Séance en hémicycle du 11 juin 2013 à 21h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'ordre du jour appelle les questions à M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Je vous rappelle que la Conférence des présidents a fixé à deux minutes la durée maximale de chaque question et de chaque réponse, sans droit de réplique.

Je donnerai la parole consécutivement aux trois premiers intervenants de chaque groupe inscrit – ou à tous pour ceux qui en ont moins de trois –, pour permettre à tous les groupes de pouvoir intervenir dans des délais compatibles avec l'organisation de notre séance de ce soir.

Nous allons commencer par trois questions du groupe UMP.

La parole est à M. Antoine Herth.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le président, monsieur le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, les discussions sur la réforme de la PAC entrent dans leur dernière ligne droite. Il se dit que la présidence irlandaise souhaite conclure les travaux avant la fin juin. Je regrette cependant que l'Assemblée nationale soit si peu informée de l'évolution des négociations. Depuis le vote d'une résolution par les commissions des affaires économiques et des affaires européennes, c'est en quelque sorte le silence radio. Le projet d'accord est-il si défavorable à la France qu'il vaudrait mieux ne pas en parler ? Ou bien considérez-vous que seul le Parlement européen mérite d'être impliqué dans les discussions, en vertu de la nouvelle procédure du trilogue Conseil-Commission-Parlement européen ? Monsieur le ministre, vous avez l'occasion d'éclairer l'Assemblée sur l'avancement de ce dossier.

Votre réponse est d'autant plus attendue que vous avez, à plusieurs reprises, annoncé le dépôt par le Gouvernement d'un projet de loi dit d'avenir pour l'agriculture, repoussé depuis à 2014. Là encore, la représentation nationale est sevrée d'informations sur le contenu de ce projet de loi en cours d'élaboration. Quelle en sera la finalité ? A-t-il une vocation défensive pour amortir le choc d'une politique agricole commune mal négociée ou pour prendre acte d'une forme de repli sur nous-mêmes, sur nos marchés et nos filières de proximité ? Dans ce cas, la loi n'aurait d'autre ambition que d'administrer le déclin d'un des rares secteurs de l'économie nationale qui pèse positivement dans la balance commerciale.

Ou alors, allez-vous choisir l'offensive ? Des perspectives de marché sont à notre portée, à condition d'avoir un esprit de conquête en renforçant la structuration des filières, en apportant une réponse aux distorsions de concurrence, en particulier s'agissant des coûts de main-d'oeuvre, et en simplifiant les contraintes administratives qui bloquent l'esprit d'initiative ; bref, en votant une loi pour soutenir la compétitivité de l'agriculture française.

Monsieur le ministre, de quel côté penchez-vous ?

Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, je vois dès la première question qu'il s'agit d'aborder avec objectivité l'avenir de l'agriculture. Je crois que sur tous ces bancs, on partage mon objectif de donner toute sa chance à l'agriculture française.

Vous avez évoqué la réforme de la politique agricole commune. Il se peut en effet que la négociation qui a lieu dans le cadre du trilogue soit bouclée lors du Conseil de l'agriculture qui se tiendra à Luxembourg du 24 au 26 juin, peut-être jusqu'au 27 juin.

L'objectif de la France est clair depuis le départ. D'abord, le Président de la République a négocié un budget pour la PAC. Vous avez oublié de souligner que ce budget est pratiquement équivalent à celui de la période précédente, alors que beaucoup de gouvernements, en particulier ceux de votre sensibilité, souhaitaient le réduire de manière drastique. La France a défendu ce budget. Elle l'a fait pour l'agriculture française, mais aussi pour l'agriculture à l'échelle européenne.

Les enjeux sont assez simples : il s'agit de revenir sur des choix qui avaient été faits, en particulier au moment du bilan de santé et en 2003, sur le fameux découplage des aides. L'objectif est d'assurer un équilibre entre la distribution des aides au secteur des céréales, aux secteurs des autres productions végétales et surtout au secteur de l'élevage, qui souffre aujourd'hui. D'où le débat sur le couplage des aides, d'où la question de la prime sur les premiers hectares et d'où aussi l'ensemble des questions posées, dans le cadre de l'OCM unique, par un certain nombre de rapports au Parlement. Il faut donner un cadre de régulation nouveau à l'agriculture à l'échelle européenne. Voilà l'objectif. Il a toujours été transparent : à chaque fois que je me suis exprimé, y compris devant les différentes commissions, j'ai donné les éléments du débat. Il se trouve qu'aujourd'hui, nous sommes dans un trilogue Commission, Conseil et Parlement européen, en application d'un traité négocié il y a quelques années, mais nous sommes sur le point de parvenir à un accord.

J'en reviens à l'objectif : oui à la compétitivité, mais pour une agriculture capable de la gérer avec sa diversité. Vous semblez réduire la compétitivité uniquement à une question de coût, mais la compétitivité de l'agriculture, c'est aussi sa capacité à développer l'ensemble de ses potentiels, y compris ce qui est hors coût : quels sont les choix qualitatifs à faire, les enjeux à porter ? Si je regarde ce qui a été fait pendant dix ans, je constate qu'on n'en a pas beaucoup parlé. C'est tout le débat sur l'agroécologie, sur la capacité de la France à combiner l'économie et l'écologie. C'est une belle perspective et nous recherchons une position de leadership pour la France dans ce domaine.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, ma question porte sur la politique viticole dans notre pays. L'AFIT, l'Association française d'ingénierie touristique, a fait une étude extrêmement sérieuse qui a démontré qu'un touriste sur deux vient chez nous parce qu'on a du bon vin et de la gastronomie. Le secteur viticole représente 500 000 emplois, 87 000 exploitations de type PME ; c'est le seul secteur vigoureux aujourd'hui, avec une balance commerciale positive, au-delà de 7 milliards d'euros.

Bien sûr, on peut comprendre que des attaques viennent de l'extérieur, comme les chinoiseries de la semaine dernière – j'assume le terme –, mais quand elles viennent de chez nous, de notre administration, que penser ? Trois rapports ont été publiés la semaine dernière. Le premier propose une taxation au degré d'alcool, ce qui aboutirait inévitablement à une taxation supplémentaire sur le vin. Le deuxième évoque le CMP, le Conseil de modération et de prévention, mais on ne le voit plus – alors que je sais que vous y êtes favorable : aucune orientation n'est fixée aujourd'hui s'agissant de cette instance. Le troisième rapport traite de la publicité sur internet en confondant, ce que je regrette beaucoup, les alcools durs avec le vin, et propose l'élargissement de la loi Évin.

Monsieur le ministre, je voudrais entendre votre position, officielle, qui sera donc celle du Gouvernement, sur ces trois rapports et votre analyse de la situation.

Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, sur cette question du vin, je rappelle tout d'abord que la position de la France a été très clairement affirmée pour revenir sur certaines décisions qui avaient été prises. Je pense par exemple aux droits de plantation. J'imagine que vous feuilletez de temps en temps les journaux consacrés à la viticulture, et vous savez que j'ai pris des positions extrêmement claires sur les questions que vous avez mentionnées. Elles ont été évoquées dans des rapports, mais il n'a jamais été question, ni pour le Gouvernement ni pour le ministère de l'agriculture, d'engager des procédures qui iraient dans le sens d'une fiscalisation renforcée du vin. Au contraire. Vous l'avez rappelé : le tourisme est lié à notre gastronomie et à notre vin, et la balance commerciale est excédentaire de 7 milliards dans le secteur viticole. Il est vrai que nous aurons à réfléchir sur le sujet car notre balance excédentaire augmente en valeur mais diminue en volume alors que la consommation de vin continue d'augmenter dans l'ensemble du monde. On a donc des questions stratégiques à se poser. Mais j'ai pris en ce domaine des positions claires et répétées, et c'est ce que je fais encore ce soir devant vous : on doit rechercher la qualité, on doit rechercher l'excellence. Le vin fait partie de notre patrimoine, de notre tradition. C'est un atout, c'est un attrait, vous l'avez dit. Dès lors, tout doit être fait pour le développer, tout en ayant parfaitement conscience que s'agissant de la consommation d'alcool, il faut rester dans le cadre défini depuis déjà quelques années pour privilégier la qualité plutôt que la quantité.

Je vous ai répondu clairement : il est hors de question d'entrer dans un débat sur la taxation du vin. Certains rapports ont pu l'évoquer, mais la position du Gouvernement est claire sur ce point.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, le Var est certes connu pour sa viticulture, mais le pastoralisme constitue également une part importante de son activité agricole puisqu'on dénombre environ 1 000 entreprises d'élevage en région Provence-Alpes-Côte-d'Azur. Néanmoins, les éleveurs traversent de grosses difficultés économiques, aggravées par deux phénomènes que vous connaissez bien : la prédation des troupeaux par le loup ; le manque d'abattoirs de proximité.

S'agissant du loup, le plan d'action national 2013-2017 a certes prévu d'améliorer les mesures de protection, notamment par un accroissement du nombre d'autorisations de prélèvements, mais les difficultés restent grandes et les mesures visant à limiter les dégâts sur les troupeaux causés par ce prédateur demeurent inefficaces. Ainsi, d'année en année, de nouvelles meutes sont répertoriées et les attaques de troupeaux se multiplient. Le loup a ainsi fait 570 victimes dans les troupeaux domestiques du Var en 2012. L'État consacre des sommes toujours plus importantes à la protection et à l'indemnisation : plus de 9 millions d'euros en 2009, et ce sans résultats probants. Quelles mesures comptez-vous donc prendre, monsieur le ministre, pour améliorer la défense des troupeaux ?

Le second volet de ma question porte sur les difficultés économiques chroniques des abattoirs en France. Le contrôle de leur mode de gestion, extrêmement contraint, ne permet pas l'implantation de nouveaux équipements de ce type, obligeant ainsi les éleveurs à amener les bêtes à des abattoirs distants de plusieurs dizaines de kilomètres, voire quelquefois de plusieurs centaines de kilomètres. Ces frais de déplacement alourdissent de façon considérable les charges d'exploitation des éleveurs et diminuent les tonnages de viande traités dans les abattoirs. Cette politique de concentration des outils d'abattage prive ainsi consommateurs et producteurs d'un modèle économique de circuits courts profitable à tous. Afin de pallier le manque d'abattoirs de proximité, envisagez-vous de donner aux abattoirs permanents l'autorisation d'exercer dans des sites d'abattage temporaires ?

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, vous avez évoqué deux sujets : le premier concerne la question du loup et du plan adopté, il y a quelques semaines, pour donner aux éleveurs des moyens supplémentaires à la fois pour se protéger, pour dissuader et aussi pour prélever. C'est la première fois qu'un accord obtenu dans le cadre du plan loup prévoit un prélèvement de plus de vingt-quatre loups.

Surtout, après une longue discussion avec des organisations de protection de l'environnement et les éleveurs, nous avons essayé de mettre en place un système à la fois réactif et actif, en développant sur place un réseau de chasseurs auxquels nous pourrons recourir pour chasser l'animal.

Actuellement, les prélèvements se font dans des délais extrêmement longs, avec beaucoup de retard. Pour mener une action efficace, nous devons être à la fois dissuasifs et réactifs, ce qui passe en particulier par la formation des chasseurs locaux, car chercher des louvetiers prend du temps. C'est cela que nous devons et que nous allons mettre en place pour assurer une meilleure protection et surtout pour entrer dans un processus de dissuasion beaucoup plus efficace que ce qui a été fait jusqu'à présent.

J'ai parfaitement conscience des difficultés de mise en oeuvre mais, avec le ministère de l'environnement, nous serons attentifs à faire en sorte que tout cela soit efficace rapidement.

Le deuxième point concerne les abattoirs. Le constat que vous faites est vrai. Ce sont des activités économiques extrêmement fragiles, avec des rentabilités financières extrêmement faibles, depuis des années. De plus, les réglementations européennes sur l'abattage impliquent des investissements assez lourds. Les rentabilités faibles conjuguées à des investissements lourds induisent de faibles retours sur investissements et donc des difficultés dès qu'il y a un problème de production ou de quantité d'abattages.

En revanche, et j'avais déjà répondu à une question sur ce sujet, il n'est actuellement pas possible de transformer des abattoirs temporaires en abattoirs permanents. Nous devons réfléchir à des schémas régionaux d'abattoirs qui permettent de structurer le tissu des abattoirs pour faire en sorte, comme vous l'avez évoqué, que l'on soit capable de traiter et d'abattre des animaux sans leur faire faire des kilomètres, ce qui fait aussi partie des objectifs en termes de bien-être. Nous sommes en train de réfléchir au schéma global qu'il va falloir mettre en oeuvre, en particulier dans votre région PACA.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous en venons au groupe UDI.

La parole est à M. Yannick Favennec.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, ma question à laquelle j'associe mon collègue de la Lozère, Pierre Morel-A-L'Huissier, porte sur les retraites agricoles.

Malgré la mise en oeuvre, sous la précédente législature, de mesures de revalorisation des retraites, un écart important persiste à ce jour entre le montant des retraites agricoles et celui des retraites du régime général, alors que l'exploitant agricole appartient justement à l'une des catégories professionnelles qui connaît le plus d'aléas et des débuts de carrière parfois très difficiles.

Il n'est plus acceptable que des retraités ayant cotisé une carrière complète aient une pension de retraite inférieure à l'objectif légal de 75 % du SMIC. Les retraites agricoles sont en effet trop faibles : elles n'atteignent que 772 euros par mois pour les anciens exploitants et 534 euros par mois pour leurs conjoints. Je le constate régulièrement dans mon département de la Mayenne.

Plus de deux retraités sur trois perçoivent des retraites inférieures au minimum vieillesse. Avec une retraite aussi faible, un agriculteur ne peut envisager sereinement un avenir qui le verra sous le seuil de pauvreté.

Les anciens exploitants subissent, en outre, un certain nombre d'injustices par rapport aux salariés, notamment en ce qui concerne le calcul de leur retraite. Il est en effet basé sur l'intégralité de leur carrière, alors qu'il porte sur les vingt-cinq meilleures années pour les salariés du secteur privé et sur les six derniers mois pour les agents de la fonction publique.

Les conjoints survivants, et en particulier les femmes d'anciens exploitants, sont souvent aussi dans une situation financière très précaire.

Alors que le Gouvernement va engager une nouvelle réforme des retraites, pouvez-vous m'indiquer, monsieur le ministre, quelles mesures vous entendez prendre pour améliorer la situation des retraités agricoles et prendre en compte les situations les plus difficiles, notamment celles des conjoints et des veuves ?

Les attentes de ces retraités sont d'autant plus fortes, monsieur le ministre, après l'annonce de la mise en oeuvre d'un plan quinquennal pour les retraites agricoles et d'un dispositif renforcé d'accompagnement pour les conjoints survivants. À moins qu'il ne s'agisse là que d'un effet d'annonce…

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, sur la question des 75 % du SMIC pour les retraites, je voudrais quand même vous rappeler – et je parle ici devant Germinal Peiro – que l'objectif avait été atteint en 2002 et qu'il a été ensuite oublié pendant dix ans, ce qui explique l'écart important que l'on constate aujourd'hui entre le niveau moyen des retraites et 75 % du SMIC.

Le Président de la République a pris des engagements sur le sujet. Comme vous le savez, une négociation globale sur les retraites va débuter et les retraites agricoles s'inscrivent dans ce débat. Des engagements avaient été pris concernant les 75 % du SMIC et la retraite complémentaire obligatoire. Deux mesures ont déjà été intégrées dans la dernière loi de finances. Nous devons progresser. Comme vous, je considère que le niveau des retraites agricoles est l'un des plus bas…

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

…et nous devons progresser.

Mais avouez – et je n'utilise pas souvent cet argument – que le retard que nous avons pris est largement imputable au fait que pendant dix ans, vous avez oublié de revaloriser les retraites.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Je suis désolé de le dire, mais c'est quand même la réalité.

Exclamations sur les bancs du groupe UDI.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

À partir de là, nous devons nous fixer des objectifs avec l'ambition de relever ce niveau des retraites…

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

…et d'ouvrir en particulier sur une partie de ces retraites complémentaires, des retraites complémentaires pour les conjoints. Cela va être l'objectif et nous y travaillons dans le cadre de la négociation globale qui est engagée.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, l'avenir de l'agriculture française passe par l'amélioration de sa compétitivité, et le rôle de l'État est d'aider l'agriculture mais aussi l'agro-industrie à retrouver une compétitivité qui s'est constamment dégradée depuis plus de vingt ans, au point de rendre la France déficitaire dans certains domaines, par exemple en matière de fruits et légumes.

Je souhaiterais vous interroger sur deux éléments concernant la compétitivité.

Tout d'abord, le Gouvernement a pris l'année dernière deux mesures défavorables pour l'agriculture, que ne compense pas le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi : la suppression des allégements de charges sociales pour l'emploi de travailleurs agricoles en CDI ; la réduction des exonérations de charges pour les travailleurs saisonniers, recentrées sur les bas salaires entre 1 et 1,25 SMIC. Le CICE ne compense pas, car les exploitations agricoles non soumises à l'impôt sur les sociétés – soit l'immense majorité d'entre elles – sont exclues de son bénéfice. Seules les coopératives, suite à un amendement, devraient pouvoir en bénéficier.

Ma première question est double. Le Gouvernement envisage-t-il d'étendre le CICE aux exploitations agricoles non soumises à l'IS ? Le Gouvernement a-t-il obtenu l'accord de Bruxelles pour faire bénéficier les coopérations agricoles et viticoles du CICE ?

En tant que rapporteur spécial de la mission « Agriculture », je vous avais proposé l'année dernière un schéma de sortie de la défiscalisation des biocarburants en deux ans – 2014 et 2015. Hélas, cet amendement n'avait pas eu l'accord du Premier ministre. Aussi, ma seconde question est toute simple : dans le projet de loi de finances pour 2014, allez-vous obtenir une sortie lente ou, comme le souhaite le ministre du budget, très rapide, de la défiscalisation et un traitement à la parité énergétique des biocarburants ?

Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, nous avons déjà eu de nombreux débats sur la question des TODE et de l'allègement de 1 euro par heure pour les salariés permanents. Vous aviez adopté une mesure qui n'a jamais été appliquée et qui était en négociation au niveau de la Commission européenne. Comme je vous l'avais signalé il y a quelque temps, au vu des conditions juridiques dans lesquelles elle s'inscrit au niveau européen, cette mesure n'aurait pas pu être appliquée.

Sur la question des TODE, j'en reviens au débat que nous avons eu et qui nous a beaucoup occupés il fut un temps, nous avons maintenu l'objectif concernant le travail occasionnel, ce qui était très important, à hauteur de 506 millions d'euros, alors qu'il avait été constaté une dépense avoisinant les 700 millions d'euros.

Nous avons donc maintenu cette exonération. S'y est ajouté le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi fixé à 4 % pour 2013 et qui sera à 6 % en 2014.

En ce qui concerne le CICE pour les coopératives, le sujet est actuellement notifié à Bruxelles et nous avons bon espoir d'obtenir gain de cause.

Quant aux exploitations non soumises à l'impôt sur les sociétés, celles qui sont imposées au forfait, elles ne pourront pas bénéficier du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi. Par contre, celles qui sont assujetties à l'IS et qui sont hors forfait le pourront.

En coopération et hors coopération, notre objectif est que le bénéfice du CICE permette des exonérations supérieures de 10 %, 15 %, 20 % ou 25 % à celles obtenues auparavant avec les seuls TODE. C'est un progrès en termes de compétitivité, et il est nécessaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, vous n'ignorez pas les difficultés persistantes que subissent les producteurs laitiers s'agissant de la fixation du prix du lait. Le constat est désormais bien connu : avec un lait sous-payé à la production, c'est toute une filière qui est fragilisée en France.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je rappellerai ainsi que lors de cet hiver, notre pays a enregistré une baisse des volumes collectés en lait de vache, résultat d'un effet ciseau entre la baisse tendancielle de rémunération au producteur et la hausse des charges et des produits amont, comme les aliments du bétail.

Durant l'année 2012, les 1 000 litres de lait ont été payés 312 euros, alors que l'équilibre ne peut être atteint en dessous des 340 euros, comme vous le savez, monsieur le ministre. C'est dire l'écart que doivent assumer les agriculteurs. Ils ne pourront pas supporter cela longtemps. D'ailleurs, le nombre d'exploitations en grande difficulté va croissant.

Monsieur le ministre, dans le contexte compliqué de la réforme de la PAC, les inquiétudes sont grandes, et nous ne pouvons que les partager. Nous vivons une crise structurelle.

Il est donc indispensable que les coûts de production soient enfin intégrés dans la chaîne des prix par les transformateurs et la grande distribution. Il n'est pas normal que les producteurs laitiers soient la seule variable d'ajustement des turbulences actuelles sur les marchés du lait. Ils ne doivent pas être les victimes de cette guerre commerciale à laquelle se livrent les fabricants de produits laitiers et la grande distribution, dont les marges sont absolument scandaleuses.

Plus que de mesures ponctuelles, les producteurs ont besoin de mesures sur le long terme et, très concrètement, d'un respect des règles applicables en termes de fixation de prix. Depuis deux mois, monsieur le ministre, certains industriels reprennent des libertés…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…et ne respectent pas les délais d'annonce de leurs prix de collecte du lait, avant le début de chaque mois. Cette attitude est absolument inacceptable. Quel acteur économique accepterait de travailler sans connaître le prix de sa rémunération ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Aussi, monsieur le ministre, nous vous demandons d'intervenir pour que cessent de telles dérives et de nous informer des mesures que le Gouvernement entend proposer pour remédier à la crise actuelle. Je vous en remercie par avance.

Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, je voudrais d'abord faire une remarque sur la question de la relation entre la grande distribution, les transformateurs et les producteurs. Vous allez avoir à débattre d'une réforme de la loi de modernisation de l'économie qui avait été votée, peut-être par vous…

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Soit. Vous ne l'avez pas votée.

…et qui avait donné beaucoup de pouvoir à la grande distribution et à la transformation. Nous allons corriger cette loi qui a engendré les difficultés actuelles. Rappelons d'ailleurs que la crise du lait a commencé en 2008. C'était l'époque des fameuses grèves du lait, avec l'épandage de lait dont nous nous souvenons, les uns et les autres.

Aujourd'hui, que faire ? D'abord, modifier la loi, ce qui donnera lieu à un débat.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Je vous invite bien sûr à voter pour les modifications de cette loi.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

À cette occasion, vous irez, j'en suis sûr, dans le sens des producteurs. Ce sera un vrai changement.

Deuxième élément important : sans attendre la modification de la loi, nous avons engagé une négociation et une médiation. Nous avons organisé une table ronde sur la question laitière, réunissant la grande distribution, les transformateurs et les producteurs, c'est-à-dire l'ensemble des acteurs, afin de trouver la voie d'une négociation et d'une médiation pour revaloriser le prix du lait. Nous avons obtenu 25 euros de plus pour les 1 000 litres, de la part de la grande distribution, en pied de facture. Pour être transmise aux producteurs, la hausse doit passer par les transformateurs.

Les députés ont aussi une responsabilité. Cet accord, cette médiation, a abouti aux 25 euros pour les 1 000 litres. Elle commence à s'appliquer. Il semble que, pour l'ensemble des départements, l'on soit autour de 70 %…

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Certains ne le respectent pas. Mesdames et messieurs les députés, dans ce débat, le Gouvernement a pris ses responsabilités, il a mis en place une médiation, et la hausse de 25 euros pour 1 000 litres qui a été obtenue doit s'appliquer. À chaque fois que vous constatez que cet accord n'est pas appliqué dans votre département, vous devez nous le signaler…

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

…pour que l'on fasse en sorte que cet accord, qui a été durement obtenu, soit appliqué pour les producteurs.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

En conclusion, je complète ma réponse à M. de Courson : je suis favorable à une sortie proportionnelle et progressive des exonérations de cotisations sur les bio-agrocarburants.

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Nous en venons aux questions du groupe écologiste.

La parole est à Mme Danielle Auroi.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'aide alimentaire aux plus démunis est, vous le savez tous, l'objet d'âpres débats dans le cadre des discussions du cadre financier pluriannuel européen.

Les associations – Croix-Rouge, associations d'aide alimentaire, Banque alimentaire, Restos du coeur – sont très mobilisées et nous avons été interpellés pour le maintien de cette aide mais aussi pour proposer des pistes nouvelles, reliant agriculture et aide alimentaire, ce qui sera l'objet de ma question.

Un temps menacé, le principe de cette aide a été maintenu, avec difficulté, dans le cadre du fonds de cohésion, avec la création du FEAD, fonds européen d'aide aux plus démunis. Ce maintien est certes fondamental ; je vous rappelle que le programme précédent, le PEAD, programme européen d'aide aux plus démunis, intégré à la PAC, représentait entre 23 % et 55 % du budget annuel des principales associations nationales d'aide alimentaire.

Le budget alimentaire des ménages les plus pauvres est très faible. Il est inférieur à 5 euros par jour pour 10 % plus pauvres. En outre, l'alimentation pèse plus lourd dans le budget de ces ménages, dont elle représente le deuxième poste après le logement. Ces personnes subissent donc une véritable insécurité alimentaire, en termes de quantité autant que de qualité. En effet, une calorie de fruits ou de légumes coûte cinq fois plus cher qu'une calorie d'autres aliments. Bien entendu, tout cela a des répercussions sur leur santé, du fait d'une surconsommation de produits gras et sucrés et d'une sous-consommation de produits frais.

J'en viens à ma question, monsieur le ministre.

Il nous a semblé, lors de la table ronde organisée par notre commission avec les associations concernées, qu'une des pistes à envisager serait de soutenir des partenariats locaux entre agriculteurs et associations de solidarité, afin de permettre l'accès à des produits de qualité tout en développant les activités rurales et l'emploi, notamment dans l'agriculture biologique ou de proximité.

Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer les pistes de réflexion qui pourraient être mises en oeuvre afin d'avancer dans cette direction, qu'il s'agisse de mesures déclinées de la PAC ou de mesures intégrées dans la future loi d'orientation agricole ?

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Madame la députée, vous savez que, sur ce sujet du PEAD puis du FEAD, la mobilisation du Gouvernement français a été totale pour défendre un budget. On est passé du budget de la politique agricole commune à celui du fonds social européen, suite à des dénonciations émanant de pays qui refusaient que cette aide soit versée à l'échelle européenne. Le cadre juridique pour garantir la pérennité de ce budget n'est pas assuré. Il faudra être extrêmement vigilant, et l'Assemblée nationale a son rôle à jouer, pour faire en sorte que ce que le Président de la République a obtenu, avec 2,5 milliards d'euros sur le FEAD, soit pérennisé et sécurisé juridiquement, je le dis ce soir.

Vous évoquez ensuite la possibilité d'engager une réflexion sur des circuits qui pourraient associer beaucoup plus localement les associations qui luttent contre la pauvreté et pour l'accès à la nourriture. La question est effectivement très importante, et vous avez raison de rappeler que cet accès à une nourriture de qualité est essentiel, à la fois pour l'éducation et pour le développement. C'est un point majeur, sur lequel il faut qu'on s'organise. On sait l'action qu'a menée Guillaume Garot en ce qui concerne la lutte contre le gaspillage, en instaurant des mécanismes de récupération et de transformation d'un certain nombre de produits, en liaison avec des associations. De même, il faut que nous soyons capables d'utiliser le fonds européen mais aussi et surtout de mobiliser localement, sur des circuits courts, l'ensemble des acteurs.

Nous devons, dans ce débat très important, qui concerne notamment le rôle des collectivités locales dans le cadre des cantines, trouver un moyen d'éviter que, en France et en Europe, dix-huit millions de citoyens soient aujourd'hui juste au-dessous du seuil de malnutrition. Voilà l'enjeu. Je crois qu'il mérite toute notre mobilisation.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, je souhaite échanger sur la question cruciale du foncier agricole.

Vous vous êtes engagé à réduire, durant votre mandat, le taux effréné d'artificialisation des terres. On le sait, disparaît tous les sept ans une surface de terres agricoles correspondant à la superficie d'un département. On reconnaît peut-être moins les dégâts que cause ce phénomène sur la résilience des sols et le cloisonnement des espaces naturels. L'artificialisation entraînera une baisse des terres cultivables dans un contexte de pression sur le secteur agricole et une augmentation des déplacements liés à une fragmentation des habitats.

La tendance est encore à considérer le foncier agricole, ou les zones naturelles et humides, comme une réserve inépuisable. Il est donc urgent de protéger ces terres, pour installer de nouveaux agriculteurs et mieux les répartir pour favoriser des pratiques agricoles durables.

La conférence environnementale a fixé l'objectif de « zéro artificialisation des terres ». Cet objectif devra être atteint dans le cadre d'une coopération entre le ministère du logement et de l'égalité des territoires, et avec les ministres en charge de l'environnement et de la décentralisation. Cela ne sera pas facile. Les conflits d'usage sont forts, avec une volonté d'étendre les villes et les zones commerciales.

De plus, à cette question est liée celle des retraites des agriculteurs. Le foncier constitue une assurance retraite pour ces derniers, dont le niveau des pensions est aujourd'hui scandaleusement faible.

Se dégagent des pistes, que je porterai dans le débat : la révision et la densification de l'urbanisme commercial ; la révision de la gouvernance et des priorités des SAFER ; la sanctuarisation des terres autour des villes, souvent les plus fertiles ; l'adaptation de la fiscalité sur les friches, afin d'inciter les propriétaires à les faire cultiver, et l'affectation du produit de cette taxe au financement de l'augmentation des retraites agricoles les plus faibles.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous exposer vos actions, vos objectifs et les points sur lesquels vous serez intransigeant sur la gestion et la préservation du foncier agricole ?

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Vous avez, madame la députée, évoqué le sujet de l'artificialisation des terres agricoles. Abordons-le en évoquant les différentes facettes de cette consommation de terres agricoles.

La première, c'est l'urbanisation des infrastructures. L'objectif – et le texte qui vous sera présenté par Cécile Duflot ira dans ce sens –, c'est de limiter, dans la conception même de l'urbanisation, la tendance à la consommation, voire au gaspillage des terres.

Vous avez parlé des zones commerciales. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Comment pouvons-nous, en France, faire des parkings à plat alors que, dans d'autres pays européens, cela fait déjà longtemps que l'on fait des parkings en hauteur, voire souterrains ? Il faut qu'on change cela.

Deuxième point, il faut que l'on puisse organiser, en face de l'urbanisation, une gestion des terres agricoles. Les SAFER doivent rester des outils. Dès lors, il faut assurer aux SAFER une meilleure gouvernance. C'est ce que vous évoquez, et je suis aussi d'accord avec vous sur ce point.

Je vous rappelle que l'observatoire des terres agricoles avait été prévu dans le cadre de la dernière LMAP. À mon arrivée au ministère, il n'avait toujours pas été installé. Il l'a été il y a quelques semaines. Nous allons maintenant avoir des chiffres précis sur cette consommation des terres agricoles, pour pouvoir éviter, précisément, leur artificialisation.

Dans ce débat, il y a donc à la fois l'urbanisation et la limitation de la consommation des terres, et, dans le monde rural, je le dis ici, à tous les députés, qui sont tous concernés, la question des lotissements. Il va falloir que l'on réfléchisse à l'idée des éco-bourgs. Comment évite-t-on de consommer de l'espace ? Nous devons tous être comptables de cette lutte contre l'artificialisation des terres. J'allais même dire que l'agriculture elle-même a son rôle à jouer. Je ferai des propositions pour que, par exemple, lorsqu'on construit de nouveaux bâtiments d'élevage, on se soucie d'abord de détruire les anciens. J'ai trop d'exemples en tête, en particulier en Bretagne, de vieux bâtiments qui restent à côté de nouveaux qu'on a construits. Je vais lancer un plan. C'est ce que j'ai fait dans la Sarthe, avec un certain nombre de producteurs de poulets de label Loué et un syndicat. Un contrat a été conclu avec une société de traitement de déchets pour qu'on soit capable de déconstruire des bâtiments avant d'en construire. Cela aussi entrera dans l'objectif d'une moindre consommation de terres agricoles.

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Nous en venons aux questions du groupe RRDP.

La parole est à M. Joël Giraud.

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Monsieur le ministre, c'est en tant que nouveau président de la commission permanente du Conseil national de la montagne que je m'adresse à vous. Les hommes se sont toujours adaptés au milieu naturel et à ses contraintes, pour cultiver, élever et se nourrir. Ils ont montré combien ils étaient ingénieux pour trouver des solutions collectives pour rendre les terres fertiles.

En montagne, les canaux qui utilisent la pente et les lois de la gravité pour irriguer les parcelles agricoles, constituent non seulement un marqueur de paysage à haute valeur patrimoniale et pédagogique, mais aussi une solution qui reste adaptée aux enjeux du partage de l'eau et du maintien d'une agriculture locale de qualité. Ces ouvrages d'art, parfois longs de plusieurs kilomètres, qui se sont développés depuis le Moyen Âge contribuent également à la lutte contre l'érosion. Ils sont gérés collectivement, et leur mode de gouvernance collective est exemplaire à l'heure où l'on tente de faire dialoguer les différents usagers autour de cette ressource essentielle.

Dans tous les massifs de l'Hexagone, les canaux sont en train de s'assécher. Si le Gouvernement ne prend pas la mesure de cette catastrophe, ces savoirs écologiques paysans, les canaux d'irrigation, ne seront bientôt plus qu'un doux souvenir. Pourtant, ces canaux, qui ont survécu aux mutations les plus profondes – l'arrivée du tracteur, le remembrement –, constituent l'un des outils d'une agriculture de montagne durable.

Alors que nos partenaires italiens, autrichiens, allemands ou suisses ont bien compris la nécessité d'entretenir, de valoriser et d'utiliser ces systèmes d'irrigation séculaires, la France a fait des choix difficilement compréhensibles pour les élus locaux et pour les agriculteurs qui, malgré les difficultés, s'accrochent à leurs montagnes. Depuis la loi sur l'eau du 30 décembre 2006, qui généralise la redevance pour prélèvement de la ressource en eau, les systèmes d'irrigation qui prélèvent autant qu'ils restituent au milieu naturel l'eau qui descend des sommets sont aujourd'hui pénalisés voire condamnés. Cette redevance, dont l'application est complexe, a déjà découragé bon nombre d'associations syndicales agréées, associations qui sont animées par des bénévoles qui ont en charge l'entretien et la gestion collective de nombreux canaux, sous un mode qui est appelé celui de la corvée. Le résultat est contreproductif : quand il n'y a plus d'associations, il n'y a plus de redevance.

Ma question, monsieur le ministre, est la suivante. Dans le cadre de la loi sur l'agriculture, la spécificité des systèmes d'irrigation traditionnels et gravitaires sera-t-elle prise en compte ? La loi permettra-t-elle enfin de reconnaître l'utilité des canaux qui participent à la fois à la préservation de la biodiversité, à la lutte contre l'érosion, au maintien d'une agriculture de proximité ? La loi va-t-elle instaurer, avant qu'il ne soit trop tard, une exonération de redevance pour ces canaux ? Si tel n'est pas le cas, je déposerai une nouvelle fois, comme ma collègue Frédérique Massat, présidente de l'Association nationale des élus de la montagne, et d'autres députés ici présents, un amendement en ce sens. En ce cas, apporterez-vous votre soutien à cet amendement ?

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, ce sujet concerne effectivement des organisations collectives qui gèrent une ressource extrêmement précieuse, l'eau, avec des canaux qui utilisent la gravité sur des surfaces importantes. Tout cela est remis en cause aujourd'hui, notamment par une urbanisation et une artificialisation des terres agricoles qui a nui à l'efficacité.

Le rapport Martin, remis au Premier ministre il y a une semaine, insiste justement sur cette question des associations syndicales autorisées, les ASA, et fait des propositions. Tous ceux qui déstructurent ces systèmes d'irrigation gravitaires devraient être taxés pour que l'on puisse les reconstituer. Ce serait un élément positif et une manière de pouvoir assurer la pérennité de ces systèmes de drainage et d'irrigation gravitaire.

Deuxième point, il faut mettre en place des appuis pour soutenir ces associations, aujourd'hui laissées sans aide. Nous avons là toute latitude pour agir, et je suis prêt à regarder avec vous, dans le cadre de la loi d'avenir, ce qu'on doit mettre en place.

Sur la question des redevances aux agences de bassin, on touche à un sujet qui concerne le ministère de l'environnement, un sujet qui n'est pas simple. Le prix de l'eau et les redevances sont fixés pour l'ensemble des prélèvements qui sont faits. Si le ministre de l'agriculture peut examiner cela avec des objectifs écologiques – je pense en particulier aux systèmes gravitaires en moyenne montagne qui ont un effet sur la biodiversité –, encore faudrait-il qu'on engage une négociation permettant d'évaluer l'ensemble des effets positifs sur l'environnement pour pouvoir discuter de l'éventuelle remise en cause du paiement d'une redevance. Chaque prélèvement d'eau donne lieu au paiement d'une redevance versée aux agences de l'eau. C'est ce qui fait la réalité des agences de bassin. Nous aurons l'occasion, sur ce point précis, de rediscuter ensemble pour essayer de trouver la bonne solution.

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La réforme de la PAC pour la période 2014-2020 est en cours d'élaboration et un accord pourrait être trouvé à l'issue du prochain Conseil des ministres de l'agriculture. Globalement, la réforme annoncée confirme des aides essentiellement découplées et avance le principe d'une convergence des soutiens pour plus d'équité.

Alors, forts de ce constat, nos territoires du grand Massif central, plus particulièrement du département du Lot, nourrissent plusieurs inquiétudes, notamment quant au probable ralentissement du rythme de la convergence des soutiens directs, quant au paiement vert et à la surdotation du paiement sur les premiers hectares qui pourraient être rendus proportionnels, quant à l'avenir de la prime herbagère agro-environnementale ou encore quant au pourcentage de couplage des aides, qui pourrait ne pas être satisfaisant pour répondre aux attentes de tous les secteurs de l'élevage.

Dans ce contexte, le maintien de toutes les zones défavorisées du grand Massif central, à l'issue du nouveau zonage attendu pour 2015, est impératif. Nombre d'agriculteurs souhaitent par ailleurs un dispositif des indemnités compensatoires de handicap naturel renforcé, avec une revalorisation des montants, y compris pour la zone de piémont et les zones défavorisées simples, un plafond porté à soixante-quinze hectares et une reconnaissance de tous les actifs exploitants.

Et surtout, ils souhaitent l'activation de la mesure de soutien aux zones à contraintes naturelles spécifiques prévue par le premier pilier de la PAC, dotée de 5 % du budget, comme complément impératif à l'aide attribuée au titre de l'indemnité compensatoire des handicaps naturels.

Ces orientations sont absolument vitales pour l'élevage dans les territoires du grand Massif central, caractérisés par une faible densité de production. Car la déprise est en route, avec des conséquences lourdes sur l'activité, le tissu social et l'emploi dans les cantons ruraux, sans oublier, bien sûr, les paysages et la biodiversité. Monsieur le ministre, allez-vous prendre en compte ces inquiétudes et pousser ces orientations au niveau européen ?

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Madame la députée, j'ai déjà eu l'occasion de présenter la position que défend la France dans les négociations sur la réforme de la politique agricole commune : il faut réorienter une partie des aides – notamment du premier pilier – vers l'élevage. Et vers l'élevage dans sa diversité : aussi bien l'élevage allaitant que les systèmes de polyculture-élevage ou les élevages laitiers. Je suis ministre de l'agriculture, c'est-à-dire de toutes les agricultures, dans toutes les régions. Quand viendra le moment de faire des arbitrages, nous devrons garder cette idée en tête : il faut prendre en compte toutes les formes d'élevage.

Vous avez parlé des indemnités compensatoires des handicaps naturels. Bien entendu, il faut d'abord maintenir l'ensemble des zones défavorisées telles qu'elles sont définies aujourd'hui. Je peux le dire : à l'issue des négociations, nous aurons gagné sur cet objectif-là. Pour le reste, vous évoquez une revalorisation.

S'agissant de la prime à l'herbe, nous allons essayer de l'intégrer aux indemnités compensatoires de handicaps naturels. Il s'agit de compenser un handicap naturel tout en valorisant un processus vertueux du point de vue écologique. Cela fait partie des objectifs que nous nous sommes fixés ; pour les atteindre, il faudra encore des négociations à l'échelle européenne, notamment au sujet du plafonnement de l'ICHN. L'objectif n'en reste pas moins clairement affiché.

Vous avez évoqué certains éléments du premier pilier. Je l'ai dit tout à l'heure : nous devons trouver un équilibre entre l'ensemble des dispositifs relevant du premier pilier. Tous ces éléments seront bien entendu abordés dans le débat. Nous y ajouterons – je reviendrai sur cet élément – une surprime sur les premiers hectares. Vous parliez de l'élevage, et vous avez mentionné le chiffre de 75 hectares concernés par l'ICHN. Les cinquante premiers hectares seront revalorisés : il s'agit d'un élément important pour structurer notre espace agricole, éviter la déprise et surtout, lier au maximum l'aide à l'actif agricole. C'est aussi un enjeu pour le développement rural, que vous défendez, je le sais.

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Nous en venons aux questions du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

La parole est à M. Bruno Nestor Azerot, pour une première question.

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Monsieur le ministre, le volet consacré à l'outre-mer de votre projet de loi sur l'avenir de l'agriculture met l'accent sur la diversification. C'est osé !

Je suis cependant d'accord avec vous. La diversification est une nécessité, mais à une condition : elle ne doit pas se faire au détriment des cultures traditionnelles exportatrices, créatrices de richesses et d'emplois, que sont la canne à sucre et la banane. Il faut tout d'abord éviter, monsieur le ministre, que les programmes d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité – les POSEI – consacrés à la culture de la banane et de la canne à sucre soient remis en cause par la Commission européenne. Ils sont le fruit d'anciens et difficiles compromis. C'est aussi pourquoi la France doit définir une position commune avec l'Espagne et le Portugal. Vous avez rencontré fin mai vos homologues, monsieur le ministre. Qu'en est-il ?

Nous croyons aussi que la diversification ne peut réussir que si, précisément, elle vient des filières traditionnelles, et s'appuie sur leur expérience en matière de présentations de produits, d'emballages, de labellisation, de logistique, de réseau de distribution, et d'organisation. Il faut également, pour qu'elle réussisse, que l'État fasse preuve d'une volonté forte et oblige la pléthore d'organisations professionnelles oeuvrant dans le secteur du maraîchage à se regrouper en une union de groupements structurée et transparente.

Et le financement, me direz-vous ? Est-il nécessaire de rééquilibrer la répartition des aides, consacrées à 75 % aux filières traditionnelles et à 25 % à la diversification ? Je crois qu'il faut être très prudent, et ne pas modifier inconsidérément cette répartition, dans son principe comme dans ses taux. Elle garantit l'emploi dans des économies fragiles où le poids de l'agriculture dans le PIB est deux fois supérieur à celui de la métropole. De plus, les filières traditionnelles représentent 80 % de l'emploi agricole. Je crois pour ma part que des moyens alternatifs peuvent être utilisés, comme le reliquat de fonds destinés à la filière de la banane et non utilisés, ou des enveloppes sous-utilisées du FEADER.

Nous soutenons donc, monsieur le ministre, votre démarche. Mais comment concilierez-vous les deux objectifs du projet de loi d'avenir : le maintien de grandes filières groupées compétitives, et la nécessaire émergence de filières diversifiées et modernes, capables de reconquérir une partie du marché intérieur et de créer de la richesse ? Ne serait-il pas souhaitable d'organiser, sur ce point précis, une table ronde ?

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, je voudrais d'abord vous dire, à propos de la banane, que la France a obtenu le déblocage d'une enveloppe de 40 millions d'euros que tout le monde disait perdue. Ces fonds compensent les conséquences de l'accord commercial conclu par l'Union européenne d'une part, la Colombie et le Pérou d'autre part. Sur ces 40 millions d'euros prévus à l'échelle européenne, 18 millions seront consacrés au soutien de la banane des Antilles. Nous avons obtenu cela pour consolider une filière historique, traditionnelle, et exportatrice.

Je voudrais vous faire part d'un constat, concernant la Martinique et la Guadeloupe – le cas de la Réunion est un peu différent. La part de la production locale dans la consommation est en train de diminuer : cela pose quand même problème ! Cela pose la question de la diversification de la production locale. La loi que nous préparons actuellement, et que nous ferons ensemble, doit avoir pour objectif de reconquérir les marchés locaux de ces territoires. Il ne s'agit pas de faire en sorte que 100 % des produits consommés soient produits localement, ce qui serait ridicule, mais d'arrêter la spirale de la régression du taux de couverture des marchés locaux.

À partir de là, il sera possible de poser la question que vous avez évoquée : faut-il modifier un peu la répartition des aides prévues au titre des POSEI pour favoriser la diversification ? Comme vous, je suis convaincu qu'il faut maintenir les cultures traditionnelles, qui assurent de l'emploi et sont créatrices de valeur par l'exportation. Il faut faire en sorte qu'elles soient viables et compétitives. Les producteurs des Antilles ont fait le choix de la banane durable. Si ce choix est affiché, affirmé, travaillé, il sera un outil de segmentation et de valorisation de cette production.

Nous devons être d'accord sur un point : nous ne pouvons pas accepter de voir régresser la part de la production locale sur le marché local. Nous devons redresser ce ratio, et pour cela, il faudra que les arbitrages sur les aides encouragent cette diversification, à condition que les producteurs s'organisent et que les filières se structurent. À ces conditions, nous pourrons discuter de la répartition des aides. Je propose – comme vous l'avez fait vous-même – d'organiser une table ronde spécifiquement consacrée à ce sujet.

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Pour une deuxième question, la parole est à M. Bruno Nestor Azerot.

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Monsieur le président, monsieur le ministre, je vais vous donner lecture de la question de M. Chassaigne.

Alors que les 230 salariés de Spanghero manifestent une nouvelle fois aujourd'hui, nous mesurons l'ampleur des conséquences du laisser-faire en matière de commercialisation des denrées alimentaires.

Nous le savons, les producteurs subissent toujours une concurrence déloyale des pays tiers, tandis que les consommateurs ne sont pas informés de façon obligatoire et rigoureuse de l'origine des produits qu'ils achètent, en particulier pour les produits transformés. Depuis l'affaire de la viande de cheval, beaucoup a été dit sur les dérives des marchés de la viande en Europe, mais rien ne change vraiment, et l'opacité des filières d'approvisionnement de produits transformés demeure. Ainsi, monsieur le ministre, sur les boîtes de raviolis ou de lasagnes vendues dans les grandes surfaces, rien ne change. On ne connaît toujours pas l'origine de la viande transformée. Nous pourrions faire le même constat pour la poêlée de légumes surgelée, ou les boîtes de conserve.

J'ai déjà eu l'occasion de le dire, j'ai déposé une proposition de loi en ce sens. Une première mesure, essentielle, consisterait à rendre obligatoire l'indication de l'origine des produits que l'on consomme, ainsi que le lieu de l'emballage. Dans leur majorité, les organisations de producteurs des différentes filières en France se sont exprimées publiquement sur cette exigence : elles y sont favorables. Les associations de consommateurs ne cessent de le réclamer.

Le Président de la République lui-même a déclaré lors de sa visite au salon de l'agriculture qu'il voulait qu' « à terme, il y ait un étiquetage obligatoire sur les viandes qui sont insérées, introduites dans des produits cuisinés » afin que « le consommateur puisse être informé de la provenance des produits qu'il consomme et notamment des viandes », mais en restant bien vague sur les délais de mise en oeuvre de cette mesure, se référant notamment aux discussions en cours au niveau européen.

Il faut porter une mesure concrète d'étiquetage obligatoire de l'origine pour tous les produits agricoles et alimentaires. Mais alors que nous allons débattre prochainement d'un projet de loi sur la consommation, cette mesure de bon sens en est exclue. Monsieur le ministre, la question de mon collègue André Chassaigne est donc simple : entendez-vous enfin mettre à l'ordre du jour de notre assemblée l'obligation de l'indication d'origine pour tous les produits alimentaires ?

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, cette question aborde deux sujets différents. Il s'agit d'abord d'un problème d'ordre européen : les dispositions relatives, de façon générale, à l'étiquetage des produits transformés relèvent du droit européen. Après les révélations concernant la substitution de viande de boeuf par de la viande de cheval, la France a engagé un débat à l'échelle européenne, précisément pour mettre fin à l'absence de mention de l'origine des viandes sur les produits transformés. Nous allons poursuivre cette initiative pour faire changer la législation européenne sur ce point.

Pour cela, j'ai saisi le commissaire européen compétent. Celui-ci nous a renvoyé une lettre le 20 mars dernier. Il a avancé la date de publication de son rapport sur cette question à la fin de l'été 2013, pour une modification législative à la fin de l'année. Nous devons rester extrêmement vigilants sur ce sujet : c'est pourquoi nous avons aussi cherché des appuis auprès d'autres pays européens, en particulier l'Allemagne. Un accord sur l'origine des viandes dans les produits transformés a été conclu entre l'Allemagne et la France.

Cette bataille doit être menée jusqu'au bout. Après ce qui s'est passé, on ne peut pas accepter de laisser la législation en l'état. J'ajoute que des éléments de coercition doivent y être intégrés à destination des fameux traders qui se permettent, sans être soumis à aucune réglementation, de faire du commerce de viande à l'échelle européenne. Voilà pour le premier point.

Le second point, c'est la question de savoir ce que l'on peut faire en France. Nous devons être offensifs, et valoriser les viandes et produits transformés d'origine française. Nous avons mis en place un plan à cet effet pour la filière porcine et la filière volaille. Un plan sera également mis en place pour la filière ovine. Nous définirons un cahier des charges global, inter-filières, sur les viandes de France. Cela, c'est une démarche volontaire pour valoriser les productions nationales auprès des consommateurs, qui y sont prêts. Il ne s'agit d'ailleurs pas que des consommateurs eux-mêmes, mais aussi de la grande distribution : voyez les publicités des grandes enseignes, qui mettent en avant l'origine française de leurs produits. Nous devons utiliser cet atout. Nous irons donc très loin pour valoriser les viandes d'origine française.

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Nous en venons au groupe socialiste, radical et citoyen.

La parole est à M. Germinal Peiro.

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Monsieur le ministre, la réforme de la PAC prévoit d'accorder des aides uniques à l'hectare aux exploitants agricoles de notre pays, et dans le même temps de les faire converger, d'abord au niveau national, puis au niveau européen. Les aides uniques à l'hectare ont l'avantage de paraître plus simples : à terme, la même aide sera accordée à tous les agriculteurs européens. Elles présentent cependant deux inconvénients majeurs.

D'abord, elles risquent de pousser – une fois encore – à l'agrandissement des exploitations, le plafond étant extrêmement élevé. Mais elles seront aussi tout à fait insuffisantes pour certaines activités agricoles. Je pense évidemment à l'élevage, que vous avez cité, mais aussi à des cultures spécialisées, par exemple le tabac.

Aujourd'hui, la question du recouplage des aides se pose. Qu'en sera-t-il ? Vous avez proposé, monsieur le ministre, d'accorder une majoration d'aide au titre des cinquante premiers hectares. Cette « surprime » vise à rééquilibrer les aides, à les rendre plus justes, mais aussi à soutenir l'emploi. Il faut rappeler que cinquante hectares, c'est la taille moyenne des exploitations agricoles dans notre pays.

Je souhaite vous poser trois questions à ce sujet. Comment envisagez-vous les modalités de mise en oeuvre de la convergence des aides au niveau national au cours des prochaines années ? Où en sont les discussions sur le recouplage des aides, et quel pourcentage du premier pilier y sera consacré ? Enfin, comment pensez-vous mettre en oeuvre la majoration d'aide sur les cinquante premiers hectares ? Cette dernière mesure est soutenue très largement dans le monde agricole. Elle a été retenue par la Commission européenne, à titre optionnel, pour les pays qui en feront la demande.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, deux des éléments que vous venez d'évoquer sont particulièrement importants.

La question de la convergence des aides, tout d'abord, autrement dit l'abandon des références historiques que sont les fameux droits à paiement unique. En France, les aides vont de 400 euros à 150 euros à l'hectare. La convergence aura pour effet de réduire cet écart pour se rapprocher de la moyenne, soit 290 euros. Certains y gagneront – le Sud et bassin allaitant ; d'autres y perdront, voire y perdront beaucoup, comme les zones de polyculture et d'élevage du grand Ouest. Si la convergence est appliquée selon le souhait de la Commission européenne, telles seront les conséquences : une redistribution s'opérera, mais ce sont les éleveurs, en particulier la polyculture élevage laitière du grand Ouest de la France, qui y perdront le plus.

Il est donc nécessaire de repenser cette convergence. Premièrement, il faut savoir quel est son niveau actuel et quel sera son niveau en 2019 ; ce sujet fera l'objet de débats. Deuxièmement, pour éviter le transfert d'une partie de l'élevage vers les activités percevant les DPU les plus faibles, il fallait concevoir un outil. C'est l'objet de la majoration de la valeur des cinquante premiers hectares, qui vise à ramener des aides là où il y a de l'actif, autrement là où il y a de l'élevage. Voilà le principe tel qu'il est débattu actuellement.

Se pose ensuite la question du couplage des aides. Pour l'heure, nous sommes entre deux bornes : celle du Parlement européen, qui a proposé 15 %, et celle du Conseil européen, fixée à 12 % . La Commission avait retenu un taux de 10 % lorsque les discussions ont commencé ; le Conseil européen a permis un gain de deux points. Le taux finalement choisi sera donc situé entre 12 % et 15 %. La France souhaite qu'il soit le plus haut possible, toujours dans le souci de soutenir l'élevage : coupler les aides, c'est donner des aides spécifiques à l'élevage.

Le débat qui va s'ouvrir sera déterminant dans le choix du niveau de convergence et pour la mise en oeuvre de la majoration des cinquante premiers hectares. Il aura lieu immédiatement après la fin des négociations, que j'espère fructueuses, le 27 juin.

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Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les services vétérinaires français doivent faire face actuellement à une recrudescence des cas de tuberculose bovine qui inquiète toute la filière.

Depuis les années cinquante, le taux de prévalence de la maladie est passé de 20 % à un taux inférieur à 0,1 %, grâce auquel la France bénéficie depuis 2001 du statut officiel de pays « indemne de la tuberculose bovine », un statut reconnu dans toute l'Europe qui garantit ses capacités exportatrices.

Or, en 2011, malgré un taux de prévalence national de 0,08 %, le doute s'est malheureusement réinstallé dans nos campagnes. De fait, des résurgences de la maladie apparaissent régulièrement sur le territoire national avec pour conséquence l'élimination de la totalité des bovins issus des troupeaux infectés.

À titre d'exemple, dans le département dont je suis l'élu, les Ardennes, quatre foyers d'infection ont été recensés depuis juillet 2012 à la suite d'une contamination par la faune sauvage, ce qui a entraîné l'abattage intégral de 550 bovins.

Malheureusement, bien qu'il fasse subir à l'éleveur un traumatisme psychologique important et qu'il pèse sur le budget de l'État à hauteur de 15 millions d'euros par an, ce protocole d'abattage systématique ne garantit nullement l'éradication de la maladie.

En conséquence, plusieurs problèmes appellent réponse.

Le premier est celui de l'indemnisation des éleveurs. Dans les Ardennes, l'un d'eux n'a été indemnisé qu'en février 2013 alors que son troupeau avait été abattu en août 2012. Une accélération de la procédure est-elle envisageable ?

Ensuite, la détection et l'élimination du vecteur de contamination que constitue la faune sauvage doivent être plus efficaces. Un partenariat renforcé entre l'Office national de la chasse et de la faune sauvage et les fédérations de chasseurs ne peut-il être envisagé, de manière à sensibiliser et former durablement les chasseurs à un meilleur dépistage des lésions évocatrices sur les animaux sauvages trouvés morts ou abattus ?

Enfin, depuis le 4 septembre 2008, l'abattage sélectif subordonné à un contrôle des animaux par tuberculination et test à l'interféron gamma a été autorisé par arrêté ministériel à titre expérimental en Dordogne et en Côte-d'Or. L'élargissement de ce protocole à d'autres départements, notamment celui des Ardennes, est-il envisageable rapidement ?

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, le problème de la tuberculose bovine est un sujet majeur : la France doit impérativement conserver son statut d'État indemne afin de pouvoir continuer à exporter de la viande bovine.

Vous avez en particulier évoqué les problèmes liés au développement de la faune sauvage. Nous avons engagé un travail sur ce sujet avec les fédérations de chasse et l'Office national de la chasse et de la faune sauvage afin d'éradiquer et d'abord de repérer les sources de vecteurs ; mais ce n'est pas aussi simple et clair qu'il n'y paraît.

Par ailleurs, la France a obtenu auprès de l'EFSA, l'Autorité européenne de sécurité des aliments, la validation des tests interféron gamma pour éviter d'abattre l'ensemble d'un troupeau et cibler les animaux malades. Vous avez évoqué le traumatisme subi par les éleveurs ; j'en ai parfaitement conscience. C'est d'autant plus dramatique que certains éleveurs ont vu leur troupeau entier abattu deux fois voire trois fois. Vous l'avez indiqué, ce test est actuellement utilisé à titre expérimental en Côte-d'Or et en Dordogne. Je vous l'annonce ce soir, monsieur le député : cette expérimentation sera étendue, en particulier à votre département des Ardennes. Cela permettra d'éviter les problèmes que vous avez évoqués et dont nous avons parfaitement conscience.

Quant aux procédures d'indemnisation des éleveurs, elles ont été accélérées au moyen d'avances.

Cela étant dit, j'insiste sur le fait que la lutte que nous devons mener contre la tuberculose bovine est la condition pour que la France conserve son statut de pays indemne et pour que l'élevage français continue d'exporter. C'est un enjeu majeur. Je ne ferai aucune entorse aux règles. Nous serons extrêmement scrupuleux et ne prendrons aucun risque, sous peine de mettre nos éleveurs en grande difficulté : il ne faudrait pas ajouter d'autres problèmes à celui de la tuberculose bovine.

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Nous avons le même problème avec la brucellose sur le bouquetin !

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Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'associe à ma question ma collègue Chantal Guittet.

La filière porcine est aujourd'hui dans l'oeil du cyclone : l'absence probable de repreneur de Gad et de ses 1 700 salariés en est la démonstration la plus douloureuse. Pas un maillon de la chaîne n'est épargné.

Cette crise est le fruit d'un faisceau de responsabilités passées : accumulation de réglementations françaises plus exigeantes que la réglementation européenne, absence d'investissements dans les entreprises comme dans les exploitations, conflits entre les acteurs de la filière. S'ajoute à ces couches de difficultés une contrainte supplémentaire, plus lourde : la concurrence exacerbée de notre voisin allemand, qui n'hésite pas, depuis 2007, à détourner les directives européennes à son avantage pour faire du dumping social. L'Allemagne fait travailler des salariés venus de l'Est pour des salaires de misère situés entre 4 et 7 euros de l'heure. Comment peut-on lutter ? C'est impossible. C'est le coup de trop pour la filière.

L'immobilisme d'hier crée la crise d'aujourd'hui car nous devons gérer dans l'urgence cette difficulté. Baisse du nombre de porcs produits, risque pesant sur les abattoirs, menace pour l'emploi : c'est toute une filière qu'il faut repenser.

Vous avez engagé des premières initiatives. Le développement de la méthanisation en est une, mais l'efficacité de la proposition réside dans la rapidité de son exécution. Or nous sommes en attente.

Les réflexions sur les procédures d'enregistrement et l'élaboration d'un plan d'avenir de la filière porcine pour retrouver notre rang sont d'excellentes initiatives avec l'objectif ambitieux de retrouver un niveau de production équivalent à 25 millions de porcs sur le territoire national. Ce chiffre n'est pas un blanc-seing donné à la profession ; il correspond à la volonté de faire mieux, une telle production devant aussi prendre en compte la nécessaire protection environnementale. Mais comment ferons-nous pour atteindre cet objectif si nous détruisions les outils de transformation entre-temps ?

Monsieur le ministre, vos objectifs sont ambitieux et nous les soutenons. Mais il y a urgence à mettre en oeuvre vos propositions : urgence pour les enregistrements pour les élevages porcins, urgence pour la méthanisation, urgence contre le dumping social allemand qui saigne nos industries, urgence pour le cahier des charges « viande porcine française », urgence à redonner confiance aux producteurs, urgence pour sauver les emplois de Gad.

Pouvez-vous nous préciser le calendrier retenu pour la mise en oeuvre opérationnelle de vos propositions ?

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, la crise porcine sévit dans tout l'ouest de la France mais frappe plus précisément un certain département de Bretagne. Vous appelez mon attention sur les appareils industriels d'abattage, un secteur qui connaît des difficultés liées à la concurrence européenne – vous avez évoqué la concurrence allemande – et à une baisse du niveau de la production de porcs abattus : certains porcs produits dans l'ouest peuvent être abattus en Allemagne. Sur ce point également, nous devons mener une réflexion globale, ce qui n'a pas été fait jusqu'à présent.

Nous avons réuni l'ensemble des acteurs de la filière afin de fixer les grands objectifs, de définir l'organisation à mettre en place et le cahier des charges pour la viande porcine française. Tout cela est désormais sur la table et est en train d'être mis en oeuvre.

Sur la question du prix du porc, j'ai décidé de confier une mission de médiation à la personne qui a réussi ce même exercice pour le lait et le lait caprin…

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À condition que les industriels respectent les règles !

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Effectivement, mais cela fait aussi partie des débats que nous menons entre nous. Chacun doit être mobilisé. J'ai donc décidé de mettre immédiatement en place une médiation analogue pour le porc.

Quant aux enjeux structurels, ils concernent la méthanisation et la mobilisation des fonds issus d'OSÉO et de la Banque publique d'investissement pour financer les projets actuellement mis en oeuvre, en particulier en région Bretagne. Les discussions sont en cours pour l'élaboration d'un plan global.

Nous allons effectuer un repérage de l'ensemble des projets qui ont déjà été déposés afin de pouvoir enclencher la production ou le développement de la méthanisation, ce qui devrait déboucher sur l'utilisation de la matière organique transformée comme fertilisant. Depuis des années, le principal problème posé par l'élevage du porc en Bretagne est lié à son impact sur l'environnement. Il est de ce fait extrêmement difficile de proposer la construction de porcheries, dont on a pourtant besoin, y compris sur le plan écologique.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, on dépense beaucoup moins d'énergie dans un bâtiment neuf que dans un bâtiment ancien. Il est donc nécessaire de réinvestir.

Afin de réduire les durées d'étude et d'enquête, j'ai donc proposé un régime d'enregistrement pour les élevages porcins. Cette proposition, sans remettre en cause les règles liées à l'environnement, permettra de raccourcir la durée des procédures et d'accélérer la restructuration, donnant ainsi à la filière la possibilité d'atteindre ses objectifs. Grâce à la méthanisation et au renouvellement de l'outil de production, on pourra ensuite stabiliser la situation des outils de transformation, autrement dit les abattoirs.

Sur la concurrence de l'Allemagne et l'utilisation de la directive « détachement », la France a initié le débat au niveau européen. Dans le même temps, la question de la fixation d'un salaire minimum en Allemagne est posée. J'espère que nous progresserons rapidement sur ce sujet.

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Nous en revenons aux questions du groupe UMP.

La parole est à M. Gilles Lurton.

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Monsieur le ministre, je souhaite aujourd'hui appeler votre attention sur la pérennité des exploitations de production de maïs à la suite de la récente suspension par la Commission européenne de certains insecticides.

Nous avons sans doute tous ici pris conscience du danger présenté par ces insecticides pour la survie des abeilles. Je ne peux pour ma part qu'approuver les mesures prises pour limiter l'exposition du cheptel apicole aux risques de poussières émises par les semences traitées.

Les producteurs de maïs en sont aussi pleinement conscients. Ils se sont d'ailleurs investis dans la mise en oeuvre de mesures de gestion du risque. Ces mesures ont été saluées par votre ministère dans le cadre du plan de suivi concernant le produit Cruiser 350.

Mais la suspension de certains insecticides par la Commission prive désormais les producteurs d'outils innovants et efficaces dans la lutte contre les ravageurs du sol dont les impacts peuvent être désastreux pour leurs cultures de maïs.

La Bretagne est ainsi particulièrement exposée : nous estimons le défaut de production qui en résulte à environ 400 000 tonnes !

L'utilisation de semences protégées à l'aide d'un insecticide étant une nécessité pour environ 50 % des surfaces, cette décision de suspension risque de remettre en cause la pérennité de ces filières.

Cependant, et j'en suis parfaitement conscient, il est aujourd'hui nécessaire de conjuguer la compétitivité de la production de maïs et la protection du cheptel apicole. Il me paraît aussi indispensable d'apporter une évaluation de l'impact des produits utilisés sur la survie des abeilles.

Vous le savez, monsieur le ministre, il nous faut préserver une production source de valeur ajoutée et d'emplois, notamment en Bretagne où, comme cela vient d'être évoqué, la filière agroalimentaire connaît de graves difficultés.

Quelles solutions alternatives et pérennes comptez-vous proposer afin que les producteurs de maïs disposent des outils nécessaires à la survie de leurs exploitations ?

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, vous évoquez les difficultés que présente la décision d'interdiction des néonicotinoïdes à l'échelle européenne.

Sachez que j'ai veillé à ce que l'extension du champ de cette interdiction au maïs soit bien le fruit d'une décision prise à l'échelle de l'Europe, afin de ne pas introduire de distorsion de concurrence entre les différents pays. Pour le colza, la décision était nette et plus claire, puisque c'est une plante mellifère et que la plus grosse part de la production est située en France ; il n'y avait donc pas de risque de perte de compétitivité. Pour le maïs, ce n'était pas le cas : la bataille devait être menée à l'échelle européenne.

Il a été décidé un moratoire de deux ans qui entrera en application à la fin de l'année 2013 ; nous ne sommes donc pas concernés aujourd'hui. Ces deux années permettront de procéder aux évaluations et de vérifier que les néonicotinoïdes présents dans les semences enrobées ont bien, comme on s'accorde à le croire aujourd'hui, un effet négatif sur le cheptel des abeilles. N'oublions pas non plus que nous avons perdu nombre d'apiculteurs en quelques années et que la France importe de plus en plus de miel, ce qui n'est pas acceptable.

La lutte intégrée, la lutte biologique, les rotations sont autant de moyens, certes plus compliqués, que les producteurs peuvent mettre en oeuvre. Mais ils ont d'autres à leur disposition, plus conventionnels. Enfin, de nouveaux produits, moins nocifs pour les abeilles, pourront être utilisés demain par les producteurs de maïs.

Nous avons fait en sorte que ce qui était nuisible aux abeilles soit abandonné, tout en veillant à proposer des alternatives. Qui plus est, ces dispositions ne s'appliqueront qu'à partir de la fin de l'année, donc sur les semis de l'année prochaine : nous aurons le temps d'informer les producteurs et de diffuser les techniques alternatives qui permettront de préserver la production de maïs, notamment celle qui, dans le grand Ouest, sert à l'alimentation des vaches laitières.

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Monsieur le ministre, le 17 avril, alors que je vous alertais sur la hausse significative des coûts de production de l'élevage, vous avez indiqué vouloir adapter les lois de modernisation de l'économie et de modernisation de l'agriculture afin d'« intégrer, dans les obligations de négocier, la question de l'augmentation des coûts de production ». Vous venez d'en faire état. J'appelle de mes voeux la réussite de cette intégration, dont dépend la survie de l'élevage français et des familles qui en vivent.

Les dix dernières années ont vu une forte restructuration de la production bovine. Dans mon département de l'Orne, près d'un élevage sur quatre a cessé son activité. Malgré le raffermissement des cours du prix de la viande, la chute du nombre des exploitations d'élevage est très préoccupante pour l'activité économique et l'aménagement de nos territoires ruraux.

Aujourd'hui, une amorce de reprise semble se dessiner ; elle ne peut se concrétiser qu'à la condition que des garanties soient apportées sur le coût des aliments et sur le prix de vente des animaux.

Il y a quelques semaines, vous avez nommé un médiateur aux négociations entre producteurs, transformateurs et grande distribution, afin de permettre une plus juste rémunération des producteurs.

Le 15 mai, le médiateur annonçait une hausse de 25 euros du prix payé aux producteurs pour 1 000 litres de lait. Vous avez indiqué il y a quelques instants que cette obligation devait figurer en pied de facture. Pourtant, à ce jour, de nombreuses laiteries et coopératives n'ont pas répercuté cette hausse.

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Pire, certaines d'entre elles ont indiqué que cette revalorisation était une avance de trésorerie, transformant de fait en prêt ce qui devait être une recette…

Dans les fermes ornaises et normandes, l'action du médiateur est devenue illisible. Les disparités de situations perturbent et inquiètent. La rémunération pour les producteurs demeure source de grande incertitude et d'angoisse permanente.

Il faut davantage de cohérence et de visibilité. Je vous remercie, monsieur le ministre, de m'indiquer, ainsi qu'aux nombreux éleveurs et producteurs de lait qui attendent des mesures rapides, comment vous envisagez d'appliquer ces revalorisations de prix indispensables et comment vous comptez les faire respecter.

Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Madame la députée, nous nous accordons sur la nécessité de revaloriser le prix du lait. Il est vrai que les indications que vous avez données sur l'évolution du marché international laissent présager une augmentation.

Mais permettez-moi de revenir sur la question de la médiation. Le droit de la concurrence interdit au ministre de l'agriculture de décider du prix. S'il le faisait, il serait immédiatement condamné.

Nous avons mis tout le monde autour de la table afin d'engager les discussions sur les évolutions des coûts de production, de faire en sorte que la grande distribution accepte de payer plus cher les produits, en particulier le lait, et de trouver un accord grâce à la médiation.

Cet accord doit s'appliquer et il s'applique, mais pas partout, comme j'ai pu le constater en Normandie, où je me suis rendu récemment. Dans l'Orne, il s'applique plus ou moins, voire pas du tout dans certaines laiteries.

Quel est le rôle des politiques que nous sommes, ministre ou députés ? Dénoncer tous les cas où l'accord, fruit d'une médiation, n'est pas appliqué. Chacun doit être mis devant ses responsabilités : le fait que les laiteries, et parfois les coopératives, ne respectent pas cet accord pose évidemment un problème. En tant que ministre, j'ai joué mon rôle ; malheureusement, je ne peux pas imposer l'application de cet accord de médiation. Mais vous comme moi pouvons dénoncer le fait qu'il ne soit pas respecté. Ainsi que je l'ai dit lors de mon déplacement en Normandie et dans l'Orne, je suis prêt à aider dans ce sens. Les syndicats professionnels doivent se mobiliser : les jeunes agriculteurs, lors de leur congrès, auquel j'ai assisté, s'y sont engagés. Nous devons nous mobiliser pour faire respecter cet accord : c'est le moins que l'on puisse faire aujourd'hui pour les producteurs. Ce qui a été négocié doit s'appliquer.

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Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la lutte contre le chômage commande la mobilisation de tous les secteurs de l'économie. Alors que notre pays perd chaque mois 50 000 emplois, il est impératif de soutenir et de promouvoir les filières qui marchent ainsi que celles qui ont du potentiel.

C'est vrai pour l'élevage ; ça l'est aussi pour la forêt. Il y a quelques semaines, monsieur le ministre, je vous ai interpellé, comme plusieurs de mes collègues, pour vous dire la souffrance et les grandes difficultés du secteur de l'élevage. Les mesures concrètes attendues tardent à venir.

S'agissant de la forêt, nous sommes face à un paradoxe. La France occupe la troisième place des pays européens les plus boisés. Nous exportons des grumes de grande qualité. Pourtant, notre déficit commercial est abyssal – 6,5 milliards d'euros par an – et nous perdons des milliers d'emplois chaque année.

Comment expliquer que nous importions autant de produits transformés alors que plus d'un quart de notre territoire est couvert de forêts ? Comment expliquer que nos voisins allemands, avec une moindre superficie, réalisent le double de notre chiffre d'affaires et que l'activité forestière outre-Rhin génère plus du double d'emplois ?

Une véritable stratégie doit être mise en place pour rendre notre économie compétitive. L'enjeu est important, en particulier pour nos territoires de montagne. La Haute-Savoie, dont 39 % du territoire est couvert par la forêt, est le premier producteur d'épicéas de France. La forêt est source de création d'activités et d'emplois : nous comptons près de 60 scieries et l'économie forestière génère plus de 5 000 emplois.

Le plan pluriannuel régional de développement forestier, pris en application de la loi de 2010, a défini les actions prioritaires. L'amélioration de l'accessibilité, l'exploitation par câble dans les zones à forte pente, la reconstitution de la forêt après les coupes, le regroupement d'exploitations et de chantiers sylvicoles, la valorisation du bois local à travers le développement des surfaces forestières certifiées ou la marque Bois Qualité Savoie sont autant de défis à relever.

Il faut planter des sapins, monsieur le ministre ! La forêt est un magnifique miroir de notre patrimoine national. Les acteurs de la filière bois-forêt attendent que l'on s'occupe d'eux.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Oui, madame la députée, il faut planter des sapins ! Pas que des sapins d'ailleurs, des arbres en général !

C'est vrai, la France accuse un retard au niveau de sa filière bois-forêt. Le déficit de notre balance commerciale se situe entre 6 et 7 milliards d'euros. Nous exportons des grumes et des billes de bois ; nous importons des meubles, ou même des bois sciés de l'autre côté de la frontière. Ce faisant, nous perdons sur deux plans : sur la valeur ajoutée de la transformation et sur la valorisation des coproduits de cette transformation, en particulier l'énergie liée aux sciures de bois.

Il faut faire revenir la transformation et élaborer une stratégie de plantation, de renouvellement de la forêt. Plusieurs rapports m'ont été remis – je viens de recevoir celui de Jean-Yves Caullet – et une ligne directrice se dessine. Nous allons préparer un projet de loi sur la forêt, qui comprendra notamment des mesures fiscales, la création – je vous l'annonce ce soir – d'un fonds stratégique qui regroupera l'ensemble des moyens pour financer la structuration de la forêt française, et des modifications législatives permettant la réouverture d'un certain nombre de débouchés. Je pense notamment à la réglementation sur les feuillus : il est tout de même insensé qu'elle ne permette pas en France, où existent de vastes forêts de hêtres, ce qui est possible en Allemagne !

S'agissant des zones pentues de montagne que vous avez évoquées, où le coût de la récolte est plus élevé, il convient de se poser la question des plantations réalisées il y a quelques années pour éviter les risques d'érosion. Cela suppose une stratégie spécifique. Un plan sur la gestion des risques avait été mis en place par Michel Barnier ; il faudra trouver le moyen de le réactiver afin de renouveler ces forêts, extrêmement utiles et, de surcroît, potentiellement productives – il s'agit en sorte de faire d'une pierre deux coups. C'est là un objectif dont nous pourrons discuter dans le cadre du plan bois et de la loi d'avenir sur la forêt.

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Monsieur le ministre, je vous parlerai d'agriculture, mais pas d'argent !

Sourires.

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Je veux évoquer la question des simplifications administratives qui concernent les procédures applicables aux installations d'élevage classées.

Je pense particulièrement aux éleveurs de porcs et de volailles français qui, depuis plusieurs décennies, sont soumis à une compétition européenne qui se déroule à armes inégales. En France, nous sommes plus royalistes que le roi : les demandes d'autorisation d'exploitation font l'objet de procédures administratives lourdes, complexes et coûteuses. Il en va de la compétitivité de nos éleveurs.

Il y a de cela deux ans, le député des Côtes-d'Armor Marc Le Fur a déposé un amendement proposant d'harmoniser les normes d'installations classées avec celles pratiquées en Europe.

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Êtes-vous prêt, monsieur le ministre, à proposer aux éleveurs français, pour ce qui concerne la modernisation de notre parc de bâtiments d'élevage, une harmonisation des seuils nationaux d'installations classées avec les seuils européens – ni plus ni moins, qu'il s'agisse du nombre de têtes ou des rejets ?

Nous avons été reçus il y a quelques semaines au ministère de l'agriculture par votre collègue-coéquipier Guillaume Garot, ministre en charge de l'agroalimentaire. Ce dernier nous a laissé entendre que vous alliez prendre des décisions en faveur de cette harmonisation.

Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, nous aurons l'occasion de revenir sur l'harmonisation. Permettez-moi d'abord une remarque sur l'amendement Le Fur. Quand avait-t-il été déposé ?

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Pour quelles raisons n'a-t-il pas été adopté ?

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Pourtant, vous aviez une majorité à l'époque !

Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

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Mais vous exerciez une pression, M. Le Drian en tête !

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Ah !

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Restons-en là et revenons à ce qui nous occupe.

Oui, il faut aller vers la simplification. J'ai fait une proposition prévoyant différents niveaux : jusqu'à 450 porcs pour la déclaration ; de 450 à 2 000 porcs pour l'enregistrement, 2 000 étant le seuil européen pour les autorisations.

Ce système ne remet pas en cause les objectifs liés à la protection de l'environnement, mais il doit permettre une simplification, c'est-à-dire une réduction des durées d'enquête et de procédure, donc des délais – qui peuvent atteindre en France vingt-huit à trente-deux mois pour une porcherie, contre douze à seize mois dans d'autres pays européens –, et des coûts.

L'objectif est là. La proposition a été faite. Le Premier ministre a donné son accord. Tout cela doit se mettre en oeuvre. Nous devons harmoniser les règles, mais nous avons pris l'engagement, en présentant le plan EMMA, de développer la transformation de l'azote organique lié aux productions animales et de renouveler en même temps les bâtiments d'élevage et les porcheries. C'est indispensable si nous voulons maintenir notre compétitivité dans le secteur, car des bâtiments modernes, c'est du bien-être pour les animaux mais surtout pour ceux qui y travaillent ; ce sont surtout des économies d'énergie.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

J'ajoute que pour la Bretagne, nous y ajouterons la déconstruction des vieux bâtiments – c'est actuellement en discussion avec la région.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Quelques semaines !

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Nous en revenons aux questions du groupe SRC.

La parole est à M. Michel Vergnier.

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Monsieur le ministre, j'associe à ma question Christine Pires Beaune, qui voulait vous interroger sur le même sujet. Au nom du groupe d'études sur l'élevage, je tiens à vous assurer de notre soutien sur certaines de vos propositions, notamment en matière de rééquilibrage.

Nos paysages sont beaux, du printemps à l'hiver. Mais, année après année, nous voyons diminuer le nombre d'exploitations. Les jeunes n'osent plus s'installer, tant la disparité de revenus est grande entre les éleveurs et les autres.

Ayant tiré ce signal d'alarme, je voudrais revenir sur quelques points précis.

Aujourd'hui certains pays européens ont décidé d'arrêter les tests systématiques sur l'ESB. Pourtant, les viandes qui viennent de ces pays européens sont vendues en France et nous les consommons tranquillement, tandis que nos éleveurs continuent à subir les tests de dépistage. L'ancien rapporteur de la commission d'enquête sur les farines animales que je suis pense que ce dépistage systématique n'est plus utile et qu'il faudrait revenir à des tests ciblés. Quel est votre sentiment sur cette question ?

On vous a également interrogé sur la modernisation des bâtiments d'élevage. Pourrions-nous savoir, là encore, si les crédits sont débloqués, et votre administration pourrait-elle nous informer précisément de ce qui est en cours ?

Enfin, je voudrais évoquer les normes. Pourrait-on envisager de les assouplir pour donner davantage de responsabilités aux préfets et encourager des contrôles fondés sur le partenariat plutôt que sur la suspicion. Franchement, nos éleveurs font un métier difficile, pour un faible revenu, et ils ne supportent plus certaines exagérations ! Vous avez parlé du changement dans la justice, monsieur le ministre : nous comptons sur vous.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le député, j'ai déjà répondu à plusieurs de vos préoccupations concernant l'élevage.

Cela dit, vous posez une question importante à propos des tests ESB. Dans un contexte européen qui voit la pratique du dépistage systématique remise en cause, nous avons entamé des discussions avec l'ANSES, qui ne partage pas les positions de l'EFSA. Nous allons travailler rapidement à rapprocher les points de vue, en prenant les bonnes décisions : il s'agit moins d'un problème sanitaire que d'un problème de gestion politique d'une affaire qui a coûté très cher à l'élevage et sur laquelle je ne prendrai pas le risque de voir les consommateurs se remettre à douter.

Je partage l'idée qu'aujourd'hui, compte tenu de la situation, on puisse envisager d'arrêter les tests systématiques, tout en gardant des tests ciblés. Mais cela ne pourra se faire qu'en prenant toutes les précautions. Je le répète : je ne prendrai aucun risque. Si je sens que je n'ai pas les éléments suffisants pour défendre objectivement cette idée, je m'abstiendrai, au nom des éleveurs précisément, et même si la situation sanitaire ne semble plus comporter les mêmes risques que lors de la crise que vous avez connue.

Le sujet est important, et je tiens à assurer ce soir la représentation nationale que mon choix sera un choix tout à la fois rationnel et soucieux de protéger la réputation des élevages. Nous avons pris les contacts nécessaires avec l'ANSES pour caler la bonne décision.

En matière de contrôle, nous ne sommes plus du tout dans une pratique systématique ou coercitive. Il faut laisser l'élevage aux éleveurs, qui font ce métier par passion. Nous ne sommes pas là pour les soupçonner, mais pour les aider.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Reste que les normes sont un moyen de protection de l'élevage lui-même dans la mesure où elles rassurent les consommateurs.

Nous pouvons compter, pour faire progresser la cause de l'élevage en France, sur suffisamment de compétences, dans le domaine de la viande bovine notamment, pour laquelle notre pays connaît de plus en plus de débouchés.

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Monsieur le ministre, j'associe à ma question ma collègue Carole Delga, députée de Haute-Garonne.

La loi sur la refondation de l'école, que nous sommes sur le point d'adopter définitivement, va permettre de réformer en profondeur notre système éducatif, dans le but de redonner à tous les enfants les moyens de réussir et de s'épanouir.

Cette ambition pour la jeunesse de notre pays, portée par le Président de la République, ne saurait être entière si elle ne concernait pas également l'enseignement agricole. Avec plus de 170 000 élèves dans l'enseignement technique, 35 000 apprentis stagiaires en formation continue et 16 200 étudiants dans le supérieur, l'enseignement agricole est la seconde composante de notre système éducatif. Une composante d'excellence : l'enseignement agricole connaît en effet un taux de réussite aux examens, tous diplômes confondus, de plus de 80 %. Mieux encore, le taux d'insertion professionnelle s'élève à 88 % pour l'ensemble des filières et à 94 % pour le seul bac professionnel.

Dans un pays dont l'identité est tant façonnée par l'agriculture, l'enseignement agricole représente pour nous tous une véritable fierté. C'est pourquoi les réflexions que nous menons actuellement sur la réforme de l'éducation, mêlées à celles sur l'évolution de notre modèle de production, doivent tout naturellement nous conduire à nous pencher sur l'avenir de l'enseignement agricole.

Dans cette optique, l'enjeu consiste à consolider les atouts de cette filière et à lui donner les moyens de franchir une nouvelle étape. Les forces de l'enseignement agricole : un enseignement basé sur une approche transversale du territoire et du vivant, un enseignement qui s'appuie sur des techniques pédagogiques innovantes, un enseignement caractérisé par la richesse de ses formations sont autant d'atouts, utiles face aux défis que devra affronter l'enseignement agricole de demain : renforcer l'égalité entre filles et garçons, favoriser la mobilité sociale, s'adapter à l'évolution du modèle productif, s'ouvrir à l'international…

Je sais, monsieur le ministre, que le projet de loi pour l'avenir de l'agriculture que vous présenterez prochainement comportera un important volet sur l'enseignement agricole. Pouvez-vous nous dévoiler d'ores et déjà les grandes orientations de cette réforme ?

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Madame la députée, j'ai dit, dès ma prise de fonctions, que nous devions travailler avec l'éducation nationale pour garantir à l'enseignement agricole le nombre d'emplois nécessaires à la pérennisation de sa réussite, qu'il s'agisse de la réussite aux examens ou d'un taux d'insertion professionnelle bien supérieur à celui de l'éducation nationale.

Certes, nous ne sommes pas sur les mêmes masses et il faut rester modeste ; reste que l'enseignement agricole dispose d'un atout majeur en ce qu'il combine la formation initiale, l'apprentissage et la formation continue. L'objectif est bien de garder cette stratégie.

Nous devons ensuite utiliser l'enseignement agricole pour la promotion sociale, notamment grâce au maintien des classes de quatrième et de troisième, qui permettent d'insérer certains élèves parmi les plus éloignés de l'éducation. Ils peuvent trouver dans cet enseignement une vocation, une voie de réussite vers le bac professionnel ou les études supérieures – le parcours de certains élèves en témoigne.

Enfin, l'enseignement agricole doit de nouveau être capable d'attirer des jeunes. Certaines filières comme le machinisme agricole par exemple manquent de jeunes formés pour satisfaire les demandes de l'industrie. Il nous appartient donc, à travers un service de l'orientation unique et en collaboration avec l'éducation nationale, de faire venir des jeunes vers un enseignement agricole plein de potentialités pour eux, notamment en termes de carrières.

Sur l'attrait de l'enseignement agricole et des métiers liés à l'agriculture, nous ferons des propositions, notamment pour ce qui touche à l'orientation.

Il faudrait également évoquer les grandes stratégies en matière d'agro-écologie. L'enseignement agricole doit former à l'agriculture du troisième millénaire, qui combinera performance économique et performance écologique : c'est un enjeu essentiel.

L'enseignement agricole, qu'il soit public ou privé, puisque des accords ont été passés avec l'enseignement privé, doit nous aider à promouvoir la réussite des jeunes. Nous avons donc tous intérêt à militer pour la valorisation de cet enseignement.

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Nous en venons à une dernière question du groupe UMP.

La parole est à M. Laurent Marcangeli.

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Monsieur le ministre, je voudrais relayer les inquiétudes des agriculteurs de mon territoire sur la manière dont la France compte traduire les engagements européens dans le cadre de la nouvelle politique agricole commune. En effet, ils craignent que l'agriculture corse en ressorte gravement pénalisée.

Comme vous le savez, vendredi dernier, les représentants de la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles et des jeunes agriculteurs de Haute-Corse et de Corse-du-Sud, ainsi qu'une cinquantaine d'agriculteurs ont manifesté leur mécontentement en occupant les locaux de la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt d'Ajaccio.

Il semble que notre pays rechigne à mettre en oeuvre le principe de convergence voulu par Bruxelles, qui consiste à harmoniser le montant de l'aide à l'hectare pour chaque agriculteur européen. En effet, en se basant sur des dotations historiques déjà peu avantageuses, la France bloque cette volonté d'équité, ce qui est profondément préjudiciable à la Corse, déjà la moins bien lotie des régions françaises.

Monsieur le ministre, les chiffres parlent d'eux-mêmes. Avec une dotation d'environ 100 euros l'hectare, la Corse se place largement en dessous de la moyenne nationale, qui s'élève à 280 euros l'hectare. Le calcul de la dotation par bénéficiaire n'est pas plus avantageux puisqu'il ne dépasse pas 4 605 euros pour les agriculteurs insulaires, contre 15 877 euros pour ceux du continent.

De telles distorsions ne peuvent qu'inquiéter le parlementaire que je suis. Elles sont en tout cas largement préjudiciables dans un système concurrentiel qui plonge nos agriculteurs dans une situation de grande précarité.

Ainsi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer les motifs de ce non-respect des engagements européens de convergence ? Quand allez-vous enfin mettre en place un système juste et équitable ? Nous attendons un signe concret de votre part afin de rassurer les agriculteurs insulaires qui ont souffert d'un cruel manque d'informations dans ce dossier, alors même que vous vous étiez engagé à constituer des groupes de travail avec l'ensemble des professionnels afin que la Corse soit dotée au mieux au niveau du régime des aides et que son relief soit spécifiquement reconnu. Je vous remercie.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Mesdames et messieurs les députés, je vois que vous applaudissez, mais permettez-moi de vous poser quelques questions.

Pour commencer, qui vous a dit que la France n'allait pas mettre en oeuvre la convergence ? Pas le ministre de l'agriculture en tout cas.

Deuxième question, que vous poserez aux représentants des Jeunes Agriculteurs et de la FDSEA de Corse, qui ont manifesté : le débat sur la convergence ne se pose-t-il pas davantage au sein de la profession agricole qu'au ministère de l'agriculture ?

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Pour ma part, j'y suis favorable, mais qu'est-ce qui est en débat ? Car le débat aura lieu, les avis étant assez partagés. Il s'agit de savoir comment nous allons répartir les aides du premier pilier. La convergence vise, je l'ai dit, à sortir des DPU, autrement dit des références historiques qui aboutissent à des droits très bas pour la Corse, beaucoup plus élevés pour d'autres régions, la moyenne tournant autour de 280 ou 290 euros l'hectare.

Si l'on applique une convergence basique, du type de celle proposée par l'Europe aujourd'hui, les aides les plus élevées, celles qui sont à 400 euros, baisseront et les plus faibles, celles qui sont à 100, 140, 150 euros – donc ceux de la Corse – remonteront automatiquement. Ceux qui sont dans la moyenne ne seront pas touchés. Or ce sont plutôt les grands bassins céréaliers qui se trouvent aujourd'hui dans la moyenne, mais il ne s'agit pas de remettre en cause le fait que les prix des céréales remontent : tant mieux. Cela étant, comment organiser la répartition pour redistribuer une partie des aides en direction des plus faibles sans prendre pour autant cette partie sur l'élevage ? Là est tout l'enjeu du dossier, d'où les propositions qui seront faites, je l'espère, dans le débat que nous aurons sur les cinquante premiers hectares. Mais je tiens à vous rassurer ce soir : le Gouvernement ne remet pas en cause le principe de la convergence. Reste que les questions que je viens de vous exposer devront être posées dans le cadre du prochain débat sur la redistribution et qu'il faudra trouver un équilibre. Sans remettre en cause une partie performante de notre agriculture, il s'agit tout de même de redistribuer une part des fonds du premier pilier, au profit en particulier de départements comme le vôtre. Ce à quoi viendront s'ajouter des dispositifs propres au pastoralisme : une partie des aides sera étendue, pas à tous les États, ce qui coûterait trop cher, mais des propositions sont faites dans le cadre du deuxième pilier, qui pourraient intéresser des régions telles que la Corse, dont on connaît la typicité et la spécificité de l'agriculture.

Quoi qu'il en soit, je tiens ce soir à vous rassurer : Le Gouvernement est favorable à la convergence.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous remercie, monsieur le ministre.

La séance des questions à un ministre est terminée.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Prochaine séance, mercredi 12 juin 2013 à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Explications de vote et vote sur la proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conditions de privatisation de la Société nationale Corse Méditerranée ;

Proposition de résolution européenne relative au respect de l'exception culturelle.

La séance est levée.

La séance est levée à vingt-trois heures vingt.

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Nicolas Véron