La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures trente.
La parole est à Mme Odile Saugues, pour exposer sa question, no 548, relative aux liaisons ferroviaires et aériennes entre Paris et Clermont-Ferrand.
Monsieur le ministre délégué chargé des transports, je souhaite vous alerter sur la dégradation continue des liaisons entre Clermont-Ferrand et Paris, par rail et par air, et vous faire part des inquiétudes qu’elle entraîne dans le monde économique auvergnat.
S’agissant de l’aérien, des interrogations se font jour concernant la pérennisation de la ligne Clermont-Ferrand-Orly, le nombre de vols quotidiens et aussi le remplacement annoncé de tous les CRJ par des ATR. Nous pouvons actuellement, mis à part deux allers-retours quotidiens, mesurer tout l’inconfort à la fois spatial et sonore de ces derniers appareils, tandis que la durée de vol est passée de 40 minutes à une heure, voire une heure dix selon le sens du vent. L’offre étant devenue moins attractive, la demande s’assèche et cela nous inquiète.
Quant au ferroviaire, dont je considère, comme bien d’autres spécialistes des transports, qu’il s’agit du meilleur moyen low-cost sur les court-courriers, il n’est pas mieux loti. Je fais l’impasse sur les travaux que les Auvergnats subiront pendant deux mois et qui rallongeront de trente minutes un temps de trajet déjà fort long, de trois heures trente. Mais j’insiste sur le fait qu’il est déjà difficile pour les acteurs économiques auvergnats d’arriver en gare de Bercy, sans intermodalité, après un voyage dans un matériel de trente-cinq ans d’âge dans lequel il n’est guère possible de travailler du fait du roulis.
Mais mon inquiétude est encore plus grande, monsieur le ministre, depuis que la commission Mobilité 21 vous a remis un rapport, le 27 juin 2013, qui place la mise en service de la liaison ferroviaire binationale Lyon-Turin à l’horizon 2030-2050. Il y est établi que sans déblocage de nouveaux moyens, « aucune possibilité de financement d’autres projets par l’AFITF ne serait plus alors ouverte avant 2028 ou 2030 ». Il semble par conséquent qu’il faille choisir entre la mise en service de la ligne à grande vitesse Lyon-Turin et les provisions pour travaux de la LGV Paris-Orléans-Clermont-Lyon, dite POCL, pourtant classée dans le rapport parmi les premières priorités. La réponse à ma question écrite n’est pas satisfaisante car elle renvoie à la convention internationale.
C’est sur l’ensemble de ces points, monsieur le ministre, que les acteurs économiques, dont Michelin n’est pas le moindre, m’ont demandé de vous interroger. Je vous remercie de votre réponse.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
L’Auvergne est mise à l’honneur à travers les deux premières questions de cette séance, la vôtre, madame la députée, et celle de Jean-Paul Bacquet. Je disposerai ainsi d’une vision très complète de l’ensemble des problématiques liées au désenclavement et aux liaisons aériennes ou ferroviaires du territoire et je pourrai également vous faire part des priorités du Gouvernement.
Je prends note des éléments dont vous avez fait part s’agissant de la desserte aérienne. En la matière, il revient de plein droit aux transporteurs de décider de l’offre qu’ils proposent en termes de type d’avion et de nombre de services. En raison de sa situation financière fortement dégradée et dans le cadre de son plan Transform 2015, le groupe Air France a décidé de mettre en ligne un avion de type ATR sur une importante partie de ses vols court-courriers. Je note avec intérêt votre remarque à ce propos, car elle ne correspond pas complètement aux indications dont je dispose s’agissant de la qualité et du confort de ce type d’avion. Je me montrerai attentif à cette situation.
Le programme de desserte de Clermont-Ferrand-Paris comprend huit allers-retours quotidiens, ce qui permet de faire des allers-retours dans la journée mais aussi la demi-journée. Le groupe Air France m’a confirmé qu’il n’entendait pas réduire ce niveau de fréquences ni à court, ni à moyen terme, ni à terme prévisible.
Par ailleurs, vous m’indiquez un temps de vol de 40 minutes pour les CRJ. Selon les informations dont je dispose, ce serait plutôt 52 minutes.
Cette durée passe à 64 minutes par temps normal avec un turbopropulseur, c’est-à-dire ces fameux ATR dont, me dit-on aussi, le confort est adapté à ce type de vol. Mais il semblerait que cela soit contesté…
Il n’en reste pas moins que les tarifs sont plus accessibles et les émissions de CO2 moindres.
Vous n’auriez même pas la place de vous y asseoir, monsieur le ministre !
Prenons l’avion ensemble, cher Jean-Paul Bacquet, et nous verrons ce qu’il en est.
Là aussi, j’ai bien pris note ! J’ai signalé à Air France que je serai vigilant quant au maintien d’une bonne qualité de service de la desserte aérienne de Clermont-Ferrand, ce que le groupe m’a d’ailleurs confirmé.
S’agissant de la desserte ferroviaire, la ligne Paris-Clermont est essentielle et fait l’objet d’un important programme de modernisation de l’infrastructure dont la première conséquence, il est vrai, est l’allongement de certains temps de parcours. Avec RFF et la SNCF, nous avons fait en sorte que ces conséquences soient mesurées, notamment pour la circulation de fin de semaine, et que les temps de parcours pour les usagers quotidiens soient préservés. Les trois week-ends les plus affectés par ces travaux sont derrière nous.
En outre, un ambitieux programme de modernisation de l’ensemble des matériels roulants a été annoncé par le Premier ministre, il est vrai à l’horizon 2018-2020. Nous sommes là encore pleinement mobilisés. Il n’y a pas eu un tel renouvellement depuis trente ans !
Nous en sommes à la troisième mouture, monsieur le ministre ! Corail, puis Téoz, puis Intercités…
Vous aurez une réponse précise dans quelques instants, madame la députée, mais vos propos ne font que souligner la difficulté devant laquelle se trouve le Gouvernement, puisque précisément le matériel roulant n’a pas été modernisé depuis trente ans.
Aujourd’hui, une question de stratégie se pose sur cette ligne : modernisation, adaptation TGV, nouvelles commandes ? Nous devons travailler sur cette question. J’ajoute que près de cent millions sont d’ores et déjà dédiés à ce premier objectif de renouvellement du matériel roulant neuf. Enfin, je note que le taux de régularité au terminus des trains Paris-Clermont a progressé par rapport à ces dernières années et qu’il atteint 90 %.
S’agissant enfin de la desserte de la gare de Paris Bercy, et notamment de la question de l’intermodalité, nous faisons en sorte d’apporter des réponses.
Pour ce qui concerne la commission Mobilité 21, je précise que le projet de ligne Lyon-Turin est sans conséquence pour ce qui nous préoccupe. Il s’agit d’un accord international qui doit s’inscrire dans les faits. Mais s’agissant du POCL que vous évoquez, la commission Mobilité 21 a précisé la hiérarchisation qui a été arrêtée et les mesures qui peuvent éventuellement être anticipées.
En Auvergne, monsieur le ministre, nous avons été déjà victimes de bien des promesses. Les acteurs économiques auvergnats considèrent que notre région ne doit pas être une variable d’ajustement de l’aménagement du territoire. Je vous remercie.
La parole est à M. Jean-Paul Bacquet, pour exposer sa question, no 550, relative à la desserte de Clermont-Ferrand et du sud du département du Puy-de-Dôme.
Vous l’avez compris, monsieur le ministre, la région Auvergne est plus que défavorisée en matière de transports. La liaison aérienne, comme Odile Saugues vient de l’évoquer, s’effectue aujourd’hui dans des conditions de confort très aléatoires et surtout les avions ne sont quasiment jamais à l’heure. Ils se posent à Orly et la desserte s’effectue par bus… quand toutefois le bus est à l’arrivée. Au final, le temps de transport peut être beaucoup plus long que le temps de vol. C’est totalement inacceptable.
Les lignes ferroviaires sont quant à elles vétustes, et même inconfortables. Nous sommes secoués comme il n’est pas permis, et on nous dit toujours que cela va changer. On nous avait promis de vieilles rames de TGV à recycler, on nous avait promis de moderniser des voitures… Nous avons entendu tellement de promesses que nous n’y croyons plus !
C’est comme pour l’arrivée en gare de Bercy : l’ensemble des parlementaires avaient demandé à rencontrer les responsables de la SNCF. Nous nous sommes trouvés face à de brillants technocrates qui se sont montrés parfaitement méprisants à l’encontre des élus, évidemment incompétents. Nous avons quitté la salle. Seul est resté le président de région, qui nous disait de ne pas nous inquiéter parce que compte tenu de ses relations à la SNCF, il allait arranger la situation. Résultat : c’est Bercy, c’est définitif et nous n’en sortirons pas. C’est totalement inacceptable, et les rumeurs sur la fermeture éventuelle, dans quelques années, des lignes Clermont-Nîmes ou Clermont-Béziers ne peuvent qu’ajouter à notre inquiétude.
Mais il y a quelque chose de nouveau, monsieur le ministre : la mise à trois voies de l’autoroute au sud du péage de Gerzat, à Clermont-Ferrand. Les syndicats représentant les agents de la direction interdépartementale des routes affirment que l’État aurait l’intention de se débarrasser du tronçon et de le privatiser.
Eh bien, c’est faux !
Mme Béjean, votre conseillère communication et presse, a confié au journal local que l’idée était de faire réaliser les travaux, comme des élargissements, par des sociétés autoroutières moyennant des allongements de concessions. Le préfet de région, en réponse à un courrier que je lui ai adressé, a également confirmé qu’il était question d’un allongement de la concession et qu’il n’y aurait pas de nouveau péage. Malgré cela, les agents de la DIR persistent à dénoncer une privatisation et leur action commence à produire des effets puisqu’une mobilisation apparaît parmi les 65 000 automobilistes qui passent quotidiennement et les maires des communes du sud de la périphérie clermontoise.
Monsieur le ministre, je ne mets en cause ni votre conseillère presse ni le préfet de la région Auvergne, mais manifestement, le message n’est pas suffisamment fort. S’agissant de ces travaux, les maires n’ont eut qu’une seule source d’information : celle des syndicats, faite de banderoles et de tracts. Il n’y a eu absolument aucune communication de l’État.
Alors, monsieur le ministre, mes questions sont simples. En ce qui concerne le ferroviaire, je ne vous demande pas si nous aurons un jour le TGV : personne n’y croit, nous non plus. Mais disposerons-nous au moins un jour d’une ligne express qui placera Clermont-Ferrand à deux heures et demie de Paris ? Pour ce qui est de l’aérien, peut-on espérer un jour des avions confortables et une régularité suffisante ? Enfin, concernant l’autoroute, pouvez-vous confirmer – un simple « oui » suffira, mais suffisamment sonore, monsieur le ministre – qu’il n’y aura jamais de péage au sud de Gerzat ? Je vous remercie.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
La question auvergnate semble mériter un débat à elle seule, considérant la portée des questions posées, l’intensité des propos tenus et aussi l’inexactitude des informations relayées ! Parfois, il s’agit plutôt de slogans.
Le ton véhément qui a été employé révèle un véritable appel à la responsabilité et à la vérité. Et bien la vérité, je vais vous la dire : ceux qui annoncent un péage mentent ; ceux qui parlent de privatisation ne disent pas la vérité ; ceux qui refusent les travaux ou en tout cas veulent les faire financer par l’État n’ont pas conscience de la réalité des choses. Pour ma part – et je vous invite à relayer ces propos, en mon nom – je préfère faire payer par les sociétés autoroutières, qui réalisent des gains substantiels, et moyennant en effet un allongement des concessions, l’amélioration des conditions de circulation, sans aucun péage supplémentaire.
Vous avez évoqué la mise à deux fois trois voies de l’A 75 au niveau du noeud A 71-A 711 : j’aime autant que ce soient les sociétés autoroutières qui paient plutôt que de faire appel au financement public, et donc au contribuable. Il est faux de dire qu’il s’agit là d’une forme de privatisation, car il n’y aura pas de péage supplémentaire. Nous contraignons au contraire les sociétés autoroutières à financer ce projet. Une augmentation de la taxe d’aménagement du territoire viendra par ailleurs abonder le budget de l’Agence de financement des infrastructures autoroutières, qui en a bien besoin.
Mais convenez que refuser à la fois l’écotaxe poids lourds, le financement de l’Afit, les travaux pour améliorer les infrastructures et les plans d’allongement de concession qui les rendraient possibles, cela commence à faire beaucoup de refus, dont certains contradictoires ! Vous formulez pour votre territoire des revendications que j’entends, en particulier concernant la régularité dans le transport aérien, je m’en ferai l’écho, et dans le transport ferroviaire. Mais pour cela, il faut bien faire des travaux ! À cet égard, le Gouvernement a souhaité, j’ai moi-même demandé la mise en oeuvre d’un grand plan de modernisation des infrastructures de transport. Cela permet à Réseau ferré de France de mobiliser 2,5 milliards d’euros supplémentaires pour les lignes qui nécessitent une remise à niveau de la sécurité de leurs infrastructures, notamment sur le réseau prioritaire.
Tout cela, ce sont des actions, pas des promesses ! En matière de politique de transport, je peux dire aux parlementaires, droit dans les yeux, que notre pays a été bercé d’illusions, de 245 milliards d’illusions. Mais le ministre des transports que je suis est soucieux de l’aménagement et de l’équilibre des territoires. J’essaie donc de mobiliser tous les moyens de financement en ce sens. Cela n’était pas une préoccupation de l’ancienne majorité et nous le payons cher aujourd’hui.
Concernant l’autoroute, monsieur le ministre, ce qui est dit clairement est bien meilleur que ce qu’on laisse entendre. Vous n’avez fait aucune communication, l’État n’a fait aucune communication pour annoncer les travaux. C’était une erreur.
Non !
Non !
Aujourd’hui, vos annonces sont extrêmement claires. Nous nous en réjouissons, et nous allons les relayer. S’agissant du train, nous avons depuis longtemps enterré le programme TGV. Vous parlez de 245 milliards d’illusions : c’est sans compter le pognon qui a été dépensé inutilement en communication sur ce sujet ! Ce que nous attendons, c’est simplement un train express qui mette Clermont-Ferrand à deux heures et demie de Paris. Quant aux avions, qu’ils soient à l’heure, c’est tout ce que nous demandons !
La parole est à Mme Marie-Line Reynaud, pour exposer sa question, no 551, relative aux conditions de la compensation financière liée au passage d’une ligne à grande vitesse.
Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur l’instauration d’une redevance pérenne destinée aux communes traversées par une ligne à grande vitesse concédée au privé. Le précédent gouvernement avait instauré un Fonds de solidarité territoriale d’un montant de 30 millions d’euros, destiné à accompagner les territoires traversés. Ce dispositif permet de financer des actions d’amélioration de l’insertion environnementale de la nouvelle infrastructure, au-delà des obligations réglementaires qui s’imposent au maître d’ouvrage de la ligne nouvelle, ou des actions visant à mettre en valeur les territoires traversés, notamment en favorisant leur développement économique, social et culturel. Ce dispositif a néanmoins un grand défaut : il est ponctuel.
Les 126 communes touchées par la ligne à grande vitesse Tours-Bordeaux, qui vont subir des préjudices de toutes sortes et des nuisances durables, demandent depuis plusieurs années une redevance pérenne. Les collectivités souhaitent que des recettes compensatrices leur soient attribuées, comme c’est déjà le cas pour les infrastructures autoroutières.
Les collectivités locales seront mises à contribution en 2014 pour 1,5 milliard d’euros, dont 840 millions pour le bloc communal. Outre cet effort important, les communes se sont vu, pour certaines, amputer du produit de la taxe sur la consommation finale d’électricité. Cette nouvelle redevance, payée par les entreprises privées, leur permettrait de financer les nouveaux équipements et de supporter les frais que ne manquera pas de susciter la nouvelle ligne.
Le trafic sur le tronçon Tours-Bordeaux est estimé à 20 millions de voyageurs par an à l’horizon 2016-2017. Une taxe d’un montant de 15 centimes d’euros sur chaque billet de train permettrait de dégager une somme de 3 millions d’euros qui, une fois redistribuée, représenterait pour chaque commune environ 10 000 euros par kilomètre de ligne à grande vitesse. Monsieur le ministre, pouvez-vous m’indiquer si le Gouvernement entend prendre une telle mesure et, plus généralement, m’exposer les actions concrètes que vous entendez mener afin d’aider durablement les communes traversées par une ligne à grande vitesse ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Madame la députée, les lignes à grande vitesse Bretagne-Pays de la Loire et Sud Europe Atlantique sont en effet des infrastructures importantes, cofinancées par les collectivités territoriales et l’État. Elles auront des conséquences sensibles sur le plan financier et en termes de dynamisme économique, puisqu’elles représentent un investissement de près de 3,3 milliards d’euros pour la première et 8 milliards pour la seconde. Des retombées économiques et sociales, directes et indirectes, sont aussi attendues pendant toute la durée du chantier au profit des collectivités. La réalisation de ces projets s’accompagnera en effet durant la phase de travaux d’une augmentation incontestable de leurs recettes fiscales, par l’intermédiaire des taxes locales.
Vous posez la question de l’instauration d’une nouvelle fiscalité, sous la forme d’une redevance kilométrique annuelle acquittée par les gestionnaires d’infrastructures. Les deux réalisations en question sont issues, vous le savez, de partenariats public-privé conclus en 2011 et 2012 par le précédent gouvernement. Or aucune disposition de cet ordre n’est contenue dans les contrats, qui font loi. La mise en place d’une nouvelle redevance constituerait dès lors une fiscalité additionnelle qui serait reportée sur les collectivités territoriales et l’État. Vous comprenez bien que ce n’est l’intérêt ni de l’État, ni des collectivités territoriales de s’acquitter d’une taxe supplémentaire.
En revanche, je suis très attaché à la mise en place des dispositifs du Fonds de solidarité territoriale, dont le montant s’élève à 14 millions d’euros pour la LGV Bretagne-Pays de la Loire et à 30 millions pour la ligne Sud Europe Atlantique. Ces sommes permettront à la fois d’améliorer l’insertion environnementale de la nouvelle infrastructure, au-delà des obligations réglementaires qui s’imposent aux maîtres d’oeuvre, et de financer des initiatives de développement économique, social ou culturel dans les territoires traversés.
Dans un contexte économique extrêmement tendu, vous comprendrez que ce fonds constitue en soi une avancée majeure. Il témoigne de l’effort consenti par la puissance publique en faveur de ces territoires. Cela étant dit, une refonte du cadre législatif permettrait peut-être, pour les infrastructures à venir, d’envisager une meilleure prise en compte de leur impact sur les territoires concernés.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, dont je connaissais déjà la teneur. Je trouve regrettable que les contrats public-privé n’aient pas prévu d’emblée une redevance comparable à celle qui existe pour les autoroutes. Tant pis.
La parole est à M. Noël Mamère, pour exposer sa question, no 544, relative à la suspension de l’éclairage d’une partie de la rocade bordelaise.
Monsieur le ministre des transports, ma question concerne la décision prise par le préfet de Gironde, en septembre 2013, de suspendre l’éclairage de la rocade bordelaise. Il s’est produit en octobre un très grave accident, qui a fait trois blessés graves et un mort. Si l’accident initial était sans doute dû à la vitesse, le suraccident quant à lui est lié à l’absence d’éclairage, alors qu’un motard avait voulu se porter au secours de la personne qui gisait sur la route.
Comme chacun sait, la suppression de l’éclairage sur les rocades peut avoir deux avantages : réduire la vitesse et entraîner des économies d’énergie. Mais cela ne s’applique pas à la rocade de Bordeaux, dont le bitume est en mauvais état, les barrières de protection défaillantes et les sorties dangereuses. La rocade bordelaise constitue donc un très mauvais exemple.
Il faut prendre conscience du contraste entre les zones éclairées et les zones non éclairées. La pluie ou le mauvais temps peuvent encore aggraver la situation, et l’éclairage des motos est bien inférieur à celui des automobiles. Une rocade sans éclairage serait envisageable si l’état de la chaussée était bon et si les conditions de sécurité optimales. Or ce n’est pas le cas aujourd’hui à Bordeaux, et la réfection de la rocade bordelaise représente un investissement particulièrement coûteux. Par ailleurs, avec le développement de la communauté urbaine de Bordeaux, cette rocade se trouve maintenant dans une zone fortement urbanisée et doit davantage être vue comme un boulevard urbain que comme une autoroute de contournement.
Dans cette optique, la question de la suppression de l’éclairage n’est peut-être plus pertinente. La proposition de la ligue des motards, qui consiste à rallumer un lampadaire sur quatre sur l’ensemble de la rocade, en utilisant de surcroît un éclairage à énergie solaire, semble être un compromis raisonnable, répondant à la fois aux enjeux de sécurité et d’économies d’énergie. Cet éclairage amoindri continuera à inciter les conducteurs à limiter leur vitesse.
Dans quelle mesure pouvez-vous intervenir, monsieur le ministre, afin d’aider l’ensemble des acteurs à dégager un compromis permettant de sécuriser la rocade bordelaise pour tous ses utilisateurs ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le député, cher Noël Mamère, je tiens d’abord à vous dire l’émotion que suscite votre interpellation et à faire part de ma compassion et de celle du Gouvernement aux familles des victimes de ce drame. Il est toujours douloureux de dénombrer les victimes de la route.
Le plan auquel vous avez fait allusion a été présenté par la direction interdépartementale des routes Atlantique et validé par le préfet en juillet 2013. Il s’agit du schéma directeur d’éclairage de la rocade de Bordeaux, qui s’inscrit dans un projet national visant à optimiser la consommation énergétique – vous n’êtes pas insensible à cet objectif – et à limiter la pollution lumineuse, tout en respectant les impératifs de la sécurité routière.
Ce schéma a fait l’objet d’une étude détaillée croisant les données relatives à la géométrie de la route et à la nature et à la quantification du trafic routier. L’étude a également analysé l’accidentalité pendant des périodes où l’éclairage était totalement ou partiellement éteint. Or aucune dégradation de la sécurité routière n’a été constatée à ces moments. Comme vous l’avez vous-même indiqué, il a même été noté une tendance à la réduction du nombre d’incidents et accidents, les conducteurs étant amenés à lever le pied et à réduire leur vitesse.
Malgré ce constat, qui a été fait sur la rocade bordelaise mais aussi, d’une manière plus générale, sur le réseau routier national non concédé où l’éclairage a été réduit, il est bien évident que la réduction de l’éclairage doit s’accompagner d’un certain nombre de mesures. Une discussion est engagée avec les représentants des motards. Plusieurs réunions d’échanges ont eu lieu localement, après ce tragique accident, entre la Ligue de défense des motards, le préfet de région et la DIR Atlantique. Elles ont permis de préciser les points d’amélioration et les mesures à déployer. Mentionnons la peinture « visible de nuit par temps de pluie », la rénovation totale de la signalisation verticale dans le cadre de la mise à deux fois trois voies de la rocade ouest, et enfin l’installation de dispositifs rétro-réfléchissants sur les glissières des bretelles, à hauteur de vue, les motards les préférant, pour des raisons de sécurité, aux plots scellés dans la chaussée. L’échangeur no 12 sera prochainement équipé de l’ensemble de ces dispositifs et un bilan est prévu avec les motards.
Notre préoccupation constante est d’assurer la sécurité des usagers sur la route, et il est nécessaire pour cela d’engager une concertation. Vous avez esquissé des pistes qui peuvent être extrêmement utiles dans le cadre des travaux d’amélioration ou de modernisation de futures infrastructures, notamment en matière de densité de luminosité. Il nous reviendra d’expertiser toutes les solutions et, en tenant compte des contraintes et des attentes, de faire en sorte que les conflits d’usage trouvent ainsi une solution pertinente.
La parole est à M. Régis Juanico, pour exposer sa question, no 559, relative à la création d’un demi-échangeur pour désengorger le CHU de Saint-Étienne.
Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur les difficultés d’accès au site du Centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne. Situé sur la commune de Saint-Priest-en-Jarez, le CHU emploie aujourd’hui près de 8 000 personnes. Avec ses 1 900 lits, c’est un outil majeur de santé publique pour la métropole stéphanoise et, plus largement, pour le département de la Loire.
Ces dernières années, le regroupement progressif des différents services hospitaliers sur le site de l’hôpital Nord a entraîné une hausse de fréquentation du CHU et, inévitablement, des difficultés de circulation aux abords de l’établissement, y compris pour les véhicules d’urgence.
Cette situation risque fort de s’aggraver après la livraison, en 2015, des chantiers du pôle santé, regroupement unique en France en matière d’enseignement, de recherche et d’industrie. Cette infrastructure de 14 000 mètres carrés, représentant un montant d’investissements total de 60 millions d’euros, réunira, sur le site du CHU, la faculté de médecine, le centre ingénierie et santé de l’École des mines, destiné à former des ingénieurs et des médecins dans le cadre d’un double diplôme, et l’Institut régional de médecine et d’ingénierie du sport, centre de recherches sur le sport santé. Ce pôle santé, qui rassemblera 3 000 personnes à la fin de l’année 2015, est complété depuis la fin de l’année 2012 par le centre Hygée, centre régional de ressources pour l’information, la prévention et l’éducation sur les cancers au sein du cancéropôle Rhône-Alpes.
Monsieur le ministre, depuis 2008, la commune de Saint-Priest-en-Jarez et la métropole de Saint-Étienne ont consenti des efforts financiers importants pour fluidifier et sécuriser les voies de circulation entre les sorties de l’autoroute 72 et le CHU. La question se pose à présent de savoir comment l’État peut accompagner leurs efforts. La desserte routière du CHU pourrait être fortement améliorée par la création d’un demi-diffuseur supplémentaire sur l’A 72, à la hauteur du musée d’art moderne. Nous l’avons déjà évoqué par courrier fin 2012. Les études d’opportunité et de faisabilité de cet aménagement ont été prises en charge par la communauté d’agglomération de Saint-Étienne et transmises à la DREAL Rhône-Alpes à la fin du mois de février 2013. Dans le courrier accompagnant cette étude d’opportunité, le président de Saint-Étienne Métropole, Maurice Vincent, précise que ce projet revêt un caractère stratégique, tant pour ce qui est de la desserte du CHU que de l’organisation de l’Euro 2016 de football, car le stade Geoffroy Guichard, qui accueillera des matchs de cette grande compétition populaire, se situe à proximité du CHU.
À la fin du mois de décembre 2013, Saint-Étienne Métropole a adressé à la DREAL une contribution au volet mobilité du contrat de plan État-région intégrant le programme routier soutenu par l’agglomération, dont l’échangeur du musée d’art moderne fait partie.
Monsieur le ministre, pouvez-vous me confirmer que l’aménagement du demi-échangeur no 11 de l’A 72 a vocation à s’inscrire dans le futur contrat de plan État-région, dans la mesure où l’agglomération s’engagerait financièrement comme elle vient de le faire pour l’échangeur de la Varizelle sur l’A 47 à Saint-Chamond ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le député, cher Régis Juanico, je sais que ce sujet vous tient particulièrement à coeur. Nous en avons discuté à plusieurs reprises et vous m’avez sensibilisé quant à cet enjeu important pour la métropole de Saint-Étienne. Cette dernière a en effet réalisé des études de faisabilité et d’opportunité concernant la création d’un demi-échangeur complémentaire sur l’A 72, afin de répondre aux difficultés réelles de circulation rencontrées dans le secteur de l’hôpital Nord. Les services de l’État poursuivent actuellement l’examen du dossier qui leur a été transmis pour s’assurer du respect des dispositions en matière de sécurité qui s’imposent aux aménagements sur le réseau routier national, singulièrement sur un axe autoroutier. Des évolutions du projet pourraient être nécessaires.
S’agissant du financement, le volet mobilité du prochain contrat de plan État-région est en cours d’élaboration et fait l’objet de discussions entre l’État et les collectivités. D’ici à la fin de son élaboration, c’est-à-dire cet été, il nous sera possible d’étudier la faisabilité du demi-échangeur. Il est pour le moment trop tôt dans le processus pour déterminer les priorités. Les préfets de région m’ont communiqué une première liste jugée prioritaire pour les cofinancements. Il est évident que la priorité est donnée là où il y a implication locale et mobilisation financière, cela va sans dire.
Je souhaite également préciser que le projet d’aménagement de l’échangeur de la Varizelle, sur la RN 88, qui n’a pas été engagé au cours de la précédente contractualisation, sera bien évidemment repris.
Les discussions locales vont se poursuivre dans les prochains mois entre l’État et les collectivités concernées afin de faire émerger d’ici à l’été un compromis sur les projets d’amélioration des infrastructures et d’avoir une visibilité sur les financements mobilisables. Dès lors que des cofinancements existent, le caractère prioritaire sera reconnu. Je souligne encore votre intérêt pour ces question, auquel je suis sensible. Nous avons souvent l’occasion d’en parler avec Maurice Vincent. Sachez que nous serons extrêmement attentifs à la suite donnée à cette proposition.
Merci, monsieur le ministre, de vos réponses sur l’amélioration de la desserte routière du CHU de Saint-Étienne. Au nom de tous les élus de la Loire, je vous remercie aussi d’avoir lancé la semaine dernière la procédure d’attribution de la concession de l’A 45. C’est une étape décisive pour la liaison entre Lyon et Saint-Étienne. Vous avez tenu vos engagements, cela mérite d’être souligné !
La parole est à M. Jean-Noël Carpentier, pour exposer sa question, no 546, relative au développement des transports publics dans l’agglomération du Parisis.
Monsieur le ministre, nous connaissons vos efforts pour améliorer les conditions de transport de nos concitoyens. Il est vrai que la situation s’est dégradée ces dernières années, faute d’investissements suffisants de l’État. Dans cet esprit, je tiens à souligner l’importance du plan de mobilisation pour les transports collectifs en Île-de-France que vous avez lancé l’été dernier avec la région Île-de-France.
En effet, les transports du quotidien sont essentiels à la qualité de vie des Franciliens. Le fonctionnement des trains de banlieue doit bien sûr être amélioré de manière significative, mais les interconnexions plus locales doivent également être développées. Malheureusement, ce plan de mobilisation ne prend pas en compte le projet de l’agglomération du Parisis, où est située une des plus importantes zones commerciale de l’Île-de-France. Pourtant, il ressort d’une étude menée récemment par le ministère de l’égalité des territoires que cette agglomération devait impérativement augmenter son offre de transport et mieux se connecter aux structures existantes afin de préserver l’emploi, se développer, offrir des formations à ses jeunes ou simplement améliorer la vie quotidienne de ses habitants.
Cette étude de l’État corrobore le projet lancé unanimement par les maires du territoire d’un prolongement par une ligne de bus avec voie réservée des lignes de tramway T8 et T2 qui arrivent aux portes de nos communes. Nous avons déjà évoqué ensemble, monsieur le ministre, ce projet destiné à un bassin de 500 000 habitants. Vous me proposiez de lui attribuer des financements pour des études de faisabilité dans le cadre du protocole État-région. Monsieur le ministre, dans le cadre de vos prérogatives et dans le respect de celles des collectivités territoriales, pouvez-vous me confirmer votre intérêt pour ce projet de l’agglomération du Parisis ? D’une manière plus générale, quel est votre sentiment à propos des interconnexions qui sont très importantes pour la qualité du service aux usagers en Île-de-France ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le député, je connais vos préoccupations, nous en avons parlé à plusieurs reprises. Elles répondent à une attente de nos concitoyens. Je vous remercie d’avoir rappelé que le Gouvernement a donné priorité à l’amélioration des transports du quotidien, tout particulièrement en Île-de-France. En conséquence, en lien avec la région Île-de-France, il a pris des engagements sans précédent au sujet du Nouveau Grand Paris, du Grand Paris Express et du plan de mobilisation porté par la région, sur lequel l’État, la région et le STIF se sont engagés.
Au-delà de la réalisation du Grand Paris Express, ce sont ainsi 7 milliards d’euros qui seront mobilisés. La Société du Grand Paris, l’État et la région auront, sur la période 2013-2017, à répondre aux enjeux prioritaires du quotidien. Le montant de cette enveloppe est triplé par rapport au montant qui était connu jusqu’alors. Ces sommes seront consacrées à l’amélioration et à l’extension du réseau existant, notamment aux schémas directeurs des lignes RER et au prolongement d’Eole, opérations prioritaires et indispensables à la qualité de vie des Franciliens.
Le protocole signé le 19 juillet dernier par le Premier ministre et le président de la région, Jean-Paul Huchon, prévoit une enveloppe de 15 millions d’euros pour financer les études de faisabilité de nouveaux projets. L’opération dont vous souhaitez la réalisation, qui consiste à prolonger au nord le tramway T8, qui est actuellement en travaux et dont la mise en service interviendra à la fin de l’année, pourrait, comme je vous l’ai indiqué, s’inscrire dans le cadre des actions éligibles à ce soutien.
L’utilisation des fonds étant décidée par le comité de pilotage du protocole qui associe à la fois l’État, le conseil régional et le Syndicat des transports de la région Île-de-France, et mes services, je relaierai votre préoccupation. Je souhaite qu’elle soit prise en compte, et je considère que le développement qu’ont connu les bus à haut niveau de service et les tramways en France montre qu’il s’agit d’un mode de transport attendu et qui correspond aux besoins de certains usagers.
J’ai bien noté votre attachement à ce projet, et je vous en remercie. Je vous remercie également de votre sensibilisation, de votre action, de votre mobilisation sur ces questions. Il n’est pas question pour le Gouvernement de se substituer aux compétences reconnues aux collectivités, notamment au STIF. Mais, au-delà de la compétence de l’autorité organisatrice des projets de transport collectif, il faut bien qu’un dialogue ait lieu, que l’ensemble des acteurs puisse échanger sur ces priorités. Je ne manquerai pas de relayer, comme je l’ai déjà fait, votre préoccupation et vos attentes.
Merci de votre réponse très précise, monsieur le ministre. Ces connexions sont effectivement importantes pour nous. Elles permettent de relier tout un pan du territoire au tramway via les réseaux de bus. Cela peut faire gagner de précieuses dizaines de minutes aux usagers. L’État peut aussi s’enorgueillir d’une action ponctuelle, en lien avec les collectivités territoriales. Le Val-d’Oise souhaite être pris en compte par la région Île-de-France dans le cadre du Grand Paris. Des études sont en cours et des réflexions sont lancées, mais votre appui nous est extrêmement précieux.
La parole est à M. Gilles Lurton, pour exposer sa question, no 566, relative aux conséquences pour les bateaux de patrimoine de l’arrêté du 13 septembre 2013 relatif au nombre de passagers admissibles sur les navires de plaisance à utilisation commerciale.
Monsieur le ministre, un arrêté du 13 septembre 2013 détermine le nombre de passagers pouvant être admis à embarquer sur les navires de plaisance à utilisation commerciale. Je vous alerte sur les conséquences de cet arrêté pour les bateaux de patrimoine, qui font la fierté de notre marine à voile. Bien qu’ils soient classés statutairement comme des navires de plaisance à utilisation commerciale, l’application de l’arrêté leur est impossible, sauf à fragiliser durablement les entreprises qui assurent leur gestion.
Ainsi, l’article 8 de l’arrêté établit l’obligation de déterminer un nombre maximum de passagers et de définir un plan de placement. De telles dispositions rendent quasiment inexistantes les zones accessibles pour les bateaux de patrimoine. De même, l’arrêté interdit toute possibilité de manoeuvrer pour les passagers, alors que c’est l’essence même de leur présence à bord. La fragmentation par temps de navigation est également dénoncée par les professionnels. Un bateau est apte à la mer pour une durée indéterminée en fonction du vent et de la météo, et non pour trois heures, six heures ou vingt-quatre heures de navigation ! L’arrêté impose aussi des aménagements de confort et de sécurité qui ne sont pas réalisables sur les bateaux de patrimoine.
Il est regrettable, monsieur le ministre, que ces mesures aient été prises sans concertation avec la profession et sans tenir compte des spécificités de ces navires dont l’accidentologie est quasi-nulle. Aucune marge de manoeuvre n’a été laissée à la profession qui m’a fait part de son désarroi face à une telle méconnaissance du métier.
Aussi, monsieur le ministre, je souhaite que vos services réévaluent l’impact de ce texte sur les entreprises de ce secteur. Quelles mesures comptez-vous prendre afin que le plus contraignant dénominateur commun de sécurité ne devienne pas la règle, et que ces navires d’exception, souvent prêts à appareiller sur les quais de Saint-Malo, ne soient pas les grandes victimes de cet arrêté ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le député, je vous remercie pour cette question qui permet de« maritimiser » le débat, si je puis m’exprimer ainsi. Les bateaux de patrimoine sont une des richesses du patrimoine maritime de la France. Nous y sommes particulièrement attachés. Leur présence sur nos côtes et dans nos ports perpétue une tradition, à la grande satisfaction du public, qui y est tout aussi attaché. L’intention du Gouvernement n’est évidemment pas de fragiliser l’exploitation de ces navires. Au contraire, nous voulons la faciliter.
Un décret relatif à la sécurité maritime fort ancien pour la matière, datant du 30 août 1984, a été modifié le 6 juin 2013 dans le but de relever le nombre de personnes autorisées à embarquer sur des navires de plaisance à utilisation commerciale. Il ouvre le droit à l’embarquement d’un maximum de trente personnes sur des navires à voile, et cent vingt personnes sur des navires historiques ou leur réplique, dans le respect des exigences de sécurité.
L’arrêté du 13 septembre 2013 relatif au nombre de passagers admissibles sur les navires de plaisance à utilisation commerciale auquel vous avez fait référence a été pris pour appliquer ces nouvelles dispositions. Il établit les critères et conditions de sécurité permettant de fixer, pour chaque navire, le nombre de personnes pouvant embarquer, en fonction de l’utilisation du navire, de la réception à quai, d’une navigation de courte, moyenne ou longue durée. Cette possibilité d’augmenter le nombre de passagers à bord des navires à voile, et particulièrement ceux du patrimoine, est donc une avancée pour le secteur.
Néanmoins, lors de la publication de l’arrêté, ces avancées n’ont pas toujours été comprises et la formulation des critères a certainement suscité des inquiétudes, dont vous vous faites l’écho. Je tiens à préciser qu’il n’est en aucune façon envisagé, par exemple, de définir une place fixe aux passagers lors de la navigation : cela relève de la compétence du capitaine. De même, il n’est pas interdit de faire participer les passagers aux manoeuvres du navire.
Cet arrêté comporte donc un certain nombre d’imprécisions ou de maladresses de rédaction. Je m’engage à ce qu’il fasse l’objet d’une concertation renouvelée dans le but de modifier cette rédaction, afin de lever toute ambiguïté.
Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse, qui est susceptible de rassurer les professionnels de ces secteurs. Si l’arrêté est applicable sur des bateaux modernes, il ne l’est pas sur les vieux gréements que nous connaissons tous, compte tenu de la qualité architecturale de ces navires qui font souvent partie de notre patrimoine historique.
La parole est à M. Daniel Gibbes, pour exposer sa question, no 573, relative à la desserte aérienne de l’île de Saint-Barthélemy.
Monsieur le ministre, à Saint-Barthélemy, située à 7 000 kilomètres de l’Hexagone, à 230 kilomètres de la Guadeloupe et à 32 kilomètres de l’île voisine de Saint-Martin, l’éloignement constitue un handicap structurel pour les populations et les économies. Les déséquilibres saisonniers de la fréquentation, l’augmentation des charges et la disparition des aides publiques en 2009 sont autant de facteurs qui expliquent que les tarifs des compagnies aériennes aient enregistré une hausse de 65 % en dix ans.
Actuellement, trois taxes aéronautiques exigibles par l’État – la taxe de l’aéroport, la taxe de l’aviation civile et la taxe de solidarité – sont incluses dans le prix du billet d’avion acquitté par le passager embarquant à l’aéroport de Saint-Barthélemy. Le prix moyen d’un aller-retour entre Saint-Barthélemy et Saint-Martin Grand Case s’établit aujourd’hui à 130 euros, pour un vol de quinze minutes. Les taxes payées par le passager sur cet axe représentent 33 % du prix du billet ; restent à la compagnie aérienne environ 67 % de ce prix, dont elle déduit d’autres taxes et redevances, de la redevance de contrôle technique à la taxe passager, sans oublier ses coûts d’exploitation. À titre de comparaison, le prix d’un aller-retour entre les Antilles et l’Hexagone, qui s’échelonne de 500 à 1 600 euros, ne comprend que 12 % de taxes aéronautiques.
En outre, le passager d’un vol Saint-Barthélemy-Paris transite nécessairement par l’aéroport international Princess Juliana de Sint Maarten, dans la partie hollandaise de l’île de Saint-Martin ; il supporte donc une taxe de solidarité de 4 euros, au lieu de 1 euro au départ d’un aéroport français.
Au moment où la Cour des comptes épingle la faiblesse de l’activité touristique dans les outre-mer, notamment aux Antilles, déjà handicapées par le taux de change euro-dollar, des charges sociales écrasantes ou des taxes en pagaille qui plombent le prix du billet d’avion, il convient de s’interroger sur cette situation de grande diversification des tarifs et de renchérissement de leur coût en haute saison afin de faire face à la baisse du trafic touristique en basse saison. Ces pratiques sont mal ressenties par les populations, qui y voient un frein à la continuité territoriale.
Monsieur le ministre, ma question est la suivante : peut-on envisager une réduction du montant des taxes sur le parcours de Saint-Barthélemy à Saint-Martin Grand Case ? Peut-on également réduire à 1 euro, voire supprimer tout simplement la taxe de solidarité pour les passagers qui doivent transiter par l’aéroport Princess Juliana pour se rendre à Paris ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Vous le savez, monsieur le député, le Gouvernement est particulièrement attentif aux conditions dans lesquelles s’effectue la desserte des territoires d’outre-mer. La liaison avec Saint-Barthélemy s’effectue essentiellement via Saint-Martin et Pointe-à-Pitre. Sa connectivité est bien établie. L’île dispose d’une compagnie basée et bénéficie d’une desserte totalement régulière : chaque semaine, 56 allers-retours sont effectués entre Saint-Barthélemy et Juliana par la compagnie Saint-Barth Commuter, et 24 allers-retours entre Saint-Barthélemy et Pointe-à-Pitre par la compagnie Air Antilles Express.
Vous m’interrogez sur le niveau tarifaire de ces vols, et notamment sur un certain nombre de dispositions fiscales. Les prix pratiqués se situent entre 111 et 240 euros. Ils ne sont pas intégralement proportionnels à la distance parcourue ou au temps de vol mais dépendent également d’un certain nombre de contraintes opérationnelles auxquelles est confronté l’aéroport que vous avez cité, qui limitent par exemple très fortement la capacité des appareils utilisables. Une part des coûts est incompressible, qu’il s’agisse du traitement au sol, du décollage, de la montée, de la descente ou de l’atterrissage.
S’agissant du volet fiscal de votre question, le tarif des taxes est fixé indépendamment de la durée du vol. Les taxes sont perçues en fonction du fait générateur, c’est-à-dire de l’embarquement des personnes, quelles que soient les conditions de vol. Elles sont applicables sans exception sur les lignes bénéficiant de subventions d’aménagement du territoire ou pour continuité territoriale, aux Antilles comme en métropole.
Les taxes aéroportuaires perçues par l’État, dont les prérogatives ont été confirmées par le Conseil d’État dans un avis rendu le 7 janvier 2014 suite à une saisine de la collectivité de Saint-Barthélemy, répondent à la nécessité de couvrir des missions d’intérêt général comme la sécurité et la sûreté. Elles sont perçues en fonction d’un dispositif de péréquation, qui bénéficie aux petits aérodromes comme celui de Saint-Barthélemy. Ainsi, la taxe d’aéroport en vigueur à Saint-Barthélemy, d’un montant de 2,60 euros par passager, est la moins élevée de la classe 3 à laquelle appartient cet aéroport. En outre, le tarif de la taxe de l’aviation civile dépend de la destination du passager ; or les liaisons avec la métropole, l’Union européenne, l’espace économique européen ou la Suisse bénéficient d’un tarif réduit, fixé à 4,31 euros en 2013, à comparer au tarif normal de 7,75 euros pour les autres destinations.
Enfin, pour rejoindre la métropole, les résidents de Saint-Barthélemy peuvent bénéficier d’un mécanisme de solidarité nationale d’aide à la continuité territoriale, géré par le ministère des outre-mer. Les bénéficiaires de ce dispositif perçoivent une aide de 170 euros pour un déplacement annuel.
Merci pour votre réponse, monsieur le ministre, mais je voudrais souligner un point concernant la taxe de solidarité. Les résidents de Saint-Barthélemy peuvent effectivement embarquer à l’aéroport de Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe, où le montant de la taxe de solidarité s’élève à 1 euro. Cependant, l’île de Saint-Martin est plus proche de Saint-Barthélemy : transiter par cet aéroport permet donc de gagner du temps, d’autant que la liaison avec Paris est directe. Or, le montant de la taxe y est de 4 euros. La différence entre les deux trajets est flagrante. La continuité territoriale et l’égalité des chances pourraient justifier une réduction la taxe applicable aux passagers transitant par Saint-Martin, qui pourrait au moins être ramenée au niveau de Pointe-à-Pitre.
La parole est à Mme Catherine Beaubatie, pour exposer sa question, no 553, relative à la procédure de choix des quartiers éligibles aux contrats de ville.
Monsieur le ministre délégué chargé de la ville, après la réforme de la politique de la ville déjà adoptée par notre assemblée et le Sénat début janvier, le Gouvernement a souhaité remettre à plat la géographie des quartiers prioritaires, relancer la rénovation urbaine et mettre en place une nouvelle contractualisation avec les collectivités locales en associant les habitants. Cette co-construction des politiques publiques avec nos concitoyens est pour la première fois reconnue par la loi, et nous devons nous en féliciter. Le but de cette réforme est de lutter contre la fracture territoriale et d’améliorer la situation des quartiers défavorisés et de leurs habitants, qui s’est gravement détériorée depuis ces dernières années, sous différents gouvernements de droite. Cette loi est donc essentielle.
Néanmoins, j’aimerais vous interroger sur le calendrier imposé aux collectivités pour le choix des quartiers précisément éligibles à ces nouveaux contrats de ville, car nous avons pu relever des incohérences, notamment à Limoges. Aujourd’hui en effet, dans le cadre de cette réforme, l’État doit signer de nouveaux contrats proposant le traitement intégré des problématiques urbaines et sociales avec les intercommunalités et les collectivités concernées. Dans le même temps, les collectivités doivent proposer à l’ANRU des projets de renouvellement urbain pour des quartiers dont aucun critère d’éligibilité n’est connu à ce jour. La ville de Limoges a ainsi demandé que trois de ses quartiers soient considérés comme prioritaires, et a présenté ses projets à l’ANRU à l’occasion des négociations relatives à son avenant de sortie de la première génération de convention. Cependant, les communes ont, en l’état, l’obligation de remettre leurs propositions pour les contrats de ville avant d’avoir reçu les conclusions de l’ANRU sur le choix des quartiers prioritaires.
Monsieur le ministre, il y a un réel problème de cohérence entre les deux calendriers. Une annonce coordonnée des deux géographies, dès le mois d’avril ou mai 2014, changerait radicalement non seulement la politique de rénovation urbaine locale, mais également la nature des interventions, c’est-a-dire les crédits à inscrire dans les projets de territoire pour les collectivités. Il me paraît donc urgent que l’ANRU annonce les quartiers retenus le plus rapidement possible, afin que les villes concernées, notamment Limoges, puissent établir en conséquence des contrats de ville opérationnels.
Madame la députée, vous soulevez la question de l’articulation entre la nouvelle géographie prioritaire de la politique de la ville et les sites retenus pour le nouveau programme national de renouvellement urbain. Plus généralement, vous soulignez l’enjeu de l’inscription des projets urbains dans les contrats de ville.
Comme vous l’avez souligné, ces questions sont au coeur de la réforme mise en place par la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, promulguée le 21 février dernier. Il s’agit en effet d’éviter ce que nous avons connu ces dernières années, c’est-à-dire une dissociation des contrats urbains de cohésion sociale et des conventions de rénovation urbaine, et par ailleurs une dilution des interventions de l’ANRU en dehors des quartiers de la politique de la ville – c’est l’objet du fameux article 6 de cette loi.
La première étape de la réforme doit donc consister à définir les nouveaux quartiers prioritaires de la politique de la ville, sur la base d’une méthodologie objective et égale pour tous, avec le recours au critère unique de concentration des populations à bas revenus, critère inscrit dans la loi elle-même. Nous traduirons ce principe dans un décret en Conseil d’État, qui sera sans doute publié en avril. La liste provisoire des quartiers prioritaires ainsi identifiés sera communiquée aux préfets et aux élus locaux pour discuter des périmètres précis autour de chacun des quartiers. Ainsi, dès la fin du mois d’avril, les quartiers prioritaires proposés seront connus par les élus, les services de l’État et les autres acteurs, ce qui permettra de commencer l’élaboration des contrats de ville. Ces contrats portent une ambition forte, celle d’imbriquer les actions urbaines, économiques et sociales.
Dans ce cadre, il est impératif de viser une utilisation optimale des moyens spécifiques du nouveau programme national de renouvellement urbain. Les subventions de l’ANRU s’élèvent à 5 milliards d’euros, pour un montant global d’opérations estimé à 20 milliards d’euros sur les dix prochaines années. L’ANRU interviendra désormais uniquement dans les quartiers prioritaires, sans dérogation possible. En outre, la majorité de ses moyens sera dirigée vers les quartiers qui requièrent les transformations urbaines les plus lourdes, comme la loi y oblige.
En termes de calendrier, le conseil d’administration de l’ANRU prendra connaissance de la nouvelle géographie prioritaire dès le mois d’avril, en même temps que les élus. Il devra alors, dans les mois qui suivent et comme le prévoit la loi, identifier les quartiers présentant les dysfonctionnements urbains les plus importants. Ces quartiers feront l’objet d’un arrêté du ministre chargé de la ville. Ils concentreront la majeure partie de l’enveloppe des 5 milliards d’euros, dans le cadre de conventions de renouvellement urbain qui seront dorénavant des conventions d’application des contrats de ville. Au-delà de ces quartiers coeur de cible, l’ensemble des quartiers prioritaires seront potentiellement éligibles à des aides de l’ANRU, d’ampleur plus limitée et gérées directement par les préfets dans le cadre d’enveloppes déconcentrées.
En conclusion, il y aura effectivement un délai entre la communication de la nouvelle géographie prioritaire de la politique de la ville et celle des sites qui concentreront les moyens de l’ANRU. Ce délai participe de la réussite de la réforme en cours, car il garantit à la fois la bonne inscription des futurs projets de renouvellement urbain dans les contrats de ville et une gestion efficace des crédits ANRU.
J’entends cependant votre demande que ce délai soit réduit à son strict minimum pour des raisons opérationnelles, et j’y souscris : les sites à enjeu majeur pour l’ANRU seront connus au plus tard à la rentrée, ce qui permettra aux élus d’affiner le contenu et le calendrier de leur stratégie urbaine en fonction des moyens spécifiques auxquels ils pourront prétendre, en vue de la signature des contrats de ville, fin 2014 idéalement et jusqu’à mi-2015 au plus tard.
Merci, monsieur le ministre, pour ces précisions. Permettez-moi cependant d’insister compte tenu de l’urgence à la fois pour les collectivités, mais surtout pour les habitants car les attentes sont fortes dans ces quartiers.
La parole est à M. Dominique Tian, pour exposer sa question, no 572, relative à l’avenir des zones franches urbaines.
Ma question s’adresse au ministre chargé de la ville et concerne l’avenir des zones franches urbaines, créées par la loi du 14 novembre 1996, du temps du Premier ministre Alain Juppé, pour redynamiser des quartiers de la politique de la ville présentant un cumul de difficultés particulièrement importantes.
Par l’article 29 de la loi de finances rectificatives pour 2013, monsieur le ministre, vous avez modifié les règles du dispositif des ZFU. Cet article, dont l’application, qui plus est, est rétroactive pour 2013, prévoit de limiter le bénéfice exonéré à la portion du chiffre d’affaires ou des recettes réalisés en ZFU. Cela va complexifier et affaiblir ce dispositif, car un grand nombre d’entreprises interviennent chez des clients situés hors zone franche.
Les zones franches urbaines ont permis d’introduire de l’économie dans des territoires qui en étaient dépourvus, d’y créer et d’y maintenir des emplois. Pour mémoire, je rappelle qu’à Marseille, plus de 13 000 emplois ont été créés et que 3 600 nouvelles entreprises se sont installées depuis le démarrage du dispositif.
Ce constat est partagé par un rapport parlementaire de 2013 et un rapport du Conseil économique, social et environnemental de 2014 qui insistent l’un et l’autre sur la nécessité de stabiliser et pérenniser ce dispositif. Un troisième rapport, adopté à l’unanimité par la commission des affaires économiques de notre assemblée, Daniel Gibbes ici présent pourrait le confirmer, demandait de « stabiliser juridiquement et fiscalement le dispositif des ZFU jusqu’au 31 décembre 2017 pour garantir aux entreprises un environnement stable ».
Or les modifications des conditions du dispositif ZFU commencent à induire dès à présent des dégâts très importants. Avec de telles modifications, quel entrepreneur choisira désormais de développer son activité en ZFU et d’y créer de l’emploi ?
Monsieur le député Tian, vous m’interrogez sur le devenir des zones franches urbaines au regard des dispositions de la loi de finances rectificatives pour 2013. Permettez-moi de vous rappeler la décision prise par le gouvernement précédent, celui que vous souteniez, lors de la loi de finances pour 2012, qui a prévu l’extinction des zones franches urbaines à compter de 2015. Ce sont d’ailleurs des questions importantes sur lesquelles d’autres parlementaires de votre département m’ont interrogé, tout particulièrement Patrick Mennucci, Henri Jibrayel et Samia Ghali.
Commençons par la loi de finances rectificative pour 2013 : son article 29 vient préciser les règles en matière d’exonération d’impôt sur les bénéfices, en soumettant à l’impôt la part du chiffre d’affaires réalisé hors zone franche urbaine. Cette mesure vise à aligner le régime des ZFU sur le droit commun applicable aux autres zonages, qu’il s’agisse des zones d’aides à finalité régionale ou des zones de restructuration de défense par exemple.
Cependant, les spécificités des ZFU seront prises en compte dans l’application de la règle de droit commun. En effet, contrairement aux autres zonages, les ZFU correspondent à des territoires restreints, de dimension infracommunale, et non à des bassins de vie ou d’emploi. En outre, la condition fixée pour accéder au bénéfice des exonérations fiscales en ZFU tient avant tout à la clause d’embauche d’habitants de la zone. Aussi l’application de la règle générale fixée par la loi de finances rectificative pour 2013 va-t-elle être précisée par voie d’instruction fiscale, dans le souci de préserver les intérêts de prestations de service établis dans les ZFU et dont les salariés peuvent réaliser une partie de leur activité en dehors de la zone. En revanche, un certain nombre d’effets d’aubaine pourront être corrigés et neutralisés.
S’agissant à présent de l’évolution générale des zones franches urbaines au-delà du 31 décembre prochain, le Premier ministre a saisi le Conseil économique, social et environnemental pour réaliser un bilan du dispositif en matière de développement économique et de l’emploi. Le CESE a adopté un avis le 15 janvier dernier. Le rapport me sera remis officiellement par Jean-Paul Delevoye le 19 mars prochain. Comprenez donc que je ne sois pas encore en mesure de vous indiquer les suites qui lui seront apportées. Cela sera fait dans le projet de loi de finances pour 2015 et surtout dans le rapport prévu par l’article 28 de la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.
D’ores et déjà, deux fondamentaux sont acquis. Il s’agira en premier lieu de rechercher des économies, et sur ce point les parlementaires de l’UMP qui revendiquent une baisse de 100 milliards de la dépense publique ne pourront que me donner raison. Bien plus, il s’agira de rechercher un meilleur rapport coût-efficacité, tant le dispositif des zones franches urbaines coûte cher au regard de son effet sur l’emploi dans les quartiers – entre 360 et 400 millions d’euros par an, soit 80 000 euros pour chacun des 5 000 emplois créés environ. C’est autant que les crédits d’intervention de l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, l’Acsé qui soutient les associations et les élus dans les quartiers prioritaires.
Ensuite, il est acquis que les exonérations fiscales associées au ZFU continueront, quelle que soit l’option retenue, à produire leurs effets pendant treize années, soit jusqu’au 31 décembre 2027. Autrement dit, toutes les entreprises implantées en ZFU aujourd’hui continueront à bénéficier des exonérations prévues lors de leur installation jusqu’au terme prévu par la loi. C’est le gage de stabilité et de confiance que vous réclamiez et que le Gouvernement apporte dès à présent aux chefs d’entreprise et à leurs salariés installés en zones franches urbaines.
La parole est à Mme Hélène Geoffroy, pour exposer sa question, no 552, relative à la situation sociale et économique de l’entreprise Sofrapain.
Monsieur le ministre du redressement productif, ma question concerne la situation sociale et économique de l’entreprise Sofrapain. Celle-ci est implantée notamment à Vaulx-en-Velin, commune de ma circonscription depuis de nombreuses années, et en a été longtemps un employeur important. Sofrapain appartient désormais au groupe NutriXo.
L’entreprise annonce un plan de licenciement pour plusieurs sites. Pour Vaulx-en-Velin, cela va se traduire par 36 licenciements sur un total de 105 salariés. À notre demande conjointe, celle des élus locaux et de moi-même, la direction du travail a organisé une table ronde le 20 décembre dernier. À cette occasion, la direction de l’entreprise a présenté la situation économique de la boulangerie en France. Elle a notamment insisté sur la morosité du marché du pain et de la viennoiserie, la perte de clients et la surcapacité de ses usines.
Les représentants syndicaux, quant à eux, ont fait part de leurs craintes que cela ne soit qu’une étape avant la fermeture de ce site. Ils se sont également inquiétés du fait qu’il existe plusieurs plans locaux de réduction de personnel au sein du groupe NutriXo. Enfin, ils ont interrogé les pouvoirs publics sur les aides de l’État que ce groupe a pu recevoir au niveau national sous forme de crédit d’impôt recherche ou de crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Cela n’a pu être ni confirmé, ni infirmé par la direction locale.
Néanmoins, il semblerait insupportable, si cette information se trouvait confirmée, qu’une entreprise enregistrant des bénéfices puisse profiter d’une prise en charge par le contribuable français, tout en licenciant une partie de ses salariés. Vous le savez monsieur le ministre, la commune de Vaulx-en-Velin souffre d’un taux de chômage supérieur à 20 % et la restructuration de toute entreprise y est vécue comme une souffrance supplémentaire.
Dans la bataille contre le chômage et pour l’égalité des territoires que mène le Gouvernement, et alors que vous portez haut la promotion et le développement de nos outils de production, pouvez-vous nous apporter plus d’informations sur la situation de Sofrapain dans ses différents sites mais également sur l’orientation sociale et économique de ce groupe ?
Madame la députée Hélène Geoffroy, merci de votre question. Je sais à quel point vous êtes engagée aux côtés des entreprises de votre territoire. Ce type de situation n’est pas anodine et nous devons en débattre. Le Gouvernement est là pour répondre à chacun de ces dossiers, quels qu’en soient la taille et l’impact. Car sauver un emploi, c’est toujours une victoire.
L’entreprise Société Nouvelle Sofrapain est un spécialiste dans le pain précuit et les produits surgelés de boulangerie. Elle est entrée dans le groupe NutriXo, qui est un des leaders européens de la meunerie et de la boulangerie, début 2009. Elle a eu en 2012 un chiffre d’affaires de 43 millions d’euros avec des effectifs de 105 salariés à Vaulx-en-Velin et 120 à son siège social à Trappes. Sofrapain a connu des pertes sur les trois derniers exercices connus, de 2,4 millions d’euros en 2010, 4,5 millions en 2011 et 1,3 million en 2012, et des capitaux propres négatifs en 2011 – moins 0,49 million d’euros – et en 2012 – moins 1,81 million.
Le 20 décembre 2013, une table ronde a été organisée par le préfet de région, à laquelle vous avez participé. Elle a permis d’instaurer un dialogue avec la direction de la société Sofrapain et les organisations syndicales présentes sur le site rhodanien. Cette réunion a permis d’examiner l’avenir des salariés, car l’entreprise a adressé le 15 octobre 2013 à la DIRECCTE compétente pour le siège un plan de sauvegarde de l’emploi.
Le projet de réorganisation et de restructuration du site de Vaulx-en-Velin prévoit la suppression de 36 postes dans l’usine de production et la création de 21 postes si les salariés acceptent la modification de leurs contrats de travail. Au soutien de cette décision, l’entreprise argue de la hausse des matières premières, qu’elle n’a pu répercuter sur le prix des produits sans créer des tensions commerciales. Elle expose un contexte de concurrence très vive qui affecte la vente des produits surgelés depuis trois ans et la perte de clients importants, comme Casino ou Marks
Un mot pour vous remercier de votre réponse, monsieur le ministre, et de l’attention que vous portez à ces situations humaines difficiles.
La parole est à M. Christian Bataille, pour exposer sa question, no 556, relative à la reconstitution de carrière des agents de La Poste et de France Télécom ayant le statut de fonctionnaire.
Monsieur le ministre, voilà désormais plus de vingt ans que des agents de La Poste et de France Télécom dits « reclassés », dont la carrière est bloquée dans leur grade détenu dans les corps d’origine des PTT, attendent que soit mis un terme à cette injustice. Ils réclament que des mesures réglementaires soient prises pour imposer à La Poste et à France Télécom de procéder à la reconstitution de leur carrière et de les indemniser pour le préjudice subi. Contrairement aux déclarations de Philippe Wahl, PDG du groupe La Poste, devant la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, aucune suite n’a été donnée à son engagement de négocier avec ces personnels et les syndicats. Pour sa part, France Télécom ne s’est toujours pas exprimée sur la situation des fonctionnaires reclassés.
Les associations et syndicats des personnels, confirmés en cela par les juges, sont conscients qu’il appartient au législateur de mettre un terme au problème en réaffirmant que c’est bien aux seuls employeurs qu’il revient de tirer la conséquence de cette situation des agents reclassés.
Monsieur le ministre, entendez-vous répondre à cette attente en prenant rapidement une initiative réglementaire ou législative qui reconnaisse le préjudice subi par ces fonctionnaires au regard de la charte européenne des droits sociaux et qui ouvre la voie à une reconstitution de carrière et à une indemnisation par les entreprises concernées ?
Monsieur le député, c’est une question extrêmement importante et très technique. Elle est particulièrement suivie par les services de mon ministère, ceux de ma collègue Marylise Lebranchu et naturellement par le cabinet du Premier ministre. Je vais vous donner dans le détail les raisons de l’immobilité du dossier.
En 1993, dans le cadre de la réforme du secteur des postes et télécommunications posée par la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications, il a été proposé aux fonctionnaires de La Poste et de France Télécom d’intégrer les corps dits de « classification », toujours régis par les titres I et II du statut général des fonctionnaires. Seuls 5 % des fonctionnaires ont refusé cette intégration et ont préféré conserver leur grade dit de « reclassement », gardant la possibilité de poursuivre leur carrière au sein des corps de classification.
En l’absence de recrutement externe dans les corps de reclassement et en raison de l’existence de quotas statutaires, les possibilités de promotion se sont trouvées très réduites, voire nulles, au sein de ces corps. Cette situation a suscité des actions contentieuses de la part de certains fonctionnaires reclassés, en dépit du fait qu’ils pouvaient poursuivre leur carrière dans les corps dits de classification sans aucune difficulté statutaire, ce que d’autres « reclassés » ont accepté.
Les décrets du 26 novembre 2004 et du 14 décembre 2009 relatifs aux dispositions statutaires applicables à certains corps de fonctionnaires de France Télécom et à certains corps de fonctionnaires de La Poste ont supprimé les obstacles statutaires à la promotion interne dans les corps de reclassement. Les fonctionnaires dits reclassés peuvent donc désormais opter pour une évolution de carrière au sein des corps de classification sans perte d’identité statutaire, ou pour une promotion au sein des corps de reclassement.
Les fonctionnaires dits reclassés n’ont donc pas subi pendant vingt ans un blocage de carrière à proprement parler puisque nombre d’entre eux ont pu évoluer, soit vers les corps de classification depuis 1993, soit dans les corps de reclassement depuis 2004 à France Télécom et depuis 2009 à La Poste.
La reconstitution de carrière qui est demandée par certains fonctionnaires reclassés et leurs associations prête à discussion car elle conduirait à une promotion automatique, ce que les juridictions administratives excluent, s’attachant à déterminer si les requérants avaient une chance sérieuse de promotion alors même qu’ils auraient rempli les conditions statutaires pour être promus. Il s’agit d’un acte administratif extrêmement rare. Il nécessite une étude de faisabilité juridique qui est en cours. Il faut rappeler que la reconstitution de carrière n’est intervenue dans le passé que pour réparer des préjudices de carrière imputables à des faits de guerre. En outre, une telle mesure risquerait de créer une inégalité de traitement avec les fonctionnaires qui ont accepté la classification mais n’ont pas davantage connu d’évolution de carrière, compte tenu des taux de promotion en vigueur à La Poste et à France Télécom s’agissant de promotions au choix.
Ce dossier épineux, qui concerne un grand nombre de personnes, mérite d’être travaillé de façon fine. Je vous ai donné les tenants et aboutissants de la discussion en cours. Nous en reparlerons.
Merci, monsieur le ministre, pour cette réponse complète et détaillée. J’espère que l’étude en cours permettra de sortir de l’ambiguïté.
La parole est à Mme Marie-Odile Bouillé, pour exposer sa question, no 558, relative à la place des sous-traitants locaux dans la filière navale à Saint-Nazaire.
Monsieur le ministre du redressement productif, le redressement industriel est une priorité du Gouvernement. Le soutien à la filière navale et aux chantiers nazairiens s’inscrit dans cette stratégie et porte ses fruits. Après la commande de l’Oasis fin 2012 et de deux ferries écologiques le mois dernier, nous espérons d’autres bonnes nouvelles d’ici peu, d’autant que pour se maintenir dans la concurrence internationale, STX France a signé avec deux organisations syndicales un accord de compétitivité portant sur la réduction des coûts.
Les coûts représentent un enjeu important. À ce titre, j’appelle votre attention, monsieur le ministre, sur la place qu’occupent les sous-traitants locaux dans la réalisation de ces navires. Vous le savez, ces PME et PMI détiennent un savoir-faire exceptionnel qui fait la plus-value de la filière navale en France. Mais malgré ses atouts, notre tissu de sous-traitants est fragilisé par une concurrence déloyale. En effet, le dévoiement de la directive européenne sur le détachement des travailleurs place nos entreprises locales en concurrence avec des sous-traitants étrangers dont les coûts sont inférieurs de 30 % à 40 %. L’exigence du donneur d’ordre d’obtenir le même prix de la part des sous-traitants locaux n’est pas tenable : ces entreprises n’auront jamais les moyens de s’aligner sur de tels coûts. La crainte est grande qu’elles se voient évincées des marchés de construction et que l’emploi local n’en bénéficie pas autant qu’il le devrait. Il n’est pas acceptable que la reprise d’activités dans notre bassin d’emplois se fasse au détriment des compétences locales.
Pour contrer les conséquences de cette directive européenne, une proposition de loi du groupe SRC que j’ai cosignée prévoit d’accroire la responsabilité juridique et financière du donneur d’ordre. Mais l’État a aussi son mot à dire. Je souhaiterais savoir comment la France entend agir au niveau européen pour faire adopter de nouvelles règles sur le détachement des travailleurs et comment l’État, en sa qualité d’actionnaire, compte faire en sorte que les sous-traitants locaux obtiennent des contrats économiquement tenables avec STX France, afin de sauvegarder nos emplois industriels et d’éviter la disparition d’entreprises sous-traitantes victimes d’une concurrence déloyale.
Madame la députée, je veux d’abord vous remercier pour votre engagement au service de la filière navale. Pas une semaine ne se passe sans que vous m’interrogiez à ce propos et je vous en sais gré. J’étais hier dans votre département, à Machecoul, et je me suis arrêté à Nantes pour discuter avec certains entrepreneurs, parmi lesquels un sous-traitant de STX.
Quand je suis arrivé aux responsabilités, c’est la question de la survie STX qui se posait. Je veux rappeler ce qu’a été le travail du Gouvernement : aux organisations syndicales qui nous demandaient quand nous allions nationaliser STX, je répondais que le problème ne résidait pas dans l’actionnariat, public ou privé, mais dans les commandes. Et justement, les commandes, nous les avons alignées et nous continuons à travailler en ce sens parce que nous considérons que les chantiers navals sont une filière d’excellence française. Nous subissons une concurrence extrêmement dure, une guerre des prix, souvent subventionnée, il faut le dire, par d’autres États, qui nous place dans une situation délicate car pour maintenir notre activité de construction navale nous devons être compétitifs. À cet égard, je tiens à saluer les organisations syndicales qui ont signé l’accord de compétitivité avec STX pour maintenir un niveau de coûts acceptable.
L’État a pris ses responsabilités dans plusieurs domaines. En tant qu’actionnaire des chantiers navals, il se montre présent, attentif, bienveillant. Il épaule les évolutions de la filière, en premier lieu sur le plan de l’innovation technologique : le navire écologique, à émissions réduites de CO2, est ainsi l’un des plans industriels que nous pilotons avec STX et des investissements au titre du grand emprunt sont prévus pour améliorer la performance par l’innovation. Quand on subit une concurrence par le prix sur des produits fabriqués par d’autres pays à travers le monde, y compris ceux qui pratiquent le low cost, on est obligé d’innover et donc d’investir.
Nous agissons également auprès de la filière et des sous-traitants. Nous avons ainsi engagé avec le groupement des industries de construction et activités navales, le GICAN, un vaste programme appelé Océans 21 qui bénéficie de 9 milliards d’euros dans le cadre des investissements d’avenir. Visant mille entreprises de la filière – chantiers de construction ou de réparation, équipementiers, fournisseurs, sous-traitants – il poursuit un objectif de consolidation. Quand les entreprises sont trop petites, elles n’atteignent en effet pas la taille critique nécessaire pour faire baisser leur coût unitaire de service. Nous leur apportons donc capital et soutien, en accord avec la profession. Il ne s’agit pas, bien évidemment, de conclure des mariages forcés, des mariages blancs – cela se termine généralement mal ! Nous préférons une démarche d’adhésion mutuelle où tout le monde se met d’accord autour d’une table. C’est ainsi que nous parviendrons à bâtir des entreprises de bonne taille, capables de remporter des marchés hors de France et de maintenir des coûts compétitifs. C’est un travail de dentellière, un travail de longue haleine et je remercie les élus, les collectivités et particulièrement la région, instance économique locale, d’y participer.
Par ailleurs, nous sommes disponibles pour actionner l’ensemble des leviers qui permettent de faire face aux fameux « trous » : en cas de baisse de production, nous utilisons le chômage partiel, à l’instar des Allemands qui ont pu sauver leurs outils de travail lors de la grande crise de 2008-2009, en évitant les fermetures. J’invite toutes les entreprises de la région qui rencontrent des difficultés à saisir le ministre, y compris par votre intermédiaire, madame Bouillé : nous travaillons au cas par cas, nous sommes équipés pour cela.
Merci à vous, madame la députée. Vive le redressement productif, vive la République et vive la France !
Merci, monsieur le ministre, pour ce plaidoyer qui vous a fait un peu dépasser votre temps de parole. La parole est à Mme Marie-Odile Bouillé.
Je tiens à remercier M. le ministre pour le travail qu’il réalise auprès des chantiers et pour le suivi de nos dossiers. Nous espérons tous que de nouvelles commandes pourront être signées très bientôt.
La parole est à Mme Linda Gourjade, pour exposer sa question, no 547, relative au bilan des établissements pénitentiaires pour mineurs.
Monsieur le ministre du redressement productif, ma question vise à appeler l’attention du Gouvernement sur la situation des établissements pénitentiaires pour mineurs et tout particulièrement celui de Lavaur situé dans ma circonscription.
La loi d’orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002 dite « loi Perben » a permis la réalisation de sept EPM sur l’ensemble du territoire français, chacun pouvant accueillir jusqu’à soixante jeunes détenus, dès l’âge de treize ans. Créés pour renforcer le dispositif d’accueil des mineurs délinquants et respecter les règles pénitentiaires européennes comme la stricte séparation des majeurs et des mineurs, ces nouveaux établissements devaient remplacer à terme les quartiers pour mineurs des centres de détention.
Aujourd’hui, cet objectif n’a toujours pas été atteint : deux tiers des mineurs sont incarcérés en quartier pour mineurs contre seulement un tiers en EPM, alors même que le taux d’occupation de ces structures n’est que de 67 %. La diminution du nombre de mineurs dans les centres de privation de liberté ces dix dernières années est principalement liée à l’accueil en centre éducatif fermé, qui constitue toujours une alternative à l’incarcération.
Dans les EPM, les mineurs vivent dans des unités de douze places. Outre une prise en charge quotidienne assurée au long d’une journée de dix heures par un binôme constitué d’un éducateur et d’un surveillant, ils bénéficient d’une prise en charge plus globale axée sur les activités socio-éducatives, l’enseignement et la santé.
J’ai rencontré dernièrement la direction de l’EPM de Lavaur, des représentants de la protection judiciaire de la jeunesse et l’ensemble des syndicats des personnels. Depuis l’ouverture de cet établissement en juin 2007, de nombreux incidents graves se sont produits : évasions, agressions de surveillants, dégradations… Des travaux de sécurisation ont permis de diminuer les agressions mais leur nombre est encore trop élevé. Même si les moyens mis à disposition sont importants – 44 agents de la PJJ, 57 agents de l’administration pénitentiaire, 7 enseignants, du personnel soignant et 13 agents d’entretien – le taux de récidive reste élevé, avec plus d’un tiers des détenus concernés.
Il est aussi constaté que l’orientation des mineurs n’est pas toujours liée à leurs projets personnels et ne respecte pas les objectifs initiaux de l’EPM. Trop fréquemment, c’est la surpopulation carcérale dans un établissement ou des mesures disciplinaires qui conduisent au transfert des jeunes vers l’EPM de Lavaur. L’éloignement des familles est souvent dommageable pour les liens familiaux et la préparation de la sortie.
En 2013, Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, a missionné le sénateur de la Haute-Saône Jean-Pierre Michel, qui a fait un premier bilan et des préconisations pour les établissements pénitentiaires pour mineurs. Il propose en particulier de procéder à une évaluation de l’efficacité des EPM en termes de récidive. Compte tenu de l’appréciation qui peut être faite de leurs résultats sur ce point, je crois nécessaire qu’une nouvelle réflexion s’engage sur l’avenir de cette approche carcérale pour mineur. Quel bilan fait le Gouvernement des résultats de l’activité des EPM ? Envisagez-vous de faire évoluer ce dispositif d’incarcération pour mineurs ?
Madame la députée, je vous prie d’excuser l’absence de Mme la garde des sceaux, Christiane Taubira, qui m’a prié de vous donner les éléments d’information suivants. Les six établissements pénitentiaires pour mineurs répondent aux exigences fixées par les normes internationales et les règles pénitentiaires européennes. Celles-ci assurent la garantie d’une prise en charge de qualité, la prévention des ruptures dans le parcours éducatif des mineurs, la prévention des ruptures des liens familiaux pendant l’incarcération et la garantie de la cohérence éducative entre détention, milieu ouvert et placement.
Les outils réglementaires, qui sont la référence quotidienne des personnels de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse, ont été actualisés par une circulaire de la garde des sceaux Christiane Taubira en date du 24 mai 2013, relative au régime de détention des mineurs. Ainsi, la prise en charge dans les établissements pénitentiaires pour mineurs est assurée par l’administration pénitentiaire et la protection judiciaire de la jeunesse à travers un binôme surveillant-éducateur référent au sein de l’unité de vie. L’éducation nationale et les personnels soignants sont également étroitement associés à cet accompagnement.
S’agissant de l’établissement pénitentiaire pour mineurs de Lavaur, si l’on peut déplorer les incidents survenus, il est important de souligner que les agressions physiques et verbales y ont connu une baisse significative en 2013. Je souhaite vous assurer que les directions interrégionales de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse mettent tout en oeuvre pour revenir à une situation apaisée. Afin d’ajuster les dispositifs de prise en charge aux réalités du public détenu, une réflexion est aujourd’hui menée sur la cartographie nationale des lieux de détention des mineurs, pour limiter les effets parfois néfastes d’un trop grand éloignement – nous connaissons tous ce problème dans nos régions respectives.
Par ailleurs, un groupe de travail réunissant la direction de l’administration pénitentiaire, la direction de la protection judiciaire de la jeunesse ainsi que l’éducation nationale et des personnels soignants se réunit actuellement pour élaborer un projet d’établissement type pour améliorer encore le suivi conjoint des mineurs poursuivis. Nous étudions également les préconisations du sénateur Jean-Pierre Michel s’agissant de ces établissements pénitentiaires. En d’autres termes, madame la députée, soyez assurée que la nécessaire préservation des parcours individuels des mineurs, notamment des mineurs détenus, est un objectif poursuivi quotidiennement par les services de la Chancellerie et que la garde des sceaux y attache une attention toute particulière.
Je remercie M. le ministre d’avoir bien voulu me répondre à la place de Mme Taubira.
La parole est à M. Charles de La Verpillière, pour exposer sa question, no 569, relative au manque d’effectifs du parquet de Bourg-en-Bresse.
Ma question s’adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. Mes collègues députés de l’Ain, Xavier Breton, Étienne Blanc, Michel Voisin et Damien Abad s’y associent. Je souhaite appeler son attention sur l’insuffisance des effectifs de magistrats du ministère public au tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse. En 2007, avant la fusion des tribunaux de Bourg-en-Bresse et de Belley, il y avait huit postes à Bourg-en-Bresse et deux à Belley, soit un effectif total théorique de dix magistrats. Or, à l’issue de la fusion, le parquet du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse, ayant désormais compétence sur tout le département, n’a conservé que huit magistrats. Le département de l’Ain a donc perdu deux parquetiers.
Cette diminution a été d’autant plus mal ressentie que trois facteurs objectifs sont venus augmenter considérablement la charge de travail du parquet. Le premier facteur tient à la croissance démographique : le département est sur ce plan l’un des plus dynamiques de France puisque nous avons gagné 42 000 habitants en cinq ans, pour dépasser les 600 000 au dernier recensement. Le deuxième facteur d’accroissement de la charge de travail est l’augmentation sensible de la délinquance, avec notamment 18 % de cambriolages en plus en 2013. Le parquet est donc mobilisé par un plus grand nombre d’enquêtes. J’ajoute que la situation géographique de l’Ain, que vous connaissez, monsieur le ministre,…
Je la connais même très bien !
…entre Lyon et Genève, l’expose particulièrement à des trafics en tous genres et au grand banditisme. Le troisième facteur, c’est l’ouverture d’un nouveau centre pénitentiaire de 730 places en septembre 2010. Il occupe pratiquement à plein-temps un magistrat sur les huit que compte le parquet pour les mesures d’aménagement des peines, sans parler des délits commis au sein de la prison ou autour d’elle. Bref, la situation est vraiment difficile, pour ne pas dire critique. Il ne me paraît donc pas déraisonnable de demander une augmentation sensible des effectifs de magistrats affectés au parquet de Bourg-en-Bresse. Je comprends bien, et même j’admets, que la conjoncture ne se prête pas à des largesses inconsidérées. Je souhaiterais néanmoins que des ouvertures de postes de magistrats, sur deux ans s’il le faut, viennent corriger tant la sous-dotation initiale que l’augmentation très forte de la charge de travail du parquet de Bourg-en-Bresse.
Monsieur le député Charles de La Verpillière, je vous prie d’excuser l’absence de Christiane Taubira. Connaissant un peu votre département, et connaissant aussi, par expérience personnelle, le secteur judiciaire, je me permets de vous donner, ainsi qu’à vos collègues, les informations suivantes s’agissant du manque d’effectifs dont souffrent en effet les parquets de certaines juridictions, et notamment celui de Bourg-en-Bresse.
Mme Taubira m’a chargé de vous dire que l’amélioration des moyens et de l’efficacité de la justice est l’un de ses objectifs prioritaires. Elle a ainsi décidé de répondre aux préoccupations des parquetiers en lançant un plan d’action en faveur du ministère public, qu’elle a présenté aux 36 procureurs généraux et aux 171 procureurs de la République réunis le 10 février dernier à l’École nationale de la magistrature, en présence du procureur général près la Cour de cassation. Ce plan est articulé autour de quatre axes et dix-neuf mesures concrètes, parmi lesquelles l’adaptation des effectifs des parquets pour tenir compte de l’importance et de la diversité de leurs missions.
Mme la garde des sceaux a pris l’engagement de diminuer l’écart entre le taux de vacance des magistrats du siège et celui des magistrats du parquet, car si le nombre de ces derniers a beaucoup augmenté ces dernières années, cela est allé de pair avec une augmentation du nombre de leurs missions. Ainsi, l’écart va prochainement se réduire : le taux de vacance du siège passera de 5,12 % à 5,79 % et le taux de vacance du parquet passera de 7,20 % à 6,45 %. Ce ne sont que des statistiques, mais elles ont beaucoup de conséquences sur la vie quotidienne des juridictions. Il n’a d’ailleurs été possible de réduire ces non-remplacements que par une politique très volontariste de recrutement que la garde des sceaux mène depuis son arrivée, après l’absence totale d’anticipation des départs à la retraite de nos prédécesseurs. Ainsi, 250 magistrats vont rejoindre en septembre prochain les juridictions, contre 105 magistrats recrutés sur plusieurs années antérieurement.
La circulaire de localisation des emplois, qui est l’un des leviers permettant de parvenir à l’adaptation des effectifs du parquet, fixe pour l’année 2013 l’effectif du parquet du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse à huit magistrats. Il est vrai, monsieur le député, que l’effectif du parquet n’a pas évolué malgré la fermeture le 1er octobre 2009 du tribunal de grande instance de Belley et son rattachement à celui de Bourg-en-Bresse. Il faut dire que l’initiative de la réforme de la carte judiciaire, qui a été pensée de façon assez improvisée, sans grande cohérence et sans s’inquiéter des conséquences en termes d’emplois et d’accessibilité du territoire, se paye, et se paye cher, monsieur le député !
Dans le cadre des derniers dialogues de gestion en vue de l’élaboration de la circulaire de localisation des emplois 2014, les chefs de la cour d’appel de Lyon ont sollicité la création d’un poste de substitut au parquet du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse, motivée par l’extension du centre de détention, l’ouverture du quartier de semi-liberté, la création d’une zone de sécurité prioritaire et la participation aux sessions de la cour d’assises de l’Ain. Cela fait beaucoup de travail en plus, raison pour laquelle Mme la garde des sceaux sera particulièrement vigilante à ce que cette demande, qui est encore à l’étude, soit prise en compte en priorité.
Merci, monsieur le ministre. Je me permets de vous prier de transmettre à Mme la garde des sceaux mes remerciements pour cette réponse qui, certes, n’est pas totalement satisfaisante, mais qui est encourageante.
La parole est à M. Hervé Pellois, pour exposer sa question, no 554, relative aux difficultés de scolarisation des enfants polyhandicapés.
Monsieur le ministre de l’éducation nationale, la question du polyhandicap est emblématique de nos fondements républicains. En souhaitant pouvoir être scolarisées, comme tout un chacun, dès l’âge de six ans, les personnes polyhandicapées demandent reconnaissance et dignité et nous interrogent sur leur place au sein de la société. Atteintes d’un polyhandicap complexe créant une grande dépendance, elles doivent pouvoir bénéficier d’un accompagnement adapté à leurs besoins spécifiques. Le droit a, et c’est heureux, beaucoup évolué ces dernières années avec la loi du 11 février 2005 ou encore l’arrêt du Conseil d’État du 8 avril 2009 qui engage la responsabilité de l’État en raison de l’insuffisance des structures d’accueil existantes. Des efforts conséquents sont conduits par le ministère de l’éducation nationale : la loi sur la refondation de l’école a notamment permis des avancées notables pour que l’école devienne réellement inclusive.
Pourtant, la proportion d’enfants non scolarisés atteint 94 % parmi les enfants polyhandicapés, sans compter ceux qui ne sont pas recensés. De nombreux parents mettent leur vie entre parenthèses faute de places disponibles, en raison de listes d’attentes trop longues ou de distance trop importante entre le domicile et l’établissement. Par exemple, dans le département du Morbihan, les 63 places d’accueil pour enfants polyhandicapés sont, pour une large part, concentrées sur le territoire pontivien. Or les professionnels sur le terrain font état d’une vingtaine d’enfants dans le bassin vannetais et d’une dizaine dans le bassin lorientais, qui ont été un peu abandonnés par notre société. Les familles du Sud Morbihan sont bien souvent obligées de déménager, d’arrêter de travailler ou d’envoyer leurs enfants, déjà fragilisés par leur handicap lourd, dans un internat éloigné. J’ai conscience des difficultés que cette question soulève, mais comment permettre à ces enfants de suivre une scolarité continue et adaptée ?
Monsieur le député, votre question est d’autant plus juste qu’elle fait le lien entre nos principes républicains et l’accueil que nous sommes capables d’accorder à nos enfants, et en particulier aux enfants polyhandicapés. Comme vous l’avez noté, des progrès ont été réalisés. Cela étant, l’écart existant entre les textes et la réalité, entre les lois et leur mise en oeuvre, entre les intentions et les actes est souvent troublant. Nous serons jugés sur notre capacité collective de diminuer l’écart entre l’égalité formelle et l’égalité réelle qui touche tous ces enfants.
C’est une grande fierté, à laquelle j’associe l’Assemblée nationale, et en particulier les députés de la majorité, d’avoir pour la première fois reconnu, dans la loi sur la refondation de l’école, le fait que l’école doit être inclusive. C’est une grande fierté d’avoir relancé, comme vous le savez, le développement, qui s’était interrompu en 2010, d’un certain nombre de postes nécessaires pour accompagner ces enfants. Nous avons ainsi pu débloquer plusieurs milliers de contrats cette année. C’est une grande fierté également, sans doute l’une des action dont nous nous honorons le plus avec ma collègue George Pau-Langevin, d’avoir sorti de la précarité les 30 000 personnes chargées d’accompagner les enfants en situation de handicap, leur donnant accès à un statut et à une formation.
Enfin, l’une des politiques que je conduis vise à mettre le maximum de moyens à la disposition de ces enfants, partout sur le territoire. En effet, vous en avez sûrement déjà fait l’expérience et je le constate partout où je me rends, il ne s’agit pas pour la société de faire la charité à ceux qui sont en difficulté : ce qui est en jeu, c’est notre capacité à nous transformer.
Partout où nous allons, nous voyons que le vrai changement des méthodes pédagogiques, l’école de la bienveillance que j’appelle de mes voeux, et donc de la réussite de tous, est transformée dans les rapports des élèves entre eux, dans les rapports à l’intérieur de la communauté pédagogique, dans le fait d’accueillir ces enfants. C’est pourquoi je continuerai de mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour rapprocher les intentions et les actes, les principes et les réalités. Cela vaudra aussi pour votre département, et je regarderai très attentivement les deux bassins dont vous avez parlé.
Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre réponse. Je souhaite remercier également toutes les associations qui oeuvrent dans le domaine du polyhandicap. Si ces associations nous dérangent d’une certaine manière, il faut se féliciter qu’elles soient là, car nous avons besoin d’être titillés en permanence. Ayant eu pendant vingt-cinq ans des responsabilités locales, je puis dire qu’il est difficile d’avoir une relation transversale entre la Maison départementale de l’autonomie, l’ARS, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, le ministère. S’il y a beaucoup d’interlocuteurs, il manque réellement une puissance publique qui puisse prendre les devants plutôt que de subir les demandes sans cesse réitérées par les associations.
La parole est à Mme Gisèle Biémouret, pour exposer sa question, no 557, relative au projet de carte scolaire dans le Gers pour la rentrée 2014.
Monsieur le ministre de l’éducation nationale, je souhaite appeler votre attention sur le projet de carte scolaire dans le Gers pour la rentrée de 2014 et plus particulièrement sur la prise en compte des départements ruraux dans la répartition des moyens.
Sans conteste, le recrutement de 60 000 enseignants durant les cinq prochaines années répare les effets néfastes des 80 000 suppressions de postes opérées par la majorité précédente. À l’occasion de la rentrée de septembre 2014, l’académie de Toulouse se voit attribuer 150 postes. Mais, en contradiction avec la volonté de renforcer notre service public de l’éducation, les premiers éléments rendus publics par le rectorat font état de la suppression dans le Gers de sept postes pour le premier degré, à effectifs constants. Cette perspective peut être considérée comme un dommage collatéral d’une concentration des moyens vers l’agglomération toulousaine. Si ces besoins semblent justifiés, ils sont satisfaits aux dépens des territoires ruraux, renforçant ainsi le sentiment de relégation.
Suite à différentes discussions avec les parlementaires de Midi-Pyrénées, vous avez tout récemment demandé à Mme la rectrice de l’académie de formuler de nouvelles propositions pour « favoriser une rentrée 2014 plus sereine et éviter des suppressions qui conduiraient à modifier les structures actuelles ». Les sept suppressions initiales seront réduites à trois. Dans ces conditions, ce projet de carte scolaire n’est pas pour autant satisfaisant : il menace des classes, voire des écoles, de fermeture. Qu’en est-il du soutien aux élèves en difficulté ou de la mise en oeuvre de l’accueil des plus petits et des situations de non-remplacement ?
Je me permets donc de vous interroger afin d’obtenir une répartition plus juste pour la prochaine rentrée. Dans quelle mesure le Gouvernement compte-il prendre en compte la spécificité des territoires ruraux comme celle du Gers en matière de répartition de ces moyens ? Dans quelle mesure un conventionnement de l’éducation nationale et des représentants locaux peut-il nous permettre de garantir à nos enfants une école de qualité ?
Madame la députée, comme vous l’avez rappelé, la priorité du Président de la République et de ce gouvernement, c’est la jeunesse et l’éducation, ce qui s’est traduit par une loi d’orientation, mais aussi de programmation puisqu’elle a prévu de créer 54 000 postes durant le quinquennat. Il ne peut donc pas y avoir de détérioration par rapport à ce que nous connaissons du service public de l’éducation. Partout il doit s’améliorer.
Nous faisons face, et la France doit s’en réjouir, à un afflux de population nouvelle. Notre démographie importante va à elle seule, cette année, absorber plusieurs milliers de postes. Imaginons ce que cela aurait été avec les 80 000 destructions en cinq ans de la majorité précédente !
Il nous faut maintenant trouver un équilibre, qui n’est pas simple, entre départements urbains et départements ruraux, et votre académie en est l’illustration. Les départements urbains, dont certains étaient en grève juste avant les vacances, connaissent une augmentation considérable de leurs effectifs. Ils font face à de très grandes difficultés sociales et économiques et nous devons y affecter des professeurs. C’est le cas de Toulouse, qui accueillera 3 000 enfants de plus à la prochaine rentrée. Et il est vrai qu’il y a eu, en fait de création de postes, une concentration des moyens sur ce secteur qui a pu apparaître injuste à l’ensemble des départements ruraux de Midi-Pyrénées.
J’ai donc demandé que l’on regarde à nouveau la carte scolaire telle qu’elle était prévue, et vous avez bien voulu rappeler que vous aviez été reçue au ministère, que le dialogue n’avait pas été interrompu et que nous avions déjà apporté certaines corrections.
Par ailleurs, et nous en avons déjà parlé ici lors d’une séance de questions au Gouvernement, je souhaite que le modèle que nous avons expérimenté pour la première fois dans le Cantal soit appliqué à l’ensemble des départements qui le souhaiteront, de telle sorte qu’il n’y ait pas de gestion chaotique de la carte scolaire chaque année, y compris avec des éléments d’irrationalité liés à des pressions, mais une stratégie éducative pour les départements ruraux – que je ne veux surtout pas opposer aux territoires urbains, car nous voyons bien que la fracture s’accroît, et c’est très préjudiciable pour l’unité du pays. Je souhaite donc que les uns et les autres s’engagent dans ce travail qui n’est pas simple, puisqu’il suppose un accord de tous les élus locaux, mais qui doit nous permettre de définir à terme des stratégies pour les territoires ruraux. C’est dans cet état d’esprit que nous allons maintenir, poursuivre, amplifier le dialogue et apporter dans la durée des solutions.
Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre réponse. Je n’oublie pas que les dix dernières années ont vu la suppression de quarante postes dans mon département. Je comprends d’autant mieux la complexité de votre tâche. Je tenais à vous assurer que tous les élus du département sont prêts à travailler avec l’éducation nationale pour une meilleure répartition des postes et pour que nos enfants puissent avoir accès, partout, à l’école de la République.
La parole est à Mme Isabelle Bruneau, pour exposer sa question, no 555, relative à la lutte contre la désertification médicale.
Madame la présidente, ma question, qui s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, concerne la désertification médicale et les inégalités entre les territoires qui en résultent.
Les difficultés ne résultent pas du nombre de médecins, mais de leur répartition sur le territoire. Un grand déséquilibre s’est créé entre les villes et certaines zones rurales ou certaines banlieues défavorisées. Or ce déséquilibre pose un véritable problème d’accès aux soins et par conséquent de santé publique.
La région Centre est fortement touchée par ce phénomène. En 2013, 2 200 médecins généralistes libéraux exerçaient dans cette région. Cela correspond à une densité standardisée de quatre-vingt-un médecins généralistes pour 100 000 habitants. Ces résultats sont très nettement en deçà de la moyenne nationale qui est de quatre-vingt-seize.
Le manque de médecin est encore plus préoccupant dans l’Indre puisque la densité standardisée est de soixante et onze à Issoudun et de soixante-huit sur le secteur de La Châtre et d’Argenton-sur-Creuse. Le canton d’Ardentes connaît actuellement une pénurie et n’aura pratiquement plus de médecin d’ici à 2015. La situation est donc urgente. Je suis fréquemment interpellée sur cette question des déserts médicaux. La moyenne d’âge des médecins étant de cinquante-cinq ans et un quart ayant plus de soixante ans et partiront à la retraite dans les deux ans qui viennent, le besoin en 2020 est estimé à quatre-vingt-onze nouveaux médecins pour ces secteurs.
Le Gouvernement a pris pleinement en compte ces difficultés et s’est fortement engagé dans la lutte contre les déserts médicaux, grâce notamment au Pacte territoire santé. Compte tenu de la situation très préoccupante dans certaines zones de l’Indre, je souhaiterais connaître les objectifs chiffrés de ce pacte, et surtout si la ministre envisage de prendre des mesures d’urgence afin d’enrayer ces inégalités et d’endiguer le sentiment d’isolement qui en résulte très fortement à l’heure actuelle.
Madame la députée, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de ma collègue Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, mais j’ai plaisir à vous répondre en son nom.
Comme vous l’expliquez fort justement dans votre question, ceux qui connaissent les territoires ruraux savent que l’enjeu n’est pas le nombre de médecins, mais le lieu de leur installation et donc leur répartition sur le territoire. Contrairement à ce que l’on entend souvent, ce n’est pas, en effet, le nombre de médecins qui est important, car notre pays se situe à cet égard dans la moyenne très haute de l’OCDE. Surtout, on en compte près de 1,5 fois plus par habitant qu’il y a vingt ans. Au 1er janvier 2013, la densité médicale métropolitaine en activité régulière était de près de 300 médecins pour 100 000 habitants. Ce chiffre est éloquent quand on le compare à celui que vous avez donné.
Il est nécessaire d’intervenir fortement afin de rééquilibrer cette inégalité territoriale qui conduit, avec en outre le vieillissement dont vous avez parlé, à des situations d’alerte pour les années à venir. C’est pourquoi le Pacte territoire santé, lancé par Mme Marisol Touraine il y a plus d’un an, est un des socles de la stratégie nationale de santé. De ce point de vue, les premiers résultats peuvent nous rendre plus ou moins optimistes, dans la mesure où déjà 180 praticiens territoriaux de médecine générale ont franchi le pas en 2013 en venant s’installer dans des territoires ruraux. Devant le succès du dispositif – c’est la première fois qu’un dispositif donne de tels résultats – 200 nouvelles installations sont prévues pour l’année 2014.
Dans le même temps, vous le savez, nous favorisons l’installation de futurs professionnels par le versement, pendant les études, d’une bourse en contrepartie de l’engagement à exercer son activité future dans un territoire manquant de professionnels de santé. Aujourd’hui, 591 étudiants ou internes en médecine ont signé ces contrats d’engagement de service public à destination des territoires dont la démographie médicale est faible. J’ajoute que le dispositif vient d’être élargi aux futurs chirurgiens-dentistes.
Enfin les structures d’exercices coordonnés maillent le territoire et la dynamique engagée montre bien que ce cadre d’exercice répond bien aux attentes de la profession, puisqu’entre 2012 et 2013 le nombre de maisons de santé a plus que doublé, passant de 174 à 370. En 2014, il y en aura plus de 600. En tant qu’ancien élu d’une circonscription rurale, je sais que c’est l’une des pistes qui permettent de répondre à cette situation.
Enfin, l’accès aux soins urgents en moins de trente minutes sera une réalité en 2014 pour un million de personnes supplémentaires, ce qui entraîne une évolution considérable du nombre de médecins correspondants du Samu, puisque nous passons de 150 en 2012, à 650 en 2014.
Ces premiers résultats sont le fruit de la mobilisation des professionnels de santé, des universités, des élus et des agences régionales de santé. Sans leur implication totale, on ne pourrait atteindre les objectifs fixés. Les résultats que je viens d’égrainer peuvent nous rendre raisonnablement optimistes, et à terme, si nous allons dans cette direction, nous apporterons une solution à ce déséquilibre territorial.
Je remercie M. le ministre pour ces précisions. J’insiste sur le sentiment d’urgence qui règne dans l’Indre, notamment avec le vieillissement démographique. Les habitants connaissent un véritable sentiment d’isolement.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour exposer sa question, no 562, relative à la lutte contre la maladie de Lyme.
Madame la présidente, ma question, qui s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, porte sur les conséquences de la maladie de Lyme.
Transmise par morsure de tique, la maladie de Lyme est une maladie infectieuse grave d’origine bactérienne, qui entraîne d’irréversibles dégâts organiques chez la personne infectée.
La maladie a été identifiée partout en France, à l’exception du littoral méditerranéen. Elle est très présente dans les régions boisées et humides – c’est le cas de ma circonscription, et je rencontre beaucoup de gens atteints de cette maladie.
L’Institut Pasteur estime que 12 000 à 15 000 personnes sont touchées chaque année en France. Le diagnostic de la maladie de Lyme est complexe, coûteux à réaliser et rend cette maladie relativement peu connue des professionnels de santé.
La méconnaissance du grand public et même de certains professionnels de santé est en partie due au classement de cette maladie comme « rare », malgré son caractère endémique attesté.
Cette maladie est d’autant plus insidieuse qu’elle peut se réveiller des mois, voire des années après la piqûre de l’acarien. Les protocoles de détection et de soins de cette infection – qui, non traitée, évolue vers l’aggravation chronique – sont actuellement obsolètes et à l’origine de faux diagnostics négatifs qui touchent des milliers de patients.
Quelles mesures entendez-vous prendre pour l’information, la prévention et le traitement de cette maladie ? Pourrait-on envisager que la maladie de Lyme soit reconnue « grande cause nationale » de l’année 2015 ?
Madame la députée Marie-Christine Dalloz, je vous réponds au nom de ma collègue Marisol Touraine, dont je vous prie de bien vouloir excuser l’absence.
La borréliose de Lyme est une maladie infectieuse bactérienne, transmise comme vous l’avez rappelé par les tiques, et dont l’évolution peut être favorable lorsqu’elle est diagnostiquée et traitée précocement.
Cette maladie est décrite en milieu rural depuis sa ré-émergence en 1975 aux États-Unis. La surveillance dont elle fait l’objet depuis plusieurs années, chez l’homme comme chez l’animal, met en évidence une extension géographique progressive des zones à risque dans les pays tempérés, c’est-à-dire des zones où les tiques sont infectées et susceptibles de transmettre cette maladie.
En France, cette maladie peut être contractée sur tout le territoire, sauf sur le littoral méditerranéen, milieu peu favorable à la survie des tiques.
La surveillance épidémiologique de la borréliose de Lyme est réalisée sous la coordination de l’Institut de veille sanitaire par plusieurs réseaux de médecins dans les zones sensibles – Alsace, Franche-Comté, Limousin, Aquitaine – et par des investigations sur les tiques.
Cette surveillance montre une diversité géographique des incidences régionales, plus élevée dans les régions de l’est et du centre de le France.
Sur la démarche de prévention, une information spécifique est apportée aux populations résidant dans les régions exposées et en particulier aux personnels des chantiers forestiers. Une brochure a été éditée par la Mutualité sociale agricole à destination du grand public et elle insiste sur l’importance des mesures de prévention.
La symptomatologie, le diagnostic et le traitement de la maladie de Lyme sont bien documentés en cas de morsure récente, et de symptômes nets et objectifs : éruption, fièvre, douleurs articulaires. Une conférence de consensus, conduite en 2006, en a précisé les points principaux.
Une information à destination des professionnels de santé a été élaborée en 2010 par le Haut Comité de santé publique. Des actions de formation continue, impulsées localement par les unions régionales des médecins libéraux, sont adaptées aux spécificités régionales.
Des situations de morsure ancienne et de symptômes non spécifiques ont suscité des questionnements et malheureusement des controverses quant aux approches diagnostiques et thérapeutiques.
C’est dans ce contexte que ma collègue Marisol Touraine a saisi le Haut Conseil de la santé publique pour disposer d’un état des connaissances actualisé sur le sujet, à partir duquel nous aurons à prendre des décisions. Ce rapport devrait sortir dans les prochaines semaines et nous espérons qu’il nous permettra d’engager des actions énergiques.
Des mesures individuelles de prévention devront être prises et il faudra prévoir une prise en charge précoce et adaptée de la maladie de Lyme.
Merci pour cette réponse. Je note qu’il y a une prise de conscience et une surveillance de cette maladie comme de ses conséquences au plan national. Sur le diagnostic, il y a une réflexion aboutie. Il faudra vraiment que les services de la ministre de la santé s’intéressent à la thérapie. Je rencontre des personnes qui étaient socialement et professionnellement intégrées avant la piqûre et qui, à cause d’une détection tardive de la maladie, sont aujourd’hui en inactivité totale, en invalidité. Ces malades sont des gens normaux : ils demandent légitimement à être soignés, au même titre que les autres patients. Je crois que c’est sur ce point qu’il faudra insister auprès de Mme la ministre, pour qu’on arrive, dans les années à venir, à trouver le bon protocole de soins et surtout à le diffuser auprès de ces patients.
La parole est à M. Patrice Carvalho, pour exposer sa question, no 545, relative à l’inscription du paracétamol au tableau des génériques.
J’avais interrogé Mme la ministre de la santé, le 22 janvier dernier, sur l’intention de l’Agence nationale de sécurité du médicament d’inscrire le paracétamol au tableau des génériques. Mille emplois directs sont en jeu chez Sanofi et BMS-Upsa.
La réponse apportée par votre collègue, Mme Dominique Bertinotti, ne m’a guère satisfait, puisqu’elle laissait entendre que la substitution de génériques du Doliprane, du Dafalgan et de l’Efferalgan bénéficierait aux patients et à la sécurité sociale.
Or, il n’en est rien, puisque la différence actuelle de prix n’est que de cinq centimes par boîte : 1,95 euro contre 1,90 entre les produits de Sanofi ou d’Upsa et les génériques. De plus, à compter du 1er janvier 2015, tous les médicaments au paracétamol seront à 1,90 euro.
Mercredi dernier, ma collègue Lucette Lousteau, députée du Lot-et-Garonne, concernée par le site de BMS-Upsa à Agen qui emploie plusieurs centaines de salariés, a également interpellé le Gouvernement, dont la position semble avoir évolué, puisqu’il a annoncé qu’aucune décision n’interviendrait avant 2015 et que sa volonté était de maintenir des sites de production de médicaments sur notre territoire.
Mme la ministre déléguée ajoutait qu’elle souhaitait une baisse des prix. Si l’industrie pharmaceutique accepte de rogner ses marges, ce n’est pas moi qui m’en plaindrai ; néanmoins, il faut éviter un écueil : l’ouverture d’une guerre des prix entre l’industrie des génériques, Sanofi et BMS-Upsa.
Si un tel affrontement avait lieu, nous ne pouvons ignorer que la variable d’ajustement serait le coût du travail, avec le risque d’une délocalisation vers les pays à faible coût de main-d’oeuvre. Déjà, le principe actif est intégralement importé d’Asie.
Second écueil : la baisse de la qualité du médicament. L’ANSM a ouvert une boîte de Pandore. Personne n’a rien à y gagner et nous avons tout à y perdre. Nous risquons demain de devoir importer les médicaments aujourd’hui fabriqués en France. La facture économique, sociale et industrielle serait lourde : comment comptez-vous stopper ce processus dangereux ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des Français de l’étranger.
Je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Marisol Touraine. Je vous remercie pour votre question qui touche à la fois à la maîtrise des dépenses de santé et au maintien de capacités de production de médicaments sur notre territoire, et donc à l’emploi.
Dans ce dossier ouvert en décembre par l’Agence nationale de sécurité sanitaire du médicament, nous recherchons une solution qui concilie le développement des médicaments génériques et le temps d’adaptation nécessaire des outils industriels. Pour le dire d’emblée, le paracétamol est une molécule efficace. C’est pourquoi son remboursement par la sécurité sociale doit être maintenu, lorsqu’il est prescrit par le médecin. Chacun, s’il le souhaite, peut également aller à la pharmacie l’acheter sans ordonnance.
C’est une vieille molécule qui ne coûte pas cher à produire, et pourtant son prix n’a pas bougé depuis 2005, quand, dans le même temps, de nombreux médicaments plus récents ont vu leur prix baisser.
Mais, la ministre des affaires sociales et de la santé le sait, les entreprises ont besoin de visibilité et de temps pour s’adapter. Elle souhaite donc qu’une baisse des prix, dans le contexte général des économies demandées au médicament, intervienne en début d’année 2015. Cela relève de la compétence du comité économique des produits de santé.
Faut-il aller au-delà et inscrire le paracétamol dans le répertoire des génériques ? À ce stade, la réponse dépend des résultats de l’analyse des observations transmises le 6 février dernier par les trente-six laboratoires consultés par l’ANSM. C’est un travail complexe, qu’il faut conduire avec soin, compte tenu des enjeux de santé publique que cela représente, mais aussi de l’inquiétude des salariés et des élus concernés.
Monsieur le député, le Président de la République a demandé qu’on propose des économies sur l’assurance maladie et nous y travaillons. C’est tout naturellement dans le cadre du Conseil stratégique de la dépense publique que la question du développement des génériques sera examinée sérieusement, comme pour l’ensemble des dépenses, et que des décisions seront annoncées.
Merci, madame la ministre déléguée, pour la réponse. Simplement, pour quelques centimes d’économies, ne perdons pas de vue des milliers d’emplois : ce sont des gens qui cotisent à la Sécu, qui paient des impôts, qui font marcher le système, et cela n’est pas du tout pris en compte par M. le Président de la République quand il parle de faire des économies sur la santé.
La parole est à M. Jean-Louis Christ, pour exposer sa question, no 575, relative aux conséquences de la fermeture d’établissement de soins dans les vallées de Munster, de Kaysersberg et de la Bruche.
L’Union pour la gestion des établissements des caisses d’assurance maladie d’Alsace a procédé, au 1er janvier 2011, à la fermeture des centres de soins de Salem et du col du Hantz, sis respectivement sur les bans des communes de Fréland et de Saulxures, et au 1er janvier 2012, à la fermeture du centre de soins de l’Altenberg, établi sur le ban de la commune de Stosswihr.
Ces fermetures ont été motivées par la nécessité de réorganiser l’offre de soins entre les différents établissements gérés par l’UGECAM : rapprochement des centres de soins des plateaux techniques situés dans les grandes villes de la plaine d’Alsace et exigences liées au recrutement des personnels de santé. Le repli de ces activités vers la plaine a renforcé quelque peu le sentiment d’abandon de ces zones de fond de vallée. Il a laissé des friches médicales, ce qui pose des problèmes graves liés à la dégradation des bâtiments.
En dépit des efforts déployés par les propriétaires, les services de l’État et les élus, ces sites n’ont toujours pas trouvé de repreneur. Leur potentiel, notamment sur le plan touristique, compte tenu de leur emplacement exceptionnel, est pourtant réel.
Il devrait constituer un atout pour le développement d’activités nouvelles. Néanmoins, la reconversion de ces friches reste un défi pour ces territoires de montagne. Elle symbolise à elle seule les difficultés auxquelles sont confrontées les zones de montagne dans leur développement économique, en raison de leur enclavement et de leur éloignement des grands centres urbains.
Et pourtant, notre pays ne saurait admettre, dans une politique ambitieuse d’aménagement du territoire, que subsistent deux France : celle des villes, en pleine expansion sur le plan technologique et numérique, sur le plan des services, de la culture, de la recherche et de l’enseignement, et celle des campagnes, en proie à une désertification inéluctable.
Dans la mesure où l’égalité entre les territoires est affichée comme l’une des priorités du Gouvernement, je vous demande quelles actions concrètes vous entendez mettre en oeuvre pour, dans ce cas d’espèce, faciliter et accompagner la reconversion des sites de l’Altenberg, du Salem et du col du Hantz, et de façon plus générale, pour promouvoir le développement économique des zones de montagne.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des Français de l’étranger.
Monsieur le député, je vous prie d’abord d’excuser l’absence de Cécile Duflot.
Trois établissements de l’UGECAM d’Alsace ont effectivement été fermés en 2010 et 2011 et leurs capacités intégralement redéployées au plus près de la population.
Situés sur les crêtes vosgiennes, et pour deux d’entre eux dans des zones montagneuses isolées, leur reconversion s’annonce toutefois difficile, du fait de leur éloignement des grands axes routiers et des bassins de vie.
Comme vous le savez, l’UGECAM a entrepris des démarches pour céder ces bâtiments. Plusieurs mandats de vente pour les trois sites ont été signés. Des contacts ont été pris auprès d’opérateurs immobiliers, auprès des communautés de communes, auprès des ambassades de pays susceptibles d’investir en France, auprès d’opérateurs privés du tourisme et auprès d’organismes publics dans les domaines sanitaire, médico-social et judiciaire. Ces démarches n’ont toutefois pas abouti pour l’instant, mais l’État entend maintenir ses efforts.
Le Gouvernement a par ailleurs conscience des difficultés particulières de développement économique qui peuvent être celles des zones de montagne, en raison de leur isolement ou des contraintes naturelles. C’est pourquoi les zones de montagne bénéficient, dans de nombreux domaines, d’un accompagnement spécifique de l’État. Par exemple, le plan « Très haut débit », lancé en février 2013, prévoit des taux de subvention de l’État plus importants pour les zones peu denses, caractéristique commune à de nombreux territoires de montagne. Le plan prévoit aussi le subventionnement des solutions satellitaires, possibilité de raccordement en très haut débit qui est parfois la plus simple pour les territoires de montagne isolés.
De manière plus générale, le Gouvernement porte une attention particulière et soutenue aux territoires qui subissent des mutations importantes et il s’attache à mettre en oeuvre des politiques qui visent à renforcer le développement économique de tous les territoires.
C’est d’ailleurs pour agir de manière plus transversale et mieux coordonnée que l’État a décidé de repenser ses outils d’intervention territoriale, via la création du Commissariat général à l’égalité des territoires, qui sera effective au printemps 2014.
Le CGET s’inscrira dans une démarche interministérielle qui permettra d’actionner plusieurs leviers sectoriels à plusieurs niveaux d’action. Ainsi, la spécificité de certains territoires, comme les zones de montagne, ou les difficultés particulières de certains bassins de vie, comme celles que rencontrent les villes sur lesquelles vous interrogez le Gouvernement, pourront être mieux prises en compte et traitées grâce à la création du CGET.
Je regrette infiniment que l’UGECAM ait fermé ces établissements sans avoir vraiment eu le souci de leur reconversion préalable. Cela aurait dû être considéré comme fondamental. On voit, vous l’avez évoqué à l’instant, que malgré la mobilisation des élus, des uns et des autres, ces établissements resteront des friches, et je ne peux que le déplorer. Les zones de montagne, les zones dans les fonds de vallée, en verront, encore une fois, leur sentiment d’abandon renforcé. La réponse que vous avez apportée ne les satisfera pas. Désolé.
La parole est à M. Lionnel Luca, pour exposer sa question, no 571, relative à la situation de la décharge de la Glacière à Villeneuve-Loubet.
Ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales.
La projection, en octobre dernier, du film Super Trash, de Martin Esposito, qui a vécu trois ans sur le site de la Glacière, à Villeneuve-Loubet, a révélé des pratiques illégales et dangereuses pour la santé publique du fait de la proximité des nappes phréatiques.
À ma demande, le ministre de l’environnement a diligenté une enquête administrative sur ces dysfonctionnements. J’ai été par ailleurs alerté par des médecins exerçant dans les communes de Villeneuve-Loubet et de Cagnes-sur-Mer, qui ont constaté que leurs patients locaux présentaient certaines pathologies en plus grand nombre que d’autres patients : problèmes respiratoires, troubles digestifs, leucémies, cancers pulmonaires, digestifs ou prostatiques.
Il me paraît donc indispensable que l’Institut de veille sanitaire évalue les risques encourus par les populations riveraines de la décharge, qui ont subi pendant trente ans une exposition aux polluants de deux décharges successives : le Jas de Madame et la Glacière. Ils continuent surtout de subir la post-exploitation du site : actuellement, des torchères brûlent les biogaz et une usine, le BGVAP, traite les lixiviats ; or les fumées issues des torchères et de l’usine contiennent des poussières de combustion, du monoxyde de carbone, de la dioxine de soufre, de l’acide chlorhydrique, de l’acide fluoridrique, des oxydes d’azote, du benzène… Toutes ces substances ne peuvent pas ne pas avoir de répercussions sur la santé des populations. Celles-ci ne comprendraient donc pas que l’État s’en désintéresse et ne procède pas à une enquête épidémiologique pour en constater les effets.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des Français de l’étranger.
Monsieur Lionnel Luca, tout d’abord, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Marisol Touraine.
Le film Super Trash, tourné au coeur de la Glacière, soulève en effet des questions quant au respect des obligations réglementaires par l’exploitant. Les témoignages révèlent des infractions qui interrogent quant à leur impact potentiel sur l’environnement et sur la santé, comme vous venez de le souligner. Le contrôle par les services de l’État a donc été renforcé. Je compléterai donc ici les éléments de réponse que vous avait apportés M. Philippe Martin, le 19 novembre 2013, par des informations sur la qualité de l’eau et sur l’impact sur la santé des populations riveraines.
La qualité de l’eau du robinet est contrôlée par l’agence régionale de santé – l’ARS – de Provence-Alpes-Côte-d’Azur, et fait l’objet d’une attention particulière depuis l’ouverture du site de la Glacière. Les résultats du suivi de la qualité des eaux des deux captages desservant Villeneuve-Loubet et de celui desservant le bord de mer indiquent une eau de bonne qualité, conforme aux valeurs réglementaires. À la demande de la commission locale d’information et de suivi du site, une surveillance spécifique du plomb et de l’arsenic a été mise en place sur le captage des Ferrayonnes. L’ARS n’a décelé aucune anomalie. Ces résultats, comme ceux de toutes les communes de France, sont accessibles à tous sur le site du ministère des affaires sociales et de la santé.
S’agissant de l’impact éventuel sur la santé des riverains, les conclusions d’une étude d’évaluation des risques commanditée après des nuisances olfactives ressenties par la population, présentées en mai 2011, montrent que « dans les conditions d’études retenues, l’ensemble des résultats obtenus permet d’écarter avec une certaine marge de sécurité la survenue d’effets sanitaires liés à l’exploitation du site ». La décision de mettre en place une enquête épidémiologique à l’échelon d’un site doit être rigoureusement évaluée car une telle étude se heurte à de nombreuses difficultés méthodologiques. En effet, l’effectif limité de la population susceptible d’être exposée ne permet pas d’atteindre la puissance statistique nécessaire pour mettre en évidence des effets sur la santé. Il est donc difficile de caractériser précisément l’exposition de la population. Enfin, on ne peut écarter la possibilité de facteurs de confusion. Le ministère des affaires sociales et de la santé rejoint les conclusions de l’ARS PACA qui, au vu des éléments objectifs dont elle dispose, estime que les conditions de lancement d’une telle étude sur site ne sont pas encore réunies.
Je prends note de la réponse de Mme la ministre, mais elle ne me satisfait pas totalement dans la mesure où argumenter sur le peu de fiabilité de statistiques éventuelles, c’est oublier que la santé publique n’est malheureusement pas une question de statistiques mais de réalité humaine. Par conséquent si, par malheur, dans les mois ou les années qui viennent, il s’avère que l’on constate certaines maladies en plus grand nombre encore qu’aujourd’hui, la responsabilité de l’État serait engagée.
J’invite malgré tout la ministre des affaires sociales à prendre, avec l’ARS, attache auprès des médecins qui sont sur le territoire de Villeneuve-Loubet et sur celui de Cagnes-sur-Mer, et qui ont eu à en connaître puisque ce sont eux qui m’en ont fait part, avec un certain trouble, constatant que leurs patients, selon la commune où ils résidaient, n’avaient pas les mêmes difficultés de santé.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour exposer sa question, no 560, relative à l’orientation professionnelle des personnes handicapées en Bretagne.
Madame la ministre, j’aimerais évoquer avec vous aujourd’hui les difficultés d’orientation des personnes handicapées au sein de la région Bretagne.
Les maisons départementales des personnes handicapées – les MDPH – confient le soin aux antennes locales de l’ADAPT, l’association pour l’insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées, d’organiser des stages de pré-orientation pour les personnes aspirant à exercer une activité professionnelle. Cette association à but non lucratif évalue à ce titre chaque année 12 000 personnes au sein de la centaine d’établissements qu’elle possède à travers l’Hexagone. Malgré l’investissement des personnels, les délais d’attente pour les stages de pré-orientation s’élèvent à près d’une année, notamment dans le département d’Ille-et-Vilaine dont je suis l’élu. Cette inadéquation entre l’offre et la demande est liée à l’existence d’un nombre de places limité au sein de chaque établissement. L’augmentation du nombre de ces places est assujettie à l’agrément de la DIRECCTE, qui subventionne leur fonctionnement annuel avec l’AFPA et la caisse primaire d’assurance maladie.
Je souhaiterais donc savoir si le Gouvernement entend donner un coup de pouce afin d’autoriser, en Ille-et-Vilaine et plus globalement en Bretagne, la création d’un nombre plus important de places, ne serait-ce qu’à titre transitoire. Je rappelle que la DIRECCTE a financé, au tournant des années 2012-2013, un module d’évaluation rapide, dit « Perspectives », qui a fait ses preuves. Je vous remercie par avance, madame la ministre, pour votre réponse.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des Français de l’étranger.
Monsieur Thierry Benoit, je vous prie au préalable de bien vouloir excuser Mme Marie-Arlette Carlotti qui, au moment où je vous parle, est en concertation sur les mesures que prendra le Gouvernement pour insuffler une nouvelle dynamique à la mise en accessibilité.
Votre question porte sur la pré-orientation des personnes handicapées, tout particulièrement en Bretagne. Ainsi que vous le soulignez, l’ADAPT a largement contribué au développement de la pré-orientation dans cette région qui compte cinq établissements à cet effet, disposant au total d’environ 110 places, ce qui situe la Bretagne à un très bon rang au niveau national. Pour mieux répondre aux demandes des personnes et de la MDPH d’Ille-et-Vilaine, l’ARS a souhaité que ces centres de pré-orientation, les CPO, conduisent des actions plus coordonnées autour de Rennes.
Le comité interministériel du handicap, réuni en septembre dernier sous la présidence du Premier ministre, a tout particulièrement mis l’accent sur l’inclusion des personnes handicapées. Il est notamment essentiel que les adultes qui sont confrontés à une ou à plusieurs déficiences ayant des conséquences significatives sur leur insertion sociale et professionnelle puissent bénéficier de prestations adaptées à leurs besoins. À cet égard, je rappelle que le dispositif de pré-orientation est constitué à ce jour de quarante-huit CPO présents sur quarante et un départements de métropole et d’outre-mer.
Au fil du temps, les prestations des CPO ont évolué et concernent aujourd’hui une population plus large. Cela a conduit à mettre en place dans certains territoires des pré-orientations spécialisées, en particulier pour les personnes qui ont des problèmes de santé mentale. C’est la même nécessité de répondre aux besoins spécifiques de certaines personnes handicapées qui est à l’origine de la création de trente et une unités d’évaluation, de réentraînement et d’orientation sociale et socioprofessionnelle dédiées spécifiquement aux personnes cérébro-lésées. Ces structures relèvent également de la compétence des ARS et d’un financement par l’assurance maladie dans le cadre d’une dotation globale.
Le Gouvernement partage votre préoccupation, monsieur le député, que soit garantie une égalité de traitement sur le territoire mais aussi pour l’ensemble des handicaps. Le ministère chargé des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion participe donc pleinement aux travaux en cours depuis le printemps 2013, lesquels portent sur l’analyse des dispositifs de pré-orientation au regard des besoins des personnes handicapées. Ces travaux, dont les conclusions seront disponibles au début de l’été prochain, doivent contribuer à une meilleure connaissance de la localisation de l’offre et de son accessibilité aux différentes personnes handicapées, puis à l’identification des évolutions souhaitables des prestations de pré-orientation afin de mieux répondre aux besoins des personnes et aux attentes des MDPH.
Monsieur le député, ces questions, vous le savez, sont au coeur du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale qui a été adopté en première lecture à l’Assemblée nationale et au Sénat. Ce texte élargit notamment le champ de compétences de la région à la formation professionnelle des personnes handicapées, dans le cadre unifié d’un service public régional de la formation professionnelle auxquels participeront les CPO au titre du programme régional.
Je voudrais malgré tout remercier Mme la ministre pour sa réponse polie… et pour m’avoir expliqué que le Gouvernement partage nos préoccupations.
Madame la ministre, sous l’ancien gouvernement, j’entendais souvent les membres de la majorité actuelle fustiger le manque d’objectifs et le manque d’ambition. Je ne veux pas ici polémiquer, mais dire seulement que les années s’écoulent et que les temps restent difficiles. Vous ferez part à la ministre qui est en responsabilité de ces dossiers de mon souhait que, dans les meilleurs délais, nous ayons l’assurance d’une ambition et d’objectifs chiffrés à atteindre, et surtout que l’on puisse définir avec l’ensemble des partenaires, notamment la DIRECCTE, ainsi que les financeurs et les associations d’insertion professionnelle, vers quels objectifs on tend, et savoir quels moyens l’on compte donner à ces associations pour faciliter l’orientation professionnelle des personnes handicapées. J’espère donc que d’ici juin, la ministre nous proposera des objectifs et une ambition clairement déterminés.
La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour exposer sa question, no 563, relative au projet de fermeture de l’ESAT de la Chesnaie à Craon.
Ma question s’adresse à Mme la ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Le projet de fermeture de l’ESAT – établissement et service d’aide par le travail – de la Chesnaie à Craon, chef-lieu de canton du sud-ouest mayennais, ne cesse d’inquiéter. Elle devrait intervenir fin décembre 2014 alors que cette structure fonctionne parfaitement et qu’un projet d’agrandissement était prévu – j’en ai même vu la maquette. Cette fermeture, décidée sans concertation, préoccupe légitimement les travailleurs handicapés et leurs parents, prévenus tardivement, ainsi que les entreprises locales clientes de l’ESAT. En effet, cette décision occasionnerait le transfert des travailleurs handicapés vers les structures de Laval et de Château-Gontier, et outre que ces déplacements perturberaient ces travailleurs et leur feraient perdre leurs repères, il se trouve que les structures qui devraient les accueillir manquent déjà de places.
Je vous demande donc de revenir sur cette décision préjudiciable à ces travailleurs handicapés ainsi qu’à leurs familles, et aussi à l’économie locale dans ce secteur de ma circonscription.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des Français de l’étranger.
Monsieur le député Guillaume Chevrollier, tout d’abord je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme Carlotti.
Vous avez appelé l’attention de la ministre sur l’inquiétude exprimée par les familles des travailleurs handicapés de l’ESAT de Craon dont la fermeture est programmée.
La fermeture de cet établissement répond à plusieurs objectifs. Il s’agit de redéployer des capacités d’accueil en ESAT vers les territoires moins bien pourvus, d’adapter les réponses aux besoins des travailleurs handicapés et de permettre à l’Association départementale des amis et parents de personnes handicapées mentales de retrouver l’équilibre financier pour les ESAT dont elle assure la gestion.
La Mayenne bénéficie du taux d’équipement en ESAT le plus élevé de la région avec 38 % de travailleurs âgés de plus de quarante-cinq ans, ce qui représente la proportion la plus élevée.
L’enjeu pour la Mayenne est le développement de réponses alternatives à l’ESAT, adaptées aux besoins des travailleurs vieillissants confrontés à la fatigabilité au travail, telles que l’accueil de jour. Les territoires ligériens moins bien dotés bénéficieront de la redistribution de ces places.
L’Adapei est confrontée à un déficit chronique de ses ESAT qui a atteint 220 000 euros en 2012. Elle doit retrouver un équilibre financier, notamment au travers d’une réduction de la capacité d’accueil qui permettra une revalorisation du financement à la place.
Dans le cadre du plan de retour à l’équilibre signé en décembre 2013 avec l’Adapei, l’Agence régionale de santé apportera une contribution financière exceptionnelle.
L’ARS a demandé à l’Adapei une réduction de sa capacité globale d’ESAT de quarante places, lui laissant le soin d’identifier le scénario le plus pertinent. La fermeture de l’ESAT de Craon a été retenue, en raison d’une capacité trop faible générant un déficit structurel, de la vétusté de la structure, ainsi que des faibles amplitudes horaires dédiées à l’accompagnement social.
Le sud de la Mayenne présente un taux d’équipement bien au-dessus de la moyenne départementale, et les besoins du bassin de vie, après fermeture de l’ESAT de Craon, resteront couverts en raison d’une forte proximité de l’ESAT de la Selle-Craonnaise, qui se situe à huit kilomètres, et de l’ESAT Adapei de Château-Gontier. Sur les quarante-trois travailleurs de l’ESAT de Craon, vingt habitent Château-Gontier.
L’ARS apporte son soutien à l’Adapei dans la mise en place de cette nouvelle organisation ; elle a ainsi réuni les parties prenantes le 27 janvier 2014, afin de s’assurer des bonnes conditions de relocalisation des travailleurs et de leur accompagnement.
Les travailleurs visitent actuellement les ESAT et expriment leurs souhaits en termes de lieux professionnels, de type d’activité, d’hébergement, de transport et d’intégration sociale. L’association travaille sur l’organisation des transports et les conditions d’accueil.
Une prochaine réunion de suivi est programmée en mai 2014 avec les différents partenaires pour s’assurer des bonnes conditions de l’accompagnement proposé aux travailleurs. Une autre réunion de suivi pourrait être envisagée en septembre. Ces réunions devraient permettre de répondre à l’inquiétude des familles.
Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Elle ne me donne pas satisfaction, mais je voudrais être sûr que le Gouvernement assurera le suivi de cette fermeture et l’accompagnement des travailleurs handicapés, notamment en ce qui concerne les problèmes de transport de ceux qui habitent à Craon et qui vont devoir se rendre dans les communes environnantes.
La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour exposer sa question, no 574, relative à l’accueil des personnes âgées dépendantes en Haute-Savoie.
Ma question s’adresse à la ministre chargée des personnes âgées et de l’autonomie.
Je souhaiterais en effet relayer les inquiétudes du président du conseil général et de l’ensemble des parlementaires de la Haute-Savoie concernant l’accueil des personnes âgées dépendantes.
L’engagement du département et de l’État s’est traduit par une offre de services significative avec la création de 300 places en accueil de jour et en hébergement temporaire pour encourager le maintien à domicile, l’installation de plus de 1 200 lits d’hébergement permanent et près de 400 nouveaux lits autorisés et ouverts progressivement.
Malgré cette politique volontariste, le taux d’équipement de notre territoire demeure inférieur aux moyennes régionales et nationales et ce territoire a d’ailleurs été classé « déficitaire » par le projet régional de santé Rhône-Alpes. La conséquence est la réapparition de listes d’attente importantes, en particulier dans ma circonscription.
Cette situation préoccupante risque de s’aggraver, car les besoins futurs demeurent importants du fait de la vitalité démographique de notre département qui attire plus de 10 000 habitants supplémentaires par an, dont de nombreuses personnes âgées.
Ainsi, au regard des projections statistiques pour 2013-2017, près de 200 lits d’EHPAD supplémentaires seraient nécessaires pour faire face au vieillissement annoncé de la population et apporter une réponse médico-sociale adaptée.
Or le programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie, tel qu’il est prévu, ne correspond pas à cette évolution et doit donc être réexaminé pour envisager une programmation cohérente avec la réalité des besoins.
À ce problème s’ajoute l’impérieuse nécessité de conforter les services d’aide à domicile, sur lesquels pèsent de plus en plus lourdement le manque de places en EHPAD mais également la pénurie de personnels médico-sociaux et soignants qualifiés, attirés par la Suisse voisine.
Par conséquent, alors qu’un projet de loi sur la dépendance est annoncé, je souhaiterais connaître les réponses concrètes que le Gouvernement entend apporter pour répondre aux enjeux liés au vieillissement et plus spécifiquement dans le département de la Haute-Savoie.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des Français de l’étranger.
Madame la député Virginie Duby-Muller, je vous prie d’excuser l’absence de Michèle Delaunay que vous interrogez sur la situation du département de Haute-Savoie dans le domaine de la prise en charge des personnes âgées dépendantes, s’agissant du taux d’équipement des établissements et services mais également de la pénurie de personnels.
Je tiens à vous apporter les précisions suivantes.
Le schéma régional d’organisation sanitaire et médico-sociale de la région Rhône-Alpes, élaboré pour les années 2012-2017 dresse le bilan des équipements médico-sociaux. Le SROMS comporte également un volet spécifique relatif au recrutement des professionnels de santé et paramédicaux.
Tout d’abord, le volet "personnes âgées" a été construit en partenariat étroit avec l’ensemble des conseils généraux, à partir d’une réflexion dont l’objectif est d’améliorer la fluidité du parcours de santé de la population en situation de vieillissement.
Le taux d’équipement régional en hébergement complet dédié à des personnes âgées dépendantes et semi-dépendantes est nettement supérieur en Rhône-Alpes à la moyenne nationale.
Les taux d’équipement en EHPAD, entre et à l’intérieur des territoires de santé, sont disparates. À l’inverse, les capacités en services de soins infirmiers à domicile sont moins bien développées dans la région. Les taux d’équipement en accueil de jour et en hébergement temporaire sont dans la moyenne nationale ou très proches de celle-ci.
Venons-en aux difficultés de recrutement de professionnels qualifiés que rencontrent les établissements et les services pour personnes âgées. L’arc alpin est particulièrement concerné : des EHPAD sont partiellement ouverts ou en attente d’ouverture faute de personnel, des fermetures partielles ont d’ailleurs été prononcées pour assurer la sécurité des résidents pour le même motif.
Pour autant, ce constat est général, dressé dans chacun des départements. Le travail auprès des personnes âgées est peu attractif et subit la concurrence avec le secteur sanitaire.
La valorisation des métiers, l’amélioration des conditions de travail, l’accompagnement des parcours professionnels représentent un enjeu pour le développement nécessaire à ce secteur, source d’emplois. L’offre de prise en charge est ainsi fragilisée dans son organisation et son fonctionnement.
L’adéquation entre les ressources humaines disponibles et les besoins de la population est un des enjeux fondamentaux des années à venir. L’ARS, en lançant le projet sur les parcours professionnels et les coopérations dans les métiers de la dépendance, affirme sa volonté de travailler avec ses partenaires régionaux, départementaux et avec le national sur la recherche de réponses adaptées.
Un effort certain de formation doit être réalisé, ces formations pouvant être facilitées par des coopérations avec les professionnels des réseaux de santé et les établissements sanitaires.
Enfin, dans le cadre des travaux de préparation de la loi sur l’autonomie, il est prévu un plan pour les métiers de l’autonomie qui a vocation à mettre en valeur une politique globale cohérente, même si la déclinaison opérationnelle des mesures s’inscrit dans un autre dispositif, comme par exemple les états généraux du travail social.
Cette mise en valeur doit contribuer à la lisibilité et ainsi à rendre plus attractifs les métiers concernés qui peuvent relever de champs différents. Les principaux objectifs de ce plan porteront notamment sur le renforcement de l’attractivité des métiers de l’autonomie, la formation et les pratiques professionnelles.
Merci, madame la ministre, pour ces éléments. J’espère en tout cas que vous prendrez en compte les arguments que je vous ai donnés, puisque nous avons une responsabilité en Haute-Savoie du fait de l’attractivité du département, pour anticiper ces besoins futurs.
J’en profite également pour rendre hommage au travail remarquable effectué par les personnels soignants en EHPAD ou par les aides à domicile en milieu rural, au service de nos aînés.
La parole est à M. Jean-Pierre Barbier, pour exposer sa question, no 565, relative à la reconstruction du centre hospitalier de Voiron.
Ma question vise à appeler l’attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur le projet de reconstruction du centre hospitalier de Voiron, dans le département de l’Isère.
L’établissement actuel est dans un état de vieillissement qui ne lui permet plus de satisfaire aux exigences d’une politique de santé ambitieuse et de qualité pour le bassin de santé de près de 150 000 habitants qu’il irrigue et qui dépasse largement le pays voironnais pour intégrer une partie de la Bièvre, de la Valdaine et du sud de Grésivaudan.
À l’ordre du jour depuis plus de dix ans, ce projet de reconstruction de l’établissement est indispensable, et il est en instruction dans le cadre d’un partenariat public-privé avec la clinique de Chartreuse.
À de nombreuses reprises, des exigences chaque fois satisfaites ont été posées concernant la réduction de la surface totale du projet et la mutualisation de certains services tels que la biologie, la restauration et la stérilisation, occasionnant la réprobation et des manifestations d’une partie significative du personnel dont le professionnalisme – je tiens à le souligner – permet néanmoins d’assurer une qualité de soins irréprochable.
Depuis des années – et particulièrement au cours des derniers mois – des informations contradictoires se bousculent quant au financement du projet par l’État, sans que rien n’ait été définitivement acquis.
Les acteurs locaux s’interrogent sur les suites à donner à l’éligibilité du dossier qu’aurait déclarée le comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins hospitaliers, en décembre 2013.
Dans un courrier daté du 31 décembre 2012, Mme Marisol Touraine m’écrit : « Je vous confirme à nouveau tout l’intérêt que je porte à ce projet ambitieux pour notre secteur public hospitalier. » Après ces mots, nous attendons des actes. Tous les établissements environnants – Bourgoin-Jallieu, Valence, Chambéry, Grenoble – sont rénovés et évoluent, ce dont je me réjouis. Seul l’hôpital de Voiron reste à quai.
Les inquiétudes quant à l’issue finale et son abandon sont réelles et de plus en plus fortes. Pourtant, il y a une réelle urgence à avancer sur ce dossier car cet hôpital répond à de vrais besoins : 32 000 passages par an, 5 700 interventions au bloc opératoire, 1 000 séjours en soins intensifs, 1 600 accouchements.
Aussi, madame la ministre, faudrait-il sortir de cette paralysie et se positionner de manière claire, responsable, définitivement assumée sur ce projet.
J’attends des réponses sur deux points. Quelles sont les intentions du Gouvernement en ce qui concerne le financement de la reconstruction du centre hospitalier de Voiron, et dans quels délais s’effectuera-t-elle ? Les aléas de procédure – annulations successives par le tribunal administratif des déclarations d’utilité publique et du permis de construire – sont-ils susceptibles de différer une décision gouvernementale à ce sujet, compte tenu de l’impossibilité de démarrer rapidement les travaux ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des Français de l’étranger.
Monsieur le député Jean-Pierre Barbier, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Marisol Touraine.
Le projet de reconstruction du centre hospitalier de Voiron est un dossier que la ministre connaît bien. Plusieurs réunions avec les élus concernés se sont d’ailleurs tenues avec son cabinet depuis juin 2012.
Le centre hospitalier de Voiron, en lien avec la clinique de Chartreuse, qui est un établissement privé à but lucratif, porte un projet de reconstruction d’un pôle hospitalier public-privé au sein du Voironnais pour un montant de 99,5 millions d’euros.
Lancé depuis plus de dix ans, ce projet a en effet connu de nombreuses évolutions sans que son intérêt pour les habitants de ce territoire soit remis en cause.
Il répond, d’une part, à une problématique d’efficience médico-économique grâce à la mutualisation du plateau technique et, d’autre part, à une problématique de vétusté des locaux non adaptés à l’évolution des modes de prises en charge et aux conditions d’accueil des patients.
Comme vous le soulignez, les acteurs ont consenti d’importants efforts pour garantir le juste coût et le bon dimensionnement du projet, sous l’impulsion de l’Agence régionale de santé de Rhône-Alpes et du comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins hospitaliers.
Ce comité, chargé de s’assurer de l’intérêt médico-économique, de la qualité et de la soutenabilité financière des investissements hospitaliers, a d’ailleurs rendu au mois de décembre 2013 un avis positif sur l’éligibilité du dossier, tout en insistant sur la nécessité de définir et formaliser les modalités de coopération entre l’hôpital et la clinique afin d’assurer la pérennité du fonctionnement du futur établissement. Le calendrier d’examen du projet est respecté puisque le dossier est à nouveau présenté aujourd’hui au COPERMO pour validation finale.
Sur la base de cet avis, le Gouvernement pourra prendre une décision quant au soutien financier et précisera les conditions requises pour que l’opération se déroule au mieux, dans l’intérêt de la population du Voironnais.
Je vous remercie. J’espère que l’avis sera positif et, surtout, que le Gouvernement prendra ensuite position très rapidement pour faire avancer ce dossier de l’hôpital du Voironnais.
La parole est à Mme Jacqueline Maquet, pour exposer sa question, no 549, relative à la situation des locaux de la gendarmerie à Arras.
Monsieur le ministre de l’intérieur, je souhaite appeler votre attention sur l’état de vétusté des locaux, des logements et de la voirie de la gendarmerie du quartier Baudimont à Arras. En effet, depuis le départ de l’escadron de gendarmerie mobile d’Arras en 2011, nous avons hérité de l’ancienne majorité une situation extrêmement critique.
Les personnels du groupement départemental et de la compagnie d’Arras, qui étaient essentiellement logés dans le privé, ont été transférés dans le parc immobilier de la gendarmerie de ce quartier Baudimont. Ce transfert a, certes, permis de faire de substantielles économies de loyer, mais il se trouve que le parc immobilier et les bâtiments administratifs de la gendarmerie du quartier Baudimont sont dans un état de vétusté important. Ces personnels sont donc logés dans de très mauvaises conditions. Dans le parc des logements les plus anciens, des travaux de rénovations lourdes doivent être faits. À titre d’exemple, les huisseries datent de 1930. Bien que le personnel reste très discret sur cette question, cet état de fait nuit au moral des troupes.
Par ailleurs, un autre projet, celui du transfert opérationnel, est actuellement l’objet d’une réflexion. En effet, l’ensemble des forces précitées sont actuellement rue des Fours à Arras. Le bâtiment où elles sont établies n’est pas adapté à leur mission et il serait judicieux d’envisager leur transfert au quartier Baudimont. C’est ce qui était initialement prévu quand l’escadron de gendarmerie mobile est parti.
Le regroupement de la composante opérationnelle et de la composante logement présenterait plusieurs avantages. Il permettrait à la gendarmerie de faire diverses économies à long terme, de rapprocher les gendarmes de leur lieu de travail pour plus d’efficacité et d’efficience, et de renforcer la présence de la gendarmerie dans le quartier d’Arras ouest, ce qui serait un facteur de sécurité pour les habitants. De plus, ces différents travaux de réhabilitation contribueraient à relancer le secteur du bâtiment dans l’Arrageois, en crise actuellement.
Je souhaite donc savoir quelles mesures vous comptez prendre pour ces rénovations.
Je connais, madame la députée Jacqueline Maquet, votre intérêt pour la gendarmerie et ses conditions de travail.
Vous avez eu raison de le rappeler : non seulement la majorité précédente a supprimé des postes de gendarmes comme jamais – 6 700 en cinq ans – mais les crédits de fonctionnement, d’équipement et d’investissement avaient également baissé, de 18 %. Pour les seuls crédits d’investissement immobilier, cette baisse a même atteint 75 % entre 2007 et 2012.
Nous avons mis fin à cette politique, malgré le contexte budgétaire que vous connaissez. Nous avons arrêté l’hémorragie des postes. Nous créons des postes supplémentaires, dans la gendarmerie comme dans la police.
J’ai obtenu au mois d’octobre dernier le dégel de 111 millions d’euros de crédits de paiement pour la police et la gendarmerie, ainsi que 10 millions d’euros d’autorisations d’engagement pour répondre aux besoins immobiliers les plus pressants, dans la gendarmerie nationale, pour le logement des familles. Ces crédits permettront des travaux d’urgence pour 200 logements. Nous avons prévu un effort comparable, d’environ 9 millions d’euros, en 2014. Ces crédits sont importants ; ils permettent de faire face à l’urgence, mais il ne sera pas possible de répondre à toutes les demandes.
Vous évoquez le quartier Baudimont à Arras. Cette caserne domaniale date de 1938 et, malgré une restauration effectuée en 1970, les bâtiments nécessitent, en effet, des travaux de rénovation.
Les rénovations successives ont concerné une partie des logements en 2000, les locaux de l’atelier auto en 2004, le mur d’enceinte en 2007 et une seconde partie des logements en 2012. Une opération de réfection du clos et du couvert des logements est également programmée. Les études sont financées sur l’exercice budgétaire 2014 à hauteur de 150 000 euros et la réalisation des travaux, d’un montant de 2,5 millions d’euros, est prévue en 2015. Enfin, la gendarmerie nationale étudie un projet de construction d’un nouveau bâtiment pour abriter les locaux des unités de gendarmerie départementale, afin d’améliorer nettement leurs conditions de travail – j’ai évoqué ce sujet lors d’un récent déplacement dans votre département –, mais un tel bâtiment a un coût élevé : 12 millions d’euros.
Nous allons donc continuer les discussions et donner la priorité aux rénovations et réfections du patrimoine de la gendarmerie. Je ne manquerai pas, évidemment, de me rapprocher de vous, car nous sommes, comme vous, soucieux des conditions de travail des militaires de la gendarmerie. Le Gouvernement fait des efforts importants, dans une situation budgétaire difficile, et il continuera.
Je connais, monsieur le ministre, votre attachement aux conditions de travail de la police et de la gendarmerie. Je vous remercie de ces informations, que je transmettrai.
Je serai vigilante sur le démarrage des travaux. Mon cabinet parlementaire est établi à proximité du quartier Baudimont, dans les quartiers ouest d’Arras. Comptez donc sur moi pour vous relancer en cas de retard dans le démarrage des travaux !
La parole est à M. Maurice Leroy, pour exposer sa question, no 561, relative au redécoupage électoral.
Monsieur le ministre de l’intérieur, je souhaite revenir sur deux explications données en votre nom par M. le ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, à nos collègues sénateurs lors de la séance des questions d’actualité du 10 janvier 2014 dernier, au sujet du redécoupage des cantons. Je cite fidèlement M. Vidalies d’après le compte rendu paru au Journal officiel : « Le Gouvernement essaie de tenir compte au maximum des limites de l’intercommunalité. Lorsque le schéma départemental n’a pas été adopté, la règle de substitution conduit à tenir compte au maximum des cantons existants. » Ce n’est pas le cas dans mon département de Loir-et-Cher et ailleurs, mais passons. Je pose la question suivante : comment se fait-il que ces deux maxima conduisent à un résultat minimal dans un très grand nombre de départements ? Comment justifiez-vous que, dans leur majorité, les limites des nouveaux cantons ne correspondent ni à celles des intercommunalités, ni à celles des cantons existants ? Comment justifiez-vous donc l’inanité de vos efforts ?
Je cite à nouveau M. Vidalies, qui a expliqué que la loi de 1990 interdisant tout redécoupage électoral dans l’année précédant le scrutin ne s’appliquait pas en cas d’annulation d’un décret : « L’éventuelle annulation d’un décret constitue, en effet, juridiquement » – écoutez bien – « un événement extérieur à l’exercice du pouvoir réglementaire, seul concerné par l’article de la loi. » Persistez-vous dans cette argutie, ou plutôt cette faribole juridique ? Si l’annulation est extérieure au pouvoir réglementaire, la nécessaire prise d’un nouveau décret l’est-elle également ? Avez-vous ainsi inventé, ou allez-vous inventer, le décret non-réglementaire ? Comment ce nouveau décret, pris pendant l’année préélectorale, et violant la loi de 1990, sera-t-il compatible avec la légalité des comptes de campagne ? C’est une véritable question, qui n’est toujours pas tranchée. J’observe d’ailleurs de nombreuses questions écrites sont posées sur ce sujet, particulièrement au Sénat ; on peut comprendre pourquoi, les grands électeurs sont les plus concernés. Il n’y est toujours pas répondu.
Je souhaite donc des éclaircissements. Ces questions me paraissent majeures.
Monsieur le député Leroy, dans le strict respect du principe d’égalité démographique – je ne rappelle pas la jurisprudence du Conseil constitutionnel –, le découpage s’organise à partir d’une ligne directrice, qui est soit la carte cantonale actuelle, soit, et c’est le plus souvent le cas, la carte des établissements publics de coopération intercommunale. Mais, pour le Conseil d’État, je veux le rappeler, le respect du périmètre d’un EPCI n’est pas un motif d’intérêt général qui permettrait de déroger au principe prioritaire, celui de l’égalité démographique, qui s’impose.
Je vous confirme cependant que, dans une très grande majorité des départements, c’est bien la carte intercommunale qui a servi de base à la nouvelle carte cantonale, dès lors que la population des EPCI s’inscrit dans l’écart à la moyenne démographique de 20 %. Ainsi, dans votre département, il y a neuf EPCI sur quatorze qui, leur population le permettant, s’inscrivent entièrement dans un canton. Parmi les cinq cantons de la communauté d’agglomération de Blois, qui doit être divisée entre plusieurs cantons, quatre s’inscrivent entièrement dans son périmètre.
Dans des départements voisins du vôtre, pour rester dans votre région, ce sont vingt-quatre EPCI du Loiret sur vingt-six, dix-sept EPCI de l’Eure-et-Loir sur vingt-deux et tous les EPCI de la Sarthe qui, leur population le permettant, sont de la même façon strictement respectés. Comment pouvez-vous donc affirmer, monsieur Leroy, que le Gouvernement n’a pas – dans ces départements – respecté les lignes directrices qu’il avait publiquement énoncées ?
Comme je vous le disais à l’instant, le Conseil d’État a été plus rigoureux encore que le Gouvernement, puisque dans dix-huit cas, il a modifié les projets du Gouvernement en faisant primer le respect du critère démographique sur le respect du périmètre des intercommunalités. Comme vous le savez, demain, le Conseil d’État se sera prononcé sur l’ensemble des projets de décret. Il a d’ores et déjà émis un avis favorable sur quatre-vingt-douze d’entre eux, en apportant parfois des modifications ; je viens de le rappeler. Comme vous le savez aussi, leur publication a commencé le 20 février dernier et sera terminée en fin de semaine, donc dans le parfait respect des dispositions de la loi de 1990 que vous mentionnez.
En ce qui concerne l’effet d’une éventuelle annulation par le juge administratif d’un décret de définition des nouvelles limites cantonales, je veux d’abord vous dire que je ne me place pas du tout dans cette hypothèse, compte tenu des précautions qui ont été prises et du travail qui a été fait. Si, toutefois, le cas se présentait, je vous confirme les propos d’Alain Vidalies : une telle annulation serait un événement juridique extérieur à l’exercice du pouvoir réglementaire. On ne reviendrait naturellement pas à l’ancienne carte cantonale, et le Gouvernement proposerait un nouveau projet de décret, conforme à la décision de la juridiction administrative. Les dispositions de la loi du 11 décembre 1990 s’appliquent aux actes du pouvoir réglementaire, pas aux décisions des juridictions. Les élections départementales auront donc bien lieu en mars 2015. En attendant, soyons attentifs à la publication de l’ensemble des décrets, et attendons que le Conseil d’État se prononce sur les recours qui seront intentés.
La parole est à Mme Marie-Louise Fort, pour exposer sa question, no 564, relative aux conséquences de l’implantation d’une borne Eurodac à Sens.
Monsieur le ministre, depuis 1erfévrier 2013, une borne Eurodac est en fonction à Sens. En effet, l’agglomération dijonnaise n’arrivait plus, semble-t-il, à faire face à l’afflux de populations immigrées, issues pour la plupart d’Afrique subsaharienne. Le maire de Dijon, M. Rebsamen, et le préfet ont alors demandé l’installation de deux nouvelles bornes en Bourgogne. Ce sont les communes de Mâcon et de Sens qui ont été choisies, sans concertation locale, ce qui, vous le comprendrez bien, est ressenti comme un certain mépris pour les élus locaux. Des structures d’accueil des demandeurs d’asile ont été créées à Vergigny et Joigny.
Concrètement, cette borne Eurodac crée et créera un appel d’air à Sens. Or, avec 25 000 habitants, à cinquante-cinq minutes de Paris, cette ville n’a pas les moyens financiers, humains et matériels de gérer une telle situation. Je tiens d’ailleurs à rendre hommage aux personnels qui ont permis le démantèlement d’une première filière malienne.
Les demandeurs d’asile déboutés – 80 % d’entre eux – sont invités à regagner leur pays d’origine, ce que, vous le savez bien, ils ne font pas tous, tant s’en faut. Que faire alors de ces familles en situation de détresse ? Le conseil général s’inquiète à juste titre.
J’ai trois questions, monsieur le ministre. Pourquoi n’avoir pas installé cette borne Eurodac dans le chef-lieu de département de l’Yonne, sa préfecture ? Quelles mesures envisagez-vous de prendre afin d’éviter que Sens, à cinquante minutes, je le rappelle, de la capitale, ne soit rapidement la destination privilégiée par ces sans-papiers rejetés et par Paris et par Dijon ? Enfin, pensez-vous vraiment que disséminer ces populations est efficace en termes de contrôle de ces flux migratoires ?
C’est un sujet difficile, madame la députée Fort, que celui de la demande d’asile. De 2009 à 2011, la Bourgogne a connu une forte progression de la demande d’asile. Celle-ci a même augmenté de 60 % en 2011. Même si l’on constate un ralentissement en 2013, la Bourgogne fait face à une situation difficile qui se retrouve au niveau national, puisque la demande d’asile a progressé de près de 70 % depuis 2007 ; je n’y reviens pas. Un rapport a été commandé à Mme Létard et à M. Touraine, et je ferai bientôt des propositions pour une autre organisation et pour réduire les délais.
Vous m’interrogez sur la question des bornes Eurodac en Bourgogne. Nous avons constaté que 70 % des premières demandes d’asile en Bourgogne étaient faites dans le département de la Côte-d’Or. Cette concentration a été favorisée, d’une part, par le fonctionnement de la plate-forme, dont le champ d’intervention était limité à ce département, et, d’autre part, par la localisation dans ce département de 80 % des places d’hébergement d’urgence en 2011.
Cette concentration des demandeurs d’asile sur un seul département ne pouvait être considérée comme une situation satisfaisante. Il a donc été décidé de mener une expérimentation sur l’ensemble de la région en installant, comme vous l’avez rappelé, deux bornes supplémentaires de relevé d’empreintes digitales, l’une à Mâcon et l’autre à Sens.
Ces choix ont été faits en concertation avec les représentants locaux. Dans le même temps, la plate-forme d’accueil a créé une antenne dans chacune de ces villes, ce qui a permis de rééquilibrer la répartition de l’hébergement des demandeurs d’asile. En outre, 100 places d’hébergement en centre d’accueil des demandeurs d’asile ont été créées en juillet 2013 dans votre département, l’Yonne.
Le suivi de cette expérimentation a permis de constater un changement des nationalités présentes dans cette région. Ainsi, les populations en provenance du Kosovo et de l’Albanie, essentiellement des familles, ont rapidement supplanté les populations de la Corne de l’Afrique, principalement des célibataires, dont le nombre a été divisé par dix. Par ailleurs, le Kosovo et l’Albanie ont enfin été inscrits sur la liste des pays d’origine sûrs : c’est un élément nouveau dont les effets sur les flux dans votre région seront observés. Les premiers éléments au niveau national montrent d’ores et déjà une baisse de la demande d’asile de ces populations, mais il faut rester prudents.
Une réforme de l’asile sera menée : elle nécessitera des moyens, une autre organisation, mais aussi une autre répartition sur le territoire ; nous aurons l’occasion d’en parler plus tard. Aujourd’hui, la grande difficulté tient au fait que ces populations se concentrent dans les mêmes régions. Il faut donc essayer de trouver, d’imaginer des solutions nouvelles et efficaces.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Comme vous l’avez bien compris, mon souci concerne à la fois les demandeurs d’asile et les étrangers qui ne sont pas reconnus comme tels. Il s’agit notamment des personnes relevant de cette dernière catégorie, puisqu’en effet, désormais, les ressortissants de ces pays ne demandent pas l’asile.
Je vous demande de continuer à être vraiment particulièrement attentif à la dissémination de ces populations. Sens est une petite sous-préfecture, et nous avons déjà beaucoup de soucis.
La parole est à M. Pierre Lellouche, pour exposer sa question, no 567, relative au problème de la mendicité dans les rues de Paris.
Monsieur le ministre, il s’agit d’une question particulièrement difficile, que vous connaissez bien : la présence sur les trottoirs de la capitale de Roms, et plus généralement de populations venues d’Europe de l’Est, qui se livrent à des activités problématiques comme la mendicité agressive, les escroqueries à la charité publique, les vols à la tire à proximité des distributeurs automatiques de billets, sans parler de la prostitution des enfants, dans les gares, et d’une sorte de camping à ciel ouvert, à longueur d’année, dans les plus beaux quartiers de la capitale. Paris est ainsi à la fois la première ville du monde – ou l’une des premières villes du monde – pour ce qui est du tourisme, et une capitale défigurée par des campements sauvages. Dans ma propre circonscription, sur les grands boulevards et autour de l’église de la Madeleine, il y en a tous les deux cents mètres.
Je sais que vous connaissez ce sujet, qui est compliqué. Il est directement issu de l’entrée de la Roumanie et de la Bulgarie dans l’Union européenne, il y a sept ans. Depuis cette époque, des communautés très défavorisées dans ces pays ont le droit de circuler en Europe, d’entrer et de sortir de notre pays sans contrôle, au mépris, d’ailleurs, de la fameuse règle des trois mois. Lorsque nous étions aux affaires, nous avons essayé de régler ce problème avec ces pays, en vain. Seuls quelques policiers roumains ont été envoyés à Paris. Nous n’avons aucun moyen de peser sur des gouvernements qui prennent l’argent de l’Union européenne – 1,3 milliard d’euros – et qui nous envoient cette population en très grande difficulté.
À partir du 14 septembre 2011, c’est-à-dire peu avant votre arrivée aux affaires, monsieur le ministre, un arrêté anti-mendicité a été pris à ma demande et à celle d’autres élus parisiens. Cet arrêté permettait, dans les quartiers les plus touristiques, comme le Louvre et les Champs-Élysées, de prendre les gens sur le terrain et de les déplacer. Dès que vous avez été nommé ministre, cet arrêté a été supprimé par le nouveau préfet de police de Paris. Celui-ci avait lui-même reconnu que « nul ne conteste que les arrêtés anti-mendicité ont, dans un premier temps, permis de faire diminuer les nuisances et délits associés à certaines formes de mendicité. » Malgré cela, il a supprimé ce dispositif ! Vous-même, monsieur le ministre, avez déclaré avoir « discuté avec les policiers confrontés aux phénomènes de mendicité, y compris ceux qui travaillent avec des collègues roumains et bulgares : si les arrêtés ont pu avoir une efficacité, se posent aujourd’hui d’autres problèmes » – personne n’en doute – « plus importants, tels que les trafics d’êtres humains ou de drogue, ou l’utilisation des mineurs. La seule consigne que j’ai donnée au préfet de police à cet égard est de prendre ses dispositions en liaison avec le maire de Paris. »
L’ennui, monsieur le ministre, c’est que ces dispositions n’ont pas été prises, vous le savez bien ! Ce système perdure : je ne sais pas par quel bout vous voulez prendre le problème. Se pose d’abord la question du respect, par la Roumanie et la Bulgarie, des principes de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et notamment de son article 2, qui oblige les États membres à respecter leurs minorités. On ne peut accepter que des pays aient tous les droits à partir du moment où ils entrent dans l’Union européenne, violent les droits de leurs minorités, et les exportent vers d’autres État membres.
J’en termine par là, monsieur le ministre. Je sais que c’est difficile, mais j’ai vraiment besoin de votre aide : peut-on compter sur un autre arrêté de ce type ? À défaut, que comptez-vous faire ?
Monsieur Lellouche, la question que vous posez soulève un problème plus général. Je ne suis pas sûr que les problèmes que vous évoquez, à propos de la Roumanie et de la Bulgarie, seraient réglés par un arrêté anti-mendicité à Paris ! Ce n’est pas exactement ce que vous dites, j’en conviens : je ne veux pas déformer vos propos.
Dans ce domaine, comme dans bien d’autres, il faut être pragmatique. C’est pour cela que nous avons renforcé la présence policière sur la voie publique, notamment depuis le printemps 2013, au moyen d’un plan de sécurisation des zones touristiques. Ce plan a eu des résultats : je l’ai constaté hier encore, au Louvre. Nous avons également mis en place un partenariat renforcé avec le parquet de Paris. Enfin, des policiers roumains ont été détachés à la préfecture de police : honnêtement, vous ne devriez pas sous-estimer leur rôle et l’efficacité de leur action. Grâce à ces mesures, les suites données aux interpellations sont plus dissuasives. Ainsi, en moins de deux ans, plus de 200 peines d’incarcération ont été prononcées contre de jeunes mineurs roumains. Sur le plan administratif, les reconduites coercitives de ressortissants roumains en situation irrégulière ont également fortement progressé en 2013 à Paris : leur nombre a crû de 47 %.
Nous devons par ailleurs poursuivre le démantèlement des réseaux. Une dizaine d’entre eux ont été démantelés en un an, avec une nette accélération à l’automne dernier.
Il faut en outre poursuivre le démantèlement des campements. C’est une politique systématique : dix-neuf ont été démantelés en 2013. Je ne dis pas que cela règle tous les problèmes, qui restent difficiles et compliqués. Nous devons néanmoins poursuivre ce travail.
Vous réclamez le retour des arrêtés anti-mendicité. Malheureusement, dans le cadre de ces arrêtés, une absence de recouvrement des amendes a été constatée : aucune d’entre elles n’a jamais été payée. Le dispositif a de plus perdu son intérêt pour l’identification des personnes mises en cause ou leur éloignement, car la jurisprudence ne permet plus de mettre en garde à vue au titre du séjour irrégulier. Enfin, la pratique policière depuis juin 2012 en témoigne, le droit commun permet tout à fait aux policiers d’agir contre les personnes se livrant à la mendicité agressive : je pense aux réquisitions délivrées par le parquet, qui sont beaucoup plus efficaces que les arrêtés pour permettre des contrôles d’identité. Le nombre de contrôles de police sur les sites anciennement couverts par les arrêtés a ainsi été accru.
Je n’ignore rien des difficultés que vous avez décrites. Je pense qu’effectivement, les solutions passent par l’Europe, par des accords avec la Bulgarie et la Roumanie, et par une politique de contrôle, de présence et de démantèlement des campements à Paris et en région parisienne.
La parole est à M. Thierry Lazaro, pour exposer sa question, no 568, relative à la hausse des braquages et des cambriolages.
Monsieur le ministre, j’appelle votre attention sur la multiplication des braquages violents de petits commerces – les petits commerçants sont tous touchés, aussi bien dans nos villes que dans nos villages – et sur l’explosion des cambriolages. Je vous donne un exemple concret : le 10 décembre dernier, vers vingt et une heures, à Phalempin, commune de 4 700 habitants que j’administre, située au sud de Lille, quatre individus lourdement armés ont fait irruption dans un débit de tabac, pour la deuxième fois en onze mois, pour y faire main basse sur la caisse et sur des cartouches de cigarettes. Pendant que l’un d’entre eux emmenait violemment la propriétaire dans la réserve pour y voler les cigarettes, les autres malfaiteurs aspergeaient gratuitement de gaz lacrymogène le patron et les clients, contraints de s’allonger et craignant tous de recevoir une balle dans la tête.
Non seulement ces commerçants doivent faire face à la concurrence impitoyable, voire scandaleuse, des grandes surfaces, qui compromet leur avenir, mais encore ils doivent aller travailler la peur au ventre, sans être certains de revenir vivants chez eux le soir.
En ce qui concerne les cambriolages, une ville d’une taille comparable à celle de Phalempin est pillée tous les quatre jours et demi, en France. Tout y passe : résidences principales, résidences secondaires, commerçants – par exemple des magasins de vêtements – et artisans – par exemple des salons de coiffure ou des garagistes. Les agriculteurs n’y échappent pas : on leur dérobe leurs outils de travail – pas toujours récents, du reste – pour les revendre en France ou ailleurs. Le 18 décembre dernier, le numéro 3 de la Gendarmerie nationale a déploré devant des parlementaires que 65 % des délinquants soient relâchés. Les gendarmes et les policiers sont démoralisés ; les Français en ont assez de ces agressions, les élus aussi – vous le savez, monsieur le ministre. Le nombre de ces pillages est exponentiel. Nous regrettons que leurs auteurs, lorsqu’ils sont arrêtés, ne soient que peu condamnés.
Je ne mets pas en doute votre volonté de lutter contre cette délinquance particulièrement violente qui altère la vie de nos compatriotes, mais je doute de la volonté du Président de la République d’y remédier. Le projet de loi sur la contrainte pénale que votre collègue, Mme la garde des sceaux, nous concocte pour avril, juste après les élections municipales, ne fera qu’aggraver cette situation apocalyptique, nous le savons tous. À la lumière de ce triste constat, je vous demande, monsieur le ministre, de m’indiquer les mesures concrètes, efficaces et rapides que vous comptez mettre en oeuvre pour restaurer la sécurité, et par là même pour rétablir la confiance de nos compatriotes, que nous devons mériter au quotidien.
Monsieur Lazaro, cela fait cinq ans que les vols à main armée et les cambriolages explosent. Or ce sont toujours les mêmes lois pénales qui s’appliquent : il n’y a pas eu de nouvelle loi dans ce domaine. J’en ai assez que, dans cet hémicycle comme ailleurs, des représentants du peuple mettent en cause la justice. C’est en faisant travailler ensemble la justice et la police que nous arriverons à des résultats.
Je ne méconnais en rien ce qui se passe aujourd’hui en matière de cambriolages et de vols à main armée. Il y a trois semaines, j’ai rencontré les représentants de l’ensemble de la profession des buralistes. Malgré des drames, nous avons constaté une baisse significative des vols à main armée en 2013 pour les bijoutiers et les joailliers, qui arrivent à se protéger. Ce sont les buralistes, ou les petits commerçants, qui en sont de plus en plus les victimes. C’est pourquoi nous avons mis en place, à partir du mois de septembre dernier, dans le cadre d’un plan national contre les cambriolages et les vols à main armée, un certain nombre d’actions. Les premiers résultats de la mobilisation des forces de l’ordre sont encourageants – en tout cas, c’est ainsi que je les vois. La hausse des vols à main armée constatée au premier semestre 2013, comme au cours des années précédentes, est incontestable : leur nombre a augmenté de 6,1 % en zone de police, et de 5,4 % en zone de gendarmerie. Cette hausse a été stoppée. Derrière ces chiffres, il y a évidemment des drames, et des difficultés majeures pour les commerçants.
Pour l’ensemble de l’année 2013, les vols à main armée sont en baisse de 0,3 % en zone de police et de 6 % en zone de gendarmerie. Quant au mois de janvier, on constate une baisse de 19 % des vols à main armée commis au préjudice des commerces. Il ne s’agit pas de crier victoire, car les chiffres restent très élevés depuis des années, vu la fragilité de ces commerces. Nous avons mis en place de nouveaux dispositifs : alerte SMS, désignation de référents pour les commerçants parmi les gendarmes ou les policiers, selon les territoires, organisation avec la profession, avec les chambres de commerce et les chambres de métiers, vidéo-protection et vidéo-surveillance avec les collectivités. Tout cela doit nous inciter à poursuivre.
Plutôt que de polémiquer sur des lois qui ne sont même pas encore appliquées, essayons de travailler ensemble sur ce phénomène de violence qui ne concerne pas que notre pays. Vous le savez bien : la Belgique, l’Allemagne ou les Pays-Bas connaissent exactement les mêmes problèmes que nous. Soyons efficaces : je ne doute pas, vous connaissant, que vous serez sur cette longueur d’onde, au-delà des moulinets et des postures propres aux périodes de campagne électorale.
La parole est à M. Thierry Lazaro. Monsieur le député, il vous reste cinquante-sept secondes.
Monsieur le ministre, je suis d’accord avec vous : il faut travailler ensemble. D’ailleurs, je ne mets pas en doute votre volonté. Simplement, moi aussi j’en ai un peu marre que l’on ne puisse pas s’exprimer sur les défaillances de la justice. En vous exprimant de cette manière, en rappelant que ce problème remonte à bien avant l’alternance, vous êtes peut-être dans votre rôle. Mais je n’en démords pas : plus on laissera un sentiment d’impunité à des petits branquignols qui font la loi un peu partout, et plus ce pays ira à la dérive ! De temps en temps, il faut le dire : ce n’est pas honteux !
La parole est à M. Julien Aubert, pour exposer sa question, no 570, relative aux moyens alloués à la police nationale.
Madame le président, monsieur le ministre, le 5 novembre dernier, les policiers du Vaucluse, à l’instar de leurs collègues de tout le territoire français, ont participé à une manifestation afin de faire part de leur mécontentement. Ils protestaient contre le manque de moyens alloués aux services de sécurité, et plus particulièrement à la police nationale. Véhicules vétustes, armes en nombre insuffisant ou hors service, dégradation des conditions de travail, locaux parfois inadaptés et souvent vétustes, diminution de la prime de risque, blocage des salaires dans la profession : les motifs d’insatisfaction ne manquent pas chez les fonctionnaires de police. Ils attendent du Gouvernement des mesures fortes, afin notamment de renforcer les moyens de la police et de la gendarmerie, et d’améliorer leurs conditions de travail actuelles.
Je suis toujours catastrophé d’entendre des fonctionnaires de police ou des gendarmes m’expliquer qu’ils amènent leur papier personnel pour pouvoir travailler, ou qu’ils doivent remplir leur véhicule de service avec du carburant acheté sur leurs deniers personnel.
Je vous demande donc, au nom de tous les fonctionnaires en charge de la sécurité publique, quelles mesures vous entendez prendre en vue d’apaiser la légitime inquiétude des policiers et des gendarmes.
Monsieur Julien Aubert, je sais que vous êtes ambitieux, mais de là à parler au nom de toute la police, c’est un nouvel exemple de votre toupet !
Sourires.
D’autant que vous oubliez – et c’est normal – les 13 700 suppressions d’emplois de policiers et de gendarmes et la baisse de 18 % des moyens de fonctionnement et d’investissement de la police et de la gendarmerie décidées par la majorité précédente, comme je le rappelais tout à l’heure à l’une de vos collègues.
Qu’a donc fait le Gouvernement ? Nous avons arrêté l’hémorragie des postes : nous remplaçons tous les départs à la retraite et créons 400 à 500 emplois de policiers et de gendarmes chaque année, pour donner les moyens nécessaires à la police et à la gendarmerie.
Pour la première fois depuis plusieurs années, nous avons aussi, dans le cadre de la loi de finances pour 2014, adopté un budget en augmentation, certes modeste, mais qui permettra tout de même une hausse des crédits de fonctionnement et d’investissement.
Par ailleurs, nous sommes, évidemment, attentifs aux conditions de travail et indemnitaires des policiers et des gendarmes, dans un contexte budgétaire difficile. Je suis très attentif au moral et à la situation des policiers et des gendarmes, et je ne doute pas un seul instant que vous ne le soyez également.
Nous avons besoin que les policiers et les gendarmes reçoivent le soutien et la très large confiance de nos compatriotes. Ils doivent pouvoir travailler dans de bonnes conditions. Le fossé est difficile à combler, mais nous essayons de le faire progressivement. Les zones de sécurité prioritaire permettent aussi de renforcer les moyens sur le terrain. Je veux saluer à nouveau, devant cet hémicycle comble et ce public très nombreux dans les tribunes,
Sourires
l’excellent travail réalisé par nos fonctionnaires de la police et les militaires de la gendarmerie.
Non, monsieur le ministre, je n’ai rien oublié. J’entends bien que vous avez beaucoup d’amour pour les forces de police, mais il serait également intéressant de donner des preuves d’amour !
Vous m’avez parlé, à juste titre, de la diminution du nombre d’agents. Or, je vous ai interrogé, non pas sur les effectifs, mais sur les moyens ; et il y a bien un problème d’arbitrage entre les moyens alloués et le nombre d’agents.
La seule ville de Carpentras a connu, en 2013, 1 515 crimes et délits. Évidemment, les statistiques officielles y verront une baisse en pourcentage. Cependant, dans une ville de 30 000 habitants, chaque crime ou délit a un impact. Vous comprendrez bien que, pour une ville de 30 000 habitants, 1 515 crimes et délits, ce sont 1 515 actes en trop, par rapport à ce qu’une population peut supporter.
Enfin, vous avez mentionné l’augmentation des moyens et parlé des zones de sécurité prioritaire. Je souscris, bien évidemment, à vos propos, mais je répète qu’il faut des preuves d’amour. Or, je n’ai pas oublié que, le 17 janvier dernier, vous vous êtes rendu en Vaucluse, et plus particulièrement à Carpentras, afin d’y rencontrer les fonctionnaires de police du commissariat de la ville.
J’ai noté que vous n’aviez annoncé aucun renforcement de moyens et aucune zone de sécurité prioritaire pour Carpentras. En conséquence, je me demande si cette visite avait pour véritable objet d’écouter les inquiétudes des policiers ou d’apporter un soutien politique, dans le cadre d’une campagne électorale.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement.
Explications de vote et vote, par scrutin public, sur la proposition de loi visant à renforcer la responsabilité des maîtres d’ouvrage et des donneurs d’ordre dans le cadre de la sous-traitance et à lutter contre le dumping social et la concurrence déloyale.
Déclaration du Gouvernement suivie d’un débat, en application de l’article 35, alinéa 3, de la Constitution, sur l’autorisation de la prolongation de l’intervention des forces françaises en Centrafrique, et vote par scrutin public sur cette déclaration.
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures cinquante.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Nicolas Véron