialogue social de l'entreprise pour le transférer au niveau de la région, à plusieurs centaines de kilomètres. Dans les branches où un dialogue formalisé a été jugé nécessaire, de telles commissions existent déjà. Pour les autres secteurs, le dispositif est superflu. Ce projet de loi s'ouvre sur une rigidification et une complexification du dialogue social, et son article 1er traduit une méconnaissance du monde des entreprises, et en particulier des très petites entreprises (TPE).
L'article 1er institue une représentation des salariés des entreprises de moins de onze salariés par la création de commissions paritaires régionales interprofessionnelles. Une telle proposition revient à nier qu'il existe dans les TPE une relation directe entre le chef d'entreprise et les salariés. Nous pensons quant à nous que cette relation existe. Elle est d'ailleurs d'autant plus forte que l'entreprise compte peu de salariés. C'est une relation qui repose sur la confiance, sans laquelle une entreprise ne peut fonctionner. La création de ces commissions est inopportune.
Un récent sondage montre que 97 % des chefs d'entreprise et 90 % des salariés de TPE reconnaissent qu'il existe une relation directe entre eux. Les chefs d'entreprise voient dans la mesure proposée une forme de défiance à leur égard. Calquer les règles applicables aux grandes sociétés sur ces petites structures est une erreur. Cela va complexifier la tâche des dirigeants, alors qu'ils attendent, plus que jamais, une simplification des normes. La suppression de cet article serait dans l'intérêt de nos petites entreprises et de l'emploi.
Avis défavorable. Personne ne nie qu'il existe un dialogue au sein des TPE. Cependant, le lien de subordination est aussi plus fort que dans les grandes entreprises. Les 4,6 millions de salariés de ces TPE sont les seuls aujourd'hui à ne pas bénéficier d'une représentation extérieure à l'entreprise. Outre les organisations syndicales, une organisation patronale a validé le dispositif. Qui plus est, de telles commissions existent déjà, dans l'artisanat, les professions libérales, le monde agricole, avec des résultats intéressants.
Des relations personnelles, parfois même fraternelles, peuvent certes exister au sein d'une entreprise, mais cela n'empêche pas de possibles divergences sur l'interprétation de tel ou tel texte. Ces commissions ont pour première vocation de contribuer à l'information des uns et des autres. Nous débattrons plus tard d'autres compétences, telles que la médiation, mais ce n'est pas le sujet de l'article 1er, et s'agissant de l'information personne n'est perdant.
Il faut également relativiser leur impact. Il s'agira, pour toute la France, de mobiliser 260 personnes, effectif qui n'est pas synonyme d'omniprésence. Leur fonction sera d'apporter aux TPE et à leurs salariés des informations dont ils ne disposent pas toujours. C'est un modèle qui fonctionne plutôt bien dans plusieurs pays voisins, tels que l'Espagne ou l'Allemagne.
Je suis surprise par ces amendements visant, alors que tout le monde prône le dialogue social, la main sur le coeur, à empêcher qu'il soit étendu à des salariés qui en sont encore privés. Contrairement à ce que j'ai entendu dans la bouche d'une représentante des organisations patronales, il ne suffit pas, dans les TPE, de « pousser la porte », voulant dire par là que salariés et chefs d'entreprise dialoguent tous les jours. Ce n'est pas l'opinion des syndicats de salariés. Nous ne doutons pas qu'il y ait un dialogue dans ces entreprises, mais il existe aussi un très fort lien de subordination. Il est parfaitement normal que s'instaure un dialogue avec des représentants des salariés, sans que ce soit témoigner de la suspicion. La suspicion est plutôt du côté de ces amendements, car un employeur honnête et soucieux de la bonne marche de son entreprise n'a rien à craindre de la concertation.
Ces amendements de suppression sont en effet quelque peu étonnants, certains autres collègues de l'opposition reconnaissant que la mesure proposée représente une avancée du dialogue social. Les petites entreprises ont des problématiques qui leur sont propres – accès à l'information, formation professionnelle ou autres – et il conviendra de réfléchir à la manière dont ces commissions pourront y répondre. Le dialogue, en tout état de cause, permet d'éviter les conflits et les contentieux.
Ce texte s'ouvre sur la création d'une nouvelle structure, ce qui n'est pas un bon signe quand on veut simplifier la vie des chefs d'entreprise et des salariés. Ce serait, à écouter nos collègues, une structure d'information : or, de l'information sur les droits et les devoirs, on peut en trouver n'importe où. L'UMP est très attachée au dialogue social, qui est au coeur de la bonne marche des entreprises. Or il existe déjà un dialogue constant entre les salariés et le chef d'entreprise dans les TPE. Quel intérêt de créer ces commissions au niveau régional ? Un décret définira leurs missions, mais, pour l'instant il n'est pas question de médiation, alors que cela vient d'être évoqué. Enfin, l'absence de l'entreprise des salariés qui seront actifs dans ces commissions devra être financée. L'étude d'impact avance le chiffre de 350 000 euros…
L'article 1er ne crée pas une structure, madame Le Callennec : il rend simplement universel un droit en l'étendant aux 4,6 millions de salariés des TPE, même si personne ne nie qu'il existe un dialogue dans ces entreprises. Le niveau régional est le plus adapté pour ces commissions qui auront un rôle de formation, de conseil, de concertation, sur les sujets de l'emploi, de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), des conditions de travail… Une position commune adoptée en 2010 par les organisations syndicales et par une organisation patronale, l'Union professionnelle artisanale (UPA), prévoyait la création de commissions régionales. Mais les branches auront toujours la possibilité de créer par accord des commissions au niveau qu'elles jugeront approprié. Ce lieu d'échange au niveau régional favorisera le dialogue social.
La Commission rejette les amendements de suppression.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS165 du rapporteur.
Elle examine ensuite l'amendement AS377 de M. Dominique Tian.
L'exposé des motifs du projet de loi fait état d'un « dialogue social trop souvent formel, n'associant pas suffisamment les représentants des salariés aux décisions stratégiques de l'entreprise » – mais cela a-t-il un sens dans des entreprises de dix salariés ? Il ajoute même que l'implantation syndicale est « trop faible » dans les petites entreprises, où l'engagement syndical serait « trop souvent perçu négativement par les employeurs » et « insuffisamment valorisé ». Ces quelques lignes montrent que les craintes des chefs d'entreprise sont parfaitement justifiées.
Avis défavorable. La présentation que vient de faire M. Tian ne correspond au demeurant pas du tout à l'amendement lui-même, par lequel il demande que ce soient les branches qui mettent en place les commissions régionales. Or la négociation entre les partenaires sociaux ayant échoué, le législateur joue son rôle. Ce n'est pas un dispositif supplémentaire ; il s'agit de permettre à 4,6 millions de salariés de disposer de représentants.
Je ne suis pas certaine que ces salariés soient demandeurs. Une organisation patronale majeure, la CGPME, ne voit pas non plus d'un bon oeil la création de ces commissions. Renvoyer, à tout le moins, ces décisions aux branches paraît plus raisonnable, même si les partenaires sociaux ne sont pas parvenus à un accord d'ensemble. S'il s'agit d'apporter de l'information aux salariés, cela fera doublon. Alors que se mettent en place des chartes partenariales sur les territoires pour que toutes les institutions se parlent et pratiquent la GPEC au niveau territorial, vous introduisez encore des structures supplémentaires, dont on ignore quelles décisions elles prendront. Les gens ne sont pas dupes : ils savent que siéger dans des instances qui n'ont pas voix au chapitre ne sert à rien.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS166 du rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel visant à assurer une cohérence entre l'alinéa 9, où il est écrit « d'entreprises », et l'alinéa 6, où il est écrit « des entreprises ».
Cela change le sens. L'alinéa 6 dispose qu'une commission est instituée au niveau régional afin de représenter les salariés et les employeurs « des entreprises de moins de onze salariés ». Si l'on écrit « d'entreprises » à la place de « des entreprises », ce n'est plus l'ensemble de ces entreprises qui sont concernées.
Nous parlons bien de l'ensemble des entreprises de moins de onze salariés, et la modification rédactionnelle que je propose ne change rien à cela.
La Commission adopte l'amendement.
La Commission examine ensuite les amendements AS244 et AS247 de M. Francis Vercamer.
Les 4,6 millions de salariés des TPE étant aujourd'hui, pour la majorité d'entre eux, privés d'une représentation spécifique, l'article 1er vise à créer des commissions interprofessionnelles au niveau régional pour remédier à cette carence. Notre amendement AS244 tend à étendre les compétences de ces commissions aux entreprises de moins de cinquante salariés, notre amendement de repli AS247 à celles de moins de vingt-six. Cela permettrait de répondre à une volonté de simplification des institutions représentatives du personnel au sein des TPE et des PME, aujourd'hui confrontées à des problèmes de seuils sociaux et fiscaux qui sont autant de freins à leur développement. Christophe Cavard n'a-t-il pas souligné il y a un instant que le dialogue permettait d'éviter le conflit ?
Avis défavorable. Ces amendements prévoient d'aller plus loin dans la simplification en étendant le champ des commissions régionales. Pour être cohérent, cher collègue, il faudrait que vous prévoyiez la disparition des délégués du personnel et délégués syndicaux dans les entreprises de onze à cinquante salariés. En ce qui concerne le second amendement, il est cocasse que des collègues qui trouvent qu'il existe trop de seuils en inventent un nouveau, à vingt-six salariés, dont j'ignore d'ailleurs à quoi il correspond.
Ces amendements rendent service au ministre puisqu'ils tendent à relever le seuil. Une représentativité des entreprises de moins de cinquante salariés serait plus logique.
Les trois quarts des entreprises de onze à vingt-cinq salariés n'ont pas de représentant du personnel, malgré le franchissement du seuil prévoyant l'élection du délégué du personnel. Le chiffre de vingt-six salariés est cohérent de ce point de vue.
La Commission rejette successivement ces deux amendements.
La Commission examine ensuite l'amendement AS378 de M. Dominique Tian.
Je propose d'écrire que les commissions régionales « représentent les salariés et employeurs des entreprises de moins de onze salariés non couvertes par des accords de branche ». Il est en effet essentiel que les branches professionnelles conservent la maîtrise du dialogue social en organisant une représentation des salariés et des employeurs dans les TPE par secteur d'activité.
Cette rédaction exclurait les branches qui ont d'ores et déjà mis en place des commissions. Le texte, surtout s'il est modifié par l'amendement AS494 que je présenterai dans un instant, sécurisera au contraire l'existence des commissions existantes, qui fonctionnent plutôt bien.
J'observe, pour m'en étonner, qu'à cet alinéa il est écrit que les commissions régionales représentent les salariés et employeurs « des entreprises » de moins de onze salariés, alors qu'au précédent l'amendement AS166 visait, par cohérence avec l'alinéa 9, à écrire « d'entreprises ».
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS494 du rapporteur.
Il s'agit de l'amendement que je viens d'évoquer. Les CPRI n'écraseront pas les commissions sectorielles existantes, qui continueront de fonctionner. Nous permettons à d'autres branches ou secteurs d'en créer de semblables.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte également l'amendement rédactionnel AS167 du rapporteur.
Elle examine ensuite les amendements identiques AS253 de M. Francis Vercamer et AS441 de M. Gérard Cherpion.
Cet amendement prend en compte la difficulté à désigner des représentants issus des entreprises de moins de onze salariés. S'il est important d'encourager le plus possible de telles désignations, force est de constater que les dispositions de l'article risquent d'entraîner de nombreux constats de carence préjudiciables au bon fonctionnement de ces instances.
Il s'agit de prévenir la difficulté que pourraient avoir les commissions paritaires uniquement composées de représentants des TPE à trouver les effectifs nécessaires à leur fonctionnement. Les effectifs restreints de ces entreprises rendent difficile l'engagement des salariés et des employeurs dans une instance de représentation externe. Il faut permettre une plus grande souplesse dans la composition des futures commissions, le principe d'une représentation de ces entreprises restant garanti par la présence d'au moins six salariés et six employeurs issus d'entreprises de moins de onze salariés. Pourquoi six ? Parce que cela permet d'assurer la parité, abordée dans un article ultérieur.
Nous nous sommes posé la question : les représentants des salariés des TPE doivent-ils être eux-mêmes issus des TPE, ou pourraient-ils, pour quelques-uns d'entre eux, être désignés par des organisations syndicales ? On nous a fait valoir qu'il serait difficile de trouver assez de représentants, mais dix par région, cela ne fait que 130 pour toute la France. Je rappelle qu'il s'agit de représenter les 6,5 millions de salariés des TPE.
L'UPA juge, pour sa part, souhaitable que les représentants des TPE soient issus de ces entreprises, au motif qu'il est préférable que les interlocuteurs « parlent le même langage ». Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à ces amendements.
La Commission rejette les amendements.
Elle se saisit ensuite de l'amendement AS9 de M. Gérard Cherpion.
Cet amendement porte sur le même problème que précédemment ; j'imagine que la position du rapporteur sera aussi la même...
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite les amendements AS254, AS245 et AS248 de M. Francis Vercamer.
La démarche de l'amendement AS254 est la même que celle de M. Cherpion, et j'entends la réponse du rapporteur. Les deux amendements suivants proposent respectivement des seuils de cinquante, puis de vingt-six salariés ; le rapporteur y sera également défavorable et je puis comprendre pourquoi.
La Commission rejette successivement ces amendements.
Puis elle se penche sur les amendements AS220 et AS275 de M. Denys Robiliard.
Ces amendements ont trait aux problématiques de l'interprofessionnel, de la multiprofession, des professions libérales, de l'économie sociale et solidaire, mais aussi à celle de l'agriculture, bref, à tous ces employeurs dits « hors champ » dont chacun emploie peu de salariés, mais qui représentent néanmoins quelque 20 % de l'emploi salarié dans les TPE. Pour assurer leur représentation spécifique, il vous est proposé de réserver deux sièges sur dix, au sein du collège des employeurs, aux organisations d'employeurs dont la vocation statutaire revêt un caractère multiprofessionnel.
À vrai dire, cependant, l'amendement AS275 est mieux rédigé que l'amendement AS220, que je retire donc au profit de ce dernier.
Il existe déjà une représentation de certaines organisations multiprofessionnelles, comme, par exemple, la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA). En outre, l'amendement précédemment adopté permet une forme de souplesse puisque, si elles le souhaitent, ces organisations – je pense notamment à celles regroupant les entreprises de l'économie sociale et solidaire – peuvent créer leurs propres commissions dans le cadre d'un accord avec les organisations syndicales. et ce sans revenir sur la représentation des salariés des TPE.
La réponse du rapporteur m'interpelle, puisqu'il reconnaît qu'il existe déjà des instances sectorielles de représentation des salariés, par exemple dans l'agriculture ou l'artisanat. Je repose donc la question : à quoi vont servir ces commissions censées représenter 4,6 millions de salariés ? Il ne faut pas tromper les Français sur les intentions réelles qui président à la création de ces commissions, ni sur leur utilité et leur efficacité pour le dialogue social.
Ces commissions seront complémentaires de l'existant : elles seront là pour assurer une présence là où, actuellement il n'y a rien. L'amendement de M. Robiliard a le mérite de garantir à certains secteurs d'être représentés.
J'entends l'argument de M. Robiliard et Cavard, mais je préfère inciter les secteurs en question à mettre en place leurs propres commissions que de leur accorder une représentation spécifique au détriment des autres TPE. Et je répondrai à Mme Le Callennec, sous forme de boutade que 130 personnes peuvent bien représenter 4,6 millions de salariés, puisque 577 députés représentent 65 millions de citoyens…
L'amendement AS220 est retiré.
La Commission rejette l'amendement AS275.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS168 du rapporteur.
Elle est ensuite saisie de l'amendement AS453 de Mme Sandrine Mazetier.
L'objet de cet amendement est d'instaurer la parité entre les femmes et les hommes pour la désignation des membres des commissions paritaires régionales. Je reprends, par ailleurs, l'argument du rapporteur sur la représentation des 4,6 millions de salariés des TPE et de leurs employeurs : il ne sera pas bien difficile de trouver 65 hommes et 65 femmes pour siéger au sein de chaque collège !
C'est un très bon amendement, et je ne le dis pas seulement parce que j'en suis cosignataire… Avis favorable.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS169 du rapporteur.
Elle se saisit ensuite de l'amendement AS388 de M. Christophe Cavard.
Les commissions régionales seront très utiles aux salariés des très petites entreprises, et il est donc essentiel que ceux-ci soient informés de leur existence. À cette fin, il est proposé un affichage obligatoire, dans les entreprises concernées, de l'identité et des coordonnées des représentants désignés.
On peut difficilement être opposé au fait de favoriser une telle communication, mais cela relève du décret, lequel est prévu, ainsi que va sans doute nous le confirmer M. le ministre.
Afin de rassurer M. Cavard, je précise en effet qu'au chapitre V est prévu un décret qui précisera les conditions d'application, notamment les modalités de publicité relative à la composition de la commission, aux noms, professions et appartenances syndicales éventuelles de ses membres.
L'amendement est retiré.
La Commission examine ensuite l'amendement AS33 de M. Lionel Tardy.
Cet amendement vise à supprimer, dans la liste des missions des CPRI, la référence au fait de « débattre » : il me semble que le dialogue social doit déboucher sur du concret.
J'avoue ma perplexité : créer par la loi une commission et lui interdire de débattre serait pour le moins curieux. J'émets donc un avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle étudie, en discussion commune, les amendements AS197 de Mme Monique Orphé et AS455 de Mme Sandrine Mazetier.
Cet amendement vise à enrichir les compétences des CPRI en intégrant les thématiques de la mixité des métiers et de l'égalité professionnelle. À cet effet, il est proposé d'inscrire dans la loi les dispositions de l'article 5 de l'accord national interprofessionnel (ANI) du 1er mars 2014, car on sait que les emplois féminins sont concentrés dans six secteurs principaux et que l'égal accès à l'emploi et la mixité au travail sont des enjeux stratégiques pour le développement des entreprises.
Mon amendement est complémentaire de celui de Mme Orphé, puisqu'il porte sur l'égalité professionnelle et le travail à temps partiel. On peut en effet espérer que ces commissions favoriseront l'émergence de groupements d'employeurs afin de réduire le temps partiel subi, dont les femmes sont les principales victimes.
Ces deux amendements ont le même objet, mais celui de Mme Mazetier est plus conforme à la terminologie habituellement utilisée. J'y suis donc favorable et propose à Mme Orphé, qui en est d'ailleurs cosignataire, de retirer le sien à son profit.
L'amendement AS197 est retiré.
La Commission adopte l'amendement AS455.
Elle examine ensuite l'amendement AS495 du rapporteur, les amendements AS224, AS225 et AS274 de M. Denys Robiliard, l'amendement AS344 de Mme Chantal Guittet et l'amendement AS389 de M. Christophe Cavard.
Plusieurs de nos collègues nous ont demandé à quoi allaient servir ces commissions. Il serait catastrophique qu'elles se bornent à faire de l'information, aussi est-il proposé d'étoffer leurs prérogatives en leur conférant un rôle de médiateur et en leur confiant la gestion d'activités sociales et culturelles, comme le font déjà, à la satisfaction générale, les commissions paritaires régionales interprofessionnelles de l'artisanat (CPRIA) avec les comités des oeuvres sociales et culturelles de l'artisanat (COSCA).
Si ce qui relève des activités sociales et culturelles paraît acceptable puisque cela se fait déjà, la recherche de solutions aux problèmes individuels et collectifs par la médiation me gêne davantage, car cela suppose que les commissions entrent dans les entreprises, ce qui est contraire à l'esprit affiché du texte.
Je comprends le point de vue de Gérard Cherpion, même si je ne le partage pas, mais cette fonction de médiation est très importante. Un certain nombre de conflits, de malentendus, de situations insatisfaisantes au sein des TPE, gagneraient à être résolus par la médiation plutôt que d'être portés devant les prud'hommes ou d'autres tribunaux. Nous avons d'ailleurs déposé un amendement à ce sujet, mais celui du rapporteur va plus loin que le nôtre.
Permettre le recours à la médiation est nécessaire. Il s'agit bien, je le souligne, d'une possibilité à laquelle on est libre de recourir ou non. Il est indéniable qu'il existe des conflits et qu'il vaut mieux tenter de les résoudre en évitant de les soumettre aux tribunaux. Je soutiens donc l'amendement du rapporteur, mais il ne se comprend – et nous avons déposé à cet effet un amendement qui viendra en discussion tout à l'heure – que si les représentants des salariés peuvent entrer dans l'entreprise, faute de quoi ils pourraient difficilement exercer leur mandat. Je ne comprends pas en quoi cela pourrait représenter une menace ou un danger.
Si je comprends bien, un salarié d'une TPE en conflit avec son employeur pourra saisir la CPRI et être entendu par celle-ci. Mais ensuite, que se passera-t-il ? Un membre salarié de la commission se rendra-t-il dans l'entreprise pour discuter avec l'employeur ? Comment la commission fonctionnera-t-elle ? Quelles seront ses prérogatives, et quelles décisions sera-t-elle susceptible de prendre ? C'est une question qui inquiète beaucoup les chefs d'entreprise.
Mes amendements visent le même objectif que celui du rapporteur. J'ai toutefois hésité entre deux vocables ; celui de conciliation, équivoque puisque réservé aux prud'hommes, et celui de médiation, tout aussi équivoque puisque c'est un mode particulier de solution des conflits prévu par le code civil.
L'amendement AS224 propose de faciliter la résolution des conflits individuels ou collectifs, en posant toutefois une double condition : aucune juridiction ne doit avoir été saisie, et la commission ne peut intervenir qu'avec l'accord des parties concernées. Dès lors pourquoi refuser au monde des TPE la simple possibilité d'une aide – peu importe le nom qu'on lui donne – à la solution des conflits ? L'exigence d'un accord des parties devrait lever les craintes de l'opposition quant au risque d'immixtion dans la vie de l'entreprise.
Quant à l'amendement AS225, il va plus loin, en matière d'action sociale et culturelle, que celui du rapporteur, qui se contente de dire que la CPRI « fait des propositions » : elle devrait, selon moi, pouvoir décider d'actions complémentaires dont il lui appartiendrait de déterminer le financement.
Gérard Cherpion a raison : il ne faut pas que les CPRI soient des conseils de prud'hommes au rabais. Certes, les délais de jugement y sont trop longs – trois ans en moyenne à Marseille, et je crois que ce n'est guère mieux ailleurs – mais ce serait adresser un mauvais message que de laisser entendre que les commissions pourraient se substituer aux prud'hommes. En revanche, elles pourraient éventuellement avoir un rôle à jouer lors de conflits collectifs, lorsqu'il faut interpréter la loi ou le code du travail, dont la complexité est telle que nul ne s'y retrouve plus.
Je crains pour ma part que, dans chaque région, les vingt représentants qui auront compétence pour des milliers de TPE ne doivent se consacrer à plein temps à leur mandat. Or, seulement cinq heures de délégation par mois sont prévues à l'alinéa 31, certes assorties de la possibilité d'allonger cette durée en cas de « circonstances exceptionnelles », mais la vie des entreprises qui compteront des représentants des salariés dans leur personnel en sera rendue impossible.
On sait que la plupart des conflits portés devant les prud'hommes concernent de petites entreprises. Dès lors, je ne vois pas bien l'intérêt d'ajouter la possibilité de saisir une instance qui fera double emploi avec eux. La rédaction retenue par l'amendement de M. Robiliard me paraît toutefois un moindre mal, sans que cela m'incite à le voter pour autant.
Comme l'a rappelé Mme Fraysse, la médiation n'est imposée à personne, il s'agit simplement de la permettre, sans remettre en cause le rôle des conseils de prud'hommes. Le fait, souligné par M. Cherpion, que les TPE soient le principal pourvoyeur de ces derniers, plaide à mon sens pour que nous ajoutions cette possibilité de médiation. La formulation retenue à cet effet par M. Robiliard dans son amendement AS224 me semble préférable à celle de mon propre amendement, et je propose de l'y intégrer, tout en conservant l'alinéa relatif aux activités sociales et culturelles.
Les amendements AS224, AS225, AS274, AS344 et AS389 sont retirés.
Le Gouvernement est favorable à cette nouvelle rédaction.
La Commission adopte l'amendement ainsi rectifié.
Elle examine ensuite les amendements AS385 de M. Christophe Cavard et AS297 de Mme Jacqueline Fraysse.
Je propose de supprimer l'alinéa 28 qui interdit l'accès des membres de la commission aux locaux des entreprises, en parfaite contradiction avec ce que nous venons de décider.
Notre amendement AS297 a pour but de donner aux représentants des salariés des TPE des missions proches de celles du délégué du personnel et des commissions paritaires locales. Naturellement, la création des CPRI nous satisfait puisqu'elle permettra enfin la représentation des salariés des petites entreprises, au sein desquelles les relations ne sont pas toujours aussi bonnes que l'on veut bien le dire. Mais, du fait des liens très forts de subordination et de dépendance économique qui y existent, les prérogatives de ces commissions nous paraissent insuffisantes. La médiation est, certes, importante, mais nous pensons que les représentants des salariés doivent pouvoir assister ces derniers dans leurs discussions avec l'employeur, comme c'est déjà le cas lors de l'entretien préalable au licenciement. Il n'y a donc rien de nouveau ni d'extraordinaire dans cet amendement, dont l'objet n'est pas du tout de remplacer les conseils de prud'hommes.
Je suis sensible à l'idée défendue par M. Cavard, car la médiation suppose de réunir l'ensemble des parties prenantes, mais la disparition pure et simple de l'alinéa 28 aurait pour effet de permettre un accès illimité à l'entreprise, ce qui pourrait être mal ressenti par l'employeur. L'amendement AS496 que je défendrai dans un instant prévoit que cet accès est soumis à l' autorisation de l'employeur, ce qui me semble être plus proche de l'esprit de la médiation. Je suggère donc à M. Cavard de retirer le sien.
Quant à l'amendement de Mme Fraysse, il revient à créer des « super-délégués » du personnel, extérieurs à l'entreprise qui plus est. C'est là un esprit différent de celui dans lequel ont été conçues les CPRI. Je suis donc défavorable à cet amendement.
L'amendement de M. Cavard revient à soumettre au droit commun les entreprises de moins de onze salariés, tandis que celui de Mme Fraysse est en contradiction avec le droit du travail lui-même.
La position du rapporteur me convient, car ces deux amendements, qui vont à l'encontre du dialogue social en mettant le chef d'entreprise sous pression. Dès lors que l'autorisation de ce dernier est requise, les choses se présentent tout autrement.
Je souhaite éviter les faux débats. Jusqu'à preuve du contraire, une entreprise est un lieu privé, où l'on n'entre pas sans autorisation. L'amendement que vient de présenter le rapporteur est donc quelque peu superfétatoire. Ce que je propose pour ma part est simplement de lever l'interdiction générale figurant à l'alinéa 28 et de laisser l'employeur libre de décider qui il laisse entrer.
Monsieur le ministre, vous vous êtes dit favorable à ce que les commissions aient un rôle de médiation. Cependant, avec ces amendements, on franchit une étape supplémentaire : les membres des commissions auront accès aux locaux des entreprises. Or, si l'alinéa 28 a été inscrit dans le projet de loi, c'est qu'il y a une bonne raison, évidente aux yeux des chefs d'entreprise.
D'autre part, vous indiquez dans l'exposé sommaire de votre amendement, monsieur Cavard, que les commissions devraient avoir « des moyens humains, des moyens géographiques et des moyens d'action réels ». Tout cela aura un coût.
Je partage l'analyse de M. Cavard : en supprimant l'interdiction prévue à l'alinéa 28, on accorderait non pas le droit, mais la possibilité aux membres des commissions d'accéder aux locaux des entreprises. Resterait alors à régler les conditions dans lesquelles cette faculté est exercée. L'amendement de M. Cavard me paraît préférable à celui du rapporteur, qui est trop restrictif.
À ma connaissance, la rédaction prévue à l'alinéa 28 figurait dans le projet d'ANI et n'a été contestée ni par les organisations patronales ni par les syndicats.
La rédaction que vous proposez, monsieur Cavard, présente un risque, dans la mesure où elle laisse une marge d'appréciation au juge : celui-ci considérera-t-il que les membres des commissions sont des représentants du personnel et qu'ils sont autorisés, à ce titre, à entrer dans les entreprises ? On ignore dans quel sens tranchera la jurisprudence.
Il vaut mieux l'inscrire dans la loi, ainsi que je le propose. Nous sommes d'accord sur le fond, mais la rédaction de mon amendement apporte davantage de sécurité, car elle évite une éventuelle interprétation jurisprudentielle défavorable à ce que nous souhaitons.
Je souscris à l'argumentation du rapporteur : il vaut mieux préciser les choses dans la loi, monsieur Cavard.
Par ailleurs, il ne faut pas transformer les membres des CPRI en « super-délégués du personnel ». Si nous souhaitons que ces commissions fonctionnent, ne leur attribuons pas d'emblée des pouvoirs qui vont au-delà de nos intentions initiales. Elles doivent avoir un rôle d'information et, avec l'accord des parties, de médiation. Quant à l'accès aux locaux des entreprises, il est bon de rappeler qu'il ne peut se faire que sur autorisation de l'employeur.
La rédaction prévue à l'alinéa 28 figurait en effet dans le projet d'ANI, mais celui-ci n'a pas été signé, monsieur Cherpion. D'autre part, l'emploi de la forme négative est un peu curieux. Je préfère la rédaction proposée par le rapporteur.
La Commission rejette successivement les amendements AS385 et AS297.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AS496 du rapporteur, AS222 de M. Denys Robiliard, AS295 de Mme Jacqueline Fraysse et AS345 de Mme Chantal Guittet.
Ainsi que je viens de l'indiquer, je propose, par l'amendement AS496, que l'alinéa 28 soit rédigé comme suit : « Les membres de la commission ont, pour l'exercice de leurs fonctions, accès aux entreprises, sur autorisation de l'employeur. »
L'amendement AS222 est identique à celui du rapporteur, à ceci près qu'il prévoit que l'accès aux entreprises se fait non pas « sur autorisation », mais « avec l'accord » de l'employeur. Cette formulation me paraît mieux convenir.
En l'état actuel du droit, l'accord de l'employeur est déjà nécessaire pour accéder à une entreprise. Si nous inscrivons dans la loi « sur autorisation de l'employeur », il arrivera que l'employeur refuse l'accès aux locaux. Dans ce cas, la médiation ne pourra pas avoir lieu au sein même de l'entreprise – celle-ci se ferait, bien entendu, avec toutes les règles de courtoisie qui s'imposent. C'est regrettable et contradictoire avec votre volonté de favoriser la médiation, à laquelle je souscris entièrement.
Je vous suggère, chers collègues, de retirer vos amendements. Nous avons tous le même objectif. Néanmoins, la notion d'autorisation est plus formelle que celle d'accord. Selon moi, on doit pouvoir justifier d'une autorisation pour entrer sur une propriété privée.
Le groupe UMP est opposé à ces amendements. Le projet d'ANI a certes échoué, mais c'était un texte équilibré. Pour les points sur lesquels les partenaires sociaux n'ont pas trouvé d'accord, je comprends que l'État joue son rôle en se substituant à eux. En revanche, pourquoi voulez-vous reprendre la main lorsque le dialogue social a abouti ? En l'espèce, les organisations patronales et les syndicats s'étaient mis d'accord sur le fait que les membres des commissions ne devaient pas avoir accès aux locaux des entreprises. Dans leur sagesse, ils avaient décidé de ne pas franchir cette étape. Pourquoi le législateur durcirait-il le texte et imposerait-il de force une mesure que personne ne réclame ?
Je suis d'accord avec M. Tian : il ne faut pas que le texte proposé par le Gouvernement dépasse les lignes que les partenaires sociaux n'auraient pas eux-mêmes franchies. Le groupe UDI est donc, lui aussi, opposé à ces amendements.
Les amendements AS222 et AS345 sont retirés.
La Commission adopte l'amendement AS496.
En conséquence, l'amendement AS295 tombe.
La Commission en vient à l'amendement AS298 de Mme Jacqueline Fraysse.
Cet amendement vise à augmenter le crédit d'heures de délégation dévolu aux membres des commissions.
Lorsque l'on a la responsabilité de travailler auprès de ses collègues et de les aider, cinq heures par mois, compte tenu notamment de la taille des nouvelles régions, c'est ridicule – j'emploie volontairement ce terme. Je me suis livré à un petit calcul : cinq heures de délégation pour chacun des dix salariés membres des treize commissions régionales, cela fait 650 heures de délégation pour 4,6 millions de salariés, soit une minute par mois pour 118 salariés ! Je propose donc de porter le nombre d'heures de délégation à quinze, quota dont disposent les délégués du personnel dans les entreprises de plus de cinquante salariés. Je suis prête à envisager, le cas échéant, un chiffre inférieur à quinze, mais il est nécessaire d'augmenter ce crédit d'heures.
Le texte prévoit que ces cinq heures s'ajoutent au « temps passé aux séances de la commission ». D'autre part, n'oublions pas que nous traitons des TPE. Si le représentant salarié est issu d'une entreprise qui emploie au total deux ou trois salariés, quinze heures correspondent à deux jours d'absence. Nous devons être vigilants à l'incidence que cela pourrait avoir sur le fonctionnement même de l'entreprise, ainsi que sur sa capacité de production. Avis défavorable, d'autant que je propose d'apporter une certaine souplesse au dispositif avec les amendements AS506, que nous allons examiner immédiatement après, et AS507, qui prévoient respectivement la possibilité d'annualiser et de mutualiser ce crédit d'heures.
Ces cinq heures sont, pour le représentant salarié, le « temps nécessaire à l'exercice de sa mission », sachant que celui-ci s'ajoute au « temps passé aux séances de la commission », ainsi que vous l'avez précisé, monsieur le rapporteur. Cependant, le temps de trajet est-il compris dans le crédit d'heures ? D'autre part, j'ai du mal à voir quel sera vraiment le rôle des représentants salariés. Que vont-ils faire concrètement pendant ces cinq heures ?
Mme Fraysse a raison : en multipliant le nombre d'heures de délégation par trois, on résout complètement le problème ! (Sourires.)
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement AS506 du rapporteur.
En conséquence, l'amendement AS226 de M. Denys Robiliard tombe.
La Commission est saisie de l'amendement AS507 du rapporteur.
Aux termes de cet amendement que j'ai évoqué voici un instant, les membres des commissions paritaires régionales pourront répartir entre eux le crédit d'heures de délégation dont ils disposent. Les représentants salariés devront en informer leur employeur quinze jours à l'avance. En outre, j'ai prévu une limite : cette mutualisation ne pourra conduire un membre à disposer dans le mois, à lui seul, de plus d'une fois et demie le crédit d'heures de délégation dont il bénéficie.
Monsieur le rapporteur, dans l'exposé sommaire de l'amendement AS506, vous indiquez que « l'activité des commissions ne sera pas nécessairement régulière ». Qui va décider de la convocation des commissions, ainsi que de l'objet des réunions ?
Un certain nombre de prérogatives leur sont confiées par la loi. Nous avons complété celles qui étaient prévues par le texte en leur donnant un rôle en matière de médiation et d'action sociale et culturelle. Vous ne pouvez pas à la fois nous expliquer que les missions de ces commissions sont trop larges, ainsi que le font certains de vos collègues, et demander qui va décider de la convocation de leurs réunions ! Les commissions vont se mettre en place et déterminer elles-mêmes leur mode de fonctionnement, notamment en adoptant leur règlement intérieur. Les commissions paritaires interprofessionnelles de l'artisanat (CPRIA), qui existent déjà, fonctionnent de manière très satisfaisante. Elles ont répondu à toutes les questions que vous posez depuis tout à l'heure.
J'entends tout à fait les arguments du rapporteur. On peut ne pas être d'accord avec la création de ces commissions, mais, dès lors qu'on les crée, on peut comprendre qu'elles aient besoin d'un minimum de souplesse pour fonctionner. Paradoxalement, je suis plutôt favorable à cet amendement de simplification.
Ne nous voilons pas la face : cette disposition donne des moyens supplémentaires aux commissions et complexifie encore le système. Le rapporteur nous a lui-même expliqué que l'on risquait de mettre en péril certaines TPE si l'on augmentait trop le crédit d'heures. Or, avec cet amendement, on tombe à nouveau sur le même problème : il y a certes un délai de prévenance, mais on allonge le temps pendant lequel l'entreprise peut être privée d'un de ses salariés.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS170, AS171 et AS173 du rapporteur.
L'amendement AS395 de M. Christophe Cavard est retiré.
La Commission examine l'amendement AS398 de M. Christophe Cavard.
Cet amendement vise à donner aux CPRI la possibilité de mettre en place des commissions afin d'assurer la représentation de certains secteurs spécifiques qui ne le seraient pas déjà dans le cadre des branches existantes, notamment celui de l'économie sociale et solidaire. Cette faculté serait prévue par le règlement intérieur. Il ne s'agit pas d'attribuer un nombre déterminé de sièges au sein de la commission paritaire, ainsi que M. Robiliard l'a proposé précédemment s'agissant des organisations multiprofessionnelles, mais de permettre à la commission elle-même de faire des choix en la matière.
Pourquoi inscrire une telle disposition dans la loi ? Laissons les commissions adopter leur règlement intérieur et définir leur propre fonctionnement. Rien ne les empêche de mettre en place des commissions spécifiques si elles le souhaitent. Avis défavorable.
Si vous me permettez un clin d'oeil, monsieur le rapporteur, il n'était pas non plus indispensable d'inscrire dans la loi que l'accès aux locaux d'une entreprise se fait « sur autorisation de l'employeur » ! Quoi qu'il en soit, je suis d'accord avec vous sur le principe : les commissions décident de leur règlement intérieur et peuvent donc déjà, en droit, prévoir une représentation spécifique pour certains secteurs. Mon amendement était, en quelque sorte, un amendement d'appel, qui visait à le leur signaler. Je le retire, mais nous aurons l'occasion de revenir sur ce point en séance publique.
L'amendement est retiré.
La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS174 et AS175 du rapporteur.
Puis elle est saisie de l'amendement AS223 de M. Denys Robiliard.
Il me paraîtrait prudent que le décret en Conseil d'État prévu par le texte précise les domaines et les modalités de délégation de la commission à certains de ses membres, dans le respect de son caractère paritaire, même si les commissions adoptent par ailleurs un règlement intérieur. Dans l'hypothèse où une commission joue un rôle de médiation ou d'assistance à la résolution d'un conflit, accepté par l'employeur et par le ou les salariés concernés, elle ne mobilisera pas ses vingt membres, mais missionnera généralement deux d'entre eux, un employeur et un salarié. Si un protocole d'accord est signé, il est possible que l'une des parties se repente et cherche à le faire annuler, en arguant que les médiateurs ou ceux qui ont facilité la résolution du conflit n'étaient pas valablement mandatés. En prévoyant une faculté de délégation dans la loi, nous sécuriserons les opérations de médiation.
Je comprends vos arguments, monsieur Robiliard : une commission peut en effet mandater des représentants pour intervenir dans le cadre d'une médiation. Cependant, je vous fais la même réponse que précédemment à M. Cavard : rien dans le présent texte n'interdit les délégations. Laissons le soin aux commissions de s'organiser : elles peuvent tout à fait les prévoir dans leur règlement intérieur. Il n'est pas nécessaire, selon moi, d'inscrire cette faculté dans la loi, laquelle n'a pas vocation à détailler l'intégralité de leur fonctionnement. De plus, leur composition pourra varier d'une région à l'autre. Je vous suggère de retirer votre amendement, monsieur Robiliard.
En matière administrative, il existe une jurisprudence fournie sur la compétence et la possibilité de la déléguer, avec une distinction entre délégation de compétence et délégation de signature. Certes, ce qui n'est pas interdit est permis. Mais lorsque des compétences sont attribuées par la loi, la faculté de les déléguer ne va pas de soi. Dès lors, il me paraît prudent de la prévoir expressément dans la loi, même si l'on renvoie au décret la fixation des modalités. Ce serait plus sûr pour les parties.
La Commission rejette l'amendement.
L'amendement AS272 de M. Denys Robiliard est retiré.
La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS176 et AS177 du rapporteur.
Elle en vient à l'amendement AS299 de Mme Jacqueline Fraysse.
Compte tenu de la rédaction actuelle du texte, les membres des commissions paritaires locales pourraient être moins bien protégés contre le licenciement que ceux des commissions paritaires régionales interprofessionnelles. Cet amendement vise à remédier à cette situation en offrant aux premiers une protection identique à celle dont bénéficient les seconds.
Les commissions paritaires locales instituées par un accord ont été volontairement laissées hors du champ du projet de loi. Les accords en question ont été signés par les organisations syndicales, et les commissions locales fonctionnent au demeurant très bien. De plus, rien ne dit que les salariés qui en sont membres seront moins bien protégés contre le licenciement que leurs collègues des commissions paritaires régionales : leur protection est prévue par les accords eux-mêmes, qui renvoient aux dispositions du livre IV du code du travail. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS178, AS179, AS180, AS182, AS183, AS184 et AS185 du rapporteur.
Elle adopte ensuite l'article 1er modifié.
Après l'article 1er
La Commission examine, en discussion commune, l'amendement AS10 de M. Gérard Cherpion et les amendements AS265 et AS262 de M. Francis Vercamer.
Actuellement, les entreprises sont soumises à trente-cinq obligations supplémentaires lorsqu'elles franchissent le seuil de cinquante salariés. Les plus importantes de ces obligations concernent la création d'institutions représentatives du personnel (IRP) telles que le comité d'entreprise et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), ainsi que la présence de délégués syndicaux, qui se voient attribuer un crédit d'heures en fonction de l'effectif de l'entreprise. À cela s'ajoutent les obligations de négocier au niveau de l'entreprise imposées par le code du travail du fait de la présence desdits délégués syndicaux. Il en résulte un frein mécanique au développement des entreprises, préjudiciable à l'emploi, dans la mesure où de nombreuses entreprises font le choix de ne pas dépasser ce seuil. Il existe ainsi deux fois et demie plus d'entreprises disposant d'un effectif de 49 salariés que d'entreprises disposant d'un effectif de 50 salariés. Afin de débloquer ce verrou, l'amendement AS10 vise à reporter les obligations pesant sur les entreprises de plus de cinquante salariés sur celles qui comptent plus de cent salariés.
La question des effets de seuil est un « marronnier » depuis déjà quinze ou vingt ans. Les seuils créent manifestement des difficultés pour les entreprises, ainsi que le montre la statistique citée par M. Cherpion. Le Président de la République a lui-même déclaré que les seuils sociaux étaient un frein à l'emploi. Quant à vous, monsieur le ministre, vous êtes allés encore un peu plus loin, et vous êtes dans le vrai. Les positions des différents groupes politiques ont d'ailleurs évolué : les préconisations qui étaient perçues comme extrêmement libérales il y a dix ans apparaissent désormais comme pragmatiques. Par l'amendement AS265, nous proposons que les obligations qui sont imposées à partir de cinquante salariés s'appliquent à partir de soixante salariés, à titre expérimental pendant un an à compter de la promulgation de la présente loi.
Ce débat s'apparente en effet à un « marronnier ». Monsieur Cherpion, un de vos collègues du groupe UMP a mentionné tout à l'heure un autre chiffre que celui que vous venez de citer : 74 % des entreprises dont l'effectif est compris entre 50 et 99 salariés ne disposent d'aucune IRP. Ce ne sont donc pas les IRP qui posent problème ! Dès lors, en affirmant que le seuil est un des aspects fondamentaux de la discussion, vous exprimez un positionnement quasi idéologique. En outre, un point me gêne dans votre approche : on a l'impression que vous considérez le dialogue social comme une sorte de frein, alors même qu'il est utile au développement des entreprises. Pour toutes ces raisons, que nous avons déjà développées à maintes reprises, j'émets un avis défavorable à ces trois amendements.
Il existe plusieurs manières d'avancer sur cette question. Celle que nous avons choisie consiste à privilégier le dialogue social. Nous avons repris dans le projet de loi la démarche dans laquelle se sont engagés les partenaires sociaux : élargir et lisser le dispositif, donner de la souplesse aux entreprises, garantir aux salariés une véritable représentation à tous les niveaux à partir de cinquante salariés, notamment au sein du CHSCT. Pour votre part, vous proposez une autre méthode : porter le seuil de cinquante à soixante ou cent salariés. Or, lorsque l'on défend le dialogue social, on ne peut pas toucher aux seuils sans l'accord des partenaires sociaux.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Nos amendements ne sont pas extrémistes : nous proposons de porter le seuil de cinquante à soixante salariés. Nous pourrions ainsi nous convaincre que le seuil de cinquante salariés est problématique, ce dont personne ne doute ici. En outre, nous répondrions à une recommandation formulée par la Commission européenne dans son avis sur le programme de stabilité présenté par notre pays pour 2015 : « La France devrait prendre des mesures résolues pour supprimer les seuils réglementaires prévus par le droit du travail et les réglementations comptables qui limitent la croissance de ses entreprises. »
La Commission rejette successivement les amendements AS10, AS265 et AS262.
Puis elle est saisie de l'amendement AS278 de M. Hervé Morin.
Il s'agit de confier à la négociation collective plutôt qu'au cadre législatif et réglementaire le soin de fixer les règles en matière de temps de travail.
Cet amendement est loin d'être anodin ! Je rappelle que les règles en matière de temps de travail sont déterminées par la loi. Celle-ci fixe non pas une durée maximale, mais une durée au-delà de laquelle se déclenche le mécanisme des heures supplémentaires. D'autre part, chers collègues de l'opposition, en dix ans, vous n'êtes pas revenus sur les dispositions des lois Aubry. Vous les avez même consacrées en défiscalisant les heures supplémentaires. J'ai cru comprendre que le débat reviendrait. Cela étant, on nous a déjà expliqué de très nombreuses fois qu'il serait rouvert, et il n'en a rien été. Je ne peux qu'émettre un avis défavorable à cet amendement.
Je vous en voudrais presque, monsieur le rapporteur, d'être favorable à mon amendement ! Je ne peux donc pas vous en vouloir d'y être défavorable. (Sourires.)
On ne peut pas tenir de tels propos, monsieur le rapporteur ! C'est sans doute la fatigue qui commence à se faire sentir. Je conviens volontiers que les évolutions ont été insuffisantes, mais nous avons apporté de nombreux aménagements aux règles en matière de temps de travail. Je voterai l'amendement de M. Richard, qui va tout à fait dans le bon sens.
J'ai seulement considéré que les évolutions intervenues étaient insuffisantes, et je n'ai pas l'intention de rouvrir ce débat, ce que vous faites toujours quand vous êtes dans l'opposition, jamais quand vous êtes dans la majorité.
La Commission rejette l'amendement AS278.
Elle étudie ensuite l'amendement AS266 de M. Francis Vercamer.
L'amendement vise à encourager, à titre expérimental, l'embauche dans les TPE, en portant le seuil d'élection des délégués du personnel à vingt et un salariés.
Avis défavorable. La seule différence avec l'amendement précédent est que la mesure serait expérimentale.
La Commission rejette l'amendement AS266.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette l'amendement AS263 de M. Francis Vercamer.
Elle est saisie de l'amendement AS334 de M. Dominique Tian.
La généralisation des commissions paritaires et le maintien de l'article L. 2312-5 du code du travail feraient double emploi. Nous proposons par conséquent de toiletter le code en supprimant les délégués de site.
Avis défavorable. La suppression des délégués de site, qui jouent parfaitement leur rôle, notamment dans les centres commerciaux, irait bien au-delà d'un simple toilettage.
La Commission rejette l'amendement.
Elle aborde l'amendement AS11 de M. Gérard Cherpion.
On dénombre en France entre 25 000 et 30 000 comités d'entreprise où siègent plus de 100 000 élus, autant de CHSCT, près de 300 000 délégués du personnel et un peu plus de 40 000 délégués syndicaux. L'amendement vise à simplifier l'architecture des institutions représentatives du personnel en ouvrant une négociation liée à la représentativité territoriale des salariés dans les entreprises de moins de cent salariés. Pour encadrer la négociation, nous proposons que ces salariés soient représentés et informés au niveau territorial. L'accord national interprofessionnel et l'accord national multiprofessionnel proposeront au Parlement une réforme afin d'harmoniser les seuils et de fusionner les institutions représentatives du personnel pour les entreprises de moins de cent salariés.
Avis défavorable. Actuellement, rien n'empêche que les salariés des entreprises de moins de cent salariés soient représentés et informés au niveau territorial. En outre, au cours des auditions, aucune organisation n'a réclamé de changement majeur sur les modes de représentation.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite les amendements AS268 et AS267 rectifié de M. Hervé Morin.
En prévoyant qu'une convention ou un accord collectif professionnel ou interprofessionnel puisse déroger aux dispositions du code du travail, à l'exception de celles qui concernent les principes fondamentaux, ces amendements tendent à revenir à l'esprit initial de la démocratie sociale. Nos propositions, qui choqueront peut-être certains de nos collègues, iraient dans le sens des évolutions souhaitées par la Commission européenne en matière de droit du travail.
Avis défavorable à ces deux amendements. La réforme que vous envisagez est considérable : elle consisterait à inverser la hiérarchie des normes, en laissant à la négociation le soin de construire le code du travail.
On ne peut inverser la hiérarchie des normes, par voie d'amendement à vingt-trois heures trente-neuf !
Les autres ont été développés par le rapporteur, et je les fais miens.
La Commission rejette successivement les amendements AS268 et AS267 rectifié.
Elle en vient à l'amendement AS376 rectifié de M. Hervé Morin.
Cet amendement, traditionnellement défendu par M. Poisson, vise à définir les modalités d'un regroupement des branches professionnelles, en précisant le nombre maximal de branches. Cette rationalisation devrait susciter l'approbation de tous les groupes.
L'amendement sera satisfait par celui que le Gouvernement a déposé à l'article 10, et qui va au-delà d'une demande de rapport. Je vous suggère donc de le retirer.
Nous avons commencé à travailler avec les partenaires sociaux. Notre objectif, qui est ambitieux, est de réduire en dix ans le nombre de branches à cent. Il y en aura cent de moins dès la fin de 2015.
L'amendement AS376 rectifié est retiré.
Chapitre II Valorisation des parcours professionnels des élus et délégués syndicaux dans l'entreprise
Avant l'article 2 :
La Commission examine les amendements AS228 et AS230 de M. Denys Robiliard.
L'amendement AS228 tend à supprimer, dans l'intitulé du chapitre II, les mots « dans l'entreprise ». En effet, un conseiller prud'homme ou un administrateur de caisse exerce sa charge hors de l'entreprise, de même qu'un délégué syndical qui consacre des heures à la négociation de branche. D'autre part, la valorisation des acquis de l'expérience liée à l'exercice d'un mandat syndical peut se faire aussi bien en interne, si le salarié évolue dans l'entreprise, qu'en externe, par le biais d'une reconversion.
L'amendement AS230 vise à substituer aux mots « délégués syndicaux », très précis en droit du travail, l'expression « titulaires d'un mandat syndical », pouvant désigner aussi les représentants syndicaux au comité d'entreprise, que le Gouvernement n'a sûrement pas l'intention de priver du bénéfice des dispositions de l'article 2. L'exposé des motifs du projet de loi montre en effet que le texte concerne l'ensemble des mandats syndicaux.
Avis favorable à l'amendement AS228. La modification proposée est bienvenue puisque l'article 6 prévoit que le délégué syndical puisse utiliser ses heures de délégation en dehors de l'entreprise.
Je vous suggère en revanche de retirer l'amendement AS230 et les suivants qui lui sont liés. Je suis convaincu par les exemples que vous avez cités, mais il serait bon de retravailler sur le sujet.
La Commission adopte l'amendement AS228.
L'amendement AS230 est retiré.
Article 2 : Entretiens professionnels de début et fin de mandat
La Commission étudie, en discussion commune, les amendements AS187 du rapporteur, AS444 de M. Lionel Tardy et AS456 de Mme Sandrine Mazetier.
L'amendement AS444 est presque identique. La loi sur la formation professionnelle prévoit qu'après une période d'absence dans l'entreprise, notamment à la fin d'un mandat syndical, l'employé passera un entretien professionnel. Cette mesure, sur laquelle je m'étais interrogé, se comprend mieux s'il s'agit de faire le point sur le mandat. Je suggère de regrouper ces dispositions dans l'article L. 6315-1 du code du travail.
L'amendement AS456, présenté par les députés du groupe socialiste, s'inscrit dans la continuité des échanges que nous avons eus avec la délégation aux droits des femmes. Pour favoriser l'engagement syndical, nous proposons d'inscrire dans la loi que l'employeur favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux fonctions syndicales et effectives, en veillant à une bonne prise en compte de la nécessaire articulation entre vie personnelle et vie professionnelle.
Les amendements, en discussion commune pour des raisons de légistique, n'ont pas du tout le même objet. Je retire donc l'amendement AS187 afin de ne pas empêcher l'adoption de l'amendement AS456, auquel je suis favorable, et émets un avis défavorable à l'amendement de M. Tardy dans l'hypothèse où il serait maintenu.
L'amendement AS187 est retiré.
La Commission rejette l'amendement AS444.
Elle adopte l'amendement AS456.
L'amendement AS229 de M. Denys Robiliard est retiré.
La Commission adopte l'amendement rédactionnel AS186 du rapporteur.
Elle en vient à l'amendement AS400 de M. Christophe Cavard.
De nombreux syndicats souhaitent que l'entretien se déroule automatiquement en présence d'un tiers, sans que le salarié ait à le demander.
Avis défavorable. C'est au salarié à choisir s'il souhaite ou non être accompagné. On ne peut ignorer son avis.
Sur le principe, je comprends l'objection, mais, cet entretien étant particulièrement important, il est important que le salarié soit accompagné.
La Commission rejette l'amendement.
L'amendement AS227 de M. Denys Robiliard est retiré.
La Commission adopte l'amendement rédactionnel AS219 du rapporteur.
Elle aborde l'amendement AS443 de M. Lionel Tardy.
Je propose d'intégrer l'entretien de début de mandat syndical, que vous proposez de créer, à l'entretien professionnel, qui a lieu tous les deux ans. La multiplication des procédures ne va pas dans le sens de la simplification.
Avis défavorable. Il faut éviter que les deux entretiens se confondent ou que l'un se substitue à l'autre.
La rédaction de l'amendement est prudente. Elle prévoit seulement que l'entretien de début de mandat syndical puisse être réalisé en même temps que l'entretien professionnel.
La Commission rejette l'amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS189 et AS190 du rapporteur.
L'amendement AS231 de M. Denys Robiliard est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement AS425 de Mme Véronique Massonneau.
La valorisation des parcours professionnels des élus, qui est une excellente idée, ne profitera pas aux femmes si on le réserve aux délégués dont la délégation atteint 30 % de la durée du temps de travail, soit quarante-cinq heures par mois. Nous proposons donc de supprimer ce seuil.
Avis défavorable. La faible proportion de femmes parmi les représentants syndicaux justifie certains aménagements, que nous avons évoqués avec la rapporteure pour avis de la délégation aux droits des femmes. Mais l'adoption de l'amendement compromettrait la reconnaissance des parcours professionnels, qui est un des objets de l'article. Dans l'accord qui a failli être validé, le seuil était fixé à 50 %.
Il n'y a pas lieu de favoriser les représentants qui cumulent beaucoup d'heures. En tout cas, si l'on introduit un seuil, celui-ci doit être inférieur à 30 %.
Un engagement syndical important peut freiner la promotion. C'est un dommage qu'il faut compenser.
L'amendement a été adopté cet après-midi par la délégation aux droits des femmes. Si judicieux que soit l'article 2, il ne concernera que ceux qu'on peut considérer comme des cumulards, sans mettre dans ce terme de nuance péjorative, car ce cumul vise à défendre les salariés et le dialogue social.
Le tableau figurant à la page 44 de l'étude d'impact montre qu'on trouve 45 % de femmes parmi les titulaires d'un mandat. Le pourcentage se réduit à 43 % parmi les titulaires de deux mandats et tombe à 35 % parmi les titulaires de trois mandats. Abaisser le seuil encouragerait les femmes à s'investir davantage dans le dialogue social.
Si l'on fixe le seuil à 30 %, on favorisera la valorisation de l'expérience acquise, mais les femmes, moins présentes dans le monde syndical, n'en bénéficieront pas. Peut-être pourrait-on retenir un pourcentage moins élevé, dans la discussion avec les partenaires sociaux.
Avis défavorable. Il n'est pas envisageable de supprimer tout seuil, ce qui reviendrait à proposer deux entretiens pour 600 000 salariés. Réduire le taux de 30 % est délicat. Il serait dommage qu'au nom d'une excellente cause – favoriser l'implication des femmes dans le dialogue social –, on renonce à dédommager les représentants qui ont subi un préjudice important en termes de parcours ou de rémunération. Je rappelle que le taux prévu dans l'accord était de 50 %.
L'amendement AS425 est retiré.
La Commission aborde l'amendement AS212 de M. Gérard Cherpion.
L'article L. 2145-1 du code du travail tel que modifié par l'article 2 du projet de loi, prévoit qu'en fin de mandat le salarié disposant d'un nombre d'heures de délégation annuel au moins équivalent à 30 % de la durée du travail qui lui est applicable, bénéficie, au cours de son entretien professionnel habituel, d'un recensement des compétences acquises au cours du mandat et d'indications sur les modalités selon lesquelles les compétences ainsi acquises seront valorisées.
Le projet de loi semble imposer à l'employeur de reclasser le salarié au terme de son mandat afin de valoriser les compétences acquises en cours de mandat, mettant ainsi à la charge de l'employeur une obligation de résultat. Cette disposition risque de mettre l'employeur en difficulté si le salarié refuse, en vertu de son statut protecteur, le simple changement des conditions de travail qui résulterait du projet de l'employeur ou une modification du contrat de travail, qui ne peut être imposée à aucun salarié sans son accord préalable. L'employeur, qui serait dans l'incapacité de respecter son obligation de résultat, s'exposerait alors à une sanction.
Il faut lever l'ambiguïté résultant de la rédaction du texte de loi en substituant à l'obligation de reclassement, celle d'évoquer avec le salarié, au cours de l'entretien annuel de fin de mandat, ses possibilités d'évolution professionnelle au regard des compétences acquises au cours du mandat.
Avis défavorable. Nulle part le texte ne prévoit l'obligation de reclassement. Il s'agit seulement de recenser les compétences acquises en cours de mandat et de les valoriser pour le bien de l'entreprise comme du salarié. Par ailleurs, il n'est pas question dans le texte de sanctionner l'employeur.
J'approuve que l'on valorise le parcours professionnel des élus et délégués syndicaux, mais je ne comprends pas que, à l'alinéa 2, il ne soit pas question de formation, alors que celle-ci peut être essentielle pour exercer un mandat. D'autre part, est-ce l'employeur ou une instance extérieure à l'entreprise qui établira la liste des compétences acquises en cours de mandat ?
Le droit à la formation figure actuellement parmi ceux des représentants syndicaux. Il va de soi qu'il est maintenu. Par ailleurs, l'alinéa 5 de l'article 3 apporte une précision importante : « Un recensement des certifications ou parties de certification comportant ces compétences et enregistrées au répertoire national des certifications professionnelles est annexé à la liste mentionnée au premier alinéa. »
Il reste toutefois une ambiguïté : à l'issue de l'entretien, à quelle compensation le salarié pourra-t-il prétendre ? Devra-t-il se contenter d'un satisfecit du chef d'entreprise ?
L'alinéa 4 de l'article 3 prévoit que les ministres en charge du travail et de la formation professionnelle établiront une liste des compétences correspondant à l'exercice d'un mandat de représentant du personnel ou de délégué syndical. L'entretien permettra de comparer les compétences acquises par le salarié et celles qui figureront sur la liste.
L'entretien se déroulera-t-il en présence d'un tiers ? Qu'arrivera-t-il si l'employeur et le salarié ne parviennent pas à s'entendre ?
Le salarié pourra, s'il le souhaite, se faire accompagner. Un salarié qui assume un engagement syndical pendant des années acquiert indéniablement des connaissances juridiques ou administratives, ou des compétences, en termes de management. L'entretien permettra de rapprocher les compétences du salarié de la liste établie par les ministres. En cas de désaccord, le salarié pourra faire valoir son parcours grâce à cette liste.
Je partage l'analyse du rapporteur. Je ne comprends pas votre volonté de corseter le parcours d'un salarié devenu permanent syndical. Nous proposons qu'au terme de son mandat il s'entretienne avec son employeur au sujet des compétences qu'il a acquises dans ses fonctions représentatives afin d'obtenir une certification, sur la base d'un système de référence.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 2 modifié.
Article 3 : Égalité d'accès des représentants du personnel et des délégués syndicaux
La Commission est saisie de l'amendement AS232 de M. Denys Robiliard.
Je vais retirer cet amendement, mais souhaiterais revenir sur l'article précédent : si Mme Le Callennec n'en comprend pas le sens, c'est qu'elle a du mal à concevoir que des socialistes puissent postuler que l'employeur peut être de bonne foi… (Sourires.)
L'article 3 prévoit la création d'une certification au profit des salariés ayant été représentants syndicaux. Or, si j'avais cru comprendre que l'exercice d'un seul mandat syndical suffisait pour obtenir cette certification, les échanges que nous venons d'avoir me donnent l'impression d'un effet de contamination entre les articles 2 et 4 d'une part, et l'article 3 d'autre part. M. le ministre peut-il nous confirmer qu'un seul mandat suffira ?
Les certifications qui seront établies après avis de la Commission nationale de certification permettront à l'employeur d'évaluer lors d'un entretien les salariés ayant exercé un mandat de représentant du personnel. Elles s'adresseront a priori à tous les salariés ayant exercé un mandat mais les niveaux de certification diffèreront selon la durée des mandats exercés et l'expérience acquise au cours de leur exercice.
Comment ce dispositif s'articulera-t-il avec l'évaluation professionnelle obligatoire tous les deux ans en entreprise ?
Il s'agit d'un autre dispositif.
Le processus de validation des acquis de l'expérience (VAE) est très encadré : une fois le dossier de demande constitué, un jury se réunit pour l'examiner.
Je n'ai jamais dit que cet article instaurait une VAE, mais bien qu'il créait un dispositif qui s'y apparentait. Et encore une fois, nous ne remettons pas en cause le droit aujourd'hui applicable dans l'entreprise. Comme un parcours syndical permet d'acquérir des compétences, nous proposons que celles-ci puissent être valorisées sur la base d'un référentiel précisé à l'alinéa 4 de l'article 3.
L'amendement est retiré.
Puis la Commission adopte l'article 3 sans modification.
Article 4 : Garantie de non-discrimination salariale pour les représentants du personnel
La Commission adopte l'amendement rédactionnel AS284 du rapporteur.
Puis elle examine les amendements identiques AS320 de Mme Jacqueline Fraysse et AS426 de Mme Véronique Massonneau.
Les représentants des salariés et les syndicalistes doivent bénéficier d'une évolution salariale comparable à celle des autres salariés, quel que soit leur temps de délégation, afin d'éviter toute discrimination, sans quoi les salariés seront dissuadés d'exercer un mandat syndical.
Je partage l'avis de Mme Fraysse. Néanmoins, je retire mon amendement afin de le réécrire d'ici à l'examen du texte en séance publique.
L'objectif visé à l'article 4 n'est pas de couvrir tous les salariés exerçant des mandats syndicaux ou électifs mais de cibler ceux dont l'engagement est tel qu'ils se sont retirés de l'entreprise. C'est parce qu'ils ont été plus longuement éloignés de leur poste de travail qu'ils sont plus pénalisés que les autres. Je suggère donc à Mme Fraysse de retirer son amendement.
On ne peut postuler a priori que l'exercice d'un mandat syndical donne nécessairement lieu à discriminations.
Je ne le postule pas : j'affirme qu'il ne faut pas que cela se produise. Monsieur le rapporteur, je vous concède que plus le nombre d'heures de délégation est élevé, plus le risque de discrimination est important. Mais on ne peut accepter que les salariés qui n'ont que quelques heures de délégation soient pénalisés.
Nous ne visons pas à empêcher des discriminations mais à assurer aux salariés qui n'occupent pas leur poste de travail plus de 30 % du temps de bénéficier d'une évolution salariale comparable à celle des autres salariés. Cette avancée était demandée.
La Commission rejette l'amendement AS320.
L'amendement AS426 est retiré.
Elle aborde l'amendement AS204 de M. Gérard Cherpion.
À la différence des deux amendements précédents, nous proposons de porter à 50 % le taux à partir duquel la disposition prévue à cet article sera applicable.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS369 de M. Dominique Tian.
Il importe de clarifier les termes de l'article L. 2141-5-1 du code du travail : le salarié exerçant un mandat doit voir l'augmentation de sa rémunération déterminée en fonction de l'évaluation portée sur son travail effectif au sein de l'entreprise.
Avis défavorable. Le salarié sera lourdement pénalisé si l'employeur ne retient que le temps qu'il passe dans l'entreprise. Nous considérons que le temps qu'un employé consacre à sa représentation syndicale n'en fait pas moins un salarié de l'entreprise.
La Commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement AS233 de M. Denys Robiliard.
Plutôt que de tenir compte, pour la détection d'une éventuelle discrimination, de l'évolution moyenne des rémunérations, nous proposons de distinguer entre les augmentations générales de salaire, dont un salarié exerçant un mandat aura nécessairement profité, et la moyenne des augmentations individuelles. Nous reprenons en cela les termes de l'article L. 1225-26 du code du travail en matière de congé de maternité.
Les augmentations individuelles de salaire sont directement liées à l'activité personnelle du salarié. Par conséquent, en les prenant en compte, on risque de pénaliser l'ensemble des salariés qui ne bénéficient pas de primes individuelles par rapport aux salariés retenus en dehors de l'entreprise.
Les salariés qui exercent un mandat syndical enregistrent au bout de quelques années un différentiel de rémunération par rapport aux autres salariés. Tout le monde bénéficiant des mêmes augmentations générales, ce différentiel ne peut s'expliquer que par l'absence d'augmentation individuelle. Vous jugez cela normal, monsieur Cherpion, au motif que le salarié en délégation n'est pas présent dans l'entreprise. Pour autant, il en fait bien partie, et nous souhaitons revaloriser les parcours syndicaux. Il n'est pas vrai que les autres salariés seront perdants, car ils bénéficieront d'augmentations individuelles tandis qu'un représentant syndical ne bénéficiera que d'une moyenne de celles-ci. Il s'agit de corriger une réalité illustrée dans toutes les études relatives aux salariés exerçant un mandat syndical.
C'est pourquoi j'émets un avis favorable à l'amendement.
Les délégués syndicaux ne se trouvent absolument pas en dehors de l'entreprise, et par ailleurs on constate effectivement, à la lecture de la jurisprudence de la Cour de cassation, des discriminations liées à l'exercice de mandats syndicaux. Le dispositif proposé vise justement à y mettre un terme.
La Commission adopte l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement AS402 de M. Christophe Cavard.
Nous proposons que les représentants du personnel puissent bénéficier d'une évolution de carrière semblable à celle de leurs collègues.
Nous proposons de retenir la même méthode de calcul que celle retenue pour les rémunérations.
Je souhaite revenir sur l'amendement AS233 de M. Robiliard que nous avons adopté et auquel je suis tout à fait favorable, car M. Cherpion a mis en avant un argument pertinent. Souvent, en effet, dans les entreprises, les sommes consacrées aux augmentations individuelles sont dans une enveloppe fermée, de sorte que si l'on introduit un nouveau droit – qui me paraît tout à fait légitime –, mathématiquement, les autres toucheront un peu moins.
Monsieur Cavard, nous avons adopté tout à l'heure un amendement permettant la reconnaissance de l'expérience acquise lors de l'exercice du mandat syndical. On ne peut pas prévoir en plus une obligation de rattrapage de l'évolution de carrière.
La Commission rejette l'amendement.
Elle aborde l'amendement AS282 de M. Gilles Lurton.
L'article 4 du projet de loi fixe une garantie d'évolution de salaire inconditionnelle : quelle que soit la situation du salarié, il doit bénéficier d'une évolution de rémunération indépendante du travail fourni. C'est pourquoi notre amendement ouvre à l'employeur la possibilité de justifier d'une politique salariale différente à l'égard de ces salariés, en apportant la preuve de raisons professionnelles objectives et non discriminatoires justifiant la différence de traitement salarial. S'il est normal qu'un salarié ne subisse pas de discriminations à raison de ses activités syndicales ou de ses mandats électifs au sein de l'entreprise, la marge de manoeuvre de l'employeur en termes de politique salariale ne peut être réduite à néant.
Avis défavorable. Votre proposition, si elle était adoptée, serait source de contentieux interminables. Je préfère la solution moyenne que nous avons adoptée tout à l'heure.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 4 modifié.
Article 5 : Représentation équilibrée des femmes et des hommes
La Commission examine les amendements AS446 de Mme Sandrine Mazetier et AS162 du rapporteur.
D'une portée symbolique importante, l'article 5 prévoit que, désormais, les listes pour l'élection des délégués des instances représentatives du personnel devront assurer une représentation équilibrée des hommes et des femmes – représentation qui soit le miroir du corps électoral de l'entreprise. Cette disposition a été diversement reçue par les partenaires sociaux qu'a auditionnés la délégation aux droits des femmes. Cette dernière considère que l'on peut aller au-delà de cette représentation miroir et poursuivre un objectif de parité. C'est l'objet de cet amendement qui prévoit pour ce faire une progression en deux étapes électorales.
Mon amendement AS162 poursuit le même objectif : tendre vers une représentation égale des hommes et des femmes. Cependant, j'ai essayé de tenir compte de contraintes objectives qui font que, dans certains métiers et certaines branches professionnelles, il y a un décalage important entre le nombre de salariés de sexes féminin et masculin.
Je propose donc que les listes pour les élections des représentants du personnel soient composées de représentants de sexe différent jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de candidat d'un des deux sexes. Mieux vaut en effet, là où une composition strictement paritaire sera impossible, que cette composition soit paritaire en début de liste et ne le soit plus en fin de liste, s'agissant de candidats qui ont le moins de chances d'être élus. Surtout, il faut éviter que, dans certains endroits, aucune liste ne puisse être déposée. Je propose à Mme Mazetier de se rallier à cet amendement.
Le texte du projet de loi apporte un progrès social aux femmes. Dans le mandat de négociation que j'ai adressé aux partenaires sociaux au mois de juillet dernier figuraient des avancées en matière d'égalité femmes-hommes dans le domaine du dialogue social. Or, c'est un sujet que les partenaires sociaux n'ont pas abordé. On peut trouver notre proposition insuffisante, mais elle a le mérite de viser à créer un droit nouveau. En cas de non-respect de l'obligation de représentation égale, il est prévu une sanction : la perte par les organisations syndicales de leurs sièges. C'est pour cette raison, madame Mazetier, que ces dernières ne sont guère favorables à cette mesure. Cela étant, je comprends l'argument du rapporteur.
Je suggère que nous nous référions plutôt au droit électoral, qui prévoit une stricte parité entre les hommes et les femmes dans la composition des listes, car les formulations proposées tant par Mme Mazetier que par le rapporteur risquent de donner lieu à interprétation.
On pourrait retenir une rédaction disposant que les listes sont composées alternativement d'un candidat de chaque sexe « jusqu'il n'y ait plus de candidat de l'un des deux sexes ».
Je ne me prononcerai pas sur ces questions de formulation, car je trouve la mienne adéquate. Cependant, à exiger des listes strictement paritaires partout, on prend le risque que les syndicats ne puissent les constituer. En imposant la parité en tête de liste, notre amendement aboutira à la désignation d'élus à parité sans que les listes mêmes soient forcément paritaires.
L'amendement proposé par une partie des membres de la délégation aux droits des femmes ne visait pas à imposer la parité dès les prochaines élections, mais à l'instaurer progressivement, sur trois élections successives. Je ne saurais retirer cet amendement, qui émane de la délégation aux droits des femmes, mais celui du rapporteur me semble régler le problème de façon simple et pratique. Il me semble également meilleur que l'amendement AS447, que j'ai le pouvoir, en revanche, de retirer.
L'amendementAS446 ne me paraissant pas applicable en l'état actuel des choses, j'y suis défavorable.
La Commission rejette l'amendement AS446.
Elle adopte l'amendement AS162.
Elle étudie ensuite l'amendement AS403 de M. Christophe Cavard.
Cet amendement prévoit que, dans un délai maximal de trois jours après le dépôt des listes à l'élection des représentants du personnel, un salarié de l'entreprise ou un syndicat peut déposer un recours devant l'autorité administrative s'il constate qu'une liste ne respecte pas les critères de représentation équilibrée entre hommes et femmes prévus à l'article 5. Cela permettra d'éviter le recours au juge.
Dans la mesure où le contentieux préélectoral est maintenu, je vous propose de retirer cet amendement.
Notre objectif est justement d'éviter tout contentieux. Cela étant, il est vrai que l'on risque de contraindre l'autorité administrative à trouver une solution en trois jours. Le rapporteur a pour sa part déposé, à l'alinéa 18, un amendement permettant au juge d'annuler la désignation de candidats élus indûment et de les remplacer automatiquement par les suivants de liste. Cette disposition nous paraît quelque peu brutale, d'où notre proposition qui permet la négociation avec l'autorité administrative.
Cette dernière ne sera pas en état de trancher dans les trois jours.
L'amendement est retiré.
L'amendement AS447 de Mme Sandrine Mazetier est également retiré.
La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS285 et AS287 du rapporteur.
Elle en vient à l'amendement AS198 de M. Gérard Cherpion.
Le contrôle des listes des candidats après l'élection, et donc l'invalidation possible de celles-ci, fait courir un risque d'instabilité. Notre amendement vise donc à instaurer un contrôle a priori de ces listes, comme pour les élections politiques.
À la différence des listes constituées pour les élections politiques, qui sont déposées devant une autorité administrative, les listes de candidats aux postes de représentants du personnel sont déposées auprès de l'employeur. Votre amendement conduirait ce dernier à devoir en évaluer la recevabilité, ce dont il n'a ni les moyens ni les prérogatives.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement de précision AS290 du rapporteur.
La Commission examine l'amendement AS497 du rapporteur.
Cet amendement, auquel M. Cavard a fait allusion tout à l'heure, dispose que le juge peut annuler l'élection d'autant de candidats en surnombre du sexe surreprésenté qu'il en existait au moment de la présentation de la liste de candidats, et que cette annulation s'appliquera à ces élus en commençant par le dernier de la liste puis en remontant l'ordre de cette liste. Ce système peut paraître curieux aux élus politiques que nous sommes, car de deux choses l'une : soit nos listes électorales sont recevables, soit elles ne le sont pas. Mais, pour les raisons évoquées tout à l'heure, nous ne pouvons utiliser le même dispositif en matière syndicale qu'en matière politique, d'où cet amendement qui prévoit un contrôle a posteriori.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle se saisit de l'amendement AS163 du rapporteur.
L'amendement AS162 concernait les délégués du personnel tandis que celui-ci, qui a le même objet, concerne les représentants du personnel au comité d'entreprise.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 5 modifié.
La séance est levée à une heure.