La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
La parole est à M. Éric Ciotti, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, depuis quelques jours, nos concitoyens assistent, médusés, au psychodrame que leur offrent la majorité et le Gouvernement dans l’affaire Leonarda. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Les ministres s’insultent, des anathèmes sont lancés, la majorité se déchire, et la compagne du Président de la République se croit autorisée à se mêler de ce débat. Pourtant, cette affaire est très simple : il s’agit de l’exécution d’une décision de justice, après que quatre juridictions ont été saisies de la situation d’une famille qui a délibérément menti pour obtenir le statut de réfugié politique.
Ce qui est plus grave, c’est que le Président de la République lui-même, en dépit du principe de respect des décisions de justice, a cru bon d’intervenir. C’est grave sur la forme – est-il normal que le Président de la République ouvre un dialogue avec Leonarda ? – et sur le fond : est-il normal qu’il ouvre un débat, remettant en question l’autorité de la chose jugée et, tout simplement, le principe de l’autorité républicaine ?
En fait, ce qui est en cause, dans ce dossier, c’est la capacité de votre gouvernement à décider. Pierre Mendès France disait : « Gouverner, c’est choisir ». Pour le Président de la République, gouverner, c’est transiger, c’est concéder, c’est renoncer. Il confond en permanence la loi de la République avec une motion de synthèse du parti socialiste !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le Premier ministre, quand allez-vous cesser d’abaisser notre pays et de donner une image pitoyable de la France sur la scène internationale ?
« Bravo !» et applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI. – Exclamations et huées sur les bancs du groupe SRC.
Un peu de calme, je vous en prie !
La parole est à M. le Premier ministre.
Monsieur le député Ciotti, il serait bon – le conseil vaut pour vous comme pour tout le monde – de passer de l’émotionnel au rationnel (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP)…
…des calculs politiciens aux principes de la République. Je vous le dis à vous, monsieur Ciotti, mais aussi à M. Copé, qui est en train de préparer l’abandon du droit du sol au profit du droit du sang : ça, ce n’est pas la République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
S’agissant du cas de cette famille, que vous venez d’évoquer, j’ai, ici même, la semaine dernière, exprimé le point de vue du Gouvernement.
J’ai indiqué qu’un rapport serait demandé
« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP
et qu’au-delà de l’émotion, que je pouvais comprendre, le Gouvernement en tirerait toutes les conséquences. C’est ce qu’a fait le Président de la République. Le rapport a été remis au ministre de l’intérieur, Manuel Valls, qui l’a présenté au Président et à moi-même, et le Président de la République a annoncé très clairement les choses. (Sourires et exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Tout d’abord, s’agissant de l’éloignement du territoire national de cette famille, tout a été fait, après l’épuisement de tous les recours, dans le strict respect de notre droit. Le Président de la République a rappelé à juste titre que, dans un État de droit, dans une République, la base de la cohésion, de la confiance, c’est le respect de notre loi et de notre droit.
Il a également indiqué que l’émotion a été suscitée par une erreur de discernement, l’un des membres de la famille, une jeune fille, ayant été interpellée à l’occasion d’un déplacement scolaire. Depuis, une circulaire, préparée samedi après-midi en interministériel à Matignon, a été signée par le ministre de l’intérieur et adressée à tous les préfets de France.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.
L’école sera protégée. Elle doit l’être, car elle protège et doit protéger les enfants, quels qu’ils soient !
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.
Rien d’autre n’a été rappelé ; vous pourriez donc parfaitement adhérer à ce que je viens de dire.
Ensuite, en raison de ces circonstances, le Président de la République a rappelé que la République, c’était le droit, mais aussi l’attention, la sensibilité, la fraternité et l’humanité. Un geste a donc été fait.
Il est proposé à cette jeune fille, si ses parents en décident ainsi, de poursuivre sa scolarité en France où des membres de sa famille vivent en situation régulière. Après, ce sera à la famille, aux parents, de décider.
Voilà la règle qui a été rappelée.
Il est important de rappeler en permanence la règle commune, car c’est la base du pacte républicain. Mais le pacte républicain, c’est aussi l’attention et la fraternité – je n’ai pas dit autre chose, la semaine dernière. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Votre président de groupe, M. Jacob, emporté une fois de plus par son élan, m’a demandé de poser à l’Assemblée nationale la question de confiance.
« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP.
Eh bien, mesdames, messieurs les députés, je n’ai aucun doute sur le fait que je recevrai, dans quelques instants, à l’occasion du vote de la première partie du projet de loi de finances, la confiance d’une large majorité de l’Assemblée nationale pour mettre en oeuvre le projet du Président de la République : le redressement de la France, la bataille pour la croissance, pour l’emploi, la solidarité et la justice. Voilà notre politique ! Vous pouvez continuer ; nous, nous gardons notre cap, et c’est celui de la France !
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe écologiste. – De nombreux députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent. – Vives exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.
La parole est à M. Guillaume Bachelay, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse à M. le ministre du budget. Depuis un mois, notre assemblée débat du projet de loi de finances pour 2014, en commission et dans notre hémicycle.
Ce budget est d’abord celui de l’inversion durable de la courbe du chômage.
Rires sur quelques bancs du groupe UMP.
Tel est l’objectif fixé par le Président de la République, dont la réalisation passe par 150 000 emplois d’avenir et 100 000 contrats de génération d’ici fin 2014.
Ce budget est aussi celui de la reprise économique et de la transition écologique, qui sont des objectifs liés : investissements d’avenir, TVA à taux réduit pour la rénovation thermique des logements et soutien aux PME. Il y a là un nouveau modèle de développement que nous soutenons.
Ce budget est celui du rétablissement continu des finances publiques : maîtriser nos déficits, ce n’est pas un enjeu de comptabilité mais de souveraineté. L’année prochaine, 80 % de l’effort proviendra d’économies, ce qui est inédit, tandis que nos priorités seront préservées : éducation, logement, santé et sécurité. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)
Ce budget est enfin celui du pouvoir d’achat.
« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.
Le Gouvernement avait proposé le dégel du barème de l’impôt sur le revenu assorti d’une décote. Les députés du groupe SRC y ont ajouté le revenu fiscal de référence.
Toutes ces mesures de justice fiscale ont un objectif, mes chers collègues : réparer et corriger des décisions fiscales injustes prises avant 2012 qui ont fait entrer dans le champ de l’impôt un certain nombre de nos concitoyens, retraités et salariés modestes, qui n’avaient pas vocation à y entrer.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
Ces mesures de justice fiscales, nous les avons votées et vous, à droite, les avez rejetées. Il est vrai que vous aviez au cours des derniers jours du débat budgétaire, mes chers collègues de l’opposition, d’autres préoccupations, comme l’abaissement de l’impôt sur la fortune que nous avons combattu et rejeté.
Dès lors, monsieur le ministre, ma question est simple. Pouvez-vous nous dire en quoi le budget, enrichi par le travail parlementaire, répond aux attentes des Français ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.
monsieur le député Guillaume Bachelay, les députés de la majorité ont très largement contribué à amender positivement le budget, ce dont je les remercie.
Il en résulte un budget favorable au pouvoir d’achat corrigeant un certain nombre d’injustices dont nous avons hérité.
Lorsque nous décidons, monsieur le député Bachelay, la réindexation du barème de l’impôt sur le revenu, nous prenons une mesure de pouvoir d’achat. Lorsque nous décidons de l’assortir d’une décote, nous prenons une mesure de pouvoir d’achat. Lorsque nous décidons d’augmenter le plafond du revenu fiscal de référence afin de faire sortir du champ de l’impôt des milliers de Français, en particulier âgés, qui y sont entrés, nous prenons une mesure de pouvoir d’achat.
Lorsque nous décidons de financer, à hauteur de deux milliards d’euros, des emplois d’avenir et des contrats de génération afin que des jeunes qui n’ont pas accès à l’emploi, ni à la consommation, ni à l’avenir puissent enfin en construire un pour eux et leur famille, nous prenons une mesure de pouvoir d’achat.
Lorsque nous décidons la mise en place des tarifs sociaux de l’électricité afin que le prix de l’énergie ne grève pas le budget des Français les plus modestes, nous prenons une mesure de pouvoir d’achat.
Lorsque nous décidons de financer, pour les jeunes ayant droit à l’autonomie, près de 100 000 bourses leur permettant de suivre leurs études, nous prenons pour eux une mesure de pouvoir d’achat.
Lorsque nous décidons d’augmenter le RSA de 2 %, au-delà de l’inflation, monsieur le député Bachelay, nous prenons une mesure de pouvoir d’achat.
Lorsque nous décidons des mesures fiscales en faveur des entreprises, comme la réforme de la taxation des plus-values sur valeurs mobilières, les mesures en faveur des jeunes entreprises innovantes et le CICE, nous prenons des mesures pour l’emploi, le retour de la compétitivité et le retour de notre appareil productif dans la compétition internationale.
Ce budget est un bon budget. Merci à la majorité du travail qu’elle a réalisé !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Projet de loi de finances pour 2014
La parole est à M. Franck Reynier, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Vous allez soumettre, monsieur le Premier ministre, le projet de loi de finances 2014 au vote de notre assemblée. Nous vous demandons une nouvelle fois d’écouter les Français et de décréter un cessez-le-feu fiscal.
Vous avez dépassé les limites de l’acceptable et les Français n’en peuvent plus.
Nous, centristes, réclamons depuis toujours l’application de la règle d’or, consistant à ne pas dépenser au-delà des recettes. Cela implique de réduire nos dépenses, pas d’augmenter les recettes par des impôts supplémentaires ! Vous assommez les Français depuis dix-huit mois !
Vous nous avez affirmé dans cet hémicycle, monsieur le Premier ministre, que neuf ménages sur dix ne seraient pas touchés par les hausses d’impôts. Mais les salariés effectuant des heures supplémentaires ont été touchés par la fin de leur défiscalisation et perdent à présent 500 euros par an en moyenne ! Seize millions de foyers ont été touchés par le gel du barème de l’impôt sur le revenu ! L’augmentation de la TVA le 1er janvier 2014 frappera tous nos concitoyens dans leur vie quotidienne, en matière de transport et de logement. Près d’un million de ménages sont devenus imposables ! Vous prélèverez en 2014 douze milliards d’euros supplémentaires dans les poches des Français. Rien de tout cela ne réduira le déficit de notre pays, ni sa dette, ni son taux de chômage. Alors, changez de méthode, réduisez les dépenses et décrétez enfin le cessez-le-feu fiscal !
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur quelques bancs du groupe UMP.
Les impôts, monsieur le député Reynier, c’est comme le cholestérol. Ce n’est pas la dernière tranche de fromage qui est à l’origine de la mauvaise analyse de sang.
Rires et applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.
Je vous rappelle, pour filer la métaphore, ce que les Français, qui ont eu droit à l’inoculation de beaucoup de mauvais cholestérol, vous doivent. Vous vous indignez, monsieur le député Reynier, de l’overdose fiscale. Mais pourquoi ne vous êtes-vous pas levé pour vous indigner en 2011, lorsque vous étiez dans la majorité qui a prélevé près de vingt milliards d’euros sur les Français ? Pourquoi ne vous êtes-vous pas levé en 2012, lorsque la précédente majorité a prélevé près de douze milliards d’euros sur les Français, soit en tout trente-deux milliards d’euros en l’espace de dix-huit mois ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
Vous qui n’aimez pas le mauvais cholestérol, monsieur Reynier, pourquoi ne vous êtes-vous pas levé lorsque la précédente majorité a pris des mesures comme la non-indexation du barème de l’impôt sur le revenu et la suppression de la demi-part des veuves, à cause desquelles de nombreux Français sont entrés dans le champ de l’impôt sur le revenu et se sont trouvés obligés de payer la CSG, la taxe d’habitation et la redevance télévisuelle alors qu’ils font partie des plus modestes ?
Je tiens à dire à ces Français qui nous regardent que toutes ces injustices, ils vous les doivent ! Ils les doivent à la précédente majorité et ils nous doivent à nous de les avoir corrigées par la réindexation du barème de l’impôt sur le revenu, par la décote, par l’augmentation du plafond du revenu fiscal de référence. De même, ils nous doivent un plan d’économies exceptionnel de 15 milliards d’euros cette année, là où pendant cinq ans vous avez augmenté de 170 milliards d’euros les dépenses publiques ! Le mauvais cholestérol, monsieur Reynier, c’est vous !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le ministre de l’économie et des finances, la première partie du projet de loi de finances sera votée aujourd’hui. Par ma voix, les députés écologistes souhaitent vous faire part de leur incompréhension face à l’augmentation de la TVA sur les transports collectifs, que vous avez maintenue dans ce budget pour 2014.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UDI et sur quelques bancs du groupe UMP.
Notre priorité commune, c’est d’améliorer et de développer les transports du quotidien. Lors de la campagne présidentielle, mais aussi après l’accident tragique de Brétigny-sur-Orge dans l’Essonne, vous avez maintes fois réaffirmé cet engagement. Or, ce projet de loi de finances, en augmentant de 7 à 10 % la TVA sur les transports collectifs, va dans le sens inverse ! C’est là, me semble-t-il, une double erreur : pour le pouvoir d’achat des usagers, d’abord, pour l’investissement dans les réseaux ensuite.
Pour les usagers d’abord : vous le savez, monsieur le ministre, près d’un citoyen sur cinq sera directement pénalisé par cette mesure, parce qu’il emprunte quotidiennement les transports collectifs. Alors que ces usagers sont des personnes à revenus modestes, la RATP ou la SNCF ont déjà annoncé qu’elles allaient répercuter au moins une partie de cette hausse sur le prix des billets.
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP.
Mais cette mesure va aussi nuire à l’entretien des réseaux. Alors que les collectivités locales avaient déjà vu leur facture alourdie de 84 millions d’euros lors de la précédente augmentation de TVA en 2011, cette nouvelle hausse pourrait leur coûter plus de 150 millions d’euros. Comment, dès lors, pourront-elles continuer à investir pour améliorer la sécurité du réseau et développer de nouvelles offres de transport – alors même que leur priorité, et la nôtre, doit être d’offrir à nos concitoyens des alternatives au tout automobile ?
Ma question est donc la suivante, monsieur le ministre : reviendrez-vous sur l’augmentation de la TVA sur les transports collectifs ? Plus généralement, quelles sont les mesures que vous comptez prendre pour donner corps à votre engagement d’améliorer les transports du quotidien ?
Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur plusieurs bancs du groupe UDI.
Madame la députée, je vous remercie pour votre question qui fait suite au débat parlementaire sur le projet de loi de finances, qui nous a permis de prendre énormément de décisions dans le domaine de l’environnement : je pense notamment au taux réduit de TVA sur le logement social, qui permettra de bâtir des logements de haute qualité environnementale, et sur la rénovation thermique.
Vous avez raison de dire que la question du transport a été posée à l’occasion de l’examen de nombreux amendements auxquels nous n’avons pas pu donner suite, et je vais expliquer pourquoi.
Tout d’abord, cette mesure a un coût extrêmement important…
…qu’il était difficile de gager. Je sais qu’un certain nombre de députés ont proposé que l’on ne couvre pas la totalité du champ des transports, mais simplement le transport en régie. Malheureusement, pour des raisons tenant à la réglementation européenne, il n’était pas possible, à moins de courir un risque de non-eurocompatibilité, de prendre une mesure qui n’aurait concerné que les transports en régie. Or, comme vous le savez, après avoir soldé un certain nombre de contentieux européens, nous ne voulions pas en ouvrir de nouveaux.
Un deuxième élément est entré en ligne de compte : lorsqu’on examine l’effet du crédit d’impôt compétitivité emploi et de la TVA dans le secteur des transports, on s’aperçoit que ce secteur, toutes structures confondues, est bénéficiaire net des deux mesures à hauteur de 20 millions d’euros.
La troisième raison, enfin, c’est que nous avons décidé d’aider le secteur des transports à travers le programme d’investissements et dans le cadre du travail qui a été fait au terme de la commission Mobilité 21, animée par Philippe Duron, sur décision du ministre des transports, le tout sous la direction du Premier ministre, afin d’accompagner les transports de demain, notamment dans les villes. Cet ensemble de mesures permettra de répondre à une grande partie des préoccupations formulées dans votre question.
La parole est à M. Xavier Bertrand, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, imaginez un grand pays – un pays qui compte, membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU – et imaginez que dans ce pays, durant une semaine, on ne parle que d’une chose : la situation d’une jeune fille renvoyée dans son pays en application de la loi républicaine.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Imaginez que, dès le premier jour, le président de l’Assemblée nationale reprenne le ministre de l’intérieur au moyen d’un tweet ; que, le lendemain, le ministre de l’éducation nationale contredise, lui aussi, le ministre de l’intérieur, dans la cour de la Présidence. Imaginez que, durant cinq longs jours, le Président de la République lui-même ne prenne pas position ! Imaginez que lorsque celui-ci se décide à rompre le silence, il le fasse en s’adressant non pas aux Français, mais directement à cette jeune fille, en lui disant que, même si toutes les procédures ont été respectées, il l’autorise à revenir en France sans sa famille. Pourquoi décide-t-il de prendre lui-même la parole, si ce n’est parce qu’il sait pertinemment que, s’il laisse parler le ministre de l’intérieur, le Premier ministre ne l’acceptera pas, tant ils se détestent ?
Protestations sur les bancs du groupe SRC.– Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Il sait pertinemment que c’est le contraire qui se produira s’il laisse l’autre parler !Parce que le Gouvernement est profondément divisé, le Président est contraint de s’exprimer lui-même !
Mêmes mouvements.
Mais les choses ne s’arrêtent pas là : l’après-midi même, il est contredit par le premier secrétaire de sa formation politique ; le lendemain, un autre parti de sa majorité le critique ; enfin, quelques jours plus tard, le président d’un groupe parlementaire de sa majorité incite les jeunes à descendre dans la rue pour critiquer cette mesure !
Le tableau ne serait pas complet si j’omettais de rappeler que, la même semaine, une sénatrice de sa formation politique, candidate à des primaires, fait huer son nom et celui du Premier ministre : voilà la situation de la France aujourd’hui – car le drame, c’est que le pays que je vous ai décrit n’est pas imaginaire, c’est le nôtre !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Vous avez une responsabilité, monsieur le Premier ministre, c’est de dire au Président de la République qu’à force d’abaisser la fonction présidentielle, il abaisse la France – et ça, nous ne pouvons l’accepter !
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Monsieur Bertrand, quand on surjoue, il faut être excellent si l’on veut espérer convaincre. Vous, vous avez été tellement confus dans votre propos que je vous plains.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Vous avez parlé de la France, mais vous n’avez pas trouvé les mots.
Mêmes mouvements.
Quand j’ai répondu, il y a quelques instants, à M. Ciotti, j’ai dit l’essentiel, à savoir ce que le Président de la République a annoncé samedi. Les choses étant claires, arrêtons maintenant cette exploitation politicienne d’un événement qui est peut-être un drame personnel et familial, mais n’est pas à la hauteur des responsabilités qui sont les nôtres vis-à-vis de notre pays, la France ! (Mêmes mouvements.)
Je crois avoir été clair, mais il y a une telle compétition dans vos rangs, monsieur Bertrand, qu’après M. Ciotti, on aurait pu entendre M. Copé ou M. Fillon – je pense que lui ne dira rien, finalement –, M. Jacob ou d’autres encore !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Vous n’êtes préoccupés que par vos affaires, qui ne sont pas celles de la France. Nous, ce qui nous intéresse, c’est le redressement du pays, c’est la bataille pour la croissance, pour l’emploi et pour la réforme de notre système éducatif, de notre formation professionnelle !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Ce qui nous intéresse, c’est la transition énergétique, c’est de redonner à la France ce qu’elle a perdu depuis dix ans ! Parce que nous refusons le déclin de notre pays, nous voulons être à la hauteur des circonstances et donner à la France son rôle de leader en Europe et dans le monde ! La France, c’est à la fois des valeurs et une République, mais aussi une puissance économique qui, je le rappelle, est toujours la cinquième puissance du monde !
L’auriez-vous oublié en parlant de cette façon, en ramenant à un niveau politicien une affaire humaine, triste et douloureuse ? Ce qui m’intéresse – contrairement à vous, semble-t-il –, c’est l’avenir de la France, et je compte pour cela sur toute la majorité qui, dans quelques instants, va manifester son soutien au Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Patrick Mennucci, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Mmes et MM. les députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent – « Samia ! Samia ! » sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le président, chers collègues, monsieur le ministre de l’éducation nationale, lors de votre visite à Marseille le 16 septembre dernier, j’ai pu mesurer les efforts considérables que vous avez faits en faveur des écoles marseillaises
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
quatre-vingts postes supplémentaires pour Marseille et quinze nouvelles classes pour accueillir les enfants de deux à trois ans à la rentrée de 2013.
Après des années se déroulant au rythme des fermetures de classes et des manifestations, caractérisées par un climat épouvantable, vous avez transformé les choses dans notre ville. Vous avez rappelé que l’école primaire est votre priorité. Vous nous apportez des moyens considérables et les Marseillais vous remercient.
Monsieur le ministre, nous aimerions bien que tous, à Marseille, suivent votre exemple. L’école publique y a été abandonnée, notamment en ce qui concerne la construction et le périscolaire, totalement inexistant. Or, à Marseille, un élève sur deux vient d’un milieu défavorisé, d’une famille pauvre. L’école est la richesse de beaucoup de Marseillais et c’est grâce à elle que, depuis la fin du XIXe siècle, nous avons pu intégrer tant et tant de déracinés, venus dans notre ville trouver la paix et y faire grandir leur famille.
Notre idée de Marseille, c’est de préparer les petits Marseillais à entrer dans l’avenir par la grande porte, celle de l’éducation, de la science, de la République, et non par le souterrain des dealers. C’est sur l’éducation nationale que nous comptons. Monsieur le ministre, qu’envisagez-vous pour accroître encore votre soutien aux écoles marseillaises ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, monsieur le député Patrick Mennucci, vous avez raison
Mêmes mouvements
l’essentiel, c’est la préparation de l’avenir, plutôt que les controverses permanentes du présent ou la tentation de revenir à un passé que nous avons connu et qui a été si néfaste, tant pour la France que pour Marseille. Toute l’action du gouvernement de Jean-Marc Ayrault, c’est bien la préparation de l’avenir. Préparation de l’avenir quand, comme cela vient d’être rappelé par Bernard Cazeneuve, nous luttons contre les déficits. Préparation de l’avenir quand nous luttons contre le chômage, en particulier le chômage des jeunes. Préparation de l’avenir quand nous assurons le développement durable. Préparation de l’avenir quand nous remettons la France sur le chemin de la compétitivité.
Et bien sûr, préparation de l’avenir avec la priorité accordée à la jeunesse et à l’école. Les chiffres et les réalités l’emportent sur les quolibets et les mauvaises polémiques. En 2012, la droite a supprimé, dans votre académie, 504 postes, dont 285 dans le primaire
Huées sur plusieurs bancs du groupe SRC
En 2013, la gauche a créé 282 postes, dont 196 dans le primaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Ce ne sont pas des mots, ce sont des actes. Ce ne sont pas des statistiques, ce sont des visages d’enfants. Je les ai vus à l’école Bernard-Cadenat, je les ai vus, avec vous, au lycée Saint-Exupéry, je les ai vus au lycée Artaud, où un enseignant s’était suicidé face à la difficulté des conditions de travail.
Toute notre action a pour objet de s’inscrire dans la durée : nous avons ainsi ouvert treize classes pour l’accueil des moins de trois ans, on dénombre 38 % de décrocheurs de moins en un an, et nous agissons en faveur du primaire, pour tous les enfants de France, sans discrimination.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Yves Foulon, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de l’éducation nationale, disons-le sans détours : votre réforme des rythmes scolaires est une véritable calamité.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Nous n’avons jamais vu cela. Décidée sans concertation, elle est imposée brutalement aux enseignants, aux enfants et aux parents. Monsieur le ministre, que les choses soient claires : nous ne sommes absolument pas hostiles au principe de faire évoluer le temps scolaire,
Exclamations sur les bancs du groupe SRC
mais votre réforme ne correspond pas aux préconisations du rapport Durand-Breton. Réformer le temps scolaire, ce n’est pas décréter la semaine de quatre jours et demi, c’est revoir la bonne articulation entre le temps d’étude, le temps de loisir et le temps de repos.
Votre réforme a été mal préparée, si bien que les enfants sont déroutés et épuisés.
Mêmes mouvements.
Les plus jeunes, qui ont besoin de repères, n’ont plus deux jours consécutifs avec les mêmes horaires et changent sans cesse d’encadrants.
Les élèves de primaire sont aussi perdus face à des ateliers plus exotiques les uns que les autres : franchement, l’initiation aux claquettes ou au hip-hop, c’est sympa mais est-ce vraiment ce que l’on attend de l’école ?
Les enseignants sont démotivés. Ils n’ont plus de coupure le mercredi et leur travail est désorganisé. À cause de votre réforme, ils sont moins disponibles pour les enfants. Les animateurs chargés des ateliers, eux aussi, grondent. La colère monte. En effet, les salaires ne seront pas versés avant novembre et de nombreux agents n’ont même pas de contrat de travail correspondant à leur emploi. Le désordre est tel que manifestations et grèves s’organisent pour le mois de novembre.
Aussi, dans l’intérêt de nos enfants, retirez cette réforme inapplicable en l’état, ou, à tout le moins, laissez aux maires le libre choix de l’organisation des rythmes scolaires.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le député, je comprends votre souci, qui est l’intérêt des enfants. L’intérêt des enfants, vous en conviendrez, c’est qu’ils aient des enseignants devant eux. C’était devenu difficile – je viens de rappeler des chiffres – partout en France, y compris chez vous, en Gironde, où je me trouvais récemment.
L’intérêt des enfants, c’est bien entendu que ces professeurs soient formés. Vous savez que, ces dernières années, la formation avait été supprimée.
Chez vous, à Bordeaux, en Gironde, comme partout sur le territoire, nous avons recréé des écoles supérieures du professorat et de l’éducation.
L’intérêt des enfants, c’est aussi que les programmes scolaires soient adaptés à leur capacité d’apprendre et à la possibilité pour les maîtres d’enseigner. C’est ce que nous faisons.
Et l’intérêt des enfants, c’est d’avoir du meilleur temps scolaire. Je tiens à vous le dire, car il me semble que vous avez commis une confusion : le mercredi matin, ou le samedi matin pour les collectivités qui le veulent, il n’y a pas de claquettes, il y a l’éducation nationale qui assume ses responsabilités. Alors que vous aviez retiré deux heures au temps scolaire pour lire, écrire et compter, nous avons remis ce temps le matin, car il est plus propice à l’apprentissage.
Le temps périscolaire relève d’autres responsabilités, y compris la vôtre. Le même mal que vous avez fait lorsque vous avez été aux responsabilités de l’État, en enlevant deux heures de temps scolaire aux enfants,
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
vous êtes en train de le reproduire pour le temps périscolaire dans les collectivités dont vous avez la responsabilité. L’éducation nationale, les enseignants assument pleinement leurs tâches, les enfants sont reçus le mercredi matin ou le samedi matin, ils peuvent lire, écrire et compter, et nous assumons pleinement les programmes. Cessez cette confusion,…
…mettez-vous en mouvement, ne pariez pas toujours sur l’échec et la défaite de la jeunesse. Notre pays a aussi besoin de vous : il aimerait vous trouver au rendez-vous.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC - Protestations sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à Mme Pascale Boistard, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse au ministre du redressement productif et j’y associe bien évidemment mes collègues Barbara Pompili et Jean-Claude Buisine.
Monsieur le ministre, hier comme aujourd’hui, les médias ont largement relayé un communiqué de presse de votre ministère annonçant la reprise partielle du site Goodyear d’Amiens-Nord par le groupe Titan. Hélas ! l’absence de confirmation de la part des différents protagonistes du dossier est venue jeter le doute sur cette annonce.
En tant que rapporteure de la commission d’enquête dont cette assemblée a voté la création, j’ai pu entendre, sous serment, depuis le début du mois de septembre, la majorité des acteurs qui se sont exprimés hier sur cette annonce de reprise partielle. Et il est vrai qu’aucun d’eux n’a, dans le cadre de nos auditions, évoqué de récentes discussions avec le groupe Titan.
Monsieur le ministre, le sujet est trop grave, le sort de ces hommes et de ces femmes vivant dans la crainte de perdre leur emploi m’importe trop pour que je me contente de recourir à l’exégèse des propos des uns et des autres dans les médias. Aussi, je vous le demande sans détour : existe-t-il réellement une nouvelle offre de reprise partielle du site Goodyear d’Amiens-Nord ? Si oui, à quelles conditions ? Enfin, quand les acteurs en charge du dossier officialiseront-ils l’existence de ce projet de reprise ?
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.
Madame la députée, voilà six ans que Goodyear a annoncé son désengagement et que les salariés du site d’Amiens-Nord se battent pour défendre leur outil de travail.
Il y a dix-huit mois, M. Maurice Taylor, le PDG du groupe Titan, une entreprise américaine spécialisée dans les pneus agricoles, a proposé de reprendre 537 salariés ; sa proposition n’a pas été acceptée. Lorsque j’ai insisté et l’ai prié par courrier, à la demande du Gouvernement, de revenir, il a adressé une lettre, qui a été rendue publique, désobligeante pour les travailleurs français et pour la France.
Néanmoins, le Gouvernement n’a jamais considéré qu’il fallait désespérer et j’ai toujours souhaité continuer à mener le combat pour sauver l’outil industriel, qui est de bonne qualité, et maintenir un maximum d’emplois, afin de préserver le très bon savoir-faire des employés du site d’Amiens-Nord dans le domaine du pneu agricole.
Nous avons donc fait une recherche mondiale. Un certain nombre de manifestations d’intérêt sont survenues, mais tous ont jeté l’éponge en raison de la conflictualité existant sur le site. Un seul candidat s’est présenté qui a décidé de faire une offre non pas à Goodyear, qui n’en est pas informé, mais au Gouvernement, en demandant à ce dernier de l’aider cette fois à convaincre toutes les parties prenantes : les salariés, Goodyear, les élus, dont vous faites partie.
Nous avons donc repris la discussion, je l’en ai remercié et je l’en remercie publiquement ici car, malgré les mots durs, désobligeants qui ont été prononcés,…
…l’intérêt de la France est de continuer à produire du pneumatique sur le territoire. La proposition est-elle intéressante ? Elle concerne 333 emplois pour 40 millions de dollars d’investissements sur le site. Est-elle moins bonne que la précédente ? Oui, s’agissant du nombre d’emplois sur lesquels le repreneur s’engage. Est-elle meilleure sur d’autres aspects ? Oui, parce que la durée d’engagement est cette fois-ci de quatre ans, et non plus de deux ans. Nous pouvons donc nous mettre tous autour de la table et essayer de réussir ensemble.
(Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe écologiste.
La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, vous êtes au pouvoir depuis un an et demi.
Les décisions, c’est vous qui les prenez, et la responsabilité, c’est vous qui devez l’assumer !
Vous avez mené campagne en mentant aux Français et en les leurrant alors que vous connaissiez parfaitement la violence de la crise économique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Depuis votre nomination, la seule réponse que vous apportez aux Français, c’est l’impôt, encore l’impôt, et toujours l’impôt !
Nous allons commencer à examiner aujourd’hui le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014. Encore une fois, vous préférez opter pour l’impôt et la hausse des cotisations des salariés et des entreprises. Les retraités vont voir leurs cotisations augmenter, les épargnants vont se faire taxer sur l’assurance-vie et sur les plans d’épargne logement, avec effet rétroactif. Les familles sont encore une fois votre cible au travers d’une baisse des prestations familiales. Les transfrontaliers sont stigmatisés. L’emploi est menacé par vos attaques incessantes contre l’industrie pharmaceutique. Bref, tout le monde en prend pour son grade ! Le ras-le-bol fiscal devient le tsunami fiscal…
Vous avez également réinventé la vignette automobile en créant la CASA, la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie ; bravo ! On fait croire aux retraités s’acquittant de cette taxe depuis l’année dernière que le produit servira à financer la perte d’autonomie des personnes âgées. En réalité, il sera utilisé pour boucher les trous de votre budget.
Votre texte ne prévoit pas de réforme structurelle, contrairement à ce qu’avait recommandé la Cour des comptes. Les Français n’en peuvent plus. Même les plus modestes, qui jusque-là ne payaient pas d’impôts, se voient mis à contribution.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Quand aurez-vous enfin le courage de faire des réformes ambitieuses qui servent le pays et qui donnent aux Français le sentiment que tout le monde participe ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Madame la députée Bérengère Poletti, la caricature vous va mal.
L’excès ne permet pas de marquer un cap. Quel est le résultat de la politique que vous avez menée ? Où sont les réformes de structure que vous proclamez ?
Nous allons engager dans quelques instants la discussion sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Ce texte traduit avant tout la volonté du Gouvernement de garantir une protection sociale forte pour l’ensemble de la population, là où vous avez fait le choix du démantèlement et de l’ouverture à la privatisation à bas bruit.
Nous faisons le choix de réformes de structure,…
…notamment pour les retraites, puisque pour la première fois nous allons pouvoir tenir compte de la vie professionnelle pour définir les conditions de départ en retraite. C’est ainsi que nous garantissons l’avenir de notre système de retraite alors que vous, vous l’avez plongé dans le déficit et dans l’injustice.
Nous opérons également une réforme de structure en matière de politique familiale, afin de combler le déficit que vous avez creusé.
Pour notre part, nous avons fait le choix de concentrer les ressources sur l’ensemble des familles et de permettre la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale.
Nous menons une réforme de structure, enfin, en matière de politique de santé, puisque nous faisons le choix fort de réorganiser celle-ci autour de la médecine de proximité, du médecin traitant…
…et de recentrer l’hôpital public autour de ses missions prioritaires.
Vous le voyez, madame la députée, nous faisons le choix de la solidarité et d’une protection sociale forte alors que vous avez abandonné les Français face aux rigueurs de la vie.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Jacques Moignard, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Ma question s’adresse à M. le ministre délégué chargé des transports.
À l’issue des travaux de la commission « Mobilité 21 », dont la mission était de préciser les conditions de mise en oeuvre du schéma national des infrastructures de transport, un rapport vous a été remis en juin 2013. Il est apparu que tous les projets inscrits au schéma national en 2010 ne pourraient pas être réalisés dans un délai raisonnable, c’est-à-dire avant 2030.
Le 9 juillet dernier, M. le Premier ministre a rendu son arbitrage ; il a choisi le scénario le plus ambitieux dans son projet « Investir pour la France ». Les priorités d’investissement de l’État ont été ainsi fixées et la ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse apparaît comme la seule ligne qui sera construite avant 2030.
Il faut bien sûr se féliciter d’une décision qui donne à Toulouse, quatrième ville de France, ainsi qu’à toute la région Midi-Pyrénées des perspectives à la hauteur des enjeux de son développement, dans une zone où la progression démographique est forte. En effet, cette ligne mettra Toulouse à trois heures vingt de Paris – au lieu de cinq heures quarante actuellement – et permettra de transporter 6 millions de voyageurs de plus par an. Les études élaborées au niveau local permettent de placer la ligne à grande vitesse au coeur des territoires. Il faut bien convenir que ce n’est pas là une mince affaire.
Vous le voyez bien, l’impact en termes de maillage national est incontestable, mais ce chantier de grande ampleur va également constituer une source d’activité bienfaitrice dans le contexte économique actuel, avec l’emploi, toujours l’emploi, en ligne de mire. Voilà bien, en effet, les effets évidents de tels investissements, l’histoire nous l’a déjà démontré.
Dans cette perspective, monsieur le ministre, pouvez-vous nous informer des étapes qui vont marquer le déroulement de ces travaux – enquête d’utilité publique, appels d’offres et programmations diverses ?
Afin de consolider les perspectives d’aménagement des gares et des réseaux routiers de raccordement, que je qualifierai de « collatéraux » et qui seront supportés par les collectivités locales, il importerait de préciser également les modalités de finalisation de ce bel ouvrage du futur.
Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le député, à la suite des recommandations de la commission parlementaire « Mobilité 21 », présidée par votre collègue Philippe Duron, M. le Premier ministre a, en effet, défini les principes de la politique des transports et des infrastructures pour le pays,…
…lesquels se déclinent en deux temps.
Tout d’abord, priorité est donnée à la modernisation du réseau existant, avec la nécessité de répondre aux enjeux et aux préoccupations de nos concitoyens, à la fois en termes de qualité de service, de régularité, de confort, mais aussi de sécurité.
Ensuite, au-delà de cette nécessaire modernisation de l’existant, nous poursuivons de grands projets, dans le cadre d’une programmation qui, rompant avec des habitudes passées, puisse être à la fois réaliste et soutenable. Il s’agit de projets structurants, souvent transeuropéens et assurant un aménagement cohérent du territoire.
Le Gouvernement s’est donc donné comme feuille de route – vous l’avez souligné –, un scénario ambitieux fondé sur une politique globale. D’ici à 2030,…
Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.
…trente milliards seront engagés, financés, pour ce qui est des grands projets, par l’Agence de financement des infrastructures de transport de France et les collectivités locales ; 30 milliards seront mobilisés dans le cadre des contractualisations État-régions, sans oublier le grand projet de modernisation de l’infrastructure ferroviaire de 2,5 milliards par RFF.
La ligne Tours-Bordeaux sera en effet mise en service en 2017. Le projet de LGV Bordeaux-Toulouse – car tel était le sujet de votre question –, dans le cadre du grand projet ferroviaire du Sud-Ouest, sera, conformément aux volontés et aux conclusions de la commission « Mobilité 21 », lancé et mené à son terme. Le tracé en a été finalisé ; le travail et la concertation ont été engagés. Dans les tout prochains jours, je pourrai annoncer le tracé retenu.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Frédéric Reiss, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Les impôts vont battre tous les records en 2014
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP
et la pause fiscale annoncée n’est qu’un miroir aux alouettes. Interviendra-t-elle en 2015 ? En 2016 ? Peut-être en 2017 ? Plus personne n’y croit !
« Il n’y aura pas d’autre impôt sur les ménages que l’augmentation annoncée de la TVA », a déclaré le ministre de l’économie et des finances. Résultat, les ménages vont payer 12 milliards de plus en 2014.
La seule bonne nouvelle pour le contribuable était la baisse du taux de TVA de 5,5 % à 5 %. Mais, une fois de plus, les engagements ne sont pas tenus : en maintenant le taux à 5,5 %, l’État va engranger 750 millions d’euros supplémentaires.
Certes, ce taux devrait bénéficier aux travaux de rénovation thermique, mais cela ne suffit pas à rassurer la Fédération française du bâtiment, inquiète de l’augmentation du taux intermédiaire à 10 %, tout comme les secteurs du bois de chauffage, de la restauration, des transports ou des déchets.
Pour des personnes modestes obligées de prendre quotidiennement les transports en commun, l’augmentation de 3 % de la TVA sera dramatique. Il en est de même pour les déchets.
En 2011, l’ancienne opposition, qui est l’actuelle majorité, s’était prononcée vigoureusement pour que le traitement des déchets soit reconnu comme un service de première nécessité, martelant que l’augmentation de la TVA porterait nécessairement sur le porte-monnaie des Français.
L’actuel rapporteur général du budget avait même déclaré : « Augmenter la TVA sur la collecte des déchets, ce n’est assurément pas une mesure de justice sociale ni de solidarité ».
Dans ce domaine, comme dans bien d’autres, ce sont les collectivités territoriales qui devront assumer les incohérences gouvernementales. Monsieur le Premier ministre, le cap de votre politique fiscale n’est-il pas celui du naufrage ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le député, je vous remercie pour votre question. Je voudrais en profiter pour apporter quelques précisions sur ce que nous faisons en matière de TVA et d’augmentation de la pression fiscale.
Comme vous le savez, le précédent gouvernement, comme le nôtre d’ailleurs, s’était engagé, dans le cadre de la stratégie de rétablissement de nos comptes devant la Commission européenne, au titre du semestre européen, à augmenter la pression fiscale de 0,3 % en 2014.
Pour des raisons qui tiennent au fait que nous souhaitons accompagner le retour de la croissance et que nous avons conscience que beaucoup de prélèvements ont été faits sur les Français,
« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP
nous avons décidé d’augmenter de 0,15 % de la pression fiscale. Abstraction faite de l’effet de la lutte contre la fraude fiscale, la hausse est en fait de 0,05 % en 2014.
Nous avons, il est vrai, décidé de financer le crédit d’impôt compétitivité emploi par 10 milliards d’économies sur les dépenses, mais aussi par une augmentation de 6 milliards de la TVA.
Cette augmentation de la TVA, malgré tout, est bien moindre que celle que vous aviez décidée, à hauteur de 13 milliards d’euros. Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, le taux de TVA était de 21,2 %. Nous l’avons ramené à 20 %.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Vous savez très bien, monsieur le député, que vous appartenez à une organisation politique dont le président, M. Copé, a indiqué que si – par malheur ! – vous reveniez au pouvoir,…
…vous prendriez par ordonnance une disposition transférant 20 milliards d’euros des entreprises vers les ménages par une augmentation de quatre points de la TVA.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Je ne comprends donc pas comment vous pouvez vous interroger sur une augmentation de la TVA destinée à accompagner 20 milliards d’allégements nets de charges alors que vous ne dites rien des propositions de votre parti et des décisions que vous avez pu prendre par le passé.
Voilà la réalité de ce que nous faisons et celle de ce que vous voulez faire.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur certains bancs du groupe écologiste.
La parole est à M. Eduardo Rihan Cypel, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le Premier ministre, le journal Le Monde a révélé, hier, que l’Agence nationale de sécurité des États-Unis avait intercepté des données personnelles de citoyens français. Ces interceptions concernent de simples courriels et des conversations téléphoniques. La NSA a opéré une véritable opération massive de collecte de données personnelles. Cette pratique est inacceptable de la part d’un pays allié et ami.
Le gouvernement de la France a eu raison de convoquer l’ambassadeur des États-Unis pour lui demander des explications précises et, surtout, l’arrêt immédiat de ce qui constitue une violation de la protection des données personnelles des Français.
La lutte contre le terrorisme est légitime, mais elle ne doit pas se faire au détriment des libertés individuelles. Il faut donc s’assurer qu’à l’avenir cette situation ne se reproduise pas.
Ces interceptions ont aussi pour but le cyberespionnage. Elles menacent à la fois nos intérêts stratégiques, économiques ou industriels.
Le cyberespionnage représente une menace réelle pour la souveraineté nationale : pas un jour ne se passe sans qu’une entreprise ne fasse l’objet de cyberattaques. Peu de textes internationaux et européens encadrent ces activités. C’est pourquoi de nouvelles règles doivent être fixées face à une avancée technologique inédite dans l’histoire de l’humanité.
La cybersécurité doit être une priorité pour la France comme pour toute l’Europe, laquelle doit être en première ligne pour nous protéger des cybermenaces, assurer la protection des données personnelles et imposer des normes là où règne un vide juridique.
Le Conseil européen, qui se réunira en décembre avec la politique de sécurité et de défense commune à l’ordre du jour, pourrait être le bon cadre pour poser le sujet.
Monsieur le Premier ministre, quelles réponses avez-vous d’ores et déjà reçues du gouvernement des États-Unis ? Que compte proposer le Gouvernement en la matière lors du conseil européen de décembre ?
Monsieur le député Eduardo Rihan Cypel, nous devons être conscients de la gravité des derniers événements : ce n’est pas rien. Cette pratique est préoccupante, voire choquante ! Choquante parce que rien ne justifie de tels agissements entre deux pays amis et alliés
« C’est certain ! » sur les bancs du groupe UMP
et parce qu’elle porte atteinte à la vie privée de nos compatriotes.
La France a immédiatement réagi.
Je suis intervenu hier. L’ambassadeur des États-Unis a été immédiatement convoqué au ministère des affaires étrangères.
Le Président François Hollande s’est entretenu hier soir avec le Président Obama pour lui demander des explications
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
et surtout exiger que ces pratiques cessent au plus vite et qu’une coopération s’organise entre nos deux pays pour lutter contre tous les dangers et les risques du terrorisme, puisqu’il s’agirait là des raisons qui motivent de telles pratiques.
Cela ne justifie pas que l’on porte atteinte à un certain nombre de règles de droit et de principes, en particulier à la vie privée de nos compatriotes. Le ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius, a rencontré son homologue John Kerry.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Le Livre blanc pour la défense, vous le savez…
Brouhaha sur les bancs du groupe UMP.
Cela ne vous intéresse-t-il pas, mesdames et messieurs les députés de l’opposition ?
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Pensez-vous vous en être occupés avant ? Alors, un peu d’attention s’il vous plaît !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.
Le Livre blanc pour la défense n’est pas à mettre à votre actif mais au nôtre ! Le Président de la République en a approuvé le contenu ; il comporte un volet particulier consacré à la cyberdéfense, qu’il faut d’autant plus renforcer en France qu’il est l’un de nos points faibles. Le Sénat vient d’ailleurs d’adopter la loi de programmation militaire qui reviendra bientôt devant l’Assemblée nationale. Chacun sera alors placé face à ses responsabilités.
Ne négligeons pas pour autant la dimension européenne de cette question. D’ici la fin de la semaine, le Conseil européen se réunira. Le Président de la République a demandé que cette question, qui est à la fois nationale et européenne, soit inscrite à l’ordre du jour. Nous devons nous protéger, exiger que de nouvelles règles soient posées. Cela implique que la France et l’Europe, dans un dialogue serein mais ferme et clair, travaillent avec les États-Unis. La sécurité est une exigence, mais elle ne doit pas être garantie à n’importe quel prix ; elle ne doit porter atteinte ni aux libertés ni à la vie privée. Telle est la position de la France !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Gabriel Serville, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Madame la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, voilà deux semaines que le pôle universitaire guyanais est paralysé par un mouvement de grève dont les participants revendiquent une université de qualité et un changement de gouvernance. Le monde universitaire a pris acte des solutions d’ordre matériel et organisationnel que vous avez proposées dans le but de faciliter le retour à la sérénité.
Toutefois, l’intersyndicale et les étudiants continuent de réclamer l’évolution du pôle universitaire guyanais vers une structure forte jouissant d’une parfaite autonomie financière et pédagogique.
Madame la ministre, permettez-moi d’insister lourdement sur la justesse et la pertinence de cette revendication, et ce pour deux raisons.
Tout d’abord, l’extrême faiblesse de l’offre de formation explique que, sur les 35 000 jeunes en âge de faire des études supérieures, seuls 2 720 étudiants ont effectué leur rentrée sur le sol guyanais.
Par ailleurs, les gouvernances locale et interrégionale du pôle universitaire guyanais sont affectées de graves dysfonctionnements qui constituent un point extrêmement critique. Ne pas régler la question de la gouvernance dans les plus brefs délais reviendrait à lancer un très mauvais signal à notre population, car elle a en mémoire les manifestations de révolte qui ont secoué la Guyane en 1996 pour obtenir une académie de plein exercice, dont personne aujourd’hui ne peut nier l’utilité ni l’efficacité.
Contrairement à ce qui s’est dit à l’occasion de ce conflit, la Guyane ne pratique pas la chasse à l’homme. Elle n’est ni raciste, ni xénophobe. Elle, qui a toujours su apporter sa contribution à l’intelligence nationale, voire universelle, à travers l’implication de ses enfants tels Félix Éboué, Gaston Monnerville ou Christiane Taubira, réclame simplement qu’on la respecte. Au nom de sa jeunesse, je vous demande instamment quelles mesures complémentaires vous comptez prendre afin que notre pôle universitaire soit doté à très court terme d’une gouvernance nouvelle.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Monsieur le député Gabriel Serville, le Gouvernement prend très au sérieux les difficultés et les tensions que connaît l’université en Guyane. Pour apaiser la situation et trouver rapidement des solutions durables, une mission a été confiée à deux médiateurs expérimentés, Christian Forestier et Raphaël Robinson. J’ai également demandé à l’inspection générale de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche de dépêcher des médiateurs pour évaluer la gouvernance qui est aujourd’hui remise en cause par un certain nombre d’acteurs universitaires.
Parmi les mesures immédiates qui sont prises, plusieurs concernent les étudiants : ouverture d’une licence professionnelle pour l’environnement malgré le petit nombre d’étudiants concernés – nous espérons que cette disposition permettra d’en accueillir davantage –, amélioration des conditions de logement, engagement anticipé de travaux de sécurité, restauration d’une bibliothèque pour accueillir les étudiants, désenclavement de l’université. Toutefois, ces premières réponses ne suffiront pas et nous devons entendre les revendications du pôle universitaire de Guyane qui souhaite être plus autonome.
Nous avons déjà demandé aux inspecteurs et aux médiateurs d’examiner les conditions d’une plus grande autonomie, notamment au niveau de la licence, dans chacune des composantes de l’université des Antilles-Guyane. Cette proposition a recueilli l’assentiment général.
Vous le voyez, monsieur le député, nous agissons aussi bien pour la réussite des étudiants que pour l’accompagnement de l’autonomie de cette université et son développement. Certes, elle compte seulement 2 500 étudiants aujourd’hui alors que 35 000 jeunes pourraient y étudier, mais nous avons réussi à quadrupler le nombre d’étudiants en Guyane depuis dix ans. Nous sommes à l’écoute du peuple guyanais et soucieux de son avenir, par l’université et la formation de ces jeunes.
La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à M. le Premier ministre. Dans l’indifférence générale d’un gouvernement tendance SFIO – IVe République occupé à ses querelles picrocholines, l’agence Chine nouvelle a déclaré qu’il était temps de penser à un monde désaméricanisé. C’est un nouvel épisode de la guerre monétaire, financière et économique brutale qui se livre sur l’ensemble de la planète.
Tandis que la Chine se dote d’une flotte de haute mer et préempte l’ensemble des matières premières du monde, que le Japon et la Corée du Sud se constituent une force de premier rang, la France baisse odieusement les dépenses militaires.
Monsieur le ministre de la défense, vous mentez aux Français, vous prétendez que vous allez respecter une loi de programmation militaire où il manquera deux milliards d’euros.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Quels régiments allez-vous supprimer ? Déjà, un régiment de dragons, bientôt un régiment d’artillerie et un régiment d’infanterie supplémentaire. Vous mentez systématiquement aux Français, car vous savez très bien qu’en 2015, vous demanderez aux chefs d’état-major de baisser encore la garde.
Depuis Marathon, les démocraties savent pertinemment que pour se battre et maintenir le niveau de vie des citoyens, il faut une défense forte, une économie et une culture souveraines. Mais la France désarme massivement.
Dans les armées, monsieur le ministre, il y a des formations et de vrais emplois, non pas des emplois aidés pour les jeunes. Mais vous vous apprêtez à mettre au chômage plus de 1 500 officiers par an.
Sommes-nous plus riches, monsieur le Premier ministre, parce que vous baissez les crédits militaires ? Y a-t-il moins de chômeurs en France parce que vous supprimez des régiments ? Non, monsieur le Premier ministre ! Vous abaissez la France, vous réduisez les crédits militaires et vous porterez une lourde responsabilité devant le pays. Vous mentez aux Français ! À droite, nous devons nous engager à porter la part des dépenses militaires à au moins 2 % du budget !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le Premier ministre, nos gendarmes n’ont plus le carburant nécessaire pour assurer la sécurité ; la flotte est aux abois. Quand prendrez-vous en compte les réalités françaises ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Nicolas Dhuicq, je ne suis pas certain qu’il faille polémiquer sur les questions de défense.
Protestations sur les bancs du groupe UMP.
En ce qui me concerne, je m’y refuse car la défense, c’est le bien précieux de la nation. Les politiques de défense s’inscrivent dans la continuité républicaine et toute outrance dans ce domaine me paraît néfaste pour l’intérêt national. Il peut y avoir des différences d’appréciation, mais, honnêtement, mettre la polémique à ce niveau ne semble pas convenable.
Je le dis d’autant mieux qu’hier soir, au Sénat, une majorité significative a approuvé la loi de programmation militaire.
Une majorité qui dépasse de manière significative la majorité sénatoriale.
Pourquoi ? D’abord parce que le Président de la République et le Premier ministre ont décidé de sanctuariser les 190 milliards d’euros destinés à notre défense sur les six ans qui viennent, en continuité avec les montants financiers qui étaient affectés à la défense en 2012.
Par ailleurs, cette loi de programmation garantit à la France sa sécurité, en faisant en sorte que les trois missions majeures de notre défense – protection du territoire, dissuasion avec ses deux composantes, capacité d’intervention, en situation de crise ou de coercition – soient respectées et validées.
Je peux vous dire, monsieur le député, qu’en comparant les efforts des uns et des autres, en 2019, au terme de cette loi de programmation, la France aura la première armée d’Europe. C’est un point qui devrait vous faire réfléchir.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe RRDP.
La parole est à Mme Linda Gourjade, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à Mme la ministre des droits des femmes. Le Gouvernement de la gauche a placé l’égalité entre les femmes et les hommes au coeur de son action. Depuis plusieurs mois, alors que, malheureusement, cette politique publique a été négligée pendant dix ans, le Gouvernement s’investit concrètement pour faire progresser l’égalité dans toutes les sphères de la vie des Français.
À l’école, au travail, dans le logement, dans le sport, dans l’accès à l’initiative économique, oui, notre pays doit fournir des efforts pour faire avancer l’égalité ! Une nouvelle illustration de la volonté indéfectible du Gouvernement en la matière a été donnée à l’occasion de la réforme des retraites portée par Marisol Touraine.
Madame la ministre, la première édition de la semaine de l’égalité professionnelle s’est tenue la semaine dernière. Alors que notre majorité s’apprête à adopter de nouvelles dispositions pour parvenir à l’égalité professionnelle dans le cadre du projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes, cette semaine a permis au monde du travail et aux acteurs de terrain de prendre des initiatives locales et nationales pour mesurer l’ampleur du chantier à engager et renforcer les actions déjà entreprises.
Une étude montre que les écarts d’opportunité entre les femmes et les hommes dans la sphère professionnelle demeurent considérables : les rémunérations des hommes restent en moyenne 27 % supérieures à celles des femmes ; les femmes sont quatre fois plus nombreuses à travailler à temps partiel ; elles créent seulement 30 % des entreprises.
Oui, la construction de l’égalité professionnelle est un impératif sociétal, un impératif social et économique, à un moment où nous mettons tout en oeuvre pour relancer la croissance. Madame la ministre, quel bilan tirez-vous de la première semaine de l’égalité professionnelle ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme la ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement.
Madame la députée, notre politique en matière d’égalité professionnelle se résume facilement en trois mots : la loi, l’incitation, l’accompagnement.
La loi, d’abord. Nous appliquons désormais les dispositions qui existaient depuis des années, imposant aux entreprises de réaliser l’égalité professionnelle sous peine d’être sanctionnées. Depuis quelques mois, des contrôles sont effectués, les sanctions tombent : 400 entreprises ont été mises en demeure, 4 ont été sanctionnées et plus de 2 500 plans d’action en faveur de l’égalité professionnelle nous ont été enfin envoyés.
Nous renforçons aussi l’arsenal législatif. Dans le projet de loi que je vous présenterai prochainement, l’accès aux marchés publics sera conditionné au respect des obligations en matière d’égalité professionnelle. La réforme du congé parental permettra de rééquilibrer les responsabilités parentales, donc les opportunités professionnelles entre les hommes et les femmes. Dans la loi de sécurisation de l’emploi, nous avons encadré et limité le temps partiel, qui affecte en premier lieu les femmes, vous l’avez dit. Enfin, dans le projet de loi sur la formation professionnelle, que vous examinerez bientôt, nous veillerons à garantir aux femmes comme aux hommes un meilleur accès à la formation professionnelle.
Il faut aussi de l’incitation, car tout ne peut être appréhendé par la loi. La lutte contre les plafonds de verre est un sujet dont les entreprises, en particulier les grands groupes, doivent se saisir. C’est pourquoi, la semaine dernière, j’ai fait signer à vingt-cinq grands groupes des conventions ambitieuses. Je les ai démarchés pendant de longs mois avant d’aboutir à cela, pour faire en sorte que des objectifs de féminisation des instances dirigeantes soient pris à brève échéance.
Enfin, nous avons publié ce palmarès inédit, qui est une photographie de la trop faible féminisation et la preuve qu’il faut encore poursuivre les efforts. Cela vaut pour le privé comme pour la fonction publique, d’ailleurs. Je vous rappelle que nous ambitionnons d’atteindre 40 % de nominations de femmes dans les cadres dirigeants d’ici 2017.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt.
L’ordre du jour appelle les explications de vote au nom des groupes et le vote par scrutin public sur l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2014 (no 1395).
La parole est à M. Nicolas Sansu, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, chers collègues, nous voici au terme du débat sur le volet recettes du projet de loi de finances pour 2014, qui fixe les prélèvements sur les ménages et les entreprises.
Si le texte n’a que très peu évolué par rapport à sa version initiale, le contexte, lui, s’est alourdi. Les dogmes austéritaires européens font des ravages qui ne sont plus supportables, que ce soit au Portugal, en Italie, en Grèce, à Chypre ou dans notre pays.
En France s’exprime ce qu’un grand quotidien a dénommé « une forme de résignation rageuse ». Après dix années d’une politique de droite qui a laissé le pays déchiré, miné par un endettement public record, des inégalités accrues et un chômage endémique, nos concitoyens se sont prononcés l’an passé pour un changement de cap.
Cette volonté s’est traduite par une victoire des forces de gauche, avec comme ciment l’impérieuse nécessité de combattre la Finance pour remettre l’homme au centre et répondre à l’urgence sociale : répondre à ces salariés de l’agro-alimentaire en Bretagne, qui enragent de voir leur outil de production, leur savoir-faire, leur région, leur vie brisés.
Répondre à ces millions et millions de smicards qui peinent à boucler les fins de mois ; répondre à ces retraités modestes, à ces ouvriers qui sont redevables de l’impôt sur le revenu pour la première fois.
Ce qu’attendent nos concitoyens, c’est un Gouvernement tenant tête aux marchés financiers qui pillent la richesse créée et détruisent des emplois. Si la défiance est aujourd’hui si grande, c’est qu’il n’est plus acceptable que les entreprises du CAC 40 distribuent 40 milliards d’euros de dividendes, alors que tous les ménages modestes et moyens sont mis à contribution. Il n’est plus acceptable non plus,de voir de riches particuliers ou de grandes entreprises soustraire chaque année aux finances publiques 60 à 80 milliards d’euros pour les planquer dans les paradis fiscaux : 80 milliards d’euros, c’est l’équivalent du déficit public de cette année !
Face à la Finance et à ses excès, les députés du Front de gauche ne se résignent pas à l’impuissance publique, car cette impuissance est le terreau sur lequel prospèrent les idées de haine, de division et de « ras-le-bol fiscal », même si l’expression est malheureuse. Il nous appartient collectivement de remettre la justice au coeur des politiques publiques, à commencer par notre fiscalité.
Il s’agit de combattre la rente pour favoriser le travail, de relancer la consommation, d’augmenter les salaires et les pensions pour remettre l’économie sur pied.
Or, avec ce projet de loi de finances pour 2014, vous cédez au prêt-à-penser libéral : beaucoup d’efforts pour les ménages, beaucoup d’égards pour les grandes entreprises.
La mise en place du crédit d’impôt compétitivité-emploi avec, à terme, la diminution de 20 milliards d’euros du produit de l’impôt sur les sociétés, sans contrepartie ni distinction selon la taille des entreprises, est un contresens, et ce d’autant plus qu’il est financé par une hausse de la TVA sur les ménages et par une diminution des services rendus à la population par l’État et les collectivités locales.
Vous ne regardez que le coût du travail, monsieur le ministre, et jamais le coût de la rente. Pourtant, ces trente dernières années, c’est bien le poids exorbitant des prélèvements en dividendes et en intérêts bancaires qui a plombé nos entreprises.
Cette loi de finances est donc une occasion manquée. La France est un grand pays, monsieur le ministre. Nous avons la capacité et le devoir de tracer un nouveau chemin en Europe pour relever le défi de la lutte contre le pouvoir financier, engager la transition énergétique et redonner l’espoir aux peuples. C’est en cela que la France sera grande.
C’est pourquoi nous portons l’exigence d’une vraie révolution fiscale pour redresser nos comptes publics, relancer l’investissement et réhabiliter l’impôt, qui doit redevenir un instrument juste et efficace de réduction des inégalités et de réponse aux besoins sociaux. Tout au long des débats, les députés du Front de gauche auront fait des propositions précises pour rendre l’impôt sur le revenu plus progressif, diminuer la contribution des ménages modestes, augmenter l’impôt sur la fortune, baisser le taux de TVA, qui pèse sur la consommation et la croissance, moduler l’imposition des entreprises en fonction de leur taille et de l’utilisation qu’elles font de leurs bénéfices.
Le sérieux, monsieur le ministre, ce n’est pas la rigueur mais la capacité à s’attaquer aux vraies priorités. « À force de reporter l’essentiel au nom de l’urgence, on finit par oublier l’urgence de l’essentiel », écrivait le sage Garm’Orin. Or, l’essentiel est aujourd’hui de libérer nos concitoyens et nos entreprises des conséquences de la dérégulation financière et de redonner toute leur force aux principes d’égalité, de justice et de solidarité qui forment le ciment du pacte républicain.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, la qualité de nos échanges et le respect mutuel n’effacent pas les divergences profondes sur la France et l’Europe que nous voulons. Or, ce budget, comme l’a dit un parlementaire de votre groupe politique, est marqué par l’empreinte du MEDEF, et nous le regrettons ! C’est pourquoi les députés du Front de gauche se prononceront contre la première partie du projet de loi de finances.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
La parole est à M. Dominique Lefebvre, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, nous allons dans quelques instants adopter la première partie du projet de loi de finances, c’est-à-dire la partie recettes et l’article d’équilibre, au terme de près de cinquante heures de débats et de l’examen de près de mille amendements.
Je veux tout d’abord saluer la qualité de ces débats qui doit beaucoup, monsieur le ministre, à la précision et à la clarté des interventions du ministre délégué au budget, M. Bernard Cazeneuve, mais aussi à son urbanité comme à son humour so british – un humour qui a parfois été très douloureux pour l’opposition, mais si réconfortant pour notre majorité parlementaire.
La qualité de nos débats doit aussi beaucoup à notre rapporteur général, dont la constance, la compétence et la solidité méritent vos applaudissements !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Je veux aussi remercier nos collègues de l’opposition qui y ont participé activement. Je veux surtout les remercier pour leurs expressions et leurs votes, qui éclairent nos concitoyens sur la réalité de la droite française aujourd’hui.
Qu’avons-nous en effet appris au cours de ce débat ? Tout simplement que l’ensemble de l’opposition de droite souffre d’une amnésie profonde au point de s’exonérer de toute responsabilité dans la situation dégradée des finances publiques.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
L’opposition souffre aussi d’une absence totale de cohérence : les mesures d’économies proposées ne sont jamais les bonnes et les mesures fiscales sont dénoncées systématiquement.
En fin de compte, la somme de vos amendements et de vos incohérences revient à ceci : toujours plus de dépenses publiques et moins de recettes, donc plus de dettes. Comme quoi, avec la droite, rien ne change !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Vous nous avez même reproché de ne pas avoir supprimé les mesures que vous aviez prises, telles que le gel du barème de l’impôt sur le revenu en 2013 ou la suppression de la demi-part des veuves en 2009. Vous nous avez surtout montré votre vrai visage, en votant contre l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu et contre la revalorisation du revenu fiscal de référence, tout en bataillant pour revenir sur le plafonnement du quotient familial, sur l’ISF et sur bien d’autres mesures qui ne concernent que les ménages les plus riches.
Bref, nous avons eu confirmation que, pour la droite française, la justice fiscale, c’est pour les riches, tout comme le pouvoir d’achat, qui ne concerne pas les milieux populaires et les classes moyennes. Le pouvoir d’achat, pour vous, c’est pour les autres, mais pas pour les Françaises et pour les Français !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Mais notre débat porte surtout la marque de la cohérence et de la solidarité tant du Gouvernement que de la majorité parlementaire, de nos collègues du groupe écologiste, de nos collègues du groupe radical ou encore, dans le combat contre la droite, de nos collègues du groupe GDR – une cohérence et une solidarité que nous allons retrouver, je l’espère, dans quelques instants, lors du vote de ce budget pour la croissance et l’emploi.
Monsieur le ministre, je souhaite au nom du groupe SRC vous remercier pour l’écoute qui a été celle du Gouvernement, permettant à notre majorité parlementaire d’affirmer dans ce débat ses choix et ses priorités.
Je m’étais engagé, lors de la discussion générale, à ce que le cap donné par le Gouvernement à ce budget, celui de la croissance et de l’emploi, non seulement soit maintenu, mais sorte renforcé de nos débats. C’est le cas, et je veux souligner ici les principales avancées de ce texte.
Tout d’abord, la trajectoire de redressement des finances publiques que nous avons choisie est confirmée : pour la première fois, la dépense de l’État en 2014 baissera de 1,5 milliard d’euros. L’effort portera à plus de 80 % sur des économies, permettant ainsi la quasi-stabilité du niveau des prélèvements obligatoires.
Exclamations sur divers bancs du groupe UMP.
Bref, c’est le budget du refus de l’austérité et du soutien à la croissance. C’est aussi le budget de l’avancée de la transition énergétique, qui donnera un prix au carbone. La transition énergétique est désormais bien en marche.
Surtout, cette première partie contient des mesures significatives pour le pouvoir d’achat : l’indexation du barème proposé par le Gouvernement pour près d’un milliard d’euros ; la revalorisation, à l’initiative du groupe SRC, du revenu fiscal de référence, soit une mesure de pouvoir d’achat de près de 450 millions d’euros ; ou encore le maintien des réductions d’impôt pour frais de scolarité à hauteur de 440 millions.
De plus, la mesure visant à abaisser au taux réduit la TVA sur les travaux de rénovation énergétique dans les logements, soutenue conjointement par le groupe SRC et le groupe écologiste, représente 500 millions en faveur du pouvoir d’achat, de l’activité et de l’emploi. Elle s’ajoute aux mesures déjà prises en matière de TVA pour le logement social et le logement intermédiaire.
Ce budget consacre ainsi près de 2,5 milliards au soutien du pouvoir d’achat, et donc à la croissance et à l’emploi.
Dans le même temps, nous avons adopté des mesures importantes pour soutenir la compétitivité de notre économie et de nos entreprises : 2014 verra la montée en charge du crédit impôt compétitivité emploi, l’application de la réforme de la fiscalité des plus-values de cession des valeurs mobilières à la suite des Assises de l’entrepreneuriat, soit, pour nos entreprises, un allégement total de la fiscalité de plus de 10 milliards d’euros.
Je veux aussi rappeler les mesures relatives à la lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales, la réforme des plus-values immobilières pour soutenir l’effort de construction de logements, les mesures traduisant le pacte de confiance et de responsabilité entre l’État et les collectivités locales.
Croissance, emploi, pouvoir d’achat, transition énergétique : voilà donc les priorités que nous affirmerons en votant ce texte qui se conjugue avec la politique de redressement des finances publiques…
…que les déficits abyssaux légués par la droite nous imposent de conduire.
Les efforts importants demandés aux Français, des efforts que nous avons décidés en responsabilité, donnent de premiers résultats. Il est de notre responsabilité d’accompagner ce mouvement et de lui donner du sens : c’est ce que fait ce texte. C’est pourquoi le groupe SRC votera la première partie du projet de loi de finances.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Hervé Mariton, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, quand la majorité est inconsistante, incohérente et divisée, il n’est pas simple de débattre.
Quand tout échappe à la majorité, comment s’opposer ? Malgré tout, nous avons voulu dans ce débat défendre les Français, défendre nos entreprises, proposer.
Vous affichez, monsieur le ministre, une telle inconscience, une telle méconnaissance des réalités de la France et des Français !
Exclamations sur divers bancs du groupe SRC.
J’ai écouté tout à l’heure le Premier ministre nous parler de confiance ; mais quand le Premier ministre parle de confiance, les Français parlent eux-mêmes, et la refusent. La confiance : pour quelle politique économique ? Nous l’avons dit : vous n’en avez aucune, et les plus aimables diront que vous en avez deux – de sens contraires. Successivement, parfois simultanément, vous augmentez les impôts sur les entreprises, puis, quelques semaines après, vous les baissez, avant de les augmenter à nouveau quelques mois plus tard. Vous proposez un impôt sur l’excédent brut d’exploitation, puis vous envisagez un impôt sur l’excédent net d’exploitation, avant d’opter pour une augmentation dramatique, inégalée en Europe, de l’impôt sur les sociétés.
Le Premier ministre nous a parlé de confiance : elle n’est pas là ! Il nous a également parlé de redressement de la France : de quoi parlez-vous ? Un déficit qui augmente de 20 milliards d’euros, une trajectoire des finances publiques qui pourrait ne pas respecter nos engagements européens l’an prochain ni dans deux ans – ou seulement au prix d’efforts supplémentaires, d’impôts supplémentaires, à hauteur de 20 milliards en 2015 et de 20 milliards en 2016.
Concernant l’emploi, seuls les emplois aidés vous permettent de contenir les chiffres du chômage. Là encore, les réalités du terrain parlent !
Le Premier ministre a également évoqué la croissance – invoqué, devrais-je dire ! Vous confiez le sort de la France au destin ! Vous vous dites qu’avec un peu de chance vous allez arriver au bon moment du cycle, et qu’alors vous pourrez profiter, en passagers clandestins, d’une reprise mondiale et européenne.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Aujourd’hui, les signaux positifs dont vous vous flattez sont minuscules, et nullement à la hauteur de ce que pourrait faire notre pays, nullement de nature à stabiliser réellement et sincèrement la situation de l’emploi.
Une fois de plus, la France sera dans une situation où, après avoir fortement souffert de la crise, elle profitera le moins d’une reprise qu’elle n’aura pas favorisée et dont elle ne développera pas les effets positifs.
Le Premier ministre nous a aussi parlé de justice. Justice ? Vous en parlez, mais les Français subissent encore le matraquage fiscal. Les familles, les personnes paieront l’an prochain 12 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires. Votre politique attaque la famille constamment et de toutes parts. Laissez-moi vous citer, monsieur Moscovici, les propos de M. le ministre Cazeneuve, parus dans Le Monde de ce soir – c’est effarant : la famille serait « sectaire, étriquée, flétrie et petite » !
Le Premier ministre nous a aussi parlé de solidarité. Solidarité ? De quoi parlez-vous ? Les Français les plus modestes souffrent. Pour la première fois en trente ans, le pouvoir d’achat a baissé. Alors, dans ce budget comme dans votre action, vous vous attaquez aux familles, vous vous attaquez aux entreprises – toutes ! Celles qui lèvent des cartons jaunes, les « pigeons » qui se disent pigeonnés, les grandes entreprises elles-mêmes, vous demandent de faire des économies – 20 milliards par an, selon leur souhait – plutôt que de poursuivre cette politique fiscale incohérente.
Nous avons formulé nos propositions : des économies, des réformes structurelles – quand vous masquez votre inaction par la débudgétisation –, moins d’impôts, moins de déficit, moins de dettes !
Certes, notre politique n’a pas été parfaite,
« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Dans ce débat, vous nous avez souvent dénié le droit de critiquer, comme si s’opposer, c’était attaquer la France ! En réalité, s’opposer à votre politique, s’opposer à votre budget, c’est une oeuvre de salut public !
Elle est pleine d’artifices : artifices sur l’emploi, artifices dans le budget ! Elle est pleine d’incohérences : incohérences de la politique économique, de son absence, de sa dualité, de ses contradictions ! Des impôts nouveaux en tous sens…
…, et parfois en sens contraires ; des carences aussi, quand le courage manque pour réformer, pour économiser, pour préparer l’avenir.
Vous l’avez donc compris : nous voterons contre la première partie du projet de loi de finances.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, ce deuxième budget du quinquennat de François Hollande, c’est le budget des illusions perdues, de la poursuite des hausses massives et injustes des impôts sur les ménages, et de l’insuffisante réduction des dépenses publiques, du fait de l’absence des grandes réformes structurelles dont notre pays a besoin.
Tout d’abord, monsieur le ministre, vous poursuivez, en 2014 comme en 2013, la hausse massive des impôts et des cotisations sociales sur les ménages.
L’an dernier, vous aviez essayé de faire croire que seuls les riches paieraient la note, que neuf contribuables sur dix ne seraient pas concernés par les augmentations d’impôts, comme l’avait promis le Premier ministre le 27 septembre 2012. Or cet automne, les Français ont découvert qu’il s’agissait d’un mensonge : ce sont les classes moyennes qui auront payé, en 2013, l’essentiel des 14 milliards d’euros d’impôts nouveaux sur les ménages.
Ainsi, 73 % des Français et 49 % de vos propres électeurs, monsieur le ministre, pensent que votre politique fiscale demande surtout des efforts aux classes moyennes ; et ils ont raison ! Votre politique a d’ailleurs gravement amputé le pouvoir d’achat des ménages, notamment modestes, qui chute, en moyenne, de 1,5 % en 2013, pour la première fois depuis plus de quarante ans.
Pour 2014, la pause fiscale promise « à terme » par le Président de la République n’est qu’un mirage. Ce sont 12 milliards d’euros d’impôts et de cotisations sociales supplémentaires que les ménages français devront payer en 2014, la plus lourde contribution étant supportée par les familles ayant ou ayant eu des enfants.
Dès le 1er janvier, les tarifs des transports publics de voyageurs, tels que la RATP et la SNCF, augmenteront de 3 %, tout comme ceux des ordures ménagères et de tous les biens et services taxés au taux intermédiaire. Même le taux réduit de 5,5 % n’est plus abaissé à 5 %.
À l’égard des entreprises, vous menez une politique qui s’inspire du tango argentin. En 2013, vous accablez les entreprises de près de 14 milliards de hausses d’impôts et de cotisations sociales, aboutissant à ce que nos entreprises aient le taux de marge le plus bas depuis 1986, et le plus faible de toute l’Europe !
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.
En 2014, changement de pied : vous essayez, à travers le crédit d’impôt compétitivité-emploi, d’abaisser les charges des entreprises de 9,7 milliards d’euros par un mécanisme mal ciblé et difficilement compréhensible.
Mais, simultanément, vous portez le taux de l’impôt sur les sociétés à 38 % pour les entreprises réalisant plus de 150 millions d’euros de chiffre d’affaires, soit 2,5 milliards d’euros de charges supplémentaires – taux le plus élevé des pays d’Europe qui, eux, maintiennent ou baissent le taux de leur impôt sur les sociétés.
Vous aviez même inventé un nouvel impôt, la taxe sur l’excédent brut d’exploitation, qui aboutissait à une vraie aberration économique : décourager l’investissement et taxer les entreprises déficitaires ! Comment pouvez-vous encore espérer inverser la courbe du chômage ? Comment voulez-vous redonner confiance aux entreprises, notamment étrangères ?
De plus, en 2014 comme en 2013, les économies que vous prétendez faire sont, pour une large partie, factices. Pour 2013, vous aviez annoncé 10 milliards d’euros d’économies ; la Cour des comptes n’en a trouvé qu’un peu plus de 6 milliards, et la part des dépenses publiques dans la richesse nationale, elle, a encore progressé d’un demi-point, pour atteindre 57,1 %, soit 10 milliards de plus qu’en 2012 – un record historique depuis la seconde guerre mondiale !
En 2014, vous renouvelez les fausses économies. En effet, sur ce que vous présentez comme 15 milliards d’euros d’économies, 9 milliards à peine sont des économies réelles. Après s’être vu décerner la médaille d’argent des dépenses publiques par l’OCDE, ce gouvernement va bientôt être gratifié de la médaille d’or !
C’est pourquoi l’engagement pris fin 2011 par le futur Président de la République de réduire à 3 % de la richesse nationale les déficits publics en 2013, a été repoussé de deux ans, soit à 2015. Il est vrai que le dérapage des déficits publics en 2013 – 4,1 % réalisés contre 3,7 % prévus initialement – risque fort de se poursuivre en 2014, rendant difficile de tenir le modeste objectif de réduction à 3,6 % en 2014 les déficits publics.
Fin 2014, la dette publique atteindra un nouveau record de 95 % de la richesse nationale, soit 1 950 milliards d’euros, ou encore 30 000 euros par habitant ! Le franchissement de la barre des 100 % est d’ores et déjà programmé pour 2016.
Messieurs les ministres, il est grand temps d’engager les réformes structurelles qui s’imposent pour redresser les finances publiques par la baisse résolue des dépenses publiques, et non par la hausse continue des recettes publiques. Pour toutes ces raisons, le groupe UDI votera résolument contre la première partie de la loi de finances.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Monsieur le ministre, au-delà du nécessaire redressement des comptes publics, ce budget traduit deux avancées majeures. La première est l’instauration d’une TVA réduite à 5 % pour la rénovation thermique des logements et la construction de logements publics, mesure qui confirme notre ambition en faveur de la relance du bâtiment, de la construction et de la rénovation de logements. L’objectif est, bien entendu, de permettre à chacun de se loger à coût modéré, mais aussi de créer un élan des ménages et des entreprises pour le « bien habiter », le retour de la confiance et la relance de l’activité économique.
La seconde, et la plus emblématique, est bien la contribution climat énergie, en ce qu’elle engage un nouveau cycle pour notre économie. Parallèlement, le maintien de la réduction d’impôt pour frais de scolarité, comme celui des allocations familiales, traduisent une politique familiale qui considère que chaque enfant se vaut, contrairement au quotient familial que nous avons été contraints de réduire pour combler le déficit de la branche famille laissé par la précédente majorité.
Ce budget dégage également des moyens pour les plus modestes, par exemple avec l’augmentation du RSA, et pour les classes moyennes, avec la revalorisation des bourses que touchent 600 000 étudiants, le relèvement de la décote, l’élévation du revenu fiscal de référence et la revalorisation des tranches du barème qui met les plus modestes à l’abri d’une augmentation des impôts, voire de l’entrée dans l’impôt.
Mais je souhaite centrer mon intervention sur l’introduction de la fiscalité écologique, qui constitue une première dans notre pays. En 2014, le compteur carbone est installé, même s’il tournera au ralenti en 2014 avant d’accélérer progressivement. Cette introduction se fera sans augmentation des prélèvements, comme en atteste la restitution aux entreprises et aux ménages. Nous aurions souhaité une compensation en faveur des ménages, afin de rendre le dispositif plus populaire, mais le fléchage vers les entreprises permet de substituer la taxation des énergies fossiles à celles du travail et de l’énergie humaine pour soutenir nos entreprises dans leur développement et dans la création d’emplois. Cette mesure améliorera la compétitivité de la France par la baisse de l’intensité énergétique. Bien que l’industrie pèse deux fois moins dans le PIB en France qu’en Allemagne, il faut 7 % d’énergie de plus en France pour produire un euro de richesse.
Il faut cependant optimiser l’utilisation du CICE car, vous le savez, chers collègues, il a pour contrepartie l’augmentation de la TVA sur les services de première nécessité à haute valeur écologique – eau, déchets, bois énergie, transports collectifs, etc. Il est donc souhaitable et possible de réduire le poids de la TVA, en particulier la TVA à taux normal. Ce chantier n’est pas clos, et nos propositions, notamment celle visant à assujettir aux taux réduit les transports urbains, le bois énergie ou encore la gestion des déchets liée à l’économie circulaire, n’ont pas reçu d’échos favorables.
Nos amendements visant à supprimer le bonus accordé aux véhicules diesel contre toute rationalité sanitaire et climatique n’ont pas été retenus non plus. Les oxydes d’azote, les fameux NOx, doivent être pris en compte de manière urgente, la situation étant désormais injustifiable et intenable.
Dans ce budget, la priorité est donc accordée aux entreprises : remboursement de la part supplémentaire patronale de cotisation de vieillesse, non-évolution du crédit impôt recherche dont certains abus ont été relevés par la Cour des comptes, crédit d’impôt compétitivité-emploi ne comportant aucun dispositif pour neutraliser les bénéfices opportunistes de certains secteurs tels que la grande distribution.
Cette stratégie en faveur des entreprises doit trouver deux contreparties précises directement liées à ce choix : d’une part, la lutte déterminée contre l’évasion fiscale, qui pourra, qui devra, produire des effets significatifs, bien au-delà des 2 milliards attendus en 2014, pour contribuer utilement au redressement des comptes publics – je salue au passage la détermination du Gouvernement et le rôle majeur joué par la France – ; d’autre part, la poursuite du travail sur la progressivité de l’impôt sur le revenu. Je pense notamment à celles et ceux qui tirent des profits importants des entreprises que nous aidons. C’est tout le sens du débat sur la création d’une tranche supplémentaire de l’impôt à 49 % que j’ai proposée et qui devra trouver toute sa place en se substituant à la taxe exceptionnelle sur les revenus de plus d’un million d’euros.
Tels sont donc, exprimés en quelques mots, monsieur le ministre, nos points de satisfaction, qui sont réels, et nos déceptions que je transformerai en attente. Nous voterons ce budget.
Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.
La parole est à M. Paul Giacobbi, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le ministre, il n’y a rien de plus difficile que de gouverner les finances publiques en temps de crise, et vous en faites l’expérience. Nous connaissons la plus grave crise depuis celle de 1929, à ceci près que l’ampleur de la crise de 2007 a été beaucoup plus violente par rapport aux PIB respectifs du monde de 1929 et de celui de 2007, puisque 5 000 milliards de dollars de valeurs financières ont été détruits. C’est aussi une crise aux multiples facettes, qui a atteint sérieusement les valeurs privées – immobilier, obligations, entreprises – puis les valeurs publiques, jusqu’à menacer le crédit public à l’échelle des continents, de l’Europe d’abord, de l’Amérique aujourd’hui.
Dans un monde bien plus interdépendant qu’il ne l’était en 1929, la crise est universelle, avec des mécanismes de transmission redoutables du public au privé et entre les économies nationales et continentales à l’échelle planétaire.
Nous savons, par exemple, que la menace qui a pesé sur le crédit public des États-Unis menaçait tout à la fois, et menace encore, sous la forme redoutable d’un risque de hausse des taux d’intérêt, tout le système bancaire mondial, ainsi que, à hauteur de 1 300 milliards de dollars, les réserves publiques de la République populaire de Chine.
Dans un contexte aussi grave, le Gouvernement a, pour la première fois, avec un courage que la France n’avait pas connu depuis des décennies, inversé la tendance naturelle à laisser filer les déficits, c’est-à-dire à laisser exploser la dette. L’effort demandé à la nation porte d’abord sur la maîtrise des dépenses. Vous jugez, à droite de l’hémicycle, cet effort insuffisant, et sans doute avez-vous raison,…
…mais c’est tout de même la première fois que l’on touche au coeur de notre dépense publique.
L’imposition a porté globalement beaucoup plus sur les ménages que sur les entreprises, c’est vrai.
Cela peut paraître injuste et attiser tous les embrasements et les indignations démagogiques. Cependant, dans un pays qui bat les records mondiaux d’épargne et où la compétitivité des entreprises est, au contraire, extraordinairement basse, fallait-il ponctionner encore les entreprises par la fiscalité et encourager l’épargne, ou, au contraire, faire contribuer les ménages, en tout cas ceux qui le peuvent, voire ceux qui bénéficient des revenus les plus élevés, et préserver les entreprises pour leur permettre de revenir sur la voie de la compétitivité ?
Le Gouvernement a institué le CICE, dont il est trop tôt pour tirer le bilan, mais dont nous demandons qu’il soit évalué au cours de l’exercice 2014.
Le Gouvernement a préservé le crédit d’impôt recherche, même s’il faut veiller à réprimer des abus qui ne remettent nullement en cause l’intérêt et l’efficacité reconnus de ce mécanisme.
Le Gouvernement a mis à contribution les collectivités territoriales, mais force est de constater que les collectivités sont encore globalement proches de l’équilibre quand l’État en est encore loin.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Ces décisions courageuses ne sont pas populaires, et le sont d’autant moins que le débat a laissé une très grande place, une trop grande place à la démagogie.
Ceux qui ont laissé filer les déficits à partir de 2008 et alourdi de plusieurs centaines de milliards d’euros notre endettement ont naturellement trouvé que le Gouvernement n’en faisait pas assez, ce à quoi celui-ci a répondu qu’il aurait fait bien plus si ses prédécesseurs l’avaient précédé sur la voie de la vertu et du courage budgétaire.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Le groupe RRDP, qui soutient le Gouvernement, salue dans cette circonstance son courage et ne l’en soutient que plus. Notre groupe est heureux qu’un certain nombre d’amendements aient été acceptés : augmentation de 4 % du revenu fiscal de référence, maintien de la réduction d’impôts pour les parents d’enfants scolarisés, renforcement de l’attractivité du crédit d’impôt dans les outre-mer, accompagnement du retour progressif au droit commun de la fiscalité des successions en Corse – voté à l’unanimité de l’Assemblée, avec l’accord du Gouvernement et de la commission. Je les remercie les uns et les autres à ce propos.
J’espère que le Gouvernement acceptera prochainement de considérer les demandes relatives au financement des aires marines protégées par l’instauration d’une redevance sur les granulats. Cette disposition aurait permis à une agence de l’État d’accomplir les missions qui lui sont confiées pour la création et la gestion des parcs marins, avec une redevance qui est la contrepartie de l’utilisation d’un bien public, tandis que les futurs payeurs – c’est assez rare pour être souligné – ont donné clairement et publiquement leur accord pour acquitter cette redevance.
Telles sont, monsieur le ministre, les raisons générales et particulières pour lesquelles le groupe RRDP votera unanimement en faveur de ce budget.
Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP, SRC et écologiste.
Je mets aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2014.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 567 Nombre de suffrages exprimés: 565 Majorité absolue: 283 Pour l’adoption: 316 contre: 249 (L’ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2014 est adopté.)
Vote sur l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2014
La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinq, sous la présidence de Mme Laurence Dumont.
L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
Nous sommes réunis pour débattre du projet de loi de financement de la sécurité sociale qui, à l’évidence, constitue un enjeu majeur pour notre pays : enjeu financier, bien sûr, compte tenu des sommes engagées, mais aussi au regard de nos valeurs et de la volonté que nous avons de garantir à l’ensemble de nos concitoyens une protection sociale de qualité.
Je voudrais d’abord vous demander de jeter un coup d’ oeil en arrière. Que de chemin parcouru en quelques mois ! Il n’est pas mauvais d’avoir de la mémoire : en l’occurrence, souvenons-nous de la situation que nous avons trouvée, en regard des leçons que parfois nous entendons.
Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, nous étions confrontés à un déficit de la sécurité sociale – régime général et Fonds de solidarité vieillesse – de l’ordre de 21 milliards d’euros.
Ce déficit, grâce à des mesures que nous avons immédiatement prises, a été ramené en 2012 à 17,5 milliards d’euros environ, puis, malgré une conjoncture économique difficile qui a réduit les rentrées en début d’année 2013, à un peu plus de 16 milliards, poursuivant ainsi la décroissance affirmée, rigoureuse, volontariste, du déficit des comptes sociaux.
Le projet de loi que nous vous présentons doit nous permettre de faire descendre ce déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse sous les 13 milliards d’euros – 12,8 milliards exactement – l’année prochaine. C’est un effort sans précédent que nous faisons, une volonté sans faille que nous affirmons, pour le redressement de nos comptes sociaux.
Mais ce redressement, à quoi correspond-il ? Au fond, on peut jongler avec les chiffres et mettre en avant la volonté financière qui est la nôtre. Mais cette volonté, nous la mettons au service d’un projet social, d’une exigence sociale, qui est celle que nous partageons. Il s’agit pour nous de réaffirmer les principes de ce que doit être notre politique et de ce que doit être la protection sociale dans notre pays, à un moment où les attaques auxquelles elle est exposée deviennent de plus en plus intenses.
Pour cela, je voudrais mettre en avant trois principes auxquels nous ne pouvons pas déroger, et qui guident notre politique.
Le premier de ces principes semble aller de soi, en tout cas sur une partie des bancs de cet hémicycle : il est la réaffirmation absolue, intangible, que c’est par le biais de la solidarité, d’une protection sociale partagée, que nous irons de l’avant. Des voix s’élèvent régulièrement pour proposer d’autres perspectives, celles de la privatisation, qu’il s’agisse de fonds de pension pour nos retraites ou d’un rôle accru des assurances complémentaires en matière d’assurance-maladie.
Ces perspectives-là, nous les refusons et les récusons. Nous devons le réaffirmer, et c’est précisément parce que nous croyons à la solidarité collective, à une protection sociale partagée, que nous devons faire en sorte que les comptes sociaux nous permettent d’atteindre cet objectif.
Le deuxième principe que nous devons rappeler, c’est que la sécurité sociale, la protection sociale, ne sont pas des politiques destinées ou réservées aux plus pauvres de nos concitoyens. Ce sont véritablement des politiques de cohésion sociale, garantissant chacun contre les risques qu’il peut rencontrer : risque de la maladie, risque de l’affaiblissement à travers la perte d’autonomie, risque d’un handicap de naissance ou acquis… Nous ne pouvons pas réduire, comme le recommandent certains, nos politiques de protection sociale à des politiques de soutien aux plus démunis.
Et le troisième principe que je veux mettre ici en avant, c’est que, face à la dégradation de la situation économique qui a entraîné une dégradation des comptes, face aux exigences sociales renforcées par le vieillissement de la population, nous devons affirmer hautement la nécessité de ne pas faire payer fortement l’adaptation de notre modèle social aux assurés et d’engager des réformes de fond, des réformes de structure…
Dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous tirons précisément les conséquences de politiques et de réformes de structure que nous avons engagées…
Vous n’avez rien compris, monsieur Accoyer. Quel aveuglement ! Et quelle amnésie !
Je veux simplement rappeler, s’agissant des retraites, que le présent projet tire les conséquences de la réforme dont nous avons débattu il y a quelques jours dans cet hémicycle et dont le Parlement va poursuivre l’examen dans les jours qui viennent.
Cette politique relative aux retraites est évidemment une politique structurelle, visant à garantir l’équilibre de l’ensemble de nos régimes de retraite à l’horizon 2020, puis 2035. C’est la politique que nous avons engagée par nos choix, choix majeurs qui consistent à tenir compte de la réalité des parcours professionnels et des parcours de vie dans le calcul des conditions de départ à la retraite, car il n’est pas juste que tous partent dans les mêmes conditions alors que les parcours professionnels et personnels sont profondément différents.
Réforme de structure, donc,…
… qui se traduit dans ce PLFSS pour 2014 par l’amélioration globale de 1,6 milliard du solde de la branche vieillesse et du Fonds de solidarité vieillesse.
Notre politique familiale, sur laquelle Mme Bertinotti s’exprimera plus longuement, s’inscrit également dans une restructuration et une réorganisation de fond, car nous choisissons de l’adapter à l’évolution de notre société. Nous considérons qu’elle ne peut se réduire à une politique de versement de prestations financières, même si celles-ci sont tout à fait nécessaires.
Nous réaffirmons trois principes : l’ensemble des familles doit pouvoir compter sur la solidarité nationale ; les familles les plus modestes doivent être davantage aidées, ce qui se traduira évidemment par des mesures précises – par exemple, l’augmentation de 50 %, à terme, du complément familial, lequel leur profitera directement ; enfin, la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale…
…est au coeur des enjeux de notre société.
Cela se traduit par la mise en place d’un plan de 275 000 places pour les enfants de moins de trois ans.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Je comprends, mesdames et messiers les députés de l’opposition, que vous fassiez du bruit. Étant donné le bilan que vous avez laissé en matière de protection sociale, je ne crois pas que nous ayons beaucoup de leçons à recevoir de votre part.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Nous n’avons pas de leçons non plus à recevoir en matière de déficit puisque, année après année, alors même que la croissance était au rendez-vous, vous avez accru le déficit de la sécurité sociale…
… alors même que vous pouviez vous appuyer sur le levier de la croissance pour engager des réformes de fond.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Et vous qui ne savez rien faire d’autre que sauter sur votre banc comme ces cabris dont parlait le général de Gaulle, en réclamant des réformes de structure, des réformes de structure et encore des réformes de structure, vous avez passé dix ans au pouvoir à aligner des mesures comptables qui n’ont pas permis d’adapter notre protection sociale aux nouveaux enjeux de la société.
Michèle Delaunay insistera davantage, dans un instant, sur les mesures fortes que nous prenons en direction des personnes âgées ou vieillissantes avant même que la loi annoncée par le Premier ministre visant à adapter la société au vieillissement de la population ne soit discutée et votée l’année prochaine : médicalisation des EHPAD…
… avec un plan de 130 millions d’euros…
… et mise en place, comme cela avait été annoncé, du plan Alzheimer. Nous prenons également des mesures fortes dans le cadre du plan autisme et pour permettre l’accueil des personnes en situation de handicap.
Réformes de structure, encore, en matière de santé, qui est un enjeu tout à fait majeur pour les années à venir.
Je le dis solennellement, nous voulons renforcer et consolider l’assurance maladie afin de garantir à nos concitoyens que c’est bien elle, la Sécurité sociale, comme ils disent – comme si cette dernière était tout entière dédiée à la prise en charge de la maladie –, qui doit être le socle de leur accompagnement en matière de santé.
Nous ne pouvons pas laisser se dégrader, s’effriter, se défaire progressivement la prise en charge par l’assurance maladie obligatoire au profit des assurances complémentaires, car la lutte contre les inégalités en matière de santé, la garantie d’accès de tous à notre système de santé sur l’ensemble du territoire, passent par la consolidation de notre assurance maladie.
C’est donc une priorité pour nous, ce PLFSS mettant en place des éléments forts d’une réorientation de notre système de santé.
Je veux souligner que l’ONDAM sera de 2,4 % en 2014, ce qui témoigne d’un esprit de responsabilité et d’exigence, auquel nous devons répondre si nous voulons pouvoir continuer à faire face aux besoins de l’ensemble de nos concitoyens.
Tous les secteurs concernés sont appelés à contribuer à cet effort, puisque nous allons mettre en place une plus forte régulation de la dépense en matière de médicaments, ainsi que sur le plan hospitalier. Nous renforçons également la maîtrise médicalisée en médecine de ville et faisons en sorte que, par des réformes de structure,…
…ces évolutions répondent mieux aux attentes des Français.
Je vais vous répondre, monsieur Accoyer.
Ces évolutions visent d’abord à renforcer la place du médecin de proximité. J’ai annoncé, lors de la présentation de la stratégie nationale de santé, que nous devions restructurer notre système autour du principe de proximité, dont le médecin traitant est évidemment le pivot.
C’est ainsi que nous engageons la rémunération de nouvelles équipes pluridisciplinaires implantées dans les territoires et que nous allons permettre aux agences régionales de santé d’adapter leur financement pour qu’il y ait davantage de fluidité entre la médecine de ville, le secteur hospitalier et le secteur médico-social. Cette « fongibilité », pour reprendre le terme technique habituel, était attendue depuis longtemps. Nous la mettons en oeuvre.
Parallèlement, nous engageons la réorganisation ou la réforme du financement de l’hôpital public à travers l’évolution de la tarification à l’activité,…
… dont on a vu qu’elle était inflationniste et ne permettait pas de tenir compte de la spécificité des parcours de soins.
Des mesures dont la mise en oeuvre a vocation à être ensuite discutée avec l’ensemble des partenaires seront prises, qu’il s’agisse de l’adaptation du financement des établissements isolés, de la dégressivité du financement en fonction du volume d’actes ou d’une meilleure prise en charge des parcours de soins autour de l’hôpital à partir d’un meilleur financement des actes de radiothérapie en cas de cancer du sein ou d’insuffisance rénale chronique.
Nous avons donc fait des choix structurels et de proximité, avec le renforcement de la médecine et de la chirurgie ambulatoires ainsi que de la coordination entre les différents professionnels.
Le deuxième axe de ce PLFSS en matière de santé, c’est la garantie d’accès à des soins de qualité,…
…en permettant à l’ensemble de nos concitoyens, conformément à l’engagement du Président de la République, de s’appuyer sur des complémentaires de bonne qualité.
C’est ainsi que ce PLFSS comporte des mesures en direction des étudiants, en particulier des étudiants isolés à qui l’on oppose les ressources de leur famille alors même qu’ils sont parfois en rupture avec elle. Nous allons leur permettre d’accéder dans des conditions plus simples et mieux garanties à la CMU. Nous lançons également le processus qui doit permettre d’identifier les bons contrats pour les bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé.
Enfin, et cela représente une avancée tout à fait importante, nous allons inscrire dans la loi des critères plus rigoureux pour déterminer ce que doit être un contrat responsable et solidaire – pour reprendre la formulation consacrée – car il n’est pas normal que nos concitoyens se trouvent confrontés à des contrats qui ne leur apportent pas de garanties suffisantes ou qui viennent solvabiliser des pratiques que nous ne pouvons pas cautionner,…
… qu’il s’agisse de dépassements d’honoraires excessifs ou de tarifs qui, dans l’optique par exemple, sont également très élevés.
La troisième priorité de ce projet de loi, c’est la réaffirmation d’objectifs en matière de santé publique. Je ne serai pas longue car nous allons en débattre. Deux priorités, toutefois, sont plus particulièrement réaffirmées : la lutte contre le tabagisme, avec la mise en place d’une aide renforcée au sevrage des jeunes de 20 à 25 ans…
… puisque c’est l’âge où ils expriment le souhait et la volonté de pouvoir arrêter de fumer ; la garantie de l’accès de l’ensemble des femmes et des plus jeunes d’entre elles à la contraception. L’année dernière, ici même, vous avez voté la gratuité et la confidentialité de la contraception pour les mineures de 15 à 18 ans. Nous proposons de mettre en place cette année le tiers payant pour les consultations et les actes associés, par exemple les actes de biologie, pour les mineures qui veulent accéder à une contraception de qualité.
Enfin, le quatrième axe de ce projet en matière de santé est la régulation de la consommation de médicaments, à travers plusieurs mesures. Nous aurons en particulier l’occasion d’évoquer la nécessité d’aller plus loin dans…
…la voie des médicaments génériques et la mise en place, pour les médicaments issus des biotechnologies, d’un répertoire des médicaments biosimilaires. Nous proposons l’expérimentation de la dispensation à l’unité…
… car la France est l’un des pays dans lesquels on consomme le plus de médicaments, situation qui ne peut pas perdurer.
Nous vous proposons un projet de loi ambitieux,
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
volontariste et responsable,…
…tant sur le plan des comptes sociaux que sur celui des protections que nous voulons apporter à l’ensemble de nos concitoyens.
Ce projet de loi consacre les réformes de structure déjà engagées en matière de retraites et de politique familiale et il marque le chemin que nous voulons emprunter pour une réorganisation de fond de notre système de santé autour des principes de la stratégie nationale de santé.
Mesdames et messieurs les députés, parce qu’il en va de l’avenir d’un système social solidaire, je ne doute pas que les débats seront à la fois responsables, engagés et protecteurs pour l’ensemble de nos concitoyens dans les jours à venir.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.
Il ne m’a pas échappé, monsieur Accoyer, que vous devez prendre la parole un peu plus tard. Je vous conseille de garder vos remarques pour vous et un peu de force pour votre intervention. Je vous demande également de laisser les ministres s’exprimer dans de bonnes conditions.
Monsieur le ministre, vous avez la parole.
Mesdames les ministres, mesdames et messieurs les députés, madame la présidente, je voudrais tout d’abord, avec Marisol Touraine, Michèle Delaunay, Dominique Bertinotti et Marie-Arlette Carlotti, vous dire le plaisir que j’ai de pouvoir participer à ce débat qui constitue un moment fort de l’agenda parlementaire puisqu’il nous conduit à examiner tous ensemble le budget des comptes sociaux.
J’ai plaisir à le faire aux côtés de Marisol Touraine, avec laquelle nous avons préparé ce texte – avec le concours de nos cabinets et de nos administrations.
J’ai plaisir à le faire, également, en présence de Mme la présidente de la commission des affaires sociales, Catherine Lemorton, que je salue, et du rapporteur Gérard Bapt dont je sais à quel point il a contribué à la préparation de ce projet et de ces débats.
Marisol Touraine, dans son intervention, a balayé la plupart des sujets qui seront portés à l’ordre du jour de nos échanges. Je voudrais par conséquent aller à l’essentiel sur quelques sujets budgétaires, en tentant d’être bref.
À l’instar de la ministre de la santé, j’insiste sur la nécessité d’inscrire notre débat dans une perspective à long terme. Si nous présentons avec rigueur des comptes que nous voulons rétablir, c’est parce que nous avons bien conscience que tout ce que nous faisons aujourd’hui pour diminuer les déficits de nos comptes sociaux et pour améliorer la situation des principales branches du régime général est destiné à assurer la pérennité de notre système de protection sociale.
À l’occasion de la présentation du projet de loi de finances pour 2014, il y a de cela quelques jours, nous avons insisté, dans nos débats, sur la nécessité de préserver le patrimoine de ceux qui n’en ont pas – je veux parler des services publics et de la protection sociale. La possibilité de préserver durablement le modèle social français, d’assurer un haut niveau de solidarité dans notre pays – les Français y tiennent – et d’assurer la performance et la montée en gamme de nos services publics sociaux dépend de notre capacité à chasser la mauvaise dépense publique au profit de la bonne ; de cette manière, nous n’aurons pas à trop solliciter les prélèvements obligatoires pour assurer l’équilibre de nos comptes et pour moderniser notre protection sociale.
Il faut que nos enfants soient assurés de bénéficier du meilleur niveau de solidarité et de protection sociale : pour cela, il faut impérativement que nous rétablissions les comptes publics, que nous avons trouvés dans une situation très dégradée. Si nous ne faisons pas aujourd’hui un effort pour assurer la pérennité du modèle social français, c’est à ce même modèle que nous porterons atteinte ; à ce modèle auquel nous tenons et pour lequel nous nous sommes battus, et que nous ne pourrons plus garantir à nos enfants.
Notre stratégie, pour y parvenir, est celle du rétablissement de nos comptes. Comme Marisol Touraine, je rappellerai quelques chiffres, relatifs à la fois à nos comptes publics et à nos comptes sociaux.
S’agissant d’abord des comptes publics, le Gouvernement a fait, depuis dix-huit mois, des efforts considérables pour engager notre pays dans une séquence continue et résolue de diminution des déficits publics. Lorsque nous sommes arrivés aux affaires, le déficit nominal était de 5,3 % ; à la fin de l’année 2012, grâce nos mesures de redressement – mesures de gel, mais aussi d’ordre fiscal, il faut bien le reconnaître – il est descendu à 4,8 % et devrait être de 4,1 % à la fin de l’année 2013 ; quant au déficit présenté dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, il est fixé à 3,6 %. Pour réaliser cette séquence continue de diminution des déficits nominaux, nous avons maintenu un haut niveau d’effort structurel : il était de 1,3 % en 2012 et devrait passer à 1,7 % en 2013, puis à 1 % en 2014. Nous respectons donc parfaitement les engagements que nous avons pris devant les institutions de l’Union européenne. C’est vous dire à quel point, concernant les déficits publics dans leur ensemble, nous tenons à atteindre nos objectifs et nous nous donnons les moyens de le faire !
S’agissant maintenant des comptes sociaux, lorsque nous sommes arrivés en 2012, le niveau de déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse était de 20,8 milliards d’euros. Il avait atteint – je le rappelle à Bernard Accoyer – un niveau supérieur à 28 milliards en 2010, alors que la croissance n’était pas atone à ce moment-là, puisqu’elle était de 1,5 %. Le déficit s’était creusé de 4,5 milliards et nous avons voulu, parce que nous considérions que ces déficits avaient atteint un niveau trop important, les engager, eux aussi, dans une trajectoire de réduction. Ils sont ainsi passés de 20,8 milliards en 2011 à 17,5 milliards à la fin de 2012, descendront à 16,2 milliards à la fin de 2013 et devraient se situer autour de 12,8 milliards en 2014. Cela veut dire qu’entre le déficit que nous avons trouvé lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités et celui que nous devrions constater au terme de l’année prochaine si nous atteignons les objectifs de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, il y aura eu une baisse de 8 milliards d’euros.
L’effort que nous faisons pour réduire le déficit des comptes sociaux représente près de 60 % de l’effort global de réduction des déficits en 2014. Pour mesurer l’importance de cet effort, il suffit de se reporter aux prévisions de la Cour des comptes. Pour le régime vieillesse et le Fonds de solidarité vieillesse, celle-ci prévoyait, entre 2011 et 2018, un niveau de déficit de l’ordre de 70 milliards d’euros ; or, compte tenu des efforts déjà réalisés, ce déficit devrait en réalité être de l’ordre de 37 milliards au cours de la même période. Pour la famille et la maladie, la Cour prévoyait un déficit de 72 milliards et nous devrions nous situer autour de 45 milliards. C’est dire si nous sommes engagés dans une trajectoire résolue ! Si celle-ci devait aller à son terme – et c’est pour cela que nous nous mobilisons – elle devrait nous permettre de diviser par quatre le niveau des déficits des comptes sociaux entre 2012 et 2017.
Je ne comprends pas sur quels éléments statistiques, ni sur quelles sources, s’appuient les commentateurs qui prétendent que la politique que nous menons contribuerait à l’aggravation du déficit des comptes sociaux. Comme la ministre de la santé et moi-même venons de le rappeler, nous sommes résolument inscrits dans une trajectoire de diminution des déficits, qui correspond exactement aux chiffres que je viens de vous indiquer.
Le deuxième point sur lequel je voulais insister, c’est le fait que cette stratégie pour 2014, qui est appelée à se poursuivre, s’inscrit dans une volonté absolue de réaliser des économies significatives, que nous entendons réaliser au titre de la branche maladie. Alors qu’au cours des dix dernières années, pendant les deux quinquennats de la droite, les dépenses d’assurance maladie ont connu une hausse de l’ordre de 4 %, nous affichons pour 2014 un objectif de 2,4 % d’augmentation de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, ce qui devrait permettre de réaliser 2,5 milliards d’euros d’économies.
Si l’on intègre à cela les 500 millions de sous-exécution des dépenses maladie pour 2013, qui font suite à près de 900 millions d’exécution sous norme, c’est-à-dire sous l’objectif que vous vous étiez fixé au cours de la précédente législature pour 2012, le niveau global d’économies attendu au titre de la branche maladie pour 2014 est de l’ordre de 3 milliards d’euros, ce qui est très significatif. Si l’on ajoute encore les économies résultant des différés d’indexation des pensions, qui représenteront environ 800 millions en 2014, et les 500 millions d’économies réalisées au titre des conventions de gestion, on arrive à un total de l’ordre de 4,5 milliards d’euros d’économies, ce qui n’est absolument pas négligeable, au regard des résultats obtenus au cours des années précédentes.
L’opposition serait fondée à me dire que je ne parle que des économies, et non des prélèvements, qui ont pourtant leur place dans le dispositif que nous vous présentons. Puisqu’il est important de toujours tout dire lorsqu’on présente un dispositif, je veux évoquer les prélèvements et exposer les raisons pour lesquelles nous avons été amenés à les mobiliser.
Oui, il y a bien une mesure touchant le quotient familial, qui permet de dégager un rendement de l’ordre d’un milliard d’euros, intégralement affecté à la branche famille, et qui sera d’abord destiné à accompagner le rétablissement des comptes de cette branche, dont le déficit, lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, s’élevait à 2,5 milliards d’euros. Nous n’aurions pas eu à prendre ces dispositions si nous n’avions pas eu à faire face à un tel niveau de déficits.
Nous ne nous contentons pas de ce dispositif fiscal pour rétablir les comptes ; nous faisons aussi des économies : 200 millions en 2014, qui doivent monter en puissance pour atteindre 800 millions d’ici 2016 ou 2017. Cette somme contribuera, elle aussi, au rétablissement des comptes de la branche famille. Mais nous voulons également, au titre de la politique familiale, financer des dépenses qui répondent à une ambition de solidarité et de modernisation du service public de la famille, qu’il s’agisse des 270 000 places d’accueil offertes par la politique que nous mettons en oeuvre, ou de l’augmentation d’un certain nombre d’allocations, décidée dans le cadre du plan de lutte contre la grande pauvreté – je pense à l’augmentation de l’allocation de soutien familial et du complément familial.
Oui, il y a bien une augmentation des cotisations de retraite, destinée, dans le cadre de la réforme des retraites, à rétablir l’équilibre des comptes ; cette réforme structurelle est extrêmement ambitieuse, puisqu’elle prend en compte un certain nombre de problèmes qui n’avaient pas été traités lors des précédentes réformes – je pense notamment à la question de la pénibilité.
Il y a bien, au titre de la fiscalisation de la contribution des entreprises aux complémentaires santé dans le cadre de contrats collectifs, une recette de l’ordre d’un milliard d’euros, destinée à accompagner la généralisation de ces complémentaires dans le cadre de la généralisation des contrats responsables, d’où la mesure proposée par votre rapporteur, consistant à alourdir la fiscalité pesant sur les autres contrats, de manière à augmenter le différentiel entre les contrats responsables et ceux qui ne le sont pas. Il faut également rappeler que, dans le cadre de cette politique, nous avons été amenés à augmenter le plafond de la couverture maladie universelle et de l’aide à la complémentaire santé, qui permet à 750 000 Français de plus d’avoir accès à cette couverture.
Enfin, je veux dire un mot des mesures du projet de loi de financement de la sécurité sociale qui concernent les dispositifs relatifs à la taxation de certains produits d’épargne. Vous savez que certains produits d’épargne étaient taxés à partir de la reconstitution, année après année, des taux historiques. Ce dispositif était illisible et injuste. Il était illisible, parce qu’on procédait à la reconstitution des taux historiques pour tous les placements qui avaient été réalisés préalablement à la date du 27 avril 1997 et que l’on appliquait le taux de 15,5 % aux placements effectués après cette date. Sur le même type de placement pouvait donc s’appliquer, selon les périodes considérées, le taux de droit commun fixé à 15,5 % ou la reconstitution des taux historiques.
Surtout, il existait un dispositif qui, pour des produits finalement assez similaires, n’appliquait pas le même mode de taxation. Une personne disposant d’une action en propre se la voyait taxer au titre des prélèvements sociaux à 15,5 % lorsque des plus-values étaient constatées, alors que, dans le cadre de plans d’épargne en action, elle pouvait se voir appliquer la reconstitution des taux historiques. Nous avons donc pris une mesure de clarification, qui est aussi une mesure de simplification, de justice et de lisibilité. Ce n’est pas une mesure rétroactive, puisqu’elle ne s’appliquera que pour la sortie des contrats, après que le nouveau dispositif aura été voté ; prétendre que cette mesure est rétroactive n’a pas de sens en droit. Cette mesure permettra, bien entendu, d’avoir un rendement.
Je voudrais, pour finir, dire quelques mots sur la politique des personnes âgées et la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie. Comme Mme Touraine vient de l’indiquer à l’instant, le Premier ministre a annoncé un plan très ambitieux…
…qui a vocation à mobiliser des financements pour accompagner les personnes en situation de grande dépendance et maintenir leur autonomie. Ce plan ambitieux, nous entendons lui consacrer des moyens, et nous espérons que ce débat nous donnera l’occasion, dans une relation intelligente avec les parlementaires, qui ne manquent pas d’idées en la matière, de cheminer ensemble. Je suis assez confiant et je pense que nous y parviendrons.
Nous devons bien montrer que, dès cette année, nous préparons la suite, mais nous devons aussi envoyer des signaux de sérieux et de rigueur budgétaire – car ils sont nécessaires – afin d’articuler notre ambition politique et l’objectif de bonne gestion qui nous rassemble tous. Cette façon de faire contrastera avec le passé, où il n’y a eu ni rigueur de gestion, ni mesures en faveur de l’autonomie. De ce point de vue là, nous aurons un vrai changement !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Voilà, mesdames et messieurs les députés, ce que je voulais vous indiquer sur le contenu de nos débats et sur les questions budgétaires. Je forme le voeu que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale soit aussi riche et aussi dense qu’a pu l’être le débat sur le projet de loi de finances pour 2014.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l’autonomie.
Madame la présidente, mesdames les ministres, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, ce PLFSS 2014 pour le secteur de l’âge est marqué par la volonté de tenir les engagements pris par notre Gouvernement pour accompagner le renforcement de ce secteur, dans une année marquée par une pression sans précédent sur les comptes sociaux.
Nous avons dû faire des choix. Ces choix se sont orientés vers la consolidation des politiques engagées qui ne peuvent être fragilisées.
Avec un taux de progression de l’ONDAM de 3 %, le secteur médico-social continue de progresser plus fortement que les autres enveloppes …
…de ville et d’hôpital, mais contribue à l’effort d’économies demandé à tous dans la mesure où les besoins sont encore très dynamiques.
Un effort est également réalisé pour maintenir un niveau de dépenses suffisant en opérant un prélèvement sur les réserves de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, mises à contribution pour 70 millions d’euros.
Au total, le niveau de dépenses autorisé pour le secteur des âgés en 2014 sera de 8,6 milliards, sur un ONDAM médico-social de 17,6 milliards.
Pour les établissements et services, cela se traduit en moyenne par un taux de reconduction des budgets pour l’exercice 2014 en augmentation de 1 % : 1,1 % sur la masse salariale et 0,55 % sur l’impact prix. Cela leur permet de couvrir notamment les effets du glissement vieillesse technicité, le GVT, ou encore le financement des mesures catégorielles. Ce taux de reconduction est fixé de manière à ne pas fragiliser la base financière des établissements et services qui repose largement sur le financement de la masse salariale.
Ce niveau de dépenses pour les personnes âgées va également permettre de poursuivre notre politique de médicalisation des EHPAD. C’est une priorité. Pas moins de 140 millions d’euros y seront consacrés, parmi lesquels 10 millions viendront financer la réouverture du tarif global en EHPAD.
Le tarif global permet d’améliorer les parcours de santé des résidents, comme le prévoit également la stratégie nationale de santé. Les travaux conduits récemment par l’IGAS démontrent les progrès que nous pouvons faire en matière d’efficience en nous engageant dans cette voie. Les conditions et critères sont en cours de formalisation car tous les établissements ne seront pas concernés par cette première vague de réouverture.
Enfin, comme le Président de la République s’y était engagé, les travaux d’élaboration d’un nouveau plan Alzheimer élargi aux maladies neurodégénératives ont débuté. Afin d’éviter les effets de rupture, les mesures du plan précédent arrivées à échéance mais qui n’ont pas toutes été déployées continueront à être mises en oeuvre. Il est en effet prévu un financement de mesures nouvelles pour 15 millions d’euros.
Au-delà de cet objectif de continuité, cinquante nouvelles maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades d’Alzheimer, les MAIA, pourront être autorisées en 2014. Les MAIA contribuent à l’amélioration de la qualité des réponses apportées aux personnes âgées en perte d’autonomie sur nos territoires.
Concernant l’aide à l’investissement, indispensable à un secteur caractérisé par des besoins importants de remise à niveau des bâtis, l’objectif global de dépenses intègre enfin l’affectation de 2 % de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie au financement, la CASA, au plan d’aide à l’investissement.
Vous le savez, la cause de l’âge est l’un des défis majeurs de ce début du XXIe siècle, et c’est pour répondre à cet enjeu que nous soumettrons à la discussion et au vote de l’assemblée un projet de loi d’orientation et de programmation dite loi autonomie, ou loi d’adaptation de la société au défi de la longévité.
Les premières mesures entreront en vigueur au 1er janvier 2015, permettant une pleine affectation de la CASA, à cette réforme.
Nous vous avons entendu parler pendant cinq ans, maintenant c’est à votre tour !
L’annonce du Premier ministre Jean-Marc Ayrault le 14 octobre dernier nous permet, moins de dix-huit mois après notre arrivée aux affaires, d’engager le travail de partage et de concertation sur cette loi si souvent promise et si longtemps attendue.
Le Premier ministre l’a rappelé, nous inscrirons dans cette loi de programmation et d’orientation l’ensemble de la politique de l’âge que je défends depuis notre arrivée au Gouvernement.
Je veux préciser devant vous les trois piliers de la loi que nous vous soumettrons, et qui couvre tout le champ de l’avancée en âge.
Le premier pilier en est l’anticipation, qui permettra de mettre en place une véritable politique de prévention, dont vous connaissez l’importance. Le deuxième pilier est l’adaptation, parce qu’il s’agit de préparer notre société aux défis de la longévité.
Les quinquagénaires d’aujourd’hui auront quatre-vingts ans en 2040. Les mesures que nous prendrons devront leur permettre de vivre leur vieillesse dans un logement adapté, dans un cadre de vie sécurisé et accessible, entourés de technologies qui facilitent leur vie quotidienne.
Enfin, le troisième pilier est l’accompagnement de la perte d’autonomie pour répondre à l’inquiétude des familles face à la dépendance. La perte d’autonomie est, vous le savez, une épreuve qui peut mettre en grande difficulté la cohésion des familles et qui marque le début d’un long processus par étapes, dont chacune peut receler tant de moments d’incertitudes et d’angoisses.
Ce projet doit répondre à toutes ces questions, à tous ces défis.
Dans le même temps, la responsabilité du Gouvernement est de le mettre en oeuvre en veillant au respect des capacités de nos finances publiques. Faute de cela, notre projet ne serait pas crédible. Je remercie de leur attention ceux qui me l’ont accordée.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
J’aimerais que la qualité d’écoute soit la même que l’orateur soit un homme ou une femme, messieurs les députés.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Madame la présidente, mesdames les ministres, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale que vous examinez aujourd’hui traduit le choix du Gouvernement de mener une politique familiale volontariste, seule démarche permettant de promouvoir toutes les familles dans le respect de leur diversité.
Nous célébrons cette année les soixante-dix ans du Conseil national de la Résistance. À ce titre, il m’est apparu éclairant de vous citer de brefs extraits des mémoires de Pierre Laroque, grand artisan de la Sécurité sociale, qui datent de 1962.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Pierre Laroque écrivait : « Pour une politique sociale de la famille il faut donc aujourd’hui beaucoup d’ambition (…) car elle doit tendre à aider toutes les familles, quelle que soit leur diversité, à remplir le mieux possible, dans tous les domaines, le rôle social. »
C’est dans cet esprit que nous devons débattre aujourd’hui de notre politique familiale.
Oui, nous devons être fiers que notre politique familiale nous soit enviée dans nombre de pays, fiers que la France consacre 1,8 % de son produit intérieur brut à la politique de la petite enfance quand les pays de l’OCDE en consacrent en moyenne moins de 1 %, fiers que la France dispose du deuxième taux de fécondité le plus élevé d’Europe, fiers que la France ait un excellent taux d’activité des femmes, puisque 77 % des femmes entre 29 et 45 ans sont actives.
Mais, pour garder cette fierté, il nous faut assurer les conditions de la pérennisation de notre politique familiale et savoir l’adapter aux nouvelles attentes de nos concitoyens. C’est pourquoi nous devons la rénover pour qu’elle soit efficace, et la rénover dans la justice.
La véritable promotion des familles, c’est porter un regard lucide sur la correction des lacunes de notre politique familiale : ne pas laisser le déficit se creuser, ne pas laisser le nombre d’enfants pauvres augmenter, ne pas laisser les inégalités en termes d’accueil du jeune enfant s’amplifier.
e Gouvernement a fait le choix d’une politique familiale volontariste en poursuivant plusieurs objectifs. Premier objectif, apporter plus de justice : un enfant issu d’une famille aisée bénéficie davantage de la politique familiale qu’un enfant de famille modeste. Deuxième objectif : faire reculer la pauvreté, un enfant sur cinq est touché par la pauvreté. Avec 3,7 % du PIB affecté aux allocations familiales et allégements d’impôts, la France est certes en tête des pays européens pour les dépenses en faveur de la famille, mais bien loin d’être en tête pour la lutte contre la pauvreté des enfants.
Il nous faut tenir compte des évolutions des familles et de leurs aspirations. Aujourd’hui, plus de 60 % des femmes travaillent, il nous faut concilier vie professionnelle et vie familiale. Une famille sur cinq est monoparentale, il faut les soutenir financièrement et les sortir de leur isolement en termes de parentalité.
Aujourd’hui, 69 % des parents considèrent préférable, pour mieux aider les familles, de leur fournir des aides sous forme d’équipements ou de services, contre 30 % qui optent pour des prestations financières.
Oui, il nous faut lutter contre les inégalités territoriales : la répartition des services aux familles est encore très inégale sur notre territoire. Il n’est pas nécessaire de rappeler que dans certains départements, le taux d’accueil des enfants entre la naissance et trois ans est de 9 % lorsqu’il est de 80 % dans d’autres. C’est un facteur profondément inégalitaire, non seulement pour les familles, mais aussi pour le développement économique de ces territoires.
Oui, il nous faut favoriser l’égalité entre les femmes et les hommes.
Et, enfin, il nous faut garantir la pérennité de la politique familiale. Le déficit de la branche famille s’élève à plus de 2,6 milliards d’euros.
Cela va déplaire à nos collègues de l’opposition, mais c’est sous le précédent gouvernement que la branche famille est devenue déficitaire. Le déficit est passé de 300 millions d’euros en 2008 à 2,6 milliards en 2011. Notre gouvernement, lui, entend mener une politique de retour à l’équilibre de la branche famille.
Pour atteindre ces objectifs, nous devons agir, et nous avons commencé à le faire. En juillet, la convention d’objectifs et de gestion a été signée entre l’État et la CNAF. Un budget sans précédent a été mobilisé, le montant du Fonds national d’action sociale passant de 4,6 milliards en 2012 à 6,6 milliards en 2017. Pour la petite enfance, cela va représenter un budget global de 2013 à 2017 de 16 milliards d’euros quand la précédente convention d’objectifs et de gestion ne prévoyait qu’un peu plus de 8 milliards d’euros entre 2009 et 2012. La convention consacre l’objectif de créer 275 000 solutions d’accueil.
Elle encourage vivement la politique de soutien aux parents et rompt avec la stigmatisation dont ils étaient l’objet précédemment. Elle contribue fortement à la mise en oeuvre des nouveaux temps éducatifs, les caisses d’allocations familiales versant une aide de 54 euros par enfant et par an pour les accueils déclarés. Ces objectifs ambitieux se réaliseront, car nous moderniserons la gouvernance grâce à des schémas territoriaux des services aux familles rénovés et beaucoup plus efficaces.
Avec le PLFSS 2014, nous poursuivons notre action et accentuons notamment la solidarité envers les familles modestes. La revalorisation de 50 % du complément familial concernera 1,5 million d’enfants, et celle de l’allocation de soutien familial bénéficiera à 3 millions de familles monoparentales. Il s’agit d’actions concrètes pour réduire la pauvreté des enfants, qui se concentre dans les familles monoparentales et les familles nombreuses.
En outre, l’idée d’un développement du tiers payant pour les familles modestes ayant recours à une assistante maternelle, évoquée lors de la discussion du PLFSS 2013, a été reprise dans le cadre du projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes.
Cette politique de justice et de développement des services aux familles justifie l’abaissement de l’avantage fiscal procuré par le quotient familial ; d’ailleurs, 88 % des ménages ne sont pas concernés par cette mesure.
Enfin, je tiens à rassurer tous ceux et celles qui s’interrogent sur le financement de la branche famille : les recettes liées à la baisse de l’avantage fiscal procuré par le quotient familial seront intégralement affectées à cette branche. La baisse de la cotisation patronale famille sera compensée par le budget de l’État.
Vous l’avez compris : le PLFSS 2013 et la réforme de la politique familiale qu’il comporte sont des actes forts en faveur de la promotion des familles – de toutes les familles. La meilleure façon de valoriser les familles consiste à leur offrir de nouveaux services, de nouveaux repères, à prendre en compte leurs nouveaux besoins et à y répondre.
C’est ce que je vous invite à faire en votant ce PLFSS.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Madame la présidente, mesdames et monsieur les ministres, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale que nous présentons aujourd’hui poursuit dans un double objectif : la maîtrise des dépenses dans la justice sociale.
Comme l’ont dit mes collègues avant moi, cet effort de redressement est indispensable alors que le déficit cumulé de la Sécurité sociale entre 2002 et 2012 s’élève à 160 milliards d’euros. Le déficit a été ramené de 17,5 milliards d’euros en 2012 à 13 milliards d’euros en 2014.
Dans ce contexte budgétaire extrêmement contraint, le taux de progression de l’ONDAM médico-social consacré à l’accueil des personnes handicapées, soit 3,1 %, est supérieur à celui de l’ONDAM général. Il s’agit là d’un marqueur fort. En effet, nous avons fait du handicap une priorité depuis 2012, et ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale est parfaitement cohérent avec ce choix. Je ne peux que m’en réjouir. Certaines économies sont réalisées, mais elles ne portent jamais sur les plus fragiles.
Nous poursuivons le rattrapage de l’offre médico-sociale en augmentant l’ONDAM médico-social pour les personnes handicapées de plus de 275 millions d’euros par rapport à l’année dernière. L’objectif général de dépense dans le champ du handicap augmente même de 3,43 %, soit 300 millions d’euros, par rapport à 2013.
Derrière ces chiffres, des avancées concrètes pour les personnes en situation de handicap et pour leurs familles méritent d’être soulignées. L’objectif général de dépense permet déjà de financer près de 80 000 places pour adultes et plus de 150 000 places pour enfants dans le secteur médico-social. Un montant de 207 millions d’euros supplémentaires sera consacré cette année à la création de places : ce seront 57 millions d’euros de plus que l’année dernière. Concrètement, 16 000 nouvelles places seront créées chaque année jusqu’en 2016 : nous maintenons ce rythme. Enfin, 50 millions d’euros seront dédiés à l’aide à l’investissement pour les établissements médico-sociaux.
Ce PLFSS voit également les premières réalisations du plan autisme. Un effort financier inédit est réalisé pour l’accompagnement des personnes autistes et de leurs familles : en la matière, ce PLFSS consacre 7,5 millions d’euros au renforcement des centres d’action médico-sociale précoce et au développement des unités d’enseignement scolaire. Nous serons prêts dès la rentrée prochaine. J’appelle votre attention sur ce point, mesdames et messieurs les députés, car il s’agit là du démarrage de ce plan essentiel. Dès cette année, nous avançons sur le diagnostic, l’orientation précoce, mais aussi l’inclusion des enfants autistes à l’école maternelle dès le plus jeune âge, grâce à des équipes polyvalentes.
Les prochains projets de loi de financement de la Sécurité sociale verront une montée en puissance de ce troisième plan autisme.
Ce PLFSS donne clairement la priorité au handicap. Il est parfaitement cohérent avec les décisions du comité interministériel du handicap réuni par le Premier ministre le 25 septembre dernier, pour la première fois de son existence. Ce comité interministériel a notamment décidé d’accompagner la consolidation des places existantes – c’est ce que nous faisons –, de créer des places nouvelles – c’est ce que nous faisons – et de mieux appréhender les besoins en la matière. La tarification des établissements médico-sociaux sera également améliorée dans le cadre du comité interministériel pour la modernisation de l’action publique.
Mesdames, messieurs les députés, la relance de la construction d’une société inclusive est aujourd’hui une réalité amorcée et accompagnée par l’ensemble du Gouvernement, au plus haut niveau. Ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale en est la preuve.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les recettes et l’équilibre général.
J’ai bu une petite tasse, mais ce n’était pas du Red Bull. (Sourires.)
Madame la présidente, mesdames les ministres, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, je souhaite dire quelques mots sur l’équilibre général et le volet recettes de ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Mon intervention est en effet limitée à ce champ.
Il me semble tout d’abord important de rappeler à nos collègues que, plus que jamais, le PLFSS s’inscrit cette année dans un contexte plus global : celui des réformes menées par le Gouvernement.
Vous l’aurez compris – et vous allez le comprendre, madame Poletti, si vous ne l’avez pas encore compris…
Mme Poletti n’a rien dit ! Pourquoi vous en prenez-vous aux femmes, monsieur le rapporteur ?
Mme Poletti n’a rien dit ! Pourquoi vous en prenez-vous aux femmes, monsieur le rapporteur ?
Je vous en prie, messieurs les députés !
Poursuivez, monsieur le rapporteur.
Je pense donc en premier lieu à la réforme des retraites, qui a un impact important sur ce PLFSS et plus encore sur les perspectives pluriannuelles qui l’accompagnent, compte tenu de l’important redressement des comptes de la branche vieillesse que cette réforme permet d’engager.
Je pense aussi aux modifications opérées dans le projet de loi de finances en matière d’impôt sur le revenu, qui dégageront des recettes nouvelles pour la Sécurité sociale. Je pense, en l’occurrence, à l’intégration à l’assiette de l’impôt sur le revenu des contributions des employeurs aux contrats collectifs complémentaires santé, à l’abaissement du plafond du quotient familial, et à la fiscalisation des majorations de pensions pour charges de famille dont j’espère que la branche vieillesse pourra bénéficier de manière effective en 2015, puisque ce n’est pas encore le cas pour 2014.
Je pense également aux réformes qui s’engagent ou vont s’engager : la réforme de la politique familiale qui, grâce aux nombreuses mesures que comporte d’ores et déjà ce PLFSS, doit être davantage animée par un souci de justice redistributive ;…
…la réforme de la prévention et de la prise en charge de la dépendance, qui sera mise en oeuvre en 2014…
…avec la présentation d’un projet de loi d’orientation et de programmation en deux volets : un premier volet spécifiquement consacré au maintien à domicile et à la prévention de la perte d’autonomie, et un second volet davantage tourné vers l’accompagnement et la prise en charge en établissement.
C’est dans ce PLFSS que nous aborderons ces sujets, madame Poletti – cette fois-ci, c’était vous !
Je pense enfin au déploiement de la stratégie nationale de santé, préfiguration de la future loi de santé publique, pour lequel ce PLFSS comporte déjà un certain nombre de mesures d’importance. Mes collègues rapporteurs sur ces différents volets ne manqueront pas de souligner l’importance de ces réformes, parfois attendues depuis longtemps – comme celle de la dépendance et de la santé publique – et que le Gouvernement décide de mener aujourd’hui.
Si l’on considère uniquement les mesures prises cet automne dans le cadre de la réforme des retraites, du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, force est de constater que ces trois textes permettront de réduire significativement le déficit de nos comptes sociaux. Par rapport aux prévisions de la commission des comptes de la Sécurité sociale, qui tablait sur un déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse de 21,5 milliards d’euros en 2014, l’effort de redressement des comptes est massif, puisque ce déficit doit être ramené à 12,8 milliards d’euros, soit un effort de redressement de 8,7 milliards d’euros.
Cet effort important se traduit par un apport net de nouvelles recettes à la Sécurité sociale pour plus de 2,2 milliards d’euros, grâce, d’une part, à la hausse des cotisations sociales vieillesse programmée dans le cadre de cette réforme et, d’autre part, à une mesure de recettes présente dans ce PLFSS et liée à l’unification des modalités d’assujettissement des produits de placement aux prélèvements sociaux. Je souhaite dire d’emblée que cette mesure, qui a suscité les interrogations de beaucoup de nos collègues, n’est pas rétroactive comme d’aucuns le prétendent : il s’agit simplement d’appliquer sur la totalité d’une assiette le taux actuel des prélèvements sociaux, au lieu des taux historiques qui continuent de s’appliquer aujourd’hui à certains produits de placement, sans que cela soit d’ailleurs justifié au regard de la particularité de ces produits de placement. Les gains ne seront taxés que lors la clôture du produit,…
…autrement dit une fois que ceux-ci seront constatés. Il n’y a donc aucune rétroactivité, et d’ailleurs aucune raison que ces gains ne soient pas taxés selon les mêmes règles que celles qui s’appliquent aux gains et aux plus-values en général.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Lorsque vous vendez un bien immobilier, monsieur Accoyer, vous payez les prélèvements sociaux applicables au moment de la vente : on ne fragmente pas l’assiette du gain latent en fonction de l’évolution progressive des taux de prélèvements sociaux.
Si elle n’est pas rétroactive, pourquoi cette mesure s’applique-t-elle avant que la loi soit votée, dès le mois de septembre de cette année ?
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Sourires.
Le PLFSS recouvre également un pan de la vaste opération de transfert de recettes menée pour partie dans le cadre du projet de loi de finances. Il s’agit, pour la Sécurité sociale, d’un gain net de 2 milliards d’euros, dont un milliard lié à l’affectation à la branche famille du produit de l’abaissement du plafond du quotient familial, et un peu moins d’un milliard d’euros lié à l’affectation à la branche maladie du produit de l’imposition au barème de l’impôt sur le revenu des contributions employeurs aux contrats collectifs de santé complémentaires.
C’est peut-être compliqué pour vous, monsieur Barbier, mais pas pour nous !
C’est aussi la compensation à la branche famille de la baisse de 0,15 point des cotisations patronales famille, pour un total de 1,16 milliard d’euros.
L’article 15 du PLFSS procède à une opération de réaffectation de recettes au sein des organismes de Sécurité sociale, afin que les sommes concernées aillent bien à leurs affectataires naturels et que le financement de la Sécurité sociale en sorte clarifié. L’assurance maladie doit être essentiellement financée par la CSG, le prélèvement social sur les revenus du capital et la fiscalité comportementale, notamment les droits sur les tabacs et la fiscalité applicable aux alcools.
S’agissant des mesures d’économies, elles représentent près de 4 milliards d’euros. Non seulement l’ONDAM est fixé à 2,4 %, mais des mesures d’économies ont également été décidées en matière de politique familiale et pour sauvegarder notre système de retraites. Je ne reviens pas plus largement sur ces mesures, qui seront abordées par les rapporteurs de chacune des branches concernées, mais je tiens à souligner l’ampleur du mouvement de résorption des déficits initié par le Gouvernement ; ce mouvement a pour principal avantage d’alléger considérablement la charge de trésorerie portée par l’ACOSS, afin d’éviter de renouer avec les plafonds démesurés atteints en 2010 – 65 milliards d’euros – qui relevaient d’un exercice d’équilibriste !
De ce point de vue, d’ailleurs, la réduction du poids de la charge de trésorerie de l’ACOSS ne se limite pas à 2014 : elle sera beaucoup plus durable, grâce à l’intégration des déficits des branches maladie et famille dans le cadre de reprises de dette programmées jusqu’en 2017, dans la limite inchangée de 10 milliards d’euros par an. Cela permet d’opérer des transferts à la CADES sans allonger sa durée de vie et à recettes globales inchangées pour elle, tout en conservant à l’ACOSS sa vocation initiale consistant à gérer une trésorerie infra-annuelle.
Ce dispositif présente un avantage puisque, grâce en particulier à la réforme des retraites, il devient envisageable de transférer à la CADES une partie des déficits anciens de la branche maladie et de la branche famille, sans toucher au cadre prédéfini du schéma de reprise de dette, contrairement à ce qui avait été fait en 2010, lorsque le Gouvernement précédent avait fait le choix de reporter de quatre années la durée de vie de la CADES, autrement dit, de faire peser plus longtemps sur les générations futures le poids de notre dette actuelle.
D’autres mesures complètent ce PLFSS sur le plan des recettes et de l’équilibre, qu’il s’agisse du financement des mesures prises en faveur des petites retraites agricoles – qui passe par la suppression d’une modalité d’optimisation fiscale qui existe aujourd’hui pour les exploitants agricoles sous forme sociétaire – ou du déplafonnement des cotisations vieillesse des indépendants, et je souligne qu’il s’agit là encore d’une mesure d’alignement avec les mesures prises au titre des cotisations vieillesse dans le régime général. S’agissant des indépendants, je tiens d’ailleurs à dire que la simplification des modalités de calcul des cotisations dont sont redevables ces professions est particulièrement bien accueillie : elle permet en effet de rapprocher la date de paiement des cotisations des revenus effectifs des travailleurs indépendants, réduisant ainsi d’autant les difficultés liées aux aléas de leur activité.
J’en viens rapidement aux travaux menés par notre commission. La majorité de notre commission a été largement satisfaite des mesures présentées dans ce PLFSS s’agissant des recettes et de l’équilibre général.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Elle n’a donc nullement cherché à modifier l’équilibre de ces mesures, mais a souhaité pouvoir néanmoins apporter quelques modifications, dont trois méritent d’être évoquées plus amplement. Notre commission a tout d’abord souhaité, s’agissant de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie – la CASA –, qui a été créée l’an passé en loi de financement, pouvoir réaffecter une partie de son produit à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA.
C’est un hold-up. Cela fait deux ans que vous procédez à un détournement !
Je rappelle brièvement le schéma de cette contribution : la CASA est toujours affectée à la CNSA, mais par une modification de la clé de répartition de la CSG à due concurrence, le rendement de la CASA est destiné à alléger le déficit persistant du FSV.
Or nous savons que la réforme de la dépendance a vocation à être mise en oeuvre au cours de l’année prochaine : dès lors, la commission a souhaité que la CNSA puisse, en 2014, se voir réaffecter une partie de cette fraction de CSG, à hauteur de 130 millions d’euros, pour la mettre en mesure de financer les débuts de la réforme de 2014. Notre commission a évidemment conscience que cette réaffectation à la CNSA ne peut pas se faire sans que la perte de recettes afférente soit compensée au FSV. Nous aurons l’occasion d’y revenir au cours des débats.
La commission des affaires sociales a également adopté deux amendements créant de nouvelles recettes. Le premier a pour objet de créer une taxe spécifique sur les boissons dites énergisantes, sur laquelle j’aurai également l’occasion de revenir.
Le second amendement porté par la commission répond, quant à lui, à un engagement du Président de la République concernant les complémentaires santé : le chef de l’État a en effet souhaité instaurer « une modulation beaucoup plus forte de la taxe applicable » aux contrats complémentaires santé, « afin que les contrats dits responsables, qu’ils soient individuels ou collectifs, deviennent véritablement attractifs ». C’est ce que nous ferons.
Tels sont les chantiers qui sont devant nous. Pour la première fois, le PLFSS prend tout son sens
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
en s’inscrivant dans les perspectives ouvertes par la stratégie nationale de santé (Mêmes mouvements) présentée récemment par Mme la ministre de la santé. La commission des affaires sociales a adopté le PLFSS pour 2014 et invite l’ensemble de nos collègues à l’adopter. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Christian Paul, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour l’assurance maladie.
Madame la présidente, mesdames les ministres, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’élaboration du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014 et, singulièrement, du budget de l’assurance maladie obéit à des intentions ambitieuses. Gérard Bapt ayant évoqué les recettes, il nous revient maintenant d’aborder les dépenses. Par temps de crise, sans se laisser tétaniser par l’étau des contraintes, il faut, à chaque étape, ne pas renoncer au progrès. En effet, le système de soins et la politique de santé sont riches d’innovations et de développements positifs.
Une gestion sérieuse des comptes et une transformation progressive, mais résolue et imaginative, des organisations médicales et hospitalières rendent possibles ces avancées : 2014 sera l’an I de la Stratégie nationale de santé, qui doit en priorité refonder l’offre de premier recours et entamer des changements en profondeur parmi les pratiques professionnelles. Cette année verra également l’amorce d’une nouvelle définition des rôles entre l’assurance maladie et les organismes de complémentaire santé.
Ces évolutions sont attendues et pensées depuis de longues années dans notre pays. Il nous appartient de leur donner un rythme et l’ampleur nécessaire pour mieux servir la santé des Français. Comme l’indique justement Didier Tabuteau, « les règles héritées d’un passé tortueux ne permettront pas de faire face aux mutations qui s’annoncent ».
Oui, mes chers collègues, il ne faut pas retarder plus longtemps l’indispensable aggiornamento de notre système de santé
Vos excès verbaux, monsieur Accoyer, font de vous un adversaire extrêmement précieux. Surtout, ne changez pas.
Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Avec un ONDAM respecté en 2013 et un ONDAM pour 2014 fixé à 2,4 %, la majorité témoigne de son engagement à ramener les comptes sociaux au plus près de l’équilibre et à mettre en oeuvre une politique de santé qui corresponde « au juste soin au juste coût » pour tous les patients. Bien sûr, des efforts importants sont et seront encore demandés à certains secteurs. Ils seront couronnés de succès, grâce à l’imagination, l’innovation et la mobilisation des équipes professionnelles.
Tout d’abord, il s’agit de revoir notre politique du médicament, pour réaliser des économies tout en renforçant la sécurité des patients. Pour les soins de ville, ce double objectif se traduit par l’expérimentation de la délivrance à l’unité des antibiotiques, par la définition de règles encadrant la prescription des médicaments biosimilaires et par une réforme des modalités de prise en charge des médicaments faisant l’objet d’une autorisation temporaire d’utilisation.
Mais la grande affaire des prochains mois, c’est la Stratégie nationale de santé, soit une réforme globale de notre système de santé, favorisant la médecine de parcours, renforçant le premier recours, rénovant la tarification hospitalière et garantissant l’égal accès de tous aux soins…
…pour apporter une réponse aux grands défis que nous devrons désormais affronter ensemble : l’allongement de la durée de vie, l’explosion du nombre des maladies chroniques, la désertification médicale, la modernisation des systèmes d’information dans le domaine de la santé.
Nous n’allons pas différer l’action pour renforcer les soins de premier recours. C’est la révolution de la proximité – le contraire de la RGPP.
En premier lieu, l’instauration d’une rémunération pérenne de l’exercice pluriprofessionnel doit se concrétiser par la signature d’un accord conventionnel interprofessionnel : le projet de loi prévoit l’instauration d’un règlement arbitral en cas d’échec des négociations, et ce, afin de garantir, quoi qu’il arrive, l’aboutissement de ce dispositif, dans un délai bref.
Dans le prolongement du rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, la commission a également tenu à soutenir le modèle économique des centres de santé en insérant dans la loi un principe d’équité de rémunération entre les centres de santé et les professionnels de santé libéraux. Je sais, madame la ministre, que vous y êtes favorable, vous nous l’aviez confirmé en commission, …
…et que vous serez attentive à ce qu’une renégociation globale de l’accord de 2003 entre l’assurance maladie et les centres de santé ait lieu très rapidement ; nous soutiendrons cette démarche.
En second lieu, le développement des coopérations entre professionnels de santé est soutenu grâce à l’introduction d’une possibilité de financement dérogatoire par l’assurance maladie et d’une évaluation systématique des protocoles de coopération. C’est important et nous soutiendrons et améliorerons peut-être la possibilité pour le Gouvernement d’y procéder de façon plus intensive, en rendant compte régulièrement au Parlement.
Enfin, la création d’indemnités journalières pour les professionnelles de santé en cas d’arrêts de travail liés à la grossesse permettra de rendre l’exercice libéral des professions médicales plus attractif pour les femmes qui sont aujourd’hui nombreuses dans ces professions et majoritairement attirées par le salariat.
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014 prévoit l’expérimentation d’un financement par l’assurance maladie des actes de télémédecine afin de participer au déploiement de ces réseaux, dont on parle beaucoup depuis 2011, mais qui n’ont pas beaucoup avancé, faute là aussi d’un modèle économique adapté.
Les expérimentations visant à mettre en place une médecine de parcours se poursuivent également cette année, après la mise en place l’an passé d’une première expérimentation portant sur les parcours de soins des personnes âgées en risque de perte d’autonomie, chère Michèle Delaunay.
Deux autres expérimentations devraient débuter en 2014 concernant le financement des parcours de soins relatifs à l’insuffisance rénale chronique et au traitement du cancer par radiothérapie. La mise en place de parcours de soins pour ces pathologies est en effet une priorité aujourd’hui eu égard, non seulement, au coût qu’elles représentent, mais surtout à la nécessité d’améliorer la prise en charge des patients en proposant les solutions les plus adaptées au cas par cas.
S’agissant de ces expérimentations, il est également apparu souhaitable à notre commission de proposer un cadre unique, dont le champ et la durée soient définis et qui soit assorti d’une évaluation annuelle transmise au Parlement, afin de permettre au Gouvernement de lancer plus aisément des projets de parcours de soins pour tel ou tel type de maladie.
En ce qui concerne les établissements de santé, là encore, nous ne saurions améliorer l’efficience des dépenses hospitalières sans une réforme de l’organisation des soins et du financement de l’hôpital qui tienne compte de leur rôle sur les territoires et de leurs objectifs spécifiques. Une réforme de la tarification à l’activité est donc indispensable, d’une part, afin de prendre en compte des critères de pertinence et de qualité des prises en charge et, d’autre part, afin de mieux tenir compte de la place de l’hôpital dans le service public territorial de santé. La loi de financement de la Sécurité sociale n’a pas vocation à traiter globalement et définitivement de toutes ces questions, mais deux mesures visant à corriger les effets pervers de la T2A y sont inscrites, et nous y reviendrons. Nous élaborons une vision globale pour sortir de l’addiction à la T2A, de votre addiction à la T2A.
De votre addiction à la T2A, monsieur Accoyer. Je constate que lorsque l’on prononce ces mots, vous réagissez de façon pavlovienne !
La première mesure institue un financement plus favorable pour les activités isolées effectuées par des établissements de santé implantés dans des zones peu peuplées. Cette mesure permettra de soutenir certaines activités de soins essentielles pour les populations. Il faut le faire avec discernement, en respectant toutes les exigences de sécurité, pour des établissements situés en zones rurales ou enclavés.
La seconde mesure introduit une dégressivité des tarifs en cas de dépassement des volumes d’activité.
J’y reviendrai, monsieur Accoyer, car il faudra une explication très précise.
Enfin, je voudrais évoquer un sujet majeur de la stratégie nationale de santé : les progrès de l’accès au soin.
L’accès aux soins n’est pas qu’une question de territoire et de géolocalisation. Les obstacles financiers sont là très présents. Or le reste à charge des ménages a augmenté ces dernières années, creusant ainsi fortement les inégalités de santé. C’est pourquoi il importe aujourd’hui d’améliorer la prise en charge des dépenses de santé.
Le projet de loi poursuit la politique de généralisation de l’accès de tous les Français à « une couverture complémentaire de qualité » annoncée par le Président de la République en septembre 2012. Les organismes assureurs seront mis en concurrence afin d’améliorer le rapport qualité-prix des contrats d’aide à la complémentaire santé, l’ACS. Les étudiants isolés et en situation précaire se verront reconnaître l’accès à la couverture maladie universelle complémentaire. Enfin, les avantages fiscaux seront recentrés – nous le souhaitons comme vous, monsieur le ministre du budget – sur des contrats solidaires et responsables redéfinis qui proposeront un panier de soins amélioré et adapté aux besoins actuels et à des niveaux de prise en charge permettant de réguler la tarification des soins.
La commission des affaires sociales a adopté des amendements visant à élargir l’accès à l’ACS aux personnes âgées disposant de faibles ressources. Nous avons aussi souhaité évoquer un plafond de prise en charge des dépassements d’honoraires des médecins. Nous aurons, madame la ministre, un débat sur le niveau de ce plafond.
En outre, la généralisation du tiers payant pour les dépenses de soins de ville,…
…prévue pour 2017 au plus tard, est amorcée dès 2014 pour les consultations relatives à la contraception des mineures de plus de quinze ans. Cette première étape sera suivie de l’extension du tiers payant aux bénéficiaires de l’ACS à partir de 2015.
Autre public prioritaire pour l’accès aux soins, les jeunes âgés de vingt à vingt-cinq ans bénéficieront d’un triplement du forfait de prise en charge des traitements par substituts nicotiniques.
Nous faisons la preuve qu’une réforme structurelle n’est pas un rationnement budgétaire.
Les réformes d’organisation du système de santé peuvent aider à maîtriser les dépenses. Elles sont d’abord des dépenses d’imagination et d’engagement que des milliers de professionnels déploieront pour soigner les Français. Ce budget de l’assurance maladie doit les aider à continuer à faire mieux en 2014. C’est pourquoi, en tant que rapporteur, je soutiens ce budget.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Martine Pinville, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour le secteur médico-social.
Madame la présidente, mesdames les ministres, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans un contexte difficile, le Gouvernement fait du secteur médico-social l’une de ses priorités. Le taux de croissance de l’ONDAM médico-social est en effet maintenu à un haut niveau, de l’ordre de 3 %. Je salue cet effort qui confirme l’attention particulière que le Gouvernement porte aux personnes âgées et aux personnes handicapées.
En témoignent les dispositions du projet de loi garantissant l’avenir et la justice des retraites concernant les personnes handicapées et – j’insiste sur ce point – leurs aidants ou accompagnants. En témoigne également l’annonce faite par le Premier ministre, le 14 octobre dernier, de l’examen par le conseil des ministres, d’ici à la fin de cette année, d’un projet de loi d’orientation et de programmation portant sur l’adaptation de la société au vieillissement qui viendra concrétiser un engagement fort du Président de la République.
En ce qui concerne ce PLFSS, les crédits de la Sécurité sociale dévolus au secteur médico-social représenteront un peu plus de 20 milliards d’euros en 2014. Ils transiteront par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, se répartissant dans des proportions comparables en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées. L’annexe 8 du projet de loi détaille l’évolution de ces ressources et les principaux postes de dépenses.
Pour 2014, les crédits dévolus au secteur permettront tout d’abord de poursuivre un certain nombre de chantiers d’envergure. Ainsi, le plan d’aide à l’investissement – PAI –, initié pour accompagner la rénovation des établissements, sera à nouveau abondé. L’article 47 du projet de loi prévoit de déléguer aux agences régionales de santé la compétence de gestion de ces enveloppes. Il s’agit d’une avancée très positive qui assouplira le fonctionnement du dispositif et permettra de répondre aux attentes les plus fortes sur les territoires.
S’agissant spécifiquement des personnes âgées en perte d’autonomie, je relève les progrès du plan de médicalisation des établissements, dont le coût est cependant élevé. Il faudra certainement envisager un bilan en fin d’année dans le cadre de la loi de programmation afin d’ajuster son financement en améliorant son efficacité.
Parallèlement, le développement de l’offre dans le cadre du plan solidarité grand âge se poursuit. Il faut aujourd’hui mettre l’accent sur les structures de répit avec les places d’hébergement temporaire et d’accueil de jour. Elles sont particulièrement précieuses aux aidants.
Par ailleurs, s’est poursuivie, au cours de l’année 2013, la réflexion sur les suites du plan Alzheimer avec la présentation des conclusions des professeurs Ankri et Van Broeckhoven. Je crois nécessaire de le prolonger tout en élargissant son périmètre à l’ensemble des maladies neurodégénératives.
S’agissant des personnes handicapées, j’ai constaté là encore la poursuite du programme de création de places. J’observe que seules 82 % des places réservées aux adultes ont été ouvertes au titre des exercices 2008 à 2012 alors que celles réservées aux enfants croissent d’une façon quasiment conforme aux ambitions initiales, atteignant un taux de 98 %. Il faut continuer à mobiliser tous les acteurs concernés.
Une attention particulière doit être accordée à la prise en charge du handicap psychique. Le programme pluriannuel de création de places 2008-2012 pour personnes handicapées avait prévu la création de 5 750 places destinées aux personnes atteintes de déficiences psychiques, dont 3 750 en service d’accompagnement médico-social. Les résultats font apparaître un taux de réalisation proche de 50 %. Il est donc clair que notre société peut et doit mieux faire.
De ce point de vue, je me réjouis de l’adoption du troisième plan autisme, couvrant la période 2013-2017, avec une enveloppe de près de 250 millions d’euros dont les lignes directrices sont adaptées aux attentes des intéressés et de leurs familles. Mais, pour le handicap psychique comme pour les autres types de handicap, les pouvoirs publics se heurtent toujours à une difficulté marquée d’évaluation des besoins. Là encore, c’est au niveau de l’échelon local, à travers une gouvernance, que nous pourrons trouver des solutions pour répondre aux besoins de ces personnes.
J’évoquerai en deux mots sur les concours de la CNSA aux prestations de compensations. Les montants sont en hausse en valeur absolue mais ils représentent une part décroissante du coût total du dispositif : ils couvrent environ 30 % des 3,3 milliards d’euros consacrés à l’allocation personnalisée d’autonomie dont la prise en charge représente désormais un peu plus du tiers des 1,5 milliard d’euros consacrés à la prestation de compensation du handicap contre près des deux tiers en 2009. La décroissance relative de ces concours posera des difficultés lourdes aux départements sur le moyen terme.
Au-delà de ce constat, plusieurs points ont particulièrement attiré mon attention.
Il s’agit tout d’abord du financement du secteur médico-social. L’année 2013 a vu la mise en place de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie : elle est destinée à financer des mesures nouvelles d’accompagnement des personnes âgées dépendantes et abonde la CNSA. Cependant, dans l’attente de l’adoption de la loi sur l’adaptation de la société au vieillissement,…
Le Premier ministre l’a annoncée, monsieur Accoyer, avec une première partie en 2014 et une deuxième partie plus tard.
Dans cette perspective donc, le Gouvernement a proposé d’affecter l’équivalent de ce surcroît de recettes au Fonds de solidarité vieillesse. Or, si les mesures nouvelles pourront certainement être financées l’année prochaine, pour 2015, il sera indispensable d’affecter l’intégralité du produit de la CASA à la CNSA sans minorer les ressources de CSG.
La sous-consommation des crédits médico-sociaux décroissant, les réserves de la CNSA sont de moins en moins abondées. Il ne sera vraisemblablement plus possible de financer des programmes d’envergure à partir de ces fonds dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015.
Je n’oublie pas en outre qu’il existe certainement des moyens d’optimiser la dépense. Je propose ainsi que les dépenses de prise en charge des équipements techniques fassent l’objet d’un travail d’analyse, par exemple de la Cour des comptes, afin de s’assurer que les marges des fournisseurs demeurent effectivement à un niveau raisonnable.
Ensuite, je crois nécessaire d’envoyer des signaux au secteur – je sais que des travaux ont déjà commencé en cens. Il importe de poursuivre le chantier de la réforme de la tarification afin qu’elle transcrive au mieux les coûts, d’assouplir les procédures d’appel à projets, qui ne laissent pas assez de place aux projets innovants, d’accompagner davantage la professionnalisation : il faut trouver un point d’équilibre entre la nécessité d’offrir des souplesses indispensables à certaines prestations, notamment les soins et l’aide à domicile, et les difficultés rencontrées pour recruter et fidéliser les personnels. Il s’agit pourtant d’un gisement d’emplois considérable et non délocalisable !
Enfin, dans la perspective du projet de loi d’orientation et de programmation, j’estime indispensable de bien définir au niveau national ce que doit être l’articulation de l’offre au niveau des territoires. Année après année, dispositifs et acteurs se sont heureusement multipliés. Seulement, nous ne sommes pas véritablement parvenus à construire un ensemble lisible pour les personnes vieillissantes comme à leurs aidants ou accompagnants. L’absence d’un « guichet unique », où ces personnes seraient accueillies physiquement, suivies personnellement et orientées, est à ce titre particulièrement préjudiciable. De trop nombreuses familles se sentent relativement démunies lorsque surviennent les premières manifestations de la perte d’autonomie alors même que les dispositifs et les prestataires existent.
Pour conclure, mes chers collègues, au nom de la commission des affaires sociales et en tant que rapporteure pour le secteur médico-social, je vous demanderai d’adopter le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.
La parole est à M. Michel Issindou, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse.
Madame la présidente, mesdames les ministres, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, mesdames, messieurs les rapporteurs, ce pourrait être un exercice de tout repos que d’être rapporteur pour l’assurance vieillesse du PLFSS pour 2014 : un seul article en tout et pour tout est concerné, l’article 51, et aucun amendement n’a été déposé sur cet article. Je serai donc relativement bref.
Ce PLFSS est riche en enseignements, qu’il faut mettre en lien avec la réforme des retraites en cours d’examen au Parlement.
En ce qui concerne les dépenses, l’article 51 dit tout ou presque : pour l’ensemble des régimes obligatoires de base, elles s’élèvent à 221 milliards d’euros dont 117,2 milliards pour le seul régime général de la Sécurité sociale. Il faut retenir qu’elles augmentent de 2,2 % par rapport à l’objectif fixé pour 2013. Cette évolution est modérée car l’effet de l’arrivée à la retraite des générations du baby-boom est compensé par le différé d’actualisation des retraites au 1er octobre.
Quant aux recettes, elles seront en progression sous l’effet de la réforme en cours. Ainsi 3,8 milliards viendront en 2014 atténuer les déficits de la branche vieillesse et du Fonds de solidarité vieillesse. Cette somme se décompose ainsi : 1 milliard au titre du relèvement de 0,15 % de la cotisation des employeurs ; 1 milliard au titre du même relèvement de la cotisation des salariés ; 1, 2 milliard au titre de la fiscalisation des majorations de pensions, qu’il faudra rapatrier sur le budget de la protection sociale, monsieur le ministre du budget ; 0,6 milliard au titre du report d’indexation au 1er octobre.
Sous l’effet d’une dépense moins dynamique que les recettes, la résorption des déficits est poursuivie en 2014 après l’effort considérable de 2013, qui portait sur 7 milliards d’euros environ.
L’hémorragie continue qu’ont connue les comptes de l’assurance vieillesse depuis 2004 est enfin stoppée. Les déficits annuels qui oscillaient entre 5 milliards et 7 milliards d’euros pour le régime général depuis 2004 seront ramenés à 1,2 milliard pour ce même régime en 2014. Le Fonds de solidarité vieillesse, qui doit faire face à de nouvelles charges, verra son déficit dépasser légèrement les 3 milliards. Et si l’on poursuit les projections des effets de la réforme, on parviendra au quasi équilibre en 2018.
Il était nécessaire et urgent d’agir, et c’est ce que vous avez fait, madame la ministre.
Ces mesures, relayées en 2020 par un allongement modéré de la durée de cotisation et, à partir de 2035, par une amélioration sensible de la situation démographique, sauveront notre système de retraite par répartition aujourd’hui bien mal en point.
Évoquons rapidement le Fonds de réserve des retraites. Créé en 1999 par Lionel Jospin pour faire face à la bosse démographique de 2020, il verse annuellement à la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, 2,1 milliards mais grâce à une gestion performante de ses actifs, il reste à un haut niveau, autour de 35 milliards. Il sera sûrement précieux dans les prochaines années pour surmonter d’éventuels aléas conjoncturels de croissance.
J’aimerais également revenir sur deux articles de recettes du PLFSS : l’article 9 et l’article 10.
L’article 9 produira les recettes à même d’améliorer très sensiblement les retraites agricoles en portant les plus basses à 75 % du SMIC et, plus globalement, contribuera à augmenter la protection sociale des travailleurs indépendants agricoles. Cet article vise à réintégrer dans l’assiette des prélèvements sociaux la part des dividendes excédant 10 % du capital social. Cette mesure limitera une forme d’optimisation liée à l’essor des formes sociétaires d’exercice de l’activité agricole.
L’article 10 concerne l’assiette de cotisations de l’assurance vieillesse des artisans et commerçants affiliés au régime social des indépendants, le RSI. Il s’agit de créer une cotisation assise sur la totalité de la rémunération en sus de celle applicable sous plafond. Cette mesure alignera le RSI sur le régime général, ce qui paraît normal s’agissant d’un régime dit aligné, fondé sur les mêmes méthodes de calcul.
Si le PLFSS est souvent affaire de tuyauteries entre caisses et régimes sous forme de compensations démographiques, de transferts entre la CNAV, le FSV, la CADES, le FRR et la CNAF, c’est aussi et surtout la traduction d’une politique.
La réforme des retraites adoptée en première lecture le 15 octobre dernier verra la mise en place de mesures de solidarité sans précédent en direction de ceux qui ont un travail reconnu pénible, des femmes, des salariés à temps partiel, des polypensionnés, des jeunes, des exploitants agricoles, des handicapés, des conjoints collaborateurs, des aidants familiaux.
Cette longue liste montre que dans un système à 80 % contributif, la solidarité n’est pas un vain mot. Non seulement cette réforme garantira un niveau de vie satisfaisant à tous les retraités, actuels ou futurs, elle va atténuer voire supprimer les injustices les plus insupportables. Voilà pourquoi nous pouvons être fiers des belles avancées sociales qu’elle contient.
Ce deuxième PLFSS du Gouvernement confirme sa volonté de sortir l’assurance vieillesse de ses déficits chroniques que les précédentes réformes n’ont pas réussi à juguler. Il va de soi que dans la continuité de la réforme des retraites en cours d’examen devant le Parlement, le groupe SRC ne peut qu’adhérer aux mesures destinées à la vieillesse dans le PLFSS pour 2014.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.
La parole est à M. Laurent Marcangeli, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour les accidents du travail et les maladies professionnelles.
Madame la présidente, mesdames les ministres, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, mesdames, messieurs les rapporteurs, laissant le soin à mes collègues de l’opposition qui me suivront dans la discussion de développer la critique de la philosophie générale du PLFSS, je me contenterai ici d’évoquer la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles pour laquelle je suis rapporteur. Il s’agit certes de la plus petite des branches du système d’assurance sociale, mais elle en est la doyenne.
Elle garantit la couverture collective des risques sociaux occasionnés par le travail, qui, les premiers, en 1898, ont suscité l’intervention du législateur, contribuant ainsi à fonder notre système d’assurances sociales.
Pour la première fois à l’Assemblée nationale, l’examen de la branche AT-MP du PLFSS est confié à un rapporteur particulier. J’ai l’honneur d’inaugurer cette tâche et, à cette fin, j’ai souhaité entendre les principaux acteurs qui mettent en oeuvre notre politique de prévention, de réparation et de tarification des risques professionnels. J’ai également tenu à rencontrer individuellement les représentants de chacune des organisations syndicales ou patronales représentées à la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles de la CNAM, car la branche AT-MP est le dernier sanctuaire du paritarisme, administrée par un conseil paritaire, présidé par un représentant des employeurs. J’ai constaté leur engagement, leur connaissance fine des risques professionnels et leurs approches, souvent convergentes, pour continuer à améliorer la prévention des sinistres.
Mais au terme de mes travaux, et au vu du projet de loi de financement, je suis au regret de constater que l’engagement de l’État n’est plus à la hauteur de celui des partenaires sociaux. L’année 2014 risque d’être, pour la branche AT-MP, celle de la rupture du lien de confiance construit patiemment avec les partenaires sociaux.
Ce projet de loi comporte un risque d’abandon de la branche AT-MP au moment où ses acteurs commencent à peine à retirer les fruits des réformes importantes engagées ces dernières années afin de simplifier la tarification du risque aux entreprises et d’améliorer la politique de prévention.
Ces réformes, il importe aujourd’hui de les approfondir et non de les laisser en friche. Surtout, il ne faut pas les paralyser en faisant reposer sur la branche AT-MP des charges indues qui la privent de marges de manoeuvre pour exercer son « coeur de métier » : prévenir, réparer et tarifer les risques professionnels.
Or le compte de prévention de la pénibilité, actuellement examiné par le Parlement dans le cadre du projet de loi sur les retraites constituera une charge indue pour la branche. À aucun moment, pendant l’examen de ce texte, le Gouvernement n’a évoqué l’incidence de sa mise en oeuvre sur le fonctionnement des services de la branche AT-MP dans les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail, les CARSAT.
Il est vrai que rares sont ceux qui sont aujourd’hui capables de mesurer les effets de ce compte pénibilité, sinon pour pressentir qu’il sera impraticable. Certains des partenaires sociaux que j’ai rencontrés m’ont confié que, selon eux, le compte pénibilité sera aux années 2010 ce que les 35 heures ont été aux années 2000.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Vous avez présenté un projet qui est intrinsèquement lié à la garantie des risques professionnels, mais sans, à aucun moment, associer la branche AT-MP à la définition du nouveau mécanisme. Pourtant, qui pouvait croire qu’il n’y aurait aucune incidence sur le travail des ingénieurs-conseils et des contrôleurs de sécurité des CARSAT qui relèvent de la branche AT-MP ?
Auditionnée par la commission des affaires sociales, madame la ministre, vous avez reconnu, pour la première fois et uniquement en réponse à une de mes questions, que le compte de prévention de pénibilité impactera bel et bien la branche : vous avez annoncé un avenant, en 2014, à la prochaine convention d’objectifs et de gestion liant la branche AT-MP à la tutelle qui doit couvrir la période 2014-2017.
Il me semble que cette méthode va compromettre le dialogue social.
Les priorités de la nouvelle COG ont été fixées par les partenaires sociaux dès septembre 2012 : ils attendent depuis un an la définition des moyens de sa mise en oeuvre. Quelques mois après le début de cette COG, ils seraient donc contraints d’en revoir tout l’équilibre ? Ceci est difficile à concevoir. Vous allez briser un lien de confiance avec l’État qui s’était pourtant manifesté avec force dans le vote unanime de la précédente COG, en 2009.
Les partenaires sociaux ont engagé un programme ambitieux et prometteur visant à accroître l’efficacité des mesures de prévention menées par leurs services. Mais, afin de consacrer des effectifs au compte pénibilité, véritable tonneau des Danaïdes, la nouvelle COG pourrait désormais réduire considérablement les moyens humains consacrés à l’objectif de prévention.
Afin de mettre en oeuvre le compte de pénibilité, un projet conçu hors-sol, les caisses se retrouveraient condamnées à ne plus faire que de la gestion de procédures et du contentieux, au détriment de leurs missions de prévention.
Pourtant, poursuivre l’objectif de prévention n’est pas vain. À titre d’exemple, les accidents du travail diminuent depuis dix ans, atteignant le niveau historiquement bas de trente-cinq accidents du travail avec arrêt pour 1 000 salariés. Cette baisse ne peut pas être mise exclusivement sur le compte de la tertiarisation qui est elle-même porteuse de risques dans les secteurs de la logistique, des services aux entreprises ou en raison de la sous-traitance.
Pour des millions de salariés, employés, ouvriers, artisans et techniciens confrontés à des risques de chute ou d’incident sur un équipement professionnel, à des postures pénibles, à des accidents de trajet, la réalité quotidienne du travail, c’est que les actions de la branche permettent de diffuser dans le tissu économique les pratiques de prévention adaptées, en encourageant, par exemple, l’employeur à mieux s’équiper ou à revoir l’organisation du travail.
Si la prévention fonctionne, il faut aller plus loin, c’est-à-dire faire de la réinsertion professionnelle le premier but de l’action de la branche : prévenir la désinsertion professionnelle après un sinistre, c’est la forme la plus noble de la prévention. C’est aussi prévenir le dommage le plus coûteux pour les comptes sociaux et le plus destructeur de la dignité du citoyen. C’est enfin la première et la meilleure forme de réparation.
Dans le cadre de la COG, les partenaires sociaux ont prévu d’expérimenter, en s’inspirant du modèle allemand, un accompagnement précoce et renforcé des salariés atteints d’accidents du travail graves vers des soins adaptés, puis vers l’emploi. Cet effort pourrait porter ses fruits dans de nombreux secteurs dont les intervenants sont mal coordonnés, notamment la médecine du travail et les services d’aide au retour à l’emploi.
Madame la ministre, plutôt que d’écraser la branche AT-MP sous le mécano technocratique du compte de pénibilité, je vous invite à accompagner la branche dans la plus noble des ambitions, léguée au demeurant par les fondateurs de la Sécurité sociale dans la loi du 30 octobre 1946.
Dans l’exposé des motifs de celle-ci, on peut en effet lire ces mots, qui devraient être en permanence présents à l’esprit des responsables publics : « La législation des accidents du travail et des maladies professionnelles […] doit tendre d’abord à prévenir l’accident du travail. Elle doit tendre ensuite, lorsque l’accident ou la maladie est survenu, à restituer à la victime la capacité de travail par des soins appropriés, par une réadaptation fonctionnelle et une rééducation professionnelle, de manière à faire disparaître, dans toute la mesure du possible, les conséquences sociales de l’accident ou de la maladie. La réparation sous forme d’indemnité ou de rente ne doit être considérée que comme subsidiaire, comme un pis-aller lorsqu’il n’est pas possible de faire mieux. »
Mais comment financer cette politique, alors que le Gouvernement réduit encore les marges de manoeuvre de la branche en lui imposant, dans ce projet de loi, une charge indue supplémentaire concernant le financement du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA ?
En effet, en 2001, le législateur a prévu un financement annuel du FIVA, non seulement par un transfert de la branche AT-MP voté chaque année en loi de financement, mais également par une dotation annuelle de l’État en loi de finances. Pourtant, pour la deuxième année consécutive, l’État ne prévoit aucune dotation pour ce fonds, alors que la dotation de la branche AT-MP fait plus que tripler. Il semble au demeurant que le Gouvernement envisage de renouveler l’opération jusqu’à la fin de la législature, ce qui ferait porter à la branche une charge indue de 250 millions d’euros.
Le financement par la branche AT-MP de l’indemnisation rapide et intégrale des dommages effroyables causés par l’amiante est pleinement légitime ; il est considérable puisque l’addition des dépenses au titre des rentes AT-MP au titre du tableau 30 des maladies professionnelles, du financement du FIVA, mais également du financement des préretraites amiante du FCAATA – le fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante –, représente près de 20 % des dépenses de la branche.
Mais cette contribution doit se faire dans la transparence et en confiance. Or l’État manque doublement à sa tâche : d’une part, il décide unilatéralement de ne pas apporter sa contribution annuelle et, d’autre part, le ministère de la défense refuse de rembourser au FIVA les indemnités complémentaires que verse le fonds aux soldats victimes d’une affection liée à l’amiante en raison d’une faute inexcusable de leur employeur : le ministère ne le fait que pour les ouvriers d’État, alors que la jurisprudence du Conseil d’État exige qu’il le fasse pour l’ensemble des agents publics. La dette envers le FIVA atteint 17 millions d’euros.
Mes chers collègues, il me semble d’autant plus inacceptable de réduire les marges de manoeuvre de la branche que le projet de loi de financement accepte de laisser l’excédent modeste de 2013 se réduire en 2014. Pour la première fois depuis 2010, le niveau du solde de la branche ne s’améliore pas d’une année sur l’autre. Pourtant, il faut rembourser, à terme, 2 milliards d’euros de déficits cumulés causés par la crise de 2009 et actuellement portés par l’ACOSS.
Au demeurant, il en va de même concernant le versement de la branche AT-MP à l’assurance maladie pour compenser les coûts occasionnés à la CNAM par la sous-déclaration et la sous-reconnaissance des AT et MP. Et il ne faut pas que le montant voté en loi de financement de la Sécurité sociale devienne, au fil des ans, un expédient de plus pour réduire le déficit de l’assurance maladie.
En respectant le principe selon lequel la branche AT-MP, financée exclusivement par les employeurs, ne devrait supporter que les charges qui lui reviennent, vous éviterez de mettre à mal la légitimité de notre système d’indemnisation forfaitaire, mais automatique, des accidents du travail et des maladies professionnelles, qui dispense le salarié victime d’un sinistre de la lourdeur du contentieux.
Mes chers collègues, la commission des affaires sociales, par le vote d’un amendement de votre rapporteur, vous a invités à faire un geste supplémentaire visant à garantir la pérennité de la branche. En matière de tarification, de nombreuses réformes, en 2009 et 2010, ont permis de simplifier les procédures pour limiter les recours abusifs des employeurs cherchant à échapper aux effets d’un sinistre sur leurs cotisations et, ainsi, d’améliorer le recouvrement des cotisations. Il convient aujourd’hui de prendre une mesure de justice pour les entreprises auxquelles il arrive parfois que les caisses imputent au compte employeur des taux AT-MP trop élevés. La Cour de cassation, dans son dernier rapport annuel, a proposé d’interrompre le délai de prescription afin que l’entreprise obtienne remboursement de l’ensemble des cotisations acquittées à tort. J’ai présenté un amendement en ce sens, adopté par la commission des affaires sociales. Il me semble qu’un avis favorable du Gouvernement constituera un signal positif tant pour les employeurs que pour les caisses, confrontées à l’explosion des recours conservatoires.
Mes chers collègues, le redressement des comptes et la modernisation en cours de la branche AT-MP, réalisés en confiance avec les partenaires sociaux, peuvent constituer un exemple pour l’ensemble de notre Sécurité sociale. La doyenne de la protection sociale peut redevenir un modèle. Ne l’empêchons pas de continuer à évoluer !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour la famille.
Madame la présidente, mesdames, monsieur les ministres, mes chers collègues, l’examen annuel d’un projet de loi de financement de la Sécurité sociale a été institué dans le but de permettre à la représentation nationale de mesurer, derrière chacune des mesures ponctuelles et techniques, une cohérence d’ensemble destinée à pérenniser notre Sécurité sociale.
Cette cohérence, nous la trouvons désormais dans le projet de loi de financement : il s’agit du redressement dans la justice.
Redresser les comptes de la branche famille, c’est d’abord lui apporter de nouvelles ressources ; c’est ensuite réformer notre politique familiale en répondant aux besoins des familles, et montrer ainsi que la réforme n’est pas synonyme de régression.
Le projet soumis à notre examen remplit pleinement ces deux objectifs. Ce PLFSS poursuit les efforts engagés dès 2012 par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault pour pérenniser le financement de la branche famille. Un fait simple, irréfutable, permet de mesurer le changement : pour la première fois depuis 2007, les comptes de la Caisse nationale des allocations familiales seront significativement améliorés l’an prochain.
La politique familiale contribue aux mesures d’économies à hauteur de 200 millions d’euros en 2014 et de 760 millions d’euros en 2017, au terme de la montée en charge des mesures présentées ici. Parallèlement, la branche va recevoir des recettes supplémentaires d’un montant de plus d’un milliard d’euros. L’apport de nouvelles recettes provient, au premier chef, de l’affectation du produit de la baisse du plafond de l’avantage tiré du quotient familial.
Les mesures d’économie sont dictées par le souci de la justice : elles recentrent vers les familles modestes des prestations sous conditions de ressources conçues précisément pour leur bénéficier. Les mesures de recettes évitent les facilités de l’austérité aveugle, qui seraient au demeurant contre-productives : ce projet de loi de financement demande des efforts raisonnables à des familles qui continueront par ailleurs à bénéficier d’avantages importants.
Contrairement à ce que prétendent ceux qui agitent un chiffon rouge, ce ne sont pas les classes moyennes qui sont concernées par la baisse du quotient familial. L’abaissement du plafond de 2 000 euros à 1 500 euros par demi-part supplémentaire n’entraîne de perte de l’avantage fiscal qu’à partir de 5 850 euros mensuels pour un foyer avec deux enfants.
Par ailleurs, le projet de loi de financement redonne, en matière de politique familiale, tout son sens au mot de « réforme », qui doit être compris comme l’adaptation patiente et graduelle de notre modèle aux mutations que vit notre société.
La démarche du gouvernement de Jean-Marc Ayrault sous la présidence de François Hollande est radicalement différente de celle des gouvernements précédents : oui, le modèle français est réformable. Il doit même être réformé pour faire face aux défis financiers, sociaux et économiques et, ainsi, préserver ses valeurs et son idéal de solidarité. Il n’y a pas de contradiction entre les réformes et ce que sont les Français. Le « nouveau modèle français » défendu par le Premier ministre ne fait donc pas table rase de notre histoire ; il retient les objectifs qui ont fondé notre pacte républicain et, surtout, il fait confiance aux talents et à l’intelligence des Français pour les actualiser.
Je prendrai pour exemple la qualité des contributions des familles elles-mêmes à l’amélioration de notre politique familiale lors de la concertation intitulée « Au tour des parents », engagée par la ministre déléguée à la famille dès sa prise de fonctions.
La politique familiale française a été inventée au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, dans un pays en ruines, mais confiant dans son avenir puisqu’il allait connaître le baby-boom. Cependant, à cette époque, la politique familiale était particulièrement matérialiste puisqu’elle se résumait à la distribution de ressources financières. En outre, on osait rarement contester la forme familiale traditionnelle, les hommes et les femmes étant assignés à des rôles sociaux bien définis : le travail pour les premiers, le foyer pour les secondes.
La réussite démographique de la France est, certes, le résultat de la grande continuité de sa politique familiale, mais elle ne s’explique pas par les seules « alloc ». En effet, les études récentes montrent que la démographie la plus dynamique est d’abord observée dans les pays qui ont mis en oeuvre une politique de conciliation entre vie professionnelle et vie familiale pour les mères. Il existe même une corrélation entre le niveau d’emploi des femmes et le nombre de naissances. À cet égard, c’est le modèle français qui fait école plutôt que le modèle allemand.
Cet héritage de la politique familiale nous engage à toujours mieux connaître les réalités des familles d’aujourd’hui, si diverses. Ainsi, des travaux sont en cours au Haut conseil de la famille sur les ruptures et les discontinuités de la vie familiale ; ils devront inspirer les prochaines réformes, notamment pour mieux aider les foyers monoparentaux.
Pour rénover notre politique familiale, nous disposons de plusieurs leviers, dont la convention d’objectifs et de gestion, ou COG, qui lie la CNAF à l’État. La nouvelle COG permettra de mener une politique d’action sociale ambitieuse. La hausse des crédits de 7,5 % par an pendant cinq ans représentera un surcroît d’investissement dans l’avenir des familles de deux milliards d’euros par an d’ici 2017. La COG permettra ainsi la mise en oeuvre d’un plan d’accueil de la petite enfance mieux ciblé sur les familles défavorisées et les territoires sous-dotés. La refondation de l’école conduite par le ministre de l’éducation nationale sera également fondamentale : le choix de renforcer la pré-scolarisation à la maternelle met un terme à la politique absurde conduite depuis dix ans, qui consistait à annuler les effets des créations de places en crèche par la fermeture de places pour enfants de moins de trois ans en école maternelle.
La réforme des rythmes scolaires améliorera l’accès à des dispositifs périscolaires et de loisirs de qualité. Ces mesures démontrent la cohérence de la rénovation de la politique familiale présentée en juin dernier, concrétisée par le projet de loi. Elles sont complétées, en matière de congé parental, par le projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes sur lequel l’Assemblée se penchera bientôt et par la prochaine loi sur les familles nourrie des différents rapports que vous avez commandés, madame la ministre, dont celui du HCF que j’ai déjà évoqué, préparés par des groupes de travail sur la médiation familiale, les droits et la protection des enfants ou encore la parentalité. Le redressement dans la justice consiste à affecter les économies à la réduction du déficit mais aussi à l’amélioration de la situation des familles les plus modestes. La diminution de la pauvreté des familles doit être un objectif de justice partagé par tous et prend place à ce titre au coeur de notre politique familiale. L’expérience de la pauvreté au cours de l’enfance expose à des risques accrus de précarité au cours de la vie d’adulte.
Le redressement dans la justice implique d’avoir le courage de revenir sur certains avantages contraires à la nécessaire amélioration du caractère redistributif des prestations, conçues dans ce but. Ainsi l’article 58 du projet de loi plafonne-t-il le complément de libre choix d’activité pour les seules familles les plus riches afin de mettre un terme aux effets d’aubaine. L’article 56 procède au nécessaire réajustement des plafonds de ressources de la PAJE. En revanche, l’article 55 augmente le complément familial de 50 % en cinq ans pour 400 000 familles vivant sous le seuil de pauvreté, et par voie réglementaire le montant de l’allocation de soutien familial de 25 % en cinq ans. Cette revalorisation concerne 735 000 familles monoparentales.
Le présent projet de loi de financement nous invite donc à redonner un sens progressiste à la notion de réforme. Celle-ci ne consiste pas à abandonner des acquis, comme les libéraux veulent le faire croire depuis les années 1980. La réforme consiste d’abord à connaître les familles qui vivent en France et à répondre à leurs besoins, car elles sont l’avenir de notre pays. La France a un destin et un avenir si elle réforme son modèle social et si la politique familiale s’inscrit dans un nouveau modèle français. Le projet de loi de financement soumis à notre examen y contribue pleinement.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Valérie Rabault, rapporteure pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Le PLFSS 2014 est un projet de fidélité. Fidélité à l’esprit des fondateurs de la Sécurité sociale désireux, comme le rappelle l’ordonnance de 1945, de « garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, à couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu’ils supportent ». Fidélité aussi, bien sûr, aux priorités du Gouvernement affirmées dès sa prise de fonction consistant à maintenir le haut niveau de protection sociale auquel les Français sont attachés, poursuivre la réduction du déficit et améliorer dans la justice notre système de santé. Fidélité, enfin, à notre engagement commun d’oeuvrer pour le progrès. J’illustrerai cette fidélité en sept points.
Je commencerai par constater avec vous que des premiers résultats ont d’ores et déjà été obtenus, dès cette année, au regard des objectifs fixés. En effet, les premières données de la commission des comptes de la Sécurité sociale laissent entrevoir une réduction du déficit en 2013, grâce à des mesures portant à la fois sur les dépenses et les recettes. En matière de dépenses, l’ONDAM sera respecté et même sous-exécuté. Il entérine une progression des dépenses bien moindre qu’au cours des dix dernières années puisque – je me tourne vers mes collègues de l’opposition – les dépenses de l’assurance-maladie progressaient en moyenne de 4,2 % par an entre 2002 et 2011.
Le deuxième point que je veux aborder avec vous ce soir, c’est l’ambition de poursuivre en 2014 l’amélioration des comptes de la Sécurité sociale.
C’est pourquoi l’objectif de l’ONDAM a été fixé à 2,4 %, ce qui est une première depuis 1998. C’est une première ambitieuse, je pèse mes mots, car pérenniser notre système sans sacrifier toute sa qualité nécessite de réduire notre déficit.
La réduction du déficit se poursuit de manière ambitieuse. Il est en effet prévu de faire reculer le déficit du régime général sous la barre de dix milliards d’euros, ce qui serait une première depuis 2008. En trois ans, le déficit serait ainsi réduit de 5,4 milliards d’euros. En 2014, la mise en oeuvre d’une telle réduction repose sur deux piliers. Le premier pilier consiste en de nouvelles recettes, à hauteur de 4,2 milliards d’euros, dont deux milliards d’euros versés par l’État et deux milliards d’euros de ressources propres. Le deuxième pilier consiste en une réduction tendancielle de la progression des dépenses, à hauteur de six milliards d’euros, sans renoncer à l’amélioration de la qualité des soins.
Tel est justement mon troisième point : cette clef de voûte de la réduction des dépenses, à laquelle il est procédé sans altérer la protection des assurés. Comme le rappelle très justement Christian Paul dans son rapport sur l’assurance maladie, le reste à charge pour les patients est en moyenne de 9,6 % en 2011 et il n’a cessé d’augmenter depuis dix ans.
Le PLFSS 2014 pose des objectifs clairs qui ne sont pas hors de portée, sans déremboursement supplémentaire ni franchise supplémentaire ni mesure qui fragiliserait la protection sociale à laquelle nous sommes attachés. C’est la deuxième fois, si l’on compte l’an dernier, et je me tourne encore vers mes collègues de l’opposition !
Je tiens à leur rappeler que l’on peut s’engager dans une démarche sérieuse de réduction du déficit sans réduire la protection sociale de celles et ceux qui en ont le plus besoin. Le haut niveau de protection sociale sera renforcé notamment grâce au caractère obligatoire des complémentaires santé, désormais inscrit dans la loi, grâce à la généralisation du tiers payant prévue pour 2017 et grâce à la lutte contre les dépassements d’honoraires.
Quatrièmement, la protection n’est pas assurée au détriment des entreprises. Il me semble nécessaire de rappeler ici quelques données chiffrées et factuelles. Pour tous ceux qui sont friands de classements internationaux, je me permets d’en reprendre un, cité par le magazine Forbes en mars 2012 : notre système de santé est considéré comme le meilleur au monde par l’Organisation mondiale de la santé
Disposer du meilleur système de santé au monde devrait être considéré comme un atout de compétitivité par chacun d’entre nous, en particulier ceux qui s’en réclament. Et en disposer pour un coût de 11,6 % du PIB contre 17,7 % aux États-Unis devrait inciter certains d’entre nous à cesser de crier haro sur le coût du travail !
À ce sujet, qui a fait débat, le rapport Moreau rappelle que les cotisations de retraite patronales connaissent depuis 1980 « une remarquable stabilité » alors que les cotisations de retraite salariales ont augmenté.
Cinquième point, le PLFSS 2014 est porteur d’avancées sociales. Il propose ainsi une amélioration de la protection sociale des femmes affiliées au régime des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés en cas d’arrêt maladie lié à la grossesse, afin de renforcer l’attractivité des professions libérales de santé. Vous l’avez rappelé, madame la ministre, il instaure le tiers payant pour les mineures de plus de quinze ans sur les actes biologiques nécessaires à la délivrance de la contraception. Il améliore les conditions d’accès à la CMU complémentaire. Il propose une majoration du complément familial et la prise en charge par l’État de l’exonération de cotisation vieillesse-veuvage pour les apprentis. Bref, il comporte tout un ensemble d’avancées en termes de protection sociale.
Sixièmement parce qu’il n’envisage ni franchise nouvelle ni déremboursement, le PLFSS propose des réductions de dépenses ciblées assorties d’un objectif de modernisation de notre système de santé visant à en protéger toute la qualité que nous devons aux assurés et à en assurer la pérennité. Telle est la condition de la réussite afin d’assurer nos équilibres financiers et la justice sociale. Le vieillissement de la population française, certes nettement moindre qu’ailleurs en Europe, induit mécaniquement une hausse des dépenses de santé. Celle-ci ne pourra être maîtrisée que si nous parvenons à mieux nous soigner, grâce à une meilleure organisation en particulier. Le PLFSS 2014 propose plusieurs dispositifs allant parfaitement dans ce sens tout en permettant des réductions de dépenses, en particulier l’économie de 960 millions d’euros d’économie sur le médicament.
Celle-ci, comme on le voit dans la répartition qui nous a été proposée, est en partie due aux génériques, dont le nombre devrait augmenter car un certain nombre de brevets vont arriver à terme. Néanmoins, des perspectives pluriannuelles sont indispensables pour préserver notre capacité d’innovation, gage à la fois de notre compétitivité et de l’équilibre financier de notre système de santé. Même si ce point n’est pas du ressort de notre assemblée, il me semble également important que la baisse ne soit pas uniforme, de manière à protéger l’innovation, gage d’améliorations futures. Le deuxième volet d’économie, de 600 millions d’euros, repose sur l’efficience du système de soins et sur une responsabilisation grâce à la contractualisation entre les différents acteurs du système de santé. Le PLFSS propose aussi d’expérimenter les médicaments vendus à l’unité afin d’adapter les quantités aux réels besoins.
Volontiers, car cela fonctionne parfaitement bien dans certains pays. Cette innovation permet d’agir sur les volumes, comme le montre un chiffre : depuis 2005, deux milliards d’euros ont été économisés grâce à la baisse des volumes.
Dès lors, l’expérimentation est prometteuse. Le PLFSS propose enfin une inscription plus rapide aux différentes nomenclatures d’un nouvel acte innovant associé à des produits de santé.
Le septième et dernier point porte sur les établissements de santé, qui représentent la moitié de l’ONDAM et peuvent compter, dans le PLFSS 2014, sur un certain nombre d’avancées significatives. Je voudrais revenir ici sur la tarification à l’acte, qui comme vous le savez repose sur deux paramètres, l’activité contrôlée directement par les établissements et la tarification fixée par le ministère. Cette tarification à l’acte met sous tension les établissements, dont la marge de manoeuvre est ainsi réduite, pour engranger une amélioration de leur organisation. Cette tension s’accompagne dans certains cas d’un recours excessif à l’intérim, dont les coûts pourraient avoisiner, selon différentes estimations, 500 millions d’euros.
Pour répondre au problème, des décisions ont été prises dans le PLFSS 2013, comme l’arrêt de la convergence tarifaire et le report de plusieurs réformes de la T2A pour les hôpitaux locaux. Cette année, le PLFSS propose de nouvelles avancées, comme l’adaptation de la tarification à l’acte dans les zones sous-denses, la dégressivité des tarifs au-delà d’un certain seuil d’activité et le pilotage par les ARS des fonds d’intervention régionaux ou FIR désormais inclus dans le PFLSS.
Outre ces dispositions plus spécifiques à l’hôpital, le PLFSS repose sur le pilier du parcours de soins. Plusieurs mesures sont proposées pour le renforcer, dont de nouveaux modes de rémunération des personnels médicaux visant à financer des équipes multi-professionnelles ou encore des actes de télé médecine. Cela est essentiel pour conjuguer deux objectifs : qualité de soin et pérennité financière. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Madame la présidente, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale constitue, chaque automne, un temps fort des travaux de la commission des affaires sociales et de notre assemblée. Ce travail, nous l’avons fait en dépit d’un calendrier difficile…
…qui a fait se succéder sans délai la réforme des retraites et le PLFSS – et je tiens à remercier et féliciter ici les six rapporteurs et toutes celles et tous ceux qui les ont assistés. Entre les auditions du premier président de la Cour des comptes, celles des ministres et l’examen des articles, la commission aura consacré plus de dix-sept heures à l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.
Ce PLFSS se caractérise par deux grands principes : poursuivre l’effort de redressement engagé en 2012 et s’inscrire dans les nombreux chantiers ouverts dans le champ social depuis l’an dernier. Cet effort résulte à la fois d’économies et de recettes nouvelles et témoigne d’un fort volontarisme. Je vais éviter de répéter ce qui a déjà été dit, pour me concentrer plutôt sur des sujets bien particuliers qui me sont chers, comme à beaucoup d’autres dans cette assemblée.
Pour ce qui est des économies, 500 millions d’économies de gestion sont attendus des caisses de sécurité sociale, ce dont on ne peut que se féliciter. Il y a des caisses auxquelles il conviendrait de s’intéresser : je pense notamment aux caisses étudiantes de sécurité sociale, au sujet desquelles la Cour des comptes dit que « les délais d’attribution de la carte Vitale sont très supérieurs à ceux du régime général – des délais de 6 à 9 mois ne sont pas exceptionnels. L’accueil téléphonique ou physique est parfois très défaillant (…).
Aucune des trois mutuelles contrôlées n’obtient la moyenne dans une enquête de satisfaction faite par la Cour auprès d’étudiants qui y sont affiliés ». Quant au taux de médecins traitants déclarés auprès de ces caisses, il est très faible, et nous aurons l’occasion de nous y intéresser. Madame la ministre, je vous sais attachée aux questions ayant trait à l’accès aux droits, et je ne doute pas de votre intérêt pour l’amélioration de l’accès aux soins des étudiants, souvent ignorants du système de soins au moment où ils découvrent le monde universitaire.
Ce projet comporte des dispositions de simplification des mécanismes de financement, indispensables si l’on veut éviter que la « tuyauterie » de la sécurité sociale ne devienne totalement incompréhensible à force de complexité. Toutefois, je souscris aux observations de Gérard Bapt qui, dans son rapport, souligne la nécessité de poursuivre résolument cet effort. Un autre élément positif est la poursuite du transfert des déficits accumulés des comptes de l’ACOSS vers la CADES.
Pour ce qui est de la branche famille, je ne reviendrai pas sur ce que Mme Clergeau a très bien exposé et me bornerai simplement à rappeler que l’abaissement du plafond du quotient familial verra son produit venir en soutien de la branche famille. Cet apport d’un milliard d’euros de recettes supplémentaires permettra de réduire de manière substantielle, pour la première fois depuis 2007, le déficit de cette branche. Et, contrairement à ce qu’affirment certains, l’équité est respectée, puisque ce sont les familles les plus aisées qui contribueront au financement de la politique familiale au profit des moins favorisés.
La réforme de la dépendance, que l’ancienne majorité, devenue opposition, n’a pas su ou n’a pas voulu faire, nous allons la faire, puisque le Premier ministre a confirmé, lundi 14 octobre dernier, qu’elle serait à l’ordre du jour du Parlement en 2014, ce dont je me réjouis tout particulièrement. Monsieur le ministre du budget, je vous ai écouté avec attention lorsque vous vous êtes exprimé à la tribune, tout à l’heure. Vous nous avez parlé d’un plan ambitieux, doté des moyens nécessaires pour accomplir cette réforme de la dépendance. Je fais partie de ces députés qui vous font confiance…
« Encore heureux ! » sur les bancs du groupe UMP
…et je suis persuadée que vous saurez rassurer les acteurs du secteur lors de nos débats, que je souhaite apaisés et propices à des votes raisonnables.
Dans le domaine de l’assurance maladie, je m’attarderai sur trois points. Tout d’abord l’article 44 du projet de loi, qui met en place le tiers payant pour les consultations et examens préalables à la contraception chez les mineures à partir de 15 ans. Vous avez prévu le financement des examens biologiques nécessaires à toute prise de contraception orale.
Je me réjouis, madame la ministre, que vous m’ayez entendue sur ce point. Ce dispositif ambitieux que nous avons voté l’année dernière se doit de fonctionner. Nous referons un bilan l’an prochain…
…et j’insiste pour que cette mesure fasse l’objet d’un effort de communication particulier afin que toutes les jeunes filles concernées connaissent son existence : l’information relative à cette mesure doit être largement diffusée, et ne pas être accessible uniquement sur le site du ministère, que les jeunes filles de 15 à 18 ans ne visitent sans doute pas très assidûment…
J’évoquerai également un amendement portant article additionnel après l’article 46, demandant un rapport sur l’ouverture des droits aux indemnités journalières. Il se trouve que je suis à l’origine de cet amendement qui, en raison de l’article 40, prend la forme d’une demande de rapport. Je sais que, comme moi, nombre de mes collègues ont été interpellés par leurs concitoyens sur cette difficulté qui touche les salariés les plus fragiles et les plus précaires. Il convient donc de nous éclairer sur le problème des salariés à temps partiel qui ont cotisé mais qui, faute d’avoir atteint une durée d’activité de 200 heures au cours des trois mois précédant l’arrêt de travail, n’ont pas droit aux indemnités journalières. On constate en effet que le mode de calcul des indemnités journalières n’est plus tout à fait en adéquation avec le marché du travail actuel.
Enfin, j’aborderai rapidement l’article 45, réformant la protection complémentaire d’assurance maladie, qui vise une meilleure prise en charge des dépenses de santé des personnes vulnérables, tout en prévoyant une meilleure articulation entre l’assurance maladie obligatoire et la complémentaire. Si je me félicite, bien entendu, de cette disposition de solidarité, je veux tout de même soulever une difficulté réelle, qui touche une grande partie du public visé par cet article, celle des modalités de récupération des franchises pour les personnes bénéficiant du tiers payant, qui ne font donc pas l’avance des frais.
Nous avons reçu le rapport sur les franchises médicales. Si je vous l’ai réclamé à cor et à cri, ce n’était pas pour vous embêter, mais parce que j’ai l’habitude de le lire chaque année ! Cette année encore, on y trouve nombre d’informations intéressantes notamment, à la page 5, une indication selon laquelle 226 millions d’euros de franchises n’auraient pas été recouvrés depuis 2008. L’explication donnée à cet état de fait est la suivante : « dans la plupart des cas, elles ne peuvent être récupérées directement par déduction sur les remboursements effectués (…) puisque ces derniers sont très majoritairement effectués en tiers payant ».
Ce phénomène pose, certes, un problème de pertes de recettes pour la sécurité sociale, mais il se traduit surtout par des conséquences difficilement supportables pour les personnes bénéficiant du tiers payant et disposant de faibles revenus qui se voient réclamer, avec un important décalage dans le temps, le remboursement de franchises pour des sommes représentant une part significative de leur revenu. J’ai ainsi reçu, dans ma permanence, une personne qui se voit réclamer, au titre des franchises non récupérées en 2012 – donc cumulées sur quatre ans – le paiement d’une somme de 279 euros, qui représente un gros tiers de son revenu disponible mensuel et que cette personne est incapable de régler. Je vous invite à lire l’imprimé exigeant d’elle le règlement de cette somme, qui ne laisse entrevoir aucune possibilité de recours : la personne en question n’a d’autre choix que celui de payer sous quinze jours, par chèque ou par virement.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Sur la question des franchises, vous n’avez pas de leçons à nous donner, car nous n’en avons pas rajouté – pas plus que de forfaits. Nous avons simplement hérité de ce que vous nous avez laissé, à savoir plus de 220 millions d’euros de franchises à récupérer – et vous l’avez fait exprès, partant du principe qu’il serait beaucoup plus facile de laisser ce travail à la nouvelle majorité ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La récupération des franchises auprès des personnes bénéficiant du tiers payant constitue un réel problème et je souhaiterais, madame la ministre, que vous nous indiquiez ce que le Gouvernement compte faire à cet égard. Je sais que l’un de vos premiers objectifs consiste – c’est une bonne mesure – à faire bénéficier du tiers payant chez le médecin les bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé.
Pour conclure sur la question qui nous tient à coeur, à savoir garantir l’accès aux soins pour tous et faire reculer les renoncements aux soins des personnes les plus fragiles, vous nous avez dit, madame la ministre, que vous vous engagiez à produire de nouveaux indicateurs permettant de mieux nous éclairer sur l’accès aux soins. Je vous remercie de nous préciser, si cela vous est d’ores et déjà possible, vos intentions en la matière. Enfin, je veux rappeler à l’ensemble de la représentation nationale, mais surtout à l’opposition…
…que le 1er juillet, le Premier ministre et Mme la ministre ont annoncé un relèvement de plus de 8 % du plafond des revenus, afin que 400 000 de nos concitoyens bénéficient de la CMU complémentaire…
Toujours la même question ! Nous, nous pensons aux personnes et à la solidarité qui doit jouer entre elles !
…et afin, disais-je, que 350 000 personnes bénéficient de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé. En tout, nous allons permettre à 750 000 personnes d’accéder au système de soins. Au-delà du bénéfice de la CMU complémentaire, les personnes concernées vont bénéficier de tarifs opposables, ne paieront plus de franchises ni de forfaits, et ne se trouveront plus confrontées à des demandes de remboursement de franchises de la part de la CPAM.
Madame et monsieur les ministres, je me félicite de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, même si j’ai posé quelques questions susceptibles de vous embarrasser – mais je ne doute pas que vous saurez y répondre, maintenant ou plus tard.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
J’ai reçu de M. Jean-Louis Borloo et des membres du groupe de l’Union des démocrates et indépendants une motion de rejet préalable déposée en application de l’article 91, alinéa 5, du règlement.
La parole est à M. Arnaud Richard.
Parmi la batterie de procédures relevant du débat parlementaire, la motion de rejet préalable est particulière, en ce qu’elle renvoie à ce qui fait concrètement de notre régime politique un régime parlementaire. Un régime parlementaire, c’est d’abord – du moins théoriquement – la primauté donnée à la discussion au Parlement sur toutes les étapes qui la rendent possible, aussi essentielles les unes que les autres, et qui permettent une élaboration sérieuse, sereine et progressive de la loi.
Bien sûr, un projet de loi de financement de la sécurité sociale n’a pas le retentissement symbolique d’une loi sur la souveraineté nationale, il n’évoque pas un projet de civilisation, il ne se prête pas vraiment aux envolées lyriques dans l’hémicycle. Cependant, le PLFSS touche tous les Français, à un titre ou à un autre. Il les touche dans le premier et le plus fondamental de leurs droits : la santé et l’intégrité physique à chaque étape de leur vie, du plus tendre au plus grand âge, dans toutes les situations, de la famille à la solitude, de l’espace public au lieu de travail.
Voilà donc, au fond, un texte qui appelle, certainement plus que tout autre, une attention particulière de la part des parlementaires. Et c’est très certainement parce que ce texte touche une immense diversité constituée d’hommes et de femmes, mais aussi l’ensemble des opérateurs publics et privés de notre système de sécurité sociale, qu’il est plus complexe que d’autres – et, avouons-le, moins accessible au plus grand nombre, ce qui est paradoxal puisqu’il concerne tout le monde.
C’est aussi parce que les contraintes financières sont lourdes et les nécessités du temps incontournables que, du brouhaha très lointain et indistinct du Parlement pour bon nombre de compatriotes, doit émerger un sens et même une sorte d’évidence. C’est pourquoi notre rôle, notre obligation de vigie de la République doivent être décuplés lors de l’examen de ce texte complexe. Au-delà de la technique et du juridique, nous sommes placés face à une obligation morale – et je veux croire, mes chers collègues, que nous sommes tous d’accord au moins sur ce point.
Mais nous faisons également face à notre devoir constitutionnel, prolongé par l’article 91, alinéa 5, du règlement de notre assemblée. Je vais donc vous demander, mes chers collègues, d’adopter cette motion de rejet préalable, pour trois raisons cumulatives.
Rires.
La plus fondamentale, c’est le temps tronqué et les supports absents pour le débat. Faute de travail et de débat préalable, ce texte s’inscrit malheureusement dans la morne continuité de ce que nous propose régulièrement le Gouvernement : alourdissement des charges fiscales et absence persistante de réformes structurantes de notre système de sécurité sociale. Au fond, madame la ministre, monsieur le ministre, avec ce texte, vous initiez une nouvelle règle parlementaire, celle de l’entonnoir inversé. Chacun, ici, connaît la règle de l’entonnoir, qui prévaut sur un certain nombre de dispositions réglementaires de l’Assemblée et prévoit que, devant chaque chambre, le débat se restreint au fil des lectures successives d’un texte. Le Gouvernement procède de la façon inverse, en commençant par restreindre, de fait, la capacité du Parlement à s’exprimer.
Tout a commencé il y a une quinzaine de jours, en commission, avec l’audition des ministres, organisée à l’initiative de la présidente – il est en effet de coutume que nous auditionnions l’ensemble des membres du Gouvernement concernés par le PLFSS. Premier couac : du fait de l’agenda des ministres, cette audition a eu lieu à l’heure du déjeuner…
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
…alors que nous devions être en séance à quinze heures et que, la veille au soir, un certain nombre d’entre vous, mes chers collègues – je pense tout spécialement aux membres de la commission des affaires sociales – travaillaient sur le texte relatif à la réforme du système de retraites.
Mêmes mouvements.
Bref, le débat était d’emblée pris dans un étau. Dans la mesure où nous devions entendre cinq ministres, six rapporteurs et l’ensemble des groupes politiques, les autres députés présents ont, pour la première fois, été privés de parole. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Certaines questions aux ministres, d’ailleurs, sont passées à la trappe : autant d’éléments de moins pour nourrir nos travaux ultérieurs. En somme, entre les mors de l’étau, il n’est pas resté grand-chose.
Second couac, et je crois que c’est la première fois depuis que le PLFSS existe…
…nous n’avions pas le texte. C’était le mercredi 9 octobre, la veille – j’y reviendrai – de la date butoir du 10 octobre inscrite dans la LOLF, et le texte ne nous a été transmis que le 11 octobre,…
…sachant que les amendements devaient être déposés le lundi suivant. Si nous pouvons tenter d’être clairvoyants, admettez que nous ne pouvons être extralucides, quelles que soient les qualités du président Accoyer. Bref, nous avions des devoirs de week-end : examiner en deux jours, dans notre circonscription, un texte assez complexe, comprenant 69 articles et représentant un budget avoisinant les 500 milliards d’euros. Nous sommes vraiment confrontés à la désinvolture la plus absolue à l’égard du travail parlementaire !
Qu’il en soit remercié, même si ce régime un peu gras, pour des parlementaires qui doivent tenir la ligne budgétaire de notre système de sécurité sociale, n’est guère approprié
Sourires.
…qui a, en effet, été courageuse, comme souvent, en sa qualité de présidente réélue de la commission des affaires sociales : je la vois s’inquiéter de mes propos.
Sourires.
Je veux la citer : « Il est difficilement acceptable que les ministres ne répondent pas ou peu aux questionnaires budgétaires qui leur ont été adressés par les rapporteurs au mois de juillet. » Nous étions, de mémoire, le 9 octobre, alors que la date butoir était le 10, et la présidente a indiqué que M. Paul n’avait reçu, sur la branche maladie, que 25 % des réponses aux questionnaires budgétaires. Dans ces conditions, je ne vois pas comment, monsieur Paul, quelles que soient vos qualités, vous avez pu écrire votre rapport.
Pour ce qui est des taux de réponse sur les recettes, nous étions à cette date à 55 %.
La présidente a évoqué tout à l’heure le rapport sur les franchises annuelles – que nous avons probablement tous découvert dans notre courrier de ce jour –, et elle a tout à fait raison de le faire, elle a le mérite de la constance, puisqu’elle disait exactement la même chose lorsqu’elle était dans l’opposition. Vous n’aviez en effet de cesse de le réclamer quand vous étiez dans l’opposition. Il devait parvenir au Parlement le 30 septembre.
Auparavant, on ne l’avait que le jeudi, alors ne donnez pas de leçons !
Je suis d’accord avec vous, madame la présidente. Bref, ces dysfonctionnements majeurs ont gravement perturbé notre travail parlementaire. Et chacun d’entre nous – en s’armant, monsieur Paul, d’un peu de bonne foi, ce que, j’en suis certain, vous êtes capable de faire – ne peut qu’en convenir. Je redirai une nouvelle fois que la présidente a été courageuse.
Permettez-moi de vous dire, en ces temps difficiles, que, si la gauche faisait une fois gagner le Parlement face à l’exécutif, elle serait peut-être de nouveau reconnue par certains de ses électeurs historiques.
Même si cela ne me regarde pas, permettez-moi de vous dire que vous pourrez peut-être sauver durablement votre majorité en surmontant l’hétérogénéité des forces qui la composent.
Je m’adresse surtout à nos collègues de la majorité, ou de ce qu’il en reste : soyez des démocrates simplement exigeants. Je ne vous demande pas même, en votant cette motion, de faire preuve d’audace vis-à-vis de ce texte : je vous demande de créer un précédent dont vous pourrez être fiers demain. Je vous demande d’admettre une évidence, qui suffit à elle seule à reporter l’examen de ce texte important. Sinon, acceptez définitivement de n’avoir pas la considération de vos électeurs, mais vous savez alors quel mal insidieux vous laissez grandir dans l’esprit public.
J’espère au moins que vous faites cela, non pour l’esprit de clan mais pour l’esprit des lois.
Au cas où cela ne suffirait pas, peut-être faut-il ajouter que la procédure n’existe que pour donner du sens à l’action parlementaire. Or, madame, monsieur les ministres, vous avez suivi une procédure réduite aux acquêts : c’est un texte de loi qui ne bénéficiera pas de l’enrichissement du débat parlementaire.
Cet après-midi, monsieur le ministre, vous insistiez sur votre choix résolu de redresser les comptes sociaux. Nous approuvons cette démarche, mais si le temps nécessaire et les informations utiles nous avaient été donnés, nous vous aurions incité, et sans doute beaucoup de nos collègues socialistes aussi, à procéder autrement.
La vérité, c’est que ce texte relatif au financement de la sécurité sociale n’a jamais suivi une pente fiscale aussi abrupte.
Le Président de la République et le Gouvernement avaient promis aux Français de ne pas alourdir les impôts et les charges sociales des ménages. Or, en proposant une refonte des prélèvements sociaux sur les produits de placement, qui porte notamment sur l’épargne logement, l’article 8 du PLFSS contredit cet engagement. Non seulement c’est une mesure politiquement inacceptable pour les Français, mais elle est aussi socialement insupportable pour les classes moyennes, dont les revenus n’ont cessé de diminuer, et qui tentent par quelques économies de se prémunir des accidents de la vie ou, simplement, d’assurer l’essentiel en vue de leur retraite, ou même encore d’épargner pour leurs enfants et leurs petits-enfants. En effet, les plans d’épargne logement, les plans d’épargne en action ou les contrats d’assurance-vie sont des placements utilisés par de nombreuses familles modestes.
De plus, cette modification du régime fiscal des contrats déjà signés – même si, monsieur le ministre, vous avez eu l’habileté de le présenter différemment dans les propos que vous avez tenus tout à l’heure – est une rupture de confiance, qui va inéluctablement conduire nombre de nos compatriotes à se détourner des placements en question.
Enfin, alors que le secteur du logement rencontre de nouveau de nombreux problèmes dont nous débattions ici il y a encore quelques semaines, cet article 8 comporte de nombreux risques pour ce secteur terriblement malmené par les choix fiscaux de ce gouvernement. Il est à croire que vous n’avez toujours pas compris l’importance du secteur du logement pour notre économie.
Autre exemple, madame la ministre, de cette volée fiscale que vous infligez à toute force aux Français : l’article 9 frappant les exploitations agricoles : plus de 168 millions d’euros vont être ponctionnés sur les agriculteurs. Là où le Président de la République avait prévu la solidarité nationale, vous avez fait le choix de la taxation, en faisant entrer dans l’assiette des cotisations sociales des revenus du capital qui ne sont pas liés à l’activité. Bref, au regard de la grande disparité de l’évolution du revenu agricole, tant en termes de filières que sur le plan individuel, cette disposition entraînera un alourdissement incontestable des charges. Comme cela a été dit par l’un de nos collègues, c’est du jamais vu depuis 1945.
Rassurez-vous, mes chers collègues, je ne vais pas citer tous les articles du projet de loi, mais force est de constater que vous créez, à l’article 10, une cotisation vieillesse assise sur la totalité des revenus des indépendants, sur laquelle sera appliquée la hausse décidée par la réforme des retraites. Déjà, l’année dernière, le Gouvernement avait augmenté les cotisations sociales du régime social des indépendants. Dans un contexte économiquement difficile, vous auriez été mieux inspirés de soutenir au contraire les PME et les très petites entreprises. Malheureusement, vous faites le contraire, faute de dialogue et d’analyse ouverte. C’est inacceptable, qui plus est compte tenu des conditions particulières des débats sur ce projet de loi.
Au groupe UDI, nous souhaitions à l’inverse rétablir la possibilité pour les particuliers employeurs d’opter pour le régime de la déclaration au forfait des travailleurs à domicile, supprimée par le projet de loi de finances pour 2013. En effet, mes chers collègues, vous n’ignorez pas que la suppression de cette possibilité a provoqué un repli de 4,4 % de l’emploi salarié à domicile au premier trimestre 2013 et le développement du travail clandestin.
Entre le premier trimestre 2012 et le premier trimestre 2013, le volume horaire déclaré a chuté de près de 8 %.
Je citerai enfin l’article 56, qui modifie les conditions d’attribution de l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant. Son montant sera désormais divisé par deux pour 12 % des ménages éligibles, soit 280 000 familles. Cette mesure s’ajoute à la baisse du quotient familial, à la diminution du complément de libre choix d’activité et à la possible suppression de la réduction d’impôt pour les frais de scolarité. Vous confondez tout et, en pensant vous attaquer à la citadelle de la famille, vous agressez une fois encore les classes moyennes.
En « mobilisant les prélèvements » – formule que je trouve assez habile –, vous fiscalisez la politique familiale, qui fait pourtant de notre pays l’un des plus dynamiques sur le plan démographique. C’est, à notre sens, une lourde erreur pour l’avenir de la France.
Au fond, vous restez arc-boutés sur les mêmes méthodes vexatoires de taxation, au prix d’une casse économique et sociale insupportable. Et la seule porte ouverte que vous avez accordée au Parlement, monsieur Bapt, c’est encore celle de l’aggravation fiscale, par la voie d’un de vos amendements revenant une nouvelle fois sur le projet de taxation des boissons énergisantes, qui avait déjà été recalé l’année dernière par le Conseil constitutionnel. Cet amendement est d’ailleurs d’autant plus contestable que, sous couvert d’un combat pour la santé publique, il concerne en réalité la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Heureusement, monsieur Bapt, la porte du Gouvernement s’est finalement refermée derrière vous, ce qui nous a permis d’échapper à toutes les propositions de nos collègues écologistes relatives à la création d’une taxe additionnelle sur l’huile de palme, sur les moteurs diesels, ou encore sur les retraites chapeaux, alors que la loi de finances rectificative pour 2012 avait déjà permis un doublement de la cotisation employeurs.
Seconde grande carence de cette discussion parlementaire : l’absence d’un dialogue suffisamment étayé n’a pas permis, une fois encore, d’élaborer et de construire ensemble de véritables politiques structurelles. En dépit des recommandations pressantes de la Cour des comptes, qui vous indiquait pourtant des gisements d’économies potentielles, surtout dans la gestion des hôpitaux, rien de structurant n’a été engagé dans ce PLFSS pour 2014. Et, au fond, là aussi, vous nous servez le plat socialiste issu d’un livre de recettes bien éculées à base de quelques boucs émissaires – tantôt les laboratoires, tantôt les radiologues, tantôt les pharmaciens, tantôt les biologistes.
Et, comme on vient de le voir, vous frappez encore les ménages et les petites entreprises, tout en ménageant vos protégés, par exemple l’hôpital. En réalité, de ce point de vue, le vrai travail n’a pas été engagé. Nous ne sommes pas les seuls à le dire : un certain nombre de voix s’expriment en ce sens dans la majorité. On ferait mieux de travailler sur la carte hospitalière, l’offre de soins, les déserts médicaux et la spécialisation des établissements. Cette réflexion d’ensemble n’existe pas – ou, si elle existe, nous avons hâte de la découvrir. En tout état de cause, l’hôpital pèse extrêmement lourd dans les coûts de la sécurité sociale en France. On espère toujours réduire les coûts en réduisant l’offre alors qu’il faudrait faire l’inverse et assurer une offre de proximité suffisante.
Tout reste à entreprendre de ce côté-là. Même réflexion sur les expérimentations en matière d’organisation des soins, de télémédecine, de rémunérations, de parcours de soins, que l’on prolonge sans cesse, ou qui sont appelées à fleurir ici ou là, sans que l’on dispose d’un paysage vraiment très clair, sans que l’on distingue un horizon, une direction. On ne conduit pas ainsi une politique de santé, madame la ministre, sous peine de s’enfoncer dans un magma indistinct.
Nous parlions tout à l’heure des boissons énergisantes, comme avaient été ciblées, l’an dernier, les bières. On voit bien, par là, que vous raclez les fonds de tiroir – ce sont des recettes de poche – en vous efforçant de trouver à chaque fois le meilleur prétexte possible.
Ce qui apparaît avec certitude, à la lecture du PLFSS, c’est le manque d’une grande loi de santé publique…
…qui permettrait de donner du sens à l’ensemble de ces mesurettes. Cela supposerait un beau dialogue en amont. Nous y sommes prêts, mais encore faut-il que vous nous en donniez l’occasion. Une fois encore, ce n’est pas le cas.
Finalement, dans ce texte, on ménage, d’un côté, et on aménage, de l’autre, mais, en vérité, on ne construit pas l’avenir.
Aussi, pour l’ensemble de ces raisons, je vous demande – et je m’adresse en particulier à nos collègues de la majorité – d’adopter en conscience cette motion de rejet préalable.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Mesdames, messieurs les députés, il n’y a pas grand-chose à ajouter à ce qui a été dit par mes collègues et moi-même lors de la présentation de ce texte. Franchement, je ne comprends pas très bien quelle est votre position, monsieur Arnaud. (« Richard ! » sur les bancs des groupes UDI et UMP). Monsieur Richard, pardonnez-moi ; cela prouve en tout cas qu’il est des moments où l’on est capable de se parler directement, contrairement à ce que certains, sur vos bancs, ont l’air d’imaginer, en préférant vociférer plutôt qu’échanger. Tel n’est pas votre cas, mais je ne vois pas ce qui, dans la motion que vous nous avez présentée, permet d’aller à l’encontre du texte du Gouvernement. Vous nous expliquez qu’il faut faire des économies, mais vous récusez l’ensemble de ce que nous proposons, sans avancer la moindre proposition alternative. Vous appelez de vos voeux une politique de santé forte : je vous appelle donc à participer à la vaste réflexion qui a été engagée autour de la stratégie nationale de santé, qui porte précisément sur les points que vous avez soulignés : placer au coeur du système de santé une médecine de proximité, de territoire, qui permette de faire face à l’enjeu des déserts médicaux et de faire de la coordination entre l’hôpital, la médecine de ville et le secteur médico-social le coeur d’un accompagnement plus proche et mieux suivi de l’ensemble des patients.
Ce projet de loi prévoit des mesures importantes et je ne doute pas, monsieur le député, que vous serez amené à les voter. Encore une fois, j’appelle l’ensemble de la représentation nationale à rejeter cette motion de censure, qui n’apporte aucun élément nouveau sur le débat que nous avons engagé.
Nous en venons aux explications de vote.
La parole est à Mme Chaynesse Khirouni, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je ne souhaite pas ménager le suspense : le groupe SRC votera contre la motion de rejet préalable,
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes UDI et UMP
qui tient davantage de la posture politicienne que d’une véritable vision pour notre système de Sécurité sociale à la française. En ces temps de crise, revenons à l’essentiel
J’ai relu les comptes rendus des débats qui avaient eu lieu l’an dernier : vous nous faisiez les mêmes critiques. Vous nous aviez prédit un dérapage de l’ONDAM et un creusement des déficits.
Malgré un environnement contraint, force est de constater que nous avons obtenu des résultats en termes de réduction des déficits. Pour notre part, nous estimons, et mes collègues l’ont rappelé, que nous devons poursuivre résolument le redressement des comptes sociaux tout en préservant notre modèle social universel. Nous poursuivons donc l’action engagée dans un esprit d’équilibre et de justice.
Le PLFSS pour 2014 permettra de porter les réformes structurelles engagées par le Gouvernement en matière de retraites, de politiques familiales et avec une véritable stratégie nationale de santé.
Ce projet de loi étend les expérimentations telles que les nouveaux modes de rémunération des médecins, les tarifications pour la télémédecine ou la délivrance de certains médicaments à l’unité. Il n’y aura aucun déremboursement et aucune participation supplémentaire ne sera demandée aux assurés.
La baisse du prix des médicaments, à la fois en ville et à l’hôpital, permettra de faire des économies. C’est là, mes chers collègues, une véritable rupture avec les politiques passées.
Vous aviez en effet réussi l’exploit de creuser les déficits tout en faisant les poches des assurés sociaux.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Avec le projet de loi de finances pour 2014, nous mettons en oeuvre des mesures de progrès social mais aussi de justice pour ceux qui, dans notre pays, sont les plus vulnérables. Je pense notamment au relèvement du plafond de la couverture maladie universelle complémentaire ou de celui de l’aide pour l’acquisition d’une assurance complémentaire santé.
Il en va de même avec le tiers payant sur les consultations et examens préalables à la contraception chez les mineurs de plus de quinze ans ou avec la politique d’accueil dans le domaine de la petite enfance pour toutes les familles. Comme vous pouvez le constater, et je conclurai sur ce point, madame la présidente, ce sont d’autres choix que nous faisons pour renforcer l’accès de tous à notre système de protection sociale.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Il est important de reprendre les propos de notre collègue Arnaud Richard sur la nature de ce texte et son caractère essentiel. Ce texte, certes complexe, concerne en effet tous les Français. Il est relatif à la santé, un enjeu capital doté d’un budget substantiel de 500 milliards d’euros.
Madame la ministre, vous ne vous êtes pas du tout exprimée sur la condition de forme qui a été relevée en premier lieu par notre collègue Arnaud Richard. Nous n’avons pourtant pas pu faire un travail sérieux en commission, nous n’avons pas pu échanger et débattre. L’audition des ministres n’en a finalement porté que le nom.
Je m’étais moi-même inscrite, comme un certain nombre de mes collègues, pour pouvoir vous interroger et vous entendre, mais cela n’a pas été possible. Il me semble que c’est un motif sérieux à prendre en compte pour le vote d’une motion de rejet préalable.
Les deux autres points énoncés par notre collègue, qui concernent le fond, doivent également être entendus.
M. Arnaud Richard a parlé de « volée fiscale », et il me semble que véritablement tous les Français sont appelés à mettre la main à la poche dans le dispositif qui est proposé. Les premiers concernés sont les épargnants : un grand nombre de Français qui ont ouvert un plan d’épargne logement vont subir un changement des règles du jeu en cours de contrat ; voilà qui crée une vraie rupture de confiance.
Certains d’entre eux verront les taux applicables passer de 0,5 % à 15,5 % ; c’est à mes yeux une raison suffisante pour rejeter ce texte.
Les agriculteurs sont également appelés à mettre la main à la poche, ainsi que les artisans, les commerçants et les industriels au travers du régime social des indépendants, les ménages au travers du quotient familial et les familles au travers de la prestation d’accueil du jeune enfant…
Tous les Français sont donc concernés. Le budget proposé est par conséquent déséquilibré, ce qui justifie le vote de la motion de rejet préalable.
Enfin, il n’y a rien de structurant dans ce texte. Vous avez parlé d’ambition, chers collègues, mais je n’en crois rien. Le PLFSS pour 2014 est dans la continuité du PLFSS pour 2013 :…
…pas de point sur l’organisation des soins, pas de point sur les déserts médicaux.
Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera bien entendu cette motion de rejet préalable.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
J’expliquerai pour ma part la position du groupe UDI qui, vous pouviez vous en douter, votera cette motion de rejet préalable. Nos collègues du groupe SRC pourraient quant à eux se tromper de bouton ; Mme la ministre en a l’habitude. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Nous voterons cette motion pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, il y va du respect du Parlement. M. Arnaud Richard l’a dit sans ambages : une audition a été tenue sans que nous ayons pu prendre connaissance du texte à l’heure du midi et alors que le projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites était examiné en séance publique,…
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Et nous nous trouvons aujourd’hui à nouveau dans une situation délicate, puisque le Gouvernement vient de porter à notre connaissance un amendement de dernière minute sur les complémentaires santé qui fait suite à la décision du Conseil constitutionnel de censurer les clauses de désignation ; le choix du moment vise bien entendu à éviter que la mesure proposée puisse être discutée en commission. En d’autres termes, le Gouvernement ne respecte ni le Parlement ni les droits de l’opposition.
Ensuite, ce projet n’a pas de cap, il ne contient aucune réforme structurante. C’était déjà le cas l’année dernière : une somme de mesurettes ne fait pas une politique.
La seule cohérence, c’est le matraquage fiscal, qui touche à la fois les plans d’épargne logement, les plans d’épargne en actions et l’assurance-vie. Cette cohérence nous la retrouvons dans tous vos textes, chers collègues de la majorité.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Elle touche tous les Français, toutes les entreprises, au détriment de la compétitivité, qui est pourtant, nous le savons, l’un des principaux problèmes de l’économie de notre pays.
Une politique fiscale ne fait pas une politique, madame la ministre ! Votre politique, nous l’attendons ! Il y a bien sûr quelques avancées, comme sur la télémédecine, par exemple, mais rien n’a été proposé, ou alors vous l’avez fait très mollement, sur les déserts médicaux,…
…rien sur l’offre de soin, rien sur la réforme de la carte hospitalière, rien sur la chirurgie ambulatoire, rien sur la prévention !
On nous rétorque que le Gouvernement a annoncé un projet de loi sur la santé publique et un autre sur la dépendance. Je vous rappelle que le Gouvernement a aussi annoncé la pause fiscale, la réforme de la compétitivité, le financement de la branche famille par d’autres ressources que les cotisations sur le travail, l’inversion de la courbe du chômage… Pour autant, nous n’avons rien vu venir !
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Le groupe écologiste ne soutiendra pas cette motion de rejet préalable parce que nous ne partageons pas les critiques adressées par l’opposition.
Elles ne sont fondées sur aucun projet alternatif, sinon celui que nous avons connu les années précédentes et qui consistait à gérer les comptes de la Sécurité sociale en s’appuyant sur le déremboursement et la réduction de l’accès aux soins.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Cela ne faisait bien entendu qu’aggraver le mal : les problèmes de santé de nos concitoyens qui n’avaient pas accès aux soins se sont aggravés tandis que le trou de la Sécurité sociale continuait de se creuser
Nous partageons et soutenons la volonté du Gouvernement de maintenir l’accès aux soins. Si nous émettons des critiques, c’est que nous estimons qu’on ne va parfois pas assez loin dans l’accès aux soins des plus démunis et que le financement aurait pu être assuré de façon plus juste.
Par ailleurs, le budget de la Sécurité sociale doit traduire une politique de santé. Le point faible du présent texte, et nous aurons l’occasion d’y revenir au cours du débat, c’est la prévention et l’accès aux soins des plus démunis. Un geste est fait pour la solidarité, mais il n’est peut-être pas suffisant. Nous ferons des critiques, mais en aucun cas celles-ci ne justifient l’acceptation de cette motion de rejet. Il n’est donc pas question pour nous de rejeter le budget que propose le Gouvernement.
La motion de rejet préalable, mise aux voix, n’est pas adoptée.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014.
La séance est levée.
La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Nicolas Véron