La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures trente.
La parole est à M. Stéphane Demilly, pour exposer sa question, no 1451, relative à la définition des zones blanches.
« Téléphonie mobile : vers la fin des zones blanches pour mi-2017 » : tel est le titre de l’article publié le 9 novembre dernier sur le site internet du ministère de l’économie.
En consultant les cartes diffusées sur le site de l’ARCEP, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, j’ai pu constater que nous étions de véritables chanceux dans le très beau département de la Somme. Nous sommes en effet en avance sur ce calendrier puisque l’ARCEP n’y voit aucune zone blanche – information confirmée par les arrêtés du ministère de l’économie et du numérique, qui ne relèvent aucune commune de ma circonscription, l’est de la Somme, en zone blanche.
Mieux encore, aucune commune de l’est de la Somme n’était citée dans le communiqué de presse de votre ministère de novembre dernier. J’apprends donc que nous n’avons ni problème d’accès à internet, ni problème de téléphonie mobile : le monde est merveilleux !
Député d’une circonscription rurale comptant 250 communes, que j’ai l’habitude d’arpenter en long, en large et en travers, je dois vous faire part, madame la secrétaire d’État, de mon étonnement. J’ai un téléphone relativement récent et, pourtant, je ne partage pas du tout les conclusions de l’ARCEP et du ministère. Je pourrais vous dresser un inventaire à la Prévert des problèmes rencontrés sur mon territoire, mais les deux minutes n’y suffiraient pas !
Cette distorsion entre les cartes des zones blanches de France et le ressenti sur le terrain par les habitants est causée, madame la secrétaire d’État, par la définition même des zones blanches. Ainsi, sont considérées comme zones blanches les communes dont le centre-bourg n’est couvert par aucun opérateur de réseau mobile dans un rayon de 500 mètres autour de la mairie. En outre, sont définies comme couvertes les communes dans lesquelles au moins 50 % des appels passés dans le centre-bourg sont acceptables pour au moins un opérateur de réseau mobile.
Ces critères sont critiquables car le cercle de 500 mètres autour de la mairie exclut de fait les habitants vivant en périphérie de la commune, ainsi que les zones fortement fréquentées par le public mais éloignées du centre-bourg.
Quant à la limitation à 50 % des appels passés et de qualité acceptable pour au moins un opérateur, cela fait des habitants de nos zones rurales des clients de seconde zone, qui doivent donc se contenter d’un seul opérateur au prix fixé par ce dernier, en situation de monopole.
L’exaspération de nos concitoyens est réelle et la demande de patience, qui tient lieu de réponse depuis des années, est aujourd’hui épuisée.
Ma question est donc simple et concrète, et j’espère que votre réponse, madame la secrétaire d’État, ne sera pas bureaucratique. Quelles mesures entendez-vous mettre en oeuvre pour que la définition des zones blanches corresponde aux réalités vécues par les habitants de nos communes rurales ? Que dites-vous au monde rural qui se sent légitimement abandonné ?
Monsieur le député, l’exaspération, la frustration, l’incompréhension que vous exprimez sur ces bancs pour refléter celles de vos administrés, je les connais, je les comprends et j’essaie d’y remédier.
Hier encore, dans l’hémicycle du Sénat, nous discutions de la couverture numérique des territoires, examinant, en dehors de toute polémique politicienne, la meilleure façon de faire face à l’urgence.
Oui, il y a urgence ! Il y a cinq ans, la couverture mobile n’était pas une priorité pour nos concitoyens ou, du moins, l’accès au téléphone et à internet arrivait en premier dans les priorités. Aujourd’hui, l’accès à la téléphonie mobile est devenu la demande numéro un. On peut le comprendre : un médecin veut pouvoir joindre ses patients de cette manière ; une personne âgée veut pouvoir communiquer sans être isolée avec ses petits-enfants ; des services publics veulent être en lien avec leurs usagers.
Il fallait donc parer à l’urgence car rien n’avait été fait pour les programmes dits « zones blanches » depuis plus de dix ans. Tous les crédits de l’État étaient concentrés sur le plan « France très haut débit », avec raison : avec 3,5 milliards d’euros, ce plan apportera la fibre dans les territoires. Une fois que la fibre sera là, il sera beaucoup plus facile d’obtenir aussi la couverture mobile.
Mais en attendant, il fallait traiter l’urgence, d’où le lancement de ce programme qui a permis d’identifier dans une première vague 268 communes. D’ici mi-2017, plus de 3 300 communes recevront l’internet mobile. Dans le département de la Somme, onze communes non encore couvertes bénéficieront de ce service.
Le financement pour les communes en zones blanches sera assuré exclusivement par l’État ; l’annonce en a été faite récemment par le Président de la République.
Nous avons également créé un guichet qui permettra aux collectivités de faire connaître les sites d’importance économique, touristique ou de services publics qui doivent recevoir une couverture prioritaire : 800 de ces sites seront couverts dans les trois prochaines années.
Je travaille aussi avec les opérateurs pour les encourager à déployer des offres de mini-antennes à l’intérieur des domiciles permettant, par l’accès à une box internet, d’obtenir la couverture mobile.
Les critères de ce protocole ont été fixés : changer les règles du jeu unilatéralement auprès des opérateurs et des collectivités aurait pris deux ans. J’ai donc fait le choix de lancer ce programme immédiatement, en plusieurs vagues de recensement des communes potentiellement concernées. Une deuxième et une troisième vagues seront lancées d’ici quelques mois, que je serai amenée à annoncer avant de lancer un grand chantier pour redéfinir les critères permettant de savoir ce qu’est une zone blanche.
Les communes que vous avez en tête, qui rassemblent des citoyens très en colère, sont sans doute des « zones grises », qui comptent au moins un opérateur mais où les autres opérateurs ne sont pas présents. Cela ne suffit donc pas à couvrir la totalité de la commune géographiquement ou à satisfaire l’ensemble des besoins des consommateurs.
Croyez-moi, la détermination est très forte pour avancer ensemble sur ce sujet : il ne saurait être question d’accepter que les zones rurales soient bien moins couvertes que les zones urbaines. Au contraire, tout l’effort public par l’État se concentre justement sur la ruralité parce que la concurrence marche bien en zone urbaine.
Je veux juste faire remarquer que onze communes dans l’est de la Somme, c’est bien – et je vous en remercie –, mais c’est insuffisant puisque ce département compte 782 communes !
La parole est à M. Jean-Luc Reitzer, pour exposer sa question, no 1424, relative à la plateforme douanière de transport routier international de Saint-Louis.
Madame la secrétaire d’État, je souhaite attire l’attention de M. le secrétaire d’État chargé du budget sur la situation actuelle de la plateforme douanière de transport routier international de Saint-Louis, dans le département du Haut-Rhin.
Cette plateforme douanière est la plus importante de notre pays puisqu’elle accueille quotidiennement près de 3 000 camions ; 600 000 camions ont transité par cette plateforme douanière en 2015. Or, le parking de cette plateforme a été conçu en 1989 pour en accueillir 400, alors que nous en sommes à 3 000 chaque jour !
Les conséquences de cette sous-capacité sont multiples. Tout d’abord, la congestion de l’autoroute A35 avec en moyenne, tous les jours, quelque dix kilomètres d’embouteillages, pénalise les riverains ainsi que les dizaines de milliers de travailleurs frontaliers – vous savez combien je suis attaché à eux – qui utilisent cet axe routier et l’échangeur entre l’autoroute A35 et la route départementale 105 dans le département du Haut-Rhin.
Deuxième conséquence : la dangerosité de certains convois qui transportent des matières dangereuses.
Nous savons tous que de nombreuses études ont été réalisées ces dernières années pour améliorer la situation. Les élus locaux, dont je suis, ainsi que le maire de Saint-Louis et les élus départementaux et régionaux, ont toujours privilégié l’aménagement d’une troisième voie sur les deux côtés de l’autoroute A35 pour la désengorger, ainsi que la création d’un pré-parking avant la plateforme pour fluidifier le trafic et, ainsi, délester les zones urbaines.
Même si je sais que ce projet est inscrit au contrat de plan État-région 2015-2020, nous avons besoin d’un soutien affirmé de l’État pour le faire avancer ; j’espère l’obtenir aujourd’hui par votre réponse.
Compte tenu de la loi NOTRe – loi portant nouvelle organisation territoriale de la République – et du redécoupage régional qui en découle, je souhaite savoir, tout comme les élus locaux, si ce dossier, auquel nous tenons, garde bien son caractère prioritaire, en me confirmant que les premiers travaux seront engagés en 2017, voire dès 2016. Par avance, je vous remercie pour votre réponse.
Monsieur le député, le secrétaire d’État au budget me prie de l’excuser et vous remercie de votre question dans laquelle vous avez parfaitement résumé la situation.
Vous l’avez dit, la plateforme douanière de transport routier international de Saint-Louis est à la fois fondamentale pour la surveillance douanière, et saturée. Au-delà des conséquences que cela emporte sur la qualité du service douanier, cela a aussi des conséquences sur la circulation sur l’autoroute A35 qui intéressent directement votre circonscription et plus largement la région au regard du caractère central de cette autoroute dans le schéma routier.
C’est pourquoi un projet d’aménagement de la plateforme douanière a été engagé par la DREAL Grand Est – Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement du Grand Est –, visant à améliorer la circulation et le stationnement des poids lourds sur cette plateforme douanière.
Il s’agit notamment de séparer les flux – transit, véhicules vides, véhicules candidats au dédouanement, véhicules de secours – mais aussi, vous en parliez, de travailler au réaménagement du parking pour prévoir des places spécifiques destinées aux véhicules transportant des matières dangereuses.
D’autres aménagements doivent contribuer au confort global du site, tels que des équipements d’assainissement et des locaux destinés à abriter les formalités douanières.
Vous interrogez le Gouvernement sur la réalité de son soutien à ce projet. Je tiens à vous rassurer : il est entier et il est bien au rendez-vous. Le dossier des études préalables transmis par la préfecture de région a fait l’objet d’une approbation ministérielle par mon collègue des transports, Alain Vidalies, le 22 avril 2016.
Cette opération est financée à hauteur de 250 000 euros cette année, au titre des études inscrites dans le plan exceptionnel pour la relance des investissements routiers pour 2016.
S’agissant de la date exacte de démarrage des travaux, j’aimerais pouvoir vous répondre, mais il est malheureusement trop tôt pour le faire car cette date d’engagement dépendra de l’avancée et des conclusions des études que je viens d’évoquer. Vous comprendrez qu’il faille faire les choses dans l’ordre ! Mais je tiens encore une fois à vous rassurer : ces crédits engagés permettent d’avancer les études d’avant-projet qui commenceront plus tôt que dans le calendrier initial.
Je vous le dis à nouveau, monsieur le député, le Gouvernement est bien mobilisé sur ce projet qui nous apparaît majeur ; il sait pouvoir compter sur votre vigilance.
Je prends acte de la réponse qui vient de m’être donnée. Je me réjouis du principe qui vient d’être affirmé sur le lancement des études, mais je tiens naturellement, comme tous les élus locaux, à ce que ce projet voie effectivement le jour.
Nous espérons qu’il n’y aura pas, dans les mois qui viennent – les temps sont incertains ! –, des remises en cause de crédits parce que c’est vraiment, comme vous l’avez rappelé vous-même, un élément fondamental pour l’économie régionale et pour l’économie nationale : cette voie, qui traverse la Suisse et va vers l’Italie, attire en effet chaque jour des milliers de poids lourds.
Il est donc important qu’au-delà des études, nous puissions très rapidement passer aux actes et à la réalisation. Je vous fais confiance et j’espère qu’il en sera ainsi dans les mois qui viennent. Je vous remercie pour cette réponse.
La parole est à M. Patrick Vignal, pour exposer sa question, no 1450, relative à la situation économique des centres de villes moyennes.
Ma question porte sur la crise que traversent actuellement les centres de villes moyennes et sur ses conséquences pour les acteurs professionnels implantés dans ces centres-villes.
C’est un constat que nous pouvons tous faire : dans chacune de nos circonscriptions, nos coeurs de villes sont entrés en crise. Une crise sociale, qui se traduit d’abord par un exode massif des classes moyennes en périphérie et par une paupérisation des centres-villes : d’après une étude de l’INSEE de juin 2015, le taux de pauvreté dans les centres-villes atteint plus de quatre fois celui des couronnes périurbaines.
Cette crise est également d’ordre économique et se traduit concrètement par une hausse de la vacance commerciale en centre-ville.
En 2001, plus de 80 villes moyennes avaient un taux de vacance commerciale inférieur à 5 %. En 2012, seules 35 villes se situaient encore sous ce seuil.
Ces chiffres ne sont malheureusement que la partie visible d’une crise qui touche le dynamisme économique de nos territoires. Les commerçants ne sont d’ailleurs pas les seuls concernés. En effet, tous les secteurs professionnels implantés en centre-ville, qu’il s’agisse des professions libérales, des professionnels de santé ou, encore, des artisans sont aujourd’hui touchés : baisse de la fréquentation, difficulté d’accessibilité, augmentation des contraintes liées à la mise aux normes des bâtiments ou, encore, concurrence déloyale des activités implantées en périphérie. Le chiffre d’affaires de tous les professionnels diminue et tous songent à s’implanter en périphérie.
Madame la secrétaire d’État, si la tendance continue, nos centres-villes vont devenir de véritables villes fantômes. Il est temps de réagir. Les centres-villes luttent pour demeurer attractifs mais ils ne peuvent y arriver seuls.
C’est pourquoi, à l’échelle de ma circonscription, de Montpellier jusqu’à Lunel – ville qui a été récemment touchée par ce phénomène – j’ai décidé de lancer un laboratoire associant à la fois les acteurs professionnels, les commerçants et les responsables de l’emploi public afin d’identifier des initiatives locales susceptibles de redynamiser ces bassins de vie.
Je dois d’ailleurs souligner que le Gouvernement a déjà apporté des réponses à cette crise, notamment avec la loi relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises – ACTPE –, la loi pour l’accès au logement et à un urbanisme rénové – ALUR – ainsi que par le biais du programme de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine – ANRU.
Néanmoins, ces réponses sont concentrées en direction des commerçants et peu en direction des autres secteurs professionnels qui sont pourtant des maillons essentiels du dynamisme économique de nos centres-villes tels que l’internet, l’e-économie et le numérique, lequel s’apprête à révolutionner le commerce.
Aussi, madame la secrétaire d’État, j’aimerais savoir quelles mesures concrètes le Gouvernement souhaite prendre afin de soutenir le dynamisme économique de nos centres-villes. Quand seront-ils une véritable cause nationale ?
Mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Patrick Vignal, Martine Pinville ne peut être présente ce matin mais elle m’a chargée de vous répondre et de vous féliciter pour l’initiative que vous avez prise face à la situation bien réelle de dévitalisation des centres-villes, celle-là même que vous avez parfaitement décrite.
Le Gouvernement a fait du maintien du commerce de proximité dans les centres-villes une priorité de ce quinquennat. La loi ACTPE, promulguée le 18 juin 2014, a introduit des mesures importantes à cet effet. Certaines ont un caractère un peu technique mais je souhaite les exposer car c’est avec l’ensemble de ces outils que nous parviendrons à revitaliser les centres-villes.
Il s’agit d’abord de la rénovation du régime des baux commerciaux, avec la limitation de la hausse des loyers commerciaux à 10 % en cas de déplafonnement et la reconnaissance de l’indice des loyers commerciaux et de l’indice des loyers des activités tertiaires comme seules références – et non l’indice du coût de la construction – pour le calcul de l’évolution des loyers commerciaux.
Cela s’accompagne d’un rééquilibrage des relations entre bailleurs et locataires, qui est assuré par l’obligation d’un état des lieux lors de la prise d’un local et d’un inventaire précis des catégories de charges locatives.
D’autres outils ont été mis à la disposition des élus pour dynamiser le commerce de proximité en ouvrant la possibilité de déléguer le droit de préemption des communes à des opérateurs mieux outillés – par exemple, des sociétés d’économie mixte – ou à des intercommunalités qui peuvent mutualiser les ressources et en allongeant le délai pour retrouver un repreneur de fonds de commerce.
Une expérimentation des contrats de revitalisation artisanale et commerciale, dont les modalités d’attribution ont été précisées par un décret du 3 juillet 2015, a également été lancée.
Ces contrats permettent aux élus locaux, via un mécanisme de préemption rénové, de choisir après un appel d’offres un opérateur qui sera chargé de racheter les fonds de commerce, de les rénover et de les louer dans des périmètres marqués par une disparition progressive des activités commerciales et artisanales.
Ces mesures viennent compléter le Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce – le FISAC –, que vous connaissez. Toute une gamme d’outils existe donc, dont l’utilisation dépend beaucoup de la mobilisation des partenaires locaux.
Par ailleurs, la secrétaire d’État en charge du commerce a souhaité apporter une réponse ciblée au phénomène de dévitalisation d’un certain nombre de centres-villes. Conjointement avec la ministre chargée de l’égalité des territoires, elle a ainsi confié récemment – il y a deux mois – une mission à ce propos à l’Inspection générale des finances et au Conseil général de l’environnement et du développement durable.
Il s’agit d’étudier les difficultés rencontrées par les centres-villes, en particulier ceux des villes de moins de 100 000 habitants, de faire le bilan de l’efficacité des outils existants et de formuler de nouvelles propositions, notamment à partir des bonnes pratiques développées sur le territoire national, et en regardant ce qui se passe dans des pays voisins, ce phénomène n’étant pas exclusivement franco-français et concernant tous les pays européens.
Les conclusions tirées de cette mission, attendues pour le mois de juin 2016, devraient permettre d’identifier les moyens les plus adaptés dans une logique de stimulation de l’activité économique locale, ce qui est absolument essentiel pour le dynamisme des villes – répartition de la présence commerciale et des professions libérales.
Avec des villes aussi belles que la vôtre, monsieur le député, on ne peut que vouloir se mobiliser pleinement !
La parole est à Mme Marie-Lou Marcel, pour exposer sa question, no 1441, relative au crédit d’impôt à l’action solidaire.
Madame la secrétaire d’État, je souhaiterais vous interroger sur la mise en place du crédit d’impôt à l’action solidaire, le CIAS, dispositif qui permettrait de rééquilibrer le désavantage subi par les organismes privés sans but lucratif du secteur sanitaire, social et médico-social, non éligibles au CICE, tant vis-à-vis du secteur public hospitalier, social et médico-social que vis-à-vis du secteur privé à but lucratif et de statut commercial.
Ces associations sanitaires et sociales, acteurs majeurs de l’économie sociale dans nos territoires sont, comme les entreprises privées, assujetties à la taxe sur les salaires. L’abattement n’épargne que les petites structures de moins de dix salariés pour seulement 2 % des emplois.
À titre d’exemple, l’Association départementale des pupilles de l’enseignement public de l’Aveyron, adhérente à la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne, qui emploie 300 salariés, pourrait bénéficier grâce au CIAS d’une réduction annuelle de charges de 300 000 euros sur un montant de taxe sur les salaires approchant aujourd’hui les 600 000 euros.
Dans le contexte contraint des comptes de l’assurance maladie, ce crédit d’impôt permettrait à ces associations de préserver et de créer des emplois mais aussi de renforcer leur capacité d’investissement, dont plusieurs de leurs structures ont grand besoin, avec une seule finalité : maintenir dans ces structures une qualité d’accueil des publics souvent fragiles ou en situation de handicap.
Il faut souligner que ces structures privées non lucratives assurent les mêmes missions médico-sociales que le secteur public territorial – le centre communal d’action sociale, par exemple – qui, lui, bénéficie à la fois d’une exonération de la taxe sur les salaires et de la TVA.
Lors du débat sur ce sujet au Sénat, le 23 novembre dernier, le secrétaire d’État chargé du budget, M. Eckert, avait reconnu qu’il existait une véritable iniquité dans ce secteur. Le CIAS serait une mesure équitable envers les organismes privés sans but lucratif qui exercent des activités sanitaires, sociales et médico-sociales.
Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre, madame la secrétaire d’État, pour que les associations sanitaires et sociales puissent bénéficier d’un traitement fiscal équitable ?
Mesdames et messieurs les députés, madame la députée, je vous remercie de votre question.
Vous connaissez l’engagement du Gouvernement en faveur de la vie associative, pilier du dynamisme local et qui fournit un soutien social absolument essentiel à des populations fragiles.
Une proposition d’amendement a été discutée à l’automne lors du débat sur les textes financiers : il s’agissait de créer un crédit d’impôt pour l’action solidaire en augmentant l’abattement de taxe sur les salaires en le faisant passer de 20 262 à 65 000 euros et en augmentant également le nombre de ses bénéficiaires.
Le Gouvernement a déjà fait un effort considérable en faveur du monde associatif lorsque l’abattement de taxe sur les salaires a été porté de 6 002 euros à 20 000 euros au 1er janvier 2014, puis revalorisé de façon conséquente à 20 262 euros au 1er janvier 2015, pour un coût total de 300 millions.
Cette mesure a permis d’exonérer de taxe sur les salaires environ 40 000 structures et d’alléger le coût de cette taxe pour 20 000 autres. Ce sont donc 60 000 structures associatives en tout qui ont bénéficié de cette mesure.
Je rappelle, ensuite, que les associations dont les activités sont totalement fiscalisées car placées dans un champ concurrentiel – dont, je suppose, celle que vous avez mentionnée – et qui emploient des salariés peuvent aussi bénéficier du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE.
En outre, je tiens à rappeler que, lorsque c’est possible, nous avons réglé la différence de situation liée au bénéfice du CICE par des tarifications différentes appliquées aux différents établissements. C’est notamment le cas dans le secteur sanitaire. En effet, la tarification n’est pas la même pour les établissements publics de santé et pour les établissements à caractère privé et elle tient compte du bénéfice ou non du CICE, y compris pour les établissements privés de santé à but non lucratif.
De la même façon, la tarification dans le secteur médico-social relève principalement des agences régionales de santé et des conseils généraux. Elle est adaptée entre les établissements en fonction des différences de situation, qui sont parfaitement connues.
Cette réponse ne vous satisfait sans doute pas totalement et le Gouvernement a bien conscience que, dans le cadre budgétaire contraint que vous connaissez, cette adaptation ne permet probablement pas de régler complètement la situation. En revanche, en se fondant sur cet exemple – qui soulève une vraie question – faut-il pour autant rejeter l’ensemble du dispositif ? Nous ne le croyons pas. Il faut continuer à chercher des solutions.
Nous connaissons votre engagement en faveur du monde associatif et nous savons que vous connaissez bien celles et ceux qui travaillent sur le terrain. Ce Gouvernement et cette majorité font beaucoup pour aider l’économie sociale et solidaire car, comme vous, nous sommes convaincus que cette forme d’économie est en cohérence parfaite avec nos valeurs de solidarité et d’entraide. Le travail continue !
La parole est à M. Guy-Michel Chauveau, pour exposer sa question, no 1438, relative au prêt participatif pour la rénovation hôtelière.
Madame la secrétaire d’État, j’appelle votre attention sur le prêt participatif pour la rénovation hôtelière, le PPRH.
Distribué par Bpifrance et destiné aux PME du secteur de l’hôtellerie souhaitant réaliser des travaux de modernisation – et, en zones rurales, accéder au numérique –, il est censé faciliter l’obtention de crédits bancaires.
Élargi en 2013 et réformé en janvier dernier, son montant s’établit désormais entre 30 000 et 400 000 euros. Il peut inclure, pour les hôtels éligibles, la formule PPRH à taux privilégié, dans la limite de 300 000 euros.
D’une durée de dix ans, avec un taux fixe, ce prêt présente de nombreux avantages : remboursement allégé les deux premières années grâce au différé d’amortissement du capital de 24 mois, octroi sans garantie sur les actifs de l’entreprise ni appel à caution personnelle du dirigeant, ce qui constitue une facilité d’emprunt complémentaire.
Les conditions de son obtention demeurent néanmoins restrictives : hôtels classés, bénéficiaires et en croissance – ce qui exclut de nombreux hôtels de 25 chambres et moins, soit environ 9 000 hôtels, dont la situation économique est fragilisée, en particulier en zones rurales. On constate ainsi un assez faible nombre de dossiers éligibles en faveur du tourisme rural.
De plus, le PPRH peut sembler assez difficile d’accès pour les petits indépendants, les repreneurs et les exploitants qui ne sont pas propriétaires de leur hébergement touristique.
Aussi, nous aimerions savoir si le Gouvernement pourrait envisager des mesures spécifiques en faveur du tourisme en zones rurales dans le cadre du PPRH afin de dynamiser et de pérenniser un secteur absolument nécessaire pour l’économie, l’emploi et l’harmonie des territoires – d’autant plus que ces secteurs étaient grandement soutenus par les collectivités locales et territoriales.
Nous aimerions également savoir si des mesures de promotion et de communication du PPRH pouvaient être envisagées afin de développer la notoriété, la visibilité et bien sûr l’efficacité du dispositif.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de votre réponse.
Mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Chauveau, ma collègue Martine Pinville vous prie de bien vouloir excuser son absence. Elle m’a chargée de vous répondre à sa place.
BPIfrance accorde en effet des prêts pour la rénovation du parc hôtelier et les travaux de mise aux normes des hôtels, qu’il s’agisse par exemple de la sécurité-incendie ou de l’accessibilité des personnes handicapées.
Les conditions du « prêt hôtellerie » de Bpifrance, initialement dénommé « prêt participatif pour la rénovation hôtelière » – PPRH –, ont été redéfinies en janvier 2016. Désormais, le « prêt hôtellerie » de Bpifrance peut avoir une durée de dix ans, avec un différé d’amortissement pouvant aller jusqu’à 24 mois, et financer les hôtels classés d’une à quatre étoiles.
Ce prêt ne s’accompagne pas d’une demande de garantie. Il est accessible aux hôtels situés dans les zones rurales, comme dans les zones urbaines denses. Son montant minimum est de 30 000 euros, ce qui le rend largement accessible, et son montant maximum, de 400 000 euros. Ce prêt bénéficie par ailleurs d’un taux réduit grâce à une bonification de la Caisse des dépôts, ce qui le rend particulièrement intéressant pour les emprunteurs, avec des conditions aujourd’hui proches de 2 %.
Un prêt complémentaire distribué par Bpifrance à un taux de marché ou par une banque partenaire peut également venir en appui d’un projet de financement. Pour le financement de projets d’investissement hôtelier, les régions et les départements peuvent aussi apporter des financements complémentaires, particulièrement utiles en cas de reprise d’un établissement ou pour la mise en accessibilité.
Comme vous l’avez souligné, les modifications apportées en janvier 2016 constituent des avancées. Il incombe désormais à Bpifrance, par une démarche de communication qui doit sans doute être plus ciblée, de mieux faire connaître ces dispositifs auprès des établissements hôteliers et de leurs fédérations professionnelles : ce travail est en cours.
Le tourisme est un secteur d’activité à très fort ancrage territorial, pourvoyeur d’emplois et facteur d’aménagement du territoire. Nous nous félicitons que les financements de Bpifrance accompagnent la démarche de modernisation et de montée en gamme de l’hôtellerie. La conjoncture des taux d’intérêt est d’ailleurs actuellement très favorable à l’investissement dans ce secteur et participe fortement à la reprise de la croissance française observée au cours des derniers mois.
L’idée proposée d’intensifier l’effort de soutien des investissements des hébergements touristiques en zone rurale retient toute notre attention. Outre les hôtels classés, un hébergement hôtelier de qualité est aussi apporté par les chambres d’hôtes, notamment dans les zones rurales, ainsi que par les meublés de tourisme. Ces modes d’hébergement, qui répondent à des demandes d’accueil plus personnalisées, peuvent aussi être éligibles à des financements de Bpifrance, dès lors qu’ils présentent un caractère innovant.
Vous l’aurez compris, le Gouvernement soutient le tourisme, et il est à vos côtés pour poursuivre ce travail.
Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État, et particulièrement de ce que vous avez dit sur l’élargissement du dispositif aux chambres d’hôtes et aux gîtes ruraux de qualité. Ce secteur a en effet besoin d’être soutenu.
La parole est à M. Razzy Hammadi, pour exposer sa question, no 1447, relative à la lutte contre le trafic de drogue dans les zones de sécurité prioritaire.
Ma question s’adressait au ministre de l’intérieur. Je souhaitais appeler son attention sur la question des zones de sécurité prioritaires, en particulier sur leur adaptation au déplacement de certaines problématiques, comme la lutte contre les stupéfiants, et sur les effets de bord.
Le 11 avril 2016, Sébastien Piffeteau, vice-procureur du tribunal de Bobigny et magistrat en charge de la division des affaires criminelles et de la lutte contre la délinquance organisée, rappelait dans un article les caractéristiques du trafic de cannabis en Seine-Saint-Denis. Son chiffre d’affaires annuel est estimé à 1 milliard d’euros. Les points de vente sont connus : les cités Soubise et Émile-Cordon dans le vieux Saint-Ouen et le quartier Zola-Arago, plus au sud de la commune ; la cité des 4 000 à La Courneuve ; les Beaudottes à Sevran ; les Mille-Mille à Aulnay-sous-Bois – j’en passe.
Dans le cadre de la politique de sécurité et de lutte contre la délinquance mise en place par le Gouvernement, quatre zones de sécurité prioritaires ont été créées en 2012 et en 2013 à Saint-Ouen, Saint-Denis, Sevran-Aulnay-sous-Bois et Aubervilliers-Pantin, avec de bons résultats : baisse des atteintes aux biens, baisse des atteintes aux personnes et augmentation des effectifs de police.
Dans ma circonscription, les plus gros points de vente de cannabis sont la cité de La Noue à Montreuil et le quartier de la Capsulerie à Bagnolet. Les habitants de ces quartiers vivent un enfer. Le maire de Bagnolet, Tony Di Martino, vous a interpellé pour demander la création d’une brigade de sécurité territoriale. En effet, la Capsulerie est un quartier ultra-enclavé, situé à l’intersection de la ligne 3 du métro, de l’autoroute A3 et de la gare routière internationale Eurolines. J’appelle votre attention sur les problèmes qui pourraient se poser à l’occasion des événements sportifs internationaux que nous allons accueillir. C’est un supermarché à ciel ouvert et, je le répète, un enfer pour les habitants.
Pourtant, avec la mise en place de la zone de sécurité prioritaire dans le 20e arrondissement de Paris pour le marché et le détachement d’unités à la porte de Bagnolet, nous avons réussi un travail extraordinaire, notamment concernant la lutte contre la vente à la sauvette. Or, aujourd’hui, le trafic se déplace là où les trafiquants sont moins inquiétés.
À Marseille, la préfecture a mis en place une logique globale, avec une coordination de toutes les directions de la police, des autres services de l’État, des collectivités locales, des acteurs publics et privés et de ceux du monde associatif. À la veille de l’Euro 2016, événement sportif international, le quartier de la Capsulerie est au coeur de l’un des tout premiers pôles hôteliers de la région, avec 700 000 nuitées par an.
J’appelle donc à l’action et à la prise de conscience. Il y a urgence à adopter des mesures concrètes. Nous appelons aujourd’hui, au minimum, à la création d’une brigade de sécurité territoriale. Nous demandons, devant la représentation nationale, que chacun prenne ses responsabilités. Nous sommes en première ligne sur le terrain, avec les habitantes et les habitants et, aujourd’hui, nous n’en pouvons plus.
Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser M. Bernard Cazeneuve, qui, ne pouvant être présent ce matin, m’a demandé de vous répondre.
Protéger nos concitoyens partout sur le territoire national, lutter contre les incivilités, aussi bien que contre toutes les formes de violence et de criminalité, constitue une priorité du Gouvernement, ainsi que des élus de terrain comme vous, monsieur le député.
Vous évoquez le secteur de la Capsulerie, à Bagnolet, en proie au trafic de stupéfiants. Les problématiques de ce secteur sont spécifiquement prises en compte, le site de la Capsulerie constituant l’un des objectifs départementaux du plan de lutte contre les stupéfiants. Des actions contre le trafic de drogue sont menées dans ce quartier à un rythme soutenu, et les résultats sont au rendez-vous : en 2015, ce sont 31 kilogrammes de cannabis et plus de 26 700 euros d’avoirs criminels qui ont été saisis. Les trois premiers mois de l’année 2016 témoignent d’une intensification de l’activité, que vous avez vous-même constatée sur le terrain, avec près de 23 kilogrammes de cannabis et plus de 6 100 euros d’avoirs criminels saisis. Ces résultats ont été encore amplifiés par la saisie, le 1er avril dernier, de 40 kilogrammes de cannabis. Dès lors, les quantités de cannabis saisies depuis le début de l’année 2016 apparaissent d’ores et déjà comme deux fois supérieures à celles prises sur l’ensemble de l’année 2015. Il y a effectivement urgence à agir.
La réponse adéquate réside-t-elle pour autant dans l’extension de la zone de sécurité prioritaire au quartier de la Capsulerie ? Il s’avère que la création, un peu technocratique, d’une nouvelle ZSP propre à la cité de la Capsulerie ne serait pas pertinente au regard de la taille du territoire concerné. Ce qui importe, c’est d’apporter une réponse concrète. La question n’est pas d’accroître le nombre des ZSP existantes, mais d’en exporter la méthode au-delà de leur périmètre actuel. L’objectif n’est pas d’obtenir un label, mais bien la qualité et la nature du travail réalisé, avec le souci quotidien de nouer des relations de confiance efficaces et durables entre tous les acteurs d’un territoire.
Cette méthode de travail pour traiter efficacement des points concentrés de criminalité est mise en oeuvre par les forces de sécurité qui interviennent dans le quartier de la Capsulerie. Par ailleurs, l’ensemble concerné fait déjà l’objet d’une action coordonnée des services départementaux et bénéficie régulièrement de renforts de la police d’agglomération. À titre d’exemple, la saisie importante du 1er avril a été réalisée grâce à une surveillance des effectifs des compagnies de sécurisation et d’intervention – CSI.
Concernant le déport de la délinquance dû à la mise en place de zones de sécurité prioritaires à proximité du quartier de la Capsulerie, la direction territoriale de la sécurité de proximité de Seine-Saint-Denis a mis en oeuvre des groupes locaux d’action transversale dans les quartiers limitrophes, ce qui permet d’éviter un éventuel effet de report.
Vous avez raison, monsieur le député, d’insister sur la coordination et la coproduction en matière de politique de sécurité. Cela suppose une action coordonnée de l’ensemble des acteurs publics, autour de réponses concrètes. À cet égard, le déploiement par la ville de Bagnolet d’un dispositif de vidéoprotection qui serait raccordé au réseau du Plan de vidéoprotection pour Paris – PVPP – constituerait certainement une avancée sensible. Ce déploiement nécessite une impulsion de la majorité municipale.
Soyez assuré, monsieur le député, de l’entière mobilisation des forces de police pour garantir la sécurité à Bagnolet, et notamment dans le quartier de la Capsulerie. Le Gouvernement met tout en oeuvre pour leur donner les moyens matériels et humains de remplir leurs missions de prévention et de sécurité, toutes deux indispensables. L’État et ses partenaires locaux vont continuer à travailler ensemble pour répondre aux attentes de nos concitoyens. Nous savons, pour cela, pouvoir compte sur votre totale mobilisation, monsieur le député.
La parole est à M. Paul Giacobbi, pour exposer sa question, no 1437, relative aux nuisances sonores causées par la base aérienne 126 en Corse.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, ma question porte sur les nuisances sonores dont souffrent les riverains proches de la base aérienne 126, notamment sur la commune de Linguizzetta, où se situe le champ de tir.
En effet, alors qu’une politique de concertation et de dialogue existe depuis des années entre les responsables de la base aérienne, les associations de riverains et les élus, et qu’elle a permis de trouver un équilibre, le bruit est devenu insupportable au mois d’avril.
Dans une communication un peu tardive, adressée le 21 avril aux maires des communes concernées, les responsables de la base ont indiqué que les tirs auront lieu jusqu’au 10 juin – ce qui n’avait pas été le cas depuis près de six ans –, au grand désarroi des professionnels du tourisme situés dans cette zone. Les tirs d’avion vont se prolonger jusqu’à la fin mai et, en juin, ce seront les tirs d’hélicoptère qui débuteront.
Le survol des habitations civiles doit s’effectuer selon des règles strictes en termes de trajectoires et d’horaires, de manière à réduire le désagrément causé à la population locale comme aux touristes, nombreux dans cette région de l’île. Cela est d’autant plus indispensable que la base aérienne 126, qui porte le nom d’un héros du Régiment de chasse Normandie-Niemen, le capitaine Preziosi, est parfaitement intégrée en Corse.
Les insulaires sont fiers de cette présence, comme de celle du 2e Régiment étranger de parachutistes et de la gendarmerie nationale. Ils participent en nombre aux peines et aux joies des militaires qui y résident, comme ce fut encore le cas, le 30 avril à Calvi, pour la commémoration de Camerone par la Légion étrangère. Par ailleurs, ils bénéficient pleinement des retombées économiques de cette présence. Mon collègue et ami Camille de Rocca Serra, ici présent, connaît aussi bien que votre serviteur l’attachement de la population à cette base, ainsi que les retombées économiques positives qu’elle en tire. Et Mme la présidente connaît également cela, au moins aussi bien que nous.
Aussi, pouvez-vous m’indiquer si le Gouvernement entend demander aux autorités militaires locales d’organiser une concertation poussée avec les élus et les habitants, afin de réduire la durée de la campagne de tir et l’impact de ses nuisances sur la population ?
Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser le ministre de la défense, retenu par une réunion opérationnelle.
Depuis le début des années 1960, la base aérienne 126 de Ventiseri-Solenzara a pour mission principale le soutien des escadrons de combat de l’armée de l’air pour l’entraînement aux tirs air-air et air-sol. Elle est ainsi associée à la zone dangereuse LF-D 67 et aux zones réglementées LF-R 65 et LF-R 66, utilisées tout ou partie pour les activités de tir air-air, ou de bombardement. Ces activités sont nécessaires au bon entraînement de nos pilotes aux opérations. La base aérienne 126 accueille régulièrement les unités opérationnelles de l’armée de l’air ou des armées alliées dans le cadre des campagnes de tir, qui induisent une activité aérienne soutenue.
Une politique de concertation et de dialogue a donc été menée depuis de nombreuses années entre les autorités militaires, les élus locaux et les associations de riverains. Cette volonté a permis de limiter le nombre de doléances annuelles recueillies pour gêne sonore : elles furent au nombre de sept en 2015 et de huit en 2014. Ces dernières semaines, du lundi 7 mars au vendredi 25 mars 2016, un exercice majeur d’appui aérien européen Serpentex a été réalisé depuis la plateforme de Ventiseri-Solenzara. Cet exercice a rassemblé des équipages et des contrôleurs aériens avancés pour un ultime entraînement avant leur déploiement en opérations.
Dès le 11 février 2016, et conformément aux usages établis entre l’autorité militaire et les élus, le colonel Le Bouil, commandant de la base aérienne 126, a informé les municipalités de Linguizetta, Aleria, Ghisonaccia, Ventiseri, Solaro, Solenzara et l’établissement Riva Bella de la réalisation de cet exercice, afin que chacun puisse informer les administrés de ces communes. En parallèle, ces prévisions d’activités ont fait l’objet d’une communication active vers les médias locaux qui s’en sont fait le relais, permettant ainsi de prévenir et de préparer l’ensemble des habitants des communes concernées.
La communication, l’information et le dialogue entre les autorités militaires locales et les collectivités n’ont donc jamais cessé.
Enfin, une réunion d’information entre le commandement de la base aérienne 126, les élus locaux et les associations de riverains est déjà programmée pour le mois de mai 2016, afin de détailler les activités à venir et les mesures de limitation des nuisances sonores qui seront mises en place.
L’armée de l’air entend donc plus que jamais, monsieur le député, poursuivre sa politique de concertation et de dialogue tout en maintenant toutes les exigences requises dans la réalisation des missions confiées par le chef de l’État aux forces armées. Il sait pouvoir compter sur votre capacité de médiation dans cette affaire.
Je remercie le Gouvernement d’affirmer cette volonté, dont je ne doutais pas. J’insiste sur notre attachement à cette présence militaire, non seulement parce qu’elle est en Corse, mais aussi parce que les besoins de la défense nationale, surtout dans cette période de crise, sont bien connus. Je remercie le Gouvernement d’insister sur cet effort de concertation, car les populations sont conscientes de son utilité, même lorsqu’elles en sont incommodées. Néanmoins, être réveillé, notamment la nuit, sans en avoir été prévenu, peut poser problème.
La parole est à Mme Josette Pons, pour exposer sa question, no 1431, relative à la concurrence subie par les produits agricoles exportés.
Monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur l’inquiétude qui monte actuellement dans le monde rural.
À l’heure où le Gouvernement sonne le glas de certains produits phytosanitaires utilisables dans l’agriculture française, sans qu’aucune solution alternative sérieuse et durable ne soit proposée, on constate, en même temps, une forte augmentation des importations, en particulier des entrées de vins ou d’autres produits agricoles, comme les fruits et légumes.
Vous ne semblez pas entendre les cris d’alarme émanant de nos agriculteurs, inquiets de voir s’accroître les distorsions de concurrence entre les agriculteurs français et les agriculteurs des autres pays, alors que tous sont européens.
Vous ne semblez pas entendre non plus les inquiétudes légitimes des consommateurs, qui voient passer sur les étalages des produits traités dans le reste de l’Europe avec des matières actives interdites en France. Monsieur le ministre, que comptez-vous faire réellement pour rassurer les agriculteurs et les consommateurs ?
La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Madame la députée, vous dites que je ne semble pas entendre les cris d’alarme des agriculteurs. Qu’est-ce qui vous permet de dire cela ? Sur la question des cerises traitées avec le diméthoate, j’ai décidé qu’il ne pourrait y avoir de dérogations à l’interdiction de mise sur le marché préconisée par l’Agence nationale de sécurité sanitaire – l’ANSES –, interdiction fondée sur des raisons scientifiques. Parallèlement, j’ai porté ce débat au niveau européen, considérant qu’une clause de sauvegarde serait appliquée pour empêcher les importations de cerises qui pouvaient, en Europe et dans les autres pays du monde, être traitées avec le diméthoate. J’ai donc parfaitement répondu à la question posée !
S’agissant des néonicotinoïdes, dont nous avons débattu à l’Assemblée, j’ai pris la décision, sur la base d’un rapport de l’ANSES, d’interdire l’usage de trois pesticides de la famille des néonicotinoïdes en enrobage de semences pour des productions directement liées à des végétaux mellifères, notamment le colza. J’ai ensuite négocié au niveau européen. Depuis trois ans, je le rappelle, un moratoire s’applique à l’échelle européenne sur ces semences enrobées. En prenant cette décision, j’ai au contraire parfaitement intégré la nécessité de ne pas placer les agriculteurs français dans une situation de distorsion de concurrence.
Vous évoquez dans votre question – là réside toute la difficulté du sujet – la nécessité de défendre, d’un côté, les agriculteurs, de l’autre, les consommateurs. Je vous invite à consulter les publications des associations, dont une sortira aujourd’hui encore, sur la question des pesticides. Lorsqu’on est ministre de l’agriculture, pour répondre aux peurs suscitées par la menace des pesticides, on essaie de trouver le bon compromis entre l’aide nécessaire aux agriculteurs pour protéger les cultures et la protection des consommateurs, que vous demandez. Je le fais avec cette cohérence. Je n’ai jamais pris une décision sans me préoccuper de ce qui se passait en Europe. Au contraire ! À l’occasion du débat sur les néonicotinoïdes, j’ai d’ailleurs envoyé un courrier à tous les députés pour rappeler que, sans alternative et sans démarche européenne, on risquait de mettre nos agriculteurs en difficulté.
Madame la députée, vous ne pouvez pas me reprocher de ne pas être à l’écoute. La preuve : je vais prendre une décision sur le diméthoate et, dans le même temps, sera appliquée une clause de sauvegarde, dont je négocie la mise en oeuvre avec les producteurs. À chaque fois que j’ai été conduit à prendre une décision de protection des consommateurs en réglementant l’usage des pesticides, quels qu’ils soient, j’ai pris en compte les inquiétudes des nombreux agriculteurs français qui craignent la définition de règles plus strictes en France que dans les autres pays européens. À chaque fois que j’ai pris une décision, j’ai été aussi la négocier à l’échelle européenne. C’est ainsi qu’il faut procéder pour mettre un terme à cette idée selon laquelle on imposerait à nos agriculteurs des contraintes que d’autres ne subissent pas, d’autant que, si l’on considère que certains pesticides sont dangereux, il n’est pas cohérent de laisser entrer des produits traités avec ceux-ci. Moi, je suis cohérent depuis le début : je protège les agriculteurs et les consommateurs français.
La parole est à M. Camille de Rocca Serra, pour exposer sa question, no 1425, relative à la dette sociale agricole en Corse.
Monsieur le ministre, en 2005, je m’étais fortement impliqué auprès de Dominique Bussereau, qui occupait alors les fonctions qui sont les vôtres aujourd’hui, sur le sujet de la résorption des dettes sociale et bancaire des agriculteurs corses. Bien que cet engagement fructueux ait constitué une étape importante et décisive, il s’agissait d’un point de départ. Le dispositif de désendettement social, préalable à la relance de l’agriculture corse, prévoyait initialement l’effacement des créances de la Mutualité sociale agricole – MSA – antérieures à 1996 et la prise en charge par l’État de 50 % de la dette sociale des exploitants agricoles en activité et des retraités pour la période 1996-2004. Au 31 décembre 2004, le montant maximal de la dette sociale qui pouvait être assumé par l’État était évalué à 5,7 millions d’euros.
Afin de poursuivre la procédure de désendettement engagée, l’article 100 de la loi de finances rectificative pour 2015, introduit par un amendement du Gouvernement en décembre dernier, prévoyait que les prises en charge soient étendues aux dettes sociales dans leur ensemble jusqu’au 1er janvier 2014, à condition que la prise en charge de la dette ne soit pas supérieure à 10 000 euros et, pour les entreprises qui existaient déjà à cette date, que la dette constatée au 1er janvier 2005 fût inférieure à 10 000 euros. L’article 100 modifiait l’article 122 de la loi de finances rectificative pour 2005 et l’article 25 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015 pour étendre les possibilités de prise en charge des cotisations sociales par la MSA au-delà des dispositions votées antérieurement et qui s’étaient révélées inadaptées pour pouvoir consommer l’enveloppe de 5 millions d’euros.
Le Conseil constitutionnel, dans sa décision no 2015-726 DC du 29 décembre 2015, a censuré l’article pour une question de procédure, considérant qu’il s’agissait d’un cavalier budgétaire. Cette décision a de lourdes conséquences sur l’objectif de résorption de la dette sociale agricole, puisque la poursuite de la politique de désendettement se trouve privée de socle juridique. L’avenir de l’agriculture insulaire, qui regorge de potentialités, implique une volonté politique forte pour assainir la situation sociale et permettre aux professionnels de se concentrer sur le développement d’exploitations viables et de productions de qualité.
Monsieur le ministre, je vous ai sollicité par courrier le 21 janvier dernier pour vous demander de réintroduire le dispositif au moyen d’un nouveau véhicule législatif. Aujourd’hui encore, je vous demande de prendre un engagement en ce sens afin de concrétiser cette dernière étape du processus de désendettement agricole.
La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le député, c’est un sujet que je connais bien car il ne date pas d’aujourd’hui. Il faut le régler avec méthode : constance dans les objectifs et mobilisation des moyens de l’État.
Suite à un rapport inter-inspection – Inspection générale des affaires sociales, Inspection générale des finances et Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux – rendu début 2014 constatant l’échec relatif du précédent plan de désendettement décidé en 2005, une feuille de route interministérielle a été définie, adossée à la mobilisation d’une enveloppe de 5 millions d’euros de prise en charge de cotisations sociales, pour enclencher le processus de désendettement. Cette feuille de route s’est traduite par une disposition votée fin 2014 en loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015, afin d’apporter une réponse à l’ensemble des anciens débiteurs, c’est-à-dire affiliés à la MSA avant le 1er janvier 2005.
Dans le cadre de cette feuille de route, l’année 2015 a été marquée par plusieurs avancées. Premièrement, une information régulière de la profession agricole sur l’avancée des travaux et l’organisation d’un Comité de suivi et de coordination sous la présidence du préfet. Je tiens à souligner que ce préfet a réalisé un travail tout à fait conforme aux engagements que j’avais pris à ce sujet. Deuxièmement, un travail important de fiabilisation des données sur le montant et la nature des dettes constituées, étape essentielle et préalable au traitement des dossiers au cas par cas. Troisièmement, une action importante portée par la caisse locale de la MSA pour améliorer ses procédures de recouvrement sur l’encours, notamment en renforçant les étapes amiables en amont du recouvrement forcé. Enfin, un premier bilan des dossiers traités a été établi : admissions en non-valeur et remises de majoration et de pénalités de retard pour 9,9 millions d’euros au bénéfice de 4 834 débiteurs et prise en charge de 786 000 euros de dette pour 280 débiteurs. Nous avons donc avancé sur le sujet.
Comme vous le soulignez, afin de poursuivre le processus de désendettement et de mobiliser l’enveloppe de 5 millions d’euros allouée, le Gouvernement a souhaité également porter des améliorations au cadre législatif par un article voté fin 2015 en loi de finances rectificative, qui a été censuré par le Conseil constitutionnel au motif que ce serait un cavalier budgétaire.
Ma réponse est très claire : pour poursuivre ce travail et mobiliser cette enveloppe de 5 millions d’euros, il faudra introduire un article spécifique dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017. Toutefois, sans attendre le vote de ce dernier en fin d’année, et afin de ne pas bloquer tout le processus en 2016, la MSA recevra prochainement des instructions lui permettant de commencer à traiter les dossiers. Sur ces bases, l’ensemble des 550 dossiers d’anciens débiteurs, représentant un total de 11 millions d’euros de dettes de cotisations légales non prescrites, devra être régularisé d’ici la fin d’année. Voilà l’engagement que je prends et qui permettra de répondre à la décision du Conseil constitutionnel tout en continuant de traiter ces dossiers. Les instructions seront données à la MSA car il faut traiter de manière claire et définitive ce sujet important.
J’espère que nos agriculteurs seront rassurés et que la MSA pourra dès maintenant engager la procédure, en anticipant l’adoption du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017. J’espère également que, grâce à cette confiance retrouvée, nos agriculteurs pourront se consacrer totalement à leur production, car leur métier est de produire, sans avoir à se préoccuper constamment de répondre à des contraintes administratives, que nous avons décidé ensemble de lever.
La parole est à M. Philippe Duron, pour exposer sa question, no 1449, relative au statut fiscal du pommeau.
Monsieur le ministre, je souhaiterais appeler votre attention sur les conséquences de la possible modification du statut fiscal du pommeau pour les producteurs cidricoles normands.
Les producteurs normands de cidre, de poiré, de pommeau et de Calvados s’inquiètent en effet des intentions de la Commission européenne de modifier la définition des boissons alcoolisées relevant de la NC 2206, qui concerne les produits intermédiaires et donc les produits fermentés comme le pommeau. Or, malgré l’addition d’alcool, le pommeau de Normandie conserve bien toutes les caractéristiques des produits classés dans cette catégorie de boissons fermentées, tant en termes d’arômes que de goût. Une requalification des boissons définies dans cet article risque d’exclure le pommeau de Normandie et le classer dans les spiritueux relevant de la NC 2208, soumis à une fiscalité plus importante.
Or une hausse des droits sur ce produit aurait des conséquences financières préoccupantes pour les producteurs cidricoles normands dont 20 % de la production de pommes se retrouve sous forme de pommeau. Par ailleurs, cette requalification constituerait une discrimination inacceptable dans la mesure où des productions similaires à base de raisin, comme le pineau des Charentes, resteraient classées et taxées comme des boissons fermentées et non classées en spiritueux.
Monsieur le ministre, dans le cadre de la révision du règlement de la Communauté européenne no 110-2008, je souhaiterais connaître la position que vous défendrez au niveau européen sur cette question essentielle pour une filière qui fait de grands efforts de qualité et qui cherche à se diversifier en élaborant des produits nouveaux – le cidre rosé, par exemple – et en recherchant de nouveaux marchés. Un tel classement aggraverait les difficultés que rencontre déjà actuellement la filière cidricole, à l’exemple de bien d’autres filières agricoles.
La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le député, je tiens tout d’abord à rappeler qu’un amendement, adopté au Sénat et à l’Assemblée dans le cadre de l’examen de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, a permis de reconnaître que, notamment le vin, produit de la vigne, ainsi que les cidres et poirés, font partie du patrimoine culturel, gastronomique et paysager protégé de la France. L’attachement du ministre à toutes ces boissons est connu et j’ai toujours revendiqué cette volonté. Je suis de l’Ouest comme vous, monsieur le député. Nous sommes l’un et l’autre attachés à notre histoire et à nos produits.
Il n’en reste pas moins vrai que le pommeau de Normandie est susceptible de faire l’objet d’un changement de statut, ce qui ne serait pas sans incidence notamment sur son maintien dans le statut d’indications géographiques – IG. En effet, ce produit bénéficie depuis 1997 de la fiscalité de la catégorie des produits intermédiaires – le code 2206 auquel vous avez fait référence. Dans le même temps, les indications géographiques de pommeau figurent à l’annexe III du règlement de la Communauté européenne no 1102008 répertoriant les IG de boissons spiritueuses enregistrées par l’Union européenne : or ce règlement exclut de son champ d’application les produits de la catégorie 2206. Cette situation de double appartenance pose a priori un problème de compatibilité.
Les représentants des professionnels, inquiets de connaître le statut fiscal qui s’appliquerait désormais à leur produit, ont été reçus au ministère par mon cabinet le 24 février dernier. Ils ont rappelé leur attachement aux IG de pommeau et leur inquiétude quant à la possibilité pour la filière d’assumer une hausse de la fiscalité associée à un passage dans la catégorie des boissons spiritueuses – code 2208 au lieu du code 2206 –, lequel aurait cependant permis au pommeau d’être couvert par le règlement régissant les IG des boissons spiritueuses. Il y a donc contradiction entre, d’une part, la reconnaissance de l’IG qui entraîne un changement de fiscalité, et le maintien dans la fiscalité actuelle qui ne permet pas la reconnaissance de l’IG.
Concernant les aspects fiscaux, le Gouvernement, par la voix de Christian Eckert, a confirmé le classement du pommeau comme boisson intermédiaire sous le code 2206. Concernant la reconnaissance des IG qui y est liée, je tiens à rappeler mon attachement à ces indications qui sont à la fois porteuses de valeur ajoutée et de reconnaissance et garantes des savoir-faire traditionnels sur le long terme. Je suis donc favorable à ce que le pommeau continue à pouvoir bénéficier de cette protection.
L’ouverture prochaine des négociations pour la révision du règlement relatif aux IG des boissons spiritueuses constitue en ce sens une opportunité pour consolider juridiquement la protection du pommeau en tant qu’IG, tout en cherchant à préserver la fiscalité applicable aux produits intermédiaires comme le pommeau. Tel est l’objectif que je poursuivrai dans les négociations. Mes services, conjointement avec ceux des douanes, préparent donc dans cet esprit les discussions futures sur ce processus de révision du droit de l’Union européenne.
Nous chercherons donc à gagner sur les deux fronts, notre objectif étant de conserver une fiscalité spécifique tout en garantissant au pommeau de Normandie son indication géographique. Telle est la ligne du Gouvernement.
Je ne doutais pas de votre soutien, monsieur le ministre, et je vous accompagne évidemment de tous mes encouragements dans cette négociation à venir.
La parole est à Mme Gisèle Biémouret, pour exposer sa question, no 1444, relative à la grippe aviaire et aux aides aux éleveurs.
Monsieur le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, depuis hier plus aucun palmipède, ni oie, ni canard, n’est présent dans les exploitations d’élevage de dix-huit départements du Sud-Ouest. À compter de cette date et jusqu’au 16 mai, les éleveurs doivent observer un vide sanitaire totalement inédit et intégral pour éradiquer un virus encore présent puisqu’un soixante-dix-septième foyer a été recensé dans le Tarn la semaine dernière. Cet épisode sanitaire vient s’ajouter à une crise généralisée frappant l’ensemble de l’agriculture et vis-à-vis de laquelle le Gouvernement et vous, en particulier, ne ménagez pas votre action.
Dans le cas de la grippe aviaire, c’est l’ensemble d’une filière économique prépondérante du Sud-Ouest qui est touché : des producteurs des filières courtes comme des filières longues, des accouveurs, des transformateurs et des acteurs associés comme les transporteurs ou les entreprises d’abattage. Dès à présent, il convient d’envisager une relance de l’activité et de restaurer la confiance des consommateurs afin de préserver les petites exploitations. C’est le sens des mesures prises par les collectivités comme la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées et le conseil départemental du Gers, en vue de compléter celles du Gouvernement.
Monsieur le ministre, qu’en est-il exactement de l’état de l’indemnisation des soixante-seize exploitations touchées par le virus et ayant interrompu leur production ? Qu’en est-il également des moyens mis en oeuvre pour respecter les délais des versements d’indemnisations ? Dans quelle mesure le délai de deux ans imparti pour la mise aux normes sur les conditions de biosécurité ne nuira pas à la garantie de produire, sachant que certains professionnels réclament un assouplissement de l’ordre de cinq ans pour mener à bien ces opérations ? Enfin, qu’en est-il d’un éventuel soutien financier de l’Union européenne dans ce dossier pour relancer la filière ?
La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt.
Madame la députée, vous avez évoqué la grippe aviaire qui nous a contraints à prendre de lourdes décisions à l’échelle européenne et mondiale, puisque nous devons être le premier pays à mettre en oeuvre un vide sanitaire total. C’est que nous avons à faire face à un virus qui, selon les informations que j’ai reçues de la Direction générale de l’alimentation, a muté. Nous devons donc prendre toutes les mesures nécessaires en termes de sécurité.
Je me déplacerai le 13 mai à la fois dans la grande région Aquitaine et dans la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées pour mettre en place l’ensemble des mesures. J’ai, le 26 janvier dernier, annoncé une première fois différentes indemnisations pour les différents acteurs touchés par cette influenza aviaire. Tous les dispositifs d’aide sont susceptibles, à des degrés variables et sous réserve de confirmation, de faire, en partie, l’objet d’une prise en charge par l’Union européenne, que nous négocions actuellement. La Commission attend la constatation des pertes réelles pour établir son soutien. En attendant et quoi qu’il arrive, la France fera les avances. En effet, comme le vide sanitaire n’est pas la procédure habituelle, qui est l’abattage, nous devons, durant les négociations, ajuster nos dispositions – ce que nous faisons actuellement.
Les éleveurs qui ont été touchés par des foyers ont d’ores et déjà été indemnisés de leurs pertes directes, via le programme sanitaire. Ensuite, s’agissant des éleveurs de palmipèdes dont les exploitations sont touchées par l’influenza aviaire – impacts des mesures de dépeuplement –, un dispositif d’aide au manque à gagner a été déployé dans les directions départementales des territoires et de la mer – DDTM – en leur direction. Les formulaires de demande sont ouverts. Une procédure, simple, sur une base forfaitaire par animal multipliée par le nombre de canards, est en cours. Les éleveurs recevront une avance à partir de la fin du mois de mai. Les forfaits prennent bien en compte toute la diversité des élevages concernés : j’ai eu un débat sur ce sujet avec l’ensemble de la profession.
À ce jour, plus de 40 % des éleveurs de palmipèdes ont déposé une demande d’avance en DDTM. Afin de laisser plus de temps pour recevoir les demandes d’autres éleveurs qui souhaiteraient solliciter un appui, j’ai décidé de proroger d’un mois la date limite pour déposer les dossiers. Chacun aura ainsi le temps de solliciter une aide. Un dispositif similaire sera disponible dans les semaines à venir pour les éleveurs d’autres volailles et les accouveurs. L’enveloppe globale – je le rappelle – s’élève à 130 millions d’euros.
Par ailleurs, les autres entreprises, de transformateurs ou transporteurs notamment, qui gravitent autour de cette filière, peuvent bénéficier, sous l’égide des préfets, des dispositifs transversaux suivants : préfinancement du CICE par Bpifrance, report et remise gracieuse des échéances fiscales et sociales, aide à l’activité partielle.
En complément de ces dispositifs, deux outils sont disponibles. S’agissant des entreprises de taille intermédiaire et des grandes entreprises qui, malgré les dispositifs transversaux, verraient leur pérennité confrontée à un risque fort, après examen rapide de leur situation économique et financière, un apport de trésorerie remboursable, sans transformation possible en subvention, pourrait leur être octroyé, dans la limite du seuil de minimis des entreprises.
S’agissant des PME-PMI, un dispositif d’apport de trésorerie avec différé de remboursement de deux ans pourra être transformé en subvention après confirmation des pertes de 2016 dues au dépeuplement. Cette mesure sera dotée d’une enveloppe de 60 millions d’euros.
Ces mesures à destination des entreprises touchées par les mesures de dépeuplement pourraient représenter un effort global de 120 millions d’euros. Elles pourront, vous l’avez souligné, madame la députée, être complétées par des subventions versées par les régions, ce à quoi elles s’appliquent actuellement.
Lorsque je me rendrai sur place le 13 mai, nous ajusterons l’ensemble du dispositif pour répondre aux besoins et des éleveurs et de toutes les entreprises qui sont concernées par la filière.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de vos réponses qui, j’en suis persuadée, rassureront les éleveurs.
La parole est à M. Pascal Demarthe, pour exposer sa question, no 1439, relative à la prise en charge médicale et éducative des enfants handicapés.
Madame la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, j’ai plusieurs fois déjà été interpellé au cours des derniers mois par un nombre grandissant de parents d’enfants en situation de handicap orientés dans les instituts médico-éducatifs – IME : ils m’ont fait part de leur désarroi quant à l’avenir de leurs enfants préadolescents, dont la prise en charge médicale et éducative cesse après l’âge de 12 ans, ce qui met en péril le développement acquis les années précédentes au sein d’unités localisées pour l’inclusion scolaire – ULIS – dans le primaire, notamment pour la partie éducative, et en hôpital de jour ou en centre d’activité thérapeutique à temps partiel – CATTP – pour la partie médicale. De fait, le travail formidable mené par les enseignants et éducateurs spécialisés ainsi que par les soignants sera perdu, faute de continuité dans les actions menées jusque-là.
On annonce aujourd’hui aux parents qui ont reçu une orientation IME de la maison départementale des personnes handicapées – MDPH – de la Somme un délai d’attente de cinq ans au moins. C’est ainsi que 64 enfants sont sur la liste d’attente de l’IME d’Abbeville, dont de nombreux enfants âgés de 12, 13 ou 14 ans qui ont épuisé tous les recours possibles et qui seront sans aucune prise en charge à la rentrée scolaire. En raison de cette situation dramatique, ceux des parents qui le peuvent essaient de trouver des solutions en envoyant leurs enfants, petits ou grands, en Belgique.
Madame la secrétaire d’État, que puis-je dire à tous ces parents qui pensent que la nation abandonne ceux qui souffrent d’un handicap et que les moyens nécessaires ne sont pas mis en oeuvre pour eux, comme ils le sont pour d’autres, ce qui décuple leur sentiment d’injustice alors que notre culture a pour fondement la solidarité ? Dites-moi ce que je dois répondre aux parents de Margaux, de Mélissa, de Clémence, de Camille, de Virgile. Que dire aux parents de Pierre, de Théo, de Lucas ? Car, madame la secrétaire d’État, les statistiques purement comptables de l’agence régionale de santé recouvrent des prénoms, et chaque prénom a besoin de nous. Je vous remercie.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Monsieur le député, je sais combien vous vous êtes impliqué sur la question du handicap et de l’accompagnement des enfants handicapés. Je souscris complètement à votre conception des choses : il ne faut pas raisonner en nombre de places ou d’enfants. Chaque enfant a un prénom et des besoins spécifiques. Il attend donc des réponses qui lui soient spécifiques.
Vous m’interrogez sur les difficultés rencontrées par les parents d’enfants et d’adolescents en situation de handicap, orientés en particulier vers l’institut médico-éducatif d’Abbeville, et qui attendent actuellement une solution d’accompagnement. Je vous répondrai de façon très précise sur les actions qui sont actuellement engagées non seulement par l’agence régionale de santé mais également par l’ensemble des partenaires du territoire.
Tout d’abord, dix places de service d’éducation spéciale et de soins à domicile – SESSAD –, destinées à l’accompagnement d’enfants et adolescents présentant des troubles du spectre autistique, seront mises en place avant la prochaine rentrée scolaire pour répondre aux besoins spécifiques de la Picardie maritime. Ce projet sera porté par l’ADAPEI – Association départementale de parents et amis de personnes handicapées mentales – de la Somme.
Le 29 mars dernier, une commission a réuni l’agence régionale de santé, la MDPH et divers services concernés par cette situation, afin de trouver une solution adaptée pour la vingtaine d’adolescents âgés de 12 à 14 ans, orientés vers l’IME d’Abbeville et identifiés comme potentiellement sans solution d’accompagnement à la prochaine rentrée scolaire. Chaque situation a été étudiée individuellement. Des préconisations ont été rendues pour chacun des enfants ; pour l’instant, elles demeurent soumises à la validation des parents.
Par ailleurs, l’ADAPEI 80 s’est engagée dans une meilleure préparation à la sortie d’IME, bien avant l’âge de 20 ans. En effet, comme vous le savez, le maintien d’un jeune en IME après l’âge limite d’admission empêche d’autres personnes, plus jeunes, d’y entrer. Les premières actions engagées permettront à l’IME d’Abbeville d’accueillir, à la rentrée prochaine, quatre enfants supplémentaires qui attendaient jusqu’alors une solution.
Dans le cadre de la mise en oeuvre du troisième plan « Autisme », l’agence régionale de santé et le département de la Somme sont en train d’examiner la possibilité de créer dix places de foyer d’accueil médicalisé spécialisé sur le territoire. Sous réserve de la position du département, cette offre permettrait de nouvelles admissions en IME, par un effet de cascade, si je puis dire.
Enfin, au regard des besoins identifiés dans l’arrondissement d’Abbeville, l’ARS a décidé d’animer, avec ses partenaires, des réunions régulières afin de permettre l’accompagnement et la scolarisation les mieux adaptés à chaque enfant. Ce faisant, l’ARS poursuit plusieurs objectifs. Il s’agit d’abord de développer l’inclusion scolaire en milieu ordinaire des enfants et adolescents en situation de handicap. Il s’agit ensuite de réserver clairement l’offre médico-sociale en établissement aux besoins des enfants et adolescents pour lesquels l’inclusion scolaire en milieu ordinaire n’est pas envisageable. Sur ce sujet, l’ARS prépare un diagnostic territorial qui sera partagé avec ses partenaires et les élus avant la fin du semestre. Si ce diagnostic territorial devait mettre en évidence de réels déséquilibres en matière de structuration de l’offre entre le médico-social et la scolarisation ordinaire, des possibilités d’ajustements seraient étudiées.
Tels sont, monsieur le député, les éléments que je souhaitais porter à votre connaissance. Le Gouvernement est très attentif à ces questions. Il est important de mettre en oeuvre des réponses adaptées à chaque enfant. C’est un changement de méthode : il ne s’agit plus d’ouvrir des « centres pour handicapés », comme certains disent, mais d’examiner la situation de chaque enfant, ses possibilités, ses souhaits, ses projets et ceux de sa famille. En fonction des possibilités et des souhaits de l’enfant, nous apportons des solutions adaptées et individuelles.
La parole est à M. Bernard Lesterlin, pour exposer sa question, no 1443, relative à l’hôpital de Montluçon.
Madame la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, vous avez voulu remettre l’hôpital public au coeur de notre politique de santé, et je m’en félicite. Cela fait quatre ans que nous soutenons la politique que vous menez, avec Marisol Touraine, pour rendre plus équitable l’accès aux soins de nos concitoyens et pour rétablir les comptes sociaux que la droite avait laissés dans l’état que vous savez. Pour obtenir ces bons résultats, tout le monde a fait des efforts, et le personnel de l’hôpital de Montluçon n’a pas manqué d’y contribuer.
Madame la secrétaire d’État, c’est sur l’hôpital de Montluçon que je souhaite vous interroger aujourd’hui. Dès 2012, la ministre des affaires sociales et de la santé avait accepté de nous aider à sortir d’une situation catastrophique en mandatant, à ma demande, l’intervention d’une mission lourde de l’IGAS. Cette dernière, qui a assuré l’administration provisoire de l’établissement en 2013 et 2014, a établi notre feuille de route, avec un plan de retour à l’équilibre sur trois ans.
Ce plan de redressement des finances du centre hospitalier a demandé beaucoup de sacrifices, notamment la suppression d’une centaine d’emplois. Mais aujourd’hui, le redressement est spectaculaire. L’hémorragie de médecins constatée ces dernières années a été enrayée et, en 2015, nous avons complètement inversé la tendance avec le recrutement de 36 nouveaux médecins. Ce revirement de situation, nous le devons grandement à la politique volontariste et à la gestion rigoureuse du nouveau directeur du centre hospitalier. Après dix ans de perte de vitesse, l’attractivité est enfin revenue.
Dans le même temps, nous avons pu moderniser l’établissement en créant deux nouveaux services de pointe : la coronarographie et l’unité neuro-vasculaire, dite UNV. Très concrètement, depuis janvier, ces nouveaux outils ont permis de sauver plusieurs vies. Pour le bassin montluçonnais où les AVC étaient jusqu’alors la première cause de mortalité, c’est une très bonne nouvelle.
Avec cette création d’activité, le centre hospitalier est sur la bonne voie. Les résultats financiers témoignent d’un redressement significatif. Depuis 2012, le déficit a été ramené de 11 à 2,5 millions d’euros – du jamais vu ! Ce redressement va continuer. En cinq ans, le déficit a été divisé par cinq. En deux ans, la productivité des personnels non médicaux a augmenté de 22 %. En un an, l’activité de l’hôpital s’est accrue de 15 %.
Alors, madame la secrétaire d’État, dites à vos collaborateurs du Comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins – Copermo – et de l’agence régionale de santé – ARS – d’arrêter de stigmatiser notre établissement public de santé. Il a fait des efforts qui méritent notre reconnaissance et notre soutien.
Permettez-moi aussi de souligner une chose dont personne ne parle. Le rapport budgétaire pour 2015, que je tiens à votre disposition, relève que l’assurance maladie doit 2,6 millions d’euros à l’établissement, et le département de l’Allier, 800 000 euros. En d’autres termes, si nous tenons compte de l’augmentation de l’activité – et donc de l’augmentation des recettes grâce à la tarification à l’activité, la T2A – et des dotations dues, l’établissement est en fait déjà à l’équilibre.
Des chiffres dépassés, datant des années 2013 et 2014, ont été communiqués par l’ARS au Copermo pour fixer un objectif inatteignable. Ce n’est pas le moment de casser la dynamique enclenchée ! Nous vous demandons donc, madame la secrétaire d’État, de surseoir à toute décision de suppression de postes supplémentaires dans l’attente du bilan financier 2016.
Je ne veux pas croire que tous les efforts fournis par la communauté hospitalière et l’ensemble du personnel puissent être ruinés par une décision aveugle et technocratique. Il est impossible, pour des personnels dont la productivité est à son maximum, d’encaisser une nouvelle coupe sans prendre de risque pour la vie des malades. Il est impossible, pour un hôpital dont l’activité est en hausse, d’encaisser une nouvelle baisse de ses effectifs. Il est impossible, pour l’élu que je suis, de voir la trajectoire de retour à l’équilibre menacée par une décision vécue comme punitive. D’ailleurs, si j’en crois les propos que vous avez vous-même tenus, madame la secrétaire d’État, au nom de Marisol Touraine lors des questions au Gouvernement du 6 avril, en réponse à une question de Mme la députée Claude Greff, « il n’y aura aucune suppression de postes dans les hôpitaux ».
Madame la secrétaire d’État, ma question est simple : au regard des résultats très encourageants du centre hospitalier de Montluçon en 2015 et de l’effort de redressement accompli depuis 2012, allez-vous revenir sur la décision du Copermo, confirmée par l’ARS, de supprimer des postes dans cet hôpital avant la fin de l’année ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser Marisol Touraine : c’est en son nom que je vais, de nouveau, vous répondre.
Vous avez raison : l’action assumée du Gouvernement en faveur de l’hôpital public a totalement inversé la tendance par rapport à l’action menée avant 2012. Nous avons mis un terme à la convergence des tarifs avec le secteur privé à but lucratif, qui était délétère, en particulier pour l’hôpital public, et balayait les spécificités de la mission de ce dernier. Nous avons aussi redonné aux hôpitaux de proximité, indispensables aux territoires ruraux, tout le soutien qu’ils méritent, en réformant la tarification à l’activité et en finançant de manière spécifique les établissements isolés. Nous avons également revu de fond en comble la manière de soutenir les hôpitaux en difficulté structurelle, en misant sur une démarche consistant en un soutien financier parfois massif accordé aux établissements pour leur donner le temps de s’adapter aux nouveaux besoins.
Tel est justement le cas du centre hospitalier de Montluçon, que la gestion antérieure à 2012 avait laissé exsangue, faute d’un projet médical véritablement soutenu et piloté. Depuis deux ans, comme vous l’avez dit, cet établissement a été remis sur les rails, retrouvant l’attractivité qu’il avait perdue, ce qui s’est traduit, en effet, par une hausse d’activité.
Pour permettre à l’hôpital de Montluçon de relever les défis de transformation indispensables à la pérennité de son offre de soins, l’État s’est montré au rendez-vous, puisque plus de 15 millions d’euros ont été versés à l’établissement dans le cadre de la démarche validée par le Comité de la performance et de la modernisation de l’offre hospitalière.
Comme vous, je veux bien sûr saluer l’engagement des professionnels hospitaliers de Montluçon. Il faut quand même être clair avec eux : ils sont appelés à poursuivre la transformation de leur établissement au service des patients qu’ils accueillent tous les jours, avec le développement des coopérations, notamment dans le cadre du futur groupement hospitalier de territoire, mais aussi avec des nouvelles modalités de prise en charge qui évitent les hospitalisations longues et pénibles pour certains patients.
C’est pour cela, monsieur le député, que nous continuerons d’accompagner le centre hospitalier de Montluçon dans son évolution, comme nous l’avons toujours fait depuis quatre ans.
La parole est à M. Dominique Potier, pour exposer sa question, no 1446, relative aux dépassements d’honoraires médicaux.
Madame la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, le niveau des dépassements d’honoraires médicaux continue de croître. C’est une immense déception, une immense source d’indignation. Les dépassements d’honoraires ont atteint 2,8 milliards d’euros en 2015. L’augmentation, déjà supérieure à 6 % entre 2010 et 2012, se poursuit à un rythme constant depuis que nous sommes aux responsabilités.
Au-delà de ce constat alarmant, il faut examiner la situation en détail et saluer l’instauration des contrats d’accès aux soins, qui ont permis à plus de 11 000 médecins généralistes de jouer le jeu et de limiter le niveau de leurs compléments tarifaires.
Pourtant, dans certains secteurs, on frôle le scandale : ainsi, chez les radiologues de secteur 1, les dépassements d’honoraires ont quasiment doublé en deux ans, passant de 16 à 30 millions d’euros. Lorsque ces dépassements atteignent un tel niveau, madame la secrétaire d’État, c’est le principe même de l’égalité qui est bafoué, puisque les patients de certains territoires ne peuvent plus trouver d’offre au tarif de la Sécurité sociale dans une proximité raisonnable.
Aujourd’hui, l’indécence de ces privilèges heurte profondément nos concitoyens. J’ai pu m’en rendre compte lors de rencontres dans l’ensemble des communes de ma circonscription : c’est l’un des sujets qui revenaient très fréquemment. On pourrait faire le parallèle avec d’autres privilèges et d’autres indécences : je pense au scandale des paradis fiscaux, qui heurte profondément tous nos concitoyens à qui l’on demande aujourd’hui de faire des efforts pour la justice, pour le rétablissement du pays, pour les comptes publics.
Il s’agit donc d’un scandale symbolique, et même d’un scandale pratique pour les patients qui n’ont pas accès à des tarifs réglementés.
Comment peut-on mettre fin à ces privilèges ? Tout d’abord, par l’éducation des parties prenantes, en rappelant aux médecins eux-mêmes le sens de leur engagement. Ensuite, en assurant la diversité de l’offre de soins sur les territoires et peut-être en sanctionnant les professionnels qui ont ces comportements que nous condamnons tous.
Je profite de cette question sur les dépassements d’honoraires pour évoquer l’une de mes autres passions : celle de la prévention en santé publique. La loi de modernisation de notre système de santé, que nous avons votée très largement et qui est l’une de nos fiertés lors de cette législature, met en valeur cette politique de santé publique, mais il y a encore du chemin à faire. Lors de la conférence internationale de l’Organisation mondiale de la santé organisée l’année dernière, nous avons appris qu’à l’échelle mondiale, 97 % des actions sanitaires étaient curatives et 3 % étaient préventives. En France, le partage est plus équilibré – 93 % d’actions curatives, 7 % d’actions préventives –, mais nous sommes encore loin du compte !
Nous savons tous qu’un investissement public massif en la matière aurait un rendement inégalé, non seulement pour le bien-être de nos concitoyens, mais aussi pour les comptes de la Sécurité sociale ; il permettrait également d’éviter toutes les dérives que nous dénonçons vers la privatisation des services de santé, ainsi que les abus que je dénonçais tout à l’heure. Le ministère des affaires sociales et de la santé est en train d’élaborer des indicateurs qui permettront de mieux évaluer l’enjeu d’un investissement en la matière.
Nous devrons mieux coordonner nos politiques publiques. Les contrats locaux de santé vont dans ce sens, mais il faudrait y intégrer les politiques de l’alimentation, les projets alimentaires territoriaux défendus par notre collègue Brigitte Allain, et la lutte contre les pesticides que j’ai moi-même portée auprès du Premier ministre, du ministre de l’agriculture et de la ministre de l’environnement. Il faudrait coordonner les politiques d’environnement, d’alimentation, d’hygiène, de sport, et faire de nos régions des territoires d’excellence sur ces sujets. Il y a là matière à un récit citoyen qui pourrait nous mobiliser, au-delà des générations, au-delà de la ville ou de la campagne, et même au-delà des catégories sociales qui composent notre société. Je crois véritablement qu’il s’agit d’un investissement important.
Je veux enfin faire le lien entre l’indécence des dépassements d’honoraires et la carence d’investissements publics en matière de santé. Et si nous luttions contre tous les dysfonctionnements du système de santé ? Contre les dépassements d’honoraires, contre le recours abusif à l’intérim dans les hôpitaux, qui devient aujourd’hui quasiment une rente, et contre quelques autres malfaçons ? Il y aurait peut-être là matière à mener, à budget constant, une politique de prévention sanitaire authentique, porteuse de promesses pour nos concitoyens et pour la République.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Vous avez raison, monsieur le député : la politique de santé est une politique au champ large, très interministérielle, qui peut également concerner le travail, le sport, l’alimentation… C’est effectivement ce que défend Marisol Touraine depuis 2012 : nous insistons particulièrement sur l’importance de la politique de prévention, qu’il faudrait privilégier à la politique curative.
Quant à la lutte contre les dépassements d’honoraires, elle fait pleinement partie de l’action de la ministre de la santé. L’avenant no 8 à la convention médicale, signé dès octobre 2012, a ainsi permis d’endiguer la progression de ces dépassements et de favoriser l’accès à des tarifs opposables. Le contrat d’accès aux soins incite en effet les médecins à pratiquer des dépassements raisonnables en contrepartie d’avantages sociaux et, pour les patients, d’un meilleur remboursement par l’assurance maladie obligatoire. Un tiers des médecins de secteur 2 en a conclu un, et 17 % des installations en secteur 2 se font aujourd’hui dans le cadre d’un contrat d’accès aux soins.
Parallèlement, l’avenant no 8 renforce le dispositif sanctionnant les dépassements jugés excessifs. Ces sanctions peuvent mener jusqu’à la suspension temporaire du conventionnement du médecin. Entre 2013 et 2015, près de 1 700 médecins ont fait l’objet d’une action de la part de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés – CNAMTS – dans le cadre du contrôle des pratiques tarifaires excessives.
Alors que depuis plus de vingt ans, les dépassements progressaient de façon continue, ils ont commencé à baisser à la fin 2012. De très bons résultats doivent naturellement être soulignés chez les médecins signataires du contrat d’accès aux soins. Ainsi, entre 2012 et septembre 2015, leur taux de dépassement a diminué globalement de 7 points pour les seuls médecins spécialistes ; leur taux d’actes à tarif opposable a lui augmenté de 8 points.
En définitive, la part des dépenses de santé restant à la charge des ménages est en baisse constante depuis 2012.
S’agissant de la prévention, Mme la ministre a demandé au directeur de la CNAMTS de faire du développement de la prévention l’un des axes prioritaires de la négociation conventionnelle en cours avec les médecins. Ainsi, la rémunération sur objectifs de santé publique – ROSP – des médecins doit davantage valoriser les actions de sensibilisation qu’ils mènent pour de meilleures habitudes de vie et des évolutions de comportement de leurs patients.
Dans les semaines à venir, il y aura, nous l’espérons tous, des modifications dans ce domaine.
La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour exposer sa question, no 1428, relative aux bénéficiaires de la prime d’activité.
Ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé et porte sur la prime d’activité mise en place au 1er janvier 2016.
Cette prime, issue de la fusion de la prime pour l’emploi – PPE – et du RSA activité, a été créée par la loi relative au dialogue social et à l’emploi du 17 août 2015. Le Gouvernement avait alors assuré que le nouveau dispositif serait moins coûteux pour les finances publiques et plus efficace, en ce qu’il permettrait de lutter contre la précarité tout en incitant au retour à l’emploi.
La ministre des affaires sociales a récemment annoncé que le nombre de bénéficiaires de la prime d’activité avait atteint 2,16 millions dès février quand les prévisions tablaient sur 2 millions d’ici à l’été. Sachant que le budget prévu pour 2016 était de 4 milliards d’euros, comment le Gouvernement compte-t-il faire face à une dépense qui pourrait s’avérer plus élevée que prévue ? Telle est ma première question.
Par ailleurs, alors que la PPE et le RSA activité bénéficiaient au total à près de 7 millions de foyers, la prime d’activité devrait à terme ne concerner que 2,8 millions d’actifs répartis dans 2 millions de ménages. La rapporteure générale du budget lors de l’examen du PLF 2016 estimait par conséquent que la réforme ferait 824 000 perdants.
Parmi eux se trouvent des couples de concubins, des indépendants – j’en ai reçu dans ma circonscription –, des jeunes, notamment des étudiants qui travaillent et percevaient la PPE. Avec le nouveau dispositif, ils ne pourront bénéficier de la prime d’activité qu’à la condition que leurs revenus professionnels excèdent 0,70 SMIC. Et dans le cas des apprentis, seuls ceux atteignant la fin de leur scolarité pourront toucher la prime.
Seconde question : le Gouvernement a-t-il comptabilisé ces « perdants » de la réforme et que compte-t-il faire pour eux ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Madame la députée, la prime d’activité permet d’aider concrètement ces millions de Français qui travaillent et touchent des revenus modestes. Cette réforme remplace des dispositifs qui, tel le RSA, avait échoué – on peut en effet parler d’échec dès lors qu’une personne éligible sur trois seulement en faisait la demande.
Le Gouvernement avait retenu une prévision de 2 millions de bénéficiaires pour la prime d’activité, la première année, ce qui supposait qu’une personne sur deux demande la prime. Au bout de trois mois, nous avons déjà dépassé cette cible : la prime a bénéficié à plus de 2,3 millions de foyers, représentant plus de 3,8 millions de personnes. La prime d’activité est également un nouveau droit devenu effectif pour 400 000 jeunes qui jusqu’alors restaient inconnus des caisses d’allocations familiales.
Notre volonté était de faciliter l’accès de chacun à la prime d’activité. À cet égard, la mobilisation a été une réussite.
Maintenant, vous redoutez que le succès de la prime ne coûte trop cher. Je ne partage pas cette inquiétude, pas plus que Marisol Touraine ou Christian Eckert, non seulement rien ne permet d’attester un dérapage de l’enveloppe financière, mais il existe des dispositifs prudentiels permettant d’assurer le respect des objectifs globaux de dépenses de l’État. Le Gouvernement, qui a déjà été interrogé à plusieurs reprises à ce sujet, a d’ailleurs toujours fait la même réponse.
Vous nous interrogez ensuite sur ceux qui se retrouveraient perdants suite à l’application du dispositif. Je vous rappelle que notre approche est globale : le Gouvernement soutient le pouvoir d’achat non seulement par la prime d’activité mais aussi dans le cadre des réformes de l’impôt sur le revenu, parmi lesquelles la suppression de la première tranche. Je vous rappelle – car on ne le dit probablement pas assez souvent – que 8 millions de Français ont bénéficié de baisses d’impôts.
Enfin, l’existence de ces « perdants » est aussi le reflet des défauts de la prime pour l’emploi, dont on pouvait bénéficier même lorsque son conjoint avait un niveau de revenu important. Dans un tel cas, on ne peut pas, aujourd’hui, profiter de la prime d’activité. Avec la prime d’activité, nous avons en effet fait des choix, notamment celui d’aider les plus modestes et ceux qui en ont le plus besoin.
Merci de votre réponse, madame la secrétaire d’État. Vous parliez de 6 millions de Français susceptibles de bénéficier de la prime pour l’emploi, mais selon les calculs du secrétaire d’État au budget, on n’y est pas. La ministre des affaires sociales elle-même prévoyait que seuls 50 % des bénéficiaires potentiels déposeraient une demande.
Il est vrai qu’un tiers seulement des personnes éligibles au RSA activité en réclamait le bénéfice. Mais la prime pour l’emploi, elle, était versée à 100 % des personnes qu’elle visait. Nous n’étions pas opposés à la fusion des deux systèmes, mais je persiste à dire qu’elle a fait a des perdants – on les reçoit du reste dans nos permanences. Et ces perdants, en dépit de votre réponse sur la baisse de l’impôt sur le revenu, se sentent lésés, particulièrement les indépendants.
La parole est à Mme Laurence Arribagé, pour exposer sa question, no 1435, relative à l’installation d’un pôle de protonthérapie.
Je souhaitais appeler l’attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur le développement de la protonthérapie, technique innovante de radiothérapie qui utilise un faisceau de protons permettant de détruire les cellules cancéreuses. Ce procédé émergeant garantit un traitement moins agressif en préservant davantage les tissus sains avoisinants d’une irradiation collatérale que lors d’un traitement classique par rayons X.
Cette technique, dont il convient de faire bénéficier un maximum de patients – notamment les enfants, étant donné la sensibilité de leurs tissus –, reste néanmoins très coûteuse puisque l’installation d’un centre de protonthérapie est estimée à environ 50 millions d’euros.
Aussi, dans le cadre du plan « Cancer 3 », un seul centre devrait voir le jour dans le Grand Sud, à l’accueil duquel les villes de Toulouse et Montpellier se sont portées candidates.
Si en matière d’oncologie, une collaboration élargie est un impératif, force est de constater que la Ville rose dispose de solides arguments en sa faveur.
D’une part, Toulouse, quatrième ville de France, compte plus de 450 000 habitants, et son agglomération plus de 725 000 habitants, ce qui en fait la première agglomération de la région Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon. Le nombre de personnes à traiter situées à proximité serait donc particulièrement important.
D’autre part, cette ville s’honore d’avoir sur son territoire un campus de cancérologie, l’Oncopole, pôle de recherche sur le cancer à dimension européenne, fort d’un milliard d’euros d’investissements publics et privés.
Ce regroupement unique de compétences universitaires scientifiques, technologiques, médicales, cliniques, pharmaceutiques et académiques agit tous les jours dans la lutte et la recherche en cancérologie. L’ouverture d’un centre de protonthérapie à Toulouse optimiserait cette force de frappe anti-cancer déjà animée par 1 200 professionnels de santé et 1 500 chercheurs.
Toulouse, vous en conviendrez, dispose donc d’une expertise pluridisciplinaire de qualité qui justifie légitimement sa volonté d’être retenue pour l’implantation du Centre de protonthérapie du Grand Sud.
Aussi, je vous serais particulièrement reconnaissante de nous assurer d’un calendrier précis et d’une prise de décision objective. À ce titre, la constitution d’un jury international d’experts scientifiques reconnus permettrait de contribuer à arbitrer le choix de la ville d’accueil au regard des enjeux inhérents à la création et à l’exploitation d’un centre de protonthérapie.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Madame la députée, une des priorités du plan « cancer 3 », lancé par le Président de la République en février 2014, est d’anticiper et d’accompagner les adaptations nécessaires des prises en charge au regard des évolutions en radiothérapie et de l’innovation dans ce domaine.
La protonthérapie est une technique très spécialisée de radiothérapie utilisant des ions légers et non des photons comme la radiothérapie conventionnelle. Ainsi, en théorie, cette technique permet de mieux cibler les zones tumorales et d’épargner les tissus sains. Elle nécessite un équipement médical lourd et une équipe de professionnels formés et dédiés.
Aujourd’hui, deux centres de protonthérapie sont opérationnels, c’est-à-dire équipés et disposant des autorisations administratives pour l’activité de traitement du cancer par radiothérapie et pour l’exploitation d’un cyclotron à usage médical. Il s’agit de l’Institut Curie à Orsay et du Centre de lutte contre le cancer Lacassagne à Nice.
Avant de créer de nouveaux centres de protonthérapie, il est indispensable de mieux préciser les indications nouvelles potentielles. C’est la raison pour laquelle Marisol Touraine a demandé que cette question soit inscrite au programme de travail 2016 de la Haute autorité de santé.
Parallèlement, le ministère de la santé, en lien avec l’Institut national du cancer, expertise les aspects médico-économiques de la protonthérapie dans le cadre du comité de pilotage « cancer » du comité de réforme de la tarification hospitalière – CORETAH.
Enfin, l’article 158 de la loi de modernisation de notre système de santé permet dès 2016 une évolution réglementaire du dispositif d’encadrement des équipements matériels lourds dans le cadre du futur schéma inter-régional de soins.
C’est sur le fondement des conclusions des travaux en cours que la ministre et les directeurs généraux des agences régionales de santé pourront autoriser des centres de protonthérapie.
En réalité, madame la secrétaire d’État, vous n’avez pas répondu à mes préoccupations,…
Si, j’ai répondu.
…notamment s’agissant du calendrier ou de la localisation du centre à Toulouse ou à Montpellier. Vous vous êtes contentée de répéter ce que j’ai dit.
La parole est à M. Gaby Charroux, pour exposer sa question, no 1422, relative au grand conseil de la mutualité dans les Bouches-du-Rhône.
Ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé. Le grand conseil de la mutualité des Bouches-du-Rhône représente vingt-huit structures de soins dans le département, emploie 680 salariés pour un chiffre d’affaires de 40 millions d’euros et s’adresse à 200 000 patients.
À titre d’exemple, le centre de santé de Martigues, ville dont je suis le maire, a réalisé 8 887 actes de médecine générale en 2015. Au total, plus de 576 000 actes ont été réalisés sur l’ensemble des centres du département – tous en secteur 1, bien sûr. Ils constituent donc bien une pièce essentielle de l’offre de soins dans le département des Bouches-du-Rhône.
Vous le savez, le grand conseil de la mutualité est confronté à de nouvelles difficultés financières. Alors qu’à l’initiative de Mme la ministre, et parfois non sans mal, le ministère des affaires sociales et de la santé préconise la généralisation du tiers-payant intégral aux médecins généralistes, les centres de santé mutualistes le pratiquent depuis plusieurs années sans aucun financement public structurel.
Par courrier du 4 avril dernier, Mme la ministre a réaffirmé son engagement à accompagner financièrement le grand conseil de la mutualité en effaçant 50 % de la dette sociale, soit un apport indirect de 3 millions d’euros.
Comme cela se pratique dans les hôpitaux, cette aide importante est conditionnée à la signature d’un contrat de retour à l’équilibre financier – CREF. Or l’application de tels contrats entraîne malheureusement souvent une gestion de la pénurie pour des centres hospitaliers qui, en dépit de leur activité croissante, restent très pénalisés par la loi HPST – hôpital, patients, santé et territoire – adoptée le 21 juillet 2009 et que ce Gouvernement n’a pas abrogée.
Si je n’envisage pas que l’État puisse, au travers de ce CREF, mettre sous tutelle le Grand conseil de la mutualité, plusieurs questions se posent sur l’avenir de la structure.
Ainsi, le tribunal de grande instance de Marseille a reporté son audience au 14 juin afin de laisser le temps de mettre en place ce contrat de retour à l’équilibre.
Un tel délai est à la fois très court et très long. En effet, deux mois ne semblent pas suffire compte tenu de l’ampleur du travail sanitaire, social et financier nécessaire pour rendre l’activité pérenne sans diminuer l’offre ni agir uniquement sur la dépense, notamment en matière de personnel – d’autant que le cadre paritaire des décisions ne doit pas être écarté. D’un autre côté, rien ne garantit que la trésorerie du grand conseil puisse tenir pendant cette période sans apport financier extérieur.
J’ai plusieurs questions à poser. En premier lieu, la ministre confirme-t-elle l’apurement de 50 % du passif lié à la signature du CREF ?
Ensuite, le ministère est-il prêt à dégager, comme il l’a déjà fait par le passé, une aide à la trésorerie afin de permettre de travailler sereinement à ce contrat sans être sous la menace d’une cessation de paiement ?
Enfin, Mme la ministre est-elle prête à agir pour que ce contrat de retour à l’équilibre n’influe pas seulement sur la dépense, mais intègre la question de la prise en charge du tiers-payant ou l’examen d’une fiscalité équilibrée par rapport aux structures privées ?
Ces questions me paraissent essentielles, car l’attribution de moyens pérennes à cette structure de soins elle-même essentielle, qui agit souvent envers les plus démunis, répondrait à une attente très forte. À l’inverse, réduire encore la voilure après les efforts faits ces trois dernières années reviendrait à reculer pour mieux sauter.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Monsieur le député, les activités exercées par le grand conseil de la mutualité, qui gère de nombreux centres de santé médicaux et dentaires, constituent une offre de santé d’intérêt général pour l’accès aux soins d’une partie de la population de votre département. Malheureusement, cet organisme se trouve en difficulté financière constante depuis plusieurs années, malgré l’importance des aides financières que l’État a régulièrement consenties au nom précisément de la préservation de l’accès aux soins. Par décision du tribunal de grande instance de Marseille, la structure a été placée sous procédure de redressement judiciaire.
C’est dans ce cadre, afin de clarifier la situation du grand conseil de la mutualité et compte tenu des difficultés financières qu’il continue de rencontrer en dépit des aides conséquentes qui lui ont été versées en 2015, que Marisol Touraine, ministre de la santé, a diligenté une mission de l’Inspection générale des affaires sociales. Celle-ci s’est conclue en janvier 2016 et a conduit, dans la foulée, à poursuivre l’accompagnement financier du grand conseil de la mutualité. Ce soutien sera néanmoins apporté sous condition d’élaboration et de validation prochaines d’un plan pluriannuel de retour à l’équilibre financier pérenne et crédible, visant à mettre un terme à cette situation permanente et angoissante pour les professionnels qui travaillent dans le cadre de cet organisme, et contractualisé avec l’agence régionale de santé de Provence-Alpes-Côte d’Azur. Ce plan devra engager des réformes profondes, précisément planifiées et régulièrement évaluées sur un horizon pluriannuel.
Le grand conseil de la mutualité s’est déclaré tout à fait favorable à cette démarche conditionnée et s’y est déjà engagé pleinement. Aujourd’hui, je ne doute donc pas qu’il saisisse cette chance d’assurer sa propre pérennité, au service de la population des Bouches-du-Rhône.
Madame la secrétaire d’État, je crois avoir compris que vous confirmez l’apurement du passif, lié à la signature du CREF.
La parole est à M. Christophe Premat, pour exposer sa question, no 1440, relative au délai de carence pour l’assurance maladie des Français expatriés de retour en France.
Madame la secrétaire d’État, dans le rapport remis par la sénatrice et ancienne ministre Hélène Conway au Premier ministre en juillet 2015 sur le retour en France, on apprend que l’inscription ou la réinscription à l’assurance-maladie est la première préoccupation des Français de l’étranger préparant un retour en France, devant l’emploi ou le logement.
Le retour en France recouvre plusieurs réalités et des situations familiales, personnelles et professionnelles très diverses. Parmi ces situations, une majorité de nos compatriotes – 59 %, selon le rapport – reviennent s’installer en France après une fin de contrat dans le pays d’expatriation ou pour suivre leur conjoint qui bénéficie d’une nouvelle opportunité professionnelle. Ils connaissent alors une période sans activité professionnelle, jalonnée de démarches en tout genre, parmi lesquelles l’inscription à la Sécurité sociale.
Ces personnes sans emploi ne peuvent cependant pas bénéficier d’une couverture immédiate, car un délai de carence leur est imposé. En effet, la protection universelle maladie – PUMa –, mise en place le 1er janvier 2016, offre une couverture maladie à toutes les personnes résidant en France, mais une telle affiliation impose un délai de carence de trois mois, impliquant l’absence de toute couverture santé pendant cette période, a fortiori lorsqu’il n’est pas possible – et c’est souvent le cas – de mettre en place la portabilité des droits à la couverture maladie du pays de départ.
Ce délai de carence est particulièrement incommodant pour ce qui concerne les démarches de réaffiliation au régime général de la Caisse primaire d’assurance maladie pour les personnes sans emploi ou pour les conjoints sans emploi revenant en France à l’issue d’une période d’expatriation, qui doivent demander leur affiliation à la Sécurité sociale via la PUMa, au titre du critère de résidence.
Pour les conjoints de retour en France et sans travail, cette situation nouvelle, liée à la disparition du statut d’ayant-droit majeur depuis la mise en place de la PUMa, est très désavantageuse, car elle ne permet plus d’être affilié dès son retour en France au titre de la couverture sécurité sociale de son conjoint salarié.
Afin de trouver une solution à ce vide juridique qui s’apparenterait pratiquement une rupture d’égalité, je vous interrogerai donc sur deux points.
Quelles sont, d’abord, les actions prévues pour mettre fin rapidement à cette anomalie qui pénalise injustement nos compatriotes Français de l’étranger devant s’installer en France après leur retour d’expatriation ?
Ensuite, dans le cas où un compatriote serait rentré en France depuis le 1er janvier 2016 et se trouve de facto dans cette période de trois mois de carence, comment pourrait-il avoir accès à des soins ou à un médecin sans avoir à débourser de frais ? Le cas échéant, pourrait-il se faire rembourser des frais engagés depuis le 1er janvier 2016 ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Monsieur le député, comme vous le rappelez, la protection universelle maladie permet, depuis le 1er janvier 2016, à toute personne majeure résidant ou exerçant une activité professionnelle en France de bénéficier de manière autonome d’une couverture maladie. Pour celles et ceux qui n’exercent pas d’activité, l’ouverture des droits est soumise à deux conditions : la régularité du séjour et la stabilité de la résidence – à savoir le fait de résider six mois par an en France. Lors d’une installation en France, cette dernière condition est remplie à l’issue d’un délai de trois mois, sauf exceptions prévues par les textes.
Votre question concerne nos concitoyens de retour en France à l’issue d’une expatriation et porte en particulier sur les règles applicables aux personnes sans activité accompagnant ou rejoignant leur conjoint relevant d’un régime d’assurance-maladie en France.
Le problème ne se pose que pour les personnes qui ne bénéficient pas de dispositions de maintien des droits ouverts dans leur pays d’origine – lorsqu’elles en ont un. Or, ce maintien est en pratique très fréquent dans le cadre de la coordination européenne ou des accords bilatéraux de sécurité sociale.
Par ailleurs, pour sécuriser le fait que ces personnes doivent bien être éligibles d’emblée à la protection universelle maladie, un décret en cours de finalisation rendra explicite le fait que la condition de stabilité de résidence est présumée remplie pour les assurés comme pour les membres de leur famille : aucun délai de carence ne leur sera appliqué pour l’ouverture de leurs droits à titre personnel. Les personnes concernées pourront demander le réexamen de leur demande de rattachement à la Sécurité sociale à leur date d’installation en France et obtenir le remboursement des soins intervenus depuis lors.
J’espère avoir répondu à vos questions et aux inquiétudes légitimes des personnes qui vous ont interrogé.
Merci beaucoup, madame la secrétaire d’État, pour cette réponse claire sur le délai de carence. Recevant de nombreux concitoyens, je peux évoquer par exemple les difficultés liées à l’accès à la carte Vitale, qui conditionne parfois, en outre, l’inscription administrative à l’université – des étudiants revenant en France après un séjour à Londres se sont ainsi trouvés sans carte Vitale ni possibilité d’inscription administrative. On peut citer aussi la question de l’ouverture de droits sociaux.
Vous soulignez à juste titre l’existence de deux possibilités : la réglementation européenne, qui évolue actuellement dans ce domaine, notamment pour les retraites et la portabilité des droits, et les conventions bilatérales, peut-être plus laborieuses, mais également nécessaires, notamment pour des pays dans lesquels la communauté française est assez nombreuse, comme c’est le cas au Royaume-Uni.
Pour ce qui est de la portabilité des droits, j’espère que les accords de sécurité sociale, notamment avec le National Health Service – NHS –, pourront aboutir afin de réduire au maximum ce délai de carence et permettre à nos compatriotes d’anticiper leur réaffiliation lors de leur retour en France.
La parole est à M. Olivier Dassault, pour exposer sa question, no 1426, relative à l’interdiction des pré-enseignes commerciales.
Madame la secrétaire d’État chargée de la biodiversité, les petits panneaux qui fleurissaient au bord des routes ont disparu depuis le 13 juillet 2015. Si chacun comprend la nécessité de limiter la publicité et d’éviter toute pollution visuelle, les artisans et commerçants travaillant en milieu rural, loin des centres commerciaux, sont désormais privés de moyens de communication.
Voilà quelques semaines, lors d’une brocante dans le village de Troissereux, un restaurateur me signalait que, depuis la suppression de sa pancarte à la bifurcation d’une route nationale, son établissement avait perdu 30 % de sa fréquentation – 30 % de sa clientèle : les visiteurs de passage ne s’arrêtent plus pour visiter et consommer dans les environs. C’est aussi 30 % de travail en moins et 30 % de baisse de revenu, qui ont inévitablement des incidences sur l’emploi. Ce témoignage démontre combien la signalétique directionnelle est indispensable au maintien d’activités commerciales dans les zones les plus reculées.
L’absence de pré-enseignes n’est pas, je le rappelle, entièrement compensée par la technologie, car les GPS ou les applications mobiles ne fonctionnent pas encore partout, faute de réseau, en particulier dans ce département qui est un peu en retard dans ce domaine. Je n’irai pas jusqu’à affirmer que la suppression des pré-enseignes tue l’activité de nos villages – d’autres dispositions s’en chargent volontiers –, mais il est certain qu’elle participe à leur enclavement !
Madame la secrétaire d’État, la beauté de nos campagnes, à laquelle je suis, comme vous, très attaché, sera garantie si quelques pancartes foisonnent encore au milieu des champs, pourvu qu’elles soient harmonieuses et encadrées.
Je sais bien que votre majorité n’est pas à l’origine de cette loi, mais il est aujourd’hui en votre pouvoir de participer à son amélioration. Comptez-vous donc soutenir l’addition des métiers de bouche et de l’activité artisanale à la liste restrictive des pré-enseignes dérogatoires figurant à l’article L. 581-19 du code de l’environnement ?
Monsieur le député, vous avez interrogé Mme Segolène Royal, ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, en charge des relations internationales sur le climat, sur la réglementation applicable à certains dispositifs publicitaires. Ne pouvant être présente, elle m’a chargée de vous répondre.
La loi no 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement a modifié le régime applicable aux pré-enseignes dérogatoires et leur a accordé un délai de cinq ans pour se conformer à la nouvelle réglementation – c’est-à-dire avant le 13 juillet 2015. Par ailleurs l’article L. 581-19 du code de l’environnement, que vous avez évoqué, a mis fin à la possibilité pour certaines activités de bénéficier de pré-enseignes dérogatoires.
Il prévoit toutefois, à son alinéa 6, la possibilité d’un signalement dans le cadre de la réglementation relative à la circulation routière. Ainsi l’arrêté du 6 décembre 2011 a-t-il modifié l’arrêté du 24 novembre 1967 relatif à la signalisation des routes et des autoroutes, afin de créer un nouveau type de signalisation directionnelle, dénommée « signalisation d’information locale » – SIL. La mise en place de cette signalisation se fait à l’initiative des sociétés concernées, en lien avec les collectivités chargées de la gestion des voiries ou du territoire d’implantation de la signalétique. Des entreprises de l’hôtellerie et de la restauration ont déjà mis en place des signalisations de ce type.
Le problème de la multiplication et de l’impact des pré-enseignes dérogatoires sur la qualité du cadre de vie, particulièrement dans les entrées de ville, a été à l’origine de la profonde réforme du droit de la publicité conduite en 2010. Les règles applicables à la publicité, aux enseignes et aux pré-enseignes sont donc fixées afin d’assurer la protection de ce cadre de vie que vous mettez en valeur, tout en garantissant le respect de la liberté d’expression et de la liberté du commerce et de l’industrie, ainsi que le bon exercice de l’activité des opérateurs économiques.
Madame la secrétaire d’État, Mme Ségolène Royal est avantageusement représentée par vous-même. Je vous remercie pour cette réponse précise et j’espère que, forts de ces éléments, nous pourrons trouver une solution locale pour permettre à ce restaurateur de grande qualité de faire venir des clients et des touristes dans cette région. Comme vous le savez en effet, lorsque ceux-ci viennent se restaurer, d’autres commerces en profitent.
Je suis toutefois d’accord avec vous : il faut préserver l’environnement et il faut que ces pancartes soient harmonieuses et joliment réalisées et dessinées. Je vous remercie de votre encouragement.
La parole est à M. Jean-Claude Mignon, pour exposer sa question, no 1432, relative au plan régional de gestion des déchets issus de chantiers du bâtiment et des travaux publics en Île-de-France.
Madame la secrétaire d’État, je tiens à appeler l’attention de Mme la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer sur une situation très préoccupante, qui suscite l’inquiétude et le mécontentement de la population et des élus du département de Seine-et-Marne.
Après cinq années de négociations, le Conseil régional d’Île-de-France a adopté à l’unanimité, en juin 2015, le plan régional de gestion des déchets issus de chantiers du bâtiment et des travaux publics – PREDEC. Ce plan, prévu pour douze ans, procède à un rééquilibrage entre les différents départements franciliens en matière de stockage des déchets. D’autre part, il organise une filière de recyclage, met fin au stockage systématique en Seine-et-Marne et prévoit un moratoire de trois ans interdisant en Seine-et-Marne toute nouvelle création d’installation de stockage, tout en limitant ensuite la capacité d’accueil à 4 millions de tonnes par an.
En 2014, le préfet de région avait donné un avis favorable à l’avant-projet. Aujourd’hui, alors que les travaux du Grand Paris vont générer plus de 43 millions de tonnes de déchets dont le stockage n’a pas été anticipé, il demande l’annulation du moratoire.
La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République – dite loi NOTRE – impose une révision du PREDEC à compter du mois d’août 2015. Il m’apparaîtrait inconcevable que les élus Seine-et-Marnais ne soient pas associés aux discussions à venir, alors que notre territoire va connaître de nouveaux bouleversements. Nous prévoyons en effet une aggravation des nuisances du trafic, la consommation de terres agricoles et une augmentation des décharges sauvages – sans compter la détérioration de nos axes routiers.
Le département de Seine-et-Marne ne peut supporter à lui seul les répercussions négatives liées aux travaux du Grand Paris. Face à l’ampleur des déchets occasionnés par ce chantier, il est indispensable de procéder à l’ouverture de décharges avec la réalisation de nouvelles plates-formes de tri et de recyclage, et non plus de simples espaces de stockage.
En conséquence, je poserai deux questions à Mme la ministre de l’environnement. Quelles pistes le Gouvernement envisage-t-il afin d’éviter que la Seine-et-Marne ne devienne la poubelle des chantiers de l’Île-de-France ? Quel est l’état d’avancement des créations de filières de recyclage de matériaux dans ce département ?
Monsieur le député, vous avez interrogé Mme Ségolène Royal, qui ne peut être présente, et qui m’a chargée de vous répondre à sa place. La planification de la gestion des déchets est un enjeu essentiel dont la ministre de l’environnement a pleinement conscience, et pour lequel elle s’est spécialement mobilisée.
Les plans de prévention et de gestion des déchets visent avant tout à définir des axes pour gérer les déchets au mieux et au plus près de leurs lieux de production. Or les travaux du Grand Paris vont entraîner d’importants besoins en matière de traitement des déchets. Ces besoins rendent nécessaire le développement d’installations de valorisation de déchets, notamment de déchets inertes, à l’ouest de la région Île-de-France. Cet aspect est bien prévu par le plan de prévention et de gestion des déchets. Ce besoin d’installations de valorisation des déchets fait l’objet d’une prise de conscience générale – certains industriels l’ont bien compris – : la démarche, dans l’ensemble, est lancée.
Le moratoire sur de nouvelles installations de stockage de déchets en Seine-et-Marne confirmait cette orientation en évitant un retour en arrière. Toutefois, la validité juridique de cette disposition a été contestée : l’affaire est désormais devant le juge administratif ; il faut attendre que ce dernier statue.
Vous pouvez compter sur le soutien plein et entier de Ségolène Royal, tant vis-à-vis des collectivités locales en charge des déchets dans la région que des fédérations professionnelles de gestionnaires de déchets, afin d’appuyer les orientations du plan de prévention et de gestion des déchets d’Île-de-France.
La parole est à Mme Luce Pane, pour exposer sa question, no 1445, relative à la lutte contre l’habitat insalubre.
Ma question s’adresse à Mme la ministre du logement et de l’habitat durable. L’habitat insalubre se caractérise par le danger qu’il représente pour ses occupants ou pour des personnes extérieures. C’est un problème de santé et de sécurité publique ; au-delà, c’est un problème pour notre cadre de vie, qui pâtit de la multiplication de telles habitations – qu’elles soient occupées, abandonnées, ou même squattées.
On estime le nombre de logements indignes occupés dans le parc privé en métropole à 430 000, répartis à parts égales entre locataires privés et propriétaires occupants. Les villes comme les campagnes sont touchées ; les communes de la circonscription où je suis élue sont elles aussi, naturellement, concernées. Elles disposent en effet d’un parc privé de logements individuels important. Ces logements sont parfois vieillissants ; ils ont alors besoin de travaux, mais ceux-ci se révèlent souvent trop onéreux pour les propriétaires.
Les pouvoirs publics interviennent : environ 10 000 situations sont traitées chaque année. Il s’agit notamment de réhabilitation de logements dans le cadre d’opérations incitatives classiques comme les OPAH – opération programmée d’amélioration de l’habitat –, les PIG – programmes d’intérêt général – et les MOUS – maîtrise d’oeuvre urbaine et sociale. Il peut aussi s’agir d’actions coercitives menées par les services de l’État et les maires.
Malgré cela, on observe un décalage entre le nombre estimé de logements privés indignes et le nombre de procédures réellement engagées. Ce décalage témoigne des limites actuelles de la lutte contre l’habitat indigne.
Les services de l’État et les collectivités locales disposent aujourd’hui d’une bonne connaissance des dispositifs incitatifs et coercitifs, mais ils sont lourds, et longs à mettre en oeuvre. Souvent, les dispositifs incitatifs à la réhabilitation des logements ne suffisent pas à convaincre les propriétaires de faire des travaux. Il est vrai que les travaux de réhabilitation coûtent cher ; surtout pour des propriétaires impécunieux ou plongés dans des difficultés sociales. Ils sont par ailleurs refusés par ceux qui louent sciemment, de façon malhonnête, des logements insalubres : marchands de sommeil, filières clandestines, etc.
La lutte contre l’habitat indigne a été jugée prioritaire à plusieurs reprises par le Gouvernement, qui a déjà agi en ce sens. La loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, y a contribué. Les outils de lutte contre l’habitat indigne ont ainsi été renforcés, mais l’identification et la mise en oeuvre de ces dispositifs est toujours épineuse.
C’est pourquoi je voudrais savoir quelles mesures Mme la ministre du logement et de l’habitat durable compte prendre pour améliorer et pour accentuer la lutte contre l’habitat indigne, aux côtés des collectivités locales.
Madame la députée, je vous prie d’excuser Mme la ministre du logement, qui est retenue par une réunion sur la question de l’hébergement des réfugiés en France. La lutte contre l’habitat indigne est une priorité pour le Gouvernement. Les pouvoirs publics disposent déjà de nombreux outils, de moyens importants : le Gouvernement s’attache, depuis plusieurs années, à les consolider.
Pour améliorer le repérage des habitats indignes, et pour rendre les actions plus incitatives, le Gouvernement a notamment conforté le budget de l’Agence nationale de l’habitat, l’ANAH, depuis plusieurs années. Cela a permis de traiter 9 573 logements indignes ou très dégradés en 2015. L’action incitative est complémentaire et indissociable de la coercition. Des actions telles que les opérations programmées d’amélioration de l’habitat, ou les programmes d’intérêt général, sont ainsi indispensables pour identifier de façon systématique les habitats indignes. Ces situations sont traitées soit de façon incitative, grâce aux subventions de l’ANAH, soit de manière coercitive, en ayant recours aux polices spéciales de lutte contre l’habitat indigne.
Pour faciliter le repérage, le Gouvernement utilise en outre, depuis 2013, un outil informatique de repérage et de traitement de l’habitat indigne, qui a vocation à rassembler l’ensemble des adresses de logements indignes et non décents. Pour consolider l’action coercitive, la loi ALUR a instauré de nombreuses mesures visant à contraindre les propriétaires à effectuer des travaux dans les logements. La lutte contre l’habitat indigne va s’intensifier car depuis la fin de l’année 2015 et la publication du décret d’application concerné, les autorités publiques peuvent prononcer des astreintes administratives dans le cadre des procédures de police administrative relatives à l’insalubrité, au péril ou aux hôtels meublés.
Le Gouvernement favorise par ailleurs des approches innovantes s’appuyant sur les procédures d’expropriation, ou des dispositifs de portage immobilier pour enrayer les phénomènes de dévalorisation et de dévitalisation urbaine, qui font le lit de l’habitat indigne – en zone urbaine comme en zone rurale. J’en donnerai deux exemples : les opérations de résorption de l’habitat insalubre irrémédiable ou dangereux et de restauration immobilière financées par l’ANAH ; les opérations de requalification de copropriétés dégradées d’intérêt national.
Afin d’améliorer l’efficacité de la lutte contre l’habitat indigne, le Gouvernement continuera à favoriser l’émergence de l’intercommunalité comme acteur unique spécialisé dans la lutte contre l’habitat indigne. C’est ce niveau qui doit disposer des outils d’incitation et de coercition. Par le projet de loi « Égalité et citoyenneté », nous proposons de consolider les dispositions instaurées par l’article 75 de la loi ALUR, pour transférer les compétences en matière d’habitat indigne en favorisant l’émergence de services intercommunaux spécialisés.
Madame la secrétaire d’État, je remercie Mme la ministre du logement pour sa réponse. Tous ces éléments nous seront utiles dans la lutte contre l’habitat indigne.
Je tiens à souligner que beaucoup d’efforts financiers ont été réalisés dans le cadre de gros programmes, tels que les programmes nationaux pour la rénovation urbaine. En matière d’habitat indigne, les procédures de péril représentent un coût important pour les collectivités locales, que cette compétence relève de la commune ou de l’intercommunalité. Il faut étudier des solutions pour les aider sous ce rapport : lutter contre l’habitat indigne, cela ne signifie pas seulement détruire des logements vétustes pour reconstruire des logements neufs, mais aussi entretenir, rénover, réhabiliter les logements existants, c’est-à-dire reconstruire la ville sur elle-même.
La parole est à M. Philippe Le Ray, pour exposer sa question, no 1423, relative à l’application de la loi ALUR.
Ma question s’adresse à Mme la ministre du logement et de l’habitat durable. La mise en oeuvre de la loi ALUR pose, comme vous le savez, de réelles difficultés. L’urbanisation de ce que l’on appelle des « dents creuses » dans les STECAL, les secteurs de taille et de capacité d’accueil limitées, est un véritable casse-tête quotidien pour les élus locaux et nos concitoyens. Les règles qui régissent ces zones sont extrêmement restrictives, car elles n’autorisent le développement que d’une ou deux zones en dehors des agglomérations.
Rien que dans le Morbihan, des milliers de petits terrains ne sont plus constructibles. Leurs propriétaires, souvent modestes, se sentent spoliés. Il faut les comprendre : ils ont payé des impôts, des droits de succession ; certains d’entre eux ne sont devenus propriétaires que récemment ; et ils se retrouvent avec un terrain non constructible !
Contrairement à ce qu’a dit Mme Cosse à la commission des affaires économiques le 29 mars dernier, en pratique, la loi ALUR est plus contraignante que la loi littoral : je persiste à le dire ! En effet, dans les communes littorales dont le plan local d’urbanisme ou le plan d’occupation des sols a été adopté avant la loi ALUR, il est possible de construire dans des « dents creuses » sans extension d’urbanisme, grâce au pastillage de certains écarts. La densification n’est pas considérée comme une extension, mais comme la résorption d’une « dent creuse ».
Certaines communes de ma circonscription comptent jusqu’à trente STECAL – c’est souvent le cas en Bretagne. Or avec la loi ALUR, les STECAL revêtent un caractère tout à fait exceptionnel, ce qui signifie, à terme, la disparition de nombreuses « dents creuses » dans les futurs PLU. Pouvez-vous préciser les dispositions que vous comptez prendre afin de modifier le caractère exceptionnel des STECAL, de sorte que les « dents creuses », sans intérêt pour l’agriculture, deviennent constructibles ? L’objectif reste, bien entendu, d’éviter l’urbanisation d’espaces agricoles.
À défaut, proposerez-vous que l’État rembourse les impôts, les droits de mutation et les droits de succession de ces propriétaires qui ont été plumés ?
Monsieur le député, je vous remercie d’excuser Emmanuelle Cosse pour son absence. Elle m’a chargée de vous répondre à sa place.
Vous l’interrogez sur les effets cumulés de la loi littoral et de la loi ALUR ; vous évoquez la situation de propriétaires qui ne savent comment agir face à des « dents creuses ». L’objectif du législateur, depuis de nombreuses années, est de maîtriser la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers. Pour cela, deux principes directeurs ont été fixés : premièrement, l’urbanisation en continuité du bâti existant sur les territoires littoraux ; deuxièmement, l’inconstructibilité des zones naturelles et agricoles, à l’exception des constructions et installations nécessaires à l’exploitation agricole, à des équipements collectifs ou à des services publics.
La situation des communes littorales est plus particulière. Plusieurs outils permettent, actuellement, de combler les « dents creuses » dans les hameaux. Tout d’abord, s’il s’agit d’une zone dense et structurée, comportant principalement des constructions à usage d’habitation, équipée par les différents réseaux, et correspondant donc à la qualification de village ou d’agglomération au sens de la loi littoral, le PLU peut la classer en zone urbaine. Cela permet, conformément à l’article L. 101-2 du code de l’urbanisme, d’implanter de nouvelles constructions par comblement de dents creuses, voire de construire de nouveaux bâtiments aux franges de l’agglomération. Il appartient aux auteurs du PLU de justifier ce choix au regard du projet de territoire.
S’il s’agit d’un hameau de faible importance, constitué de quelques constructions éparses, implantées sur de vastes parcelles entourées d’espaces naturels ou agricoles, le classement en zone A ou N est le plus approprié. Si l’implantation des constructions nouvelles et des annexes non accolées y est interdite, l’extension des constructions à usage d’habitation existantes et le changement de destination du bâti agricole restent possibles dans les conditions prévues par les dispositions ad hoc du règlement du PLU.
Enfin, pour les espaces intermédiaires que la commune entend conforter ou développer, le statut de « hameau nouveau intégré à l’environnement », ou HNIE, permet d’assouplir l’inconstructibilité des zones situées en discontinuité de l’urbanisation ; il se traduira, dans le plan local d’urbanisme, par un STECAL. L’objectif est de permettre de reconfigurer un secteur précis pour lui conférer les caractéristiques d’un espace structuré, en évitant de miter les espaces naturels et agricoles.
Pour conclure, au regard des nombreuses évolutions législatives intervenues très récemment en matière de constructibilité dans les zones A et N, il convient d’amplifier le travail de pédagogie des services déconcentrés de l’État afin d’accompagner les collectivités pour qu’elles se saisissent de toutes les possibilités qui leur sont offertes. Dans cette tâche, vous pouvez compter sur le ministère du logement.
Madame la secrétaire d’État, nous sommes totalement d’accord avec les objectifs que vous avez présentés, et avec l’interprétation que vous avez faite des textes législatifs. Mais vous devez savoir qu’en pratique, cela ne se passe pas comme cela ! Nous sommes d’accord, il est juridiquement possible de densifier les hameaux, mais le régime des STECAL limite le nombre de hameaux que l’on peut densifier. Or la particularité de la Bretagne, c’est qu’elle compte beaucoup de hameaux.
Récemment encore, des PLU ont été adoptés selon les règles fixées par la loi ALUR. Du temps de la loi littoral, on pouvait densifier une trentaine de hameaux, sans étendre les agglomérations ni consommer d’espaces naturels et agricoles – nous sommes bien d’accord avec vous sur ce point : il ne faut pas consommer d’espaces naturels et agricoles, mais densifier les hameaux. Dans le cadre de la loi ALUR, les STECAL doivent être exceptionnels : seuls deux STECAL ont donc été autorisés par les services de l’État.
À cause de cette interprétation de la loi, certains propriétaires se retrouvent plongés dans une phase de transition. Ils subissent une violence inouïe : le retrait du caractère constructible de leurs terrains, qui sont au mieux de grands jardins, mais certainement pas des terrains agricoles ou naturels.
C’est pourquoi je vais demander à Mme Cosse s’il ne serait pas possible de prévoir une phase intermédiaire pour les PLU, notamment littoraux, en Bretagne, pour que ces propriétaires, des gens de bonne foi, qui ne cherchent pas à faire de la spéculation, se retrouvent au moins, après le paiement des droits de succession, dans une situation qui leur permettent de s’en sortir financièrement.
Mais sinon, je suis complètement d’accord avec le ministère sur l’idée de densifier et d’étendre les bourgs.
La parole est à M. Alain Moyne-Bressand, pour exposer sa question, no 1430, relative au tribunal de Bourgoin-Jallieu.
J’attire l’attention de M. le garde des sceaux, dont vous serez certainement le porte-parole, madame la secrétaire d’État chargée de la biodiversité, pour défendre les intérêts d’un projet alternatif concernant le tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu.
En effet, je souligne les conditions d’extrême précarité dans lesquelles est exercée la mission de service public de la justice dans ce TGI : les locaux ne sont pas aux normes et trop exigus, ne permettant pas d’assurer la sécurité des personnels et un accueil digne des justiciables. La construction d’une cité judiciaire, annoncée à de nombreuses reprises depuis 1991, apparaît aujourd’hui irréaliste d’un point de vue budgétaire.
Il existe toutefois un projet alternatif moins coûteux et déjà bien avancé techniquement, et qui bénéficie du soutien de tous les acteurs locaux, qu’il s’agisse des magistrats, des services administratifs territorialement compétents, de la sous-préfecture et évidemment de la ville de Bourgoin-Jallieu. Celui-ci consisterait à réhabiliter la partie ancienne du palais de justice et à l’agrandir en substituant aux bâtiments préfabriqués qui font office de salle d’audience et de bureaux une construction en dur. Je vous demande dès lors, madame la secrétaire d’État, si la chancellerie entend réserver les financements nécessaires à la réalisation de ce nouveau projet et, si possible, de me préciser le calendrier des opérations.
Monsieur le député, je vous prie en effet d’excuser l’absence de M. le garde des sceaux, qui m’a chargé de vous répondre.
Vous appelez son attention sur la situation immobilière des juridictions de Bourgoin-Jallieu. Sensible aux conditions de travail des personnels et d’accueil des justiciables, je vous confirme que des études relatives à une opération d’extension et de restructuration du palais de justice sont en cours. L’opération consisterait, dans un premier temps, à construire une extension et, dans un second temps, à restructurer et à mettre aux normes le bâtiment actuel. Pour mener à bien cette opération, le ministère de la justice a besoin d’acquérir des parcelles détenues par la ville et mises à disposition, jusqu’à fin 2016, pour l’installation de modulaires – dont la suppression est également prévue dans le cadre de l’opération. Je précise que l’acquisition de ces parcelles pourrait se conclure par un échange foncier qui fait actuellement l’objet de discussion avec les services locaux. Le lancement du concours d’architecture est envisagé fin 2016, temps nécessaire à la finalisation du programme. En conséquence, les études de maîtrise d’oeuvre auraient lieu en 2017 pour une livraison de l’extension en 2019-2020, ce qui permettrait ensuite de lancer la réhabilitation du bâtiment existant.
À ce jour, le coût final estimé de l’opération est globalement évalué à un peu plus de 14 millions d’euros. De premiers crédits ont été inscrits à cet effet en loi de finances pour 2016, d’autres le seront dans les prochains projets de loi de finances. Dans le contexte budgétaire actuel du ministère de la justice, contexte que vous connaissez, monsieur le député, cette opération constitue donc un effort très important.
Je remercie le garde des sceaux pour cet engagement qui est nécessaire, souhaitant qu’il n’en reste pas seulement à l’état de promesses mais que celles-ci soient tenues, sachant que la ville de Bourgoin-Jallieu est prête à procéder rapidement à un échange de terrains, la procédure étant déjà en cours pour régler tous les problèmes administratifs et juridiques afin de pouvoir engager le projet le plus vite possible.
La parole est à Mme Marie-Françoise Bechtel, pour exposer sa question, no 1442, relative au plan d’accompagnement des mutations économiques du Soissonnais.
Monsieur le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, je souhaite vous interroger sur la continuité de l’approche gouvernementale quant à la fragilité du territoire que je représente.
Tout d’abord, le Gouvernement entend-il poursuivre l’action qu’il a décidé de mener en faveur des territoires en mutations économiques, dits « territoires fragiles », soit une dizaine de bassins d’emploi, notamment en faveur de celui du Soissonnais ? Ce dernier avait été fléché à ma demande en mars 2014, il a fait l’objet d’un plan d’accompagnement des mutations économiques qui commence à produire effets. Cela a bien sûr engendré des espoirs dans le Soissonnais, et c’est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre, de m’assurer que ce plan, acté par le Commissariat général à l’égalité des territoires et suivi par celui-ci, continuera à produire ses effets, notamment grâce aux efforts consentis dans le cadre du contrat de plan État-région.
Je souhaite aussi en savoir plus sur la manière dont vont se traduire les engagements pris par le Premier ministre en matière de participation financière de l’État au développement de la fibre optique dans le cadre de la mise en oeuvre du plan « Très haut débit » dans l’Aisne. Le Premier ministre m’a en effet assuré, par lettre du 14 avril dernier, que le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales ainsi que le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique regarderont avec la plus grande attention cette requête. Il n’est nul besoin d’insister sur l’opportunité très particulière que représente, notamment pour les territoires en difficulté, le très haut débit.
Enfin, j’appelle votre attention sur un élément d’actualité, à savoir les grandes difficultés qui vont résulter de la fermeture de la société NLMK située dans la commune de Beautor. La mobilisation de la région, de la députée que je suis et des acteurs locaux est totale, mais seul un soutien conjoint des deux ministères intéressés, le vôtre et celui de l’économie, pourrait permettre la recherche active d’un nouveau projet économique, essentiel pour l’avenir de ce territoire.
La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.
Madame la députée, le plan d’accompagnement des mutations économiques du Soissonnais est un document structurant et ambitieux pour le territoire, qui porte tant sur la structuration du tissu économique que sur les transports, le logement et l’attractivité, la formation ou encore le développement touristique, vous le savez mieux que quiconque. Son comité stratégique, lors de son installation le 2 juin 2014, sous présidence du préfet du département de l’Aisne et en votre présence, a décidé de la mise en place de groupes de travail thématiques. Dans ce cadre, l’État a conduit, courant 2015, plusieurs réunions de travail avec le territoire concerné pour l’accompagner et inscrire ce plan dans les différents dispositifs structurants alors en cours de rédaction, notamment le contrat de plan État-région – le CPER – Picardie et le programme opérationnel régional Picardie financé par le Fonds européen de développement régional, le FEDER, au travers du dispositif des investissements territoriaux intégrés. Bien qu’il ne mentionne pas spécifiquement les conditions d’intervention par territoire, le volet territorial du contrat de plan État-région a en effet été rédigé sur la base des besoins identifiés par les huit grandes agglomérations de l’ex-région Picardie, dont évidemment le Soissonnais.
L’acte II du plan d’accompagnement des mutations économiques a d’ores et déjà démarré : l’agglomération du Soissonnais devrait bénéficier de 8 450 000 euros au titre du FEDER pour décliner certaines des actions prévues dans ce plan. J’ajoute qu’elle a, en 2015, bénéficié d’une dotation de 100 000 euros du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire au titre du volet territorial du CPER pour son projet de réhabilitation de la friche industrielle issue de la fermeture de BSL à Soissons. La communauté d’agglomération peut poursuivre ses demandes de financement au titre du volet territorial en s’adressant à la sous-préfecture de Soissons, à la préfecture de l’Aisne ou à la préfecture de région – via le secrétaire général pour les affaires régionales – afin de financer les projets de maisons de santé, de réhabilitation de friches ou de rénovation urbaine.
Par ailleurs, l’aménagement de la RN2 au sud de Soissons, prévu dans le plan, est inscrit dans le volet mobilité du CPER.
Concernant le projet très haut débit de l’Aisne, porté par l’Union des secteurs d’énergie du département de l’Aisne, syndicat mixte ouvert, je précise qu’est prévue la construction de plus de 100 000 prises d’ici à 2020. L’accord préalable de principe au financement par le plan « France très haut débit » présenté par ce syndicat a été notifié le 5 novembre dernier, pour un montant de 38 410 000 euros. Aujourd’hui, le taux de soutien départemental de l’Aisne est de 50 % et le plafond de 487 euros ; comparé aux départements voisins, l’Aisne est celui disposant du taux de soutien le plus élevé. Sur l’ensemble du territoire, l’Aisne bénéficie d’un taux de subvention supérieur à celui de soixante-sept départements.
Enfin, madame la députée, je relaierai votre demande concernant la société NLMK auprès du ministre de l’économie afin qu’une solution adaptée puisse être trouvée dans la concertation entre l’État, les partenaires sociaux et les différents acteurs locaux, dont vous-même bien évidemment.
Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir décliné l’ensemble des actions menées en faveur du Soissonnais, notamment dans le cadre du contrat de plan État-région. C’est de nature, je puis vous l’assurer, à soutenir et à rassurer les acteurs concernés quant à leurs projets futurs.
Un mot sur le très haut débit : en 2011 avait été adopté un plan pour son financement, plan qui laissait le Soissonnais complètement de côté tout en favorisant beaucoup, il faut bien le reconnaître, les agglomérations de Laon et de Saint-Quentin. C’est pourquoi nous serons très attentifs à une remise niveau de façon que le Soissonnais, notamment l’agglomération de Soissons, atteigne un niveau de financement à la hauteur de celui des autres communautés.
La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour exposer sa question, no 1429, relative à la compétence économique des départements.
Monsieur le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, la loi du 7 août 2015 relative à la nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », comporte dans ses dispositions principales la suppression de la clause de compétence générale pour les départements et pour les régions. De ce fait, est ainsi remise en cause l’intervention des départements dans plusieurs domaines, notamment dans le champ économique. C’est dommage car en Haute-Savoie, nous sommes à ce jour le premier financeur public d’un pôle de compétitivité, Mont Blanc Industries, oeuvrant pour le dynamisme de l’industrie mécatronique. La politique économique de ce département a permis depuis de nombreuses années de structurer les différentes filières – mécatronique, outdoor, bois, images, biotechnologies –, de soutenir l’innovation dans les entreprises, quelle que soit leur taille, et de mieux surmonter les moments de crise au niveau local.
Face à cette rupture que constitue la loi NOTRe puisqu’il ne s’agit pas d’un transfert de compétences, les acteurs économiques locaux expriment des inquiétudes grandissantes ; ils s’interrogent sur la pérennité des aides accordées. Nous avons évidemment travaillé de concert avec la région Auvergne Auvergne-Rhône-Alpes pour essayer de maintenir une certaine forme de continuité. J’associe d’ailleurs à ma question mon collègue Martial Saddier, vice-président de la région, en charge des entreprises, de l’emploi et du développement économique. La loi NOTRe ne comporte pas de dispositions précises sur la possibilité pour les régions de reprendre à leur charge, dès 2017, les politiques conduites jusqu’alors par les départements. On sait pourtant que les nouvelles régions doivent réussir, dans un temps très court, la fusion des anciens périmètres régionaux mais aussi assumer de nouvelles missions, dont certaines non financées.
La délégation régionale de compétence économique au profit des départements semble proscrite. Ne serait-ce pas pourtant un moyen efficace d’optimiser les ressources et les moyens publics au service d’une politique économique efficace et qui a fait ses preuves ? Il conviendrait au moins de retarder la mise en oeuvre de la loi sur ce point afin de permettre aux départements de poursuivre leurs accompagnements économiques en 2017. Il apparaît en effet nécessaire d’étendre d’un an la phase au cours de laquelle ils peuvent maintenir les financements accordés aux organismes qu’ils ont créés antérieurement ou à ceux auxquels ils apportent déjà un financement au titre du développement économique du territoire.
Monsieur le ministre, nous sommes dans une situation de flou juridique dangereux pour notre tissu économique local alors que celui-ci nécessite des mesures de bon sens pour assurer la pérennité des aides économiques.
La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.
Madame la députée, la loi d’août 2015, dite « loi NOTRe » comme vous venez de le rappeler, a supprimé en effet la clause de compétence générale des régions et des départements, après de très vifs débats au Sénat comme ici même. La région est donc désormais seule compétente pour définir et pour octroyer des aides en faveur de la création ou de l’extension d’activités économiques. En outre, elle détient la responsabilité exclusive de la définition sur son territoire des orientations en matière de développement économique et doit élaborer à ce titre le schéma régional de développement économique, d’internationalisation et d’innovation – le SRDEII –, qui doit être adopté avant le 31 décembre prochain. Le soutien et la participation au pilotage des pôles de compétitivité situés sur son territoire sont dorénavant réservés aux régions par la loi NOTRe.
Au demeurant, le législateur a prévu une entrée en vigueur différée des dispositions relatives aux compétences des autres collectivités en matière d’interventions économiques. Ainsi, les dispositions des articles 2 et 3 relatifs au SRDEII et modifiant la répartition des compétences des collectivités territoriales en matière d’aides aux entreprises sont entrées en vigueur seulement le 1er janvier dernier.
Le législateur a prévu des dispositions transitoires particulières, afin de permettre aux départements de poursuivre leurs accompagnements économiques.
Ainsi, conformément aux dispositions du VI de l’article 133, tout engagement pris par un département ou par une région avant le 8 août 2015 peut se poursuivre jusqu’à son terme dans les conditions prévues lors de sa conclusion – comme dans le cas que vous soumettez, madame la députée.
En outre, les dispositions spécifiques aux départements ont été introduites au V de l’article 2 afin d’assurer dans de bonnes conditions le devenir des organismes créés pour concourir au développement économique. Ainsi, les départements sont donc autorisés, à titre dérogatoire, à « maintenir les financements accordés aux organismes qu’ils ont créés antérieurement ou auxquels ils participent, pour concourir au développement économique de leur territoire jusqu’au 31 décembre 2016. Durant cette période transitoire, les régions organisent en conférence territoriale d’action publique, un débat sur l’évolution de ces organismes ».
Vous l’avez compris, madame la députée, il s’agit d’une période transitoire, prévue par la loi, que le Gouvernement ne souhaite pas rendre permanente en ajoutant des délais supplémentaires, comme vous le souhaitiez.
La parole est à Mme Marie-Louise Fort, pour exposer sa question, no 1434, relative à la réforme de la dotation globale de fonctionnement.
Monsieur le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, la vie de la dotation globale de fonctionnement n’est pas un long fleuve tranquille. Après une réforme proposée dès 2016, puis reportée en 2017, après de nombreuses informations contradictoires de l’Élysée et de Bercy sur la hauteur de la participation des collectivités à l’effort de redressement des comptes publics en 2017, après la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles – MAPTAM – et la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République – NOTRe –, qui ont profondément désorganisé le paysage institutionnel local, alors que les collectivités territoriales prennent connaissance de plus en plus tardivement des montants des dotations d’État, les conséquences de ces désorganisations apparaissent dans toute leur ampleur.
Il devient impossible pour les territoires de prévoir assez tôt leurs recettes et de construire des budgets fiables et sincères. Ainsi, la création des métropoles et les divers changements de périmètres au niveau national emporteraient pour les communautés une baisse sans précédent de la valeur du point, déclenchant pour la quasi-totalité d’entre elles les mécanismes de garantie, cette baisse se cumulant aux baisses de dotations subies depuis trois ans.
Plus encore, les communautés ayant fait un effort d’anticipation et d’intégration en se transformant en agglomération se voient injustement et gravement pénalisées.
La communauté d’agglomération du Grand Sénonais, que je préside, ou les communautés de Quimperlé ou d’Étampes sont ainsi privées de dotations par habitant décentes. Ainsi, pour mon agglomération, la dotation s’élève à 20 euros par habitant avant ponction, contre une moyenne de 45 euros pour les autres établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – de même catégorie, ce qui est parfaitement inéquitable.
Aussi, monsieur le ministre, comment comptez-vous, au nom de l’équité entre les territoires, corriger les injustices criantes que je viens de citer, dès 2016, et cesser ce jeu de loterie pour permettre à l’État de tenir sa parole et de retrouver sa crédibilité ?
La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.
Madame la députée, la vie de la dotation globale de fonctionnement, je vous le confirme, n’est pas un long fleuve tranquille. En effet, dans le cadre de la loi de finances pour 2016, le Gouvernement avait souhaité engager une réforme de la DGF visant à répondre au constat de l’illisibilité des dotations de l’État aux collectivités, qui se sont sédimentées au cours du temps. Cette réforme, qui a dû être reportée d’un an, fait actuellement l’objet d’un travail et d’une concertation approfondis avec l’ensemble des associations d’élus, avec le comité des finances locales, ainsi qu’au sein d’un groupe de travail transpartisan, constitué d’abord à l’Assemblée nationale puis au Sénat, avant que ces deux groupes ne fusionnent.
Dans le cadre de la loi de finances pour 2016, il a par ailleurs été décidé que la création des métropoles d’Aix-Marseille-Provence et du Grand Paris n’emporterait pas de conséquence sur l’enveloppe de la DGF des autres intercommunalités. A cette fin, la DGF des intercommunalités a été abondée par l’État d’un montant de 113 millions d’euros. Comme l’année précédente, les communes et intercommunalités se sont vu appliquer une baisse de leur DGF au titre de leur contribution au redressement des finances publiques. Le débat est connu : cette contribution est l’un deux facteurs explicatifs du montant de la dotation d’intercommunalité de la communauté d’agglomération que vous présidez, madame la députée, celle du Grand Sénonais.
Premier facteur : la communauté de communes du Sénonais s’est transformée en communauté d’agglomération et a accueilli six nouvelles communes au 1er janvier 2016. Avec un coefficient d’intégration fiscale égal à 0,35, correspondant au coefficient moyen de la catégorie, et un potentiel fiscal par habitant égal à 327 euros en 2016, la dotation d’intercommunalité avant contribution au redressement des finances publiques de la communauté d’agglomération du Sénonais s’est ainsi élevée à 1 229 734 euros, contre 555 830 euros en 2015, un montant qui est donc en forte progression.
Second facteur : l’article L. 5211-28 du code général des collectivités territoriales dispose que le montant de la dotation d’intercommunalité des EPCI à fiscalité propre de métropole et des départements d’outre-mer est minoré au titre de la contribution au redressement des finances publiques de 621 millions d’euros à partir de 2016. L’extension de la communauté d’agglomération à six nouvelles communes conduisant à une augmentation de ses recettes réelles de fonctionnement, la contribution au redressement des finances publiques augmente. Ainsi, en 2016, elle s’élève à 948 098 euros contre 519 585 euros en 2015. En définitive, la dotation d’intercommunalité de la communauté d’agglomération du Sénonais s’élève à 281 636 euros en 2016 contre 36 245 euros en 2015. La dotation d’intercommunalité étant, malgré la baisse des dotations, sensiblement plus élevée en 2016 qu’en 2015, l’effort d’intégration a donc bien été valorisé.
Monsieur le ministre, je vous remercie pour ces indications. Nous essayerons d’explorer l’ensemble des possibilités pour réparer ce que nous considérons comme une injustice.
Cependant, je vous demande instamment, à l’instar de toutes les associations d’élus, de mettre un terme à la baisse des dotations qui fragilise notre économie, alors que les collectivités, à qui vous demandez 20 % des efforts de redressement, ne représentent que 9 % du déficit public.
La parole est à Mme Nicole Ameline, pour exposer sa question, no 1433, relative aux trains intercités en Normandie.
Monsieur le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur la base d’un premier accord signé en avril dernier avec l’État, Hervé Morin, président de la nouvelle région normande, a pris une initiative particulièrement audacieuse et courageuse visant à mettre un terme à des années de défaillance chronique, pénalisant des dizaines de milliers d’usagers du train et incompatible avec la vision moderne, que nous pouvons partager, d’un service de qualité en matière de transports collectifs, d’une nécessaire mobilité sur le plan professionnel et social, ainsi que du respect de l’environnement.
La région normande devient ainsi l’autorité organisatrice des transports en région, dont elle assurera l’organisation ainsi que la maintenance, donc, la responsabilité. Outre cet accord, la région, l’État et la SNCF ont confirmé qu’ils engageraient près de 800 millions d’euros dans la modernisation des deux principales lignes normandes.
Monsieur le secrétaire d’État, s’agissant des matériels roulants, une très forte attente et une grande exigence se manifestent pour que les investissements engagés répondent, de manière quantitative et qualitative, aux demandes unanimes des responsables politiques normands, ainsi que, naturellement et avant tout, aux usagers, qui font l’expérience chaque jour des défaillances de ces matériels.
En novembre 2011, j’avais soumis l’idée d’un projet d’intérêt national pour une ligne desservant une région qui va de Paris à la mer, qui incarne le nord-ouest de la France et qui aboutit au premier port français, celui du Havre. Un projet de cette importance mériterait un investissement majeur de l’État dans la vision structurante de l’aménagement du territoire.
Aussi, monsieur le secrétaire d’État, quelles initiatives comptez-vous prendre pour en renforcer le pilotage politique et la mise en oeuvre ?
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Madame la députée, les transports ferroviaires en Normandie font l’objet depuis plusieurs années d’une priorité conjointe de l’État et de la région. Des efforts importants ont été mis en oeuvre, tant en faveur de l’infrastructure, avec 700 millions d’euros d’investissements prévus dans les nouvelles générations de contrats de plan État-région, que des services de transport, notamment avec l’acquisition de trains neufs pour la ligne de trains d’équilibre du territoire – TET – entre Paris et Granville. Aujourd’hui, cependant, ces TET ne répondent plus de manière satisfaisante aux attentes des voyageurs en termes de desserte, comme de qualité de service, notamment sur la ligne Paris Normandie.
Face à cette situation, l’État a lancé le chantier de la renaissance de ces trains. Après le travail mené par la commission présidée par Philippe Duron, le Gouvernement a présenté une feuille de route le 7 juillet 2015 et engagé une nouvelle dynamique en faveur des TET.
Dans ce cadre, Hervé Morin, président du conseil régional de Normandie, dans un courrier du 11 février, a indiqué au Premier ministre sa volonté de participer activement à l’amélioration de ces trains. Le Gouvernement a accueilli favorablement cette proposition, convaincu qu’il sera possible d’offrir un nouvel avenir aux trains d’équilibre du territoire, avec une mobilisation pleine et entière des autorités organisatrices régionales.
Cette nouvelle étape de la mobilisation conjointe de l’État et de la région en faveur du ferroviaire constitue une belle opportunité de proposer des trains ponctuels, confortables, et qui offrent une qualité de service correspondant aux attentes des voyageurs. Ces engagements ont été formalisés par la signature d’un protocole d’accord entre l’État et la région le 25 avril 2016. La région Normandie deviendra autorité organisatrice des cinq lignes TET desservant son territoire à compter du 1erjanvier 2020 au plus tard. Quant à l’État, il s’est engagé à financer le renouvellement des matériels des lignes Paris-Caen-Cherbourg-Deauville et Paris-Rouen-Le Havre, à hauteur de 720 millions d’euros. Ce renouvellement sera conduit par la région, en lien avec SNCF Mobilités dans le cadre de ses nouvelles missions d’autorité organisatrice de ces lignes.
Enfin, madame la députée, comme vous le savez, le Gouvernement a déjà pris des engagements dans le cadre des contrats de plan en cours. Il est naturellement attentif à la volonté de la région, s’agissant notamment de ses nouvelles perspectives en matière d’infrastructures. Il y a un engagement fort, celui d’appuyer les initiatives des autorités locales, lorsqu’elles le veulent.
La parole est à M. Christophe Guilloteau, pour exposer sa question, no 1427, relative au tracé de l’autoroute A45.
Monsieur le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, le projet autoroutier de l’A45, voulu par les élus de la Loire, qui s’oppose à la requalification de l’A47, suscite de nombreuses interrogations dans le département du Rhône. Les élus de 175 de ses communes ainsi que du département, que j’ai l’honneur de présider, se sont exprimés contre son tracé. De plus, le sénateur-maire président de la métropole de Lyon vient d’émettre un avis négatif sur ce projet.
Monsieur le secrétaire d’État, vous venez de concéder cette structure autoroutière à une grande entreprise. Mais le financement de ce projet est-il assuré aujourd’hui alors que 1,2 milliard d’euros étaient initialement prévus ? Même si l’État et le concédant doivent prendre en charge une partie de ce montant, les collectivités seront sollicitées. Comment, avec la fin de la clause de compétence générale, le conseil départemental pourra-t-il financer une structure économique comme celle-ci ?
Par ailleurs, il est certain que les propriétaires privés hostiles au projet formuleront de nombreux recours. Le département du Rhône entend de plus préserver ses terres agricoles, ses zones de captage et ses zones naturelles d’intérêt écologique, faunistique et floristique – ZNIEFF –, pilotées par l’État.
Aussi, monsieur le secrétaire d’État, ne pensez-vous pas plus judicieux, comme cela a été demandé il y a très longtemps, de requalifier l’A47 ? Cette structure autoroutière, qui avait déjà commencé à être élargie près de Saint-Etienne, pourrait déjà être finie si la décision en avait été prise plus tôt.
Si les élus de la Loire ont le droit de souhaiter rejoindre plus vite Saint-Exupéry, ils doivent considérer que la ligne droite entre Saint-Etienne et Saint-Exupéry ne passe pas par le département du Rhône, et encore moins par la ville de Lyon.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le député, comme vous le savez, l’autoroute A45 a été déclarée d’utilité publique en juillet 2008 : les recours sur l’utilité publique que vous évoquez sont aujourd’hui purgés. Le temps n’est plus à ce débat, notamment en termes de recevabilité des recours.
J’ai reçu le 20 avril les cofinanceurs du projet. Comme vous l’avez rappelé, j’ai, avec leur accord, confirmé la nomination de Vinci comme concessionnaire de l’autoroute. Il revient désormais, d’une part, à l’État de lancer la procédure d’instruction du contrat, avec d’abord la saisine, qui sera effective dans les prochaines semaines, de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières – l’ARAFER –, puis avec la saisine du Conseil d’État.
D’autre part, il revient aux collectivités territoriales de délibérer sur un projet de convention de financement de la subvention d’équilibre du projet. Celle-ci, comme vous le savez, est d’environ 845 millions d’euros en valeur 2012, et sera financée pour moitié par l’État et pour moitié par les collectivités territoriales. Je précise qu’à la communauté d’agglomération et au département s’est ajoutée très récemment la nouvelle région, qui participera à hauteur de 100 millions d’euros – c’est ce qui m’a été confirmé.
En ce qui concerne les zones agricoles, la réalisation de l’autoroute est assortie, comme c’est le cas pour tous les contrats récents d’infrastructure nouvelle, d’exigences très fortes en matière d’insertion environnementale et paysagère, dans la continuité des engagements pris par l’État à l’issue de la déclaration d’utilité publique. À ce titre, une attention particulière est portée à la réduction des prélèvements agricoles. Le respect des exigences de protection de la ressource en eau est également au coeur du projet, en particulier s’agissant de la nappe du Garon, conformément aux conclusions de la tierce expertise menée sur demande de la commission d’enquête publique.
Concernant enfin le débouché de l’autoroute A45 dans l’agglomération lyonnaise, il est prévu au contrat de plan État-région de modifier le dispositif d’échange, afin de prendre en compte les évolutions de trafic engendrées par la mise en service de l’A45. Aussi, le contrat prévoit-il, à hauteur de 4,5 millions d’euros, un réaménagement des échangeurs situés aux terminaisons de l’autoroute A450, notamment la réalisation de la bretelle dite « d’Irigny ». Les premiers travaux préparatoires débuteront dès la fin 2016.
Si le débouché de l’autoroute va être modifié, cela veut dire que son tracé lui-même sera modifié : dès lors, de nouveaux recours pourront être engagés – même s’ils ne seront plus possibles s’agissant de la déclaration d’utilité publique. Je suis en tout cas intimement convaincu que le tracé fera l’objet de recours.
D’autre part, vous n’avez pas répondu à ma question relative au financement du projet par le conseil départemental de la Loire. J’imagine que la loi d’août 2015 s’applique dans la Loire et dans le Rhône comme partout en France ?
La parole est à Mme Joëlle Huillier, pour exposer sa question, no 1448, relative à l’enseignement des langues vivantes dans les collèges de Villefontaine.
En vue de l’élaboration de la nouvelle carte des langues vivantes dans l’académie de Grenoble à la rentrée scolaire 2016, les élèves de sixième et de cinquième du collège Sonia-Delaunay de Villefontaine – dont je suis conseillère municipale – ont été invités, en novembre dernier, à exprimer leur choix ; vingt-deux d’entre eux ont opté pour l’italien comme deuxième langue vivante.
Avant même de connaître les résultats de ce sondage, le rectorat a décidé de supprimer l’apprentissage de l’italien dans ce collège. En parallèle, l’apprentissage de l’allemand a été supprimé dans l’autre collège, René-Cassin, sauf pour les élèves qui, l’ayant déjà commencé, souhaiteraient le poursuivre jusqu’en troisième.
Une telle évolution contraindrait soit les parents d’élèves à solliciter une dérogation à la carte scolaire – hypothétique quant à son résultat –, soit leurs enfants à choisir une langue qui ne leur conviendrait pas. Pourtant, la proximité géographique de l’Italie, la construction en cours d’un village de marques à Villefontaine et le jumelage très actif, notamment dans les collèges, avec l’Italie sont propices aux échanges avec les ressortissants de ce pays ; dans ce contexte, l’apprentissage de l’italien serait un réel avantage pour les élèves villards.
En outre, il semblerait que les budgets supplémentaires alloués aux deux établissements au titre des difficultés sociales soient en partie affectés au financement des heures de langue, et non aux projets pédagogiques et culturels. Déjà privés d’allemand ou d’italien, les élèves n’auront donc pas non plus accès à ces activités.
Monsieur le secrétaire d’État, les enfants de Villefontaine, déjà traumatisés par une autre affaire, ne sont pas particulièrement privilégiés ; il y a, par exemple, 32 % d’élèves boursiers au collège Sonia-Delaunay. Il convient de leur donner toutes les chances de réussir. Serait-il possible de réexaminer la situation, afin de laisser la possibilité aux élèves des deux collèges d’apprendre ces langues qui leur seraient très utiles pour l’avenir ?
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Madame la députée, la maîtrise des langues vivantes non seulement tient une place fondamentale dans la construction de la citoyenneté, l’enrichissement de la personnalité et l’ouverture au monde, elle est aussi un atout dans l’insertion professionnelle des jeunes, en France comme à l’étranger.
S’agissant plus particulièrement de la nouvelle carte des langues vivantes dans l’académie de Grenoble, celle-ci a été définie au plan local par le rectorat à partir des orientations données par la ministre de l’éducation nationale, en respectant deux priorités : la diversification de l’offre linguistique et le respect des spécificités locales. C’est précisément dans ce cadre que, dans l’académie de Grenoble, le nombre des dispositifs bi-langues de continuité va plus que doubler ; ils passeront de cinquante et un à cent douze à la rentrée 2016, avec un effort particulièrement marqué en direction de l’allemand et de l’italien.
Les collèges proposeront par ailleurs, dans leur très grande majorité, une offre diversifiée d’au moins deux deuxièmes langues vivantes à partir de la classe de cinquième, tenant compte des accords éducatifs franco-allemands et franco-italiens. Le choix a d’ailleurs été fait de renforcer les dispositifs bi-langues anglaisitalien pour consolider les liens géographiques naturels avec l’Italie. On proposera ainsi une carte des langues cohérente sur le territoire, de manière à combattre le déterminisme social.
Concernant les deux établissements de Villefontaine que vous mentionnez, si l’allemand n’est pas retenu dans la nouvelle offre de langues vivantes du collège René-Cassin, des moyens spécifiques sont affectés pour permettre aux élèves déjà germanophones de mener à terme leur cursus au sein du collège. L’italien continuera à être offert dans cet établissement.
Le collège Sonia-Delaunay proposera quant à lui aux élèves l’allemand et l’espagnol comme seconde langue vivante, assurant ainsi la diversité linguistique dans le territoire.
Cette réponse ne me satisfait bien évidemment pas. Elle ne satisfera pas non plus les parents d’élèves – du moins, ceux du collège Sonia-Delaunay, que je fréquente très régulièrement. Je trouve vraiment dommage que, pour un coût évalué à 6 000 euros par an, l’on ne puisse pas dispenser l’italien dans ce collège.
La parole est à M. Daniel Gibbes, pour exposer sa question, no 1436, relative à la création d’un vice-rectorat à Saint-Martin.
Je regrette l’absence de la ministre de référence, mais je compte sur vous, monsieur le secrétaire d’État, pour apporter une réponse précise à ma question.
Dans le cadre de la réforme territoriale, la nouvelle géographie de l’Éducation nationale a pris effet au 1er janvier 2016. Outre-mer, où plus d’un demi-million d’élèves sont scolarisés, cette organisation se décline en quatre académies, quatre vice-rectorats et deux services de l’éducation. Ex-commune de Guadeloupe, la collectivité d’outre-mer de Saint-Martin – 10 000 élèves – demeure la lanterne rouge des politiques éducatives orchestrées par le rectorat de Guadeloupe, dont elle continue à dépendre, quand les collectivités d’outre-mer de Saint-Pierre-et-Miquelon – 1 500 élèves – et de Wallis-et-Futuna – 4 000 élèves – bénéficient quant à elles respectivement d’un service de l’éducation rattaché à Caen et d’un vice-rectorat digne de ce nom.
Violence, illettrisme, retard scolaire, classes surchargées, enseignants en sous-effectifs, résultats en baisse aux examens : la situation scolaire empire, rentrée après rentrée, à Saint-Martin, alors que si l’on s’en donnait les moyens, l’île, avec ses 93 % d’élèves anglophones, aurait tous les atouts pour devenir un territoire français d’exception.
D’ailleurs, malgré cet isolement, les acteurs de l’éducation à Saint-Martin sont parvenus à mettre sur pied des enseignements spécifiques dans le domaine du tourisme et de la valorisation du territoire et se montrent innovants dans la prise en charge particulière des élèves en grande difficulté ou en situation de handicap.
Malgré les bonnes volontés, que ce soit en matière de ressources humaines, de projet académique, de formation ou de remplacement des professeurs absents, le faible service de l’éducation de Saint-Martin montre quotidiennement ses limites, avec de lourdes conséquences pour les 10 000 élèves de Saint-Martin, dont 80 % sont scolarisés en éducation prioritaire.
C’est bien dans l’intérêt des élèves, donc des jeunes, c’est-à-dire de l’emploi et du devenir du territoire, qu’il paraît nécessaire et urgent de créer enfin un véritable vice-rectorat à Saint-Martin. Ce vice-rectorat permettrait notamment la mise en place d’une véritable stratégie d’application de la politique éducative nationale et une réelle gestion des personnels et des établissements.
La situation actuelle ne peut plus durer. Les conséquences d’une administration, d’un centre décisionnel, d’une gestion, d’une politique éducative obsolètes, inadaptés et éloignés sont nombreuses, et ce sont nos élèves qui en payent les frais : plus de 55 % des jeunes de 17 ans sont en grande difficulté de lecture et plus de 30 % de nos jeunes sont au chômage.
Il est grand temps que la France considère tous ses territoires, sans exception. Le Gouvernement peut-il créer au plus vite ce vice-rectorat, dans l’intérêt de l’ensemble des acteurs de l’éducation de l’île ?
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le député, votre question porte sur l’opportunité de la création d’un vice-rectorat sur le territoire de Saint-Martin. Ce gouvernement est attaché au rétablissement de la justice sociale au sein de l’école, notamment dans les territoires couverts par l’éducation prioritaire, et la ministre de l’éducation nationale est consciente des difficultés existant à Saint-Martin.
Pour mémoire, pour ce qui concerne les collectivités de Saint-Martin et Saint-Barthélemy, les attributions qui relèvent en métropole de la compétence des recteurs et directeurs académiques des services de l’éducation nationale sont actuellement exercées par le recteur de l’académie de la Guadeloupe. Ce dernier est assisté dans sa tâche par un adjoint, chef du service de l’éducation de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, auquel il peut déléguer sa signature ; toutefois, il n’existe pas de service, en tant qu’une entité propre.
Le fait que le chef du service ne puisse pas s’appuyer sur une structure a pu, en effet, entraîner des dysfonctionnements. Les services de l’éducation nationale ont donc été mobilisés sur cette question ; à la suite d’une analyse approfondie, il apparaît plus adapté d’installer à Saint-Martin une direction académique clairement identifiée et référencée, ayant à sa tête un directeur académique des services de l’éducation nationale. Cette solution permettra d’institutionnaliser la présence du rectorat de l’académie de Guadeloupe à Saint-Martin et Saint-Barthélemy et de créer l’interface locale nécessaire entre les personnels et les services du rectorat. Une direction académique reconnue en tant que telle clarifiera en outre les rapports entre les partenaires, et en premier lieu entre la préfecture déléguée et les collectivités.
Vous le voyez, monsieur le député : nous travaillons à refonder une école de la République plus juste, qui prenne en compte de manière concrète les problématiques de chaque territoire. Soyez assuré que, dans ce cadre, les discussions concernant la création d’une direction académique à Saint-Martin vont se poursuivre.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie pour votre réponse : c’est déjà un bon début. Je voudrais rappeler que Saint-Martin est depuis 2007 une collectivité d’outre-mer régie par l’article 74 de la Constitution, avec les transferts de compétence qui en découlent. Les compétences sont là, mais les moyens pas toujours. Pour l’heure, votre réponse me satisfait, et j’espère que Saint-Martin et Saint-Barthélemy bénéficieront bientôt d’une direction à part entière.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Discussion du projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s.
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures trente.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly